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LA CONFRÉRIE DE LA DAGUE NOIRE

FAN-FICTIONS – Tome 1

(*)

Sommaire

LEXIQUE DES TERMES ET DES NOMS PROPRES ....................................................................... 3

UNE RAISON DE VIVRE ................................................................................................................ 5

SOUVENIR SECRET ...................................................................................................................... 21

RENCONTRE AVEC LE DESTIN ................................................................................................. 48

*Voir aussi FAN-FICTIONS – Tome 2 : La nouvelle génération (en 5 livres).

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LEXIQUE DES TERMES ET DES NOMS PROPRES

Ahstrux nohtrum : En Langage Ancien, garde du corps d’une personne d’importance avec

« permis de tuer ».

Ahvenge : Vengeance, généralement menée par un mâle au profit d’une femelle

Appel : Période de fertilité des vampires femelles (durée moyenne deux jours), accompagnée

d’intenses pulsions sexuelles. En règle générale, l’appel survient environ cinq ans après la transition,

puis une fois tous les dix ans. Tous les mâles sont réceptifs à proximité d’une femelle pendant cette

période, qui peut engendrer des conflits et des combats, si la femelle n’a pas de compagnon attitré.

Au-delà : dimension intemporelle où les morts retrouvent leurs êtres chers et passent l’éternité.

Confrérie de la Dague Noire : Guerriers vampires chargés de protéger leur race contre la

Lessening Société. Des unions sélectives leur ont conféré une force physique et mentale hors du

commun, ainsi que des capacités de guérison rapide. Les membres sont admis dans la Confrérie par

cooptation. Agressifs, indépendants et secrets par nature, les Frères vivent à l’écart et entretiennent peu

de contacts avec les autres, sauf quand ils doivent se nourrir. Ils font l’objet de nombreuses légendes et

d’une vénération dans la société des vampires. Seules de très graves blessures peuvent leur ôter la vie.

Dhunhd : Enfer

Doggen : Serviteur d’une espèce vampire particulière, qui obéit à des pratiques anciennes et suit un

code d’habillement et de conduite extrêmement formel. Les doggens peuvent s’exposer à la lumière du

jour, mais vieillissent relativement vite. Leur espérance de vie est d’environ cinq cents ans.

Ehros : Élue entraînée aux pratiques sexuelles.

Élues : Vampires femelles au service de la Vierge Scribe. Elles ont un haut statut social, mais une

orientation plus spirituelle que temporelle. Elles ont peu d’interaction avec la population civile, ou les

mâles en général, mais peuvent s’unir à des Frères pour assurer leur descendance. Elles possèdent des

capacités de divination. Dans le passé, elles avaient pour mission de satisfaire les besoins (sang ou

sexe) des membres célibataires de la Confrérie, mais cette pratique est tombée en désuétude.

Fakata : Tenue de cérémonie pour l’Autre Côté, sorte de pyjama de soie blanche.

Glymera : Cœur de l’aristocratie, ensemble des membres du plus haut rang.

Hellren : Vampire mâle dans un couple. Un mâle peut avoir plusieurs compagnes.

Leelane : Terme affectueux signifiant « chérie ».

Lessening Société : Organisation de tueurs à la solde de l’Omega. Ses membres sont les lessers.

Lesser : Membre de la Lessening Société. Ex-humain qui a vendu son âme à l’Omega, et cherche à

exterminer les vampires. Seul un coup de poignard en pleine poitrine le fait disparaître. Il est

impuissant et n’a nul besoin de s’alimenter ni de boire. Avec le temps, il perd sa pigmentation

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(cheveux, peau, iris). Il dégage une odeur de talc très caractéristique. Un lesser conserve dans une jarre

de céramique le cœur qui lui a été ôté. Son sang devient celui de son maître, noir et huileux.

Mahman : Mère, terme d’affection.

Mhis : Brouillard né d’un champ d’illusion destiné à protéger un territoire physiquement délimité.

Omega: Force mystique et malveillante cherchant à exterminer l’espèce des vampires par rancune

contre la Vierge Scribe, sa sœur. Il existe dans une dimension intemporelle, le Dhunhd, et jouit de

pouvoirs extrêmement puissants, mais pas de celui de création.

Première famille : Roi et reine des vampires, ainsi que leur descendance éventuelle.

Princeps : Noble. Le plus haut rang de l’aristocratie, après la Première Famille et les Élues. Titre

obtenu uniquement héréditaire, qui ne peut être conféré.

Pyrocant : Personne qui provoque une faiblesse ou un risque chez un mâle. Il peut s’agir d’une

faiblesse interne, une addiction par exemple, ou externe, comme un(e) amant(e).

Rahlman : Sauveur.

Shellane : Vampire femelle d’un couple. En règle générale, elle n’a qu’un seul compagnon, en

raison du caractère extrêmement possessif des vampires mâles.

Sympathe : Espèce particulière parmi les vampires qui se caractérise entre autres par l’aptitude et

le goût de manipuler les émotions d’autrui pour en obtenir l’énergie. Au cours des siècles, ils ont été

rejetés et même parfois massacrés par les autres vampires. Ils sont en voie d’extinction.

Trahyner : Terme de respect mutuel et d’affection entre mâles. Littéralement « ami très cher ».

Transition : Moment critique où un vampire mâle ou femelle devient adulte, (vers vingt-cinq ans)

et acquiert ses caractéristiques raciales. C’est la première fois où se pratique un échange de sang entre

vampires. Certains n’y survivent pas, notamment les mâles. Avant leur transition, les mâles pré-trans

n’ont aucune force physique, ni de maturité sexuelle et sont incapables de se dématérialiser.

Vampire : Membre d’une race distincte, avec des caractéristiques génétiques qui ne s’obtiennent

en aucun cas par morsure ou autre. Après leur transition, les vampires ne peuvent plus s’exposer à la

lumière du jour et doivent boire du sang à intervalles réguliers sur un vampire du sexe opposé. Le sang

humain n’a sur eux qu’un effet à très court terme. Ils peuvent se dématérialiser à volonté, mais dans

certaines conditions. Ils ont la faculté d’effacer les souvenirs récents des humains. Leur espérance de

vie est d’environ mille ans. Parfois, un vampire se reproduit avec un humain, et un sang-mêlé ne subit

pas forcément la transition.

Vierge Scribe : Force mystique œuvrant comme conseiller du roi, gardienne des archives vampires

et pourvoyeuse de privilèges. Existe dans une dimension intemporelle, l’Autre Côté, entourée des

Élues. Ses pouvoirs sont immenses. Elle est capable d’un unique acte de création, et a ainsi conféré

aux vampires leur existence et privilèges. D’où sa guerre avec l’Omega, son frère.

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UNE RAISON DE VIVRE

“Something To Fight For” inspiré par J. R. Ward

Cette fan-fic se situe vers la fin du tome 3.

***

Après avoir perdu Bella, Zsadist se rend un soir à Charleston. Il vient de quitter la clinique de

Havers, et a une décision à prendre. Va-t-il accepter cette rupture ? Ou plutôt faire l’effort de combler

le gouffre que son passé et son attitude récente ont créé entre eux ?

Zsadist est le plus sombre des Frères. Enlevé enfant à sa famille, il a vécu un horrible esclavage

durant des décennies. Brisé d’âme et de corps, son instabilité inquiète souvent ses Frères, et en

particulier son jumeau, Phury.

Bella est une aristocrate vampire, déchue de la Glymera. Dès leur première rencontre, elle a été

fascinée par Zsadist, troublée par sa violence et son intensité. Lorsque le guerrier la délivre de son

horrible captivité aux mains des lessers, ils apprendront ensemble à oublier leur passé.

.

***

En quittant la clinique de Havers, Zsadist était encore raide mais se sentait

étonnamment fort. Plus qu’il ne l’avait été depuis des lustres. Il savait que

c’était le sang de Bella qui lui rendait ses pleins pouvoirs de guerrier.

Un peu plus tard, au manoir, il était dans sa penderie lorsqu’il remarqua un

truc brillant tombé à ses pieds. Il se pencha pour le ramasser. C’était le petit

collier de Bella. Qu’elle avait laissé derrière elle.

Il agita un moment la chaîne fragile, regardant jouer la lumière sur les

diamants, et d’un seul coup, il eut besoin de faire le ménage dans son passé. Sur

une impulsion, il ramassa le crâne aux orbites vides qui avait si longtemps

traîné près de son grabat, descendit au sous-sol de la grande maison et jeta la

triste relique dans l’antique chaudière.

Il avait encore un truc à faire…

***

Pour Zsadist, ce ne fut pas difficile de retrouver Bella. Le sang de la femelle

qui coulait dans ses veines, riche et épais, le dirigeait comme une balise. Du

moins s’il se trouvait à proximité. Mais Zsadist n’avait pas la moindre intention

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de demander à son jumeau, Phury, où était Charleston. Pas plus qu’il ne voulait

qu’on lui dessine une carte. Il avait entendu Wrath dire que c’était une ville de

Caroline du Sud. Il se doutait vaguement de la direction à prendre.

Dès qu’il reprit forme dans les environs, retrouver Bella fut une affaire de

minutes.

Peu après, il était planté devant sa grille.

Il étudia attentivement les hauts murs, tandis que ses prunelles brillaient d’une

lueur jaune presque phosphorescente dans l’obscurité. Zsadist avait encore du

mal à s’habituer à la nouvelle couleur de ses yeux. Quand il voyait leur réflexion

dans un miroir, il lui semblait que c’était ceux de son frère, et non les siens. Il

avait passé tant d’années à croiser son propre regard mort, noir, et sans âme.

Secouant la tête, il revint au présent— et fronça les sourcils. La sécurité de

l’endroit n’était pas terrible. Rien à voir avec ce qui entourait le manoir de la

Confrérie. Bon, un mur, c’était mieux que rien, d’accord. Mais il n’y avait

aucune alarme extérieure sur la grille, ni au sommet du mur. Merde. Charleston

était peut-être une ville plus sûre que Caldwell. Il espérait du moins. Mais ça ne

voulait pas dire qu’il appréciait que Bella ne soit pas mieux protégée. En fait, ça

le rendait malade. Ouais, et même carrément furieux.

D’un bond souple, Zsadist escalada le mur, là où les ombres étaient les plus

noires. Puis il traversa le jardin. La maison semblait plutôt agréable, avec un toit

de tuiles claires, des piliers blancs, et de grandes fenêtres ouvertes sur

l’extérieur, ornées des rideaux blancs. Tout était grand. Clair. Ouvert. On aurait

dit une boîte de verre et acier. La maison avait dû appartenir à des humains.

Lorsqu’elle était tombée dans le monde vampire, l’ancienne véranda ouverte qui

faisait le tour du bâtiment avait été renforcée par des parois de verre et des

volets d’aciers amovibles. Zsadist espérait au moins que ces derniers étaient

solides. Si Bella était à l’abri du soleil, c’était déjà une consolation

Zsadist tenait vraiment à ce que les travaux aient été exécutés

consciencieusement. Bella méritait ce qu’il y avait de mieux.

Á travers les fenêtres, il voyait des lumières, un peu tremblantes— des

chandelles sans doute. Surtout dans l’angle gauche de la maison, pas loin de

l’endroit où il se tenait. Il avança pour mieux voir, et se colla contre le mur…

avant de réaliser que le crépi était blanc. Merde. Lui-même était tout en noir. Pas

vraiment un endroit où il pouvait se planquer discrètement. Il s’écarta jusqu’à

l’abri d’un arbre. Bien trop proche de la maison. Bordel, cet endroit était

vraiment mal protégé contre les maraudeurs. Lorsque Zsadist vérifia par la

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fenêtre, il vit deux doggens qui s’occupaient d’allumer les chandeliers d’un

salon. Ah, très bien.

Il déglutit avec difficulté. Et ce n’était pas la première fois, cette nuit, qu’il

avait ce geste convulsif.

Il était content de voir les doggens, parce que leur présence signifiait que les

hôtes de la maison devaient être bien traités. Quels que soient les sales connards

d’aristocrates de merde qui vivaient dans cette foutue baraque, Zsadist espérait

d’eux qu’ils respecteraient Bella comme elle méritait de l’être. En fait, toutes ces

chandelles— cette lumière— ce blanc— ça semblait… bien.

L’atmosphère du salon lui rappelait celle de la ferme aux alentours de

Caldwell où Bella avait vécu avant son enlèvement. Zsadist avait passé

beaucoup de temps dans cette ferme lorsqu’il recherchait désespérément la

femelle. Il s’en souvenait parfaitement. Tout y était clair, lumineux, et aussi…

Merde, quel était le mot exact qui lui échappait ? « Chaleureux » peut-être…

Oui, la ferme de Bella avait été un vrai foyer. En fait, il ne savait pas trop ce que

Bella aimait ou pas. Mais sa maison, en quelque sorte, lui ressemblait. Elle

aimait la beauté et l’harmonie. Et merde. Comment pouvait-elle supporter de le

regarder, lui ?

Des pensées qui émergeaient en tous sens tourbillonnaient dans sa tête. Il ne

savait plus quoi dire, quoi penser, quoi faire. Après tout, Bella l’avait quitté. Elle

ne voulait pas de lui. Ce qu’il comprenait, bien entendu. Il n’avait fallu que

quelques jours à la femelle— même pas des semaines, non, juste cinq putain de

jours ! — pour regretter d’avoir couché avec lui. (Il ferma les yeux.) Pour

regretter ce qui avait été les plus belles heures de toute la vie de Zsadist.

Heureusement pour lui qu’elle était partie loin de Caldwell.

Heureusement pour lui qu’elle vivait désormais dans un endroit comme celui-

ci.

Tu parles.

C’était parfait pour elle. Mais pour lui, c’était l’enfer.

Il effleura d’une main la poignée de sa dague, tout en plongeant l’autre au

fond de sa poche, serrant le poing sur le collier de diamants qui appartenait à

Bella. Il avait tellement besoin de la revoir. Juste une fois. Et ce serait suffisant.

S’il pouvait simplement poser les yeux sur elle, étudier son visage, y voir un

sourire… alors, il pourrait prendre une décision. Vraiment.

Si elle paraissait heureuse, souriante et détendue, il pourrait frapper à la porte

et demander à lui parler. Il lui rendrait son collier. S’excuserait en bonne et due

forme pour l’avoir mêlée, ne serait-ce qu’un temps, au désastre qu’était sa vie.

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S’excuserait aussi, du mieux qu’il pouvait, de ne pas avoir réussi à l’ahvenger.

Et puis il lui dirait… ah, il lui dirait qu’elle était… vraiment… extraordinaire.

Détentrice d’une force qui n’avait besoin de personne. Bien sûr, il aurait

souhaité parfois qu’elle ait davantage besoin de lui. Mais qu’importe. Il aimait

ça en elle. Qu’elle soit une femelle de valeur. Indépendante. Intelligente. Belle.

Incroyablement merveilleuse.

Il eut un gémissement rauque. Il n’était vraiment qu’un parfait salaud. Dire

qu’il était là, planté dans l’ombre du jardin de Bella, prêt à s’excuser d’avoir

oser s’approcher d’elle— et qu’il ne pensait qu’à… la baiser. Non. Á lui faire

l’amour. N’importe. Les mots étaient sans importance. Bordel. Ouais, il voulait

la baiser. Salaud ! Pas à dire, quels que soient ses efforts, le naturel revenait au

galop.

Il tenta de se concentrer sur autre chose. Comme par exemple le regard des

yeux bleus de Bella quand elle avait posé son poignet sur la bouche de Zsadist,

pour lui donner son sang. Le forçant à accepter— le forçant à vivre. Tant de

férocité. Tant de courage. Et il la revit, si brave, si calme, tandis qu’elle relevait

le canon de son arme sur le lesser qui l’avait enlevée. Avant de lui faire sauter la

cervelle, en regardant Zsadist droit dans les yeux.

En y repensant, Zsadist se sentit à nouveau la honte l’envahir comme une

vague de boue. Á sa place, il n’aurait pas pu rester si calme. Il aurait arraché la

tête du lesser, avant de le mordre, de le déchirer, de le dépecer— aussi enragé

qu’une bête fauve. Jamais il n’aurait pu croiser son regard comme Bella l’avait

fait. Et la façon dont elle avait attiré le lesser vers elle ? En l’appelant… par son

prénom… encore et encore… pour le faire venir… parce que la seule arme

qu’elle avait était de faible portée. Il savait pourtant qu’elle avait dû vivre un

martyre, la peau crispée d’horreur à la vue de son bourreau qui s’approchait

d’elle. Il ne voulait plus y penser. Merde, il avait là encore failli à la protéger. Il

était resté à terre, trop faible, pendant qu’elle s’occupait elle-même de ce

salopard. Il aurait préféré la voir à des millions de kilomètres du lesser. Mais

elle méritait sa vengeance après tout. Bien plus que lui. Et ce serait la dernière

fois qu’il interviendrait dans sa vie.

Les yeux de Zsadist ne quittaient pas les immenses fenêtres. Les doggens

avaient disparu, mais la pièce était désormais tout illuminé, aussi quelqu’un

finirait bien par y venir. Et Bella, vivait dans cette maison.

Il avait toujours la ferme intention de s’en tenir à ce qu’il avait décidé. Il avait

revu vu et revu son plan en se préparant à ce déplacement. Si Bella semblait

calme, détachée, alors il lui parlerait. Pour la dernière fois. Pour son bien. Pour

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lui rappeler combien elle était merveilleuse. Il eut un hochement de tête, comme

pour s’encourager, parce qu’il se sentait prêt à perdre courage. Et pourtant, il

tenait tellement à ce qu’elle sache… qu’il était heureux qu’elle soit… bien.

Même loin de lui. Surtout loin de lui. Et peut-être même avec—

À nouveau, il se maudit, et poussa un juron étouffé. Pouvait-il vraiment

souhaiter à Bella un avenir heureux avec un autre compagnon ? Bordel. Non. Il

ne pourrait pas évoquer ça. Il ne pourrait pas s’empêcher de gronder sa fureur.

Avec ces conneries de mâle dédié, son instinct réagirait en occultant son

cerveau. Il secoua la tête pour s’éclaircir les idées. Mais ça ne l’aida pas. Il

chercha alors à se concentrer une fois encore sur son plan. Pour la millième fois

au moins. Oui mais…

Et si elle n’avait pas l’air calme ? Et si elle avait encore… des yeux lourds

larmes ? Et si elle paraissait triste ? Et si elle semblait trop fragile ? Et si elle

affichait cette expression d’effroi que toutes les autres femelles sensées avaient

toujours eu en sa présence ? Ah… Dans ce cas-là, il ne s’imposerait pas une

nouvelle fois à elle. Il frapperait quand même— oui sans doute, mais quand un

des doggens lui ouvrirait, il laisserait le collier en demandant qu’il soit remis à

Bella. Comme s’il avait été livré par porteur spécial ou un truc du genre.

N’importe. Oui, ce serait mieux. Ensuite, il se dématérialiserait au manoir, et

resterait éternellement loin d’elle. Comme il aurait dû le faire depuis le tout

début.

C’était son plan. C’était ce qu’il allait faire. Pour une fois dans sa vie, il

agirait correctement. Noblement—

Mais soudain, Bella apparut derrière la vitre. Et pour Zsadist, le monde

s’arrêta.

Elle portait une longue robe, avec un corsage qui moulait ses seins parfaits, et

une jupe dont les plis ondulaient à chacun de ses pas. Il ne l’avait jamais vue

auparavant en robe. Elle avait une allure… royale. Aristocratique. Merveilleuse.

Il déglutit à nouveau, forçant sa gorge serrée à fonctionner. Elle portait de la soie

bleue sombre. Un tissu lourd, scintillant, riche. Quelque chose que Marissa

aurait pu porter. Bien sûr, sombre débile, ricana-t-il de lui-même. C’était comme

ça que s’habillaient les femelles de la Glymera. Mais Zsadist n’avait pas

l’habitude de fréquenter les aristocrates. Qui ne l’aimaient pas plus que lui-

même ne les appréciait.

Toute pensée cohérente disparut soudain de son crâne lorsque la femelle

avança vers la fenêtre. La robe flottait. Bleue. Si bleue. Comme ses yeux. Ouais,

exactement de la même couleur. Bien sûr, il était trop loin pour les voir, mais il

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les connaissait. Si bien. Il revoyait ces merveilleuses prunelles aux couleurs de

la soie, et savait que le tissu serait aussi doux et lisse que la peau de Bella— que

ses lèvres— que son sexe. Aaah. Il savait aussi combien le corps de la femelle

serait souple et chaud dans ses bras.

Il vit Bella poser la main sur la vitre. Souriait-elle ? Non. Elle avait l’air triste.

Et la voir ainsi brisa le cœur de Zsadist, l’arrachant à ses réminiscences

sensuelles. Il ne supportait pas qu’elle soit malheureuse. Mais souffrait-il

uniquement pour elle ? Ou parce que la morosité de la femelle, d’après le plan

qu’il avait décidé, allait l’empêcher de la revoir— de lui parler— de savourer

une dernière fois sa présence ? Les deux peut-être.

De ses longs doigts fins, Bella souligna l’un des carreaux de la fenêtre, avant

de laisser sa main retomber. Zsadist la regardait fixement, se demandant si la

robe était à elle, ou bien si elle l’avait empruntée à l’une des femelles de la

maison. Curieusement, ce détail était important pour lui. Il voulait tout savoir de

Bella. Chaque pensée qui traversait son esprit— chaque émotion de son

regard— chaque seconde de sa vie.

Il aurait aussi voulu arracher la fenêtre, et en écarter Bella, parce qu’il trouvait

dangereux qu’elle soit ainsi exposée. Même avec lui de garde à l’extérieur, il

n’aimait pas qu’elle se mette en danger. Il voulait la protéger. Il voulait avoir le

droit d’être auprès d’elle. Il voulait traverser cette pelouse trop bien tondue au

pas de course, faire une entrée fracassante dans la maison et—

Ouais, sauf qu’arroser une femelle de verre cassé était un moyen discutable de

l’impressionner. Sombre connard ! S’injuria-t-il en luttant contre son instinct le

plus primitif qui le poussait à tout détruire pour récupérer Bella.

La situation devint encore pire pour Zsadist quand un mâle entra dans le

salon— juste sous ses yeux. Zsadist entendit le grondement féroce qui montait

dans sa poitrine, et eut un mal de chien à serrer les dents suffisamment pour

bloquer son hurlement de rage… Il ne l’étouffa à moitié, et un feulement rauque

résonna quand même dans la nuit. Du calme, du calme, du calme… Se répétait-il

en boucle.

D’ailleurs, une femelle était aussi apparue dans la pièce. Probablement la

shellane du mâle. Qui ne touchait même pas Bella. Il restait simplement près

d’elle. Pas de quoi péter un câble, non ? Zsadist secoua la tête, furieux contre

lui-même. Il se mit à s’insulter mentalement. Beau boulot, vraiment ! Et si Bella,

heureuse du nouveau foyer qui l’avait accueillie, avait soudain regardé par la

fenêtre hein ? Elle aurait pu découvrir que le salopard qu’elle avait cherché à

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fuir grognait comme un chien enragé— en rêvant de dépecer ses nouveaux amis.

Ouais, bravo. Tu es vraiment complètement taré, mec. Irrécupérable.

Zsadist n’avait pas quitté la fenêtre des yeux. Avec un sourire, l’autre femelle

dit quelque chose qu’il ne put entendre, tout en prenant le bras de Bella pour

l’écarter de la fenêtre.

Il grogna. Sa moitié sensée était soulagée qu’elle ne soit plus à la merci d’un

éventuel danger qui aurait pu émerger de l’extérieur. Mais sa moitié primitive

voulait massacrer la femelle qui avait osé s’interposer entre lui et Bella.

Zsadist était si fort agrippé au tronc de l’arbre derrière lequel il se cachait que

ses ongles avaient creusé l’écorce. Après s’être éloigné dans le salon, le trio

resta dans son angle de vue— et Zsadist adressa un remerciement silencieux à la

Vierge Scribe pour cette petite grâce. Puis il regarda les trois vampires

s’installer dans de délicates petites chaises recouvertes de velours, autour d’une

table ronde qu’il distinguait à peine de sa position. Un doggen leur apporta un

plateau de thé, qu’il posa sur la table. Personne ne se servit. La femelle leva la

main, semblant demander quelque chose, et un autre doggen s’approcha en

portant un petit panier d’osier. Qui semblait contenir des morceaux de tissu, des

aiguilles, et différentes autres accessoires de couture. Quand la femelle fouilla

dedans, Zsadist la vit en sortir des vêtements d’enfant. De bébé. Elle devait être

enceinte. Quittant un moment Bella des yeux, il étudia soudain de plus près

l’autre femelle et remarqua le renflement de son ventre. Oui, elle était enceinte.

Elle sortit une pelote et se mit à tricoter, agitant les mains en cadence.

Son hellren la regardait fixement, comme si rien d’autre au monde n’existait

pour lui. Et Bella semblait mal à l’aise. Belle et triste, mais manifestement mal à

l’aise. Serait-elle un jour enceinte elle aussi ? Zsadist se demanda ce qu’il

éprouverait si, comme le mâle, il devait regarder Bella porter un petit. Á qui

ressemblerait l’enfant de Bella ? Serait-il comme elle ?

Non.

À nouveau, Zsadist grogna sans pouvoir s’en empêcher. L’enfant de Bella ne

serait pas comme elle. Parce qu’il y aurait aussi un géniteur dans l’équation.

Zsadist sursauta légèrement et regarda le tronc qu’il venait entendre craquer

sous la pression de ses doigts crispés. Il se força à lâcher prise, et mit ses deux

mains dans les poches de son pantalon de cuir. Un jour, Bella serait enceinte,

pensa-t-il, lugubre. Un jour, elle serait la mère de l’enfant d’un autre. D’un mâle

qui aurait le droit de la tenir dans ses bras— de l’embrasser— de la baiser.

Bordel, c’est bien comme ça qu’on créait un petit, non ? Zsadist avait déjà envie

de tuer ce mâle hypothétique.

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Il sut soudain qu’il valait mieux qu’il s’en aille.

Et qu’il choisisse la porte à l’autre extrémité de la maison— pour ne pas que

Bella le voie. Puis il tendrait le collier au doggen et foutrait le camp, très loin

d’ici...

Mais il ne pouvait pas. S’il ne devait jamais la revoir, autant qu’il reste à la

regarder le plus longtemps possible. À se gorger d’images pour se souvenir

ensuite de combien elle était belle à la lumière des chandelles. Avec des yeux

brillants, parce qu’elle ignorait qu’il était si près d’elle. Et donc n’avait pas à

s’inquiéter—

Et soudain, comme un cadeau miraculeux qu’il n’avait vraiment pas mérité,

elle sourit—

Non, mieux encore, elle se mit à rire. Zsadist regretta aussitôt de ne pas

entendre son rire. Puis il chercha à comprendre la raison de sa joie… Et ressentit

un violent serrement de cœur en voyant le mâle parler, souriant à sa shellane,

mais aussi à Bella. Le vampire agitait les mains. Racontait-il une histoire ? Une

plaisanterie ? Se pencha soudain en avant, le mâle posa une main sur l’épaule de

chacune des deux femelles. À nouveau, Zsadist sentit la jalousie le couper en

deux. Il était écartelé entre sa joie de voir Bella heureuse et son désespoir qu’elle

le soit à cause d’un autre.

Lorsque le mâle enleva enfin sa main de l’épaule de Bella, Zsadist avait de

plus en plus de mal à maîtriser sa rage. Il était possédé par l’instinct primitif de

tuer tout être qui s’approchait de sa femelle. Une horrible idée lui vint soudain.

Et si le vampire cherchait une seconde shellane ? Et si c’était la raison qui

avait poussé Bella à s’installer chez eux ? D’après Wrath, le mâle était un

lointain cousin à elle. Mais c’était sans importance. En vérité, dans la Glymera,

tous les aristocrates étaient plus ou moins cousins les uns des autres. Et ça ne les

empêchait pas de s’unir.

Zsadist serra ses deux bras autour de lui-même, luttant pour se contrôler. Il

pourrait tuer ce mâle. Il pourrait tuer quiconque qui manquerait de respect à

Bella. Elle méritait bien mieux qu’être une seconde compagne. Elle était unique,

et digne de la première place. Elle devait être honorée, vénérée, aimée. Et

chaque vampire, mâle ou femelle, qui s’approchait d’elle, avait sacrément intérêt

à l’apprécier à 100 %. À ne penser qu’à la rendre heureuse. Certainement pas en

la mettant en concurrence avec une autre.

Lorsque Zsadist regarda à nouveau par la fenêtre, il ne relâcha pas sa prise

autour de son torse. Il essaya juste de mieux comprendre la situation. À la façon

dont le mâle regardait sa femelle enceinte, leur union semblait solide. Vraiment,

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il semblait peu probable qu’un mâle aussi dédié cherche une seconde compagne.

Mais d’un autre côté, une femelle enceinte, courrait un risque certain. Tant de

vampires mouraient pendant leur grossesse ou leur accouchement. Peut-être le

mâle gardait-il Bella en réserve— au cas où sa compagne meure en couches ?

Zsadist se laissa tomber à genoux par terre, tellement son désir de tuer

devenait obsédant. Bordel de merde. Il lui fallait contrôler sa rage. Absolument.

Il avait promis à Phury de mieux se maîtriser. Et puis Bella… merde, Bella était

juste devant lui. Il n’était pas question qu’elle assiste à une crise de folie

furieuse avec Zsadist qui pénétrait de force dans la maison pour réduire ce

salopard en miettes.

Mais avec la Glymera et ses règles à la con, aucun scénario n’était impossible.

Zsadist détestait tous ces aristocrates, si imbus d’eux-mêmes, prêts à tout pour

assouvir leur besoin de reconnaissance sociale. Il évoqua le frère aîné de Bella.

Le mâle avait dû apprendre que sa sœur avait été honorée durant son appel. Or

Bella avait déjà vécu, dans le passé, une rupture orageuse— ce qui l’avait exclue

de la bonne société vampire. Après son dramatique enlèvement, aucun

aristocrate ne voudrait plus d’elle. Aussi, être la seconde compagne d’un lointain

cousin était sans doute la proposition la plus honorable qu’elle puisse recevoir.

Et même pas à Caldwell en plus, mais dans un trou comme Charleston— avec

un misérable moins-que-rien même pas capable d’installer un système de

sécurité correct. En fait, le mec n’était même pas aristocrate. Juste un civil aisé,

moins sensible sans doute aux règles strictes de la Glymera. Pas quelqu’un qui

serait capable de comprendre Bella. Ou qui saurait reconnaître le trésor qu’elle

représentait.

D’un seul coup, Zsadist se calma un peu, contre toute raison. Parce que Bella

ne s’intéressait nullement au mâle. Il suffisait de la regarder. Ouais, elle ne

ressentait rien pour lui.

Soulagé, Zsadist se remit à observer le trio. Le mâle n’essaya plus de toucher

Bella. Il était entièrement concentré sur sa shellane. Quant à Bella, elle regardait

ses mains. Mais elle sourit encore, une fois ou deux, à quelque chose que le mâle

disait. Malgré sa haine, Zsadist se raisonna. Jamais Bella ne se soumettrait sans

combattre à un diktat. Or, quand elle lui avait parlé à la clinique de Havers, elle

semblait accepter ce séjour à Charleston. Il se souvint de sa violente réaction,

quelques semaines plus tôt, quand son frère avait tenté d’obtenir un décret royal

pour la mettre en sehclusion. Jamais une telle femelle ne serait venue ici avec le

sourire pour s’unir avec un compagnon qu’elle n’avait pas choisi. Non.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

14

En pensant à la façon dont Bella aurait traité un mâle cherchant à la

soumettre, Zsadist eut un hochement de tête approbateur. Il était fier d’elle.

Infiniment.

Il sentit sa respiration se calmer, bien que le désir d’arracher la tête du mâle

reste sous-jacent en lui. Une fois encore, Zsadist examina son rival. Les chances

qu’avait ce minus de gagner Bella étaient vraiment très minces. Dans ce cas, qui

était-il ? Pourquoi lui souriait-elle ? Pourquoi riait-elle à ses plaisanteries ?

Pourquoi était-elle ainsi assise dans ce salon— chez lui— avec lui ? Peut-être

était-il… son ami ?

Mais ce mot provoqua en Zsadist un autre élan de jalousie. Oui, le mâle était

certainement un ami de Bella. Et pendant que lui, Zsadist, devait se cacher

derrière un arbre dans ce putain de jardin, son rival était assis près d’elle— à la

regarder— à lui parler— à la distraire.

Chère Vierge de l’Au-delà, Zsadist aussi voulait jouir d’un tel privilège. Il en

crevait même d’envie. Plus encore qu’il ne l’aurait cru possible. En fait, qu’il ne

puisse plus jamais coucher avec Bella était sans importance. Qu’elle regrette le

temps passé avec lui était sans importance. Qu’elle ne veuille plus de lui était

sans importance. Ce qui comptait était le droit de s’asseoir avec elle… De la

regarder… De la faire rire… De lui parler. Ainsi, peut-être ne la perdrait-il pas

complètement...

Mais quelles chances avait-il qu’elle l’accepte comme ami ?

Il fut surpris par la violence de son désir. De son envie. De son besoin. De son

élan irrésistible. Il évoqua sa douleur à l’idée de devoir s’en aller. Á

l’insupportable perspective que ce serait peut-être la dernière fois qu’il la verrait

sourire. Il pensa à l’incroyable hypothèse qu’un jour peut-être, ce serait grâce à

lui qu’elle sourirait.

Oui, les pensées voletaient dans sa tête, toutes reliées au fait que— un jour

peut-être— il pourrait être son ami. Un rêve fou, sans doute, mais depuis

combien de temps n’avait-il pas rêvé ?

Il s’appuya contre l’arbre, parce que ses jambes ne le soutenaient plus. Il se

sentait faible, presque pathétique. Il entendit un craquement dans le bois, et ne

s’en soucia pas. La réalité lui revenait en force.

Lui— devenir son ami ? Quelle foutaise ! Qu’avait-il après tout à lui offrir ?

Comment pourrait-il la faire rire comme l’autre mâle l’avait fait ? Il ne

connaissait aucune histoire— aucune plaisanterie— rien qui soit susceptible

d’intéresser ou d’amuser une femelle. Bordel, il n’était même pas capable de lire

ou d’écrire...

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Il ne savait absolument rien faire d’autre que combattre. Tuer. Mettre en

pièces les ennemis de la race. D’accord, en ça, il était doué. Létal même. Mais

ce n’était pas terrible comme talent pour briller en société.

Alors, qu’avait-il à offrir à Bella ? Que pouvait-il partager avec elle ? Bordel

de merde, est-ce que vraiment il se voyait, assis à côté d’elle— à boire un thé

ridicule— sur une chaise ridicule— autour d’une table ridicule ? Non. Il serait

comme une anomalie monstrueuse dans son monde parfait. Il n’y avait pas de

place pour lui auprès d’elle. Phury aurait su quoi faire. Son jumeau aurait été

parfait. Rhage aussi. Ou Havers. Ou même ce connard de mâle qui vivait dans

cette foutue maison. Oui, mais pas lui. Cette idée était grotesque. Et—

Et pourtant… comme il en avait envie. Il désirait devenir l’ami de Bella plus

qu’il n’avait jamais rien désiré d’autre de toute sa vie.

Cherchant désespérément à se raccrocher à quelque chose— à un espoir, aussi

mince soit-il— Zsadist se demanda s’il pouvait changer son apparence. Ah, pas

sa cicatrice… Qui était à jamais gravée dans sa chair. Mais le reste ? Déjà, ses

yeux étaient une amélioration flagrante. Oui, il avait désormais les mêmes yeux

jaunes que Phury. Nettement mieux que l’ancienne couleur, noire et terrifiante

(à ce qu’il avait entendu dire.) S’il avait changé ses yeux, peut-être pourrait-il

changer autre chose ? Après tout, même Phury avait été affreux en coupant ses

longs cheveux pour se faire passer pour lui, Zsadist, et tromper le lesser qui le

recherchait…

Zsadist décida de ne plus se raser les cheveux. Il allait le faire. C’était

grotesque— ridicule… Tous ses Frères allaient se foutre de lui— Hollywood

surtout— Mais Bella le valait bien. Oh que oui. Il allait endurer les plaisanteries

pour elle. Et laisser pousser ses cheveux pour elle. Il se souvint que Wrath, tout

indépendant et orgueilleux qu’il soit, portait les siens jusqu’aux reins parce que

sa shellane, Beth, les aimait comme ça.

Incroyable ce qu’un mâle dédié était prêt à faire pour sa femelle.

Quoi d’autre ? Que faisait Phury de plus que lui ? Manger. Bon, pour ça,

Zsadist était déjà dans les rails. En sortant de chez Havers, ayant échappé de peu

à la mort, il avait décidé d’arrêter de jeûner. D’accord, au début c’était surtout

pour que son jumeau cesse de s’inquiéter à son sujet. Il s’y appliquait

sincèrement. Bien sûr, ça ne faisait pas longtemps, mais quand même… Il avait

la sensation d’avoir déjà un peu engraissé. Après un seul jour.

Il ne savait pas trop combien de kilos il prendrait, mais il verrait bien au fur et

à mesure. Peut-être pourrait-il poser la question à Havers ? Histoire de savoir ce

qu’il devait manger. Tous les autres Frères étaient bien plus imposants que lui.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Aussi leur exemple était bon à suivre. S’il mangeait autant qu’eux, ça pourrait

l’aider.

Et puis, désormais, il prendrait régulièrement une veine. À cette idée, il serra

si fort les poings que ses ongles lui rentrèrent dans la peau. Il n’avait aucune

envie d’ingurgiter le sang d’une femelle vampire qui n’était pas Bella. Surtout

pas après avoir goûté à son sang délicieux, enivrant, unique. Mais c’était une

nécessité, aussi il le ferait. Pour devenir un mâle que Bella serait susceptible de

faire rentrer chez elle un jour. Un vampire qui ne lui ferait pas honte.

