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Les nouvelles frontières de l’open innovation Jean-Yves Huwart / Entreprise Globale En partenariat avec Awex

Les nouvelles frontières de l’Open innovation

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Le rapport d'Entreprise Globale sur les « Les nouvelles frontières de l’Open innovation ». Source : http://www.entrepriseglobale.biz/2012/01/27/sortie-du-rapport-les-nouvelles-frontieres-de-lopen-innovation

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Page 1: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Les nouvelles frontières de l’open innovationJean-Yves Huwart / Entreprise Globale

En partenariat avec Awex

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Rapport Open Innovation / Awex

p 2

Table des matières

1. Pourquoi l’open innovation p4

La genèse de l’industrialisation de l’innovation p4

Les laboratoires-citadelles des années 1960 p5

L’ouverture comme réponse à la complexité p6

Sous-traitance et marché de la propriété intellectuelle p6

2012, un plus grand besoin d‘ouverture, encore… p9

“Pourquoi l’open innovation s’impose chez nous?” :

Interview - Didier Malherbe, Administrateur délégué UCB Belgique p12

2. Une approche à multiples facettes p15

Glissement de paradigme p15

Les différents visages de l’open innovation p16

Définitions souples et restrictives p18

3. Une brève cartographie de l’open innovation p21

Clusters et pôles de compétitivité p21

C.E.S.A.R – Porto Digital (Recife, Brésil) p23

L’innovation avec les fournisseurs p25

Atol rapatrie sa production en France pour co-innover avec ses sous-traitants p27

Innovation avec les concurrents p28

Un modèle de co-opétition dans le secteur des panneaux solaires p29

Idea Markets et communautés d’innovation p30

Precyse reçoit 33 suggestions utiles collectées en 90 jours p32

La co-création et le crowdsourcing p33

Tchibo-Ideas.de, un exemple de co-création C2C p35

Le Henkel innovation Challenge : un concours d’innovation

sur les réseaux sociaux p36

Le Pepsi Refresh Project : co-innover dans le domaine du marketing p37

Swisscom Labs : « user-driven innovation » p39

Une grande marge de progression en matière d’open innovation

dans de très nombreux secteurs p40

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Rapport Open Innovation / Awex

p 3

4. Un état d’esprit approprié p41

L’importance d’un cadre de confiance – L’exemple de l’accord Texas A&M / Awex p42

Le rôle positif des « connecteurs » p45

Comment Xerox pratique l’open innovation de six façons différentes et simultanées p47

5. Les PME et l’open innovation p49

“Le PME ont tout à gagner de l’open innovation,

même si elles ne doivent pas oublier d’être prudentes”:

Interview - Jeffrey Baumgartner, consultant-expert de l’innovation

collaborative dans les PME : p49

Internalisation de la R&D des PME p52

L’influence du modèle open source p53

Les petites structures sont comme des grandes grâce au crowdsourcing p55

ConCLuSIon p58

Photo de couverture : Fiat Mio CC

Source : Fiatmio.br

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Rapport Open Innovation / Awex

p 4

1. Pourquoi l’open innovation

“SI vouS vouLEz METTRE LE DoIGT SuR DE GRAnDES IDéES, vouS DEvEz En AvoIR bEAuCouP.” Thomas Edison

LA GEnèSE DE L’InDuSTRIALISATIon DE L’InnovATIon

Thomas Edison, né en 1847, fut l’un des innovateurs les plus prolifiques de l’ère moderne.

L’Humanité lui doit les téléscripteurs, les micros pour les premiers téléphones, le phonographe

ou, bien sûr, l’ampoule électrique. Les historiens s’entendent pour dire qu’Edison est à l’orgine de

l’industrialisation de l’innovation.

Au cours de sa carrière, Edison déposa plus d’un millier de brevets.

Cette fécondité, l’inventeur la doit à une curiosité sans borne. Edison avait l’habitude de collaborer

avec des acteurs très divers dans les domaines tant scientifiques qu’économiques et politiques. Le

destin d’Edison n’aurait jamais été le même si ce dernier n’avait systématiquement associé à ses

explorations des partenaires tiers.

Tout au long de sa vie, l’inventeur américain n’envisagea jamais l’innovation comme une démarche

purement isolée1. S’il fut bien un impulseur, ses inventions ont la plupart du temps bénéficié des

inputs de collaborateurs brillants dont il s’entourait et de partenaires extérieurs. Les biographies

de Thomas Edison racontent ainsi qu’il passait une grande partie de ses journées et de ses soirées

à réseauter avec autant de personnes que possible.

Pour l’ampoule à incandescence2, Thomas Edison partit d’un prototypes vieux de vingt ans qu’il

persista sans relâche à améliorer. Au bout de quelque 6.000 essais différents et un an et demi de

travail, Edison trouva la solution3.

L’inventeur ne s’arrêta toutefois pas en chemin. Sans un réseau électrique et un parc de

générateurs, l’ampoule à incendescence n’avait aucun intérêt.

Thomas Edison s’associa donc avec des experts en réseau et des industriels pour mettre au point

le premier réseau électrique intégral.

non seulement il mit au point une technologie nouvelle. Mais grâce à ses contacts, il put

également contribuer à bâtir l’ensemble de la filière électrique. L’aventure du téléscripteur, du

1Même si, avec plus de 60 chercheurs sous sa responsabilité directe à Menlo Park, dans l’Etat du new Jersey, Thomas Edison a créé le premier laboratoire industriel de l’Histoire.2Invention qui rendit la première Edison célèbre.3 problème des prototypes d’ampoules précédants était que la durée de vie du filament n’était que de quelques heures. L’invention était donc inexploitable en situation d’utilisation réelle. En utilisant de la fibre de bambou, il put porter la durée de vie du filament d’une ampoule à plus de 600 heures. Cette dernière devenait ainsi commercialisable.

L’un des premiers prototypes d’ampoule

à incandescence développé par

Thomas Edison

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phonographe voire même du cinéma furent à peine différentes.

A la fin de sa vie, Thomas Edison dirigeait un empire industriel ainsi que l’un des plus importants

regroupements de scientifiques et d’ingénieurs du globe.

LES LAboRAToIRES-CITADELLES DES AnnéES 1960

A partir de l’époque Edison, les activités d’innovation au sein des entreprises se sont

professionnalisées.

L’image d’Epinal du savant génial et échevelé, enfermé jour et nuit dans son laboratoire, a

laissé la place à des équipes organisées. La recherche s’est organisée autour de protocoles. Des

départements Innovation à part entière ont vu le jour dans les organisations industrielles, avec

leurs propres budgets, leurs propres recrutements, dans lesquels furent logées les tâches relatives

à la recherche et à l’innovation. La recherche s’est “taylorisée”.

Ce faisant, toutefois, les équipes spécifiquement dédiées à l’innovation se sont parfois isolées du

reste de l’organisation.

Les tâches liées à l’innovation furent réservées à des profils d’employés et de cadres bien

définis et identifiés au sein de l’organisation, et non à l’ensemble des salariés. Encore moins

à des intervenants extérieurs. Les départements d’innovation se sont transformés en citadelle,

protégeant des cohortes de chercheurs isolés du monde extérieur.

Cette évolution correspondait alors, à un contexte historique. Les priorités étaient dissemblables.

En période de forte croissance, en effet, dans les années 50 et 60, l’enjeu, pour la plupart des

entreprises industrielles, était de conquérir de nouveaux marchés de masse. La concurrence était

moins rude. L’environnement économique était plus prévisible. Les entreprises pouvaient gérer

leur processus d’innovation de façon linéaire, en se basant sur simple analyse des rapports coût/

bénéfice.

A partir des années 70, toutefois, la crise est apparue. Le contexte économique s’est durci. Les

projets d’innovation ont été dotés d’échéances plus précises. Des objectifs à plus court terme se

sont imposés.

Dans les années 80, les principes de la gestion de la qualité inspirés du « miracle » industriel

japonais ont intégré les méthodes de gestion de l’innovation des entreprises européennes et

américaines. L’amélioration de la qualité et des performances des produits existants est devenue

l’une des priorités des labos et des ingénieurs.

Avec l’intensification de la mondialisation, dans les années 90, les entreprises ont investi dans

des systèmes sophistiqués visant à raccourcir les distances entre leurs clients et leurs fournisseurs

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Rapport Open Innovation / Awex

p 6

(optimisation de la supply chain). La priorité en matière d’innovation a glissé vers la recherche des

réductions de coûts, aux dépens, parfois, de l’innovation de produits.

L’ouvERTuRE CoMME RéPonSE à LA CoMPLEXITé

L’économie et les processus industriels n’ont cessé, depuis, de se complexifier.

La digitalisation de l’information a accéléré les cycles d’innovation, dans le même temps qu’elle

rendait les consommateurs plus critiques. De nou acteurs ont pris leur essor en Asie et dans

d’autres pays émergents.

Les marchés sont devenus plus concurrentiels et plus volatiles. Les offres de produits se sont

enrichies. Dans les produits alimentaires, les boissons, les céréales ou les articles de confection,

par exemple, la variété des articles proposée aux consommateurs augmente de 25% par an1.

En 2010, les fabricants de combinés portables commercialisaient 900 modèles différents de

téléphones portables en plus qu’en 2001…

Les technologies sont plus complexes. un « Smartphone » moderne est couvert pas près de 300

brevets différents, dans des domaines très variables qui vont des modules radios à la structure

informatique ou aux économiseurs de batteries.

Cette inflation de nouveaux produits toujours plus intégrés nécessite, désormais, des approches

multidisciplinaires.

Pour les entreprises s’arc-boutant sur la maîtrise de A à z, en interne, de leurs processus

d’innovation, les choses sont devenues plus compliquées. En même temps, elles sont tenues,

pour rester compétitives, de garder contact avec des matières toujours plus hétéroclites.

L’unique moyen, pour nombre d’entre elles, de relever les défis modernes de l’innovation consiste

à s’ouvrir. A mettre en œuvre des collaborations. A embrasser les principes et la dynamique de

l’open Innovation.

SouS-TRAITAnCE ET MARCHé DE LA PRoPRIéTé InTELLECTuELLE

Certes, l’open innovation n’est pas une nouveauté pour certaines entreprises.

Depuis les années 90, certaines grandes entreprises réduisent et sous-traitent une partie de leurs

efforts en R&D.

4McKinsey Quarterly

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p 7

5 Les Programmes-cadres pour la recherche et le développement technologique sont pluri-annuels (FP1,.. FP6, FP7, etc.). Le premier a démarré en 1984 et s’est clôturé en 1988. Il était doté de 3,5 milliards d’euros. Le FP8 s’étalera de 2014 à 2020 et devrait être crédité de 80 milliards d’euros.

6Les critères d’attribution des fonds impose la formation de consortia incluant la participation d’acteurs venus de plusieurs Etats membres différents.

Les investisseurs financiers ont incité les capitaines d’industrie à se détourner du modèle du

conglomérat industriel, pour se concentrer sur certaines tâches plus spécifiques.

Ainsi, aux Etats-unis, la part des dépenses R&D assumées par les entreprises de plus de 10.000

employés a fondu, entre 1990 et 2000, de 77% à 53% du total de dépenses de R&D dans l’industrie

américaine (voir graphique). Les investissements en R&D au sens large ont néanmoins continué

de croître.

Selon les cas, l’ouverture des processus d’innovation s’est toutefois opérée de façon très différente.

Dans certains secteurs, comme les technologies de l’information ou les biotechnologies, le

développement rapide du marché du capital-risque permit de transférer une partie du risque

d’innovation vers des petites structures agiles et très innovantes (startups, spinoffs, etc.).

Dans l’automobile, l’électronique ou l’aéronautique, les fournisseurs de composants et de pièces

détachées ont, eux, été invités par leurs donneurs d’ordre à prendre en charge une partie des frais

de développement.

L’innovation est devenue, pour ces sous-traitants, une composante essentielle de leur relation

contractuelle avec les grands ensembliers. Le mouvement d’externalisation de quelques grandes

marques a permis aux fournisseurs, comme valéo, Delphi, HTC ou FlexTronics, de se transformer

en véritables multinationales, au point, parfois, de renverser le rapport de force. Les fournisseurs

de premier ou second rang fixent désormais souvent le tempo de l’innovation de leurs clients

constructeurs.

Parallèlement, un marché de la propriété intellectuelle s’est développé.

En Europe, 17% des brevets déposés par les entreprises ne sont pas exploités. Plutôt que de

laisser ces actifs dormir dans les tiroirs, leurs propriétaires les ont mis en vente.

Source : Open Innovation in Europe effects, determinants and Policy, Oslo, July 19th 2011

ETATS-UNIS : ÉVOLUTION DE LA PART DE LA R&D SUPPORTÉE PAR LES GRANDES ENTREPRISES DEPUIS LES ANNÉES 60

Pourcentage de la R&D industrielle aux mains des grandes entreprises américaines (+ de 10.000 salariés)

Pourcentage de la R&D industrielle aux américain.

A

Pourcentage du PIB américain.

90%85%80%75%70%65%60%55%50%45%40%

1960 1970 1980 1990 2000 20100,5%

1,0%

1,5%

2,0%

2,0%A B

Investissements en R&D des grandes entreprises en pourcentage du PIB américain

B

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p 8

un shopping de la propriété intellectuelle s’est ainsi développé. Les universités, elles-mêmes, ont

adopté des stratégies de vente ou de cession des technologies développées en leur sein, via la

commercialisation de licences et/ou de royalties.

Les autorités publiques, pour leur part, ont encouragé le déploiement, au niveau local, de

pôles scientifiques et de recherche spécialisés, afin de compenser les dégâts causés par la

désindustrialisation de larges zones économiques d’Europe ou d’Amérique du nord. Les centres

de recherche, les clusters, les partenariats publics-privés avec les universités, les contrats de

recherche, les chèques-innovation et autres instruments de soutien à l’innovation ont ainsi vu le

rôle au fur et à mesure des années.

En Europe, le renforcement du rôle des fonds européens de soutien à l’innovation et à la recherche,

comme le Programme Cadre Européen5, a stimulé la mise en place de collaborations structurelles

entre les opérateurs de différents Etats membres6. Le réseau européen EEn (Enterprise Europe

network), par exemple, met en relation des centres d’innovation européens afin de féconder de

nouvelles opportunités. La recherche fondamentale et l’innovation précompétitive se retrouvent

intégrés dans des réseaux de partenariats englobant opérateurs privés externes.

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p 9

7 La stratégie de Lisbonne visait à faire de l’économie européenne l’économie la plus compétitive du monde à l’horizon 2010. Faute d’indicateurs pertinents, de cohérence et de suivi effectif des mesures, cette stratégie à échoué. http://fr.wikipedia.org/wiki/Strat%C3%A9gie_de_Lisbonne

2012, un PLuS GRAnD bESoIn D‘ouvERTuRE, EnCoRE…

Si ces évolutions récentes ont substantiellement enrichi les processus d’innovation, un nouveau

chapitre semble désormais s’ouvrir.

La croissance économique molle des vingt dernières années en Europe, ajoutée à l’échec relatif

de la stratégie de Lisbonne 2000-20107, amène les responsables européens à envisager une

nécessaire évolution des modèles d’innovation.

Cette réflexion se justifie d’autant plus que le contexte économico-technologique a changé. En un

peu plus de dix ans, internet a modifié les modes d’interactions entre les acteurs. L’information

est devenue surabondante, disponible en un instant où que l’on se trouve sur le Globe.

Parallèlement, le cercle des acteurs pertinents dans le domaine de l’innovation s’est élargi. Les

pays émergents sont à présent des acteurs à part entière du progrès technologique mondial.

Enfin, la compréhension des dynamiques propres de l’innovation a évolué et s’est affinée, ces

dernières années.

Longtemps, l’innovation fut perçue comme un processus linéaire. L’augmentation des dépenses en

R&D, pensait-on, assurait un retour sur investissement proportionnel aux montants engagés. or,

le parcours de certains pays réputés pour l’importance de leurs investissements en R&D, comme

la Suède ou le Japon, a montré les limites de cette vision. Malgré leurs efforts, ces derniers

n’enregistrent plus de performances économiques supérieures à celles de leurs pairs, balayant

ainsi certaines perceptions jusque là bien ancrées.

En fait, à côté de l’innovation dure (« hard »), qui recouvre les aspects liés à la technologie,

à la recherche scientifique, aux essais de mise en production industrielle, l’innovation possède

une dimension «  soft  » au moins aussi critique. Cette dernière prend en compte des aspects

comme la création de nouveaux services, le design, l’innovation de business modèle, les relations

humaines…

L’innovation ne se décrète pas. Pas plus qu’elle ne se manufacture selon des recettes toutes faites.

L’innovation naît d’une alchimie, faite d’essais et d’erreurs, de hasards, de recherche d’information

et de relations interpersonnelles… La proximité avec le marché accroît, par ailleurs, la qualité de

l’innovation. une technologie qui ne répond pas à un besoin, qui n’anticipe pas un nouvel usage,

qui ne s’adapte pas à son public et à son contexte d’utilisation, perd rapidement toute valeur

économique. Qu’importe le degré de sophistication de cette dernière.

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8Les codes sources des logiciels sont libres d’utilisation par n’importe qui, sans frais. Et chacun peut apporter ses modifications.9 une partie de l’innovation dans le domaine informatique repose sur des communautés de développeurs indépendants qui se coordonnent sur internet pour travailler sur des projets communs dont ils ne cherchent pas à protéger les droits d’utilisation, pour se rémunérer sur la vente de licence. Leur motivation repose, en général, sur leur passion et à leur volonté d’accroître leur expérience/expertise personnelle. Ils valoriseront ensuite celle-ci, autrement (en prestant des services ou en développant d’autres produits).

10 Les plus récentes initiatives de l’union européenne, telles que le « European Design Innovation Initiative (EDII)”, visent à supporter davantage l’innovation non technologique ainsi qu’une plus grande proximité entre les utilisateurs, les chercheurs, les ingénieurs et les innovateurs au sens large.

Dans ce cadre, ouvrir les processus d’innovation devient un atout.

Les autorités européennes, à travers les voix des commissaires européennes respectivement en

charge de la Recherche, Máire Geoghegan-Quinn, ou des Technologies numériques, nellie Kroes,

commencent à défendre cette vision plus ouverte de l’innovation.

nellie Kroes, par exemple, a reconnu la valeur de l’ « open source »8 dans l’économie moderne.

