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Avertissement par Alain Bergala ......................................... 3 L’Esprit de la ruche de Víctor Erice Espagne, 1973, 95 min ......................................................... 5 Le film, ainsi que les chapitres, sont présentés en version originale non sous-titrée, sous-titrée espagnol ou sous-titrée français, au choix. Le ravissement d’Ana par Jean-Philippe Tessé ................. 11 Jean-Philippe Tessé analyse le film de Víctor Erice et le resitue dans le contexte de l’œuvre et de la personnalité du cinéaste. Contrechamp sur Víctor Erice d’Alain Bergala France, 2008, 31 min ...........................................................15 Lors d’une récente rencontre à Madrid, Alain Bergala interroge Víctor Erice sur le tournage de L’Esprit de la ruche. À travers cette conversation, il aborde avec le cinéaste sa conception du mythe de Frankenstein, de la censure franquiste, de la mise en scène, de la direction d’acteurs, du monde… Le Petit Bruit de la caméra dans le fracas de la Guerre d’Espagne de Sophie Le Merdy France, 2008, 29 min .......................................................... 19 À l’aide d’images d’archives et d’extraits de films, la réalisatrice trace un portrait de l’Espagne et de ses relations au cinéma, depuis le début de la guerre civile et l’arrivée au pouvoir de Franco, jusqu’à la fin de cette dictature qui dura trente-sept années. Portfolio .......................................................................... 27 L’ESPRIT DE LA RUCHE 1 Sommaire

01 Livret Esprit BAT 2...préparatifs et avertissement [2’25] Les villageois arrivent dans la salle des fêtes, chacun apportant son siège. Les enfants se placent devant… À l’entrée,

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Avertissement par Alain Bergala ......................................... 3

L’Esprit de la ruche de Víctor EriceEspagne, 1973, 95 min ......................................................... 5Le film, ainsi que les chapitres, sont présentés en version originale nonsous-titrée, sous-titrée espagnol ou sous-titrée français, au choix.

Le ravissement d’Ana par Jean-Philippe Tessé ................. 11Jean-Philippe Tessé analyse le film de Víctor Erice et le resitue dans lecontexte de l’œuvre et de la personnalité du cinéaste.

Contrechamp sur Víctor Erice d’Alain BergalaFrance, 2008, 31 min ...........................................................15Lors d’une récente rencontre à Madrid,Alain Bergala interroge Víctor Erice sur le tournage de L’Esprit de la ruche.À travers cette conversation, il aborde avec le cinéaste sa conception dumythe de Frankenstein, de la censure franquiste, de la mise en scène, dela direction d’acteurs, du monde…

Le Petit Bruit de la caméra dans le fracas

de la Guerre d’Espagne de Sophie Le MerdyFrance, 2008, 29 min .......................................................... 19À l’aide d’images d’archives et d’extraits de films, la réalisatrice traceun portrait de l’Espagne et de ses relations au cinéma, depuis le débutde la guerre civile et l’arrivée au pouvoir de Franco, jusqu’à la fin decette dictature qui dura trente-sept années.

Portfolio .......................................................................... 27

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Sommaire

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Ana (Ana Torrent) s’enfuit devant son père.Photogramme extrait de la séquence : « La fuite d’Ana ».

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Depuis le début de cette collection, c’était pour nous une évi-dence que L’Esprit de la ruche y était indispensable et prioritaire,l’un des films les plus beaux et les plus justes de l’histoire ducinéma sur un personnage d’enfant et sa perception du monde. Lapetite Ana, avec sa grâce fragile et sa détermination têtue, y est lemédium idéal des mystères et des croyances de l’enfance. Le filml’approche avec la plus grande délicatesse, sans jamais surexposerce qui doit rester protégé du sanctuaire de l’enfance que consti-tuent son visage blanc et son regard noir où le monde s’engouffre.Ce monde qui l’entoure, l’Espagne de 1940, correspond à celuide l’enfance du cinéaste, avec tout le poids de l’histoire proche ettragique de la guerre civile, même dans ce petit village apparem-ment isolé, mais le film ne nous en dit pas plus que ce qu’en vit eten comprend Ana dans son imaginaire bouleversé dès la premièrescène par une projection ambulante de Frankenstein.Ana est interprétée par une petite fille découverte par VíctorErice,Ana Torrent, que Carlos Saura allait engager deux ans plustard dans Cria cuervos. Le travail d’acteur engagé par le cinéasteavec cette petite fille est proche, souvent, de celui entrepris par

Jacques Doillon dans Ponette, dont rend compte le film JouerPonette de Jeanne Crépeau, inclus dans notre DVD sur L’Acteurau cinéma.Nous avons demandé à Jean-Philippe Tessé, fin et sensibleconnaisseur de l’œuvre de Víctor Erice, d’écrire un texte dans celivret pour situer ce cinéaste rare et singulier, nous aider à sentirce qui fait lien entre ses films, et nous faire partager sa perceptionde L’Esprit de la ruche.Pour approcher ce film en situation pédagogique, il nous a sembléindispensable de proposer dans le DVD un documentaire, réalisé àcette occasion par Sophie Le Merdy, sur la guerre civile espagnoleet sur les années de plomb du franquisme qui lui ont succédé. Cefilm, Le Petit Bruit de la caméra dans le fracas de la Guerre d’Espagne,met en rapport la grande histoire tragique de cette période et unepetite histoire, parallèle, celle de la façon dont le cinéma l’a accompagnée. Les enseignants y trouveront de précieux docu-ments filmés, ainsi que des extraits de films de fiction, nombreuxet exemplaires, pour approcher avec leurs élèves la Guerre d’Espagne et plusieurs décennies de franquisme.

Avertissementpar Alain Bergala

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J’ai moi-même réalisé pour ce DVD, à Madrid, un long entretienavec Víctor Erice où il nous parle de la genèse de ce premier film,mais aussi de ses convictions en matière de cinéma, de sa visionpersonnelle de ce film et de ses personnages, et de l’environne-ment dans lequel il a été conçu et réalisé.Le portfolio, rassemblé par Mélanie Gérin et Manuela Marques,propose des photos de tournage du film, des photos des autresfilms de Víctor Erice et de Frankenstein, des photos de la Guerred’Espagne, des figurations artistiques de l’enfance, des images dontla scénographie est proche de celle de plans du film, et quelquesœuvres consacrées aux thèmes des tableaux présents dans le film :saint Jérôme, saint Joseph.Ce DVD est le fruit d’une précieuse collaboration avec CarlottaFilms qui a entrepris la ressortie en DVD et en salle, en France,des trois longs métrages de Víctor Erice. Nous les en remercions.

A.B.

Ana près de la grange abandonnée.Photogramme extrait de la séquence : « Ana cherche ».

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Titre original : El Espíritu de la colmenaRéalisation :Víctor EriceScénario :Víctor Erice,Angel Fernándo SantosImage : Luís CuadratoSon : Luís RodríguezMusique : Luís del PabloMontage : Pablo Gonzáles del AmoScript : Francisco T. QuerejetaDécor : Adolfo CofiñoPhotographe de plateau : Laureano LópezProduction : Elias Querejeta, pour S. Film - Pablo NuñezDistribution : Carlotta FilmsInterprétation :Ana Torrent (Ana), Isabel Tellería (Isabel), FernandoFernán Gómez (Fernando),Teresa Gimpera (Teresa), Queti de laCámara (Milagros), José Villasante (la créature de Frankenstein),Lali Soldevila (Doña Lucia, l’institutrice), Miquel Picazo (lemédecin), Estanis González (le garde civil) Juan Margallo (lefugitif).

Le film comporte des extraits du film Frankenstein de James Whale(États-Unis, 1931).

