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UNIVERSITÉ DE PARIS 1 - PANTHÉON SORBONNEINSTITUT DE RECHERCHE ET D'ÉTUDES SUPÉRIEURES DU TOURISME
VERS UNE APPROCHE PLUS GLOBALEVERS UNE APPROCHE PLUS GLOBALE
DU REVENUE MANAGEMENTDU REVENUE MANAGEMENTAPPLICATION DANS TOUS LES SERVICESAPPLICATION DANS TOUS LES SERVICES
OPÉRATIONNELS D'UN ÉTABLISSEMENT HÔTELIEROPÉRATIONNELS D'UN ÉTABLISSEMENT HÔTELIER
Mémoire professionnel présenté pour l'obtention du
Diplôme de Paris 1 - Panthéon Sorbonne
MASTER PROFESSIONNEL « TOURISME »
Spécialité Gestion des Activités Touristiques et Hôtelières
Par : Monia-Lisa Daoud
Directeur du mémoire : Xavier Marcé
Année universitaire 2011 - 2012
11
AVANT - PROPOSAVANT - PROPOS
Je souhaite tout d'abord remercier mon professeur de revenue management et directeur de
mémoire, Mr Marcé, qui a su amplifier mon intérêt pour ce domaine, et qui m'a accompagnée et
conseillée tout au long de ce mémoire de recherche.
Je remercie également Mr Decelle, Maître de conférence à l'IREST et responsable du Master
GATH (Gestion des Activités Touristiques et Hôtelières), ainsi que l'ensemble du corps enseignant
de cette promotion, qui m'ont permis de découvrir et d'apprécier le secteur du tourisme, et plus
particulièrement celui de l'hôtellerie.
Enfin, je tiens à remercier Mr Fécamp, directeur financier de l'hôtel Marriott Champs-
Elysées, ainsi que Mr Ribeiro, directeur de la restauration dans le même établissement, pour le
temps qu'il m'ont accordé et leur aide très précieuse.
22
SOMMAIRESOMMAIRE
INTRODUCTION GÉNÉRALE ..................................................................................................... 4
CHAPITRE I - PRÉSENTATION DU YIELD MANAGEMENT ............................................... 8
L'émergence du Yield Management ................................................................................................ 8
Particularités du Yield Management ............................................................................................. 11
Les composants du Yield Management ........................................................................................ 16
CHAPITRE II – OPTIMISATION DU REVENU GLOBAL .................................................... 25
Le Revenue Management appliqué à la restauration .................................................................... 26
Le Revenue Management appliqué à d'autres activités ................................................................ 37
Le Revenue Integrity, ou Total Revenue Management ................................................................. 49
CHAPITRE III – LIMITES ET AVENIR DU REVENUE MANAGEMENT ......................... 52
Les limites du Revenue Management ........................................................................................... 52
L'avenir du Revenue Management ................................................................................................ 56
CONCLUSION ............................................................................................................................... 61
BIBLIOGRAPHIE ..........................................................................................................................63
TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX .................................................................................... 66
TABLE DES MATIÈRES .............................................................................................................. 67
GLOSSAIRE ................................................................................................................................... 70
RÉSUMÉ ......................................................................................................................................... 72
33
INTRODUCTION GÉNÉRALEINTRODUCTION GÉNÉRALE
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il me paraît essentiel d'aborder les raisons de mon choix
concernant le thème de ce mémoire de recherche. D'une part, le yield management est un outil qui
utilise beaucoup les mathématiques, ma matière de prédilection. En effet, il faut établir des
prévisions, calculer des indicateurs ou encore déterminer des niveaux de prix en fonction des
clientèles ou des conditions de vente, et cela s'apparente finalement à des mathématiques appliquées
à la gestion. D'autre part, le revenue management concerne de nombreux domaines de la gestion,
tels que le marketing, qui permet de bien connaître son marché et donc de proposer le bon produit,
au bon tarif et au bon client, la gestion des opérations, qui s'attache à maximiser le revenu par unité
vendue, le contrôle de gestion, qui recherche la performance par la maîtrise des recettes, et le
management, indispensable pour bien organiser les services et motiver les équipes de travail. Enfin,
j'ai pour ambition de travailler dans le secteur de l'hôtellerie après avoir terminé mes études, et le
revenue management semble être un enjeu de plus en plus important pour les établissements
hôteliers.
En effet, la globalisation, traduite notamment par l'expansion du transport aérien ainsi que la
généralisation des congés payés dans les pays industrialisés, à fortement contribué à l'apparition du
tourisme de masse dans les années cinquante. C'est pourquoi, les entreprises de services n'ont eu
d'autre choix que de trouver des leviers de compétitivité. La demande est en constante mutation, les
consommateurs sont de plus en plus exigeants en terme de rapport qualité/prix, et la disparition des
frontières spatiales a fait apparaître d'une part de nouveaux concurrents tels que la Chine ou les pays
d'Europe de l'Est en terme d'offre d'hébergement, et d'autre part une nouvelle demande issue des
pays émergents comme le Brésil, l'Inde, l'Afrique du Sud, ou encore la Turquie... Par conséquent,
l'optimisation du revenu à travers une politique de yield management est devenue indispensable
pour que les établissements hôteliers puissent conserver leur part de marché.
L'activité touristique s'est démocratisée en France au début du XXème siècle. Toutefois, c'est
au sortir de la Seconde Guerre Mondiale que le phénomène touristique a pris de l'ampleur avec
l'apparition de nouvelles formes de tourisme. Cela est directement lié à l'augmentation de la richesse
et de la consommation dans les pays industrialisés. H. Durand et F. Jouvet (2002) distinguent trois
périodes dans l'histoire du tourisme de masse. Le « quantitatif-roi » (1950 - 1975 ) est caractérisé
par l'explosion de la demande touristique et l'uniformisation des modes de consommation (tourisme
balnéaire). La seconde période (1970 - 2000) est marquée par la prise en compte du qualitatif, qui
44
importe désormais bien plus aux yeux des consommateurs que le quantitatif. Cela s'explique
notamment par une plus grande diffusion de l'information. En outre, les loisirs de proximité, le
tourisme culturel et le tourisme d'affaire se sont développés, raccourcissant ainsi les séjours
touristiques. La troisième période (2000 - aujourd'hui) correspondrait à un « tourisme diversifié de
masse » puisque la demande touristique est toujours aussi abondante, mais les exigences des
consommateurs en terme de diversification de l'offre s'est accrue, car le loisir est davantage présent
dans leur vie, l'individualisme s'est généralisé, et la qualité est devenue un facteur décisif, tant en
terme de sécurité que de développement durable. Cela démontre bien que l'on est passé d'un
« tourisme traditionnel » à un « nouveau tourisme ». Cependant, nous pouvons également constater
que le tourisme « fordiste » n'a pas totalement disparu. Il s'agit en fait d'une pluralité des modes de
tourisme, qui rend difficile la capacité d'adaptation des firmes aux mutations de la demande.
Proportionnellement à cette évolution, la concurrence s'est amplifiée, ce qui a poussé les
entreprises touristiques à innover afin de se distinguer et de répondre au maximum aux besoins des
consommateurs, à la recherche perpétuelle de nouvelles expériences. Mais attention à ne pas réduire
l'innovation à sa simple dimension technologique. En effet, dans le secteur du tourisme, les
innovations sont le plus souvent organisationnelles. J-P Flipo (2001) définit l'innovation comme un
« processus de création de valeur nouvelle, d'abord orientée vers le client en tant qu'arbitre principal
de la compétitivité des entreprises, mais pouvant concerner aussi, en tant que bénéficiaires majeurs,
d'autres parties prenantes telles que l'organisation elle-même, les actionnaires, des partenaires
externes... ». En ce sens, il me semble que l'apparition du yield management au sein des firmes
touristiques a été très novateur, puisqu'il a su accroître leur rentabilité et leur compétitivité, aussi
bien au profit des clients qu'au profit des actionnaires. En effet, nous verrons que l'application du
yield management permet de toucher une clientèle plus large, et donc de satisfaire davantage de
besoins. De plus, cet outil permet d'optimiser le revenu d'un établissement hôtelier, ce qui favorise
également les actionnaires, qui ont pour principal objectif de rentabiliser au mieux leur activité.
La pertinence du yield management repose sur l'assurance d'une exploitation continue des
actifs et la régularité de l'activité dans les entreprises de service. En effet, celles-ci sont souvent
confrontées aux fluctuations de la demande, difficiles à gérer, aussi bien en période creuse qu'en
période de pointe.
55
PROBLÉMATIQUE ET MÉTHODOLOGIEPROBLÉMATIQUE ET MÉTHODOLOGIE
Habituellement, le yield management est utilisé pour optimiser le revenu hébergement d'un
établissement hôtelier car les conditions d'application de cet outil sont toutes respectées : la
demande est variable, la capacité est fixe, le comportement des clients est prévisible, les tarifs sont
différenciés selon les conditions de vente et les caractéristiques de la demande, et le niveau des
ventes peut être contrôlé. Cependant, outre les hôtels « bureau » qui n'ont pas d'activité de
restauration à proprement parlé, le revenu hébergement ne représente souvent pas plus des deux
tiers du revenu global d'un hôtel. En effet, si nous prenons l'exemple de l'hôtel Plaza Athénée dans
lequel j'ai effectué un stage de six mois au service financier, j'ai pu constater, en analysant les
recettes de l'année 2010 et du premier semestre 2011, que le chiffre d'affaires hébergement
représentait en moyenne 63% du chiffre d'affaires total, contre 31% pour la restauration (dont 2%
pour les banquets), 2% pour le spa et 3% pour les recettes diverses (business center, boutique...).
Par conséquent, je me suis demandée s'il était possible d'employer le revenue management pour les
activités hors hébergement d'un établissement hôtelier, telles que la restauration, les spas ou encore
les parcours de golfs.
L'hypothèse de départ qui va me permettre de démarrer ma démonstration est la suivante : je
suppose que le yield management est applicable à tous les services opérationnels d'un établissement
hôtelier. Ce mémoire aura alors pour objectif de confirmer ou d'infirmer cette hypothèse, et
d'estimer ainsi l'ampleur de l'enjeu que représente le revenue management pour les sites
touristiques, et plus précisément pour les hôtels.
Je commencerai par présenter les bénéfices du revenue management, en proposant un aperçu
de l'application de cette politique dans diverses activités de services : la restauration, les spas et les
parcours de golf. Par la suite, je m'interrogerai sur la réelle pertinence de cette pratique, qui certes,
permet d'accroître le revenu d'une entreprise, mais peut également avoir des effets néfastes sur
celle-ci, à commencer par le sentiment d'insatisfaction des consommateurs qui engendre une perte
de fidélité pour l'entreprise. De plus, il est nécessaire de distinguer les différentes activités de
services en fonction de leur objet (ex : activités de loisir), afin de déterminer les entreprises pour
lesquelles le revenue management et vraiment efficace. Enfin, la notion d'éthique sera largement
abordée, puisque certaines pratiques du revenue management peuvent être considérées comme
« immorales », à l'image de la discrimination tarifaire, qui reste le concept le plus contesté chez les
consommateurs.
66
Le premier chapitre de ce mémoire présentera la notion de yield management, depuis son
apparition dans les années soixante-dix jusqu'à son application actuelle, notamment au sein des
établissements hôteliers. L'origine, les définitions et les principes du yield management seront bien
entendu développés dans ce premier chapitre, mais il importe également de s’intéresser aux
éléments qui composent le yield management, à savoir la politique de tarification, la gestion des
capacités, les indicateurs de performance, la distribution, ainsi que les contraintes juridiques qui se
rapportent à l'application de cet outil. Nous verrons à cette occasion que le yield management est un
domaine qui concerne aussi bien le marketing que la gestion financière, et qu'il s'agit d'une notion
bien plus large que le « pricing », défini comme un « ensemble de techniques permettant de fixer le
prix d'un produit ». En effet, le yield management constitue un « ensemble de techniques permettant
de prévoir la demande pour un ou plusieurs produits, et d'en optimiser la disponibilité à la vente »1.
La seconde partie de ce devoir s'attachera à étudier la généralisation de l'application du yield
management à tous les services opérationnels d'un hôtel. Pour cela, je m'appuierai sur de nombreux
articles de recherches, rédigés notamment par Sheryl E. Kimes, professeur spécialisé dans le
domaine du revenue management au sein de la Cornell University School of Hotel Administration à
New York. En effet, elle s'intéresse à l'application de cette technique dans diverses activités, comme
les restaurants, les spas ou encore les parcours de golf. En outre, la notion de « revenue integrity »
sera introduite dans ce deuxième chapitre, et montrera qu'il ne s'agit pas uniquement de jouer sur les
prix ou les volumes pour optimiser le revenu d'un hôtel, mais également de réduire au maximum les
coûts liés à la vente du produit. Autrement dit, l'objectif du revenue management consiste à évaluer
la marge des produits vendus afin de la maximiser.
Enfin, la troisième et dernière partie de ce mémoire sera consacrée à la présentation des
limites du revenue management, ainsi qu'à la projection de ce que cette technique représentera d'ici
quelques années. Pour cela, je me suis appuyée sur divers articles de recherche, traitant notamment
de l'impact du revenue management sur la satisfaction des consommateurs, et sur les deux études
menées par Sheryl E. Kimes auprès de nombreux professionnels du revenue management hôtelier,
concernant leurs attentes en terme d'évolution de cette pratique. De plus, grâce aux différents
entretiens que Mr Fécamp, le directeur financier de l'hôtel Marriott Champs-Elysées, m'a accordés,
j'ai pu me poser les bonnes questions, et remettre en cause ma démarche initiale. En effet, étant
naïvement persuadée que le revenue management était une « recette miracle » permettant
d'optimiser le revenu de n'importe quelle activité de services, je m’efforçais de démontrer les
bienfaits de cette politique afin de confirmer mon hypothèse. Or, j'ai réalisé au cours de ces
entretiens que ma certitude de départ devenait de plus en plus contestable...
1 Définitions du « pricing » et du « yield management » : XMO Consultants (http://www.xmo.fr/lexique)
77
PRÉSENTATION DU YIELD MANAGEMENTPRÉSENTATION DU YIELD MANAGEMENT
I.I. L'ÉMERGENCE DU YIELD MANAGEMENTL'ÉMERGENCE DU YIELD MANAGEMENT
1. Origine du Yield Management
En 1978, la loi « Airline Deregulation Act » a été votée par les autorités politiques
américaines afin de favoriser la libre concurrence dans le secteur aérien. Grâce à cela, certaines
compagnies aériennes ont été créées, et de nombreuses autres ont pu développer leur activité, car
cette loi leur a permis d'obtenir des droits de trafic sur les lignes souhaitées, et de fixer librement
leurs tarifs. Bien entendu, cela ne fut pas sans conséquence puisque la concurrence exacerbée du
secteur aérien a engendré une guerre des prix sans précédent, permettant aux compagnies de
récupérer ou de conserver leur part de marché. En effet, les gains de productivité étaient clairement
limités étant donné la rigidité des coûts, ne laissant d'autre choix aux compagnies que de réduire les
prix pour augmenter les volumes de vente. Toutefois, cette guerre tarifaire ne peut être salutaire qu'à
court terme, puisqu'elle engendre à moyen terme une baisse des bénéfices due aux sacrifices
consentis sur la marge. Dans ce contexte, les dirigeants des compagnies aériennes ont cherché des
solutions pouvant leur apporter plus d'efficacité que la simple réduction massive des prix, qui s'est
finalement avérée inutile puisque que certains consommateurs étaient prêts à payer leur billet plus
cher tant que le service répondait à leurs attentes. C'est alors que des experts d'American Airlines
ont mis en place de nouvelles pratiques managériales, qui permettent d'optimiser non pas le
« remplissage » mais le « revenu généré par les ventes réalisées ». Il ne s'agit plus de remplir l'avion
à n'importe quel prix, mais d'adapter les tarifs aux différents segments de clientèles, aux différents
types de produits et aux différentes périodes de vente.
En Europe, le yield management s'est diffusé grâce aux compagnies aériennes, comme Air
France qui a inspiré les hôtels Méridiens, mais également grâce aux grandes entreprises
américaines, telles qu'EuroDisney, initialement géré par une compagnie américaine, ou encore le
groupe hôtelier Marriott, que nous présenterons dans les prochains chapitres de ce mémoire.
Aujourd'hui, le yield management concerne toutes les activités de service ayant une capacité
fixe et proposant à la vente des produits périssables qui ne peuvent pas (ou très peu) être stockés.
Ainsi, le yield management s'est implanté dans les grandes entreprises de transport (aériens,
ferroviaires et maritimes) puis s'est diffusé dans les secteurs de l'hôtellerie, des tours-opérateurs, des
télécommunications, des médias, de la santé, de l’énergie, du spectacle, de la mode...
88
2. Définitions et modèles du Yield Management
De nombreux travaux ont été réalisés sur le yield management depuis les années quatre-
vingt, mais aucune définition unanime et universelle ne s'en dégage vraiment. Il est parfois
considéré comme une simple technique de prévisions, alors que certains auteurs le caractérisent
comme une démarche stratégique d'optimisation.
Daudel et Vialle ont été les premiers à proposer une définition du yield management en
1989. D'après eux, le yield management est « un ensemble de techniques au service d'un principe :
la gestion des capacités en vue de la maximisation des revenus d'une entreprise de services ». La
même année, Kimes définit le yield management comme « un processus d'allocation du meilleur
service au meilleur client, au meilleur prix et au meilleur moment ». Par la suite, d'autres ont défini
le yield management, à l'image de Smith, Leimkhuler et Darrow en 1992, qui le considèrent comme
« une forme sophistiquée de gestion de l'offre et de la demande par l'action simultanée sur les tarifs
et sur la capacité disponible ». Pour Donaghy et McMahon (1995), le yield management est « une
technique de maximisation du revenu qui vise à augmenter le rendement net par une prévision
d'allocation de la capacité disponible concernant des segments de marché prédéterminés à un prix
optimal ». En 1998, Le Gall associe le yield management à « la gestion du rendement d'une quantité
fixe à vendre afin de maximiser le profit générer par celle-ci à un instant donné ». Cependant, ces
définitions ne font qu'évoquer le rôle du yield management, sans en préciser la véritable
signification. Ainsi, Jones a pensé le yield management en tant que système permettant de
maximiser le revenu d'une entreprise de services.
Figure 1 : Système de Yield Management2
2 A. Capiez, Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 2003, p. 10
99
Processus de décisionstratégique
Processus de décisionopérationnelle
Système de décision
Enquêtes de clients
Analyse de la demande Réservations
Ressources humainesTechnologie
Système d'information
Système d'aide à la décision
ENVIRONNEMENT
EXTERNE
Selon Jones3, le yield management est « un système destiné aux propriétaires de l'entreprise
afin de maximiser la profitabilité par un management évolué, en identifiant les potentialités de
segments de marché, en évaluant leur valeur, en fixant des prix, en créant des règles de réduction de
tarifs et de déplacement pour établir un processus avancé de réservations, et en contrôlant
l'efficacité de ces règles ainsi que leur mise en œuvre. ».
Au cours des années 2000, d'autres auteurs ont tenté de définir le yield management, à
l'image de Capiez qui indique en 2003 qu'il s'agit d'une « méthode d'optimisation cherchant à
maximiser le revenu de l'entreprise de service sous la contrainte d'une capacité disponible qu'il faut
allouer en fonction de la demande exprimée ». Mais cette définition reste descriptive et précise
avant tout le but du yield management.
Dans son article4, Imen Zrelli a rassemblé les différentes traductions du yield management
que les auteurs ont exposé dans leurs ouvrages, depuis Daudel et Vialle en 1989 jusqu'à Capiez en
2003. Et elle en a dégagé trois visions différentes : le management, l'optimisation et la continuité.
De même, la multitude de définitions que les chercheurs ont présenté du yield management depuis
1989 se distinguent par la vision qu'ils en ont, ce qui permet de les classer en deux catégories.
Revenue Management vs Yield Management
Les termes « yield » et « revenue » management sont souvent employés sans réelle
distinction. Mais ils sont pourtant différents, puisque le yield management représente en fait une
technique du revenue management.
D'après Cross (1998), « le revenue management, c’est l’art d’optimiser son capital-client en
vue de maximiser son chiffre d’affaires. C’est tout à la fois un état d’esprit, un ensemble de
tactiques de marketing et, selon l’ampleur du marché et la taille de l’entreprise, l’utilisation de
technologies de l’information sophistiquées pour prévoir finement et en temps réel l’évolution de la
demande. Le revenue management dépasse donc les considérations techniques et mathématiques du
yield management et replace le client et ses attentes aux cœurs des considérations de l’entreprise. ».
