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……………
Ce 8 mai, à 11 heures, la direction de la papeterie a donné l’ordre d’arrêter la fabrication qui
heureusement n’était pas commencée du fait que je n’étais pas là la veille. Je rentre chez
moi et le lendemain, je téléphone aux Recouvrements pour demander ce que je dois faire.
Comme c’est la veille de la Pentecôte, on me dit de rester chez moi sans préciser qu’il y a un
début de pagaille et qu’on envoie du personnel en province, surtout à Ostende pour
convoyer wagons et camions.
J’ai omis de dire que tout le personnel avait reçu auparavant un livret de mobilisation civile.
Donc la Banque pouvait disposer de nous à n’importe quel moment, de jour et de nuit. Cela
était instauré, en raison de la désorganisation du travail dans les services, lors de l’appel
des réservistes, durant le Pied de paix renforcé en 1938, lors de l’affaire de Munich. J’ai été
mobilisé durant cette période. J’ai passé une huitaine de jours à Renkelen, dans le
Limbourg, sans toucher de ravitaillement, ni équipement. Le commandant qui avait fait l’autre
guerre nous dit : »Je ne vois rien arriver. Que ceux qui ont de l’argent le donne pour acheter
du pain et moi, j’achèterai du café. » Nous étions 350 rappelés. Il y avait un bon nombre de
chômeurs dans le tas. J’avais en tout et pour tout sur moi, une vieille tunique (15 ans d’âge),
un bonnet de police, un pantalon de toile et une paire de vieilles godasses aux semelles
trouées. J’étais parti persuadé d’avoir un paquetage complet, à mon arrivée et d’être nourri !!
Un autre inconvénient celui des latrines ! Eh ! bien ! On s’en est passé pendant huit jours et
nous étions 350, dans un petit patelin ! Quant à se laver ??!!. Le jour où j’ai reçu mon livret
de mobilisation, la gendarmerie est venue chez moi avec un rappel de mobilisation. C’était la
deuxième fois.’s Anderendaags vroeg ik in de Bank wat ik moest doen en de chef van het
personeel zei me het me niet aan te trekken. Le lendemain, j’ai demandé à la Banque ce que
je devais faire et le chef du personnel m’a dit de ne plus m’en occuper.
Le mardi après la Pentecôte, je vais à la banque que je trouve quasi déserte… Bon nombre
de mes collègues étaient partis convoyer des camions réquisitionnés. Certains ne sont
rentrés chez eux qu’en 1945. Ils avaient été expédiés à Ostende pour embarquer des
valeurs à bord de la malle Ostende-Douvres et devaient après rejoindre Bruxelles.
Malheureusement, ils durent monter à bord, la malle se dirigeant vers la France, tout cela
sous le bombardement de la Luftwaffe. En cours de route, la Navy donna l’ordre au bateau
de rejoindre l’Angleterre où ils sont restés jusqu’à la libération de la Belgique. Certains
étaient dans la Brigade Piron et ont fait le débarquement de Normandie. Le 15 mai, annonce
de la radio belge : « Les hommes de 16 à 35 ans doivent rejoindre Roulers par leurs propres
moyens, ceux de 36 à 45 ans doivent rejoindre Ypres. »
Le 15 mai, annonce de la radio belge : « Les hommes de 16 à 35 ans doivent rejoindre
Roulers par leurs propres moyens, ceux de 36 à 45 ans doivent rejoindre Ypres. ».
Le 15 mai, la Banque paie trois mois d’appointements au personnel et durant l’après-midi
encore trois mois. La Banque donne l’ordre au personnel susceptible d’être rappelé de
rejoindre Roulers ou Ypres selon le cas. Nous sommes sept camarades groupés qui quittent
Bruxelles, le 16 mai 1940, le matin en direction d’Ypres. Arrivés là, nous voyons la place des
Halles encombrée d’une multitude d’hommes. Un petit tableau d’écolier porte l’avis tracé à la
craie : tous les hommes valides doivent rejoindre la France par leurs propres moyens.
Beaucoup s’ils ont un vélo sont par contre démunis d’argent et de vivres. En route pour la
France !! Au bout de quinze jours, nous arrivons à Poitiers, pourchassés par l’avance des
blindés de la Wermacht. Nous avons pédalé sans arrêt, traversé le Pas de Calais, la
Somme, le Calvados, L’Eure, la Mayenne, le Maine et Loire et la Vienne. Au long de la route,
nous avons dormi dans des fossés, les granges et même dans de longues mangeoires à
bétail où des puces de poules nous ont expulsés en pleine nuit. A Poitiers, nous avons
trouvé un logement dans la grange de la villa Beljouanne, à la Torchaise, aux confins de la
ville. Il y a une douche publique, près de la Place d’Armes. Nous allons pouvoir en profiter
car nous en avons besoin !! Depuis notre départ à Bruxelles, je ne me suis déshabillé que
deux ou trois fois pour changer de linge, laver le rechange et l’empaqueter à moitié séché
car il fallait foutre le camp en vitesse. Constat amer … je sens mauvais !!