RésuméDans les années 1940, la petite Ana vit dans un village de Castilleentre son père Fernando, absorbé par sa passion pour l’apiculture,sa mère, la rêveuse Teresa, et sa sœur aînée, Isabel, quand un tour-neur vient projeter Frankenstein dans la salle des fêtes.Ana est trèsimpressionnée par la créature meurtrière créée par le savant. Isabellui raconte que c’est un esprit que l’on peut invoquer si on estson amie.Après une rencontre avec un soldat fugitif, réfugié dansune grange abandonnée, la fillette va fuguer dans les bois et ytrouver l’esprit.

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L’Esprit de la rucheVíctor Erice, Espagne, 1973, couleurs, 95 min.

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Séquences

Générique [1’25]Le générique s’inscrit sur des dessins d’en-fants et se termine sur celui d’un écran decinéma. Une phrase apparaît : « Il était unefois », qui se prolonge au plan suivant par :

La joyeuse arrivée du tourneur [2’15]« Quelque part en Castille, vers 1940. »Brinquebalant, un vieux camion bâchéentre dans le petit village de Hoyuelos, oùl’escorte une bande d’enfants, hurlant :« Le film est arrivé ! »Des hommes descendent les bobines. Letourneur explique à la jeune troupe quec’est un film magnifique, mais refuse deleur en révéler plus.Puis la garde-champêtre, s’accompagnantde sa trompe, annonce qu’aura lieu dans lasalle des fêtes de la mairie la projection deDr Frankenstein.

La séance :préparatifs et avertissement [2’25]Les villageois arrivent dans la salle desfêtes, chacun apportant son siège. Lesenfants se placent devant… À l’entrée,Tomasi, le tourneur, encaisse l’argent de laséance et répète « c’est une splendeur ».Une femme apporte un brasier. Oncharge le projecteur 35 mm. Le noir sefait. Sur l’écran, un prologue a étérajouté : un homme en habit présente aupublic (composé essentiellement defemmes et d’enfants) l’histoire du docteurFrankenstein, qui tenta de créer une créa-ture humaine, faisant par là ce que seulDieu peut faire. Les enfants (parmi les-quels deux sœurs, la brune Ana et lablonde Isabel) sont fascinés. L’homme enhabit exhorte le public, quels que soientses sentiments, à ne pas prendre cette his-toire trop au sérieux.

L’apiculteur et l’épistolière [4’25]Protégé de pied en cap et masqué, un api-culteur (Fernando) s’occupe de ses ruches,

les enfumant, sortant les cadres aux cel-lules couvertes de miel, sur lesquelsgrouillent les abeilles. Sur son image, onentend la voix de Teresa lisant une lettre.On découvre la jeune femme en traind’écrire, assise à son bureau.La lettre, écrite à un destinataire inconnu,parle de la famille (Fernando et les filles)qui essaye de survivre ici, de la séparationdue à la guerre, de l’espoir des retrou-vailles, du monde détruit qui entoureTeresa, de l’amour.Teresa part à la gare à bicyclette et postesa missive dans une boîte aux lettres accro-chée au flanc du wagon d’un train quirepart. Par la fenêtre du train, rempli desoldats,Teresa échange un regard avec unjeune homme.

Fernando et Frankenstein [5’35]Fernando fait sonner dans ses mains gan-tées sa montre de gousset en argent. Puis,se démasquant, il abandonne ses ruches etrentre. Le dialogue du film sourd à travers lacloison de la salle des fêtes dans la rue

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calme du village, tout à ses occupationsrurales. « Il me comprend » dit le savant doc-teur Frankenstein, parlant sans doute de sacréature. Fernando regarde l’affiche du filmplacardée à l’extérieur de la salle [1’50].De retour dans la grande maison vide,accueilli joyeusement par son chien,Fernando cherche Teresa et demande àMilagros, la gouvernante, qui nourrit lespoules à l’arrière de la maison, où est lereste de la famille. Les filles sont aucinéma,Teresa est sortie. Fernando a faimet se fait rabrouer par Milagros qui luienjoint de « descendre de ses nuages » etmanger à l’heure des repas.L’homme et son chien sont maintenantdans le bureau où le dialogue du filmvient retentir encore (« Le cerveau volé dansmon bureau était celui d’un criminel » dit lesavant). Fernando s’est approché de lafenêtre dont le vitrage doré semblealvéolé. [3’45]

Ana, Maria et le monstre :le savoir d’Isabel [3’25]Dans la salle, les enfants sont fascinés parla scène où la petite Maria [Mary] joueprès de la rivière. Rejointe par la créature,l’enfant lui offre des fleurs, lui parle genti-ment. Sur leur siège, Ana et Isabel sonttendues. Dehors, Teresa rentre en bicy-clette, pendant que le dialogue du film faitcomprendre qu’on cherche Maria. Surl’écran, le père de celle-ci marche, portantla dépouille de sa fille. « Pourquoi l’a-t-iltuée ? » chuchote Ana. « Je te le dirai tout àl’heure » répond Isabel.

Présence de l’esprit,transparence de la ruche [9’40]Les petites rentrent joyeusement à la mai-son. La prière du soir, dite par une voixenfantine, accompagne l’extinction deslumières. Mais Ana et Isabel ont vite faitde rallumer leur bougie. Dans leurs litsjumeaux, elles discutent. Ana veut savoir.Isabel se tait, puis lâche à sa sœur que lacréature n’a pas tué, n’est pas morte, car au

cinéma tout est faux. Est-ce un fantôme?Non, un espr it, et en tant que tel,dépourvu de corps. Pour bousculer lescepticisme de la petite (« s’il ne sort que lanuit comment lui parles-tu ? ») Isabel affirmeque si on est en amitié avec l’esprit, il suf-fit pour le voir, de l’appeler : « SoyAna/C’est moi,Ana. »À côté, Fernando arpente son bureau,dans lequel se trouve une ruche de verre.Il écoute, casque sur les oreilles, son émet-teur morse, fume, se fait du café, jette surson cahier quelques observations sur laruche transparente et l’agitation desabeilles, va observer ses filles.Le matin trouve l’apiculteur endormi à satable. Seule dans son lit, Teresa estréveillée, mais ferme obstinément les yeuxpendant que son mari va et vient dans lachambre.

Les yeux de Don José [4’]En blouses gr ises, roses, blanches, lespetites filles vont rejoindre la classe deDoña Lucia.Après la récitation de mathé-

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matiques, c’est la leçon de sciences : l’ins-titutrice fait équiper par ses élèves le corpsdépourvu d’organes du mannequin DonJosé. Le voilà muni d’un cœur, de pou-mons, d’un estomac… C’est à Ana querevient la tâche de doter d’une paired’yeux noirs le silencieux José. « Don Josépeut nous voir maintenant » dit la maîtresse.

Ana cherche [5’50]Après l’école, Ana et Isabel contemplentune grange qui s’inscrit au loin dans unpaysage aride de champs à perte de vue.Elles portent encore blouse et cartables.C’est là qu’« il » vit, annonce Isabel. Lesfillettes courent vers la bâtisse abandon-née, tuiles cassées, portes béantes. À droiteun puits sur lequel se penche Isabel, pen-dant qu’Ana se fige. Les voilà reparties.Ana revient seule sur ses pas, se penche àson tour sur le puits, cr ie, envoie uncaillou, s’introduit un peu dans l’obscuritéde la grange puis, dehors, repère uneénorme empreinte de pas dans laquelleelle place son pied.

Dans leur chambre, les filles discutent enjouant aux ombres chinoises. Isabel amenti à Teresa, lui disant qu’Ana était res-tée cet après-midi à l’école. « Tu es retour-née au puits ? – Oui. – Tu l’as vu ? –Non,dit Ana. » La présence de Fernando les faitéteindre rapidement la bougie.

