À tous les âges de la vie, nous risquons de sombrer dans ...PREMIÈRE PARTIE. L’expérience du mensonge. Le mensonge est une expérience dans la communication avec les autres et

DU MENSONGEà l’authenticité

MARIE LISE LABONTÉ

DU

MEN

SON

GE

À L

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THEN

TIC

ITÉ

MA

RIE

LIS

E L

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ON

TÉ

À tous les âges de la vie, nous risquons de sombrer dans les

mensonges. Si certains sont bénins, d’autres, plus graves, empoisonnent la vie familiale, conjugale et professionnelle. Or, s’il soulage à court terme, le mensonge se transforme souvent en esclavage. Brouillant le contact avec les émotions, il engendre frustration, amertume et colère. Et pourtant, derrière tout mensonge se cache un appel de détresse, une vérité qui doit être entendue. Heureusement, il est possible de guérir cette blessure fondamentale. Pour vous affranchir de cet asservissement et retrouver le pouvoir sur votre vie, vous devrez vous lancer courageusement sur le chemin de l’authenticité. Ce voyage exigeant vous mènera au cœur de vous-même, et vous vous éveillerez à votre propre lumière.

Marie Lise Labonté est psychopraticienne en Europe et auteur de plu-sieurs essais. Initiée à la psychologie jungienne, elle a créé la Méthode de Libération des Cuirasses MLC©, une thérapie psychocorporelle liée au mouvement. Elle est également cocréatrice de la méthode Images de Transformation IT©, une thérapie de dialogue avec l’inconscient. Elle forme des intervenants et donne des séminaires et des conférences dans le monde.

ISBN 978-2-7619-3635-4

Du mensonge a l'authenticite.indd Toutes les pagesDu mensonge a l'authenticite.indd Toutes les pages 2014-01-06 4:21 PM2014-01-06 4:21 PM

DU MENSONGEà l’authenticité

MARIE LISE LABONTÉ

DU

MEN

SON

GE

À L

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TIC

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LIS

E L

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TÉ

À tous les âges de la vie, nous risquons de sombrer dans les

mensonges. Si certains sont bénins, d’autres, plus graves, empoisonnent la vie familiale, conjugale et professionnelle. Or, s’il soulage à court terme, le mensonge se transforme souvent en esclavage. Brouillant le contact avec les émotions, il engendre frustration, amertume et colère. Et pourtant, derrière tout mensonge se cache un appel de détresse, une vérité qui doit être entendue. Heureusement, il est possible de guérir cette blessure fondamentale. Pour vous affranchir de cet asservissement et retrouver le pouvoir sur votre vie, vous devrez vous lancer courageusement sur le chemin de l’authenticité. Ce voyage exigeant vous mènera au cœur de vous-même, et vous vous éveillerez à votre propre lumière.

Marie Lise Labonté est psychopraticienne en Europe et auteur de plu-sieurs essais. Initiée à la psychologie jungienne, elle a créé la Méthode de Libération des Cuirasses MLC©, une thérapie psychocorporelle liée au mouvement. Elle est également cocréatrice de la méthode Images de Transformation IT©, une thérapie de dialogue avec l’inconscient. Elle forme des intervenants et donne des séminaires et des conférences dans le monde.

ISBN 978-2-7619-3635-4

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Table des matières

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Première partie : L’expérience du mensonge . . . . . . . . . 17

Chapitre 1Mentir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

Chapitre 2Un moyen de communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

Chapitre 3Un refuge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

Chapitre 4Le mensonge à soi-même . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49

Chapitre 5Le mensonge pour de vrai . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

Deuxième partie : L’esclavage du mensonge . . . . . . . . . 71

Chapitre 6Les bénéfi ces secondaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

Chapitre 7Le pouvoir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

Chapitre 8La manipulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

Du mensoge a l authenticite 001-176.indd 173Du mensoge a l authenticite 001-176.indd 173 13-12-13 2:26 PM13-12-13 2:26 PM

