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BASILE VALENTIN LAZOTH OU LE MOYEN DE FAIRE DE LOR 1
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BASILE VALENTIN LAZOTH OU LE MOYEN DE FAIRE DE LOR 2
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AZOTH OU LE MOYEN DE FAIRE LOR CACHE DES PHLOSOPHES
DE FRERE BASILE VALENTIN
PREMIERE PARTIE.
ADOLPHE, VIEILLARD.
Vnrable Vieillard, bien vous soit, vous apercevant il y a longtemps, de loin,
seul proche de cet arbre, pensant je ne sais quoi en vous-mme, je ne puis plus
tarder que je ne mapproche de vous, pour minformer du sujet de cette
mditation.
LE VIEILLARD.
Pour vrai ( ! jeune Adolescent) maintenant il mest permis de connatre les
choses qui me semblaient en mon jeune ge incroyables et hors de raison, car
lorsque jtudiais, bouffi dorgueil, je me prsumais savoir toutes choses, et
maintenant la fin de mon ge, je prends plaisir de rechercher avec grand soin,
ce grand livre plein de difficult de la nature, encore que je vois toutefois toute
occasion et longueur du temps, passer comme une eau coulante, et de quoi
grandement je me plains.
ADOLPHE.
Cest la vrit ce que jadmire en toi ( ! Vieillard) quand je considre les
affections si contraire entre nous : car il te semble que le temps senvole devant
la saison, et les jours me semblent aller trop lentement, pour cette cause il y a
longtemps que je dsire monter cheval et trouver compagnie plaisante qui me
puisse ter la fcherie que mapporte le temps coulant si lentement.
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LE VIEILLARD.
Certainement, ami, je vous vois en la fleur de votre ge, dune face librale,
partant je serai trs aise de savoir votre nom, et votre race, estimant que naurez
dsagrable, si tout soupon de fraude t, je demande votre nom, et la
condition de votre vie.
ADOLPHE.
Mon nom est Adolphe, et ma Patrie Hassie, laquelle ma enseign les lettres ds
mon bas ge, et avanc en ge, jai laiss les tudes, et ai pris la marchandise, et
nayant ni Tuteur, ni Gouverneur, mme administrant mes bien paternels, jai
eu envie daller voyager, et voir les terres les plus loignes, et certainement
avant toute chose, il me plairait daller Rome, matresse de lUnivers, avec
compagnie, toutefois je dsire entendre votre conseil, comme homme bien vers
lusage des choses et exprience.
LE VIEILLARD.
Mon conseil ne vous manquera pas, pourvu que vous ne refusiez dobir au
bons avis que je vous donnerai, parce que jai moyen de vous en aider plus
facilement, ayant la connaissance de ces lieux.
ADOLPHE.
Jestime quil me sera loisible de vous obir vous principalement qui tes
vieux, et avez lexprience des choses : de grce montrez celui qui erre, et fuit
les chemins obscur, vous jugerez avoir trouv un auditeur docile et attentif.
LE VIEILLARD.
Vous dites mon fils, que vous avez dsir de voir Rome, mais tenez-vous pour
persuad que jai vu vritablement cette tte de lUnivers, mais tant
maintenant fait plus sage par lge, je suis plus avis et attentif aux prils et
dangers. Or suivant mon avis, ne veuillez converser longtemps en ces lieux, car
ce lieu-l est la vrit, ce que je vous dirai plus amplement ci-aprs. Mais il me
dplat grandement que je vous vois accuser la longueur du temps en si parfaite
sant, bien que nous nayez endur la violence daucune maladie, tant en cette
fleur dge. Je souhaite donc que vous estimiez ces choses devoir tre prises
avec plus de considration, car vous voyez que jai plutt acquis ces choses en
moins de temps, que je nai pass cette longueur de ma vie : il nest licite de
passer le temps en oisivet, mais plutt soigneusement, et avec diligence,
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sadonner la connaissance de Dieu et de ses uvres, et y employer les forces
de nos sens, car nous sommes cr lImage de Dieu, cette fin et non pas la
semblance des btes, qui ont t produites pour notre usage. Nos yeux donc
soient ouverts, et nos oreilles attentives pour louer Dieu, fuir loisivet, et
employer le temps aux tudes.
ADOLPHE.
Vritablement, mon Vieillard, il me semble avoir dj compris les choses qui me
sont ncessaires, car jai acquis la connaissance de la langue latine, et la notice,
recueillie de la doctrine Aristotlique. Japerois bien quil nest de besoin de se
travailler tant en ces tudes principalement quand je reconnais que toutes
choses sont imparfaites et vaines, et quil ny a aucun Matre ou docteur de lart,
qui conduise les actions en telle sorte, sans fraude et tromperie, quil puisse
acqurir dextrement la fin dsire. Ltude de lastronomie, qui devrait tre
devant tous autres Arts trs certain, et indubitable, est du tout incertain,
trompeur et inconstant, on fait pareil jugement de la Mdecine. Qui est celui qui
considre les mauvaises coutumes et erreurs qui se glissent dans les esprit
sacrs des Thologiens, vu que lon ne doit douter de la Sainte Ecriture, de sa
fermet et constance, et nanmoins elle est presque prise en divers sens de tous,
et ny a fin aucune des controverses, par icelle les uns piant la vie dautrui, les
autres tuent lme, les autres pourchassent les biens, et ny a fin aucune de
larcins, de rapines, de dbats, et querelles, et chacun a coutume de louer, et dire
ces uvres tre, ou de grande doctrine, ou de prudence, ou de force. Mais
encore que jeune, je ne puis consentir ces choses, bien que je ntudie plus
principalement cause que je vois que le vrai but est de chacun presque
dlaiss, & que ces jours passs il me fut reproch par un certain Villageois, que
les plus doctes sont les plus mchants, & les plus pernicieux : & aucuns
craignent (non sans raison) que les doctes porteront la peine de cette chose par
leur propre mfait : Et ny a raison aucune pour laquelle nous nous retirons de
la vraie & cleste doctrine, vu quelle nous a t divinement dlaisse par le
Verbe Incarn, comme je lai ci-devant entendu de vous. Mais pour mieux dire,
la sagesse humaine & le cercle inconstant des doctrines est imparfait, & crois
que vous serez de mon opinion en ce.
LE VIEILLARD.
Il est bien vraisemblable, & je mattribue la connaissance de la langue latine,
mais la notice des langues trangres na point de lieu propre, ni pculier, & ne
semblent ncessaires aucunement : comme est la langue Hbraque, & Grecque,
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par lesquelles la connaissance de tous les Arts nous a t anciennement
enseigne, & nous voyons aussi que ces langues trangres sont principalement
ncessaires aux maisons des Princes, cause des affaires diverses, & est un
excellent don de Dieu, lequel parat lexemple de ceux qui difiaient la Tour
de Babel, entre lesquels y eut confusion merveilleuse des langues, celle fin
qupars par toutes les contres, & parties du monde, ils ne se pussent accorder.
Toutefois ces choses taient tellement gouvernes de Dieu, trs bon, & trs
grand : quils se servirent, & par la force du Saint Esprit (les dvots de tous les
Gentils amasss) cette Tour, btiment fol, a t convertie par le ministre des
Aptres, en Temple de Dieu, saint & sacr, dans lequel sont entendues les
louanges de Dieu, car la confusion ne plat Dieu, comme au contraire le Diable
est Auteur de discorde, & querelles, & Dieu en Trinit nous demande la paix, &
la concorde, mme de toutes choses, Cette est la paix, apparaissant par-dessus
tous, en laquelle le monde a t fait, & reluisent les Gouvernements des
Royaumes en laquelle Jsus Christ notre Sauveur, & ses Disciples, nous ont
laiss un exemple quil faut imiter avec soin. Et cette, ces choses suffiront de la
connaissance des langues diverses, mais quant au salut des mes, il nest pas
ncessaire demployer son ge pour acqurir la connaissance des langues, mais
il est expdient que nous entendions les sermons sacrs des Prdicateurs, & que
nous lisions les Ecritures Saintes avec diligence, comme ils sont, es principales
trois langues, la langue naturelle est propose tous, de mme la Philosophie
naturelle, & le soin dacqurir des biens de fortune. Mais les sages mondains, &
les russ de ce sicle prennent chemin divers, non content du gouvernement
ordonn de Dieu, cherchent les trangres & contraires : De l le prcieux trsor
du temps est dissip, & les Ames en grand danger de succomber la fin du
sicle, que Dieu visitera la dernire Ville de Jrusalem, cest--dire, le monde
universel, & le jugera. Aussi semblablement paratront les trois ennemis
capitaux, & principaux, les spirituels comme ils taient devant la venue de Jsus
Christ, & sa Passion, mais son dernier avnement leur conseils seront vains &
ridicules devant le Tribunal de Jsus Christ. Si donc il arrive que ceux-l
viennent par ci-aprs, nous connatrons la fin du monde approcher : car en
mme temps les diverses sectes des Pharisiens, Sadducens, & Essniens se
lveront ; savoir si les Pharisiens Oprateurs ntaient pas arrts la terre,
occups aux uvres externes, nayant connaissance de lEsprit, ni de la venue
du Messie. Les Sadducens ne niaient-ils pas la rsurrection des morts ? Les
Essniens remplis de lEsprit Anabaptiste ne combattaient-ils pas contre la
Sainte Trinit ? le premier blasphme contre la puissance de Dieu, le second
contre la misricorde, & le troisime plein dinjure contre le juste & vrai Esprit
de Dieu. On connat de l que les hommes sont toujours contraires la loi de
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Dieu, & bien quils fussent plusieurs en nombre & diversit de sectes, toutefois
taient nommes les principales, lesquelles tchaient de nuire en la doctrine de
la Sainte Trinit : car les uns dOrient, les autres dOccident, changeant
seulement leurs noms, multipliaient de jour en jour en malice, & les juifs taient
en petit nombre, & y avait peu de juifs qui fussent adonns au vrai culte,
lesquels menant une vie secrte, avec grand soin, ils fuyaient les embches de
ce monde. Il faut donc prouver tout esprit, mais quun chacun de nous
sprouve soi-mme par le Verbe divin, comme par la pierre de touche ; que si
ainsi est, cet Esprit en pluchant dun chacun la conscience, demeurera toute
preuve ; Ces choses soient dtes de la connaissance des langues, & tenez pour
certain que la conservation naturelle, journalire, & ternelle de lhomme & sa
connaissance ne consiste seulement la recherche du corps animal, (car il
nappartient quaux hommes derrer) mais plutt en lacquisition de la
perfection de lune & lautre partie, cest--dire, tant du corps que de lesprit, au
Verbe Divin, laquelle conservation linvestigation de nature doit suivre, car
nous prenons de Dieu notre origine, nous retournons lui mme, & en icelui
nous nous arrtons, car le Verbe est la seule rgle & le sceptre, & la nature la
rgle de toutes cratures, prparant la voie pour lhabitation de lme & du
corps, par lesquelles choses on connat certainement le sage, aimant Dieu.
