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Toxo, Méndez et d’autres dirigeants syn- dicaux ont publié un article demandant « un nouveau contrat social européen ». En as-tu eu connaissance ? Je le connais, et je ne partage absolument pas son contenu. L’article ne représente-t-il pas cependant la position du mouvement syndical euro- péen ? D’abord, à ce que j’en sais, cela n’a été dis- cuté dans aucune instance syndicale. Et d’après les informations en ma possession, même si les dirigeants de l’UGT et des CCOO, de la DGB allemande et d’autres syn- dicats français et belges le signent, d’autres dirigeants syndicaux ont refusé de le faire. En particulier, j’aimerais faire remarquer que ni les dirigeants syndicaux grecs ni les portugais, les irlandais ou les britanniques ne le signent. Mais l’article ne correspond-il pas à la ligne adoptée par la direction de ton syn- dicat, les CCOO ? Il me faut reconnaître que beaucoup de choses correspondent aux propositions de la majorité du syndicat. Mais cela ne signi- fie pas, bien loin de là, que l’ensemble des syndicalistes connaissent et approuvent ces propositions. Qu’en penses-tu personnellement ? Les propositions d’un « nouveau contrat social européen » ne sont pas nouvelles. Elles sont la continuation naturelle de l’ASE (accord social économique, « pacte social » signé en Espagne entre le patronat, les direc- tions des confédérations syndicales et le gou- vernement en début d’année — NDLR) qui a accepté la diminution des pensions. Le 3 février dernier, les directions de l’UGT, des CCOO et de la DGB, trois des huit signa- taires de l’article, publiaient une déclara- tion intitulée « l’Europe à la croisée des chemins », dans laquelle elles défendaient des réformes du travail « produits du dia- logue social et des accords passés avec les partenaires sociaux », et disaient « qu’en ce sens, ils estiment les accords récemment obte- nus en Espagne sur les pensions et la négo- ciation collective positifs ». Quelle est ton appréciation de l’ASE ? Le résultat de l’ASE est une diminution de 20 % des futures pensions et deux ans de plus de travail pour obtenir la retraite. En ce qui concerne la négociation collective, le résultat des accords est égal à zéro. La négociation des conventions était bloquée et reste bloquée malgré les engagements à la modération salariale. Et parmi les jeunes, qui sont ceux qui verront leur retraite le plus retardée et la pension la plus réduite, c’est un désastre syndical. Peux-tu nous expliquer cette apprécia- tion de « désastre syndical » ? Après l’ASE, dans les CCOO, l’adhésion des jeunes, qui était déjà réduite, a chuté de 50 %. Et comme me l’expliquait très fine- ment un jeune militant, les mobilisations massives des indignés du 15M (15 mai 2011 — NDLR) n’auraient pas été possibles sans la signature du pacte par les dirigeants de l’UGT et des CCOO, qui a provoqué un désar- roi important, le rejet parmi les jeunes et a ouvert un fossé entre les organisations syn- dicales et les millions de jeunes sans emploi. Penses-tu que la tribune signée par les huit dirigeants entre dans cette ligne ? Il suffit de lire des phrases telle que celle- ci : « Le mouvement syndical européen ne défend pas une position partisane : nous cherchons à défendre l’intérêt général et à contribuer à la recherche de solutions à la très grave crise politique de l’Union euro- péenne. » Il faut rappeler que les syndicats sont des organisations créées pour défendre les intérêts des travailleurs, opposés à ceux des patrons. Mais ne crois-tu pas que si l’Union euro- péenne s’effondre nous en pâtirons tous ? C’est une bonne question qu’il faut poser aux travailleurs grecs, portugais ou irlan- dais, ceux que la troïka — dont font partie, aux côtés du FMI, la Commission euro- péenne et la Banque centrale, institutions centrales de l’Union européenne — mène à la ruine. Ou aux fonctionnaires de Cata- logne, de Castille-La Manche, des Canaries, ou à ceux de l’enseignement de Madrid et de la Navarre, où, pour diminuer le déficit comme l’exige l’Union européenne, on baisse les salaires tout en augmentant la durée de service, où on les licencie tout sim- plement. Et le prix va être encore plus élevé. Un prix plus élevé ? Rajoy (nouveau Premier ministre — NDLR) a dévoilé aux dirigeants de l’UGT et des CCOO quelques-unes des exigences que la Banque centrale européenne a faites par lettre secrète envoyée au gouvernement espagnol en juillet : outre la réforme de la Constitution, baisse des salaires de 20 %, emplois « jeunes » avec un salaire inférieur au salaire minimum et qui n’ouvre pas de droits au chômage ni à la retraite. Le gou- vernement Zapatero, avant de partir, a fait le premier pas en légiférant sur un « travail en formation » pour les diplômés universi- taires ou de la formation professionnelle, avec 426 euros de salaire, alors que le SMIC est à 640 euros. Il faut rappeler que lorsque le gouvernement Felipe Gonzalez a voulu imposer en 1988 un prétendu « plan pour l’emploi jeunes », avec des contrats de ce type, la réponse du mouvement syndical a été l’appel à la grève générale du 14 dé- cembre, qui a été massivement suivie. L’article des huit dirigeants dit qu’il « faut élaborer un nouveau contrat social et économique avec la participation active des partenaires sociaux. Un contrat social européen novateur ayant comme grands chapitres, entre autres : l’emploi, les salaires (que les partenaires sociaux doivent continuer à négocier de façon autonome), les pensions, les allocations chômage, l’éducation et la santé ». C’est une orientation qui les mène au désastre. Elle oblige à faire table rase de toutes les conquêtes sociales arrachées par la lutte de classes, à accepter que tout soit négociable. « Sauver l’Europe » exige d’ac- cepter les conditions imposées par le capi- tal financier. Où cela nous mène-t-il ? Lors du dernier conseil confédéral des CCOO, je me suis opposé à la ligne de « concertation » avec le futur gouvernement Rajoy, et j’ai proposé, à l’inverse, de rendre publiques les « lignes rouges » des coupes budgétaires que, comme syndicat, nous n’accepterions en aucun cas, et de chercher dès maintenant les alliés pour organiser la mobilisation pour la défense des services publics, les droits du travail, les conquêtes sociales. Le secrétaire général, Ignacio Fer- nandezToxo m’a fait une réponse décon- certante. Il m’a dit que sur cette ligne nous ne perdrions sans doute pas d’adhérents, voire que nous en gagnerions, mais que nous resterions en dehors des cercles de décision, sans la possibilité d’influer sur les changements. Ce sont là deux conceptions opposées. Pour moi, la force des syndicats vient précisément de leurs adhérents et de leur capacité de mobilisation. Pour d’autres, ce qui compte c’est d’être présents dans les commissions du « dialogue social », même si, pour cela, il faut démobiliser, et qu’il n’en sorte que des diminutions (comme le montre l’expérience des dernières années). Mais alors, il n’y a rien à faire ? Faut-il considérer la bataille perdue au sein des syndicats ? Absolument pas. Il faut regarder les mobi- lisations des enseignants de Madrid ou dans la santé en Catalogne qui ne sont possibles qu’avec les syndicats et avec des assemblées de travailleurs qui imposent la mobilisation unie. Il faut avoir à l’esprit les mobilisations massives et les grèves du peuple grec avec leurs syndicats. Il faut rejeter la campagne contre les syndicats, qui s’appuie sur les erreurs des dirigeants, mais qui va bien au- delà. Par exemple, quinze responsables du syndicat de l’électricité de Grèce ont été inculpés pour avoir participé à la campagne de boycott de la nouvelle taxe d’habitation que le gouvernement perçoit avec la fac- ture électrique. Faut-il les laisser tomber ? A l’inverse, il faut mener campagne pour leur défense. Les prochaines batailles contre les coupes budgétaires qui s’annoncent exigent, plus que jamais, que nous luttions pour que nos syndicats les organisent et les dirigent. C’est dans ce combat qu’il sera possible pour les travailleurs d’avancer dans la recon- quête de leurs organisations. > L’actualité politique et sociale >>> 4 INFORMATIONS OUVRIÈRES N 0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011 “Les propositions d’un “nouveau contrat social européen” ne sont pas nouvelles. Elles sont la continuation naturelle du pacte social en Espagne qui a abouti à une diminution de 20 % des futures pensions et à deux ans de plus de travail pour obtenir la retraite” Huit responsables syndicaux européens prônent un “contrat social européen” INTERVIEW Les résultats du pacte social en Espagne Face au sommet de l’Union européenne qui envisage une possible réforme des traités de l’Union européenne, huit responsables de confédérations syndicales (1) ont publié le 7 décembre une tribune libre dans plusieurs journaux, tribune dans laquelle ils plaident pour « un approfondissement du projet euro- péen », mais sur une autre politique que celle des échecs et des injustices actuelles afin « d’atteindre les objectifs de réduction des déficits et des dettes (…) dans des délais réalistes », pour un « nouveau traité social européen qui remplace le traité historique », et ils demandent enfin la participation du mouvement syndical à la future révision des traités, par une « convention » dont l’objet sera de « garantir la survie (…) de l’Union euro- péenne ». Nous avons interviewé Luis Gonzalez, res- ponsable syndical de la santé à Séville et membre du conseil confédéral des Commis- sions ouvrières (CCOO), qui a soutenu des positions opposées à celles qui sont exprimées dans la tribune en question. (1) Sont signataires de l’article, outre Ignacio Fernandez Toxo, secrétaire géné- ral des CCOO, et Candido Méndez, secrétaire général de l’UGT, Michael Som- mer, président du DGD allemand, Susanna Camusso, secrétaire générale de la CGIL italienne, BernardThibault, secrétaire général de la CGT, et François Ché- rèque, secrétaire général de la CFDT (France), Anne Demelenne, secrétaire générale de la FGTB et Claude Rolin, secrétaire général de la CSC (Belgique). Entretien avec Luis Gonzalez, responsable syndical de la santé à Séville et membre du conseil confédéral des Commissions ouvrières (CCOO)