Le lendemain de notre arrivée, nous nous présentons au bureau de la place où l’officier
belge nous annonce que nous sommes mobilisés. C’est la troisième fois que je le suis et ce
sera la dernière. Le proverbe dit « Jamais deux sans trois » L’officier ajoute : « Vous ne
pouvez pas quitter Poitiers. Tirez votre plan, appliquez le système D… facile à dire …..En
flânant dans Poitiers surpeuplé, car nous n’avons rien d’autre à faire, nous rencontrons Mr
Festraets, caissier de l’Etat qui a accompagné les ministères qui campent dans la vieille
université, avec une grande partie de la police d’Etterbeek, en uniforme. Celle-ci aide la
police locale qui n’en sort pas pour canaliser la circulation automobile.
Mr Festraets nous demande ce que nous faisons à Poitiers. Il nous demande si nous
voulons travailler avec lui car ils ne sont que deux et il est débordé par la besogne. Il nous dit
disposer de trois guichets à la Banque de France. Vu l’exiguïté de ceux-ci, nous décidons d’y
aller à trois un jour et le lendemain, l’autre équipe de trois s’y rendra et ainsi à tour de rôle, le
septième restera à la grange pour faire la lessive du groupe et remuer la litière où nous
dormons avec des hérissons qui rappliquent du jardin dès qu’il fait noir et que nous sommes
couchés. De ce fait, nous dormons tout habillés ainsi nous ne sentons pas leurs picots. Ils
doivent aimer la chaleur pour se coller ainsi à nous !
Je dois avouer que dès le lendemain de notre départ, l’esprit et le langage de caserne nous
a repris. Nous ne vivons pas dans l’atmosphère ouatée d’un couvent de jeunes filles et nous
invoquons souvent le nom du Créateur. Pour ma part, j’ai toujours eu difficile à m’en
débarrasser.
Mr Festraets nous demanda un jour de trouver une charrette à bras ; car il attendait un
chargement de sacs de billets de mille francs en provenance de Paris qui devait arriver par
rail le lendemain.
Comme la rue qui mène de la gare à la Banque de France est en pente raide, nous sommes
partis à sept avec le pousse-cul; le train entre en gare avec des wagons pleins de soldats
français blessés, couchés sur la paille. Mais pas de sacs ……Apercevant un monticule à
l’extrémité du quai, je m’en approche et vois un individu débraillé et sale, assis au sommet
de la pyramide de sacs BNB qui mange du pain, du fromage et boit du vin à même la
bouteille. J’avertis discrètement les autres et nous attendons qu’il ait fini son repas et qu’il
s’en aille pour prendre les sacs de billets. Il ne s’est pas douté un seul instant qu’il déjeunait
assis sur une fortune !!
Le 13 juin, le Gouverneur arrive de Paris, précédé par le Vice-Gouverneur. On est en pleine
retraite. Quelle pagaille !. Le départ est donné le soir pour Mont de Marsan, dans les landes.
Là, je rencontre un camarade Vincent qui m’offre de partager son lit si la propriétaire st
d’accord. Je paie 100FF par mois pour la location et je prends mes repas dans un restaurant
basque pour 20 FF par jour. Tout est très pimenté même le potage. La Banque, installée
dans une partie de la Banque de France, nous a repris en charge du fait que nous avons
travaillé pour le caissier de l’Etat, à Poitiers. Nous avons droit à 32 FF comme frais de
déplacement journalier. A la mi-août, la Coloniale quitte sa caserne pour se diriger vers
l’Afrique du Nord. Les blindés SS entrent dans Mont de Marsan. Le Vice-Gouverneur prend
la direction pour rentrer en Belgique, le Gouverneur étant souffrant et le secrétaire était
hospitalisé à la clinique de Mont de Marsan. Et quand je rentre avec le dernier convoi, il y
est toujours. Je rentre avec des puces Je ne m’en suis pas aperçu mais… ma femme les a
senties ….
Les bijoux de la couronne royale ainsi que la plus grande partie de l’encaisse de la Banque
étaient entreposés dans les coffres de la Banque de France à Mont de Marsan.