Aristote na pas en vraie connaissance de toutes ces choses, encore quil fut de
grande doctrine, & excellent par-dessus tous, en subtilit de raison humaine, car
il est permis de le voir aveugle aux choses de ce monde. Il en faut autant dire de
ses sectateurs, encore que leur nom soie en grande estime & autorit envers
plusieurs. Or devant toutes choses il faut exactement considrer le temps, &
suivre ltude de vrit & justice de toute notre force, & implorer laide du Saint
Esprit, qui nous largit la connaissance des choses spirituelles, & virilement
prendre garde que par les vices nous ne tombions dans le labyrinthe de ce
monde mais suivant le bien & quit, & ne permettant couler un jour ni heure
sans travailler, toutes nos actions conduisions la gloire du nom de Dieu, & au
profit du prochain.
ADOLPHE.
Vous avez si amplement parl de toutes ces choses, mon Vieillard, qu peine
en ai-je retenu quelque partie, dont je vous puisse rpondre, je vois bien quil
faut suivre le bien en toute diligence & soin, & nestime pas quil soit bon se
hter de rpondre tous les points ensemble, mais lentement, & aprs y avoir
bien song.
LE VIEILLARD.
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Il faut apprendre, mon ami, les choses que vous confessez ignorer encore, car je
confesse que par le moyen des sages & anciens, je sais le chemin facile & dsir,
lequel ne dsesprs pouvoir atteindre, pourvu que vous y apportiez la volont
& diligence requise.
ADOLPHE.
Certes jai grand dsir dentendre de vous toutes ces choses, & emploierai toute
mon tude & labeur pour satisfaire mon dsir, principalement quand je
connais que toutes ces choses son utiles & honntes.
LE VIEILLARD.
Devant toutes choses est considrer avec beaucoup de raison la noblesse &
excellence des sept dignits, lesquelles je vous mettrai par ordre maintenant,
qui sont, la sant heureuse, & la charge soigneuse du temps, laquelle est triple,
mais est rejeter le soin de la bonne grce, de lautorit & estimation humaine,
comme aussi de la force, & de la puissance, & des richesses, & de sa propre
commodit car ces quatre sont dons desquels ont accoutum les hommes
dabuser, sans y prendre garde. Que si Dieu trs puissant, & trs grand, ne nous
visitait cause diceux dons par afflictions & tentations, & quelques fois par
mort soudaine, aussi ne patientait ( comme par manire de dire) de chtier les
humains ( car devant lui il ny point gard des personnes, considration de
dignit, aristarque lesprit de lhomme, ignore ce qui est, & se fait soir & matin )
nous parviendrons facilement la contemplation & connaissance de ces biens.
Mais un chacun de nous a aussi soin, aprs le salut de lme, de lternel &
perptuelle sant, de la paix durable, de langlique beaut, de la force & cleste
sapience & des trsors de la gloire, lesquelles choses nous nous promises, & en
attendons le fruit & communication par notre Sauveur Jsus Christ, mais non
pas en ce corps corrompu & gt. Si nous persvrons jusqu la fin de
cheminer en Ses voies & enseignements, & jusqu larche vraie de
considration. Car qui obira la volont Divine, dcouverte & dmontre au
livre de vie, son nom ne sera effac de ce livre de vie, car nous sommes tous
appels. Encore que vritablement je dsirerais dire quelque chose de la gloire
de ce monde, laquelle est vraie, toutefois est nulle, & du tout morte, compare
la gloire cleste, encore quelle soie un trsor trs prcieux, car je la reconnais
telle, sinon quelle est caduque & vaine, non pas perptuelle & immortelle
comme la gloire cleste, Jsus Christ. Or heureux & vraiment heureux ceux,
lesprit desquels Dieu illumine par les afflictions, & les conduit jusque l o il
semble que les choses temporelles nont point defficace, car alors le dbat
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spirituel, la lutte & les armes, paraissaient ceux qui en usent : Mais je suis
daccord que cette force dpend du seul Verbe de Dieu, & est concde aux
hommes larticle de la mort, mais non pas tous ; de l aussi prenant les
choses au rebours quelles ne sont, & faisant peu de compte de la vie cleste,
nous menons une vie du toute oiseuse & voluptueuse, estimant que nous
navons qua combattre la nature, bien quil en aille autrement, do vient la
svrit en toute la vie de lhomme, qui fait office de tyran. De l est vident
que lesprit de lhomme est assujetti aux passions & tourment, aussi comme
lesprit a le premier pch, il a consomm les pchs en second lieu par son
corps. En la mme faon le chagrin perptuel & laffliction prcdent la mort, &
la fait paratre lhomme plus horrible que toutes les choses, & principalement
ceux qui ont men une vie sale, vilaine, & malhonnte, alors le remords de
conscience traverse les mes des hommes de mille tentations. Plt Dieu que
nous connussions vraiment la gloire dicelui au temps de la grce offerte, & que
la puissions comprendre des yeux, & des oreilles, comme constitus au
prcdent, & lavenir, par son verbe, dans le quel sont cachs les trsors
clestes & ternels, & qui demeurent aprs la fin & dsolation de toutes choses,
bien que toutes choses soient remplies de la Majest Divine, & que dicelle
toutes les cratures & uvres de ses mains portent tmoignage au Ciel, sous le
Ciel, en terre, & sous la terre. Car en toutes ces choses, il tait loisible de
contempler Dieu souverain, & matre en la puissance de sa vertu, & en sa bont
: Que si nous considrons cela avec diligence, nous trouverons quil nous
convient contempler les grands trsors de la sagesse, afin que, outre la
connaissance de son verbe, tremblant devant sa face, cause de limbcillit de
notre esprit, nous puissions acqurir iceux trsors ( qu grand peine pouvions
nous jamais esprer) quand nous considrons Dieu trs grand & trs bon, avoir
cr toutes choses par ordre, bon, & dcent en notre considration. Car lhomme
contemple vraiment Dieu en Esprit, & peut se rjouir en icelui quand il sait quil
est en Esprit lImage de Dieu, & quil veut conduire les actions de sa vie selon la
loi de Jsus Christ, premier Adam, & prcurseur des actions, lutilit du
prochain. Or en la vie future & parfaite, nous aurons connaissance entire de la
gloire divine, sans aucun travail & peine nous apprendrons ce que en cette vie
nous sommes contraints de dvorer en cette vie l, lhonneur & la gloire du
nom de Dieu sera parfait, & demeurera perptuit, car nous avons aperu sa
misricorde renouveler tous les jours, & sa gloire ne pourrait tre assez chante
par la voix des Anges, & ne pouvons nous autre hommes assez diligemment
rechercher & louer les divins mystres, si le Saint Esprit ne nous assiste. Or les
mchants qui ne regardent qu leur profit particulier, ont toujours devant les
yeux laffliction perptuelle de ce feu ternel la faim & la soif les accompagne, la
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vision des Diables, la froideur & chaleur intolrable qui mme affligent &
tourmentent les Dmons, encore quils ne puissent sentir les passions
lmentaires mais seulement sentiront les peines ternelles & spirituelles,
desquelles choses nous ne pouvons rien dire de certain, sinon ce que nous
avons puis dans les mystres du Verbe Divin. Aussi que nous devons
considrer & examiner lternit, & la dure du temps, qui sera jamais, & prier
Dieu tous les jours, & tous moments afin quil nous dlivre de lennemi, qui
tache de nous opprimer par infinies tentations & maux, en toutes nos voies &
sentiers comme aussi les autres cratures & les lments, les corps clestes & les
esprits qui sefforcent de nous nuire, si Dieu en cette partie ne nous aidait. Or
sur toutes choses est ncessaire la prire fervente, par laquelle nous
demandions laide & secours du Saint Esprit, afin quaids de sa grce, nous
entendions & apprenions sans relche la parole de Dieu, par laquelle parole
nous avons confiance en Dieu, qui est la rgle & la pierre de touche de notre vie,
quand lui mme dit ; faites cela, & vous vivrez. Et en autre lieu, qui a pch
fasse pnitence, & ne pche plus ; car il ne se rjouit pas de la mort du pcheur,
mais veut sa conversion, & quil vive. Mais pour ce qui touche la connaissance
de notre chair, il semblerait de prime face quil ny aucune puissance cleste,
la colre de laquelle, & ses peines, seraient craindre, quand nous ne pouvons
voir de nos yeux, & entendre autre chose, sinon choses caduques, mortelles, &
terrestres, & non pas la volont Divine. Mais les choses sont bien autrement, car
nous avons Moise, & les Prophtes, & la voix qui crie au dsert, qui annoncent
la parole de Dieu, & sa volont, & prparent la voie, de laquelle nous soyons
estims dignes en ce grand jour de notre mort, & universel jugement, quand
toutes les actions des hommes seront examins selon la rgle du livre de vie, &
le tmoignage de lesprit, & la sentence sera donne contre toute chair vivante,
car alors les Infidles verront celui, duquel ils ont perc le ct, quand ils ne
lont voulu voir invisiblement en esprit, & parfois, sils nont mis les doigts aux
plaies lui faites par les juifs, considrant plutt les choses qui conviennent la
nature de ce monde, que celles qui sont attribues au Roi Cleste.