3 P. Jones, Defining Yield Management and measuring its impact on Hotel Performance, 20004 I. Zrelli, Les déterminants de l'orientation yield management, Revue Française de Gestion, 2010
1010
YieldManagement
Vision opérationnelleDaudel et Vialle (1989)
Donaghy et McMahon (1995)Le Gall (1998)
Autissier (2000)
Vision stratégiqueKimes (1989)
Liberman (1991)
II.II. PARTICULARITÉS DU YIELD MANAGEMENTPARTICULARITÉS DU YIELD MANAGEMENT
1. Principes du Yield Management
« La problématique du yield management est le contrôle d'une demande aléatoire qu'il faut
adapter à une offre fixe et périssable par un système de tarification différenciée. »5. En effet, le yield
management est un outil d'aide à la décision qui s'attache à maximiser le revenu d'une entreprise de
services en opérant de fortes variations tarifaires adaptées à un contexte de marché relativement
complexe (demande diversifiée et instable, concurrence exacerbée).
Les différents aspects fonctionnels du yield management ont été énoncés par le Dr Scot
Hornick de Anderson Consulting6. Tout d'abord, il est essentiel de bien analyser la demande et
d'effectuer une segmentation rigoureuse et approfondie du marché, en prenant en compte la valeur
que le client attribue à la prestation de service, mais également les sensibilités des consommateurs
au prix et à la qualité. Ainsi, l'entreprise pourra protéger les clientèles à forte contribution, et
différencier ses tarifs de façon plus pertinente. Cela correspond au deuxième aspect du yield
management, qui permet notamment de prévenir et de restreindre les fluctuations de la demande en
proposant des tarifs différents selon le profil et la contribution potentielle de chaque segment de
clientèle. Ensuite, il est nécessaire de mettre en place des techniques sophistiquées de prévisions de
la demande, le plus souvent à partir des ventes passées, afin d'ouvrir ou de fermer certains tarifs au
moment le plus judicieux dans un soucis d'optimisation du chiffre d'affaires. Pour cela, il va falloir
gérer les capacités disponibles en fonction de la demande de chaque groupe de clientèles. Enfin, la
négociation des réservations peut être utile pour diriger un client vers un produit plus cher ou un
produit similaire, en contribuant de ce fait à une bonne gestion des capacités.
Les différentes spécificités des entreprises de services conditionnent la mise en application
d'une politique de yield management. Tout d'abord, la prestation de service est par définition
intangible puisqu'elle ne peut pas être stockée. Par conséquent, lorsqu'une unité de vente n'est pas
commercialisée au cours de la réalisation de la prestation, elle est perdue et sa valeur devient nulle.
De plus, la capacité (ou unités de vente disponibles) est fixe, ce qui peut engendrer des pertes de
revenu, soit parce qu'une unité est invendue, soit parce qu'une partie de la demande n'est pas
satisfaite du fait de l'insuffisance de la capacité. Dans la majorité des entreprises de service, les
coûts fixes sont très élevés, donc l'entreprise doit trouver un moyen de les couvrir totalement en
assurant un taux de remplissage minimum. Mais attention à ne pas diluer le revenu en proposant des
5 A. Capiez, Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 20036 Commission Européenne, Yield management dans les petites et moyennes entreprises de l'industrie du tourisme,
Rapport de Synthèse, 1997
1111
prix attractifs lorsque la demande est faible, car certains clients susceptibles de payer plus cher
pourraient profiter de cette promotion sans que le volume des ventes n'augmente significativement,
et le revenu généré serait finalement moins élevé que la performance attendue. Un autre élément
caractérise les activités de service, celui de pouvoir vendre la prestation de service avant que celle-
ci ne se réalise. En effet, les consommateurs ont la possibilité de réserver l'unité de vente, comme
un billet d'avion ou une chambre d'hôtel par exemple. Enfin, pour pouvoir appliquer le yield
management, les entreprises doivent être confrontées à une demande fluctuante, et commercialiser
des produits différenciés en fonction du profil des clientèles, justifiant ainsi la multiplicité des tarifs
proposés.
La mise en application d'une politique de yield management implique l'élaboration de
techniques d'optimisation qui jouent à la fois sur le prix unitaire grâce à une bonne gestion des
capacités et des classes tarifaires permettant de privilégier les segments de clientèles ayant la plus
haute contribution, et sur le volume des ventes en modulant les tarifs de façon à capter la demande
la plus large possible.
2. Système de Yield Management
D'après Capiez, le système de yield management repose sur un processus en quatre étapes :
la prévision, l'exécution, l'évaluation et l'apprentissage7.
La prévision constitue l'élément de base du système de yield management, puisqu'elle a pour
objectif d'ajuster les capacités en fonction de la demande et de stimuler certaines ventes si
nécessaire. De plus, elle permet de déterminer le niveau de surréservation le plus juste pour
compenser les éventuels « no-show » ou annulations. La prévision s'effectue essentiellement à partir
d'historiques (réservations, taux d'occupation, résultats, annulations, no show, déplacements,
événements liés à l'activité...), et utilise diverses techniques de calculs comme les moyennes
mobiles ou le lissage exponentiel. La méthode des moyennes mobiles consiste à déterminer la
demande future à partir d'une moyenne des demandes des jours précédents. Quant au lissage
exponentiel, qui peut être simple, double ou triple selon le taux de saisonnalité de l'activité, il
prévoit la demande de demain en fonction de la demande la plus récente en utilisant des constantes
dites de lissage comprises entre 0 et 1.
L'exécution se base sur les différents modules d'optimisation de l'offre par classe tarifaire,
qui permettent de définir des contingents pour chacune des classes et de protéger celles qui sont les
plus contributives.
7 A. Capiez, Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 2003
1212
L'évaluation correspond à un contrôle des performances qui vérifie à la fois les résultats
financiers relatifs à la gestion des capacités, et l'efficacité des méthodes de prévisions utilisées en
comparant les demandes estimées et réelles. Les différents indicateurs de performance sur lesquels
nous reviendront plus en détail dans la troisième partie de ce chapitre sont généralement le revenu
par unité disponible (RevPar), le taux d'occupation, le prix moyen unitaire, et le taux de refus lié à
un trop fort taux de surréservation.
Enfin, la dernière phase du processus concerne l'apprentissage, sans lequel l'entreprise ne
pourrait améliorer le système de yield management mis en place. Pour faire progresser au mieux ce
système, il importe de faire collaborer au maximum les experts en yield management et les
analystes marketing, afin d'orienter cet outil vers le consommateur, en ne se concentrant plus
uniquement sur le produit vendu mais également sur la relation client.
Figure 2 : Les phases du Yield Management8
8 A. Capiez : Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 2003, p. 150
1313
Base de donnéeshistoriques
Prévision de la demande Prévision des annulationset des no-show
Gestion des capacités
Allocation de l'offrepar classes
Détermination desclasses tarifaires
Calcul du niveaude surréservation
Ouverture / fermeturedes classes
Affichage desdisponibilités
Suivi et contrôledes performances
Revenu par unitédisponible
Performance desmodèlesNombre de refus
PRÉVISION
EXÉCUTION
APPRENTISSAGE
ÉVALUATION
3. Résultats attendus du Yield Management
Les spécialistes du yield management ont déterminé un certain nombre d'objectifs que le
yield management doit permettre à l'entreprise d'atteindre, et Imen Zrelli les a distingués selon
quatre catégories, comme le montre le tableau suivant.
Tableau 1 : Les objectifs attendus du Yield Management9
OBJECTIFS ATTENDUS DU YIELD MANAGEMENT AUTEURS
Gestion des DSRTT
Gestion des disponibilités Daudel et Vialle (1989)Jones et Hamilton (1992)
Gestion des segments de clientèles Capiez (2003)Zrelli (2007)
Gestion des risques Autissier (2000)Capiez (2003)
Gestion du temps Peters et Huyton (1997)
Gestion de la tarification Kimes et Wirtz (2002)Zrelli (2008)
Ajustement de l'offreà la demande
Analyse de l'opportunité du marché Daudel et Vialle (1989)
Allocation des tarifs par classes Autissier (2000)
Recherche d'adéquation entre l'offre et la demande
Donaghy et McMahon (1995)Lehu (1999)
Optimisation du rendement
Optimisation du prix moyen et du TO Belobaba (1996)
Accroissement du RevPar Capiez (2003)
Décisionsdynamiques
Arbitrage Jones et Hamilton (1992)
Prévision Peters et Huyton (1997)
Fonctionnement en temps réel Capiez (2003)
Allocation spatio-temporelle de la capacité Guérin (1997)
Un aspect indispensable à la réussite d'une politique de yield management ne doit pas être
négligé, il s'agit de la qualité du service proposé, qui conditionne le prix que le client est prêt à
payer pour la prestation. La valeur nette est « la somme de tous les bénéfices perçus moins la
somme de tous les coûts du produit » (Lovelock, 2004). Les bénéfices perçus sont les différents
avantages liés à la qualité du service (accessibilité, image, services secondaires ou
complémentaires, environnement, ambiance du lieu du service...). Les coûts perçus correspondent
quant à eux au sacrifice économique consenti par le client (prix payé), au risque, à l'attente, à la
9 I. Zrelli, Les déterminants de l'orientation yield management, Revue Française de Gestion, 2010
1414
difficulté d'obtenir le service... Pour que le prix accepté par le consommateur soit le plus élevé
possible, l'entreprise doit faire en sorte que la valeur nette soit positive et la plus grande possible.
Ainsi, il est fondamental de clairement définir les différents niveaux de services offerts par une
analyse conjointe de ses attributs (principaux et secondaires), afin que la différenciation tarifaire
soit mieux adaptée à chaque classe de consommateurs. Cela permettra de toucher une clientèle plus
large, et donc d'accroître le taux d'occupation tout en améliorant la rentabilité, objet essentiel du
yield management. En effet, la rentabilité d'une entreprise de services dépend principalement de la
satisfaction qu'elle apporte aux clients.
Figure 3 : Les déterminants de la rentabilité de l'entreprise de service10
Il est souvent difficile d'analyser la satisfaction des clients pour pouvoir l'optimiser, car elle
est à la fois subjective, relative et évolutive. En effet, les perceptions des clients concernant la
qualité d'un service ne peuvent être uniformisées puisqu'elles dépendent de leurs standards
personnels. De plus, les clients n'ont pas tous les mêmes attentes, et bien que le yield management
se base sur une segmentation rigoureuse de la clientèle, il existera toujours une différence entre la
qualité perçue et la qualité attendue. Enfin, « les progrès de la qualité sont plus lents que l’évolution
des exigences clients, qui s’adaptent instantanément au progrès et qui sanctionnent d’autant plus
sévèrement les défauts, qu’ils considèrent de plus en plus l’excellence comme une norme »11.
10 A. Capiez, Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 2003, p. 13911 J.C KOSKAS, Les Liaison entre qualité - satisfaction - fidélité, Revue Française de Marketing, n° 164, 1997
1515
Service perçu parle client
Service attendu parle client
Satisfaction,Valeur pour le
client
Serviceoffert
Coût pourl'entreprise
Prix duservice
Rentabilité pourl'entreprise
III.III. LES COMPOSANTS DU YIELD MANAGEMENT LES COMPOSANTS DU YIELD MANAGEMENT
1. La politique de tarification
Nous avons vu précédemment que l'une des caractéristiques de l'activité de services était
l'importance considérable des charges fixes par rapport aux charges variables. Par conséquent, le
prix d'un service ne peut pas être déterminé en fonction de son coût de revient, mais en fonction de
la demande. En effet, plus la demande est importante, plus les charges fixes pourront être amorties,
ce qui explique notamment l'importance du taux d'occupation. De plus, contrairement aux produits
industriels, le service peut être adapté aux besoins des consommateurs, ce qui permet une plus
grande flexibilité des tarifs.
Pour élaborer un mix homogène, il doit exister une cohérence entre le prix et les décisions
marketing concernant le positionnement du ou des services proposés à la vente et la segmentation
des clientèles susceptibles d'être intéressées par le ou les services commercialisés, ce qui va par la
suite influer sur la part de marché de l'entreprise, qui sera plus ou moins importante selon la
politique tarifaire appliquée. Sachant que le prix a un effet direct sur les décisions d'achat des
consommateurs, il doit permettre d'adapter l'offre à un contexte de marché particulier ainsi qu'aux
fluctuations de la demande. Pour cela, il est essentiel de bien comprendre les attentes et les
comportements des différents segments de clientèles, afin de fixer au mieux le prix optimal et
d'établir des variations tarifaires pertinentes. D'ailleurs, pour pouvoir faire varier ses prix
correctement, l'entreprise a intérêt à surveiller les tarifs des concurrents, puisqu'une hausse ou une
baisse des tendances tarifaires du marché peut être un élément déclencheur de variation à la hausse
ou à la baisse des prix pratiqués par l'entreprise. Cependant, il ne doit pas y avoir un écart trop
important entre des tarifs se succédant, pour permettre au consommateur de choisir un tarif
supérieur sans que le surcoût soit trop élevé pour lui. Ainsi, lorsqu'un tarif est fermé à la vente, les
clients prêts à payer un peu plus cher une prestation ne doivent en aucun cas la payer moins cher.
Aujourd'hui, les entreprises ne communiquent plus sur un prix maximum (ou prix rack),
mais sur le prix le plus avantageux pour le client (best available rate). Celui-ci doit correspondre au
prix le plus élevé qu'est prêt à payer un consommateur en fonction de son profil et des conditions de
marché actuelles. Cela est possible car les entreprises ajustent leurs tarifs en temps réel (pricing
dynamique), ce qui ne signifie pas que les prix changent constamment, contrairement à ce que
pensent les consommateurs. En effet, les tarifs sont fixés grâce à des analyses marketing portant sur
les attentes et les réactions de la clientèle à l'égard des prix de vente. En réalité, ce sont les
contingents d'unités de vente associés à chaque tarif qui évoluent, et engendrent l'ouverture ou la
1616
fermeture d'un tarif. Le nombre d'unités de vente associé à chaque tarif est défini en fonction des
historiques de ventes, mais aussi par rapport aux événements et aux spécificités du marché à un
instant donné.
Le contingentement permet de pallier en partie à la dilution du revenu, entraînant une perte
de chiffre d'affaires pour l'entreprise, en protégeant les classes tarifaires hautes. Pour cela,
l'entreprise relève progressivement le bid price, tarif au-dessous duquel l'entreprise refuse de vendre
son produit, en fonction des prévisions et de la montée en charge des réservations. Le principe
consiste à fermer les tarifs les plus bas lorsque la demande est forte, et à ouvrir certains tarifs
promotionnels à la vente dans le cas inverse afin de stimuler la demande, la difficulté étant de
fermer et d'ouvrir les tarifs au moment le plus approprié. Cela permet de contrôler les réservations
pour chaque classe tarifaire, en acceptant une réservation seulement si le revenu qu'elle génère est
supérieur au bid price. De plus, il importe également de comparer les contributions de chacune des
réservations, afin de les hiérarchiser et de sélectionner celles qui sont les plus profitables pour
l'entreprise en fonction de la capacité disponible. Par conséquent, l'entreprise sélectionne les
réservations en fonction de leur contribution nette (différence entre le revenu généré et le bid price),
et la règle du « premier arrivé, premier servi » ne s'applique désormais plus de façon générale, mais
seulement à l'intérieur de chacune des classes tarifaires disponibles.
Figure 4 : La gestion des tarifs12
Sans contrôle Avec contrôle (yield management)
Dans la majorité des cas, les consommateurs réagissent plutôt négativement à l'instabilité
tarifaire liée aux pratiques du yield management. Cela s'explique notamment par le fait qu'ils n'en
comprennent pas les règles de fonctionnement. Selon eux, ce ne sont pas des contingents d'unités de
vente associés à chaque niveau tarifaire qui varient constamment, mais bien les prix, ce qui ne
facilite pas leur analyse du rapport qualité-prix. En outre, ils peuvent ressentir un sentiment
12 P. Legohérel, Revenue Management - Anticiper l'offre et la demande, Optimiser les prix, Dunod, 2011, p. 96
1717
1 3
4
52
7
ACCEPTÉ REFUSÉ
Prix
DemandeCapacité
Demande
Prix
46 2
765 3 1
ACCEPTÉ REFUSÉ
Capacité
BID PRICE
d'injustice lié au fait que deux clients distincts puissent payer deux prix différents pour une même
prestation. Ainsi, le fait que certains consommateurs intègrent le principe de variation des tarifs ne
signifie en aucun cas qu'ils le comprennent, et encore moins qu'ils l'acceptent. Et cela ne joue pas en
faveur des entreprises puisque l'opacité qui règne autour des règles de fixation des tarifs remet en
cause leur crédibilité. Par conséquent, H. Mariton pense qu'une « transparence réelle sur les tarifs
pratiqués est indispensable aux consommateurs, de manière qu'ils puissent adapter leurs décisions
au contexte, en toute connaissance de cause »13.
2. La gestion des capacités
Allouer des capacités signifie attribuer un certain nombre de chambres à chaque segment de
clientèles, et donc à chacune des classes tarifaires. La difficulté réside dans le fait d'allouer le bon
nombre de chambres à chaque segment, dans le but de satisfaire l'ensemble de la clientèle tout en
optimisant son revenu. Par exemple, un nombre limité de chambres est attribué à la classe loisirs,
puisqu'elle a l'habitude de réserver relativement tôt son séjour afin de bénéficier de tarifs
préférentiels. Cependant, les conditions de vente associées à ce niveau de service sont assez
restrictives. En revanche, la classe affaires, qui est certainement la plus rentable, accorde moins
d'importance au prix mais exige une grande flexibilité quant aux conditions de vente. Ainsi, pour ne
pas prendre le risque de refuser une clientèle à forte contribution, l'entreprise doit à la fois analyser
pertinemment ses historiques de vente et anticiper au mieux la montée en charge des réservations
pour savoir combien de chambres elle doit allouer à chaque segment.
Il arrive souvent que les entreprises acceptent plus de réservations que la capacité
disponible, afin de prévenir les risques de no show ou d'annulations, considérés comme un gâchis.
Mais il est très difficile pour l'entreprise de les anticiper puisque par définition, l'imprévu est
imprévisible, bien qu'il s'agisse d'une pratique observée assez régulièrement chez les
consommateurs. Par conséquent, plus l'entreprise place de clients en surréservation, plus la
probabilité de devoir déloger un client à son arrivée sera élevée, et cela peut coûter cher à
l'entreprise. En effet, l'entreprise devra dans ce cas trouver une chambre qui réponde aux mêmes
conditions de tarif et de confort, située à proximité, ce qui n'est pas aisé. De plus, le délogement
peut engendrer des frais divers (chambre plus coûteuse, taxis, restaurant...) que l'entreprise devra
prendre en charge. Enfin, l'insatisfaction du client confronté à cette situation ne peut être que
néfaste pour l'entreprise. Ainsi, l'entreprise doit évaluer la marge générée par des pratiques
d'overbooking en tenant compte des éventuels coûts liés au refus de clients, ce qui lui permettra par
la suite de juger de l'intérêt de ces pratiques, qui doivent contribuer à maximiser le chiffre d'affaires.
13 Rapport d'information n° 1161, Commission des Finances, octobre 2008, p. 39
1818
Selon Autissier, la relation qui existe entre la demande et la capacité est le point de départ de
la démarche du yield management.
Figure 5 : La démarche de pilotage du Yield Management14
L'objectif d'une gestion des capacités consiste à contrôler les demandes pour chaque nuit et
par classe tarifaire, mais également par durée de séjour. En effet, il ne s'agit pas d'optimiser le
revenu de chacune des nuits, mais le revenu hebdomadaire. Pour cela, l'entreprise doit prendre en
compte les réservations sur plusieurs jours, en fermant à la vente les réservations portant sur une
seule nuit à partir d'un certain seuil. Car même si la contribution à la nuitée est supérieure pour un
client qui reste une nuit que pour un autre qui reste deux ou trois nuit, sa contribution à la semaine
sera moins importante. Ainsi, en acceptant autant de clients ayant réservé une seule nuit que de
capacité disponible, cela risque de bloquer certaines réservations portant sur une durée de séjour
plus longue, et donc de réduire le revenu total sur la semaine. La durée de séjour est donc un
élément fondamental à prendre en compte dans la gestion des capacités.