00 PAGE UNE 2 · 2011-12-15 · Toxo,Méndezetd’autresdirigeantssyn-dicauxontpubliéunarticledemandant «unnouveaucontratsocialeuropéen». Enas-tueuconnaissance? Jeleconnais

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Page 1: 00 PAGE UNE 2 · 2011-12-15 · Toxo,Méndezetd’autresdirigeantssyn-dicauxontpubliéunarticledemandant «unnouveaucontratsocialeuropéen». Enas-tueuconnaissance? Jeleconnais

“Toxo, Méndez et d’autres dirigeants syn-dicaux ont publié un article demandant« un nouveau contrat social européen ».En as-tu eu connaissance ?Je le connais, et je ne partage absolumentpas son contenu.

L’article ne représente-t-il pas cependantla position du mouvement syndical euro-péen ?D’abord, à ce que j’en sais, cela n’a été dis-cuté dans aucune instance syndicale. Etd’après les informations enma possession,même si les dirigeants de l’UGT et desCCOO, de laDGB allemande et d’autres syn-dicats français et belges le signent, d’autresdirigeants syndicaux ont refusé de le faire.En particulier, j’aimerais faire remarquerque ni les dirigeants syndicaux grecs ni lesportugais, les irlandais ou les britanniquesne le signent.

Mais l’article ne correspond-il pas à laligne adoptée par la direction de ton syn-dicat, les CCOO ?Il me faut reconnaître que beaucoup dechoses correspondent aux propositions dela majorité du syndicat. Mais cela ne signi-fie pas, bien loin de là, que l’ensemble dessyndicalistes connaissent et approuvent cespropositions.

Qu’en penses-tu personnellement ?Les propositions d’un « nouveau contratsocial européen »ne sont pas nouvelles. Ellessont la continuation naturelle de l’ASE(accord social économique, « pacte social »signé en Espagne entre le patronat, les direc-tions des confédérations syndicales et le gou-vernement en début d’année — NDLR) quia accepté la diminution des pensions.Le 3 février dernier, les directions de l’UGT,des CCOO et de la DGB, trois des huit signa-taires de l’article, publiaient une déclara-tion intitulée « l’Europe à la croisée deschemins », dans laquelle elles défendaientdes réformes du travail « produits du dia-logue social et des accords passés avec lespartenaires sociaux », et disaient « qu’en cesens, ils estiment les accords récemment obte-nus en Espagne sur les pensions et la négo-ciation collective positifs ».

Quelle est ton appréciation de l’ASE ?Le résultat de l’ASE est une diminution de20 % des futures pensions et deux ans deplus de travail pour obtenir la retraite. Ence qui concerne la négociation collective,le résultat des accords est égal à zéro. Lanégociation des conventions était bloquéeet reste bloquéemalgré les engagements àlamodération salariale. Et parmi les jeunes,

qui sont ceux qui verront leur retraite le plusretardée et la pension la plus réduite, c’estun désastre syndical.

Peux-tu nous expliquer cette apprécia-tion de « désastre syndical » ?Après l’ASE, dans les CCOO, l’adhésion desjeunes, qui était déjà réduite, a chuté de50 %. Et comme me l’expliquait très fine-ment un jeune militant, les mobilisationsmassives des indignés du 15M (15mai 2011—NDLR) n’auraient pas été possibles sansla signature du pacte par les dirigeants del’UGTet desCCOO, qui a provoquéundésar-roi important, le rejet parmi les jeunes et aouvert un fossé entre les organisations syn-dicales et lesmillions de jeunes sans emploi.

Penses-tu que la tribune signée par leshuit dirigeants entre dans cette ligne ?Il suffit de lire des phrases telle que celle-ci : « Le mouvement syndical européen nedéfend pas une position partisane : nouscherchons à défendre l’intérêt général et àcontribuer à la recherche de solutions à latrès grave crise politique de l’Union euro-péenne. » Il faut rappeler que les syndicatssont des organisations créées pour défendreles intérêts des travailleurs, opposés à ceuxdes patrons.

Mais ne crois-tu pas que si l’Union euro-péenne s’effondre nous en pâtironstous ?C’est une bonne question qu’il faut poseraux travailleurs grecs, portugais ou irlan-dais, ceux que la troïka— dont font partie,aux côtés du FMI, la Commission euro-péenne et la Banque centrale, institutionscentrales de l’Union européenne —mèneà la ruine. Ou aux fonctionnaires de Cata-logne, de Castille-LaManche, des Canaries,ou à ceux de l’enseignement de Madrid etde la Navarre, où, pour diminuer le déficitcomme l’exige l’Union européenne, onbaisse les salaires tout en augmentant la

durée de service, où on les licencie tout sim-plement. Et le prix va être encore plus élevé.

Un prix plus élevé ?Rajoy (nouveau Premier ministre—NDLR)a dévoilé aux dirigeants de l’UGT et desCCOO quelques-unes des exigences que laBanque centrale européenne a faites parlettre secrète envoyée au gouvernementespagnol en juillet : outre la réforme de laConstitution, baisse des salaires de 20 %,emplois « jeunes » avec un salaire inférieurau salaire minimum et qui n’ouvre pas dedroits au chômage ni à la retraite. Le gou-vernement Zapatero, avant de partir, a faitle premier pas en légiférant sur un « travailen formation » pour les diplômés universi-taires ou de la formation professionnelle,avec 426 euros de salaire, alors que le SMICest à 640 euros. Il faut rappeler que lorsquele gouvernement Felipe Gonzalez a vouluimposer en 1988 un prétendu « plan pourl’emploi jeunes », avec des contrats de cetype, la réponse dumouvement syndical aété l’appel à la grève générale du 14 dé-cembre, qui a été massivement suivie.

L’article des huit dirigeants dit qu’il « fautélaborer un nouveau contrat social etéconomique avec la participation activedes partenaires sociaux. Un contrat socialeuropéen novateur ayant comme grandschapitres, entre autres : l’emploi, lessalaires (que les partenaires sociauxdoivent continuer à négocier de façonautonome), les pensions, les allocationschômage, l’éducation et la santé ».C’est une orientation qui les mène au

désastre. Elle oblige à faire table rase detoutes les conquêtes sociales arrachées parla lutte de classes, à accepter que tout soitnégociable. « Sauver l’Europe » exige d’ac-cepter les conditions imposées par le capi-tal financier.

Où cela nous mène-t-il ?Lors du dernier conseil confédéral desCCOO, je me suis opposé à la ligne de« concertation » avec le futur gouvernementRajoy, et j’ai proposé, à l’inverse, de rendrepubliques les « lignes rouges » des coupesbudgétaires que, comme syndicat, nousn’accepterions en aucun cas, et de chercherdès maintenant les alliés pour organiser lamobilisation pour la défense des servicespublics, les droits du travail, les conquêtessociales. Le secrétaire général, Ignacio Fer-nandez Toxo m’a fait une réponse décon-certante. Il m’a dit que sur cette ligne nousne perdrions sans doute pas d’adhérents,voire que nous en gagnerions, mais quenous resterions en dehors des cercles dedécision, sans la possibilité d’influer sur leschangements. Ce sont là deux conceptionsopposées. Pour moi, la force des syndicatsvient précisément de leurs adhérents et deleur capacité demobilisation. Pour d’autres,ce qui compte c’est d’être présents dans lescommissions du « dialogue social », mêmesi, pour cela, il faut démobiliser, et qu’il n’ensorte que des diminutions (comme lemontre l’expérience des dernières années).

Mais alors, il n’y a rien à faire ? Faut-ilconsidérer la bataille perdue au sein dessyndicats ?Absolument pas. Il faut regarder les mobi-lisations des enseignants deMadrid ou dansla santé en Catalogne qui ne sont possiblesqu’avec les syndicats et avec des assembléesde travailleurs qui imposent lamobilisationunie. Il faut avoir à l’esprit lesmobilisationsmassives et les grèves du peuple grec avecleurs syndicats. Il faut rejeter la campagnecontre les syndicats, qui s’appuie sur leserreurs des dirigeants, mais qui va bien au-delà. Par exemple, quinze responsables dusyndicat de l’électricité de Grèce ont étéinculpés pour avoir participé à la campagnede boycott de la nouvelle taxe d’habitationque le gouvernement perçoit avec la fac-ture électrique. Faut-il les laisser tomber ?A l’inverse, il fautmener campagnepour leurdéfense. Les prochaines batailles contre lescoupes budgétaires qui s’annoncent exigent,plus que jamais, que nous luttions pour quenos syndicats les organisent et les dirigent.C’est dans ce combat qu’il sera possiblepour les travailleurs d’avancer dans la recon-quête de leurs organisations. �

> L’actualité politique et sociale >>>4INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011

“Les propositions

d’un “nouveau contrat

social européen”

ne sont pas nouvelles.