Il savait que Rhage prenait la veine d’une Élue blonde qui venait

régulièrement au manoir. Après tout, sa shellane, Mary, était humaine. Aussi le

mâle devait-il lui-aussi trouver une autre solution. Et Zsadist ferait pareil.

L’Élue de Rhage pourrait sans doute le servir… sinon, Zsadist demanderait à

Phury de l’aider. Parce que son jumeau devait bien se nourrir régulièrement lui

aussi. Mais sur qui ? Zsadist trouva surprenant de n’en avoir aucune idée. Il

aurait pu poser la question plus tôt.

Bien. Ça lui faisait déjà tout un programme : Manger. Boire. Se laisser

pousser les cheveux.

Et ensuite… ? Et bien— il serait tout comme Phury— sauf pour sa cicatrice.

Mais ça n’avait rien de catastrophique, pas vrai ? Beaucoup de mâles portaient

des cicatrices. Pas aussi marquées que la sienne, d’accord, mais quand même…

Á travers la fenêtre, il gardait les yeux fixés sur le visage de Bella. Et

n’arrivait pas à penser autre chose qu’à ce qu’il ressentirait assis près d’elle— à

lui parler— à la voir sourire. Ce qui pouvait arriver. S’il ressemblait à son frère

oui, ça pourrait arriver.

D’un seul coup, son cerveau fut en feu. Il se sentit plus concerné et concentré

qu’il ne l’avait jamais été— même en pourchassant le lesser qui avait enlevé

Bella.

Il allait apprendre à lire. Oui, il allait faire tous les efforts nécessaires pour

ça. Le jour-même, pour Phury— pour que son jumeau apprécie ses efforts—

Zsadist avait tenu à rencontrer Mary et à lui demander son aide. Mais désormais,

c’était autre chose. Désormais, il voulait apprendre pour lui-même. Mary avait

déjà accepté d’être son professeur. Il mettrait tout ce qu’il avait dans ce projet,

aussi dur que ce soit. Il écouterait tout ce que la femelle avait à lui apprendre. Et

bordel, il travaillerait comme un malade.

Parce qu’il n’avait pas le droit de s’approcher de Bella tel qu’il était

aujourd’hui : Illettré, obtus, et aussi frustre qu’un esclave de merde. Oui, aussi

borné que l’esclave que le destin l’avait forcé à devenir. Non, s’il voulait

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devenir l’ami d’une telle femelle, il devait cesser de se sentir esclave. Il devait

porter la tête haute, et prendre conscience d’être un guerrier. Il devait faire

honneur à son sang. En fait, s’il pouvait se montrer digne de tous les autres

membres de la Confrérie de la dague Noire, alors… Alors il lui serait possible

de revenir voir Bella sans honte. D’entrer dans la maison. D’y être accueilli,

reçu. Et peut-être lui parlerait-elle. Lui sourirait-elle...

Oui, il allait apprendre à lire. Il allait aussi interroger Phury, pour savoir ce

qu’il devait faire d’autre. Ce qu’un guerrier apprenait de sa famille de sang au

cours de son enfance, il allait le découvrir à présent. Il était probable qu’il aurait

un mal de chien à ingurgiter toutes ces nouvelles notions. Mais qu’importe. Il

était prêt à travailler dur.

Mary lui avait affirmé qu’il pouvait apprendre. Elle refusait d’admettre qu’il

soit con. Ou lent d’esprit. Il avait confiance en elle. Il avait apprécié le courage

et le calme de cette frêle humaine dès la première fois où il l’avait vue. Sans

doute pourrait-elle lui offrir plus qu’une instruction basique.

Seigneur ! Il avait tant de choses à apprendre que la tête lui tournait. Mais il

ferait aussi vite qu’il le pouvait pour pouvoir revenir ici, et frapper à cette porte,

avant qu’un autre mâle ne remarque Bella et ne cherche à l’emmener au loin.

Et si elle refusait de coucher avec lui ? Et si elle ne voulait pas de lui comme

son compagnon ? Tant pis. Au moins, il serait son ami. Il allait se rendre digne

d’être son ami. S’il apprenait assez vite, peut-être pourrait-il revenir avant même

qu’un autre mâle n’ait eu le temps de la voir. Parce que si elle avait un

compagnon— cette seule idée le rendit enragé— mais il se força à rester calme.

C’était difficile. Mais il fallait qu’il apprenne à contrôler sa colère. Il ne pouvait

pas s’approcher d’elle en étant aussi volatil.

Il décida d’accepter tout compagnon qu’elle pourrait trouver. Du moins, après

s’être assuré que le mâle en question était assez bien pour elle. Il faudrait que

Zsadist devienne un très bon ami pour que même un compagnon ne puisse le

séparer de Bella. Ah— Il se contenterait de ça. Il le faudrait bien. Ce serait

infiniment mieux que rien. De plus, en tant qu’ami, il pourrait la protéger. Et

trouver plein de façons de la faire sourire.

Il sentit la force de sa résolution monter en lui… tout en la regardant rire, une

fois encore, derrière la fenêtre, toujours assise devant la petite table. Il allait

acquérir les manières nécessaires pour s’asseoir à une table comme ça auprès

d’elle— et même boire son thé dans une tasse de porcelaine.

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Et alors seulement, il reviendrait, et lui rendrait son collier. Avec la silhouette

imposante d’un guerrier. Un visage plus avenant. Un esprit plus cultivé. Oui, il

serait un vampire différent quand il reviendrait frapper à cette porte…

Il espérait désespérément que ses efforts suffiraient à ce qu’elle le laisse

entrer. À ce qu’elle lui offre une tasse de thé. À ce qu’elle lui donne une petite

chance— et il la saisirait et s’efforcerait de la faire fructifier. Cette fois-ci, elle

n’aurait rien à regretter. Il lui montrerait qu’il était capable de changer. De

s’améliorer. D’être digne d’elle. Et chaque fois qu’il verrait sur ce ravissant

visage ce merveilleux sourire, il le savourerait

Et ce serait le but de sa vie. Sa raison de vivre.

Zsadist jeta un dernier regard à travers la fenêtre, dans le salon. Et d’un seul

coup, Bella tourna la tête, ses yeux fouillant l’obscurité. Seigneur, ils étaient si

brillants. Si bleus. Si assortis à sa robe. De la couleur de l’océan. De la couleur

du ciel à la tombée du soir. Zsadist s’effondra à nouveau contre le tronc, certain

qu’elle ne pourrait pas le voir, mais se sentant néanmoins exposé.

Elle ne le vit pas. Peu après, elle détourna la tête. Mais ce fut suffisant. Elle

était tout ce dont il avait besoin. Elle était pour lui le monde entier. Une longue

route l’attendait, difficile, ardue. Mais il la franchirait pour aller jusqu’à elle. Á

chaque pas, il se souviendrait de la couleur de ses yeux, de la courbe de sa

bouche, de sa silhouette assise dans sa petite chaise…

Avec un soupir, il se dématérialisa. Et retourna au manoir, le collier de

diamants toujours serré dans son poing, au fond de sa poche.

***

Quand il reprit forme dans la cour intérieure, la lune était haute, et illuminait

le marbre clair de la fontaine. Zsadist traversa l’étendue gravillonnée, monta les

marches, et ouvrit la porte qui entrait dans le sas. Il était temps de se mettre au

boulot. Bordel de merde. Si seulement il savait par quoi commencer. Dès qu’il

mit le visage devant la caméra de sécurité, la porte intérieure s’ouvrit. Il entra

dans le grand hall, et vit Phury et le gosse, John, descendre l’escalier. Curieux,

remarqua-t-il. Phury dévisageait le gosse comme s’il avait vu un fantôme. À sa

vue, tous deux parurent surpris. Puis ils le regardèrent, l’air interrogateur.

Zsadist s’éclaircit la voix, mal à l’aise. Tu prends un nouveau départ, se

rappela-t-il. Tu es censé être plus sociable, plus aimable. Une nouvelle fois, il se

racla la gorge, se demandant si vraiment il lui serait possible de s’améliorer.

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N’était-ce pas une mission impossible ? Non. Certainement pas. Il ne

l’accepterait pas.

—Salut, Phury. Salut, John, dit-il d’une voix rauque.

Il fut heureux de constater que le gosse le regardait calmement. Au moins, il

n’avait plus peur de lui. Ça devait compter pour quelque chose.

Phury se frotta le cou, d’un air bizarre. Mais Zsadist avait l’esprit trop agité

pour s’y attarder.

—Salut, Z, répondit son jumeau. D’où viens-tu ?

Zsadist sentit sa gorge se serrer. Il ne pouvait pas expliquer à Phury ce qu’il

venait de faire. Il ne voulait raconter à personne qu’il était resté des heures dans

un jardin, à espionner Bella. Alors ? Que pouvait-il répondre pour paraître

normal ?

—J’ai fait un petit voyage… Assez loin d’ici. (Oui, c’était pas mal. Et vrai, en

plus. Il fallait qu’il continue… histoire de parler, de communiquer.) Que se

passe-t-il ?

Quand Phury eut un geste fébrile de la main, en désignant John, Zsadist

devina que son frère avait dû abuser de sa drogue, une fois de plus.

— Je vais aller faire réviser quelques trucs à John au gymnase.

Le gymnase. L’entraînement. Oui, c’était aussi un bon début. Zsadist s’était

même risqué, quelques heures auparavant, à se proposer comme professeur pour

les élèves du programme. Voilà sa chance de tester ses capacités. Vas-y !

S’ordonna-t-il.

Il referma la porte derrière lui, et prit son courage à deux mains :

— Et si je venais avec vous ? (Merde, sa voix n’était pas très ferme. Il fallait

qu’il fasse mieux que ça. Il fit un pas en avant.) Ou peut-être devrais-je le

formuler autrement. Puis-je venir avec vous ?

Quand Phury et John le regardèrent fixement, Zsadist déglutit, soudain mal à

l’aise. Merde de merde. Était-il vraiment si différent de d’habitude ? Était-ce si

étonnant que pour une fois, il agisse… normalement ? Il sentit sa mâchoire

durcir. Oui bien sûr, c’était étonnant. Mais plus maintenant. Á partir de

maintenant, il allait changer. S’ils avaient l’air aussi surpris, c’était bien la

preuve que ce changement était manifestement nécessaire.

Ce fut le petit muet, John, qui hocha la tête le premier tandis que Phury

demeurait tétanisé quelques secondes de plus. Mais son jumeau finit par réagir :

— Bien sûr, mon frère, dit Phury. Viens avec nous. Tu es toujours… le

bienvenu.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Bordel, quelle connerie ! Il n’y avait qu’auprès de Phury que Zsadist était le

bienvenu. Phury avait toujours été le seul à être de son côté. Et bien, il allait

falloir qu’il agrandisse son cercle. Chère Vierge Scribe, même si ça devait le

tuer, il allait le faire.

Zsadist traversa le sol brillant de la mosaïque— qu’il avait toujours détestée.

Parce qu’il y avait trop de couleurs mélangées au même endroit. Il déglutit

encore une fois, et se lança :

— Merci. Merci beaucoup.

Ils s’engagèrent ensemble, tous les trois, dans le passage souterrain. Tandis

qu’ils avançaient vers le centre, Zsadist jeta un coup d’œil à son frère et à John

et songea que la vie n’hésitait pas à vous balancer de sacrés pavés en travers de

la gueule. Phury avait reçu le sien avec lui. Le gosse avait perdu la seule famille

qu’il ait jamais connue, après une vie solitaire et difficile— à ce que Zsadist

avait cru comprendre. Et lui ? Merde, sa vie avait été une vraie galère… qu’il

voulait oublier.

Et pourtant ils étaient là, ensemble, tous les trois. Trois vampires. Marchant

vers le même but. Agissant de leur mieux. S’entraînant pour combattre. Il

évoqua aussi la Confrérie— six Frères, en les comptant tous, même celui qui

manquait à l’appel. Six guerriers. Qui combattaient parce qu’ils étaient forts.

Parce qu’ils étaient libres. Parce que malgré tous les fardeaux qu’ils avaient à

porter, ils possédaient chacun un but dans la vie. Une raison de continuer.

Oui, lui aussi. Pour la première fois de sa vie, il avait en vue quelque chose

qui valait la peine de lutter.

Une raison de vivre.

Et bordel, c’était vraiment génial.

FIN

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SOUVENIR SECRET

“One Treasured Memory” inspiré par J. R. Ward)

Cette fan-fic se situe environ au milieu du tome 4.

***

Á Caldwell, dans l’État de New-York, au manoir de la Confrérie de la Dague Noire, le vampire

Vishous et l’humain Butch O’Neal partagent la maison de gardien, et une amitié très forte…

Butch O’Neal est un ancien inspecteur de police révoqué pour brutalité. Depuis lors, il vit avec la

Confrérie et les aide dans la limite de ses capacités.après avoir abandonné tout espoir de conquérir

Marissa, la femelle vampire qu’il adore, il perd aussi son envie de vivre.

Vishous est le plus intelligent des Frères. En plus d’un don de double vue, il possède une main

nitescente aux incroyables capacités de destruction. C’est un guerrier froid et solitaire, qui considère

Butch comme son unique ami sur terre... et sa propriété exclusive.

.

***

Butch se leva, alla jusqu’à sa penderie et sortit son sac Gucci… avant de

réaliser qu’il ne voulait rien emporter de cette ancienne vie en la quittant.

Il rejeta le sac, mit un jean et un sweater, enfila des chaussures de sport et

retrouva son ancien portefeuille avec les clés qu’il avait emmenées en

s’installant avec la Confrérie. Il regarda le simple anneau argenté, et se souvint

ne rien avoir déménagé de son appartement en septembre dernier. Après tout ce

temps, son propriétaire avait dû tout débarrasser, non ? Tant mieux. Il ne

voulait pas davantage retourner là-bas.

Il laissa donc les clés, sortit de sa chambre… et réalisa qu’il n’avait plus de

voiture. Il jeta un œil à ses chaussures. Il allait devoir marcher jusqu’à la Route

22, puis faire du stop à partir de là.

Il n’avait aucun plan précis sur ce qu’il voulait faire, ni où il voulait aller. Il

savait simplement qu’il allait quitter les Frères et Marissa, un point c’est tout. Il

savait aussi que pour que cette coupure soit définitive, il devait quitter Caldwell.

Peut-être pourrait-il aller vers l’ouest…

Quand il entra dans le salon, il fut soulagé de ne pas y voir V. Dire adieu à

son coloc serait presque pire que quitter Marissa. Autant éviter une scène

pénible.

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Merde. Qu’allait faire la Confrérie en apprenant son départ ? Il en savait

beaucoup à leur sujet— N’importe. Il ne pouvait pas rester, et s’ils voulaient

prendre des mesures à son sujet, voilà qui le libèrerait définitivement.

Quant à ce que l’Omega lui avait fait, et bien il n’avait pas de réponse sur ces

histoires de lessers. Mais au moins, il n’aurait plus à craindre d’être un danger

pour les Frères s’il ne devait plus jamais les revoir.

Sa main était sur la porte du sas quand une voix demanda :

-Où vas-tu, Cop ?

***

Butch sursauta.

Merde ! C’était Vishous. Le mec devait être à peine rentré car il portait encore

un pantalon de cuir. Butch ferma les yeux, et marmonna quelques jurons entre

ses dents. Il avait vraiment espéré se tailler discrètement. Appuyant la tête contre

la porte, il chercha désespérément les mots qui lui permettraient de convaincre

son meilleur ami.

Le silence, un long moment, pesa entre les deux mâles.

— Hey, Cop ? Ça va ?

Ouais, Butch comprenait que V soit inquiet de son silence inaccoutumé. Parce

que, jusqu’ici, ils n’avaient jamais trouvé difficile de se parler l’un à l’autre. En

fait, V et lui partageaient tout.

— V… Je m’en vais, dit Butch.

Il ne regardait pas le vampire— ne le pouvait pas. Pas avec cet effroyable

mélange de culpabilité et de couardise qu’il ressentait et qui lui pesait comme un

camion jusqu’au fond des tripes.

Quand seul le silence lui répondit, Butch ne put s’empêcher quand même de

jeter un coup d’œil—

Les yeux étrécis, Vishous tirait à grands coups sur la cigarette roulée qu’il

tenait à la main.

— Et pourquoi ? Dit-il soudain.

Devant ce ton si calme, Butch eut une bouffée de colère. Comment V ne

comprenait-il pas ce qu’il éprouvait ? À quel point c’était dur pour lui ? Butch

n’avait aucune envie de partir, mais il n’avait PAS le choix.

Les poings serrés, il s’écarta de la porte et se retourna lentement pour faire

face au vampire.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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— Je ne suis pas à ma place ici, V. Je n’ai rien qui me retienne. Je ne suis

qu’un parasite venu d’autre monde que le tien Et bordel, je n’ai même plus

aucune possibilité de retourner là où j’étais avant. Je n’ai pas de boulot. J’aime

une femme que je ne peux pas avoir. Parce que je ne saurais pas la protéger. Ni

lui donner ce qu’elle mérite. Alors je m’en vais— dans l’espoir de trouver un

endroit où je pourrai enfin servir à quelque chose. Un endroit où je pourrai être

moi-même. Où mes lacunes ne me seront pas sans arrêt renvoyées à la gueule…

Butch s’interrompit, l’esprit soudain à court de mots. Il sentit que son visage

s’empourprait, comme si sa respiration trop rapide n’envoyait plus assez

d’oxygène dans ses poumons. Ses yeux le brûlaient, mais il se refusait à ouvrir

les vannes. Vraiment, ça serait le comble du pathétique.

— Écoute, mon pote…

Vishous s’exprima d’une voix calme, avant de s’avancer pour poser une main

sur l’épaule de son copain. Il ne savait pas trop pourquoi Butch agissait ainsi—

pourquoi cette crise arrivait maintenant— mais il était certain que c’était sans

doute sa seule chance de réconforter cet humain comme il avait si souvent rêvé

de le faire.

Il était aussi conscient que Butch ne POUVAIT PAS partir. À aucun prix. Dès

le départ, les vampires avaient prévenu le flic qu’une fois la ligne franchie,

aucun retour en arrière ne lui serait permis.

De plus, Vishous n’arrivait pas à admettre la possibilité de perdre son copain

humain. En l’évoquant simplement, il éprouva une telle douleur qu’il coupa net

à cette idée.

Le flic tremblait. Vishous eut la sensation qu’il était très proche des larmes.

Un problème avec Marissa sans doute. Satanée femelle. V ne comprenait pas

trop comment la situation avait si vite dégénéré, ni pourquoi Butch l’encaissait

aussi mal, mais quelle importance à présent…

— Butch ? Insista Vishous en secouant légèrement l’épaule qu’il tenait, avant

de forcer son ami à se retourner pour lui faire face.

Des yeux noisette au regard perdu plongèrent dans les siens, aussi blancs et

durs que des diamants. V eut un bref halètement. Pas à dire, le flic était vraiment

au fond du trou. Vishous ressentait son désespoir dans son propre sang, comme

une huile trop épaisse qui souillait ses veines, les encrassaient. Il eut soudain la

vision d’une corde accrochée à un arbre mort, avec un sinistre nœud coulant au

bout—

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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La voix de Butch le ramena sur terre, quand un appel désespéré émergea des

lèvres de l’humain :

— V… mon pote. J’ai BESOIN de trouver ma place quelque part.

Devant une telle angoisse, le cœur de Vishous eut un battement d’empathie.

Sa poitrine le brûlait tellement qu’il avait du mal à respirer. Ouais, la douleur qui

émanait de son copain était intense. C’était comme si un grand mur

impénétrable s’était élevé entre deux. Le vampire était conscient que la seule

façon de faire tomber un tel obstacle était de le dynamiter. Parfois, la violence

était la seule solution.

D’un geste brusque, il agrippa à deux mains le visage de Butch et l’approcha

du sien.

— Tu as ta place quelque part, mec. Tu as ta place ici… Avec moi ! Rugit-il,

les lèvres relevées, les canines allongées.

Devant une telle agression, il vit les yeux noisette s’écarquiller, mais Vishous

s’adoucissait déjà.

Surpris par sa propre réaction, V secoua la tête, et se força à rester concentré

sur Butch. Il s’écarta légèrement, sans relâcher le crâne de son copain, et caressa

du pouce les joues râpeuses. Il lui fallait calmer la situation. Il avait l’intention

d’être ferme, bien entendu, mais pas de terroriser ce pauvre mec, surtout dans

son état.

Malgré ça, Vishous avait la sensation qu’on l’avait écorché vif. Plus Butch

parlait de son départ, plus sa blessure devenait profonde.

Il se racla la gorge, et essaya de raisonner son coloc.

— Tu as ta place ici, d’accord ? Je sais bien que tu n’es qu’un humain, mais

quand même, ta place est avec nous. J’en ai eu la vision.

— Mais enfin, V… Comment est-ce possible ? Je ne suis pas un vampire, et

encore moins un Frère. Je suis à peine une roue de secours, toujours laissée sur

la touche— ou à la maison.

Se libérant des mains du vampire Butch s’écarta, avant d’arpenter le salon à

grands pas. Il était à bout de nerfs. Il ne pourrait jamais être biologiquement

celui dont Marissa avait besoin et l’idée qu’elle prenne la veine d’un autre... Et

même— bordel, il lui avait fait de la peine, et ça le tuait. Aucune chance que les

choses s’améliorent entre eux deux. Le monde vampire n’était pas pour lui.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Quant au monde humain ? Il avait perdu son boulot autrefois, ce qui prouvait

bien qu’il n’était pas bon à grand-chose. Sa famille le haïssait. Du coup, il vivait

actuellement entre deux univers, et ni l’un ni l’autre ne voulait de lui.

Ou du moins, ne l’acceptait tel qu’il était.

Il avait beau tourner et retourner ses options dans sa tête, il ne voyait aucune

solution, et se heurtait sans cesse à des impasses. Ça le rendait fou. Sous le coup

de la frustration, il avait de plus en plus envie de hurler.

En silence, Vishous regardait Butch arpenter l’espace entre le baby-foot et le

canapé. L’humain ressemblait à un animal en cage, de ceux qui deviennent

enragés de rester prisonniers. Sans doute parce qu’ils avaient reçu trop de coups.

Il devait absolument faire quelque chose. Mais quoi ? Il eut soudain des

images précises de lui qui sautait sur le flic, et le couchait sur le cuir du canapé.

Avant de peser de tout son poids sur lui, pour l’embrasser voracement. Il vit

voler des vêtements, des corps nus qui se pressaient l’un contre l’autre, peau

contre peau, des mains avides, des langues humides—

Se reprenant avec difficulté, Vishous avança et se plaça sur le chemin de

Butch, près du canapé. Le flic le remarqua à peine. Il continuait à marmonner

qu’il avait tout raté, qu’il avait passé sa vie à fuir— il ne savait trop quoi, sa

différence sans doute. Et chaque échec qu’il ressassait sembler ajouter à son

désespoir.

Vishous sentit sa colère monter. En partie pour Butch, et pour la vie merdique

que son copain avait dû subir. En partie— en très grande partie— parce qu’il

voulait vraiment ce mâle, tout en sachant que jamais, il ne pourrait assouvir sa

faim.

Butch finit par relever les yeux sur V. Ils restèrent un moment, l’un devant

l’autre, à se regarder.

D’un geste soudain, sans prévenir, Butch envoya son poing en avant, droit

dans le visage du vampire. Plus de surprise que de douleur, Vishous grogna,

mais ne répliqua pas. Quand Butch attaqua à nouveau, V sentit ses dents vibrer.

Puis il se mit à rire, et laissa son copain se défouler et l’utiliser comme

punching-ball, hurlant des imprécations entre chaque coup.

— Tu— aurais— dû— me— tuer— dès— le— début. Merde !

Quand Butch finit par s’arrêter, il était haletant. Et n’osait pas relever les yeux

pour vérifier le massacre qu’il avait fait de la tronche de son pote. Il lui jeta

enfin un coup d’œil honteux.

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— Tu te sens mieux ? Demanda Vishous qui le regardait en riant, l’air

compréhensif

— Pas vraiment, cracha Butch. (Il semblait enragé de remarquer le visage

parfaitement net de son copain.)

— Tu veux continuer ?

— Ouais.

Sur cet aveu, l’humain se jeta sur le vampire, qui cette fois lui renvoya ses

coups.

Durant un long moment, ils luttèrent l’un contre l’autre, avant de terminer

écroulés sur le sol, en un combat acharné où tous les coups étaient permis.

Du côté de Vishous, sa violence exprimait la colère, le désir, et le mépris qu’il

se portait. Et les deux mâles étaient aussi heureux l’un que l’autre de vider leur

frustration à grands coups de poing.

N’était-ce pas la meilleure façon d’utiliser l’amitié ?

Un bon moment plus tard, ils restèrent côte à côte étendus sur le sol, à fixer le

plafond, aussi essoufflés et sanglants l’un que l’autre.

— Alors, Cop ? Tu es calmé ? Demanda V en roulant sur lui-même avant de

cracher du sang.

Il avait la lèvre éclatée et les jointures meurtries. Plus plusieurs bleus et

entailles sur la figure. C’était carrément jouissif. Vishous n’aurait pas échangé

ce moment contre la meilleure Grey Goose du monde.

Après un grognement d’approbation, Butch se releva prudemment et s’assit.

Lui aussi avait les jointures abîmées. Et une arcade ouverte qu’il tâta du bout des

doigts. Il avait également les yeux larmoyants, ce qui l’ennuyait profondément.

Il essuya le sang de ses jointures sur le tapis, avant de se passer la main sur la

figure.

Puis il jeta un coup d’œil au vampire, réalisant soudain ce qu’il avait forcé

son copain à faire. Ce n’était pas de la faute de V que sa vie soit un tel merdier.

Et c’était vraiment lamentable de sa part d’avoir utilisé le mec comme punching-

ball. Merde, n’était-ce pas exactement ce que Zsadist réclamait de son jumeau

avant de rencontrer Bella ?

Mort de honte, Butch gardait les yeux sur le tapis. Et réalisa soudain, qu’il y

avait une tache aussi grande que la Floride juste sous la table. Comment diable

ne s’en était-il jamais rendu compte jusque-là ?

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— Non, dit calmement Vishous. Tu n’as rien en commun avec Zsadist. Et

pour la tache, c’est moi qui l’ai faite.

Tout à coup, V était assis juste à côté de lui, et le vampire plongeait ses

prunelles lumineuses dans celles de Butch.

— Tu n’as rien en commun avec Z, mec. Après avoir subi un siècle de

tortures, mon Frère était complètement tordu, malade. Pour trouver une soupape

à sa colère, Z était devenu accro à la douleur. Merde, on aurait vraiment dit qu’il

ne vivait que pour ça.

— Oh Seigneur ! Je ne le savais pas, dit le flic, effondré. Merde.

Butch passa une de ses mains— la moins abîmée— à travers ses cheveux

ébouriffés. Et Vishous regarda d’un œil avide la façon dont les muscles du mâle

gonflaient le tissu de sa chemise quand son bras bougeait.

L’humain ne sembla pas remarquer cette attention quand il tourna les yeux

vers Vishous.

— Écoute, je suis franchement désolé, s’excusa-t-il. Je ne sais pas ce qui m’a

pris. Je n’aurais jamais dû m’en prendre à toi.

Vishous haussa les sourcils. « Aucune importance, » Exprima-t-il en silence.

Puis il regarda sa main gantée, qu’il pliait et dépliait machinalement.

— Mais merci quand même… Continua le flic. C’était plutôt sympa, tu

sais… tout ça. J’ai vraiment aimé vivre ici avec toi, partager ce que nous avons

partagé. J’avais besoin de… Enfin, tu sais… Merde, V. J’arrive même plus à

trouver mes mots.

Quand Butch eut un rire sans joie de sa maladresse, Vishous se releva et lui

tendit la main pour l’aider en faire autant. Butch indiqua du menton le couloir

qui menait à sa chambre.

— Avant d’être encore plus pathétique, dit-il, je vais me pieuter un moment.

Tandis qu’il s’éloignait, la tête basse, Vishous ne put s’empêcher de le suivre

des yeux. Il était sidéré. Incroyable. Le mec n’avait rien remarqué— rien

compris.

Incapable de s’en empêcher, il fonça derrière son meilleur ami.

Dans la chambre, Butch refermait sa penderie quand un camion-remorque le

heurta dans le dos, l’écrasa contre le mur. Puis une poigne féroce le retourna, et

il se retrouva face-à-face—

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Nom de Dieu… C’était Vishous. Et le mec était carrément terrifiant avec ses

yeux luisants, presque sauvages. Il avait les lèvres relevées et grondait comme

un fauve, exhibant des dents longues et pointues.

— Sombre connard ! Hurla le vampire. Tu ne comprends vraiment rien.

Pour la seconde fois, en l’espace de quelques minutes, Butch se retrouva à la

fois sidéré et quelque peu effrayé par son copain.

— Euh…comprendre quoi, V ? Merde, dit-il.

Il essaya bien de se dégager, mais la force du vampire, infiniment supérieure à

la sienne, le maintint sans peine contre le mur.

Puis Vishous se pencha en avant, tout vacillant, avant de laisser tomber sa tête

contre l’épaule de Butch. Le grand corps eut un frémissement, et Butch crut

entendre le bruit d’un sanglot étouffé…

— J’ai essayé de le cacher, marmonna le mâle. Si longtemps. Mais ça me

bouffe en permanence. Et maintenant tu me parles de partir ? Merde. Je ne peux

pas…

Vishous écarta brutalement sa tête, et Butch fixa dans les yeux le mec qu’il

connaissait si bien. Du moins, c’est ce qu’il croyait.

En croisant le regard de diamant, Butch lut l’infinie tristesse qui y brillait— et

aussi quelque chose d’autre— qu’il n’osait pas nommer. Et curieusement, qu’il

n’osait pas davantage remettre en question.

Depuis le tout début, il s’était senti infiniment proche de ce vampire. Après

tout, ils avaient quand même partagé une chambre la nuit même de leur

rencontre. Ensuite, ils avaient passé des nuits et des nuits à parler devant un

verre, aussi bien au ZeroSum qu’à la Piaule. Ils avaient des goûts communs,

dont une passion pour le base-ball, et les Rex Sox de Boston. Butch avait même

bu le sang de V, quelques semaines plus tôt, et le vampire lui avait sauvé la vie

grâce à ça, quand il avait été capturé et torturé par l’Omega.

En principe, un humain ne buvait jamais sur un vampire, ni un mâle sur un

autre. Butch savait que V avait brisé pour lui une loi de sa race. Mais il n’avait

pas hésité, pour contrer une vision où il avait vu Butch mourir. Et la main du

vampire, ou du moins la lumière intense qui en émergeait, était la seule chose

qui réussissait à sauver Butch de la noirceur que l’Omega avait incrustée en lui.

Oui, pas à dire, V et lui partageaient un lien très fort qui allait bien au-delà de

la simple amitié.

Butch y réfléchissait encore tandis que Vishous se frottait les yeux, avant de

dire :

— Je ne peux pas supporter que tu partes, Butch.

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Il ouvrit la bouche pour discuter, mais Vishous l’en empêcha.

— Je ne peux pas supporter que tu me quittes.

À cette déclaration, les yeux de Butch s’écarquillèrent. Avait-il vraiment bien

compris ? V sous-entendait-il vraiment que…

Le vampire lui prit le visage dans sa main gantée. Butch sentit l’énergie

vibrante qui émanait à travers le cuir.

— Comment peux-tu dire que tu n’as pas ta place ? Comment peux-tu croire

que personne ne veut de toi ? C’est juste que tu n’as jamais rien compris.

La voix de Vishous était douce et envoûtante. On aurait presque dit une

shellane murmurant des mots d’amour à son hellren. Butch en ressentit un

frisson électrique tout au long de l’échine.

Il déglutit péniblement tandis que V s’approchait de lui, pressant tout son

corps dur contre le sien. Inconsciemment, il relâcha ses mains du mur pour les

s’agripper aux bras du vampire. Qui émit un ronronnement sensuel à ce contact,

avant de se pencher en avant, lentement, très lentement… jusqu’à poser ses

lèvres sur celle de Butch.

Il y eut comme un craquement, une sorte d’étincelle qui les fit vibrer tous les

deux. Après un sursaut de surprise, Butch s’abandonna, et laissa la chaleur le

traverser, énergisant d’un seul coup le moindre nerf de son corps.

Tandis que le baiser devenait plus profond, plus passionné, les lèvres de

Vishous se firent tentatrices, offrant plus qu’elles ne prenaient, ouvrant un

horizon incroyablement nouveau. Butch sentit toute pensée cohérente disparaître

de son crâne. Et se laissa couler avec le flot, répondant au désir qui lui brûlait le

sang.

Il ne ressentait aucun malaise, aucune répulsion, juste une tentation brûlante à

laquelle tout son corps réagissait.

Avec un grognement rauque, il s’agrippa aux durs bras du vampire tandis que

leur étreinte se resserrait autour de lui. En gémissant, il ouvrit davantage la

bouche, et laissa la langue de V plonger et replonger en lui. Puis il hasarda la

sienne, tâtant les pointes dures des canines du vampire, en un accord muet.

Vishous n’arrivait pas à y croire. Il embrassait réellement son copain

humain— là, en plein milieu du couloir. Et la façon maladroite et passionnée

dont Butch caressait ses canines le rendait carrément dingue.

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Il essaya réellement de retrouver un minimum de contrôle, mais c’était

difficile. Parce que Butch semblait en vouloir davantage, bien que V sache

parfaitement que le jeu était nouveau pour lui.

Vishous réfléchit à ses propres expériences. Il avait baisé un nombre

incalculable de femelles— il préférait ne même pas compter. Il avait baisé

quelques mâles aussi. Mais dans un contexte différent. D’ailleurs, il avait

dominé tous ces corps, qui étaient plus ou moins restés anonymes à ses yeux.

C’est ainsi qu’il l’avait voulu— qu’il en avait eu besoin.

Mais pas avec Butch. Il ne sentait aucune urgence de domination dans leur

relation. Oh bien sûr, il ne rêvait que d’arracher les vêtements du mec et sentir le

corps nu et ferme se serrer contre le sien, mais il n’était pas pressé. Il savourait

bien trop la sensation du moment, la certitude que c’était Butch qu’il tenait ainsi,

collé contre le mur— et non pas un inconnu quelconque qu’il oublierait dès qu’il

s’en écarterait—

Waouh. Vishous fut brutalement rappelé au présent quand la main de Butch

quitta ses bras pour glisser vers sa taille, tandis que les hanches de l’humain

entamaient un mouvement d’appel sans équivoque.

Vishous émit un feulement rauque en sentant leur bas-ventre se heurter, et son

érection déjà engorgée devint carrément douloureuse.

— Oh merde, Butch, gronda-t-il, en écartant ses lèvres, au bord de l’asphyxie.

Vishous laissa sa tête retomber en arrière— et sursauta quand une douleur

inattendue le saisit à la gorge. Butch s’était rué sur la chair offerte, et essayait de

le mordre. L’humain le serrait à deux bras, l’écrasait carrément contre lui.

— Bordel ! Rugit Vishous électrisé.

Il dut se retenir d’une main sur le mur derrière la tête de son copain. De

l’autre, il serra la jambe qui s’était accrochée à sa taille. Quand ils

commencèrent à onduler l’un contre l’autre, Vishous creusa carrément un trou

dans le mur parce que Butch s’était agrippé à son cou, suçant et aspirant sa peau,

cherchant son sang.

Mais Vishous réalisa soudain que n’importe qui pouvait entrer dans la Piaule,

et les surprendre ainsi. Il verrouilla mentalement toutes les portes, puis s’écarta

du mur, emportant Butch avec lui.

Ils tombèrent ensemble sur le lit, Vishous étendu sur son copain. Il eut un

coup de rein, et Butch cria sous la sensation, la tête rejetée en arrière, relâchant

la gorge de V.

— Tu aimes ça, Cop ? Demanda V, la voix rauque et sensuelle.

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— Ouais, bordel, gémit le flic, en se frottant contre lui, remuant la tête de

droite à gauche sur l’oreiller.

Vishous le regarda, avec un sourire satisfait. Puis il se pencha pour

l’embrasser à nouveau. Jamais il n’en aurait assez.

Tandis que sa langue plongeait dans la bouche offerte, et la dévorait

voracement, V était accroché à deux mains à la tête de l’humain, à califourchon

sur lui, dans une position démente.

Butch était sidéré. Sa poitrine le brûlait. Et très trèèès loin en bas de son

corps, son sexe était plus dur qu’il ne l’avait jamais été pour aucune femme dans

le passé. Il n’arrivait pas à comprendre ce qui venait de se passer... Depuis que

V lui était tombé dessus. Mais les sensations qu’il éprouvait à présent avec le

vampire étaient les plus incroyables qu’il ait jamais éprouvées. Il ne s’était

jamais senti aussi avide, aussi brûlant, aussi vivant. De toute sa vie.

V grondait maintenant, tout en mordillant sa lèvre inférieure— puis sa

mâchoire— son cou. Butch savourait le moindre son que le vampire émettait,

mi-grognements, mi-gémissements. Jamais il n’avait réussi à faire vibrer

Marissa de cette façon. La femelle n’était qu’un autre échec à ajouter à sa

longue liste. Mais pas V. Qui avait l’air de l’apprécier. Vraiment.

Tant mieux. Il était décidé à ce que le vampire éprouve autant de plaisir que

lui à ce qui se passait.

Avec un grognement, il se cambra, et fit rouler le mâle sur le dos, puis lui

releva les bras au-dessus de la tête. Le vampire se laissa faire, en écarquillant les

yeux. Butch se pencha, et embrassa sa clavicule, puis lécha son cou. Puis il

glissa les mains le long du torse, et se mit à déboutonner sa chemise, lentement,

avec un sourire plein d’expectative et de promesse.

Le vampire déglutit de façon audible, la respiration courte, tandis que Butch

caressait la poitrine lisse et musclée, puis le ventre si dur aux abdominaux

dessinés. V jeta même la tête en arrière pour rire, quand Butch ne put

s’empêcher de le chatouiller le long des flancs.