La leçon de champignons [3’40]Fernando emmène ses filles à la cueillettedes champignons, comme le faisait songrand-père avec lui. Dans le petit boisclairsemé, le père enseigne tranquillementà ses filles tout ce qu’il faut savoir. Il n’endemeure pas moins que le plus vénéneuxdes champignons, sauvagement foulé aupied par Fernando, était pour Ana « celuiqui sentait bon ». Au loin, le père leurmontre une sorte d’éden des champi-gnons, où poussent les meilleurs, mais quiest trop lointain pour pouvoir y aller. Ildemande aux fillettes de ne rien dire àleur mère.

Quand le chat n’est pas là… [3’15]Fernando est parti en carriole de bonmatin. Les filles font les folles dans leurchambre jusqu’à ce que Milagros, arméed’un balai, vienne y mettre bon ordre. Lasalle de bains est aussi une occasion de rireet de jeu,Ana ayant subtilisé le blaireau deson père. Plus tard, quand Teresa la coiffe, lapetite fille essaye d’interroger sa mère surles esprits, qu’elle connaît, elle. Mais Teresane rentre pas dans son jeu et répond bana-lement que l’esprit est méchant avec lesenfants mauvais, et bon avec les gentils.Anaest-elle sage? Oui. La séance se termine parun câlin entre mère et fille.

Affronter le train [1’10]La voie de chemin de fer est déserte.Anaet Isabel posent leur tête sur le rail pourentendre l’approche de la locomotive.Quand cela se produit, Isabel se lève ets’éloigne alors qu’Ana semble tétanisée. Sasœur l’appelle, fort. Le train passe bruyam-ment devant les deux fillettes.

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Sonatine du temps passé [3’10]Le chat se repose. Pendant que Teresa pia-note sur le clavier, Ana regarde un albumde photos de famille, et y découvre samère jeune, son père, ses amis, les grands-parents… Une photo de Teresa est dédi-cacée à « son cher misanthrope ». Teresaferme le piano et sort.

Les observations d’Isabel [11’]Teresa s’éloigne en vélo. C’est l’heure de la sieste. Dans le silence du bureau deFernando, Ana regarde la ruche de verrepuis le tube de maille d’acier suspendu lelong de la fenêtre, dans lequel montent etdescendent des abeilles prisonnières.Pendant ce temps, sur son lit, Isabel s’estréveillée et a attrapé le chat. Elle étrangleméthodiquement l’animal qui finit pars’échapper en la griffant. La fillette suceson sang puis s’en maquille les lèvresdevant un petit miroir.Assise au bureau de son père, Ana tapelaborieusement à la machine quand elleentend un cri. Isabel gît inerte devant une

fenêtre ouverte. À terre, un pot de fleurcassé. Ana essaye en vain de ranimer sasœur, l’appelle, se blottit contre elle. Au-dehors, le chien aboie. Ana referme lafenêtre ouverte et rassure Isabel : « Il estparti. » Affolée elle sort appeler Milagros,mais tout est désert. À son retour, lachambre est vide. Cachée derr ière lapetite, Isabel vêtue de la blouse de sonpère saisit soudain Ana à la gorge avec lesgants d’apiculteur de Fernando. La fillettese retourne terrorisée. Isabel rit.

Ana et le feu de joie [3’25]Dans une friche au centre du village, Isa-bel et ses amies s’amusent à courir autourd’un feu de joie et à sauter à travers sesflammes. Ana les fixe, assise sur un vieuxcadre de ruche. La nuit tombée, Teresarentre sur son vélo. L’enfant est toujourslà, seule devant les vestiges du feu quis’éteint. Milagros vient doucement laramener à la maison.Plus tard Ana, en chemise de nuit, noue leslacets de ses chaussures, prend sa cape et

sort en silence dans le jardin plein d’ombresmouvantes. Elle fixe une trouée lumineusedu ciel nocturne, ferme les yeux.

Le soldat [2’20]Un train passe. Un homme saute d’un deswagons et roule sur le remblai. Il se relève,la cheville en sang. Barbu, vêtu d’unecapote militaire, une besace aux côtés, lesoldat fugitif boitille jusqu’à la grangeabandonnée. Ana rejoint sa chambre aupetit matin et se recouche. Isabel interrogesa sœur, mais elle ferme les yeux.

Le dialogue silencieux [3’30]Dans la grange, le soldat dort, têteappuyée sur sa besace.Ana debout dans sablouse d’écolière le regarde, puis se dissi-mule. Il se réveille, saisit une arme. Anarevient et sort de sa mallette rouge unepomme qu’elle lui offre. Plus tard, l’enfantrapporte au soldat du miel, de la nourri-ture et la veste de son père. Le jeunehomme y trouve la montre qu’il fait son-ner pendant qu’Ana lui noue ses lacets. Ils

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n’échangent pas une parole, mais un tourde passe-passe fait sourire l’enfant. Elles’éloigne. La nuit venue, des coups de feuilluminent la grange.

La montre de Fernando [4’15]Fernando se rend en mairie puis, escortépar la guardia, va à la salle des fêtes ou lecadavre du soldat repose sous l’écran. Il nele connaît pas. Le maire lui rend sa veste,ses chaussures, sa montre.Pendant le petit-déjeuner, servi par Mila-gros, chacun reste silencieux. Fernandofume. Isabel rit et tousse dans son bol. Lamontre du père retentit. Ana échange unlong regard avec son père.

La fuite d’Ana [3’25]Ana court jusqu’à la grange maintenantdéserte et y trouve des traces ensanglan-tées. Soudain, elle se trouve face à Fer-nando, qui l’appelle.Ana tourne les talonset fuit à travers champs.Teresa et Isabel l’appellent pour qu’elle lesentende même de très loin. Silence.

Plus tard dans l’obscurité, on mène unebattue, avec torches et chiens, pour laretrouver. Mais Ana se trouve seule à tra-vers bois.

La rencontre [4’35]Ana erre dans le bois aux champignons,s’approche d’une des plantes mortelles.À la maison,Teresa relit une lettre qu’ellelivre ensuite aux flammes de la cheminée.On y distingue à peine la destination :« Nice, France ».Dans le bois,Ana, environnée de feux fol-lets, se mire dans l’eau d’un étang quand yapparaît le reflet déformé de la créature dudocteur Frankenstein.Ana se retourne.L’es-prit est là en chair et en os. Il s’approche,s’agenouille, avance des mains menaçantes.L’enfant défaille. Noir.

Retour dans la ruche [6’55]Au matin, le chien de Fernando découvreAna étendue en plein champ, au pied d’unmur, et alerte les hommes.À la maison Miguel, le médecin, rassure

Teresa sur l’état de choc de sa fille, lui pro-met qu’elle oubliera peu à peu. L’essentiel,dit-il en insistant, est qu’elle est vivante. Ilexhorte la jeune femme à se reposer elleaussi, donne son ordonnance, fait sesrecommandations.Isabel entre dans leur chambre où l’on aenlevé son matelas. Elle s’approche de sasœur, la regarde longuement.Les vitres alvéolées du bureau de Fer-nando s’illuminent. La silhouette del’homme va et vient, on l’entend dire sesobservations. Plus tard, il s’est endormi.Teresa vient doucement le recouvrir, reti-rer cahier et lunettes, éteindre la lampe àpétrole.

C’est moi,Ana [4’20]Dans la nuit,Ana boit longuement puis selève et va ouvrir la porte-fenêtre. Onentend les aboiements. La fillette regardele ciel. Si tu es son amie, tu peux lui par-ler… « Soy Ana/C’est moi,Ana » dit-elle.Générique de fin.