Les navigateurs internet, reconnaît-elle, les applications mobiles, les systèmes opérationnels

pour serveurs informatiques les plus populaires de la planète tournent aujourd’hui, souvent,

sur des plates-formes mises au point en open source9. Sans cette forme d’innovation ouverte,

le monde des nouvelles technologies tel que nous le connaissons de nos jours ne serait sans

doute pas aussi avancé. D’où la volonté de la commissaire de protéger et de mettre en avant ces

approches ouvertes.

Plus largement, la digitalisation des échanges d’information concerne aujourd’hui tous les

«  knowledge workers  » et donc tous les innovateurs. Ces dynamiques d’échange ouvrent de

nouvelles perspectives de collaboration. L’émergence des réseaux sociaux permet à des individus

de se trouver dans le cadre de thématiques d’innovation partagées, indépendamment de liens

préexistants entre les structures auxquelles ils appartiennent. Ils démultiplient ainsi les

opportunités de connexion, sans prérequis sectoriels ou nécessité d’une proximité géographique10.

En vue de gagner des marchés à l’étranger, les entreprises doivent être en mesure d’accroître leurs

capacités de collaborer avec d’autres acteurs internationaux sur le plan de la R&D, du testing ou

encore de l’exploration de nouveaux marchés.

Encore une fois, ce défi nécessite une dynamique d’ouverture : ouverture des processus, ouverture

des organisations, mais aussi, ouverture des mentalités. Tout cela dans un environnement

technologique et économique global.

A côté de formes de collaboration classiques, vieilles parfois de plusieurs décennies, de nouvelles

pratiques émergent.

Dans la prochaine partie, nous passerons en revue certaines des nouvelles approches qui se

développent dans le domaine de l’open innovation. Certaines permettent d’accélérer la phase

de prototypage. D’autres donnent l’occasion de recueillir plus rapidement les feedbacks des

utilisateurs. Ils permettent de multiplier les partenariats qui, souvent, grâce aux réseaux, se

multiplient et se traduisent par une augmentation du nombre des opportunités commerciales qui

se présentent dans d’autres secteurs ou d’autres pays…

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p 11

11 La commissaire européenne en charge de la Recherche, 5 mars 2010, Innovation Summit, Lisbon Council http://ec.europa.eu/ireland/press_office/speeches-press_releases/geoghegan-quinn-innovation-summit-mar10_en.htm

12 neelie Kroes, vice-President of the European Commission responsible for the Digital Agenda “unlocking the digital future through open Innovation”, 4th pan-European Intellectual Property Summit brussels, 3 December 2010

«  Indeed, we need to ask ourselves some pretty profound uestions about how best to foster

innovation in the early 21st century. It may be by promoting the growing trend towards greater

openness. on the other hand, firms will inevitably vary in terms of how open they want to be,

depending on their line of business. »11 Máire Geoghegan-Quinn

« (…) I am talking about providing the European research and innovation community with a

platform that allows large scale experimentation and evaluation of smart service concepts under

real-life conditions. (…) The real challenge here is the now clichéd shift from working in silos to

collaborations. (…) openness is central to the success of the initiative. (…) Take San Francisco

and the issue of public sector information. In the second half of 2010 San Francisco created

regulations mandating open data, and made some software development tools available to the

public. Citizens have taken ownership of these facilities and created numerous applications that

use the city’s data. The next step is a shared process in which knowledge is made available

openly and transparently for all to develop Internet-based products and services on the new

platform. »12 Nellie Kroes

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Rapport Open Innovation / Awex

p 12

Deuxièmement, les autorités de régulation, dans le monde, sont

de plus en plus strictes et demandent, aujourd’hui, des garanties

croissantes.

Troisièmement, nous sommes désormais dans une industrie où

nous devons être globaux dès le départ. on ne peut plus se

permettre de développer une molécule seulement pour l’Europe

et les Etats-unis. Il faut également intégrer le brésil, la Chine,

la Russie...

Les tests cliniques, dès lors, sont plus longs et coûteux. Il faut

tenir compte des paramètres physiologiques de chaque région du

monde.

La forte augmentation des investissements en R&D, induite par

tous ces éléments, nous incite à ouvrir les processus d’innovation

pour partager davantage les risques et impliquer davantage

d’acteurs...

Quelle forme prend l’open innovation au sein du groupe?

En premier lieu, on l’applique en interne, en rompant les silos.

Dès qu’une piste d’innovation se précise pour le développement

d’une molécule, des groupes de travail multidisciplinaires se

forment. on implique directement des chercheurs, avec des

responsables marketing, des directeurs de projets, des experts en

financements, etc.

nous ouvrons, par ailleurs, les processus d’innovation vers

l’extérieur. Que ce soit au niveau des tests cliniques, de la

recherche ou du déploiement commercial, nous cherchons chaque

fois à nous associer avec d’autres. on partage ainsi les risques.

Le groupe américain Amgen, par exemple, travaille avec uCb

sur la phase 3 d’un médicament sur l’osthéoporose. La nécessité

est apparue assez tôt, sur base des informations émises par nos

laboratoires. Comme nous avons également un certain nombre

de pistes de recherche prometteuses en la matière et que nos

Le groupe pharmaceutique belge uCb occupe 11.000 personnes

dans le monde. Ses spécialités sont l’immunologie et les maladies

neuronales. Chaque année, la firme dépense 700 millions d’euros

en recherche & développement (R&D).

Didier Malherbe, administrateur délégué d’uCb belgique, explique

en quoi l’open innnovation s’est imposée à l’entreprise.

Pour l’open innovation s’est-elle imposée au groupe UCB ?

D’abord parce que l’innovation coûte de plus en plus cher.

Quand je suis arrivé chez uCb, tout le processus de développement

d’une molécule représentait un investissement d’environ 1 milliard

de dollars uS. Cinq ans plus tard, nous sommes à 2 milliards de

dollars uS.

Pour quelles raisons ?

D’abord, il ne s’agit plus aujourd’hui de découvrir les remèdes

contre quelques grandes maladies. nous entrons sur le territoire

de pathologies plus complexes, comme Alzheimer ou Parkinson,

que nous ne pouvons encore guérir…

“PouRQuoI L’oPEn InnovATIon S’IMPoSE CHEz nouS?” Interview - Didier Malherbe

Didier Malherbe

Administrateur délégué UCB Belgique

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Rapport Open Innovation / Awex

p 13

des stars de l’epilepsie, par exemple, est devenu un tout petit

monde, qui ne connaît plus les frontières...

Au cours des cinq dernières, l’évolution la plus marquante est bien

que la planète semble devenue un village. La référence n’est plus

le binôme Europe-Etats-unis auquel on pouvait ajouter le Japon.

Désormais, notre environnement direct est multipolaire. L’Inde, la

Russie et d’autres deviennent des interlocuteurs importants dans

notre industrie. Le pôle asiatique prend une importance majeure...

Cela nous oblige à rencontrer un maximum d’opérateurs à travers

le globe. De rencontrer des parcs scientifiques chinois, de nous

adapter à d’autres modes de pensée. De collaborer. D’imaginer de

nouveaux accords... La maîtrise des soft skils est extrêmement

importantes pour pouvoir nouer la confiance, indispensable en

matière d’open innovation.

Va-t-on, chez UCB, vers toujours plus d’ouverture dans les processus d’innovation ?

Certainement. L’ouverture interviendra plus tôt, plus rapidement.

Elle sera davantage multisectorielle. nous devons réfléchir

de plus en plus au delà du médicament. nous devons réfléchir

aux appareils médicaux, aux nouvelles façons d’avaler un

médicaments, aux autres instruments d’injection, etc. A titre

d’exemple, nous développons des auto-injecteurs pour permettre

aux patients de se signer eux-mêmes. nous devons nous poser

des questions telles que celle de savoir si nous ne devrions pas

travailler avec des acteurs hors de notre secteur. un producteur

de plastique, des producteurs informatiques comme Apple ou HP,

demain, par exemple, afin que le patient n’oublie pas de prendre

son traitement ou ne se trompe pas de dosage.

nous ne nous posions pas ce type de question aussi

systématiquement, voici trois ans. L’évolution des technologies

rend désormais possible des rapprochements entres des secteurs

que l’on ne pensait pas réalisables hier. Les nanotechnologies, par

exemple, pour mieux diffuser les principes actifs dans le corps.

Est-ce qu’un travail sur la culture d’entreprise est nécessaire pour entrer dans une logique d’open innovation ?

ressources ne sont pas infinies, le fait de collaborer avec des tiers

nous permet de mener nos explorations plus loin.

Enfin, une troisième forme d’open innovation touche les

investissements en recherche fondamentale. nous nouons

des accords avec les universités, notamment dans le cadre de

partenariats publics-privés soutenus par les pouvoirs publics.

Cela nous permet d’accéder à des projets de recherche très tôt

dans le développement.

Comment trouver et nouer les contacts avec des partenaires externes, en matière d’innovation ?

C’est toute la problématique du travail de business development.

D’une part, nous sommes en quête constante de nouvelles

molécules, développées par d’autres compagnies, et dont les

licences sont à vendre.

Dans les cas où ce sont des molécules que nous détenons et

développons, nous nous mettons à l’affût d’équipes de recherche

actives dans le domaines pour collaborer avec nous. on se trouve

beaucoup via les congrès, les lectures de revues spécialisées et,

bien sûr, internet.

Les affinités humaines demeurent essentielles. Si les relations

sont bonnes avec les interlocuteurs de certains universités,

par exemple, les projets de collaboration auront sans doute

des chances de se répéter. Cela dit, comme notre univers est

également global, nous aurons tendance à rechercher les meilleurs

à ce niveau.

vu qu’uCb s’est spécialisé, ces dernières année, sur les maladies

du système nerveux central, il est plus facile de trouver les experts

dans les domaines qui nous intéressent, d’où qu’ils viennent, de

Chine, d’Europe ou du Canada... La qualité des scientifique et leur

focus nous permet de concrétiser les contacts nécessaires.

Que change l’évolution de nouveaux outils web dans votre approche en matière d’open innovation ?

L’information est ouverte à tous. Quelqu’un qui souhaite se faire

connaître peut se rendre visible sans trop de difficultés. L’univers

Page 14: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 14

Les gens commencent à comprendre qu’il faut avoir une vision à

360° et qu’il faut se préparer mentalement à mettre en oeuvre

tous les partenariats possibles. Cela ne vaut pas que pour les

entreprises, d’ailleurs. Les universités aussi, par exemple, ont

changé leur vision des choses, en se détachant peu à peu de

la sacro-sainte pureté académique. Elles ont compris qu’elles ne

pouvaient continuer à vivre en vase clos. Cela leur a ouvert un

nouvel appétit pour la protection et à la commercialisation de

leur propriété intellectuelle.

L’innovation dans un groupe comme UCB vient-elle également, de plus en plus, de plus petites structures, comme des startups ou des spinoffs universitaires ?

Les équipes de business development passent en revue des

initiatives de ce genre, des produits développés par des startups

qui n’ont pas d’intention de commercialiser le produit de leur

recherche. D’autres cèdent l’utilisation de leur technologie en

échange du paiement de royalties. L’entrepreneurship innovant se

développe beaucoup plus vite dans les petites structures agiles,

c’est clair... Les associer, d’une façon ou d’une autre, fait donc,

effectivement, partie de notre stratégie. Au lieu de devoir engager

des équipes chez nous, on trouve les briques de recherche qui

nous manquent là où elles ont déjà été partiellement développées,

voire testées.

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Rapport Open Innovation / Awex

p 15

de licences de royalties sur la vente de chaque appareil intégrant

des processeurs dont l’architecture s’appuie sur son travail

de design. une excellente gestion de ses droits de propriété

intellectuelle à laquelle s’ajoute un réseau de prestataires et

de partenaires commerciaux extrêmement étendus assure à

l’entreprise la collecte de son dû.

Ce modèle d’innovation centré sur la dimension immatérielle plaît

beaucoup aux 200 équipementiers électroniques qui collaborent,

dans le globe, avec ARM.

A la différence d’Intel, qui produit et vend des semiconducteurs

standardisés, les processeurs développés par ARM sont

“customizés” pour chaque produit final. ARM offre du quasi sur-

mesure. La firme peut, à l’envi, ajouter des caractéristiques ou

ôter des fonctionnalités inutiles qui consomment de l’énergie.

Pas besoin de fonctionnalités GPS, par exemple, pour un appareil

photo HD... Cette souplesse plaît particulièrement aux grandes

marques de l’électronique, dont la production est de toute façon,

aujourd’hui, en grande partie sous-traitée auprès de “contract

manufacturers”.

ARM est presque 70 plus petit qu’Intel13. La premier n’en fait pas

moins désormais trembler le groupe californien.

ARM a bâti son succès sur une approche ouverte et décentralisée,

maîtrisant à la perfection la gestion des réseaux et des partenariats

externes. Son modèle semble plus en phase avec les équilibres

qui se forment en ce début de XXIème siècle. De son côté, Intel

incarne le modèle d’innovation et de développement industriel de

la fin du XXème siècle.

La flexibilité du modèle d’innovation permet une offre

technologique mieux adaptée aux besoins spécifiques des

différents marchés modernes. Selon le cabinet spécialisé AbI

Research, ARM pourrait rafler plus de 50% du marché global des

microprocesseurs, informatique comprise, d’ici 2014.

GLISSEMEnT DE PARADIGME

Cela ne surprendra personne : le marché des micro-processeurs a

beaucoup bougé, ces dernières années.

Depuis plus de vingt ans, le géant américain Intel est le leader

incontestable des semiconducteurs pour ordinateurs, avec près

de 86% du marché mondial des PC équipés de ses célèbres puces.

Pourtant, Intel perd de sa superbe. Le groupe californien, en

effet, a raté le virage des téléphones portables, des décodeurs

pour télévisions ou des tablettes digitales. En fait, Intel s’est

laissé voler la vedette par un acteur beaucoup plus petit que lui:

ARM.

Groupe originaire du Royaume-uni, ARM équipe en micro-

processeurs la plupart des smartphones et des tablettes vendues

dans le globe. Apple, Google ou les fabricants asiatiques

d’équipements électronique se fournissent auprès de lui.

Sur quoi se joue la différence ?

La firme britannique s’est focalisée sur la vente de son savoir-faire

immatériel. ARM conçoit l’architecture interne des processeurs.

Grande divergence avec Intel : elle ne fabrique pas ceux-ci... La

production est laissée à des fondeurs indépendants, Samsung ou

Texas Instruments, par exemple. ARM tire ses revenus du paiement

2. Une approche à multiples facettes

Source : Les Echos

LES PARCOURS RÉUSSI DE LA SOCIÉTÉ ARM

Les chiffres clefsEn 2010

Les secteursRépartition du chiffre d’affairesdu premier semestre 2011

Le cours de l’actionA Londres, en pence

743LICENCES

6,1MILLIARDSDE PUCES

2,5PUCES ARM PAR

TELEPHONE

100

200

300

400

500

600573

52%Royalties

36%Licences

12%Autres

90,5Jan2009

29 sept.2011

13 2.000 personnes dans le monde, pour 489 millions de dollars uS de chiffre d’affaires pour ARM, contre 35 milliards de dollars uS à Intel et 82.500 personnes.

Page 16: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 16

LES DIFFéREnTS vISAGES DE L’oPEn InnovATIon

L’histoire de ARM est-elle une success story de l’innovation ouverte ?

Indéniablement.

Si ARM est sollicité, c’est d’abord parce que ses clients (HTC, Asus, Apple, etc.) ne cherchent plus

à contrôler l’intégralité de leurs processus de développement et de fabrication.

Le Taïwanais Asus, lui-même, s’est transformé, en une poignée d’années, de sous-traitant de

quelques grands fabricants de l’électronique en leader du marché des netbooks. Le groupe a fondé

cette métamorphose sur sa capacité à fédérer diverses compétences venant de l’extérieur, à les

organiser pour concevoir et assembler un tout nouveau produit. De la feuille à dessin au produit

final, le délai écoulé s’est incroyablement raccourci.

L’innovation ouverte offre aux entreprises l’opportunité de décupler leur capacité de réaction et

de développement rapide.

La notion d’open innovation présente, cela dit, des facettes mutliples. Il existe de nombreuses

façons de mettre en pratique les principes de l’open innovation. Chaque entreprise peut trouver

la sienne propre.

ARM, pour sa part, travaille sur un modèle essentiellement porté sur la vente de sa propriété

intellectuelle à des tiers (via des systèmes de licences et de royalties).

L’avionneur EADS/Airbus, lui, partage les risques d’innovation avec ses fournisseurs de composants.

Le géant américain des produits de grande consommation Procter & Gamble (P&G)14 gère

des unités de veille commerciale et technologique extrêmement pointues qui lui permettent

d’identifier, dans des zones reculées du monde, les détenteurs (PME, individus, université,…) d’un

procédé spécifique ou d’un savoir-faire à haute valeur ajoutée pouvant lui être utile. La firme

les contacte. négocie un partenariat avec eux ainsi qu’un modèle de rétribution. P&G réemballe

ensuite l’ensemble dans un nouveau produit intégrant la technologie ou l’approche sous revue,

avant de le commercialiser dans le monde entier.

La célèbre balayette jettable Swiffer, par exemple, est le fruit d’une collaboration semblable entre

P&G et un petit fabricant japonais de tissus électrostatiques. La crème olaz, autre marque phare

de la multinationale américaine, est née des travaux de recherche d’une PME française, récupérés

ensuite par P&G.

14Dans le cadre de son programme Connect & Develop.

Page 17: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 17

15business Week, 9 avril 2009 http://www.businessweek.com/magazine/content/09_16/b4127052262113_page_2.htm

Pour P&G, cette ouverture est synonyme d’amélioration de ses processus d’innovation et donc de

mise sur le marché plus rapide. Les partenaires de la firme américaine, pour leur part, trouvent en

P&G un spécialiste du marketing et de la distribution de masse au niveau mondial, susceptible de

tailler en diamant la technologie brute développée initialement par eux. P&G leur ouvrent ainsi

la porte des marchés globaux.

Le groupe Daimler, en Allemagne, pratique l’open innovation sous une autre forme.

En 2008-2009, le groupe automobile a mis sur pied une compétition visant à donner à des

designers en herbe l’occasion de créer la ligne du prochain modèle de la micro-voiture Smart.