Dans la même logique, le yield management ne s'attache pas à optimiser le revenu de chaque
client pris individuellement, mais le revenu total correspondant à la somme des contributions
individuelles. Par conséquent, la gestion des groupes représente de la même manière que la gestion
des durées de séjours un aspect essentiel du management des capacités. Lorsque la capacité
14 A. Capiez, Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 2003, p. 142
1919
Capacité > Demande Capacité < Demande
Élargissement de l'offre (prixet services différenciés)
Marge nonoptimisée
Margeoptimisée
Déchets RefusGâchis
Surreservation
Affectation descapacités auxprestations lesplus rentables
Augmentationdes capacités parl'investissement
disponible n'est pas atteinte, il est intéressant pour l'entreprise d'accepter un groupe, puisque cela lui
permet d'augmenter son taux d'occupation. En revanche, lorsque la période est contrainte,
l'entreprise doit faire des choix stratégiques lui permettant de maximiser son chiffre d'affaires.
Ainsi, l'entreprise acceptera le groupe uniquement si sa contribution totale est supérieure à celle des
individuels qui ne pourront pas être accueillis du fait d'un manque de capacité, non pas sur une
seule nuit, mais pendant toute la durée de séjour du groupe. La gestion des groupes consiste alors à
accepter ou refuser une demande de groupe en fonction des prévisions de la demande individuelle,
et au vu de sa contribution financière totale.
3. Les indicateurs de performance
Initialement, les entreprises de services évaluaient leur efficacité commerciale grâce au taux
d'occupation, correspondant à leur taux de remplissage. Ainsi, pour maximiser ce ratio, les
entreprises n'hésitaient pas à appliquer des tarifs promotionnels peu de temps avant la réalisation de
la prestation. Cependant, les entreprises proposant des services haut de gamme ne pouvaient pas se
le permettre, au risque d'entraver leur image ; elles subissaient alors parfois des taux d'occupation
assez bas, bien que leur prix moyen soit plutôt élevé. Dans les deux cas, nous pouvons constater que
l'optimisation n'est pas atteinte, puisque soit le prix moyen, soit le taux d'occupation connaissent des
résultats non satisfaisants. Par conséquent, les entreprises ont cherché un moyen de trouver un
équilibre entre « vendre un maximum d'unités de vente » (volume) et « conserver un niveau tarifaire
acceptable » (prix). Pour cela, il a fallu identifier un indicateur pertinent, traduisant la performance
de la politique tarifaire de l'entreprise (prix moyen) compte tenu de son niveau de remplissage (taux
d'occupation), comme le revenu par unité disponible (appelé RevPar en hôtellerie), calculé en
divisant le revenu total sur une période donnée (jour, semaine, mois, année...) par le nombre d'unités
disponibles sur la même période. Le RevPar résulte également de la multiplication du taux
d'occupation par le prix moyen, tout comme le chiffre d'affaires est obtenu en multipliant le volume
par le prix.
Un autre indicateur apparaît indispensable en revenue management, il s'agit du seuil de
rentabilité, souvent utilisé en comptabilité analytique, qui correspond au montant minimal de chiffre
d'affaires que l'entreprise doit obtenir pour couvrir la totalité de ses charges. En effet, dans les
entreprises de services, les charges sont majoritairement fixes, ce qui impose à l'entreprise d'assurer
un minimum de remplissage. Pour cela, la marge sur coûts variables (chiffre d'affaires - charges
variables) doit être supérieure ou égale au montant des charges fixes. Si c'est le cas, l'activité est
rentable. L'objectif est de permettre à l'entreprise de pratiquer des prix réduits si le chiffre d'affaires
est supérieur au seuil de rentabilité et lorsqu'il n'y a plus de demande à plein tarif.
2020
4. La distribution, un levier d'optimisation
La fonction principale du yield management consiste à définir des classes tarifaires
différenciées et à protéger celles qui contribuent le plus à la maximisation du revenu, l’objectif étant
de vendre chaque jour la totalité de la capacité au prix optimal. Ainsi, il est essentiel de connaître en
temps réel la capacité disponible de chacune des classes tarifaires afin d’ouvrir et de fermer à la
vente les tarifs au moment le plus opportun. Telle est la mission d’un système de réservation et de
distribution, qui doit mettre à jour l’inventaire dès qu’une réservation, une annulation ou un
changement est effectué par un client. Il est donc légitime pour les acteurs touristiques de considérer
la distribution comme un levier d’efficacité économique associé directement à l’accroissement du
chiffre d’affaires. En d’autres termes, les systèmes de distribution sont déterminants quant à
l’efficience d’un dispositif de yield management.
Le choix des entreprises concernant les possibilités de distribution qui s’offrent à elles
s’appuient sur deux critères : l’optimisation des ventes et la réduction des coûts liés à la distribution.
Concernant l'optimisation des ventes, il importe de choisir un réseau de distribution adapté aux
segments de clientèles, et dont l’efficacité commerciale ne fait aucun doute. Quant aux coûts
imputés à la distribution, ils diffèrent selon le mode de distribution adopté.
La vente directe par centres d’appel ou via les sites Internet des entreprises engendre des
coûts en termes de moyens humains, techniques, et financiers, bien qu’ils permettent d’éviter de
payer des commissions aux agences de voyage. Mais les charges fixes associées à la gestion d’un
réseau de distribution sont parfois plus conséquentes que la charge relative au versement de
commissions. Ainsi, l’entreprise peut opter pour la vente indirecte, en passant par des intermédiaires
tels que les Global Distribution System (GDS) correspondant à des « plate-formes électroniques de
gestion des réservations qui permettent aux agences de voyage de connaître l’état du stock des
différents fournisseurs de produits touristiques et de réserver à distance »15. Le fonctionnement d’un
GDS s’articule en trois niveaux. Le premier niveau est composé des serveurs qui gèrent les
capacités fixes dont disposent les fournisseurs de service. Le second niveau gère l’ensemble de
l’information concernant les réservations (dates, tarifs, disponibilités…) à partir d’une base de
données, qui fournit des prévisions d’occupation permettant de déterminer les disponibilités de
chaque classe tarifaire, et d’évaluer par la suite l’efficacité des actions mises en place. Enfin, le
troisième niveau est une interface automatisée qui permet au GDS d’interagir avec les agences de
voyage et les sites de vente sur Internet.
15 P. Legohérel, Revenue Management - Anticiper l'offre et la demande, Optimiser les prix, Dunod, 2011
2121
Figure 6 : Architecture d'un système informatique intégré16
Aujourd'hui, l'utilisation d'Internet comme outil de communication, de distribution et de
vente est devenu un enjeu fondamental pour les entreprises de services puisqu'elle permet de
toucher un très grand nombre de clients potentiels, aussi bien des consommateurs (B to C) que des
professionnels (B to B), et d'élargir sa cible de clientèle en s'adressant aux internautes assidus qui
réservent habituellement sur le web. En outre, Internet permet de diffuser des informations très
complètes, notamment sur les tarifs et les disponibilités de services, facilement accessibles par les
consommateurs et actualisées pratiquement en temps réel. Enfin, Internet permet de collecter des
informations plus détaillées sur les clients qui réservent, puisque la saisie n'est plus effectuée par
téléphone, mais en ligne, ce qui laisse plus de temps au consommateur pour répondre aux questions.
De plus, le fait que ce n'est plus l'entreprise mais le client qui saisisse les informations permet de
réduire le nombre d'erreurs. En terme de coût, Internet procure aux entreprises de services de
nombreux avantages, à commencer par la diminution des no-show permise par le système de pré-
16 A. Capiez, Yield Management - Optimisation du revenu dans les services, Hermes Science, 2003, p. 166
2222
Serveurs des fournisseursde services
GDS
- Dates, horaires
- Disponibilités
- Réservations
- Calcul des prix
- Aide à la vente
- Comptabilité et gestion
- Services financiers
- Interfaces avec les
établissements financiers
Base de données
Système de prévision
Système d'optimisation
Système de diagnostic
Terminaux des agencesde voyage
Sites de vente surInternet
Autres GDS
paiement, qui n'aurait pas été possible sans l'apparition des paiements sécurisés grâce auxquels les
achats effectués sur Internet ont connu une croissance exponentielle. Par ailleurs, cela permet aux
firmes touristiques d'améliorer leurs prévisions et d'éviter de faire du surbooking, ce qui constitue
un risque pour l'entreprise, comme nous avons pu le voir précédemment dans ce chapitre. Enfin,
Internet permet de réduire les charges de personnel (dans les points de vente ou les centres
d'appels), puisque les clients s'informent et réservent seuls en ligne, bien que cet outil n'apporte pas
l'expertise d'un agent de voyage, qui donne des conseils « sur mesure » et qui informe les
consommateurs de façon globale, en répondant à toutes leurs préoccupations. Mais ce dernier point
conduit à se poser la question suivante : quel niveau de service associé à la distribution les
entreprises souhaitent-elles délivrer aux clients ? En effet, le client est de plus en plus contraint à
effectuer lui-même la procédure de vente, que ce soit sur Internet ou grâce aux distributeurs
automatiques, qui permettent de réduire le temps de présence du personnel d'accueil dans un hôtel.
De nos jours, étant donné la diversification des comportements d'achat des consommateurs,
les entreprises de services doivent adopter une stratégie permettant de toucher un maximum de
clientèles. Pour cela, elles doivent communiquer et vendre leurs produits ou services simultanément
via plusieurs canaux de distribution (centre de réservation interne à l'entreprise, agence de voyage,
Internet...). Cette stratégie de distribution dite « multicanal » se développe de plus en plus, car les
consommateurs n'hésitent pas à utiliser plusieurs canaux de distribution pour rechercher
l'information qui les intéresse, afin d'acheter le produit ou le service correspondant au mieux à leurs
attentes.
5. Les contraintes juridiques
L'article 13 de l'arrêté du 3 décembre 1987 relatif à l'information du consommateur sur les
prix précise l'obligation d'affichage des tarifs par les entreprises de services : « Le prix de toute
prestation de services doit faire l'objet d'un affichage dans les lieux où la prestation est proposée au
public. L'affichage consiste en l'indication sur un document unique de la liste des prestations de
services offertes et du prix de chacune d'elles. Ce document, exposé à la vue du public, doit être
parfaitement lisible de l'endroit où la clientèle est habituellement reçue. En outre, le prix de tout ou
partie des prestations proposées au public doit faire l'objet d'un affichage lisible de l'extérieur, selon
des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'économie. ». L'article 1 précise également
que « toute information sur les prix de produits ou de services doit faire apparaître, quel que soit le
support utilisé, la somme totale toutes taxes comprises qui devra être effectivement payée par le
consommateur, exprimée en euros. ». Cependant, les pratiques actuelles de yield management
rendent très difficile l'application de cette réglementation puisque les prix varient constamment. Les
2323
prix ponctuels concernant un service en particulier et répondant à une demande précise sont
toujours disponibles aux clients. Le problème se pose pour une information tarifaire générale et
permanente, qui n'existe pas lorsque le yield management est appliqué dans l'entreprise. Par
conséquent, pour respecter au mieux l'obligation d'affichage des tarifs, les entreprises publient à
l'accueil un « prix rack » correspondant au tarif maximum proposé par l'entreprise pour ses
principales prestations. Toutefois, elles n'hésitent pas à utiliser diverses méthodes de
communication tarifaire, en affichant à l'extérieur de leur établissement un tarif minimum (« à partir
de … € ») ou une fourchette de prix. En effet, il est important de ne pas amalgamer les règles
légales d'affichage des tarifs et la publicité portant sur les prix.
Concernant le cadre juridique relatif à l'application du yield management, cette pratique a
été légalisée par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 200817. Par exemple, l'article 92 a
modifié l'article L441-6 du Code de Commerce : « Les conditions générales de vente peuvent être
différenciées selon les catégories d'acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de
services », ce qui correspond à l'un des éléments essentiels du yield management.
CONCLUSIONCONCLUSION
Pour pouvoir traiter au mieux les deux prochains chapitres de ce mémoire et trouver une
réponse pertinente à la problématique générale, il m'a semblé nécessaire de rédiger un chapitre
introductif sur le yield management. En effet, avant de nous intéresser à la possible globalisation de
cette pratique aux différents services opérationnels d'un établissement hôtelier, il faut avant tout
connaître le sujet, et notamment savoir quelles sont les conditions d'application de cette technique.
Ainsi, après avoir clairement défini le sujet, les grands principes du yield management ont été
exposés, ses objectifs ont été précisés, et tout ce qui compose cette méthode d'optimisation du
revenu a été présenté.
A présent, nous pouvons nous concentrer sur l'hypothèse qui formulée en introduction, afin
de répondre le plus justement possible à problématique.
17 H. Mariton, Rapport d'information n° 1161, Commission des Finances, octobre 2008, p. 29
2424
OPTIMISATION DU REVENU GLOBALOPTIMISATION DU REVENU GLOBAL
Le revenue management est une technique d'optimisation de la rentabilité des entreprises de
services, qui a depuis longtemps fait ses preuves au sein du département hébergement des
établissements hôteliers. Mais qu'en est-il du revenu dégagé par les autres services d'un hôtel tels
que la restauration, les centres de bien-être ou les cours de golf ? Le yield management peut-il
maximiser le revenu de chacun de ces départements, et par conséquent le revenu global de
l'établissement ? Voici la question à laquelle nous tenterons de répondre dans ce second chapitre.
Comme le montre le tableau ci-dessous, les entreprises de services peuvent être définies
selon différentes combinaisons entre le contrôle de la capacité et la politique de prix, qui sont les
deux piliers du revenue management.
Tableau 2 : Typologie du Revenue Management18
PRIX
FIXES VARIABLES
DEMANDE
PRÉVISIBLE
Salles de cinémaThéâtresStades
Salles de spectacles
HôtelsTransport aérien et ferroviaire
Location de voituresBateaux de croisières
IMPRÉVISIBLERestaurants
SpasCours de golf
Services médicaux
Les entreprises traditionnellement associées au yield management comme les hôtels ou
l'industrie du transport aérien sont capables de faire varier leurs prix pour un même produit,
caractérisé par une demande spécifique et prévisible, ce qui n’est pas tout à fait le cas des
restaurants, des spas ou des parcours de golf, qui doivent faire face à une demande relativement
imprédictible. Cependant, nous allons démontrer dans ce second chapitre que l’application du
revenue management peut optimiser les profits des activités de restauration, de bien-être et de golf,
en combinant à la fois une gestion de la capacité permettant de prévoir la demande, et une politique
tarifaire discriminée en fonction des besoins et de la sensibilité au prix des différents segments de
clientèle qui auront été définis. Mais cela suppose une remise en cause totale du processus de
gestion de l’établissement, ce qui explique en partie la difficulté d’appliquer une telle politique dans
une entreprise de services qui n’est pas entièrement prédisposée à cela.18 G. Withiam, The 4-C stategy for Yield Management, CHR Reports, Cornell University School of Hotel
Administration, 2001
2525
I.I. LE YIELD MANAGEMENT APPLIQUÉ À LA RESTAURATION LE YIELD MANAGEMENT APPLIQUÉ À LA RESTAURATION
1. Présentation du restaurant revenue management
a) Conditions d'efficacité
Comme nous avons pu le voir précédemment, le yield management est efficace lorsqu'il est
utilisé pour optimiser le revenu des activités de services présentant les caractéristiques suivantes :
une capacité relativement fixe, un inventaire non stockable, une prestation pouvant être réservée,
une demande variable qui peut être segmentée, et un coût fixe élevé par rapport à un coût marginal
plutôt faible. Il est donc essentiel que l'activité de restauration rassemble toutes ces spécificités afin
d'accroître l'efficacité d'une politique de yield management.
Tout d'abord, la capacité d'un restaurant peut être mesurée de plusieurs façons, telles que le
nombre de places assises, la taille de la cuisine, le nombre d'articles proposés à la vente dans le
menu, le niveau de dotation en personnel... Mais quelle que soit la méthode de détermination de la
capacité du restaurant, elle est relativement fixe. Ensuite, l'activité de restauration étant à la fois une
activité de production et une activité de services, la définition de l'inventaire peut être interprétée de
différentes manières : soit il correspond au stock de denrées qui sont utilisées pour la conception des
plats (production), soit il correspond au temps pendant lequel une place assise est disponible
(service), ce qui dans ce cas coïnciderait avec le caractère non stockable de l'inventaire, satisfaisant
ainsi à la deuxième condition. En effet, lorsqu'une table n'est pas utilisée au moment de la
réalisation de la prestation de service, elle est définitivement perdue pour le prestataire. Autre
caractéristique permettant de rendre plus efficace une politique de yield management, le fait que la
prestation peut être réservée. Nous verrons par la suite que cette pratique est utilisée dans la plupart
des restaurants qui pratiquent le restaurant revenue management, ce qui permet au manager du
restaurant de mieux contrôler ses ventes. Concernant les spécificités de la demande, tout comme
dans d'autres activités de service, celle-ci est variable mais peut quand même être prévisible grâce à
des historiques de vente ou selon le moment de la réalisation de la prestation (midi, soir, jour de
semaine, week-end...). La demande peut également être segmentée, notamment en fonction de la
sensibilité des clients au prix, ce qui permet de protéger les clients à forte contribution en période de
pointe et à attirer une clientèle plus sensible au prix en période creuse. Enfin, tout comme dans
l'hôtellerie, les coûts associés à l'activité de restauration sont majoritairement fixes, ce qui oblige les
restaurateurs à avoir un volume de vente suffisant pour amortir ces coûts. En contrepartie, le fait
que les coûts variables sont relativement faibles permet aux restaurateurs d'avoir une politique de
prix flexible en réduisant certains tarifs en période creuse (happy hour).
2626
b) Mesurer la performance
Traditionnellement, les restaurateurs mesurent leur performance journalière grâce au ticket
moyen, au nombre de couverts et au prime cost (coût des marchandises consommées + coût du
personnel). Cependant, ces indicateurs ne prennent pas en compte le facteur « temps » qui est
déterminant dans la gestion des capacités, un des piliers du yield management. En effet, le problème
en restauration n'est pas tant le tarif apparent mais bien la différence de temps de consommation.
Ainsi, pour estimer le revenu généré par personne tout en évaluant la gestion de la capacité, un
indicateur plus précis a été introduit en 1998, le revenue per available seat-hour (RevPash). Tout
comme nous calculons le revenu par chambre disponible dans le secteur de l'hôtellerie, nous
pouvons calculer le revenu par siège disponible. Cependant, contrairement à l'hôtellerie où une
seule et même chambre peut être vendue pour une nuit, une table d'un restaurant peut être occupée
plusieurs fois par service. Il apparaît donc plus pertinent d'estimer la rentabilité de chaque siège
disponible par heure et non pas par jour ou par service.
Deux méthodes existent pour déterminer le RevPash. La méthode traditionnelle, définie par
S. E. Kimes en 199919 puis en 200420, calcule le RevPash en divisant le revenu de toutes les
transactions ouvertes au cours d'une heure par le nombre de places disponibles dans le restaurant.
Prenons l'exemple d'un restaurant ayant une capacité disponible de 120 sièges et ouvert de 11h à
14h pour le service du déjeuner. La durée moyenne d'un repas est de 60 minutes. Supposons que 20
groupes de 4 personnes arrivent en même temps et passent commande à 12h40, sachant que le ticket
moyen par personnes est de 10€. Le RevPash est alors égal à 0 entre 11h et 12h, à 6,67€ entre 12h et
13h (20 × 4 × 10 ÷ 120) et à 0 de 13h à 14h, ce qui donne un revenu par siège disponible total de
6,67€ pour la totalité du service. Nous pouvons constater dans cet exemple, intentionnellement
exagéré, que le fait d'enregistrer la totalité du revenu au moment où la table est ouverte dans le POS
(point of sale) ne permet pas de distribuer le revenu sur toutes les périodes pendant lesquelles les
tables sont occupées. Ainsi, M. Thompson a défini en 200821 une seconde méthode plus précise
pour calculer le RevPash. D'après lui, puisque les clients utilisent la capacité du restaurant pendant
la durée totale de leur repas, l'approche idéale serait d'enregistrer le revenu proportionnellement à la
durée du repas dans chacune des tranches horaires. Si nous reprenons l'exemple précédent, les
RevPash seraient égaux à 0 entre 11 et 12h, à 2,22€ entre 12h et 13h (6,67 × 20 min ÷ 60 min) et à
19 S. E. Kimes, Implementing Restaurant Revenue Management - A five step approach, CHR Reports, vol.40 n°3, Cornell University School of Hotel Administration, June 1999
20 S. E. Kimes, Restaurant Revenue Management, CHR Reports, vol.4 n°2, Cornell University School of Hotel Administration, February 2004
21 G. M. Thompson, H. Sohn, Accurately Estimating Time-Based Restaurant Revenues Using Revenue per Available Seat-Hour, CHR Reports, vol.8 n°9, Cornell University School of Hotel Administration, May 2008
2727
4,45€ entre 13h et 14h (6,67 × 40 min ÷ 60 min), pour un RevPash total de 6,67€ sur la totalité du
service. Au final, le RevPash total est le même, mais la précision obtenue grâce à la méthode de
M. Thompson permet aux managers de restaurant d'améliorer leurs décisions et d'accroître ainsi leur
revenu. En effet, avec la première méthode, un RevPash à 0 entre 13h et 14h laisserait penser qu'il
s'agit d'une période creuse, et qu'il serait peut être judicieux de proposer des tarifs promotionnels
pour attirer la clientèle. Mais la seconde méthode nous permet de constater que c'est précisément
sur cette tranche horaire que le RevPash est le plus élevé puisque le restaurant est occupé par 80
personnes pendant 40 minutes.
c) Les leviers stratégiques du restaurant revenue management
Le restaurant revenue management est « un processus par lequel un gestionnaire de
restaurant vise à maîtriser la disponibilité des sièges d'une salle commercialisés à différents tarifs,
afin d'optimiser la rentabilité d'exploitation »22. L'originalité du yield management réside dans le
caractère conjoint du contrôle de la capacité et de la tarification discriminée, qui sont les deux
leviers stratégiques du restaurant revenue management.
