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À l’ouest de la Russie, non loin de la Lettonie, la réserve naturelle strictement protégée de Polistovsky égrène lacs, marais et forêts sur 635 km2. En proie à la désertification, ces vastes forêts sont aujourd’hui devenues un refuge pour de nombreuses espèces. La prise de conscience russe demeure pourtant marginale face à ce véritable trésor biologique à préserver.Par Marine Dumeurger Photos Andrian Kolotilin
Polistovsky, une réserve sanctuaire
IndonésieFORÊT D’AILLEURS
LA RIVIÈRE DRAINE L’EXCÉDENT D’EAU DES MARAIS DE STRADNISTA JUSQU’AU LAC POLISTO. Cette vaste zone humide impénétrable offre aux oiseaux comme le cygne chanteur un refuge exempt de toute présence humaine.
RUSSIE
Arbres et forêts 91 mars 2012Arbres et forêts 90 mars 2012
D ans la réserve de Polistovsky, la nature revêt des airs de sanctuaire. Nous sommes ici dans le plus grand pays du monde, aux confins européens de
la Russie, non loin de la Lettonie, à 650 kilo-mètres de Moscou, 450 kilomètres de Saint-Petersbourg et cette zone frontière de la Russie donne le sentiment d’être parvenu au bout du monde. Au pays de la taïga, la nature ressemble à son territoire : profonde, sauvage et abandonnée, pour le meilleur comme pour le pire. Ainsi, à Polistovsky, les forêts ont poussé, loin des villes et des hommes. Un cadre exceptionnel mais fra-gile que le personnel de la réserve s’attache à préserver. Car si la Russie est réputée pour ses vastes forêts – elles couvrent près de la moitié de sa superficie et représentent 22 % des ressources mondiales –, les efforts pour la conserver sont quasi inexistants. Nicolaï Shmatkov, res-ponsable de la section Forêt chez WWF Russie, résume la situation, un peu moqueur : « En Russie, on croit encore à un conte de fées. On pense que la forêt est infinie. Dans ce contexte, les autorités se demandent tout simplement pourquoi dépenser de l’argent pour la protéger. » Dans la partie européenne du pays, on estime que la majorité de la forêt primaire a été abattue, souvent remplacée par des essences de moindre qualité, des pins et des sapins. Dans la région de Pskov, où se situe Polistovsky, elle a presque dis-paru. Avec ses 4 000 hectares de forêts, la réserve en conserve jalousement quelques souvenirs. Autour du sentier aménagé pour les visites s’épa-nouit un de ces îlots primitifs et sa ribambelle de feuillus, érables, chênes, cendres et ormes. « Nous possédons là les dernières forêts primaires d’Europe », fait valoir Mikhail Yablokov, le direc-teur de la réserve, avant de quitter le bosquet pour rejoindre le marais.
Interdire pour conserverÀ l’instar de cet espace à Polistovsky, certaines
zones font office de conservatoire. Et pour cause : la majeure partie de la réserve, soit une superficie de 380 km2, est classée zapovedniki. Sur l’échelle russe, c’est le degré de protection naturelle le plus élevé. Au total, de la frontière lettone au Kamtchatka, en passant par le lac Baïkal, la région arctique ou le Caucase, le pays compte une centaine de zapo-
FORÊT TYPIQUE DES BORDS DE MARAIS à l’automne ;
pendant les mois chauds d’été, les eaux s’assèchent
et cèdent le passage
aux visiteurs.
RussieFORÊT D’AILLEURS
Arbres et forêts 93 mars 2012Arbres et forêts 92 mars 2012
emprunter un réseau de pistes, praticable, selon les saisons, avec des véhicules tout-terrain. Pour les visiteurs, pas de restaurant ni d’hôtel, seul un gîte dans un petit village de maisons tradition-nelles en bois, qui doit être rénové. Aux alen-tours, les bâtiments abandonnés se comptent par villages entiers, aux façades fanées et aux fenêtres brisées.
Si le cœur de la réserve est inhabité, quelques hameaux, en voie de désertification, subsistent dans la zone tampon. Une station d’observation s’est installée dans l’un d’entre eux. En été, on ne peut y venir qu’en barque, la route étant devenue infranchissable au fil des années. En hiver, quand le thermomètre frise les - 20 ° C – des tempéra-tures « adoucies » par la proximité du marais –, on ne circule qu’en moto-neige. Nées dans ce village, seules quatre personnes âgées y vivent encore, en autarcie. Pendant l’hiver, le personnel de la réserve leur apporte quelques provisions et les dernières nouvelles...