Ce projet, baptisé Daimler Smart Car, soumit aux internautes tous les outils de conception assistée

par ordinateur pour dessiner la future version de la deux-places de Daimler. Quelque 8.000

participants prirent part au concours organisé sur une plate-forme en ligne. Daimler recueillit

quelque 50.000 idées différentes en six semaines. Ces dernières alimentèrent précieusement la

réflexion des équipes design du constructeur automobile.

En belgique, open ERP est une jeune société informatique active dans le développement de

solutions logicielles de gestion d’entreprise (comptabilité, gestion de flux, CRM, etc.). La PME

compte des milliers de clients. Elle ne dépense pourtant quasi rien en recherche & développement

(R&D). Des centaines de développeurs à travers le monde, réunis au sein de communautés d’initiés,

consacrent des heures, chaque semaine, à développer la plate-forme. Gratuitement.

open ERP est une solution open source. Cette dernière n’appartient à personne, si ce n’est à la

communauté de ses développeurs volontaires. La PME belge se rémunère en vendant des services

d’installation et de personnalisation du logiciel. open ERP valorise son expertise de la sorte. En

2010, la société a levé plus de 3 millions d’euros de capital auprès d’investisseurs.

Citons, pour finir, le géant mondial de la mobilophonie vodafone.

La firme britannique a grandi à coup d’acquisitions. Mais au début des années 2000, de nombreux

cloisonnements limitaient les opportunités de croiser les expériences différentes propres à

différents départements et profils d’individus. Les dynamiques d’innovation en souffraient. Afin

de contourner cet embonpoint, vodafone choisit d’initier une série de collaborations avec de plus

petits partenaires, dans les pays émergents, notamment.

Le groupe de bristol a ainsi soutenu, par exemple, indirectement, le développement de M-Pesa,

un système de paiement par téléphone mobile très performant au Kenya. vodafone a également

constitué son propre fond de capital-risque interne, qui lui permettent d’entrer au capital de

startups innovantes.

Plus récemment, vodafone a mis sur pied une plate-forme internet destinée à recueillir les

idées et suggestions de personnes extérieures à l’entreprise. betavine, le nom de la plate-forme,

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Rapport Open Innovation / Awex

p 18

16 « Open Innovation in Europe: effects, determinants and Policy » Report Prepared for: European Commission Directorate-General Enterprise unit D1 Policy Development for Industrial Innovation, Project consortium : Austrian Institute of Economic Research, WIFo, vienna, (coordination), Fraunhofer Institut für System- und Innovationsforschung, ISI, Karlsruhe, Greenovate! Europe, brussels, nIFu, oslo, unu-Merit, Maastricht, MCI Innsbruck, Innsbruck, (subcontractor). oslo, July 19 2011

DéFInITIonS SouPLES ET RESTRICTIvES

Toutes ces initiatives peuvent, de près ou de loin, se réclamer

des principes de l’open innovation. Encore une fois, l’approche

déployée par chacune de ces entreprises diffère grandement,

selon les cas.

nous avons évoqué comment, au XIXème siècle, Thomas Edison

faisait un usage intensif du dépôt, de l’achat et de la vente de

brevets.

Le principe de la structuration d’écosystèmes locaux à travers les

clusters est un autre visage de l’innovation ouverte.

Si les clusters entrent, selon nous, dans le cadre du concept de

l’open innovation, d’aucuns défendent, notamment dans le monde

académique, une définition plus restrictive.

une étude sur l’open Innovation, commanditée par la Commission

européenne et rendue publique en juillet 201116, propose la

définition suivante : “La recherche d’information/connaissance

à l’extérieur, la sous-traitance des efforts de recherche et

d’innovation auprès de tiers (recherche contractuelle, notamment),

les collaborations directes et la commercialisation externe”.

Les auteurs identifient donc quatre dimensions principales en

matière d’open innovation.

L’étude européenne s’intéresse, cependant, davantage aux

dimensions liée à la recherche et développement (R&D). or,

comme on l’a vu, l’innovation déborde largement des seuls

aspects techniques et technologiques (hard).

Les auteurs du rapport soulignent néanmoins l’impact positif

incontestable de la collaboration directe sur la qualité et les

performances en matière d’innovation. une entreprise qui collabore

directement avec des tiers dans un processus d’innovation accroît

ses chances de mieux valoriser le produit de cette innovation par

rapport à un modèle où elle se limite à collecter de l’information.

ou à confier les tâches de développement à l’extérieur.

s’adresse à des développeurs, à des innovateurs qui veulent

suggérer un projet ou à des utilisateurs heureux de pouvoir tester

de nouveaux prototypes en échange d’un feedback. La plate-

forme betavine supporte les échanges entre des communautés au

niveau international. Elle organise aussi des concours avec des

écoles d’Afrique, du Moyen-orient ou du Royaume-uni. Plusieurs

applications mobiles de premier plan, liées par exemple à la

collecte d’informations climatiques pour les agriculteurs, ont vu

le jour grâce à cette plate-forme.

Grâce à la plate-forme collaborative Bétavine, Vodafone a soutenu le

développement de dizaines de services innovants sur le mobile en Afrique

“We were a bit naive thinking everything could be done in-

house. now the only way to create a fertile environment for

innovation is to have open platforms and leverage them.” Vittorio Colao, CEO Vodafone Group, 200915

Page 19: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 19

18Open Innovation: Researching a New Paradigm (oxford, 2006)19 « En 2003, se souvient Henry Chesbrough, lorsque que je faisais une recherche sur Google à propos du terme ‘Open Innovation’, je tombais sur 200 résultats. Huit ans plus tard, Google extrait

plus de 13 millions de ressources”.20 “L’open innovation comme un profond changement de méthode, de philosophie et d’approche de dynamiques d’innovation”.

Henry Chesbrough, professeur à l’université de berkeley, en Californie, propose lui une définition

plus souple de l’open innovation :

“Pour les entreprises, dit-il, l’open innovation consiste, d’une part, à pouvoir intégrer beaucoup plus

rapidement en interne des apports venant de l’extérieur, afin de stimuler et accélérer leurs processus

d’innovation. D’autre part, l’open innovation consiste également pour les entreprises à identifier

les innovations ou les compétences en interne qui ne sont pas exploitées afin de les valoriser avec

des tiers.”

En 2006, Henry Chesbrough a fortement popularisé le concept de l’open Innovation, grâce à

son livre “Open Innovation : Researching a New Paradigm”18. Le professeur de berkeley insiste

justement, lui, sur l’importance d’aborder l’innovation au delà de sa seule dimension R&D. Et donc

de l’ouvrir à d’autres disciplines, pratiques et états de pensée19.

Selon Henry Chesbrough, l’open innovation englobe à présent bien plus de pratiques que lors de

la sortie de son premier livre, au milieu des années 200020.

“Au début de mes travaux, explique Henry Chesbrough, on parlait, pour l’essentiel, du cas de

l’entreprise X ou de l’entreprise Y qui avaient ouvert leur centre de R&D pour autoriser des partenariats

avec des tiers à tel et tel endroit. Entre-temps, de nouveaux outils et de nouvelles plates-formes

digitales sont apparues. Ces dernières permettent à plus de personnes et plus de profils d’interagir

les uns avec les autres”.

“De nos jours, les idées des employés, par exemple, peuvent être plus facilement écoutées et leurs

idées valorisées ailleurs. Cela offre l’avantage de réduire leur frustration de n’être jamais entendu

dans leur propre organisation”.

Dans les années 90 et 2000, les entreprises se sont focalisées sur l’optimisation de leurs processus

et de la chaîne logistique d’approvisionnement. Ces méthodes et ces techniques ont depuis fait le

tour du monde. Elles sont désormais partagées par la plupart des opérateurs à travers le monde.

Elles ne sont plus un facteur différenciateur.

Les relais de croissance de demain passent donc, selon Chesbrough, par la relance des dynamiques

d’innovation.

Comment ?

Par une plus grande ouverture de l’organisation et une plus grande proximité avec les clients,

répond Henry Chesbrough.

« L’innovation n’est plus seulement

une affaire de blouses blanches. Les

processus d’innovation doivent s’ouvrir

davantage. »

Henry Chesbrough,

Executive Director Center for Open

Innovation, Berkeley

__

Source : http://facultybio.haas.berkeley.edu/faculty-

list/chesbrough-henry

Page 20: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 20

21 Le dernier livre du professeur de berkeley, sorti en janvier 2011, s’intitule “Open Services Innovation- Rethinking your business to grow and compete in a new Era”. Jossey-bass, 2011 Exemple cité par le professeur de berkeley : la compagnie américaine Xerox. La firme a rencore beacoup de copier, mais il offre aussi managed print services à travers le monde. Il facture seulement les copies imprimées et livrées. un client se moque de devoir gérer l’équipment chez lui. C’est aussi un changement.

22 Des plates-formes existent, comme Acquitech, en Wallonie.

L’open innovation peut aussi inclure des clients, des voisins, des

communautés d’experts, voire Monsieur et Madame Toutlemonde,

grâce, notamment, aux outils digitaux.

Enfin, la vente de propriété intellectuelle22, les contrats de

recherche ou la collecte systématique d’informations constituent

aujourd’hui une pratique d’open innovation bien rodée.

Les opérateurs économiques ont la possibilité de s’aventurer plus

loin et de s’ouvrir encore davantage.

Les logiques économiques et industrielles qui peuvent alimenter

la croissance et l’expansion internationale sont en train de

changer.

« Le groupe pharmaceutique belge Janssen Pharmaceutica, fondé

en 1953, est aujourd’hui l’un des premiers innovateurs du pays. Si

l’entreprise était née à notre époque, observe Philippe Lachapelle,

directeur des partenariats internationaux à l’Awex, Janssen

Pharmaceutica ne se serait sans doute par créée de la même

façon. Les modèles économiques des grands groupes changent. Ils

préfèrent travailler avec des partenaires locaux. Cela leur permet

aujourd’hui de tester de nouveaux paradigmes, sans devoir encourir

seuls le risque d’un important investissement ».

«  Certes, la logique de l’open innovation n’est pas sans risque,

poursuit Philippe Lachapelle. Toute la difficulté réside dans le

fait d’identifier la limite jusqu’à laquelle il faut aller en matière

d’ouverture. Cette limite dépend souvent de son positionnement

stratégique et de là où on se trouve… »

Dans la partie qui suit, nous passerons en revue les différentes

formes que peut prendre l’open innovation.

L’innovation n’est plus seulement une affaire de blouses blanches,

martèle-t-il. Les processus d’innovation doivent s’ouvrir

davantage. Cette ouverture passe, entre autres, par l’acceptation

de nouveaux modèles économiques ainsi que par le développement

intégré de nouveaux services21. Tous les employés de l’entreprise

peuvent participer d’une façon ou d’une autre à ces dynamiques

créatives.

Les employés ne sont d’ailleurs pas les seuls concernés. Les

fournisseurs, également, sont invités à collaborer au processus

d’innovation. Tout comme les centres de recherche, les universités,

sans oublier les clusters ou les pôles de compétitivité dans lequels

les Grandes entreprises les PME et startups peuvent resserrer leurs

liens et leurs échanges.

LISIÈRE FLOUE DÉVELOPPEMENT COMMERCIALISATION

ModèleR&D fermé

Revenus réalisés sur coeur de marché

Idées et technologies venant de l'extérieur

Acquisition d'actifs immatériels et de propriété intellectuelle

Vente d'actifs immatériels et de propriété intellectuelle

Vente Intégration dans des produits partagés

Création de spinouts immatériels et de propriété intellectuelle

Revenus réalisés sur coeur de marché

Nouvelles sources de revenus

Openinnovation

1

1

2

2

3

3

4

4

5

5

Source: Bax & Willems Consulting Venturing

Page 21: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 21

23 La forte concentration de connaissances et de compétences spécifiques à un secteur d’activité, d’une part, l’excellent maillage, la facilité d’accès et la communication ouverte entre les acteurs autochtones, d’autres, ont permis le regroupement des forces et des dynamiques innovantes.

24Les six pôles de compétitivité wallons sont Mecatech, biowin, Skywin, Wagrallim, Wallonia Logistics et WinGreen. 25 A côté des pôles de compétitivité, la Wallonie soutien également l’animation de clusters à part entière, tels que Infopôle-ClusterTIC, Twist, etc. dans des secteurs aussi divers que l’énergie,

l’informatique ou les nouveaux matériaux.

1. CLuSTERS ET PôLES DE CoMPéTITIvITé

«  Un cluster d’entreprises est une concentration géographique d’opérateurs économiques

interconnectés, de fournisseurs et d’acteurs institutionnels dans un domaine particulier ».

Michael Porter, professeur à la Harvard business School, a théorisé cette approche des clusters

(grappes, en français) d’entreprises voici près de trente ans.

Des dizaines de clusters sont aujourd’hui opérationnels dans la plupart des régions d’Europe.

Citons le cluster de la nano-électronique en Grèce ou la Solar valley à Thalheim, en Allemagne,

pour ne prendre que deux exemples parmi des dizaines.

Les clusters ne sont pas nouveaux au sens où l’approche fut mise en œuvre parfois très tôt, dans

certains pays. Dans le nord de l’Italie, à brescia ou en vénétie, les acteurs n’ont pas attendu

Michael Porter pour bâtir des clusters très dynamiques23, dans l’agro-alimentaire, la confection ou

les articles de sport. Au Royaume-uni, les autorités de la région de Cambridge ont commencé dès

les années 80 à structurer un vaste cluster couvrant les soins de santé.

Le modèle de clusters va parfois plus loin qu’une simple mise en relation organisée.

C’est le cas en Wallonie et en France, où s’est développé le concept de pôles de compétitivité24. outre

le fait d’organiser des rencontres entre acteurs d’un même secteur économico-technologique, un

pôle de compétitivité favorise les collaborations concrètes entre universités, grandes entreprises

et PME à travers le financement de projets d’innovation concrets25.

La dynamique entrepreneuriale et innovante qu’engendre les clusters, quelle que soit leurs formes,

a nourri la création de centaines de milliers d’emplois en Europe.

Les clusters sont aussi des aimants pour attirer les investissements étrangers. La présence d’une

constellation d’acteurs spécialisés dans une discipline et fortement interconnectés assure la

disponibilité de ressources humaines indispensables à la croissance d’un futur investissement.

Les clusters continueront sans doute à jouer un rôle majeur dans le développement économique

des pays européens, dans les années à venir. Les entreprises qui se tiendront à l’écart de ces

réseaux d’acteurs risquent de se retrouver éloignées des évolutions futures dans leur propre

secteur. Cet isolement peut leur devenir dommageable.

3. Une brève cartographie de l’open innovation

Page 22: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 22

26 En Europe, un observatoire européen des clusters a d’ailleurs vu le jour. 27 L’industrie biotech britannique représente, à elle seule, 20% du portefeuille des produits biotech européen…

notons que le modèle du cluster n’est plus, aujourd’hui, nécessairement limité à un bassin

géographique local. Les clusters se mettent désormais en relation les uns avec les autres26.

D’aucuns parlent désormais de la formation de méga-clusters. Le Royaume-uni, tout entier, par

exemple, se définit désormais comme un méga-cluster dans le domaine des biotechnologies27.

Les clusters s’internationalisent aussi. Dans les zones frontalières. Mais aussi bien au-delà. Parfois

à des milliers de kilomètres. Les pays émergents, eux-mêmes, comme le brésil, la Chine ou l’Inde,

adoptent des stratégies de formation de clusters, selon des schémas qui leur sont propres (lire

l’exemple de Recife).

Les clusters sont des outils stratégiques de l’innovation moderne. Ils fécondent les collaborations

entre opérateurs susceptibles d’innover et de créer des projets ensemble.

Reste que les clusters peuvent aussi, parfois, induire quelques inconvénients. La philosophie qui

sous-tend l’existence du cluster demeure relativement exclusive, propre à une discipline ou un

secteur, ce qui peut attiser le risque de repli thématique.

C’est ce que reproche, entre autres, Gunjan bhardwaj, professeur de management de la croissance

et de l’innovation à la European business School (EbS) : « Les décideurs politiques, dit–il, devraient

revoir certaines priorités afin d’accroître les bénéfices potentiels pour leur région ou leur pays de

s’inscrire dans des réseaux plus ouverts. Ils offriront ainsi à leurs entreprises un cadre différent pour

leur permettre de générer des innovations plus radicales et créatives. »

Dès lors, outre l’appartenance à un cluster spécialisé, il sera intéressant d’engager parallèlement

des relations avec des réseaux/clusters ouverts à d’autres thématiques. Des clusters dans d’autres

pays peuvent également s’avérer une porte d’entrée pour nouer le contact avec d’éventuels futurs

partenaires étrangers.

Page 23: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 23p 23

A Recife, dans le nord-est du brésil, un cluster régional a pris, en quelques années, une dimension

nationale et internationale.

L’incubateur C.E.S.A.R. (Recife Center for Advanced Studies and Systems), a vu le jour à Recife, en

1996, sous l’impulsion de différents professeurs de l’université fédérale de Pernambuco28. Porto

Digital, par ailleurs, est une initiative publique soutenue par l’Etat de Pernambuco, dont Recife

est la capitale.

un écosystème digital très dynamique a germé des efforts conjoints de ces deux opérateurs. Grâce

à eux, Recife est devenu le cœur de l’innovation digitale au brésil.

Porto Digital compte aujourd’hui 173 entités membres, dont 143 entreprises privées, pour un

chiffre d’affaires annuel de 431 millions de dollars uS.

L’impact de l’écosysème fut considérable pour cet Etat rural et pauvre du nord-est du brésil.

Entre 2001 et 2009, le poids du secteur des technologies de l’information dans le PIb de l’Etat du

Pernambuco est passé de 1,6% du PIb à 4%. D’ici 2020, le gouvernement local espère atteindre les

10%. Recife, grâce à sa dynamique de cluster, deviendra alors une technopole digitale mondiale.

Aujourd’hui, Porto Digital et C.E.S.A.R. donnent de l’emploi à des centaines de chercheurs,

spécialisés dans les technologies de l’information. Ils développent des processus, des services,

des produits ou des composants technologiques utilisables dans des domaines divers comme les

télécommunications, l’énergie, la finance…

Le cluster est également un extraordinaire moteur commercial bien au-delà des limites de Recife.

un peu plus de quinze ans après sa création, les clients locaux ne représentent plus que 2% du

chiffre d’affaires de C.E.S.A.R.