Elles sont la continuation

naturelle du pacte social

en Espagne qui a abouti

à une diminution

de 20 % des futures pensions

et à deux ans de plus de travailpour obtenir la retraite”

Huit responsables syndicaux européensprônent un “contrat social européen”

INTERVIEW

Les résultats du pacte social en Espagne

Face au sommet de l’Union européenne quienvisage une possible réforme des traités del’Union européenne, huit responsables deconfédérations syndicales (1) ont publié le7 décembre une tribune libre dans plusieursjournaux, tribune dans laquelle ils plaidentpour « un approfondissement du projet euro-péen », mais sur une autre politique que celledes échecs et des injustices actuelles afin« d’atteindre les objectifs de réduction des

déficits et des dettes (…) dans des délaisréalistes », pour un « nouveau traité socialeuropéen qui remplace le traité historique », etils demandent enfin la participation dumouvement syndical à la future révision destraités,par une « convention »dont l’objet serade « garantir la survie (…) de l’Union euro-péenne ».Nous avons interviewé Luis Gonzalez, res-ponsable syndical de la santé à Séville et

membre du conseil confédéral des Commis-sions ouvrières (CCOO), qui a soutenu despositions opposées à celles qui sont expriméesdans la tribune en question.

(1) Sont signataires de l’article, outre Ignacio Fernandez Toxo, secrétaire géné-ral des CCOO, et CandidoMéndez, secrétaire général de l’UGT, Michael Som-mer, président du DGD allemand, Susanna Camusso, secrétaire générale de laCGIL italienne, BernardThibault, secrétaire général de la CGT, et François Ché-rèque, secrétaire général de la CFDT (France), Anne Demelenne, secrétairegénérale de la FGTB et Claude Rolin, secrétaire général de la CSC (Belgique).

Entretien avec Luis Gonzalez, responsable syndical de la santé à Sévilleet membre du conseil confédéral des Commissions ouvrières (CCOO)

Tardieu J-C
Sticky Note
Une question révélatrice de l'état d'esprit de celui qui la pose. Ne vaudrait-il mieux pas que l'UE ne s'effondre pas, ce serait un soulagement pour les travailleurs, bref, la vie continuerait comme avant... avec l'UE !
Tardieu J-C
Sticky Note
On entend ce genre de discours depuis 70 ans. Et que constatons-nous ? Que c'est exactement l'inverse qui se produit, les travailleurs désertent les syndicats et laissent les dirigeants pourris maître à bord. Quand en tirerez-vous les conclusions qui s'imposent ? Jamais il faut croire, puisque plus haut il le reconnaît.
Tardieu J-C
Sticky Note
Non, décidément vous ne comprenez pas grand chose. Toxo sait que la classe ouvrière s'est embourgeoisée ou que les syndicats organisent principalement les couches supérieures de la classe ouvrière ou celles qui ont le sentiment d'avoir quelque chose à perdre, donc elles préfèrent négocier ou passer par le dialogue sociale pour tenter de préserver leurs avantages plutôt que d'aller à l'affrontement qui ne leur rapportera sans doute rien, c'est en tout cas leur calcul. C'est le fond de commerce des bureaucrates pourris.
Page 2: 00 PAGE UNE 2 · 2011-12-15 · Toxo,Méndezetd’autresdirigeantssyn-dicauxontpubliéunarticledemandant «unnouveaucontratsocialeuropéen». Enas-tueuconnaissance? Jeleconnais

> L’actualité politique et sociale >>>6INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011

Les enseignants des collègesTomas-Divi et Anatole-France, à Châteaudun, réunis avec la FSU et FO, ont décidé dediffuser, à l’occasion de la grève et de lamanifestation du 15 décembre, un tract à tous leurs collègues.Ils y font le lien entre les mesures prises par le principal du collège Tomas-Divi à l’encontre d’un enseignant et ceà quoi conduirait le projet de décret duministre Chatel sur l’évaluation s’il voyait le jour.C’est ainsi qu’en conclusion de leur appel, ils soulignent : « Parce que nous ne voulons pas que l’exemple du collègeTomas-Divi devienne la règle, nous exigeons le retrait pur et simple du projet de décret sur l’évaluation. »

DOCUMENT (EXTRAITS)

La conférence des présidents d’associations de professeurs spécialistes se prononcepour le retrait immédiat des projets de décret et arrêté sur l’évaluation

Jean Markun

Informations ouvrières a publié,dans un précédent numéro, unetribune de Denis Langlet sur

quelques points de repère sur la situa-tion économique.Oui, au cœur des plans d’austérité, ily a une attaque frontale contre la Sécu-rité sociale.C’est sur les malades, sur les retraités,sur les familles que le gouvernementveut récupérer les milliards qu’exigel’Union européenne.« Notre modèle social n’est pas intan-gible », a déclaréNicolas Sarkozy à Bor-deaux. Qu’est-ce qui est visé ?« Nous devons repenser le système definancement de notre système social »,a-t-il ajouté.C’est donc bien le cœurmême du sys-tème qui est visé. « Dans un mondeouvert, soumis à la concurrence, le coûttrès élevé du travail dans notre payspénalise notre économie » : tel est lecœur du problème.Selon leMedef, « on ne peut pas sépa-rer la question du coût du travail decelle de la nécessaire réforme structu-relle à conduire sur le financement etla gestion de notre système de protec-tion sociale ».Le patronat s’est vu imposer, en 1945,un système de Sécurité sociale fondésur lamise en commun d’une fractiondu salaire, pour protéger les maladeset les travailleurs âgés. Sur quoi reposele système de financement fondé surles cotisations sociales ? Sur des basessimples et efficaces : chaque fois que

la classe ouvrière arrache une augmen-tation de salaire, cela augmente les res-sources de la Sécurité sociale. Tout pasen avant des droits ouvriers entraîneune augmentation des recettes de laSécurité sociale.C’est avec cela qu’ils veulent en finir !Malgré des années de pillage par lesexonérations de cotisations, 316 mil-liards d’euros depuis 1992 (voir tableaudans notre numéro 175), le finance-ment est encore basémajoritairementsur les cotisations.Sarkozy déclare, toujours à Bordeaux :« Dans quelle proportion faut-il mettreà contribution différents types d’impôtspour réaliser cet élargissement ? »LeMedef a déjà répondu en proposantle transfert de 30 à 80milliards (sur les160 milliards versés actuellement encotisations) sur la contribution socialegénéralisée (CSG) et la TVA.Un basculement qui signifie un chan-gement radical du système.Jusqu’à aujourd’hui, et malgré les loisde financement imposées par Juppé,les prestations sont encore détermi-nées par l’état de santé de l’assuré. Unassuré en arrêt de travail depuis sixmois est pris en charge à 100 % àcompter du premier jour du septièmemois, quel que soit l’état financier dela Sécurité sociale.Avec le transfert sur l’impôt, les pres-tations dépendraient des disponibili-tés financières de l’Etat. Chacun lecomprend : plus aucun droit ne seraitgaranti.Nous y reviendrons chaque semaine.

Au cœur des plans d’austérité,une attaque frontalecontre la Sécurité sociale

Claude Dupuis

La nouvelle convention médi-cale (1) doit êtremise en appli-cation le 1er janvier 2012.

Dans son numéro 166, Informationsouvrières alertait ses lecteurs sur lecaractère pervers de cette nouvelleconvention et titrait : « Au nom del’“efficience économique”, le médecingénéraliste devrait s’opposer à l’inté-rêt du patient. »En effet, cette nouvelle conventionmédicale introduit la rémunération« à la performance », celle-ci étantjugée sur des critères économiquesde réduction des coûts.Nous écrivions notamment : « Com-ment avoir confiance dans son méde-cin si on ne sait pas si le traitementprescrit est le meilleur pour sa santé ? »Depuis, nous avons été informés del’avis rendu par le Conseil nationalde l’Ordre des médecins ; cet avismérite d’être largement connu.Pour présenter ses observations,conformément à l’article L.162-15 duCode de la Sécurité sociale, le Conseilnational de l’Ordre des médecins aécrit le 15 septembre 2011 auministreXavier Bertrand en ces termes : « Pré-voir de nouveaux modes de rémuné-ration suscite (…) de fortes réservesdès lors que la convention les associe(…) à un exercice professionnel de plusen plus administré et contrôlé. L’in-

dépendance professionnelle a été ins-taurée dans l’intérêt des malades, nel’oublions pas. Enfin, un certainnombre de dispositions convention-nelles font difficulté sur le plan de ladéontologie et de l’exercice profes-sionnel. »Le Conseil national de l’Ordre desmédecins, tout au long d’un docu-ment très fourni et détaillé, relève lesatteintes au respect de la déontolo-gie médicale. Il rappelle qu’il s’étaitdéjà opposé antérieurement à un inté-ressement financier. Il pointe les dis-positions pouvant remettre en causele secret médical, celles pouvantconduire à une sélection desmaladeset « s’inquiète de la possibilité ouvertepar la loi à l’assurance maladie, orga-nisme financeur des soins, d’élaborerdes référentiels de bonnes pratiquesmédicales » et en conclut qu’« on esten plein conflit d’intérêt ».Dans le climat de consensus quidevait entourer cette nouvelle conven-tion médicale, cette voix s’élevantpour défendre les malades fait figurede rappel à la raison et d’encourage-ment pour tout ceux qui ne peuventaccepter que soient sacrifiés l’exer-cice médical et la Sécurité sociale.