Bordel… Le mec avait un corps vraiment superbe. Une peau magnifique,

dorée, lisse et douces. Des muscles durs, aux stries apparentes. C’était

incroyablement étrange de les sentir sous ses doigts. Butch eut soudain envie de

les caresser de ses lèvres.

En frémissant d’excitation mais aussi d’énervement, il se pencha, et embrassa

le corps offert. Vishous eut une réaction merveilleuse— un ronronnement de

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fauve qui fit vibrer sa gorge, et Butch le sentit les doigts du vampire passer dans

ses cheveux et se crisper sur sa nuque.

Il n’eut pas besoin d’autres encouragements pour continuer ses caresses.

V s’agita un peu quand les lèvres de Butch se refermèrent sur son mamelon.

Lui aussi avait désespérément envie de caresser le flic, mais il craignait qu’un

geste trop brusque ne fasse exploser ce rêve— comme tous ceux qu’il avait faits

jusqu’ici. Il se retrouverait à nouveau, seul et malheureux, comme d’habitude.

— V… mec, ça va ? Demanda Butch en levant la tête, pour le regarder.

V vida sa tête de ses pensées moroses, et caressa doucement les bras du flic

penché sur lui.

— Désolé, j’ai zappé pendant un moment.

— Pas de problème. (Malgré ça, Butch sembla s’assombrir, et il se frotta la

bouche d’un doigt.) Est-ce que je…

Il s’arrêta, et resta silencieux. Aussi Vishous se rassit, pour se retrouver face à

face avec son copain. Il le regarda en levant un sourcil interrogateur, aussi Butch

prit-il une grande inspiration avant de dire :

— Je me demandais juste si je faisais ça bien, avoua-t-il.

Il avait tourné la tête pour ne pas croiser le regard de Vishous. Heureusement.

Parce que le vampire avait la sensation d’avoir pris une claque en plein visage. Il

avait les yeux écarquillés, la bouche ouverte.

Bordel, l’humain ne comprenait-il pas la passion que V ressentait pour lui ?

Ne sentait-il pas la force de son érection— qui cherchait à creuser un trou dans

son pantalon de cuir ?

Il se maudit, se traitant de tous les noms. Non mais quel con ! Il vivait enfin le

plus merveilleux interlude qu’il ait jamais connu, et qu’est-ce qu’il s’arrangeait à

faire ? À tout gâcher en évoquant au pire moment un passé moins heureux ?

Malheureusement, Butch avait considéré son silence comme une réponse

négative, aussi il commençait à s’écarter. Horrifié à l’idée que tout allait

s’arrêter, V prit le flic par les poignets et le ramena sur lui. Puis il embrassa

férocement, avant d’affirmer d’une voix cassée :

— Je te veux. Maintenant.

— C’est vrai ?

— Je vais te montrer, grogna Vishous.

Il arracha la chemise du flic pour exposer sa peau nue… qu’il attaqua des

lèvres— de la langue— des canines.

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Retombant sur le lit sous l’attaque, haletant, frémissant, et tordu de plaisir,

Butch s’agrippa aux draps du lit à deux mains, et ferma les yeux. Son sexe était

douloureux à en hurler. Et seul V avait le remède à une telle agonie.

Comme s’il devinait cette pensée, le vampire eut un rire rauque— comme la

promesse érotique qu’il allait s’occuper, quand bon lui semblerait, du problème

du flic.

V le poussa sur le côté, puis sur le dos. Butch rouvrit les yeux, et examina le

corps splendide couvert d’une fine couche lueur de sueur qui brillait à la

lumière, comme une statue animée.

Vishous remua pour être contre lui, légèrement de côté, puis il pressa sa

cuisse entre les jambes de Butch. Qui s’offrit sans hésiter, en relevant les

genoux, accroché à la taille du vampire.

Avec un autre rire bas, Vishous laissa un moment Butch se frotter contre lui, à

un rythme frénétique. Mais ensuite, il s’écarta, et s’assit à nouveau sur le bas-

ventre de son copain. Frustré, Butch gémit, et essaya de retrouver le contact.

D’un geste lent, le vampire glissa la main le long des jambes de Butch, et

récupéra l’une des dagues noires qui étaient cachées dans ses bottes. Butch

frissonna et se figea en voyant ce que Vishous avait dans la main. Quand le

vampire posa la lame sur sa poitrine, il regarda la lame noire faire un cercle

autour de son mamelon, puis descendre jusqu’à son nombril. Son corps se tordit

sous l’étrangeté de la sensation caressante, et il leva les hanches, en gémissant.

Quand il releva les yeux, il vit son copain sourire, et lever un sourcil, tout en

glissant la lame sous le pantalon de cuir et le boxeur de Butch. D’un geste de la

main, le vampire découpa les vêtements en deux.

Un sexe rigide jaillit de l’ouverture. V lâcha sa dague pour l’agripper à deux

mains, d’un geste presque violent. Butch poussa un hurlement, tandis que son

plaisir explosait, et qu’il jouissait sans pouvoir s’en empêcher, crispant ses deux

mains sur les genoux durs qui encadraient ses hanches.

Quand les spasmes se calmèrent, et que son corps se détendit enfin, il était

essoufflé.

— Bon sang, V, marmonna-t-il enfin, cherchant encore l’oxygène.

Penché sur lui, le vampire affichait un grand sourire satisfait.

— C’était bon ? Demanda tranquillement V, en posant la main sur la joue de

Butch.

— Tu n’as pas idée, répondit Butch, encore haletant.

Il remonta un peu dans les oreillers, cherchant une position plus confortable.

— Alors montre-moi, suggéra le vampire à son oreille.

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Et Vishous lui prit la main et l’appuya entre ses jambes.

Les yeux de Butch s’écarquillèrent en vérifiant la dureté et l’importance de

l’érection qui palpitait sous ses doigts. Bordel, il savait bien que le mec était un

énorme enfoiré, mais quand même— jamais il aurait imaginé le vérifier d’aussi

près.

Vishous ferma les yeux quand l’humain se mit à le caresser d’un mouvement

régulier, de plus en plus rapide. De l’autre main, le flic dégrafa son pantalon et

descendit la fermeture éclair, puis s’interrompit le temps de rejeter tous les

vêtements qu’ils portaient encore. Un moment après, Butch pilonnait à deux

mains le sexe dur qu’il avait découvert, et Vishous beugla rapidement sa

jouissance en se vidant en un jet brûlant qui semblait sans fin.

Agrippé aux reins durs de l’humain, le vampire laissa son orgasme se

poursuivre, encore et encore, avant de s’écrouler enfin, le souffle court.

— Seigneur, s’exclama Vishous, quand il réintégra son corps

— Non, ce n’est que moi, dit Butch d’un ton faussement modeste.

Avec un ricanement, Vishous se souleva du matelas, saisit la tête de son

copain par les cheveux, et embrassa férocement le mâle.

— Ne t’imagine surtout pas que c’est déjà fini, dit-il.

Avec ça, il lui tordit la tête en arrière, et le mordit au cou, comme il en avait

envie depuis si longtemps.

Le flic eut un gémissement, mais il ne se débattit pas. Il serra juste Vishous

contre lui, le laissant prendre son sang.

La sensation était incroyablement érotique, pensa Butch. Bien trop tôt, V

releva la tête, cicatrisa les entailles, et se lécha les canines. En le regardant,

Butch eut une nouvelle érection, et V dut le sentir car il baissa les yeux, avant de

se laisser glisser le long du corps de Butch, pour le prendre son sexe dans sa

bouche.

Comme ça. Sans avertissement.

Tandis que Butch recommençait à se tordre dans le lit, Vishous s’activa sur

lui avec entrain, savourant les cris de plaisir qu’il arrachait à son copain.

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Curieusement, il ressentait un incroyable sentiment de pouvoir. Qui

ressemblait en fait à celui qu’il avait en étant dominant. Mais sans la douleur et

la colère qu’il défoulait généralement sur ses partenaires.

Son propre sexe répondait à chaque odeur, cri ou geste que le flic émettait,

mais V l’ignorait, souhaitant offrir toute son attention à son coloc.

Butch était perdu dans un univers de sensations, dominé par la brûlure humide

de la bouche du vampire sur lui… Bon sang, cette langue sinueuse, ces

succions— c’était presque une overdose de jouissance. Il sentit même V sourire

contre son sexe lorsqu’il hurla, parce que le vampire lui avait pris les bourses

entre ses doigts durs pour les serrer, pas trop doucement.

— Tu prendras tout ce que je te donnerai, humain.

— Qu… ?

Butch essaya de poursuivre sa phrase, mais il ne pouvait pas— aussi il se

contenta de serrer les dents tandis que le feu montait dans ses tripes, comme le

geyser d’un volcan. Puis il explosa, la queue toujours tourmentée par la bouche

sans pitié de Vishous.

— Oh merde ! Hurla Butch en jouissant.

Son orgasme eut une violence qui lui vida l’esprit, et expédia son corps

quelque part dans le firmament. Et V le caressa durant tout cet incroyable

orgasme— le plus long que Butch ait jamais connu. Il avait la certitude que sa

queue s’était ouverte en deux.

Et quand ce fut fini, Vishous recommença à l’aiguillonner, explorant chaque

centimètre carré de son corps de sa langue de ses doigts. Le menant, encore et

encore, à des orgasmes à la fois libérateurs et dévastateurs.

Mais Butch apprenait vite, et il rendait au vampire toutes ses caresses, plus

quelques-unes qu’il inventait…

***

Plusieurs heures plus tard, nus et couverts de sueur, de sperme, et même de

larmes, les deux mâles s’immobilisèrent enfin sur le grand lit dévasté, repus et

épuisés. Butch serrait V dans ses bras et lui caressait le dos, tandis que le grand

corps tremblait encore les spasmes de son dernier orgasme.

Quand tout fut apaisé, et qu’il se sentit capable de regarder son meilleur ami,

Butch fut ébloui. Les yeux de V étaient lumineux, et son sourire merveilleux.

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— Waouh, dit Vishous, se sentant ridicule, et pourtant incapable d’exprimer

sa satisfaction de façon plus intellectuelle.

Butch éclata d’un rire sonore, que Vishous ne put s’empêcher de suivre.

— Qu’y a-t-il de si drôle, mon pote ? Demanda-t-il enfin.

— Je n’arrive pas à croire que j’ai couché avec mon meilleur ami— qui se

trouve aussi être mon coloc, dit le flic sans réfléchir.

Vishous étrécit les yeux.

— Et qu’y a-t-il de si drôle à ça ? Demanda-t-il, presque en colère.

Butch dut réaliser le changement de sa voix, et il arrêta de rire.

— Je n’avais jamais imaginé que ce pourrait être… si étonnant, dit-il, avec

une toux gênée.

Vishous se contenta de sourire, puis il étira son corps énorme sur le lit.

— Effectivement, dit-il.

Mais il se parlait essentiellement à lui-même. Alors qu’il était ainsi allongé,

auprès de l’être qu’il avait désiré le plus au monde, un calme étrange

l’envahissait. Une sérénité qu’il n’avait jamais connue.

Butch se souleva sur un coude, le temps de se pencher hors du lit pour

récupérer les draps qu’ils avaient rejetés. Il en recouvrit leurs deux corps.

Retombant sur le dos, il regarda le vampire.

V avait sorti une roulée qu’il allumait. Il semblait tellement paisible que

Butch ne put s’empêcher de sourire. Il était heureux que Vishous ne regrette pas

ce qui venait d’arriver.

D’un autre côté, Butch était vraiment secoué. Il avait la sensation d’avoir

perdu tous ses repères. Quelques heures plus tôt, il avait fait l’amour avec

Marissa— une femme qu’il aimait de tout son cœur, qu’il aurait tout donné pour

pouvoir épouser, et garder près de lui toute sa vie.

Et maintenant, il était troublé. Et ne se reconnaissait plus. Il savait ne pas être

gay, mais cet épisode avec V était différent. En fait, le vampire était quasiment

un autre lui-même. Aussi, leur récente expérience était aussi intime que

personnelle.

Peuh ? Quelle explication grotesque. Butch eut soudain la sensation que sa

tête allait exploser. Comment accorder ce qui venait de se passer avec le reste de

sa vie ? N’importe. Il y penserait plus tard.

— Ça va, Cop ?

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FAN-FICTIONS – TOME 1

37

— Oui, très bien. Merci.

Butch sentit le matelas bouger tandis que V s’installait pour dormir. Puis il

ressentit un étrange besoin de préciser quelque chose.

— V ?

— Ouais ?

— Est-ce que tu… Voudrais-tu… Euh. Non rien. Laisse tomber.

Est-ce que tu pourrais me tenir dans tes bras ? Me serrer ? Me consoler ?

Parce que je me sens bizarre… comme perdu et que je ne veux pas rester seul…

Vishous eut un choc en percevant les pensées saccadées de l’humain, mais il

se pencha vers son ami, et le serra dans ses bras. Instantanément, le flic se

détendit, et soupira.

Vishous savoura son contact jusqu’à être certain que son copain s’était

endormi. Puis il sortit du lit, ramassa ce qui restait de leurs vêtements, et les jeta.

Ensuite, il passa dans la salle de bain et en revint avec une serviette chaude et

mouillée. Lorsqu’il s’approcha du lit, Vishous plaça Butch dans une transe

légère, souleva le drap, et nettoya entièrement le corps nu des traces de ce qui

venait de se passer. Il fit aussi rouler le corps et changea les draps.

Une fois qu’il eut fini, il retira les couvertures jusqu’au menton de son copain,

et repoussa les cheveux bruns sur son front. Un long moment, il regarda le mâle

dormir, étudiant ce visage qu’il connaissait si bien, avec son nez cassé, ses

cheveux ébouriffés, sa mâchoire entêtée. Sous le coup de l’émotion, Vishous

sentit ses lèvres trembler…

Il baissa la tête, et marmonna quelques mots de remerciement, tandis qu’une

larme unique glissait sur sa joue et se perdait dans son cou.

— Tu m’as donné le plaisir le plus intense de toute ma vie. Je t’en remercie.

Mais il est temps pour toi d’oublier ces précieux moments et de retourner à la

vie normale. À ton destin. Je serai le seul à garder éternellement ce souvenir. Et

je te jure qu’il demeurera dans mon cœur jusqu’à mon dernier voyage dans

l’Au-delà…

Vishous s’arrêta— parce qu’il n’avait plus de voix de continuer. C’était sans

importance de toute façon, puisque Butch ne l’entendait pas. Vishous avait

quand même eu besoin de prononcer ces quelques mots, pour marquer à jamais

ce qui venait de se passer.

Tout devait disparaître. C’était obligatoire. Sinon, lui et le flic ne pourraient

pas continuer à être amis après un tel épisode. Et ils n’avaient aucune chance de

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FAN-FICTIONS – TOME 1

38

vivre ensemble. Vishous appartenait à la Confrérie, et Butch à Marissa…

Seigneur, elle lui était nécessaire. Vishous ne tenait pas à détruire l’amour qui

existait entre son copain et sa femelle.

Vishous se passa la main sur le visage, et se releva en tremblant.

Pour que le destin continue tel qu’il était prévu, il devait effacer ce souvenir

de la mémoire de Butch, et rester le seul à savoir qu’il ait jamais existé. Jusqu’à

la fin de sa vie, Vishous garderait ces images de ce qui aurait pu être.

Mais le flic était déjà bien trop secoué, il n’avait pas besoin de porter ce

fardeau en plus. Vishous voulait aller voir Wrath et proposer une solution ardue

pour résoudre le problème de son copain. La Vierge Scribe accepterait-elle ?

Quelle alternative avaient-ils ? Et il restait aussi à gérer au quotidien cette

infection que l’Omega avait placée dans le ventre du flic…

Ouais. Le destin qui attendait Butch O’Neal serait déjà bien assez difficile.

Vishous inspira longuement, puis posa un dernier baiser sur le cou de Butch.

Ensuite, il mit sa main sur son front, ferma les yeux, et chercha des souvenirs

qu’il voulait détruire. Effacer à jamais.

Pour les remplacer par d’autres…

***

Lorsqu’il se réveilla, bien plus tard, Butch regarda le réveil et constata qu’il

avait dormi deux heures d’affilée. Il était aussi passé à la phase suivante de la

gueule de bois : Une douleur massacrante qui lui martelait le crâne, des yeux

hypersensibles à la lumière qui passait sous la porte. Il roula sur lui-même et

s’étira jusqu’à faire craquer son épine dorsale.

Un gémissement sinistre surgit soudain du couloir.

— V ? Appela Butch.

FIN

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FAN-FICTIONS – TOME 1

39

BON VOISINAGE

“Truly yours” inspiré par J. R. Ward

Cette fan-fic se situe environ entre les tomes 4 & 5

***

Vishous possède un appartement dans une tour à Caldwell, où il partage le dernier étage avec un

autre vampire, Rehvenge, alias « le révérend », propriétaire du ZeroSum

***

Ploc.

Ploc.

Ploc.

Nom d’un chien ! On aurait pu croire que la seconde lettre que j’avais

envoyée à l’appartement du dernier étage aurait enfin réglé ce problème. Á mon

avis, un mec capable de s’offrir le meilleur (et le plus cher) appartement de

l’immeuble était plein aux as et devait donc avoir les moyens d’appeler un

plombier pour réparer cette saloperie de fuite qui me rendait folle. Je me

retournai dans le lit, repoussai l’oreiller que j’avais collé sur ma tête, et jetai, à

contrecœur, un coup d’œil sur mon réveil : 3h43. Avec un gémissement, je

compris que le sommeil, pour moi cette nuit, c’était cuit.

Merci, M. Plein-aux-as !

Sachant que je ne pourrais pas me rendormir, je m’assis dans mon lit, allumai

ma lampe de chevet, et récupérai un stylo et un bloc dans le tiroir de ma table.

Puis je me levai pour aller étudier de plus près la fuite dans la salle de bain.

L’eau coulait par le conduit de ventilation du plafond. Je savais parfaitement que

je ne pouvais rien faire de chez moi, vu que j’avais déjà fait venir deux

plombiers pour arranger les choses. Tous les deux avaient renvoyé la faute sur

M. Plein-aux-as. Mais malgré mes multiples tentatives de prendre contact avec

lui, pour qu’il fasse réparer la fuite de son côté, cet enfoiré avait réussi à

m’échapper.

Et bien, mec, pas ce soir. Ce soir, j’en ai ras la frange, et je vais sévir. En

temps normal, je suis une femme plutôt calme, aimable, et même polie. Mais vu

que ça fait quatre nuits, bordel, que je ne dors pas, ce soir c’est la mégère qui est

aux commandes.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

40

Cher Monsieur du dernier étage.

Si vous ne réparez pas cette saloperie de fuite très très vite, (c’est-à-dire dans

la journée de demain,) je vous préviens que je ferai venir un serrurier pour

forcer votre porte, ainsi que le plus onéreux des plombiers de la ville— et vous

aurez droit à une sacrée note. Je compte par ailleurs vous poursuivre pour

dommages et intérêts suite aux désagréments personnels que j’ai eu à subir par

votre faute.

Sincèrement vôtre,

L’appartement 45 A.

PS. Arrêtez de jouer au con. Je vous ai écrit, téléphoné, laissé des messages,

et vous n’avez JAMAIS répondu. La balle est dans votre camp.

Ce fut avec une grande satisfaction que je relus ma lettre, après avoir laissé

ma colère se répandre sur le papier. Sans me donner le temps de réfléchir, je

sautai du lit, récupérai mes clés sur une console dans l’entrée, et quittai d’un pas

vif mon appartement avec la ferme intention d’apporter ce message moi-même

jusqu’au connard de l’étage du dessus.

Tandis que j’attendais l’ascenseur, je réalisai soudain être sortie du lit si vite

que je n’avais pas pris la peine de m’habiller. Bien sûr, je n’étais pas

franchement nue. En fait, sur une plage, je serais même passé inaperçue. Mais je

n’étais pas sur une plage. Il était 4:00 du matin. Et j’avais les idées troublées par

le manque de sommeil. Ce qui m’avait poussé à écrire une note incendiaire un

voisin, et à me retrouver plantée devant mon ascenseur en pyjama— c’est-à-dire

en ne portant qu’un fin débardeur de coton et mon caleçon préféré— celui qui

avait le sigle des sigles Red Sox imprimés partout.

Merde. J’aurais dû davantage réfléchir. Bien sûr, je n’étais pas franchement

timide, et il ne devait pas y avoir grand monde dans les couloirs à cette heure de

la nuit… En fait probablement personne. Donc, si je me dépêchai de monter un

étage, de glisser la note sous la porte, avant de redescendre vite fait, qui s’en

apercevrait ?

Croisant les bras pour cacher ma poitrine, je serrai ma lettre et mes clés dans

la main, et jetai un coup d’œil dans le couloir derrière moi. N’y voyant

absolument personne, je fus rassurée, et crus que je pouvais continuer à suivre

mon plan sans risque.

L’ascenseur arriva avec un petit bruit carillonnant, m’annonçant que les

portes allaient s’ouvrir. Ce que j’attendais le souffle court. Il «était curieux que

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FAN-FICTIONS – TOME 1

41

délivrer un mot un emmerdeur de voisin en pyjama au milieu de la nuit puisse

d’un seul coup me paraître une aventure presque illégitime.

Lorsque la porte s’entrouvrit, je baissai les yeux, vérifiant où je posai les

pieds en passant le seuil métallique. Ce qui fait qu’il me fallut une bonne

seconde pour réaliser qu’il y avait quelqu’un d’autre dans l’ascenseur. Juste

devant moi. Avec des yeux soudains écarquillés, je sentis mon visage

s’empourprer, tandis qu’une chaleur brûlante se répandait dans mon corps. Je

m’étais mise dans un sacré pétrin. La première chose que je vis, vu que mes

yeux étaient baissés, ce fut ses bottes noires, d’où émergeait un pantalon de cuir,

noir, qui serrait des jambes musclées. Remontant le long de ces membres

puissants, je me trouvai soudain face-à-face avec le mec le plus incroyablement

sexy que j’aie jamais rencontré.

Nom d’un petit bordel à queue.

Je tendis la main et cherchai à rouvrir l’ascenseur, me sentant parfaitement

grotesque. Comment avais-je pu imaginer m’en sortir avec un plan aussi con ?

Bien entendu, le destin bloqua ma fuite, et les portes de l’ascenseur se

refermèrent sans que j’aie de chances d’en sortir.

-Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, je descendais.

Quand je me retournai pour faire face au dieu du sexe en cuir noir, je ressentis

un accès soudain de claustrophobie. C’était sans doute normal, vu qu’il prenait

nettement plus que la moitié de l’espace dans l’ascenseur. Je reculai lentement

jusqu’au coin le plus éloigné, essayant de retrouver mes esprits. Il leva un

sourcil moqueur. Et je pris tout mon temps pour étudier son visage, tout en

affichant un air composé. Pas évident ! Après tout, j’étais coincée dans un

espace clos avec un parfait étranger. Pourtant, mon côté le plus féminin

s’illuminait et pétillait comme des guirlandes à noël. Comme si je n’avais jamais

de ma vie vu un mec aussi chouette. Ce qui, en fait, était le cas. À dire vrai, je ne

pensais même pas qu’un type comme ça existait sur la terre.

— Ah non. Merde !

Je marmonnai, mâchonnant entre mes dents le seul mot qui me venait à

l’esprit. Manifestement, j’avais laissé toutes mes pensées sensées et cohérentes

dans mon appartement en claquant la porte. Et tandis que je restais plantée là,

bouche bée, je notai quand même qu’il avait un corps magnifique… un torse

puissant serré dans un tee-shirt noir qui soulignait ses longs muscles, des

cheveux aussi noirs que la nuit, une barbe noire, et des tatouages qui lui

marquaient l’œil gauche. Mais plus que tout, je remarquai ses yeux, que je

regardais, et regardais encore— tétanisée, hypnotisée.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Il avait dû constater que j’appréciais son physique— je pense que mon visage

m’avait trahie— parce qu’il eut soudain un sourire à la fois moqueur et sensuel.

Il me fallut un bon moment pour réaliser que pendant que je l’examinais, il ne se

gênait pas pour faire la même chose avec moi.

Je dus lécher mes lèvres desséchées pour retrouver mon souffle, tout en me

noyant dans l’éclat dangereux de ses yeux. Comment un regard aussi glacé

pouvait-il être aussi brûlant ? Je cherchai à parler, désireuse de ne pas passer

pour la parfait abrutie— ce qu’il devait déjà penser de moi— mais il s’exprima

avant que je ne réussisse à formuler les mots dans ma tête :

— Avez-vous besoin que je vous emmène quelque part ? Ou alors un taxi

vous attend-il en bas ?

Nom d’un petit bordel à queue. Même sa voix était incroyablement sensuelle.

Du sexe à l’état pur. Ce timbre si profond sembla caresser ma peau, et je sentis

la chair de poule me hérisser partout. Conscient que je le dévisageai toujours, il

fronça les sourcils, et appuya sur un bouton de l’ascenseur. Qui se bloqua.

— Écoute, femelle, qu’est-ce que… ?

— Non, répondis-je très vite, je vis ici.

— Vous vivez ici ?

Je ne pus manquer, bien sûr, le regard sceptique il me lança. Et le doute

résonnait également haut et clair dans sa voix. Manifestement, il ne faisait pas

vraiment confiance à une femme bizarre qui prenait l’ascenseur au milieu de la

nuit en pyjama. Il devait penser que j’étais folle, ou sans-abri, ou même une ex-

copine qui venait de se faire jeter en pleine nuit après une dispute. À moins qu’il

ne me prenne pour une pute ? Ah… Quelle importance ? Qui se souciait de ce

que ce mec-là pensait. J’étais dans mon immeuble, bordel, et il pouvait

parfaitement être un serial killer. Bon, d’accord un chouette serial killer— très

trèèès chouette Mais quand même…

— Oui, je vis ici, répétai-je. Et ça ne vous regarde pas. J’avais l’intention de

monter au dernier étage pour laisser un message à mon voisin—

— Vous comptiez aller voir le Révérend dans cette tenue ?

Après cette phrase sibylline, M. Cuir poussa un long sifflement qui ne laissait

place à aucune équivoque. Malgré moi, je sentis des papillons voleter dans mon

estomac. Je savais ce qu’il pensait. Je devais être folle de souhaiter attirer son

attention, mais après tout, il y a un grain de folie dans chaque femme sur la terre,

non ? Il suffit de trouver le bon déclic pour le faire ressortir. Pour moi, c’était le

cas, juste à présent, avec l’éclat dangereux— et donc incroyablement attirant—

qui brillait dans les yeux de ce mec.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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— Cet enfoiré a de la chance.

— Pardon… ? Quel rév… ? C’est un révérend qui vit au dernier étage ?

Merde, je ne peux pas déposer une lettre pareille à un homme de Dieu.

Ce n’était pas pour M. Cuir que je parlais. C’était pour moi-même. En vivant

seule, j’avais l’habitude de me tenir des conversations à haute voix. Et pourtant,

il parut aussi intrigué qu’amusé.

Je réalisai soudain que l’ascenseur était toujours bloqué, et qu’il était placé

devant la rangée de boutons. Il ne semblait pas pressé de mettre un terme à notre

conversation, aussi bizarre soit-elle. J’essayai donc de ramener son attention sur

le fait qu’il devait avoir un rendez-vous qui l’attendait ailleurs.

— Ne deviez-vous pas descendre ? Peut-être que quelqu’un vous attend ?

— Effectivement. Mais je m’amuse beaucoup plus ici, avec vous.

Avec ça, le côté comique de ce cauchemar m’apparut en plein. Et j’éclatai de

rire. Pas du tout un petit gloussement posé et féminin, mais un hurlement sonore

qui me partait du fond des tripes, à la limite de l’hystérie.

Merde, pensai-je en m’essuyant les yeux. Il est quatre heures du matin. Je

n’ai pas dormi. Et voilà que je me retrouve coincée dans un ascenseur avec un

mec à tomber raide, qui doit reprendre pour une tarée.

— Non, répondit-il. Je ne vous prends pas pour une tarée, mais je considère

le "à tomber raide" comme un compliment.

Il sourit, cligna de l’œil, puis se pencha pour appuyer sur le bouton, et

l’ascenseur se remit en route.

Le brusque mouvement me surprit, et je perdis l’équilibre, aussi je lançai les

mains en avant pour me retenir, lâchant en même temps mon message et mes

clés. Ma poitrine heurta un avant-bras dur tandis qu’il passait son autre bras

autour de ma taille pour me retenir. Aussitôt, je levai les yeux, et trouvai son

visage à quelques centimètres du mien. J’eus la sensation qu’il humait l’air

autour de moi.

— Bon sang, femelle, tu sens sacrément bon.

Il poussa un grondement sourd, et cet appel primitif faillit me jeta dans ses

bras. Déjà, je sentais que mes seins avaient durci au contact de son bras. Et il

devait le savoir aussi— parce que j’étais presque collée à son corps musclé…

des pieds à la tête

Et merde. C’était si bon— c’était… dément. Il était tellement viril, avec tous

ces muscles durs qui correspondaient si bien à mes rondeurs. Comme si nos

deux corps avaient été créés pour s’emboîter. Je retins à grand-peine un

gémissement de plaisir. Mais je m’étais un peu trop attardée sur la sensation

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éprouvée, et il me fallut un moment pour réaliser qu’il commençait à s’intéresser

à moi.

— Euh…, marmonnai-je, mon message.

— Mon chou, si tu te pointais devant ma porte dans cette tenue, je peux te

garantir que ton principal souci n’aurait pas été ce putain de message.

Nous étions toujours serrés l’un contre l’autre. M. Cuir leva la main jusqu’à

mon visage, et caressa mes lèvres du pouce. Instinctivement, j’ouvris la bouche,

aspirai son doigt, et le mordis, avant d’y passer ma langue pour m’excuser. Je

vis ses pupilles noires se dilater, tandis qu’il inspirait profondément, avant de

retirer son pouce de ma bouche.

De ce même pouce (maintenant humide), il suivit la ligne de mon cou jusqu’à

ma clavicule, puis plus bas, vers mes seins, avant de s’arrêter sur mon mamelon.

Puis il me regarda encore, un sourcil levé.

— Un piercing ? C’est sacrément sexy, mon chou.

Il murmura ces mots à mon oreille, avant de se mettre à l’embrasser

doucement, puis à descendre le long de ma gorge. Ses deux mains étaient

passées sous mon tee-shirt, et pour la première fois, je remarquai qu’il portait un

gant à la main droite. Ça créait une double sensation dans ses caresses, ce qui

envoya très vite mon corps sur orbite tandis dès qu’il atteignit mes seins. J’étais

accrochée à son cou, caressant ses cheveux soyeux, mais je baissai les yeux pour

regarder ses mains sur mon corps. La sensation était indescriptible. De le voir

agir ajoutait encore à mon excitation. Il prit mes seins en coupe, et s’attaqua à

mes mamelons de façon si savante que je fermai les yeux, laissant ma tête

retomber contre lui. En fait, je me laissai aller complètement.

Mais je revins brutalement à la réalité lorsque l’ascenseur s’arrêta tout à coup.

Mes yeux se rouvrirent en même temps que les portes, lorsqu’un courant d’air

glacé envahit l’ascenseur.

— Bordel, V. Pas étonnant que tu aies tenu à prendre l’ascenseur ce soir.

Demain, c’est moi qui passe shotgun.

Nous étions dans le parking, et non pas à l’accueil comme je m’y étais

attendue. Devant les portes de l’ascenseur, je vis un autre homme immense, les

mains sur les hanches. Qui m’examina de haut en bas, notant sans aucun doute

l’étrangeté de ma tenue et l’excitation qui devait encore vibrer en moi. Les

signes sur mon corps étaient immanquables.

— Fous-moi la paix, Cop, grogna M. Cuir. Laisse-moi encore une minute,

d’accord ?

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Cop ? Un flic ? Je jetai un autre coup d’œil derrière moi— ah-ah, le nouveau-

venu matait mon cul. Pas étonnant. Les mecs faisaient souvent ça.

— Tu as fini ? Demanda le "flic" à M. Cuir, tout en m’adressant un grand

sourire.

Il était plutôt attirant, remarquai-je, et si je n’étais pas déjà aussi braquée sur

M. Cuir, je me serais sans doute intéressée à son cas.

— Hey, Rhage, cria le mec. Viens un peu voir ce que V a trouvé.

En réponse à son appel, il y eut un claquement de porte dans le parking. Je

tournai la tête vers un 4x4 Escalade noir garé non loin, et j’en vis sortir un mec

blond— l’homme le plus immense que j’aie jamais vu. Qui s’approcha des

portes de l’ascenseur. Seigneur, il était (lui aussi) beau à tomber.

— Bon sang, V. Elle a mis les Sox sur son cul.

— V ? Demandai-je un peu perdue.

— C’est moi, mon chou, répondit M. Cuir

Ils parlaient de mon cul quand même. Cherchant à me cacher des deux

autres— maintenant plantés devant l’ascenseur— je passai derrière V.

Heureusement pour moi, il était assez grand pour me servir d’écran. Collée à lui,

je me souvins que je n’étais pas la seule à avoir été survoltée par notre petit

intermède dans l’ascenseur. Mais maintenant, je ne pouvais plus rien y faire, à

mon grand regret.

Ses deux copains nous regardaient toujours, affichant un grand sourire,

secouant la tête et agitant les mains. Manifestement, ils se foutaient de moi. Me

en sécurité, accrochée au bras de V, je leur jetai un regard noir. Puis je me frottai

un peu plus contre V, espérant désespérément soulager la tension qui vibrait

toujours en moi.

— Écoutez les mecs, dis-je nerveusement. J’aimerais bien croire la réalité de

cet épisode, mais manifestement, je manque de sommeil. Alors, je vais remonter

chez moi, et prétendre que tout ça n’a été qu’un rêve.

— Mon petit cœur, tu peux rêver de moi autant que tu veux.

C’était le grand blond aux merveilleux yeux bleus qui venait de me sortir ça.

Avec un sourire sensuel et un clin d’œil. Sincèrement, je ne sais pas comment

ces mecs-là s’en sortaient avec des vannes pareilles. Mais malgré moi— malgré

le ridicule de la situation, de l’heure, et du lieu— je les trouvais tous les trois

adorables, aussi je ne pus m’empêcher de lui rendre son sourire.

À ce moment-là, je réalisai que V ne s’était pas écarté de moi, pas plus qu’il

n’avait qu’une seule fois regardé ses copains. Il ne me quittait pas des yeux.

Aussi je relevai les miens vers lui.

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— Butch, Rhage, dit-il d’une voix rauque. Foutez le camp.

Il avait parlé calmement, mais quelque chose dans sa voix me sembla

menaçant. D’ailleurs, les deux autres reculèrent, libérant les portes de

l’ascenseur, qui se refermèrent tranquillement. Nous nous retrouvâmes seuls, V

et moi, comme si rien ne nous avait interrompus.

Quand V se baissa pour récupérer mes affaires, ses yeux furent soudain au

niveau de mon bas de pyjama. De mon ventre… Je haletai, mon cœur s’emballa,

et mon sang se mit à bouillonner dans mes veines. J’attendis, folle

d’anticipation, son prochain mouvement. De sa main nue, il caressa doucement

les impressions des Red Sox sur le tissu. Un geste si simple— et pourtant, je

n’étais pas certaine de pouvoir encore longtemps tenir debout, tellement mes

jambes flageolaient.

— Je suis un fan des Red Sox, mon chou, dit-il. Mais j’ai vraiment envie de

t’arracher ça.

Puis il se releva souplement, tout contre moi, humant mon corps tout du long.

Ensuite, il s’écarta, et jeta un bref coup d’œil au message qu’il tenait à la main…

avant de me le rendre, avec mes clés. J’eus temps de voir naître sur son visage

un éclair de surprise, comme une ombre d’inquiétude, mais ça disparut si vite

que je ne pus en être certaine. Je récupérai mes affaires d’une main tremblante ?

Je savais parfaitement que je vivais le moment le plus incroyablement érotique

de ma vie. Dans un putain d’ascenseur.

— Euh, merci, dis-je, un peu timidement.

Curieux que la gêne ne me vienne que maintenant, après toutes les autres

émotions que mon visage devait exprimer. Mon corps quant à lui, gardait sa

priorité. Il était glorieusement vivant, attentif, avide.

V me répondit par un sourire sensuel, qui étrangement, me mit à l’aise.

— De rien, dit-il. Je dois sortir maintenant, mais je rentrerai à cinq heures.

Disons que ce sera un rendez-vous. Toi. Moi. Et les Red Sox. Compris ?

Oh que oui, j’avais compris. Je lui répondis par le même sourire entendu, et

fus heureuse de constater que je l’affectai aussi. C’était mieux si ça marchait

dans les deux sens. J’aurais bien aimé qu’il continue à me caresser.

— Pas maintenant, mais à en revenant, je m’en occuperai. Tu peux en être

sûre.

Il se mit à rire, les yeux brillants, avant de s’approcher de moi, forçant mon

corps (une fois encore), à réagir à sa présence. Il agrippa mes fesses à deux

mains, et me souleva contre lui, frottant son bas-ventre contre le mien, comme

pour assouvir le désir douloureux qui nous animait tous les deux. Son baiser

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presque brutal éveilla en moi une sauvagerie que j’ignorais posséder, et je

savourai dans sa bouche le grondement profond qui émergeait de sa gorge.

Et soudain, je devins agressive, cherchant à vaincre sans faire de prisonniers.

Ma bouche buvait à la sienne, bordel, mordait même. J’étais prête à dévorer tout

ce qu’il y avait de cet homme étonnant. De mes dents ma langue, mes lèvres,

j’embrassai, mordillai, suçai— et j’aurais aimé que cet instant d’extase dure

éternellement.

Mais après un maelström de tension sexuelle, alors que nos deux corps

tremblaient du désir de trouver l’apaisement, ma raison revint peu à peu.

Doucement, V me laissa retomber sur mes pieds, caressant une fois encore de

son pouce mes lèvres gonflées.

