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© Masson, Paris, 2005 Ann Pharm Fr 2005, 63 : 228-232
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ConstatQualité rédactionnelle des ordonnances.Résultats d’une enquête menée auprès des médecins généralistes lorrainsSt. Perdreau (1), Fr. Bonneaux (2), J. Birge (3), P. Labrude (4)
Résumé. L’amélioration d’une pratique professionnellecommence par une évaluation personnelle, ce qui amotivé un groupe de médecins généralistes lorrains à par-ticiper à un audit afin d’apprécier leurs pratiques rédac-tionnelles de prescription. Il suffit de rappeler quel’ordonnance se situe à l’interface entre le médecin, lepharmacien et le patient pour comprendre toute l’impor-tance d’une prescription en adéquation avec la réglemen-tation en vigueur. Trois grands thèmes ont été étudiésdans cet audit : l’identification du patient, la prescriptionen elle-même et des critères plus généraux tels que la lisi-bilité et l’informatisation. L’âge du patient est la seulemention obligatoire souvent omise par les prescripteurs.Les résultats exposés sont les scores moyens du groupeainsi que les scores maxima et minima.
Mots-clés : Audit, Prescription, Réglementation, Qualitérédactionnelle.
Summary. Better medical practice begins with personal
evaluation. A group of Lorraine medical practitioners too part
in an evaluation of their prescription practices and their
compliance with existing regulatiions. The prescription ser-
vers as a link between the physician, the pharmacists and
the patient.
Three broad topics were studies in this audit: patient identi-
fication, regulation per se, and general criteria such as legibi-
lity and computerization. Among the different mandatory
inscriptions, the only item which was often missing was the
patient’s age. The results listed here present the average
performance observed in a group of medical practitioners
and the highest and lowest performances.
Key-words: Audit, Prescription, Regulation, Prescriptionquality.
Prescription practices: an audit of prescription quality
among Lorrain general practitioners. St. Perdreau, Fr. Bon-neaux, J. Birge, P. Labrude, Ann Pharm Fr 2005, 63: 228-232.
ordonnance se définit en droit médicalcomme « une ligne de conduite écritepour le malade quant aux mesures cor-
rectives à prendre ». Moyen de communicationentre le médecin, le pharmacien et le patient,elle permet au premier de formuler sa prescrip-
tion et au deuxième d’avoir les éléments néces-saires à sa délivrance.
Un certain nombre d’éléments doit obligatoire-ment figurer sur l’ordonnance tandis que d’autresfacilitent la communication entre les deux acteursde santé, gage d’une dispensation dans lesmeilleures conditions de sécurité pour le patient.
Un audit a été mené auprès des médecins géné-ralistes lorrains afin d’évaluer leurs pratiquesrédactionnelles de prescription [Perdreau S. Qua-lité rédactionnelle des ordonnances. Enquêteauprès des médecins généralistes lorrains. Thèse,pharmacie, Nancy, 2002, 62 pages].
1. Pharmacien adjoint, Sampigny (Meuse).
2. Maître de conférences, Faculté de Pharmacie, 5 rue Albert Lebrun
54000 Nancy (Meurthe et Moselle).
3. Médecin généraliste, Boulay (Moselle).
4. Professeur, Faculté de Pharmacie, Nancy (Meurthe et Moselle).
Tirés à part : Fr. Bonneaux, à l’adresse (2) ci-dessus.
L’
Qualité rédactionnelle des ordonnances
229
Cadre juridique et réglementaire
de la prescription
Trois types de règles entourent la prescription [1,2] [Stenger S. Connaissances, opinions et compor-tements à l’égard de l’audit et des pratiques enmédecine générale. Enquête auprès d’un échan-tillon des médecins généralistes lorrains. Thèsemédecine générale, Nancy, 1998, 129 pages] :
• Le code de déontologie médicale, notammentdans ses articles 8, 21, 34, 39, 40 et 45, s’attacheà son aspect éthique.
• Des règles conventionnelles, applicables auxseuls médecins conventionnés, viennent lescompléter. Elles prévoient notamment de ne pasutiliser d’ordonnances pré-imprimées, sauf pourles règles hygiéno-diététiques.