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L’œuvre de Víctor Erice est une île dans un cinéma espagnol enperpétuelle crise d’identité. Elle y fait figure de poste avancé,adossée à une modernité en quelque sorte adulte, délestée de touteffet de façade, hors des genres et des modes. Moderne et inac-tuelle ? C’est dans ce paradoxe – qui n’est qu’apparent – que setient le cinéma d’Erice, œuvre insulaire aussi par sa rareté : troislongs métrages en trente-cinq ans, à quoi s’ajoutent une partici-pation à un film collectif (Los Desafíos, en 1969), une poignée decourts métrages et, depuis quelques années, avec de petites camé-ras et sous des formes courtes, un travail à la lisière du cinéma,voire hors les murs, dans la foulée de sa correspondance vidéoavec le cinéaste iranien Abbas Kiarostami, consacrée par uneexposition et plusieurs installations.Trois longs métrages, tirés d’inspirations diverses : L’Esprit de laruche en 1973, scénario original, met en scène une fillette, Ana,perturbée par la vision d’un film, Frankenstein ; Le Sud (El Sur) en1983, adaptation d’un roman d’Adelaida García Morales (d’unepartie tout au moins), a, comme son prédécesseur, une petite fillepour héroïne, Estrella, fascinée par un père lointain semblant

absorbé par des regrets, aspiré par un ailleurs protéiforme (le Sud,le cinéma, le passé) ; Le Songe de la lumière en 1992, documentairesur le peintre espagnol Antonio López, qu’Erice filme pour l’es-sentiel chez lui, dans sa cour où il s’évertue à fixer sur la toile lalumière automnale heurtant la peau jaune des coings.Trois films,un tous les dix ans, c’est peu. C’est le prix d’une exigence etd’une précaution à filmer, qui se repère également dans lesimages, et la manière de les fabriquer. Sur le plateau de L’Esprit dela ruche, Erice avait ainsi demandé à chaque personne présente deparler à voix basse, et de se comporter comme si Frankenstein,« l’esprit », existait vraiment, parce que la petite actrice,Ana Tor-rent, croyait fermement à la possibilité de son apparition, et quetoute apparition magique n’advient que dans l’écrin d’un halo desilence et de quiétude.La précaution et la douceur, et pourtant les films d’Erice frap-pent par leur mélancolie, comme si un sentiment proche dudésarroi les parcourait. C’est qu’ils enregistrent, chacun à leurmanière, un affect douloureux : une séparation, toujours, unemise à distance. Celle-ci revêt plusieurs formes, prend divers

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Le ravissement d’Anapar Jean-Philippe Tessé

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costumes, oppose différents termes, mais sous l’impermanencedes circonstances, elle demeure le constant moteur des films,leur invariante dynamique. Quelle distance ? C’est à chaque foisle cœur du film. Dans L’Esprit de la ruche, Erice revient sur sapropre expérience de spectateur, et sa découverte du cinéma :en se glissant, alors qu’il était enfant, dans une salle obscure, lefutur cinéaste avait mesuré, ébloui, quelle distance immatériellele séparait des chimères de l’écran. La petite Ana, bouche béedevant la projection de Frankenstein, paie le prix fort d’uneexpérience similaire, ne parvenant plus à faire la distinctionentre le monde des spectres et le monde sensible, noyée dansl’entre-deux flottant des illusions. À travers la folie d’Ana, Ericepose la question des sensations premières et de leur irrépressibleéloignement, de la difficulté qu’il y a à les reporter dans le pré-sent, et comment elles n’offrent désormais que leur écume. LeSud est également une fable de la perte et de la distance :Estrella s’éveille au moment où son père est déjà parti. Être ici,dans le nord de l’Espagne, dans une maison familiale, dans leprésent de l’enfance, c’est toujours être loin. Loin du Sud,comme le père est lui-même loin de son passé, d’un amour dejeunesse dont il se rapproche, lui aussi, en contemplant l’agita-tion lumineuse d’un écran de cinéma. Le Songe de la lumière,enfin, est une méditation sur le cinéma et la peinture, sur lamanière dont l’un et l’autre appréhendent la nature. Face aupinceau précis d’Antonio López, Erice enregistre l’incompres-

sible écart qui maintient le cinéma dans une périphérie atmo-sphérique, la caméra mystérieusement plus éloignée des choses àmesure qu’elle s’en approche – puissante impuissance du cinémaà n’être rien d’autre qu’un simulacre ; impuissante puissance ducinéma à s’offrir pourtant le luxe d’une proximité intime avec leréel.L’originalité du cinéma d’Erice – sa modernité inactuelle – c’estde figurer ces paradoxes dans la poudre lumineuse d’un projec-teur : le fantastique, chez lui, est plus qu’ailleurs proche desconditions mêmes de la fabrication du cinéma. Si le motif de laprojection et du rayon lumineux revient si fréquemment chezlui – la séance de Frankenstein dans L’Esprit de la ruche ; Estrellaespionnant son père l’œil collé à la serrure d’où s’échappe untrait de lumière, puis le père, dans ce même film, perdu dans sarêverie au-dessous du faisceau craché par le projecteur d’unesalle de cinéma ; les projecteurs braqués sur les fruits au pied del’arbre, dans Le Songe de la lumière – c’est que, pour le cinéaste,l’affaire du rapport entre le cinéma et le monde n’est pas réglée.S’il relève la disposition magique et la disponibilité au mer-veilleux et à l’enchantement du cinéma,Víctor Erice n’hésitepas à en signaler le péril : ce que nous fait la lumière artificielledu cinéma – l’œil est-il blessé ou caressé par elle ? Il faut médi-ter sans cesse cette phrase prononcée par le cinéaste à propos duSonge de la lumière, lorsqu’il émet l’hypothèse selon laquelle lesprojecteurs qu’il utilisait sur le plateau ont accéléré le mûrisse-

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ment des coings que López s’échinait à peindre, jusqu’à ce quele peintre soit obligé de renoncer à en saisir l’éclat : comme il apourri les fruits, « le cinéma pourrit le naturel ».C’est justement la réflexion à quoi nous amène L’Esprit de la ruche :qu’est-ce que c’est, être saisi par le cinéma? C’est être ravi, à tous lessens du terme. Ravi, étourdi et enchanté par l’abandon aux puis-sances des chimères, à l’envoûtement des spectres : être serré, aubord d’une rivière, par les bras forts de l’Esprit, de ce Frankensteinsorti de l’écran, soudain épais de cette épaisseur dont la surfaceplane de l’écran prive les corps. C’est être aussi ravi, enlevé, kid-nappé : entourée par les paumes de Frankenstein,Ana s’arrache aumonde, à celui de sa sœur qui malgré elle lui avait murmuré lafatale formule magique, à celui de ses parents, prisonniers du passé.Le ravissement d’Ana, porté à incandescence dans l’extraordinairescène de la rivière, où le visage de l’enfant est transfiguré dans lereflet de l’eau sombre, est, dès le premier long métrage du cinéaste,le point d’achèvement de toute son œuvre. Chaque scène etchaque film devront en repasser par cette scène d’envoûtement etde possession, ce nœud par où s’écoulent les principes de l’art eri-céen, autant que la matière même des films et les choix formels quiy sont opérés – en premier lieu le fondu enchaîné, figure de stylematricielle où se réitère presque charnellement la mise à distance,puisque ce type de raccord marque autant la séparation (dans letemps, l’espace ou le champ symbolique) qu’il consacre l’opérationmagique d’une fusion aussi ensorcelante qu’illusoire.

La fusion magique et inquiétante qui s’opère dans l’esprit per-turbé de la petite Ana entre « le réel et son double », pourreprendre le titre d’un essai de Clément Rosser, c’est-à-dire entrela peau du monde et le manteau que le cinéma confectionne etqui se colle à lui, est l’énigme que Víctor Erice résout figurative-ment dans la scène de la rivière. Nulle condamnation du rêve,cependant, dans une œuvre qui regorge de scènes oniriques. Aucontraire, L’Esprit de la ruche est un traité de l’imagination, et de laplace dont elle a fait son royaume, nichée dans la minusculebéance qui s’ouvre entre le monde et ses fantômes, la rivière et sesreflets, un monstre de celluloïd et un Frankenstein charnel.Traitéde l’imagination, et comment elle aspire à soi les enfants, les ravit,les émerveille et les ravage peut-être, chant des sirènes et Gorgone tout à la fois.

