Une Lettresandrinebach49.e-monsite.com/medias/files/unelettre.pdf · 2016-08-21 · (EllE CommEnCE...

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UneLettre

Pour toiMaMan

Sandrine Bach Nicolas Bulard

TexTes :

Sandrine Bach

IllusTraTIons :

Nicolas Bulard

UneLettre

Pour toiMaMan

Pourquoi moi ?

Enfermée, comme dans une prison. J’attends désespérément qu’on vienne me délivrer.

Toute la journée, je vois des enfants jouer et rire ensemble. Ils sont si beaux si pleins de vie.

Je les envie. Pourquoi le destin s’est-il acharné sur moi, je ne comprends pas ?

Je suis là, seule, si seule.

Pourquoi suis-je si différente ?

Leurs regards me transpercent comme une flèche atteignant sa cible.

Je n’arrive pas à être heureuse, mon cœur saigne. J’ai mal, si mal et personne ne s’en soucie. Mes quelques amis m’ont délaisséetrop occupés par leurs jeux...

Je suis si jeune et je suis perdue dans un monde où je ne trouve pas ma place.

Je t’en prie Maman...Aide-moi, car ma douleur est trop lourde à porter.

Je suis dans un étau qui se resserre et je n’arrive plus à respirer...

- Maman, tiens c’est pour toi...

- Enlève tes lunettes ma chérie, il n’y a pas de soleil dans le salon.

- MAMAN ! (EllE s’énErvE)

- Quoi ?

- C’est pour toi. (EllE lui donnE la lEttrE)

- C’est un cadeau ? - Pas vraiment...

- la petite fille dans cette lettre, c’est toi n’est-ce pas ? (avEC un ton Effondré)

- Oui

- Excuse-moi, je suis désolée je n’ai pas vu, pardon... pardon... (EllE CommEnCE à plEurEr)

- Maman, il ne s’agit pas de toi, alors pourquoi pleures-tu ?

- tu es mon enfant et il est difficile pour un parent de voir la souffrance, le désespoir détruire ceux qu’on aime. Je pensais que mon amour aurait suffi pour te protéger. mais je me suis trompée, pardonne moi.

- Maman, il y a tant de souffrance en moi. Lorsque je suis à la maison je me sens en sécurité, mais à l’extérieur, je suis comme un oisillon tombé de son nid qui va bientôt s’écraser. Je ne suis pas prête pour cette vie. Il y a trop de méchanceté, dis-moi, explique-moi comment vais-je y arriver ?

- assieds-toi près de moi. tu es différente des autres enfants, c’est vrai. Je sais que la vie à l’école n’est pas toujours facile, mais nos différences sont nos forces, tu apportes tant de chaleur et de générosité.

- Ce n’est pas suffisant pour que je me sente heureuse. Tu ne comprends pas. J’ai le cœur brisé.

- Dis-moi, comment pourrais-je continuer à aller à l’école ? Je n’ai ni la force ni le courage. J’ai envie de hurler devant cette injustice. Je ne veux plus vivre comme ça. Pourquoi les enfants sont-ils méchants ? Pourquoi moi ? Pourquoi moi, ce n’est pas juste !

- les enfants ne sont pas tous méchants, tu sais. ils ont une vision très différente de la vie.

- Alors pourquoi se moquent-ils ?

- ils ne savent pas. i ls n’ont pas appris le respect, la différence. ils ne prennent pas suffisamment conscience que leurs actes sont destructeurs et peuvent avoir des conséquences dangereuses.

- Mais je souffre et tu me demandes d’accepter ? Je te déteste... tu entends ? JE TE DéTEsTE !

- Je suis ta fille. Tu voudrais que je les comprenne alors que tu devrais aller leur parler pour me protéger !

- Je suis allée à l’école pour signaler le harcèlement mais ils ont refusé de me croire. Je me suis même fortement fâchée après des enfants, ne me dis pas que je ne t’aime pas, ce n’est pas vrai, j’ai mal tout comme toi. le harcèlement est un sujet qui dérange et certaines personnes ne sont pas prêtes à l’entendre, ils ne veulent surtout pas en parler. faire comme si tout allait bien est une solution de facilité, c’est uniquement pour cette raison qu’ils sont dans le déni.

- Alors, il n’ y a pas de solution, c’est ça ? Tu me demandes d’accepter ? Jamais, tu entends ? J’ai envie de crier, de hurler ! Je me sens doublement punie ! Maman, je me fais harceler à l’école et les grandes personnes me prennent pour une menteuse. (EllE CriE)

??!

- Je sais...

- NON, tu ne sais rien du tout.

- ne crois pas que je sois rassurée lorsque tu vas à l’école. J’ai le cœur déchiré parce que je ne suis pas près de toi pour te protéger.

-Alors, laisse-moi rester à la maison... Ce n’est pas toi qui, toute la journée, doit accepter les moqueries, les injures. Il y a les bousculades volontaires dans les escaliers... et c’est tout le temps.

Je ne veux plus y retourner ! J’ai peur, Maman, tellement peur...

Et puis, tout est de ta faute ! Tu m’as toujours appris qu’il fallait être gentille et regarde, on se défoule sur moi.

