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Centre de Recherche et de Formation en Eco-éthologie 5 rue de la Héronnière, 08240 Boult-aux-Bois Tel : 03.24.71.16.07 - http://www.cerfe.com Rapport final d’activité 2010-2011 « Outils de veille de l’état des populations de mustélidés » Elaboration et validation d’outils de suivi des populations de deux mustélidés, le Blaireau européen (Meles meles) et la Martre des pins (Martes martes). MARS 2012 Documents associés : Abondance des populations de Martre d’Europe (Martes martes) dans deux paysages distincts : le massif forestier et le bocage agricole. (doc. I/IV) Elaboration et validation d’outils de suivi des populations de Blaireaux européens (Meles meles) (doc. II/IV) Corrélations entre densités et dégâts de Blaireaux européens (Meles meles) - Premières réflexions (doc. III/IV) Degré d’atteintes des objectifs initiaux et perspectives (doc. IV/IV)

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Centre de Recherche et de Formation en Eco-éthologie 5 rue de la Héronnière, 08240 Boult-aux-Bois Tel : 03.24.71.16.07 - http://www.cerfe.com

Rapport final d’activité 2010-2011

« Outils de veille de l’état des populations de mustélidés »

Elaboration et validation d’outils de suivi des populations de deux mustélidés, le Blaireau européen (Meles meles) et la Martre des pins (Martes martes).

MARS 2012 Documents associés :

• Abondance des populations de Martre d’Europe (Martes martes) dans deux paysages distincts : le massif forestier et le bocage agricole. (doc. I/IV)

• Elaboration et validation d’outils de suivi des populations de Blaireaux européens

(Meles meles) (doc. II/IV)

• Corrélations entre densités et dégâts de Blaireaux européens (Meles meles) - Premières réflexions (doc. III/IV)

• Degré d’atteintes des objectifs initiaux et perspectives (doc. IV/IV)

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« Outils de veille de l’état des populations de mustélidés »

Document I / IV

ABONDANCE DES POPULATIONS DE MARTRE D’EUROPE (Martes martes) DANS DEUX PAYSAGES DISTINCTS : LE MASSIF FORESTIER ET

LE BOCAGE AGRICOLE

MARINA MERGEY-BARBE

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SOMMAIRE Introduction ................................................................................................................................ 2 Sites d’étude ............................................................................................................................... 5 Matériel et Méthodes.................................................................................................................. 6

Récolte des échantillons ......................................................................................................... 6 Risques d’erreur sur ADN rare............................................................................................... 7 Extraction et amplification ADN ........................................................................................... 7 Identification des génotypes et qualité des données............................................................... 8 Estimation de l’abondance de la population .......................................................................... 9

Résultats ................................................................................................................................... 10

Collecte de fèces................................................................................................................... 10 Qualité des échantillons ....................................................................................................... 11 Estimation de la taille des populations à partir des données génétiques .............................. 14 

Identification des individus et validation des données..................................................... 14 Analyses Capwire............................................................................................................. 15 Analyses CAPTURE........................................................................................................ 16 

Estimation de l’abondance des populations à partir des données de radiopistage ............... 17 Discussion ................................................................................................................................ 18

Les difficultés d’une étude d’abondance sur fèces............................................................... 19 Proposition d’un protocole de récolte adapté....................................................................... 21 Effectifs des populations de martres .................................................................................... 21

Remerciements ......................................................................................................................... 23 Références bibliographiques .................................................................................................... 24 

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LISTE DES FIGURES

Figure 1. Zones de collecte d’échantillons pour l’étude d’abondance des populations de martres en forêt et

bocage et leur localisation dans les Ardennes (nord-est de la France). Les grands types d’habitat ont été

illustrés à partir de données Corine Land Cover. Les transects théoriques parcourus dans des quadras de

400 ha sont également représentés pour chacune des zones sur des photos aériennes (IGN) ....................... 5

Figure 2. Localisation des fèces récoltées au cours des 4 sessions d’échantillonnage entre 2010 et 2011 (mars

2010, points rouges ; juin 2010, bleus ; septembre 2010, verts ; mars 2011, noirs) en bocage (A) et en

forêt (B) ....................................................................................................................................................... 10

Figure 3. Nombre de fèces collectées en bocage et forêt au cours des 4 sessions d’échantillonnage ................... 11

Figure 4. Proportion des niveaux de confiance des fèces collectées concernant leur appartenance à la Martre (A)

et des fèces dont les génotypes ont été identifiés avec succès (B) dans les Ardennes en bocage et forêt.... 12

Figure 5. Proportion des états de fraicheur des fèces de martres collectées en bocage et forêt (A) et des fèces dont

le génotype a été identifié avec succès (B) dans les Ardennes .................................................................... 13

Figure 6 - Proportion des fèces collectées sur les différents sites de dépôt en bocage et forêt dans les

Ardennes...................................................................................................................................................... 13

Figure 7. Localisation des fèces génotypées avec succès pour les 3 sessions d’échantillonnage (mars 2010, points

rouges ; septembre 2010, points verts et mars 2011, points noirs) en bocage (A) et forêt (B) .................... 14

Figure 8. Estimations des tailles de population de martres au cours de 3 sessions d’échantillonnage en bocage (en

noir) et forêt (en rouge) dans les Ardennes, obtenue au moyen de 2 estimateurs TIRM et ECM disponibles

dans le logiciel Capwire .............................................................................................................................. 16

Figure 9. Estimations de la taille de la population de martres en massif forestier au moyen de 3 modèles M(h),

M(h) de Chao et M(o).................................................................................................................................. 17

Figure 10. Localisation des domaines vitaux de martres suivies entre 2005 et 2009 (femelles en rouge plein et

mâles en vert plein) et des domaines vitaux de martres hypothétiques (femelles en rouge barré et mâles en

vert barré) en vue d’une estimation de l’abondance de population de martres grâce à la technique de

cartographie des domaines vitaux................................................................................................................ 18

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INTRODUCTION

L’estimation fiable des paramètres d’une population est essentielle pour assurer la gestion et la conservation de la faune sauvage (William et al. 2002 ; McDonald et Yalden 2004). Parmi ces paramètres, l’abondance de la population et son évolution représente une donnée cruciale qui permet non seulement d’accéder à une bonne connaissance de cette population mais aussi de comprendre son fonctionnement. Par exemple, ces informations vont permettre de détecter les situations critiques (crash de population ou surdensité) en vue d’apporter les solutions adaptées. Les espèces qui supportent d’importants prélèvements telles que celles classées « nuisibles » sont donc particulièrement concernées par ce type d’étude. En Europe de l’ouest, le cas du Grand Hamster (Cricetus cricetus) en est un bon exemple puisqu’il a été longtemps exterminé pour les dégâts qu’il causait aux cultures jusqu’à ce que des études de l’Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage montrent que l’espèce se trouve au bord de l’extinction, uniquement présent à l’heure actuelle en Alsace (Losinger et al. 2006).

Cependant, l’abondance d’une population est souvent difficile à estimer, en particulier

lorsque l’espèce ciblée est peu commune et difficile à observer. Par exemple, le snowtracking (qui consiste à inventorier des pistes animales dans la neige, Becker et al. 1998) a été souvent utilisé sur les Carnivores (Raphael 1994 ; Halfpenny et al. 1995 ; Sulkava et Liukko 2007). Ont rapidement été préférées des techniques permettant de distinguer les animaux observés, telles que la photo-identification (grâce à l’utilisation de pièges photo ou pièges vidéo). Ces dernières s’adaptent bien sur les espèces dont les individus sont porteurs de signes distinctifs faciles à mettre en évidence tels que les marques faciales chez le Tigre (Panthera tigris) ou encore les cicatrices dorsales chez les Cétacés. Cependant, cette méthode n’est pas utilisable sur la majeure partie des espèces. Depuis ces 15 dernières années, le développement de techniques s’appuyant sur l’utilisation d’échantillons non invasifs (type poils, fèces) est apparu comme une bonne alternative à ce problème (Schwartz et al. 2007). La récolte de tels échantillons permet d’aboutir à une estimation de l’abondance via des méthodes de capture-marquage-recapture (CMR, Kohn et al. 1999 ; Creel et al. 2003 ; Eggert et al. 2003 ; Bellemain et al. 2005). Le principe de la CMR est de marquer des individus lors d’une première session de capture et ensuite, au cours des sessions suivantes, de quantifier la proportion d’individus marqués. La taille de la population étudiée est alors estimée à partir du rapport d’individus marqués sur le nombre d’individus non marqués en partant de l’hypothèse que tous les individus ont une chance égale d’être capturés. Dans le cas d’une CMR faisant appel à la technique de marquage génétique, l’ADN est extrait des cellules présentes dans les échantillons prélevés pour identifier des génotypes individuels sur la base de marqueurs moléculaires type microsatellites (Taberlet et al. 1999). Les génotypes sont comparés d’une

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session de capture à la suivante et en cas de correspondance, on considère que l’individu a été recapturé.

La CMR génétique paraît donc tout à fait adaptée au cas des petits Carnivores qui

évoluent globalement à faibles densités, que l’on observe difficilement du fait de leur rythme d’activité nocturne et leur nature discrète. Petit Carnivore classé parmi les espèces nuisibles, la Martre (Martes martes) est une espèce encore mal connue et dont on sait peu de chose sur l’état de ses populations. En tant que mammifère forestier, c’est une espèce potentiellement sensible à la perte et la fragmentation de l’habitat forestier. Etant donné l’impact des activités agricoles et sylvicoles sur la forêt en France, il apparaît intéressant de disposer d’informations précises sur le cas de la Martre.

Des études récentes ont montré que malgré sa spécificité pour l’habitat forestier, la Martre est capable de s’accommoder de paysages où cet habitat ne domine pas, voire dans lequel il est largement minoritaire (Pereboom et al. 2008 ; Mortelliti et al. 2010 ; Mergey et al. 2011). De plus, dans ces paysages, les martres sont établies sur des domaines vitaux de taille réduite (Mergey et al. 2011). Nous notons la présence d’individus dans des taches de surface très variables pouvant aller jusqu’à quelques hectares seulement. Cependant, les individus suivis se cantonnaient dans ces taches d’habitat. Nous nous posons donc la question de savoir si cette réduction de la surface des domaines vitaux est associée ou non à une augmentation de la densité de la population. Afin de mener à bien cette étude, nous avons choisi d’étudier 2 populations de martres, l’une dans ce bocage agricole où l’habitat forestier est présent sous forme de taches et l’autre dans un grand massif forestier. Ainsi, travailler dans des paysages à niveau de fragmentation de l’habitat distinct doit nous permettre de mener de front une étude comparative de l’abondance des populations et une étude d’impact de la fragmentation paysagère sur ces abondances.

Au cours de cette étude, nous avons soulevé plusieurs problèmes méthodologiques liés à l’échantillonnage de fèces, à la conservation de matériel ADN rare, aux protocoles de laboratoire et aux analyses CMR qui ont trait à l’utilisation de fèces pour ces estimations. Nos objectifs étaient 1) de développer et valider un protocole d’estimation de l’abondance des populations de martres à partir d’une identification génétique individuelle, 2) de fournir une comparaison de cette estimation avec celle issue de méthodes de suivi télémétrique d’individus et enfin 3), de comparer l’abondance des populations de martres dans 2 paysages forestiers distincts pour mieux comprendre l’impact de la fragmentation forestière sur cette espèce.

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SITES D’ETUDE Après une recherche approfondie sur le terrain, nous avons identifié 2 zones de 64 km2

aux caractéristiques paysagères distinctes : un massif forestier et un bocage agricole où l’habitat forestier est présent sous forme de bois, boqueteaux et haies.

Figure 1. Zones de collecte d’échantillons pour l’étude d’abondance des populations de martres en forêt et bocage et leur localisation dans les Ardennes (nord-est de la France). Les grands types d’habitat ont été illustrés à partir de données Corine Land Cover. Les transects théoriques parcourus dans des quadras de 400 ha sont également représentés pour chacune des zones sur des photos aériennes (IGN)

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Le site « massif forestier » est situé dans le nord des Ardennes, entre les communes de Monthermé et Hargnies. Il est compris dans un massif d’environ 70 000 ha (Figure 1). Il est caractérisé par des parcelles de grande surface souvent monospécifiques et une végétation à dominante résineuse.

Le site « bocage agricole » est situé dans le sud-est des Ardennes, autour de la commune de Buzancy, à 50 km à vol d’oiseau du site « massif forestier » (Figure 1). Ce site comprend 12% de forêt avec des taches boisées d’1.2 ha en moyenne, une densité de lisière de 72m/ha et une distance moyenne entre les taches de 30 m. La végétation est beaucoup plus diversifiée que sur le site forestier, avec une dominante de peuplements mixtes conifères et feuillus. Ce site d’étude a été choisi pour assurer un chevauchement des données de suivi radiotélémétrique de martres afin de croiser les estimations obtenues par CMR génétique et par cartographie des domaines vitaux.

MATERIEL ET METHODES

Récolte des échantillons Nous avons procédé à une recherche de fèces sur les 2 site d’étude au cours de 4

sessions : mars 2010, juin 2010, septembre 2010 et mars 2011 et ce, afin de couvrir 3 saisons ainsi que 2 années successives. Une session était réalisée en 1 à 2 semaines. Pour optimiser la probabilité de capture des individus mais également la récolte d’échantillons d’individus différents, nous avons divisé chaque zone en 16 quadras de 400 ha (i.e. la surface moyenne d’un domaine vital de martre en massif forestier). La récolte dans les quadras a ensuite été organisée de sorte à maximiser la détection de tous les individus présents sur la zone. Pour ce faire, nous avons parcouru des transects d’environ 3 km orientés de façon opportuniste c’est-à-dire optimisant les chances de trouver des fèces (Figure 1). Au total, nous avons parcouru environ 48 km à chaque session dans chacune des zones. En bocage, cet échantillonnage a permis de prospecter toutes les taches d’habitat forestier présentes sur le site d’étude.

Pour chaque fèces ramassée, nous avons relevé la date, les coordonnées GPS, le site de dépôt et nous avons également attribué deux notes : la fraicheur de l’échantillon (de 1 à 3, du plus récent au plus ancien) et le degré de certitude de l’appartenance à l’espèce cible (de A, forme très caractéristique de fèces de martre à C, forme peu caractéristique). Les fèces étaient collectées dans des sachets plastiques au sec puis maintenues au congélateur jusqu’à leur traitement en laboratoire.

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Risques d’erreur sur ADN rare Lorsque l’on travaille sur de l’ADN rare tel que trouvé dans les fèces, on doit faire

face à 3 grands types de problème : l’échec d’amplification ADN, le saut d’allèle et les mutations in vitro. L’échec d’amplification est dû à l’échec de la procédure PCR (Polymerase Chain Reaction) à produire de nombreuses copies de l’ADN cible et cela peut s’expliquer par l’absence ou la présence en trop faible quantité de cet ADN dans l’échantillon. La présence d’inhibiteurs de PCR et DNases dans l’échantillon est également possible. Ce problème reste simple à gérer car il se traduit en l’absence de données qui est pris en compte dans ce type d’étude par une probabilité de capture des individus inférieure à 1 lors du développement des modèles. Le saut d’allèles intervient quand un allèle n’est pas amplifié à un locus donné ou n’était pas présent dans l’ADN pipeté et ne peut donc pas être amplifié. L’individu apparaît homozygote à ce locus, alors qu’étant hétérozygote à l’origine. Ici, il s’agit de répéter plusieurs fois l’étape d’amplification afin de s’assurer de la meilleure qualité possible des résultats. Enfin, des mutations in vitro, qui restent rares, créent de nouveaux allèles et font apparaître des individus soit hétérozygotes au locus concerné soit porteurs de 3 allèles à ce même locus auquel cas, l’erreur est vite décelée. Les deux derniers cas sont problématiques dans des études de CMR car sans tenir compte de ce risque, de nouveaux génotypes apparaissent et entrainent une surestimation du nombre d’individus présents dans la population échantillonnée. Pour limiter ces erreurs, nous avons fait appel à plusieurs méthodes telles que la mise à l’écart des échantillons de faible qualité, l’utilisation d’un jeu de microsatellites suffisamment important et variable pour permettre une identification satisfaisante de génotypes uniques et l’expérience de techniciens qui ont l’habitude de travailler avec ce type d’échantillons. Une double lecture à l’aveugle des profils génétiques a permis également d’obtenir une confirmation des génotypes proposés.

Nous estimons avoir pris en compte ces différents risques lors de chacune des étapes aboutissant à l’estimation d’une abondance des populations de martres.

Extraction et amplification ADN Chaque échantillon est identifié avec un numéro unique qui garantit la traçabilité au

laboratoire de la préparation de l’échantillon jusqu’à la production des génotypes en passant par l’extraction d’ADN et les analyses génétiques. Les fèces sont raclées de façon stérile sur le pourtour extérieur afin de récupérer des fragments d’excrément contenant des cellules de l’animal (entre 5 et 20 mg) et de placer ces fragments dans un tube numéroté. La manipulation des fèces pour l’extraction d’ADN est réalisée dans une pièce débarrassée de toute ADN contaminant par des traitements aux UV et un nettoyage approfondi à l’eau de javel. L’extraction d’ADN est réalisée sur des plaques de 96 colonnes d’extraction (Nucleospin 96 Tissue, Macherey-Nagel) en présence de témoins négatifs et positifs

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d’extraction. Les échantillons sont lysés toute une nuit à 56°C, puis l’ADN est purifié sous vide à l’aide des colonnes conformément au protocole fourni avec le kit d’extraction d’ADN. L’ADN est élué pour obtenir deux tubes de 60 µl d’ADN concentré à 20-100 ng/µl. L’ADN est conservé à -20°C sous forme de plaque de 96 microtubes numérotés individuellement.