Mieux, Porto Digital est reconnu comme un bassin de talents mondial dans des niches comme

les jeu, la sécurité électronique et d’autres. De grandes marques globales, telles que Microsoft,

Motorola, nokia, Alcatel, ou encore Dell, s’installent à Recife pour collaborer avec les acteurs de

l’écosystème local. Coca Cola y a fait développer un jeu publicitaire.

Cette intégration internationale donne à Porto Digital un rôle de tête de pont pour les entreprises

et startups membres du cluster. Elle donne aussi l’opportunité aux acteurs brésiliens du digital

C.E.S.A.R Porto Digital (Recife, Brési l)

28 http://thenextweb.com/la/2011/05/22/why-brazils-most-innovative-institution-comes-from-recife/?awesm=tnw.to_18R8R&utm_content=spreadus_master&utm_medium=tnw.to-other&utm_source=direct-tnw.to , http://www.businessweek.com/magazine/content/05_30/b3944085_mz058.htm

Page 24: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 24

de se faire connaître et de nouer des accords commerciaux avec des clients non-nationaux. Le

client final est, dans ce cas, en Chine, en Inde, en Israël, aux Etats-unis, en Angola ou en Europe.

Les acteurs de Porto Digital ont participé au projet de télévision digitale lancé par l’union

Européenne. En contrepartie, C.E.S.A.R. a ramené de nouvelles connaissances qui lui ont permis

de contribuer au développement de la première chaîne de télévision interactive lancée au brésil.

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Rapport Open Innovation / Awex

p 25

29outsourcing Innovation, business Week, 21 Mars 200530Même si des variations subsistent selon les secteurs. 31 R&D : Vers la co-traitance, Le nouvel Economiste, 16/02/2011 Pour ces raisons, le comportement des acheteurs dans les grands groupes nécessite aujourd’hui de changer, également,

à ce niveau, pour passer la logique du rapport de force à une logique de collaboration.

L’optimisation de la chaîne d’approvisionnement n’est plus

cantonnée aux questions de production et de distribution.

La logique s’étend désormais aux tâches propres au processus

d’innovation30. En 2008, aux Etats-unis, la sous-traitance des

efforts d’innovation représentait déjà plus de 20à 25% du total

des investissements en R&D (voir le graphique ci-dessous).

Le secteur automobile est, aujourd’hui, sans doute l’un de ceux

qui est allé le plus loin dans l’externalisation de ses processus

d’innovation.

Comme dans l’électronique, les constructeurs automobiles sous-

traitent non seulement la production de parties complètes de

systèmes. une grande partie de l’innovation embarquée dans les

voitures neuves est le fruit des investissements R&D de sous-

traitants tels que bosch, valeo, Delphi ou visteon. Ces fournisseurs

de premier ordre occupent plusieurs milliers de personnes dans le

monde, maîtrisent de A à z la conception et la production de

sous-systèmes - l’injection motorisée pour bosch, par exemple,

ou les modules de commande électronique pour valeo…- que

Peugeot-Citroën, Ford ou Fiat n’ont plus qu’à intégrer sur la ligne

d’assemblage.

Si les constructeurs conçoivent les véhicules dans les grandes

lignes, l’innovation des sous-ensembles est du ressort de ces

sous-traitants intégrés. Et ces derniers, eux-mêmes, s’appuient

sur de plus petits sous-traitants en deuxième ligne et troisième

ligne. La chaîne de l’innovation se retrouve ainsi éclatée, à l’instar

de la chaîne de production ou de la chaîne logistique31.

2. L’InnovATIon AvEC LES FouRnISSEuRS

L’innovation avec les fournisseurs a beaucoup gagné en popularité.

Ces dernières années, elle fut l’un des facteurs de changement

les plus marquants dans l’industrie moderne. En cause : la

difficulté grandissante de maîtriser des processus d’innovation

de plus en plus complexes, rapides et pluridisciplinaires, d’une

part ; la volonté de répartir les risques financiers relatifs aux

investissements en innovation sur un plus grand nombre

d’acteurs, d’autre part.

Dans l’industrie électronique, les groupes comme Philips, Dell,

Hewlett-Packard ou Motorola sous-traitent depuis longtemps

une partie de la conception technique de leurs appareils,

principalement en Asie (Taïwan, Corée du Sud, Japon, Chine,

Inde…).

Les grandes marques se sont concentrées sur le rôle d’ensemblier.

Elles ont transféré une partie de la responsabilité en matière

d’innovation à des sous-traitants qualifiés de original-design

manufacturer (oMD). Certains de ces oMD - tels que les Taïwanais

Foxconn, HTC, Flextronics ou Quanta – se sont transformés en

véritables multinationales. Ils maîtrisent aujourd’hui l’intégralité

de la conception technique de certains produits électroniques

(télévision, téléphones portables, etc.). Pour les grandes marques

internationales, l’innovation passe parfois par un simple shopping

auprès de ces géants industriels. Ces derniers leur proposent

régulièrement de nouvelles solutions technologiques, incluant le

développement, la production en masse et la livraison.

Si, à la fin des années 90, le groupe informatique Apple, par

exemple, a pu s’aventurer sur le terrain des baladeurs musicaux

(iPod) puis de la mobilophonie (iPhone), malgré une absence

d’expérience dans ce domaine, l’entreprise californienne le doit

notamment à l’essor des oMD.

Ce transfert des activités d’innovation vers les sous-traitants n’est

pas propre aux secteurs de l’électronique, professionnelle ou grand

public. Dans le domaine des sciences du vivant, les sous-traitants

offrent des prestations de plus en plus sophistiquées, tout comme

dans les secteurs de l’automobile ou de l’aéronautique29.

POURCENTAGE DES INVESTISSEMENTS EN R&D DES ENTREPRISES AMÉRICAINES EFFECTUÉS À L'ÉTRANGER, PAR SECTEUR (2008)

PharmacieSemiconducteurs

InformatiqueChimie

Equipements électriquesTextiles et vêtements

Automobile

0% 10% 20% 30% 40% 50%

Source : National Science Foundation, Business R&D and Innovation Survey

Page 26: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 26

32 http://www.businessinsider.com/dreamliner-supply-chain-2011-9?op=133 Le 787 Dreamliner accuse trois années de retard au niveau de ses livraisons aux transporteurs aériens. Les problèmes tiennent toutefois davantage à la gestion de la chaîne logistique

qu’à la qualité de l’innovation produite par les fournisseurs extérieurs.34 En France, 80% des entreprises investissent dans leur innovation. L’organisation des efforts en la matière reste toutefois très isolée et trop peu intégrés, tant en interne qu’en externe,

selon une étude du consultant Lowendalmasaï, en octobre 2011.

Le scénario est à peine différent dans le secteur de l’aéronautique.

Pour la production de son 787 Dreamliner, par exemple, boeing

a mis au point un modèle de sous-traitance, à la fois sur la

production et la co-innovation, reposant sur un nombre limité

de cinquante sous-traitants stratégiques, répartis à travers le

monde32 .

Chaque sous-traitant est responsable d’un sous-système de

l’avion. Ce partenaire contractuel est tenu de s’occuper à la

fois du développement et de la production (voir graphique). De

gigantesques pièces détachées (empennage, nez, etc.) voyagent

ainsi à travers le monde jusqu’au hangar d’assemblage33.

Les sous-traitants de premier ordre prennent en charge la gestion

des processus d’innovation, pour le système qui les concerne,

avec des partenaires qui leur sont propres. Au total, 5.400 usines

sont englobées dans ce vaste réseau.

Cette évolution vers une chaine d’approvisionnement globale,

impliquant les fournisseurs dans le processus d’innovation, est

doublement importante pour les PME. En particulier les PME

actives dans la production de produits semi-finis. Disposer de

la capacité de participer aux processus d’innovation devient

un argument commercial à part entière dans les négociations

commerciales avec les donneurs d’ordre34 .

La taille limitée d’une organisation n’est plus un frein pour

décrocher un contrat international. Les clusters, les programmes

de recherche publics-privés, les nouvelles formes modernes d’open

innovation (voir plus loin) sont autant de façon, pour une PME, de

déployer à son tour ses propres capacités d’innovation.

une nouvelle culture de la collaboration se diffuse, aujourd’hui,

dans le monde des petites et moyennes entreprises. n’importe

quelle PME peut aujourd’hui prendre l’initiative d’actions de

co-innovation avec des partenaires, des fournisseurs voire des

concurrents.

C’est ce que font de plus en plus d’acteurs, à l’instar du lunetier

français Atol. Grâce à cette approche collaborative, Atol a pu se

recréer un écosystème innovant en France et redéfinir son modèle

économique.

Spirit Aerosystem fournit à Boeing le nez du B787, le sous-traitant prenant en

charge le développement d’une partie du système

__ Source : Spirit Aerosystem

Fixes and movableleading edgeSpirit, U.S.

Forward fuselageSpirit, U.S.

Forward fuselage IIKawasaki, Japan

Center fuselageAlenia, Italy

Aft FuselageVought, U.S.

Horizontal stabilizerAlenia, Italy

Tail �nBoeing, U.S.

Main landing-gearwheel wellKawasaki, Japan

Centerwing boxFuji, Japan

Landing-geardoorsBoeing, Canada

Landing gearMessier-Dowty,U.K.

Cargo-access doorsSaab, Sweden

Passenger-entry doorsLatecoere, France

EngineRolls-Royce, U.K.and GE, U.S.

Engine housingsGoodrich, U.S.

WingMitsubishi, Japan

Wing tipsKAL-ASD, Korea

Movable trailing edgeBoeing, Australia

LES PARTIES DU BOEING 787 DÉVELOPPÉES ET PRODUITES PAR DES SOUS-TRAITANTS AUTOUR DU GLOBE

Source : Boeing

Page 27: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 27

Au début des années 2000, le fabricant de lunettes Atol, basé dans le Jura français, avait pris la

décision de délocaliser sa production en Chine. Cinq ans plus tard, la firme fit marche arrière et

rapatria une partie de sa production en Europe. but : gagner en proximité avec ses partenaires

afin d’améliorer les processus de co-innovation avec eux.

Grâce à cette démarche de co-innovation, Atol a pu concevoir de nouveaux produits plus originaux

et monter en gamme. La mise au point de branches interchangeables « clipables », entre autres,

lui a permis d’élever le prix de vente des lunettes à 200 euros. La firme a ainsi pu viabiliser le

retour du dispositif de production en Europe.

La possibilité d’entrer dans une dimension de partenariats étroits avec les fournisseurs, et de

co-innover avec eux, était indispensable. Le gain justifiait le risque lié à la hausse des coûts de

production consécutive au retour dans des usines de l’Hexagone.

« En France, nous n’avons pas la barrière de la langue, justifie néanmoins Philippe Peyrard, Pdg du

groupe d’Atol35. Nos sous-traitants savent ce que nous souhaitons. Leur savoir-faire leur permet de

trouver des solutions, de nous faire des propositions. C’est ainsi que nous avons pu baisser le coût

de revient de nos lunettes à montures métalliques, en concevant des modèles sans vis ni soudures ».

Si le groupe a relocalisé sa production dans le Jura, c’est surtout, aussi, parce que les industriels

locaux s’inscrivaient eux-mêmes dans une démarche d’ouverture et de co-innovation. « Pour y

avoir déjà travaillé, je savais que les industriels locaux pouvaient innover davantage, et nous

apporter une valeur ajoutée stratégique pour nous démarquer de la concurrence », explique Philippe

Peyrard36.

Atol s’est inscrite dans une politique de customisation et de design qui renforce l’importance de

la réactivité, de la vitesse de création, de la mise en production et, donc, de partenariats ouverts

très souples.

Atol rapatrie sa production en France pour co-innover avec ses sous-traitants

Source : http://www.opticiens-atol.com/img/pages/

collections/tae2/tae2_branches_background.jpg

35Atol mise plus que jamais sur le Made in France, Le Figaro, 26/08/2011 36Idem

Page 28: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 28

37 Elles défendent les intérêts communs des acteurs du secteur concerné. Mais elles s’assurent également d’une forme de veille et de l’échange des meilleures pratiques entre les différents membres.

38Ford to Join With Toyota to Develop Hybrid Pickup Trucks, SUVs, bloomberg, 23/08/2011

rester à la pointe des développements les plus récents dans les

métiers informatiques. Les compagnies commerciales se livrent

par la suite bataille sur le terrain de la prestation de services.

Complexité technologique, immaturité des marchés émergents,

globalisation… En amont du bras de fer concurrentiel, les raisons

de s’entendre et de coopérer à la mise en place d’un terrain de

jeu technologique commun ne manquent plus. L’innovation avec

les concurrents est devenue fréquente au stade de la recherche

précompétitive, au niveau de la recherche fondamentale.

Certes, les discussions entre opérateurs concurrents ne se font

pas toujours sans heurts.

Rappelons-nous de la longue lutte entre les fabricants

d’électronique grand public japonais et européens, dans les

années 80, pour imposer la norme vHS dans les magnétoscopes.

ou la bagarre qui opposa Européens et Américains, dans les années

90, pour l’adoption de la norme GSM, à l’aube de l’explosion du

marché de la mobilophonie.

Des entreprises concurrentes peuvent aussi joindre leurs forces

sur un segment de marché afin d’accélérer le développement d’un

nouveau champ d’innovation. Le partenariat signé au mois d’août

2011 entre les constructeurs automobiles Ford et Toyota pour co-

développer un train de motorisation hybride pour les utilitaires,

entre dans cette catégorie38.

Signalons, enfin, une autre forme d’innovation ouverte apparue

ces dernières années, dans laquelle une entreprise supporte

le développement d’un écosystème concurrentiel… pour des

tiers. L’opérateur, par exemple, met à disposition une plate-

forme technique dont il laisse toutes les spécificités ouvertes.

Les constructeurs de consoles de jeux utilisent ce procédé pour

soutenir l’apparition d’une large communauté de développeurs

indépendants. La PlayStation de Sony, dans une certaine mesure,

ou, surtout, le App Store pour l’iPhone d’Apple, ou le Android

Store de Google, opèrent ainsi. Cette approche favorise la création

d’un écosystème d’innovateurs autour de soi. Ce dernier aura plus

de valeur pour l’entreprise, estiment-ils, que le fait de se bâtir

une citadelle, en voulant contrôler la chaîne de valeur de A à z.

3. InnovATIon AvEC LES ConCuRREnTS

Depuis les guildes et les corporations, les collaborations entre

entreprises sont légion. Pensons, plus récemment, aux fédérations

professionnelles qui existent dans toutes les industries37. De

même, les coopérations visant à définir collectivement de

nouveaux standards techniques au sein d’une même profession,

dans les chemins de fer ou dans le secteur de l’électricité.

En matière d’innovation, ces collaborations initiales pavent de

plus en plus souvent le futur de toute une industrie nouvelle, qui

n’aurait pas éclos sans ce consensus de départ.

La création, en 1982, de la Semiconductor Research Corp fut

sans doute déterminante, par exemple, pour l’essor de l’industrie

des semi-conducteurs. Trente ans après sa mise sur pied, cette

communauté collaborative regroupe quantité d’acteurs spécialisés,

dont 237 universités. Ces acteurs ont mis leurs moyens en commun

pour générer un socle de savoirs partagés. Tous les membres du

consortium ont pu profiter d’une base solide sur laquelle ils ont

pu construire leurs produits respectifs. Les groupes Intel et AMD,

les principaux acteurs au niveau du secteur informatique, avant

de devenir de féroces concurrents, ont planté leurs racines dans

cette vaste initiative d’innovation collaborative.

De même, l’incroyable succès du modèle open source, en

informatique, a démontré les vertus et l’efficacité des modèles

ouverts et collaboratifs.

Le système opérationnel Linux (adversaire du Windows de

Microsoft) ou le navigateur web Mozilla Firefox, deux des plates-

formes les plus utilisées dans l’informatique moderne, sont

nés dans les communautés open source. De nouveaux outils

informatiques complexes, réclamant la construction d’un savoir

cumulatif (chaque version se basant sur la précédente), n’auraient

peut-être jamais vu le jour sans ces collaborations ouvertes.

Certains industriels ne s’y trompent plus. Les géants informatiques

IbM et Sun Microsystems, par exemple, ont apporté et apportent

encore une contribution importante au développement de

l’environnement open source. Cette implication est précieuse pour

Page 29: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 29

39http://www.lesechos.fr/economie-politique/france/dossier/0201396664069/0201396464586-les-pme-decouvrent-l-innovation-ouverte-168381.php40 Entre 2008 à 2009, le chiffre d’affaires consolidé de Giordano est passé de 50 à 54,5 millions d’euros. Quant à Clipsol, elle a fait progresser son chiffre d’affaires de 14,6 millions d’euros en

2008 à 26 millions en 2009.

La co-opétition est une pratique tout à fait adaptée pour les PME.

En 2008, Clipsol et Jacques Giordano Industries, deux fabricants de panneaux solaires thermiques

français, ont mis sur pied une collaboration en vue de faire face à la concurrence étrangère.

objectif du partenariat39 : partager les connaissances et coordonner les efforts d’innovation pour

améliorer le rendement des panneaux et réfléchir à un système de stockage de l’énergie.

L’approche s’avéra fructueuse au point que, trois ans plus tard, le partenariat accueillit d’autres

opérateurs, tels le Commissariat à l’Energie Atomique, l’Institut national de l’Energie Solaire et

le Centre national de la Recherche Scientifique. Les pouvoirs publics, eux-mêmes, finalement,

décidèrent de débloquer un budget pour soutenir l’initiative.

Au départ, cette démarche coopérative permit à Clipsol et à Jacques Giordano Industries de

mutualiser certains achats de matières premières (verre, aluminium, plastiques,…). Par la suite,

ensemble, ils ont mis en commun leurs compétences pour mettre au point des améliorations à

leurs produits. Ainsi, les deux PME ont renforcé leurs positions concurrentielles respectives, grâce

à des meilleurs produits (meilleur rendement, prix moindre), par rapport aux autres producteurs

européens, hors de l’Hexagone40.

Cette collaboration entre opérateurs d’un même secteur, présents sur des marchés qui se

chevauchent, leur a également permis de s’insérer plus facilement dans des programmes de

soutien et d’aide à la recherche, en collaboration avec des centres d’innovation publics ou privés

ainsi que des universités, dans le cadre notamment des pôles de compétitivité français.

Un modèle de co-opétit ion dans le secteur des panneaux solaires

Source : www.clipsol.com

Page 30: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 30

4. IDEA MARKETS ET CoMMunAuTéS D’InnovATIon

Jusqu’ici, nous avons évoqué des formes d’innovation qui mettaient en relation des organisations

qui se connaissaient au départ, avant de collaborer.