ADOLPHE.
Il me semblait certainement entendre la prdication de quelque pasteur, bien
que je ne puis nier que ces choses spirituelles me sont charge, & quil nest pas
permis ordonner les actions de ma vie selon cette rgle, mais par aventure &
aucunes fois on se plait davoir appris & parfait ces choses. Cependant toutefois
je mefforcerai faire toutes ces choses diligemment, & autant quil me sera
possible, & que les forces de notre imbcillit humaine le permettront, &
dautant que vous avez fait mention du trsor de ce monde jai grand dsir de
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savoir de vous qui est ce trsor mondain, car il me semble lavoir il y a
longtemps connu, & quil ny en ait autre que les biens & richesses de ce monde,
que sil y en un autre contraire mon opinion je souhaite grandement en
savoir de vous la description & entire connaissance.
LE VIEILLARD.
Savoir si jestim que tu dsire la connaissance entire de ce quand tout le
monde brle de le savoir: Mais aies cela pour assur, que ce trsor est lessence
spirituelle & pleine de vertu non seulement abondance en richesses mais aussi
en science de mdecine : & certes d un tel breuvage mdicinal, par lequel les
hommes sont dlivrs de maladies insupportables par la faveur & grce divine ;
Auxquelles maladies mme un autre mdecin ne peut donner soulagement. Or
ce mystre surpasse de beaucoup toute lexcellence de lor & de largent, &
aiguillonne la raison humaine, & est plein de mystres qui semblent aux autres
incroyables : de toutes ces choses vous pouvez lire la rvlation Hermtique de
Thophraste, je ne vous veux pas dire maintenant quel il est, car ce mystre est
un secret cach ds le commencement du monde, jusque ici, & est telle la
volont de Dieu, & ne vous rvlerai plus amplement ce sceau de Nature, la
faon des anciens Philosophes, & ses secrets sont assez apertement & au long
dclars pur les auteurs, mais par providence divine il a t concd que ce
mystre soit rvl aux pieux & dvots sectateurs de cet art, car ds le
commencement il connat toutes les choses futures, & telle est la providence
divine, aux pieds de laquelle les hommes doivent jeter les faisceaux dorgueil.
ADOLPHE.
Encore que vous vous soyez efforc jusquici de cacher ces choses par une
couverture pure spirituelle, toutefois connaissez & entendez maintenant ce que
vous voulez infrer de l, car ce mystre est la vrit & la pierre des Philosophes
mentionne en leurs crits, compose de la premire matire : savoir est, de Sel,
Soufre & Mercure. Tous les livres font mention de cette pierre Philosophique &
tous les jours ont t mis en lumire plusieurs crits, & mmes ai connu
quelques-uns qui adonns cet art, & men ont confr, & ont accoutum de
montrer des esprits, lesquels moi-mme ai changs en quelques lieux. Et encore
qu la vrit ils soient soigneusement & artificiellement travaills, toutefois
sont corrompus, & malicieusement changs diceux. De l limprimeur & le
vulgaire, ignorant, se sont tromps & le gain est pour ce seul raptaceur, do je
reconnais un grand scandale. Outre ces choses nous ne voyons daucuns la fin
& leffet de lart. Et les artistes sont semblables au rare & noir Cygne, qui ont
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trouv son vrai usage, aussi qu plusieurs es coles les prceptes de lart sont
tenus pour fables & sornettes, ce que jai entendu des plus doctes, qui disputant
avec les artistes, les ont appels rappetasseurs, imposteurs, & impudents,
cause du peu de certitude &de constance quils ont en leur art, & jamais je ne
croirai que ces extracteurs de lart puissent produire de lor & de largent des
autres mtaux infrieurs, ou bien je pense quils les font, ou par la vertu divine,
ou par enchantements, ou par le mystre des dmons, principalement quand
jai entendu que plusieurs taient souponns, non sans cause, avoir familiarit
avec les dmons. Mais je dsire entendre de vous (home vnrable) plus
soigneusement, cause que je vois que vous en avez la certitude, bien que vous
refusiez de me rvler les mystres principaux de lart : Mais ordonnez de cet
art, & donnez plus sain jugement de la transformation des secrets de nature,
savoir si ce don est concd aux hommes de Dieu, trs bon, & trs grand car
quand jy pense ; je suis grandement tonn quand principalement il me
souvient avoir lu quelques choses sur ce sujet, & me semblait moins pouvoir
entendre leur sens, & que les trompeurs de lart ont accoutum duser de
manire de parler, cach & diffrant des autres, de l procdent les dpenses
vaines de tant dannes, de frais & de labeurs immenses, quil nest loisible de
crier que lesprance est du tout douteuse incertaine & trompeuse qui nourrit
les enfants de lart, principalement quand le vrai effet de cet art nest vu en
aucune part.
LE VIEILLARD.
Mais, ami, je vous montrerai la fin & je vrai effet de cet art, afin que vous
sachiez la certitude dicelui, & que je la possde vraiment, mais que cela soit dit
de la pierre, & vous persuadez que jai vraie connaissance de la racine de cet
arbre, ensemble avec les choses ncessaires cette tude, laquelle racine
toutefois est inconnue de tous les autres, & du vulgaire. Ne vous lassez pas
quand vous verrez que je serai plus long que de coutume quand je disputerai
de ces choses : car la raison de cet art le requiert, & les choses principales
premires & excellences doivent procder en aprs les terrestres. Or je
rpondrai ci aprs avec plus de longueur & avec questions que vous mavez
proposes dmontrerai videmment avoir dit choses vraies.
ADOLPHE.
Je dsirerais devant toutes choses savoir la raison pour laquelle nous ne
connaissons aucuns artistes qui aie acquis la perfection, & sache exactement la
transmutation des mtaux, au contraire cet art est mpris des plus doctes, qui
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toutefois bon droit en devraient avoir lentire connaissance, quand
principalement il nest sans fruit & utilit, bien que je naie entendu, ni vu en
aucun lieu, aucun qui ait acquis par ce moyen les richesses de Crsus. Et encore
vu que vous vous attribuez la connaissance de cet art, vous tes pauvrement
vtu en Hermite. Mais si javais la connaissance de la procdure de cet art
excellent & porte richesse, jamasserais de grands trsors, & les richesses du
monde, & achterais des tats & dignits si grandes, que les plus puissants Rois
du monde sen pouvanteraient, & en auraient envie, car les artistes faux en
promettent de mme aux autres toutefois je dsire entendre votre opinion de
ces choses.
LE VIEILLARD.
Il Semble que votre opinion soit semblable celle du vulgaire de ce monde, &
de tous les fols qui cherchent avec soin les trsors des richesses corruptibles, &
les allchements des volupts, lintention des philosophes & leur avis est bien
autre, car ceux ne sont dignes du nom de philosophes, qui courent aprs telles
folies, mais ceux qui sadonnent soigneusement la connaissance entire des
mystres divins, & emploient leur tude & labeur au servisse de Dieu, trs bon
& trs-grand, chassant deux la vanterie, lambition, & le soin damasser des
richesses terrestres, encore que ncessaires, & que Dieu nous les largisse
misricordieusement pour cette vie, les tudes de ce secret sont bien autres,
lintention est bien diffrente qui soccupe en la seule acquisition laborieuse de
largent & richesses, & au superbe fat des dignits en haine desquels les
Philosophes ont de coutume voiler ces mystres de lart, de peur dencourir la
violence, & oppression de la famille de Nembrot. Et est mme raison pourquoi
ces secrets sont cachs ces bateleurs, & joueurs de passe-passe, car il
sensuivrait en la publication de ce mystre une grande confusion & trouble de
chaque ordre de ce monde, vu que toutefois la distinction des ordres a t
tablie de Dieu, & quelle soit trs ncessaire pour entretenir les hommes en
paix & concorde : car Dieu trs bon & trs grand a tellement pars cette
distinction dordres & degrs entre les humains, que les uns serviraient aux
autres, & les conserverait en paix jusqu ce quils fussent conjoints les uns des
autres, tout ainsi que le Philosophe Artiste spare lun de lautre, lme, le
corps, & lesprit, & les conjoints semblablement. Or celle divine sparation de
Dieu trs bon & trs grand, ne doit tre faite daucun, sil na le commandement
du Verbe de Dieu, de rprimer les mchants, pource que seul il est lunique
vrit & justice, & ce qui est tiers cela, ce nest que blasphme & abomination
devant Dieu. Car de l le Magistrat qui tient la place de Dieu, a pris entire
puissance divine, aussi sera la punition & vengeance de la loi contre celui qui
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rpand le sang humain contre ce prcepte, car Dieu naccepte personne. Or cette
sparation divine est avec diligence considrable, & en grande estime. Mais il
semble que ces choses soient dites hors de propos, qui toutefois apportent
grand profit & utilit au genre humain, & pour cette cause il ma sembl bon
lajouter, & la vrit au livre dEzchiel le Prophte, il est fait mention de
quatre vents, qui soufflrent les os morts, qui taient environns de chair par
icelui, & l mme est parl de lesprit, qui a dtenu ces ossements, mmement
de la dissipation & retour des vents. Nous voyons aussi en lagonie de la mort
toutes les parties des hommes tre spares lun de lautre, car alors les quatre
lments, lesprit, & lAme, lesquels sont manifests du nom desprit, sont
dpartis, & se sparent lun de lautre : En leur lieu, leau & la terre lmentaire
sont conjoints, & un autre air aussi & feu, sont paissis. Lesprit astral de la vie,
lhomme interne & invisible, retourne au Ciel, & est lev sur les lments,
lme va au sein dAbraham, suivant les promens de Dieu, & repose sur
lautel, jusqu la consommation du monde, & que toutes choses soient ac-