Chaque ADN extrait est testé par l’amplification d’un microsatellite témoin des 5 espèces de carnivores présents sur la zone et entre lesquelles il est possible de faire une confusion (renard, putois, chat forestier, fouine), ce qui a permis de poursuivre l’amplification des marqueurs microsatellites sur les échantillons qui présentent à la fois suffisamment d’ADN et l’ADN cible. Onze marqueurs microsatellites (Ma1, Ma2, Ma3, Ma8, Ma9, Ma10, Ma18, Ma19, Gg7, Ggu454, Lut604) et un marqueur de sexe (DDX3XY, Sekigushi et al. 2009) sont amplifiés à l’aide d’une PCR multiplex (Polymerase Chain Reaction) et analysés sur séquenceur automatique d’ADN en une seule migration. Pour chacun des marqueurs, sont conçues et synthétisées une amorce oligonucléotidique froide (Sigma Aldrich) et une amorce oligonucléotidique fluorescente (Applied Biosystems) correspondant à une amorce froide à laquelle est adjointe un fluorochrome (Fam, Vic, Ned, Pet, Applied Biosystems).

Les réactions de PCR sont réalisées dans des plaques 96 puits en présence de 3 témoins négatifs et de 3 témoins positifs d’amplification. Chaque réaction de PCR est réalisée dans un volume final de 10 µl contenant 5 µl de mastermix Taq Polymerase (Type-It, Qiagen), 1,94 µl d’un mélange de 13 couples d’amorces oligonucléotidiques (2 couples d’amorces étant utilisés pour le marqueur de sexe) à une concentration comprise entre 0,06 et 0,8 µM et 50 ng de la matrice d’ADN génomique. Chaque amplification par PCR est réalisée dans un thermocycleur (Biometra T Gradient thermocycler) selon le programme suivant : 95°C pendant 5 minutes, puis 50 cycles avec une phase de dénaturation à 95° pendant 30 secondes, une phase d’hybridation à 56°C pendant 1 minute et 30 secondes et une phase d’élongation à 72°C pendant 30 secondes et finalement 60°C pendant 30 minutes.

Afin d’obtenir les résultats les plus fiables possibles, l’étape d’amplification de l’ADN extrait est répétée entre 2 et 4 fois en fonction de la qualité des profils alléliques obtenus et comme décrit précédemment, les profils obtenus sont lus par 2 personnes en aveugle afin de contrôler les résultats.

Identification des génotypes et qualité des données Les génotypes, issus de l’amplification des 11 microsatellites, ont été comparés à

l’aide des logiciels GeneCap et R grâce au package « allelematch ». Ils étaient considérés comme appartenant au même individu quand tous les allèles à tous les loci étaient identiques. Pour conserver un maximum de données et au vu du taux non négligeable de perte allélique, nous avons également considéré que 2 génotypes appartenaient au même individu dans plusieurs cas où la correspondance n’était pas parfaite c’est-à-dire jusqu’à 3 loci non correspondants. De telles analyses nous ont permis de détecter non seulement le nombre de

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génotypes uniques mais également le nombre de recaptures aux différentes sessions d’échantillonnage.

La puissance de résolution du jeu de microsatellites utilisés a été calculée à partir de la probabilité d’identité PI (probabilité que deux individus pris aléatoirement partagent le même génotype aux loci considérés). Nous avons également calculé la PI au sein d’une fratrie.

Le site d’étude « bocage agricole » a été choisi de façon à ce que les données de CMR génétique et de suivi télémétrique se chevauchent. Cela nous a donc permis d’une part, de comparer les profils génétiques des martres suivies à ceux obtenus sur les fèces et d’autre part, de vérifier les erreurs possibles présentes dans le jeu de données issues du CMR génétique. Pour cela, nous avons comparé les fréquences alléliques des profils génétiques obtenus à partir des fèces et des tissus.

Enfin, la fiabilité du marqueur de sexe a été obtenue en faisant des tests sur des échantillons connus de tissus (martres suivies).

Estimation de l’abondance de la population De nombreux modèles sont disponibles pour estimer l’abondance d’une population et

ceux-ci sont groupés dans 2 grandes catégories, les estimateurs utilisant une seule session d’échantillonnage et ceux utilisant 2 ou plusieurs sessions d’échantillonnage (méthodes CMR classiques). Des études empiriques récentes (Puechmaille et Petit 2007 ; Robinson et al. 2009 ; Harris et al. 2010) ont montré que les méthodes utilisant une session de capture fournissent de bonnes estimations lorsque l’on travaille sur des populations comportant moins de 100 individus. Ces méthodes sont même plus précises que les modèles CMR multi-sessions (Robinson et al. 2009). Dans le cas des populations de martres, nous nous attendons à trouver une abondance de population sur la surface des 64 km2 échantillonnée bien inférieure à 100 individus. La méthode d’estimation à échantillonnage sur session unique paraît donc une bonne alternative. Cependant, dans la mesure où nous avons réalisé plusieurs sessions d’échantillonnage, nous avons souhaité tester les 2 types de méthodes à session unique et multi-sessions afin d’obtenir une mesure la plus fine possible de l’abondance de martres en forêt et en bocage pour les années 2010 et 2011.

Pour la méthode à échantillonnage unique, 2 estimateurs ont été testés grâce au test de

rapport de vraisemblance : ECM (Even Capturability Model) où tous les individus ont la même probabilité d’être capturés et TIRM (Two Innate Rates Model) où les individus ont des probabilité d’être capturés différentes et appartiennent à 2 groupes, les individus faciles à capturer de type A et les difficiles à capturer de type B. Le test du rapport de vraisemblance permet ensuite à partir du rapport d’Akaike (AIC) de choisir quelle méthode offre la meilleure estimation. Ces analyses ont été réalisées à l’aide du logiciel Capwire.

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Nous avons également analysé les performances d’estimateurs disponibles dans le logiciel CAPTURE (White et al. 1982). Ceux-ci sont basés sur l’hypothèse que l’on dispose de sessions d’échantillonnage au cours desquels un individu ne peut être capturé qu’une seule fois. Ils ne tiennent donc pas compte de l’hétérogénéité de capture individuelle dans une même session et reposent également sur l’hypothèse qu’il n’y a pas d’effet du temps entre les sessions sur la capturabilité des individus, c’est-à-dire pas de prise en compte de la probabilité de survie (i.e. cas d’une population fermée). En revanche, ils permettent de tester la présence d’une hétérogénéité de capture entre les sessions. Nous avons testé les performances des modèles Mh-Jackknife (Burnham and Overton 1979) et Mh-Chao (Chao 1989) qui repose sur l’hypothèse d’une hétérogénéité individuelle de capture. Chaque capture génétique d’un individu a été assignée à une occasion de capture afin de nous permettre de créer des histoires de capture pour chacun des individus détectés sous format matriciel (Otis et al. 1978).

RESULTATS

Collecte de fèces

Au cours de l’année 2010, 3 sessions (mars, juin, septembre) ont été menées à bien. La session du mois de décembre a tout d’abord été reportée en raison des importantes chutes de neige qui ont recouvert le sol rendant impossible la recherche de fèces puis a été annulée en raison des inondations au mois de janvier.

Figure 2. Localisation des fèces récoltées au cours des 4 sessions d’échantillonnage en 2010 et 2011 (mars 2010, points

rouges; juin 2010, bleus; septembre 2010, verts ; mars 2011, noirs) en bocage (A) et en forêt (B)

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Au total, 830 fèces ont été collectées de mars 2010 à mars 2011 : 266 en mars 2010, 189 en juin 2010, 74 en septembre 2010 (dans seulement 5 quadras échantillonnés en bocage) et 239 en mars 2011. Un large biais dans la récolte de fèces est observé en faveur du bocage avec une moyenne de 13.5 fèces par transect contre 3.4 en massif forestier en mars 2010, 8.6 fèces contre 3.6 en juin 2010 et 10 contre 4.9 en mars 2011 (Figure 3). En septembre, seulement 5 transects ont été réalisés en bocage et ne permettent donc pas de comparer les deux récoltes. Nous trouvons donc significativement plus de fèces « martres » en bocage qu’en massif forestier (X2=27.6, ddl=2, p-value <0.001).

Figure 3. Nombre de fèces collectées en bocage et forêt au cours des 4 sessions d’échantillonnage

Qualité des échantillons

Sur la base de critères morphologiques, 49% des fèces collectées en bocage et 43% en forêt étaient considérées comme très caractéristiques de la Martre, i.e. de type A. Le reste des fèces a été collecté car bien que moins proche de la morphologie classique de fèces de martre, il pouvait correspondre à l’espèce recherchée (site de dépôt caractéristique, taille correspondante, etc...). Dans les 2 sites d’étude, nous avons collecté davantage de fèces de type A. Cependant, morphologiquement, nous n’avons pas observé de différence significative de proportion des 3 types de fèces collectées entre bocage et massif forestier (X2 = 4.66, ddl = 2, p-value = 0.097, figure 4). De plus, en bocage, les types A n’ont pas obtenu de succès de génotypage plus important que les types B et C (X2 = 4.58, ddl = 2, p-value = 0.1015) alors qu’en massif forestier, les fèces typées A ont permis d’identifier plus de génotypes de martres que les fèces de types B et C (X2 = 6.30, ddl = 2, p-value = 0.043). D’après ces résultats, il

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reste intéressant de collecter des fèces sur la base d’autres critères que morphologiques, tels que le site de dépôt.

Figure 4. Proportion des niveaux de confiance des fèces collectées concernant leur appartenance à la Martre (A) et des

fèces dont les génotypes ont été identifiés avec succès (B) dans les Ardennes en bocage et forêt

Par ailleurs, les mêmes proportions de fèces récentes à anciennes (1 à 3) ont été collectées en bocage et massif forestier (X2=3.64, ddl = 2, p-value = 0.162, figure 5). De même, on retrouve globalement le même profil de proportion de fèces aboutissant à des génotypes dans les 2 zones d’étude (X2=3.22, ddl = 2, p-value = 0.199). De plus, les proportions de fèces d’âge différents aboutissent aux mêmes proportions de fèces génotypées avec succès et ce dans les 2 sites d’étude, en bocage (X2=4.686, ddl = 2, p-value = 0.096) et en massif forestier (X2=0.438, ddl=2, p-value= 0.803). L’âge estimé des fèces ne permet donc pas d’améliorer le succès de génotypage sur une sélection des fèces à partir de ce critère pendant la récolte.

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Figure 5. Proportion des états de fraicheur des fèces de martres collectées en bocage et forêt (A) et des fèces dont le

génotype a été identifié avec succès (B) dans les Ardennes

Concernant les sites de dépôt (Figure 6), en bocage, 70% de fèces sont trouvées sur les troncs d’arbre au sol, les 30% restants sont trouvées sur les souches, les sentiers, les pierres, au pied d’arbres morts. En forêt, les différents sites sont représentés de façon plus homogène avec une majorité des fèces (30%) trouvées sur sentier. Au cours de nos transects, nous avons noté une forte présence de troncs et de branches au sol en bocage, ce qui n’était pas le cas en massif forestier où les parcelles sont régulièrement nettoyées. Ensuite, nous avons orienté nos transects sur les sentiers au cours de la session mars 2011 en massif forestier face à la difficulté de collecter des fèces au travers des parcelles de grandes surfaces.

Figure 6 - Proportion des fèces collectées sur les différents sites de dépôt en bocage et forêt dans les Ardennes

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Estimation de la taille des populations à partir des données génétiques

Sur les 266 échantillons de mars 2010, 106 (soit 40%) ont été amplifiés avec succès sur 5 à 12 marqueurs et 104 n’ont donné aucune trace d’ADN au moment de l’extraction (Figure 7). A titre d’information, il est à noter que les échantillons de bocage ont donné de meilleurs résultats que ceux de massifs forestiers avec 43% contre 24%. Sur les 74 fèces analysées en septembre 2010, 46 ont permis d’obtenir un génotype (soit 62%). Enfin, sur les 239 fèces collectées en 2011, 90 ont été amplifiés avec succès (soit 38%). Malgré une distribution des fèces récoltées assez uniforme, l’étape du génotypage a engendré une réduction importante de la couverture du site d’étude en massif forestier avec seulement 9 quadras sur 16 correctement représentés et 5 sur lesquels aucun génotype n’a pu être identifié.

Figure 7. Localisation des fèces génotypées avec succès pour les 3 sessions d’échantillonnage (mars 2010, points

rouges ; septembre 2010, points verts et mars 2011, points noirs) en bocage (A) et forêt (B)

Identification des individus et validation des données

Sur une surface de 64 km2, nous avons identifié 40 génotypes distincts en bocage contre 8 en massif forestier en mars 2010. Les profils dont on a pu déterminer le sexe correspondaient à 5 femelles et 15 mâles uniquement en bocage. En septembre 2010, 16 individus dont 1 femelle et 9 mâles ont été distingués sur les 5 transects de bocage contre 15 dont 4 femelles et 3 mâles, sur le site entier du massif forestier. Enfin, en mars 2011, nous avons identifié 30 martres en bocage dont 4 femelles et 10 mâles contre 13 en forêt dont 2 femelles et 2 mâles. En bocage, le nombre de captures par individu par session s’échelonne de 1 à 10 et en massif forestier, de 1 à 4.

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Au total, et en prenant en compte les recaptures d’une session à l’autre, 70 individus ont été identifiés en bocage dont 8 femelles et 19 mâles contre 31 individus en massif forestier dont 6 femelles et 6 mâles.

Analyses Capwire

Le nombre d’individus et leur taux de capture ont été utilisés pour estimer la taille des populations à l’aide du logiciel Capwire. Les sessions d’échantillonnage n’ont pas été regroupées dans le but d’approcher au mieux les conditions du modèle appliqué aux populations fermées (absence de mortalité, de natalité, d’émigration et d’immigration).

Sur la base d’un test de rapport de vraisemblance, le modèle TIRM a été sélectionné

pour les 2 sessions d’échantillonnage en bocage. La session de septembre n’a pas été utilisée pour l’estimation de la taille de cette population car l’échantillonnage ne correspondait pas à celui des 2 autres sessions. En mars 2010, la taille de la population est estimée à 58 individus avec une largeur d’intervalle de confiance à 95% de 27. Treize individus sont considérés comme facile à capturer (classe A) et 45 comme difficile à capturer (classe B). En mars 2011, la taille de la population est estimée à 53 individus avec une largeur d’intervalle de confiance à 95% de 31 (Figure 7). Neuf individus sont classés en individus faciles à capturer et 44, en difficile à capturer. La forte proportion d’individus de classe B dans les 2 sites est le résultat du nombre important de génotypes capturés une seule fois.

En massif forestier, c’est le modèle ECM qui a été sélectionné pour les 3 sessions analysées. Les tailles de population estimées sont inférieures à celle du bocage. En effet, en mars 2010, la taille de la population est estimée à 11 individus avec un intervalle de confiance à 95% allant de 8 à 22. En septembre 2011, la taille de la population est un peu plus importante avec 25 (15-50) individus. Enfin, la taille de la population estimée en mars 2011 est de 22 (13-36) martres (Figure 8).

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Figure 8. Estimations des tailles de population de martres au cours de 3 sessions d’échantillonnage en bocage (en noir)

et forêt (en rouge) dans les Ardennes, obtenue au moyen de 2 estimateurs TIRM et ECM disponibles dans le logiciel Capwire

Analyses CAPTURE

Les probabilités de captures en forêt ne présentent pas de variations significatives entre les sessions (X2=3.034, ddl = 2, p-value = 0.219). L’hétérogénéité de capture entre les individus et la réponse comportementale après capture initiale n’ont pas pu être testées à cause d’un manque de données.

Les histoires de capture des martres issues du massif forestier ont été analysées en utilisant le modèle M(h) de Chao, l’estimateur jacknife M(h) et le modèle nul M(o). Bien que la comparaison des modèles grâce au test de fonction discriminante confère au modèle nul le meilleur score (1.0 contre 0.84 et 0.64), nous relevons qu’il est plus vraisemblable biologiquement qu’il existe une probabilité de capture variable entre individus. En effet, les martres présentent des domaines vitaux de taille variable, ne serait-ce qu’entre les sexes. En forêt, la moyenne d’un domaine vital de femelle est de 120 ha et celle d’un mâle de 340 ha (Mergey et al. 2011). Par conséquent, les résultats obtenus par l’estimateur jacknife M(h) semble plus fiable. L’abondance de la population en massif forestier est ainsi estimée à 52 (SE = 6.87) pour le modèle tenant compte d’une hétérogénéité individuelle (Figure 9).

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Figure 9. Estimations de la taille de la population de martres en massif forestier au moyen de 3 modèles M(h), M(h) de Chao et M(o)

Estimation de l’abondance des populations à partir des données de radiopistage

En bocage, l’abondance de la population de martres résidentes et adultes, estimée par la technique de la cartographie de domaines vitaux, est de 48 individus sur la surface des 64 km2. Nous avons suivi sur cette zone 14 martres pendant au moins un an (10 mâles et 4 femelles). La surface d’habitat disponible permet de positionner 34 domaines vitaux hypothétiques (9 mâles et 25 femelles) (Figure 10).