• L’article R.5194 du livre V (décr. n
° 88-1232du 29 déc. 1988 ; n
° 92-963 du 7 sept.1992) duCode de la Santé Publique (CSP) en vigueur aumoment de l’étude, précise quant à lui, pour lesmédicaments renfermant des substances véné-neuses à doses non exonérées, un certain nombrede mentions obligatoires que doit comporterl’ordonnance. Il stipule que toute ordonnancecomportant une prescription de médicaments ouproduits mentionnés à la présente section, doitêtre rédigée après examen du malade et indiquerlisiblement :
1. (décr. n
° 94-1030 du 2 déc. 1994) : « Lenom, la qualité et, le cas échéant, la qualifi-cation ou titre du prescripteur, son adresse,sa signature et la date à laquelle l’ordon-nance a été rédigée » ;
2. la dénomination du médicament ou duproduit prescrit, sa posologie et son moded’emploi ;
3. la quantité prescrite ou la durée dutraitement et éventuellement, le nombre derenouvellements ;
4. (décr. n
° 94-1030 du 2 déc. 1994) : « Pourun médicament classé dans la catégorie des médi-caments à prescription initiale hospitalière enapplication des dispositions de l’article R.5143-5-3, la date à laquelle un nouveau diagnostic doitêtre effectué lorsque l’autorisation de mise surle marché (décr. n
° 97-88 du 31 janv. 1997) ou
l’autorisation temporaire d’utilisation le pré-voit » ;
5. (décr. n
° 97-88 du 31 janv. 1997) : « Lesmentions prévues au quatrième alinéa de l’articleR.5143-5-4 et au 3
° de l’article R.5143-5-5 lors-que l’autorisation temporaire d’utilisation le pré-voit ».
En outre elle mentionne :1. lorsqu’elle est destinée à la médecine
humaine, les noms et prénoms, le sexe et l’âgedu malade ;
2. lorsqu’elle est destinée à la médecine vété-rinaire, les noms et prénoms et l’adresse dudétenteur de l’animal ou des animaux ainsi queles moyens d’identification de ceux-ci.
Toute commande à usage professionnel demédicaments ou produits mentionnés à la pré-sente section doit indiquer :
1. le nom, la qualité, le numéro d’inscriptionà l’Ordre, l’adresse et la signature du praticien,ainsi que la date ;
2. la dénomination et la qualité du médica-ment ou du produit ;
3. la mention « usage professionnel ».Les éléments en gras représentent l’essentiel
des règles que les médecins généralistes sontamenés à suivre lorsqu’ils rédigent une pres-cription destinée à un patient. Il s’agit doncd’indications obligatoires concernant à la foisl’authentification de l’ordonnance, l’identifica-tion du patient et le libellé de la prescriptionproprement dite.
L’étude, réalisée en 2001 et 2002 s’inscrit dansce cadre.
Les nécessaires évolutions de la réglementation[3-6] ont conduit au décret n
° 2004-802 du29 juillet 2004 relatif aux parties IV et V (dispo-sitions réglementaires) du CSP et modifiant cer-taines dispositions de ce code. Il a été publié dansl’annexe du Journal Officiel de la RépubliqueFrançaise du 8 août 2004 [7].
Il reprend en substance les éléments de l’articleR.5194 dans les articles R.5132-3 et R.5132-4.Concernant nos critères d’étude, la seule modifi-cation significative concerne l’identification dupatient, puisqu’il convient désormais de men-tionner « si nécessaire, sa taille et son poids ».
St. Perdreau et Coll.
230
Méthode de l’audit réalisé
Par définition un audit médical est une méthoded’évaluation qui permet, à l’aide de critères déter-minés, de comparer la pratique du médecin à desréférences admises, en vue d’améliorer la qualitédes pratiques et des soins délivrés aux patients[8].
C’est en s’inspirant d’un audit sur « la rédac-tion des ordonnances » réalisé par le Cercle dequalité des médecins dunkerquois, que le GLAM(Groupe lorrain d’audit médical) a pris l’initiativede lancer cet audit au niveau lorrain.
Les critères d’étude retenus sont essentielle-ment les mentions prévues à l’article R. 5194 duCSP, indiquées ci-dessus. Par ailleurs, deux autrescritères concernant le libellé de la prescription ontété inclus, car ils participent à la qualité rédac-tionnelle de l’ordonnance :
• Mode de rédaction : manuscrit, informatiséou mixte,
• Lisibilité de l’ordonnance : facile, difficile ouimpossible.