Chapitre 9S’affranchir du mensonge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

Troisième partie : De l’autre côté du mensonge . . . . . 111

Chapitre 10L’insoutenable vérité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

Chapitre 11La vérité construite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

Chapitre 12La vérité avouée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

Chapitre 13La sincère vérité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

Quatrième partie : Vers l’authenticité . . . . . . . . . . . . . . . 137

Chapitre 14Ce qui, en nous, ne ment pas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139

Chapitre 15Ce qui, en nous, nous pousse à grandir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

Chapitre 16Ce qui, en nous, nous appelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149

Chapitre 17Ce qui, en nous, est le chemin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

ConclusionL’existentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172


Introduction

L’appel pour écrire ce livre m’est venu après que j’eus constaté combien les gens que je côtoyais en thérapie, ou lors de mes conférences, ou encore dans ma vie privée, avaient du mal à être authentiques au moment même où il aurait été temps pour eux d’entreprendre une transformation importante de leur vie. Comme si la lumière de l’authenticité était trop éblouissante et l’ombre du mensonge, trop attirante. La peur d’être authentiques et différents de leur système, la peur de l’inconnu et surtout la peur d’oser être eux-mêmes les empri-sonnaient dans une toile de mensonges qui inhibe l’action et la communication authentique.

Pour avoir connu le mensonge dans ma vie, pour en avoir vécu les séquelles à travers une maladie auto-immune, je suis bien placée pour comprendre ce que j’ai observé chez les autres. Oser être soi-même, oser exprimer ce qui en soi est authentique, nous oblige à croiser le fer avec certains « dé-mons » intérieurs : la peur de blesser l’autre ; la peur de ne plus correspondre à ce que l’autre attend de soi ; jusqu’à la peur de perdre l’amour. Il y a aussi une crainte associée à l’authenti-cité. Dans notre nature humaine bien conditionnée, nous projetons sur l’authenticité une quête de perfection, une quête de véracité qui nous met en confl it avec le mensonge. Nous tombons dans les extrêmes en voulant dire la vérité à n’im-porte quel prix, pour être soi-disant transparents. Nous pen-sons qu’être authentique signifi e être transparent.


10 • D u m e n s o n g e à l ’ a u t h e n t i c i t é

L’authenticité est un chemin auquel nous accédons par le dépouillement de notre passé, par l’écoute de notre intériorité et par le respect de notre nature profonde. Et pourtant, sur ce chemin-là, nous ne pouvons nier que le mensonge nous a servis, nous a protégés, et que nous l’avons utilisé comme cheval de Troie dans des moments diffi ciles de notre vie, où sans lui nous avions l’impression d’être démasqués à l’idée d’être nous-mêmes. Le mensonge a plusieurs visages, et certains peuvent à la longue nous heurter. Mentir, c’est aussi « se mentir » ; dans cette expression, le mensonge détruit la communication d’amour envers soi-même et envers l’autre.

Dans mon expérience de vie, j’ai dans l’enfance et l’adoles-cence entretenu le mensonge pour survivre, pour tenter d’exis-ter dans un milieu que je percevais si différent de moi-même. Un an avant le diagnostic de ma maladie auto-immune, j’ai ressenti le besoin urgent de changer ma vie, ma vie dans la-quelle je m’enlisais, mais, plutôt que d’agir, j’ai continué de me mentir à moi-même, me disant : « Ce n’est pas grave. » Je n’ai pas osé être authentique. Alors, le diagnostic est tombé. Et, même atteinte d’une maladie incurable (selon la méde-cine), j’ai continué de me mentir pour sauvegarder l’apparence selon laquelle « tout allait bien » et que « les autres me sauve-raient de la maladie ». Ce mensonge à moi-même a duré qua tre ans. Et puis, un soir, voyant l’aggravation de mon état, je me suis retrouvée dans les ténèbres de la souffrance et de la victimisation. J’ai alors eu un éclair de lucidité, un éclair d’au-thenticité face à tout ce que je vivais : je venais de passer des années à croire que les autres allaient me donner la permis-sion d’être moi-même, des années à leur demander de me sor-tir de ma diffi culté de vivre, mais je continuais de me mentir et de mentir aux autres en croyant que tout allait survenir sans que j’ose être plus authentique. J’espérais que je n’aurais pas à