— Bordel, je n’arrive pas à croire que je ne t’ai jamais vue.

V avait l’air étonné, et je ne savais pas si la question s’adressait à moi ou s’il

se parlait à lui-même.

— Pourquoi m’aurais-tu déjà vue ? Répondis-je. Tu as dit être monté voir le

révérend. Tu ne vis pas ici.

Cette fois, c’est moi qui étais surprise de l’apparition inattendue d’un tel

homme dans cet immeuble. J’aurais dû y penser avant, mais manifestement mes

hormones avaient occulté mes neurones.

Quand V rouvrit les portes de l’ascenseur, je vis que le gros 4x4 noir

l’attendait toujours. Il y jeta un coup d’œil, puis s’éloigna vers ses copains. Au

bout de quelques pas, il se retourna vers moi, et m’adressa le sourire le plus

ravageur que j’aie jamais vu.

— Oh mais je vis ici, cher "appartement 45 A", je suis l’enfoiré du dernier

étage.

FIN

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RENCONTRE AVEC LE DESTIN

"Lovers Destined" inspiré par J. R. Ward

Cette fan-fic se situe après le tome 8 - en un futur alternatif.

***

Á Caldwell, dans l’État de New-York, il y a une trêve entre la guerre que mène la Confrérie de la

Dague Noire contre les lessers. Certaines tensions naissent au manoir…

Qhuinn est un soldat aux ordres de la Confrérie. Il est aussi l’ahstrux nohtrum de John Matthew—

c’est-à-dire son garde du corps privé— ce qui le condamne à rester son ombre. Renié par sa famille

après une enfance difficile, il a du mal à exprimer ses émotions, et lutte contre les sentiments qu’il

éprouve pour son meilleur ami, Blay.

Blaylock est également soldat. Membre de la Glymera, il est conscient que son orientation

sexuelle risque de lui créer des difficultés.

Les habitants du manoir de la Confrérie : Les Frères (Wrath, Rhage, Zsadist, Vishous Butch et

Tohrment) ; les shellanes des guerriers : Beth, Mary, Bella, Doc Jane et Marissa ; John Matthew, et

Xhex, les deux autres soldats de la Confrérie ; et Fritz, le vieux doggen.

Autres personnages : Phury, le Primâle des Élues ; Saxton, le cousin de Qhuinn ; Trez et iAm, deux

Moors, propriétaires du club Le Masque de Fer et du restaurant de Sal.

Parmi les Élues : Layla et Selena

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Chapitre 1

Aux alentours de Caldwell, le manoir de la Confrérie était perdu dans la

campagne profonde, au pied des montagnes. Enfoui dans le mhis, la brume

secrète des vampires que V maniait comme personne, cerné de hauts murs et

protégé de toute la dernière technologie de surveillance— caméras, haut-

voltage, et autres— le domaine était une véritable forteresse. Mais pour Qhuinn

qui se retrouvait consigné à l’intérieur, c’était aussi une prison.

Les dernières semaines avaient été épuisantes. D’abord, il y avait eu

l’enlèvement de Xhex, la guerrière sympathe qui avait accompagné la Confrérie

dans une mission sauvetage pour récupérer Rehvenge, le nouveau roi sympathe.

Puis l’obsession de John Matthew, le frère de la reine Beth, à retrouver la

femelle qu’il réclamait pour sienne. Puis la guerre sans merci que les Frères,

John, Blay et lui avaient mené contre Lash—

Qhuinn se crispa en évoquant son défunt cousin. Dès son enfance, le mec

avait été un véritable emmerdeur— et l’ennemi personnel de Qhuinn. Six mois

auparavant, Qhuinn avait tenté de tuer Lash, ce qui l’avait précipité dans des

emmerdes sans nom. Mais l’ordure avait la vie dure. Sauvé in extremis par

l’Omega, l’ancien vampire s’était retrouvé à diriger la Lessening Société. Sacrée

promotion. Et un désastre pour la race. Des années durant, Lash avait été reçu

par les principaux membres de la Glymera. Devenu lesser, il utilisé ses

informations pour massacrer des familles entières de nobles vampires— dont ses

propres parents et ceux de Qhuinn. (On avait retrouvé les cadavres de Lohstrong

et de sa shellane, et de leur fille. Celui du fils aîné avait disparu.) Enivré de ses

succès, Lash avait viré mégalo. Dix jours plus tôt, John et Xhex avaient quand

même réussi à le renvoyer à son créateur. Bon débarras. Qhuinn n’oublierait

jamais la dernière vision qu’il avait eue de son cousin. Le vampire aux cheveux

blonds qu’il avait connu toute sa vie avait disparu. Á sa place se trouvait une

sorte de spectre répugnant, mélange de goudron et d’ombres, exhalant une

puanteur douceâtre. Seule la voix, moqueuse et ricanante, était bien la même. Si

Lash avait disparu, les conséquences de ses exactions pesaient toujours lourd

dans la société vampire.

Quant à Qhuinn, il était orphelin. Ce qui ne le changeait pas beaucoup, vu

qu’il avait déjà été renié par sa famille— à cause du meurtre de Lash. De quoi

rire, vraiment, s’il avait encore su comment le faire. Qhuinn était né dans la plus

haute sphère de la Glymera, l’aristocratie vampire, ses deux parents faisant tous

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deux partie des familles originelles. Après deux héritiers vivants, un fils de sang

et une femelle, peut-être avaient-ils tenté le sort en souhaitant un nouveau petit ?

Qu’importe, Qhuinn était né… différent. Son père avait eu des yeux gris argent ;

Sa mère d’étonnantes prunelles ardoise, dures et brillantes ; Ses frère et sœurs,

des yeux gris. Et Qhuinn était né avec un œil bleu et l’autre vert. Une anomalie

génétique qui avait couvert sa famille de honte. Et causé son exclusion. Toute

son enfance, il avait été mis à l’écart, chacun espérant secrètement que la

transition le tuerait, ou réparerait cette erreur de la nature—

Qhuinn revit soudain une des rares fêtes à laquelle il avait assisté enfant…

C’était une belle soirée d’été, et la soirée s’annonçait somptueuse. Qhuinn

était encore sous le choc d’y participer— sans savoir ce qui lui valait ce

traitement inaccoutumé. Il regarda autour de lui. Ses parents s’étaient déjà

mêlés aux autres aristocrates, son frère aîné avait disparu avec une jeune

femelle, et sa sœur gloussait près du buffet. Qhuinn savait qu’il ne pouvait

s’approcher des autres pré-trans de son âge à cause de son cousin, qui le

détestait. Lash était toujours l’exemple que Lohstrong, le père de Qhuinn, citait

les rares fois où le mâle lui parlait, enviant à son frère, Ibix, un tel héritier de

sang. Et Lash était aussi la pire croix de sa jeune vie. Qhuinn ne savait trop ce

qui lui valait tant d’inimitié. Peut-être était-ce juste le fait qu’il se refuse à

idolâtrer ce pantin arrogant, comme le faisaient les autres jeunes. Ne voyaient-

ils pas que Lash les méprisait ? N’importe.

Laissant la fête derrière lui, Qhuinn s’aventura au fond du parc, jusqu’à un

étang dont l’eau noire luisait sous la clarté des étoiles. L’endroit était paisible

et superbe. Il y avait une petite cabane à bateau sur la rive, et une lumière y

était allumée. Qhuinn s’était approché prudemment…

Un jeune mâle roux lisait à la lueur d’une bougie.

— Hey, dit le jeune rouquin en levant ses yeux bleu pâle. Comment

t’appelles-tu ? Moi, c’est Blaylock, fils de Rocke.

— Qhuinn, fils de Lohstrong.

— Oh ?

Quoi, « oh ? ». Qhuinn se raidit et demanda agressivement :

— Tu fais quoi, là, tout seul ?

L’autre eut un sourire serein.

— J’étais venu pour lire tranquillement, mais la nuit est si belle que je

regardais juste les étoiles.

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Ils étaient restés là des heures à parler. De quoi ? Qhuinn ne s’en souvint

jamais. Et c’était sans importance. Il savourait surtout un sentiment qu’il

n’avait encore jamais rencontré : L’acceptation.

Qhuinn secoua la tête et revint au présent. Ouais, son amitié avec Blay avait

commencé ce soir-là. Peu après, il avait été invité chez les parents de son

nouveau copain… qui l’avaient accueilli sans restriction. Cet oasis avait sans

doute sauvé sa santé mentale durant son enfance. Parce que sa famille—

Le seul être de son sang qui l’aimait bien ne vivait pas à Caldwell. Et puis son

père, Tyhm, ne s’entendait pas trop avec son cousin Lohstrong, aussi Qhuinn

voyait-il peu Saxton.

Et ce soir, il ne voulait surtout pas évoquer Saxton—

Qhuinn était debout sur la terrasse du premier étage, devant sa chambre. Au-

dessous de lui s’étendaient les jardins, bordés au loin par la masse sombre des

montagnes. La lune était pleine, et sa vision nocturne excellente. Qhuinn

soupira. Ce soir encore, aucune sortie dans les ruelles sombres de Caldwell ne

lui permettrait de vider la violence qui brûlait en lui.

Pour fêter l’union de John et Xhex, le roi leur avait offert quelques jours de

détente à ses quatre soldats—Blay, John et lui-même, plus Xhex qui venait elle-

aussi d’être enrôlée dans leur groupe. Qhuinn ricana. Il imaginait très bien ce

comment John et Xhex utilisaient leurs congés. Bordel, mais il avait également

une très bonne idée de ce qu’en faisait Blay—

Pourquoi avait-il fallu que son meilleur ami rencontre son salopard de cousin

Saxton, quelques semaines plus tôt, chez Trez et iAm ? Qhuinn connaissait

l’orientation sexuelle de Sax, et n’en avait jamais rien pensé de particulier. Du

moins, pas avant qu’il ne remarque l’expression intense du visage parfait du

mâle en regardant Blay. Pauvre Blay. Tout rougissant, gêné d’une attention à

laquelle il n’était pas accoutumé. Peuh ! Son embarras n’avait guère duré. Une

semaine après, il disparaissait une nuit complète dans le repaire que Saxton

possédait à Caldwell. Et voilà maintenant qu’il avait ramené le mâle au manoir.

Et le roi l’avait laissé faire ! C’était vraiment la première fois que Qhuinn

doutait du bon sens de son souverain.

Il jeta un coup d’œil derrière lui. La chambre de Saxton—où devait se trouver

Blay— était obscure. Ouais, les deux mâles devaient se reposer, après… Il

grinça des dents.

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Il se pencha par la rambarde et regarda l’eau claire et cristalline de la piscine

en dessous… se demandant s’il y sautait ou pas. D’où il était, il avait toutes les

chances de s’écraser sur la pierre.

— Merde, marmonna-t-il entre ses dents.

Il n’était pas du genre à se lamenter. Pourtant, il sentit ses yeux le brûler. La

douleur dans sa poitrine devenait insurmontable. Derrière lui, dans la chambre,

lui parvinrent soudain des bruits de voix étouffées— Blay et Saxton. Ensemble.

Il n’arrivait pas à le supporter. Et voilà plus d’une semaine qu’il devait l’endurer

en permanence.

— Le ciel est vraiment magnifique cette nuit, dit une voix derrière lui.

En entendant la voix de son cousin, Qhuinn ferma les yeux.

— Bordel, mais c’est pas vrai, gronda-t-il. Qu’est-ce que tu fous là ?

— Une telle grossièreté est-elle vraiment nécessaire ? Qhuinn ?

Qhuinn se tourna brièvement, le temps de jeter à Saxton un regard menaçant,

avant de ramener les yeux sur la piscine. En fait, pourquoi y plonger ? Balancer

Saxton par-dessus la rambarde serait sans doute bien plus satisfaisant. Il ne put

s’empêcher de sourire à cette idée.

— Je ne comprends pas trop la raison de ta colère contre moi, continua

Saxton. Je pensais même que tu serais content pour Blay et moi.

— Alors, c’est quasiment officiel vous deux, pas vrai ?

Quand Qhuinn se retourna pour un autre regard noir, il vit son cousin, blond

et magnifique, appuyé contre le manoir, un pied relevé derrière lui sur le mur.

Dans son peignoir de soie, il ressemblait à un jeune Hugh Hefner. (NdT :

Fondateur et propriétaire du magazine Playboy.)

— Aucun serment n’a été prononcé, dit le mâle en haussant les épaules, mais

cette semaine a été absolument… parfaite.

Qhuinn sentit la bile lui remonter dans la gorge, et la ravala avec difficulté,

priant pour ne pas vomir.

— Je sais qu’il se croit amoureux de toi, continua son cousin. En fait, il

refuse même que ton nom soit prononcé devant lui. Mais tu sais, Qhuinn, il

finira bien par t’oublier. Il n’est pas du genre à rester éternellement accroché à

une chimère.

Cette fois, Qhuinn pivota carrément pour faire face à Saxton. Carrant son cul

contre la rambarde, il croisa les bras sur sa large poitrine.

— Pourquoi restes-tu avec lui s’il est amoureux d’un autre ? grogna-t-il.

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Merde de merde, mais à quoi jouait cet espèce de connard ? Pensa-t-il furieux.

Ce mec était assez beau et intelligent pour avoir qui il voulait. Pourquoi avait-il

fallu qu’il tombe sur Blay ?

— Un autre ? (Saxton se mit à rire.) Tu n’arrives pas à accepter qu’il s’agisse

de toi. Maintenant, si tu veux savoir pourquoi je tiens à rester avec lui— Attends

un peu que je réfléchisse… Pour le sexe, bien sûr. (Le mâle poussa un

gémissement forcé.) Il est adorable. Et il a un corps magnifique.

Qhuinn se dématérialisa juste en face de Saxton, et écrasa de son énorme

avant-bras la gorge de son cousin. Il avait les lèvres relevées sur un grognement

féroce qui dénudait ses canines.

— Écoute-moi bien, connard. Si jamais tu lui fais le moindre mal, je

t’arrache la tête.

— Ah-ah, on se sent d’humeur protectrice, pas vrai ? Je ne pensais pas que

cette larme rouge que tu portes au visage était destinée à Blaylock. Et je n’ai

jamais senti sur lui ta fragrance de mâle dédié. Il ne t’appartient pas.

Enragé, Qhuinn accentua la pression sur la gorge de son cousin.

— Espèce de fumier, je vais te tuer.

Il le pensait vraiment. Il avait envie d’attraper ce joli cœur par son petit

peignoir de soie et de le balancer par-dessus la rambarde. Il voulait se pencher

ensuite pour voir une mare de sang s’étaler sous le corps après que le crâne ait

éclaté sur la terrasse en dessous.

Saxton leva les mains et s’agrippa au bras de Qhuinn, en essayant (vainement)

de le repousser.

— Du calme, cousin. Toi et moi savons très bien que tu n’en feras rien. Tu ne

voudrais pas faire une telle peine à Blaylock après tout. (Il frappa du doigt la

poitrine de Qhuinn.) Agir ainsi ferait trop mal à ton petit cœur vide et solitaire.

Qhuinn grogna

— Je n’ai pas peur de toi, cousin, continua calmement Saxton. Lâche-moi. Je

suis sûr que Blaylock s’ennuie déjà de moi.

Qhuinn maintint sa prise quelque seconde de plus, pendant que ses yeux

dépareillés parcouraient le visage parfait qui lui faisait face. Brusquement, il se

souvint ne pas être digne de Blay, aussi il laissa retomber son bras et recula—

puis força ses lourdes bottes de combat à s’écarter de plusieurs mètres, jusqu’à

revenir à la rambarde où posa ses mains énormes. Il s’y accrocha, le dos tourné à

son cousin.

— Je retourne dans ma chambre, dit Saxton. Ça a été un vrai plaisir de parler

avec toi, Qhuinn.

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Ce ne fut qu’après avoir entendu la porte claquer dans son dos que Qhuinn se

retourna. Il se laissa glisser jusqu’à tomber assis à terre, et remonta ses genoux

contre sa poitrine. Puis il passa ses longs doigts tremblants dans ses cheveux

noirs. S’il n’avait vraiment qu’un « petit cœur vide et solitaire », pourquoi avait-

il la sensation qu’un bulldozer était logé dans sa poitrine ?

Et pourquoi avait-il aussi mal ?

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Chapitre 2

Planté devant le miroir de la salle de bain, Blaylock boutonnait lentement sa

chemise bleue pâle. Il essayait vraiment de se concentrer sur sa tâche… mais son

esprit ne cessait de vadrouiller. Durant cette dernière semaine, il avait cru

qu’une aventure avec Saxton l’aiderait à oublier Qhuinn— à avancer quoi ! —

mais il avait obtenu un résultat diamétralement opposé.

Quand il avait imaginé sa première fois avec un mâle, Blay avait toujours

espéré une expérience merveilleuse avec quelqu’un qu’il aimait. Oui, il avait

toujours imaginé que ce serait avec Qhuinn...

Aussi tous les efforts qu’il mettait dans sa relation avec Saxton ne servaient à

rien. En réalité, il n’avait jamais réellement été intéressé par le mâle… parce

qu’il ne pensait qu’à Qhuinn— et tout le temps. Dans ses fantasmes, c’était les

mains de Qhuinn qui parcouraient son corps, sa poitrine, son ventre. C’était les

longs doigts de Qhuinn qui saisissaient son sexe. C’était sa bouche qui le

caressait. Rien qu’en y pensant, Blay sentit son excitation monter, son corps

brûler, son sexe durcir contre la fermeture éclair de son pantalon Gucci.

En secouant la tête, il se regarda dans le miroir. Merde, à quoi jouait-il au

juste ? Pourquoi refuser d’admettre que Qhuinn ne voulait pas de lui ? À quoi ça

l’avançait de continuer à croire à son rêve impossible ?

Impossible ?

Un ancien souvenir lui revint en mémoire…

Peu après avoir rencontré Qhuinn, Blay l’avait invité chez lui. Il était fils

unique, et ses parents lui laissaient une grande liberté. Blay n’aimait pas trop

traîner avec les autres jeunes mâles de la Glymera. Certains vivaient

extrêmement protégés par leur famille— et n’avaient en fait aucune liberté.

D’autres préféraient singer les adultes, médire les uns des autres ou colporter

des ragots. Blay n’était pas davantage attiré par eux. Très introverti, il lisait

beaucoup ou sortait avec son père pour de longues promenades. Avec l’âge,

Rocke était devenu comptable, et portait des lunettes d’écaille, mais il avait été

soldat autrefois au Vieux Pays. Après tout, il y avait un ancêtre guerrier dans la

famille. Rocke enseignait à son fils de sang les lois anciennes de la nature et de

la race. Blay l’écoutait avec sérieux. Oui, il avait eu jusqu’alors une enfance

plutôt calme.

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Rencontrer Qhuinn avait été comme voir émerger un des personnages

mythiques de ses livres— Lancelot, ou Harry Potter. Blay avait entendu parler

de lui, bien entendu. Le propre cousin de Qhuinn, Lash— un m’as-tu-vu

prétentieux qui se moquait régulièrement des cheveux roux de Blay ou de ses

goûts studieux— jasait à qui voulait l’entendre sur l’anomalie génétique qui

« défigurait » son cousin. Quelle folie ! Le pré-trans était un être rare, aux yeux

merveilleux, dépareillés certes mais si intenses et brillants... Il parlait aussi

d’une voix passionnée des rêves plus ou moins impossibles qu’il voyait dans son

futur. « Rien n’est impossible si on le veut vraiment ! » Aimait-il à répéter.

Qhuinn vivait rejeté par les siens, par la Glymera, par la race tout entière et

jamais il ne s’en plaignait. Ayant pris son parti du fardeau qu’il portait, il

gardait la tête droite et affrontait l’existence bille en tête. Avec un courage à

rendre humble un guerrier.

Cette rencontre entre deux jeunes mâles au caractère diamétralement opposé

fit naître une amitié qui changea à jamais la façon dont Blay envisageait

l’existence.

Un coup sur la porte attira son attention, lui faisant oublier son monologue

intérieur.

— Oui, répondit-il.

Sans doute Saxton l’attendait-il, prêt à sortir… à moins qu’il ne veuille un

autre intermède sexuel ?

Blaylock n’était attiré par aucune de ces alternatives.

Il entendit des pas lourds traverser sa chambre. Et ce ne fut pas le reflet de

Saxton qui apparut dans le miroir derrière lui. Non— c’était la plus merveilleuse

vision qu’il connaisse au monde. Des yeux dépareillés et perçants croisèrent les

siens à travers le miroir tandis que Qhuinn se penchait de côté, appuyé au battant

de la porte.

— Où vas-tu comme ça ? Demanda le mâle.

Blay dut s’éclaircir la gorge avant de pouvoir parler. Qu’importe le nombre de

fois où ça lui arrivait, dès qu’il regardait Qhuinn, il n’arrivait plus à respirer.

Bien entendu, ça ne l’aidait pas que l’autre n’ait pas enfilé sa chemise.

— Je sors dîner, répondit-il.

— Avec Sax ? (Blay hocha la tête.) Vous n’allez pas retourner dans ce putain

de bar à cigares plein d’homophobes, pas vrai ?

— Qu’est-ce que ça peut te faire ?

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Il essaya d’écarter les yeux de Qhuinn, mais n’y réussit pas. En fait, son

regard parcourait avidement la large poitrine nue, les abdominaux parfaitement

dessinés, et les muscles pelviens qui plongeaient en V sous la taille du chouette

jean sombre que Qhuinn portait bas sur les hanches. Seigneur, le mâle avait des

hanches magnifiques. Et Blay aurait voulu s’y agripper à deux mains.

— Pourquoi dis-tu ça ? Protesta Qhuinn en fronçant les sourcils. Tu sais très

bien que je tiens à toi.

— Pas vraiment, marmonna Blay entre ses dents, avant de s’appuyer à deux

mains au comptoir de marbre en face de lui.

Derrière lui, Qhuinn croisa les bras sur sa poitrine— quelque chose qu’il

faisait souvent quand il était nerveux ou mal à l’aise. Blay avait si souvent

observé son meilleur ami qu’il était capable de déchiffrer le moindre de ses

gestes.

— Si, je tiens à toi. Aussi j’aimerais savoir à l’avance si je vais encore devoir

massacrer un connard d’humain ce soir.

— Ce ne sera pas nécessaire. (Il réussit enfin à quitter Qhuinn les yeux, et

fixa le sol.) Nous allons simplement dîner.

Il y eut un silence, si long que Blay finit par relever les yeux pour voir si

Qhuinn n’était pas parti.

— Tu veux autre chose ? Dit-il d’un air las. Sinon, il faudrait que je finisse

de me préparer.

Qhuinn décroisa les bras, et avança vers Blay, effaçant la distance entre eux

en deux longues enjambées. Il posa lourdement les mains sur les épaules de

Blay, ce qui bien entendu lui coupa immédiatement la respiration.

— Blay, murmura Qhuinn. (Puis il mit son visage entre les deux omoplates

de Blay, tandis que ses mains glissaient de ses épaules le long de ses bras, de ses

avant-bras, avant de se poser doucement sur les mains crispées sur le comptoir.)

J’avais juste besoin de te voir. Vraiment.

Quand Qhuinn lâcha prise, recula jusqu’à la porte, et s’arrêta, Blay le regarda

à travers le miroir, absolument sidéré.

— Si tu as le moindre ennui, tu sais où me joindre, dit encore Qhuinn. Je

serai là en une seconde.

Sur ce, il se retourna et quitta la pièce.

Il fallut un bon moment à Blay pour retrouver sa respiration, puis il se tourna

et avança jusqu’à la chambre. Où il resta planté un moment à regarder la porte.

Il finit par ouvrir son pantalon pour y rentrer sa chemise, espérant vaguement

que Qhuinn reviendrait.

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Autrefois, Qhuinn ne restait jamais plus de 48 heures sans passer voir Blay.

Jamais le jeune mâle n’évoquait ce qui se passait chez lui— ou plutôt la façon

dont il était traité chez lui— mais Blay le devinait. Tout comme il devinait que

son ami trouvait dans la maison de Rocke un calme et une tolérance dont il

avait le plus grand besoin.

Une chance que Blay n’ait jamais eu la moindre attirance pour les réunions

régulièrement organisées pour les jeunes de la Glymera. Parce que le bruit de

son amitié avec Qhuinn s’était peu à peu répandu et qu’il en payait déjà les

conséquences. Par de petites insinuations, diverses mesquineries, ou encore des

silences significatifs quand il passait parmi ses pairs. Lash, le propre cousin de

Qhuinn, semblait le plus acharné. Il avait d’abord tenté de séparer les deux

amis, en proposant à Blay son amitié, des cadeaux et diverses autres faveurs.

Enragé du peu de succès de ses offres, le jeune pré-trans aux cheveux blonds et

au visage si faussement angélique tenait désormais un autre langage, plus

direct. Mais Blay se fichait bien que des calomnies courent sur son compte. Et

jamais ses parents n’y faisaient allusion.

Comme quoi les membres de sang d’une même famille pouvaient être la pire

des plaies ou le plus fidèle des appuis.

Peu de temps auparavant, Blay avait rencontré un autre cousin de Qhuinn—

Saxton, fils de Tyhm. Un mâle plus âgé qu’eux, et très sûr de lui. Aux prises à

une timidité presque maladive, Blay s’était contenté de rougir sous ses cheveux

roux, incapable de prendre part à la conversation. Il avait plus d’une fois senti

peser sur lui le regard moqueur et légèrement condescendant de Saxton.

Qhuinn ne s’était rendu compte de rien. Il faisait assaut d’humour avec son

cousin, ou l’écoutait, bouche bée, parler de ses sorties, de ses virées nocturnes,

de ses beuveries et autres excès. Blay n’arrivait pas comprendre pourquoi ça

attirait autant son ami. Peut-être la vie à Caldwell était-elle trop calme pour un

être aussi vibrant ?

Pour lui, Qhuinn était tellement plus intéressant à écouter que son cousin—

Blay sursauta quand un coup retentit à nouveau à sa porte.

— Entre, dit-il arrivant à peine articuler les mots.

Le panneau s’ouvrit doucement.

— Salut bel homme, tu es prêt ?

Blay fut très déçu de constater qu’il s’agissait de Saxton, aussi splendide, que

d’habitude, dans son costume noir.

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— Oui, répondit-il d’une voix calme. Je n’ai plus qu’à mettre mes

chaussures. J’en ai pour une seconde. Je te retrouve en bas.

— D’accord, je t’attends dans le hall, dit Saxton avant de refermer la porte

derrière lui.

Blay agrippa ses cheveux rouges à deux mains, ayant la sensation qu’ils lui

brûlaient les doigts.

Merde, j’ai vraiment besoin d’une clope.

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Chapitre 3

Qhuinn était encore enivré par l’odeur de Blay et de son eau de toilette qu’il

gardait dans le nez. Dévalant l’escalier, il fonçait tout droit vers la cuisine quand

il vit Saxton planté dans le grand hall. Il s’arrêta si brusquement qu’il faillit en

renverser Mary. La shellane de Rhage émergeait de la salle à manger et, devant

sa violence, se cogna contre le panneau.

Elle poussa un cri.

— Mary ? Je ne vous ai pas fait mal ?

Il n’avait pas vraiment besoin qu’Hollywood veuille lui faire la peau pour

ahvenger sa femelle. Si Qhuinn avait bousculé Mary, son énorme hellren

n’hésiterait pas une minute à le massacrer. Et ce n’était pas le meilleur moment.

— Non, Qhuinn, ça va, répondit-elle gentiment. Tu m’as juste fait peur.

Qu’est-ce qu’il y a ? Tu sembles tendu.

Bien sûr, c’était bien dans le caractère de Mary de s’inquiéter davantage pour

lui. Ils entrèrent ensemble dans la cuisine. Qhuinn secoua la tête, puis tira un

siège près du comptoir pendant que Mary allait jusqu’au frigidaire qu’elle

ouvrit.

— Tu veux manger quelque chose ? Demanda-t-elle

Il crevait de faim.

— Non ça va. (Vu tout ce que la femelle sortait du frigidaire, il était

manifeste qu’elle s’apprêtait à préparer une collation pour son hellren. Et

Qhuinn ne voulait pas interférer.) Je vais juste grignoter une pomme.

Mary lui jeta un bref coup d’œil.

— Une pomme ? Je ne vais pas te laisser ne manger que ça.

Pas te laisser ? Il eut du mal à retenir son sourire. Puis il tourna la tête pour la

regarder quitter la cuisine vers le billard. Elle en revint avec un verre de whisky

qu’elle plaça devant lui. Et elle posa sa petite main sur son dos nu, entre ses

deux omoplates.

— Tiens, prends ça. Et reste avec moi moment. Ça me ferait plaisir d’avoir

de la compagnie.

— Merci.

Qhuinn n’arrivait pas à comprendre pourquoi elle était aussi gentille avec lui.

Ou pourquoi elle souhaitait sa compagnie. En fait, bien que Mary soit la plus

gentille personne de la maisonnée, il la voyait peu. Bien sûr, elle s’entendait

bien avec John. Et vu que Qhuinn, entant que son ahstrux nohtrum, était

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toujours collé à son copain, il la croisait de temps en temps. Mais en

réfléchissant, il n’était pas certain d’avoir à jamais eu avec elle une vraie

conversation. Pas plus qu’avec Beth, Marissa, Doc Jane ou Bella, les autres

shellanes des Frères. Peut-être devrait-il revoir sa sociabilité ?

Il but une gorgée de son Jack Daniel.

— Alors, ce soir, tu restes là ? Dit-elle tout en remplissant une lourde cocotte

de plusieurs ingrédients.

Il haussa les épaules.

— On dirait bien. C’est bien normal que John et Xhex profitent encore de

leur lune de miel.

Il n’avait pas eu l’intention d’être sarcastique, et pourtant l’intonation existait

dans sa voix Elle lui adressa un sourire par-dessus son épaule, et touilla le

contenu de sa large cocotte— quel qu’il soit.

— Ah, je vois. Je suis si heureuse pour John. (Elle posa un couvercle sur la

cocotte pour la laisser mijoter, puis se retourna et s’appuya sur le comptoir, face

à Qhuinn.) Tu sais, c’est admirable ce que tu fais… de toujours protéger John

avec ta vie. La Confrérie t’estime beaucoup.

— Je n’en mérite pas tant. En fait, je n’ai pas trop eu le choix. Je ne suis

qu’un déchet, une anomalie défectueuse, dit Qhuinn d’une voix sèche avant

d’avaler le reste de son whisky.

— Qhuinn, ce n’est pas vrai !

Ouais, mais Mary était humaine. Elle ne pouvait pas comprendre les règles et

restrictions qui régissaient le monde vampire— et la Glymera en particulier. Et

puis, elle était psychothérapeute pas vrai ? Il n’était pas vraiment d’humeur à

supporter une session en ce moment. Qhuinn posa un pied sur le sol pour se

lever avant que Mary recommence à parler. Elle prit un air rêveur, un doux

sourire sur le visage.

— Je me rappellerai toujours ma première rencontre avec Rhage. (Elle eut un

gloussement.) Il est entré dans ce restaurant où j’attendais… Quand il m’a dit

qu’il était là pour moi, j’ai cru que c’était une erreur. Comment un homme aussi

magnifique pouvait-il souhaiter rencontrer une fille aussi banale que moi ?

Cette fois, Qhuinn étudia réellement la femelle. Elle était si simple et naturelle

que sa beauté n’apparaissait sans doute pas au premier coup d’œil. Mais quand

même, elle n’avait absolument rien de « banal ».

— N’importe, continua-t-elle d’une voix sereine, il a purement et simplement

refusé toutes mes excuses pour le repousser. (Elle regarda Qhuinn, les yeux

graves.) J’avais toujours considéré être un vilain petit canard jusqu’à la première

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fois où Rhage a posé les mains sur moi. Grâce à lui, je me suis sentie belle—

tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. C’est vraiment étrange la façon dont l’amour

peut transformer une vie… en changeant complètement la façon dont on se

perçoit.

Mary tendit la main à travers le comptoir, et la plaça doucement sur celle de

Qhuinn, tout en le regardant droit dans les yeux.

— Tu es très beau, Qhuinn. Tu n’as rien de défectueux. Tes yeux

extraordinaires te rendent unique. Ta loyauté à John et à la Confrérie te fait

honneur. Tu n’as rien d’un déchet. Tu es un mâle de valeur.

Qhuinn ne sut quoi répondre. Jamais il n’avait rencontré une telle gentillesse,

et Mary croyait manifestement à son mensonge. Qhuinn avait déjà été traité de

tous les noms, mais certainement jamais de « mâle de valeur ».

Il fut soulagé quand elle se détourna de lui pour revenir à sa cuisine.

— Je vous remercie de votre offre qui m’honore, Mary, dit-il d’une voix

tendue, mais je n’ai pas réellement faim.

Il se leva et marcha vers la porte. Soudain, il s’arrêta, se retourna, et dit avec

sincérité :

— Merci… (Elle eut un doux sourire.) Pour le verre.

Il poussa le panneau de la porte et s’apprêta à sortir.

— Qhuinn ? (Il la regarda par-dessus son épaule.) Si tu as un jour besoin de

parler, je suis là.

— Je m’en souviendrai.

Dans le grand hall, Qhuinn croisa Marissa, la shellane de Butch. La femelle

était splendide, vêtue d’un tailleur noir, les cheveux blonds attachés en un

chignon lâche. Elle le salua poliment mais elle semblait lasse, et même triste.

Peut-être avait-elle de quoi avec ce qu’elle voyait chaque nuit. Cette aristocrate

de la Glymera avait souhaité aider la race plus utilement qu’en étant un simple

ornement dans les bals et les fêtes où son lignage lui donnait place. Elle avait

donc créé le Refuge, une association qui s’occupait des femelles battues ou sans

ressources du monde vampire. Qhuinn monta au premier étage derrière Marissa

et la vit frapper à la porte du bureau du roi.

Sans attendre, il fila rapidement jusque dans sa chambre, et se laissa tomber à

plat ventre sur le lit, le nez dans l’oreiller.

Mary, Marissa… Qhuinn réfléchit un moment aux femelles que les Frères

avaient choisies comme compagnes. Wrath, le roi légitime de la race, avait élu

pour reine une sang-mêlé à moitié humaine— répudiant pour elle sa première

compagne. La Glymera avait jasé des mois durant sur cette entorse inouïe à la

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tradition. Beth, la reine, était aussi la demi-sœur de John Matthew, un vampire

pure race. Et leur père commun était le guerrier de la Dague Noire, Darius,

assassiné quelques mois plus tôt par les lessers.

Hollywood s’était trouvé une humaine. Qhuinn ne savait absolument pas

comment une telle rencontre avait été possible. D’après John, la Vierge Scribe

avait octroyé à Mary la vie éternelle. Vu la différence d’espérance de vie entre

les deux races, c’était une chance pour le couple.

Zsadist était le compagnon de Bella, une aristocrate déchue après une liaison

orageuse— et aussi la demi-sœur de Rehvenge, un demi-sympathe ex-

maquereau et ex-dealer. Ouais, difficilement la femelle idéale à présenter à sa

famille. Mais faut dire que Z n’était pas exactement le mâle à se préoccuper des

opinions d’autrui.

Vishous lui aussi avait choisi une humaine— morte d’ailleurs et devenue

fantôme. Qhuinn se souvenait encore du choc qu’il avait éprouvé en réalisant la

présence d’un spectre dans la maison. Doc Jane était également le chirurgien

privé de la Confrérie, et elle avait installé au centre d’entraînement une clinique

extrêmement bien montée. Qhuinn y était déjà passé une fois ou deux pour des

blessures légères. Fantôme ou pas, la femelle était un sacrément bon médecin.

Qhuinn reconnaissait vite les gens doués avec une lame.

Qui restait-il ? Ah— le jumeau de Z, Phury. Qui ne vivait pas au manoir mais

dans le nord, avec sa shellane, l’Élue Cormia. Qhuinn avait bien aimé cette

femelle douce et timide aux temps où elle vivait à la Confrérie, tout au début de

son union. Il se souvint de l’avoir vue un soir émerger de la piscine, nue et

trempée— et belle à tomber. Bien sûr, Phury était l’un des rares Frères à avoir

une compagne traditionnelle. Sauf que le guerrier était aussi le Primâle des

Élues et qu’il avait renoncé à ses droits sur les quarante femelles de son harem.

Désormais libres de sortir du Sanctuaire, au grand dam des traditionnalistes de

l’aristocratie.

Quant à Tohrment, le père adoptif de John, il avait perdu sa shellane, la noble

Wellsandra Aussi une autre union bien classique avait-elle été rompue.

John Matthew s’était uni à une guerrière à demi-sympathe. Que Wrath avait

engagée dans la Confrérie pour combattre les lessers. Qhuinn n’était pas certain

que la nouvelle ait déjà atteint la Glymera. Après tout, depuis les attaques de

l’été passé, les nobles vampires avaient déserté Caldwell…

Blay était gay.

Et Qhuinn—

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Ouais, qu’était-il au juste. Il avait passé les mois depuis sa transition à baiser

tout ce qu’il rencontrait, mâle et femelle, sans état d’âme.

Et dire que Mary le considérait comme un mâle de valeur ? Il ricana à voix

haute. C’était une humaine, une femelle naïve. Il n’avait rien d’un mâle de

valeur— pas plus qu’elle-même n’était une fille banale.

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Chapitre 4

— On dirait que tu as la tête ailleurs.

Blay releva les yeux de son menu pour regarder Saxton, assis en face de lui.

C’était la vérité. Il ne pensait qu’à Qhuinn— aux mains dures qui s’étaient si

doucement posées sur les siennes— au murmure de la voix lui disant qu’il avait

besoin de le voir… Elle résonnait en boucle dans ses oreilles, encore et encore.

D’ailleurs, il se serait flanqué des claques. Pourquoi était-il resté planté comme

un abruti, sans dire un mot ? En vérité, il avait eu terriblement peur d’être rejeté,

une fois encore.

— Je n’arrive pas à me décider sur ce que je veux commander, répondit-il.