(1) Conventionmédicale : accord régissant lesrapports entre l’assurancemaladie et lesméde-cins libéraux permettant aux malades d’êtresoignés et aux médecins d’être rémunérés.

Protection sociale

Nouvelle convention médicale

Le Conseil national de l’Ordre des médecinss’adresse auministre de la Santé,Xavier Bertrand

“Le principal du collège Tomas-Divi vient defaire un rapport haineux et rageur de troispages contre un enseignant pour demander

des sanctions avec comme motif officiel… le déplace-ment d’une heure de chorale ! Officiel, car sur deux pagesde ce rapport, il explicite le motif réel : délit d’opinionpour des questions posées en tant qu’élu au conseil d’ad-ministration (CA).

LES FAITS :Un élu enseignant au CA pose deux questions auxquellesle chef d’établissement refuse de répondre. L’élu ayantosé (!) insister, il remet en question et dénigre le travailde collègues avec des propos diffamatoires, et ce publi-quement, devant des élus locaux, des représentantsd’élèves et de parents d’élèves ! Il est clair queMme le prin-cipal a pris le ridicule prétexte du déplacement d’uneactivité périscolaire, ce qu’elle qualifie de “faute grave”,pour demander des sanctions. Le SN-FO-LC et le SNESont été saisis le 24 novembre par des professeurs du col-

lège des menaces qui pesaient sur l’un des leurs. Le soirmême, une délégation de Force ouvrière était reçue parmonsieur l’inspecteur d’académie (…). Les responsablesFO ont demandé à l’inspecteur d’académie d’intervenirpour que cessent les abus de pouvoir à Tomas-Divi, quesoient respectés les droits et devoirs (…).Le 28 novembre, conscients que le comportement de leurchef d’établissement serait légitimé par le décret Chatelsur l’évaluation, les enseignants de Tomas-Divi ont prisla décision unanime d’être en grève le 15 décembre.Avec ce décret, le chef d’établissement n’aurait mêmeplus besoin de faire appel à l’inspecteur pour sanction-ner un enseignant, il pourrait “l’inspecter” lui-même,l’évaluer ou plutôt le sous-évaluer, baisser sa note, doncson salaire.Le décret sur l’évaluation, c’est le règne de l’arbitraire, lamise en cause de l’indépendance pédagogique et du sta-tut des fonctionnaires, c’est la privatisation, c’est l’aval despratiques du principal du collège Tomas-Divi ! » �

Grève du 15 décembre dans l’Education nationalepour le retrait du projet de décretsur l’évaluation

Eure-et-Loir

Dudécret Chatel…au collègeTomas-Divi, à ChâteaudunAujourd’hui : autoritarisme et harcèlement.Et demain : sanction pécuniaire ? Baisse de la note ?

Si la pédagogie des professeurs n’est plusévaluée par les spécialistes de leur disci-pline que sont les inspecteurs, c’est en toute

logique que les savoirs disciplinaires ne seront plusau centre de leur mission, ce d’autant plus que desactivités étrangères à l’enseignement seraient prisesen considération.Par ailleurs, en confiant, dans le cadre d’une auto-nomie accrue des établissements, aux seuls chefsd’établissement, déjà présidents du conseil péda-gogique, toute l’évaluation des professeurs, ce pro-

jet les soumet à des critères locaux et subordonneles programmes nationaux et la liberté pédago-gique au projet d’établissement, remettant en causele caractère national de l’enseignement dispensé.Enfin, en parlant d’une évaluation à la mesure « desrésultats professionnels obtenus par l’agent »,ce projet (…) disculpe commodément les politiquesmises en œuvre ces dernières décen-nies (…). Elles en exigent le retrait immé-diat et le maintien de la double notationdes professeurs. »

Association des professeurs d’arts plastiques ; Association des professeurs de communication, d’économie-gestion ; Association desprofesseurs de mathématiques de l’enseignement public ; Association des professeurs d’éducation musicale ; Association des profes-seurs de français et langues anciennes en classes préparatoires littéraires ; Association des professeurs d’histoire et géographie ; Asso-ciation des professeurs de lettres ; Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public ; Association des professeursde sciences médico-sociales ; Association des professeurs de vente ; Coordination nationale des associations régionales des enseignantsde langues anciennes ; Société des langues néolatines ; Union des professeurs de physiologie, biochimie et microbiologie.

Enseignement

“ ”

“Le décretsur l’évaluation,c’est le règnede l’arbitraire”

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INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011

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Jean-Paul Huchondécide une nouvelle haussede 1,5 % des transportsen Ile-de-France au 1er janvierLes tarifs des transports en Ile-de-France vont augmenter de 1,5 %au 1er janvier 2012, le Syndicat des transports (Stif), dont le prési-dent n’est autre que le « socialiste » Jean-Paul Huchon, égalementprésident du conseil régional, ayant décidé le 7 décembre de réper-cuter la hausse de la TVA prévue dans le plan de rigueur du gou-vernement.Concrètement, le passe Navigo zone 1-2 passe à 62,93 euros, celuide la zone 3 à 81,30 euros, la zone 4 à 99,57 euros, la zone 5 à111,55 euros.Le carnet de dix tickets coûtera 12,70 euros, 6,35 euros en demi-tarif, le ticket à l’unité 1,70 euro. Une nouvelle hausse pourrait inter-venir en juillet 2012 : « Je ne peux pas vous dire de combien seracette hausse-là », a répondu Jean-Paul Huchon lors d’un pointpresse, le 7 décembre, à la suite du conseil d’administration duStif… �

Les salariés de Radio France inter-nationale (RFI) étaient en grève pen-dant quinze jours, depuis le 28 no-

vembre dernier, avec l’ensemble de leurssyndicats, sur une plate-forme qui deman-dait le maintien de l’indépendance édi-toriale et des garanties conventionnelles,mais qui protestait surtout contre lavolonté de fusionner la radio RFI avec lastation de télévision France 24. Le lundi5 décembre, un référendum organisé parles syndicats donnait un résultat sansappel : 94,4 % des 591 votants rejetaientcette fusion RFI-France 24, ce nombre devotants étant très élevé, puisque RFIcompte 781 postes de travail.Chaque jour de la semaine se tenait uneassemblée générale des personnels quivotait la reconduite de la grève.Elle permettait d’échanger des informa-tions, mais aussi de clarifier les enjeux.Une journaliste a ainsi raconté les diffi-cultés rencontrées lors d’un reportage enEgypte, lorsque le technicien de l’équipedevait s’occuper non seulement des repor-tages radiomais aussi des reportages pourla télévision France 24.Une autre journaliste s’est adressée audélégué de la CFDT : « Si, entre syndicats,vous avez réussi à vous mettre d’accord surle mot d’ordre “non à cette fusion !”, pour-quoi déclares-tu dans une interview à lapresse que tu es pour la fusion mais contrecette fusion-là ? Tu aurais pu te contenterde dire que tu es contre cette fusion ! »Différentes initiatives sont prises : mani-festation là où se tient un conseil d’ad-ministration qui vote sur la fusion, àIssy-les-Moulineaux (là où est programméle déménagement de RFI), lettre adresséeaux auditeurs…Vendredi, en une heure et demie, des gré-vistes de RFI ont recueilli auprès de leurscollègues de Radio France deux cent

quatre-vingt-cinq signatures sur une péti-tion de soutien.Lors d’une assemblée générale, un débats’engage sur qui, au niveau du gouverne-ment, est réellement « tutelle ».Le ministère de la Culture ? Celui desAffaires étrangères, qui a manifesté savolonté d’avoir son mot à dire sur l’au-diovisuel extérieur tout en déclarant quela fusion relevait de la responsabilité dela direction de RFI ? Alors que cettemêmedirection de RFI écrivait dans un texteremis aux syndicats : « Ce projet de fusionest un projet souhaité par le président dela République et nous ne l’abandonneronspas. »Réponse d’un journaliste, applaudi enassemblée générale : « C’est quand mêmeincongru, une direction qui dit qu’il fauts’adresser à Kim Il Sung ! »Face à ces responsables politiques qui serenvoient la patate chaude, l’assembléegénérale des personnels a décidé d’aller

manifester chez le Premierministre, devantMatignon, pour demander le gel de lafusion. Une centaine de salariés y étaientrassemblés le lundi 12 décembre. Ils ontentendu lesmessages de soutien d’un jour-naliste de l’AFP et d’une représentantesyndicale de France Télévisions.Celle-ci annonçait une grève déclenchéece même jour à France 3, contre la miseen commun du magasin technique deFrance 3 et de France 2.Un jugement de la cour d’appel devantpar ailleurs intervenir le 16 janvier quipourrait remettre en cause le processusde fusion, l’assemblée générale des sala-riés de RFI du 12 décembre a décidé desuspendre la grève, en affirmant que ladétermination des personnels restaitintacte.Le nouveau directeur général a tenté defaire quelques déclarations apaisantes.Mais il le sait : rien n’est réglé.