Une opportunité pour les biotopesCette inaccessibilité confère à Polistovsky son
caractère unique et préservé. Forêts profondes et marais à perte de vue, la nature a repris ses droits. En lieu et place des anciens kolkhozes, des forêts secondaires ont poussé, colonisées par des pins, des bouleaux argentés et des bouleaux blancs aux feuilles plus rondes. En Russie, les espèces, peu nombreuses, s’adaptent davantage : pins et bou-leaux s’étendent de la toundra jusqu’aux régions arides. Ce type de forêts secondaires représente la majeure partie des forêts de la réserve. Mais ici, rien n’a été planté et les feuillus d’ori-
vedniki, soit 1,4 % de sa surface. Imaginés sous l’Union soviétique, ces territoires étaient tout simplement interdits d’accès, afin que les écosystèmes puissent s’épanouir loin de toute présence humaine. Autour d’eux, une zone tampon pouvait être habitée, mais les activités y étaient régulées : interdiction de chasser, de cueillir, d’exploiter le bois. Malgré une période difficile, avec la chute de l’URSS, le statut de zapovedniki est resté. Composée d’une tren-taine d’employés, l’équipe de la réserve est chargée, entre autres, de le faire appliquer. Elle veille notamment au respect des limites du ter-ritoire par les locaux, attirés par les baies ou les champignons. Des incidents mineurs au vu de la situation passée… Car comme le reste de la Russie, pendant les longues années qui ont suivi la perestroïka, la région a souffert de l’exploi-tation de ses forêts, livrées à l’anarchie et aux coupes sauvages.
Un territoire désertéMais ici, le véritable fléau qui touche une
grande partie des campagnes russes est celui de la désertification. Dans la région de Pskov, elle est particulièrement visible. Contrairement aux espaces vierges de Sibérie ou d’Extrême-Orient, Pskov était autrefois habitée, notamment au XIXe siècle. Avec les collectivisations et les poli-tiques d’exode forcé vers les villes, la population a diminué tout au long du XXe siècle. Le coup de grâce a été porté avec l’abandon des kolkhozes et le déclin de l’agriculture. L’histoire se lit dans les paysages. À Polistovsky, l’accès à la réserve est plutôt sportif. Il faut quitter l’asphalte et
VLADIMIR EGOROV DIRIGE LES SERVICES DE SÉCURITÉ DE LA RÉSERVE DE POLISTOVSKY qu’il parcourt pour retrouver les pêcheurs et chasseurs qui bravent les interdits (en haut à gauche). Né sur place, il doit son activité à l’existence de ces espaces protégés. Après avoir frôlé l’extinction, les castors européens ont reconquis en cinquante ans les territoires abandonnés par les hommes : à gauche, une hutte de castor se dresse sur l’emplacement même de Svinaevo, ancienne exploitation agricole. Dans la région de Pskov, en bas, le pin des marais (Pinus sylvestris wilikommii) grandit peu dans la mousse épaisse où ses racines sont submergées. À 70 ans, il atteint parfois deux mètres.
RussieFORÊT D’AILLEURS
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LA RÉSERVE DE POLISTOVSKY a été créée en même temps que celle de Rdeisky, deux noms
pour préserver la moitié du territoire du plus grand marais de Russie du nord-ouest, celui de Polistovo-
Lovatskoye, qui étend ses 250 000 hectares sur deux régions contiguës, entre Novgorod et Pskov.
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Arbres et forêts 95 mars 2012Arbres et forêts 94 mars 2012
L’ÉLAN, LE PLUS GRAND DES CERVIDÉS, a bien failli disparaître à cause de la chasse. Lors des étés chauds, la femelle élan promène ses petits d’île en île au gré des passages découverts par les marais asséchés.
RussieFORÊT D’AILLEURS
Arbres et forêts 97 mars 2012Arbres et forêts 96 mars 2012
LE VISON AMÉRICAIN A REMPLACÉ PARTOUT LE VISON EUROPÉEN, en haut à gauche. En revanche, le tétra lyre n’a pas cédé sa place et trouve depuis toujours ici le calme nécessaire à son quotidien (ci-contre). Il passe aisément l’hiver au bord de la forêt secondaire à feuilles caduques. Il y trouve sa nourriture et s’abrite la nuit sous une profonde couche de neige. Les aulnes noirs, en haut, issus de l’antique forêt primaire, rappellent la mangrove. Ci-dessous, les prairies qui nourissaient jadis les troupeaux domestiques ont été rendues aux marais, des linaigrettes se sont installées en bordure de forêt. Il faudra cinquante ans sans patûre pour qu’une jeune forêt secondaire les remplace.