Les nouvelles plates-formes digitales ouvertes permettent à des individus n’ayant jamais été en

contact les uns avec les autres d’innover ensemble. Que ce soit sur de micro-projets ou dans une

perspective de plus long terme.

voici quelques années, des espaces virtuels dédiés à l’innovation collaborative sont apparus sur la

Toile. Aux Etats-unis, où ils ont en premier fait leur apparition, ces sites internet ont été baptisés

: idea markets.

Les idea markets s’apparentent à des foires aux idées virtuelles. n’importe quelle entreprise

confrontée à un écueil qu’elle ne parvient pas à surmonter peut expliquer le problème sur une

plate-forme en ligne. objectif : laisser un tiers, quelque part dans le monde, proposer une réponse

ou une solution.

Le site internet Innocentive.com est l’un des plus anciens idea markets publics. un des plus

connus dans le monde, également.

Innocentive met chaque jour en relation des milliers de « solution seekers » avec près de 200.000

« problem solvers ». une grande partie sont des scientifiques. Les « solvers », fixent eux-mêmes

le prix de leur intervention. De 5.000 dollars uS à 100.000 dollars uS, par exemple. Tous les

domaines et types de problèmes peuvent être couverts, que ce soit la recherche d’un processus

de synthèse pour une protéine ou la nécessité de trouver un nouvel élément pour la conception

d’une lentille de téléscope, etc. Innocentive augmente les chances de trouver une solution pour

un coût marginal.

Les plates-formes d’innovation ouvertes ne sont pas LA formule miracle… Il n’empêche : le taux

de succès sur Innocentive tournerait, aujourd’hui, autour de 40%. Autrement dit, dans quatre cas

sur dix, les solutions apportées s’avèreraient répondre de façon optimale à une problématique

donnée... Les contributions restantes n’amènent, en général, qu’une solution partielle. Toujours

bonnes à prendre, parfois.

Les idea markets gagnent en force.

Hypios, une autre plate-forme ouverte de résolution de problème, recense à présent 150.000

scientifiques inscrits. En 2010, un appel y fut lancé, par exemple, pour trouver une solution en

vue d’étanchéifier la fuite de pétrole consécutive à l’explosion d’une plate-forme pétrolière de bP

dans le Golfe du Mexique. une question relative à l’extraction pétrolière et au colmatage en eau

froide trouva une réponse grâce à la proposition d’un spécialiste du ciment.

Page 31: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 31

La transdisciplinarité des solutions proposées stimule la créativité, insistent les fondateurs

de Hypios.

Innoget, nineSigma, IdeaConnection, Innovation Exchange sont d’autres exemples de idea

markets en ligne.

A côté des idea markets indépendants, les réseaux sociaux digitaux deviennent aussi des lieux

d’échange d’idées et de feedbacks professionnels. Certains sous-services disponibles sur les

réseaux sociaux permettent, eux aussi, de poster une question ou un problème à résoudre.

Ainsi, le service « Answers » du réseau social LinkedIn donne la possibilité à chaque inscrit de

poser une question et de solliciter la créativité de contributeurs tiers. WikiAnswers ou Yahoo

Answers, des services identiques, recensent, eux, plusieurs dizaines de millions d’utilisateurs.

Quora, un autre site spécialisé dans la résolution de questions, utilise lui l’approche du micro-

blogging (comparable à Twitter), avec le même objectif. A ce jour, Quora compte plus de un

demi-million d’utilisateurs. Les questions pointues posées sur ces forums sont en général traitées

par des professionnels relativement spécialisés.

D’autres communautés spécialisées se forment par ailleurs, indépendamment, sur le net. Les

participants se trouvent en fonction de leurs spécialités ou de leurs centres d’intérêt et non pas

à partir d’une question lancée à la cantonade numérique.

Là aussi, les réseaux sociaux LinkedIn, Xing, viadeo, Facebook, ning jouent un rôle grandissant

pour supporter les échanges au sein de ces communautés thématiques. Ces espaces de discussions

virtuels peuvent se transformer en véritables écosystèmes digitaux, dans lesquels des internaute

du monde entier partagent des informations, des idées ou simplement entrent en contacts avec

d’autres professionnels. Les participants s’alimentent mutuellement. Ils améliorent leur capacité

de veille. Ils suscitent de nouvelles opportunités de partenariats, dans le cadre de développements

nouveaux, avec des opérateurs situés dans d’autres régions du monde.

Enfin, des plates-formes d’échange indépendantes émergent également en dehors des réseaux

sociaux. Syndicom, par exemple, en est une. Syndicom est une plate-forme sur laquelle des

chirurgiens du dos échangent sur des questions liées aux nouvelles thérapies, à la mise au point

de nouveaux protocoles, etc. Festo Engineering est une autre plate-forme en ligne, gérée depuis

la Californie, destinée aux professionnels des technologies photovoltaïques. Chaque membre de

ces communautés spécialisées profite de ces rencontres et discussions virtuelles pour enrichir ses

propres approches et procédures.

Page 32: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 32

Precyse Technologies est une société américaine spécialisée dans les technologies RFID (système

d’identification par radio fréquence). A l’instar de nombreuses entreprises de pointe, Precyse était

à la recherche d’un moyen d’améliorer la durée de vie de ses batteries sur ses produits sans fil.

un des responsables de l’entreprise a expliqué le « défi » sur un Idea Market.

Pas loin de 500 contributeurs répondirent à l’appel, originaires de 64 pays différents.

Après 90 jours, Precyse avait collecté un total 33 propositions utiles. L’une des idées suggérait de

récupérer une partie de l’énergie diffusée dans les ondes radios afin de limiter l’utilisation de la

batterie. Cette solution fut retenue. Son auteur fut rémunéré.

En procédant seule, la PME aurait mis beaucoup plus de temps et n’aurait sans doute pas imaginé

une option aussi originale qu’efficace…

Precyse

Reçoit 33 suggestions uti les col lectées en 90 jours

Source : Precyse Technologies

Page 33: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 33

41http://www.levidepoches.blogs.com/contagiousideas/2011/03/co-creation-communities-can-be-goldmines-for-brands-by-justin-pearse.html

une marque et son public grâce au phénomène d’appropriation.

Dans certaines entreprises, l’ouverture du processus d’innovation

à la population des internautes vise aussi, pour cette raison, un

objectif marketing.

bref, un nombre croissant d’entreprises se tournent, de nos jours,

vers le crowdsourcing.

Selon le Economist Intelligence Unit, 75% des grandes entreprises

jugent que leurs clients sont une source majeure d’idées neuves41.

Celles qui mettent réellement ce principe en pratique ne sont

toutefois, encore, qu’une minorité. bien que les expérimentations

se multiplient. Certaines fois de manière plus structurelle.

Depuis plusieurs années, la firme danoise Lego met en ligne un

outil de conception 3D utilisable par quiconque pour imaginer

de nouvelles scènes lego. Quelques uns des meilleurs projets

sont transformés en boîtes de jeu vendues dans le commerce.

Les contributeurs peuvent espérer percevoir des royalties sur les

ventes.

Le groupe Fiat, lui, a récemment inauguré un programme de

crowdsourcing pour le développement d’un nouveau modèle: la

MIo. Cette voiture compacte est destinée au marché brésilien. Les

internautes lusophones peuvent soumettre leurs idées au sujet

de l’esthétique, du profil techniques, de la voiture. Ils sont aussi

appelés à voter pour les meilleures propositions. Fiat qualifie cette

action d’approche open-source appliquée à l’automobile.

Dans l’agro-alimentaire, le groupe Danone, le thés Tetley, le

fabricant de boissons vitaminWater, ont également élaboré des

stratégies de consultation de leurs clients et mis en place des

programmes pour leur permettre de participer à la co-création de

nouveaux goûts ou produits. Le fabricant d’outillage domestique

Fiskars est un fervent adepte du crowdsourcing. L’entreprise

entretient plusieurs forums digitaux en ligne sur lesquels

elle collecte les réactions et commentaires de ses clients. Ces

informations sont instantanément traitées par les départements

concernés qui intègrent, en général, immédiatement celles-ci afin

de remplir le « tuyau » d’innovation.

Dans l’industrie et les activités inter-entreprises (b2b) également,

5. LA Co-CRéATIon ET LE CRoWDSouRCInG

Comme on l’a vu, les outils digitaux offrent de nouvelles

opportunités de partager et puiser dans le potentiel créatif d’une

population de professionnels actifs sur internet.

Il est toutefois possible d’aller un cran plus loin, encore, dans

l’ouverture des processus d’innovation… en ouvrant la dynamique

à n’importe quel individu qui le souhaite. Expert ou non.

« S’il y a plus d’idées et d’intuition dans plusieurs cerveaux que

dans un seul, la population la plus créative ne peut être que le

monde… » Tel est le principe du crowdsourcing. Laisser la foule

s’emparer et participer à sa propre dynamique d’innovation. Il

s’agit de la forme ultime de l’open innovation.

Certes, les concours d’innovation promettant un prix important

à l’auteur d’un exploit technique exceptionnel ou au concepteur

d’une solution révolutionnaire, d’où qu’il ou elle vienne, sont

nés voici bien longtemps. Charles Lindbergh, par exemple, en

1927, inaugura la première traversée aérienne sans escale de

l’océan Atlantique motivé par la récompense promise par un

homme d’affaires américain à quiconque réussirait la prouesse.

Les mondes digitaux, néanmoins, démultiplient considérablement

les occasions d’impliquer l’homme de la rue dans des processus

d’innovation jusqu’ici relativement clos.

Se tourner vers la population au sens large présente comme

premier avantage de pouvoir se rapprocher au maximum de ses

clients. Le processus d’innovation est ainsi mené au plus près du

marché. Les retours d’expérience des utilisateurs sont immédiats.

Autre atout : les inputs donnés à la dynamique d’innovation sont

plus diversifiées. Le processus est plus créatif. Le fruit de ces

efforts sont moins prévisibles, donc susceptibles de se démarquer

davantage de la concurrence. Sans compter que le processus

d’idéation (génération d’idées) est aussi, potentiellement, moins

coûteux.

Enfin, ce travail de création ouverte aux inputs et idées de clients

et autres individus intéressés permet de resserrer les liens entre

Page 34: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 34

opportunité de profiter de l’ouverture de grandes entreprises ou

d’autres PME à la collaboration. Guetter ces ouvertures entrera

sans doute, de plus en plus, aux tâches dévolues aux personnes

en charge de l’innovation au sein des organisations.

En ce qui concerne la pratique du crowdsourcing par les PME

elles-mêmes, pour garnir leur portefeuille d’innovation, il s’agit

bien sûr, là aussi, d’une option à envisager. Le crowdsourcing

nécessitera cependant l’adoption d’un état d’esprit et d’une forme

d’organisation beaucoup plus souple, transparente et flexible.

Autant en être conscient.

le crowdsourcing gagne en popularité.

Le conglomérat industriel General Electric (GE) a récemment

lancé un concours majeur baptisé : «  GE open-innovation  ».

L’action est dotée d’un budget de 200 millions de dollars uS.

objectif poursuivi : accélérer le développement du groupe dans le

domaine des technologies vertes. Le public pourra voter pour les

meilleures pistes et idées. Les suggestions les plus intéressantes

seront récompensées d’un prix de 100.000 dollars uS et plus…

Les startups les plus prometteuses, repérées dans ce cadre, sont

censées bénéficier d’investissements généreux de la part de GE.

« Nous voulons puiser dans le potentiel de la cloud industry  »,

indique sur le site web du projet Jeffrey Immelt, le CEo de GE,

faisant référence au cloud computing, l’informatique distribuée

qui révolutionne aujourd’hui le secteur IT. «  De notre côté,

nous avons besoin de votre capacité d’innovation. De votre côté,

vous avez besoin de notre taille, pour atteindre les marchés  »,

clame-t-il.

La société américaine de location de films en ligne netflix a, elle,

offert des récompenses aux développeurs lui ayant soumis les

suggestions les plus pertinentes pour améliorer son système de

recommandation automatique baptisé Cinematch.

Le crowdsourcing s’imposera-t-il un jour comme une façon naturelle

d’organiser l’innovation d’une entreprise, peut-on penser ?

Pour n’importe quel individu ou n’importe quelle PME sur la planète,

le développement du crowdsourcing constitue une extraordinaire

Source : Fiatmio.br

Page 35: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 35

42www.tchibo-Ideas.com

Tchibo est une chaîne de café allemande fondée en 1949. La marque propose une large gamme de

produits allant du café aux vêtements et aux voyages, en passant par les équipements ménagers,

etc.

En 2008, Tchibo a créé la plateforme de co-création communautaire « Tchibo-Ideas.de ». La firme

y recense les problèmes signalés par les consommateurs, ainsi que les solutions que ces derniers

proposent. Quelque 9.000 membres sont ainsi mis en relation par la marque. Aucune sélection

préalable n’est opérée sur les problèmes énoncés.

Tchibo se concentre sur le travail d’animation de la plateforme. Chaque mois, la marque récompense

trois produits plébiscités par la communauté. Et chaque année, les experts de Tchibo élisent une

idée, qui fera l’objet d’une commercialisation exclusivement réservée aux magasins Tchibo.

Les points de vente Tchibo ont la caractéristique de renouveler leur offre de produits chaque

semaine. D’autre part, elle présente des produits essentiellement pratiques. Pour Tchibo,

s’intéresser au plus près à l’avis des consommateurs est donc particulièrement approprié.

Les échanges par le biais de cette plate-forme transparente, accessible et ouverte au dialogue,

nourrissent un vivier d’idées. Emergent des tendances et des individus pour les soutenir

(influenceurs). Tchibo n’a plus qu’à s’en inspirer, pour mettre ensuite en production des produits

constamment adaptés aux goûts des clients, et concevoir un marketing plus efficace. En un temps

record, Tchibo met sur le marché les meilleures idées, sous sa propre marque.

De leur côté, les participants tirent profit d’un nouvel environnement pour l’échange d’expériences.

Cet espace C2C (consommateur à consommateur), basé sur l’humain, parle de choses vécues, rend

service et apporte aussi un apprentissage.

une internationalisation de la plateforme42 devrait permettre de développer encore cet espace

créatif et l’expansion de valeur qu’il génère. Le but étant de fédérer une communauté de

consommateurs toujours plus diversifiée et interconnectée.

Tchibo-Ideas.de Un exemple de co-création C2C

Le lauréat du concours Tchibo-Ideas est récompensé.

__

Source : VisualOrgasm

http://www.flickr.com/photos/

visualorgasm/3529152246/sizes/m/in/photostream/

Page 36: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 36

43 Henkel figure parmi les 500 entreprises au monde réalisant le plus gros chiffre d’affaire. Son activité globale (tous secteurs confondus) a généré un profit de 2,27 milliards de dollars uS pour l’exercice 2010.

44http://www.henkel.com/cps/rde/xchg/henkel_hic/hs.xsl/772_HIC_HTML.htm

La groupe allemand Henkel43, spécialiste des produits d’entretien, fonde aujourd’hui sa stratégie

R&D, dit-il, de plus en plus « sur l’écoute attentive des besoins des clients et des consommateurs »43.

En matière de développement durable, en instaurant un dialogue permanent avec toutes les

parties prenantes, à l’échelle locale, régionale, nationale ou mondiale.

Le «  Henkel Innovation Challenge  », un jeu-concours créé en 2007, vise à fournir en idées

innovantes les différentes marques du groupe. Par équipes de deux ou trois, des étudiants de tous

pays préparent pour leur idée un business plan comportant des aspects de marketing, finance

et distribution. Ils sont accompagnés par un mentor - un manager de Henkel - qui leur donne

l’occasion de se familiariser avec la manière dont le Groupe Henkel envisage son business. Les

gagnants remportent un tour du monde, et la possibilité de rencontrer Kasper Rorsted, le patron

de Henkel.

Le concours s’appuie sur un site web dédié, dont les contenus sont relayés sur les réseaux sociaux

Twitter, Youtube et Facebook. La Fan Page Facebook comptabilise cinq mille fans.

Le Henkel Innovation Challenge : Un concours d’ innovation sur les réseaux sociaux

Le Henkel Innovation Challenge est organisé dans plusieurs

pays et dispose même de son “merchandising”

__

Source : APA-OTS

http://www.flickr.com/photos/apaots/5053837092/

sizes/m/in/photostream/

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Rapport Open Innovation / Awex

p 37

45http://www.pepsico10.com/

En avril 2010, le groupe Pepsi lance aux Etats-unis « PepsiCo10 », un incubateur interne de

startups45. Ce programme se présente sous la forme d’un concours destiné aux jeunes startups.

Son but est de dénicher les meilleurs talents pour en faire de futurs partenaires du groupe. Il vise

des projets innovants appliqués aux médias sociaux, marketing mobile, jeu et vidéo numériques,

ambiant marketing ou marketing d’expérience.

Le défi sous-jacent à ce programme est donc celui d’innover en matière de communication,

publicité et marketing.

Les participants proposent un projet d’application en ligne. Ils ajoutent une brève description de

l’expérience de l’entreprise et de sa vision. vingt projets sont sélectionnés par le jury de PepsiCo.

Ceux-ci sont invités à présenter leur business plan à l’occasion d’un sommet réunissant plusieurs

centaines d’employés et de partenaires du groupe. Parmi eux, des sociétés de capital risque. Au

final, 400 idées innovantes ont été proposées.

PepsiCo10 propose aux dix entreprises gagnantes de consacrer un an au développement d’un

programme pilote pour une des marques du groupe. une bourse de 10.000 dollars uS récompense

les élus. Aucun investissement n’est dû de la part de PepsiCo ni de ses partenaires. Seule

contrepartie : le mentorat par un manager de la marque, et l’accès aux relations publiques et

sociétés médias de PepsiCo.

Le retour sur investissement attendu par ces startups est surtout un gain en termes de visibilité

et de réputation. Avoir travaillé pour une grande marque est censé prouver la valeur de leur propre

business model.

PepsiCo a poursuivi dans cette voie en lançant, par la suite, le Pepsi Refresh Project. Ce programme

américain qualifié par PepsiCo de « Corporate Citizen » propose de recueillir les idées des citoyens,

associations et entreprises pour changer le monde.