Dans la restauration, la gestion de la capacité est rendue complexe par la difficulté de
prévoir la durée d'utilisation du service, contrairement aux autres activités telles que l'hôtellerie et le
transport où le temps de consommation de la capacité allouée à chaque client est connue à l'avance
et précisée contractuellement (check-in, check-out, durée du trajet...). Ainsi, pour mettre en place
une stratégie efficace de management de la demande, il est essentiel de bien gérer la durée
d'utilisation du service, en plus de baser sa politique de prix sur la demande. Par ailleurs, il est
important de noter qu'une tarification discriminée ne sera acceptée par les consommateurs que si les
barrières tarifaires qui en découlent sont connues et comprises par les clients.
Pour illustrer le fait que le contrôle des quantités et les décisions de prix sont indissociables
et déterminants en restaurant revenue management, nous pouvons constater qu'ils permettent de
minimiser les risques liés aux activités de service. D'une part, les variations tarifaires réduisent les
risques de gâchis (demande inférieure à la capacité d'accueil) ou de gaspillage (demande supérieure
au nombre de sièges disponibles) puisqu'elles jouent sur la sensibilité au prix des consommateurs.
D'autre part, le fait de contrôler l'arrivée des clients au lieu d'appliquer la règle du premier arrivé
premier servi permet de réduire le risque de déchet en privilégiant la clientèle à forte contribution.
22 J-M Chapuis, Optimisation de la recette des restaurants : apports de la recherche opérationnelle et marketing en Restaurant Revenue Management, Centre de recherche en Finance, Architecture et Gouvernance des Organisations, Université de La Rochelle, Mai 2006
2828
2. Contrôler la capacité disponible
a) Établir des prévisions au plus juste
Afin de mieux manipuler la durée des repas, les modes de sélection des clients ainsi que la
tarification, il est indispensable de prévoir à l'avance le nombre de clients, l'heure à laquelle ils se
présenteront, et le temps d'utilisation du service relatif à chaque table occupée (en fonction du
nombre de personnes). Pour cela, les managers ont la possibilité d'observer statistiquement ces
données grâce au POS system (terminal de point de vente), et d'établir par la suite des historiques
qui permettront de réduire l'incertitude des arrivées en anticipant le timing et le volume des arrivées.
b) Mettre en place une politique de gestion des arrivées
Pour gérer au mieux les arrivées, les restaurateurs mettent généralement en place une
politique de réservation, bien que cette solution puisse entraîner des no-show (clients qui ne se
présentent pas), des late show (clients qui arrivent en retard) ou des short-show (clients qui
consomment peu). Les no-show peuvent être gérés en acceptant plus de réservations qu'il n'y a de
places disponibles, mais cette pratique est rarement utilisée dans la restauration car les walk-in
(clients qui ne réservent pas) sont plus nombreux dans ce secteur que dans d'autres activités
(hôtellerie, transport) et permettent de compenser les annulations. De même, il est rare de
sanctionner financièrement un client qui ne se présente pas en demandant un numéro de carte de
crédit lors de la réservation car il est difficile de connaître à l'avance la recette future de chaque
client. Le mieux à faire est de confirmer de nouveau la réservation par téléphone peu de temps avant
que la prestation ne se réalise. Concernant les late show, le restaurant peut prévoir de ne plus
garantir une table réservée à partir d'un certain retard pour réduire le risque de gaspillage.
La difficulté des restaurateurs qui acceptent les réservations consiste à déterminer la quantité
exacte de tables à attribuer à chaque tranche horaire et à évaluer le bon intervalle de temps entre
deux réservations. Pour déterminer la capacité à allouer aux clients qui réservent, il est important
d'estimer la contribution de ces clients par rapport à celle des clients qui ne réservent pas, de façon à
protéger la clientèle dont la contribution est la plus élevée. Quant à l'intervalle de temps entre deux
réservations, il dépendra du nombre de personnes par table réservée, car la durée du repas varie
selon que la table est occupée par deux ou six personnes.
Dans certains restaurants, les managers décident de prendre des réservations uniquement
pendant les heures creuses, de façon à inciter les clients qui accordent de l'importance à la sécurité
procurée par la réservation de se présenter en dehors des pics d'activité.
2929
c) Optimiser l'agencement des tables
Bien que la capacité de production des cuisines soit un élément majeur de la rentabilité d'un
restaurant, celle-ci est également déterminée par la capacité d'accueil de la salle. En effet, pour
optimiser le chiffre d'affaires, il importe de configurer les tables du restaurant de façon à accueillir
un maximum de clients au même moment. Mais pour optimiser l'agencement des tables, il est
nécessaire d'établir des prévisions de demande journalières au plus juste afin de faire correspondre
chaque jour le mix des tables disponibles du restaurant avec le mix des tablées attendues. En outre, il
est nécessaire de contrôler les arrivées des clients pour pouvoir les installer aux tables qui leur sont
réservées. Par exemple, si un restaurant appliquait la règle du premier arrivé premier assis, certaines
tables de 4 personnes seraient occupées par des groupes de deux ou trois personnes, ce qui
reviendrait à « gâcher » de la place et donc du revenu. La règle à appliquer correspond alors à celle
du premier arrivé premier assis à la bonne table.
Finalement, la configuration adéquate d'une salle de restaurant associée à un contrôle
efficace des arrivées permet de réduire les risques de gâchis et de pénurie, et d'optimiser ainsi le
revenu du restaurant. En effet, des recherches à ce sujet ont abouti à la conclusion qu'un mix de
tables pertinent pouvait accroître le potentiel de chiffre d'affaires de 35%23.
d) Gérer la durée d'utilisation du service
La gestion de la durée d'utilisation du service correspond au pilier de base du restaurant
revenue management. Elle concerne la totalité du temps passé à table par le client, depuis son
arrivée jusqu'à son départ. Ainsi, il s'agit d'évaluer et de gérer aussi bien la durée du repas que la
durée hors consommation, c'est-à-dire avant et après le repas, dans le but de les réduire afin
d'augmenter la rotation des tables. Pour cela, le service du personnel est déterminant, notamment
avant et après le repas, moments les plus opportuns en terme de gain de temps. De plus, ce sont
souvent les instants hors consommation que les clients souhaitent voir raccourcir. La première
amélioration que le personnel doit apporter pour réduire les phases du processus de service qui ne
concernent pas le temps du repas porte sur la communication et l'esprit d'équipe, particulièrement
entre la salle et la cuisine. Ensuite, le personnel doit être capable d'exercer une influence sur le
comportement des clients de manière à les faire libérer la table, par exemple en la débarrassant ou
en apportant l'addition. Enfin, le temps pendant lequel une table est inoccupée doit être réduit au
maximum, en débarrassant les tables avant le départ du client, en facilitant l'accès aux couverts pour
le dressage des tables, ou encore en embauchant un ou plusieurs commis débarrasseurs pour les
23 S. E. Kimes, Restaurant Revenue Management, CHR Reports, vol.4 n°2, Cornell University School of Hotel Administration, February 2004
3030
services dont la fréquentation est maximale. Tout cela démontre que le personnel joue un rôle
majeur dans l'amélioration du revenu, et que la volonté de réduire les coûts de personnel peut être
néfaste pour un restaurant. La difficulté pour le manager réside dans l'élaboration des plannings du
personnel, qui doivent coïncider avec les prévisions de demande, afin d'assurer une qualité et une
rapidité de service essentielles en restaurant revenue management. De même, il peut être judicieux
d'adapter les menus en fonction des prévisions, en prenant en compte par exemple le temps de
préparation des plats et leur durée de consommation.
L'objectif recherché en réduisant la durée d'utilisation du service est de pouvoir exercer un
contrôle sur la disponibilité des tables. Cela permettra par la suite de mieux gérer les réservations,
d'indiquer aux clients un temps d'attente plus précis lorsque ceux-ci n'ont pas réservé, et d'accroître
le turnover en rendant plus régulière la durée des repas. Cependant, tous les consommateurs n'ont
pas les mêmes attentes en termes de durée d'utilisation du service. Par exemple, certains clients
aiment avoir un contrôle total sur le déroulement de leur repas, et pourraient se sentir oppressés par
un serveur qui cherche à en réduire la durée. Une étude a été menée sur la durée souhaitée d'un
repas, et il apparaît que celle-ci varie beaucoup selon la nationalité de la personne interrogée. Ainsi,
il est important d'étudier les habitudes de consommation des clients selon leurs caractéristiques
personnelles, dans le but de satisfaire la clientèle, enjeu tout aussi fondamental que la maîtrise de la
capacité en revenue management.
3. Pratiquer une politique tarifaire discriminée
a) Discrimination tarifaire
Traditionnellement, les restaurateurs déterminent leurs tarifs en fonction du coût matière, qui
ne doit pas représenter plus de 30% du prix de vente. Cependant, ce mode de calcul n'est pas
judicieux puisque certains clients sont prêts à payer plus cher tandis que d'autres pourraient être
attirés par un tarif moins élevé. Une autre méthode de fixation des prix consiste à s'aligner sur les
prix de la concurrence, ce qui peut être favorable à l'entreprise s'ils répondent aux attentes des
consommateurs. Mais dans le cas contraire, ce choix ne serait pas approprié. Par conséquent, ces
deux méthodes n'étant pas optimales, le revenue management préconise la discrimination tarifaire,
c'est-à-dire une manipulation des prix qui n'est pas justifiée par une différence de coût de production
ou de distribution. Il s'agit en fait de faire varier les tarifs en fonction de la demande, en augmentant
les prix en période de forte activité et en les réduisant en période creuse afin d'attirer une clientèle
plus sensible aux prix, de façon à optimiser la recette d'exploitation quelques soient les conditions
du marché. Par exemple, la pratique des happy hours illustre parfaitement cette idée, puisque cela
3131
permet d'accroître le volume d'activité en dehors des pics de demande, et d'éviter ainsi les
gaspillages de ressources. Toutefois, les modifications de tarifs à la baisse peuvent entraîner des
effets néfastes. D'une part, cela peut diluer le revenu puisque certains clients habitués à payer plus
cher peuvent profiter de tarifs attractifs sans que cette perte ne soit compensée par une hausse de
volume d'activité significative. D'autre part, la perception qu'ont les consommateurs de la marque et
de la qualité des produits commercialisés peut se dégrader et engendrer de ce fait une baisse
d'activité. Il est donc essentiel de limiter ces pratiques et de proposer des prix attractifs qui restent
proches du tarif de référence pour éviter de déstabiliser la clientèle.
b) Les barrières tarifaires
Pour justifier la pratique de tarifs différenciés, il a fallu définir des barrières tarifaires qui,
pour être efficaces et acceptées par les consommateurs, doivent être logiques, transparentes et
conçues de façon à ne pas pouvoir être déviées. Elles permettent de segmenter la clientèle selon sa
sensibilité au prix, son comportement et ses besoins, ce qui, nous l'avons vu, est un des éléments
majeurs d'une politique de revenue management. Ainsi, les prix pourront être adaptés à chaque
segment de clientèle. Ces barrières sont présentées dans le tableau suivant, établi par S. Kimes et
complété par J-M. Chapuis.
Tableau 3 : Barrières tarifaires applicables en restauration24
Barrières physiques
Tarif saisonnier (été-hiver, midi-soir, happy hours)
Emplacement de la table dans la salle
Vue de la table sur l'extérieur
Services annexes (produits d'accueil...)
Barrières spécifiques à la personne
Affiliation à un groupe (carte corporate ou de fidélité...)
Récence des réservations
Canaux de distribution (téléphone, sites internet...)
Barrières spécifiques à la transaction
Réservations
Dépôts de garantie lors de la réservation
Nombre de clients par table
Menus spécifiques (cinéma, dégustation...)
Limite ou autorisation d'accès en période de forte activité
24 J-M Chapuis, Optimisation de la recette des restaurants : apports de la recherche opérationnelle et marketing en Restaurant Revenue Management, Centre de recherche en Finance, Architecture et Gouvernance des Organisations, Université de La Rochelle, Mai 2006
3232
c) La perception d'une politique de prix différenciés
Pour qu'ils puissent à leur tour en persuader les clients, les managers doivent être capables
de convaincre les employés que les barrières tarifaires bénéficient autant à l'entreprise qu'aux
clients. Par exemple, lorsqu'un consommateur paye un repas à un prix plus élevé que son prix de
référence, il doit être assuré que cela justifie un supplément de valeur procuré par le restaurateur.
D'après une étude menée par Kimes et Wirtz en 2002, les variations de prix justifiées par
l'heure du repas (midi/soir, happy hours), le jour du repas (semaine/week-end) ou encore la
localisation de la table dans la salle ne sont pas perçues négativement par les consommateurs.
Cependant, cette étude ne s'intéresse qu'aux barrières physiques, alors que ce sont souvent les
barrières tarifaires spécifiques à la personne ou à la transaction qui peuvent avoir un impact néfaste
sur la satisfaction de la clientèle. En effet, le principe de discrimination tarifaire à service égal qui
sous entend que tous les clients ne sont pas égaux pose manifestement des problèmes d'ordre moral
aux consommateurs. Toutefois, ce sentiment d'iniquité et d'injustice se fait beaucoup moins ressentir
chez les consommateurs bénéficiant de certains services qui leur auraient été inaccessibles sans les
pratiques de yield management.
4. Mettre un place un programme de restaurant revenue management
a) Les cinq étapes définies par S. Kimes
S. Kimes préconise de suivre cinq étapes25 pour mettre en place une politique efficace de
restaurant revenue management. En premier lieu, il s'agit d'établir une base de données sophistiquée
rassemblant des informations essentielles telles que la durée moyenne des repas, le modèle des
arrivées, les caractéristiques et préférences des différents segments de clientèle, ainsi que les
éléments permettant le calcul du RevPash. En effet, les restaurateurs connaissent généralement leur
prix moyen ainsi que leur prime cost (pourcentage associant le coût des marchandises consommées
et le coût de la main d’œuvre), mais ces indicateurs ne permettent pas d'évaluer concrètement la
performance de l'entreprise. Concernant les données chiffrées, les managers peuvent utiliser leur
POS system pour obtenir les renseignements souhaités. Quant aux données qualitatives sur les
attentes et les besoins des consommateurs, ils ont la possibilité d'effectuer des enquêtes auprès de
leur clientèle en leur soumettant un questionnaire par exemple. La deuxième étape consiste à
analyser les facteurs pouvant avoir un impact sur la durée du repas et la performance mesurée grâce
au RevPash. Cela étant fait, les managers pourront ainsi discerner les difficultés les plus importantes
25 S. E. Kimes, Implementing Restaurant Revenue Management - A five step approach, CHR Reports, vol.40 n°3, Cornell University School of Hotel Administration, June 1999
3333
rencontrées au cours du processus de service et en identifier les causes, dans le but de corriger les
problèmes en apportant des solutions tangibles. De ces recommandations découleront ainsi une
stratégie, combinant une gestion des arrivées avec un contrôle de la durée d'utilisation du service,
auxquels s'ajoute l'adaptation d'un mix des tables en fonction des prévisions de demande. Ensuite, il
importe d'estimer le retour sur investissement des différentes directives mises en place pour
connaître leur véritable efficacité et la nature de l'impact qu'elles ont pu avoir sur l'évolution du
RevPash. Ultérieurement à cela, les dirigeants doivent s'assurer que les managers et tous les
employés du restaurant comprennent le principe, le but et les pratiques du restaurant revenue
management, et identifient leur rôle dans la mise en œuvre de cette politique. Enfin, tout comme
n'importe quelle procédure de gestion, il est fondamental d'établir un système permettant d'apprécier
les améliorations apportées par l'instauration du restaurant revenue management dans l'entreprise.
L'objectif de cette cinquième et dernière étape étant d'apporter, le cas échéant, des corrections qui
permettront de perfectionner la politique actuelle.
b) Système de restaurant revenue management
En conclusion de cette section, voici un schéma de synthèse décrivant le système de
restaurant revenue management.
Figure 7 : Système de Restaurant Revenue Management
3434
Gérer la durée d'utilisation du service Pratiquer une politique de prix différenciée
Connaître la durée d'utilisationdu service : observations
statistiques de la durée des repas
Réduire l'incertitude desarrivées : mettre en place unepolitique de réservations et
optimiser l'agencement des tables
Réduire l'incertitude de la duréedes repas : raccourcir la durée hors
consommation, influencer lecomportement des clients, adapter
l'offre à la demande (menus) etminimiser le temps de redressage
des tables
Fixer les prix : prix basés sur lescoûts vs prix basés sur la demande
(discrimination tarifaire)
Déterminer des barrièrestarifaires : barrières physiques,spécifiques à la personnes etspécifiques à la transaction
RevPash=
Recette d'exploitation÷
Capacité disponible
5. Cas pratique : l'Hôtel Marriott Champs-Elysées
L'hôtel Marriott Champs-Elysées, classé 5 étoiles depuis juillet 2009, est composé sur 7
étages de 192 chambres dont 25 suites, d'un restaurant, d'un bar, d'une terrasse, de 9 salles de
réunion, d'une salle de fitness et d'un business center. Il accueille une clientèle haut de gamme,
affaire ou loisir, principalement étrangère (États-Unis, Moyen Orient).
Afin d'avoir une idée de la façon dont est gérée l'activité de restauration de cet hôtel, le
Directeur du département Food & Beverage m'a accordé un entretien le jeudi 12 juillet 2012.
Le Restaurant dispose d'une capacité d'accueil de 80 couverts, mais elle est très rarement
atteinte car la demande est inférieure à l'offre. Cela s'explique tout d'abord par l'emplacement du
restaurant dans l'hôtel, qui n'encourage pas la clientèle externe à s'y rendre. En effet, il est situé à
l'opposé de l'entrée principale de l'hôtel, ce qui d'une part ne favorise pas sa notoriété, et d'autre part
oblige les clients à traverser tout l'établissement hôtelier pour y accéder. Il s'agit par conséquent d'un
restaurant d'hôtel à proprement parler, qui réalise 60% de son chiffre d'affaires lors du petit
déjeuner, contrairement à d'autres établissements tels que le Café de la Paix, le Fouquet's ou encore
le Relais Plaza, qui sont tous les trois situés côté rue et qui accueillent donc une clientèle externe
importante. De plus, la clientèle étrangère loisir de l'hôtel déjeune rarement au restaurant puisqu'elle
préfère visiter Paris, et par conséquent prendre son repas au cours de son excursion. Ainsi, le service
du midi accueille plutôt une clientèle affaire locale. Enfin, il arrive régulièrement qu'une partie ou la
totalité du restaurant soit privatisée pour les banquets, ou que l'offre évolue pour s'adapter à la
clientèle interne à l'hôtel (barbecue, menu buffet le soir, chichas et musique d'ambiance orientale
pour attirer la clientèle Middle East), ce qui peut déstabiliser le consommateur externe, qui peut
avoir des difficultés à s'identifier au lieu.
Par conséquent, cela nous amène à nous poser la question suivante : une politique de
revenue management est-elle utile lorsque la demande n'est pas supérieure à l'offre ? C'est ce que
j'ai souhaité découvrir tout au long de cet entretien.