Introduction • 11

changer. Je m’enfermais dans mon leurre. Ce soir-là, un voile s’est levé et j’ai su que je ne pouvais plus continuer ainsi. Cet éveil a changé ma vie. J’ai cessé de me mentir. J’ai quitté une façade, un masque, pour entrer dans l’authenticité. Devant moi, il y avait l’inconnu ; mais, en moi, j’avais la certitude que ce changement d’état intérieur était la voie vers la guérison.

Mentir aux autres et se mentir à soi est devenu pour beau-coup d’entre nous une seconde peau dans laquelle nous nous réfugions pour donner un sens à nos attitudes, à nos convic-tions et à nos souffrances. Nous vivons dans une société qui dénonce les mensonges des politiciens et qui exige d’eux la plus grande transparence. Une quête nouvelle semble naître. Nous réclamons la vérité, nous ne voulons plus du mensonge, et sou-vent, avec horreur, nous découvrons grâce aux médias des his-toires de vies détruites par des mensonges pervers, et nous réagissons en stigmatisant les méchants, les mégalomanes. Mais qu’en est-il de notre propre vie ?

Sommes-nous conscients de nos mensonges ou sommes-nous tellement habitués de mentir que nous avons occulté cette posture face aux autres et face à soi ? Nous voulons être vrais, plus authentiques, mais sommes-nous prêts à nous connaître sans « mentir » ? À la vérité, faire advenir l’authenti-cité dans sa vie passe par la connaissance du mensonge, par l’audace de se connaître dans ses actes mensongers. Il faut oser s’accueillir soi-même dans cette part d’ombre, puisque le men-songe en fait partie. Autant nous avons besoin de nos men-songes comme garde-fous de nos jardins secrets, autant nous jugeons la partie de nous qui ment. Nous nous culpabilisons de mentir, mais nous continuons de mentir par habitude ou sous l’infl uence d’un milieu familial et transgénérationnel où domine l’art de mentir. Tous ces mensonges font partie de notre identité, de nous en tant qu’êtres humains.



Cela dit, mentir n’est pas une tare, mais nous avons besoin de comprendre le mensonge. Par exemple : qu’est-ce qui fait que je mente ? En quoi cela me sert-il ? Pourquoi suis-je la per-sonne à qui l’on ment ? Y a-t-il un message caché derrière le mensonge de l’autre ?

Le mensonge peut nous servir, en ce sens qu’il peut com-porter des gains secondaires inconscients. Entretenir le men-songe peut perpétuer un pouvoir, une forme de domination sur une situation ou sur quelqu’un qui nous fait peur. Dès lors, n’est-il pas important de le comprendre, de nous connaître dans notre art de mentir, pour mieux transformer notre vie ?

Explorer le mensonge, le connaître sans nous culpabiliser et comprendre ses mécanismes est un passage important pour nous redonner la liberté de mentir ou de cesser de mentir. Il n’y a pas de loi ; il y a un choix.

Nous associons le mensonge à la vérité. Toutefois, « dire la vérité » n’est pas nécessairement plus lumineux, car souvent, in-consciemment, nous nous projetons dans cet élan de « la vé rité à tout prix », sans connaître le besoin qui se cache derrière cet ap-pel – besoin de reconnaissance, besoin d’être aimé, besoin de nous libérer d’une culpabilité, besoin de dominer, etc. Derrière le fait de « dire la vérité » se cachent aussi des espaces d’ombre appelés vengeance, contrôle, inquisition, dogme, rigidité.