complies. Nous voyons aussi comme la terre nous fournit de viandes
journalires dans lesquelles est cach cet esprit des Elments, comme la
nourriture, & aussi cleste essence, en pareille raison nous avons aussi la
nourriture de leau & du feu, par lequel nous conserverons le temprament du
corps terrestre, lequel contient le feu & leau spirituelle, pour renforcer lesprit
intrieur. Car comme la terre ces deux choses en soi, pareillement le Ciel, qui
est dit quintessence, car il est bien plus noble que les lments, & est la viande
de lesprit ; comme le Verbe de Dieu est la nourriture des mes, & est fait corps,
afin de donner la batitude cleste au corps, lme, & lesprit, encore quil ne
soit viande & nourriture corporelle, mais le lien & sceau de la promesse, & du
livre de la vie, en tmoignage de la vrit, cause de notre foi petite, & de la
connaissance faible de la divinit, tant Dieu aime grandement les choses
naturelles & spirituelles, & veut que toute sa crature soit en lhomme, & en la
conjonction de Jsus Christ, par lequel les pchs sont pardonns. Car comme le
Verbe divin est le principe de toutes choses, pareillement aussi est le principe
de limage de Dieu, car pour couter le Verbe de Dieu : de cette fleur du Saint
Esprit commence la foi, de la semence de cette fleur nat un arbre des bonnes
uvres, encore que les bonnes uvres, ne mritent le salut ternel, mais la foi
au verbe de Dieu ce que nous disons impossible. Ensemble tre fol devant notre
face, ce verbe est un amour magntique par lequel il nous attire lui avec les
bons & ne peut tre spar de personne, ny a pareil amour Astral magntique,
& la nature terrestre lesquelles choses on doit considrer avec la balance trs
exactement, comme est grandement considrer en la connaissance de nature,
ce que lhomme intrieur fait en la nature, lequel homme intrieur est invisible
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& cleste, mais lme est super-naturelle & super-cleste, desquelles choses
nous ne savons rien que ce qui nous a cit rvl de Dieu. Or la nature propos
les esprits naturels, encore quils soient grands, & ont le soin dune
considration secrte, & lhomme corporel ne peut entendre les choses spiri-
tuelles si lesprit de vrit ne lui tait rvl par le Roi des esprits, & le Saint
Esprit, par icelui tous les arts, la sapience & la science sont examins, cet esprit
excite aux Chrtiens un feu super-clestiel damour, & un esprit magntique de
sapience, & nous enflamme & nous lave de pure eau, & nous rend nets, afin que
nous fassions pnitence pour nos pchs, & que ne mourions tous les jours en
nos offenses, do vient le rcit frquent de leau & du feu, du sang & de lesprit
de leau, qui est celui qui donne la vie, car notre pch est de couleur sanguine,
& la rcompense du pch la mort noire, la croix & laffliction, mais des dvots
& pieux la robe blanche & la couronne de gloire. Ces choses amplement dites
suffisent maintenant : venons lexplication des questions de vous proposes,
lesquelles je vous dirai par ordre, & montrerai la certitude de cet art par la
chose mme, en telle sorte que vous nen pourrez douter. Or quand ce qui
appartient lautre objet par lequel vous tenez que plusieurs doctes ont une
connaissance fort petite de cet art, sachez que cest la volont de Dieu, & que
cela est fait pour quelque considration & certain profit, car Dieu rprouve
toute superbe & ambition & donne ce trsor aux humbles & pauvres & non pas
aux grands & aux enfants de ce monde, lequel trsor lhomme doit mettre
charge selon la loi du Seigneur pour son honneur & gloire, & pour soulager les
pauvres, de peur que pleins doisivet ne dlaissions la charge de notre vie,
mais que nous fassions les uvres de notre vocation suivant la volont, de
Dieu. Que si ce trsor se donnait tous quelle confusion ( je vous prie) serait ce
entre les mortels : Et ne vois pas par quelle raison se pourrait vrifier le dire de
Sirac : Mon fils, si tu veux plaire & servir Dieu prpare-toi au jour de
laffliction ? ce qui est die vritablement de la pauvret, diserte & imbcillit
humaine, comme vous pourrez facilement conjecturer de vous-mme, & nest
aussi baill aux hommes duser de ce trsor comme bon leur semble, car la
nature de lhomme est malicieuse & dprave. Or ne rvlez ce secret
personne, & ne le donnez lme superbe avaricieuse & ambitieuse, car cest
lhonneur & la seule gloire de Dieu, mais fais ainsi, si la fortune te favorise,
garde-toi de tenorgueillir, si elle tourne garde-toi de succomber, car Dieu est
larbitre de lune & lautre fortune, & les modre comme il lui plat, & nest
moindre vertu devant la science acquise, la rechercher avec soin que la tenir
secrte quand on la sait, car si vous laviez rvle autrement quil nest permis,
cet art trs grand part le nom & dignit dart. De l un certain Philosophe dit
Cache cet uvre devant les yeux, de tous, comme la parole en ta langue, & le
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feu en tes yeux, mme ne dispute en toi-mme de cet uvre, que le vent ne
porte les paroles un autre, lesquelles tapporteraient de lincommodit. Je
vous ai fidlement averti de ces choses, cest vous dy prendre garde, afin que
vous ne soyez tourment de corps & dme. Or labus de ces dons trs
excellents de Dieu, est trs grand, lesquels Dieu donne de sa propre grce &
libralit, aussi est-ce une grande ignominie & lchet de ces dons
Philosophiques soient ritres, & foulez aux pieds, & que les sciences soient
gts mchamment des ignorants, pour laquelle ignominie aussi ils ne pourront
voir cette lumire. Or le crime davarice & de luxure a tellement crevs curs
des enfants de ce monde, que la Foi & la Justice nest pas garde leurs
domestiques, & tous droits sont subvertis. Je vous en rciterai un exemple,
lequel jai vu de mes yeux. Il demeure en certaine ville un homme trs riche &
regorgeant de biens, pre de plusieurs enfants avares, chiche & ne se fait pas du
bien soi-mme cause de lavarice, il amassait de grands trsors ses enfants,
lesquels nourris par la mre en toute abondance de choses assurs des richesses
de leur pre, passant le temps en oisivet, luxure & dbauche, & comme ils
croissaient en ge, aussi leur mchancet & vie multipliait & comme le pre ft
dcd, tous les jours dpensant prodigalement en festins & banquets leurs
biens paternels, plongs dans les vices & mchancets, attendaient, insenss
quils taient, laccroissement des richesses ( comme il avait t auparavant fait)
mais en vain : sentant de jour en jour la diminution de leur bien & richesses
rduits en grande pauvret, ne laissaient de commettre de grandes
mchancets, exposs au dshonneur & lignominie, le reste de leur vie. Or
toutes ces choses ont t la cause quils ont t mal instruits, bien que
premirement ils eussent t enseigns en la connaissance des meurs & des
sciences. Car en ce reluit la volont de Dieu, qui veut que les ordres & degrs
des hommes soient distincts & spars, & que les uns servent les autres : Aussi
tous les hommes en leur vocation & ordre sont serfs & mercenaires : Car notre
Sauveur & Seigneur lui mme fait des uvres serviles, & a lav les pieds de
ses disciples, mais lhonneur des uns est moindre ; des autres plus grand &
nous sommes, comme il plat Dieu nous bnir. Do la rgle a t ordonne du
pre de famille Dieu trs bon & trs grand, en la manire que tu serviras en ta
vocation, de mme je te rcompenserai. Or Dieu en un jour distribue tellement
les grands trsors des richesses, quils semblent surpasser de beaucoup les
richesses des plus puissants Rois, & toutefois ses trsors ne diminuent point,
mais au contraire, tant plus il aura donn, tant plus il abonde, & cest pourquoi
Dieu doit tre aim devant toutes choses & sur toutes choses. Nous voyons
arriver fort souvent des humaines richesses que celui qui amasse des biens par
avarice, mourant laisse un successeur libral prodigue, suivant le dire des
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doctes : Que les richesses ajoutent des cornes au pauvre, & prcipitent le plus
souvent celui qui les possde en extrme malheur, & aux tourments ternels de
lenfer. Car si quelquun a eu en abondance les biens & richesses de ce monde, a
grand peine se soucie-t-il de la vraie sant, & ne pense la paix cleste, & ne
studie par libralit daider les pauvres, au contraire met toute sa diligence &
tout son soin pour faire amas de grandes richesses, & cependant oublie Dieu, &
les uvres de pit. Or les jeunes hommes sont en grand danger en ces
allchements du monde, encore que la prudence supple au dfaut quelquefois
de lge, mais les pieux sont contraints de boire le calice des afflictions, les
mchants tant rserv aux peines denfer. Mais ce qui est plus dplorer cest
que chacun se moque & se rie de ces choses, & que tous les enfants de ce sicle
ne travaillent qu laisser des richesses & des honneurs a leurs enfants sans
conscience, qui leur raconte sans moquerie quil faut chercher devant toutes
choses la sapience divine, sans laquelle rien ne peut subsister en ce monde, do
vient que le ver de la conscience ronge les curs dos misrables de diverses
tentations en lagonie de la mort ; car les hommes nont accoutum de chercher
le salut de leur me en vraie & parfaite humilit.
ADOLPHE.
Il semble que les choses que vous venez de dire soient contraires entirement au
but auquel vous prtendez, bien que je reconnatre que ce que vous avez dit soit
en ma faveur : toutefois ajouts diligemment le reste, car jen attends la fin bien
attentif. Cependant jai dsir de savoir, comment ce fait que cet art & les
mystres des Philosophes ne sont rvls aussi aux autres, & quils ne les
connaissent, vu que nous voyons tous les autres arts souvent tre sus du
peuple, & quelquefois en y pensant exactement jentre en grand soupon savoir
si cela est vrai.
LE VIEILLARD.