— Non. (Le visage du mâle prit une expression accusatrice.) Tu as été

comme ça toute la nuit. Comme si tu avais quelque chose sur le cœur.

Blay fronça les sourcils, puis haussa les épaules.

— Désolé si ma compagnie manque de charme. Y a-t-il quelque chose sur ce

menu que tu pourrais me recommander ?

Il tenait à détourner l’attention de Saxton sur un autre sujet. Franchement,

l’habitude qu’avait le mâle de faire un drame au moindre motif commençait

réellement à lui courir sur le système. Blay se sentait tendu, et pas de façon

agréable.

— C’est à cause de Qhuinn ? Insista Saxton.

Bon sang ! Pourquoi avait-il fallu que Saxton soulève le problème ?

— En quoi étudier un menu concernerait-il Qhuinn ?

Blay avait haussé la voix pour répondre. Ce n’était pas son genre, mais il en

avait assez d’être en position de faiblesse. Devant la sécheresse de sa voix,

Saxton détourna les yeux. Puis il baissa la tête, haussa les épaules, et parla d’une

voix basse :

— Écoute, je sais que ce n’est probablement pas le bon moment pour en

parler. Je ne voulais pas le faire, mais ça m’a pesé toute la soirée.

Saxton releva les yeux pour croiser ceux de Blay, qui sentit son corps se

crisper. Il serra les mains en poings sur la table. Il ne savait pas où l’autre

comptait aller, mais s’il évoquait sa relation avec Qhuinn, Blay se lèverait et

quitterait la salle. Le sujet était hors limite.

— Tu sais, continua Saxton, j’ai parlé à Qhuinn avant de quitter le manoir.

Blay aurait dû déjà courir vers la porte. Pourtant, il resta assis. Parce qu’il

était soudain très intéressé par ce que Qhuinn avait répondu à Saxton.

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— Je n’ai qu’un truc à te dire, dit le mâle. Si tu restes accroché à l’espoir

d’être un jour avec lui, tu seras éternellement malheureux. Qhuinn a été très

clair. Il est ravi que j’existe désormais dans ta vie et que tu lui fiches la paix. Il

pense que tu as enfin oublié ton obsession à son sujet, Blaylock. Mais moi…

» (Saxton leva les mains d’un geste élégant.) Je n’en suis pas certain. Et je ne

peux pas me heurter sans cesse à ce que toi et Qhuinn avez autrefois partagé.

J’ai besoin de savoir si tu es intéressé par une relation sérieuse. Je tiens à toi,

c’est certain, mais pas à mes propres dépens.

Blay croisa les mains et posa son menton dessus. Il fixait machinalement la

flamme vacillante des chandelles posées au milieu de la table. Il avait l’estomac

si douloureusement noué qu’il ne savait pas s’il lui serait possible d’ingurgiter la

moindre nourriture. Il était effondré. Qhuinn savait que Saxton lui répéterait leur

petite conversation. Alors, il avait tout soigneusement préparé. Et ensuite, peut-

être ce connard égoïste avait-il ressenti une pointe de culpabilité— ce qui

expliquait leur échange dans la salle de bain.

Blay releva les yeux vers Saxton. Ça lui serait difficile, mais il devait oublier

Qhuinn. Définitivement.

Il tendit la main à travers la table, et la posa sur celle de Saxton.

— Il n’y a jamais rien eu entre lui et moi. Point final. (Il ne pouvait même

pas prononcer le nom de son copain, il avait bien trop peur de s’étouffer avec.)

Si je ne voulais pas être avec toi, je ne serais pas là ce soir. Alors je t’en prie,

savourons notre dîner.

Blay déglutit avec difficulté.

Quand Saxton lui sourit, Blay retira sa main et fit semblant de s’intéresser à

nouveau au menu. Du coin de l’œil, il vit le geste de l’autre mâle qui tirait sa

chaise pour l’approcher de la sienne. Et soudain, il sentit la main de Saxton se

poser sur le haut de sa cuisse.

Blay ferma les yeux, et inspira longuement.

— Que dirais-tu à la fin du repas de passer chez moi pour un petit dessert ?

Susurra Saxton.

La voix était basse et séduisante. Blay en était conscient, tout comme de la

chaleur de la main posée sur sa jambe. Et pourtant, il ne ressentait aucun intérêt,

aucune émotion. Son sexe restait flaccide. Il ouvrit les yeux pour regarder

Saxton.

— Ça serait chouette, mentit-il.

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Il avait d’ores et déjà l’intention de prétendre ne pas digérer son dîner. Oui,

l’excuse d’un mal à l’estomac lui servirait à s’échapper. Il avait besoin d’être

seul.

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Chapitre 5

Le hurlement d’une sirène de police réveilla Qhuinn en sursaut. Cette

saloperie sonnait si fort qu’on aurait cru que le son émergeait de tous les murs

du manoir. Il tourna des yeux hagards vers la télévision où le feuilleton— New

York, Police Judiciaire— faisait un boucan d’enfer. Des chiffres rouges sur le

décodeur indiquaient 3:00. Merde de merde. Il était 3:00 du matin et il était

vautré dans son lit au lieu de massacrer des lessers dans les rues ? Pas dire, côté

pathétique, il avait vraiment touché le fond. Cette connerie de lune de miel de

John lui courait sur le système.

Qhuinn roula dans son lit et récupéra sa télécommande. Au point où il en

était, peut-être pourrait-il trouver une chaîne qui diffusait les Golden Girls ou

une autre merde du genre ? Il ne méritait pas mieux. En fait, il allait peut être

finir comme Lassiter, l’ange déchu. Qui était lui aussi pathétique avec ses goûts

télévisés et—

Il entendit alors des pas pesants traverser le grand hall. Puis se rapprocher...

De plus en plus près, jusqu’à s’arrêter juste devant sa porte. Il releva vivement la

tête, s’attendant à entendre frapper. Mais ce ne fut pas le cas. Pourtant, celui qui

était dans le couloir ne s’éloignait pas.

Étonné, Qhuinn se releva d’un bond, traversa la pièce au pas de course, et

ouvrit sa porte en grand.

— Blay ?

— Désolé de t’avoir dérangé. J’allais dans ma chambre, bafouilla Blay.

— Ta chambre est avant celle de John, indiqua Qhuinn en agitant la main.

Qu’est ce qui ne va pas ? C’est Saxton ? Il t’a emmerdé ?

Ses questions devenaient de plus en plus rapides et pressantes tandis que sa

colère montait.

Le visage de Blay exprima une sorte d’étonnement.

— Non. Écoute, excuse-moi. Je ne voulais pas te déranger... Vraiment.

— Tu ne me déranges pas. Bordel, c’est même le contraire, parce que je

m’emmerdais comme un rat mort. entre.

Laissant la porte ouverte, Qhuinn se détourna, et retourna se jeter sur son lit.

Blay hésita une minute, puis entra.

— Alors, ce dîner ? Demanda Qhuinn. C’était comment ?

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— Qhuinn… (Blay gardait les yeux fixés au sol. Sans le regarder. Merde. Ça

faisait longtemps que Qhuinn s’était habitué à ce que son copain ne croise plus

son regard.) Je voudrais m’excuser.

— Pourquoi ? Mais bordel, pourquoi voudrais-tu t’excuser ?

Quand Blay releva les yeux, Qhuinn sentit son souffle s’étrangler dans sa

gorge. Cette fois, les prunelles saphir étaient bel et bien posées sur lui. Blay

passa la main dans ses cheveux roux, cherchant manifestement ses mots pour

s’exprimer.

— Je suis vraiment désolé d’avoir tout foutu en l’air, dit-il enfin. D’avoir

créé ce malaise entre nous. Ce n’est pas de ta faute, ajouta-t-il, avant de s’arrêter

pour secouer la tête. Ce n’est pas de ta faute. Tu n’as rien fait pour provoquer ce

que je ressens. Et je n’avais aucun droit d’espérer quoi que ce soit en retour.

Aussi je suis vraiment désolé de t’avoir causé un problème.

Blay chercha autour de lui et repéra à côté du lit un fauteuil où il s’assit

lourdement. Puis il posa ses coudes sur ses genoux, et cacha son visage dans ses

mains.

— Je suis tellement désolé, répéta-t-il.

Qhuinn se releva d’un bond de son lit.

— Tu ne m’as pas causé de problème. Tu n’as pas créé de malaise entre

nous. Merde, mais où as-tu inventé ça ?

Il devina soudain que ça venait de Saxton— que son cousin avait ouvert sa

grande gueule. Il avait d’ailleurs la ferme intention d’apprendre tout ce que cet

enfoiré avait raconté— avant de se lancer à sa poursuite pour lui arracher la tête

comme il le lui avait promis. Fumier.

Blay releva la tête et s’adossa dans son fauteuil.

— Allez, Qhuinn. On peut arrêter de faire semblant. Tu te doutais bien que

Saxton me répéterait votre conversation.

La voix de Blay était si atone que Qhuinn eut la sensation que son sang

bouillonnait dans ses veines, juste sous sa peau.

— Bordel de merde, qu’est-ce qu’il t’a dit ?

Blay leva les yeux au ciel, mais ne répondit pas. Qhuinn se pencha, les deux

mains posées sur les accoudoirs du fauteuil où Blay était assis, et lui dit nez à

nez :

— Qu’est-ce qu’il t’a dit ?

Mais Blay ne se laissa pas intimider. Il posa ses larges mains sur la poitrine

nue de Qhuinn pour le pousser en arrière, puis il se releva.

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— As-tu vraiment besoin de le demander ? C’est bon, ce n’est pas grave. Je

reconnais avoir agi de façon stupide. Et je comprends que tu sois heureux d’être

débarrassé de moi. Aucun problème.

Qhuinn ricana, avant d’arpenter nerveusement la pièce.

— Ce petit fumier t’a menti. Oh, je présume aussi qu’il a oublié de te parler

de ma promesse de le massacrer s’il te causait la moindre peine ? Ou s’il

t’utilisait à ses propres desseins ?

— Tu es vraiment incroyable, tu sais, dit Blay qui se détourna et s’éloigna

vers la porte.

— Incroyable ? Ne me dis pas que tu vas croire ce connard plutôt que moi ?

Blay se retourna et lui jeta un coup d’œil. Et Qhuinn sentit sa peau se

recroqueviller en réalisant que son meilleur ami le prenait pour un menteur. Pour

cacher sa douleur, il pivota sur lui-même— et se retrouva face à un miroir,

devant la penderie, à fixer son reflet. Il eut à peine le temps de remarquer les

deux yeux dépareillés qui le regardaient avec dégoût.

Sur une impulsion, il envoya son poing en avant et fit éclater le miroir en

mille morceaux.

— Seigneur ! S’exclama Blay

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Chapitre 6

Blay n’arrivait pas à en croire ses yeux en regardant le sang qui jaillissait de

la main de Qhuinn et tombait sur le tapis. D’un geste instinctif, il agrippa

Qhuinn par le bras et le traîna jusqu’à la salle de bain— où il le força à s’asseoir

sur le rebord de la baignoire. En même temps, il attirait du pied la corbeille la

plus proche et la glissait sous la main sanguinolente.

— Mais pourquoi as-tu fait ça ? S’exclama-t-il.

Qhuinn ne répondit pas. Pourtant, il grimaça de douleur quand Blay souleva

sa main blessée pour l’examiner de plus près.

— C’est vraiment moche, continua Blay. Il faudrait que tu voies Doc Jane.

— Non. Ça va aller. Je m’en occupe.

— Arrête de jouer au dur, Qhuinn. Il y a des morceaux de verre plantés dans

ta main.

— Je ne veux pas voir le docteur, c’est clair ?

Qhuinn commença à se relever, mais Blay l’en empêcha de force, obligeant

son ami à garder son cul posé sur le rebord de marbre de la baignoire.

— D’accord, dit-il pour le calmer. Je vais te nettoyer ça.

Avec un soupir, Blay se pencha pour ouvrir le placard sous le lavabo. Pas à

dire, Qhuinn était vraiment pénible à être aussi buté. Á toujours vouloir se

débrouiller seul. Bien sûr, ça faisait parti de son charme, mais de temps en

temps, franchement, c’était énervant. Comme maintenant, par exemple.

Blay se souvint de la fois où Qhuinn l’avait convaincu d’aller se baigner en

pleine nuit sur les berges du fleuve Hudson. C’était dangereux et strictement

interdit. D’abord, les lessers hantaient les rues de Caldwell la nuit. D’accord,

en principe, les non-vivants ne distingueraient pas de simples pré-trans

d’humains, mais quand même… il valait mieux ne pas les rencontrer. D’autre

part, les rives étaient mal fréquentées, par des drogués et des sans-abris, pour

qui deux maigres gamins seraient une proie facile. Blay eut un frisson à cette

idée.

De plus, l’Hudson avait des courants violents, et des tourbillons. Y nager était

risqué.

Mais Qhuinn était décidé. Il annonça à Blay qu’il irait seul si son ami refusait

de l’accompagner. Aussi Blay était-il venu, à contrecœur, au rendez-vous.

Qhuinn avait dégoté une vieille voiture, et les deux pré-trans étaient partis

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ensemble, s’écartant de Caldwell pour suivre les rives dont l’eau noire

paraissait menaçante.

Une fois garée dans un chemin de terre défoncé que Qhuinn avait affirmé être

un raccourci, ils avaient marché ce qui avait semblé à Blay des heures durant,

jusqu’à un vieux ponton à moitié défoncé, près d’une cabane, au bord de l’eau.

Bien entendu, Qhuinn avait plongé le premier. Droit sur un pieu en fer planté

dans la boue, où l’occupant de la cabane devait accrocher ses filets.

Blay revoyait la main en sang de Qhuinn tandis qu’ils revenaient sur leur pas,

et le tee-shirt roulé en bandage sommaire qui fonçait de plus en plus sous

l’afflux de sang—

Qhuinn avait refusé de passer chez Havers. Mais sa blessure l’avait quand

même dénoncé. Lohstrong, son père, leahdyre du conseil des Princeps, l’avait

consigné un mois durant pour avoir volé une voiture…

Le jour-même de sa libération, Qhuinn était passé chercher Blay, au volant

d’une autre guimbarde, et ils étaient retournés au même endroit. Où ils avaient

passé la nuit à plonger du même ponton. Avant de grignoter des cookies en

buvant du Coke.

Qhuinn ne laissait jamais tomber un projet qui lui tenait à cœur—

Tout en réfléchissant, Blay sortit du placard une trousse de premiers soins

puis il prit une serviette qu’il mouilla au robinet. Avec quoi allait-il pouvoir

retirer les débris de verre ?

— Tu n’aurais pas par hasard une pince ou quelque chose du même genre ?

demanda-t-il.

— Dans l’armoire à pharmacie, marmonna Qhuinn.

Effectivement, il y avait une pince dans l’armoire, au milieu de nombreuses

autres fournitures médicales. Soulagé, Blay attrapa tout ce dont il avait besoin,

et installa son matériel sur le rebord de la baignoire, juste devant Qhuinn.

Ensuite, il retira les pans de sa chemise de son pantalon et commença à la

déboutonner. Qhuinn releva la tête d’un geste vif. Leurs regards se croisèrent.

Sans broncher, Blay continua à se déshabiller et enleva sa chemise, exposant le

fin tee-shirt qu’il portait en dessous. Il jeta le vêtement derrière lui, sur le siège

des toilettes. Puis il arracha sa ceinture et les yeux de Qhuinn s’écarquillèrent

davantage. Blay posa sa ceinture sur sa chemise avant de s’agenouiller devant

son ami.

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Doucement, il prit entre les siennes la main blessée, et l’essuya avec soin de la

serviette mouillée. Il y avait tellement de sang que les débris de verre étaient

difficilement accessibles.

— Je ne suis pas un menteur, dit Qhuinn d’une voix calme.

En entendant ça, Blay s’arrêta, et releva les yeux, examinant le visage si

proche du sien. Une barbe noire et drue ombrait les fortes mâchoires et, sous les

yeux enfoncés, de larges cernes violets marquaient la fatigue et… autre chose

aussi. Qhuinn devait avoir besoin de sang. Depuis quand n’avait-il pas pris une

veine ? Les cheveux habituellement raides et hérissés du mâle étaient aplatis sur

son crâne. Et les merveilleuses prunelles étaient... tristes. Instinctivement, Blay

eut à nouveau besoin de le réconforter.

— Je sais, dit-il doucement, avec une parfaite sincérité. Mais je n’ai pas

besoin que tu défendes mon honneur, Qhuinn. Je ne suis pas une lavette. Je peux

me débrouiller seul.

Il baissa les yeux, et se remit à soigner la main de Qhuinn.

— Je n’ai jamais dit le contraire, protesta Qhuinn. Et tu ne serais pas mon

meilleur ami si tu étais une lavette.

Blay se mit à rire.

— Tu as vraiment réponse à tout, pas vrai ?

Lorsqu’il entendit un gloussement, l’incongruité d’un tel son émanant de

Qhuinn lui fit relever les yeux. Sa respiration s’étrangla dans sa gorge. Son ami

souriait. Et tout le visage dur en était transformé. Avec cette étrange douceur qui

illuminait soudain les traits bien dessinés, il devenait d’une beauté stupéfiante.

Mais le si rare sourire s’effaça rapidement.

— Quoi ? grogna-t-il en levant un sourcil interrogateur.

Blay secoua la tête, et continua à retirer les débris de verre des profondes

entailles dans la main de Qhuinn.

Ils restèrent silencieux tout le temps qu’il s’appliqua à sa tâche.

— Je pense que j’ai tout enlevé, dit enfin Blay.

Il apposa une pommade antibiotique sur les coupures, puis prit de la gaze

qu’il déroula sur les plaies, avant de tout faire tenir avec du sparadrap. Il n’avait

pas encore terminé quand il sentit des doigts lui caresser doucement le visage. Il

sursauta.

Atterré, il ferma les yeux, en les serrant fort.

— Ne fais pas ça, chuchota-t-il.

Qhuinn lui avait mis la main en coupe, sous la mâchoire, soutenant son

visage. Baissant sa tête rousse qui pesait soudain très lourd, Blay gardait les

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yeux clos, étroitement serrés. La sensation de la main de Qhuinn sur lui était à la

fois douloureuse et exaltante. Bien que le mâle ait des mains de guerrier, fortes

et larges, son toucher était tendre et délicat. Mais Blay ne pouvait plus supporter

qu’il existe entre eux d’aussi intenses moments qui ne débouchent sur rien.

— J’ai envie d’être avec toi, Blay. Vraiment. (Quand Qhuinn s’arrêta, Blay

eut la sensation que son cœur tambourinant aller s’échapper de sa cage

thoracique.) C’est juste que...

Qhuinn se tut. Et le silence dura si longtemps que Blay finit par rouvrir les

yeux… pour s’apercevoir que l’autre mâle avait fermé les siens. Avant de

poursuivre d’une voix cassée :

— C’est juste que je m’inquiète pour toi. Je n’ai pas envie que tu sois avec

moi. (Qhuinn secoua la tête.) Je n’ai pas confiance en moi. Si je te causais du

tort, ça me tuerait. Ouais, bordel, je me tuerai.

Ça devait être un rêve, pensa Blay. Sûrement. Toujours à genoux, il se

redressa, et réunit tout le courage qu’il possédait pour prendre à deux mains la

tête de Qhuinn. Qu’il attira vers lui, pressant son front sur celui de l’autre mâle.

Il sentait la respiration rapide de son meilleur ami s’échapper de sa bouche en

souffles rauques qui lui caressaient le visage.

— Tu ne te tueras pas, dit-il doucement. Le suicide nous est interdit, tu le

sais. Tu perdrais toute possibilité d’entrer dans l’Au-delà.

— Je ne mérite pas d’y aller.

La voix de Qhuinn était si amère que c’en était déchirant. À nouveau, Blay

éprouva le besoin de le réconforter. Aussi, il posa ses lèvres sur celles de son

ami, les effleurant à peine. Et il resta ainsi, sans bouger, durant un long moment.

Soudain, Qhuinn réagit et serra Blay contre lui tout en l’embrassant

fiévreusement, les deux mains crispées sur ses avant-bras.

Dans la tête de Blay, la zone sensée qui s’inquiétait toujours de ce qui pourrait

arriver par la suite s’occulta complètement. Sans plus réfléchir, il se perdit dans

la magie du moment. Après tout ce temps d’attente, il sentait enfin sur lui la

bouche de Qhuinn. Et il le désirait tant. Il en avait tellement besoin. De ça, et de

bien plus encore.

Tandis que leurs deux langues dansaient l’une contre l’autre, le baiser devint

de plus en plus passionné, bien plus intense que tout ce qu’ils avaient partagé

jusque-là. Les mains de Blay se serrèrent sur la tête de Qhuinn, ses doigts

s’emmêlant dans les souples mèches noires. En réponse, Qhuinn grogna, et

referma les dents sur la lèvre inférieure de Blay, qu’il aspira sensuellement. De

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ses canines allongées sous l’afflux du désir, il mordilla la chair humide et

gonflée de sang.

— Ouvre les yeux, ordonna-t-il. Regarde-moi prendre ton sang.

Quand Blay obéit, il se noya dans les merveilleux yeux dépareillés et brûlants

fixés sur lui. Son sexe était si engorgé de désir qu’il en devenait douloureux. Il

voulait posséder le mâle. Le marquer. Il en avait une envie frénétique et vitale.

Le regard de Qhuinn se baissa sur sa lèvre tandis que Blay léchait le sang qu’il

avait fait couler. Puis il s’écarta, et déglutit ostensiblement en gémissant de

plaisir.

— Oh merde, haleta Blay, le souffle court.

Qhuinn eut un bref sourire, avant de se pencher à nouveau pour embrasser le

cou de Blay. Qui sentit les canines acérées de l’autre mâle glisser le long de sa

peau. Il saisit à deux mains à la taille de son ami. Et son gémissement d’extase

renvoya des échos dans la salle de bain. Soudain, l’atmosphère autour d’eux fut

embaumée une riche odeur d’épices sombres. Enhardi, Blay s’attaqua à la

fermeture du pantalon de Qhuinn— tout en s’attendant plus ou moins à ce que

l’autre recule. Mais ce ne fut pas le cas. Blay ouvrit le bouton et descendit la

fermeture éclair…

Était-il possible que ça arrive vraiment ? Et qu’il soit ainsi avec Qhuinn—

comme il en avait rêvé depuis si longtemps ? Plongeant dans l’ouverture du

jean, il saisit à pleines mains le sexe dur et brûlant, au moment même où les

canines du vampire se plantaient dans sa gorge. Tandis qu’il caressait

amoureusement le membre raidi, promenant sa paume du haut en bas, Qhuinn

buvait à son cou, les deux mains crispées sur ses épaules.

Un violent choc sur la porte les fit sursauter, et ils s’écartèrent rapidement

l’un de l’autre.

— Mais c’est pas vrai, bordel, grommela Qhuinn.

Alors que la porte de la chambre s’ouvrait sans attendre d’invitation, Qhuinn

remonta rapidement la fermeture de son pantalon. Une seconde après, Vishous

entrait dans la salle de bain.

— Cette odeur me dit quelque chose, s’exclama le Frère hilare devant l’odeur

épicée qui régnait dans la pièce. À quoi vous jouez là-dedans, les mecs ? Et

pourquoi n’ai-je pas été invité à cette petite session ?

Vu les pratiques habituelles du mâle, il pensait manifestement que le sang et

les pansements faisaient partie une sorte de violent jeu sexuel. Ce qui n’était pas

le cas. Du moins, pas vraiment. Bien sûr, le miroir éclaté dans la pièce d’à côté

n’arrangeait pas trop leurs affaires.

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Sans répondre, Qhuinn fixa simplement le Frère tandis que Blay gardait le dos

tourné à la porte où Vishous s’était planté en attendant calmement une réponse.

Quand il n’en obtint pas, il haussa les épaules d’un geste fataliste.

— D’accord. Tant pis. Je voulais juste vous avertir que Wrath veut voir tout

le monde dans la salle à manger dans vingt minutes. C’est l’anniversaire de

Mary. Alors à tout de suite.

Il se détourna et quitta la pièce.

Avec un clin d’œil, Qhuinn regarda Blay et dit :

— Et si tu finissais mon pansement ?

Blay eut un sourire timide et soulagé, puis il se baissa pour ramasser le

sparadrap.

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Chapitre 7

D’un œil attentif, Qhuinn surveilla Blay tandis qu’il terminait le pansement de

sa main. Du sang coulait encore des deux entailles au cou du vampire parce que

Qhuinn n’avait pas eu le temps de sceller sa morsure avant que Vishous n’entre

dans la pièce. Seigneur, le sang de Blay. Il avait encore le goût dans la bouche.

Et jamais il n’avait rien goûté de tel— un véritable nectar, épais, riche et

enivrant. Il se demanda tout à coup s’il lui serait possible de vivre du sang de ce

mâle, parce que franchement, il avait envie de ne plus jamais prendre d’autre

veine de toute son existence.

— Te voilà paré, dit enfin Blay, avant de lui tapoter la cuisse.

Puis le mâle se pencha et ramassa tout ce qui restait, rangeant soigneusement

les fournitures dans leur boîte, jetant les emballages utilisés, repliant la serviette.

Incroyable à quel point ce mec était ordonné. Tout le contraire de Qhuinn. Qui

resta assis sur le rebord de la baignoire pendant que Blay arpentait la salle de

bain pour remettre la trousse de soins sous le lavabo, les pinces dans l’armoire à

pharmacie, et la serviette (pliée) dans le bac à linge sale avant de se laver les

mains.

Bon sang, pensa Qhuinn, il avait envie de Blay. Il voulait retrouver cette

incroyable sensation qui avait ébranlé tout son être quand le mâle l’avait touché.

Mais c’était impossible, bien sûr. Il ne leur restait que dix minutes avant de

descendre retrouver les autres en bas. Et ça ne suffisaient absolument pas pour

ce qu’il avait en tête. Ouais, Blay n’était pas une pute qu’on baisait à la va-vite

dans une salle de bain.

— Merci, dit Qhuinn tandis que Blay passait devant lui.

L’autre s’arrêta, et mit les mains sur ses hanches, faisant gonfler ses muscles

épais. Le mâle avait des bras que tout vampire aurait rêvé d’avoir. Bordel,

Qhuinn rêvait incontestablement de les avoir… serrés autour de lui.

— Aucun problème, répondit Blay, qui se mit à rire avant d’ajouter : Mais

n’en fais pas une habitude.

Qhuinn finit par se lever, et fit face à Blay. Il posa les deux mains sur les

biceps de son copain et se pencha, scellant d’un coup de langue les entailles

ouvertes de son cou. Le goût du sang sur sa langue envoya un nouvel éclair de

feu à travers son corps.

— Je ne te remerciais pas de tes soins, mec, chuchota Qhuinn à l’oreille de

Blay.

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Sans attendre de réponse, il se détourna et quitta rapidement la salle de bain.

Une fois dans sa chambre, il alla jusqu’au miroir éclaté. Tout en enlevant son

tee-shirt noir et froissé, il examina le foutoir qu’il avait provoqué.

— Fritz va avoir un sacré choc, dit Blay derrière lui.

Qhuinn se retourna pour le regarder. Le mâle avait remis sa chemise dont il

rangeait les pans dans son pantalon. Il avait les joues aussi rouges que les

cheveux. Et Qhuinn ne put s’empêcher de sourire.

Sinon, Blay avait raison. Il allait sacrément se faire engueuler par le vieux

doggen. Mais vraiment, il n’arrivait pas à regretter d’avoir fait exploser cette

saloperie de miroir.

Pendant que Blay remettait sa ceinture, Qhuinn ne le quitta pas des yeux. Par

rapport à lui, le mâle avait l’air en tenue de soirée. Mais ça, c’était tout Blay :

Toujours parfaitement vêtu. Une vraie putain de gravure de mode.

— Oh merde, grogna-t-il soudain, en se rappelant pourquoi son copain était

aussi bien habillé. Je vais devoir côtoyer ce sinistre connard en bas.

Bien entendu, Blay comprit immédiatement à qui s’appliquait la charmante

épithète.

— Non, répondit-il. Saxton n’est pas revenu au manoir avec moi.

Si Qhuinn en fut soulagé, il aurait quand même bien voulu savoir ce qui

s’était passé. Il détestait ne pas être au courant de tout. Mais il était manifeste

que Blay ne tenait pas à en parler, aussi il se retint d’insister. Du moins, pour le

moment.

— Allez, on y va, dit-il seulement.

Qhuinn tint la porte ouverte pour laisser passer Blay, et leurs yeux se

croisèrent. D’un seul coup, Blay claqua la porte d’une main, et colla Qhuinn

contre le panneau de l’autre. Le désir violent qui émanait de lui était quasiment

perceptible. Qhuinn le sentait, tout comme il sentait le regard bleu lui brûler la

peau. Des lèvres fermes et ourlées lui écrasèrent la bouche avec force, tandis

qu’une langue autoritaire le pénétrait. Enivré, Qhuinn imagina cette même

bouche s’activer ainsi sur son sexe. Avant qu’il ne puisse lancer la suggestion,

Blay s’écarta, le laissant pantelant.

— C’est fini entre Sax et moi, dit-il sèchement. C’est un chieur qui

commençait à me courir.

Qhuinn ne put que hocher la tête, encore sous le choc. Merde, mais que lui

arrivait-il ? Personne n’avait jamais été aussi sexuellement agressif envers lui.

En général, c’était lui qui menait la danse. Mais pas cette fois. Blay prenait

toutes les initiatives. Et c’était sacrément jouissif.

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Blay rouvrit la porte, forçant Qhuinn à s’écarter. Et le mâle était à deux pas

devant tandis que Qhuinn le suivait dans le couloir aux statues.

— Tu deviens sacrément autoritaire en prenant de l’âge, tu sais ? Dit Qhuinn

au dos de son copain. (Il n’obtint comme réponse qu’un rire bref.) Ça fout la

trouille.

— Dans le bon ou le mauvais sens ? Demanda Blay sans se retourner.

— Les deux. (Le regard de Qhuinn glissa le long du dos de Blay quand le

mâle mit les deux mains dans ses poches, tendant le tissu de son pantalon sur

son cul parfait.) Ouais, pas de doute, les deux.

— Si ça peut te faire plaisir, j’éprouve les mêmes sensations, dit Blay en

arrivant en haut des marches.

Les autres membres de la maisonnée étaient déjà réunis en bas, dans le grand

hall et la salle à manger. Apparemment, Qhuinn et Blay étaient les derniers

arrivés parce que tous les yeux se levèrent pour les regarder.

Y compris ceux de Vishous… et le mâle arborait un sourire carrément

sardonique.

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Chapitre 8

— Mary, dit V avec un rire sonore, la fête peut commencer, les clowns sont

entrés en scène.

Tout à coup, Blay se sentit nerveux sans trop savoir pourquoi. Il ne devrait

pas paraître bizarre que lui et Qhuinn arrivent en même temps. Après tout, ils

étaient amis de longue date. Bien sûr, ça faisait un bail que Blay évitait de se

retrouver en compagnie de Qhuinn mais quand même. Le mâle restait son

meilleur ami. Il se demanda si Vishous s’était senti obligé de partager les détails

de ce qu’il avait vu avec les autres.

Il sentit la main de Qhuinn se poser légèrement sur ses reins pour l’inciter à

avancer, avant d’entamer aussi la descente des escaliers. À ce geste, Blay se

sentir légèrement réconforté, et il suivit lentement son ami jusqu’au rez-de-

chaussée. En vérité, on aurait pu croire qu’un cirque s’était installé là. Ou une

foire en tout cas. Dans un coin, Rhage s’activait devant une machine à barbe à

papa, tournant un bâtonnet de bois dans la mixture rose et mousseuse tandis que

Bella, juste à côté, remplissait des gobelets de pop-corn. Des vampires qui

fêtaient un anniversaire avec de la barbe à papa et du pop-corn, ce n’était

vraiment pas courant. En fait, Blay n’avait jamais vu ça.

— Vishous, sois gentil avec eux, dit Mary en sautant de sa chaise.

Elle jeta ses deux bras autour de Qhuinn et le serra affectueusement contre

elle, tandis qu’il restait planté, tout gêné, ne sachant pas trop comment répondre

à son geste.

— Je suis vraiment contente que vous ayez pu venir, les garçons, dit Mary.

Qhuinn s’écarta d’elle avant de grommeler entre ses dents :

— J’ai pas trop eu l’impression qu’on ait le choix.

Il traversa le hall, tira une chaise et s’installa en face de John Matthew et

Xhex, sur la grande table.

— C’est un poker ? J’en suis.

Il n’y avait que Qhuinn pour être aussi désagréable envers Mary. Blay fut

heureux de voir que la douce femelle ne semblait pas rebutée par le froid accueil

qu’elle avait reçu. En secouant la tête, il la serra dans ses bras.

— Bon anniversaire, Mary. comment pouvons-nous vous aider ?

— Merci, Blay. Rhage a insisté pour faire une petite fête. (Elle gloussa, avec

un sourire heureux et vraiment contagieux.) Il n’y a rien à faire, amusez-vous

seulement. Nous avons prévu des jeux et des sucreries pour tout le monde.

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Blay ramassa une Tootsie pop dans un des bols posés sur la table— sans

doute provenaient-elles de la réserve personnelle de Rhage qui ne pouvait se

passer de ces sucettes rondes. Il ôta l’emballage et se colla le truc dans le bec

avant d’aller s’asseoir à côté de John.

Qui se tourna vers lui, et indiqua par signes :

— Qu’est-ce que vous foutiez ? Pourquoi avez-vous mis si longtemps à

descendre ?

— John, c’est à toi de parler, intervint Qhuinn en prenant un paquet de cartes

sur la table.

Blay leva les yeux, et trouva l’étonnant regard bleu et vert planté dans le sien.

Dur. Figé. Glacial.

— Tu joues aussi, Blay ? Demanda Qhuinn d’une voix un peu rauque.

Tout à coup, Blay ne ressentait plus rien de la sensation de confiance

enivrante qu’il avait éprouvée un peu plus tôt. Parce qu’à nouveau, Qhuinn le

regardait comme il l’avait fait tous ces derniers mois : Avec une sorte de pitié

méprisante et détachée. C’était comme si rien n’avait eu lieu entre eux.

Blay retira la sucette de sa bouche avant de répondre :

— Non merci. Je vous regarde simplement.

Il était quasiment certain que Xhex allait gagner, et piquer aux deux autres

tout leur argent. Blay était peut-être idiot dès qu’il s’agissait de Qhuinn, mais

jamais il ne s’aviserait de jouer au poker avec une sympathe. Dommage qu’il ne

sache pas gérer avec autant de certitude le reste de sa vie.

— Qu’est-ce que tu as à la main ? Demanda Xhex à Qhuinn.

— Rien, répondit Qhuinn d’un ton ferme, sans lever les yeux de ses cartes.

Les yeux bleu foncé de John passaient de Blay à Qhuinn, puis de Qhuinn à

Blay. Au bout d’un moment, le mâle s’adressa à Blay par signes :

— Que se passe-t-il au juste ?

— Rien du tout, coupa Qhuinn. Alors, on joue ou pas ?

— Ça n’est pas à toi que je parle.

— Laisse Blay répondre, aboya Xhex en même temps.

Il n’y avait guère d’affection entre Xhex et Qhuinn. Et c’était logique, pensa

Blay. Aussi brusques et agressifs l’un que l’autre, ils se ressemblaient bien trop

pour pouvoir s’entendre. Blay sentait que la femelle n’allait pas laisser Qhuinn

s’en tirer comme ça.

— Merde, mais c’est quoi ton problème au juste, Qhuinn ? insista Xhex.

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— Mon problème ? Répondit Qhuinn sur le même ton hargneux. Ça fait une

semaine maintenant que je ne quitte pas cette foutue baraque parce que vous ne

faites que roucouler— et ça me rend dingue. Voilà mon problème

D’un geste furieux, il jeta ses cartes sur la table.

— Personne ne t’empêche de sortir, indiqua John.

— Bordel, t’as pas l’air d’avoir bien compris la règle du jeu, John. Alors, tu

pourrais peut-être commencer par la potasser.

Qhuinn repoussa sa chaise, se leva, et s’en alla à grands pas.

— Quel con ! Grommela Xhex entre ses dents.

Blay s’enfonça dans son siège, et croqua sa sucette. En silence. Il n’avait pas

prononcé un seul mot après avoir salué Mary, et sincèrement, il ne savait pas

quoi dire. Une fois de plus, Qhuinn agissait de façon étrange. Et Blay n’y

comprenait plus rien. Il ne voulait pas envisager que l’humeur noire de Qhuinn

était liée à ce qui s’était passé entre eux— et donc que c’était à cause de lui. Et

pourtant, il ne pouvait s’empêcher de le croire.

Blay jeta un regard autour de lui. Mary, Marissa, Wrath, Beth, Doc Jane,

Phury et Cormia jouaient au Monopoly au bout de la table. Zsadist et Rhage

s’amusaient avec Nalla sur le tapis tandis que Bella faisait toujours du pop-corn.

Butch et Vishous étaient à côté, dans la salle de billard— et Qhuinn les avait

apparemment rejoints.

Par la porte entrouverte, Blay regarda son copain rassembler des boules avant

de reculer pour laisser jouer Butch. Comme si le mâle s’était senti observé, il se

retourna, et planta ses yeux dépareillés dans ceux de Blay. Le visage dur resta

figé, n’exprimant rien.

L’excuse de prendre une autre sucette permit à Blay de se lever en détournant

le regard sans affectation. Bon sang, qui diable pouvait savoir ce que Qhuinn

avait encore inventé ? Pas lui en tout cas. Essayer de comprendre son processus

mental ne servirait qu’à lui donner une migraine à crever.

Un coup sur le bras ramena son attention vers John, qui haussait vers lui un

sourcil interrogateur.

— Ça va ?

— La journée a été longue, répondit Blay par signes. J’ai juste sommeil.

Il lui était plus facile de bouger les mains que de faire l’effort de retirer sa

sucette pour parler. Seigneur, c’était vrai que la journée avait été longue. Ça ne

faisait que quelques heures qu’il avait rompu avec Saxton— et ça lui paraissait

une vie entière.