Le Pepsi Refresh Project :Co-innover dans le domaine marketing

Page 38: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 38

PepsiCo a de cette façon, en quelque sorte, « crowdsourcé » son programme de Corporate Social

Responsibility.

Au total, Pepsi Refresh Project (édition 2010), représente un investissement de 20 millions de

dollars. Au total, 7500 nouvelles idées ont été soumises, lesquelles ont recueilli près de 45

millions de votes. Quelques 800.000 fans supplémentaires se sont inscrits sur la page du groupe

sur Facebook.

Source : http://www.flickr.com/photos/

rahulsthirdeye/5130417157/sizes/m/in/photostream/

Page 39: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 39

46http://labs.swisscom.ch/ideas

Swisscom est le premier opérateur de télécommunications de Suisse. Il est aussi le premier à

lancer un « laboratoire virtuel » accessible en ligne, à l’instar des grands éditeurs de logiciels46.

« Swisscom Labs » est né en 2006. Caractéristique première : l’interactivité avec l’utilisateur. Selon

les termes utilisés par le groupe helvète, le processus d’innovation vise à capturer les idées au

moment de leur éclosion, au cœur de l’expérience de l’utilisateur.

Conçue comme un véritable laboratoire d’expériences, l’interface web encourage les échanges.

Il est possible de poster des commentaires et avis ; de participer aux forums de discussion ; de

proposer des idées de test concernant les smartphones et Internet ; de découvrir les nouveautés de

partenaires tels que vodafone, des universités ou des startups ; de tester des produits en version

bêta ; de participer à des essais ; ou encore de se tenir au courant des dernières tendances...

Les développeurs peuvent aussi mettre en ligne des applications en phase de test afin de susciter

des commentaires et recueillir des feedbacks sur celles-ci.

En mars 2010, le lancement d’un concours d’idées a permis la collecte de plus de 270 idées. La

communauté vote pour les idées envoyées, sur le principe du « like » de Facebook (« j’aime »).

Différents prix sont attribués. Le Prix de la communauté, par exemple, est réservé à l’idée qui

remporte le plus grand nombre de « likes ». Le Prix du jury Swisscom Labs allant à l’idée élue

par le jury de Swisscom Labs. voter pour une idée est aussi récompensé. Le concours est gratuit.

Toute personne ayant participé au vote a une chance de gagner un prix.

En se rapprochant de l’expérience du client, souligne Swisscom, le groupe peut intégrer plus

rapidement les technologies innovantes issues de parties tierces. En interne, un observatoire des

utilisateurs constitués de sociologues suit désormais cette expérience sur de longues périodes.

Les modes de comportements du consommateur sont étudiés au plus près de leurs changements

et tendances.

Swisscom Labs « User-driven innovation »

Source : http://www.swisscom.ch/content/

swisscom/fr/ghq/Portraet/Social_Media_und_RSS/

jcr%3acontent/narrowpar/textimage_8/image.170.

jpg/1306228601204.jpg

Page 40: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 40

47http://www.bluenove.com/en/tag/open-innovation/

(1,7%), le conseil (1,6%), l’éducation et l’administration (0,6%),

et les autres services (0,2%).

Si, dans un certain nombre de secteurs, l’open innovation est

perçue comme une évolution inévitable, 87,9% d’entre elles

observent que cette ouverture les expose à un risque de vol de

propriété intellectuelle ou de « reverse engineering » de brevet…

La plupart d’entre elles estiment néanmoins qu’elles seront en

mesure de gérer ce risque en prenant les mesures de précaution

nécessaires.

Les grandes entreprises françaises interrogées par bluenove

sont conscientes des difficultés qui se poseront dans le cadre

des collaborations qu’elles mèneront en phase d’innovation avec

des tiers. Pour quelque 69.8% des répondantes, les problèmes

pourront être causés par des problèmes liés aux différences

culturelles. 70% craignent les écueils liés à la gestion des équipes

à distance. Trois-quarts jugent que les employés hésiteront à

partager leurs idées, de peur de s’exposer personnellement ou de

s’en faire voler la paternité.

A l’occasion de l’étude qu’elle vient de publier fin mai 2011 sur

«  Les grandes entreprises françaises et l’Open Innovation  », la

société de conseils bluenove révèlait de grandes disparités de

pratiques d’innovation entre secteurs d’activité en France47.

En 2009-2010, les besoins des grandes entreprises françaises

en matière d’open innovation (oI) ont enregistré un taux de

croissance de 40%. Pour bluenove, ceci prouve qu’elles ont

intégré les concepts et sont passées à la pratique. « Cependant,

les entreprises continuent à voir l’open innovation plutôt comme

un outil que comme un projet d’entreprise ».

En ce qui concerne la mise en pratique concrète de l’open

innovation, le secteur de l’IT et des Télécommunications domine

de loin tous les autres secteurs. Ce dernier représente à lui seul

67,6 % de l’activité oI (en termes de chiffre d’affaire). Le secteur

cosmétique et pharmaceutique n’en représente déjà plus que

9,3%, suivi de près par celui des médias et du contenu (6,9%),

celui de la culture et des loisirs (5,2%), et celui de l’énergie (5%).

Les secteurs à la traîne sont : la distribution (1,9%), l’industrie

Une grande marge de progression en matière d’open innovation dans de très nombreux secteurs

Page 41: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 41

4. Un état d’esprit approprié L’innovation n’est pas une science exacte. C’est d’abord une dynamique humaine, qui nécessite

échanges, discussions et partages entre des individus. L’innovation est également un processus

dans lequel les émotions jouent un rôle déterminant.

L’innovation en vase clos est un leurre. La dimension humaine est fondamentale.

Et ce n’est pas nouveau.

Les grands savants de l’ère moderne ne peuvent se passer d’échanges personnels avec leurs

pairs. Depuis le début du 20ème siècle, par exemple, les plus grands physiciens de la planète se

réunissent tous les trois ans à bruxelles lors des grandes conférences Solvay. Marie Curie, niels

bohr, Albert Einstein... Ces séminaires sont chargés de tensions, d’affections ou d’inimitiés entre

les participants. Les émotions qu’inspirent les uns et les autres ou la confiance sont autant

d’éléments fondamentaux qui influencent directement la réussite ou non des démarches inscrites

dans l’esprit de l’open innovation.

L’open innovation nécessite donc, à la base, un état d’esprit particulier, une attitude et une forte

capacité à nouer des relations humaines non ambigües. L’open innovation n’est fertile que sur un

socle de confiance que seuls les échanges personnels participent à construire.

nous allons voir dans cette partie comment la dimension humaine joue son rôle au niveau

des attitudes et des esprits, à travers deux exemples : l’accord Awex/ Texas A&M et le rôle de

connecteur du Sirris.

Grâce au témoignage de Xerox Europe, nous verrons également comment les principes de l’open

innovation peuvent être aujourd’hui simultanément mis en oeuvre par une entreprise à différents

niveaux.

Page 42: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 42

48Coulé dans un mémorandum of agreement.49Dans le cas du partenariat Texas A&M / Awex, le travail de mise en œuvre a requis un minimum de deux visites par an au Texas. Et inversement de leur côté.

L’IMPoRTAnCE D’un CADRE DE ConFIAnCE L’EXEMPLE DE L’ACCoRD TEXAS A&M / AWEX

La route à travers la pleine du Texas semble interminable. La route, tour à tour rectiligne puis

sinueuse, s’étire au milieu de vastes prairies parsemées de bosquets, de fermes et de rares derricks

plongeant leur longue trompe d’acier dans les entrailles du sous-sol texan. Au bout de deux

heures de trajet, les panneaux indicateurs indiquent l’arrivée à Collège Station, le campus de

Texas A&M, l’un des deux plus vastes systèmes universitaires de l’Etat.

La matière grise est tout à l’oeuvre dans ce coin du Texas, perdu dans le centre de l’Etat, entre

Houston et Austin. L’université est un archipel de bâtiments épars, entourés de parkings et

de pelouses soigneusement entretenues. La Région wallonne, à travers l’Awex, et le système

universitaire de Texas A&M se sont liés d’amitié, voici quelques années. La Wallonie et l’université

texane48 semblent avoir compris, avant d’autres, que le cavalier seul et l’isolement étaient

synonymes de manque à gagner. Pour les deux partenaires, la collaboration permet aujourd’hui

d’aller plus vite, et plus loin.

“Voici cinq ans, notre principale préoccupation était de maximiser la vente de licenses sur

ses technologies brevettées, entame brett Cornwell, directeur oTC (office of technology

commercialisation) du système universitaire Texas A&M. Nous remplissions nos tuyaux avec un

maximum de brevets, à l’instar de la plupart des institutions académiques. Depuis lors, poursuit-

il, nous avons compris que la commercialisation de la technologie va bien au-delà de la vente de

licences. Nous avons compris que la collaboration accroît grandement le potentiel de valorisation de

notre recherche....C’est la raison pour laquelle Texas A&M a noué des partenariats privilégiés avec

l’Awex, mais aussi avec l’Université de Tsinghua de Pékin et le Kiwinet de Nouvelle-Zélande.”

Il ne suffit toutefois pas d’apposer un paraphe au bas d’un accord pour rendre la collaboration

opérante. Cette dernière requiert, pour être fertile et fructueuse, une attitude ouverte et une

empathie réelle entre les individus.

« Il faut du temps et de fréquents allers et retours pour que la confiance s’installe explique, Philippe

Lachapelle, directeur des Partenariats internationaux à l’Awex. Les partenaires doivent apprendre

à se connaître personnellement. Il faut communiquer beaucoup pour se faire connaître. Il faut

beaucoup de persévérance, de travail et la construction d’un capital relationnel… »49

Ce tissu relationnel et personnel, bâti par une poignées d’individus, a permis la germination de

différents projets de collaboration.

Le cœur du partenariat wallo-texan repose sur le concept : « Born Big ». En joignant les forces

des uns et des autres, de façon ouverte, ces innovateurs jouissent tout à coup d’une empreinte

globale.

Page 43: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 43

chimiques. Texas A&M dispose justement d’un centre de recherche

en matière d’accidents chimiques. L’alliance était évidente. Texas

A&M a investi, avec la maison-mère, dans la création d’une

filiale américaine. Quelques mois plus tard, la première vente est

conclue.

Huit à neuf cas semblables sont en gestation, selon brett

Cornwell. belcim est un autre exemple. Cette entreprise belge

développe des logiciels de simulation. Ces derniers sont adaptés

pour la simulation des processus d’exploration pétrolière en

eaux très profondes. Le marché potentiel est important. une très

grande partie des nouveaux gisements pétroliers découverts ces

dernières années le sont à des profondeurs de plusieurs milliers

de mètres sous la surface des océans.

Le système belcim n’est toutefois pas encore au point. De

nombreuses versions sont encore nécessaires avant de pouvoir le

vendre aux compagnies pétrolières.

Dans le cadre du partenariat, les acteurs wallons ont présenté

le projet aux Texans. Ces derniers s’y sont ralliés et ont

accepté d’y consacrer des moyens communs. Le processus de

développement et de commercialisation à grande échelle s’en est

trouvé nettement accéléré. Le risque qu’un concurrent mette sur

le marché une solution concurrente qui réduirait fortement les

revenus que peuvent escompter les partenaires à terme se trouve

ainsi réduit…

«  Désormais, si j’identifie chez nous une technologie dont le

potentiel est global, je peux appeler l’université de Tsinghua à Pékin

de même que l’Awex en Europe, poursuit Guy Diedrich. Tsingshua

peut nous dire qu’ils n’ont pas encore apporté de contribution au

projet précis, mais qu’ils sont avec nous. Idem avec les partenaires

en Wallonie. Philippe Lachapelle peut me contacter pour attirer

mon attention sur une entreprise wallonne qui cherche à préparer

son développement en parallèle aux Etats-Unis et voir si nous

voulons en être… »

Dans un modèle classique, démarrer la commercialisation d’une

technologie en Chine prendrait au minimum deux ans. Juste pour

monter le dossier, analyser la situation du marché, trouver les

collaborateurs, les avocats, etc. S’ajoutent les risques liés à la

copie, notamment. Tous ces éléments rendent l’opération très

lourde et incertaine…

Dans un premier temps, ce réseau international leur permet de

puiser dans de nouvelles ressources intellectuelles disponibles

pour mener des projets d’innovation plus ambitieux. Pas la suite,

en phase de développement, les partenaires peuvent rapidement

tester la sensibilité de tel produit ou service aux variétés

culturelles et aux spécificités légales ou commerciales propres à

chaque continent. Ainsi, ils peuvent adapter directement ceux-ci

avant leur mise sur le marché.

Ainsi, un innovateur belge ou américain peut, directement,

mettre sur pied une stratégie commerciale globale. Il évite ainsi

la politique de déploiement commercial par cercles concentriques,

dont le défaut est de laisser longtemps les marchés non couverts

à la merci de potentiels concurrents.

“Aujourd’hui, ce partenariat avec la Wallonie est une véritable tête

de pont pour nous aider à trouver des débouchés à nos technologies

en Europe, affirme Guy Diedrich, vice-chancellor de Texas A&M,

qui négocia le premier la mise sur pied de l’accord cadre avec la

Wallonie. Nos technologies, nos spinoffs, nos entreprises, disposent

via la Wallonie d’un promontoire pour tester et affiner leurs propres

produits et services en fonction de la perception qu’en auront les

Européens, différente des réactions éventuelles que nous pourrions

obtenir dans notre biotope américain. Beaucoup de startups d’ici

veulent aller en Europe. Or, sans cette phase d’expérimentation

et de prise de contact avec le marché européen, elles risquent

d’essuyer rapidement des échecs faute de disposer des bons réseaux

et d’adapter leurs produits aux perceptions locales”.

“La logique Born Big est une reconnaissance que nous ne

disposons pas de toutes les solutions chez nous, ajoute Guy

Diederich. C’est un exercice d’humilité qui ouvre, en fait, un

immense champ d’opportunités. Nous sommes en train de créer

une sorte d’écosystème avec la Wallonie, Kiwinet, Tsingshua,... On

se rencontre régulièrement et des liens de confiance se tissent ”.

Le partenariat Awex/ Texas A&M s’inscrit dans l’esprit de

l’open innovation. Les collaborations peuvent s’enclencher très

rapidement, quand la technologie concernée n’est encore qu’en

phase de pré-développement.

Illustration avec Lisam, une entreprise wallonne ayant conclu

un partenariat dans le cadre de l’accord-cadre Awex/Texas A&M.

Lisam développe des logiciels dédiés à la gestion des accidents

Page 44: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 44

«  Dans notre modèle de collaboration ouverte, vous pouvez compter sur un partenaire en

Chine dès les premières phases de maturation de la technologie, argue-t-on chez Texas A&M.

Un partenaire avec une structure, des ressources financières, un réseau… Si Tsinghua dit d’accord,

cela devient une collaboration à 50/50. Si l’Awex dit je marche, également, cela devient un

partenariat à trois. Une startup devient directement Born big. Si l’ensemble est bien géré, l’effet

peut être exponentiel ».

Encore une fois, cette forme de collaboration très large et fertile ne fonctionne que si elle est

sous-tendue par des relations de confiance étroites instituées entre les différentes personnes et

organisations parties prenantes.

« Désormais, les relations et la communication sont devenues très fluides entre nous. Presque

liquide, note Guy Diedrich. Bâtir des relations comme celles-là est absolument critique. Je sais que,

quand j’appelle Philippe, je trouve un partenaire fiable et compétent. De son côté, il sait qu’avec

nous, il ne perdra pas son temps On se connaît suffisamment bien ».

Cela dit, si les relations personnelles sont fondamentales au début, petit à petit, avec l’expérience,

la confiance gagne les institutions elles-mêmes, ajoute-t-il. Dès lors, même si les personnes

changent, les liens structurels subsistent.

« Les partenariats ne sont pas exclusifs. Ils sont privilégiés. Je sais que si Philippe me dit qu’il veut

nouer une relation particulière avec Berkeley, la question suivante qu’il me posera sera : voulez-vous

en être ? Il en sera de même en ce qui me concerne. La confiance se bâtit également sur ce genre

de transparence. »

Guy Diedrich,

Vice-Chancellor de Texas A&M

Page 45: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 45

50 Le Sirris fut créé originellement sous l’appellation de CRIF, grâce aux fonds du plan Marshall, au lendemain de la seconde guerre mondiale. objectif : redynamiser l’industrie. Le Sirris occupe désormais 150 personnes en belgique, répartis entre six centres différents. une cinquantaine de personnes sont actives dans la division régionale de Liège. Au total, le centre d’innovation totalise 2.500 membres, dont seulement 125 ne sont pas des PME. Aujourd’hui, le Sirris réalise 4.800 interventions en entreprise chaque année, dans le cadre de mission allant de deux jours à deux ans. Les services de Sirris de décomposent en trois familles principales : de la veille technologique, le transfert et l’acquisition de compétences et des opérations de transfert de technologie ciblé par rapport à certaines entreprises.

LE RôLE PoSITIF DES « ConnECTEuRS »

L’open innovation, on l’a vu, a besoin d’un cadre. Celui-ci ne suffit toutefois pas toujours, en

soi, pour créer les collaborations. Les partenaires ont parfois besoin que quelqu’un les aide à se

rencontrer ou à susciter les opportunités de nouveaux projets.

Ces « entremetteurs » ou ces « connecteurs » sont précieux pour apporter à l’esprit de certains

opérateurs diverses occasions de collaborer ensemble sur des pistes innovantes. Sans ces

connecteurs, l’idée de croiser les destins ne serait, peut-être, jamais survenue.

Les intermédiaires de l’innovation ne sont pas nouveaux dans le paysage.

Le centre de recherche belge Sirris, lui, accomplit cette tâche depuis 194950. A l’époque, les

initiateurs avaient déjà diagnostiqué la distance trop grande entre chercheurs, universités et

les demandes du marché, alors qu’à l’opposé, les industriels manquaient parfois d’accès aux

dernières technologies développées par les laboratoires universitaires, ce qui pénalisait dès lors

leur compétitivité.

« Nous tentons de mettre les gens pertinents ensemble, résume Umberto Baraldi, directeur adjoint

du Sirris Wallonie. Nos équipes sont capables de clarifier les demandes technologiques par rapport

à une demande latente. Sur cette base, nous pouvons analyser s’il est possible de mener un projet

à partir de ressources humaines internes ou externes. On aide aussi à analyser quelles sont les

possibilités de financement extérieur, en particulier de subside ».