Vous avez entendu par-ci devant quil a t impos silence aux enfants de lart
afin que cette science fut tenue cache cause de la puissance des tyrans de ce
monde, & des mchancets des paillards superbes, des usuriers, des luxurieux
& des autres sclrats. Car tous les Philosophes cachent la vraie connaissance de
cette science avec grand artifice, dautant que aucuns ayant acquis la possession
de cette divine science, en ont mal us, ont perdu son usage & perverti les
commodits, aucuns ayant t vexez par une more fcheuse, & les autres tant
prvenus de la mort. Or il est besoin que lauditeur & le possesseur de cet art
soit humble, pieux, taciturne, & dbonnaire. Quand Dieu donc vous aura largi
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la science & possession de cet art, gouvernez-vous en cette sorte, & ne lallez
vendre a & l, mais plutt employs vous soigneusement & avec grande
diligence la connaissance plus secrte des choses, & avec uvres de votre
vocation, & fais du bien ton prochain & a ton ennemi, car la loi du
Christianisme nous oblige cela : Il faut aussi rsister de toutes nos forces aux
ennemis de la foi, & soigneusement sefforcer en cela, afin que les autres
prpars louer Dieu , ils chantent avec nous sa misricorde, mais cause de
lingratitude plusieurs choses sont caches, & lignorance engendre beaucoup
de maux, la science au contraire augmente les biens, & est le rayon de la
lumire. Il y eh plusieurs qui sefforcent & emploient la recherche de cet art,
mais ils ne studient aux vertus ncessaires, principalement a le tenir secret. Ils
tombent en une mme infortune que ce Phaton duquel parle Ovide, lequel ne
su conduire le chariot de Phbus son pre, aussi convient avec grand soin
garder ce trsor. Que si lhomme a considr seulement les paraboles et les
mystres, quil pense tre abondamment satisfait, quand il voit en la nature le
sceau et image de la divine bont tre imprime, car la nature parfait toutes
choses diligemment, & certes plus parfaitement que lhomme mme, qui
toutefois est la trs noble crature & plus proche de Dieu, raisonnable & aime
de Dieu, do parat lexcellence de lhomme sur toutes autres cratures, & pour
cette cause Dieu trs bon & trs grand lui a aussi propos les prceptes & la vie
ternelle.
ADOLPHE.
Je confesse la vrit quil faut ici considrer de grandes choses, jattends
toutefois brivement votre opinion des paraboles, principalement quand vous
avez dit souvent quil les convenait bien plucher.
LE VIEILLARD.
Mais pour mieux dire il les convient considrer devant toutes autres choses, &
pource jen ai fait mention telle que jai laiss presque les autres choses sans en
parler, lesquelles sont infinies & non pas ncessaires. Car qui a eu connaissance
de cette uvre, il connat par soi-mme quil ne faut donner occasion aux
opinions errantes, car ces moqueurs sefforcent quelquefois vendre ces choses
au simple peuple sous le sacr nom de la bible, lequel a de coutume les prendre
grandes brasses, aussi est ce chose impie & un blasphme de parangonner
autre uvre la divine puissance, car le verbe de Dieu est lchelle de Jacob : Et
Jsus Christ est seul mdiateur & la rgle, par lequel toutes choses sont mises au
livre de vie, en mme raison nous voyons en notre uvre naturelle, la vie & la
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mort, la rsurrection & la cration de tout le monde, les nombres, la mesure & le
poids, laccroissement, les forces & efficace des Etoiles & des Elments, en
premier lieu du Soleil & de la Lune, car par le Soleil la vie descend selon ce quil
plait a Dieu, & pour cette cause est compare au Soleil, & appele de son nom,
car tout ainsi quil est en haut, ainsi il est en bas, par lequel les merveilles sont
accomplies. Aussi le Soleil purpurin, rouge & dor, est mle & femelle, &
serviteur de tout lunivers : contenant en soi les richesses universelles. Il est
besoin noter deux choses en ceci, comme dune chose & de deux, car Dieu trs
bon & trs grand, cre quelque chose de rien. Or cette chose tait une chose de
laquelle toutes les choses tant clestes que terrestres sont produites, car Dieu
dit, soit fait, & il tait. Quand donc toutes choses ont t cres par son verbe, &
aprs icelui tait la nature universelle spare de la chose & bonne eu son
essence tait aprs Dieu, & tait son bon plaisir, car il tait trs bon, mais il
stait retir quelque chose soudain de lui, & navait dur jusquau temps du
grand monde, & cause de ce, il tait requis une autre chose, car par une chose
il ne pouvait durer, comme il avait t fait ds le commencement cause de la
crature la plus dbile, laquelle Dieu dsirait ensemble, & disait croissez &
multipliez, alors on multipliait tellement, que rien ne prissait la fin du sicle,
car ctait la bndiction du Seigneur, laquelle par son verbe il dpartt
lhomme, & toutes choses font paracheves jusque la fin par trs grande
obissance, & sont conduites par le Saint Esprit, de mme en est-il Adam, & a
Eue, au masse & la femelle. Il faut observer ici comment la cration se parfait
par lun & par lautre, laugmentation, multiplication, & conservation, & par le
troisime ladministration, comme par lesprit, ces choses doivent tre
examines diligemment. Louange & honneur Dieu en Trinit. En outre Dieu
commandait & descendait lhomme incontinent quant lessence, et lui
assujettissait tout sans aucun dfaut, & lui donnait puissance de manger de tous
les fruits du Paradis, except le seul arbre de science, du bien & du mal, le fruit
duquel lui avait t dfendu, par aventure cause de la malice du Diable la
volont duquel finalement il se soumit par la dsobissance, car il faut connatre
seulement le bien, & fuir le mal, par lequel le chemin est donn lennemi, car
Dieu est seul Seigneur qui conduit & administre toutes choses, & les cratures
lui sont toutes sujettes : le commandement introduit le pch quand les
hommes ne sen prenaient pas garde, par linstinct & savoir du Diable, & de sa
propre volont : car le premier pch tait blasphme & lIdoltrie,
obscurcissant par ignorance toute science, mais pour dire mieux, convertissant
en science, en connaissance du mal, jusqu maintenant, & en tous vices,
mchancets & arts du Diable, auxquels on renonce au Sacrement du Baptme,
savoir en la rgnration & rnovation de notre vie, au nouveau Adam, comme
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au bois de vie, qui a t t nos parents au Paradis terrestre de la vie terrestre,
toutefois promis en la semence dune femme, Christ qui est larbre de vie &
spirituelle & corporelle, par lequel non seulement lme reoit la vie, mais aussi
le corps. Car tout ainsi quAdam chass du Paradis tait envoy au monde,
jardin de tnbres & dafflictions, pour la mortification du sang & de la chair, de
mme si nous entendons la manne, cest--dire le pain cleste, le verbe de Dieu,
& que nous vivions selon ses commandements, & que nous croyons le verbe
lequel a t fait chair, par icelui nous reprendrons la vie, & seront transports
de la maison dignorance au Paradis cleste, & comme la mort emportait &
ravissait Adam, ainsi elle nous contraint de demeurer bon gr mal gr par le
seul verbe de Dieu, Jsus Christ, duquel toutes choses sont, car nous mourons
au vieil Adam, & nous ressuscitons en Jsus Christ nouveau Adam, comme il
nous a prcd cest pourquoi il est larbre de vie duquel nous devons manger
bannis en cette maison dafflictions, & la vrit, comme au premier Adam a
t dfendu le fruit du Paradis par un certain moyen, aussi pareillement
estimons ny avoir autre rgle, commandement, ou voie, ni a droit ni a gauche
outre le verbe de Dieu, compris au livre de vie, lequel ferm de sept sceaux
Jsus Christ a ouvert. Mais si nous dsirons connatre choses plus grandes, &
manger du fruit de larbre de science du bien & dis mal, lon dira que nous
voulons servir deux matres, cest dire, Dieu & au Diable, prenant le
mensonge pour la vrit, & rprouvant la vrit comme mensonge, aussi nous
recevons rcompense digne de nos uvres, & a t fait que nos premiers
parents ont t chasss de la prsence de Dieu vivants car Dieu nest pas
semblable lhomme, mais les hommes one t faits son image, afin quils
obissent ses commandements, & quils ny diminuent ni ajoutent : quand
nous sont proposes la sapience & la science qui nous sont concdes en viande,
du verbe Divin, duquel lhomme vt, & sont tires du livre de vie jardin
spirituel. Car toute chose bonne est dicelui, & par icelui toutes choses sont
faites, lesquelles il est permis comprendre des yeux & des mains, car la visible
est fait de linvisible, de mme la foi prend son commencement de loue de la
Foi, les bonnes uvres cest dire de linvisible le visible, & du verbe le
Chrtien est engendr. Or les choses sont telles afin que lhomme de mme
raison agisse & opre, non pas quil se forme des questions oiseuses & frivoles
de la toute puissance divine, car cest le vouloir de Dieu, & la toute puissance
qui a aussi baill lhomme semblable patron & exemple : mais Thomas
incrdule ne pouvait parvenir cela quand il connaissait seulement la nature
humaine & la Science, & le Ciel lmentaire infrieur, & en premier lieu les
choses intrieures comme leau & la terre, qui toutefois sont rceptacles &
prisons de la mort. Or cette Philosophie est rprouve de S. Paul, en laquelle il
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ni a nulle perfection, car la seule Philosophie cleste est consomme par la foi,
esprance & charit. En ce lieu il est noter, que comme toutes choses sont
conserves par le verbe de Dieu, & que nous devons croire la parole qui est
sortie de la bouche de Dieu, ainsi Jsus Christ a dfr cet honneur son Pre,
que rien nest acquis sans foi, mais la plus grande partie des hommes ne croient
les choses lesquelles ils ne voient, & ne considrent que Dieu le Pre, Dieu le
Fils & Dieu le S. Esprit ne peut tre vu de nos yeux chargs de pchs, comme
aussi les rayons de son visage qui surpasse de beaucoup en splendeur le Soleil :
Les hommes nont pu voir cause de la nature pcheresse, quand il tait avec
eux en forme visible ; & lorsquil tait en ce monde, encore que Jsus Christ
nous assiste corporellement & soit la dextre de Dieu, cest--dire en la sacre
sainte puret & Dit, comme il a accompli la volont de son Pre & est all aux
enfers, & a mont aux Cieux en chair & en Esprit, & parachev tout en tout. Qui
est dentre les hommes celui qui puisse trouver en cherchant la grandeur &
sagesse de Dieu, nous savons que le Ciel est son sige, & la terre est lescabeau
de ses pieds. Nous ne pouvons nous informer des choses clestes, ni connatre
sinon celles qui ne sont donns du verbe Divin, & lesquelles S. Paul a vues, &
na tenu compte de dire, mais nous a laiss le Verbe ce cleste pain comme un
sceau dans lequel consiste le salut de nos mes, savoir la volont de Dieu, vrai
arbre de vie, afin que nous buvions son sang & mangions sa chair, & que nous
croyons fermement que toutes nos choses sont, si les paroles de linstitution
sont dites. Ainsi la parfaite nature dmontre plusieurs merveilles en un seul
miroer, de laquelle semble avoir parl assez quand les choses de lEcriture
Sainte sont assez connues par icelle. Or celui qui fait la volont de Dieu vois
toutes choses & les connat comme aussi certains dentre les Sages Paens &
Ethniques ont connu.