Sur le chemin de l’authenticité, nous ne sommes pas à l’abri de nos petits démons dissimulés derrière le mensonge et la vérité. Or, il est essentiel de connaître et d’accueillir ces parts d’ombre si nous voulons jouir un jour d’une plus grande li-berté d’être, d’une plus grande unité intérieure et d’une meil-leure communication avec soi et les autres.

Être authentique est une voie d’évolution qui nous permet de découvrir les dimensions profondes de notre vérité inté-rieure. C’est la voie de l’Être qui est en constante transforma-tion, et il serait triste d’y accoler une rigidité, un dogme, ou


Introduction • 13

même une quête. Sur ce chemin, l’authenticité n’est pas le but. Le but, c’est le chemin lui-même. Sur ce chemin, l’authenticité nous est révélée, elle se dévoile, elle est libre, elle existe au-delà de la pensée binaire – « Je mens ou je dis la vérité » – ou de la pensée ubiquiste – « Je suis sincère ».

Vivre authentiquement est un appel profond qui, par son aspect inconditionnel, nous pousse sur le fi l du funambule. Notre élan est l’amour et la bienveillance envers soi-même et les autres.

MARIE LISE LABONTÉLos Arcos, le 14 août 2013



« L’homme qui ne craint pas la véritén’a rien à craindre du mensonge. »

– THOMAS JEFFERSON1



PREMIÈRE PARTIE

L’expérience du mensonge

Le mensonge est une expérience dans la communication avec les autres et avec soi-même. Il soulève une foule d’émotions et de senti-ments, cachant à la fois des mystères et des vérités, entraînant répul-sion et fascination. Lorsqu’on explore l’authenticité, la compréhension du mensonge est un passage obligé pour accueillir notre nature hu-maine sur le chemin de la sincérité.



CHAPITRE 1

Mentir

Mentir est une nécessité absolument vitale chez l’Humain qui est bien souvent obligé d’inventer de petits ou gros mensonges en solution parfaite pour s’éviter de plus ou moins graves ennuis,

et parfois même la mort dans des cas extrêmes1.

Le mensonge est l’une des étapes du développement de la personnalité chez l’enfant. L’enfant de 4 ans est près de son monde imaginaire et il lui est encore impossible de le différen-cier du monde réel. Le tout-petit, à cet âge, ne fait pas encore la distinction entre la subjectivité et l’objectivité. Par conséquent, le « mensonge » d’un enfant de 4 ans s’apparente plutôt à un « pseudo-mensonge ». Son attitude est facilement décelable : son mensonge n’est pas élaboré et, surtout, il n’est pas inten-tionnel. Son corps exprime ce pseudo-mensonge par une forme d’hésitation entre deux mondes. Il se dandine de gauche à droite ou d’avant en arrière. Son regard peut être absent, comme s’il se nourrissait d’un ailleurs. L’enfant peut simple-ment regarder derrière lui, comme s’il tentait de relier deux réalités. Ses mains se joignent et il agite gentiment ses petits doigts. Le langage verbal montre des hésitations ; l’en fant peut répéter des mots, ou accélérer le débit, puis faire des pauses et recommencer à parler.



La part du symbole, des histoires et contes de fées auxquels il peut s’identifi er est encore très importante. L’enfant projette son désir d’être, avec ce qu’il est dans sa perception de la réa-lité. Animé du désir pur et naturel d’embellir un monde invi-sible aux yeux des adultes, il raconte ce qu’il a fait, ce qu’il a vu, en exagérant les choses ou en inventant sa vie, tout simple-ment. Dans cette expression du pseudo-mensonge à la fois positif et constructif, la peur de cacher la vérité n’existe pas. Comme l’a dit Jean Piaget : « Les enfants avant l’âge de 5 ans sont fanatiques de la vérité. Ils savent que mentir ou tromper, c’est mal. Ils condamnent le mensonge. Tout ce qui n’est pas vrai est faux et celui qui dit des choses fausses est un menteur même s’il est un ami gentil2. »

Plus l’enfant avance en âge, jusqu’à la préadolescence, plus le mensonge lui sert de jeu possible dans la construction de sa personnalité, et cela pour transformer, masquer, voire nier une réalité douloureuse. Son mensonge devient intentionnel pour des raisons qui lui sont propres.