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Figure 10. Localisation des domaines vitaux de martres suivies entre 2005 et 2009 (femelles en rouge plein et mâles en vert plein) et des domaines vitaux de martres hypothétiques (femelles en rouge barré et mâles en vert barré) en vue

d’une estimation de l’abondance de population de martres grâce à la technique de cartographie des domaines vitaux

En massif forestier, l’abondance de la population de martres estimée en usant de la même technique correspond à 71 individus (18 mâles et 53 femelles) sur cette même surface.

DISCUSSION

Compte tenu de la difficulté d’observer des petits Carnivores dans leur milieu naturel, nous avons procédé à une estimation d’abondance faisant appel à la collecte d’indices de présence. Conformément à ce qui était prévu, nous sommes parvenus à fournir une estimation d’abondance de martres pour les années 2010 et 2011. La méthode de Capture-marquage-recapture (CMR) génétique a été appliquée sur les 2 populations de martres échantillonnées, en bocage et en massif forestier. En revanche, nous avons dû faire face à 3 difficultés majeures : le coût important des analyses génétiques, le temps nécessaire à la

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récolte des échantillons et le faible succès d’amplification ADN. Pour ces raisons, nous avons réadapté notre protocole au cours de l’étude.

Environ 40% des fèces ont permis d’aboutir à l’identification de génotypes de qualité aux sessions de mars et malgré une récolte d’échantillons moins importante à la session de septembre, 60% des fèces ont été génotypées avec succès.

Cette étude a mis en évidence la présence de 70 martres sur les 64 km2 de bocage au cours de 2 années successives avec 10 individus présents les 2 années. En massif forestier, 31 martres ont été identifiées sur les 64 km2 de massif forestier pendant les 2 années successives. D’après les modèles choisis, nous estimons que l’abondance de la population de martres en bocage est d’une cinquantaine d’individus alors que celle de la population en massif forestier est 2 fois moins importante.

Les difficultés d’une étude d’abondance sur fèces Face à ces difficultés, quelques solutions peuvent être proposées. Etant donné les coûts

importants proposés par les prestataires de service compétents, nous avons dû diminuer le nombre de sessions de capture et le nombre d’échantillons à analyser. Nous envisageons donc lors d’études futures de développer nous même les analyses laboratoires par le biais de collaboration avec des laboratoires possédant le matériel nécessaire. Il en va de diviser le coût par échantillon par 3, ce qui nous permettra de multiplier les sessions d’échantillonnage et donc d’améliorer la fiabilité des estimations d’abondance obtenues.

Concernant le temps nécessaire à la récolte d’échantillons, la seule solution est de disposer d’équipes techniques suffisamment nombreuses pour pouvoir minimiser le temps consacré à cette partie du travail. Il est peu recommandable de proposer une récolte des échantillons au gré des sorties sur le terrain car la durée de collecte pour réunir un nombre d’échantillons satisfaisants serait trop importante et mortalité, dispersion et natalité pourraient alors survenir dans la population. Or, les modèles d’estimations d’abondance considèrent les populations fermées c’est-à-dire dans lesquelles n’interviennent ni mortalité, ni natalité, ni immigration, ni émigration. La méthode utilisée ici, les transects semi-opportunistes, s’avère fructueuse et peut donc être conservée pour ce type d’étude. En effet, en bocage, le nombre moyen de fèces collectées est de 10 à 13 fèces par transect de 3 km. Cette moyenne est très inférieure en forêt mais la solution est d’adapter les transects au type d’habitat. C’est pour cette raison que lors de la session de mars 2011, nous avons réorienté les transects en privilégiant le passage sur sentier. Le cas de figure de ce site d’étude se prête bien à une dilution de la distribution des fèces. Tout d’abord, les domaines vitaux de martres en forêt sont plus grands qu’en bocage (Mergey et al. 2011). Pour un nombre égal de fèces par individu, ces fèces sont donc réparties sur une plus grande surface. Ensuite, l’habitat proposé est radicalement différent. Les parcelles sont de grande surface et rendent le paysage très

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uniforme sur de grandes étendues sans réel repère pour orienter les recherches. De plus, une grande partie du site d’étude est représentée par des plantations d’épicéas et dans ce type d’habitat, il est difficile de trouver des repères pour se diriger, ne trouvant au sol qu’une litière de mousse. Enfin, la majeure partie du site d’étude étant en forêts domaniale et communale, les parcelles sont régulièrement nettoyées et la disponibilité en troncs morts et branchages au sol est très faible. Or, comme nous l’avons vu en Figure 6, en bocage 70% des fèces étaient trouvés sur ce site d’éléments. Tous ces éléments rendent difficile la collecte de fèces mais cette optimisation de la récolte en passant le long des sentiers a permis d’augmenter le nombre de fèces de 46%, passant de 54 fèces trouvées en mars 2010 à 79 en mars 2011. L’objectif étant de maximiser la collecte de fèces, les transects semi opportunistes se prêtent donc bien à ce type d’étude.

Enfin, le dernier problème rencontré est le très faible succès d’amplification des fèces : 40% en forêt contre 20% en bocage. Plusieurs raisons peuvent être invoquées pour expliquer ce résultat : la collecte de fèces appartenant à d’autres espèces, la collecte de fèces pas assez fraiches, une technique d’extraction ADN peu performante. Au cours de l’étude, nous avons tenté d’améliorer ce rendement en qualifiant les fèces collectées afin de tester les 2 premiers problèmes éventuels. Cependant, d’après nos résultats, toutes les fèces collectées et qui permettaient d’extraire une quantité suffisante d’ADN, appartenaient bien à de la Martre puisque les fèces de type A, B et C ont permis d’obtenir des génotypes. De plus, un marqueur d’espèce a été testé sur chacun des échantillons afin de ne pas poursuivre les analyses sur des fèces qui ne seraient pas de la martre et sur la totalité des échantillons, seulement une fèces s’est avérée être du Putois. Nous avons donc une erreur de collecte assez faible. Par ailleurs, notre estimation de l’âge des fèces n’a pas davantage permis de comprendre le résultat d’amplification. Deux raisons sont possibles. La première est que notre estimation de l’âge est mauvaise. Nous réalisons cette estimation en analysant l’état général de l’échantillon et nous savons qu’en fonction des conditions dans lesquelles elles ont été placées, les résultats peuvent être très différents. Par exemple, une fèces ancienne maintenue au frais, non abîmée par la pluie se conserve très bien et peut passer pour fraîche alors qu’une fèces fraiche dégradée par la pluie peut facilement passer pour ancienne. La pluie a d’ailleurs le gros inconvénient de lessiver la surface des échantillons emportant alors les cellules épithéliales présentes sur cette surface. Une solution envisageable est de réaliser plusieurs sessions de capture à intervalle de temps très rapproché (ce qui permet également de répondre aux conditions requises d’une population fermée) dans la mesure où dès la deuxième session, nous serons certains de récolter des fèces récentes. Enfin, concernant la technique d’extraction ADN, nous envisageons de proposer cette étape à un prestataire spécialisé dans ce type d’échantillon.

En conclusion, il existe quelques moyens afin d’améliorer le rendement des analyses et donc de limiter le coût des analyses. Cependant, leur efficacité reste à tester quant à une

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optimisation significative de leur rendement. En attendant ces tests, nous sommes en mesure de proposer un protocole mieux adapté, et tout de même performant, pour l’estimation d’abondance de populations de martres à partir de fèces.

Proposition d’un protocole de récolte adapté La récolte de fèces peut se faire le long de transects en faisant appel à des équipes de 2

personnes. Deux personnes par équipe est une plus-value non négligeable car cela permet de prospecter le long d’une bande plutôt que le long d’une ligne. Les observateurs doivent avoir un minimum d’expérience en reconnaissance de fèces. Les informations disponibles dans les ouvrages spécialisés sont tout à fait suffisantes pour bâtir cette expérience. Les transects de 2 à 3 km dans des quadras de 400 ha sont bien adaptés à l’identification des individus présents sur la zone de prospection. Néanmoins, ces transects doivent s’adapter au paysage prospecté. L’objectif d’une telle étude est de collecter un maximum de fèces. Ainsi, en bocage, les transects doivent maximiser les passages dans les taches d’habitat forestier et en massif forestier, il est plus intéressant de marcher le long de sentier où le sol est bien visible. Dans le cas d’équipes de 2 personnes, un observateur peut se tenir sur le sentier pendant que le deuxième prospecte dans les parcelles qui longent le sentier. Ensuite, il est plus approprié pour les raisons citées dans le paragraphe précédent de réaliser un minimum de 5 sessions consécutives à une ou 2 semaines d’intervalle. Ce travail de terrain doit être réalisé de préférence en hiver, entre début février et début avril. L’absence de végétation au sol et les températures peu élevées sont gages non seulement d’une meilleure récolte mais aussi d’échantillons mieux conservés.

Effectifs des populations de martres En bocage, l’effectif de la population de martre est estimé à 58 (29-85) individus en

2010 et 53 (22-84) individus en 2011 au moyen du logiciel Capwire. En massif forestier, cet effectif est estimé à 11 (8-22) individus en 2010 et 22 (13-36) martres en 2011 au moyen du même logiciel et à partir de Capture, à 52 (43-70) individus.

En bocage, l’effectif de la population semble se tenir sur une cinquantaine de martres.

Ce résultat paraît tout à fait vraisemblable au vu du succès de récolte de fèces et celui du génotypage. Avec une moyenne d’environ 13 fèces par transect, nous pensons avoir détecté une bonne partie des martres présentes sur le quadra. En revanche, pour 40% de fèces aboutissant à un génotype exploitable, nous perdons nécessairement des individus à cette étape ce qui explique le décalage du nombre de martres identifiées (40 en 2010 et 30 en 2011)

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et les effectifs de population estimés par Capwire. Si l’on compare maintenant ces résultats à l’abondance de martres estimée par cartographie de domaines vitaux (48 individus), les effectifs sont assez proches.

En massif forestier, la première année s’est avérée très mauvaise à la fois pour les succès de récolte de fèces et de génotypage (20% succès). Il est donc très probable que les 11 individus estimés par Capwire en 2010 soit une importante sous-estimation du nombre réel de martres présentes sur ce site. En 2011, le nombre de martres estimé est doublé mais reste encore moitié moins important que l’estimation donnée par Capture. La première difficulté est de parvenir à obtenir un nombre de fèces satisfaisant pour ce type d’étude et l’orientation des recherches sur sentier s’est avérée fournir de meilleurs résultats (40% supplémentaire). Le travail doit encore être poursuivi à ce niveau. Ensuite, malgré une distribution des fèces récoltées relativement régulière, celle des fèces génotypées avec succès s’est avérée groupée sur une partie du site d’étude. Ainsi, on peut dire que 7 quadras sur 16 restent non représentés et nous n’avons donc obtenu un effectif de martres que pour une large moitié du site d’étude. L’absence de données sur des zones échantillonnées est difficile à interpréter et ne nous permet pas de diviser le site d’étude par 2. Cependant, nous sommes intimement convaincus que des martres sont bien présentes dans les zones où nous n’avons pas génotypé de fèces. Cette conviction est appuyée à la fois par la récolte de fèces dans ces endroits mais aussi par l’observation directe d’individus dans ces zones. De notre point de vue, la difficulté ici reste de trouver une méthode plus performante encore pour récolter des fèces et d’optimiser le génotypage de ces échantillons.

En bocage où la méthode a bien fonctionné, nous pouvons traduire cette abondance

(55 individus pour 64 km2) par une densité d’environ 8.5 (3-13) martres pour 10 km2. Cette estimation est légèrement supérieure à celles trouvées dans la littérature. En Pologne, dans la forêt primaire de Bialowieza, Zalewski et Jedrzejewski (2006) estiment que la densité de populations de martres est d’environ 5.4 (3.6-7.6) individus pour 10 km² pendant la saison froide, c’est-à-dire une densité estimée pendant la même période que notre étude. De même, nos résultats sont un peu supérieurs à ceux trouvés en Biélorussie par Sidorovich et al. (2005) avec 1.2 à 7.1 pour 10 km² ou encore en Galice par Ruiz-Olmo et Lopez-Martin 2001 avec 5 individus per 10 km².

Pour apporter quelques éléments de réflexion en terme d’impact de fragmentation de l’habitat, nous avons tout de même traduit nos résultats obtenus en massif forestier en densité. D’après la zone réellement échantillonnée, nous estimons que la densité de martres se rapproche de 22 martres pour 36 km2 (9 quadras relevés avec succès), soit 6.1 martres pour 10 km2. Cette estimation est tout à fait comparable à celle trouvée dans la littérature et donc un peu inférieure à celle trouvée sur notre site d’étude en bocage.

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Malgré la fragmentation de l’habitat forestier constatée sur la zone de bocage, la population de martres semble se tenir sur une densité comparable, voire légèrement supérieure, à celles de populations présentes en massif forestier (dans les Ardennes et d’autres zones de son aire de répartition). Les intervalles de confiance étant assez larges, nous dirons donc que nous sommes dans des niveaux de densité équivalents. La fragmentation de l’habitat forestier, tel qu’observée sur notre site d’étude, ne semble pas modifier la densité de martres dans le paysage. La réduction de surface des domaines vitaux compense l’absence d’individus dans les zones non forestières et maintient la densité de la population à un niveau équivalent aux sites forestiers. Nous n’avons pas en notre possession l’estimation des autres paramètres vitaux de la population tels que les taux de survie (adulte et juvénile) et le taux de natalité, il reste donc difficile d’interpréter l’impact réel de la fragmentation de l’habitat forestier sur les populations de martres et de conclure que ce processus n’a pas d’effet observé, autre qu’une adaptation des individus par diminution de surface de leur domaines vitaux. La population observée en bocage pourrait aussi être maintenue par un taux de remplacement important des individus. D’ailleurs, 10 individus seulement sont retrouvés d’une année sur l’autre en bocage. Cependant, le nombre de martres observées les 2 années successives en forêt est également faible. Il s’agit donc ici aussi de poursuivre l’étude pour renforcer ces résultats.

A titre d’information, seuls 20% d’habitat forestier est présent sur le site. A l’hectare forestier, la densité de martres est donc nécessairement bien plus importante. On estime donc que la densité est de 42 martres pour 10 km2 forestiers. Par conséquent, une étude de disponibilité alimentaire en bocage serait intéressante à mener afin de savoir si les martres installées en bocage se sont accommodées au paysage en réduisant la surface de leur domaines vitaux grâce à une plus forte disponibilité alimentaire ou du fait d’une plus grande densité, l’un n’excluant pas l’autre.

REMERCIEMENTS

Cette étude a été menée à bien grâce à un effort de terrain collectif grâce à l’implication des membres de l’URCA-Cerfe. Elle a également été permise grâce au soutien financier du Fonds Européen de Développement Régional (FEDER), de la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) et de la Communauté de Communes de l’Argonne-Ardennaise. Les analyses en laboratoire ont été réalisées par Antagene (qui a d‘ailleurs pris en charge une partie des analyses).