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Ana tend une pomme au fugitif.Photogramme extrait de la séquence : « Le dialogue silencieux ».

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Réalisation : Alain BergalaImage : Gérald DumourSon : Raul MartinezRéalisation montage : Anne HuetMontage et sous-titrage : Ricardo MunozMixage : Christophe BaudinProduction : SCÉRÉN-CNDP 2008Extraits du film L’Esprit de la ruche de Víctor Erice© Carlotta Films

IntroductionVíctor Erice est un cinéaste discret, qui a une conscience aiguë del’inflation de la parole dans nos sociétés médiatiques, et de sesméfaits. Quand il prend la parole, rarement, chaque phrase estmûrement pesée, chaque idée a été méditée longtemps dans lesilence de la solitude. Il était important de trouver les bonnesconditions de cet entretien. Celui-ci a eu lieu au terme d’unéchange lent et timide commencé en 2005 pour l’exposition EriceKiarostami Correspondances, dont j’ai été le commissaire. Ce matin-

là,Víctor Erice a choisi le lieu de notre dialogue, un petit bar dansun quartier ordinaire du centre de Madrid, dont il connaissait lepatron, où nous étions au calme mais où la vie de la rue nousparvenait avec les sons et les changements de lumière dus aux pas-sants et à la circulation. L’entretien s’est déroulé avec la plusgrande fluidité, en douceur, sans blocage ni malentendu, et nousavons eu tous les deux le sentiment, à la fin de ce dialogue, que leschoses importantes avaient été dites, sans forçage sur ce film secretd’un cinéaste secret. A. B.

RésuméLors d’un entretien à Madrid, en juillet 2008, avec Alain Bergala,le réalisateur de L’Esprit de la ruche,Víctor Erice, expose son rap-port au cinéma, au monde, à la culture espagnole et au contextepolitique de l’Espagne, encore franquiste, dans laquelle il réalisace film en 1973. Le cinéaste parle à Alain Bergala de ses choix demise en scène, de ses personnages et de ses acteurs, particulière-ment la petite Ana Torrent.

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Contrechamp sur Víctor EriceAlain Bergala, France, 2008, couleurs, 31 min.

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Séquences

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1. Commencer un filmLe tournage de la projectionde Frankenstein [2’35]Le film s’ouvre sur la séquence de la pro-jection du Frankenstein de James Whales,précédé d’un prologue, rajouté par la pro-duction. Les deux sœurs Ana et Isabel fontpartie du public fasciné qui regarde lefilm.Erice explique que cette séquence, tournéeavec deux caméras (l’une sur l’écran, l’autresur le public), est quasi documentaire etque les deux jeunes actrices, comme leurspersonnages, découvraient le film.L’origine du projet [4’20]Le projet s’origine dans une commandede film de genre « terreur », de type clas-sique, autour du personnage de Franken-

stein. Erice, fraîchement sorti de son écolede cinéma, pense aussitôt à l’expression-nisme allemand ou au cinéma nordique.Puis propose, devant la réduction du bud-get, de tourner un « Frankenstein espagnol,un Frankenstein du pauvre », loin des canonshollywoodiens ou expressionnistes.L’image de la rencontre de la créature deFrankenstein et de Mary marque pour lecinéaste, qui, enfant, a vu le film, sa ren-contre avec le mythe. Le choix d’unepetite fille (Ana) lui paraît propice à uneidentification plus forte.

2. La mise en scèneLa censure, le langage cinématographiquedu film [3’10]Erice, qui a tourné pendant une périodeparticulièrement sévère de la censure fran-quiste, explique son rapport d’artiste àcette contrainte et son utilisation de lafigure de l’ellipse (typique du muet). Sanschercher la confrontation directe, mais enfaisant le choix de créer une formeouverte et aussi de se tourner vers le lan-

gage poétique, le cinéaste a permis auxspectateurs de déposer dans le film unepart de leur inconscient.La frontalité, les influences [2’40]Alain Bergala interroge Víctor Erice surson rapport à la frontalité et à la « ligne defuite ». Erice n’avait pas alors théorisé sapréférence pour la symétr ie, mais endécouvrant, par la suite, les films d’Ozu, ils’y est reconnu. C’est ce même parti quilui a permis plus tard, dans Le Songe de lalumière, de capturer le « fugitif » dans lerituel mis en place par le peintre AntonioLópez.Le son [2’05]À partir de la séquence de Teresa dans sonlit, Erice explique son utilisation décaléedu son, colonne vertébrale de son film.

3. Les personnagesIsabel et Ana [4’15]Pendant la scène où les enfants sautentpar-dessus un feu de joie, l’ombre d’Isabels’envole et se fige. Pour Erice, ce momentest celui où la sœur aînée, arrivée à son

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point maximum, laisse place à la petite. Ilexplique le rapport des deux fillettes à lapeur, qui « joue pour de faux » et qui « jouepour de vrai ». Si Isabel est dans la représen-tation,Ana a sur elle une supériorité évi-dente : sa foi, sa croyance en l’existence dela créature. C’est elle qui ira à la rencontredu fugitif.Ana rencontre la créaturede Frankenstein [5’30]Ana Torrent croyait à l’existence dumonstre. Cela a guidé Erice, qui distingueentre les réalisateurs qui s’inclinent au-dessus des enfants et ceux qui se font diri-ger par eux. La rencontre pendant undîner de la jeune actrice et de l’acteurincarnant la créature a d’abord terroriséAna, puis l’enfant s’est laissé apprivoiser.Mais elle a demandé au comédien pour-quoi il avait tué la petite Mary.La place du père [2’20]Er ice explique le personnage de Fernando, un intellectuel qui n’est pasparti d’Espagne pendant le franquisme etqui vit un « exil intérieur ». Et évoque

l’écrivain Maurice Maeterlinck à qui lefilm doit son titre, L’Esprit de la ruche.

4. Le rôle du cinématographeL’ouverture à une conscienceÊtre citoyen du monde [4’05]Erice parle de l’expérience collective de

la découverte du cinéma en salle et sonimportance pour aider à construire uneidentité. Pour Ana, dans le film, c’est lecinéma qui a été le moteur de son ouver-ture au monde. Et pour Víctor Erice, lecinéma a permis à sa génération d’êtrecitoyens du monde.

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Fernando explique à ses filles le mystère des champignons.Photogramme extrait de la séquence : « La leçon de champignons ».

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Sierra de Teruel/L’Espoir d’André Malraux et Denis Marion, France, 1939. Coll. Cahiers du cinéma.

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Scénario et réalisation : Sophie Le MerdyInfographie : Michel BertrandMontage : Julien MiquelMixage : Christophe BaudinDocumentalistes : Manuela Marques, Mélanie GérinVoix : Sophie Le MerdyProduction : SCÉRÉN-CNDP 2008

Archives : Ciné-Archives, Fonds audiovisuel du PCF-Mouvementouvrier et démocratique, Archives audiovisuelles Footage Farm,Atelier des Archives/British Movietone, Carlotta Films, GaumontPathé Archives, Les Grands Films classiques,Video Mercury FilmsS.A.U., Les Films de la Pléiade.

Remerciements : Hervé Pernot, Patrick Chenais, Carlotta Films etVincent Paul-Boncour, Filmoteca Española et Egeda (Madrid),Instituto Cervantes (Paris).