Dès l’âge de 6 ans, l’enfant a la capacité logique d’y joindre une intention ; son mensonge n’est plus « naïf », mais devient délibéré. L’intention, la préméditation et l’anticipation sont des facteurs qui susciteront alors le mensonge. Selon la charge émotionnelle qui y est associée, le mensonge peut perdre sa dimension constructive pour acquérir un caractère plus dange-reux, et même destructeur. Les parents n’ont pas à s’en sentir culpabilisés, mais doivent se questionner sur le fait que leur enfant commence à mentir. Car les parents ont la responsabi-lité d’éviter que les enfants ne développent une personnalité fortement identifi ée au mensonge.


Mentir • 21

Les mensonges innocentsDans notre vie d’enfant et même dans notre vie d’adulte, cer-tains mensonges ne seront jamais dangereux, dont les men-songes blancs, les mensonges altruistes et les mensonges de convenance. Ces types de mensonges servent à protéger celui qui ment et son interlocuteur d’un malaise non nécessaire, d’un embarras, ou même d’un sentiment de honte que l’on préfère éviter.

Le mensonge blanc est un mensonge de complicité. L’en-fant de 4 ans, encore un « fanatique de la vérité », aura ten-dance à dénoncer la réalité et sera incapable de dire un mensonge blanc, à moins que la famille lui apprenne à agir de connivence.

Prenons l’exemple de papa qui fait comprendre à Justin, 4 ans, qu’il va cacher le gâteau d’anniversaire de maman, l’impliquant ainsi dans un mensonge blanc : « Nous dirons à maman qu’il n’y a pas de gâteau. » L’enfant de 4 ans peut certes collaborer à une complicité légère, mais nous ne sa-vons pas s’il pourra garder longtemps ce secret. Par contre, l’enfant de 5 ans qu’on implique dans un tel mensonge blanc saura mener le jeu jusqu’au bout, et il en sera même très fi er, car il accorde encore au parent beaucoup de pouvoir et de toute- puissance3.

Quant au mensonge altruiste, par lequel on évite de faire de la peine à quelqu’un, il a pour but de protéger une per-sonne ou un système. C’est ainsi que, dans cette étape du déve-loppement, l’enfant peut garder le secret d’un abus, car l’abuseur est le tout-puissant. Les enfants de 5 ans et plus tai-ront un tel secret, et ils mentiront s’il le faut pour protéger un abuseur, surtout si ce dernier est un parent ou une fi gure d’au-torité du cercle familial. Instinctivement, l’enfant sait que quelque chose ne va pas. Tout en mentant pour ne pas blesser



l’autre, il pourra tout de même révéler des signes de la réalité de l’abus, par exemple par ce qu’il écrira dans son journal in-time, par un dessin, etc.

Le mensonge de convenance est un passe-partout collectif. Sachant parfois que la vérité à tout prix n’est pas nécessaire, nous acceptons de mentir, mais avec discernement. Tante Jus-tine, par exemple, âgée de 80 ans, s’est faite belle pour sa sortie du dimanche. Cependant, elle a mis un chapeau excentrique, et elle vous demande : « Comment trouvez-vous mon cha-peau ? » Qu’allez- vous lui répondre ? Que vous trouvez ce cha-peau très laid ? Il y a fort à parier que vous direz un mensonge de convenance pour permettre à tante Justine de bien vivre sa journée. D’ailleurs, nous avons tous des raisons d’utiliser, si besoin est, le mensonge de convenance, et il est important d’en informer nos enfants pour qu’ils apprennent à recon-naître les situations où il est acceptable de mentir sans tomber dans l’accoutumance.