Correspondante �

RADIO-FRANCE INTERNATIONALE

Quinze jours de grève à RFILes personnels manifestent devant Matignon pour dire non à la fusion avec France 24

Actualité politique et socialeRFI

Lettre à nos auditeurs (extraits)Chers auditeurs,La situation est grave pour notre radio : c’est l’avenirmême de RFI qui est en jeu aujourd’hui. Désormais,Radio France internationale appartient à une holding,l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF). Le gouverne-ment a voulu regrouper RFI, France 24 et TV5 en uneseule et même structure juridique.Mais la fusion avec France 24 se fera au détriment deRFI (…). Le risque, c’est « de déshabiller Pierre pourhabiller Paul ».Les moyens de RFI ont déjà été réduits. L’an passé, unpremier plan social a fait disparaître 206 postes de tra-vail, soit 20 % des employés, c’est-à-dire un emploi surcinq. Un nouveau plan est programmé pour les mois àvenir qui viendra encore amputer les moyens de pro-duction.A plusieurs reprises, notre direction a qualifié la radio demédia « archaïque », oubliant au passage les quarantemillions d’auditeurs de RFI à travers le monde et surtouten Afrique (…).La prochaine étape pour RFI, c’est la fusion de notrerédaction avec celle de France 24. Notre direction nousparle de « transmédia », de journalistes qui travaillerontà la fois pour la radio, la télévision et Internet, qui assu-reront des directs en plateau, tout en préparant les sujetspour l’antenne. En devenant des « journalistes à toutfaire » et surtout à tout faire vite, comment conservernotre rigueur, notre spécialisation ?Ici, à RFI, nous connaissons votre juste exigence d’uneinformation précise et honnête. Nous voulons rester des« producteurs d’information et non de simples répéti-teurs de dépêches d’agence ». Nous revendiquons depouvoir continuer à vérifier nos informations. Il en va denotre crédibilité (…).Nous demandons aux autorités françaises de stopper ceprojet de fusion.

Le personnel en grève,le 6 décembre �

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Dans une prise de position commune,les organisations syndicales des univer-sités Paris-Sorbonne, Pierre-et-Marie-Curie, Panthéon-Assas et Muséumnational d’histoire naturelle alertent lesenseignants, les étudiants et le person-nel et se prononcent contre la fusion deleurs quatre établissements à travers lamise en place d’une fondation privée.Celle-ci remettrait en cause l’ensembledes droits des différentes catégories et lestatut de fonctionnaire d’Etat des per-sonnels (extraits).

“L es organisations FO Paris-IV,SNCS Paris-VI, Snesup Paris-VI, CGT Paris-VI, UNSA

Paris-IV, CGT Paris-IV, FSU P-IV, SLR, FOParis-VI, SNPTES UNSA Muséum, SUDEduc Paris-VI, UNEF Paris-VI, AGEPSParis-IV, Sud Etudiants Paris-IV, FSUMuséum, CGT Muséum, SNPREES-FOMuséum, AutonomeSup-SNASMuséum,SolidairesMuséum, SGEN-CFDTMuséum,UNEF Paris-IV, communiquent :La modification des statuts du pôle derecherche et d’enseignement supérieur(PRES) revient à détruire les quatre éta-blissements concernés : université Paris-Sorbonne, université Pierre-et-Marie-Curie,université Panthéon-Assas,Muséumnatio-nal d’histoire naturelle, aumoyen et aupro-fit d’une fondation de coopération scien-tifique de droit privé SorbonneUniversité.

Le PRES remet en cause :— la liberté et l’indépendance de l’ensei-gnement et de la recherche ;— les statuts de fonctionnaires d’Etat pourles personnels ;— l’égalité des conditions d’accès à l’en-seignement supérieur des étudiants ;— le fonctionnement démocratique desétablissements avec des représentantsélus dans les instances décisionnelles ;— l’identité et les missions spécifiquesdes établissements.Cette fusion déguiséemais bien réelle ins-titue une structure étanche en réponse àl’appel d’offre « Initiatives d’excellence ».Cette structure, l’Initiative d’excellence(Idex), regroupera une minorité de labo-ratoires et quelques filières de formation,en absorbant environ la moitié des bud-gets de chacun des établissements, soit722 millions d’euros en tout.Plus concrètement, pour chacune de noscatégories, personnels et usagers, celasignifie :

� Bibliothécaires, ingénieurs, adminis-tratifs, techniciens, personnels sociauxet de santé (BIATSS) : il y aura mutuali-sation des services existants puis fusion,ce qui aura pour conséquence la sup-pression d’emplois (…).

� Enseignants-chercheurs et chercheurs :la création de « directions transversales »du PRES va faire éclater ou diluer nos

enseignements, nos formations et nos axesde recherche qui seront définis à termepar le PRES. Il n’y aura plus de raison demaintenir les UFR dans les différentes uni-versités fusionnées (…). L’intégration del’activité enseignement-recherche duMuséumnational d’histoire naturelle danscemodèle universitaire conduira à sa liqui-dation comme établissement d’ensei-gnement supérieur et de recherche enréduisant ses missions historiques à laseule fonction muséale.

� Etudiants : fondation privée, le PRESpourra ouvrir des filières « d’excellence »,avec des droits d’inscription libres, ce quibarrera la route aux étudiants qui n’au-ront pas les moyens de payer des droitsd’inscription exorbitants (…).Est-il acceptable de passer sous la couped’une fondation privée ? L’enseignementuniversitaire et la recherche doiventrester publics.Tous les enseignements, tous les domainesde recherche doivent être maintenus, etdisposer desmoyens nécessaires. Nos éta-blissements ne doivent pas fusionner !Tous les membres des conseils d’admi-nistration des quatre établissements doi-vent voter contre un projet qui ne recueillepas l’assentiment de la communauté uni-versitaire et contre lequel les comités tech-niques de Paris-IV et Paris-VI se sont déjàprononcés à l’unanimité. » �

UNIVERSITÉS PARIS-SORBONNE, PIERRE-ET-MARIE-CURIE, PANTHÉON-ASSASET MUSÉUM NATIONAL D’HISTOIRE NATURELLE

“Non à la disparition de nos établissements et des statutsde fonctionnaires d’Etat sous l’égide d’une fondation de droit privé”

Manifestation des salariés de RFI au conseil d’administration, à Issy-les-Moulineaux.

Le musée des Arts décos en grève depuis le 8 décembre.

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Grève reconduite au Musée des artsdécoratifs pour les salaires et les emploisLes salariés de l’Association des arts décoratifs (Muséedes arts décoratifs, Ecole Camondo, Atelier du Carrouselsous tutelle du ministère de la Culture) sont en grèvedepuis le 8 décembre à l’appel des syndicats CGT, CFDT,FO, CGC et UNSA. La grève a été une nouvelle foisreconduite le 12 décembre par les salariés « pour exigerde véritables négociations sur les salaires, la mutuelle,les primes et les emplois ».

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Christel Keiser et Dominique Ferré

“Nouvelle semaine crucialeen Grèce », titre Le Parisien,alors que le ministre des

Finances du gouvernement d’union natio-nale est « convoqué » par les « inspecteurs »de la troïka. « Les inspecteurs doivent éva-luer le nouveau programme de mesurespréparées par le gouvernement grec de coa-lition, tant au plan budgétaire (réductionde la fonction publique, mise en place dela grille unique des salaires, réforme dumarché du travail) que sur le plan desréformes dites structurelles dont a besoinle pays, selon ses créanciers. Selon le quo-tidien grecKathimerini, les experts devraientse concentrer sur lamise en place d’un nou-veau Code des impôts destiné à réformer lesystème fiscal indigent du pays. »Or, comme l’explique Hélène Zografaké-Telemè, syndicaliste enseignante, c’est pré-cisément contre la nouvelle taxe immo-bilière (couplée à la facture d’électricité,afin d’utiliser le chantage des coupures decourant) que se concentre la résistance destravailleurs grecs à la politique de la troïka.C’est parce qu’ils luttaient contre cette taxeque Nikos Photopoulos, président du syn-dicat de la compagnie grecque d’électri-cité, et ses camarades sont menacés, le10 janvier 2012, de peines de prison ferme.Relayée par l’Entente internationale destravailleurs et des peuples, la campagneinternationale pour la levée des poursuitesa commencé : signalons parmi les prisesde position, en France, le syndicat CGT del’INRA et la commission exécutive del’union départementale Force ouvrière deSeine-et-Marne ; dans le monde, l’Uniongénérale des travailleurs de Guadeloupe(UGTG), le Parti des travailleurs et de ladémocratie du Burundi, ou encore JohnMcDonnell, le chef de file des députés dela gauche du Labour Party de Grande-Bre-tagne. Pour recevoir le matériel de la cam-pagne, écrire au journal ou par e-mail :[email protected] y a urgence ! �

GRÈCE :Le nouveau gouvernement“convoqué” par la troïka

ChroniqueINTERNATIONALE

Grèce : arrêtdes poursuitesjudiciaires contreNikos Photopouloset ses camarades !