D'une part, le yield management préconise d'établir des prévisions afin d'anticiper le volume
des arrivées et d'adopter en conséquence une politique tarifaire adéquate. Toutefois, les historiques
de ventes du restaurant de l'hôtel Marriott Champs-Elysées ne permettent pas d'entrevoir une
tendance claire, puisque la demande varie en fonction du taux d'occupation de l'hôtel et des
segments de clientèle qui séjournent dans l'établissement. Par exemple, la clientèle Middle East
génère souvent plus de revenu que les autres segments de clientèle. Par conséquent, aucune
politique de gestion des arrivées n'a été mise en place, car les clients n'ont pas besoin de réserver
3535
une table pour s'assurer de sa disponibilité. De même, les prévisions sont très difficiles à établir sur
la terrasse Marriott Square car la fréquentation varie en fonction de la météo, et généralement,
l'ouverture ou la fermeture de la terrasse est décidée au jour le jour. Concernant l'agencement des
tables, la salle du restaurant est composée de plusieurs rangées de tables pour deux personnes mises
côte à côte, ce qui permet de facilement configurer les tables en fonction du nombre de personnes
par tablée. Quant à la durée d'utilisation du service, il n'est pas nécessaire de chercher à la réduire
étant donné le taux de captage du restaurant.
D'autre part, les tarifs du restaurant ne sont pas déterminés selon les pratiques du revenue
management, mais en fonction du coût de revient et des prix pratiqués par la concurrence. De plus,
il existe très peu de barrières tarifaires justifiant une politique de prix discriminée. En effet, les prix
ne varient pas en fonction de la saison, de l'emplacement de la table dans la salle, de la récence des
réservations ou encore du nombre de clients par table. Cependant, certains éléments peuvent être
considérés comme une pratique du revenue management, comme la mise en place d'un menu
« buffet » le soir, le fait que les clients affiliés au programme de fidélité « Marriott Rewards »
bénéficient du petit déjeuner offert, la présence du restaurant sur le site Internet La Fourchette qui
permet d'obtenir une réduction de 30%, l'augmentation des prix de 20% au delà de 23 heures sur la
terrasse, ou la pratique d'happy hours sur la terrasse lorsque la demande est faible.
Ainsi, lorsque j'ai demandé au Directeur F&B de l'hôtel Marriott Champs-Elysées si la mise
en place d'une politique de revenue management permettrait de mieux rentabiliser l'activité de
restauration, il m'a répondu que cela dépendait du taux de captage du restaurant. En effet, le
restaurant revenue management serait plus utile dans une grande brasserie parisienne dont la
demande est supérieure à l'offre, puisque dans ce cas, l'utilisation d'un logiciel de gestion de la
capacité tel qu'open table serait efficace, et dégagerait un bon retour sur investissement. De plus,
d'après lui, 80% de la fonction d'un directeur de la restauration concerne l'humain et le social
(gestion du personnel). Par conséquent, pour optimiser la gestion d'un restaurant, il serait plus
judicieux d'affecter les tâches spécifiques au revenue management à une personne spécialisée dans
ce domaine, et étant donné le coût en personnel que cela engendrerait, seul un restaurant dont la
demande est importante pourrait se le permettre.
3636
II.II. LE REVENUE MANAGEMENT APPLIQUÉ À D'AUTRES ACTIVITÉSLE REVENUE MANAGEMENT APPLIQUÉ À D'AUTRES ACTIVITÉS
1. Application du revenue management dans les spas
a) Le marché du bien-être en France
Au cours des vingt dernières années, le marché du bien être n'a cessé de se développer. En
effet, les consommateurs occidentaux sont de plus en plus nombreux à vouloir accéder au bien-être,
condition désormais nécessaire pour être heureux de nos jours. En effet, Abraham Maslow a
démontré que la recherche du bien-être était inévitable, puisqu'il s'agit d'un préalable indispensable
à l'accomplissement personnel, ultime besoin à satisfaire pour accéder au bonheur.
Le secteur économique du bien-être est devenu l'un des plus prospères en Europe et
notamment en France, avec 7% d'augmentation en 2009, en dépit d'un contexte économique
instable. Selon l'INSEE, il regroupe aujourd'hui 288 465 entreprises françaises qui rassemblent
542 846 salariés, et représente 37,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Autrement dit, en terme
de chiffre d'affaires, ce marché domine aussi bien l'industrie de la mode et du luxe (35 milliards
d'euros) que l'industrie aéronautique et spatiale (32,1 milliards d'euros). De plus, le nombre de
salariés composant le marché du bien-être est plus important que celui du secteur automobile
(320 000) et du secteur agroalimentaire (390 000).
Malgré la crise économique, la croissance continue de ce marché n'est pas prête de
s'interrompre, bien au contraire. La recherche du bien-être a été renforcée par une situation qui
engendre stress et angoisse chez les individus, reconnus comme ayant des conséquences néfastes
sur la santé par l'Organisation Mondiale de la Santé. Au début des années 2000, les Français
attachaient beaucoup d'importance à leur réussite financière, alors qu'à présent, ils sont plus motivés
par la quête du bien-être et d'une meilleure santé.
Un autre phénomène explique également l'essor de ce secteur économique en France : le
Papy Boom. Les baby boomers nés à la suite de la Seconde Guerre Mondiale sont aujourd'hui des
seniors, et représentent près d'un tiers des citoyens français. Cette population, généralement aisée
financièrement, est la première consommatrice sur le marché du bien-être car elle cherche à
conserver sa jeunesse et à prévenir les risques de maladies.
Le marché du bien-être a connu une évolution constante depuis son apparition, et il est clair
que ce secteur connaîtra un succès de plus en plus grand dans les années à venir, surtout avec le
développement des nouvelles technologies et des innovations.
3737
b) Le développement des spas en France
Face à l'explosion du marché du bien-être en France, les hôteliers ont pris conscience que le
fait de proposer une offre de spa était un avantage concurrentiel incontestable, et source de valeur
ajoutée pour leur établissement. Ils sont donc de plus en plus nombreux à investir dans la création
de centres de bien-être, quelque soit la taille et la gamme de leur hôtel. Dans certains cas, les
investissements peuvent atteindre des sommes astronomiques, comme à l'hôtel du Palais à Biarritz,
où les dépenses se sont élevées à 12 millions d'euros26.
La présence d'un spa dans les établissements hôteliers est devenue un critère de sélection
dans le choix des consommateurs pour leurs séjours touristiques, même s'ils ne sont pas certains de
le visiter. En effet, seulement 15% des résidents d'un hôtel fréquentent un centre de bien-être en
moyenne. Cependant, certains sont de véritables centres de profit, et, à défaut, bien qu'ils ne soient
pas directement rentables pour l'établissement, ils permettent d'accroître significativement le taux
d'occupation. D'après Olivier Aron, président de la société d'études Rosae dans le domaine de la
beauté et du parfum, « le spa fonctionne comme un générateur de trafic et un créateur d’images ».
Les spas permettent également de prolonger les séjours des clients, et s'ils en sont satisfaits, de les
faire venir plus souvent.
Toutefois, le fait que la demande soit aussi forte ne suffit pas à rentabiliser les spas, car leurs
coûts de fonctionnement sont colossaux. De plus, il faut avoir un savoir-faire irréprochable pour
répondre aux exigences de plus en plus grandes des consommateurs, ce qui implique d'importants
coûts de main d’œuvre. Enfin, les hôteliers n'ont pas le droit à l'erreur quant au mode de
management mis en place car les montants investis sont souvent considérables.
c) Le spa revenue management
Depuis la mise en place du revenue management dans les secteurs du transport et de
l'hôtellerie, de plus en plus d'activités de service adoptent ce mode de management, car son
efficacité est incontestable. En effet, la pratique du yield management a prouvé tout au long de ces
trente dernières années qu'il s'agissait d'un véritable outil permettant de maximiser le revenu des
entreprises de services disposant d'un inventaire périssable et d'une capacité fixe. Par conséquent,
cette technique semblerait être un atout manifeste permettant de rentabiliser les centres de bien-être,
puisque les caractéristiques requises pour s'assurer du succès d'une telle politique de gestion sont
toutes réunies : non seulement leur capacité d’accueil est fixe (cabines de soin) et leur inventaire est
périssable (durée des soins), mais il est également possible de segmenter la clientèle selon ses
26 A. Warlin, Hôtellerie de luxe - Le spa n’a pas fini de se réinventer, Le nouvel économiste, 2010
3838
besoins et ses préférences, de proposer des tarifs diversifiés en fonction du service offert, et de
prévoir la demande grâce à l'étude des données historiques et à la mise en place d'une politique de
réservation. Enfin, les charges fixes des spas sont très élevées (fonctionnement des cabines de soin,
charges de personnel...) par rapport à des coûts variables raisonnables (coût des produits utilisés
pendant les soins et des produits mis en vente...).
D'après Kimes, le succès du revenue management dépend souvent de la faculté à gérer
efficacement la capacité. Pour cela, il est essentiel de disposer d'un logiciel de gestion incorporant
les caractéristiques du yield management. Mais ce genre d'outil n'est pas aussi élaboré dans le
secteur des spas que dans celui de l'hôtellerie. En effet, les logiciels d'exploitation spécifiques au
revenue management dans les établissements hôteliers sont capables de mesurer la demande
actuelle et d'établir des prévisions de demande future en fonction du comportement des
consommateurs, des tarifs pratiqués par la concurrence, de la saisonnalité et d'autres facteurs
pouvant avoir une influence sur les ventes, afin de calculer de façon très précise le prix optimal à
proposer à la clientèle. En revanche, les logiciels mis en place pour l'industrie du spa ne permettent
pas une telle précision puisqu'ils n'intègrent pas les spécificités du yield management, bien qu'ils
permettent aux managers d'évaluer leur productivité et la santé financière de leur centre de bien-être
grâce à une base de données rassemblant un certain nombre d'informations (taux d'occupation,
fréquence des soins, impact des promotions...). Par conséquent, il est nécessaire d'investir dans un
système informatisé avancé incorporant les particularités du yield management afin d'optimiser
l'allocation des ressources et d'accroître davantage le revenu. Mais cela ne peut être véritablement
efficace que s'il est associé à un programme de formation du personnel, afin qu'il assimile au mieux
la « culture » du revenue management. En effet, toute l'équipe opérationnelle et managériale d'un
spa joue un rôle plus ou moins important dans la maximisation du revenu de l'établissement.
d) Le métier de spa revenue manager
Avant toute chose, le spa revenue manager doit être capable de comprendre le concept
général du yield management et de se familiariser avec ses différentes applications, dans le but
d'améliorer sa stratégie de prix initiale, afin non seulement d'augmenter la recette d'exploitation,
mais aussi et surtout de maximiser le profit de son centre. Pour cela, il doit contrôler et ajuster les
ventes ainsi que sa stratégie tarifaire en fonction de la demande, qu'il doit continuellement analyser.
Par exemple, il peut proposer des offres promotionnelles ou des « packages » en période de faible
demande, et augmenter les prix lorsque la demande est élevée. Mais cela suppose d'élaborer
rigoureusement des prévisions de vente, notamment en fonction des données passées, mais
également en gardant régulièrement un œil sur l'état des réservations. En effet, selon Jauncey
3939
(1995), la capacité à manipuler les prix et, de ce fait, à maximiser le revenu, dépend de la précision
des prévisions de la demande future.
Les fonctions qui incombent au spa revenue manager sont diverses et nombreuses :
superviser le travail de l'épique opérationnelle ; coordonner les différentes opérations du
département ; développer, contrôler et ajuster la politique tarifaire en organisant par exemple des
réunions hebdomadaires avec le directeur du spa et le directeur des opérations afin de confronter les
résultats de la semaine avec les décisions qui ont été prises au cours de la précédente réunion ;
analyser la compétitivité du centre de bien-être en identifiant les stratégies de ventes et les
tendances marketing actuelles, en étudiant les éléments susceptibles de stimuler la demande, et en
conservant une base de données historique permettant de comprendre les résultats passés ; informer
les managers des relations client (réception, réservation...) de toute nouveauté survenant dans le spa
(promotions, nouveaux produits, nouveaux soins...) ; surveiller les rapports de ventes pour évaluer
notamment l'efficacité des promotions ; etc...
e) Les éléments clés du spa revenue management
Quatre professionnels ont exposé plusieurs recommandations concernant la gestion d'un
centre de bien-être27 : Judy Singer, Présidente de la firme Health Fitness Dynamics spécialisée dans
le conseil en marketing et management des spas ; Bonnie Buckhiester, Présidente de Buckhiester
Management USA, entreprise consultante en revenue management pour les établissements
hôteliers ; Ben Campsey, directeur financier de l'hôtel The Umstead Hotel and Spa ; et Paul
Schmidt, directeur général de l'entreprise Living Energy Design.
En termes de politique tarifaire, il faut définir un prix qui permette à la fois de proposer une
expérience qui soit perçue comme une valeur ajoutée pour les clients, et d'atteindre les objectifs de
profits préalablement fixés. De plus, les prix doivent être abordables pour les clients, afin de les
encourager à venir fréquemment dans le spa et non pas de façon occasionnelle. Mais adopter une
approche de revenue management signifie également adhérer à la politique tarifaire dictée par le
marché, qui impose de combiner aussi bien les conditions du marché que les prix des concurrents,
les attentes des consommateurs ou le niveau de la demande pour déterminer le prix optimal. Il est
donc nécessaire de conduire des études de benchmark aussi sérieuses que possible, car les décisions
de prix seront moins difficiles à prendre lorsque les anomalies des prix des concurrents auront été
préalablement identifiées. En outre, les managers de spas doivent absolument connaître les marges
de chaque soin proposé à la clientèle dans le but de privilégier ceux qui sont les plus rentables en
27 J. Singer, Best practices : Revenue maximization for spas, Hotel Business Review, janvier 2010
4040
périodes de pointe. Parmi les quatre professionnels, Bonnie Buckhiester a préconisé de suivre cinq
règles d'or pour définir la politique tarifaire la plus juste pour le client et la plus profitable pour
l'entreprise : réaffirmer la valeur proposée aux clients (pourquoi tel soin ou tel produit vaut tel
prix ?), s'assurer que l'on a bien comparé deux offres similaires (les soins sont-ils identiques ?),
ajouter de la valeur avant d'augmenter les prix, mettre des barrières autour des offres
promotionnelles (temps limité, valable seulement en combinaison avec tel autre soin ou produit...),
et enfin, faire les bons calculs avant de baisser ou d'augmenter les prix (combien de soins
supplémentaires devrais-je vendre pour compenser la baisse tarifaire ?, la baisse de la fréquentation
engendrée par la hausse des prix sera-t-elle compensée par un meilleur chiffre d'affaires ?).
Concernant la gestion de la capacité dans le secteur des spas, il s'agit certainement de l'enjeu
le plus important et le plus contraignant. En effet, un intervalle de temps d'une heure ou deux entre
deux programmes de soins peut coûter cher au centre de bien-être en termes de main d’œuvre. Le
manager peut alors proposer des offres de dernière minute pour stimuler la demande pendant ces
périodes, mais la régularité des promotions peut avoir un impact néfaste pour l'entreprise, car il y a
un risque que le prix de référence pour le client ne corresponde plus au prix réel, mais au tarif
réduit, et de ce fait, que la demande apparaisse uniquement lors du discount. Par conséquent, il faut
élaborer une stratégie plus efficace permettant de lisser la fréquentation du spa sur la journée. Par
exemple, une façon de mieux gérer les écarts de temps entre deux soins serait de limiter la
disponibilité des services populaires lors des périodes de forte demande, et de les proposer aux
heures où la demande est la moins forte pour réduire les temps de repos. De plus, le manager peut
créer des règles de réservations qui encouragent la consommation de soins ayant une marge élevée à
des périodes de forte demande. Enfin, il peut être utile d'offrir à certains clients la possibilité de
recevoir une réduction tarifaire s'ils sont flexibles au niveau de l'heure à laquelle ils réservent leur
soin.
Autre élément à ne pas négliger pour optimiser le revenu d'un centre de bien-être, la
performance de l'équipe opérationnelle. D'une part, pour les inciter aux up-sells, les managers
peuvent verser des primes aux employés lorsqu'ils vendent un service plus cher à un client que celui
qu'ils désiraient au départ. Ils peuvent également définir des objectifs et récompenser les salariés
lorsqu'ils les ont atteints. Cela permet de motiver l'équipe et de l'inciter à accroître le chiffre
d'affaires. D'autre part, la productivité d'un salarié, bien que n'étant pas directement liée au revenu, a
un impact direct sur la rentabilité d'une opération. Elle est calculée en divisant le nombre de soins
exécuté par le nombre de soins disponibles, par heures et pour chaque salarié. Il est important de
s'assurer que certains salariés sont disponibles pour des clients qui se présentent sans réservation,
4141
mais il existe un niveau à partir duquel ce nombre peut devenir excessif et coûteux. Le rôle du
manager consiste alors à déterminer un planning de présence pertinent en fonction des prévisions de
ventes, pour optimiser la productivité de ses salariés tout en satisfaisant au mieux la clientèle.
Pour finir, il est fondamental de définir un objectif qui permette d'évaluer et de quantifier les
résultats de tout ce qui a été mis en place afin de régler avec précision ce qui fonctionne et
d'améliorer le mieux possible ce qui ne fonctionne pas. Il importe en outre d’exécuter sa politique
de gestion (marketing, prix, capacité, personnel) de façon à ce que l'ensemble de cette combinaison
soit meilleur que la somme des éléments évalués séparément.
Tout comme dans le secteur de l'hôtellerie ou celui de la restauration, un bon indicateur
existe en yield management pour évaluer l'efficacité de la politique instaurée dans un centre de
bien-être : le RevPath (revenue per average treatment hour). Il s'agit du revenu moyen dégagé par
traitement et par heure. Il s'obtient en multipliant le taux d'occupation des salles par le revenu
moyen des traitements, ou encore en divisant le revenu sur une période donnée (matinée, après-
midi, journée, semaine, mois...) par le nombre d'heures disponibles pour les traitements.
2. Application du revenue management dans l'industrie du golf
a) Caractéristiques de l'industrie du golf
Les caractéristiques qui font qu’une entreprise convient aux pratiques de yield management
sont communes à l’industrie du golf tout comme à l’industrie du transport aérien ou à l’industrie
hôtelière. En effet, les « tee times », ou heures de départ d’un parcours de golf, peuvent d’une part
être réservés, donc la demande est prévisible, et sont d’autre part considérés comme un inventaire
périssable puisque toute heure de départ non réservée par un client est définitivement perdue, tout
comme une chambre ou une place non occupée dans un hôtel ou un avion. De plus, les parcours de
golf ont une capacité limitée et des structures tarifaires différentes selon la durée du parcours, la
saison, le type de joueur… Enfin, les charges de fonctionnement d’un parcours de golf sont très
élevées, alors que le coût d’une réservation de tee time supplémentaire est assez négligeable
comparé au revenu que celle-ci peut rapporter. Toutefois, bien que le yield management semble
naturellement convenir à l’industrie du golf, il est plutôt rare de trouver un parcours de golf qui
utilise cette technique. La raison principale vient tout d’abord du manque de besoin exprimé dans ce
domaine. En effet, l’industrie du golf prospérait au cours des années quatre-vingt dix, et n’avait pas
besoin d’une technique aussi élaborée pour être profitable. Mais aujourd’hui, le contexte
économique est différent. Le surinvestissement dans de nouvelles propriétés qui fait suite au succès
des années quatre-vingt dix a connu une croissance bien supérieure à la croissance du nombre de
4242
joueurs de golf. Par conséquent, les parcours de golf rivalisent maintenant vigoureusement dans un
domaine où la demande n’est pas au rendez-vous, et cherchent activement de nouvelles façons de
rester compétitifs.
Actuellement, le principal obstacle à l’application du yield management dans l’industrie du
golf est le manque d’automatisation du processus de gestion, combiné à la perception que
l’automatisation est seulement utilisée pour les activités de niveau inférieur (low-cost) et ne
contribue pas substantiellement au résultat final. Tout comme dans l’industrie du transport aérien, le
yield management est conduit par le processus de réservation. Cependant, beaucoup de parcours de
golf utilisent encore des feuilles de réservation sur papier, et d’autres commencent à peine à
remplacer leur processus manuel par des systèmes informatisés automatiques, mais relativement
simples, à l’image de l’exemple ci-dessous.
D’autant plus que les rares systèmes de réservation informatisés spécialisés dans l’industrie
du golf n’intègrent pas les méthodes qui permettent de mettre en place les règles du yield
management dans le processus de réservation.