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En y repensant, Sax n’avait pas du tout apprécié que Blay le laisse tomber

ainsi. Mais vraiment, quelle importance ? Pour Blay, Qhuinn était le seul être

qui importait. Ça avait toujours été le cas. Ça serait toujours le cas. Ouais, pour

tout le reste de sa vie, que ça le rende horriblement malheureux ou pas.

— Qu’est-ce qui se passe entre Qhuinn et toi ?

Après avoir regardé John, Blay laissa son regard retourner vers Qhuinn. Le

long corps du mâle était penché en avant sur la table de billard. De là où il était,

Blay voyait le cul ferme, le dos musclé, et les bras tendus pour préparer le

prochain coup. Aussitôt, Blay imagina ce que ce serait de pouvoir s’approcher

son ami dans cette position—

Dès qu’il sentit revenir son excitation, il coupa court à son fantasme avant que

son état ne devienne trop évident. En se retournant, il croisa le regard de John,

attentif et inquiet. D’accord. Qu’est-ce qui se passait entre Qhuinn et lui ? Bonne

question. Il aurait bien aimé en connaître la réponse.

Il haussa les épaules.

— Demande-le-lui.

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Chapitre 9

Quand Qhuinn se retourna, il vit que Blay ouvrait une autre putain de Tootsie

Pop. Bon sang de merde ! S’il devait encore regarder le mec tournicoter sa

langue autour de cette saloperie— ronde et pourpre, bordel ! — avec des joues

creusées sous l’effet de la succion, il allait devoir foncer dans la salle de bain la

plus proche pour un rendez-vous d’urgence avec la Veuve Poignet. Son sexe

était déjà tellement douloureux qu’il craignait de le perdre. C’était la pire torture

qu’on ait inventée dans toute l’histoire du monde.

— Ça fait combien de temps que tu refuses d’admettre la vérité ?

La question de V le prit par surprise. Merde, il n’avait pas vraiment besoin de

ça, pas quand il n’arrivait pas à quitter du regard les lèvres de Blay qui se

refermaient sur la sucette. Il imagina ces mêmes lèvres sur lui— là— à cet

instant précis— alors qu’il en avait tellement besoin. Ouais, un sacré pied en

perspective—

— Je t’ai posé une question, gamin.

Qhuinn se força à tourner la tête pour croiser le feu des yeux de diamant du

Frère. Bordel, mais où était parti Butch ?

— Quoi ?

— Ça fait— combien de temps— que tu refuses— d’admettre— la vérité ?

Et je ne parle pas de ton niveau au billard.

En attendant une réponse, Vishous gara son cul sur le rebord de la table verte,

les yeux fixés sur Qhuinn. Le Frère était manifestement curieux après la petite

scène qu’il avait interrompue un peu plus tôt dans la salle de bain. Mais c’était

exact, il y avait bien longtemps que Qhuinn refuser de regarder la vérité en face.

— Je ne sais pas de quoi tu parles, répondit-il.

— Foutaises, répliqua V en allumant une roulée. Je vois bien la façon dont tu

couves du regard ton sucre d’orge aux cheveux roux. Mec, tu agis comme un

mâle dédié.

Qhuinn ricana.

— C’est peut-être l’impression que ça donne. Mais je ne suis pas dédié, V.

— Hmm. (Vishous se releva et s’approcha de Qhuinn.) Tant mieux, c’est bon

à savoir.

En disant ça, le mâle tourna la tête pour regarder Blay avec attention, avant de

se lécher les lèvres, comme s’il savourait une gourmandise. En voyant son geste,

Qhuinn sentit son estomac se serrer et une jalousie féroce l’envahir. En même

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temps, une rage décapante lui montait aux narines, comme un air brûlant et

empoisonné.

— J’ai toujours eu un faible pour les rouquins, insista V, surtout dans un

aussi chouette emballage. Si tu me dis que le mec est libre, j’irai bien tâter de

son petit cul.

Qhuinn réagit d’instinct, sans pouvoir s’en empêcher. Il leva les mains et

s’agrippa férocement aux avant-bras du Frère, tandis qu’un grognement de fauve

émanait de sa poitrine. Il avait déjà les lèvres relevées et les canines allongées

quand Vishous tourna tranquillement la tête vers lui pour le regarder bien en

face.

— Ouais, c’est bien ce que je pensais, ricana le Frère. Tu es drôlement

chatouilleux, pour un mâle qui affirme ne pas être dédié. Maintenant, lâche-moi,

sombre crétin. Enlève tes putains de mains de mon bras ou je te massacre.

Qhuinn s’empressa d’obéir. Puis il secoua la tête pour reprendre ses esprits.

Bon sang, mais qu’est-ce qui lui avait pris ? Il avait vraiment pété un câble.

Alors qu’il avait cultivé depuis des lustres la maîtrise de soi, il s’était soudain

retrouvé incapable de se contrôler.

— Tu voulais me tuer, pas vrai ? Demanda Vishous avec un grand sourire.

(Qhuinn hocha la tête, la gorge encore trop serrée pour parler.) Mec, c’est

comme ça que réagit un mâle dédié.

Á nouveau, Qhuinn regarda Blay, et imagina quelqu’un posant les mains sur

lui. Oui, la rage revenait. Il déchiquetterait quiconque s’y risquerait.

Il est à moi.

— Crois-moi, gamin, ça ne sert à rien de le nier, dit Vishous en lui envoyant

une grande claque sur l’épaule. Tu ne gagneras pas contre toi-même.

Peu après, Butch revint dans la pièce, au moment où Blay disait « bonne

nuit » à John et Xhex. Qhuinn pensait que son copain allait se tourner vers lui,

mais Blay ne fit pas. Merde. Tout à coup, Qhuinn devina que Blay n’avait pas

compris la raison de sa mauvaise humeur à la table de poker. Le mec devait

s’imaginer que c’était à cause de lui. Mais ce n’était pas le cas. Qhuinn avait

juste besoin de quitter ce putain de manoir.

— Je vous laisse les mecs, dit Qhuinn aux deux autres vampires. À plus tard.

Quand Vishous lui envoya un autre sourire, Qhuinn ne put s’empêcher

d’ajouter :

— Tu es sacrément vicieux, tu sais, V. Tu portes bien ton nom.

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Il s’attendait plus ou moins à ce que le Frère lui renvoie une réplique

assassine— ou même un gnon en pleine poire— mais le mâle se contenta de

rire.

— Tu as de la chance que je t’aie à la bonne.

Avec un gloussement, Qhuinn quitta le billard et traversa le grand hall vers les

escaliers, adressant un vague signe de tête général sans regarder personne.

D’ailleurs, John et Xhex avaient déjà disparu. Zsadist et Bella aussi, sans doute

pour aller coucher leur bébé. Rhage embrassait Mary sous l’escalier, son énorme

corps enveloppant complètement la petite humaine. Quant aux joueurs de

Monopoly, ils s’engueulaient sur une règle quelconque. Qhuinn entendit Wrath

affirmer d’une voix tonnante à Phury être en mesure de payer sa libération avant

le tour suivant.

Quelle libération ? Pensa Qhuinn malgré lui, tout en escaladant les marches

deux par deux. Y avait-il une loi qui empêchait le roi des vampires d’être

« envoyé en prison sans passer par la case départ » ? Après tout, il y avait tant

de règles ici-bas qui variaient selon la position sociale de ceux auxquelles elles

s’appliquaient— ou selon la couleur de leurs yeux. Curieux quand même qu’un

simple détail génétique puisse influencer toute une vie…

Qhuinn prit le couloir aux statues au pas de course, et ne s’arrêta même pas

pour frapper en arrivant devant la chambre de Blay. Il entra directement. La

pièce était déserte, mais il entendit de l’eau couler dans la salle de bain. Aussi il

se jeta sur le lit et attendit. En regardant autour de lui, il remarqua combien la

chambre était en ordre. On aurait cru que les doggens venaient juste d’en sortir

après avoir fait le ménage. Qhuinn ne put s’empêcher de sourire en réalisant que

Blay aurait un choc qu’il ait gardé ses chaussures pour s’étendre sur le lit. Il fit

glisser ses jambes de côté, et d’un coup de pied, laissa tomber ses nouvelles

Adidas sur le plancher.

Un moment après, la porte de la salle de bain s’ouvrit. Qhuinn adressa une

brève prière au ciel pour que Blay n’en émerge pas à poil. Il ne serait pas

responsable de sa réaction si c’était le cas.

Blay se figea net dès qu’il remarqua la présence de Qhuinn sur son lit. Il

portait un boxer. Bon sang, il aurait aussi bien pu être nu, et son corps

magnifique était aussi sculpté qu’une statue.

— Hey, dit Qhuinn d’une voix étranglée.

— Hey, répondit Blay, avant de s’asseoir sur un fauteuil, de l’autre côté de la

chambre.

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Qhuinn dut se mordre l’intérieur de la bouche pour s’empêcher de traverser la

pièce en courant, tomber à genoux devant Blay, et… Non. Il coupa court à son

imagination en remarquant les yeux las de son copain, et les cernes sombre qui

marquaient son visage. Le mâle était manifestement épuisé.

— Je voulais juste que tu saches que ma petite crise tout à l’heure n’avait

rien à voir avec toi, dit-il. Je suis certain que tu le pensais. Et j’en suis désolé.

C’était la vérité. Qhuinn détestait que Blay se sente mal à cause de lui. Il

aurait pu faire n’importe quoi pour réparer le tort qu’il avait causé.

— Alors qu’est-ce que tu avais ? Demanda Blay d’une voix pâteuse.

Qhuinn secoua la tête.

— Parfois, ce boulot me gonfle intensément. Et ça m’énerve que John ne

réalise pas que toute ma vie tourne autour de lui. Je n’ai aucun libre choix. En

temps normal, j’évite d’en parler. Parce que ça ne sert à rien. Mais ça me rend

dingue de rester bloqué dans cette baraque, nuit après nuit.

Les beaux yeux bleus si lumineux de Blay étaient à moitié fermés. On aurait

cru que le mec allait tomber de sommeil d’une minute à l’autre.

— Je suis désolé, marmonna-t-il.

Voir Blay lutter contre la fatigue qui l’écrasait aida Qhuinn à oublier ses

propres ennuis.

— Viens ici, dit-il en tapotant le lit. Tu es HS.

Trop épuisé pour discuter, Blay se releva, traversa la pièce, et se glissa sous

les couvertures, face à Qhuinn. Qui se tourna pour le regarder. Il tendit la main,

et caressa du doigt les cernes noirs sous les yeux de son ami.

— Quand as-tu pris une veine pour la dernière fois ?

— Ça fait un bail.

— C’est ce que je vois. (Qhuinn laissa tomber sa main. Á la façon dont Blay

le regardait, il avait l’impression d’avoir l’âme à nu.) Ça sera toujours comme ça

tu sais. Il faudra toujours que je fasse passer John en premier. Est-ce que tu

comprends ce que ça veut dire ?

Qhuinn aurait tellement voulu pouvoir ne penser qu’à Blay.

Blay hocha la tête, et ferma les yeux. Et Qhuinn se pencha, et l’embrassa

doucement sur les lèvres.

— Dors, murmura-t-il. (Il lui prit la main, éteignit mentalement les lumières

de la pièce. Au moins, en ce moment précis, il ne pensait qu’à Blay. Et c’était

tout ce qui importait.) Bonne nuit.

— Bonne nuit Qhuinn.

Ensemble, main dans la main, ils s’endormirent.

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Chapitre 10

Quand Blay se réveilla, il garda un moment les yeux fermés. Malgré ces

quelques heures de sommeil, il se sentait toujours vaseux, sans force. Ça faisait

bien trop longtemps n’avait pas pris de veine. S’il sortait combattre dans cet état,

il se ferait massacrer. Il était heureux pour lui qu’aucune sortie ne soit

programmée de sitôt. Avec un gémissement, il s’étira longuement dans son lit au

moment même où les volets métalliques qui protégeaient toutes les fenêtres du

manoir s’ouvraient pour la nuit.

Qhuinn… ?

La mémoire lui revint d’un seul coup, inondant son esprit des images de la

veille. Qhuinn s’était endormi avec lui, dans ce lit-même. Avec un sursaut, il

ouvrit les yeux. Et vit qu’il était seul. Pourtant, il trouva un morceau de papier

blanc soigneusement plié sur l’oreiller à côté de lui et sourit en le prenant.

« J’ai attendu. Mais tu pionçais vraiment fort. J’espère que tu seras en forme

au réveil. Q »

Blay regarda un long moment le papier marqué d’une écriture arrogante. Il

était sidéré. Un tel geste ne ressemblait pas du tout à Qhuinn. En même temps, il

craignait que tout ça disparaisse, et qu’il se réveille d’un rêve merveilleux mais

sans consistance.

Il roula sur lui-même, s’assit, posa les pieds par terre, et rangea le billet sur sa

table de nuit. Oh oui… Qhuinn avait réellement été là— à ses côtés— durant la

nuit. Il se demanda combien de temps le mâle avait attendu, en le regardant

dormir… avant de s’en aller.

Il sursauta, arraché à ses pensées, par un coup doucement frappé à la porte.

Peut-être était-ce Qhuinn qui venait vérifier ce qu’il faisait ? Pensa-t-il… mais

en fait, c’était probablement un des doggens qui passait chercher le linge à laver.

Blay se leva, enfila un short de sport qu’il prit dans le tiroir de sa commode, et

alla ouvrir la porte.

Il faillit tomber à la renverse quand une odeur de cannelle et d’épices lui sauta

au visage.

— Layla ? S’exclama-t-il.

— Bonjour messire, répondit-elle d’une voix mélodieuse. J’ai été convoquée

pour vous servir. Vous avez besoin de mon sang. Je vous en prie, acceptez ce

que je suis heureuse de vous offrir.

Le ravissant visage de la femelle émergeait de la collerette de sa longue robe

blanche, tandis qu’elle lui faisait face, attentive et souriante.

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— Je vous remercie d’être venue, Layla, répondit Blay. (Il se frotta les

cheveux, comme pour chercher à s’éclaircir les idées.) En vérité, j’ai bel et bien

besoin de sang mais je ne vous ai pas convoquée. Peut-être s’agit-il de Rhage ou

de Vishous ?

Elle secoua la tête.

— Non messire. C’est Qhuinn qui m’a demandé de venir. Et il m’a prévenue

que ce serait pour vous servir.

À l’idée que Layla avait déjà donné sa veine à Qhuinn, Blay sentit les muscles

de son ventre se contracter. En fait, c’était surtout en imaginant ce qui avait dû

suivre…

Il déglutit péniblement, et jeta un coup d’œil derrière lui, dans sa chambre,

soudain conscient que lui et la femelle étaient toujours plantés dans l’embrasure

de la porte. Il s’inclina en guise de salut tardif, puis s’écarta pour la laisser

entrer.

— Excusez-moi, Layla. Entrez, je vous en prie.

La blonde Élue avança d’une démarche souple et gracieuse, comme si elle

flottait au dessus du sol. Blay retourna vers sa commode d’où il sortit un tee-

shirt. Qu’il passa avant de revenir vers Layla. Il s’assit auprès d’elle sur une

méridienne recouverte de soie et prit sa main fine dans la sienne, tout en

remarquant qu’elle ne portait aucune morsure au poignet.

— Je vous remercie du don que vous me faites, dit-il, les yeux fixés sur la

veine bleue.

Son cœur se mit à tambouriner. Soudain il était pris d’une envie de sang

presque irrépressible.

— Messire ?

Layla avait parlé juste avant qu’il ne la morde. Il s’interrompit avec peine, la

regarda et vit qu’elle avait les yeux pleins de larmes.

— Oui ?

— Voudriez-vous boire à mon cou ?

Tout en parlant, elle ouvrit le haut de sa robe, et en laissa retomber le pan

jusqu’à sa taille, découvrant sa gorge, son épaule, et ses seins. Elle était d’une

beauté stupéfiante.

Devant un tel spectacle, Blay resta sans voix, et il lui fallut un long moment

pour récupérer. Des larmes se mirent à couler sur le visage de Layla.

— Heu... Layla... bafouilla-t-il.

— Je vous en prie messire, murmura-t-elle d’une voix brisée, ne me refusez

pas.

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Blay tendit la main pour refermer la robe de Layla.

— Ce n’est pas mon intention, je vous assure. J’ai besoin de sang. Mais

d’abord, expliquez-moi… Que se passe-t-il ?

Cette simple question suffit à ouvrir les vannes. La femelle s’effondra et

resserra sa robe contre elle en sanglotant bruyamment. Inquiet, Blay la prit dans

ses bras et la tint contre lui.

— Layla, je vous en prie, calmez-vous et dites-moi ce qui se passe.

Blay se souvint soudain de la dernière fois où la femelle avait été aussi

bouleversée— parce qu’elle désirait Qhuinn. Ou du moins parce qu’elle voulait

qu’un mâle la prenne, et lui fasse découvrir le plaisir physique. Et la voilà cette

fois-ci qui se dénudait devant lui. Merde.

Blay n’avait jamais pu admettre la façon dont les Élues se considéraient au

service des guerriers, leurs corps de simples objets que les mâles utilisaient pour

leur besoin ou leur plaisir. Il se redressa, saisit Layla par les épaules et essuya

doucement du pouce les larmes qui coulaient sur les joues lisses.

— Pourquoi pleurez-vous ?

— Messire, je suis vraiment désolée. Prenez ce que vous voulez. Comme

vous le voulez. Et puis, je m’en irai.

Elle leva son poignet. Que Blay regarda à nouveau. Il était manifeste que

Qhuinn avait repoussé la blonde Élue. Voilà sans doute ce qui expliquait son

émotion. Bien entendu, Blay ne pouvait s’empêcher d’en être heureux. Mais en

même temps, il ne voulait pas voir souffrir Layla. Qui avait toujours été aimable

et serviable envers lui.

Blay lâcha les épaules de Layla pour lui prendre les mains, et la tirer sur ses

genoux.

— Écoute, Layla. Je sais ce que tu ressens. Je sais ce qu’on éprouve à désirer

éperdument et en vain que quelqu’un vous désire. Mais sincèrement, je pense

que chacun ici-bas trouve un jour ou l’autre celui qui lui convient vraiment.

D’une manière ou d’une autre, les couples se forment. Parfois, ça prend plus

longtemps que prévu. Parfois, on est presque prêt à perdre espoir. Mais quand

finalement, on trouve le bonheur, on oublie toutes les difficultés de l’attente.

Parce que découvrir enfin le véritable compagnon que la vie a désigné pour vous

vaut tous les sacrifices. Pour passer un seul jour en sa compagnie, on peut

attendre une vie entière sans avoir perdu son temps.

Blay leva la main et la posa sur la poitrine de Layla, au niveau du cœur.

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— Un jour, quelque chose remuera en toi, et tu sauras alors avoir rencontré

celui qui t’est destiné. On ne peut pas forcer sa chance. Mais un jour… elle vous

sourit.

Layla plaça ses mains fines sur celle de Blay qu’elle serra contre son sein.

— Vous en êtes certain ? Vous croyez vraiment avoir trouvé le véritable

compagnon de votre vie ? Demanda-t-elle d’une voix douce.

Blay pensa à Qhuinn. À l’amour infini qu’il éprouvait depuis si longtemps

pour son ami. À la façon dont tout en lui s’animait dès qu’il posait les yeux sur

le mâle. Oui, pour Qhuinn, il était prêt à attendre toute sa vie.

— Oui, absolument, répondit-il.

Layla eut un sourire, que Blay ne put s’empêcher de lui rendre.

— Tu es une femelle merveilleuse, dit-il, et tu offriras un jour à un mâle—

quel qu’il soit— un immense bonheur.

— Je vous remercie, messire.

— Je t’en prie, appelle-moi Blaylock.

— Blaylock, puis-je vous demander une faveur ?

Layla paraissait nerveuse en disant ça, puis elle se tordit les mains. Après ce

qui venait de se passer, Blay s’inquiétait un peu de ce qu’elle avait à lui

demander.

— Bien sûr, répondit-il cependant.

— Aucun mâle n’a jamais bu à mon cou, dit-elle. Si ce que vous m’avez dit

est exact, il est possible que j’attende encore bien longtemps de rencontrer mon

véritable compagnon. Il y a tant de nouvelles sensations que j’aimerais pourtant

découvrir.

Elle n’avait rien demandé, mais Blay comprit qu’elle souhaitait toujours qu’il

prenne la veine de sa gorge. Il n’était pas trop certain d’en avoir envie.

Mais elle laissa tomber ses mains et le regarda bien en face.

— C’est vraiment ce que tu veux ? demanda-t-il pour gagner du temps. Que

je boive à ta gorge ?

Elle hocha la tête.

D’un geste tendre, Blay lui caressa la joue, avant de laisser sa main glisser le

long de son cou jusqu’à son épaule.

— Tu as toujours été très généreuse dans ce que tu nous offrais. Je vais le

faire pour te prouver ma gratitude.

— Merci mess— Merci Blaylock.

Blay l’attira contre lui et posa les lèvres sur sa carotide, sentant

immédiatement sa bouche s’inonder de salive et ses canines s’allonger. Aussi

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délicatement que possible, il perça la peau. Mais ne put retenir un gémissement

d’extase quand le sang chaud et riche jaillit sur sa langue. Jamais plus il ne

prendrait le risque d’attendre aussi longtemps pour assouvir un besoin aussi

essentiel, se jura-t-il. Il serra Layla davantage tout en aspirant avidement son

sang.

Quand il en eut assez, il lécha les entailles pour les cicatriser, et recula pour

regarder la femelle. Qui avait des yeux tout écarquillés et fixés derrière lui.

En même temps, Blay sentit que la pièce était embaumée d’une odeur

d’épices sombres. Il comprit aussitôt que ce n’était pas lui qui émettait une telle

fragrance. Il ferma une seconde les yeux. Quand il les rouvrit, il se retourna pour

regarder celui que dévisageait Layla.

Qhuinn était revenu. Il était appuyé contre le panneau de la porte, les mains

serrées en poings massifs, et ses yeux dépareillés et furieux étaient braqués sur

Layla.

Immédiatement, Blay se tourna vers l’Élue. Qui le regardait maintenant d’un

air interrogateur.

— Est-ce donc lui—

Sans lui laisser le temps de terminer sa question, Blay hocha la tête. Oui,

Qhuinn était bien le compagnon de sa vie.

— Vous êtes un mâle de valeur, dit Layla d’une voix calme. Je vous

remercie, Blaylock. Je vais m’en retourner à présent.

— Oui, répondit Blaylock en hochant la tête, c’est une bonne idée.

Il se leva et raccompagna Layla jusqu’à la porte. Pour rien au monde, il ne

souhaitait que Qhuinn se montre désagréable ou brutal envers elle. En les voyant

approcher, Qhuinn s’écarta lentement, les lèvres serrées, comme s’il se forçait à

ne pas montrer les dents. Layla s’enfuit dès que la porte s’ouvrit, et Blay referma

doucement le panneau derrière elle, inspirant un grand coup avant de faire face à

Qhuinn et à sa rage.

Le mâle était juste derrière lui quand il se retourna, ses deux énormes mains

posées sur les hanches. À sa vue, Blay sentit son cœur rater un battement.

Qhuinn portait un jean noir, un tee-shirt serré noir, et des baskets Adidas noires.

Il avait le visage fraîchement rasé, et les cheveux encore humides de sa douche,

tout hérissés de pointes noires. Le regard bleu et vert était intense.

Qhuinn rompit enfin le silence pesant :

— Bordel, mais à quoi tu joues ?

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Chapitre 11

Qhuinn n’arrivait pas à admettre la scène qu’il venait d’interrompre. C’était

vraiment la dernière chose à laquelle il se serait attendu. Surtout venant de Blay.

Dès qu’il avait ouvert la porte, son corps était passé en pilotage automatique.

C’était un vrai miracle qu’il n’ait pas agrippé Layla par la gorge pour la mettre

en pièces. Ouais, en tout petits morceaux. Il avait fallu à Qhuinn toute la force

mentale qu’il possédait pour s’en empêcher. Maintenant que la femelle avait

disparu, il commençait à se détendre. D’ailleurs, il avait les yeux plongés dans

ceux de Blay. Contre qui jamais Qhuinn ne pourrait jamais rester en colère. Au

contraire, il réalisait soudain ce que son ami avait enduré toutes les fois où il

avait dû assister à une séance de baise entre Qhuinn et une pute quelconque—

dans l’arrière salle d’un bar ou autre. En y repensant, son attitude passée le

dégoutait.

— Je ne t’ai pas entendu rentrer, dit Blay calmement.

— Ça ne change rien à ce qui s’est passé, grommela Qhuinn.

— Elle était bouleversée. J’ai fait ce qu’elle m’a demandé. C’était sans

importance.

— Mon cul ! s’exclama violemment Qhuinn à nouveau furieux. Elle m’a

demandé aussi de la baiser. Ce n’est pas pour ça que je l’ai fait.

Dès que les mots s’échappèrent de sa bouche, Qhuinn vit la surprise

apparaître sur le visage de Blay. Ah. Bien sûr, Blay avait cru qu’il couchait avec

Layla. Et c’était sans doute pour ça qu’il avait agi ainsi.

— Tu croyais que je l’avais fait, pas vrai ? Insista Qhuinn. Et c’est pour ça

que tu t’es épanché sur son cou ? Pour me renvoyer l’ascenseur ?

Blay éclata de rire. Un élan bruyant, naturel et joyeux. Bon sang, qu’il était

beau ! Qhuinn le regardait, tout en crevant d’envie de le serrer dans ses bras.

— Ne me dis pas que tu es jaloux de Layla ? Demanda Blay qui riait

toujours.

— Je suis ravi que tu trouves ça drôle, dit Qhuinn, le visage figé.

— Qhuinn, protesta Blay, c’est une femelle.

Ce n’était pas du tout le problème qui emmerdait Qhuinn. Il savait

parfaitement que Blay ne désirait pas la blonde Élue. Mais le voir ainsi à son

cou, avec une telle expression de plaisir béat sur le visage— il en avait encore

l’estomac tordu de jalousie.

— Tu n’as jamais pris ma veine, grogna-t-il d’un ton pincé.

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Voilà qui coupa court à l’amusement de Blay.

— Je ne me souviens pas en avoir eu l’occasion, dit-il en levant très haut les

sourcils.

Qhuinn baissa la tête, et ferma les yeux. Il ne tenait pas à ce que Blay se sente

coupable. Vraiment pas. Mais il voulait aussi être honnête sur ce qu’il ressentait.

Avec Blay, il ne voulait pas porter de masque ou cacher ses sentiments. Et

merde. Cette saloperie d’instinct de mâle dédié l’emporta.

— Je sais, avoua-t-il, misérable, mais quand même... je ne supporte pas de te

voir avec cette Élue.

Blay s’avança et prit Qhuinn dans ses bras, forçant le front buté à s’appuyer

contre son épaule.

— Je suis désolé de t’avoir forcé à assister à mes conneries, chuchota

Qhuinn. J’imagine ce que tu as dû ressentir. C’était nul de ma part. (À nouveau,

Blay eut un rire bref.) Ouais, d’accord, mais vraiment, je m’excuse. Et puis, je

ne sais pas au juste comment gérer ce truc entre nous. C’est tellement nouveau

pour moi.

Cette fois, Blay relâcha son emprise sur Qhuinn, et leurs yeux se

rencontrèrent. L’instant était important. Ils n’avaient pas encore pris la peine de

discuter de la nouvelle relation qui semblait naître entre eux.

— Je n’ai pas eu le temps d’y penser non plus, admit Blay.

— Alors ça ne te choque pas que j’aie envie d’assassiner tous ceux qui

posent les mains sur toi ?

— Non, je sais que tu es cinglé. (Quand il rit encore, Qhuinn étouffa son

sourire. Blay le remarqua et dit :) Tu peux sourire, tu sais. En fait, je te trouve

très chouette quand tu souris.

Qhuinn secoua la tête, et laissa les coins de sa bouche remonter légèrement.

Aussitôt, les mains de Blay se posèrent de chaque côté de son cou.

— Non, non, non, pas question, dit Qhuinn. Je n’ai pas l’intention de

t’embrasser, Blay. Tu n’aurais plus le même goût à présent. Je trouve déjà

affreux que tu sentes si fort le beignet à la cannelle.

Cette fois, Blay rit tellement qu’il se plia en deux. Et c’était si communicatif

que Qhuinn ne put s’empêcher de le suivre. Il éclata d’un rire sonore. Ça faisait

un bail qu’il n’avait pas vu Blay rire aussi fort. Putain, c’était vraiment

fantastique d’entendre ça, même si c’était à ses dépens et que son copain se

foutait de sa gueule. Il n’en avait rien à branler.

Au bout d’un moment, Blay le repoussa, et recula jusqu’au lit où il se laissa

tomber de tout son long, les mains derrière la tête. Peu à peu, son rire se calma.

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— Je suis toujours aussi fatigué, dit-il en bâillant. C’est quand même dingue.

Qhuinn avança jusqu’au lit. Chère Vierge Scribe, Blay avait le corps le plus

incroyable qu’il soit. Il caressa des yeux les muscles souples des cuisses qui

émergeaient du short de sport.

— C’est pas logique, admit-il. Tu viens juste de prendre une veine. Au fait,

c’est quoi cette connerie qu’elle t’appelle Blaylock ? Comment es-tu devenu si

intime avec cette chère Élue ?

Blay eut un sourire qui le rendit incroyablement attirant. Il ne répondit pas

mais s’étira sur son lit comme s’il attendait que Qhuinn lui saute dessus. Comme

s’il l’espérait aussi.

Bordel de merde, pensa Qhuinn qui en crevait d’envie. Mais il ne le pouvait

pas. Ça faisait des semaines qu’il n’avait rien à foutre. Et ce soir justement—

bien sa chance— John l’attendait au centre d’entraînement. Il n’avait pas le

temps de s’attarder. Pourtant, il avança jusqu’au rebord du lit, tout près des pieds

de Blay.

— Alors ? Demanda Blay. Tu veux toujours me parler ?

— Peut-être pas, répliqua Qhuinn en plissant les yeux, d’un air calculateur et

entendu.

Quand Blay se remit à rire, Qhuinn se pencha en avant, un genou posé sur le

lit, et une main de chaque côté des jambes de Blay. Lentement, très lentement, il

grimpa le long du corps de son ami, tout en le regardant dans les yeux, noyé

dans le feu des prunelles bleu pâle. Dès que son visage fut au-dessus de celui de

Blay, il laissa retomber son corps de tout son poids, sachant que l’autre mâle

sentirait la bosse rigide que formait son sexe raidi de désir. Du bout du nez, il

caressa la mâchoire de Blay— puis son oreille— puis la veine qui courait le long

de son cou— avant de remonter en suivant le même chemin, traçant de la langue

un sillon brûlant sur la peau douce. Arrivé au menton, il s’écarta, et fixa à

nouveau les yeux de Blay.

— Je n’ai pas changé d’avis. Je ne compte pas t’embrasser. En fait… j’aurais

vraiment voulu le faire, mais à cause de toi, c’est foutu. J’espère que tu ne

commettras plus une telle erreur, termina-t-il d’une voix moqueuse.

— Jamais plus, affirma Blay avec un sourire.

— Parfait.

Le téléphone de Qhuinn se mit à vibrer dans sa poche. Il roula de côté et se

rassit avant de répondre.

— C’est un texto de John, dit-il. Il est déjà au centre d’entraînement. Viens

nous y rejoindre si tu as le courage de sortir ton cul paresseux de ce lit.

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— Où est Xhex ?

— Elle est sortie travailler chez Trez et iAm. Tu n’as pas pris la peine de

vérifier tes messages, sinon tu le saurais.

Qhuinn récupéra le téléphone portable de Blay sur la table de nuit. Il ouvrit

l’appareil. Et vit que le premier message provenait de ce petit fumier de Saxton.

« Blaylock, appelle-moi. » lut-il à voix haute. Il tendit l’écran devant le visage

de Blay avant de refermer rageusement le portable qu’il lui jeta sur l’estomac.

— Je n’ai pas l’intention de le rappeler, dit Blay qui resta couché, les mains

toujours derrière la tête, dans une posture parfaitement détendue.

Qhuinn s’appuya contre la tête-de-lit. Il tendit la main, agrippa la tête de Blay,

et en détacha les doigts de son copain. Puis il passa ses propres mains à travers

les mèches rousses et si douces. Il resta dans la même position, en silence,

durant plusieurs minutes.

Qhuinn réfléchissait. Il avait la nette sensation qu’il devait agir en ce qui

concernait son cousin. Mais il ne voulait pas troubler Blay en évoquant tout de

suite le problème. Il valait bien mieux qu’il aille exprimer sa frustration sur un

punching-ball.

— John va m’attendre, dit-il seulement. Tu penses venir aussi ?

— Je suis surpris que tu ne sortes pas ce soir.

— Ça fait des semaines qu’on n’est pas sorti combattre. Je ne veux courir

aucun risque. Nous avons tous besoin de reprendre l’entraînement. Toi en plus,

tu avais besoin de sang. Tu étais devenu bien trop faible.

En réalité, c’est surtout pour Blay que Qhuinn ne voulait courir aucun risque.

Jamais. Pas question que son copain puisse être blessé. Actuellement, il pouvait

à peine supporter l’idée que Blay sorte combattre. Surtout dans son état de

faiblesse actuelle. Mais Qhuinn ne pouvait pas laisser Blay deviner sa position.

Le mâle se sentirait immédiatement humilié et s’imaginerait considéré comme

une lavette ou une autre connerie du genre. Ce n’était pas vrai, loin de là. Mais

si quelque chose arrivait à Blay, Qhuinn en mourrait.

— C’est sympa de penser à moi, dit Blay, interrompant ses pensées.

Qhuinn se pencha et posa les lèvres sur les cheveux roux.

— Je pense toujours à toi, dit-il doucement.

Il se redressa et quitta le lit, très détendu. Manifestement, Blay n’était pas près

d’en bouger.

— Je vous rejoindrai peut-être tout à l’heure, dit Blay, en se frottant le

visage.

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— Ne le fais que si tout va bien. Si tu n’es pas bien réveillé, tu vas juste

prendre un poing dans la tronche.

Avec un grognement outré, Blay roula sur lui-même et s’assit de l’autre côté

du lit.

— Même à moitié endormi, je peux encore te botter le cul, protesta-t-il.

Blay était effectivement le plus grand des deux. Mais Qhuinn le compensait

par sa vitesse. Grâce à ça, il réussissait en général à éviter de prendre des coups

dans un corps-à-corps.

— D’accord, disons alors qu’on a rendez-vous.

Avec Blay, il avait en tête un autre genre de rendez-vous. Mais ce serait pour

plus tard. Levant les yeux au ciel, Blay avança jusqu’à sa penderie. Quand le

mâle passa devant lui dans son boxer serré, Qhuinn envoya une claque

retentissante sur les fesses fermes.

— À tout à l’heure.

— D’accord, marmonna Blay, qui se mit à fourrager parmi ses habits.

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Chapitre 12

Blay admirait un superbe exemple de planche anatomique. Voilà les muscles

qu’un mâle se devait de posséder, pensa-t-il. Frappant à coups de poings dans un

énorme punching-ball qui dansait devant lui, Qhuinn ne portait qu’un pantalon

bas sur les hanches. Trèèès bas même. En fait, le vêtement défiait carrément les

lois de la gravité. Blay n’arrivait pas à comprendre comment ce truc tenait en

place. Peut-être était-ce dû à la fermeté rebondie de ce cul parfait. Côté face, le

ventre était bardé de muscles aux stries nettement dessinées. Même les flancs du

mâle étaient sculptés. Et le pelvis dessinait un V qui indiquait une direction

intéressante. Avec un frémissement, Blay se lécha les lèvres.

Mais il n’était pas le seul spectateur du show.

— Comment va, mec ? Demanda-t-il à John en guise de salut. (Son copain

regardait aussi Qhuinn s’entraîner, assis sur un matelas, les jambes étendues

devant lui.) Ne me dis pas que tu as déjà fini ?

— Non, je me suis juste posé un moment. Et toi ? Tu te sens prêt à échanger

quelques coups ? Demanda John par signes.

— Bien sûr, répondit Blay avec un sourire.

— Alors allons-y.

Quand John se releva, Blay le suivit jusqu’à l’endroit où les accessoires de

boxe étaient rangés.

Tout en enfilant ses gants, Blay laissa son regard retourner vers son sujet de

prédilection. Qhuinn continuait à matraquer le sac sans marquer la moindre

pause. Le mâle tourbillonnait, esquivait, plongeait, reculait. Avec un

remarquable travail de jambes. La voix d’Axl Rose (NdT : William Bruce Rose,

né en 1962, musicien américain, chanteur et compositeur du groupe de hard

rock Guns N’ Roses,) hurlait dans les haut-parleurs de la stéréo. Welcome to the

Jungle avait toujours été la chanson préférée de Qhuinn.

Au moment où Blay s’apprêtait à affronter John, Qhuinn agrippa le punching-

ball pour le stabiliser et éviter de le prendre en pleine figure. Il vit Blay en se

retournant.

— Hey, dit-il avec un clin d’œil. Tu as réussi à bouger.

Blay sentit son souffle se coincer dans sa gorge dès que le mâle s’avança vers

lui, balançant ses gants de boxe au rythme de ses pas, le corps trempé de sueur.

Il savait bien que c’était un effet de son imagination, et pourtant… il eut

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vraiment la sensation que Qhuinn marchait au ralenti, comme au cinéma. Sainte

mère de Dieu, jamais il n’avait rien vu d’aussi intensément sexuel.

Qhuinn posa un gant sur l’épaule de Blay.

— Je vais te laisser t’échauffer avec John, ensuite tu tenteras ta chance avec

moi. (Avec un sourire carnassier, il remua les sourcils plusieurs fois, en

exagérant le mouvement.) Qu’est-ce que tu en dis ?

Merde, pensa Blay éperdu, pourquoi le mec le regardait-t-il comme ça ? Blay

avait déjà du mal à respirer. Il n’avait pas vraiment besoin que l’autre en rajoute.