Dominique Ferré

Nous avons rendu comptede la campagne relayéepar l’Entente internationaledes travailleurs et des peuplespour l’arrêt des poursuites judi-ciaires contre Nikos Photopoulos,président du syndicat des tra-vailleurs de la compagnie grecqued’électricité GENOP-DEH,et quatorze de ses camarades.Expulsés violemment par la policedu central qu’ils occupaient,ils sont menacés de six mois à cinqans de prison pour avoir empêchéles coupures de courant électriquechez les familles ouvrières quine peuvent pas payer la nouvelletaxe exigée par la troïka (FMI-Commission européenne-BCE).Des dizaines d’instances syndi-cales ont d’ores et déjà faitconnaître leurs prises de positionau GENOP-DEH, ainsiqu’auxministres du Travail et de laJustice de Grèce.A la conférence internationaled’urgence contre les interventionset pour la souveraineté, à Alger,des dizaines de responsablessyndicaux, politiques, députésde nombreux pays ont pris posi-tion. C’est un encouragementà poursuivre la campagne. Il nousreste peu de temps : le gouverne-ment grec a reporté le jugementau 10 janvier.En tentant de frapper le syndicatGENOP-DEH, le gouvernementd’union nationale en Grècecherche à frapper tous les syndi-cats qui s’opposent aux plansbarbares dictés par la troïka.Comme le notait leNewYorkTimesen juillet dernier, « Genop repré-sente les salariés de l’entreprisepublique d’électricité (…).Le syndicat s’oppose fermementà la privatisation des servicespublics (…) prévue en 2012.(…) Les privatisations sont parti-culièrement mal perçues parune opinion publique qui craintune liquidation des biensde l’Etat et applaudit les initiativesde Genop et d’autres syndicats. »Permettre aux travailleursde disposer d’organisationssyndicales qui combattentpour les revendications, et refuserle talon de fer de la troïkacontre la démocratie : tels sontles enjeux de la campagne pourla levée de toutes les poursuitescontre nos camaradessyndicalistes grecs.

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> L’actualité internationale >>>INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011

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Depuis la grève gé-nérale des 19 et20 octobre derniers,comment a évoluéla situation poli-tique ?Malgré le change-ment de gouverne-ment, c’est la mêmepolitique qui conti-nue de s’appliquer,celle de l’Union euro-péenne, de la troïka.

Les syndicats appellent à une nouvellegrève générale demain. Nous combat-tons contre la politique du gouvernementPapademos qui applique la politique dela troïka.De nouvelles coupes de 1,7 milliard sontprogrammées dans l’Education natio-nale. Il faut savoir que le budget de l’Edu-cation ne représente que 2,7 % du budgetgénéral. C’est le plus faible.Les sondages indiquent que les Grecs sou-tiennent le nouveau gouvernement. C’estplus compliqué, mais il y a une campagnede terreur pour faire peur et certains voientdans ce nouveau gouvernement celui dela dernière chance.Les mesures qui découlent du plan euro-péen adopté le 26 octobre doivent êtremises en œuvre afin de bénéficier de lanouvelle tranche d’aide. De nouvellesmesures contre les travailleurs serontannoncées d’ici au 15 décembre, pour lemoment personne ne les connaît.

Quelle est la position du syndicat parrapport à la nouvelle taxe immobilièreprélevée sur les factures d’électricité ?Les unions locales du syndicat ont décidéde ne pas payer la nouvelle taxe.Les unions locales du syndicat parti-cipent aux assemblées locales, avec les

travailleurs dans les quartiers. Certainesmunicipalités participent également etprennent parfois en charge les factures.Pas un seul euro ne sera versé pour cettetaxe.Le gouvernement a dû exclure de la taxeles catégories de travailleurs les pluspauvres et les chômeurs.Cette taxe est illégale et anticonstitu-tionnelle. Une manifestation est prévuedevant le Conseil constitutionnel le2 décembre.

Quelle est la situation dans les syndi-cats ?Lors des élections dans les unions locales,Paske (la fraction du Pasok dans le syn-dicat—NDLR) a perdu 15 % de ses voix.

Quelles sont, selon toi, les perspec-tives politiques ?Le traité de Maastricht, le plan Merkeldétruisent tout. Il y a une conscience deplus en plus grande de l’absence dedémocratie en Europe. Ce sont des per-sonnes non élues qui décident pour nous.Il faut une coordination au plan euro-péen pour mettre en cause cette poli-tique.

Propos recueillis le 30 novembre 2011 �

Une nouvelle semaine cruciale

“Le traitéde Maastricht,le plan Merkeldétruisenttout.Il y a uneconsciencede plus enplus grandede l’absencede démocratieen Europe”

INTERVIEW

Hélène Zografaké-Telemè,membre du bureau exécutifdu syndicat des enseignants du secondaire (OLME)

Athènes, novembre 2011 : l’Acropoleest fermée pour cause de grève, lestouristes rebroussent chemin.

Page 5: 00 PAGE UNE 2 · 2011-12-15 · Toxo,Méndezetd’autresdirigeantssyn-dicauxontpubliéunarticledemandant «unnouveaucontratsocialeuropéen». Enas-tueuconnaissance? Jeleconnais

Dominique Ferré

Que se passe-t-il depuis une semaine en Russie,après l’annonce du résultat des élections législa-tives du 4 décembre qui ont vu le parti de Poutineet Medvedev perdre aumoins 15% des voix ?Comme d’habitude, ceux qui imposent la dicta-ture de la troïka enGrèce, et qui organisent de parlemonde les « guerres humanitaires » (Irak,Afgha-nistan, Libye…) n’ont pasmanqué de donner des« leçons de démocratie ».Ainsi, Catherine Ashton, chef de la diplomatie del’Union européenne, a exprimé ses « graves pré-

occupations », tandis que Hillary Clinton décré-tait que les élections en Russie n’avaient été « nilibres ni équitables ».Ce qu’ils expriment est relayé en Russie par « l’op-position libérale » qui estime que Poutine etMed-vedev ne s’ouvrent pas assez vite, non pas à ladémocratie,mais à « l’économie demarché ».Mais, comme le souligne notre correspondant,membre de la rédaction de Rabochie Izvestiya(Les nouvelles ouvrières), les protestationsmas-sives du 10 décembre ont surpris tout le monde,le pouvoir comme les « libéraux » et les « com-munistes ». �

“Qu’il y ait eu fraude électorale, c’est cer-tain, mais semble-t-il pas plus que lorsdes élections de 2007. Les résultats ne

reflètent pas la disposition réelle des forces dans lasociété, mais montrent que malgré lafraude “Russie unie” (le principal partidu Kremlin, dirigé par Poutine et Med-vedev) s’effondre. Le score des partisdit “de gauche” (Parti communiste dela Fédération de Russie, KPRF, et “Rus-sie juste”, un parti créé par le Krem-lin) augmente. Beaucoup de ceux quiont voté pour eux n’ont cependantaucune confiance dans leurs direc-tions, mais l’ont fait par esprit de pro-testation. Le taux de participation estde 60 % (3 % de moins qu’en 2007).En réalité, la participation réelle estmoindre.Personne ne s’attendait aux actions de protestationmassives après les élections. Une véritable paniques’est emparée des cercles du pouvoir. La police ad’abord eu comme consigne d’agir brutalement.Quand ces méthodes ont abouti au contraire de cequ’il attendait, le pouvoir a alors “remplacé le fouetpar le pain d’épice”, laissant les meetings servir dedéfouloir.Le 10 décembre à Moscou, on estime que 80 à100 000 personnes étaient réunies, du jamais vu

depuis les années 1990. L’impression de tous, c’estque les gens ne craignent plus de sortir dans la rue,même sous la menace des matraques policières, etc’est une bonne chose. La question maintenant,

c’est dans quelle direction va s’orien-ter cette énergie spontanée. La majo-rité écrasante des manifestants nesont pas des militants politiques. Il ya beaucoup de jeunes, étudiants etlycéens, mais aussi ceux qu’on appelleles “classes moyennes”, ainsi que desreprésentants de “l’élite”, essentiel-lement à Moscou.Des manifestations ont eu lieu dansenviron quatre-vingt villes de toute laRussie, y compris dans les grandscentres industriels (à titre d’exemple,il y avait de 2 à 3 000 manifestants à

Samara, de 1 500 à 2 000 àTogliatti). A l’origine, l’ini-tiative du meeting du 5 décembre a été prise par“l’opposition libérale”. Celle-ci tente d’utiliser lemouvement pour ses propres buts. La plupart deceux qui étaient sur la place Bolotnaïa le 10 décembrene se reconnaissent dans aucune force politique etparticipent sur la base d’aspirations démocratiquestrès générales : annulation des résultats, nouvellesélections, enquête sur les falsifications, démissiondu président de la commission électorale Tchou-rov. » �

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INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011

RUSSIE

Au lendemain des élections législatives

Les protestations massivesdu 10 décembreont surpris tout le monde

Monde

Jean-Pierre Barrois

Lundi 5 décembre, Enda Kenny, Premierministre irlandais, a rendu public un pre-mier volet de mesures inscrites dans lebudget 2012— le septième budget d’aus-térité en trois ans.Comme il l’avait annoncédans son « discours à la nation » prononcéla veille, l’objectif est d’aboutir à des coupesde l’ordre de 12,4milliards d’euros,aunomde la réduction de la dette.

