1
Tous droits réservés - Les Echos 16/4/2014 P.Industrie & Se INTERVIEW // CHARLES COPPOLANI Président de l’Arjel « Internet n’a pas déstabilisé le monde des jeux » Propos recueillis par Christophe Palierse [email protected] C harles Coppolani a été nommé en février prési- dent de l’Autorité de régula- tion des jeux en ligne. Dans un entretien – sa première interview – aux « Echos », ce haut fonction- naire de soixante-trois ans analyse la situation du secteur et détaille sa feuille de route. L’Arjel constate l’effondrement prolongé du pari hippique et du poker en ligne dans son bilan d’activité pour le pre- mier trimestre. Cette situation n’est-elle pas inquiétante ? C’est effectivement un sujet de pré- occupation, et il faut s’interroger sur cette situation. Il y a des éléments communs et des éléments spécifi- ques qui l’expliquent. L’impact de la crise est le premier élément com- mun. Le pari hippique et le poker en ligne sont des activités de loisirs même s’il existe des joueurs profes- sionnels. Autre élément commun : l’un et l’autre de ces deux jeux ont une difficulté à renouveler leur population de joueurs. S’agissant du pari hippique, le sujet est le vieillis- sement de la population de joueurs et le caractère un peu technique du jeu. La question est tout autre pour le poker pratiqué par un public plu- tôt jeune. L’effet de mode est passé. Au fond, le marché du poker en ligne est peut-être arrivé à maturité. Vous avez évoqué l’impact de la crise. Pourtant, l’engoue- ment pour le pari sportif sur Internet ne se dément pas… N’oublions pas qu’il avait connu, contrairement au pari hippique et au poker en ligne, une chute après avoir bénéficié d’un démarrage tonitruant avec la Coupe du monde de football de 2010. Il y a, à nouveau, depuis plus d’un an, un effet loco- motive du football. Il tient à l’attrac- tivité de la Ligue 1 et de la Ligue des champions. Le sport, et le football en particulier, relève du culturel. Or, le marché du pari sportif continue de s’élargir car le nombre de comp- tes joueurs actifs augmente. Quel bilan tirez-vous de ces quatre ans, quasiment, d’ouverture et de nouvelle régulation du secteur ? Globalement, le marché n’est pas au rendez-vous des espérances des opérateurs. En revanche, l’objectif du législateur qui était de faire bas- culer l’offre illégale existante vers une offre légale, régulée et sécurisée pour le joueur, est atteint. Et, contrairement à ce que d’aucuns redoutaient, Internet n’a pas désta- bilisé le monde des jeux en France. Quels sont les priorités de votre mandat ? La protection des joueurs est une priorité permanente. A ce titre, nous réfléchissons à la mise en œuvre d’indicateurs avancés de l’addiction. Nous devons par ailleurs être en mesure de surveiller les paris à l’étranger sur les compéti- tions françaises. On surveille l’acti- vité en France mais nous n’avons aucune visibilité sur ce qui se passe en dehors. Par ailleurs, nous allons travailler main dans la main avec la Française des Jeux. La lutte contre l’illégalité est un combat sans fin. Nous sur- veillons 2.800 sites en permanence. L’an dernier, 1.021 ont été mis en demeure et 65 ont été « déconnec- tés » après saisine du tribunal de grande d’instance de Paris et action auprès des fournisseurs d’accès à Internet. Nous avons d’ailleurs encore saisi le TGI ces dernières semaines. Je crois aussi nécessaire de développer la recherche en France autour du jeu, et ce dans tou- tes ses dimensions. L’Arjel va tra- vailler avec des universités. a L’intégralité de l’interview sur lesechos.fr/industrie-services Pour Charles Coppolani, « le marché du pari sportif continue de s’élar- gir car le nombre de comptes joueurs actifs augmente. » Photo DR l Le nouveau président de l’Autorité de régulation des jeux en ligne veut mieux surveiller les paris à l’étranger.

Charles COPPOLANI. President ARJEL. Interview_Les Echos. France

  • View
    181

  • Download
    0

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Charles Coppolani : « Internet n'a pas déstabilisé le monde des jeux » Par Christophe Palierse Charles Coppolani a été nommé en février président de l'Autorité de régulation des jeux en ligne. Dans un entretien - sa première interview - aux « Echos », ce haut fonctionnaire de soixante-trois ans analyse la situation du secteur et détaille sa feuille de route. Christophe PALIERSE: L'Arjel constate l'effondrement prolongé du pari hippique et du poker en ligne dans son bilan d'activité pour le premier trimestre. Cette situation n'est-elle pas inquiétante ? Charles COPPOLANI: C'est effectivement un sujet de préoccupation, et il faut s'interroger sur cette situation. Il y a des éléments communs et des éléments spécifiques qui l'expliquent. L'impact de la crise est le premier élément commun. Le pari hippique et le poker en ligne sont des activités de loisirs même s'il existe des joueurs professionnels. Autre élément commun : l'un et l'autre de ces deux jeux ont une difficulté à renouveler leur population de joueurs. S'agissant du pari hippique, le sujet est le vieillissement de la population de joueurs et le caractère un peu technique du jeu. La question est tout autre pour le poker pratiqué par un public plutôt jeune. L'effet de mode est passé. Au fond, le marché du poker en ligne est peut-être arrivé à maturité. Christophe PALIERSE: Vous avez évoqué l'impact de la crise. Pourtant, l'engouement pour le pari sportif sur Internet ne se dément pas… Charles COPPOLANI: N'oublions pas qu'il avait connu, contrairement au pari hippique et au poker en ligne, une chute après avoir bénéficié d'un démarrage tonitruant avec la Coupe du monde de football de 2010. Il y a, à nouveau, depuis plus d'un an, un effet locomotive du football. Il tient à l'attractivité de la Ligue 1 et de la Ligue des champions. Le sport, et le football en particulier, relève du culturel. Or, le marché du pari sportif continue de s'élargir car le nombre de comptes joueurs actifs augmente. Quel bilan tirez-vous de ces quatre ans, quasiment, d'ouverture et de nouvelle régulation du secteur ? Globalement, le marché n'est pas au rendez-vous des espérances des opérateurs. En revanche, l'objectif du législateur qui était de faire basculer l'offre illégale existante vers une offre légale, régulée et sécurisée pour le joueur, est atteint. Et, contrairement à ce que d'aucuns redoutaient, Internet n'a pas déstabilisé le monde des jeux en France. Christophe PALIERSE: Quels sont les priorités de votre mandat ? Charles COPPOLANI: La protection des joueurs est une priorité permanente. A ce titre, nous réfléchissons à la mise en oeuvre d'indicateurs avancés de l'addiction. Nous devons par ailleurs être en mesure de surveiller les paris à l'étranger sur les compétitions françaises. On surveille l'activité en France mais nous n'avons aucune visibilité sur ce qui se passe en dehors. Par ailleurs, nous allons travailler main dans la main avec la Française des Jeux.