Il existe bien des nuances dans l’intentionnalité d’un men songe. Ce qui soutient ou non l’enfant dans son ap-prentissage du mensonge, c’est le système familial. Allons-nous, en tant que parents, encourager l’enfant à mentir, ou allons-nous plutôt punir sévèrement le mensonge ? Lui expliquerons- nous les différentes intentions possibles du mensonge ?

Louise a 8 ans et vient d’être admise dans un collège privé où presque tous les enfants ont des parents qui exercent des professions libérales : avocats, médecins, architectes, etc. Sa mère la prépare donc à altérer légèrement la réalité quant à la profession de son père.

« Louise, si on te demande ce que fait papa, réponds qu’il est maître coiffeur. »


Mentir • 23

Pour Louise, l’expression « maître coiffeur » ne veut rien dire. Son père est coiffeur et elle en est fi ère, mais l’attitude de sa mère la rend perplexe. Son père ne serait donc pas à la hauteur d’un certain rang social ? Louise se met donc à questionner sa mère et à remettre en cause sa proposition. Cependant, la mère de Louise insiste :

« Un maître coiffeur est un artiste de la coiffure. Il a son propre salon. En plus, ton père est très estimé dans toute la ville par ses pairs et ses clientes. »

Cette explication satisfait Louise, mais suscite une pointe d’insécurité quant à ce nouveau collège et à ses exigences sociales. Elle accepte la demande de sa mère et celle-ci est soulagée, car elle a l’impression qu’elle vient de protéger Louise.

Peu après, ce que sa mère avait craint arrive. Un après-midi, pendant la récréation, des jeunes fi lles se vantent de la profession de leur père. Quand vient son tour de parler, Louise, rassurée par les explications de sa mère, dit à ses camarades : « Mon père est maître coiffeur. » À ces mots, des fi lles éclatent de rire, d’autres se mettent à glousser, et Louise se sent si honteuse d’être ainsi jugée par le groupe qu’elle voudrait disparaître sous les pavés de la cour de l’école. Comme elle est pensionnaire au collège, elle sait qu’elle de-vra subir les moqueries des autres toute la semaine. Effon-drée, elle rentre chez elle le vendredi soir et raconte tout à sa mère. Ensemble, Louise et elle réfl échissent, se demandent ce qu’il conviendrait de dire quant à la profession du père. La mère fi nit par trouver une solution.

« Louise, ton père est un homme d’affaires. »La mère vérifi e si Louise est prête à partager avec elle

cette complicité.« Oui ! Oui ! C’est ça ! »



Déjà, Louise se sent fi ère à l’idée de dire aux autres que son père est dans les affaires. Elle se convainc dans sa tête de 8 ans que c’est bien ce qu’il fait. Après tout, il possède son propre salon de coiffure et une ferme à la campagne. Oui, c’est cela, c’est un homme d’affaires.

Cette complicité de Louise avec sa mère dans l’élaboration du mensonge aide l’enfant à trouver sa place dans un milieu social qui, avec ses exigences implicites, est loin de lui ressem-bler. Le mensonge blanc et le mensonge de convenance propo-sés par la mère aideront Louise à s’intégrer dans ce collège d’élite.

Ces types de mensonges, nous les expérimentons réguliè-rement, par exemple quand nous rentrons d’un voyage à l’étranger. À la douane, l’agent nous demande : « Avez-vous quelque chose à déclarer ? » Bien évidemment, nous répondons par la négative, mais nous cachons dans nos valises cinq bou-teilles de champagne ramenées de France !

Les douanes sont un lieu d’apprentissage du mensonge. Imaginez que vous alliez travailler aux États-Unis pour quel-ques semaines. Le douanier vous demande : « Que venez-vous faire aux États-Unis ? » Avec un grand sourire, vous répondez : « Je viens m’amuser. » Mauvaise réponse : il est trop fort de café, ce mensonge blanc adressé à un douanier américain. À coup sûr, vous allez attirer son attention.