Le 25 novembre, l’OCDE avait claire-ment indiqué les exigences des ins-titutions financières internationales

en recommandant, par la voix de John Mar-tin, le chef de son département Emploi, desréductions de salaires dans le secteur publicqui viendraient encore aggraver le plan gou-vernemental qui prévoit déjà la suppres-sion de 25 500 postes d’ici à 2015 dans unpays qui compte 300 000 fonctionnaires,c’est-à-dire près de 10 % de la force de tra-vail, la suppression de quarante projetslocaux de développement qui devaient setraduire par des créations d’emplois et unehausse de la TVA.Il convient d’ajouter que ce n’est pas vrai-ment au gouvernement irlandais que s’a-dressait l’OCDE, puisque c’est à Bruxellesque Dublin doit envoyer son projet de bud-get pour approbation préalable par la troïka(Union européenne, FMI, Banque centraleeuropéenne) avant publication.Selon le premier volet de mesures annon-cées le 5 décembre, les allocations fami-liales vont être considérablement réduitespour les familles de trois enfants et plus,ainsi que les indemnités de chauffage pourles personnes âgées et les allocations pourhandicapés devraient quasiment dispa-raître. Bref, comme le dit un député, il s’agitd’« un budget qui poursuit totalement lapolitique du gouvernement précédent en

capitulant devant les spéculateurs et lesmar-chés ». Ce qui amène le syndicat Mandateà « dénoncer la volonté du gouvernementqui s’en prend aux revenus les plus faibles ».A quelques jours de la présentation du bud-get, Shopfloor, le journal du syndicat Man-date, publiait un éditorial citant largementle secrétaire général, John Douglas : « A l’oc-casion du prochain budget, c’est pour ladéfense des intérêts des citoyens que le gou-vernement doit agir et nonpour les banquiersqui ontmis ce pays à genoux. Jusqu’à ce jour,le gouvernement nous a servilement admi-nistrés les remèdes de la troïka Union euro-péenne, FMI et BCE.Le projet de budget pour2012 coule de lamême fontaine. Il y a désor-mais 400 000 chômeurs dans ce pays que50 000 jeunes quittent chaque année.Ce gou-vernement a été élu pour protéger les intérêtsdes citoyens irlandais,pas ceux des banquiersétrangers et des spéculateurs. J’appelle tousles membres de Mandate à contacter leursdéputés qui vont devoir se prononcer sur lebudget endécembre afin de leur dire qu’il n’estpas question que nous subissions en silence. »Le premier volet de ce budget est mainte-nant public, avec le contenu et les consé-quences que l’on connaît. Les travailleursirlandais doivent-ils renoncer à leurs reven-dications et se laisser saigner au nom de laréduction d’une dette qui n’est pas la leur ?Une question d’autant plus brûlante qu’àl’heure où ces lignes sont écrites le gou-vernement irlandais vient d’approuver lesdispositions de la proposition Merkel-Sar-kozy qui accroissent la dictature de la troïkaet nient toute souveraineté nationale.Plus que jamais sont d’actualité les motsde la proclamation de la République d’Ir-lande signés en 1916 par James Connolly :« Nous proclamons le droit du peuple d’Ir-lande à la propriété de l’Irlande et au contrôlesans entraves de sa destinée ; le droit à êtresouverain et uni. » �

Septième plan d’austérité en trois ans

Les résultatsne reflètentpas la dispositionréelle des forcesdans la société.

Moscou,10 décembre,

De 80 à 100 000moscovites ont

participé aumeeting “pourdes élections

libres”, du jamaisvu depuis lesannées 1990.

IRLANDE

ITALIE > Dix-sept jours après la chute de Berlusconi

Premier acte de Monti au gouvernement :un quatrième plan de rigueur encore plus draconien

Lorenzo Varaldo

Seulement dix-sept jours après la chutede Berlusconi et l’arrivée de MarioMonti à la tête du gouvernement ita-

lien, un plan de rigueur d’une gravité excep-tionnelle a été approuvé par le nouveaugouvernement : augmentation de l’âge dedépart à la retraite ; augmentation de laTVAde deux points (Berlusconi l’avait déjà aug-mentée d’un point, entraînant une forteaugmentation des prix) ; réintroduction etdoublement de la taxe d’habitation ; coupesde 5 milliards dans le financement desrégions et des municipalités ayant pourconséquence des coupes dans les budgetsde la santé, de l’école, des services publics,alors que déjà des centaines d’hôpitaux ontété fermés ainsi que des milliers de services,que les écoles ne peuvent effectuer les tra-vaux nécessaires pour assurer la sécurité,que le prix des tickets de bus a été augmentédu 50 %. Il faut ajouter une augmentationdu prix de l’essence et un plan de privati-sation totale des services publics munici-paux et de l’Etat.Avant de présenter ce plan au Parlement,Monti est allé à Bruxelles pour le discuterdirectement avec les responsables del’Union européenne, desquels il a obtenule feu vert. Ce plan ainsi que les trois autresdécidés depuis le mois de juillet provoquentune aggravation des conditions de vie etune énorme diminution du pouvoir d’achat.Dans certains cas, on en revient à des formesde troc : des travailleurs cherchent parexemple à payer les avocats ou les méde-cins avec de vieux téléviseurs ou ordina-teurs.Dans le même temps, Monti décide, encou-ragé par la troïka, d’effacer ce qui reste de

la taxe IRAP, taxe payée par les capitalistes.Par ailleurs, il a décidé d’accorder aux capi-talistes 10 à 15 000 euros d’exonération pourchaque jeune ou femme embauché. Ce quireprésente plus ou moins un tiers du salaire !Il est clair que Monti a été placé là par latroïka pour remplacer Berlusconi qui nepouvait plus faire passer un nouveau planface à une possible explosion sociale.Rappelons que Monti a travaillé pour Gold-man Sachs, a été commissaire européen eta liquidé l’industrie italienne. Alors que leParti démocrate affirme qu’il faut « amé-liorer » le plan, les syndicats ont immédia-tement déclaré « s’opposer, parce que le plann’est pas équitable ». Ils n’ont pas demandéle retrait du plan mais son « changement ».Sur cette base, ils ont convoqué une grèvedu secteur privé pour le 12 décembre (detrois heures), et une autre pour la fonctionpublique le 19 décembre (d’une heure). Ilsont expliqué qu’il est « impossible de convo-quer la grève le même jour, parce qu’il y laloi antigrève qui nous impose un préavis dequinze jours pour les fonctionnaires ».Tout le monde s’interroge : pourquoi appe-ler à deux grèves distinctes ? Cela n’a-t-ilpas un rapport avec la signature par la direc-tion de la CGIL, en commun avec d’autresresponsables syndicaux européens, d’un« nouveau contrat social européen » visantà « défendre l’intérêt général » ?Pour sa part, le comité pour la constructiond’un parti des travailleurs a lancé une cam-pagne pour l’unité pour le retrait des plansde rigueur et propose la tenue d’une confé-rence de militants, travailleurs et syndica-listes pour aider à organiser la résistance.Dans les instances syndicales, des motionsposent la question du retrait du plan, en rap-port avec la défense des revendications. �

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INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 172 SEMAINE DU 27 OCTOBRE AU 2 NOVEMBRE 201112

Une conférence historiqueA Alger, les 11, 12 et 13 décembre, s’est tenue à l’appel du Parti des travailleurs d’Algérie et de l’UGTA la conférenceinternationale d’urgence contre les guerres d’occupation, l’ingérence dans les affaires des pays,pour la défense del’intégrité et de la souveraineté des nations.