D’ailleurs, il avait une bien meilleure idée en tête : Pourquoi lui Qhuinn ne

sucreraient-il par l’entraînement pour foncer directement sous la douche ?

Ensemble.

— Génial, dit Blay en envoyant un coup de gant dans l’estomac de Qhuinn.

Mais je ne suis pas certain que tu sois à mon niveau. Tu penses tenir le coup ?

Il était bien conscient que la conversation ne portait plus sur la boxe. Il avança

vers John, mais ne put s’empêcher de jeter un coup d’œil par-dessus son épaule,

pour vérifier ce que faisait Qhuinn…

Il se marrait. Les deux poings posés sur les hanches, ses gants encadrant son

ventre dur aux muscles si tentants.

— Oh ouais, je suis sûr de tenir le coup. Quoi que tu tentes, mon pote. Quoi

que tu fasses. La voix rauque et sensuelle contenait une promesse immanquable.

— Très bien, dit Blay. On verra ça.

— C’est une promesse ? insista Qhuinn, les sourcils relevés.

— Si tu veux, répondit Blay.

Il n’était pas certain de supporter plus longtemps la tentation qui le rongeait.

Si ça continuait, il allait se ruer sur Qhuinn et le coller contre le mur. Il avait

autant besoin du mâle que de sang pour survivre. Blay leva les bras et, avec

difficulté à cause des gants qu’il avait déjà mis, il ôta son tee-shirt qu’il jeta sur

un matelas. Puis il commença à sautiller sur place pour s’échauffer, remuant les

bras, dénouant ses épaules.

Les yeux de Qhuinn suivaient le moindre de ses mouvements.

— Bien sûr que je veux. (Le mâle ne souriait plus.) Tu n’as pas idée à quel

point.

Ils se regardèrent un moment, sans parler.

— Alors John, tu es prêt ? Demanda Blay d’un seul coup.

Assis sur un banc, John avait l’air aussi sidéré que s’il avait vu débarquer des

Martiens. Ses yeux bleus en étaient tout écarquillés.

— C’est quoi ce bordel ? Mima-t-il.

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Dans le feu de l’échange plutôt brûlant qu’il avait eu avec Qhuinn, Blay avait

complètement oublié que John aussi était dans la pièce.

Devant l’expression de son ami, il eut un rire gêné et avança vers lui, levant

ses gants de boxe. Derrière eux, Qhuinn alla jusqu’à la stéréo et commença à

tripoter les boutons de l’iPod qui était branché dessus. Il finit par se décider pour

Back in Black, de AC/DC. (NdT : Groupe de rock australo-britannique formé à

Sydney en 1973 par les frères Young.) Pendant ce temps, Blay et John

échangèrent quelques coups d’esquives avant de se mettre sérieusement au

boulot. Blay fut le premier à envoyer un coup au but— un crochet qui tomba

tout droit sur les côtes de John. « Enfoiré ! » Mima John avant de répliquer par

un direct à la mâchoire.

Une heure après, leurs coups étaient nettement moins brillants. Les deux

mâles étaient à moitié morts de fatigue, les bras lourds, la mâchoire douloureuse.

Puis John se laissa tomber assis, et s’étala de tout son long sur le matelas. Il

arracha ses gants un par un, et les jeta à travers la pièce avant de lever les deux

mains pour indiquer par signes :

— Pouce. Je me rends.

Blay se mit à rire et s’assit à côté de lui. Il n’était pas en état de faire un

nouveau round avec Qhuinn. D’ailleurs, le mâle n’était plus dans la pièce. Lassé

de n’être qu’un spectateur, il avait sans doute été s’entraîner dans la salle de

poids.

John se releva et regarda autour de lui, cherchant probablement Qhuinn lui

aussi. Il ramena son regard vers Blay.

— Que se passe-t-il entre toi et Qhuinn ? Et ne me réponds pas encore une

fois d’aller le lui demander.

Blay regarda son ami, et inspira un grand coup. Que se passait-il entre lui et

Qhuinn ? Merde, il n’en avait aucune idée. Alors que répondre à ça ?

— Nous n’avons encore rien décidé.

— Il est évident qu’il se passe quelque chose.

— Oui, marmonna Blay, en laissant tomber sa tête sur ses genoux.

Quand John claqua dans ses mains pour attirer son attention, Blay releva la

tête.

— J’espère que ça marchera entre vous.

— Merci mec.

Peu après, John se releva, et regarda Blay avec un rictus fatigué.

— Je vais faire trempette dans ma baignoire. Je me sens aussi tonique

qu’une nouille trop cuite.

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Il tendit la main à Blay pour l’aider à se relever. Puis les deux mâles

s’étreignirent en s’envoyant des claques sur l’épaule.

Une fois John reparti vers le manoir, Blay traversa le gymnase en direction de

la salle des poids. Qu’il trouva déserte. Avant de chercher plus loin, il alla se

laver les mains dans la salle de bain. Penché en avant sous le jet, il se passa de

l’eau sur le visage et dans les cheveux avant d’attraper une serviette dans la pile.

Il se retourna, et s’appuya au lavabo tout en serrant le linge contre son visage

meurtri. Bon sang, John n’avait pas ménagé ses coups.

— C’est pas trop tôt.

En entendant la voix de Qhuinn, Blay lâcha sa serviette et releva les yeux.

Planté devant les casiers, le mâle émergeait manifestement de la douche. Il ne

portait qu’une serviette attachée autour des reins. Si Blay avait trouvé un peu

plus tôt que Qhuinn était incroyablement sexuel, c’était encore pire à présent.

Waouh. Blay s’encouragea fermement à demeurer calme et à respirer posément

pour éviter une hyperventilation.

— Tu as eu la trouille et tu t’es planqué ?

Devant cette provocation, Qhuinn ouvrit son casier en ricanant. Sur une

impulsion, Blay se dématérialisa et reprit forme juste derrière son ami, refermant

la porte du casier sans lui laisser le temps de répondre. Étonné, Qhuinn se

retourna lentement.

— Agressif comme tu l’es, dit-il, que je sois prudent ne devrait pas t’étonner.

Blay avança et coinça Qhuinn contre la porte métallique. Il sentait la lourde

fragrance épicée qui émanait de sa peau, et l’odeur l’enivrait. Il se pencha et

embrassa fiévreusement le mâle. Puis il lui prit les mains et les posa sur sa

propre tête. Ils poussèrent ensemble un gémissement rauque tandis que leurs

langues se nouaient.

Soudain, Blay arrêta tout et s’assit sur le banc, devant Qhuinn. Qui laissa

retomber ses bras tandis que Blay examinait son corps à moitié nu d’un œil

avide. Vu d’aussi près, pensa Blay, ce torse lisse est encore plus magnifique. Il

aurait voulu prendre le mâle— ici— tout de suite— maintenant… Mais il avait

vraiment besoin d’une douche.

— Blay ? Chuchota Qhuinn.

Sans répondre, Blay leva la main et, d’un doigt léger, souligna le ventre de

Qhuinn sur toute sa longueur, marquant les monts et les vallées. Quand il

descendit, il s’agrippa aux hanches dures et attira le corps plus près de lui.

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Utilisant cette fois ses deux mains, il passa le bout de ses doigts le long des

muscles durs du bas-ventre, au creux de ce pelvis en V qui le rendait fou. Sous

son toucher, il sentait Qhuinn frémir, et sa respiration devenir saccadée.

— Tu as les abdominaux les plus parfaits que j’aie jamais vus… dit Blay

d’une voix cassée. Regarde-moi ça… C’est dément. J’ai toujours eu envie de

toucher. (Il releva les yeux et croisa l’intense regard vairon braqué sur lui.) Je

peux ? Ça ne te gêne pas ?

Incapable de parler, la respiration sifflante, Qhuinn secoua la tête.

Presque en transe, Blay se pencha en avant et posa la bouche sur la peau si

douce. Des lèvres, il suivit le chemin qu’avaient pris ses doigts, dessinant les

faisceaux de muscles, descendant, encore et encore… jusqu’à ce qu’il atteigne la

pointe dessinée par le V, au ras de la serviette. Sans hésiter, il arracha cet

obstacle qui tomba en travers de ses cuisses.

Un sexe fier et engorgé lui faisait face. Il sentait le sien vibrer de passion dans

son pantalon souple. Bon sang. Il avait toujours voulu faire ça. Pas question

d’hésiter maintenant que son rêve le plus cher se réalisait enfin. Saisissant à à

deux mains l’objet de son désir, il plongea dessus, la bouche en avant. Tout en

relevant les yeux vers le visage de Qhuinn.

— Oh bordel, gémit Qhuinn qui crispa les deux mains dans les cheveux roux

pour se retenir.

Blay le caressa sur toute la longueur, enroulant sa langue sur le gland sensible

avant de recommencer son mouvement de haut en bas. Le souffle rauque et les

gémissements de Qhuinn résonnaient dans la pièce, comme un chant glorieux

qui encourageait Blay à aller de plus en plus vite, de plus en plus profond. De

l’autre main, il caressait le mâle par en-dessous, exacerbant ainsi les sensations

qu’il lui procurait avec sa bouche. Qhuinn avait lâché ses cheveux et serrait

maintenant à deux mains les épaules de Blay tout en exprimant son plaisir sans

contrainte. Avec un dernier cri rauque, il s’écarta soudain de Blay et récupéra la

serviette qu’il serra contre lui avant d’exploser dans ses plis. Les yeux clos, le

visage crispé, il retomba en arrière contre la porte métallique de son casier, et

essaya de récupérer son souffle.

Toujours assis, Blay le regardait, plutôt content de lui. Il venait de procurer à

Qhuinn un sacré orgasme— comme il avait toujours rêvé de le faire.

Il se redressa lentement, ce qui força Qhuinn à ouvrir les yeux.

Blay prit à deux mains à la tête du mâle et l’embrassa à pleine bouche.

— Peut-être auras-tu moins peur la prochaine fois.

Il le lâcha et se détourna vers la porte.

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— Blay ? (La voix de Qhuinn était encore haletante. Blay se retourna vers lui

et vit le sourire en coin que son ami ne retenait pas) Tu es sacrément doué, mec.

Avec un gloussement, Blay sortit de la pièce. Il avait besoin d’une douche. Et

tout de suite.

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Chapitre 13

En revenant au manoir par le couloir souterrain, Qhuinn avait toujours la tête

dans les nuages. Tout en marchant vers sa chambre d’un pas mécanique, il ne

pouvait pas— ne voulait pas— oublier l’image de Blay s’activant sur lui. Il ne

s’agissait pas vraiment de la pipe. Non, le plus important était ce qu’il ressentait.

De sa sensation d’être différent. Il revoyait les yeux bleus qui s’étaient levés

vers lui, brûlants de passion. Ce regard lui était tombé dessus comme un putain

de mur de briques. Un impact qui avait écrasé l’être qu’il avait été durant vingt-

cinq ans. Le laissant transformé à jamais.

Qhuinn inspira profondément, et secoua la tête en montant l’escalier qui

menait à l’étage. Il prit le couloir vers sa chambre. Quand il y entra, il trouva

Fritz devant sa penderie, occupé à y suspendre les vêtements propres qui

venaient d’être repassés. Le doggen se retourna en entendant la porte claquer.

— Bonsoir messire. Comment vous portez-vous en cette belle soirée ?

Demanda le vieillard avec un gentil sourire.

— Ça va, ça va, répondit Qhuinn. Et vous ?

— Parfaitement bien, je vous remercie, messire. (Le doggen s’inclina). Je

suis désolé de vous déranger. Auriez-vous besoin d’autre chose avant que je ne

redescende.

Qhuinn s’assit sur le bord de son lit.

— Vous ne me dérangez pas. (Il réfléchit un moment, les yeux fixés sur le

vieux mâle.) Fritz, je suis vraiment désolé pour le miroir que j’ai cassé. J’aurais

dû m’occuper moi-même de nettoyer les morceaux.

Le majordome tourna la tête vers le mur en question. Lorsque Qhuinn était

revenu dans sa chambre, peu après l’incident, il n’avait plus trouvé aucun éclat

de verre éparpillé. Et les taches de sang avaient été nettoyées. De plus, un

nouveau miroir avait été accroché au même endroit que l’ancien.

— En vérité, messire, c’était mon rôle de le faire. Bien entendu, si je puis me

permettre, je préférerais que vous évitiez à l’avenir de détruire le mobilier. Tout

est ancien, vous savez.

— Aucun problème, dit Qhuinn, amusé par le ton compassé du doggen. Vous

êtes vraiment fâché, Fritz ? Allez, ne me dites pas que je vais m’en tirer aussi

facilement.

— Auriez-vous besoin d’autre chose pendant que je suis là ? Fut la seule

réponse qu’il obtint.

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Qhuinn secoua la tête, en réprimant son grognement déçu. Une fois— une

seule fois, bordel— il aurait aimé voir Fritz se mettre en colère contre

quelqu’un. Et piquer une vraie crise. Là au contraire, le vieux mâle restait

respectueusement attentif, raidi dans son uniforme noir et solennel, comme un

soldat dans une putain d’armée— ou autre connerie du même genre.

— En fait, dit Qhuinn, j’aurais effectivement besoin d’un truc. Puis-je vous

poser une question ?

— Bien entendu, messire.

Merde, pensa Qhuinn, il détestait vraiment cette formule chez ce majordome.

— Je voudrais vous parler franchement— euh, hors contexte. Est-il possible

que vous quittiez un moment votre rôle officiel ? (Qhuinn fit un geste de la main

pour indiquer le fauteuil près du lit.) Installez-vous.

Fritz hésita un moment avant d’avancer pour se percher au bord du fauteuil.

Où il attendit que Qhuinn reprenne la parole.

Qhuinn se secoua la tête, comme pour s’éclaircir les idées et trouver les mots

adéquats. Il ne savait pas trop comment aborder le sujet. Mais il savait vouloir le

faire. Devoir le faire. Il avait besoin d’un avis et n’avait dans sa vie aucune

image paternelle. Le vieux doggen lui paraissait aussi apte qu’un autre à en

remplir le rôle. Pourquoi pas ? Après tout, Qhuinn le connaissait assez pour être

au moins certain que le mec n’irait pas inconsidérément bavarder à son sujet.

— Avez-vous déjà eu une compagne ? Demanda Qhuinn, les yeux rivés sur

Fritz.

— Oui, il y a bien des années. Mais ma shellane n’est plus parmi nous.

— Avez-vous fait pour elle quelque chose de gentil… comme… Ah. Je ne

sais pas...

Qhuinn s’interrompit. Il avait l’air d’un parfait crétin à bredouiller comme ça.

Merde. Mais que lui arrivait-il au juste ?

— Me demanderiez-vous, messire, comment impressionner une dame ?

En fait, non— pas vraiment. Blay n’avait rien d’une dame. C’était un mâle

pur sang. Et pas non plus quelqu’un que Qhuinn avait besoin d’impressionner.

Pour une raison étrange— et à dire vrai bouleversante— Blay appréciait Qhuinn

tel qu’il était, et pour ce qu’il était.

Malgré ça, Qhuinn souhaitait réellement faire quelque chose de gentil pour

son pote— quelque chose qui prouverait la force des sentiments qu’il éprouvait.

Ne sachant pas comment les exprimer en paroles, il aurait voulu qu’une action

les matérialise clairement.

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— Pas vraiment l’impressionner, dit-il enfin, c’est plutôt… Et bien… Oh

Seigneur. Je n’en sais rien. Je ne connais rien à ce genre de conneries.

Énervé, Qhuinn se releva et se mit à arpenter la pièce, agitant nerveusement

les mains— les croisant dans son dos, se frottant le cou, ou tirant sur ses mèches

raides de gel.

— Peut-être pourrais-je vous donner un avis plus circonstancié si je

possédais davantage d’informations, dit Fritz posément.

Qhuinn prit une profonde inspiration, et vint s’asseoir sur un fauteuil, en face

de Fritz. Il se pencha en avant, posa ses coudes sur ses genoux, et réfléchit un

moment, les yeux au sol.

— Je voudrais faire quelque chose de spécial pour Blay, dit-il à voix basse,

se sentant soudain terriblement vulnérable.

— Pour messire Blaylock ? Demanda Fritz gentiment. (Quand Qhuinn hocha

la tête en le regardant, le vieux doggen continua :) Aimeriez-vous lui offrir un

cadeau ou plutôt passer une soirée spéciale en sa compagnie ?

Qhuinn préférait incontestablement l’idée de la soirée avec Blay. Ce n’était

pas quelque chose qui pourrait attendre plus longtemps. La passion brûlait trop

fort entre eux. Il leur fallait l’exprimer. Ouais, il voulait Blay…

— Les deux peut-être, dit-il.

— Très bien. Je vous suggérerais alors de réfléchir à quelque chose que vous

aimeriez faire ensemble. Il serait plus facile ensuite d’organiser votre soirée.

En entendant parler le doggen, Qhuinn n’eut qu’un seul mot en tête : Sexe. La

nuit ne finirait pas sans une autre rencontre… explosive, passionnée,

dévastatrice. Il en était certain. Tu parles, il ferait tout pour ça. Ouais, voilà qui

serait parfaitement spécial. D’ailleurs, avec Blay, tout était spécial.

— Quant au cadeau, continua Fritz, heureusement inconscient du fantasme

où délirait Qhuinn, je conseillerais quelque chose de simple venant du cœur.

Qhuinn hocha la tête, pensant toujours au sexe. En fait, cette tension

permanente qu’il provenait certainement de la chasteté à la con qu’il s’était

imposée ces derniers temps. C’était bien normal qu’une couillonnade pareille

commence à lui courir sur le système et à le rendre dingue. En ce moment

précis, il avait le sang en ébullition. Alors qu’il venait d’avoir le plus sublime

orgasme de sa vie. Un truc aussi intense aurait dû régler son problème…. mais

pas du tout. C’était encore pire qu’avant. Bordel, bien sa chance.

— Merci, Fritz. C’est très gentil à vous. J’apprécie aussi votre largeur

d’esprit.

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Tout à coup, Qhuinn ne souhaitait plus que se retrouver seul. Il avait vraiment

besoin de prendre les choses en mains. Au sens littéral.

Fritz se releva immédiatement.

— C’était un plaisir, messire. Je suis honoré que vous ayez sollicité mon

avis.

À peine une seconde après que Fritz ait refermé la porte sur lui, Qhuinn

plongea la main dans son pantalon et serra le poing sur son sexe. Il ferma les

yeux et laissa les récentes images de Blay lui envahir le cerveau— Son corps

retrouva les sensations délirantes… la brûlure des yeux du mâle sur lui—

l’humidité de la bouche du mâle sur lui— la pression des mains du mâle sur

lui… Aahhh.

Il ne lui fallut que quelques minutes pour exploser dans un orgasme

quasiment sismique. Pour étouffer ses cris, il se mordit si fort la lèvre inférieure

qu’il la fit saigner.

Il rouvrit ensuite des yeux vitreux. Comment diable allait-il supporter

d’attendre plus longtemps ? Bien sûr, il pourrait essayer de se faire porter pâle la

nuit suivante… Non, jamais John n’avalerait un truc pareil. Bordel, parfois, il

avait vraiment envie de massacrer son copain— juste pour se défouler.

Se concentrer. Il avait besoin de se concentrer.

Qhuinn se jeta sur son lit et alluma la télé. La première image qui apparut sur

l’écran fut celle d’une publicité annonçant la parution prochaine d’un nouveau

jeu d’Xbox. Voilà qui lui rappelait pas mal d’anciens souvenirs chers à son

cœur…

Et ce fut alors qu’il eut une brillante idée.

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Chapitre 14

Blay se réveilla parfaitement reposé. C’était agréable de se sentir à nouveau

redevenu lui-même. Il entra dans sa penderie et en sortit un pantalon de cuir et

une chemise à manches longues Under Armour (NdT : Entreprise américaine

spécialisée dans l’habillement basée à Baltimore aux États-Unis,) qui lui collait

au corps comme une seconde peau. Il jeta un coup d’œil vers le réveil. Les

volets ne remontraient pas avant une bonne demi-heure, aussi il pouvait encore

attendre avant de mettre ses armes. Emportant avec lui ses lourdes bottes de

combat, il revint dans sa chambre pour allumer la télévision. Il se laissa tomber

dans un fauteuil et zappa parmi les chaînes jusqu’à trouver une retransmission

du film Terminator. Il enfila ses bottes sans les attacher et se laissa glisser au

creux des coussins de cuir, dans une posture détendue.

Peu après, il y eut un coup à la porte.

— Entrez, cria-t-il sans bouger.

— Alors maintenant, tu restes le cul vissé sur ton fauteuil. Tu te prends pour

le roi ou quoi ?

En riant, Blay tourna la tête vers Qhuinn qui entrait. Le mâle était aussi

splendide que d’ordinaire, un dangereux prédateur tout en noir, bardé d’armes,

prêt à répandre sur les lessers la mort et la destruction.

Qhuinn s’approcha et tendit à Blay un sandwich, avant de s’asseoir sur le

fauteuil en face de lui pour terminer son propre casse-croûte.

— Merci, dit Blay, je crève de faim.

— C’est bien ce que j’ai pensé, répondit Qhuinn la bouche pleine.

— Dis-moi, tu as opté pour le look oiseau de proie ce soir ?

En effet, les soyeux cheveux noirs de Qhuinn étaient aplatis sur sa tête, sauf

une crête dressée au milieu.

Qhuinn l’effleura du bout de ses longs doigts.

— Je n’ai pas vérifié, dit-il, je n’ai même pas pris le temps de me regarder

dans une glace.

— Je trouve ça très mignon, gloussa Blay d’une voix moqueuse.

Qhuinn leva un sourcil menaçant.

— Mignon ? Répéta-t-il. (Il se releva et avança en roulant les épaules. Puis il

se pencha et posa chacune de ses mains sur les accoudoirs du fauteuil de Blay.)

Un gosse de trois ans peut être mignon. Pas moi.

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Et alors, il l’embrassa. Un court effleurement des lèvres. Bien trop court. Bien

sûr, Blay en aurait voulu davantage, mais il était prêt à accepter tout ce que le

moment lui offrait.

Qhuinn se releva, et cligna de l’œil.

— Bouge ton cul mec. Je t’attends en bas.

Le cœur en fête, Blay regarda Qhuinn traverser la pièce vers la porte.

— Je te trouve incroyablement sexy, ne put-il s’empêcher d’avouer.

Alors qu’il posait déjà la main sur la poignée de la porte, Qhuinn se retourna,

et ricana :

— Je préfère ça. Je me sens incontestablement plus sexy que mignon. (Ses

yeux fixés sur Blay se firent soudain graves.) Á tout de suite.

Quand il fut parti, Blay mordit dans son sandwich. Et le savoura

tranquillement. Dès qu’il eut fini, il serra les crochets de ses bottes, se releva et

s’occupa un moment à attacher ses armes autour de lui. Puis il attrapa son

manteau et quitta sa chambre.

***

Vu que Qhuinn conduisait comme démon échappé des Enfers, ce ne fut pas

longtemps après avoir quitté le manoir que le Hummer se trouva garé derrière le

Screamer. Ce bar était merdique. Quel dommage que le ZeroSum ait disparu

quand Rehv avait fait cramer sa boîte.

Durant les premières heures de la nuit, les trois vampires arpentèrent les rues,

espérant rencontrer des lessers dans sombres ruelles minables qu’ils aimaient à

hanter.

Leur tour de garde était presque écoulé quand Blay sentit enfin lui monter aux

narines la puanteur douçâtre du talc qui caractérisait les ennemis de la race.

Aussitôt, la tension du combat enfla en lui, faisant frémir tout son être.

— Ils sont par là, dit-il avec un geste de la main, pour indiquer à John et

Qhuinn la direction à prendre.

Les deux autres le suivirent, ayant eux aussi perçu l’odeur apporté par le vent.

Ils n’avaient pas fait trois pas dans la ruelle qu’un salopard de lesser se jeta par

la fenêtre d’un immeuble en ruine, tombant comme une masse sur le dos de Blay

qui s’écrasa le nez en avant sur le trottoir. Il pivota rapidement sur lui-même,

repoussant l’enfoiré— mais trop tard. Parce que Qhuinn s’était déjà occupé du

mec qui retombait de côté, le cou brisé. D’ailleurs, Qhuinn et John faisaient face

à deux autres égorgeurs qui venaient d’émerger de l’immeuble à la suite du

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premier. Les deux nouveaux lessers avaient les cheveux sombres, le signe

distinctif des nouvelles recrues. Et ils étaient plutôt fluets pour des membres de

la Société. Vu que ses copains n’avaient pas besoin de lui, Blay s’accouda au

mur de briques et les regarda combattre.

Le massacre ne prit pas longtemps.

— Bon, c’était un amuse-gueule tout à fait réjouissant, dit Qhuinn avec un

éclat de rire en contemplant les trois lessers qui gisaient au sol. John, envoie un

texto à Butch pour le nettoyage. (Il avança vers Blay.) Ça va ? Tu saignes. Tu es

sacrément écorché

Quand Qhuinn tendit la main vers son visage, Blay s’écarta d’un geste

nerveux. Il était en colère.

— Je vais très bien, aboya-t-il. Et j’aurais pu m’occuper de cet égorgeur.

— Je sais. Mais tu étais à terre et j’ai eu une opportunité. Tu croyais quoi ?

Que j’allais juste rester les bras croisés ?

Blay ne répondit pas, et respira profondément pour tenter de se calmer. Il

savait parfaitement que si les rôles avaient été inversés, il aurait agi pareil.

— D’accord, c’est bon. Et si on allait boire une bière ?

Ce n’était pas le moment idéal pour discuter avec Qhuinn. En plus, il avait

vraiment la tronche éclatée.

Quand il s’écarta du mur, la main de Qhuinn pesa lourdement sur son épaule.

— Blay ?

— Je t’ai dit que c’était bon, répliqua Blay sèchement. Alors, John ? Tu as pu

avoir Butch ?

— Oui. Il arrive.

— Génial, on peut se barrer.

Ils retournèrent au Screamer sans se parler, Qhuinn et John suivant Blay qui

marchait deux pas devant. Une fois la file d’attente dépassée, dès qu’il furent

entrés dans le bar, Blay se tourna vers Qhuinn :

— Je vais me nettoyer. Essayez de nous trouver une table.

Avant que Qhuinn n’ait le temps de lui répondre, une pute haut-de-gamme

s’agrippa au bras de Blay.

— Oh, mon pauvre petit chou, tu t’es blessé. Laisse-moi te soigner ça.

Qhuinn réagit au quart de tour

— Dégage salope, grogna-t-il.

Sa voix était six agressive que la prostituée s’écarta rapidement, et se perdit

peu après dans la foule.

— Était-ce bien nécessaire ? Demanda Blay.

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Mais Qhuinn n’était plus là pour l’entendre. Il avait déjà foncé vers une table

qui se libérait, et John le suivait de près. Blay fronça les sourcils. Il ne savait

vraiment pas ce qu’avait son pote, mais il sentait de plus en plus un problème

imminent. Á régler plus tard, et dans un autre contexte… Pour le moment, Blay

avait surtout besoin de garder son calme à tout prix.

Une fois dans la salle de bain, il examina son visage dans le miroir, faisant de

son mieux pour ignorer le couple qui baisait dans la stalle juste à côté, avec tout

le bruitage approprié. Bon, il avait de sacrées égratignures à vif. Il fit couler

l’eau, plongea la tête dessous, et s’aspergea la figure. Quand il se redressa, il

regarda à nouveau son reflet dans le miroir et— fit un bond. Avant de se

retourner vivement.

— Saxton ? Mais que fais-tu là ?

— C’est un endroit public, Blaylock.

Vêtu d’un costume bleu marine et un nœud papillon rouge, Saxton n’était

manifestement pas à sa place dans la clientèle habituelle de ce bar. Seigneur, est-

ce que le mâle l’avait poursuivi ? Blay grimaça en pensant au sang que Saxton

avait bu de lui.

— Ce n’est pas le genre d’endroit que je t’imaginais fréquenter.

Blay espérais de tout cœur que Qhuinn n’allait pas se pointer pour vérifier son

état. Il avait la nette sensation qu’une rencontre entre les deux cousins finirait

très mal.

— Ce n’est pas non plus le genre endroit que je t’imaginais fréquenter,

répondit Saxton d’une voix douce. Mais je sais que tu fais des exceptions dès

qu’il s’agit de ton si précieux Qhuinn.

En moins de deux minutes, Saxton s’était déjà arrangé pour crisper Blay. Qui

tenta pourtant de s’accrocher à son calme.

— Dis-moi ce que tu veux exactement, dit-il les dents serrées.

— Tu ne réponds pas à mes messages. Pas plus que tu ne prends mes appels.

Blay appuya ses fesses sur le comptoir, et essuya l’eau de son visage avec une

serviette en papier.

— Sax, je te rappelle que nous avons rompu. En quelque sorte du moins. Je

pense que tu imaginais notre relation plus importante qu’elle ne l’était.

Quand l’autre mâle s’approcha de lui, Blay regretta d’être coincé par le

lavabo dans son dos. Saxton posa la main sur son bras.

— Essaie de comprendre que tu vas souffrir avec lui. Il ne sait rien faire

d’autre que détruire ceux qui l’approchent.

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Cette fois, Blay était franchement en colère. Il arracha son bras de l’emprise

de Saxton, le contourna, et marcha vers la porte. Il s’arrêta, la main sur la

poignée. Dans la stalle adjacente, après un bruyant concert de hurlements, le

silence était retombé. Il prit une profonde inspiration et se retourna.

— Tu ne connais rien de lui, dit-il calmement.

Quand Saxton ricana d’un air méprisant, Blay serra la main sur la poignée, si

fort qu’il craignit un moment d’arracher la porte de ses gonds.

— Toi et ton costume chicos devriez retourner dans les quartiers qui vous

correspondent, dit-il sèchement.

Il ouvrit la porte et sortit. Et constata que Qhuinn parlait à grands gestes en

LSM avec John. Lorsqu’il s’assit en face d’eux, il jeta un coup d’œil en arrière

vers la salle de bain, avant d’explorer du regard l’ensemble du bar. Mais il ne vit

Saxton nulle part.

— Seigneur, existe-t-il des psys spécialisés pour les vampires ?

Il n’avait pas eu l’intention de parler à voix haute.

— Qu’est-ce que tu racontes ? Demanda Qhuinn. Pourquoi as-tu été aussi

long ?

Il avait les yeux fixés sur Blay, attendant une réponse.

Blay savait qu’il ne fallait pas parler de Saxton. Mais il était si en colère qu’il

passa outre.

— J’ai eu de la compagnie dans la salle de bain. Parce que Saxton m’y a

suivi.

— Quoi ! Rugit Qhuinn, déjà levé de son siège.

Blay le retint par le bras.

— Merde, assois-toi. Il est reparti.

— Non. Je veux retrouver ce fils de pute.

Cette fois, Blay se leva aussi. Une fois nez à nez avec Qhuinn, il grogna :

— Et tu comptes faire quoi ensuite, Qhuinn ? Laisser John ici pendant que tu

joues au héros pour me défendre ? Je te signale que tu es toujours son ahstrux

nohtrum. Et pas le mien. J’en ai ras la frange que tu me traites comme un

demeuré incapable de me débrouiller seul. Si tu continues à déconner comme ça,

je sortirai plutôt avec les autres Frères. (Blay marqua une pause.) J’ai besoin

d’air.

Il repoussa Qhuinn et traversa le bar, ramassant au passage un paquet de

cigarettes qu’une vendeuse ambulante lui proposait. Une fois dehors, il s’appuya

contre le mur près de la porte, et carra une cigarette entre ses lèvres.

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Qhuinn avait dû le suivre de près. Parce que le mâle arracha la cigarette avant

même que Blay n’ait le temps de l’allumer. Il la jeta par terre et la piétina.

— Je pensais que tu avais arrêté avec cette connerie, grogna-t-il.

Blay leva au ciel des yeux exaspérés.

— Dégage, Qhuinn.

Il prit une autre cigarette et l’alluma. Et la première bouffée lui brûla les

poumons.

— Je n’ai pas l’intention de dégager. Il faut qu’on parle. Et maintenant.

— Non, je n’en ai pas du tout envie, alors dégage.

Refusant de regarder Qhuinn, Blay se concentra sur sa cigarette, et tira

avidement dessus.

— Mais je veux te parler, insista Qhuinn d’une voix plus calme. Écoute, je

sais que j’ai réagi de façon déconnante— comme un malade mental, trop

possessif. Je… je suis désolé. Je n’arrive pas à m’en empêcher. Je n’ai plus

aucun contrôle. Je ne sais pas ce qui me prend. Ça me rend dingue d’imaginer

qu’il puisse t’arriver quelque chose. L’idée que tu souffres…

D’accord, Blay ne pouvait plus espérer avoir la paix ce soir. Il jeta sa

cigarette, l’écrasa du pied, et se tourna vers Qhuinn.

— Merde de merde, tu dis ne pas supporter qu’il m’arrive quelque chose

alors que tu te fous complètement de ce qui t’arrive. Tu ne fais jamais attention à

toi. Un de ces jours, tu vas te faire buter. Et alors, qu’est-ce qui arrivera, hein ?

Quand tu seras mort, imagine un peu dans quel état ça me mettra ? Arrête tes

conneries, Qhuinn. (Blay s’écarta du mur et se redressa.) Je vais rentrer. Vous

pouvez rester tous les deux, je vais juste me dématérialiser derrière le bar.

Ils restèrent un moment, silencieux pendant que quelques humains passaient

devant eux. Puis Qhuinn se rapprocha de Blay.

— Je vais chercher le Hummer. Tu récupères John ?

Cette fois, Blay regarda son copain bien en face. Et détesta voir autant de

douleur dans les merveilleuses prunelles dépareillées. Il aurait voulu serrer le

mâle contre lui, et s’excuser… mais il ne le fit pas.

— Bien sûr, répondit-il simplement.

Tête basse, Qhuinn s’éloigna dans la ruelle, et Blay le regarda jusqu’à ce qu’il

disparaisse au coin. Puis il retomba contre le mur, la tête appuyée aux briques

rouges. Il soupira. Dire que c’était la première nuit de leur retour au combat.

Quel désastre !

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Chapitre 15

Blay avait raison. Il devait se reprendre.

Qhuinn se traitait de tous les noms en avançant dans les ruelles obscures de

Caldwell. Il ne pouvait pas supporter l’idée que son copain soit fâché contre lui.

Et pourtant, ces derniers temps, tout ce qu’il faisait y menait fatalement. Il ne

souhaitait que protéger un mâle de valeur du merdier dans lequel lui-même se

retrouvait en permanence— où qu’il aille et quoi qu’il fasse. Curieux quand

même que ses bonnes intentions lui retombent systématiquement en pleine

gueule. Et bordel, à quoi jouait ce connard de Saxton ? Pourquoi s’accrochait-il

ainsi. Ce serait peut-être une bonne chose que Qhuinn se charge de lui faire

rentrer le message dans le crâne. À coups de crosse par exemple...

Au moment où cette idée lui traversait l’esprit, Qhuinn jeta un coup d’œil

machinal par la vitrine du bar miteux devant lequel il passait. Il repéra aussitôt

les cheveux blonds et lumineux de son cousin qui buvait un martini directement

au bar, planté comme une gravure de mode sur son haut tabouret.

— Oh que ça tombe bien ! ricana Qhuinn à voix haute. Mon jour de chance.

Sans hésiter, il fonça vers la porte où il fut arrêté par un videur qui lui arrivait

à peine au menton.

— Vous cherchez quelque chose, monsieur ?

Ce nain ne manquait pas de culot, d’accord, mais il tombait très mal. Et

Qhuinn n’hésita pas à le remettre à sa place.

— Dégage connard avant que je t’explose la gueule.

Qhuinn dépassa le mec qui avait reculé en ouvrant de grands yeux. Merde. Il

faudrait qu’il se souvienne d’effacer la mémoire de cet humain avant de quitter

le bar.

— Merci beaucoup, dit-il quand même.

Quand Qhuinn pénétra dans la salle, tous les yeux se tournèrent dans sa

direction. Sans se démonter, il planta son cul sur le siège libre à côté de son

cousin, qui lui jeta un coup d’œil en biais.

Saxton prit la peine de lever son martini et d’en boire une grande gorgée avant

de parler d’une voix mielleuse:

— C’est très aimable à toi de me rejoindre, Qhuinn, dit-il.

Que cet enfoiré aille se faire foutre avec ses mondanités. Qhuinn n’avait pas

de temps à perdre et tenait à lui régler son compte le plus vite possible.

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— Tu as intérêt à ce que je ne te croise jamais seul dans une rue la nuit,

grogna-t-il d’une voix contenue, parce que je te massacrerai sans hésiter.

Saxton jeta un coup d’œil autour d’eux pour vérifier que personne ne les

regardait. Puis il sirota à nouveau son martini.

— Vraiment, je n’arrive pas à comprendre ce que Blaylock te trouve. (Il

pivota sur son tabouret et examina Qhuinn de bas en haut.) Tu es un vrai

désastre. Du calme, mon garçon, ajouta-t-il quand un grondement féroce enfla

dans la poitrine de Qhuinn. N’attire pas davantage l’attention de ces humains sur

ta triste personne. Tu ne tiens certainement pas à créer une scène désagréable.

— Je suis juste venu te prévenir. J’espère que tu as compris le message.

Sur ce, Qhuinn se releva, mais Saxton se mit à glousser, comme un farfadet

démoniaque.

— Oui cousin, j’ai bien reçu ton message. Et l’avenir entre nous risque d’être

plutôt intéressant. (Qhuinn se détourna sans rien ajouter.) Juste un mot encore

avant que tu ne me quittes. J’aimerais savoir si Blaylock crie toujours mon nom

en jouissant ? J’avoue avoir été particulièrement friand de cette petite habitude.

Qhuinn inspira profondément. Délibérément. Cherchant désespérément à se

contrôler. Dégage, s’ordonna-t-il à lui-même. Boucle-la et dégage. Tout de suite.

