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La jeunesse marchait devant moi et je la suivis jusqu'à un champ retiré.

AutumnsGoddess

Là, elle s'arrêta et contempla les nuages, qui couraient au-dessus de la

ligne d'horizon, tel un troupeau de brebis

blanches.

trinket

. Je regardai les arbres, qui pointèrent leurs branches nues vers le ciel dans un geste d'invocation, pour

que revînt leur vert feuillage.

kayceeus

kayceeus

Je lui demandai « Ô Jeunesse, où sommes-

nous?» Elle répondit :

« Dans le champ de la confusion. Prends garde !

»

auralis

Alors je m'écriai : « Allons-nous-en, cet

endroit désolé m'effraie et la vue des arbres nus et des nuages m'attriste ! »

Mais elle objecta : « Sois patient, car la

confusion est le commencement de la

connaissance. »

kayceeus

Regardant à l'entour, je vis une magnifique

créature venir vers nous. Étonné, je m'écriai :

«Qui est cette femme?»Et la Jeunesse de répliquer

: « C'est Melpomène, la fille de Jupiter et la Muse de la

Tragédie. »

kayceeus

Alors je m'enquis : «Mais, Jeunesse heureuse, que me veut la Tragédie alors que tu es près de

moi ?»Elle me répondit :

«Elle est venue afin de te montrer la terre et ses

tristesses, car quiconque n'a jamais vu la tristesse ne peut

prétendre voir la joie. »

kayceeus

La Muse posa alors la main sur mes yeux.

Et quand elle la retira, la Jeunesse s'en était allée et

j'étais seul, dépouillé de tout vêtement terrestre.

fabienbos

Je lui demandai : «Ô toi, fille des dieux, où

donc est partie la Jeunesse?»

La Muse ne dit mot, mais elle me prit sur ses ailes et

me transporta jusqu'au sommet d'une haute

montagne.

kayceeus

Je vis la Terre, et tout ce qui la recouvrait, s'étaler sous mes yeux comme la page d'un livre, et les secrets de ses habitants se révéler à

moi comme des lignes. Stupéfait, je restai auprès

de la Muse, méditant sur les mystères de l'homme et m'interrogeant sur les

symboles de la vie, et je finis par voir. Ah ! si j'avais

pu ne pas voir!

golfiscool

Je vis les anges du bonheur combattre les

démons du malheur et, au milieu d'eux, était l'homme, en pleine

perplexité, tiraillé tantôt par l'espoir, tantôt par le

désespoir.

EvilinLee-web

Je vis l'amour et la haine se jouer du cœur humain : l'amour lui dissimulait ses fautes, l'enivrait du vin de la soumission et lui déliait

la langue en éloges et flatteries; et la haine

excitait ses hostilités, le rendait aveugle à la vérité et sourd à la juste parole.

Zephyri

Je vis la cité assise telle une fille de ruelles qui

s'agrippait aux pans des habits des descendants

d'Adam.

adonis4573

Et je vis la belle campagne qui, au loin, était debout, pleurant sur l'homme.

kayceeus

Je vis des prêtres aussi rusés que les renards,

wredwr

je vis de faux messies conspirer contre les penchants de l'âme

doubleewe

et je vis l'homme appeler la sagesse à la rescousse, alors que celle-ci en était

aussi dégoûtée que furieuse, car, quand elle

l'interpellait dans les rues au vu et au su de tous, il faisait la sourde oreille.

socaltimes

Je vis des vicaires lever souvent les yeux au ciel,

alors que leurs cœurs étaient ensevelis au fond des tombes de la cupidité.

Je vis des jeunes hommes faire la cour en usant de leurs paroles et de leur

fougue, alors qu'ils étaient bien loin de leur divinité et

que leurs sentiments véridiques étaient en état

de sommeil.

sommeil_etternel

Je vis des législateurs commercer avec leur

verbiage en plein marché de la tromperie et de

l'hypocrisie.

BenHeine

Je vis des médecins se jouer des âmes candides

et crédules.

Je vis l'ignorant délibérer avec le sage, élevant son

passé au trône de la gloire, déroulant un tapis

d'opulence sous son présent et préparant pour son futur une couche de

luxe.

prettyfly

Je vis les pauvres malheureux semer

stupidboy187

et les riches influents récolter et manger,

yoferdinand

tandis que l'oppression, travestie en loi, montait la

garde.

mtrutledge

Je vis les brigands des ténèbres piller les trésors de l'esprit alors que les sentinelles de la lumière

sombraient dans le sommeil de l'indolence.

Bluefley

Je vis la femme telle une lyre dans les bras de

l'homme, qui ne savait en jouer, elle ne lui faisait alors entendre que des

sons discordants.

jeffslater

Je vis des bataillons distingués qui

assiégeaient la cité de l'honneur héréditaire,

toutefois je vis d'autres bataillons qui faisaient défection car ils étaient

désunis et peu nombreux.

BiondoArt_dot_com

Je vis la vraie liberté marcher seule dans les

rues et frapper aux portes, demandant refuge sans

que personne prêtât l'oreille à ses appels,

Niveus_Basium

puis je vis la banalité s'avancer dans un cortège

majestueux et la foule l'acclamer comme si

c'était la liberté.

FromDarkerWoods

Je vis la religion ensevelie dans les Livres alors que l'illusion lui ravissait sa

place.

shley77

Je vis l'homme dissimuler sa lâcheté sous le

manteau de la patience et appeler la paresse

endurance, et la peur courtoisie.

kimber84

Je vis l'intrus parler avec prétention dans des

banquets littéraires alors que les hôtes gardaient le

silence.

Disco_Gee

Je vis l'argent dans les mains du gaspilleur comme un filet de

méchancetés

RevVassago

et dans les mains de l'avare comme un appel à

la haine,

LycanW

mais dans les mains du sage je ne vis point

d'argent.

whitfiddy

Quand j'eus vu tout cela, je criai de douleur devant

cette vision : «ô fille des dieux, cela est-

il vraiment la Terre ? Cela est-il véritablement

l'homme ? »

Asilwen

Elle répondit avec une sérénité blessante :

« Ce que tu viens de voir, c'est le chemin de l'âme, parsemé de ronces et de

lucioles. Mais ce n'est là que

l'ombre de l'homme, la nuit, alors que le matin ne

saurait tarder. »

kayceeus

Puis elle posa à nouveau la main sur mes yeux. Et quand elle l'eut retirée, je vis ma Jeunesse marcher lentement à mes côtés.

kayceeus

Et devant nous, en courant, l'Espoir ouvrait la

marche.

greatanin

Musique Largo de « Xerses » de Haendel

Texte de Khalil Gibran

Photos : InternetDaniel 10 juillet 2008 danielvillaperla@gmail.com Ce diaporama numéro 48 est strictement privé. Il est à usage non commercial.