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Document II / IV

ELABORATION ET VALIDATION D’OUTILS DE SUIVI DES POPULATIONS

DE BLAIREAUX EUROPEENS (Meles meles)

CAROLE BODIN

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SOMMAIRE

A- INTRODUCTION.................................................................................................................... 3 1. Généralités .................................................................................................................... 3 2. Répartition et densités de populations ....................................................................... 3 3. Objectifs ........................................................................................................................ 7

B- METHODES.......................................................................................................................... 8 1. Zone d’étude ................................................................................................................. 8 2. Effectifs des groupes de blaireaux .............................................................................. 9

a) Caméras automatiques................................................................................................ 9 b) SESAM....................................................................................................................... 9 c) Affûts aux terriers..................................................................................................... 10

3. Terriers de blaireaux ................................................................................................. 10 a) Comptage exhaustif.................................................................................................. 10 b) Transects................................................................................................................... 11 c) Analyses des variables environnementales .............................................................. 12 d) Modèles prédictifs .................................................................................................... 13

C- RESULTATS ....................................................................................................................... 14 1. Effectifs des groupes................................................................................................... 14

a) Caméras.................................................................................................................... 14 b) SESAM..................................................................................................................... 14 c) Affûts........................................................................................................................ 14

2. Terriers........................................................................................................................ 16 a) Comptage exhaustif.................................................................................................. 16 b) Transects................................................................................................................... 18 c) Caractéristiques des terriers ..................................................................................... 19 d) Modèles prédictifs .................................................................................................... 25

D- DISCUSSION....................................................................................................................... 30 1. Effectifs des groupes................................................................................................... 30 2. Terriers........................................................................................................................ 31

a) Comptage exhaustif.................................................................................................. 31 b) Transects................................................................................................................... 31 c) Caractéristiques ........................................................................................................ 31 d) Sélection de l’habitat ................................................................................................ 32

3. Conclusions ................................................................................................................. 33

E- REMERCIEMENTS............................................................................................................... 34

F- BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................. 35

ANNEXE 1 : Localisation des terriers selon les variables d’habitat........................................... 40

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INDEX DES FIGURES ET DES TABLEAUX Figure 1 : Répartition du Blaireau européen ............................................................................. 4 Figure 2 : Localisation et composition de la zone d’étude........................................................ 8 Figure 3 : Passage d’un blaireau sous un SESAM. Système de vidéosurveillance................... 9 Figure 4 : Distribution des groupes selon le nombre d’adultes dans le groupe....................... 16 Figure 5 : Localisation des différents types de terriers dans la zone d’étude et contour de la zone expérimentale............................................................................................................... 17 Figure 6 : Contour de la zone expérimentale, trajets de prospection et transects ................... 19 Figure 7 : Distribution du nombre de terriers secondaires et principaux en fonction du nombre de gueules.................................................................................................................... 20 Figure 8 : Pourcentages de points aléatoires, de tous les terriers et de terriers principaux pour chaque classe de la variable paysage ............................................................................... 21 Figure 9 : Pourcentages de points aléatoires, de tous les terriers et de terriers principaux pour chaque classe des variables. ............................................................................................. 22 Figure 9 suite ........................................................................................................................... 23 Figure 10 : Diagramme en boîtes des surfaces de végétation dans les cercles autour des terriers principaux. ................................................................................................................... 23 Figure 11 : Diagramme en boîtes des surfaces de végétation détaillée dans les cercles autour des terriers principaux................................................................................................... 25 Figure 12 : Localisations de tous les terriers sur la carte des valeurs de p, générées avec les terriers principaux. Histogrammes de ces valeurs de p pour tous les terriers..................... 26 Figure 13 : Localisations de tous les terriers sur la carte des valeurs de p, générées avec tous les terriers. Histogrammes de ces valeurs de p pour tous les terriers ............................... 27 Figure 14 : Résultats de l’AFDM réalisée avec toutes les variables ....................................... 28 Tableau 1 : Estimation des densités de blaireaux en France et en Europe................................ 5 Tableau 2 : Moyennes et écarts-types totaux et détaillés des effectifs de groupes ................. 15 Tableau 3 : Type et nombre de terriers de blaireaux recensés ................................................ 16 Tableau 4 : Surface, nombre de terriers principaux, densité, nombre de blaireaux adultes et densité de blaireaux en adultes/km² dans la zone expérimentale ......................................... 17 Tableau 5 : Nombre et densité de terriers principaux trouvés lors des prospections à pied ... 18 Tableau 6 : Tests exacts de Fisher entre la distribution des points aléatoires, de l’ensemble des terriers et des terriers principaux ..................................................................... 21 Tableau 7 : Tests t univariés pour la variable végétation........................................................ 24 Tableau 8 : Tests t univariés pour la variable végétation détaillée ......................................... 24 Tableau 9 : Analyse des distances de Mahalanobis : profil environnemental moyen des terriers principaux .................................................................................................................... 26 Tableau 10 : Analyse des distances de Mahalanobis : profil environnemental moyen de tous les terriers ......................................................................................................................... 27 Tableau 11 : Contribution des variables à l’AFDM................................................................ 29

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A- INTRODUCTION

1. Généralités En France comme en Europe continentale, les blaireaux vivent généralement en groupes de deux à quatre adultes éventuellement accompagnés des jeunes de l’année (e.g. en France : Mouchés 1981, Lambert 1990, Bodin 2005 ; en Suisse : Ferrari 1997, Do Linh San 2006 ; au Luxembourg : Schley et al. 2004 ; en Belgique : Bauduin et al. 1999), alors que des groupes plus grands sont observés en Angleterre (Roper 2010). Les blaireaux ne sont toutefois pas considérés comme formant des groupes « sociaux » mais des « groupes spatiaux », de même que le renard roux Vulpes vulpes (Macdonald 1983), différentes espèces de hyènes (Crocuta crocuta, Bearder & Randall 1978 ; Hyaena brunnea, Owens & Owens 1996), le chacal à chabraque Canis mesomelas (Moehlman 1979), le chacal doré Canis aureus ou le chat haret Felis catus (Macdonald 1983). Pour ces carnivores vivants en groupes spatiaux, les membres d’un même groupe partagent un domaine vital, mais chaque individu se déplace et recherche sa nourriture de manière solitaire à l’intérieur de ce domaine (Macdonald 1983, Kruuk 1989). Chez le blaireau, les membres d’un groupe ont de plus la particularité de partager un même terrier pour le repos diurne (Roper 1992a). Ce terrier est le théâtre de contacts relativement développés entre les individus (Kruuk 1978, Woodroffe 1993), contrairement au renard roux par exemple (Macdonald et al. 1980), mais il n’existe pas de hiérarchie entre les membres d’un groupe de blaireaux (Macdonald et al. 2002), comme chez les hyènes ou les chacals. Ainsi, les terriers revêtent une grande importance pour les blaireaux puisqu’ils servent de refuge en cas d’alerte, abritent le repos diurne et les phases de repos nocturne et accueillent la mise bas et l’élevage des jeunes (Roper 1992a). Cependant, il s’avère que les nombreux terriers disséminés dans le domaine vital d’un groupe ne sont pas utilisés de la même manière par les blaireaux (Roper 1992a, b, 2001 ; Thornton 1988). Un seul d’entre eux accueille la mise-bas et l’élevage des jeunes et peut abriter tous les membres du groupe simultanément. Ce terrier est occupé tout au long de l’année et c’est celui qui est quasi exclusivement utilisé au cours de l’hiver. C’est le terrier principal. Les autres, dits secondaires, ne sont qu’occasionnellement fréquentés, rarement par plus d’un ou deux blaireaux à la fois, et majoritairement pendant les mois de printemps et d’été. Ils ne servent qu’au repos.

2. Répartition et densités de populations L’aire de répartition de l’espèce est immense (Figure 1), à tel point que les populations éloignées les unes des autres ont pu se séparer en sous-espèces. Selon les auteurs, les blaireaux pourraient compter deux à huit sous-espèces et jusqu’à 24 types géographiques (Long & Killingley 1983, Lynch 1996, Kurose et al. 2001, Abramov & Puzachenko 2005,

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Marmi et al. 2006). La classification la plus généralement admise, basée sur une analyse génétique, différencie quatre sous-espèces, en Europe, en Asie du sud-ouest, au nord et à l’est de l’Asie, et au Japon (Marmi et al. 2006). Néanmoins, si on regarde les types géographiques, Meles meles meles est principalement représenté en France et Meles meles marianensis peut s’observer dans le sud de la France et dans la péninsule Ibérique (Revilla et al. 1999). Bien que les connaissances actuelles concernant ce sujet nécessitent d’être complétées, des types géographiques tels que ceux qui occupent les îles méditerranéennes ou tel que Meles meles marianensis méritent pourtant qu’on s’intéresse à leur conservation, du fait du faible effectif de leurs populations ou de leur répartition géographique très limitée.

Figure 1 : Répartition du Blaireau européen (d’après Griffiths & Thomas 1993).

Le blaireau, du fait sa répartition, n’est pas une espèce menacée, mais des disparités existent entre les régions en termes d’abondance des populations (Tableau 1). Ce tableau comparatif illustre bien l’importance de l’échelle choisie (Hobbs 2003). Les études locales qui rapportent la densité des populations de blaireaux qu’elles suivent ont des résultats toujours supérieurs à ceux d’études à échelle plus large. Elles se situent en effet par nature dans des zones favorables à l’espèce. Comparées aux valeurs obtenues en Europe, il s’avère que la France abrite une densité de blaireaux assez basse. Les populations de blaireaux en France et dans les pays frontaliers ont en effet fortement souffert des campagnes de destruction des renards mises en œuvre dès les années 1950’ et jusque dans les années 1980’ dans le cadre de la lutte contre la rage. Dans les années 1970’, certaines populations de blaireaux ont ainsi diminué de 90%, atteignant un niveau dramatiquement bas dans le nord-est de la France et en Allemagne, ainsi qu’en Belgique, au Luxembourg ou aux Pays-Bas. Ce n’est qu’à partir des années 1990’ que les populations de blaireaux semblent de nouveau progressivement augmenter et l’espèce a pour cela été protégée dans plusieurs pays européens. Une enquête menée par l’ONCFS auprès d’un échantillon de 10% des communes de chaque département montre que l’espèce

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est cependant répartie sur l’ensemble du territoire, avec des creux de populations dans les départements très urbanisés et dans le sud-est du pays (Hargues & Arnauduc 2008). Tableau 1 : Estimation des densités de blaireaux en France et en Europe.

Région Densité (adultes/km²) Echelle Sources

Europe continentale 0,63 Europe Kowalczyk et al. 2000 Pays-Bas 0,07 Pays Association Das & Boom 2000 Bialowieza 0,08 Région Kowalczyk et al. 2000 Suisse 0,18-0,36 Pays Do Linh San 2006 Sud de l’Espagne 0,2-1 Région Rodriguez et al. 1996, Revilla &

Palomares 2002 Marne-Meuse 0,2 Région Desmet (comm. pers.) France entière 0,27-0,54 Pays Hargues & Arnauduc 2008 Luxembourg 0,44 Région Schley et al. 2004 Lorraine 0,5 Région Lebecel & GEML 2010 Jura Suisse 0,5 Locale Ferrari 1997 Loiret 0,5 Macro locale Bon & Lambert 1988 Ardennes 0,8 Locale Cette étude Centre de la Pologne 1,1 Locale Goszczynski & Skoczynska 1996 Ouest de la France 1,6 Micro locale Mouchès 1981 Iles Britanniques Ecosse 1,1-6,2 Régionale Kruuk & Parish 1982 Faubourg de Bristol 4-7 Locale Cheeseman et al. 1988, Cresswell &

Harris 1988 Sud de l’Angleterre 10-38 Régionale Stewart et al. 2001, Macdonald &

Newman 2002 Sans être actuellement menacée à l’échelle nationale, l’espèce a néanmoins besoin que sa distribution et ses effectifs soient mieux appréhendés pour éviter que des creux d’abondance n’isolent des populations. La recherche d’une méthode efficace d’estimation des densités de populations de blaireaux a fait l’objet de plusieurs travaux. Les méthodes basées sur l’observation directe des animaux au cours de leur période d’activité (notamment le distance sampling, Buckland et al. 1993, 2001) présentent l’inconvénient que les blaireaux sont peu visibles, en raison de leur couleur grisâtre, de leur faible hauteur, de leurs yeux peu brillants dans les projecteurs et de leur habitat forestier (Ruette et al. 2003). La méthode de distance sampling a cependant été testée sur une population de densité connue du sud de l’Angleterre (Hounsome et al. 2005). Les auteurs concluent qu’une estimation correcte de la densité de la population ne peut être obtenue qu’en ajoutant un facteur de correction dans le modèle mathématique. La précision de ce facteur est cruciale, puisque la fiabilité des résultats en dépend, et elle est fortement liée au type de paysage de la zone d’étude. Calculé en effet d’après le mode d’utilisation de l’habitat par les blaireaux, le calcul de ce facteur nécessite donc qu’un suivi intensif par radio-télémétrie soit préalablement effectué. Ainsi,

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malgré les avantages de la méthode de distance sampling pour un bon nombre d’espèces, celle-ci n’est pas appropriée pour déterminer la densité d’une population de blaireaux à grande échelle.

Comme pour la plupart des carnivores européens, l’utilisation de la méthode de capture- marquage- recapture (CMR) au sens strict n’est que peu appropriée pour l’étude à grande échelle des blaireaux. Les succès de capture (et donc de recapture) relevés en Europe continentale sont en outre très faibles (Ferrari 1997 et Do Linh San 2004 en Suisse, Lambert 1990 et Bodin 2005 en France, Rodriguez et al. 1996 et Revilla & Palomares 2002 en Espagne) et le marquage d’un nombre suffisant d’individus sur une région entière suppose alors un travail de terrain et un coût considérable. A une échelle très locale et dans le cadre d’un programme de recherche (Tuyttens et al. 1999), la capture et le marquage des blaireaux permettent cependant une meilleure approximation des effectifs des groupes, renseignent par ailleurs sur leur composition et leur organisation (âge et sex-ratio) et peuvent être couplés à un protocole de suivi par radio-télémétrie ou GPS. Une autre méthode de CMR, plus indirecte, a été testée par Kruuk et al. (1980), qui ont injecté une solution de zinc faiblement radioactif (65Zn) à des blaireaux et ont ensuite recherché la proportion de crottes radioactives. Cette méthode, en plus des problèmes éthiques et environnementaux qu’elle peut soulever, nécessite de nouveau la capture des animaux, et n’est applicable qu’à une échelle locale.

Pour les blaireaux, l’estimation des densités de populations est donc préférentiellement basée sur des méthodes indirectes (Sadlier et al. 2004). Le principal avantage des blaireaux dans le cadre de l’estimation des densités de leurs populations se situe dans leur mode d’utilisation des terriers. En effet, à chaque groupe correspond un seul terrier principal et chaque terrier principal n’accueille qu’un seul groupe (Neal & Cheeseman 1991). Cette caractéristique permet d’évaluer indirectement la densité en groupes de blaireaux d’une zone donnée via la densité en terriers principaux de cette zone. Cependant, les terriers secondaires doivent évidemment être écartés des comptages au risque de surestimer fortement la densité. Ensuite, l’effectif moyen des groupes permet de convertir le nombre de groupe en abondance de blaireaux.

Afin de déterminer l’effectif des groupes, plusieurs études ont cherché à établir une relation entre les signes d’activités et les effectifs de blaireaux. La mesure de l’abondance des empreintes est fortement limitée (et donc biaisée) par la présence nécessaire de substrats particuliers sur lesquels puissent s’imprimer les empreintes. Le nombre de trous fraîchement utilisés sur un terrier principal est un indice simple et donc convoité dans le cadre de l’estimation du nombre d’animaux d’un groupe. Cependant, une très bonne relation entre ce nombre et l’effectif du groupe n’a été montré que pour une seule zone d’étude située en

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milieu agricole, alors que dans d’autres types d’habitats, et notamment en milieu pastoral, ces deux paramètres ne sont pas du tout liés (Sadlier et al. 2004). De même, Tuyttens et al. (2001) observent que l’activité aux latrines n’est liée à la densité de blaireaux que dans une seule population mais pas dans une autre, sans que les différents paramètres testés n’expliquent cette différence. Enfin, Wilson et al. (2003) montrent que la relation entre le nombre de blaireaux et plusieurs indices d’activité, au niveau du terrier principal, n’est pas stable mais varie selon les saisons, et ils concluent qu’aucun de ces indices ne convient pour estimer les tailles de groupes. Les relations entre les signes d’activité observés au niveau des terriers principaux, quels qu’ils soient, et le nombre de blaireaux semblent donc très complexes, et varient avec de nombreux facteurs environnementaux ainsi qu’avec des caractéristiques comportementales des populations, ce qui ne permet pas d’utiliser les signes d’activités laissés par les blaireaux pour estimer leur abondance sur de grandes superficies. Les blaireaux d’un groupe ayant pour habitude de quitter le terrier plus ou moins au même moment au crépuscule, actuellement, la méthode la plus simple et la plus utilisée reste encore le comptage des blaireaux lorsqu’ils émergent des terriers principaux, lors d’affûts.

3. Objectifs La méthode qui semble le plus appropriée à l’étude des densités de blaireaux consiste donc à multiplier la densité en terriers principaux par l’effectif moyen des groupes (Sadlier et al. 2004, Do Linh San 2006). Nos objectifs, à travers ce projet, sont ainsi :

- De rechercher la meilleure méthode d’estimation de la densité en terriers principaux de blaireaux. Pour cela, la première étape sera de réaliser une recherche exhaustive des terriers principaux dans une zone dite expérimentale. Ensuite, nous chercherons à définir quelles sont les variables environnementales qui permettent de prédire la distribution et la densité de ces terriers. Ces prédictions seront validées à l’aide de modèles biogéographiques sur SIG.

- De tester de nouvelles méthodes de comptage, automatiques, des effectifs des groupes, de manière à améliorer les méthodes actuelles, coûteuses en temps.

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B- METHODES

1. Zone d’étude La zone d’étude couvre environ 900 km² à l’est du territoire de la Communauté de Communes de l’Argonne Ardennaise, au sud-est du département des Ardennes. Elle a été définie de manière à comprendre une surface équivalente des deux types de paysage prépondérants, le bocage et les massifs forestiers, qui correspondent à des surfaces forestières continues de plus de 400 hectares (Figure 2).

Vouziers

Grandpré

Boult-aux-BoisBuzancy

5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

N

Vouziers

Grandpré

Boult-aux-BoisBuzancy

Vouziers

Grandpré

Boult-aux-BoisBuzancy

5 km5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

NN

Figure 2 : Localisation et composition de la zone d’étude.

Les cartes de végétation utilisées proviennent de la BD TOPO® version 2 de l’IGN, sur le SIG ArcView 3.2. Les classes de végétation définies dans la BD TOPO® sont regroupées selon différents niveaux pour les besoins de l’analyse (cf. ci dessous 3.c. Analyses des variables environnementales).