De plus, et bien que cela ne figure pas explici-tement dans l’article R. 5194 du CSP, il nous asemblé intéressant, concernant les patients demoins de 15 ans, d’inclure le critère poids dupatient. Cette précision est incontestablement uncritère de qualité de la prescription, l’établisse-ment de la posologie à partir du poids étant laméthode la plus habituelle dans le champ pédia-trique.
L’audit a été proposé à l’ensemble des méde-cins généralistes lorrains, exception faite desMeurthe-et-Mosellans pour lesquels seuls lesadhérents de la formation continue furentcontactés.
Il s’est déroulé selon le processus suivant :1. accord du médecin.2. désignation par le praticien de une ou deux
officines où les patients se rendent habituelle-ment avec leurs ordonnances.
3. information du pharmacien de cette dési-gnation par un courrier précisant le but et lesmodalités de l’audit.
4. demande téléphonique d’accord du phar-macien.
5. lancement à une date choisie en accord avecle pharmacien sans que le médecin prescripteurn’en ait connaissance.
6. photocopies d’ordonnances, comportant aumoins trois lignes de prescription, par le pharma-cien : vingt ordonnances successives du mêmeprescripteur en cas de désignation d’un seul phar-macien par le médecin, ou dix ordonnances suc-cessives en cas de désignation par le médecin dedeux pharmacies destinataires habituelles.
7. masquage du nom du patient sur chaqueordonnance par le pharmacien.
8. collecte des ordonnances et codage du nomdu prescripteur par l’auditeur.
9. lecture et analyse des ordonnances aprèsmélange de celles-ci : renseignement des critèresd’étude (grille d’évaluation), étude statistique.
10. envoi des résultats globaux et des résultatsindividuels le concernant à chaque participant del’audit.
Résultats et discussion
• 1 852 médecins généralistes ont été sollicitéspar courrier. 75 ont accepté de participer àl’étude, soit 4,0 % d’entre eux.• 1 470 ordonnances ont été collectées et analy-sées pour les critères choisis.• L’expression des résultats s’est faite de deuxmanières :— Individuellement pour chaque médecin etchaque critère : score exprimé en pourcentage derenseignement ou de satisfaction d’un critère,rapporté au nombre total d’ordonnances étudiéesdu prescripteur (résultats non présentés ici).— Globalement pour chaque critère : scoreexprimé en pourcentage de renseignement oude satisfaction d’un critère, rapporté au nombred’ordonnances étudiées, tous prescripteursconfondus.
Ce double mode d’expression des résultats per-met à chaque participant d’évaluer sa prescrip-tion par rapport à la réglementation et aux autrescritères retenus, et par rapport à l’ensemble dugroupe audité.
Les critères étudiés ont été regroupés dans troistableaux qui concernent respectivement l’authen-tification de l’ordonnance (tableau I), l’identifica-tion du patient (tableau II) et le libellé de laprescription (tableau III).
Qualité rédactionnelle des ordonnances
231
L’étude des scores portés sur les tableauxmontre que la quasi-totalité des mentions obli-gatoires prévues à l’article R. 5194 du CSP figuresur la grande majorité des ordonnances, qu’ils’agisse de mentions ayant trait à l’authentifica-tion de l’ordonnance (date, signature), à l’iden-tification du patient (nom, prénom, sexe) ou aulibellé de la prescription (dosage unitaire s’il enexiste plusieurs, forme galénique s’il en existeplusieurs, posologie, durée de traitement ounombre d’unités).
Seule l’identification de l’âge fait fréquemmentdéfaut, puisque ce critère n’est enregistré qu’envi-ron 4 fois sur 10.
En revanche, la précision du poids des patientsde moins de 15 ans, paramètre non obligatoirelors de la réalisation de l’étude, apparaît dans8 cas sur 10, ce qui témoigne d’un souci de qua-lité dans la prescription.
L’informatisation des prescriptions se généra-lise puisque plus de la moitié de celles-ci le sontpartiellement ou totalement. Cet aspect est àmême de faciliter la lecture de l’ordonnance, esti-mée comme difficile, voire impossible, dans7,5 % des cas.
La portée de cette étude peut apparaître limitéeen raison du nombre modeste de médecins incluset, pour chacun d’entre eux, du petit nombred’ordonnances étudiées. La nature même del’audit et son principe de volontariat, des médecinscomme des pharmaciens, lui sont inhérents.