Recommençons !« Que venez-vous faire aux États-Unis ?— Je vais visiter New York. »Et vous le regardez à peine dans les yeux… Bonne

réponse.Les mensonges innocents ne portent pas de charges émo-

tionnelles et sont facilement acceptés par la société.


Mentir • 25

Les mensonges par imitationDans les âges de développement de l’enfance, le parent a un rôle important à jouer dans l’élaboration du mensonge. Il existe une réelle différence entre le mensonge blanc et le mensonge par imitation qui, lui, risque de devenir une habitude. Car l’imita-tion fait aussi partie d’une étape de l’édifi cation de la personna-lité de l’enfant. Les parents mentent et les enfants les imitent, par amour, par besoin d’être comme eux et de « faire pareil ».

Nous l’avons vu, les mensonges innocents ne blessent per-sonne, mais ils nous protègent le temps de la résolution d’un confl it ou d’une mésentente. Le mensonge par imitation, par contre, peut devenir une identité, un ancrage où l’enfant ne sait pas pourquoi il ment. Nous savons, nous, qu’il ment par habitude et par conditionnement.

Ces types de mensonges sont plus destructeurs, car ils en-gendrent de la confusion chez l’enfant et le coupent de la réa-lité de son monde intérieur. L’enfant est conditionné par son imitation. Pour lui, l’important est de répondre à l’identité proposée pour s’assurer d’être aimé. Alors, il répète comme un petit automate la réalité mensongère de ses parents.

Si le parent utilise le mensonge comme mode de commu-nication, l’enfant qui l’imite le ressent. En présence du couple parent/enfant, on peut détecter aisément le mensonge du pa-rent. Il suffi t d’observer le corps de l’enfant.

Première attitude possible : le parent ment et l’enfant tourne la tête pour le regarder mentir. Ce geste spontané chez l’enfant est très révélateur de son chemin intérieur d’authenticité.

Deuxième attitude possible : le parent ment et l’enfant re-garde au sol, embarrassé par ces mensonges.

Troisième attitude possible : le parent ment d’une façon provocante et l’enfant rougit.



Si, en tant que parents, nous devions mentir en présence de notre enfant, et si cela devait se répéter, il serait important de lui expliquer, sans toutefois révéler tous nos secrets, les rai-sons pour lesquelles nous devons adopter cette attitude. Ainsi, nous éviterions que l’enfant ne conclue que mentir est l’atti-tude idéale face au monde.

Si mentir devient notre unique manière de communiquer avec notre enfant, nous pouvons provoquer une grande insé-curité chez lui et détruire peu à peu la relation de confi ance. À la longue, le doute et la distanciation peuvent s’installer dans le lien de résilience entre l’enfant et nous. Dès lors, une coupure trop rapide risquerait de pousser précocement l’enfant vers les autres et leurs infl uences.

Évidemment, un parent ne peut pas tout dire à son enfant, car cela entraînerait des conséquences fâcheuses et ne l’aide-rait pas à édifi er son monde intérieur. Nous sommes ici dans un mouvement de balancier entre une « trop grande transpa-rence » et un « trop grand mensonge ». La grande transparence devient une intrusion dans la vie de l’enfant. Il pense : « Si mon parent me dit tout, je dois aussi tout lui dire. » C’est une équa-tion logique chez l’enfant. Il se sent obligé d’être comme le parent, mais il n’est pas un adulte : il a besoin de ses espaces et de ses secrets pour se construire. Il n’a pas encore acquis la capacité de discerner ce qui demande une connaissance de soi. Par contre, le trop-plein de mensonges engendre la peur, l’in-sécurité, le doute, la méfi ance, et surtout le sentiment d’être trahi par plus grand que soi. Par conséquent, l’enfant peut perdre confi ance en la personne à qui il s’est attaché.