IntroductionVíctor Erice situe l’action de son film L’Esprit de la ruche au débutdu franquisme, dans un pays dévasté par les trois ans de guerrecivile. Tourné en 1973, donc dans les dernières années d’unrégime où censure et répression n’ont jamais vraiment cessé, cefilm revient pour la première fois sur le traumatisme vécu par lesEspagnols.Le Petit Bruit de la caméra dans le fracas de la Guerre d’Espagne resituedans leur contexte les causes et le déroulement de la guerre civileespagnole. Images d’archives, images de films de propagande oude films militants produites aussi bien par les républicains que parles franquistes permettent de suivre l’affrontement pendant cestrois années de guerre, jusqu’à l’accession au pouvoir du généralFranco. La production cinématographique sous le franquisme seralourdement influencée par le régime et il faudra attendre lesannées 1960, avec Buñuel et quelques cinéastes indépendants,pour que la production cinématographique retrouve une véri-table inspiration. Sophie Le Merdy

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Le Petit Bruit de la caméra dans le fracas de la Guerre d’EspagneSophie Le Merdy, France, 2008, noir & blanc et couleurs, 29 min.

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RésuméÀ l’aide d’archives d’actualités cinémato-graphiques et d’extraits de films, la réali-satrice retrace, de la Guerre d’Espagne à lamort de Franco, le rapport qu’a entretenule cinéma à l’Histoire ainsi que son évo-lution pendant les quarante années où l’Espagne vécut sous la botte du fran-quisme.

Séquences

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1. La montée du fascisme avant laguerre civile (1931-1934) [6’55]La réalisatrice dresse d’abord les circons-tances qui ont entraîné l’Espagne dans laguerre civile, depuis l’abdication d’Al-phonse XIII jusqu’à l’avènement de laRépublique (14 avril 1931). La difficultéde la jeune République à faire face à l’im-mensité des réformes à faire (réforme

agraire, séparation Église/État, créationécole publique et laïque…) entretientdans le peuple espagnol des insatisfactionsgrandissantes.Dans Las Hurdes (interdit par le gouver-nement républicain) Luís Buñuel montrele dénuement extrême des habitants decette région. Manifestations et grèves semultiplient pendant que la Phalange etl’extrême droite s’organisent. Dans lesAsturies, la répression menée par la Ban-dera du général Franco est particulière-ment violente. Les deux Espagne, républi-cains et franquistes, sont désormais face àface.

2. La guerre civile [11’45]Après les élections de 1936, le pays estcoupé en deux. Le gouvernement decentre gauche est fragile, l’extrême droitede plus en plus violente.Après l’assassinatpar les républicains d’un dirigeant monar-chiste, le 13 juillet 1936, c’est l’embrase-ment. Du Maroc, Franco décrète l’état deguerre. Pour l’aristocratie et l’Église, il

devient « le sauveur de la vieilleEspagne ». La gauche (anarchiste et socia-liste puis communiste) s’organise. Trèsanticléricale, ses exactions contre les reli-gieux déclenchent la fureur de la droite.La Colonne Durruti (1936) filmée par lafédération anarchiste retrace la vie d’unemilice anarchiste qui vint défendreMadrid, où son chef Durruti fut tué.La chute de Tolède marque le début del’aide germano-italienne aux franquistes.De leur côté, 40 000 combattants étran-gers s’engagent et forment les Brigadesinternationales pour combattre aux côtésdes républicains. Parmi eux, André Mal-raux crée l’escadrille de combat España,écrit L’Espoir et tourne Sierra de Teruel enhommage aux brigadistes (interdit, le filmne sort qu’à la Libération en 1945).Madrid est bombardée en 1936, et le26 avril 1937, la Légion Condor bom-barde Guernica, où 1600 civils sont tués.Ce massacre est dénoncé par Picasso. LePCF tourne Espagne 1937 pour sensibili-ser l’opinion française. Les franquistes,

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appuyés par l’aviation étrangère et militai-rement très bien organisés, ont l’avantagesur les républicains, soutenus par la popu-lation civile. lls gagnent la bataille deTeruel, prennent Barcelone. La Mutilationde Barcelone (1938) filme cet épisode dra-matique. Madrid, assiégée 28 mois durant,résiste, ce que retrace le film de Joris IvensTerre d’Espagne.

3. La chute de Madridet l’avènement de Franco [2’45]Madrid tombe le 28 mars 1939. C’est lafin de la guerre civile et l’arrivée au pou-voir de Franco. Son régime dictatorial,appuyé sur l’Église et l’armée va durertrente-sept ans.La censure est présente partout, notam-ment sur la production cinématogra-phique. Les premiers films caractérisent leretour à l’ordre moral et aux valeurs édi-fiantes (patriotisme, courage, religion,obéissance du peuple…).Ainsi Raza (écritpar Franco lui-même) ou ¡A mi la legion!Locuta de amor, représente un autre genre

prisé, celui des fresques exaltant des figuresreligieuses ou historiques. L’expressionartistique n’est pas favorisée par la censure,pourtant le premier long métrage de des-sin animé européen et en couleurs (Gar-bancito de la Mancha, 1945) sort des stu-dios espagnols !

4. Les années 1950 et 1960 [3’15]Ce sont celles des valeurs conservatrices,illustrées au cinéma par le règne desenfants stars comme le petit Joselito (Elruiseñor de la cumbres). Pourtant, parallè-lement à la production officielle, descinéastes comme Juan Bardem ou LuísBerlanga revendiquent un cinéma pluspersonnel, avec des œuvres comme Bien-venido Mister Marshall qui se moque dela manne américaine ou Muerte de unciclista qui se démarque nettement del’esthétique officielle.

5. Les années 1960-1970 [4’30]Franco est toujours là, mais la censure s’assouplit un peu. El Vertugo (Luís Garía

Berlanga, 1963) s’inspire nettement desinsolentes comédies italiennes. Buñuelrevient du Mexique, tourne l’anticléricalViridiana (film interdit jusqu’en 1977),puis Tristana avec ses acteurs fétiches, Fer-nando Rey et Catherine Deneuve. Desauteurs comme Carlos Saura émergent(Los Golfos, 1960). C’est le renouveau ducinéma espagnol. En 1973, alors que lacensure sévit toujours,Víctor Erice tourneL’Esprit de la ruche dont il situe l’actiondans les débuts du franquisme.Franco meurt en 1975. La censure estenfin abolie en 1977, et ce sera l’explosionde la movida, dont le chef de file est PedroAlmodóvar.

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Las Hurdes/Terre sans pain de Luís Buñuel, Espagne, 1932. Photogramme.

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Films cités[hors actualités cinématographiques]

Las Hurdes/Terre sans painLuís Buñuel, Espagne 1932. Scénario :L. Buñuel. Commentaire : Pierre Unik.Image : Eli Lothar. Musique : Brahms.Durée : 30 min.Buñuel tourne en 1932 ce documentaire sansfard sur les habitants de la région déshéritée deLas Hurdes, près de la frontière portugaise. Lefilm, accusé, même par les républicains, de mon-trer une image trop misérable de l’Espagne, estinterdit et ne sort qu’en 1939.© Les films de La Pléiade

Le CRDP de Lyon a publié en double DVDTerre sans pain, de Luís Buñuel avec pour la pre-mière fois la version complète et restaurée dufilm (1965) et la version censurée (1936).Plus de trois heures de médias et de nombreuxcompléments inédits sont proposés pour appré-hender ce film et la question de la représenta-tion du réel au cinéma.Un dossier de 70 pages en partie Rom vouspermet de découvrir des articles de presse, desdocuments historiques rares et des séancespédagogiques.