ADOLPHE.
Vous avez t si long en vos paroles que jen ai oubli la plus grande partie,
toutefois je dsire entendre cela de vous, savoir, si cet uvre de nature ne
contient pas en soi un esprit qui soit cause de mutation, pource quil me semble
que vous avez fait mention du second nombre qui est multiplication, il est
requis pour cet effet un esprit vital.
LE VIEILLARD.
A la vrit lesprit vital minral est en cette uvre qui se parfait aprs quil est
prpar, suivant la dignit par lArtiste : car Dieu par sa bont infinie a
constitu lhomme, Seigneur de cet esprit, afin que dicelui il formt autre
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chose, savoir un nouveau monde par la force du feu, selon lordre &
commandement donn de Dieu. Et cause de ce lhomme ne parachvera rien
du tout, & est requis que toutes ses choses se fassent en la crainte de Dieu, par
un moyen honnte & une pure conscience. Que sil y en a dentre le vulgaire qui
ne parvienne la fin de cet art, quil ne soit scandale, encore quil soit devant
les yeux des hommes, que chacun la voit, & souvent est employ dautres fins,
toutefois plusieurs ignorent son vrai usage, ne sachant pas que ce grand trsor
est entour de ces tnbres, do souvent cest or trs pur environn dpaisse
obscurit & de rouillure, est laiss dans la boue & vilenie, lesquelles choses sont
ainsi faites par le droit ordre de Nature. Les Philosophes plus sages oyant
seulement le nom de Mercure connaissent ce trsor & lont devant les yeux,
bien quil soit invisible & spirituel, toutefois il est matriel, & est une vierge trs
chaste qui na point connu dhomme. Substance fragile, do on la nomme lait
virginal, le miel terrestre des montagnes, lait, urine des enfants, & semblables
autres noms : & en toutes ces choses plusieurs Artistes lont recherche mais ils
ne lont trouve, car elle est prpare de matire mtalliques & trs bonne.
ADOLPHE.
Lor nest-il pas cette matire cause de sa noblesse, & quil est le plus parfait
mtal, il me semble que toutes vos paroles tendent l.
LE VIEILLARD.
Non la vrit, mais il est besoin que vous entend ici de moi auparavant autres
choses, car vous vous arrtiez trop ardemment encore aux trsors de cet or
terrestre, & navez pas assez conu ce que jai dit, & vritablement je vous
mettrai par crit le dernier & principal mystre de cet art, & bien que en ce
prsent discours il me semble y avoir quelques doutes, il nest pas utile
toutefois de les expliquer plus clairement, & vritablement ce trsor nest pas
cet Or mondain commun ni lArgent, Mercure, Soleil, Antimoine, Nitre, Soufre,
ni autre chose semblable, mais cest lesprit de lOr & le Mercure, qui est
nomm des Philosophes la premire & seconde matire propre & seul de la
nature & de la proprit, Or trs pur Oriental nayant senti la force du feu, sur
tous excellent, plus mou & ais fondre que lOr du vulgaire. Il est vrai
mercure de lor & antimoine, attirant ses qualits des corps sil est liqufi. Sa
prparation nest autre chose que le bien laver & le mettre en menues parties
par leau & le feu, comme toutes les autres choses sont en la mme faon pr-
pares : afin quils soient agrables Dieu & aux hommes. Il convient
exactement connatre quest ce que sublimation, distillation, sparation,
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digestion, purification, coagulation, & fixation, & rechercher diligemment cet
uf de nature, dsir de plusieurs ds le commencement. De ceci il y a
plusieurs crits, & entre autres du Comte de la Marche Trvisanne Bernard, &
des autres, lesquels je te montrerai la fin, & ajouterai plusieurs paraboles.
LE VIEILLARD.
Quand je considre que lusage de cet art doit tre acquis par beaucoup de
sueur, & que sa possession en est prilleuse, & quil convient faire la vocation
o nous sommes appels de Dieu a le plaisir que tavais pris auparavant me
rend plus humble quand je vois que jai t tromp de vaine esprance.
ADOLPHE.
Estimez-vous que je vous aie dit ces choses comme par manire dacquit, quil
faut travailler grandement, & quil faut exercer les uvres de misricorde
envers les pauvres, non pas envers tous les pauvres, mais ceux qui le sont
vraiment, & avoir soin des orphelins, & des veuves, pour la gloire & lhonneur
du nom de Dieu. Or lhonneur est du Dieu plutt qu nul autre, lors les
consolations sont demandes du Verbe divin, car le Verbe de Dieu prcde
grandement la nature, comme le serviteur suit le matre, & le pre excelle en
dignit la-mre. Il faut donc faire en sorte, comme si de cela il ne nous en
appartenait rien du tout, mais plutt travailler diligemment selon notre
vocation pour lutilit du prochain, & le profit de la Rpublique, & dtruire les
maux quapporte lignorance, car sans relche la raison & le corps doivent faire
bien, car loisivet est loreiller de Satan, & est dfendue sous grave peine,
dautant que de l proviennent toutes les normits, la luxure, lavarice,
lhomicide, le mensonge, les impostures, & fraudes, imitant en cela leur nature
mme. Or notre uvre jamais nest oisif, mais travaille & opre sans cesse jour
& nuit, jusqu ce que le temps sixime de ses semaines soit complet, & que son
Sabath approche, car alors il repose & honore son Seigneur, lhomme auquel il
doit servir selon le commandement de Dieu, obissant ses lois. En la mme
sorte les hommes doivent travailler, jusqu ce que nous entrions au Royaume
ternel de Dieu. Voire mais toutes ces choses se font. Nature presque y
contredisant, & nous fchons quand nous entendons quil faut travailler
assidment pour le vivre, jusqu ce que nous retournions en terre, de laquelle
nous sommes faits, cause que loisivet & le dsir de commander plaisent
tous galement, qui est loccasion que nous sommes paresseux & ftards en nos
oraisons & prires, bien que lon doive prier Dieu pour imptrer toutes choses :
nous mprisons les uns comme pauvres, cause quils ont petit revenu,
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cependant avaricieux, & que nous sommes obligs de bien faire nos ennemis,
toutes les mchancets ont pris place en nous, comme sont la colre, lavarice, la
haine, linimiti, la mutuelle dfiance, & cause dicelles le trs excellent bien
nous est t, comme aussi celle science de mdecine qui est cache en ce bien,
est inconnue des autres Mdecins plus doctes : Car ce trsor ne sapprend pas es
coles des Mdecins, mais cach demeure devant leur yeux, en la mme faon
que lesprit interne de la Sainte Ecriture tait scell aux Pharisiens, qui tait le
vrai Messie, & la mdecine de lme, encore quil ft au milieu deux. Aussi il
rendt grces Dieu son Pre de ce quil avait cach ce trsor aux sages de ce
monde, & laurait dclar aux petits : De mme aussi est dit de notre mdecine
naturelle, que la volont de Dieu doit prcder quand elle est demande par
ardente prire, comme en toutes les autres choses mondaines, cette volont
divine dispose toutes choses : & de l saperoit la vanit de ces mdicaments
de simples & sirops, qui courent entre les mains de ces faiseurs donguent, avec
la perte de la renomme & estimation des mdecins, au grand dommage des
malades. Mais qui plus est, ces sirops sont bus par un trs certain
endommagement, & mort diceux, & les dpenses faites par les malades sont
converties pour entretenir la superbe & luxure, comme il ni pas longtemps
quun panure homme se plaignait avoir t tromp diceux, & avoir employ
presque tous ses biens, & perdu sa substance, si un homme de petite & basse
fortune ne lui eut aid. Ainsi nous voyons que plusieurs ont seulement ce soin,
quils veulent tre en recommandation la Postrit, comme Dieux, cependant
ils ngligent da tout le soin & diligence daider leur prochain, dtudier les
bons livres, par lesquels la connaissance universelle de cet art sacquiert. il est
de besoin donc tous de se peiner, en ce qui peut sparer le bien du mal, cest-
-dire, quils connaissent par modestie, patience, & humilit la vertu & les fruits
du bon arbre, avec la racine triple, de mme aussi honorent les fruits de lme,
la Foi, lEsprance, & la Charit, afin que nous sachions que cest que vrit &
justice, tant de lme que du corps, cest--dire, du bien cleste & corporel, et
afin que nous puissions facilement comprendre cette chose. La science
Thologique & juridique nous est donne de Dieu pour ce quen icelles consiste
la puret & saintet de nature, & la vertu luvre de la vocation, & la justice est
singulire sapience, lumire, & philosophie, cause de laquelle Salomon
surmontait de beaucoup tous les autres hommes. Et la vrit Dieu mme a
ordonn un chacun les uvres de sa vocation, & a command un chacun de
nous, de conduire ses actions prudemment, pieusement, & justement en sa
vocation & devoir de la vie, selon la rgle du Verbe Divin, comme serviteur de
Dieu, & qui rendra compte de toutes choses devant le Tribunal du juge de
toutes les nations, & devant lequel tous les faits des hommes seront rvls. Or
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tout bien vient de Dieu, ensemble dicelui descend le sage & le fol, le riche & le
pauvre, le fort & le faible : & qui mprise le pauvre & imbcile, il mprise celui
qui la cre, car tout bien est de Dieu, & tous les maux viennent du Diable,
comme fontaine & origine de tout mal. Mais par un particulier conseil de Dieu,