Un parent mentira à son enfant pour le protéger des diffi -cultés inhérentes au monde des adultes et pour lui permettre de poursuivre sa vie dans le monde de l’enfance. La lucidité du parent est ici nécessaire, car l’enfant, on le sait, lit le corps du


Mentir • 27

parent et détecte le manque de transparence. Plus le parent se raidit dans un mensonge par ailleurs nécessaire, plus l’enfant risque de ressentir de l’insécurité. C’est au parent qu’il revient de trouver la juste mesure dans la nécessité de mentir. Demandons- nous ce qui nourrit cette nécessité. Il importe d’être au clair sur son propre mensonge, et cela pour la santé psychique de son enfant.



CHAPITRE 2

Un moyen de communication

Mentir, c’est respecter l’autre, c’est ne pas lui faire de mal, mais c’est aussi le préparer tout doucement

à la vérité quand il faut la lui dire. […] Par conséquent, maintenant certains disent la vérité comme on envoie un coup de poing dans la fi gure…

Je l’ai vu… Dans ce cas-là, dire la vérité devient une forme de non-respect de l’autre. Il y a une attention

à l’autre qui exige qu’on le mène à la vérité1.

La façon dont nous répondons aux mensonges de notre enfant est aussi une manière de les entretenir ou de tenter doucement de les démystifi er. Derrière tout mensonge, il y a une vérité qui a besoin d’être entendue.

Pouvons-nous, parents, éducateurs ou guides, entendre ce qui ne peut être nommé ? Pouvons-nous écouter ce qui n’est pas dit ? Pouvons-nous accepter qu’il y ait chez notre enfant une dimension que nous n’arrivons pas à posséder, à prendre ou à contrôler ? Pouvons-nous permettre qu’une vérité, déran-geante pour nous, puisse exister dans le système familial ?

Le mensonge exprime une vérité qui ne peut être formulée autrement que par l’acte de mentir. C’est souvent pour l’enfant une façon d’appeler à l’aide, d’attirer notre attention. Devant



le mensonge devenu moyen de communication, voici des questions qu’un parent peut se poser :

— Qu’est-ce que mon enfant tente de me communiquer lorsqu’il ment ?

— A-t-il peur de dévoiler une réalité qui n’est pas à l’image du désir que je projette sur lui ?

— Tente-t-il d’éviter une punition ?— A-t-il besoin de faire porter telle faute par sa sœur ou

son frère ?— Veut-il me protéger ?— Veut-il protéger un secret, un sentiment de honte, un

monde émotionnel qui le submerge2 ?

L’enfant peut aussi utiliser le mensonge par besoin d’affi r-mer son existence, sa différence ; pour tenter d’embellir une image de lui-même qu’il perçoit négativement. Dans ce cas, le mensonge lui sert de toile de fond pour se mettre en valeur et mettre en valeur sa réalité, par le recours à l’exagération. Ainsi, il sera remarqué, vu, accepté et même entendu. Le mensonge qui nourrit l’exagération est sans danger à l’âge de 4 ou 5 ans, mais il devient dangereux dans le développement de la per-sonnalité de l’adolescent. Ce dernier peut se prendre à son propre jeu et croire son mensonge jusqu’à atteindre un début de mythomanie.

Derrière le mensonge existent plusieurs réalités propres à celui qui ment, des réalités qu’il doit communiquer. Parfois ces réalités sont entremêlées et forment une matière douloureuse intérieure que le mensonge recouvre tel un baume sur une plaie.

François, 6 ans, vient de briser accidentellement un verre d’eau. Le fracas, l’éparpillement des tessons et les éclabous-


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À tous les âges de la vie, nous risquons de sombrer dans ...PREMIÈRE PARTIE. L’expérience du mensonge. Le mensonge est une expérience dans la communication avec les autres et