4343
b) Conditions d'application du yield management dans l'industrie du golf
Parmi les principaux composants du yield management, l’allocation des capacités associée à
une politique tarifaire discriminée est certainement ce qui est le plus appliqué dans l’industrie du
golf afin d’atteindre le plus complet et le plus profitable mix de réservations sur une journée. En
effet, différents prix et différentes disponibilités sont définis en fonction de la récence de la
réservation, de la taille du parcours (9 trous, 18 trous...), de la période de l’année, de l’heure de
départ du parcours, ou encore en fonction d’événements spéciaux ou de « packages ». Cependant,
tout comme les autres entreprises qui sont confrontées à la nouveauté du yield management,
l’industrie du golf doit faire face à un processus d’apprentissage dans la mise en place de cette
pratique. Tout d'abord, il faut être capable de prédire la demande en fonction des modèles
historiques de ventes. Ensuite, l'importance de la relation client ne doit pas être négligée. En effet,
dans le transport aérien, certains consommateurs continuent à ressentir de l'insatisfaction en raison
de la perception de la discrimination des prix. C'est pour cette raison que les propriétaires de
parcours de golf doivent mettre en œuvre une politique de revenue management de façon
progressive, sans changer radicalement la structure des prix, mais en prenant des décisions
pertinentes selon la capacité disponible. Pour finir, la complexité du yield management exige non
seulement une technologie spécialisée ainsi qu'un nouveau processus de gestion incluant des
mesures de performance, mais aussi un investissement dans l'enseignement et la formation du
personnel. Par conséquent, pour mettre en place avec succès les techniques de yield management,
les parcours de golf doivent être remis en cause à tous les niveaux, et non pas seulement dans le
domaine des nouvelles technologies de l'information.
c) OpenTee : un outil indispensable de gestion des parcours de golf
Jusqu'à présent, le seul logiciel qui livre une gestion opérationnelle du rendement à
l'industrie du golf est commercialisé par OpenCourse Solutions, un fournisseur de systèmes
automatisés basé à San Diego. Connu sous le nom d’OpenTee, ce système automatise toutes les
fonctions d’une feuille de réservation (tee sheet), intègre d'autres fonctionnalités de gestion, et
incorpore tous les outils du yield management nécessaires à la maximisation du revenu.
L’allocation des capacités
OpenTee permet au manager de contrôler la capacité allouée au segment de clientèle le moins
contributif au revenu. Ce contrôle est exécuté à deux niveaux.
Au niveau de la gestion : Le manager peut configurer le système pour définir à quel moment ouvrir
ou fermer à la vente une classe tarifaire en fonction de la saison, du jour, du temps, du type de
4444
joueur, de la taille du parcours… Ces variables fournissent au système une vaste gamme d'options,
permettant également de configurer la disponibilité et les tarifs en fonction de l'historique des
données, des prévisions de demande et des événements spéciaux.
Au niveau des réservations : Pendant le processus de réservation, une fonctionnalité automatisée de
réservation applique les règles configurées par le manager. Les agents de réservation ou les clients
sont guidés par une série d'écrans pour parvenir à un temps optimal associé à un certain tarif, basé
sur le type de joueur, ses préférences et le « package » de golf proposé. Les règles utilisées par cette
fonctionnalité peuvent être ajustées en temps réel pour répondre aux fluctuations inattendues de la
demande.
Le processus de décision
Le plus important dans le yield management, ce sont les décisions qui nécessitent d'évaluer la
demande et ses caractéristiques, et de gérer cette demande en utilisant le contrôle de la capacité et
les prix. Il y a trois catégories de décisions de gestion de la demande en yield management : des
décisions structurelles, des décisions de prix et des décisions liées à la quantité. OpenTee intervient
dans ces trois décisions comme le montre le tableau suivant.
Tableau 4 : Les différentes fonctions d'OpenTee28
Type de décision Décisions à prendre Fonctions d’OpenTee
Structurelle
Quel type de produit faut-il créer ?
Quel processus de vente faut-il utiliser ?
Quelle segmentation faut-il effectuer ?
Quelles conditions de vente faut-il instaurer ?
Quels « packages » faut-il proposer ?
Packages
Chaîne de distribution
Types de joueur
Pénalités pour no show
Gestion des groupes
Prix
Comment fixer les prix ?
Quand faut-il offrir des réductions ?
Quel prix faut-il définir pour quel segment ?
Comment faire évoluer les prix ?
Gestion des tarifs
Prévisions (réservations)
Association réservation/package
Saisons (dates, temps)
QuantitéQuand faut-il ouvrir/fermer les classestarifaires ?
Comment allouer la capacité au mieux ?
Configuration du revenuemanagement
Automatisation des réservations
28 http://www.acemicrotech.com/resources/OpenCourseYieldManagementWhitepaper.pdf
4545
Les autres outils du yield management
L'optimisation du volume : Elle est accomplie par le retrait des limites en termes d’accessibilité et
de disponibilité (la capacité n’est plus considérée comme fixe), l'utilisation de multiples circuits de
distribution (centrale de réservation, système de réservation de l’hôtel, sites internet…), et la
création de multiples « packages », ce qui donne l’impression que l’offre s’agrandit, et ce qui
permet par conséquent d’augmenter la demande.
L'optimisation des installations : Ce contrôle est conçu pour maximiser les ventes des joueurs ou
des groupes qui ont tendance à dépenser plus d’argent dans les différentes installations du cours de
golf (location des chariots, nourriture et boissons, marchandises au détail). L’optimisation des
installations est accomplie par des modules de veille économique qui rassemblent et rapportent des
données clients produites par le système OpenTee, le point de vente micros, le service commercial,
Internet... Ces données sont utilisées pour identifier les groupes et les individus qui contribuent le
plus au revenu global de la propriété. De plus, un organisateur d'événements de groupe est un
module qui permet de rassembler toutes les informations qui aident à optimiser le retour sur
investissement des groupes (la facturation, les contrats, des garanties de paiement et autres
informations concernant l'événement).
d) Impact financier du yield management dans l'industrie du golf
Le yield management peut fournir la force de levier pour augmenter deux sources de revenu
qui sont précisément sous-exploitées dans l'industrie de golf. Ces sources de revenu incluent :
Le volume : La faculté de contrôler la disponibilité a un impact positif sur la capacité. De plus, les
opérateurs peuvent s’associer avec des grossistes et d'autres entités externes, profitant ainsi des
nouveaux volumes de demande qui seraient autrement indisponibles.
Le prix unitaire : Un meilleur contrôle des « packages », des types de joueurs et des quotas tarifaires
permet aux opérateurs de manipuler le prix unitaire basé sur la demande de façon la plus
avantageuse possible. Combiné avec des coûts marginaux bas, la capacité à rapidement ajuster le
prix unitaire peut avoir un effet spectaculaire sur le revenu progressif.
Des études ont montré que l'application cohérente du yield management dans l'industrie du
golf peut augmenter le chiffre d'affaires de 3 à 7 pour cent29. En outre, des coûts bas marginaux
impliquent que le revenu brut connaît des gains en pourcentage semblables au chiffre d’affaires
réalisé.
29 http://www.acemicrotech.com/resources/OpenCourseYieldManagementWhitepaper.pdf
4646
e) Perception du yield management dans l'industrie du golf
La satisfaction des consommateurs est un paramètre essentiel pour les activités de services
puisqu'elle impacte directement le revenu. Par conséquent, une politique de revenue management ne
peut être véritablement efficace que si elle est perçue de façon positive par la clientèle. Ainsi, Sheryl
E. Kimes et Jochen Wirts ont réalisé une étude en 200230 qui permet de déterminer l'incidence que
peuvent avoir les différentes pratiques du revenue management sur la satisfaction des
consommateurs de golf. Ils se sont notamment intéressés au contrôle de la capacité (gestion des
arrivées et de la durée des parcours) et à la politique de prix basée sur la demande, les deux leviers
stratégiques du revenue management. Pour chaque question, les répondants avaient le choix entre 7
réponses, de 1-extrêmement acceptable à 7-Extrêmement inacceptable.
Concernant la politique tarifaire, les auteurs ont analysé quatre éléments distincts. Tout
d'abord, la demande étant plus élevée le week-end et plus précisément lors des premières heures du
matin, les parcours de golf pourraient sans doute augmenter leur revenu en proposant un tarif plus
élevé à cette période sans que cela n'ait de conséquence néfaste sur le volume des réservations. On a
donc exposé le scénario suivant à l'échantillon de deux façons différentes. D'une part : « Un
parcours de golf propose deux tarifs différents les samedi et dimanche matin. Si vous jouez avant
10h, le prix est 20% plus cher que si vous jouez entre 10h et midi. ». D'autre part : « Un parcours de
golf propose deux tarifs différents les samedi et dimanche matin. Si vous jouez entre 10h et midi, le
prix est 20% moins cher que si vous jouez avant 10h. ». En général, quel que soit le sens de la
phrase, les consommateurs considèrent la tarification selon le moment de la journée comme étant
relativement acceptable (3,41). En effet, la luminosité du parcours de golf due au lever du soleil
justifie que certains consommateurs soient prêts à payer plus cher pour jouer avant 10h. Cependant,
lorsque le prix est présenté en tant que discount (seconde phrase), les consommateurs considèrent
cette pratique comme étant bien plus acceptable (2,96) que lorsque le tarif est présenté comme un
supplément (première phrase). Ensuite, les chercheurs ont étudié l'impact d'une politique tarifaire
irrégulière sur la satisfaction des consommateurs en proposant le scénario suivant : « Un golfeur
joue sur le même parcours de golf à la même heure tous les samedi matin au mois d'octobre. Le prix
affiché est $60. Certaines semaines, le tarif est de $50 alors que d'autres semaine il est de $75. ».
D'après les répondants, cette pratique est extrêmement inacceptable (6,16), et ce, que le tarif
diminue ou augmente. Par conséquent, les managers de golf doivent s'efforcer de maintenir une
politique tarifaire constante. Autre élément relatif à la tarification, les tickets « deux parties pour le
prix d'une ». De nombreux parcours de golf utilisent ce programme afin de se composer une
30 S. E. Kimes, J Wirtz, Perceived Fairness of Revenue Management in the Golf Industry, Cornell University School of Hotel Administration, Center for Hospitality Research, January 2002
4747
clientèle pendant les heures creuses. Ainsi, le scénario suivant a été présenté aux consommateurs :
« Un parcours de golf participe au programme deux tickets pour le prix d'un. Les clients peuvent
utiliser les deux tickets à tout moment, hormis les samedi et dimanche matin. » L'échantillon estime
que cette pratique est extrêmement acceptable (1,8), ce qui encourage les managers de golf à mettre
en place ce type de programme. Enfin, certains parcours de golf appliquent des tarifs plus élevés
lorsque la réservation est faite en avance, alors que d'autre appliquent au contraire des tarifs plus
élevés pour des réservations de dernière minute. Mais quel que soit la pratique du parcours de golf,
les consommateurs considèrent la tarification selon la date de la réservation comme étant
relativement inacceptable (5,12). Toutefois, lorsqu'une remise est offerte aux consommateurs qui
réservent plus tôt, cette pratique est moins inacceptable (4,22).
Concernant la gestion de la capacité, deux pratiques ont été étudiées. D'une part, de
nombreux parcours de golf font face à des problèmes de no-show. Par conséquent, certains
managers ont mis en place des pénalités financières pour réduire leur manque à gagner. Deux
scénarios sont possibles. « Un parcours de golf demande une caution de $20 pour chaque
réservation. Si vous honorez votre réservation, la caution vous est rendue. Dans le cas contraire,
vous perdez la caution. ». « Un parcours de golf prévoit une pénalité de $20 par personne en cas de
no-show. Si vous honorez votre réservation, vous ne paierez aucune pénalité. Dans le cas contraire,
nous vous débiterons du montant de la pénalité ». Dans les deux cas, l'échantillon est plutôt
favorable à ce type de pratique (3,14 pour la caution lors de la réservation et 3,24 pour la pénalité de
no-show) car il trouve normal d'indemniser le parcours de golf en cas de perte de revenu causée par
leur absence. D'autre part, certains golfeurs préféreraient qu'un intervalle plus long soit mis en place
entre deux débuts de partie. Mais cela engendrerait un manque à gagner pour le parcours, à moins
que celui-ci n'augmente ses tarifs pour compenser la perte de volume. Le scénario suivant a donc
été exposé : « La plupart des parcours de golf prévoient un intervalle de 8 à 9 minutes entre deux
tee times. Un parcours de golf prévoie quant à lui un intervalle de 15 minutes, mais propose un tarif
30% plus cher que les autres parcours de golf. ». En moyenne, les répondants estiment que ce genre
de pratique est relativement acceptable (3,95). Ainsi, les parcours de golf ne risquent pas de perte de
volume s'ils appliquent une majoration tarifaire en cas d'intervalle plus long entre deux tee times.
En conclusion, les golfeurs considèrent le golf revenue management comme une pratique
relativement acceptable. Mais il importe de communiquer sur le caractère « gagnant-gagnant » de
cette pratique en précisant bien quelles sont les différentes barrières tarifaires et en insistant sur leur
logique, afin d'accroître la satisfaction des consommateurs, qui continuent à penser que la
discrimination tarifaire est injuste et donc inacceptable.
4848
III.III.LE REVENUE INTEGRITY OU TOTAL REVENUE MANAGEMENT LE REVENUE INTEGRITY OU TOTAL REVENUE MANAGEMENT
1. Philosophie du Revenue Integrity
Le revenue integrity correspond à une approche plus globale de l'optimisation du revenu de
l'entreprise, qui s'apparente à la recherche de performance commerciale sur le long terme. Ainsi, il
s'agit de combiner un niveau de chiffre d'affaires régulièrement élevé à une lutte efficace contre les
pertes de revenu, en s'assurant que le revenu réellement encaissé coïncide bien avec le revenu
normalement encaissable, et que le produit vendu à un instant donné a correctement été facturé,
encaissé au bon tarif et aux bonnes conditions tarifaires. Le revenue integrity permet donc de
récupérer du chiffre d'affaires en impliquant toutes les activités de l'entreprise dans une démarche
d'amélioration des processus, grâce à la mise en place de procédures claires et cohérentes, et à la
transmission des bonnes pratiques à suivre. En effet, « si, en s'inscrivant dans une démarche de
revenue integrity, les collaborateurs contribuent à fluidifier les process, à les standardiser, à les
documenter, s'ils s'assurent que de bout en bout, depuis la définition claire du concept jusqu'à son
implémentation, son paramétrage, sa facturation, la chaîne est cohérente et robuste, alors c'est
l'entreprise tout entière qui en bénéficiera. »31. En outre, il importe également d'identifier les
différentes failles qui peuvent survenir dans le dispositif commercial afin de les corriger. Ces
défaillances peuvent être des problèmes d'ordre technique (un tarif qui ne remonte pas sur
Internet...), des problèmes de procédure (des conditions tarifaires mal transmises par ceux qui les
paramètrent en système...), des problèmes de communication (manque de précision pour une offre
hôtelière...) ou encore des problèmes de comportement (non-respect des consignes de vente...).
Initialement, le yield management s'attachait à définir des segments de marché, à en évaluer
les potentialités et à fixer les tarifs des produits commercialisés. Aujourd'hui, le yield management
tend vers une approche plus générale intitulée total revenue management, qui s'intéresse non plus
seulement au revenu du produit principal (chambre d'hôtel), mais à la valeur totale qu'une
réservation peut générer. Par conséquent, il est nécessaire d'étudier la corrélation de chacun des
segments de clientèles avec leur contribution effective au profit global de l'entreprise, et d'analyser
leurs effets sur les différents départements de l'entité (hébergement, restauration, spa, golf...). Cela
permettra par la suite d'affiner la segmentation afin d'améliorer la politique commerciale. En effet,
alors que le yield manager était un technicien expert des historiques et de la tarification, le revenue
manager est devenu un véritable stratège qui préconise des options commerciales ayant pour
objectif d'optimiser l'ensemble du revenu de l'établissement.
31 P. Legohérel, E. Poutier, Revenue Management - Anticiper l'offre et la demande, Optimiser les prix, Dunod, 2011
4949
Pour terminer, l'analyse des coûts constitue aujourd'hui un levier d'optimisation de la
performance des activités de services, alors qu'elle était considérée comme négligeable dans
l'approche traditionnelle du revenue management. En effet, la part des coûts fixes est, nous l'avons
vu, considérable par rapport aux coûts variables qui sont relativement secondaires. Toutefois, cela
est exact lorsque l'on étudie la maximisation de la contribution d'un client au revenu d'une chambre
d'hôtel, mais l'impact des coûts peut être plus significatif si l'on considère l'ensemble des achats du
consommateur (produits de restauration, soins de spa...). Ainsi, le total revenue management, défini
par P. Legohérel et E. Poutier comme « la recherche de la maximisation du revenu par la
combinaison de ventes croisées de différentes prestations de service au sein d'un même centre de
profit », intègre la notion d'analyse des coûts, et notamment leur impact sur la contribution globale
de la clientèle au résultat de l'entreprise.
2. Mise en place du Total Revenue Management dans l'hôtellerie
Dans le secteur de l'hôtellerie, le revenue management traditionnel cherche à maximiser le
RevPar (revenue per available room), qui concerne uniquement le département hébergement.
Cependant, les groupes hôteliers se sont rendu compte qu'il était primordial de faire évoluer cette
approche, en étudiant tous les centres de profit de l'établissement afin d'optimiser la performance
globale. Cela passe par l'identification et l'analyse des différentes sources de revenu générées par les
clients (restaurant, bar, room service, spa, golf...), qui peuvent parfois présenter des opportunités
d'optimisation du profit supérieures à celles des chambres. Ainsi, les consommateurs ne seront plus
segmentés en fonction de leur contribution au chiffre d'affaires hébergement, mais par rapport à leur
valeur totale. Toutefois, cela nécessite de réaliser avec précision une base de données relationnelles,
qui enrichira l'analyse marketing de l'entreprise et facilitera la prise de décisions commerciales. En
effet, l'ensemble des informations recensées dans la base de données permettront à l'établissement
d'avoir une vision complète et actualisée du profil de ses clients.
L'indicateur à maximiser n'est alors plus le RevPar, mais le TotalRevPar, qui se réfère à
toutes les sources de revenu de la clientèle pour les mettre en corrélation avec le potentiel global de
l'ensemble de l'établissement, tous services confondus. Cela démontre l'importance d'établir un
profil complet et détaillé du client, afin d'affiner et donc d'optimiser la segmentation, qui doit se
faire dorénavant en fonction du niveau réel de contribution des consommateurs.
Évidemment, l'optimisation du revenu d'un établissement hôtelier passe toujours par la mise
en pratique des techniques de yield management, mais il convient également d'intégrer la totalité
des sources qui contribuent à générer du revenu supplémentaire. Pour cela, le total revenue
management préconise d'une part d'analyser l'ensemble des dépenses des clients sur un même site
5050
pour identifier leur contribution réelle et mieux les sélectionner. Par exemple, la démarche d'un
responsable de parcours de golf qui cherche à maximiser la vente des green-fee (prix d'accès au
parcours) s’avérerait inefficace s'il ne tient pas compte des dépenses annexes des golfeurs (location
de voiturettes et de matériel, dépenses au bar et au restaurant...). En effet, ce n'est pas
nécessairement le golfeur qui paye le green-fee le plus cher qui est le plus rentable pour le parcours
de golf. D'autre part, il ne suffit pas d'étudier minutieusement les dépenses des clients pour
optimiser le chiffre d'affaires, il faut les provoquer ! Et cette incitation peut aussi bien concerner des
prestations de services secondaires qui complètent l'offre principale, que certains aspects de la
prestation principale qui étaient auparavant inclus dans l'offre globale (ex : le parking d'un hôtel).
Pour terminer, la mise en place d'une politique de revenue integrity dans un établissement
hôtelier peut contribuer à résoudre les nombreuses anomalies qui pourraient survenir au cours du
processus de vente. Par exemple, les tarifs « seniors » sont-ils réellement utilisés par des seniors ?
Les annulations ou modifications de séjours sont-elles facturées selon les règles en vigueur ? Les
remises manuelles appliquées sur certaines réservations sont-elles contrôlées ? Les tarifs en système
sont-ils correctement paramétrés ? Mais attention à ne pas confondre la philosophie du revenue
integrity avec un dispositif strictement répressif. En effet, l'objectif consiste à faire appliquer au
mieux les conditions de vente, et non pas à les durcir. Pour cela, tous les indicateurs permettant de
distinguer les leviers d'amélioration les plus pertinents doivent être identifiés, et transmis à
l'ensemble du personnel concerné.