Conclusion
La qualité rédactionnelle de l’ordonnance faitpartie intégrale de l’acte médical et elle condi-tionne la qualité de l’acte pharmaceutique.L’audit réalisé n’a pas vocation à refléter les pra-tiques de la profession médicale en la matière. Iltémoigne de l’intérêt porté à la qualité dans l’éta-blissement des ordonnances par les prescripteursayant participé à l’audit.
Pour la grande majorité des critères étudiés,comme pour celle des médecins inclus dansl’audit, il ressort que les obligations réglementai-res sont respectées, exception faite de l’indicationde l’âge du patient. L’informatisation des pres-criptions devient fréquente et les prescripteurs nese limitent pas aux seules mentions obligatoirespuisque l’indication du poids des sujets de moinsde 15 ans est habituelle.
Les résultats enregistrés doivent encourager lesprescripteurs à poursuivre dans cette voie, qu’ilsaient participé ou non à l’audit.
Remerciements :
• Aux 75 médecins généralistes et aux phar-maciens ayant participé à cette étude.
• Au GLAM (Groupe lorrain d’audit médical)pour son aide dans la mise en forme de l’audit.
Tableau I. — Authentification de l’ordonnance.Origin of the prescription.
Scoredu groupe
Scoreminimumenregistré
Scoremaximumenregistré
Présencede la date sur les ordonnances
99,8 96,0 100
Présencede la signature du médecin
99,7 95,0 100
Tableau II. — Identification du patient.Patient identification.
Scoredu groupe
Scoreminimumenregistré
Scoremaximumenregistré
Présence du nom 100 100 100
Présencedu prénom
98,6 55 100
Précisiondu sexe en cas de prénom ambigu
84,5 0 100
Présence de l’âge 41,0 0 100
Présencedu poids pourles patients de moins de 15 ans
80,1 0 100
St. Perdreau et Coll.
232
Références
1. Anonyme. Journal officiel de la République française,
Paris : Imprimerie des Journaux officiels 1995 ; 13305-10.
2. Anonyme. Code de la Santé publique : Pharmacie.
Livre V. Textes réglementaires, Clamecy : La nouvelle
imprimerie Laballery, 1999, 564 pages.
3. Anonyme. Une interprétation irrecevable de la réglemen-
tation. La Revue Prescrire 2000 ; 20, 620-1.
4. Anonyme. Penser et prescrire en DCI. La Revue Prescrire
2000, 20 ; 606-16.
5. Anonyme. Sécuriser l’ordonnance : un acte pharma-
ceutique. Les Nouvelles Pharmaceutiques 2000 ; 202,
6-8.
6. Anonyme. Assurance qualité : une priorité stratégique pour
les officinaux. Les Nouvelles Pharmaceutiques 2001 ; 216, 16.
7. Anonyme. Journal officiel de la République française, Paris :
Imprimerie des Journaux officiels 2004 ; 37088-288.
8. Anonyme. Agence nationale pour le développement de
l’évaluation médicale. L’évaluation des pratiques profes-
sionnelles en médecine ambulatoire : l’audit médical,
Paris : Andem 1993, 33 pages.
Tableau III. — Libellé de la prescription.Wording of the prescription.
Score du groupe Score minimum enregistré
Score maximum enregistré
Présence du dosage unitaire s’il en existe plusieurs :
• Dans 100 % des cas• Dans 99-66 % des cas• Dans 66-33 % des cas• Dans 33-1 % des cas• Dans 0 % des cas
90,106,302,5
001,1
6000000000
10033180
13
Présence de la forme galénique s’il en existe plusieurs :
• Dans 100 % des cas• Dans 99-66 % des cas• Dans 66-33 % des cas• Dans 33-1 % des cas• Dans 0 % des cas
87,104,202,500,106,1
3600000000
10029215
50
Présence de la posologie :
• Dans 100 % des cas• Dans 99-66 % des cas• Dans 66-33 % des cas• Dans 33-1 % des cas• Dans 0 % des cas
85,911,802,000,100,2
3900000000
10044336
10
Présence de la durée de traitement ou du nombre d’uni-tés en cas d’usage ponctuel :
• Dans 100 % des cas• Dans 99-66 % des cas• Dans 66-33 % des cas• Dans 33-1 % des cas• Dans 0 % des cas
87,708,702,600,400,6
29000000
100464068
Répartition des ordonnances :
• Informatisées• Partiellement informatisées• Manuscrites
42,512,545,1
000000
10060
100
Lisibilité des ordonnances :
• Facile• Difficile• Impossible
92,505,901,6
050000
1005650
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