Citation preview

Page 1: Charles COPPOLANI. President ARJEL. Interview_Les Echos. France

Tous droits réservés - Les Echos 16/4/2014 P.Industrie & Services

INTERVIEW // CHARLES COPPOLANI Président de l’Arjel

«Internetn’apasdéstabilisélemondedesjeux»

Propos recueillis parChristophe [email protected]

C harles Coppolani a éténommé en février prési-dent de l’Autorité de régula-

tion des jeux en ligne. Dans unentretien – sa première interview –aux « Echos », ce haut fonction-naire de soixante-trois ans analysela situation du secteur et détaille safeuille de route.

L’Arjel constate l’effondrementprolongé du pari hippiqueet du poker en ligne dans sonbilan d’activité pour le pre-mier trimestre. Cette situationn’est-elle pas inquiétante ?C’est effectivement un sujet de pré-occupation,etilfauts’interrogersurcette situation. Il y a des élémentscommuns et des éléments spécifi-ques qui l’expliquent. L’impact de lacrise est le premier élément com-mun.Leparihippiqueetlepokerenligne sont des activités de loisirsmême s’il existe des joueurs profes-sionnels. Autre élément commun :l’un et l’autre de ces deux jeux ontune difficulté à renouveler leurpopulationdejoueurs.S’agissantdupari hippique, le sujet est le vieillis-sement de la population de joueurset le caractère un peu technique dujeu. La question est tout autre pourle poker pratiqué par un public plu-tôt jeune. L’effet de mode est passé.Au fond, le marché du poker enligne est peut-être arrivé à maturité.

Vous avez évoqué l’impactde la crise. Pourtant, l’engoue-ment pour le pari sportif surInternet ne se dément pas…N’oublions pas qu’il avait connu,contrairement au pari hippique etau poker en ligne, une chute aprèsavoir bénéficié d’un démarragetonitruant avec la Coupe du mondedefootballde2010. Ilya,ànouveau,depuis plus d’un an, un effet loco-

motive du football. Il tient à l’attrac-tivité de la Ligue 1 et de la Ligue deschampions. Le sport, et le footballenparticulier,relèveduculturel.Or,le marché du pari sportif continuede s’élargir car le nombre de comp-tes joueurs actifs augmente.

Quel bilan tirez-vous de cesquatre ans, quasiment,d’ouverture et de nouvellerégulation du secteur ?Globalement,lemarchén’estpasaurendez-vous des espérances desopérateurs. En revanche, l’objectifdu législateur qui était de faire bas-culer l’offre illégale existante versuneoffrelégale,réguléeetsécuriséepour le joueur, est atteint. Et,contrairement à ce que d’aucunsredoutaient, Internet n’a pas désta-bilisé le monde des jeux en France.

Quels sont les prioritésde votre mandat ?La protection des joueurs est unepriorité permanente. A ce titre,nous réfléchissons à la mise enœuvre d’indicateurs avancés de

l’addiction. Nous devons parailleursêtreenmesuredesurveillerlesparisàl’étrangersurlescompéti-tions françaises. On surveille l’acti-vité en France mais nous n’avonsaucune visibilité sur ce qui se passeen dehors.Par ailleurs, nous allons travaillermaindanslamainaveclaFrançaisedes Jeux. La lutte contre l’illégalitéest un combat sans fin. Nous sur-veillons 2.800 sites en permanence.L’an dernier, 1.021 ont été mis endemeure et 65 ont été « déconnec-tés » après saisine du tribunal degrande d’instance de Paris et actionauprès des fournisseurs d’accès àInternet. Nous avons d’ailleursencore saisi le TGI ces dernièressemaines. Je crois aussi nécessairede développer la recherche enFranceautourdujeu,etcedanstou-tes ses dimensions. L’Arjel va tra-vailler avec des universités.

aL’intégralité de l’interview surlesechos.fr/industrie-services

Pour Charles Coppolani, « le marché du pari sportif continue de s’élar-gir car le nombre de comptes joueurs actifs augmente. » Photo DR

l Le nouveau président de l’Autorité de régulation desjeux en ligne veut mieux surveiller les paris à l’étranger.