La Colonne DurrutiAnonyme, 1936.Menée par Buenaventura Durruti, de la mi-1936 à sa mort le 20 novembre 1936, la fut laplus célèbre des colonnes anarchistes.Elle joua unrôle important dans le maintien de la Républiqueà Madrid, face à la montée du franquisme. Ellefut finalement incorporée à l’armée de la Répu-blique.© Archives françaises du film, CNC

Sierra de Teruel/L’EspoirAndré Malraux et Denis Marion, France,1939. Durée : 78 min. Scénario :A. Malraux,D. Mar ion, Max Aub, Bor is Peskine,d’après le roman d’A. Malraux (Gallimard,1937). Image : Louis Page,André Thomas,Manuel Berenguer. Décor :Vincent Petit.Musique : Dar ius Milhaud. Montage :A. Malraux, Georges Grace. Production :Corniglion-Molinier avec Roland Tual.Durée : 68 min. Interprétation : José Sem-pere (commandant Pena),Andrès Mejuto(capitaine Muñoz), José Lado (le paysan).Seul film de l’écrivain, Sierra de Teruel

raconte la Guerre d’Espagne et suit des maqui-sards républicains face aux troupes franquistes. Ilne sortit qu’à la Libération. « […] Malrauxévite de tomber dans le piège [… des] grandsdiscours moralisateurs. L’Espoir est une chro-nique dépouillée qui tend à ressembler le pluspossible aux actualités cinématographiques del’époque sans en reprendre le ton sentencieux.Les faits sont là et les images se suffisent àelles-mêmes, l’une des qualités primordiales decette œuvre étant l’habileté avec laquelle desdocuments pris sur le vif sont intégrés auxscènes de fiction pure. La distribution composéed’inconnus renforce encore cet aspect et confèreaux différentes anecdotes une authenticité quine sait jamais tricher avec la vérité des senti-ments. » Jean-Philippe Gérand dans le Dic-tionnaire des films, Larousse, 1999.© Les Documents cinématographiques

España 1937/Espagne 1937Film collectif, France, 1937.Film de montage de documents qui évoque lachronologie de l’avènement du front populaireespagnol, son soutien parmi les masses, l’agres-

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sion étrangère et la résistance militaire et civilede la République du 6 février 1936 au secondsemestre 1937. Cette version, dont le commen-taire en français insiste sur la discipline, le cou-rage, l’effort de culture, y compris sur le front,était destinée à l’opinion française et présentaitla plupart des positions du PCF.© Archives françaises du film (CNC)

La Mutilation de BarceloneDocumentaire, anonyme, Espagne, 1938,noir et blanc, sonore. Durée : 8 min.Le film décrit les ravages qu’ont fait subir à Bar-celone les terribles bombardements de l’arméefranquiste du 18 mars 1938.Voulant dénoncer« l’œuvre du fascisme international » (c’estl’aviation italienne de Mussolini qui bombarda)et susciter l’aide de la population française, ilmontre notamment les pertes subies par la France(école française, mort du vice-consul).© Archives françaises du film (CNC)

Terre d’Espagne/Spanish EarthJoris Ivens, France, 1937. Commentaire(anglais) : Ernest Hemingway. Image : John

Ferno. Musique : Mark Bilzstein,VirgilThompson. Montage : Helen van Dongen.Durée : 53 min.Le film montre l’exploitation des terres expro-priées à Fuentidueña sur le Tage et la défensede Madrid, l’union entre la paysannerie et lefront républicain. Il fut projeté le 8 juillet 1937à la Maison Blanche devant Roosevelt, avec uncommentaire dit par Orson Welles. La versionfrançaise fut commentée par Jean Renoir.© Archives audiovisuelles Footage Farm

RazaJosé Luís Sáenz de Heredia, Espagne,1941. Image : Heinrich Gärtner. Musique :Manuel Parada. Interprétation : AlfredoMayo (José), José Nieto (Pedro), LuisArroyo (Jaime). Durée : 113 min.Sur un scénario de Franco (sous le pseudo-nyme de Jaime de Andrade), ce film de purepropagande fut tourné avec des moyensénormes pour un pays qui venait de connaîtreles ravages de la guerre. Raza (la race) raconte,du point de vue franquiste, l’histoire d’unefamille galicienne de 1898 à 1939. La

ferveur nationaliste, militariste, patriotiquesurpassera les divisions familiales.© Tous droits réservés

¡A mí la legión!/À moi la légion!Juan de Orduña, Espagne, 1942. Scénario :Raul Cancio, Jaime Garcia. Image :Alfredo Fraile. Montage : Antonio Canóvas. Musique : Juan Quintero. Inter-prétation : Alfredo Mayo, Luis Peña,Manuel Luna, Miguel Pozanco. Durée :82 min.Une vision romanesque de la Légion espagnole,avec le comédien Alfredo Mayo (Raza), unevision des légionnaires bien différente de celleque donnait, par exemple, La Bandera deJulien Duvivier.© Video Mercury Films S.A.U.

Locura de amor/Folies d’amourJuan de Orduña, Espagne, 1948. Scénario :Carlos Blanco, Alfredo Echegaray. Image :José F. Aguayo. Montage : Juan Serra.Musique : Juan Quintero. Interprétation :Aurora Batista (Dona Juaña), Fernando

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Lucia Bosé et Alberto Closas dans Muerta de un ciclista/Mort d’un cycliste de Juan Bardem, Espagne, 1955. Coll. Cahiers du cinéma.

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Rey (Felipe el Hermoso), Sara Montiel(Aldara). Durée : 112 min.Fresque historique.© Video Mercury Films S.A.U.

Garbancito de la ManchaJosé María Blay et Arturo Moreno,Espagne, 1945. Scénario : Julián Pemartín.Durée : 98 min.Conte de fée : un enfant (litt. « Petit poischiche ») affronte un ogre et une sorcière.© Video Mercury Films S.A.U.

El ruiseñor de la cumbre/Le Rossi-gnol des montagnesAntonio del Amo, Espagne, 1958. Interpré-tation : Joselito (Joselito), Roberto Carma-diel (Pepino), Lolita Vilaespesa (la mère),Antonio Cases (le père). Durée : 91 min.Un petit berger fugue après avoir vu une vio-lente dispute opposer sa mère à son ivrogne depère.© Video Mercury Films S.A.U.

¡Bienvenido Mister Marshall !/Bien-venue M. Marshall !Luís García Berlanga, Espagne, 1953. Scé-nario : Juan Antonio Bardem, L. GarcíaBerlanga, M. Mihura. Image : ManuelBerenguer. Musique : Jesus García Leoz.Interprétation : Lolita Sevilla (Carmen Var-gas), Manolo Moran (Manolo), AlbertoRomeo (Don Luis), Luis Perez (le curé).Durée : 80 min.Le petit village de Villard el Rio est bouleversé(curé, maire, notables, villageois…) depuis lanouvelle que la délégation américaine du PlanMarshall doit s’y arrêter.© Video Mercury Films S.A.U.

Muerte de un ciclista/Mort d’uncyclisteJuan Antonio Bardem, Espagne, 1955.Image : Alfredo Fraile. Musique : IzidoroMaiztegui. Montage : Margarita Ochoa.Interprétation : Lucia Bosé (Maria-José),Alberto Closas (Juan). Durée : 100 min.Maîtresse d’un universitaire, une jeune femmeécrase un cycliste, et prend la fuite. Son amant,

pris de remords, essaye de la convaincre de serendre à la police. Elle le tuera à son tour avantde mourir dans un accident.© Video Mercury Films S.A.U.

El Verdugo/Le BourreauLuís García Berlanga, Espagne, 1963.Scénario : L. Berlanga. Image :Tonino DelliColli. Musique : Miguel Asins Arbo. Mon-tage :Alfonsa Santacana. Interprétation : JoséIsbert (Amadeo), Nino Manfredi (José-Luis). Durée : 110 min.José-Luís, jeune employé des pompes funèbres,se fait surprendre avec sa fiancée par son futurbeau-père. Il doit alors accepter un emploi debourreau que lui impose celui-ci. Lors de sa pre-mière exécution, on doit le traîner sur les lieuxdu supplice…© Video Mercury Films S.A.U.