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2. Effectifs des groupes de blaireaux

a) Caméras automatiques Afin d’améliorer les méthodes de dénombrement des groupes de blaireaux, nous avons testé l’utilisation de caméras automatiques (PixController Inc, DVREye Wireless RF). Jusqu’à trois caméras sont posées sur les terriers et radio-déclenchées à distance par un à neuf capteurs de mouvements. L’objectif consiste à obtenir au moins une première idée de la fréquentation du terrier et au mieux à déterminer un effectif minimum sans réaliser d’affûts, en filmant les membres du groupe à leur sortie du terrier, lorsqu’ils jouent et se toilettent.

b) SESAM En partenariat avec le IPHC-CNRS-DEPE de Strasbourg et dans le cadre du projet NAVIMELES, nous avons développé un outil de comptage des entrées-sorties des blaireaux. Cet outil consiste à placer une série de micro-loggers au niveau des gueules de terriers, enregistrant à chaque passage l’heure, le sens, la vitesse, la taille de l’animal. L’analyse des données devrait permettre de déterminer le nombre de blaireaux qui fréquentent le terrier, et pourra fournir par ailleurs des résultats sur la présence de jeunes, les rythmes d’activité et la présence d’autres espèces dans le terrier. Afin de calibrer le fonctionnement des premiers prototypes, les premiers tests ont été réalisés au Zoodyssé de Chizé sur des blaireaux captifs, filmés 24/24h. Des lampes infrarouges couplées aux caméras permettaient de filmer en continu. Les résultats ont permis de choisir les fréquences d’acquisition des données et de mettre en évidence les patrons de données correspondant à chaque type de passage sous les loggers (Figure 3).

Figure 3 : à gauche, passage d’un blaireau captif sous le SESAM placé dans le tunnel du terrier artificiel du Zoodyssé de Chizé. A droite, système de vidéo-surveillance.

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Ensuite, un test en conditions réelles a été réalisé dans les Ardennes, sur le site du Parc Argonne Découverte, qui abrite un terrier principal de blaireaux et quelques terriers secondaires, en liberté totale. Nous disposions à ce moment là de cinq prototypes et nous avons équipé cinq des six gueules du terrier principal avec un logger placé au plafond, à l’intérieur de la gueule. La septième gueule était abandonnée. Toutes les gueules équipées étaient filmées en continu et nous avons laissé le dispositif en place trois semaines. Les tests suivants, en conditions réelles et filmés, ont tous été réalisés en Alsace par le IPHC-CNRS-DEPE. Ils ont principalement consisté à déterminer quelle position du capteur était la plus judicieuse par rapport à la gueule du terrier et quel matériau était le mieux supporté par les blaireaux.

c) Affûts aux terriers Bien que les signes de présence ne renseignent pas sur les effectifs des groupes, ceux-ci sont tout de même assez facilement déterminés à l’aide d’affûts aux terriers (Hoffer 1988). Ils consistent à se placer à proximité d’un terrier principal au moment de l’émergence des blaireaux et à observer combien d’individus sont présents simultanément sur le site. Les affûts se déroulent de mai à octobre pour profiter d’une certaine régularité dans les horaires de sortie des blaireaux (20h-23h environ), alors qu’en hiver les blaireaux sortent peu et très irrégulièrement. La méthode nécessite la réalisation d’au moins trois affûts fructueux par terrier ciblé, et elle ne permet d’obtenir qu’un effectif minimum du groupe (Hoffer 1988). La présence d’animaux équipés de colliers permet d’utiliser la méthode de capture-marquage-recapture et ainsi d’affiner les résultats.

3. Terriers de blaireaux

a) Comptage exhaustif Afin de réaliser l’inventaire exhaustif des terriers de blaireaux dans la zone d’étude, il a été nécessaire de s’entourer de partenaires ayant une bonne connaissance de celle-ci. Nous avons ainsi progressivement formé un réseau d’une quarantaine de personnes, chasseurs, traqueurs, piégeurs, naturalistes, agents forestiers, gardes particuliers, agriculteurs, etc., chaque contact en amenant de nouveaux. Les personnes rencontrées nous ont indiqué des terriers et nous ont parfois précisé l’historique du lieu, la possibilité de chasse ou la présence d’autres espèces ou de jeunes blaireaux. C’est donc selon la disponibilité et les connaissances de ces personnes que la « zone expérimentale » à été définie, comme la zone où, selon la meilleure certitude, l’inventaire des terriers de blaireaux est exhaustif. La zone expérimentale est déterminée

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comme une zone d’un seul tenant et peu linéaire (un terrier donné doit être entouré sur trois cotés au moins d’autres terriers). Elle forme un polygone dans lequel nous nous sommes assuré, auprès de nos partenaires et par des prospections à pied, que nous connaissions tous les terriers principaux. Les terriers signalés ont ensuite été recherchés sur le terrain pour être précisément caractérisés (localisation GPS, description du terrier et de son habitat, relevé des indices de présence de blaireau et d’autres espèces, dégâts subis ou provoqués par les blaireaux) et classés comme terriers principaux ou secondaires. Les terriers principaux et secondaires sont distingués selon leur taille et leur utilisation par les blaireaux. Les terriers secondaires sont le plus souvent composés d’une à trois-quatre gueules irrégulièrement nettoyées, alors que les terriers principaux comptent généralement plus de six-sept gueules, et souvent plus d’une dizaine. Ces paramètres étant variables selon les terriers et les régions, et afin de caractériser les terriers de taille intermédiaire, il a fallu aussi s’appuyer sur leur fréquentation, notamment en hiver, et sur la présence de jeunes. La date de la visite est donc une information importante, puisqu’elle peut clarifier le statut d’un terrier lorsque les autres caractéristiques connues ne nous permettent pas de le déterminer. Enfin, toutes les informations supplémentaires disponibles, comme les observations d’animaux, l’histoire du terrier, la présence et le nombre de crottes, d’empreintes, de litière, etc., sont utilisées pour éclaircir des cas douteux. Pour certains terriers, plusieurs visites à quelques mois d’intervalle ont été nécessaires pour déterminer s’il s’agissait ou non de terriers principaux. Lorsque les terriers décrits par nos partenaires étaient sans aucun doute des terriers secondaires (une ou deux gueules utilisées temporairement), ils n’ont pas été recherchés. Une fois que la zone expérimentale s’est nettement dessinée, lorsque les terriers signalés étaient clairement en dehors de celle-ci, ils n’étaient pas recherchés sur le terrain. De manière à mesurer l’effort de prospection et les surfaces visitées, les trajets effectués à pied dans des zones susceptibles d’abriter des terriers de blaireaux, lors des recherches de terriers, ont été autant que possible enregistrés à l’aide d’un GPS portatif.

b) Transects En plus de rechercher les terriers signalés par nos partenaires, nous avons réalisé sept transects plus ou moins linéaires de 6 à 10 km chacun environ, afin de couvrir des zones dans lesquelles il nous semblait manquer d’informations. De plus, nous avons aussi recherché les terriers de blaireaux le long de 16 transects d’environ deux-trois kilomètres chacun, réalisés dans le cadre de la partie « martres » de ce projet pour l’échantillonnage des crottes de martre.

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Ceux d’entre eux qui se situaient dans la zone d’étude sont pris en compte dans l’analyse de données. De la même manière, tous ces trajets ont été enregistrés à l’aide d’un GPS.

c) Analyses des variables environnementales Les terriers sont cartographiés dans le système de géoréférencement Lambert 93, de manière à correspondre aux cartes d’habitats de l’IGN. A chaque terrier sont associées plusieurs variables : ○ Caractéristiques des terriers :

- coordonnées X et Y en Lambert 93 ; - terrier principal ou secondaire ; - distance au plus proche terrier principal en mètres ; - nombre de gueules.

○ Environnement des terriers : Habitat

- paysage (2 classes : massif et bocage) ; - végétation (4 classes : forêt de + de 400 ha, forêt en bocage, haie, ouvert) ; - végétation détaillée (10 classes, correspondants aux classes de la BD TOPO®

version 2 de l’IGN : bois, forêt fermée de feuillus, forêt fermée de conifères, forêt fermée mixte, forêt ouverte, lande ligneuse, peupleraie, verger, haie, ouvert) ;

Topographie - altitude (5 classes : 100-150m, 150-200m, 200-250m, 250-300m, plus de 300m) ; - degré de la pente (4 classes : 0-5°, 5-10°, 10-15°, supérieur à 15°) - orientation de la pente par rapport au nord (8 classes : nord, nord-est, est, sud-est,

etc.). Seuls les terriers situés dans la zone expérimentale ont été pris en compte pour l’analyse des variables d’environnement. Nous avons recherché quelle était l’influence des différentes variables sur la localisation des terriers, en prenant en compte tous les terriers, puis seulement les terriers principaux. Pour cela, nous avons généré un jeu de données représentatif du milieu disponible, en plaçant aléatoirement 1000 points à l’intérieur de la zone expérimentale, et nous les avons associés aux variables d’environnement. La différence entre ces points et les terriers, pour chaque variable d’environnement, a été testé à l’aide d’un test exact de Fisher. Autour de chaque terrier principal de la zone expérimentale, nous avons créé un cercle de diamètre égal à la moyenne des distances entre chaque terrier principal et son plus proche voisin, soit des cercles d’environ 100 hectares. La surface de chaque type de végétation (forêt de + de 400 ha, forêt en bocage, haie, ouvert) ainsi que la surface bâtie et la surface en eau, ont été mesurées dans chaque cercle. Nous avons alors comparé la végétation dans les cercles

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autour des terriers principaux à la végétation disponible dans la zone expérimentale à l’aide de tests t univariés. Le même test a été réalisé pour la végétation détaillée (plus surface bâtie et surface en eau).

d) Modèles prédictifs Le modèle biogéographique des distances de Mahalanobis (Mahalanobis 1936, Jenness 2003, DeVries 2005) intègre plusieurs variables dans l’analyse et permet de cartographier les conditions « idéales » d’emplacement des terriers, sous SIG. Son principe est de mesurer les conditions idéales de présence, ici des terriers de blaireaux, en se basant sur la moyenne, mais aussi sur la variance et les matrices de covariance, de toutes les variables. Il est ainsi possible de décrire de manière quantitative l’ensemble de la zone d’étude, en termes de plus ou moins grande similarité avec cet idéal. Le modèle fournit alors une carte des zones potentiellement attractives et donc potentiellement utilisées. C’est une technique de modélisation de la présence seule, qui ne requiert pas de données d’absence ni de définition de la zone disponible. Les analyses cartographiques ont été réalisées à l’aide des logiciels de SIG ArcView 3.2 et ArcGis 10 et les analyses statistiques à l’aide des logiciels StatView 5.0 et R 2.14. Le seuil de significativité est choisi à 5%.

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C- RESULTATS

1. Effectifs des groupes

a) Caméras Les caméras vidéo automatiques prévues pour estimer les effectifs des groupes de blaireaux n’ont finalement pas apporté les résultats escomptés. Tout d’abord, les premiers capteurs ont montré des problèmes d’étanchéité et les délais du service technique ont fait que nous n’avons pas pu utiliser ce matériel pendant plusieurs mois. En plus des problèmes d’étanchéité des capteurs et de liaisons radio entre capteurs et caméras, il s’est avéré que l’enregistrement des images ne commençait que dix secondes après le premier mouvement devant un capteur. Il est évident que nous avons ainsi perdu de nombreuses observations potentielles. Ensuite, il s’est généralement avéré impossible de couvrir toute la surface du terrier et très difficile de déterminer les zones propices pour filmer le groupe de blaireaux, même avec les trois caméras, en raison de la végétation et/ou de la topographie du terrier. Nous n’avons donc jamais filmé plus d’un individu à la fois.

b) SESAM Le développement et le test de ces micro-loggers en partenariat avec le IPHC-CNRS-DEPE s’est avéré plus complexe et donc plus long que prévu et nous ne disposons toujours pas de ce matériel, encore en phase de développement en Alsace. Les tests des SESAM réalisés en 2010 et 2011 dans les Ardennes et en Alsace montrent que les blaireaux ont tendance à éviter les gueules équipées de capteurs, voire à abandonner le terrier pendant plusieurs semaines lorsque toutes les gueules sont équipées, quels que soient l’emplacement et le matériau des capteurs. Cet effet des capteurs et le grand nombre de gueules des terriers principaux sur notre terrain d’étude ne nous ont pas permis d’utiliser les SESAM pour comptabiliser les effectifs des groupes de blaireaux.

c) Affûts En termes d’affûts, tous les terriers suivis se situent à l’intérieur de la zone de recensement exhaustif et en massif forestier. Les terriers se prêtent plus ou moins bien à l’observation. Dans notre cas, quatre groupes pour lesquels les affûts étaient malaisés ont probablement des effectifs sous-estimés par rapport aux autres. Aux données de l’URCA-CERFE (de 2001 à 2011) s’ajoutent des affûts réalisés entre 1994 et 2004 par les animateurs de l’ancien Centre d’Initiation à la Nature (CIN) de Boult-aux-Bois. De plus, pour certaines années, la présence de blaireaux équipés de colliers-émetteurs a permis de traiter les données d’observation par la

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méthode de CMR et d’affiner l’estimation des effectifs (Bodin 2005 et doctorat de Carole Brendel, en cours). Près de 340 heures d’observation ont été réalisées, au cours de 204 affûts auprès de 11 terriers. Ceux-ci nous ont permis d’observer des blaireaux à 119 reprises, dont 36 fois des animaux marqués, soit un taux de réussite global de 0,58, variable de 0,1 à 0,9 selon les terriers. La présence de jeunes n’est pas systématique tous les ans et dans tous les groupes, et d’après le nombre de jeunes observés, nous n’avons jamais vu qu’une seule portée par terrier, d’une moyenne (± écart-type) de 2,8 (± 1) jeunes (Tableau 2). En considérant les terriers suivis année par année (soit un total de 24 terriers/année), nous avons observé des jeunes à neuf reprises, c'est-à-dire que dans l’ensemble, 37,5% des groupes produisent une portée (jeunes vivants à leur émergence du terrier, soit vers trois-quatre mois) chaque année ou que chaque groupe produit une portée tous les 2,7 ans. Tableau 2 : Moyennes et écarts-types totaux et détaillés des effectifs estimés pour les onze groupes suivis sur la zone expérimentale.

Effectifs estimés Terrier Adultes Jeunes Groupe

1 3,9 ± 2,4 2,7 ± 0,9 5,6 ± 2,5

2 1,6 ± 0,7 1,6 ± 0,7

3 1,9 ± 0,7 1,9 ± 0,7

4 1 1

5 1,3 ± 0,6 2 1,5 ± 0,7

6 1 1

7 2 4 3 ± 1,4

8 1 ± 0 1 ± 0

9 2,6 ± 1,1 2,6 ± 1,1

10 2,4 ± 0,9 2,4 ± 0,9

11 2 ± 0 2 ± 0

Total 2,6 ± 1,9 2,8 ± 1,0 3,3 ± 2,5 Le nombre moyen d’adultes par groupe étant plus représentatif de la stabilité de la population que le nombre total d’individus (jeunes compris) c’est ce résultat qui est utilisé. Les effectifs moyens [± intervalle de confiance à 95%] des groupes sont de 2,6 [2,30 - 2,98] adultes et varient entre 1 et 3,9 adultes par groupe selon le groupe (Tableau 2, Figure 4).

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0

10

20

30

40

50

Effe

ctifs

Nombre de blaireaux adultes1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 150

0

10

20

30

40

50

Effe

ctifs

Nombre de blaireaux adultes1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 150

Figure 4 : Distribution des groupes selon le nombre de blaireaux adultes dans le groupe.

2. Terriers

a) Comptage exhaustif Au total, sur les 387 terriers qui nous ont été signalés, 260 des terriers visités sont des terriers secondaires et 97 sont des terriers principaux. Quarante terriers n’ont pas été répertoriés, soit parce qu’ils étaient sans aucun doute des terriers secondaires d’après les indications de nos partenaires, soit parce qu’ils n’ont pas été trouvés (peut-être disparus) sur le terrain. La zone expérimentale est un polygone concave dessiné à 500m autour des terriers principaux, de manière à prendre en compte leur habitat proche dans les analyses. Elle a une surface de 256 km² et contient 323 terriers, dont 81 terriers principaux (Figure 5, Tableau 3). Tableau 3 : Type et nombre de terriers de blaireaux recensés dans la zone expérimentale et au total.

Type Zone expérimentale Total

Terriers principaux 81 97

Terriers secondaires 218 260

Terriers non vus (2aires ou hors zone) 24 40

Total 323 387

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5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

N

terrier principalterrier secondairezone expérimentale

5 km5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

NN

terrier principalterrier secondairezone expérimentale

Figure 5 : Localisation des différents types de terriers dans la zone d’étude et contour de la zone expérimentale.

Dans la zone expérimentale, la connaissance exhaustive des terriers principaux de blaireaux nous permet de calculer simplement une densité de 0,32 terriers principaux par km², soit 0,82 [0,73 - 0,94] blaireaux adultes par km² [± intervalle de confiance à 95%] dans cette zone (Tableau 4). Tableau 4 : Surface en hectares, nombre de terriers principaux, densité (en terriers principaux/km²), nombre de blaireaux adultes [± intervalle de confiance à 95%] et densité de blaireaux en adultes/km² [± intervalle de confiance à 95%] dans la zone expérimentale.

Surface (en ha)

Nombre de TP

Densité (TP/km²)

Nombre de blaireaux

Densité blaireaux (adultes/km²)

Zone expérimentale 25 562 81 0,32 210,6 [186,3 – 241,4] 0,82 [0,73 - 0,94]

Les effectifs des groupes relevés ici (2,7 ± 2,1 adultes/groupe) correspondent à ceux relevés en Europe de l’ouest, par exemple dans la Marne et la Meuse (2,5 ± 1,5 adultes/groupe ; Desmet, com pers), en Lorraine (2,4 ± 1,4 adultes/groupe ; Bodin 2007), au Luxembourg (2,6 ± 1,3 adultes/groupe ; Schley 2000) ou en Suisse (3 à 4 adultes/ groupe ; Do Linh San 2004).