Le centre de recherche accompagne ses utilisateurs notamment dans leurs démarches pour

intégrer des dimensions de l’innovation non directement liées à leur cœur de compétence

technologique, dont la maîtrise est néanmoins indispensable pour pouvoir réussir la phase de

commercialisation. Ces aspects touchent, par exemple à l’ergonomie du produit, à l’insonorisation

de l’appareil ou encore au choix d’un matériau optimal. Rares sont les entreprises qui disposent

de ces compétences en interne.

Cela dit, l’approche du Sirris en matière d’accompagnement de l’innovation a évolué au cours des

dernières années.

« Tout un temps, nous avons fonctionné comme des dépanneurs, relate Umberto Barald. Quelque

chose ne fonctionnait pas, nous aidions à trouver des solutions techniques ».

« Depuis, ajoute-t-il, nous sommes passés à une approche différente. Notre rôle consiste désormais

à aider les entreprises à intégrer les innovations dans des produits, des processus ou des modèles

d’affaires ».

Page 46: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 46

51 Le Sirris assiste, par exemple, les entreprises dans la mise en pratique de l’open innovation à travers différentes actions. L’une d’entre elles est baptisée « étagères de technologie ». L’organisation repère des brevets non utilisés par les entreprises (parce que les directions ont changé d’option stratégique en cours de route, par exemple) et tente de trouver de nouveaux amateurs.

52Les wikis sont des documents éditables en ligne par des internautes différents. Ces wikis peuvent être publics (comme sur l’encyclopédie en ligne Wikipedia, ou privés)

« Prenons le cas concret d’une entreprise que nous connaissons qui a développé un système de

conversion en imagerie pour les aveugles, illustre Umberto Baraldi. La version actuelle de leur

machine est grosse comme une table. C’est très peu pratique. Ils ont donc besoin de compétences

et de technologies spécifiques pour la miniaturisation afin de commercialiser leur invention. Nous

pouvons leur fournir ».

Le Sirris déniche ainsi les compétences nécessaires où elles se trouvent. En belgique, d’abord en

France, en Allemagne où ailleurs, ensuite.

« Une PME qui fabriquait des joints pour des machines hydrauliques cherchait une solution par

rapport à la résistance dans certains milieux chimiquement agressifs, narre le directeur adjoint de

Sirris Wallonie. Nous les avons mis en contact avec un centre de recherche à Paris spécialisé dans le

caoutchouc. Nous apportons également des pistes d’innovation à travers notre travail de veille ou

via le réseau européen EEN ».

Au niveau européen, l’open innovation a progressé parfois un peu artificiellement. Les programmes

conditionnent souvent l’octroi des aides à la mise en place d’un consortium international.

« Cela dit, le fait, déjà, de postuler au niveau des programmes de financement européens donnent

déjà une indication sur le fait que l’entreprise est ouverte vers l’extérieur et curieuse de cherche des

compétences externes, précise-t-on au Sirris. Vu la complexité de la constitution des dossiers, il faut

plus que de l’opportunisme pour postuler. »

Si, vu du Sirris, l’open innovation est une réalité ancienne, le concept et la pratique gagnent

nettement en popularité ces dernières années. « Nous nous sentons très concernés par la montée

en puissance du concept d’innovation ouverte, confirme Umberto Baraldi. Les expériences se

multiplient »51.

Les responsables du centre de recherche croient, entre autres, à l’influence grandissante des

outils digitaux en matière d’open innovation.

“ Au niveau technique, nous utilisons des outils collaboratifs en ligne, comme des wikis52, indique

Fabienne Windels, directrice veille au Sirris Wallonie. Nous essayons d’initier les entreprises

à l’utilisation des réseaux sociaux. Notre rôle reste de faciliter, de connecter et d’animer des

communautés d’innovation, c’est vrai... ”

Le Sirris est un acteur parmi des dizaines d’autres, dans le paysage européen de l’innovation. L’un

des défis pour ces intermédiaires sera sans doute, dans l’avenir, de s’ouvrir davantage encore à la

multidisciplinarité mais aussi, à sortir du seul cadre de l’innovation technologique.

Umberto Baraldi,

directeur adjoint Sirris Wallonie

__

http://innovate.sirris.be/uploadedImages/INNOVATE09/

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Page 47: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 47

CoMMEnT XERoX PRATIQuE L’oPEn InnovATIon DE SIX FAçonS DIFFéREnTES ET SIMuLTAnéES

Le fabricant américain de matériel bureautique et informatique Xerox applique les principes de

l’open innovation depuis un certain nombre d’années, déjà.

Au fur et à mesure du temps, les pratiques se sont perfectionnées.

Ce géant de 22 milliards de dollars uS de chiffre d’affaires applique l’open innovation à travers

plusieurs canaux différents, explique Monica beltrametti, vice-présidente du centre de recherche

européen de Xerox, basé à Grenoble, en France.

Xerox utilise toute la palette des pratiques existantes en matière d’open innovation décrites dans

les chapitres précédents, selon les besoins, des circonstances et la nature des différents objectifs

poursuivis.

voici ces différents niveaux :

1. Sous-traiter l’innovation incrémentale auprès des fournisseurs Xerox sous-traite de plus en plus auprès de ses fournisseurs l’innovation relative à

l’amélioration de produits existants, autrement dit l’innovation incrémentale. Ce transfert

est surtout guidé par la volonté de réduire les coûts.

2. Utiliser les courtiers en technologieXerox recourt abondamment aux « courtiers en technologie ». Ces courtiers sont des

intermédiaires très utiles qui pourvoient l’entreprise en idées et contacts pertinents

pour développer de nouveaux produits et services.

3. La co-opétitionXerox travaille avec certaines multinationales concurrentes dans le développement de

plates-formes techniques communes, par exemple, avec le groupe japonais Fuji, au sein

de la co-entreprise Fuji Xerox. Dans les phases précompétitives, Xerox n’hésite pas non

plus à former des consortiums avec d’autres industriels.

4. S’insérer dans les réseaux et programmes de recherche européensLa firme américaine n’hésite pas à rejoindre les réseaux européens de recherche et

les projets gouvernementaux dotés de nombreux dispositifs de subsides, au sein de

partenariats publics-privés. Ainsi, Xerox est en mesure de sonder et d’explorer de

nouveaux champs de recherche fondamentale.

Page 48: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 48

Pour l’entreprise californienne, le fait d’étendre son réseau vers l’extérieur est doublement

stratégique. Il permet, d’une part, de trouver des partenaires pour valoriser et externaliser

les technologies qui n’entrent pas dans le coeur de métier de l’entreprise. D’autre part, l’open

innovation permet d’importer des idées et des ressources venant d’autres disciplines pour le

développement de technologies et d’applications radicalement neuves voire insolites.

En cela, Xerox est fidèle à l’esprit de l’open innovation décrit par Henry Chesbrough.

Les entreprises à succès de demain seront celles qui auront réussi à gérer de façon agile ces

nouvelles approches ouvertes en matière d’innovation, estime Monica beltrametti. Source : www.xerox.com

5. Fréquenter les idea marketsLe groupe Xerox puise certaines de ses idées d’innovation dans des places de marché

d’innovation telles que ninesigma ou Innocentive, évoquées plus tôt.

6. Co-innover avec les clientsRécemment, le géant américain s’est lancé dans la co-innovation en accordant une

écoute plus particulière aux contributions et commentaires de ses clients, en utilisant

notamment les nouveaux outils sociaux du web.

Page 49: Les nouvelles frontières de l’Open innovation

Rapport Open Innovation / Awex

p 49

avec une PME américaine spécialisée dans la fabrication d’engins

de levage. Cette dernière connaissait un problème avec un

composant central dans une de ses machines. Afin de trouver une

solution, l’entreprise a organisé une forme de brainstorming en

ligne entre des employés à elle et les employés des compagnies

sous-traitantes. une soixantaine de personnes participèrent. Il

en est ressorti non seulement une solution au problème, mais le

nouveau composant s’est aussi révélé, par la suite, plus simple à

produire et plus fiable.

Un sous-traitant a finalement apporté une idée géniale…

En fait, le génie est rarement pour quelque chose dans ce type de résultat.

L’important n’est pas d’attendre l’idée qui révolutionnera l’entreprise ou

le secteur. C’est de constituer toute une collection d’idées, plus ou moins

pertinentes. Dans le cadre des échanges, émergent souvent des quarts

ou des dixièmes de bonnes idées. La dynamique de la conversation

entre les participants au processus d’open innovation, d’une part,

et les intéractions entre ces morceaux de bonnes idées, d’autre part,

permettent d’assembler celles-ci pour parvenir in fine à une solution

innovante et pertinente. C’est l’échange même qui produit la solution.

Vous parliez de brainstorming. Beaucoup d’entreprises organisent ce type d’événements de temps en temps. Toutefois, ceux-ci donnent parfois l’impression d’être des prétextes justifiant, le reste du temps, de continuer à faire la même chose...

C’est un le syndrome du lundi. La fête est terminée. Tout le monde

reprend la routine. Idéalement, l’open innovation nécessite de

créer une culture de l’innovation permanente. Que ce soit pour de

grands ou de petits aspects.

53http://www.innovationtools.com/Articles/EnterpriseDetails.asp?a=643 Jeffrey baumgartner est, notamment, le développeur d’un logiciel de brainstorming collaboratif baptisé Jenni.

Jeffrey Baumgartner53 est un consultant américain vivant en

belgique, spécialiste de l’innovation collaborative. Au cours de

sa carrière, il a beaucoup travaillé avec les PME et

observé comment ces dernière parvenaient à se mouvoir dans

l’univers de l’open innovation.

voici son point de vue :

L’open innovation est-elle praticable par les PME ?

bien sûr ! Pour une raison stratégique, d’abord. beaucoup de PME

naviguent trop près de leurs produits. Elles ne prennent pas, de

temps en temps, le recul nécessaire pour évaluer leur situation

et prendre en compte des options neuves, potentiellement plus

intéressantes pour elles.

Certaines formes d’open innovation sont-elles plus appropriées pour les petites et moyennes entreprises?

Sur base de mon expérience, je dirais que l’innovation ouverte en

collaboration avec les fournisseurs est l’une des plus efficaces.

Les sous-traitants connaissent le marché. Ils connaissent

les produits de la PME. En même temps, ils apportent une

perspective différente. J’ai connu cette expérience, par exemple,

5. Les PME et l’open innovation

Jeffrey Baumgartner,

Consultant- expert de l’innovation

collaborative dans les PME

“LE PME onT TouT à GAGnER DE L’oPEn InnovATIon, MêME SI ELLES nE

DoIvEnT PAS oubLIER D’êTRE PRuDEnTES” Interview de Jeffrey Baumgartner

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sont à la recherche des nouvelles idées de rupture. Elles ne sont

d’ailleurs pas opposées à ce que les PME adoptent cette attitude

de protection. Les grandes entreprises préfèrent la certitude. Elles

favorisent donc les approches déjà bien documentées. Elles savent

que si une idée est déjà, partiellement, protégée, la négociation

sera plus facile.

Par quoi doit commencer une PME qui souhaite exploiter le potentiel de l’open innovation ?

Elle peut entamer plusieurs démarches. une des plus simples

consiste, par exemple, à inviter, occasionnellement, des

représentants de ses fournisseurs à boire un verre le soir, de

façon conviviale. Ainsi, chacun peut échanger des avis, des

impressions, des idées... on n’oubliera pas, comme évoqué plus

haut, de mettre quelques problématiques précises à l’agenda.

Les réseaux sociaux sur internet sont également une nouvelle

source d’échanges intéressants. une PME peut ouvrir une page

de discussion sur LinkedIn ou Facebook. ou poser des questions

précises afin de recueillir les réponses des communautés

spécialisées présentes en ligne. Qu’elle n’hésite pas non plus

à encourager ses clients à communiquer les problèmes qu’ils

rencontrent éventuellement. C’est une autre manière d’ouvrir son

processus d’innovation, en se mettant davantage à l’écoute.

un blog sur des thématiques d’innovation, pour autant qu’il

soit régulièrement alimenté, augmentera aussi la réputation de

l’entreprise en tant qu’acteur de l’innovation..

Une PME peut-elle aborder l’open innovation à travers plusieurs types d’action différentes, à l’instar de certaines entreprises telles que Xerox ?

bien sûr. Comme on l’a dit, l’open innovation n’est pas uniforme.

Elle repose d’abord sur un état d’esprit général partagé par les

membres de l’organisation. L’open innovation ne se limite pas

à une mise au vert deux fois par an, ou au discours annuel du

CEo. Cela passe par la possibilité d’échanger librement les idées

au sein de l’entreprise. Très souvent, les “ideas killers” se logent

au niveau du management intermédiaire. “Nous n’avons pas le

Les PME ont moins de ressources que les plus grandes organisations. Afin d’accroître l’efficacité des processus d’innovation ouverte, vous recommandez à celle-ci de partir d’un problème existant et bien identifié plutôt que de partir dans le vague. Pourquoi?

Certaines entreprises mettent aujourd’hui en ligne, sur leur site

internet, une fonction appelant les visiteurs à leur proposer leurs

idées. Cela permet de recueillir des idées parfois amusantes,

parfois totalement à côté de la plaque. néanmoins, cette approche

“feuille blanche” laisse souvent les individus muets. Lors d’une

récente conférence que je donnais à l’étranger, j’ai lancé à

l’assistance un défi en demandant : “Allez-y, donnez-moi des

idées de rupture”. La salle est resté silencieuse. une chaise était

posée sur la scène. J’ai alors demandé comment nous pouvions

ensemble améliorer cette chaise. Tout à coup, les participants se

sont mis à réagir et toute une série d’idées originales ont surgi.

Cet exemple s’applique tout à fait dans le cadre des démarches

d’open innovation. En laissant le cadre trop ouvert, on risque

beaucoup de pollution. 95% des idées collectées seront sans

doute sans intérêt ou sans valeur. une PME ne peut se permettre

de gérer cela d’un point de vue administratif. Par contre, le fait de

proposer un défi spécifique permet aux individus de se focaliser

sur une problématique. on fera l’extraction de 10, 15, 20 idées

intéressantes. En cadrant la discussion, par ailleurs, la petite ou

moyenne entreprise s’assure que les propositions collent avec sa

stratégie d’entreprise.

Mais les PME cherchent également des idées de rupture... Comment éviter qu’un cadre trop serré limite les opportunités de découvrir des pistes plus insolites et prometteuses ?

Sans doute faut-il séparer les approches d’open innovation dont le

but est de trouver “the next big thing” de celles visant à améliorer

les choses existantes. Si un partenaire extérieur a l’idée du siècle,

celle qui va changer la face de votre secteur, probablement ne

la partagera-t-il pas avec vous dans le cadre d’une démarche

d’innovation collaborative. Il tentera de la faire protéger avant de

vous la proposer contre paiement... De grandes entreprises comme

P&G ou bMW, qui pratiquent abondamment l’open innovation,

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protection ne sont toutefois pas adaptés à toutes les situations.

un très grand nombre d’entreprises innovantes dépendent, par

exemple, de la vente de licences ou de royalties pour générer

leurs revenus. Pour ces dernières, à moins de modifier leur modèle

économique, pas question de laisser tomber toute notion de

protection de la propriété intellectuelle, même dans un schéma

d’innovation ouverte.

Afin, néanmoins, de pouvoir continuer à avancer et tirer profit

des vertus de l’open innovation, le mieux sera de clarifier le plus

tôt possible le partage et la répartition des droits de propriété

intellectuelle.

Si une entreprise décide de s’ouvrir aux idées extérieures via

un appel sur son site internet, par exemple, elle peut inclure

un formulaire via lequel les contributeurs peuvent directement

marquer leur accord quant au transfert de la propriété des idées qui

seront soumises. La firme pourra également prévoir un dispositif

facile d’accès où des candidats partenaires peuvent aussi proposer

des idées et des technologies déjà brevetées. J’ajoute qu’il existe

aussi des services qui permettent de protéger partiellement et

provisoirement certaines idées avant de les soumettre, sans pour

autant devoir passer par la case dépôt de brevet.

Enfin, des formules existent aussi pour, par exemple, garantir à

une entreprise participante le fait que les idées générées par elle

dans le cadre du partenariat reste sa propriété. Ce genre d’accord

existe aussi en ligne pour les participations via des plates-formes

digitales.

Le désavantage de ce genre de protection est que les autres

participants limitent leur degré de participation ou bien gardent

pour eux leurs meilleures idées. Moins les participants partagent

de façon transparente, moins les fruits de cette collaboration

seront originaux ou ambitieux.

Il est donc capital de trouver le bon équilibre entre la prudence

bien comprise et la volonté de se donner une chance de réellement

innover mieux grâce à la dynamique collaborative.

budget”, “Ce n’est pas pour nous”,… sont autant d’arguments clés

sur porte que l’on entend pour rejetter les idées extérieures...

L’ouverture plus large des processus d’innovation passe donc

aussi par une implication et une sensibilisation forte du middle

management.

L’open innovation devient-elle la première étape du processus de démarchage commercial, a fortiori vers l’étranger ?

De plus en plus d’entreprises migrent vers ce modèle. Il s’agit

aussi d’une évolution culturelle. Les grandes entreprises tendent

à s’ouvrir à leurs sous-traitants et aux startups pour stimuler

leurs processus d’innovation qui sont parfois en panne. En même

temps, les PME doivent garder une certaine prudence lorsqu’elles

travaillent avec les grandes entreprises. Ces dernières ont parfois

la tentation de mettre leurs PME sous-traitantes sous une pression

extrême, y compris par rapport à leurs efforts d’innovation

conjointe. Il faut s’assurer d’un équilibre correct et respectueux.

Comment doivent-elles aborder la question de la protection de la propriété intellectuelle ?

Par principe, l’open innovation implique un partage d’informations.

Ces informations peuvent concerner la stratégie marketing de

l’entreprise, des caractéristiques techniques prévues dans les

futurs produits,... Elles peuvent aussi laisser entrevoir certaines

faiblesses dans le positionnement de marché de l’entreprise ou

des défauts dans la conception... une plate-forme ouverte ou une

démarche collaborative expose toute l’organisation à ce risque.

Dès lors, une des premières étapes consiste à décider quelle part

de l’information pourra être partiellement dévoilée en vue de

nouer des partenariats en matière d’innovation participative. Et

avec qui. L’information échangée avec les fournisseurs ne sera

pas la même que celle que l’on sera prêt à mettre en ligne sur une

plate-forme de crowdsourcing.