le mal en cette vie tyrannise & donne de la fcherie aux pieux & gens de bien :
& bien que le Diable par sa propre malice sefforce de dresser le mal aux
dtriment des hommes, toutefois tout mal sert de bien Dieu & aux dvots, car
le Diable mme est contraint de servir malgr lui la gloire Divine. Et notre
pch est seul loccasion pourquoi le mal est ml avec le bien en cette vie, nous
nourrissant cependant la bont & misricorde divine, & mme fin les dix
commandements nous sont baills de Dieu, afin que nous sparions le mal du
bien, pour fuir la damnation Eternelle. Mais facilement peut-on voir qui est la
face du monde, & le soin, & les larrons avares qui se disent Chrtiens, par le
Sacrement de Baptme, imitent par les exactions immodres dusures la
perfidie & pillerie des Juifs, quand ils pensent avoir fait la volont divine,
lorsquils ont ravi les biens des Ethniques & trangers, ( par lequel nom ils ont
accoutum dappeler les Chrtiens) & que le Sauveur du monde menace de
peines Eternelles, ceux qui offensant leur prochain par usures & exactions,
dpendant leurs biens en festins & banquets ; comme ceux qui faisant bonne
chair, prennent par fraude les biens des orphelins & des veuves, & la vrit
ces deux genres dhonneur , avaricieux, & luxurieux, doivent tre conjoints &
mis en mme balance. Mais la vie de ces riches Patriarches, Abraham, Isaac,
Jacob, Joseph, & Job, a t prcieuse, juste, & pleine de modestie, & dobissance
envers Dieu, car ils prfraient lhonneur de Dieu toutes autres cratures, &
cheminant en puret de vie, & en justice, ils priaient Dieu avec ardeur &
efficace. Et tout ainsi que plusieurs en lancien Testament possdaient de
grandes richesses, conjointes par le lien de constance. De mme la pauvret a
accueilli plusieurs Adorateurs de Jsus Christ au nouveau Testament, toutefois
il est requis semblable constance, crainte & amour envers Dieu. De toutes ces
choses jestime que vous avez suffisamment entendu loccasion pourquoi ce
mystre & secret a t cach dsormais devant les yeux de plusieurs, quand le
Diable peut facilement dtourner de la voie droite, par les vaines volupts de ce
monde, car il nous sduit en la connaissance de tout mal, & mchant, & sclrat,
a sduit Adam notre premier parent, le plus sage de tous, mais pour dire
mieux, par sa cautelle tous les Saints sont tombs en choses mauvaises, & pour
nos pchs. Et pource lire de Dieu a t pandue sur nous, & toutes choses sont
vendues aux mortels par grand labeur, soin & sollicitude : car cest le Calice de
la Croix, dans lequel nous boirons du fruit de vigne avec notre Sauveur Jsus
Christ, jusqu ce grand jour de Sabath, & repos Eternel du sicle avenir, ou
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nous demeurerons sous un autre espce, & passerons celui qui pareillement
nous avance & se hte de venir nous, laquelle flicit nous conduise Dieu
trs bon & trs grand par notre Mdiateur & le Saint Esprit, auquel nous
sommes conjoint par alliance de filiation, & auquel nous sommes tenus obir,
en faisant les bonnes uvres, & foulant aux pieds les mauvaises, afin que nous
lui offrions de nouveaux Juifs, un esprit contrit & rendant Dieu les vux que
nous avons faits. En ces choses lEsprit de Dieu opre, par la Foi, Esprance, &
Charit, tout ainsi comme le dsir brlant & la coutume parfait beaucoup de
choses en nature qui semblent incroyables, & il y peu dhommes qui
studient dacqurir patiemment la connaissance de Dieu, mais plutt suivent
les biens mortels, terrestres, & caduques, adonns aux volupts, lambition, &
la puissance mondaine. Cest pourquoi Jsus Christ spare son Royaume du
monde, & rejette de soi le soin des choses mondaines , encore quil aie
connaissance de toutes choses, & quil soit la mme fontaine & source. Ces
choses toutefois mprises, il a annonc le Royaume de la sapience divine
lequel il faut rechercher devant toutes choses, & moi-mme lordonne : mais je
dsire savoir votre opinion l-dessus.
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ADOLPHE.
Certainement la vrit me contraint confesser que toutes ces choses sont ainsi
disposes, & que mon avis saccordait de point en point avec lopinion des
enfants de cette lumire : Mais dautans que jentends choses du tout contraire
ma croyance, il la faudrait changer. Or je ne doute point, & me semble du tout
indubitable, que ce mystre & secret ne peut tre rvl & communiqu a tous,
principalement quand en tous les arts qui nous sont donns, tant de la nature,
quenSeigns par un matre. Je considre que lon y doit tenir un mme chemin,
car pour en acqurir la connaissance, la grce divine est requise, lindustrie, la
diligence, & ardente tude conjoint avec grand labeur, comme ces choses sont
dsires en toutes les autre s ncessits de la vie. Or en ce qui mappartient
certainement parlant de cette vie voluptueuse jendurerais patiemment la
compagnie de ces entre-metteurs, de ces bien-entendus, de ces gourmands, &
de ces ddaigneurs (quand jay vu advenir quelques-uns un grand heur &
flicit sans travail ) & emploierais lusage de ce trsor la puissance &
ambition, & acqurir de grandes richesses.
LE VIEILLARD.
Et quoi vous ignorez que la puissance est donne aux Rois & Princes de ce
monde, afin quils rpriment la malice des hommes, au lieu de Dieu trs bon &
trs grand, & honorent la justice, la vrit, pit, & obissance, & les multiplient
afin que toutes choses soient ordonnes en cette vie prudemment. Et tout ainsi
que le juge politique a de coutume de punir les mchants par le glaive sculier :
Ainsi les Pres spirituels & magistrats Ecclsiastiques gouvernent le peuple
Chrtien par le glaive de lEsprit du Verbe de Dieu, & de ses commandements,
& aprs avoir apport les plaies par la maldiction de la Loi, ils les oignent de
lhuile de justice & gurissent, si ce nest que les transgresseurs rejettent la
bont & cure des plaies, toutefois ces blessures de la conscience ne doivent tre
guris par les Ecclsiastiques par le glaive temporel, comme nous voyons
Aaron, Mose, & Josu, avoir eu les offices sparez jusqu ce quils entrassent
en la terre de promission, & est aussi command aux sujets dobir, au juge &
Magistrat ordonn de Dieu, de peur que enfls dorgueil, ils ne sattribuent
eux mmes les Magistrats par devoirs, & ravissent les dignits par pression,
fraudes, ou puissances, sils ne sont lgitimement appels, car qui slvera par
dessus les autres, il sera humili, pour ce quil provient dambition & arrogance
laquelle Dieu rsiste grandement : car la superbe est une Idoltrie excrable
sur toutes choses, cause que Dieu est seul grand & puissant, & lequel institue
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& gouverne selon si volont & bon plaisir tous les ordres & degrs de la
puissance sculire, connaissant pleinement toutes choses dans la lumire &
tnbres, crateur & auteur de tout ordre de Justice, & des cratures, empchant
les arbres & les montagnes monter plus haut au Ciel, refrnant les sectes
ravissantes, & rprimant la force & cruaut des Gants & tyrans : car ceux qui
rsistent a Dieu & sont contraires ceux quil a choisis, au lieu de bien ils nont
que du mal, bien que le Soleil commun leur claire, Dieu ravissant la force de
leur puissance miraculeusement par un tourbillon de vents, de laquelle chose
nous rendent tmoignage les exemples journaliers. Outre ces gens ils se
trouvent certains qui mnent les grands esprits, ayant quelque science des arts
mdiocres, mineurs & petites des Gentils, levant la puissance de Dieu trs bon
& trs grand, & menant une vie Epicurienne. Il se faut bien donner de garde
deux, principalement quils sont de nature encline mal, bien que nous
ignorions comment le monde a t fait par le verbe de Dieu, & est procd
lesprit de ce verbe, & que lImage de Dieu est cache ; ce que Mose voyait par
derrire en la roche, & que en ce temps-l Jsus Christ ne pouvait tre vu des
yeux corporels.
ADOLPHE.
Vous fates dtranges digressions, & bien loignes de ce que vous avez
commenc, voulant claircir les questions spirituelles. Jai grand dsir
dsormais dentendre la description de votre proposition, encore quil me
semble en avoir entendu quelques choses de vous, lesquelles je ne prenais pas
garde, quelles devaient tre diligemment balances.
LE VIEILLARD.
Lon doit chercher dun mme pas la connaissance des biens divins & humains,
dautant que les biens & externes donnent entre la flicit temporelle une
seule fois, & que la volont de Dieu est immuable, afin que jour & nuit nous
mditions sa loi : car dicelle le salut de lme provient, & lhomme connat que
toutes choses doivent tre demandes par prires de cette fontaine de biens,
quil faut rejeter le soin des choses terriennes, & les biens qui nous sont donns,
les convient garder en humilit & modestie, car aussi la puissance & astuce du
Diable parait trs grande sur toutes choses, & personne ne pourrait viter sa
force & sa ruse, si la misricorde de Dieu ne nous gardait. Que peut tre estime
la flicit, le profit & lexcellence de lhomme, encore quil soit rempli de biens
& de richesses, si les maladies de lme ne sont guries, & ne sont tes ? Ctait
le plus grand bnfice que Dieu nous ait laiss quand Jsus Christ notre
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Sauveur conjoignait toujours la rmission des pchs la gurison des
maladies.
ADOLPHE.