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b) Transects Au cours de la prospection à la recherche des terriers signalés par nos partenaires, nous avons parcouru 263 km à pied au cours de 173 sorties sur le terrain. En considérant que la visibilité moyenne lors de nos trajets était de 20 mètres de part et d’autre, la surface prospectée à pied est de 581 hectares. Dans la zone expérimentale, la prospection couvre 506 hectares. Comme nous n’avons pas pu enregistrer systématiquement les tracés des trajets avec un GPS et que par ailleurs nous avons parfois été deux personnes à prospecter la même zone (avec un seul GPS), cette valeur de surface prospectée est un minimum. En paysage de massif, 372 hectares ont été parcourus pour trouver 50 terriers principaux (soit 13,4 terriers principaux trouvés par 100 hectares prospectés), et 209 hectares ont été parcourus en bocage pour 43 terriers principaux (soit 20,6 terriers principaux par 100 hectares prospectés). Cette différence importante provient du fait qu’en bocage, où les parcelles d’habitat sont de plus petite surface, il a été plus facile de trouver les terriers signalés. En massif, au contraire, les points de repères sont plus difficiles à trouver et même un terrier bien localisé par nos partenaires a souvent nécessité de fouiller longuement la zone (Tableau 5, Figure 6). Tableau 5 : Nombre et densité de terriers principaux trouvés lors des prospections à pied, pour la recherche des terriers signalés par nos partenaires et pour les transects supplémentaires, en fonction du paysage, sur l’ensemble de la zone d’étude. Terriers signalés Transects

Hectares prospectés

TP trouvés TP / 100 ha prospectés

Hectares prospectés

TP trouvés TP / 100 ha prospectés

Massif 372,0 50 13,4 153,3 0 0

Bocage 209,0 43 20,6 158,9 4 2,5

Total 581,0 93 16,0 312,2 4 1,3 Les sept transects supplémentaires et les 16 transects réalisés conjointement avec la partie Martre ont été parcourus par une ou deux personnes à la fois et totalisent 312 hectares prospectés. Au cours de ces recherches, 26 terriers secondaires ont été découverts. Par contre, seuls quatre terriers principaux ont été trouvés dans les 159 hectares prospectés en bocage (soit 2,5 pour 100 hectares) et aucun n’a été trouvé sur les 153 hectares prospectés en massif (Figure 6, Tableau 5).

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5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

N

prospectionstransectszone expérimentale

5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

N

prospectionstransectszone expérimentale

5 km5 km

milieu ouverthaie

villageeau

forêt

NN

prospectionstransectszone expérimentale

Figure 6 : Contour de la zone expérimentale, trajets de prospection et transects.

c) Caractéristiques des terriers

i. Variables terriers : nombre de gueules Pour ces tests, tous les terriers ont été utilisés sans tenir compte de leur localisation dans la zone d’étude. Pour les terriers secondaires, la médiane [1e quartile – 3e quartile] du nombre de gueules est de 2 [0,5 – 3,5] gueules (Figure 7 à gauche). Pour les terriers principaux, la médiane [1e quartile – 3e quartile] du nombre de gueules est de 18 [10,5 – 25,5] et le nombre le plus fréquemment observé est de 10 gueules. On trouve dans la zone d’étude globale des terriers principaux de très grande taille, jusqu’à 83 gueules, et 16,5% des terriers comptent plus de 30 gueules (Figure 7 à droite).

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Nombre de gueules

Terr

iers

sec

onda

ires

0

20

40

60

80

100

120

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Nombre de gueules

Terr

iers

sec

onda

ires

0

20

40

60

80

100

120

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Nombre de gueules

Terr

iers

prin

cipa

ux

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90

Nombre de gueules

Terr

iers

prin

cipa

ux

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90

Figure 7 : Distribution du nombre de terriers secondaires (à gauche ; N=260) et principaux (à droite ; N=97) en fonction du nombre de gueules.

Pour l’ensemble des terriers, principaux et secondaires, le nombre de gueules ne diffère pas significativement quel que soit le paysage considéré (test de Mann-Whitney ; Nmassif = 183 ; Nbocage = 174 ; z =-0,5 ; p = 0,62). De même, il n’y a pas de différence dans la taille des terriers qu’ils soient situés en forêt de massif, forêt de bocage, en haie ou en milieu ouvert (test de Kruskal-Wallis ; Nforêt massif = 183 ; Nforêt bocage = 139 ; Nhaie = 25 ; Nouvret = 10 ; H = 1,21 ; p = 0,75). Pour les terriers principaux, le nombre de gueules ne diffère pas significativement quel que soit le paysage considéré (test de Student ; Nmassif = 51 ; Nbocage = 46 ; t = 0,98 ; p = 0,33) et quelle que soit leur situation (test de Kruskal-Wallis ; Nforêt massif = 51 ; Nforêt bocage = 38 ; Nhaie = 6 ; Nouvret = 2 ; H = 4,6 ; p = 0,20).

ii. Variables environnementales de la localisation des terriers Pour ces tests, qui comparent les caractéristiques des terriers aux caractéristiques moyennes de l’environnement disponible (zone expérimentale), seuls les terriers de la zone expérimentale ont été utilisés. La comparaison de la localisation des terriers de la zone expérimentale avec la localisation des 1000 points placés aléatoirement dans cette zone montre que les terriers de blaireaux, qu’ils soient secondaires ou principaux, ne sont pas situés au hasard dans leur environnement. Contrairement aux points aléatoires, les terriers sont significativement situés plus souvent en paysage de massif forestier qu’en bocage (test exact de Fisher sur l’ensemble des terriers, p < 0,0001 ; test exact de Fisher sur les terriers principaux, p < 0,0001). C'est-à-dire que, par rapport à l’habitat disponible, les terriers de blaireaux sont situés préférentiellement en massif et moins souvent en bocage que s’ils étaient distribués de manière homogène (Figure 8).

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Figure 8 : Pourcentages de points aléatoires (en gris), de tous les terriers (en brun) et de terriers principaux (en orange) pour chaque classe de la variable paysage.

Pour les autres variables, les distributions des terriers, selon la végétation, selon la végétation détaillée, selon les classes d’altitude et selon les classes de degré de pente, sont significativement différentes des distributions des points aléatoires selon ces variables (tests exacts de Fisher). Par contre, le test exact de Fisher montre que la distribution des terriers dans les types de végétation détaillée utilisés n’est pas différente de la distribution des points aléatoires (Figure 9b.). C'est-à-dire que si certains types de végétation sont évités, il n’y a pas de préférence pour l’un ou l’autre de ceux qui sont sélectionnés par les blaireaux. Enfin, le test montre que la distribution des terriers selon l’orientation de la pente n’est pas différente de la distribution des points aléatoires (Tableau 6, Figure 9, Annexe 1). Tableau 6 : Pour chaque variable, valeurs des p obtenus à l’aide des tests exacts de Fisher comparant la distribution des points aléatoires placés dans la zone expérimentale, celle de l’ensemble des terriers et celle des terriers principaux (détails en Annexe 1).

Variables p Fisher

aléatoires/tout terriers p Fisher

aléatoires/principaux Paysage 2e-09 ** 0,0003 **

Végétation 0,0005 ** 0,0005 **

Végétation détaillée 0,0005 ** 0,0005 **

Végétation détaillée utilisée sans ouvert 0,0009 ** 0,44

Altitude 0,003 ** 0,02 *

Degré de la pente 0,0005 ** 0,0005 **

Orientation de la pente 0,52 0,97

Disponible

Ensemble des terriers

Terriers principaux

Paysage

0

10

20

30

40

50

60

70

bocage massif

pour

cent

age

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22

Végétation

0

10

20

30

40

50

60

forêt_massif forêt_bocage haie ouvert

pour

cent

age

b.) Végétation détaillée

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

bois conifères feuillus f_mixte f_ouverte Haie lande lign peupleraie verger ouvert

pour

cent

age

c.) Végétation détaillée utilisée, sans le milieu ouvert

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

bois conifères f_mixte haie peupleraie

pour

cent

age

76

77

78

79

80

81

82

83

84

feuillus

pour

cent

age

Altitude

0

10

20

30

40

50

60

100_150 150_200 200_250 250_300 sup 300

pour

cent

age

Degré de la pente

0

1020

30

40

5060

70

80

0_5 5_10 10_15 sup 15

pour

cent

age

Figure 9 : Pourcentages de points aléatoires (en gris), de tous les terriers (en brun) et de terriers principaux (en orange) pour chaque classe des variables d’habitat. b.) végétation détaillée, c.) végétation détaillée utilisée et sans le milieu ouvert, d.) altitude, e.) degré de la pente. Notez que pour un souci de lisibilité de la figure c., une échelle différente figure la forêt fermée de feuillus.

Disponible

Ensemble des terriers

Terriers principaux

a.)

d.) e.)

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Orientation de la pente

02468

1012141618

N N-E E S-E S S-W W N-W

pour

cent

age

Figure 9 suite : Pourcentages de points aléatoires (en gris), de tous les terriers (en brun) et de terriers principaux (en orange) pour chaque classe des variables d’habitat. f.) orientation de la pente).

iii. Variables environnementales des alentours des terriers Pour ces tests, seuls les terriers de la zone expérimentale ont été utilisés. Comparativement aux surfaces de chaque type de végétation (plus les surfaces bâties et les surfaces en eau) dans la zone expérimentale (surfaces théoriques), les surfaces de forêt de massif et de forêt de bocage sont significativement plus importantes qu’attendu dans les cercles autour des terriers principaux. Par contre, les surfaces bâties, les surfaces en eau, les surfaces de haie et de milieu ouvert dans les cercles autour des terriers ne diffèrent pas significativement des surfaces théoriques (tests t univariés, Tableau 7, Figure 10).

Bâti

Sur

face

en

hect

ares

0

20

40

60

80

100

Eau Haie Forêtbocage

Forêtmassif OuvertBâti

Sur

face

en

hect

ares

0

20

40

60

80

100

Eau Haie Forêtbocage

Forêtmassif Ouvert

Figure 10 : Diagramme en boîtes (médianes, 1e et 3e quartiles, 1e et 9e déciles) des surfaces en hectares de chaque classe de végétation dans les cercles autour des terriers principaux. Les valeurs théoriques sont représentées par des traits rouges lorsque la différence est significative.

Disponible

Ensemble des terriers

Terriers principaux

f.)

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Tableau 7 : Pour la variable végétation accompagnée des surfaces bâties et des surfaces en eau, valeurs des p (tests t univariés) entre la surface théorique dans la zone expérimentale et les surfaces moyennes dans les 100 ha autour des terriers principaux, pour chaque classe.

Végétation Surface théorique en pourcentage

Surface moyenne dans les cercles en %

p

Surfaces bâties 0,7 1,6 0,35

Surfaces en eau 0,9 0,8 0,92

Haie 1,0 1,0 0,56

Forêt en bocage 10,8 17,0 0,02 *

Forêt en massif 35,8 66,4 0,0001 **

Milieu ouvert 50,6 45,6 0,15

En termes de végétation plus détaillée, les cercles de 100 hectares autour des terriers principaux contiennent des surfaces significativement plus importantes de forêt fermée de conifères, de forêt fermée de feuillus, de forêt fermée mixte et de forêt ouverte qu’attendu. Ce qui indiquerait donc que les terriers sont placés de manière à être proches de ces types de végétation. Par contre, les surfaces bâties, les surfaces en eau, les surfaces de haie, de lande ligneuse, peupleraie, verger et milieu ouvert dans les cercles autour des terriers ne diffèrent pas significativement des surfaces théoriques (tests t univariés, Tableau 8, Figure 11). Tableau 8 : Pour la variable végétation détaillée accompagnée des surfaces bâties et des surfaces en eau, valeurs des p (tests t univariés) entre la surface théorique dans la zone expérimentale et les surfaces moyennes dans les 100 ha autour des terriers principaux, pour chaque classe.

Végétation détaillée Surface théorique en pourcentage

Surface moyenne dans les cercles en %

p

Surfaces bâties 0,7 1,6 0,18

Surfaces en eau 0,6 0,8 0,97

Bois 0,3 2,1 0,29

Forêt fermée de conifères 3,8 9,7 0,0003 **

Forêt fermée de feuillus 37,0 46,0 0,006 **

Forêt fermée mixte 2,9 12,4 0,004 **

Forêt ouverte 0,1 1,9 0,03 *

Haie 1,0 1,0 0,65

Lande ligneuse 0,2 1,3 0,46

Peupleraie 2,2 5,4 0,08

Verger 0,1 0,8 0,10

Milieu ouvert 50,6 45,6 0,14

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Eau BoisForêt

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Forêtouverte Haie Lande

ligneuse Peupliers Verger Ouvert

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20

40

60

80

100

Bâti

Surfa

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n he

ctar

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Eau BoisForêt

conifèresForêt

feuillusForêtmixte

Forêtouverte Haie Lande

ligneuse Peupliers Verger Ouvert

Figure 11 : Diagramme en boîtes (médianes, 1e et 3e quartiles, 1e et 9e déciles) des surfaces en hectares de chaque classe de végétation détaillée dans les cercles autour des terriers principaux. Les valeurs théoriques sont représentées par des traits rouges lorsque la différence est significative.

d) Modèles prédictifs

Nous avons choisi d’intégrer dans l’analyse des distances de Mahalanobis uniquement les variables que nous avions significativement corrélées à la présence ou à l’entourage des terriers, c'est-à-dire l’altitude et le degré de la pente pour les variables topographiques (Tableau 6), et la présence de forêt fermée de feuillus, de forêt fermée de conifères, de forêt fermée mixte et de forêt ouverte (Tableau 8) pour les variables de végétation. Etant donné que seules des variables numériques peuvent être prises en compte, nous avons utilisé les valeurs exactes d’altitude et de degré de la pente, et non les classes ; et nous avons créé quatre variables de distance, entre le terrier et les quatre types de végétation choisis (un terrier situé en feuillus obtient la valeur zéro pour la variable distance aux feuillus). Etant donné les six variables et leurs corrélations, le modèle calcule les caractéristiques moyennes d’un terrier et l’analyse cartographique, sur une grille de 50 m de coté, confère une valeur statistique p comprise entre 0 et 1 à chaque cellule selon son écart à la moyenne idéale. L’ensemble des terriers est ensuite positionné sur la carte et la valeur p correspondante est relevée. L’analyse des distances de Mahalanobis générées à partir des terriers principaux (Tableau 9, Figure 12) montre que les zones favorables se situent principalement dans les massifs forestiers et à proximité ou dans les forêts fermées de feuillus, en pente moyenne. Cependant, lorsqu’on calcule les valeurs de p associées à la localisation de tous les terriers, il s’avère que près de 60% d’entre eux obtiennent des valeurs inférieures à 0,5 (moyenne ± écart-type des p pour tous les terriers = 0,44 ± 0,29 ; histogramme de la Figure 12). Ce faible score pourrait être dû à un nombre trop faible de données de présence.

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Tableau 9 : Profil environnemental moyen des terriers principaux pour les six variables utilisées dans l’analyse des distances de Mahalanobis.

Variable Mahanalobis Mean Vector

Altitude 182 m Degré de la pente 6,5 ° Distance à la forêt fermée de feuillus 29,2 m Distance à la forêt fermée de conifères 944,2 m Distance à la forêt fermée mixte 1059,8 m Distance à la forêt ouverte 3806,4 m

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Figure 12 : A gauche, localisations de tous les terriers sur la représentation cartographique des valeurs de p comprises entre 0 (blanc) et 1 (noir), générées avec les terriers principaux. A droite, histogrammes de ces valeurs de p pour tous les terriers.

Etant donné que nos résultats précédents montrent que les terriers principaux et les terriers secondaires ne diffèrent pas dans leurs caractéristiques, nous avons de nouveau généré l’analyse des distances de Mahalanobis en prenant en compte cette fois l’ensemble des terriers et suivant ainsi la méthode utilisée par Etherington et al. (2009). Lorsque l’analyse est réalisée à partir de tous les terriers, le profil moyen (Tableau 10) ressemble fortement à celui des terriers principaux (Tableau 9) et les zones favorables semblent similaires, quoique plus diffuses (Figure 13, carte). Cependant, les valeurs de p associées aux terriers sont plus faibles (moyenne ± écart-type des p pour tous les terriers = 0,41 ± 0,30), avec un pic de plus de 20% des terriers situés à des valeurs de p inférieures à 0,1 (Figure 13, histogramme).

Valeurs p

Pou

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02468

10121416

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1Valeurs p

Pou

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02468

10121416

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1

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Tableau 10 : Profil environnemental moyen de tous les terriers pour les six variables utilisées dans l’analyse des distances de Mahalanobis.

Variable Mahanalobis Mean Vector

Altitude 189 m Degré de la pente 6,8 ° Distance à la forêt fermée de feuillus 44,3 m Distance à la forêt fermée de conifères 1052,6 m Distance à la forêt fermée mixte 1147,1 m Distance à la forêt ouverte 4088,2 m

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Figure 13 : A gauche, localisations de tous les terriers sur la représentation cartographique des valeurs de p comprises entre 0 (blanc) et 1 (noir), générées avec tous les terriers. A droite, histogrammes de ces valeurs de p pour tous les terriers.