L’Esprit de la ruche/El Espíritu de lacolmenaVíctor Erice, Espagne, 1973.Voir le découpage ci-dessus, page 5.© Carlotta Films

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Portfolio L’Esprit de la ruche

1. L’Esprit de la rucheEl espíritu de la colmenaVíctor Erice, Espagne,1973.Photo de tournage : IsabelTellería et Ana Torrent.© Víctor Erice Archive. PhotoLaureano López Martinez

2. L’Esprit de la rucheVíctor Erice, Espagne, 1973.Photo de tournage :l’équipe et le réalisateur.© Víctor Erice Archive. PhotoLaureano López Martinez

3. L’Esprit de la rucheVíctor Erice, Espagne, 1973.Photo de tournage : àgauche, le réalisateur.© Víctor Erice Archive. PhotoLaureano López Martinez

4. Le Sud/El SurVíctor Erice, Espagne,1983.Sonsoles Aranguren etOmero Antonutti.Collection Cahiers du cinéma

5. Le SudVíctor Erice, Espagne,1983.Omero Antonutti etSonsoles Aranguren.Collection Cahiers du cinéma

6. Le Songe de lalumière/El Sol delmembrilloVíctor Erice, Espagne,1992.Le peintre Antonio López.Collection Cahiers du cinéma

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7. Ten Minutes Older :The TrumpetVíctor Erice, court métrage,film collectif, 2002.© Photo12.com. Collectioncinéma

8. Barcelone : enfants auspectacleRobert Capa, photographie,janvier 1939. Pendant queles troupes fascistes deFranco bombardent la ville,des enfants assistent à unspectacle en attendant d’êtreévacués.ROBERT CAPA © 2001 ByCornell Capa/Magnum Photos

9. Madrid après les raidsgermano-italiensRobert Capa, photographie,nov.-déc. 1936.ROBERT CAPA © 2001 ByCornell Capa/Magnum Photos

10. Guerre d’EspagneBataille pour l’Ebre sur lefront d’Aragon, près deFraga.Robert Capa, photographie,novembre 1938.ROBERT CAPA © 2001 ByCornell Capa/Magnum Photos

11 Guerre d’EspagneDes soldats républicains.Gerda Taro, photographie,1937.Gerda Taro © 2002 byInternational Center ofPhotography, NY/MagnumPhotos

12. Paysage, Horta de Ebro(le réservoir)Pablo Picasso (1881-1973).Photographie, 1909.Paris, musée Picasso.© RMN/Jean-Gilles Berizzi© Guernica, SuccessionPicasso, 2008

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Page 29: 01 Livret Esprit BAT 2...préparatifs et avertissement [2’25] Les villageois arrivent dans la salle des fêtes, chacun apportant son siège. Les enfants se placent devant… À l’entrée,

13. FrankensteinJames Whale,États-Unis, 1931.Boris Karloffet Marilyn Harris.© Rue des ArchivesCollection Grégoire

14. FrankensteinJames Whale,États-Unis, 1931.© Getty Images

15. FrankensteinJames Whale,États-Unis, 1931.Boris Karloffet Mae Clarke.© UNIVERSALPICTURES/ALBUM/AKG

16. La Malédiction des hommes-chats/The Curse of the Cat PeopleRobert Wise et Gunther von Fritsch,États-Unis, 1944.Ann Carter. Photogramme.

17. L’Esprit de la rucheVíctor Erice, Espagne, 1973.Ana Torrent. Photogramme.

18. La Malédictiondes hommes-chatsRobert Wise et Gunther von FritschÉtats-Unis, 1944.Ann Carter. Photogramme.

19. L’Esprit de la rucheVíctor Erice, Espagne, 1973.Ana Torrent. Photogramme.

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20. Alice Liddell (1852-1934)photographiée vers l’âge de10 ans par Lewis Carroll (1832-1898).© Rue des Archives/MaryEvans

21. Julie Manetdit aussi L’Enfant au chatPierre-Auguste Renoir(1841-1919).Huile sur toile,65 x 54 cm, 1887.Paris, musée d’Orsay.© Bridgeman-Giraudon

22. Portrait de petite filleKees van Dongen(1877-1968).Huile sur toile,76,2 x 76,2 cm, 1918.Jérusalem, Israel Museum.© Roger-Viollet

23. FifiGabriel Cualladó (1925-2003).Photographie, 1957.© Héritiers de GabrielCualladó.

24. Le Rêve, GivernyClaude Batho (1935-1981).Photographie,60 x 57,5 cm, 1980.Fond régional d’artcontemporain Champagne-Ardenne.© Claude Batho

25. Toilette dans unpaysageJoan Gonzalez ou Gonzalès(1868-1908).Papier bleu, pastel,30,3 x 47,7 cm.Paris, musée d’Orsay.© RMN (muséed’Orsay)/Hervé Lewandowski

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26. Enfants dans unechambreÉdouard Vuillard (1868-1940).Huile sur carton,52 x 79 cm, 1893.Saint-Pétersbourg,musée de l’Hermitage.© Hermitage, St. Petersburg,Russia/The Bridgeman ArtLibrary

27. Portes ouvertes/OpenDoorsVilhelm Hammershøi,(1864-1916).Huile sur toile, 52 x 60 cm,1905.Copenhague,David Collection.© AKG-Images

28. Printempstardif/BanshunYasujiro Ozu, Japon, 1949.Photogramme.

29. L’Archange Gabriel et TobieAttribué au Titien (vers 1488-1576).Huile sur panneau, 170 x 149 cm.Venise, Galerie de l’Académie.© Bridgeman-GiraudonCameraphoto Arte Venezia

30. Saint Jérôme en méditationGeorg Pencz (vers 1500-vers 1550)Huile sur toile, 132 x 135 cm, vers 1548.Paris, musée du Louvre.© RMN/Jean-Gilles Berizzi

31. L’Apparition de l’ange à saint Josephdit aussi Le Songe de saint JosephGeorges de la Tour (1593-1652).1re moitié du 17e siècle.Nantes, musée des Beaux-Arts.© RMN/Gérard Blot

32. KerzeGerhard Richter (1932).Huile sur toile, 100 x 100 cm, 1982.Baden-Baden, musée Frieder Burda.© Gerhard Richter

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Ce DVD a été produitpar le SCÉRÉN-CNDP

Sous-titres espagnols du film L’Esprit de la ruche :Ricardo MunozInfographiste : Michel BertrandCorrection :Anne PeetersMastérisation :Vectracom, Johan JoliboisPressage : Quantom Optical Laboratories

Illustrations du livret : photogrammes extraits des films composant ce DVD, photos duportfolio, collection Cahiers du cinéma.Couverture du DVD :Ana regarde la ruched’acier dans le bureau de son père. Ana etIsabel regardent Frankenstein. Photogrammesextraits des séquences : « Les observationsd’Isabel » et « La séance : préparatifs etavertissement ».

RemerciementsNous remercions tous ceux qui nous ont aidés à laréalisation de ce DVD et particulièrement :Vincent Paul-Boncour (Carlotta Films),Xavier Carniaux (AMIP).

L’Eden CINEMA

Directeur de collectionConception du DVD

Alain Bergala

Directrice artistiqueAnne Huet

Chef de projetCatherine Goupil

Chargée de productionManuela Marques

IconographieMélanie Gérin

Rédaction du livretCatherine Schapira

Conception graphique de la collectionPaul-Raymond Cohen

Directeur de la publicationPatrick Dion

Imprimerie Jouve

Fernando passe devant la salle des fêtes où estplacardée l’affiche de Frankenstein. Photo-gramme extrait de la séquence : « Fernando etFrankenstein ».