CONCLUSIONCONCLUSION
Ce second chapitre nous a permis de démontrer les vertus du revenue management dans un
certain nombre d'activités de services, qui n'étaient pourtant pas prédisposées à mettre en place une
telle pratique. En effet, nous avons pu constater que le revenue management permettait d'améliorer,
voire d'optimiser la rentabilité des activités de services qui adoptaient cette méthode. Cependant, la
recherche insatiable de la performance financière n'a-t-elle pas des conséquences néfastes pour les
entreprises de services ? Est-ce réellement le mode de gestion qui convient le mieux aux activités de
loisirs telles que les spas ou les golfs ? Quelles sont les limites de cette « recette miracle » qui
promet aux activités de services de dégager une meilleure profitabilité ? Et enfin, qu'en est-il de
l'avenir du revenue management et de ses conséquences sur le long terme ?
Ce sont toutes ces interrogations qui définirons le fil conducteur de la dernière partie de ce
devoir, afin de reconsidérer l'efficacité du revenue management, et de trouver la réponse la plus
juste à notre problématique.
5151
LIMITES ET AVENIR DU REVENUE MANAGEMENTLIMITES ET AVENIR DU REVENUE MANAGEMENT
I.I. LES LIMITES DU REVENUE MANAGEMENTLES LIMITES DU REVENUE MANAGEMENT
1. Limites et recommandations générales du revenue management
Lorsqu'une entreprise de services, qui par définition est fondamentalement orientée vers le
client, implémente un système de revenue management, il arrive qu'un certain nombre de conflits
apparaissent entre les consommateurs et l'établissement, ce qui peut engendrer de graves
conséquences pour l'entreprise sur le long terme, et mettre ainsi en péril sa performance.
D'une part, la complexité des tarifs associée aux pratiques de revenue management oblige
les consommateurs à traiter une quantité considérable d'informations, liée à de nombreuses offres de
services différentes, qui sont elles-mêmes proposées à de multiples tarifs. Par conséquent, le
sentiment d'incompréhension dû à l'illisibilité des tarifs complique la décision d'achat du client, qui
manque de visibilité quant à la valeur du service offert. De plus, l'absence de transparence tarifaire
renforce le sentiment d'injustice des consommateurs, qui considèrent que les variations incessantes
de prix sont rarement justifiées. Par exemple, un client peut comprendre qu'un même service puisse
être vendu à un tarif différent selon la date de la réservation ou le moment de la réalisation de la
prestation, mais ils n'acceptent pas qu'un même service offert au même moment soit vendu à des
prix différents. De ce fait, les pratiques tarifaires du revenue management sont perçues comme
immorales par les clients, qui dénoncent un réel manque d'éthique et d'équité de la part des
entreprises de services. En effet, le principe même de discrimination tarifaire selon les
caractéristiques des clients est largement dénoncé et condamné par de nombreux consommateurs. Et
cette révolte n'apparaît pas seulement chez les consommateurs qui payent le plein tarif, puisque
ceux qui bénéficient de prix avantageux grâce au revenue management peuvent éprouver un
sentiment de culpabilité. Finalement, ne s'agit-il pas de faire payer non pas le prix le plus juste mais
le plus élevé aux clients ? Par exemple, sur Internet, nous pouvons penser que les tarifs sont les
mêmes pour tous les utilisateurs, du fait de leur anonymat et de leur capacité à comparer facilement
les tarifs. Mais de nouveaux logiciels sont apparus, permettant aux vendeurs de détecter les
consommateurs les plus aisés32. En effet, en navigant sur les sites web, ces derniers laissent
échapper une grande quantité d'informations les concernant. Les cookies révèlent alors quels sont
les autres sites web qu'ils ont visités, et permettent de deviner quels sont leur âge, leur sexe ou
32 The Economist, Online prices : CaveatEmptor.com, June 30th 2012The Economist, Personalising online prices : How deep are your pockets ?, June 30th 2012
5252
encore leur catégorie de revenus. De plus, leur adresse internet peut souvent être mise en relation
avec leur adresse postale, ce qui laisse supposer que leurs revenus sont plus ou moins importants
selon le quartier dans lequel ils habitent. En outre, certains distributeurs, tels que Orbitz, une agence
de voyages sur internet, n'hésitent pas à faire varier leurs prix en fonction du type d'ordinateur
utilisé (Mac ou PC), sachant qu'un utilisateur de Mac est en moyenne plus fortuné qu'un utilisateur
de PC. Enfin, un simple clic de souris peut faire varier les prix sur Internet. Par exemple, si un
consommateur passe trop rapidement de la page principale d'un site marchand à un lien concernant
un produit ou un service, le vendeur en conclut que le consommateur est déjà prêt à acheter le
produit ou service sélectionné. Ainsi, pourquoi lui offrir un tarif promotionnel ? Toutes ces astuces
permises par l'apparition de nouveaux logiciels participent au développement de la discrimination
tarifaire sur Internet, basée uniquement sur les hypothèses émises par les distributeurs concernant
les caractéristiques des consommateurs. Et ce phénomène est d'autant plus vrai pour des produits ou
services dont la politique tarifaire s'est complexifiée, comme par exemple la vente de chambres
d'hôtel, car les consommateurs n'ont aucun moyen de vérifier si le prix qu'ils payent est juste ou pas.
D'autre part, au delà de la politique tarifaire immorale du revenue management, d'autres
pratiques sont tout aussi critiquables et peuvent nuire à la performance globale de l'entreprise. Par
exemple, pour compenser l'effet de no-show, de nombreux établissements pratiquent le surbooking,
et certains clients qui avaient réservé une prestation peuvent se voir refuser l'accès au service. Ceci
implique donc une qualité attendue par le client très largement inférieure à la qualité offerte par
l'entreprise. Mais la question que nous pouvons nous poser est la suivante : l'impact financier du no-
show est-il réellement inférieur à l'impact du relogement d'un client ? En effet, en plus d'une
compensation financière offerte au client, le sentiment de frustration et l'insatisfaction de ce dernier
peuvent avoir un effet d'autant plus néfaste sur l'entreprise, notamment à cause d'un bouche-à-
oreilles qui se diffuse bien plus rapidement en cas d'expérience négative, et qui peut provoquer un
manque de confiance et donc de fidélité chez les consommateurs à l'égard de l'établissement. De
plus, le revenue management préconise de privilégier les clients les plus contributifs au revenu,
alors que ces derniers ne sont pas nécessairement les plus fidèles à l'entreprise. Par conséquent, le
fait de refuser l'accès au service à la clientèle fidèle en période de forte demande peut occasionner
une baisse de leur consommation en période creuse, voire la perte définitive de ses clients pour
l'entreprise, alors que l'effort fourni pour les fidéliser a été coûteux. Ainsi, le gain financier que
pense obtenir une entreprise qui pratique aveuglement le revenue management n'est qu'illusoire,
puisque l'absence d'orientation client ne peut qu'impacter de façon négative une activité de services,
aussi bien en termes financier qu'au niveau de sa notoriété.
5353
Afin de pallier aux différents problèmes que peut causer une politique de revenue
management mal employée, différents auteurs33 ont établi un certain nombre de recommandations
qui ont pour principal objectif d'améliorer la satisfaction de la clientèle et de conserver sa fidélité à
l'entreprise, tout en continuant à bénéficier des avantages financiers procurés par cette technique.
Tout d'abord, les nombreuses offres proposées par l'entreprise de services doivent être
clairement distinguées afin que le consommateur accepte plus facilement les différences de tarifs. Il
est important de relier de façon précise le prix payé par le client et la valeur qu'il reçoit en
contrepartie. Cela passe notamment par une communication efficace sur les conditions de vente et
les raisons qui explique la variété tarifaire d'un seul et même service. Des barrières tarifaires
tangibles doivent donc être mises en place afin qu'elles soient approuvées par les clients. En effet,
ces barrières tarifaires permettent d'influencer la décision d'achat des consommateurs, qui se
segmentent eux-mêmes en fonction de leur sensibilité au prix, de leurs attentes et de leurs besoins.
Elles sont donc fondamentales pour les activités de services, et doivent par conséquent être
clairement définies et distinctement identifiables. La vente de packages peut également être un
moyen efficace pour atténuer le sentiment d'iniquité du consommateur, puisque cela permet
d'empêcher les comparaisons tarifaires faites par les clients en fonction de leurs expériences
passées, et de leur perception à la fois du prix de référence et de la transaction de référence. De plus,
lorsque des conditions de vente ou des restrictions sont imposées pour un segment de clientèle – et
donc une classe tarifaire – l'entreprise aura plus de facilité à les faire accepter à la clientèle
concernée si elle présente son offre de façon à refléter un gain plutôt qu'une perte pour le
consommateur. Ensuite, tous les segments de clientèle ne sont pas nécessairement intéressés par des
réductions tarifaires. L'entreprise doit donc diversifier son offre afin de proposer des avantages non
plus seulement financiers, mais temporels (réduction du temps d'attente), fonctionnels (disponibilité
d'un site Web), émotionnels (expérience plus agréable) ou encore sociaux (entente et sympathie
entre la clientèle et le personnel de l'établissement). Enfin, les pratiques du revenue management
sont souvent incomprises par les consommateurs, ce qui explique en partie leur rejet face à cette
technique. Par conséquent, il importe de former les responsables et le personnel concernés par le
revenue management afin de les convaincre de l'équité de cette pratique, et pour qu'ils puissent par
la suite transmettre cette certitude aux clients, en les informant des avantages du revenue
management, dans le but de leur donner confiance, et donc de les fidéliser. En effet, les
consommateurs considèrent que la valeur de l'entreprise doit être égale à la leur. Il est donc
33 N. Selmi, Le Revenue Management : De la gestion optimisée des revenus à la gestion des conflits, 2ème Journée du Marketing IRIS “La relation client dans les activités de services”, Lyon, Mars 2007J. Wirtz, S. E. Kimes, J. Theng, P. Patterson, Revenue Management : Resolving potential customer conflicts, Cornell University School of Hotel Administration, Center for Hospitality Research, September 2002
5454
indispensable de leur communiquer les bienfaits d'une telle pratique, afin qu'il perçoivent le revenue
management comme une situation gagnant-gagnant.
2. Limites du revenue management dans les activités de loisirs (spa, golf)
Nous avons vu dans le chapitre précédent que le revenue management pouvait être mis en
place dans les spas ou les parcours de golf. Toutefois, cette technique est-elle réellement pertinente
pour ce type d'activité ?
Les deux leviers du revenue management étant une gestion des capacités associée à une
politique de prix basée sur la demande, cette pratique nécessite une segmentation très fine de la
clientèle pour déterminer un certain nombre de classes tarifaires, et ceci n'est pas toujours évident à
effectuer. En effet, les principaux segments de clientèles des secteurs aérien et de l'hôtellerie, tels
que la classe affaire vs loisir ou l'individuel vs les groupes, sont difficilement identifiables dans les
activités de loisirs (spa, golf). Par conséquent, il est difficile de faire varier les tarifs en fonction de
la sensibilité au prix des clients ou de toute autre caractéristique des consommateurs. De plus, la
variation tarifaire qui peut exister pour une même chambre d'hôtel ne peut pas connaître de tels
écarts et être aussi régulière dans les activités de loisirs. En effet, la clientèle d'un spa n'accepterait
pas de payer un même soin plus cher ou moins cher selon la date ou l'heure de la prestation, tout
comme un golfeur refuserait de payer un prix différent pour un 18 trous la semaine suivante. Cela
s'explique certainement par le caractère « obligatoire » qu'il peut y avoir à prendre l'avion ou à
réserver une chambre d'hôtel – ce qui restreint la disponibilité des clients et donc leur capacité à
modifier leurs dates de réservation – contrairement aux activités de loisirs qui par définition
permettent une liberté de choix quant à la date ou l'heure de la prestation choisie.
Concernant les parcours de golfs, les éléments qui peuvent être rattachés à des pratiques de
yield management sont, par exemple, le fait de proposer des tarifs plus élevés en période de forte
demande (premier et dernier tee time lorsque le soleil se lève ou se couche), ou encore de composer
des packages (golf + repas ou golf + nuit d'hôtel), qui sont souvent plus intéressants financièrement
aux yeux des clients. Mais cela ne constitue pas en soi une politique de revenue management.
Certes, la mise en place d'un logiciel OpenTee peut aider le manager à améliorer l'allocation de sa
capacité, mais ce qui prévaut reste évidemment la relation client, qui permet d'offrir un service
personnalisé à la clientèle, et qui génère satisfaction et fidélisation chez le consommateur.
De même, dans les centres de bien-être, il est difficile de mettre en place une politique
tarifaire diversifiée. Certes, il est possible de proposer des discounts en période creuse, mais cela
peut désorienter le consommateur sur sa perception du tarif de référence. Le plus intéressant à
5555
mettre en place reste l'upsell. Et cela implique que les salariés soient suffisamment bien formés pour
pouvoir vendre des produits aux clients qui ne sont venus que pour un soin. L'indicateur de
performance le plus pertinent à utilisé n'est donc pas le RevPath (revenue per available treatment
hour), mais le profit par heure généré par chacun des salariés. En effet, leur productivité est la clé de
la réussite du spa.
II.II. L'AVENIR DU REVENUE MANAGEMENTL'AVENIR DU REVENUE MANAGEMENT
1. Les attentes futures des professionnels du revenue management
S. E. Kimes a réalisé deux études sur l'avenir du revenue management et les attentes qu'ont
les professionnels de son évolution34.
Les répondants considèrent que les techniques du revenue management les plus développées
sont la politique de réservation, la prévision de la demande et la détermination des prix, alors que
l'optimisation nécessite encore d'être améliorée. Cela est certainement lié au fait que la part des
ressources humaines, à savoir l'embauche et la formation des revenue managers, ainsi que la
définition d'un plan de carrière approprié, est trop souvent négligée par les entreprises, alors que
l'outil principal du revenue management est le revenue manager ! Ainsi, l'un des enjeux identifiés
par les professionnels concerne l'amélioration de la politique RH, afin d'accroître la qualification
des revenue managers et de détecter de nouveaux talents. En outre, d'autres enjeux ont été exposés,
à commencer par l'élargissement de l'application du revenue management à d'autres activités de
services « non traditionnelles », telles que la restauration, les spas ou les golfs. En effet, le revenue
management doit devenir de plus en plus stratégique afin d'inclure toutes les sources de revenu de
l'établissement dans l'objectif de maximisation du profit. Pour cela, tous les aspects du management
de l'entreprise doivent être impliqués : le marketing, la finance, l'opérationnel... Les autres enjeux
concernent la politique de distribution, qui doit s'adapter aux nouveaux outils des consommateurs
(Internet, smartphone...), ainsi que le perfectionnement de la technologie, indispensable pour mettre
en place des ordinateurs et des logiciels plus sophistiqués, afin d'optimiser non plus le revenu
hébergement mais le revenu global de l'entreprise. En effet, cela permettra au revenue manager de
jouer un rôle non plus seulement tactique et analytique, mais également stratégique. Par conséquent,
l'indicateur de performance privilégié ne sera plus le RevPar, mais le GOPPAR (gross operating
profit per available room) ou le TotRevPar (Total RevPar).
34 S. E. Kimes, Hotel Revenue Management - Today and Tomorrow, Cornell University School of Hotel Administration, Center for Hospitality Research, August 2008S. E. Kimes, The Future of Hotel Revenue Management, CHR Reports, vol.10 n°14, Cornell University School of Hotel Administration, October 2010
5656
2. Intégration du CRM dans la politique de revenue management d'un hôtel
La propagation rapide du revenue management a considérablement modifié le
comportement des consommateurs, qui ont perdu de vue le tarif de référence associé à une
transaction de référence, et sont dorénavant à la recherche constante de tarifs avantageux et de
« bonnes affaires ». Cela s'explique par l'émergence de pratiques telles que les ventes flash sur
Internet, utilisées depuis de nombreuses années en grande distribution. La vente flash est une offre
plus ou moins promotionnelle faite sur une durée limitée (de quelques heures à quelques jours). Elle
vise à créer un sentiment d’urgence chez le consommateur, généralement favorisé par l’affichage
d’un compte à rebours sur la validité de l’offre. Certains distributeurs vont même jusqu'à proposer
une forte réduction uniquement si un certain nombre de clients achète le même produit ou service
en un temps limité (ex : réduction de 80% sur tel produit ou service si 100 personnes l'achètent
avant telle date). On retrouve également des ventes aux enchères sur Internet d'un produit ou d'un
service, toujours sur une durée limitée. Tout cela participe à rendre la clientèle de plus en plus
volatile, ce qui menace sa fidélisation dans les entreprises de services, qui reste pourtant un élément
déterminant de la pérennité de leur succès.
Ainsi, nous pouvons nous demander quelle sera l'évolution du CRM (customer relationship
management) dans les activités de services, parallèlement à celle du revenue management. Ces deux
pratiques sont-elles réellement inconciliables ? D'après B. M. Noone, S. E. Kimes et L. M.
Renaghan, la réponse est non. Bien au contraire, ces chercheurs considèrent que le meilleur moyen
d'optimiser le revenu d'une activité de services est d'intégrer dans la politique de revenue
management une démarche de CRM35.
L'objectif du customer relationship management (gestion de la relation client) consiste à
fidéliser la clientèle d'une entreprise afin d'accroître sa profitabilité à long terme. Et le préalable à la
fidélisation est évidemment la satisfaction des clients, ce qui implique d'une part d'adapter la
prestation de service aux besoins et aux préférences des consommateurs, et d'autre part de
développer une communication personnalisée avec chaque client. Pour cela, il est indispensable de
collecter un maximum d'informations sur les consommateurs, et de les entretenir au fur et à mesure
de la relation, grâce à une infrastructure technologique appropriée, bien que complexe à mettre en
place. En effet, le meilleur moyen de personnaliser le service offert et de préserver une relation
durable avec chaque client serait d'intégrer un système informatique complet, commun à l'ensemble
des services de l'établissement, voire à tous les établissements hôteliers d'un même groupe et à tous 35 B. M. Noone, S. E. Kimes, L. M. Renaghan, Integrating Customer Relationship Management and Revenue
Management : A hotel perspective, Cornell University School of Hotel Administration, Center for Hospitality Research, February 2003
5757
les canaux de distribution, afin d'unifier le profil de chaque consommateur et de répondre au mieux
à ses attentes. Ainsi, cela permettrait à l'entreprise de segmenter la clientèle non plus en fonction de
sa sensibilité au prix comme le fait le revenue management, mais en fonction de la valeur de sa
« durée de vie » dans l'établissement. Généralement, les clients les plus fidèles à l'entreprise sont
aussi les plus rentables, car ils coûtent moins cher à l'entreprise (qui n'a pas besoin de les
démarcher), ils sont souvent plus enclins à dépenser de l'argent, et ils participent à la promotion de
l'hôtel par un bouche-à-oreilles élogieux. Par conséquent, même si la contribution nette des
consommateurs réguliers sur un séjour est inférieure à celle d'une clientèle profitable mais volatile,
il est plus intéressant de se focaliser sur la clientèle fidèle, puisque c'est elle qui impactera le mieux
la rentabilité de l'établissement sur le long terme.
En 2002, Reinartz et Kumar36 ont proposé une segmentation de clientèle qui permet de
prendre en compte la valeur de la durée de vie (lifetime value) des consommateurs dans
l'établissement hôtelier pour le calcul de leur profitabilité :
➢ the strangers : ils ont une faible contribution et une durée de vie très courte dans l'entreprise,
ce qui les défini comme étant les moins rentables pour l'hôtel
➢ the barnacles : leur contribution est relativement faible mais ils sont plutôt fidèles à
l'établissement
➢ the butterflies : ce segment de clientèle est très volatile, mais leur contribution est
importante
➢ the true friends : il s'agit du meilleur profil de clientèle pour l'hôtel, qui garanti le meilleur
retour sur investissement
Pour chacun de ces segments, B. M. Noone, S. E. Kimes et L. M. Renaghan ont défini une stratégie
de revenue management à employer :
✗ traditional revenue management : cette approche traditionnelle du revenue management est
centrée sur le contrôle de la capacité et la définition d'une politique tarifaire basée sur la
demande, en fonction des prévisions effectuées à partir d'historiques de vente ; cette
méthode ne prend pas en considération les attentes et les besoins de la clientèle, mais plutôt
sa sensibilité au prix ; elle convient donc parfaitement aux segments de clientèle strangers et
barnacles, qui ne sont pas vraiment rentables et qui contribuent à remplir les classes
tarifaires basses.