son abandonnée, en bordure de la réserve. Il y a peu, une grand-mère vivait là. Quelques poules lui ont survécu, devenues proies faciles pour le goulu vison américain. Autre habitué, un ours attiré par une ruche visite régulièrement la bâtisse. Originaire d’un des villages voisins, un des deux gardes plaisante, moitié rieur, moitié sérieux : « Vous voyez, bientôt il n’y aura plus âme qui vive dans notre région. Seulement la nature, des animaux et, qui sait, peut-être des touristes. »
La nature en partageCar à Polistovsky, on aimerait développer
le tourisme vert et mettre en valeur ces îlots préservés. L’idée : les ouvrir aux visites, mais de façon limitée. Ornithologue de formation, le directeur, Mikhail Yablokov, revient d’un voyage aux États-Unis au cours duquel il a pu se rendre dans plusieurs parcs nationaux du nord-est du pays. « Nous avons en commun l’immensité de notre territoire. Nous voulions voir comment sont
équipés leurs parcs et com-ment se déroule l’accueil des visiteurs. (...) J’ai été particu-lièrement étonné par la façon dont on peut observer les ani-maux, qui sont habitués à la
présence humaine, et par la qualité des infras-tructures. » Passionné par son métier, le jeune trentenaire veut sensibiliser la population à la fragilité de son environnement. Car si les Russes apprécient la nature, un gros travail d’éducation reste à faire.
Pour relever le défi, trois sentiers ont déjà été imaginés au sein de la réserve, un pour chaque écosystème : le marais, la forêt et les lacs, avec des panneaux explicatifs et des zones d’observa-tion pour chacun d’eux. À la saison prochaine, un centre doit ouvrir ses portes pour accueillir les touristes intrépides. Cette année, deux cents visiteurs sont venus jusqu’ici. Moscovites pour la plupart, ils ont les moyens de se payer de telles excursions. Comme souvent en Russie, le manque d’infrastructures rend l’accès à la nature coûteux et élitiste.
Autres réguliers, les enfants des alentours qui viennent passer quelques jours de stage dans la forêt en été. « Nous aimerions davantage impliquer les locaux dans notre projet, appuie le direc-
gine, érables, chênes, tilleuls qui composent les quelques zones de forêt primaire épargnées par les coupes reviendront spontanément. Autre curiosité de la réserve, ses aulnes glutineux, faci-lement identifiables avec leurs troncs noirs et leurs feuilles en cœur. « La mangrove russe », sou-rit Mikhail Yablokov. Surtout visibles au prin-temps quand une eau sombre noie leurs racines surélevées, ils forment la limite entre les forêts et le marais. Ce sont les seuls à s’adapter à ces terrains asphyxiés, inondés en permanence.
Pour stimuler cette fascinante biodiversité, le personnel de la réserve ne touche à rien. Il laisse les arbres tombés au sol, dégageant juste le sentier. En se décomposant, le bois héberge champignons, mousses, lichens et insectes qui alimentent les nombreux oiseaux de la région, scrupuleusement recensés chaque année. Le grand tétras est un familier. Tout comme l’im-posante chouette lapone qui a pour habitude de fréquenter les forêts près des marais. On y croise
également des aigles dorés et des cigognes noires. Comptant de nombreuses espèces protégées, la réserve constitue un site de passage important pour les migrateurs, comme le plongeon arc-tique ou le balbuzard pêcheur.
Avec l’automne, beaucoup sont partis, aban-donnant derrière eux, perchés dans les branches, une multitude de nids vides. Sur un tronc, nous remarquons plusieurs trous laissés par des pics à dos blanc. Avec la gélinotte, c’est l’un des témé-raires qui affrontent les - 20 ° C de l’hiver.
Mais ce ne sont pas les seuls. Lynx, loups ou élans sont aussi communs que les ours bruns, même s’ils restent très discrets. Comme le chemin est en cours d’aménagement, mieux vaut donc être accompagné pour l’emprunter, au risque de suivre la trace d’un plantigrade contre son gré... Sur un arbre, Nadejda, notre accompagnatrice, remarque justement des traces de griffes. « Ici, nous ne voyons jamais les animaux, seulement des indices de leurs passages », confie Mikhail. À l’avant, les deux gardes discutent d’une mai-
Souvent le manque d’infrastructures rend l’accès à la nature coûteux et élitiste.
RussieFORÊT D’AILLEURS
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