En raison des faibles scores obtenus avec les distances de Mahalanobis, nous avons recherché à l’aide d’autres méthodes, non spatiales, comment nos variables agissaient sur la position des terriers et les unes par rapport aux autres. Pour prendre en compte l’ensemble de nos variables, nous avons réalisé une analyse multivariée sur données quantitatives et qualitatives (AFDM sous R, package FactoMineR). Nous avons utilisé comme variables qualitatives : le type de terrier (principal ou secondaire), le paysage, la végétation, la végétation détaillée et l’orientation de la pente par rapport au nord ; et comme variables quantitatives : l’altitude, la pente, la distance aux bâtiments, à l’eau, à la forêt fermée de feuillus, à la forêt fermée de

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conifères, à la forêt fermée mixte, à la forêt ouverte, à la haie, au bois, à la lande ligneuse, à la peupleraie, au verger et au milieu ouvert (Figure 14, Tableau 11).

Figure 14 : Résultats de l’AFDM réalisée avec toutes les variables. En haut, la représentation des individus, en bas à gauche le cercle de corrélation des variables quantitatives, en bas à droite la représentation des variables qualitatives

Il s’avère que les variables que nous avons relevées ne permettent d’expliquer qu’un très faible pourcentage de la variabilité de la position et des alentours des terriers de blaireaux. Plus des trois-quarts de la variabilité ne sont pas expliqués. Finalement, il semblerait que ces variables représentent plutôt le paysage que les caractéristiques des terriers puisque les groupes de variables générées par l’AFDM séparent les terriers de bocage des terriers de massif. En effet, deux des variables les plus contributives sont le paysage et la végétation (Tableau 11) et dans la Figure 14 (cercle de corrélation), les variables distances aux haies, aux

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bois, au milieu ouvert, à la peupleraie, aux vergers et au bâti caractérisent le bocage, contrairement aux variables distance aux conifères, à la forêt mixte et à la forêt de feuillus, qui sont représentatives du massif. Tableau 11 : Contribution des variables à l’AFDM, en pourcentage, pour la première et la deuxième dimension.

Variable Dimension 1 Dimension 2

Terrier principal / secondaire 2 classes 0,000 0,345 Paysage 2 classes 10,733 0,780 Végétation 4 classes 11,438 18,516 Végétation détaillée 10 classes 4,342 31,272 Orientation de la pente 8 classes 2,763 1,336 Altitude Numérique 3,183 4,991 Degré de la pente Numérique 0,847 0,760 Distance à l’eau Numérique 1,003 0,131 Distance aux zones bâties Numérique 5,321 0,857 Distance à la forêt fermée de feuillus Numérique 0,833 25,808 Distance à la forêt fermée de conifères Numérique 6,673 3,489 Distance à la forêt fermée mixte Numérique 5,461 5,020 Distance à la forêt ouverte Numérique 3,588 3,101 Distance au bois Numérique 11,585 0,047 Distance à la haie Numérique 13,437 0,237 Distance à la lande ligneuse Numérique 1,907 0,360 Distance à la peupleraie Numérique 1,806 1,627 Distance au verger Numérique 2,389 1,322 Distance au milieu ouvert Numérique 12,692 0,002 Total 15,82 7,59

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D- DISCUSSION

1. Effectifs des groupes Contrairement à ce que nous espérions, la mise en place de techniques automatisées de comptage des blaireaux n’a pas porté ses fruits. Alors que les caméras ou les appareils photos automatiques sont souvent plébiscitées comme un bon outil d’observation des groupes (guideline : Stewart et al. 1997 ; relations sociales chez le blaireau : Buesching et al. 2003 ; abondance de lynx roux : Heilbrun et al. 2006 ; abondance et diversité des poissons de récif : Lowry et al. 2011), le matériel que nous avions choisi n’était finalement pas adapté. C’est pourquoi nous avons utilisé des données d’affûts et de CMR déjà existantes, auxquelles nous avons ajouté les données relevées au cours du travail de doctorat de Carole Brendel, actuellement en cours. Lors de la détermination des effectifs de groupes, quelle que soit la méthode, la question se pose de savoir dans quelle mesure tous les blaireaux du groupe sont présents en même temps dans le terrier principal observé. Et donc si le comptage des blaireaux par observation directe ou comptages automatiques est une méthode sure ou s’il serait absolument nécessaire de réaliser des comptages simultanés au niveau du terrier principal et de tous les terriers secondaires du groupe (ce qui serait évidemment impossible). L’utilisation des terriers principaux et secondaires peut être déterminée à l’aide du suivi télémétrique ou GPS des individus. En Suisse (Do Linh San 2004), chaque blaireau fréquente de zéro à trois gîtes secondaires (moyenne ± écart-type = 1,2 ± 1,1) en plus du terrier principal de son groupe. Dans les Ardennes, jusqu’à cinq terriers secondaires ont été utilisés par un même animal, pour une moyenne de 1,2 (± 1,9) terriers secondaires fréquentés (Bodin 2005). Même si, en été, certains individus peuvent passer jusqu’à 70% de leurs journées de repos hors de leur terrier principal (Ferrari 1997 près de Neuchâtel), ce sont bien les terriers principaux qui sont le plus souvent fréquentés, puisque les blaireaux y sont localisés dans 60 à 75% des cas en Suisse (Ferrari 1997, Do Linh San 2004) et dans 94% des cas dans les Ardennes (Bodin 2005). Par ailleurs, sur ce dernier site d’étude, neuf des 14 blaireaux suivis n’ont jamais utilisé de terriers secondaires. Quoique coûteux en temps et applicable uniquement lorsque des animaux peuvent être marqués, le couplage des affûts avec une méthode de capture-marquage-recapture visuelle sur les terriers principaux abritant des animaux marqués est donc sans doute une méthode relativement précise. Nous prévoyons de tester, dans la suite du travail, de nouveaux appareils photos automatiques, similaires à ceux utilisés avec succès pour estimer la composition et l’effectif de groupes de sangliers (Hubert Pauline, ONCFS, comm. pers.), et que l’URCA-CERFE utilise dans le cadre du suivi de populations de chevreuils en plaine. Par ailleurs, dans le cadre

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du projet In Situ, porté par l’URCA-CERFE et la région Champagne-Ardenne, des échantillons de blaireaux vont être collectés dès 2012 sur dix sites répartis dans toute la région, afin de définir la structure génétique des populations. Nous pensons réaliser l’échantillonnage de manière à pouvoir déterminer les effectifs de plusieurs groupes de blaireaux par la technique de CMR génétique, qui a fait ces preuves pour les populations de martre (cf. rapport d’activité de Marina Mergey).

2. Terriers

a) Comptage exhaustif D’après le comptage exhaustif des terriers principaux dans la zone expérimentale et les estimations des effectifs moyens des groupes de blaireaux, les estimations de densités réalisées ici (moyenne [intervalles de confiance à 95%] = 0,82 [0,73 – 0,94]) se situent dans les mêmes valeurs que d’autres estimations réalisées en France à une échelle comparable (Tableau 1, p. 5). Comme la plupart des études à l’échelle locale, nos estimations ont été réalisées dans une zone relativement favorable à l’espèce, soulignant l’importance de tenir compte des facteurs favorables et défavorables à l’espèce pour estimer les densités à plus grande échelle, ainsi que l’ont fait Lofroth & Krebs (2007) sur le glouton (Gulo gulo).

b) Transects Même si nous ne pensions pas tester la méthode des transects comme méthode d’estimation de la densité en terriers principaux de blaireaux, les résultats obtenus avec les 285 hectares prospectés au cours des transects supplémentaires prouvent l’inefficacité de cette méthode pour la recherche des terriers principaux. Ceci s’explique par le fait que ceux-ci sont séparés les uns des autres d’un peu plus d’un kilomètre en moyenne, et ce type de distribution nécessiterait des transects beaucoup plus longs pour espérer rencontrer des terriers principaux.

c) Caractéristiques Les terriers principaux inventoriés ici (21,2 ± 13,5 gueules) semblent plus grands que les terriers principaux étudiés dans des régions proches de notre terrain d’étude. En Suisse les terriers principaux comptent 13,8 ± 6,4 gueules (Do Linh San 2004) et au Luxembourg 90% des terriers principaux ont plus de six gueules seulement (Schley 2000). Dans des régions plus éloignées, les terriers principaux semblent encore plus petits. Ils comptent 8,9 ± 5,7 gueules en Angleterre (Wilson et al. 2003), 6,3 ± 2,4 en Pologne (Kowalczyk 2000) et seulement 2,6 gueules en moyenne en Espagne (Revilla et al. 2001). Les terriers de très grande taille de notre zone d’étude (jusqu’à 83 gueules et 16,5% des terriers qui comptent plus de 30 gueules)

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correspondent à des terriers utilisés depuis de nombreuses générations de blaireaux (Ostler & Roper 1998). Il semble qu’on puisse en déduire que la région est propice à l’installation des terriers, probablement en raison de la nature du sol, une roche friable et siliceuse (la gaize). Par ailleurs, le paysage considéré et leur situation en forêt de massif, forêt de bocage, en haie ou en milieu ouvert n’a pas d’influence sur le nombre de gueules et donc sur l’importance du terrier. Cela indiquerait d’une part que, comme le montrent aussi Wilson et al. (1997) et Etherington et al. (2009), les terriers secondaires et principaux se situent dans le même type de paysage, mais aussi, encore une fois, que les blaireaux peuvent rester fidèles au site de leur terrier principal malgré de potentiels changements dans leur environnement.

d) Sélection de l’habitat Dans notre terrain d’étude, et en accord avec les études précédentes sur ce sujet (Anrys & Libois 1983, Skinner et al. 1991, Brøseth et al. 1997, Bodin 2001, review in Do Linh San 2006 et in Roper 2010), les terriers de blaireaux sont situés préférentiellement en massif forestier, puis en forêt quelle que soit sa surface. Les types de végétation privilégiés sont les forêts fermées, plutôt de feuillus, alors que les conifères et les forêts de type ouvertes (forêt ouverte, peupleraie, verger) sont plutôt évités. Les alentours des terriers principaux sont constitués de plus de couvert forestier correspondant à de la forêt « vraie » (pas de peupleraie ou de verger) que la moyenne de la région. Par contre, on aurait pu penser que les blaireaux cherchent à se rapprocher des zones d’alimentation que sont les prairies et les cultures, et à s’éloigner des surfaces bâties, mais leurs surfaces dans les 100 hectares autour des terriers principaux ne sont pas différentes de l’ensemble de la région. Ceci dit, le milieu ouvert couvrant 50% de la zone, il est loin d’être limitant, et les zones anthropisées se limitent ici à des petits villages. Concernant la topographie, les blaireaux situent leurs terriers préférentiellement sur des pentes moyennes à fortes (supérieures à 10°), évitent le plat ou les pentes très faibles (inférieures à 5°) et n’évitent ni ne préfèrent les pentes intermédiaires. Par contre, l’orientation de la pente par rapport au nord n’a aucune importance sur l’emplacement des terriers principaux. Dans l’ensemble, les terriers étudiés ici montrent des caractéristiques proches de celles relevées par de nombreuses études dans le choix du couvert végétal, alors que la topographie ne semble pas jouer pas un rôle prépondérant mais plutôt être un facteur secondaire du choix de l’emplacement. Ce résultat est peut-être dû à la nature particulière du sol de la région, qui semble particulièrement convenir au creusement de très grands terriers. Les conditions atmosphériques dans ces grands complexes souterrains seraient alors d’avantage tamponnées par rapport au climat extérieur et les variables topographiques ne joueraient alors qu’un rôle négligeable dans le maintien de conditions atmosphériques « idéales » dans les terriers.

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Les résultats précédents semblent montrer que la végétation détaillée joue un rôle dans la localisation des terriers de blaireaux. Etherington et al. (2009) ont utilisé les distances de Mahalanobis à partir de variables connus pour être liées à l’emplacement des terriers de blaireaux, et Newton-Cross et al. (2007, sur le blaireau) et Lofroth & Krebs (2007, sur le glouton) ont préalablement caractérisé l’habitat lié à l’espèce cible, dans une zone connue, puis ont proposé une prospective à plus grande échelle de la distribution et de la densité des populations. Cependant, contrairement à ces auteurs, et bien que nous ayons utilisé le même type de méthodes et le même type de variables, il nous a été impossible, avec les variables dont nous disposons, de mettre en évidence un profil caractéristique des terriers de blaireaux, ni par la méthode des distances de Mahalanobis, ni via des analyses multivariées. Les résultats obtenus par la méthode des distances de Mahalanobis ont en effet montré que ne prendre en compte que les variables significativement corrélées à la position et aux alentours des terriers ne permet pas d’obtenir une prospective correcte, ni des zones favorables, ni de la localisation des terriers. Ensuite, dans le cadre des analyses mutivariées, les variables que nous avons relevées ne permettent pas d’expliquer la variabilité de la position et des alentours des terriers de blaireaux. Il nous a donc été impossible de définir quel est le profil environnemental typique d’un terrier de blaireaux.

3. Conclusions Nos objectifs et les problèmes que nous avons rencontrés s’inscrivent assez bien dans le sens de cette citation de Gros et al. (1996) : « Nos recherches soulignent l’importance de calibrer des méthodes indirectes d’estimation des densités de carnivores, et montrent les difficultés des gestionnaires à intégrer des estimations de densité provenant de différentes méthodes lors de l'élaboration des stratégies de conservation ». Le fait que nous n’ayons pas pu définir le profil environnemental d’un terrier de blaireaux s’explique probablement de plusieurs manières. Tout d’abord, il y a une grande variabilité dans les caractéristiques des terriers de blaireaux de notre zone d’étude. Etant donné cette variabilité, il est d’autant plus important de définir les bons facteurs explicatifs et ici, il est clair qu’il nous manque des informations. Ensuite, nous avons vu que notre terrain d’étude abritait de nombreux terriers anciens sans doute creusés depuis plusieurs dizaines d’années, et il est probable que les caractéristiques environnementales de ces terriers aient fortement évoluées depuis. Ce biais temporel n’est pas mesurable. Il découle de ces résultats que sans pouvoir déterminer le profil environnemental des terriers de blaireaux, nous ne pouvons pas modéliser les facteurs de présence potentielle ni finalement réaliser d’estimation prospective de la distribution et de la densité des terriers de blaireaux sur une grande échelle géographique. De la même manière, nous ne pouvons pas proposer de modèle

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d’échantillonnage des terriers puisque nous ne pouvons pas prédire où et comment réaliser l’échantillonnage de manière à obtenir des résultats représentatifs de la population réelle. Le biais temporel dû à l’âge des terriers et la variabilité de leurs localisations ne sont pas exceptionnels. Ainsi, même si nous testions les effets de nouvelles variables afin de mieux évaluer le profil environnemental des terriers de blaireaux, les problèmes que nous avons eu risquent de se reproduire ailleurs. La méthode que nous souhaitions mettre en place, alors qu’elle semble porter ses fruits pour les populations de blaireaux des Iles Britanniques et pour d’autres espèces, n’est donc pas appropriée aux populations de blaireaux du nord-est de la France. Alors que ce volet du projet n’a pas permis d’apporter les réponses que nous espérions, dans l’autre volet de ce projet, l’utilisation de données de CMR génétique s’est avérée efficace pour estimer les densités de populations de martres (cf. le rapport de Marina Mergey). Comme le profil génétique du blaireau a déjà été étudié (Kohn et al. 1999, Frantz et al. 2004), nous tenterons de profiter des données récoltées dans la suite de nos travaux, et notamment dans le cadre du projet In Situ porté par l’URCA-CERFE et la région Champagne-Ardenne, pour tester la possibilité d’estimer les densités des populations de blaireaux à l’aide de la méthode de CMR génétique.

E- REMERCIEMENTS Cette étude s’est déroulée dans le cadre du projet « Outils de veille de l’état des populations de mustélidés », grâce au soutien financier du Fonds Européen de Développement Régional (FEDER), de la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) et de la Communauté de Communes de l’Argonne Ardennaise (2C2A). Les travaux de terrain ont pu être menés à bien grâce à l’excellente connaissance de la zone d’étude de nos nombreux partenaires, qui ont accepté de nous signaler les terriers et nous ont permis d’obtenir un inventaire exhaustif des terriers principaux de blaireaux dans notre zone expérimentale. Il convient aussi de remercier ici les stagiaires et les membres de l’équipe du CERFE qui ont bien voulu apporté leur aide ponctuelle mais essentielle.