La protection de la propriété intellectuelle est un must pour

n’importe quelle entreprise innovante. Tous les modes de

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54http://www.bluenove.com/publications/blog/internationalisation-de-la-rd-et-open-innovation/55http://www.ft.com/cms/s/0/c73ea5cc-11e9-11e0-92d0-00144feabdc0.html#ixzz1YawFckoI

InTERnATIonALISATIon DE LA R&D DES PME

Selon un sondage mené en 2007 auprès de 70 PME allemandes, les petites et moyennes entreprises

rechignent de moins en moins à collaborer avec des centres de recherche à l’étranger. L’une de

leurs premières motivations est d’accélérer l’adaptation de leurs produits aux attentes et usages

spécifiques des marchés régionaux. néanmoins, selon la même enquête, 25% des interrogés ne

savent pas comment trouver le bon partenaire académique à l’étranger, et plus spécialement dans

les pays émergents54.

Le mouvement d’internationalisation de la R&D des PME semble, quoi qu’il en soit, inéluctable…

ne fût-ce que parce que les grandes entreprises, souvent d’importants clients des petites et

moyennes entreprises, optent aujourd’hui, clairement, pour des chaînes de R&D beaucoup plus

distribuées géographiquement. Et le mouvement s’amplifie.

Après les usines et certains centres d’appel, les grandes entreprises globalisent, donc, à présent,

leurs activités de R&D en Chine, en Inde, au brésil ou dans d’autres pays émergents.

En 2013, le groupe Procter & Gamble ouvrira, par exemple, un centre de recherche à la pointe de la

technologie sur l’île de Singapour. Le groupe pharmaceutique Astrazeneca, lui, a lancé, en 2007,

une alliance stratégique en Asie suivie d’une collaboration avec l’Hôpital général de Guangdong

en Chine. Dans ce partenariat, l’hôpital fournit chercheurs, laboratoires et la possibilité de tester

les tissus tandis que le groupe fournit son expertise technique et les fonds de recherche. Le

géant français des cosmétiques L’oréal, pour sa part, possède 18 centres de R&D dans le monde. Il

prévoit l’ouverture d’un centre de R&D à Mumbai (Inde), le 6ème plus grand centre de recherche

du groupe…

Dans cette perspective, un nombre croissant de grandes entreprises sont en veille pour trouver

des petites et moyennes entreprises, où que ce soit dans le monde, susceptibles de leur apporter

une innovation à fort potentiel et qui sont prêtes à collaborer avec elles. Contrairement au modèle

passé, la philosophie ne consiste pas ici, ou pas toujours, à opérer par rachat d’entreprises. ni de

les phagocyter en les enfermant dans son propre fonctionnement.

« C’est un réel défi, pour nous, d’apprendre à mieux travailler avec les PME, observe bruce brown,

directeur Technologies de P&G, qui supervise une grande partie des budgets R&D de la firme55.

Parfois, certaines tentatives de collaboration ne fonctionnent pas. De plus petits partenaires

craignent de se retrouver écrasés. D’autres ont peur de s’enliser en raison de la lenteur de nos

processus de décision internes. Dans ce cas, chacun prend acte de la situation, de façon adulte,

dans le respect mutuel ».

Il s’agit d’un nouveau défi pour les PME innovantes. Pour accompagner ce glissement, elles

doivent hisser leurs efforts d’innovation à un niveau plus international. Pour compenser leurs

ressources plus réduites que de grandes organisations, il leur faudra développer encore plus

fortement leurs capacités de mise en réseau et de collaboration.

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56 Littéralement “libre de droits”. Le mouvement open source a commencé à se développer au début des années 90, dans le domaine informatique. Des milliers de codeurs du monde entier ont contribué, à distance, au développement de nouvelles plates-formes logicielles. Des centaines de nouvelles applications ont ainsi pu voir le jour. Le système opérationnel Linux, concurrent du célèbre Windows du groupe américain Microsoft, est sans doute le plus connu. Aujourd’hui, le système opérationnel, dont l’installation en tant que telle est gratuite, a conquis une grande partie du marché des serveurs. De nombreux autres applications ont été développées, depuis, grâce à l’implication des milliers de développeurs volontaires, dans des domaines comme le montage photo, la création 3D, la comptabilité, la gestion d’entreprise, les web services etc. Le modèle open est désormais celui adopté par un grand pan de l’industrie informatique.

L’InFLuEnCE Du MoDèLE oPEn SouRCE

Les observateur de la vie de l’innovation industrielle assiste, aujourd’hui, à l’immixtion de

l’approche open source56.

Les modèles “libre de droit” et “développement technologique en communauté” ne semblent plus

réservés aux seuls milieux informatiques.

Des ingénieurs, des scientifiques, dans des disciplines différentes, commencent à ouvrir leurs

travaux aux contributions de tiers. Gratuitement. Afin d’accélérer le rythme du développement

technologique. La rémunération, pour eux, proviendra de canaux alternatifs à ceux, classiques,

de la vente de droits de propriété intellectuelle (distribution, services, formations, accords

d’exclusivité, etc).

“L’open source s’affirme dans de nouveaux domaines, notamment là où un enjeu collectif apparaît,

note Fabienne Windels, au Sirris. Celui de sauver la planète en est un évident, de nos jours. Ainsi,

a-t-on vu récemment émerger des collaborations ouvertes et atypiques dans le développement des

énergies renouvelables ou des GreenTech. Le protectionnisme technologique n’est plus bien vu, en

la matière, car il compromet, juge-t-on, la capacité de l’humanité de lutter contrer les menaces

écologiques et climatiques”.

Des entreprises constituent aujourd’hui des bases de données de brevets dans lesquelles chacun

peut aller puiser librement. IbM, par exemple, est dans ce cas.

un nouveau courant, baptisé “open hardware” gagne, par ailleurs, des galons.

Aurora 224, pour prendre un exemple, est un projet de table de mixage de musique pour disc

jockey, développée ouvertement par des dizaines d’ingénieurs inscrits dans une démarche de

collaboration. uzebox, quant à elle, est une console de jeu dont la conception technique a été

réalisée en ligne, par des centaines de passionnés.

on parle même, aujourd’hui, de voiture open source.

Certes, ces objets demeurent relativement rudimentaires et expérimentaux. Leur aspect extérieur

est assez brut. La technologie sous-jacente, néanmoins, fonctionne parfaitement. Chacun peut

utiliser les plans gratuitement, comme il/elle l’entend. Libre à tous d’améliorer ceux-ci (pour

autant qu’il/elle en fasse profiter les autres). Chacun est libre de créer, par dessus la technologie

open source, sa propre coque, son propre emballage, qui rendra le produit beaucoup plus attractif

et donc vendable...

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Devons-nous être étonnés de cette extension de l’open source au monde des produits phyiques?

Pas vraiment, sans doute. Même la recherche contre le cancer s’ouvre, désormais, à l’approche

open source57.

Ces collaborations ouvertes, on l’a vu, rendent les processus d’innovation beaucoup plus rapides.

La collaboration à distance, entre passionnés, est accessible à toute création immatérielle

pure. Aujourd’hui, tout knowledge worker connecté à internet a la possibilité de travailler avec

n’importe qui à l’autre bout du globe sur des développements intellectuels qui ne requièrent pas

directement de manipulation ou d’expérimentation physique.

La fabrication d’un produit, à tout le moins d’un prototype peut s’opèrer dans un second temps,

à l’initiative de n’importe quel contributeur prêt à y investir quelques moyens financiers ou

de fournir les équipements adéquats. En outre, la technologie apporte une nouvelle souplesse,

avec l’apparition des imprimantes dites 3D, qui démocratisent considérablement la phase de

prototypage.

Les imprimantes 3D offrent désormais la possibilité de fabriquer des objets unité par unité,

dans un matériau qui peut être, au choix une poudre de plastique, un agloméré de magnésium,

une résine synthétique voire, même, de la céramique... Ainsi, le coût de fabrication du premier

prototype s’effondre.

Plusieurs centres de recherche dans le monde se sont à présent équipés de plusieurs imprimantes

3D. Ils les mettent au service d’architectes, par exemple, pour leurs maquettes, ou au service

d’industriels locaux. Il suffit d’envoyer les plans 3D sous le format approprié et la machine les

manufacture automatiquement58.

“L’imprimante 3D permet de valider une idée très rapidement, souligne Umberto Baraldi. Un

fichier couleur sur un écran ne donne pas nécessairement toute l’information nécessaire pour bien

comprendre la complexité d’un objet ou d’un concept. Des ambiguités subsistent tant qu’on ne

tient pas l’objet en main... Un angle mal calibré, par exemple, un joint, invisible jusque là, peut

augmenter le frottement...”

“Avec l’impression 3D, la durée de réalisation de certains prototypes est ainsi passée de 2 mois

à quelques jours. Pour réaliser et valider le prototype d’un nouveau dénoyauteur ou d’une pince

chirurgicale, par exemple, il ne faut plus que 3 jours... Des imprimantes 3D permettent aussi de

fabriquer des objets plus complexes, comme des circuits imprimés voire, même, pourquoi pas, des

traceurs biologiques...”

Imprimente 3D

__ Source photo Flickr christopher.e

http://www.flickr.com/photos/41667064@

N02/5063057601/sizes/l/in/photostream/

57http://www.ted.com/talks/jay_bradner_open_source_cancer_research.html58via un système de découpe laser et d’impression par couche.

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59Lire aussi http://rossdawsonblog.com/weblog/archives/2011/06/crowdsourcing-goes-mainstream-shaping-organizations-and-the-future-of-work.html

LES PETITES STRuCTuRES AuSSI FoRTES QuE LES GRAnDES GRâCE Au CRoWDSouRCInG

Cela dit, nous l’avons évoqué plus tôt, un nombre croissant de grandes entreprises mettent

aujourd’hui en ligne des sites internet destinés à collecter de nouvelles idées.

De même, le principe de mettre en ligne, pour soi, une boîte à idée digitale ouverte à toute la

planète paraît, de prime abord, très séduisante pour une PME. Il convient toutefois de prendre

conscience que la gestion administrative de ces milliers de suggestions potentielles peut s’avérer

relativement lourde.

Souvent, les idées partent dans tous les sens. La plupart sont déstructurées, redondantes,

inabouties, peu originales… La déception peut guetter. Le travail de filtrage est relativement

conséquent. Selon Jeffrey baumgartner, à peine 2% des suggestions ont une réelle valeur.

Et encore, il s’agit en général de micro-améliorations.

Statistiquement, il est donc nécessaire de collecter un maximum d’idées pour en collecter

un minimum acceptable. Cette logique de chiffres nécessite néanmoins, comme on le voit,

d’importantes ressources dont ne disposent pas nécessairement toutes les PME.

La solution, en tant que PME, consiste sans doute à utiliser les plates-formes de tiers ou à

s’associer avec d’autres pour travailler sur une plate-forme commune, à l’instar du secteur

photovoltaïque, par exemple.

Partir sur une logique de questions précises peut s’avérer plus efficace. un concours public peut

s’avérer plus efficace.

une autre possibilité sera de miser sur de jeunes innovateurs, dans des startups ou des étudiants,

pour les inviter à réfléchir de façon créative sur un problème particulier. Dans le même ordre

d’idées, l’entreprise peut procéder à une séance de réflexion et de génération d’idées pour résoudre

la question uniquement avec des experts spécialisés, triés au préalable.

Quoi qu’il en soit, le principal avantage du crowdsourcing est lié au fait de pouvoir puiser dans

une réserve quasi infinie de contributions et d’idées, originales et diverses59.

« Le crowdsourcing est un moyen pour les PME d’avoir accès à un potentiel global, en utilisant

notamment Internet, estime, de son côté, Klaus-Peter Speidel, fondateur d’Hypios. La difficulté,

c’est que ces petites et moyennes entreprises doivent avoir les ressources internes suffisantes pour

évaluer la qualité des solutions qu’elles trouvent sur la Toile ».

Pour Klaus-Peter Speidel, le crowdsourcing est optimal pour les entreprises déjà innovantes.

non pas celles ayant déjà toutes les idées à leur portée, mais celles possédant l’ensemble des

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60http://www.collaboratif-info.fr/chronique/codesign-latout-des-environnements-virtuels-collaboratifs

compétences techniques pour les réaliser.

bien sûr, une PME de 50 personnes réunira sans doute, sur son nom, moins de contributeurs qu’une

multinationale présente dans 120 pays. Elle peut néanmoins développer sa capacité d’action en

ligne en allant là où sont les tiers. D’ailleurs, de plus petites structures encore, telles des écoles,

recourent désormais sans vergogne au crowdsourcing.

« Le monde internet fourmille d’outils qui permettent de faire du co-conception. Les mondes virtuels

représentent une classe potentielle intéressante, rappelle, pour sa part, le coach et blogueur

Serge Soudoplatoff60, reprenant l’exemple d’une école secondaire de Sydney ayant jadis lancé

un programme international baptisé Skoolaborate, permettant à des écoles du monde entier de

collaborer sur des projets spécifiques via la Teen Grid du réseau virtuel immersif Second Life.

Définir ces éléments au préalable mettra l’entreprise dans une situation plus confortable face à

l’imprévu. Par ailleurs, certaines formules de précaution, comme les accords de confidentialité,

permettent de se prémunir contre certaines mauvaises expériences possibles. bien que cet aspect

ait aussi sont revers.

« Les accords relatifs à l’utilisation et au partage de revenus des droits de propriété intellectuelle

sont deux fois plus longs à négocier qu’il y a dix ans, commente Monica beltrametti, chez Xerox.

Tout est devenu plus complexe. Et en Europe, les différences juridiques entre pays rendent les choses

plus difficiles encore. Etre préparé et bénéficier d’un accompagnement ad hoc en la matière est donc

absolument stratégique pour tout organisation ».

« On nous demande de plus en plus souvent des accords de confidentialité, confirme umberto

baraldi. J’en signe trois par semaine, aujourd’hui. Je n’en signais jamais voici cinq ans. N’est-ce

pas paradoxal ? Cela montre sans doute que les choses changent en profondeur et que chacun doit,

aujourd’hui, trouver ses marques dans ce nouvel environnement innovant... »

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The Open innovation levels

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61The Economist, 29 novembre 2011. En 2011, les comptes de la firme finlandaise se sont enfoncés dans le rouge pour la première fois.

En 2010, l’une des premières actions de Stephen Elop, le tout nouveau patron de nokia, fut

d’envoyer un couriel alarmant à tous les employés du géant finlandais des téléphones portables

indiquant que le groupe était comme une plate-forme pétrolière en feu au milieu de l’océan…

Les choses ne sont pas améliorées depuis, pour nokia61. Trois ans plus tôt, le groupe finlandais

était pourtant l’une des entreprises les plus prospères et les plus admirées du monde.

nokia a raté le virage des téléphones intelligents (smartphones), ceux qui se connectent à

internet. Cloîtrée dans un modèle d’innovation fermé, la firme n’a jamais voulu céder le controle

de la plate-forme logicielle sur laquelle elle comptait vendre ses futurs services digitaux. Le

groupe s’est ainsi laissé doubler par Apple.

bien qu’étranger, jusque là, au monde la mobilophonie, Apple a trouvé et assemblé les compétences

nécessaires, en recourant aux original-design manufacturers (oMD) asiatiques. L’iPhone est né en

neuf mois, à peine.

Le groupe californien a évité le piège du contrôle des contenus. Contrairement à nokia, Apple a

choisi de soutenir le développement d’un écosystème ouvert: l’AppStore. Grâce à ce dernier, des

milliers de développeurs et d’innovateurs ont trouvé un moyen de distribuer et de vendre leurs

propres applications mobiles à travers le globe. Cet environnement a considérablement accéléré

la dynamique d’innovation des produits et services disponibles sur l’iPhone, rendant ce dernier

encore plus irrésistible.

L’odyssée du groupe Apple est une fable moderne pour toute entreprise de notre temps.

Elle n’aurait pu se produire sans l’extraordinaire essor des oMD. Ces importants sous-traitants,

quel que soit le secteur, sont désormais de plus en plus impliqués dans le co-développement de

produits et de technologie. En partageant avec les autres, Apple a pu capturer une partie de la

valeur de ce gigantesque écosystème que la firme a contribué à créer.

Les pratiques de l’open innovation, on l’a vu, ne sont pas apparues, pour la première fois, dans

les années 2000. Mais les approches se généralisent et s’amplifient.

un nouveau champ d’opportunités s’ouvre aujourd’hui. Il devrait conduire les entreprises à

nouer des partenariats en amont de leurs processus d’innovation. A entrer dans des modèles

de collaboration et d’intégration beaucoup plus étroits. A considérer la perspective d’une

empreinte internationale et globale toujours plus tôt dans leurs efforts de développement et de

commercialisation.

Conclusion

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bien sûr, les défis ne sont pas minces. De nouvelles compétences devront voir le jour pour gérer

la mise en réseau et la collaboration. La protection de la propriété intellectuelle est également au

coeur de la démarche. D’une part, les entreprises devront apprendre à identifier clairement ce qui

est l’essence de leur valeur, ce qu’elles doivent absolument conserver pour elles. Parallèlement,

elles devront accepter de partager une partie de leur compétences et de leur savoir-faire afin de

nouer de nouvelles relations, d’avancer plus vite et plus loin avec d’autres.

L’open innovation constitue une opportunité fantastique pour les PME européennes. Les petites et

moyennes entreprises peuvent rejoindre des plates-formes de toutes sortes, sur la base d’accords-

cadres (à l’instar de la collaboration Texas A&M/ Awex), d’outils en ligne (Innocentive et d’autres),

de structures organisées (un cluster, un pôle), de grandes entreprises explicitement ouvertes à

l’input de tiers (P&G, Xerox, et de plus en plus d’autres). Elles peuvent également initier par elles-

mêmes ce type de collaboration en fonction de leurs propres actions de réseautage et de contacts.

L’open innovation est multi-facettes.

Les entreprises, grandes ou petites, idéalement, ne devront pas exiger directement des partenaires

qu’ils apportent une innovation clé sur porte. L’open innovation croît le mieux sur un tissu de

relation humaine, fait de confiance et de compréhension mutuelle. Les résultats surgiront, avant

tout, de l’échange…

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Avec le soutien de l’Agence wallonne à l’exportation et aux investissements étrangers.

Editeur Responsable :

Entreprise Globale www.entrepriseglobale.biz