- écoute-moi, il faut parfois aider ces personnes à devenir un peu plus humaines. J’aurais aimé que tu ne sois pas confrontée à cette réalité mais malheureusement je ne peux pas changer ce qui a été fait. il y a tout comme toi des enfants en souffrance qui font l’objet de moqueries de brutalité, c’est inacceptable. ils se font taper quotidiennement ou bien on se moque d’eux à cause de leurs mauvaises notes, on fait circuler l’information dans toute la classe et les enfants se déchaînent ensuite sur la victime.

- Mais pourquoi ?

- ils sont tout simplement différents, ils n’appartiennent à aucun groupe, ils se retrouvent seuls pendant les récréations et ils deviennent souffre-douleur.

- Est-ce qu’ ils en parlent à leurs parents ou à l’école ?

- il y a des enfants comme toi qui ont le courage d’en parler et d’autres qui pensent qu’ils ne seront pas pris au sérieux. C’est affreux de subir des violences verbales ou corporelles, un enfant ne peut se construire correctement dans ces terribles conditions.

- Tu as raison maman. Personne ne devrait vivre dans la peur...

- personne ne naît méchant, les enfants viennent au monde en demandant une seule chose l’amour, un mot si simple que certains ne mettent pas en application.

- malheureusement, les enfants qui n’ont pas reçu de tendresse, de câlins, d’affection, ne savent pas transmettre ce trésor si précieux. l’école ne devrait pas être un lieu où l’on déverse sa colère et le harcèlement ne devrait pas exister.

- Maman, tu m’as dit que je devrais aider les enfants mais je ne sais pas comment ? - sers toi, de ton vécu, de ta souffrance, de tes pleurs, de tes cris de désespoir. aide-les à comprendre qu’il y a d’autres solutions. tu dois leur parler, affronte ta peur, il faut que les choses changent. un enfant devrait aller à l’école avec plaisir car il y a des professeurs qui sont extraordinaires et tu en connais, n’est-ce pas ? Grâce à eux, tu as pu réapprendre les joies de l’école avec tes camarades.

- Lorsque que je regarde mes dessins de petite section, je me revois innocente et pleine de joie...

On m’à forcé à grandir trop vite, et c’est dommage. Je ne serai sans doute plus la même. J’aurai toujours en moi ce sentiment de tristesse et de blessure. Mais tu as raison, il faut que ça change !

Car quelle que soit notre couleur de peau, Quelle que soit notre religion,Quel que soit notre handicap,Et quelles que soient nos notes,ou notre façon de nous habiller à l’école,

Nous devons apprendre à nous respecter.

Maman, j’aimerais que chaque enfant puisse se mettre un instant à la place de tous ceux qui se font harceler.

- il faudrait leur faire interpréter ce rôle dans une pièce de théâtre, on ne peut pas rester insensible devant un enfant qui pleure.

- Il y a peut- être encore un espoir.

- lequel ?

- L’ amour et le partage

- tu as tout compris ! (EllEs sE sErrEnt dans lEs bras)

Voici quelques pages blanches pour, à votre tour, raconter votre histoire, vos peurs ou simplement dessiner ce que le mot harcèlement vous évoque...

A vos crayons !!

JE tiEns à rEmErCiEr ChalEurEusEmEnt

les conseillères et secretaires de l’inspection académique d’angers

monsieur lambert (psychologue) pour avoir sauvé ma fille

monsieur agator (directeur de l’école alfred Clément - angers) ainsi que tous

les enseignants de cet établissement, pour avoir réussi à lui redonner

l’envie de retourner à l’école.

Et enfin, nicolas bulard (les ufographistes)pour ses dessins et la mise en page de ce livre.

sandrine Bach

dans beaucoup de pays la prise de conscience est déjà bien avancée puisqu’au Canada en finlande ou en angleterre, des programmes existent depuis 20 ou 30 ans. C’est en norvège que fut lancée la première campagne qui date de 1983. la Grande-bretagne distribue, dès 1994, un pack anti harcélement composé d’un guide théorique et d’une série de vidéos, avant d’aller plus loin, après une série de suicides, en adoptant une loi d’orientation et d’éducation en 1998.

C’est en finlande que va naître un véritable programme visant à briser le silence qui entoure ce fléau. suite à 2 massacres de masses perpétrés dans des écoles par des jeunes gens harcelés, ce programme, financé à hauteur de 4 millions d’Euros par l’état, est adopté par 75% des écoles et collèges et se voit récompensé du prix Européen de prévention de la criminalité.

En france les choses commencent seulement à bouger. après un premiier essai en 2011, le gouvernement met en place une nouvelle campagne accompagnée d’un clip vidéo, de brochures, d’un site internet (www.nonauharcelement.education.gouv.fr), ainsi que d’un numéro de téléphone (le 3020).

il est plus que temps, car les chiffres sont là pour nous alerter et le constat est implacable...

1 enfant sur 10 est victime de violence à l’école : 18% le sont occasionnellement, 11,7% sont victimes de violences physiques et verbales répétées.

22% des enfants harcelés n’en parlent à personne

61% des élèves harcelés disent avoir des idées suicidaires

3 à 4 adolescents se suicideraient chaque année à cause du cyber-harcèlement

lE harCèlEmEnt sColairE En QuElQuEs ChiffrEs

*

Clara, une petite fille que rien ne

différencie vraiment des autres,

commence à se sentir seule et

un peu perdue, face à la foule

parfois un peu rude de son école.

Surtout maintenant que les

insultes semblent laisser

place aux bousculades...

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