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ANNEXE 1 : Localisation des terriers selon les variables d’habitat Pour chaque variable, valeurs des p obtenus à l’aide des tests exacts de Fisher comparant la distribution des points aléatoires placés dans la zone d’étude réelle, celle de l’ensemble des terriers et celle des terriers principaux ; et pourcentages des points aléatoires, de l’ensemble des terriers et des terriers principaux dans chaque classe de ces variables. Variables

classes Points aléatoires

(en %) Tout terriers

(en %) Terriers principaux

(en %) Paysage p = 2e-09 p = 0,0003

Bocage Massif

63,4 36,6

44,2 55,8

- +

43,2 56,8

- +

Habitat p = 0,0005 p = 0,0005 Forêt massif Forêt bocage Haie Milieu ouvert

36,6 10,9

1,1 51,5

55,8 36,8

2,7 4,7

+ + + -

56,8 39,5

2,5 1,2

+ + + -

Végétation p = 0,0005 p = 0,0005 Bois Forêt feuillus Forêt conifères Forêt fermée mixte Forêt ouverte Lande ligneuse Peupleraie Verger Haie Ouvert

0,3 37,2

3,8 2,9

0,06 0,2 2,2

0,09 1,1

52,1

0,7 78,9

4,7 8 0 0

0,3 0

2,7 4,7

+ + + + - - - - + -

1,2 80,25

6,2 7,4

0 0

1,2 0

2,5 1,2

+ + + + - - - - + -

Végétation utilisée sans ouvert p = 0,0009 p = 0,44 Bois Forêt feuillus Forêt conifères Forêt fermée mixte Peupleraie Haie

0,6 77.2

9.4 5.7 5.1 1.9

0.7 82.8

4.9 8.4

0.35 2.8

+ + - + - +

1.25 81.25

6.25 7.5

1.25 2.5

Altitude p = 0,003 p = 0,02 100-150m 150-200m 200-250m 250-300m Plus de 300m

20,9 49,8 23,6

4,8 0,9

19,7 39,1 31,4

8 1,7

- - + + +

30,9 32,1 30,9

3,7 2,5

+ - + - +

Degré pente p = 0,0005 p = 0,0005 0-5° 5-10° 10-15° Supérieur à 15° Plusieurs pentes

69,4 24,6

5,6 0.4

0

44,8 33,1 19,1

1,3 1,7

- + + + +

44,4 29,6

21 3,7 1,2

- + + + +

Orientation pente p = 0,5 p = 0,97 Nord Nord-est Est Sud-est Sud Sud-ouest Ouest Nord-ouest

9,2 11,8

9,8 12,2

15 14,3 13,4 14,3

13,2 12,2

8,8 12,7 16,1 11,7 15,1 10,2

10,5 15,8

7 10,5 15,8

14 10,5 15,8

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Document III / IV

CORRELATIONS ENTRE DENSITES ET DEGATS DE BLAIREAUX

EUROPEENS (Meles meles) - PREMIERES REFLEXIONS

CAROLE BODIN

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SOMMAIRE LISTE DES FIGURES ...................................................................................................................... 1

A- DEGATS LIES AUX BLAIREAUX............................................................................................. 2

1. Consommation de cultures .......................................................................................... 2

2. Dégâts dus aux terriers ................................................................................................ 2

B- ESTIMATIONS DES DEGATS .................................................................................................. 4

1. Identification de l’espèce ............................................................................................. 4

2. Estimations des surfaces, des coûts et de l’impact moral ......................................... 4

C- EFFET DE LA DENSITE SUR LA PRESENCE DE DEGATS ........................................................... 5

D- SOLUTIONS POTENTIELLES .................................................................................................. 5

E- BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 6

LISTE DES FIGURES Figure 1 : Dégâts de blaireaux sur une culture de maïs............................................................. 2 Figure 2 : Différents types de problèmes dus à des terriers de blaireaux.................................. 3

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A- DEGATS LIES AUX BLAIREAUX

1. Consommation de cultures Le blaireau est souvent mentionné dans le cadre des dégâts causés par la faune sauvage sur les cultures, étant donné son attirance pour le maïs et le raisin, mais également parfois pour l’avoine, le blé, l’orge ou divers fruits (framboises, mures, fraises). Les dégâts se traduisent par la consommation proprement dite des plantes et/ou par leur piétinement (Figure 1). Cette consommation de cultures a lieu sur de courtes périodes, au stade laiteux pour le maïs et les céréales, et à maturité pour les raisins et les autres fruits.

Figure 1 : Dégâts de blaireaux sur une culture de maïs (photos CERFE).

D’autres dégâts liés au régime alimentaire de l’espèce concernent les jardins des particuliers, qui peuvent trouver des trous de fouille dans leurs pelouses ou leurs potagers, creusés par des blaireaux à la recherche de larves et autres vers.

2. Dégâts dus aux terriers Les dégâts qui peuvent être imputés aux terriers de blaireaux sont très divers, et pour diverses raisons (Figure 2). Des terriers peuvent être considérés comme un problème lorsqu’ils sont situés à proximité de cultures et abritent des animaux qui consommeront potentiellement ces cultures. Les terriers peuvent également être à l’origine de dégâts plus sérieux lorsque leur localisation crée un risque d’effondrement. C’est le cas des terriers creusés à l’intérieur des parcelles cultivées, dont les galeries peuvent s’effondrer sous le poids des machines agricoles, ou sous le poids du bétail lorsqu’ils sont situés dans des pâtures. Un terrier creusé dans un talus en aval d’une parcelle cultivée peut occasionner des affaissements de terrain empiétant

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sur la surface cultivable et pouvant s’avérer dangereux lors du passage d’une machine agricole.

Figure 2 : De gauche à droite : affaissement de terrain en bordure de parcelle cultivée dû à la présence d’un terrier en contrebas ; terrier dans une parcelle cultivée, chaque ruban jaune matérialise une gueule ; terrier dans un talus entre une route et une parcelle de maïs (photos CERFE).

Les terriers peuvent aussi menacer des constructions humaines, lorsqu’ils sont creusés sous des bâtiments, ou plus particulièrement dans les talus qui supportent des ouvrages d’art : remblais de routes et d’autoroutes, de ponts ou de voies de chemin de fer, les digues. Les risques d’affaissement de terrain font qu’il est évident que ces terriers doivent être rebouchés. En 2005 par exemple, des terriers de blaireaux creusés dans les digues du Rhône ont été détruits en raison des risques d’inondation qu’ils occasionnaient, et en 2006 dans les Vosges, un blaireau installé sous une maison a été relâché un peu plus loin. De même, en Hollande, les digues des polders sont surveillées et les blaireaux délogés rapidement lorsqu’ils cherchent à s’y installer. Enfin, la plupart du temps, les terriers creusés dans les cultures ou dans les talus sont des terriers secondaires, les terriers principaux étant rarement situés en milieu ouvert. Dans ce cas, leur destruction sera d’autant plus facile et les animaux auront d’autant moins tendance à revenir qu’elle se fera rapidement après l’installation des animaux, sans attendre que les terriers soient régulièrement fréquentés (sans compter que celle-ci aura d’autant moins d’impact sur les populations).

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B- ESTIMATIONS DES DEGATS

1. Identification de l’espèce Les empreintes et les crottes trouvées dans la parcelle renseignent sur les espèces qui sont venues, et les traces laissées sur les végétaux consommés permettent de déterminer les espèces à incriminer. Dans le cas du blaireau, les crottes ont la particularité d’être déposées dans des petits trous creusés par l’animal, et des petits terriers avec une ou deux gueules se trouvent quelquefois en plein cœur de la parcelle. Les plants de maïs mangés par les blaireaux sont identifiables à la manière dont ils sont coupés au pied d’un coup de dents et aux marques de griffes le long de la tige, sur les feuilles et sur les épis des plantes couchées. Les épis mangés par les blaireaux sont effeuillés à coup de griffes, alors que les sangliers ont tendance à les mâchouiller entiers. Quant aux terriers creusés par les blaireaux, ils sont suffisamment caractéristiques pour n’être confondus avec ceux d’aucune autre espèce.

2. Estimations des surfaces, des coûts et de l’impact moral En France, seuls les dégâts causés par le grand gibier et par les sangliers (classés nuisibles) sont indemnisés, par les fédérations de chasse, à hauteur de 250 000 à 1 million d’euros, selon les années et les départements, dans le nord-est de la France. Lorsque les dégâts sont identifiés comme commis par des blaireaux, ils ne sont pas mesurés ni même enregistrés. Il est de ce fait actuellement impossible d’estimer précisément les dégâts de blaireaux dans les cultures, que ce soit en termes de surface ou en termes financier. Il semble cependant que les plaintes soient rares, voire anecdotiques, notamment pour des dégâts agricoles, et la plupart des plaintes concernent des problèmes liés à la présence des terriers. Au Luxembourg, les dégâts causés par les blaireaux et les sangliers, ainsi que la manière dont ceux-ci sont perçus par les agriculteurs, ont récemment fait l’objet d’une étude (Schley 2000). Cette importante enquête a été réalisée sur plus de 2 500 km² et le paysage et l’agriculture y sont comparables à ceux du nord-est de la France. Ce travail est plus spécialement centré sur deux cultures économiquement importantes, le maïs et les vignobles. Les résultats montrent que seuls 11% des agriculteurs dont des parcelles de maïs ont subi la visite de blaireaux considèrent ces dégâts comme un problème (soit moins de 2% des agriculteurs interrogés), alors que quasiment tous les agriculteurs ayant subit des dégâts de sangliers les estiment comme un problème, tant en terme d’occurrence (nombre de visites) que de quantité abîmée. Ceci est par ailleurs étayé par le fait que peu d’agriculteurs prennent le temps d’estimer la perte financière des dégâts de blaireaux, qui sont pourtant indemnisés par l’état luxembourgeois. Concernant les vignobles, 2% des exploitants ont eu affaire à des blaireaux, alors que 24% d’entre eux ont subi des dégâts de sangliers. Enfin, 40% des personnes

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interrogées jugent que les dégâts de sangliers sont intolérables, alors que seuls 3% de l’ensemble des personnes interrogées, dont 4% des agriculteurs et 7% des chasseurs, ont cette opinion des dégâts de blaireaux.

C- EFFET DE LA DENSITE SUR LA PRESENCE DE DEGATS Sans autres données pour estimer les dégâts de blaireaux que des informations ponctuelles et non chiffrées, et étant donné l’échec de la mise en place d’une méthode prospective d’estimation de la densité des populations de blaireaux à grande échelle, nous n’avons évidemment pas pu, au cours des deux ans de ce projet, tester l’effet de la densité en blaireaux sur l’occurrence et l’importance des dégâts imputables au blaireaux. Une enquête poussée, en relation avec les administrations territoriales chargées de l’agriculture et de la chasse ainsi avec les acteurs sur le terrain (agriculteurs, chasseurs, déterreurs), permettraient de disposer d’informations plus solides et de définir l’effet réel des blaireaux sur l’agriculture. Quant aux solutions à apporter, elles sont relativement simples mais nécessitent informations et aides aux agriculteurs pour que ceux-ci les considèrent préférables à la destruction de l’espèce.

D- SOLUTIONS POTENTIELLES Les méthodes à mettre en place pour lutter contre la consommation et le piétinement des cultures par les blaireaux sont sensiblement les mêmes que celles utilisées pour repousser les sangliers. Il peut s’agir de clôtures électrifiées ou d’une cordelette imbibée de répulsif et tendue à une quinzaine de centimètres du sol. De l’essence ou des répulsifs vendus pour écarter les chiens ou les chats conviennent. Les blaireaux ayant tendance à passer sous les clôtures électriques, elles doivent être placées plus bas que pour les sangliers. La particularité qu’ont les blaireaux à cheminer sur des coulées définies facilite les méthodes de lutte, puisque une clôture de quelques dizaines de mètres au niveau de ces passages fréquentés suffit généralement à les décourager. Des études récentes montrent par ailleurs que les blaireaux peuvent se détourner d’un aliment après consommation de celui-ci traité avec un répulsif (Baker et al. 2005, Cagnacci et al. 2005). Cependant, les dégâts provoqués par les blaireaux sont souvent restreints, se limitant à une perte de quelques kilos par hectares, soit moins de 0,5% de la récolte et 30 à 40 euros en moyenne (Bourand 1989, Roper et al. 1995, Do Linh San 2006), trop peu pour que le coût de mise en place d’une clôture soit justifié. Alors que dans la plupart des pays et pour la plupart des espèces de carnivores, la solution en cas de problèmes est la destruction, en Angleterre, où les populations de blaireaux sont en densité bien plus importante que dans le reste de l’Eurasie et où l’espèce et ses terriers sont protégés, une autorisation délivrée par le Defra (Department for Environment, Food and Rural

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Affairs, équivalent du ministère de l’environnement) est nécessaire avant toute action contre les blaireaux ou contre leurs terriers. Grâce aux données des demandes d’autorisation, Delahay et al. (2009) ont pu déterminer par exemple que la majorité des problèmes provenaient de la présence des terriers (plutôt que des animaux eux-mêmes) et que ceux-ci semblaient en augmentation en zone urbaine alors qu’ils étaient en diminution dans les zones rurales. En zone urbaine, les dégâts consistent surtout en la présence de terriers sous les habitations et dans les jardins, alors qu’en zone rurale, ils se situent plus fréquemment dans les parcelles cultivées. La solution la plus utilisée (quoique parfois difficilement avec succès en milieu urbain) est la mise en place, tout autour du terrier incriminé, d’une clôture munie de portes permettant uniquement la sortie des blaireaux, dans le but que ceux-ci, incapables de réintégrer le terrier, finissent par l’abandonner et par se déplacer vers des terriers moins gênants. Cependant, la densité de demandes n’est pas lié à la densité de blaireaux. Ceci s’explique notamment par le manque de données, les derniers travaux nationaux datant de 1997 (Wilson et al. 1997), mais aussi peut-être parce que l’augmentation du nombre de demande pourrait être liée au fait que le public est de mieux en mieux informé de l’obligation d’avoir une autorisation du Defra avant de toute action contre les blaireaux ou leurs terriers. Quant à l’augmentation des cas urbains, elle est sans relation avec l’augmentation des densités de populations de blaireaux urbaines, et est probablement due au fait que les terriers de blaireaux sont plus gênant en milieu urbain qu’en zone rurale. Ainsi, malgré les nombreux travaux réalisés en Angleterre, Delahay et al. (2009) ne parviennent pas à relier le nombre de demandes d’autorisations, ni l’évolution du nombre de demandes, à l’abondance et à l’évolution de l’abondance des populations de blaireaux.

E- BIBLIOGRAPHIE Cette partie est tirée d’un rapport bibliographique rédigé pour une association : Bodin C. 2007. Particularités du Blaireau européen (Meles meles) - Impacts des prélèvements sur ses populations. Groupe d’Etude des Mammifères de Lorraine, France, 76p. Baker S.E., Ellwood S.A., Watkins R.W & Macdonald D.W. 2005. A dose-response trial with

ziram-treated maize and free-ranging European badgers Meles meles. Applied Animal Behaviour Science, 93: 309-321.

Bourand M. 1989. Le blaireau (Meles meles). Mémoire CSTC. Syndicat des chasseurs de France, Union nationale des fédérations des chasseurs, 160p.

Cagnacci F., Massei G., Cowan D.P. & Delahay R.J. 2005. Can learned aversion be used to control bait uptake by Eurasian badgers? Applied Animal Behaviour Science, 92: 159-168.

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Delahay R.J., Davison J., Poole D.W., Matthews A.J., Wilson C.J., Heydon M.J. & Roper T.J. 2009. Managing conflict between humans and wildlife: trends in licensed operations to resolve problems with badgers Meles meles in England. Mammal Review, 39: 53-66.

Do Linh San E. 2006. Le blaireau d’Eurasie, Delachaux & Niestlé, Paris, 224p.

Roper T.J., Findlay S.R., Lups P. & Shepherdson D.J. 1995. Damage by badgers Meles meles to wheat Triticum vulgare and barley Hordeum sativum crops. Journal of Applied Ecology, 32: 720-726.

Schley L. 2000. The Badger Meles meles and the Wild boar Sus scrofa: distribution and damage to agricultural crops in Luxembourg. PhD thesis, University of Sussex, 294p.

Wilson G., Harris S. & McLaren G. 1997. Changes in the British badger population, 1988 to 1997. People's Trust for Endangered Species, London, 142p.

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Document IV / IV

DEGRE D’ATTEINTE DES OBJECTIFS INITIAUX ET

PERSPECTIVES

REMI HELDER

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OBJECTIF DU PROJET L’objectif du projet visait à mettre au point des outils d’estimation des densités de populations de deux espèces de mustélidés, le Blaireau européen (Meles meles) et la Martre des pins (Martes martes), au cours des années 2010 et 2011.

DEGRE D’ATTEINTE DES OBJECTIFS INITIAUX DU PROJET En résumé, les outils testés dans le cadre du programme Blaireau - estimateur d’effectifs au terriers par des systèmes de comptage automatiques ou par pièges photographiques et détermination des zones préférentielles d’installation de blaireautières sur la base de nouveaux outils de prospective par Système d’Information Géographique - se sont révélés décevants et n’ont pas permis d’obtenir les résultats escomptés malgré les moyens déployés. Si nous sommes parvenus à estimer la population locale de la zone d’expérimentation, nous n’avons pas pu extraire de variables environnementales qui permettraient de généraliser notre protocole à plus grande échelle. Les premières réflexions sur les corrélations entre densité et dégâts des blaireaux portent donc sur la problématique en général. Nous estimons que le degré d’atteinte de cet objectif s’élève à 2/5. En revanche, les outils de Capture Marquage Recapture (CMR) génétiques sur fèces ont bien permis de déterminer les densités de populations de Martres, notamment dans les paysages de bocage. Un protocole de déploiement de cette technique est proposé en conclusion du rapport sur l’estimation de la densité des populations de Martres. Nous estimons que le degré d’atteinte de cet objectif s’élève à 4/5.

PERSPECTIVES A la vue des résultats obtenus, nous nous proposons de poursuivre nos investigations en marge d’un nouveau programme de recherche conduit par le CERFE sur les 3 années à venir (programme In Situ) destiné à évaluer la connectivité forestière de la région Champagne-Ardenne. Nous y orienterons la collecte d’échantillons afin de tester la possibilité d’évaluer l’abondance des blaireaux sur la base des protocoles de CMR génétiques à l’image de ceux qui se sont révélés efficaces dans l’estimation de densité des populations de Martres. Ce travail nous permettra par ailleurs d’affiner les techniques et de renforcer les résultats obtenus sur la problématique Martre, notamment dans les paysages forestiers.