Ces choses sont la vrit trs certaines ; mais plusieurs ne le considre
comme il faut, ce qui marrive bien souvent, & principalement quand je souille
mon me de cupidits & volupts mondaines. Mais puisque lusage &
possession des richesses, comme aussi cet uvre ne rpugne la volont de la
nature Divine, jai bonne esprance que jy pourrai profiter selon le
commandement & volont de Dieu trs bon & trs grand. Toutefois outre ces
choses laveuglement des Pharisiens me dtient quelque peu, qui ne voulaient
croire sils ne voyaient les miracles & signes de Jsus Christ, encore que je ne
doute point que la foi mest donn par la grce de Dieu, ncessaire au salut de
lAme : mais pour confirmer ma foi des miracles divin, & la connaissance des
paraboles de ce trs excellent trsor, jattend plus exacte explication de vos
paroles.
LE VIEILLARD.
Jai racont toutes ces choses ainsi amplement, afin que vous entendiez que ce
trsor ne sacquiert par art magique, comme quelques uns estiment pouvoir
acqurir autres choses par ledit art, auquel il ne faut mettre sa confiance, ni
aucunement ajouter foi. Mais afin que je vous dmontre loccasion vraie pour
laquelle elle doit tre cache des enfants de la science, & quelle ne doit tre
donn un seul : car toutes choses ne sont donnes un seul. Do est tire
lexcellente parabole de notre Sauveur Jsus-Christ, dans S. Matthieu, sixime :
Que personne ne peut servir deux matres. Et afin que nous voyons que Dieu
sest dmontr apertement soi-mme es uvres de la Nature, afin que ses
uvres admirables soient connues de tous & vritablement cela se fait par
divers s moyens & par contraires fortes de tentations & afflictions, non pas en la
fange des volupts, & comme nous voyons Zache avoir t reu de Dieu,
lorsquil tombait dans le vice de lEsprit, encore quil ft petit & de basse
stature, toutefois il a voulu loger chez lui, pource quil avait un amour
magntique envers Zache qui tait aussi donn en coulant aux autres : Mais
par une commune tache de nature humaine : nous nous enorgueillissons
lesprit, & fermons la fontaine de la douceur, comme si ce don nous tait donn
pour notre seule utilit, quand plutt nous devons faire de bonnes uvres, &
exercer les uvres de misricorde envers les pauvres : mais les sectateurs de ce
monde, ces farceurs & bouffons se moquent aisment de toutes ces choses : car
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les richesses changent les hommes & leurs meurs, & les pervertissent afin quils
fassent choses du tout contraires, & tent le mords de justice : les richesses ont
t appeles de Jsus Christ, Mammon. Davantage les richesses donnent la
sapience, & la Sagesse des pauvres est de peu destime quand la bourse sonne,
& largent parle, & pour cette cause il est difficile quun riche entre au Royaume
cleste, mais Dieu connat & nourrt les pauvres Sages, doux & humbles,
rduisant labondance des richesses en pauvret (pource quils estiment navoir
besoin de personne ) & montre aussi que la sagesse de ce monde nest que folie
devant toutes choses : ainsi trs joyeux cherchons le Royaume de Dieu, & prions
avec le Prophte David que Dieu nous donne nos ncessits selon sa volont &
notre pauvret, afin que nous ne nous dtournions du vrai chemin cause que
la voie de ce monde est grandement lubrique, & dangereuse. Aussi Salomon
Roi demande la Sagesse de Dieu, afin quil puisse le rgir & gouverner le
peuple de Dieu, ton honneur & louange, & toutefois recevoir de grands
trsors de Dieu, comme Salomon lui-mme dit, que la Sagesse criant en la voie
fourchue invite un chacun son amour & tude : car la gloire Divine est grande
& excellente, se dmontrant a nous en tous lieux & partout, & nous y invitants,
mais il y a peut de gens qui considrent ces choses avec attention en cette vie
mortelle laquelle senvolant bien vite, semble plusieurs nanmoins se retirer
ngligemment. Le mystre de Dieu donc est grand envers ceux qui le craignent,
& la lumire claire en tnbres aux bons, par la misricorde & justice de Dieu.
Psal, 112. Afin donc que nous nemployons ce trsor prcieux du temps, & nos
forces de lesprit & du corps acqurir & amasser des richesses, & imitions les
ambitieux & superbes, faisons toutes choses en la crainte de Dieu pour le profit
& utilit des bons, bien que imprudents.
ADOLPHE.
Bien que je confesse ces choses tre vraies, toutefois jai un scrupule en lAme,
quand jentends lavis des Philosophes tre, quil faut demander tout par
prires, ce trsor de Dieu, & le requrir.
LE VIEILLARD.
Il y a long temps que vous mavez ou dire quil faut chercher devant toutes
choses le Royaume de Dieu, que Dieu nous ajoutera & donnera souhait toutes
choses, & que lhomme ne peut pas vivre de seul pain, mais de tout verbe
procdant de la bouche de Dieu. Or en la mme raison que le Diable a tent
notre Sauveur, de mme jusqu aujourdhui il a de coutume nous tenter,
principalement au temps que nous avons besoin de quelque chose : car o la foi
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& la parole de Dieu ne nous assiste, nous dsesprons en nos afflictions, &
sommes du tout abattus, & pour vrai dire, quand la fortune nous rit, le mme
nous arrive : car nous suivons le Diable mme & louvreur de tout mal, & lui
demandons aide ; icelui nous promet les choses qui ne sont pas en sa puissance,
& nous prcipice aux tnbres dignorance : prfrant donc le pain cleste la
manne terrestre de tant que nous pourrons : Ce que disent les Philosophes, quil
faut prier Dieu, en la recherche de ce trsor, cest une chose vraie & bien dite car
Dieu seul nous le donne, pourvu que nous lui dsignions les moments du
temps & le moyen, & que ne prsumions pouvoir rsister sa volont : car il est
seul la vrit, la Sagesse & la justice, rendant un chacun selon son mrite par
le Saint Esprit, comme aussi il a t parts parmi les Aptres. Aussi pour cette
cause il nous est command de demander tous les jours en loraison.
Dominicale, notre pain quotidien, car nous ignorons les choses que nous
devons demander Dieu, & souvent nous demandons les choses qui tourneront
a notre dommage, bien quelles nous soient concdes pour nous tenter. Laide
& secours seul du S. Esprit, la sant heureuse et les commodits de la Paix
doivent tre demandes de Dieu : car dicelui descend toute science & sagesse,
tant naturelle que spirituelle. Et Jsus-Christ dsirait ardemment le salut des
hommes, & de la je dis que son Royaume ntait point de ce monde, & quil tait
venu au monde afin de sauver les hommes : & les retirer des tnbres
dignorance & des richesses terriennes, jusque finalement en avoir conduit
aucuns au Royaume cleste, as pour cette fin il nous a baill par tradition cette
oraison que nous appelions Dominicale, & nous a enseign comme nous devons
dresser nos prires Dieu son Pre, duquel nous sommes enfants par adoption,
quand ci-devant nous cheminions devant lui sous les crmonies de la Loi en
crainte & peur servile. Outre ces choses jestime que vous savez que les choses
naturelles sont sorties des surnaturelles, & que le Royaume de Dieu est Eternel,
duquel procde le Royaume temporel. Nest il pas vraisemblable que le Ciel &
le firmament a t en premier lieu prpar, & aprs llment, & le dernier de
tous la terre ; aprs icelle a t fait lhomme, nouvelle crature & petit monde.
Car Dieu commence premirement en lhomme pour tre en terre, comme
centre du cercle, comme aussi il avait pris commencement du grand centre, &
aprs la vie lme fut mise au corps de lhomme, la vie & me ternelle &
immortelle : car cela est superclestiel & comme Ciel divin Astral & comme
esprit essentiel de toutes cratures vivantes naturelles, ont t auparavant, &
puis aprs le corps lmentaire comme en corps seul, centre de la terre, touch
au doigt de Jsus Christ quand il la nomm sel de terre ; car le sel conserve
toutes choses de pourriture, comme lon connat de lOcan, Mer naturelle du
monde, quelle contagion sortirait de telle puanteur, si Dieu ne prservait par ce
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sel cest Ocan, & aussi sil ny avait mouvement. Davantage on confre les
pasteurs & ministres de la parole de Dieu au sel qui conserve de putrfaction
les membres qui leur ont t commis par la prdication du verbe Divin, & le
Saint Esprit, en cette mre du monde. Aussi notre premier pre Adam avait
entire connaissance de toutes cratures, & nous successeurs dicelui,
possdons grand peine quelques particularits, & reconnaissons mme que
cette notre connaissance est imparfaite ; Aussi aux derniers temps plusieurs
seront, congrgs en plusieurs, au lieu dun seul Adam, & dit-on que tous les
arts devant le dernier jugement seront rvls apertement. Jamais il ne fut
donn tant de science & de connaissance quil en a t concd Adam notre
premier Pre, & Jsus Christ nouveau Adam, laquelle science il a laisse son
Eglise, jusqu ce que nous entrions en la vie ternelle en laquelle toutes choses
nous seront connues & rvles, & sera donn un chacun sa due rcompense :
car en ce monde nous sommes tourments par diverses tentations fcheriez &
ennuis, cause du pch par lequel le genre humain reoit de grandes
incommodits par lennemi Satan, car ayant perdu la similitude de Dieu, nous
faisons toujours le contraire de sa volont. Outre ces choses vous considrerez
aussi ce que disait notre Sauveur quand il commande de chercher les trsors qui
ne sont sujets la pourriture, ni la pillerie des larrons & voleurs, mais des
trsors spirituels, dfendant les consciences des hommes quand ils sont
extrmement tents, quand aussi lesprit & le corps cherchent en vain le secours
humain, la crainte & peur ts ; car en ce moment de temps larmure cleste est
grandement requise, & alors la force qui est des vertus Cardinales de ces
mondains, desquelles nous nous appuyons au temps de la grce florissante,
savoir est de la beaut, sagesse, richesse & puissance. La force semble toutefois
caduque & fragile, compare la gloire divine, laquelle convient rechercher en
Jsus-Christ seul & sa parole. Que si donc en ce temps de notre prgrination
veillant & priant, nous faisons paratre notre Foi, Charit , Esprance, Modestie,
Humilit & Patience, comme lEpouse de Jsus-Christ, afin que nous soyons
conformes notre Ep
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