36 W. J. Reinartz, V. Kumar, The Mismanagement of Customer Loyalty, Harvard Business Review, 2002
5858
✗ lifetime value-based pricing : cette approche est basée sur l'importance de la durée de vie du
consommateur dans l'entreprise ; plutôt que de déterminer le prix en fonction de la demande
et de la sensibilité au prix des clients comme le fait l'approche traditionnelle du revenue
management, le prix défini pour chaque consommateur varie en fonction de sa durée de vie
dans l'entreprise ; par conséquent, cette méthode est plutôt réservée au true friends, qui
constituent la clientèle la plus fidèle de l'établissement.
✗ availability guarantees : cette stratégie permet d'éviter les pertes de revenu liées à un
manque de capacité disponible en protégeant les clients les plus fidèles ; certains
établissements offrent déjà ce service dans le cadre de leur programme de fidélisation, mais
la difficulté réside dans le choix du type de clientèle qui peut bénéficier de cette offre (par
exemple, dans le programme de fidélité Marriott, les membres « Platinium », qui résident
dans les hôtels du groupe au moins 75 nuits par an, ont droit à une garantie de réservation de
48 à 72 heures dans un des établissements de la marque) ; de même que pour la stratégie
précédente, cette approche convient parfaitement au segment de clientèle true friends.
✗ short term and ad-hoc promotions : pour augmenter leur taux d'occupation en période
creuse, certains hôtels ont l'habitude de proposer des offres promotionnelles à leurs clients ;
cependant, il est nécessaire de cibler la clientèle qui bénéficiera de ces réductions, pour
éviter tout risque de déchet (par contre, des offres spéciales et des avantages peuvent être
accordés aux clients fidèles les plus rentables, sans nécessairement leur proposer des
discounts) ; les short term promotions correspondent à une série de réductions intensives qui
durent peu de temps et qui concernent les consommateurs à forte contribution mais ayant
une durée de vie très courte dans l'entreprise, ce qui convient parfaitement aux butterflies ;
quant aux ad-hoc promotions, elles consistent en une activité promotionnelle régulière
effectuée sur une longue période, et sont désignées pour accroître la part du portefeuille de
consommateurs fidèles, ce qui peut être intéressant à mettre en place pour les barnacles.
L'intégration d'une démarche CRM dans une politique de revenue management nécessite de
réviser certains éléments du procédé traditionnel. Tout d'abord, l'un des éléments fondamentaux du
revenue management est la capacité à prévoir la demande future. Ainsi, l'introduction d'une
politique garantissant la disponibilité des chambres au segment true friends nécessite d'effectuer des
prévisions supplémentaires pour cette demande spécifique, ce qui ajoute un niveau de complexité au
processus de prévision de la demande du revenue management. En effet, si les hôtels ne prévoient
pas la demande aux deux niveaux, ils courent le risque de vendre trop de chambres en période de
5959
forte demande, et donc de renoncer au revenu généré par la clientèle fidèle non satisfaite, qui se
tournera vers la concurrence. Les prévisions concernant la demande true friends doit donc être
utilisée pour ajuster la capacité disponible du système traditionnel de revenue management. De
plus, l'intégration d'un système de management global pour l'ensemble des hôtels et des canaux de
distribution d'un groupe hôtelier est coûteuse et longue à mettre en place, mais il s'agit d'un enjeu
fondamental qui permet non seulement d'implémenter une démarche CRM dans l'établissement
grâce à la centralisation des données client, mais également de faciliter le développement d'un
système de revenue management basé sur la valeur de la durée de vie du client. Enfin, il est
indispensable que les employés et les managers de l'établissement comprennent l'objectif et
l'importance de mettre en place une politique de revenue management à deux niveaux (traditionnel
et en fonction de la durée de vie des consommateurs), afin de l'intégrer dans leurs activités
(réservation, réception, sales & marketing, revenue management). Pour cela, il doivent recevoir une
formation adéquate, afin qu'ils participent au bon déroulement de cette stratégie au sein de
l'entreprise.
CONCLUSIONCONCLUSION
Ce dernier chapitre a permis de déterminer les anomalies du revenue management ainsi que
les moyens d'améliorer son efficacité, toujours dans le but d'optimiser la rentabilité de l'entreprise.
Pendant de nombreuses années, il existait une réelle confrontation entre les exigences des
actionnaires en terme financier et les attentes de la clientèle en terme d'expérience vécue, surtout
depuis l'apparition du yield management, dont l'objectif consiste à maximiser la rentabilité de
l'entreprise. En effet, le yield manager cherchait à prévoir la demande de la façon la plus précise
possible, afin d'ouvrir et de fermer des classes tarifaires au meilleur moment, sans se soucier de la
satisfaction du consommateur. Il s'agissait en quelque sorte d'un mathématicien qui considère le
consommateur comme une statistique. Mais depuis quelques années, les managers se sont rendu
compte que cette démarche purement technique ne permettait pas d'optimiser le revenu de
l'entreprise, car l'avis du consommateur prend une place déterminante dans les activités de services.
Sans satisfaction, on ne peut espérer de fidélisation, et donc de pérennisation de la réussite de
l'entreprise. Le yield management s'est donc peu à peu transformé en une démarche stratégique, qui
ne recherche plus la maximisation du chiffre d'affaires sur le court terme, mais l'optimisation de la
profitabilité sur le long terme. Pour cela, l'entreprise doit prendre en considération les attentes et les
besoins des consommateurs, ce qui revient à intégrer une démarche de CRM dans la politique de
revenue management.
6060
CONCLUSION GÉNÉRALECONCLUSION GÉNÉRALE
Depuis de nombreuses années, le revenue management a permis d'optimiser le revenu de
diverses activités de services, qui avaient toutes en commun de disposer d'une capacité fixe et
limitée, d'un service non stockable et périssable pouvant être vendu avant la réalisation de la
prestation, de coûts fixes très élevés par rapport à un coût marginal négligeable, et d'une demande
variable mais prévisible pouvant être segmentée.
Grâce à un contrôle de la capacité associé à une politique tarifaire basée sur la demande, les
hôteliers ont su maximiser leur chiffre d'affaires en s'appuyant sur une segmentation très fine de la
demande, notamment définie en fonction de la sensibilité au prix des consommateurs, et sur un
historique de ventes et une politique de réservation permettant d'établir des prévisions rigoureuses.
Ainsi, au vu de l'efficacité de cette méthode au sein du département hébergement des établissements
hôteliers, il était cohérent de se demander si elle pouvait également permettre d'accroître la
rentabilité d'autres centres de profit, tels que la restauration, les spas ou les parcours de golf.
Cependant, ces activités ne sont pas pourvues de toutes les caractéristiques citées précédemment,
étant donné que la demande est difficilement prévisible et que les tarifs pratiqués sont relativement
fixes. En effet, les managers de restaurants ont l'habitude de déterminer les prix de leur produits en
fonction du coût de revient et non pas selon l'intensité de la demande ou la sensibilité au prix des
consommateurs. De même, il est rare de constater qu'un même soin dans un institut de beauté est
proposé à des tarifs différents selon l'heure ou le jour du rendez-vous. Enfin, un golfeur régulier ne
comprendrait pas pourquoi une même prestation coûterait plus cher ou moins cher d'un jour à
l'autre, puisque la durée et la qualité du parcours de golf ne varient pas.
Mais malgré ces obstacles, nous avons pu déterminer un certain nombre de pratiques
associées au revenue management qui permettaient d'améliorer le revenu de ces activités par une
meilleure gestion de leur capacité. Dans les restaurants par exemple, les managers peuvent mettre
en place une gestion des arrivées, un contrôle de la durée d'utilisation et un système de réservation
pour accroître leur indicateur de performance, le RevPash (revenue per available seat hour). En ce
qui concerne les centres de bien-être, bien que l'utilisation d'un logiciel de gestion élaboré puisse
augmenter le revenu de l'établissement, la pratique des upsells reste la meilleure solution puisque
c'est la productivité du personnel et sa capacité à vendre toujours plus de produits qui fait la
différence. Enfin, pour ce qui est des parcours de golf, le logiciel OpenTee ainsi que la création de
packages sont les moyens les plus efficaces pour optimiser la rentabilité du site.
6161
Par conséquent, le revenue management contribue à augmenter voire à maximiser les
revenus des différents centres de profit d'un établissement hôtelier, mais l'optimisation du revenu
global de l'entreprise ne peut se faire sans une démarche de revenue integrity, qui nécessite la
participation de tous les acteurs de l'hôtel. En cela, nous pouvons clairement affirmer que l'impact
du revenue management sur l'organisation d'une activité de services est considérable, puisque pour
optimiser son efficacité, chacun doit jouer un rôle dans la mise en œuvre de ce processus. En outre,
une politique managériale dans une activité de services ne peut en aucun cas négliger les attentes et
la satisfaction des consommateurs, sans lesquelles l'entreprise ne pourrait subsister. En effet, les
liens sont très étroits entre la satisfaction de la clientèle et la rentabilité de l’entreprise, ce qui
permet d'en déduire que la meilleure façon de rentabiliser son activité est d'appliquer conjointement
une politique de customer relationship management et une politique de revenue management, afin
de prendre en considération la fidélisation et la satisfaction du consommateur dans l'objectif de
maximisation du profit sur le long terme.
Ainsi, pour répondre à notre problématique, le revenue management peut effectivement être
appliqué dans la restauration, les spas et les parcours de golf, mais l'objectif de maximisation du
revenu ne sera atteint que par une mise en œuvre réfléchie et pertinente de cette pratique. En effet,
pour ce genre d'activité, tout n'est pas bon à prendre dans le revenue management, notamment la
discrimination tarifaire basée sur la sensibilité au prix des clients, qui peut nuire à l'entreprise si elle
est appliquée de façon mécanique, sans aucune considération pour le consommateur. L'intérêt de
chaque activité doit donc se focaliser avant tout sur la satisfaction et la fidélité des clients, plus que
sur le simple résultat financier à court terme. De plus, il ne s'agit pas de maximiser individuellement
le revenu de chaque centre de profit de l'hôtel, mais d'optimiser la rentabilité globale de
l'établissement, ce qui nécessite un travail collectif de la part de tous les salariés.
Pour conclure, c'est au prix d'une orientation systématique vers le client et d'une forte
implication du personnel que le revenue management constitue un atout concurrentiel de première
importance pour les activités de services, puisque cela permet d'optimiser le revenu de l'entreprise
tout en améliorant la satisfaction et la fidélisation de la clientèle.
6262
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P. Landman, Spa Revenue Management Techniques : Dynamic Pricing, Dynamic Availability &
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P. Landman, Why spas should be added to the revenue management of hotels ?, Xotels, 2011
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Sites Internet :
http://geotourweb.com
http://www.mesacosan.com
http://www.revdev-consultants.com
http://www.xmo.fr
http://www.xotels.com
http://www.acemicrotech.com/resources/OpenCourseYieldManagementWhitepaper.pdf
6565
TABLE DES FIGURES ET TABLEAUXTABLE DES FIGURES ET TABLEAUX
FIGURESFIGURES
Figure 1 : Système de Yield Management
Figure 2 : Les phases du Yield Management
Figure 3 : Les déterminants de la rentabilité de l'entreprise de services
Figure 4 : La gestion des tarifs
Figure 5 : La démarche de pilotage du Yield Management
Figure 6 : Architecture d'un système informatique intégré
Figure 7 : Système de Restaurant Revenue Management
TABLEAUXTABLEAUX
Tableau 1 : Les objectifs attendus du Yield Management
Tableau 2 : Typologie du Revenue Management
Tableau 3 : Barrières tarifaires applicables en restauration
Tableau 4 : Les différentes fonctions d'OpenTee
6666
TABLE DES MATIÈRESTABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION GÉNÉRALE ..................................................................................................... 4
CHAPITRE I - PRÉSENTATION DU YIELD MANAGEMENT ............................................... 8
L'émergence du Yield Management ................................................................................................ 8
Origine du Yield Management ................................................................................................... 8
Définitions et modèles du Yield Management ........................................................................... 9
Particularités du Yield Management ............................................................................................. 11
Principes du Yield Management .............................................................................................. 11
Système de Yield Management ................................................................................................ 12
Résultats attendus du Yield Management ................................................................................ 14
Les composants du Yield Management ........................................................................................ 16
La politique de tarification ....................................................................................................... 16
La gestion des capacités ........................................................................................................... 18
Les indicateurs de performance ............................................................................................... 20
La distribution, un levier d'optimisation .................................................................................. 21
Les contraintes juridiques ........................................................................................................ 23
Conclusion .................................................................................................................................... 24
CHAPITRE II – OPTIMISATION DU REVENU GLOBAL .................................................... 25
Le Revenue Management appliqué à la restauration .................................................................... 26
Présentation du Restaurant Revenue Management ................................................................... 26
Conditions d'efficacité .......................................................................................................... 26
Mesurer la performance ....................................................................................................... 27
Les leviers stratégiques du Restaurant Revenue Management ............................................ 28
Contrôler la capacité disponible ................................................................................................ 29
Établir des prévisions au plus juste ...................................................................................... 29
Mettre en place une politique de gestion des arrivées ......................................................... 29
6767
Optimiser l'agencement des tables ....................................................................................... 30
Gérer la durée d'utilisation du service ................................................................................. 30
Pratiquer une politique tarifaire discriminée ............................................................................. 31
Discrimination tarifaire ........................................................................................................ 31
Les barrières tarifaires ......................................................................................................... 32
La perception d'une politique de prix différenciés ............................................................... 33
Mettre en place un programme de Restaurant Revenue Management ..................................... 33
Les cinq étapes définies par S. Kimes ................................................................................... 33
Système de Restaurant Revenue Management ...................................................................... 34
Cas pratique : l'Hôtel Marriott Champs-Elysées ................................................................. 35
Le Revenue Management appliqué à d'autres activités ................................................................ 37
Application du Revenue Management dans les spas ................................................................ 37
Le marché du bien-être en France ........................................................................................ 37
Le développement des spas en France ................................................................................. 38
Le Spa Revenue Management ............................................................................................... 38
Le métier de Spa Revenue Manager ..................................................................................... 39
Les éléments clés du spa revenue management .................................................................... 40
Application du revenue management dans l'industrie du golf .................................................. 42
Caractéristiques de l'industrie du golf ................................................................................. 42
Conditions d'application du yield management dans l'industrie du golf ............................. 44
Open Tee : un outil indispensable de gestion des parcours de golf ..................................... 44
Impact financier du yield management dans l'indstrie du golf ............................................ 46
Perception du yield management dans l'industrie du golf .................................................... 47
Le Revenue Integrity ou Total Revenue Management .................................................................. 49
Philosophie du Revenue Integrity ............................................................................................. 49
Mise en place du Total Revenue Management dans un hôtel ................................................... 50
Conclusion .................................................................................................................................... 51
6868
CHAPITRE III – LIMITES ET AVENIR DU REVENUE MANAGEMENT ......................... 52
Les limites du revenue management ............................................................................................. 52
Limites et recommandations générales du revenue management ............................................. 52
Limites du revenue management dans les activités de loisirs (spas, golfs) .............................. 55
L'avenir du revenue management ................................................................................................. 56
Les attentes futures des professionnels du revenue management ............................................. 56
Intégration du CRM dans la politique de revenue management d'un hôtel .............................. 57
Conclusion .................................................................................................................................... 60
CONCLUSION ............................................................................................................................... 61
BIBLIOGRAPHIE ..........................................................................................................................63
TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX .................................................................................... 66
TABLE DES MATIÈRES .............................................................................................................. 67
GLOSSAIRE ................................................................................................................................... 70
RÉSUMÉ ......................................................................................................................................... 72
6969
GLOSSAIREGLOSSAIRE
Analyse conjointe : analyse qui porte sur les préférences des consommateurs à partir des utilités
qu'ils affectent à chacun des attributs constituant une offre de service.
Best Available Rate (BAR) : prix affiché par de nombreux opérateurs, notamment du secteur
hôtelier. Il représente le meilleur prix pour le client à un moment donné. Il est calculé par niveau de
tarif et en fonction des dates de réservation.
Bid Price : espérance de revenu de la dernière unité disponible utilisée comme prix minimum pour
l'accès à une classe tarifaire. Il se traduit par un prix plancher au deçà duquel on ne peut pas vendre.
Classe tarifaire : groupement de tarifs auxquels un même stratégie est appliquée (contingentement,
disponibilité...).
Central Reservation System (CRS) : système informatique qui centralise toutes les réservations,
directes ou indirectes, de tous les canaux de distribution pour une prise en charge par le PMS. Il
permet le couplage avec des sites de vente et la gestion des stocks de chambres.
Dilution du revenu : perte de chiffre d'affaires et de profit.
Early booking : vente finalisée longtemps avant le date de réalisation de la prestation, associée à
des tarifs avantageux, mais également à des conditions restrictives pour le consommateur.
Gâchis (spoilage) : manque à gagner engendré par une sous-utilisation de la capacité.
Global Distribution System (GDS) : plate-formes électroniques de gestion des réservations qui
permettent aux agences de voyages de connaître l'état du stock des différents fournisseurs de
produits touristiques et de réserver à distance.
Go-show (walk-in) : client qui se présente au moment de la réalisation de la prestation de service
sans avoir réservé.
Inventaire : ensemble des unités disponibles d'un service sur un site d'exploitation donné (ex :
nombre total de chambres d'un hôtel).
Lead time : durée séparant la date de réservation de la date d'arrivée du client.
Montée en charge (pick-up) : évolution du nombre de réservations dans le temps pour une date
donnée. Elle se traduit par une représentation graphique de l'évolution des réservations, de
l'ouverture des ventes jusqu'à la réalisation de la prestation.
7070
No-show : client ayant réservé sa prestation et qui ne se présente pas lors de la réalisation de la
prestation.
Parité tarifaire : elle consiste à pratiquer des tarifs identiques sur différents canaux de distribution.
Property Management System (PMS) : logiciel de gestion interne d'un hôtel. Il permet la gestion
en temps réel des réservations d'un hôtel.
Pricing : politique de tarification.
Rate management : positionnement de la grille tarifaire dont la différenciation par période, par
segment de clientèle et par catégorie de produit participe à l'optimisation et permet de mieux
communiquer avec le marché.
Revenue Per Available Room (RevPar) : indice de performance par unité de ressource sur la
totalité de la ressource considérée. Cet indicateur révèle la performance dans le temps de la
politique tarifaire mise en parallèle avec le taux de remplissage.
Revenue Management System (RMS) : système informatisé de yield/revenue management.
Surréservation (surbooking - overbooking) : capacité virtuelle de l'hôtel qui doit être ajoutée à la
capacité physique de chaque inventaire afin de compenser les no-show et les annulations.
Total Revenue Management : recherche de la maximisation du revenu par la combinaison de
ventes croisées de différentes prestations de service au sein d'un même centre de profit.
Upgrade : attribution à un client d'une prestation de niveau supérieur à celle qu'il a réservée, sans
supplément de prix.
7171
RÉSUMÉ - RÉSUMÉ - ABSTRACTABSTRACT
Depuis son apparition à la fin des années soixante-dix, le revenue management s'est
largement développé au sein de diverses activités de services, à commencer par les secteurs du
transport et de l'hôtellerie. Cette technique a pour objectif d'optimiser la rentabilité de l'entreprise,
par une action simultanée sur la capacité et la politique tarifaire. Cela passe par une segmentation
très fine de la demande et la définition de classes tarifaires associées à chaque segment, qui seront
ouvertes et fermées en temps réel, en fonction des prévisions et de l'évolution des réservations.
Étant donné l'efficacité qu'a pu engendrer cette méthode dans le département hébergement
des établissements hôteliers qui l'ont mise en place, nous pouvons nous demander, et c'est l'objet de
ce mémoire, si le revenue management peut être élargi à tous les services opérationnels d'un hôtel
tels que la restauration, les spas ou encore les parcours de golf, afin d'optimiser non plus le revenu
hébergement mais la profitabilité globale de l'entreprise.
****
Since its appearance at the end of the seventies, revenue management widely developed
within various service activities, to begin with the sectors of the transport and the hotel business.
This technique has the objective of optimizing the profitability of the company, by a simultaneous
action on the capacity and the pricing policy. It requires a very fine segmentation of the demand and
the definition of tariff classes associated with every segment, which will be opened and closed in
real time, according to forecasts and the evolution of the reservations.
Given the efficiency that this method was able to generate in the accommodation department
of the hotel organisations, we can wonder, and it is the subject of this report, if revenue management
can be widened to all the operational departments of a hotel such as food & beverage, the spas or
still the golf courses, not to optimize only accommodation's revenue, but the global profitability of
the company.
7272
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