Algérie

La presse algérienne a largement renducompte de la conférence d’urgence, notam-ment du rapport de Louisa Hanoune et de

la discussion qui s’en est suivie.Pour le quotidien L’Authentique (11 décembre),« en douze mois d’intervalles, Mme Hanoune, sou-tenue par l’UGTA, a réussi le pari d’organiser deuxévénements internationaux. Le premier ayant traità la huitième édition de la conférence internatio-nale ouverte contre la guerre et l’exploitation tenueen novembre 2010, et le second, qui n’est pas desmoindres, sur les guerres d’occupation et contre l’in-gérence qui s’est ouvert hier ».Pour le quotidien La Tribune (11 décembre), « laporte-parole du PT,Mme Louisa Hanoune, s’alarme :“somalisation”,“militarisation”,“afghanisation” sontautant de menaces qui guettent le monde aujour-d’hui. C’est ce qui ressort du discours prononcé àl’ouverture des travaux de la conférence interna-tionale d’urgence. »Le quotidien Le chiffre d’affaires (12 décembre)note : « “Le continent africain est ciblé par des in-terventions des grandes puissances pour sesrichesses et ses ressources naturelles” a estiméDialo Abdoulaye lors de son intervention au nomde l’organisation de l’unité syndicale africaine(OUSA) ».Pour Le Soir d’Algérie (12 décembre) : « DanielGluckstein : “Nous sommes en présence d’uneaction basée sur la terreur et le pillage menaçanttous les peuples” a ajouté le coordinateur de l’En-

tente internationale estimant qu’il est “légitimepour l’ensemble des peuples de s’organiser dansle but de contrer cette offensive” ».Et de citer aussi : « La vice-présidente du conseil dela nation, lamoudjahida (combattante de la guerred’indépendance — NDLR)Mme Bitat, a soulignéque la défense des richesses nationales passe par la

défense des indépendances et des souveraineté natio-nales. Or, a-t-elle dit, là n’est pas le programme desgrandes puissances. »Pour El Moudjahid (13 décembre) : « Le secrétairegénéral de l’UGTA a déploré hier à Alger l’attitudedu mouvement syndical mondial en indiquant :“Lemouvement syndical international a choisi defaire dans l’accompagnement et non pas dans larésistance.” »Le Courrier d’Algérie (13 décembre) note : « Lesparticipants ont en effet décidé de se constituer encomité permanant de veille, lequel comité aurapour mission de préparer la tenue d’un tribunalinternational de type Bertrand Russel (1) qui dres-sera un acte international d’accusation contre lesresponsables et fauteurs de guerre. »Revenant sur les informations données par la délé-gation américaine, avec, à sa tête, NancyWohl-forth, responsable à l’AFL-CIO, le quotidienHorizon (13 décembre) écrit : « La secrétaire géné-rale du Parti des travailleurs a affirmé que la délé-gation américaine qui a pris part à cette rencontrelui a révélé qu’un site émanant de l’administra-tion américaine aurait publié des informationsselon lesquelles les Américains s’apprêtent déjà àla préparation d’un conseil de transition pour l’Al-gérie. » �

(1) Bertrand Russell avait lancé, dans les années 1960, un tri-bunal international pour juger des crimes de guerre auViet-nam.

> L’actualité internationale >>>INFORMATIONS OUVRIÈRES N0 179 SEMAINE 15 AU 21 DECEMBRE 2011

L’introduction de Louisa Hanoune à la conférence,au nom du Parti des travailleurs et de l’UGTA (extraits)

Après avoir souligné la significationpour la régionetpour lemondede l’in-tervention en Libye,LouisaHanouneest revenue sur ses conséquences enAlgérie.

“En effet, les impacts sécu-ritaires de l’interventionen Libye s’ajoutent à un

chantage extérieur continu exercécontre elle par les gouvernements desgrandes puissances.Il est reproché à l’Algérie qui, par lepassé, a été saignée par la dette exté-rieure et a subi un PAS (plan d’ajuste-ment structurel — NDLR) qui a mas-sacré son potentiel économique, demettre en œuvre une politique socio-économique à contre-courant des poli-tiques meurtrières de rigueur appli-quées en Europe et aux Etats-Unis auprofit des banques et des entreprisesprivées.Il est reproché à notre pays, en effet,l’introduction de correctifs importantsdans l’orientation économique dont,notamment, la renationalisation deshydrocarbures en 2006 puis la res-tauration de la souveraineté de déci-sion économique à travers la LFC (loide finances complémentaire—NDLR)2009 et celle de 2010, l’injection d’im-portants investisse-ments publics dansla relance écono-mique, les augmen-tations des salaireset autres dépensessociales malgré lespressions du FMI,de la Banque mondiale, de l’Unioneuropéenne et des gouvernementsdes grandes puissances. Il lui est repro-ché d’avoir instauré la règle de 51-49(règle selon laquelle les investissementsétrangers en Algérie ne peuvent dépas-ser 49 % — NDLR) dans les contrats

de partenariat avec les étrangers, ledroit de préemption au profit de l’Etat,la préférence nationale, l’obligationpour les entreprises étrangères d’in-vestir une part de leurs bénéfices enAlgérie. (…)L’Algérie s’apprête à célébrer en 2012le cinquantenaire de son accession à

l’indépendancenationale. C’est, pournous, un événementtrès important, car lepeuple algérien apayé un lourd tributpour se libérer dujoug du colonialisme

puis pour préserver l’intégrité de lanation qui a été confrontée pendantplus d’une décennie à une guerre deterrorisme et de décomposition so-ciale, alimentée par le PAS imposé parle FMI et la Banquemondiale dans lesannées 1990. Une guerre qui a fauché

200 000 vies humaines et causé plusde 20 milliards de dollars de dégâtsmatériels nécessitant des efforts gigan-tesques pour reconstruire le pays.Et il est précisément reproché à l’Al-gérie de ne pas avoir sombré dans lechaos, d’avoir eu la force, puisant dansson histoire, de dégager une solutionnationale algérienne à la crise pourrestaurer la paix sans ingérence externeet donc en préservant la souveraineténationale et l’intégrité du pays. (…)Dans ce cadre, par-delà la position dechacun sur la nature de tel ou telrégime, nous réaffirmons ici que c’estaux peuples seuls d’imposer les chan-gements conformes à leurs aspira-tions, de définir les moyens d’yparvenir, car les révolutions et leschangements importés de l’extérieur,concoctés par les centres impérialistes,procèdent de la contre-révolution etde la destruction des nations. �

Urgence

Lucien Gauthier

Durant trois jours, les 10, 11 et12 décembre, s’est tenue à Algerla « Conférence internationaled’urgence contre les guerres d’occu-pation, l’ingérence dans les affairesdes pays, pour la défensede l’intégrité et de la souverainetédes nations », à l’appel du Partides travailleurs et de l’Uniongénérale des travailleurs algériens.Plusieurs centaines de participants,venus dumonde entier, étaientprésents, et tout d’abord de la régiondirectement concernée par la guerredestructrice en Libye.C’est ainsi qu’étaient présentsdes délégués d’Algérie, de Libye,de Tunisie, duMaroc, duMali,de Mauritanie, du Niger, du Tchad,et également d’Egypte,mais égale-ment du Bahreïn, du Liban,de Palestine et de Turquie.Ils étaient très nombreux venusde tout le continent africain :Afrique du Sud, Bénin, Burkina Faso,Burundi, Cameroun, Centre-Afrique,Côte d’Ivoire, Gabon,Guinée,Ile Maurice, Sénégal,Togo,et Somalie— pays qui, depuisl’intervention « humanitaire »des grandes puissances il y a vingtans, est déchiré par la guerre civile.Venues de France, d’Espagne,d’Italie, du Portugal, de Suède,mais également de Russie et de Ser-bie, des délégations d’Europeet des Etats-Unis matérialisaientle combat contre l’interventionen Libye de leurs propres gouverne-ments.D’Afghanistan, ils étaient venuspour expliquer les conséquencesde la guerre.Mais également d’Haïti, occupéepar la Minustah, et du Brésil ainsique duVenezuela, pour dénoncercette occupation.C’est là un très grand succès.Rappelons en effet que cette confé-rence d’urgence a été convoquéeil y amoins de deuxmois parla secrétaire générale du Partides travailleurs d’Algérie, LouisaHanoune, et le secrétaire généralde l’UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd.Un succès dont l’ampleur n’a paséchappé à la presse radiophonique,télévisuelle et écrite d’Algérie,qui en a largement rendu comptedurant trois jours.On lira ci-contre les décisionsadoptées par cette conférence.

Extraits dela déclaration finale1. Préparer la tenue d’un tri-bunal international de typeBertrand Russel pour, sur labase des faits, dresser unacte international d’accusa-tion contre les responsableset les fauteurs de guerred’occupation-pillage, de des-truction des nations.

2. Coordonner l’action unieet réagir ensemble pour ladéfense de l’intégrité et dela souveraineté des nations.

3. Organiser la mobilisationunie contre la guerre et pourque les budgets de guerresoient utilisés pour le déve-loppement socio-écono-mique, pour la santé, l’ins-truction, pour combattre lamisère et la famine qui sepropagent dans le monde.

4. Organiser la mobilisationunie contre les plans meur-triers du FMI, de la Banquemondiale, de l’Union euro-péenne, etc., contre le dik-tat des déficits budgétairesutilisé en Europe pour impo-ser aux travailleurs et auxpeuples des plans d’ajuste-ment structurel assassins,la destruction des droits etdes acquis sociaux. �

Il est reprochéà l’Algérie de ne pas avoirsombré dans le chaos (...),de dégager une solutionalgérienne à la crise.