— Oh, insista Saxton en riant de plus belle. Je vois que tu n’en es pas encore

là avec lui. Ça ne m’étonne pas. J’ai toujours estimé que tu devais être un amant

déplorable. Bien trop égoïste pour satisfaire un être un tant soit peu raffiné.

Cette fois, Qhuinn se jeta en avant, écrasant l’épaule de Saxton d’une poigne

brutale. Il se pencha vers le mâle, et plaça sa bouche contre son oreille.

— Après ce que je te vais te faire, cousin, tu regretteras d’être né.

Il relâcha Saxton et s’écarta d’un pas.

— Je pense que c’est plutôt l’inverse, Qhuinn. C’est toi qui regrettes d’être

né. C’est toi qui es l’anomalie génétique de la famille, pas moi.

En entendant cette accusation qu’il avait dû endurer depuis le jour sa

naissance, Qhuinn sentit son estomac se nouer douloureusement. Et il lui fut

impossible de soutenir le regard de Saxton. Il tourna le dos et quitta le bar,

vidant les souvenirs de sa présence dans tous les esprits humains qu’il croisa en

chemin. Une fois dehors, il réalisa qu’il tremblait de tout son corps.

Peu après, quand il se retrouva derrière le volant du Hummer, il laissa tomber

sa tête en arrière et tenta de se calmer. Sans réussir à cesser ses frissons. Ses

doigts étaient tellement crispés sur le volant que ses jointures étaient devenues

blanches.

Il eut un violent sursaut quand la portière côté passager s’ouvrit tout à coup.

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C’était Blay. Qui le regardait.

— Qu’est-ce qu’il y a ?

Vu que Qhuinn n’avait plus de voix, il ne put répondre.

— Qu’est-ce qu’il y a ? Insista Blay. Qhuinn ? Tu vas bien ?

Quand il n’obtint toujours pas de réponse, Blay referma la porte, fit le tour de

la voiture, et ouvrit la portière de Qhuinn.

— Pousse-toi. Laisse-moi conduire.

Mais Qhuinn n’arrivait même pas à lâcher le volant. Il avait la sensation

d’avoir une crise de panique— incoercible, folle, terrorisante... Blay posa la

main sur les siennes.

— Qhuinn, du calme. (Son autre main et effleura doucement les épaules de

Qhuinn.) Du calme.

Sous le toucher apaisant, Qhuinn sentit enfin son corps se détendre. Il relâcha

ses doigts et glissa sur la banquette du côté passager pendant que Blay

s’installait à sa place et démarrait le moteur. John était déjà monté à l’arrière.

Qhuinn appuya la tête contre la vitre, et les trois vampires prirent le chemin

du retour dans un silence total. Même la radio n’avait pas été allumée. Peu à

peu, Qhuinn sentit que le ronronnement du moteur le calmait. Vingt minutes

plus tard, le 4x4 s’arrêtait devant la première grille qui protégeait l’entrée de la

propriété.

— Il faut que je te parle— dès que possible, dit Qhuinn à voix basse.

Une fois le véhicule garé dans la cour intérieure, devant le manoir de la

Confrérie, Qhuinn fut le premier à sortir. Il traversa rapidement l’espace

gravillonné, poussa la lourde porte, offrit son visage au moniteur de la sécurité

puis monta tout droit jusqu’à sa chambre. Il savait que Blay le suivait de près.

En entrant dans sa chambre, il laissa la porte ouverte et arracha son blouson

qu’il jeta sur le lit. Derrière lui, Blay enleva soigneusement le sien et le déposa

sur le dossier un fauteuil. Il était encore occupé à ajuster le pli des manches

quand Qhuinn l’attrapa par les épaules et le jeta sur le lit. Puis il tomba à genoux

devant le corps étendu et s’attaqua à la fermeture du pantalon de cuir noir.

— Qhuinn…

Quand Blay tenta de se redresser, Qhuinn leva la main et le poussa à nouveau

en arrière. Puis il détacha le pantalon du mâle, le fit descendre le long des

cuisses, libérant ainsi le sexe dressé. Avec un profond soupir, Qhuinn le prit

dans ses mains et le caressa de haut en bas. Il n’avait jamais encore fait ça à un

mâle. Mais pour Blay, il était désireux d’apprendre. Et le gémissement d’extase

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que poussa son copain lui donna le courage de continuer. Bordel, tout ça était

même incroyablement jouissif.

Sans plus hésiter, Qhuinn se pencha en avant et laissa le sexe de Blay pénétrer

sa gorge, complètement, avant de refermer les lèvres et de tenter un coup de

langue. Seigneur, dément— c’était une expérience enivrante.

Ayant souvent reçu de telles caresses, Qhuinn connaissait le processus. Aussi

il se mit à la tâche avec ardeur. Et tandis que sa tête montait et descendait, que

ses joues se creusaient sous la succion, que sa langue s’activait, il voyait Blay se

tordre, les deux poings crispés sur les draps, gémissant de plus en plus fort. Bon

sang, il risquait d’exploser dans son froc rien qu’à admirer le spectacle. Désireux

de poursuivre son exploration, il relâcha le sexe de Blay, et grignota la veine

engorgée qui courait sur toute la longueur. Puis il mordilla les bourses renflées

tout en les caressant du bout des doigts. Avec un cri rauque, Blay tira le drap sur

lui, se plia en deux, et se mit à jouir.

— Bon sang, Qhuinn, marmonna-t-il, la respiration sifflante.

Qhuinn n’avait pas terminé. Il remit Blay sur le dos et s’assit sur lui, serrant

les hanches du mâle entre ses deux genoux. Puis il sortit l’une des dagues noires

que son copain portait dans un harnais croisé sur la poitrine.

— Mais qu’est-ce que tu fais ? Demanda Blay aussitôt d’une voix encore

essoufflée.

Qhuinn leva la lame jusqu’à sa bouche, s’entailla la lèvre, et se pencha en

avant pour embrasser Blay à pleine bouche. Sa langue le pénétra profondément,

puis il suça la lèvre renflée. Le goût du sang rendait le baiser encore plus

sensuel. Qhuinn rompit brutalement le contact, prit le crâne de Blay à deux

mains, pencha la tête de côté, et approcha de sa carotide les longues canines

encore vibrantes du mâle. Il avait la bouche tout près de l’oreille de Blay.

— Vas-y, chuchota-t-il.

La morsure fut franche et directe. Et Qhuinn bondit sous l’assaut. Mais quand

Blay aspira son sang à grandes goulées, il lui sembla que son corps se dissolvait.

Qu’il n’existait plus que délimité par les bras du mâle serrés autour de lui.

Qhuinn ferma les yeux, sidéré de réaliser que la brûlure qu’il y ressentait devait

être des larmes. Quelle connerie. Il n’avait jamais pleuré de toute sa vie. Jamais.

À nouveau, il se mit à trembler. Il n’en pouvait plus. Ça faisait vingt-cinq ans

qu’il se retenait. Mais là, il n’en pouvait plus. Il céda soudain et laissa couler ses

larmes.

Quand Blay entendit le changement de sa respiration, il cessa de boire, scella

les entailles d’un coup de langue, et regarda Qhuinn bien en face.

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— Seigneur, qu’est-ce que tu as ? Je suis désolé. Je ne voulais pour rien au

monde te bouleverser à ce point.

Qhuinn secoua la tête. Ce n’était pas Blay qui le bouleversait. Blay ne lui

avait jamais causé le moindre tort. Dès qu’il ouvrit les yeux, il se noya dans le

regard saphir et attentif posé sur lui— et s’effondra. Complètement. Le front

appuyé contre celui du meilleur ami qu’il ait jamais eu au monde.

— Je t’aime, murmura-t-il, avant de cacher son visage au creux du cou de

Blay.

Il sentit les mains de Blay se serrer sur son crâne, ses doigts se crisper dans

ses cheveux, en le serrant très fort.

— Je t’aime aussi, répondit une voix douce.

Ils devaient avoir l’air fin, pensa Qhuinn atterré. Deux vampires— en habits

de combat— portant à eux deux assez d’armes et de munitions pour faire sauter

tout un quartier— et qui se serraient l’un contre l’autre à la recherche de

réconfort…

Malgré ça, Qhuinn sanglota entre les bras de Blay sans pouvoir s’arrêter. Un

très long moment.

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Chapitre 16

Blay avait une sensation glacée sur son épaule, là où sa chemise était trempée

par les larmes de Qhuinn. Il était plus que sidéré par ce qui venait d’arriver. En

fait, il n’arrivait pas à y croire. Et Qhuinn sanglotait toujours. Et ça faisait

maintenant un bail que ça durait. Blay ne savait pas ce qui avait provoqué un tel

effondrement chez son meilleur ami, mais assister à une telle débâcle lui brisait

le cœur. Ne sachant quoi faire d’autre, il se contentait de lui frotter le dos. Et

d’attendre.

Au bout d’un long moment, les spasmes s’étouffèrent enfin, puis devinrent

peu à peu des soupirs rauques. Et puissants. Blay sentait l’air que soufflait

Qhuinn lui caresser la peau.

— Ça va mieux maintenant ? Demanda-t-il doucement.

Il sentit dans son cou le hochement de tête de son ami.

— Je suis désolé, marmonna Qhuinn, d’une voix cassée.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? Demanda Blay, (il s’inquiétait sérieusement

d’avoir provoqué cette crise inattendue.) C’est à cause de moi ? Je suis navré. Je

n’aurais jamais dû te parler comme je l’ai fait.

— Non. Ce n’est pas toi, protesta Qhuinn toujours niché dans le cou de Blay,

en secouant la tête pour accentuer sa dénégation.

— D’accord, alors c’est qui ?

Cette fois, Qhuinn s’écarta de Blay et se redressa. Il roula sur lui-même, puis

s’assit sur le rebord du lit, les coudes posés sur les genoux, s’essuyant les yeux à

deux mains.

Pour lui laisser un moment pour se reprendre, Blay se leva, en ajustant en

même temps son pantalon de cuir. Puis il enleva le drap qu’il avait utilisé, et

passa dans la salle de bain pour le jeter dans la chute à linge sale. Lorsqu’il

revint peu après dans la chambre. Qhuinn n’avait pas bougé d’un poil. Il était

toujours assis sur le lit, le dos vouté, la tête cachée dans les mains.

Blay enleva toutes ses armes, et les posa sur le lit avant de s’y asseoir à côté

de Qhuinn. Il plaça la main sur le dos du mâle et le tapota légèrement.

— Alors, est-ce que tu vas m’expliquer ?

Les longs doigts de Qhuinn quittèrent son visage pour aller s’emmêler dans

ses cheveux. Il avait la mâchoire serrée, les maxillaires saillants.

— C’est compliqué, finit-il par avouer d’une voix lente. Tout déconne dans

ma vie.

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En entendant le halètement rauque que son ami ne put réprimer à la fin de sa

phrase, Blay lui posa le bras autour des épaules et l’attira contre lui pour le

serrer étroitement contre sa poitrine. Il sentit les frissons qui agitaient le corps

raidi. Mince, Qhuinn recommençait à pleurer.

— Tu es tout ce que j’ai, Blay, dit Qhuinn en cachant son visage contre Blay

pour cacher ses larmes. Je t’en prie, ne me quitte pas. Ne me quitte jamais.

Blay avait du mal à saisir les mots étouffés dans sa chemise, et comme hachés

par les sanglots. Il baissa la tête et enfouit son visage sur les cheveux noirs

hérissés.

— Comment peux-tu envisager une chose pareille ? Dit-il doucement. Tu

sais bien… tu sais bien que jamais je ne le ferai.

Ils restèrent ainsi enlacés un long moment. Puis Qhuinn inspira longuement,

et sembla se reprendre. Il se redressa pour s’essuyer les yeux. Ensuite, il laissa

retomber ses mains sur ses genoux. Et regarda Blay. Qui craignait de parler, de

peur de déclencher à nouveau une crise.

Qhuinn devina ce qu’il pensait.

— Ça va aller maintenant, dit-il pour le rassurer, en respirant profondément

une fois de plus.

En examinant le visage de son meilleur ami— et en le trouvant si

bouleversé— Blay avait la sensation d’avoir une blessure béante au milieu des

tripes. Les yeux merveilleux, un bleu et un vert, étaient rouges et gonflés.

D’énormes cernes les soulignaient de pourpre. Sur la lèvre de Qhuinn, l’entaille

qu’il s’était faite n’avait pas encore cicatrisé. C’était un visage douloureux, qui

semblait avoir souffert au-delà de ce qu’il pouvait endurer. Blay posa la main

sur la nuque de Qhuinn, et la serra légèrement.

— Dis-moi ce qui ne va pas.

— C’est Saxton, avoua Qhuinn qui laissa tomber la tête.

Blay eut un soupir intérieur.

— Seigneur. Ne me dis pas que tu l’as tué ?

— J’aurais dû le faire. (Comme ragaillardi par cette idée, Qhuinn eut un léger

gloussement.) Mais non, je l’ai simplement prévenu.

Blay savait bien qu’il était arrivé autre chose. Qui avait déclenché la réaction

émotionnelle de Qhuinn. En fait, c’était bien la première fois depuis qu’il le

connaissait que Blay voyait son ami aussi bouleversé. D’ailleurs, jamais il

n’avait encore vu Qhuinn exprimer aussi ouvertement une émotion quelconque.

Il n’arrivait toujours pas à y croire.

— Que t’a-t-il dit ? insista-t-il.

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Il regretta sa question dès que les mots quittèrent sa bouche. Il espérait

sincèrement ne pas déclencher une autre crise de larmes.

Mais Qhuinn se contenta de soupirer, la tête toujours très basse.

— J’aurais préféré ne pas naître, tu sais. Je suis une anomalie génétique qui a

toujours fait honte à ma famille. Ouais, bordel, une vraie tare… (Il réfléchit un

moment.) Quant à Saxton, je n’ai pas envie de te répéter ce qu’il a dit. Ça me

ferait gerber.

Qhuinn se leva et se mit à enlever ses armes. Il traversa la pièce pour les

déposer sur sa commode avant d’arracher son tee-shirt noir qu’il jeta n’importe

où… et qui atterrit sur le tas. Puis le mâle posa les poings sur le bois ciré, et

sembla hésiter…

Blay se leva aussitôt, et avança jusqu’à lui. Il mit la main sur le dos nu, entre

les deux omoplates. Tout en savourant le contact de la peau lisse et chaude, il

réalisa qu’il avait une envie frénétique de se lancer à la poursuite de Saxton et de

tuer cet enfoiré lui-même— pour le mal qu’il avait causé à son cousin.

— Rien de ce qu’il t’a dit n’est vrai, dit Blay, pensant à la façon dont la

famille de Qhuinn l’avait traité toute sa vie.

— J’en ai rien à foutre de ce qu’il m’a dit. (Qhuinn s’écarta d’un geste

nerveux et retourna s’asseoir sur le lit pour détacher ses lourdes bottes qu’il

envoya valser une par une. Puis il leva vers Blay des yeux hantés) Je déteste

l’idée que tu aies couché avec lui. Bordel, je ne le supporte pas.

Devant cette accusation directe, Blay ferma les yeux, soudain effondré. Oui,

lui aussi détestait cette idée.

— Je suis désolé, dit-il, malheureux et honteux. Si je pouvais effacer ça, je—

— Non, le coupa Qhuinn qui se redressa d’un bond pour venir se mettre en

face à Blay, à qui il referma la bouche d’un doigt sous le menton. Ne fais pas ça.

Tu n’as pas à te sentir coupable. Je n’aurais jamais dû dire ça. (Il laissa tomber

sa main, comme si toucher Blay le brûlait.)

À nouveau, Blay dévisagea longuement son ami.

— Tu sais, je crois que tu as besoin de prendre une veine.

— Non, dit Qhuinn qui se détourna pour aller fourrager dans le tiroir de sa

commode. Ça va.

— Ne sois pas buté. Ça ne va pas. Je devrais prévenir Layla.

— Blay, laisse tomber. Je t’ai dit que ça allait.

Seigneur, quelle sacrée tête de mule.

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— Est-ce que tu préfèrerais que j’appelle une autre Élue ? Insista Blay. Ça te

permettrait d’éviter de revoir Layla si tu préfères. Tu ne peux pas rester

éternellement dans cet état. Je te rappelle qu’un vampire a besoin de sang.

Cette fois, Qhuinn posa frappa du poing la commode, inspira un grand coup,

et se retourna.

— Je prendrai une veine demain. Mais pas ce soir. D’accord ? (Quand Blay

hocha la tête, Qhuinn continua :) Maintenant, j’ai franchement besoin d’une

douche. Ensuite, je vais me pieuter. Ouais, je manque de sommeil.

Considérant qu’il venait d’entendre son congé, Blay récupéra son blouson

posé sur le dossier d’un fauteuil, puis ses armes alignées sur le lit.

— Dors bien, dit-il doucement, en jetant un coup d’œil à Qhuinn.

Même si le mâle avait l’air d’un guerrier blessé qui revenait des Enfers, il

restait l’être le plus splendide que Blay ait jamais vu.

— Toi aussi, répondit Qhuinn à voix basse.

Blay avançait déjà vers la porte quand une lourde main s’agrippa à son bras

pour l’arrêter.

— Blay… Ah, je… Pour ce qui s’est passé… euh, tout à l’heure… (Le mâle

bafouilla encore un peu, puis s’arrêta, et soupira longuement.) J’aurais préféré

que ça se passe différemment. Je suis désolé.

Blay secoua la tête.

— Pas de quoi.

— Mais si, répliqua aussitôt Qhuinn. (Il s’approcha plus près, et prit à deux

mains le cou de son ami.) C’est vrai, tu sais, ce que je t’ai dit. Je t’aime.

Ça faisait des années que Blay attendait d’entendre ces mots. Ces derniers

mois, il avait même fini par se persuader qu’ils ne lui parviendraient jamais—

du moins venant de Qhuinn. La première fois que le mâle les avait prononcés,

tout entrecoupés de sanglots, Blay avait préféré ne pas y croire, les enfermant

dans un recoin de sa mémoire pour ne pas donner de fausses racines à ses

espoirs les plus fous. Il ne pensait alors qu’à réconforter son ami, à soulager sa

terrible douleur. Mais à présent, Qhuinn le regardait bien en face, le regard clair,

intense, lucide. Et dans les yeux superbes et si rares, Blay lut enfin la vérité :

Oui, Qhuinn— l’amour de sa vie— pensait vraiment ce qu’il disait. Ces trois

petits mots lui enflammèrent le cœur, l’enivrant d’un bonheur si intense qu’il en

était douloureux. Seigneur, rêvait-il ?

Il déglutit avec peine, et essaya de trouver sa voix pour répondre :

— Moi aussi, je t’aime, haleta-t-il, la voix à peine audible.

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Malgré ça, Qhuinn eut un sourire rayonnant et sincère à cette déclaration

pitoyable.

— Je ne sais vraiment pas pourquoi, mais bordel, j’en suis bien content.

Voilà qui ressemblait bien à Qhuinn dans son état normal, aussi Blay se mit à

rire.

— À demain, dit-il.

Il se sentait soudain épouvantablement épuisé.

— Ouais, répondit Qhuinn, à demain. (Il tira Blay vers lui pour l’embrasser.)

Et merci.

Dès que la bouche du mâle se posa sur la sienne, Blay regretta fortement

d’avoir les mains encombrées par toutes ses affaires. Il envisagea un moment de

les laisser tomber, mais déjà Qhuinn s’écartait. Le baiser avait été très bref, à

peine un effleurement des lèvres.

— Bonne nuit, dit Blay la tête vide.

— Toi aussi, mec.

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Chapitre 17

— Fritz, je pense que c’est parfait.

Qhuinn était planté au milieu de la salle de cinéma, au second étage du

manoir, et il examinait l’immense écran placé sur le mur du fond tandis que

Fritz plaçait les bouteilles d’un pack de bière— douze Coronas— dans un

saladier d’argent rempli de glaçons et posé sur le bar.

— Je suis bien certain, messire, que Blaylock appréciera la soirée que vous

avez prévue pour lui, répondit le doggen.

Oui, Qhuinn l’espérait bien. Il descendit les marches qui menaient au premier

rang des sièges installés devant l’écran. Il posa son cul sur l’un d’eux, et

remonta machinalement l’un après l’autre ses genoux contre sa poitrine.

— Hey, dit-il soudain en se retournant vers le doggen, merci, vraiment, pour

votre aide.

Il était sincère. Rien de ce qu’il avait prévu n’aurait été aussi réussi sans Fritz.

— C’était un plaisir de vous servir, messire, dit le vieux mâle avec un sourire

béat qui montrait toutes les rides de son visage. Je veillerai à ce que les pizzas

vous soient servies d’ici une heure.

Fritz resta près du bar pour trancher finement un citron qu’il présenta ensuite

dans une assiette à côté du saladier. Qhuinn hocha la tête, approbateur. Pour bien

savourer une Corona, il fallait glisser une rondelle de citron dans le goulot avant

de la siroter. Par contre, pas question d’utiliser un verre.

Qhuinn se releva et s’approcha aussi du bar, sortant de sa poche une petite

boîte noire. C’était le cadeau qu’il avait prévu pour Blay— un truc qu’il avait

choisi seul, sans l’aide du majordome. Mais soudain, il avait comme une arrière-

pensée, presque un doute.

— Dites-moi un peu ce que vous en pensez, Fritz, dit-il en ouvrant la boîte

qu’il posa sur le bar. (À l’intérieur, se trouvaient des boutons de manchettes

ornés de diamants.) Á votre avis, Blay va-t-il les aimer ?

— Oh, messire… (Fritz ne put retenir un gloussement ravi.) Un crâne et des

os croisés ? C’est… très original. Vraiment. Blaylock en sera enchanté.

— Ouais, dit Qhuinn, ils sont déments. (Plutôt fier de lui, il reprit la boîte

pour regarder le dessin de plus près.) Et puis, mon pote adore porter ce genre de

conneries.

Avec un haussement d’épaules, Qhuinn referma la boîte qu’il remit dans sa

poche.

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— Bon, je me barre, dit-il au doggen. Merci encore.

Fritz de se retourna pour lui sourire. Il avait vraiment l’air heureux d’avoir

participé à cette fête— à moins que ce ne soit d’avoir aidé Qhuinn ?

— Je vous souhaite de passer une bonne soirée, messire.

— Fritz, vous êtes le meilleur, dit Qhuinn avant de quitter la salle.

Il descendit deux par deux les marches qui menaient au grand couloir du

premier étage. Il avait remonté sur sa tête le capuchon de son sweat noir, et

gardait les deux mains dans ses poches. Au milieu du couloir, il s’arrêta devant

la porte de Blay. Et resta figé un moment. Il se sentait nerveux. Nerveux ?

Merde. Pourquoi diable se sentirait-il nerveux ?

— Ne sois pas con, se dit-il à lui-même, à voix haute, avant de tendre la main

pour taper à la porte.

— Entrez, cria Blay de l’intérieur.

Qhuinn leva les yeux au ciel. Décidément, c’était une nouvelle manie chez

Blay que de ne pas venir ouvrir sa porte lui-même. Mais vu qu’il avait déjà fait

cette réflexion la veille, il garda pour lui son opinion.

Dès qu’il entra dans la chambre, il eut le souffle coupé en apercevant son

copain, étendu sur son lit, lisant un bouquin. Sacré tableau ! Le mec avait

remonté les manches de sa chemise sur ses bras, exposant ainsi la peau dorée de

ses avant-bras, tendue sur les longs muscles gonflés. Les boucles rousses étaient

ébouriffées, et les merveilleuses prunelles saphir brillaient— la cerise sur le

gâteau. Ouais, le mec était une publicité ambulante pour Gucci. D’ailleurs, en

approchant Qhuinn aperçut le logo de la marque imprimée en relief dans la

ceinture de cuir de Blay. Superbe, pensa-t-il.

— C’est quoi cette nouvelle manie de ne pas ouvrir la porte et de crier

"entrez" ? Demanda-t-il sans réfléchir dès qu’il retrouva ses esprits.

— Mais je savais que c’était toi, dit Blay en riant.

Qhuinn s’étendit aux côtés de Blay, laissant la fragrance enivrante du mâle lui

monter aux narines. Merde, ça devenait une véritable addiction. Malgré ça, il ne

put s’empêcher de ricaner en remarquant que Blay vérifiait par-dessus son livre

que Qhuinn n’ait pas posé ses chaussures directement sur le lit.

— Qu’est-ce que tu lis ? Demanda Qhuinn. Le dernier Twilight ?

Blay faillit s’étouffer, puis secoua la tête. Il referma son livre, marquant

soigneusement la page où il s’était arrêté, avant de le déposer sur sa table de

chevet.

— Non andouille. C’est le dernier roman de John Grisham. (NdT : Avocat et

auteur américain de romans judiciaires.)

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— Génial, répondit Qhuinn, sans enthousiasme.

Il sentait que Blay le dévisageait. Manifestement, son copain savait que

Qhuinn n’avait pas encore pris une veine. Merde. Bien sûr qu’il en avait besoin.

Bien sûr qu’il manquait de sang. Bien sûr qu’il se sentait dans un état merdique.

Mais il n’avait pas envie d’ingurgiter le sang d’une femelle. Non, il voulait celui

de Blay. Et de personne d’autre.

Blay tendit la main et baissa le capuchon qui recouvrait la tête de Qhuinn.

— Alors ? Tu as bien dormi ? Demanda-t-il.

— Bof, dit Qhuinn en haussant les épaules. Quelques heures en tout cas.

Le sujet ne l’intéressant pas du tout, il chercha à en changer. Aussi il s’agita

pour récupérer la boîte dans sa poche, et prit de son autre main celle de Blay. Il

ouvrit les doigts de son copain et déposa dans sa paume la petite boîte noire.

— J’ai quelque chose pour toi.

— En quel honneur ? Demanda Blay surpris, en regardant d’abord la boîte,

puis Qhuinn.

— J’ai décidé que, si toi et moi devions passer la soirée ensemble, un cadeau

pour marquer l’occasion serait une bonne idée. Normal non ? On n’arrive pas les

mains vides en principe. Les roses ou les chocolats, c’est banal. En plus, j’aurais

été grotesque. (Il ricana.)

Mais Blay avait toujours l’air aussi étonné.

— Comment ça ? Quelle soirée ? Je ne savais pas que tu avais prévu quelque

chose. Un rendez-vous ? Tu sais, nous ne sommes pas obligés de sortir ou

d’aller où que ce soit. Et puis, tu n’avais rien besoin de m’offrir.

Qhuinn soupira.

— Je ne l’ai pas fait parce que j’en avais besoin mais parce que j’en avais

envie. Maintenant ferme-la, et ouvre cette putain de boîte.

— D’accord, du calme. (Dès que Blay souleva le couvercle, il eut un grand

sourire.) Oh, c’est génial. Merci beaucoup.

Il sortit l’un des boutons de manchettes de la boîte pour le regarder de plus

près.

Tendu, Qhuinn scrutait Blay de près. Voir ce visage si cher s’illuminer de joie

lui fit un bien fou. Il se pencha pour embrasser la tempe du mâle, avant de poser

son menton sur l’épaule de son copain.

— T’as vu ? Il y a des petits diamants noirs qui marquent les yeux.

— J’ai vu. C’est magnifique. Merci, dit Blay qui regarda Qhuinn avec un

grand sourire.

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— De rien. Tu es prêt ? fit Qhuinn avant de pivoter sur lui-même, et de faire

claquer ses deux pieds par terre.

Blay referma le couvercle de la boîte, la posa avec soin sur le livre sur sa table

de chevet, et demanda :

— Ça dépend. Où allons-nous ? Faut-il que je me change ?

— Sûrement pas. Bordel je te trouve parfait comme ça. Tu me fais bander.

Merde, pensa Qhuinn. Il n’avait pas eu l’intention de dire ça à voix haute. Et

pourtant, c’était la vérité. Il avait un mal fou à s’empêcher de sauter illico sur le

mâle. Bien entendu, il aurait pu le faire. Mais il souhaitait vraiment que la soirée

soit spéciale pour Blay. Quelque chose de plus raffiné que la nuit précédente. Ou

que son style habituel, en quelque sorte.

Mais Blay ne fut pas choqué de son langage. Au contraire, il éclata de rire.

— Bon, alors d’accord.

Le mâle se leva et avança vers la porte. Qhuinn le rejoignit, et prit sa main.

Quand il serra ses doigts contre ceux de son meilleur ami, il resta immobile un

moment, puis le tira par la main pour l’entraîner vers le bout du couloir, jusqu’à

la porte de l’escalier qui montait au second. Il resta silencieux tout en marchant,

songeant à la sérénité qu’il avait toujours éprouvée auprès de Blay. Aujourd’hui,

c’était encore plus flagrant. Tout semblait si normal, si évident… Et c’était un

une sensation à laquelle il pourrait s’habituer. Quand il tourna la tête pour

regarder Blay, il s’aperçut que le mâle le regardait aussi. Il éprouva un élan de

joie. Comment était-il possible qu’un être aussi merveilleux puisse lui

appartenir ? Il savait bien ne pas le mériter.

— Tu n’avais pas besoin de tout ça, dit Blay, en interrompant ses pensées.

Ils étaient arrivés à la porte qui montait à la salle de cinéma.

— Arrête de répéter ça, grommela Qhuinn.

— Ce que j’essaie de te dire, insista Blay, c’est que tu n’as pas à être

différent de ce que tu es. Je sais que tu n’aimes pas les mondanités. Je m’en

fiche.

Qhuinn agrippa son copain aux épaules pour le forcer à lui faire face.

— Mais de quoi tu parles ? Tu ne sais même pas ce que nous allons faire. (Il

laissa ses paumes descendre le long des bras de Blay jusqu’à ses mains qu’il prit

dans les siennes.) J’essaie de faire quelque chose de sympa pour toi. Alors ça me

brancherait pas mal que tu arrêtes de râler. (Il marqua un temps de pause.)

Maintenant, si tu penses que j’allais t’emmener dans une connerie de bar pour

écouter du jazz ou fumer des cigares, tu n’as pas à t’inquiéter. Effectivement,

c’est pas mon style.

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— Mais j’aime le jazz, protesta Blay avec un sourire.

— Ouais, je sais… Pourtant, c’est nul à chier. Mais tu ne peux pas n’avoir

que des qualités.

Ils éclatèrent de rire ensemble.

Puis Qhuinn agit d’instinct et colla Blay contre le mur, pesant contre lui de

tout son poids, leurs mains toujours nouées. Il ouvrit la bouche et la posa sur le

cou du mâle, remontant en effleurements légers le long de sa gorge jusqu’à son

oreille. Il sentit Blay s’amollir contre le mur.

— Bordel, que tu sens bon, murmura Qhuinn.

Ses lèvres tracèrent un chemin brûlant sur la joue pour atteindre la bouche de

Blay. Du bout de sa langue percée, Qhuinn suivit le tracé des lèvres fermes,

avant de se glisser à l’intérieur, tandis que ses canines allongées par le désir

commençaient à battre au rythme de son sang. Il sentit Blay libérer ses mains et

s’agripper à ses hanches pour attirer son corps encore plus près. Qhuinn plaqua

ses deux paumes sur le mur derrière Blay, s’aidant de cet appui pour peser

encore plus contre le mâle. Il sentait la bosse énorme formée par leurs deux

sexes engorgés qui se frottaient un contre l’autre. Les mains de Blay passèrent

dans son dos, soulevèrent son sweat, et remontèrent le long de sa colonne

vertébrale tandis que leurs langues se tordaient l’une contre l’autre, dans une

frénésie qui semblait sans fin.

Lâchant le mur, Qhuinn agrippa la nuque de Blay, arracha ses lèvres de sa

bouche, et revint à son cou, descendant passionnément jusqu’à la clavicule où il

utilisa son menton pour écarter le col de la chemise. Il sentait le sang du mâle

battre juste sous la peau. Et sa faim devenait de plus en plus violente.

Pendant ce temps, Blay glissait ses doigts dans son jean. Et son contact contre

sa peau nue rendait Qhuinn à moitié fou. Aucune chance qu’ils arrivent jusque

dans la salle de cinéma dans cet état. En fait, si ça continuait, ils n’allaient pas

tarder à s’écrouler par terre, dans le couloir, où n’importe qui pouvait leur

tomber dessus. Bien sûr, vu que ça faisait des semaines qu’il était chaste— sauf

le petit intermède dans les vestiaires— et qu’en plus, il désirait Blay comme un

malade, Qhuinn savait que le premier round allait être plutôt rapide. Mais tant

pis, même s’il explosait en quelques secondes, il pourrait toujours se rattraper la

seconde fois… la troisième… ou même la quatrième. Il voulait Blay. Et tout de

suite.

Blay pencha davantage la tête et lui mordilla le cou, tout en continuant à

agiter les hanches de façon spasmodique. Qhuinn gémit, et s’écarta un moment

de son copain pour dire :

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— Je te veux.

— Moi aussi, chuchota Blay. Fais ce que tu veux.

Cette fois, Qhuinn s’écarta de Blay et le regarda droit dans les yeux, tandis

qu’ils soufflaient aussi fort l’un que l’autre. Il hésita… et jeta un coup d’œil à la

porte de la salle de cinéma, pensant à tout ce qui était préparé là-dedans pour la

soirée spéciale qui l’avait voulu offrir à Blay. Mais ça pouvait attendre, pas

vrai ? Se demanda-t-il à lui-même.

— Ouais, répondit-il à haute voix, avant de prendre Blay par la main pour

dire : On y va.

Ils retournèrent au pas de course jusqu’à la chambre de Blay où Quinn faillit

arracher la porte tellement il l’ouvrit violemment, désireux d’être le plus vite

possible à l’intérieur.

Á peine entré, Blay lâcha sa main et fila vers la salle de bain en disant :

— Je reviens.

— D’accord, répondit Qhuinn qui se laissant tomber en arrière sur le lit, le

corps en feu.

Il écouta, s’attendant à attendre de l’eau couler. Mais non, tout restait

silencieux. Plusieurs minutes s’écoulèrent. Il finit par se demander ce que Blay

pouvait bien foutre. Il se releva et s’approcha de la porte, posant la main dessus,

pour dire :

— Blay ? Ça va ?

Il avait parlé doucement. Blay ne répondit pas. Pourtant, Qhuinn entendait sa

respiration sifflante à l’intérieur. Il tapa fort sur le panneau.

— Blay, je rentre.

Il poussa la porte et trouva Blay appuyé sur le comptoir de marbre du lavabo,

les poings crispés, la tête basse. Le mec avait-il changé d’avis ? Qhuinn prit une

profonde inspiration.

— Si tu ne veux pas faire ça, c’est bon… On peut attendre.

— Non, je le veux, répondit Blay passionnément, mais sans lever la tête.

Crois-moi, je n’ai jamais rien voulu aussi intensément.

Alors qu’est-ce qui ne va pas ? Demanda Qhuinn.

Blay se retourna, s’appuya au comptoir, puis releva la tête. Qhuinn eut la

sensation d’un choc physique en croisant son regard. Seigneur, il y avait dans

ces yeux-là une lumière étrange, brûlante, aveuglante. Qhuinn n’avait jamais vu

une telle expression chez quiconque.

— Tes yeux… Ils sont… Tu es magnifique.

Blay soupira et ferma les yeux.

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— Non, dit Qhuinn aussitôt. Ne les ferme pas.

Il avança jusqu’à son copain, et lui posa les mains sur les épaules. Blay

rouvrit lentement ses yeux lumineux pour regarder Qhuinn.

— Je t’ai attendu si longtemps, dit-il d’une voix intense.

Ils se regardèrent un long moment. Un très long moment. Puis Blay hocha la

tête :

— Je suppose que j’ai la trouille.

Qhuinn avait la gorge si serrée qu’il eut du mal à parler. Il leva la main pour

la poser sur la joue de son copain.

— Blay, chuchota-t-il, moi aussi.

Après cet aveu, Blay se redressa lentement, et serra ses deux bras autour de la

taille de Qhuinn, avant de le ramener dans la chambre. Une fois devant le lit, ils

restèrent un moment face-à-face, conscient de l’importance de l’enjeu. Puis d’un

geste décidé, Blay s’attaqua à la ceinture du jean de Qhuinn. Il ouvrit la boucle

et tira sur une extrémité, libérant le cuir des passants du jean, un par un. Avec un

sourire sensuel…

En voyant les lèvres de Blay se relever dans ce sourire intime, Qhuinn sentit

son cœur se serrer, fondre, s’enflammer. Il était incroyablement attentif à la

moindre nuance du visage en face de lui. Émerveillé, amoureux, heureux.

Il passa à son tour à l’offensive, leva les mains et se mit à déboutonner sa

chemise de Blay. Quand il arriva au dernier bouton, il regarda les yeux bleus et

dit une fois encore :

— Je t’aime.

— Je t’aime aussi, répondit Blay.

D’un même geste, les deux mâles se penchèrent l’un vers l’autre pour un

baiser qui scellait leur destin.

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Chapitre 18

Blay était toujours en proie à une nervosité qui lui laissait l’esprit brumeux.

Les yeux écarquillés, il laissait Qhuinn le déshabiller, déboutonner les manches

de sa chemise, un poignet après l’autre. Ensuite, Qhuinn tira les pans hors du

pantalon de Blay avant de faire glisser la chemise le long de ses épaules. Et Blay

frissonna sous la caresse de la soie sur sa peau sensibilisée. Le vêtement tomba

au sol dès que Qhuinn le lâcha.

Se reprenant, Blay ouvrit la fermeture-éclair du sweat à capuche de Qhuinn,

révélant en dessous le tee-shirt blanc qui moulait le torse du mâle. D’un geste

des épaules, Qhuinn s’en débarrassa et le sweat noir tomba lui aussi sur le tapis.

Déjà, Qhuinn soulevait l’ourlet de son tee-shirt et le faisait passer par-dessus sa

tête. Instinctivement, le regard de Blay se baissa sur le ventre dur aux

abdominaux si parfaitement sculptés. Comme d’habitude, les voir lui donna une

envie irrépressible d’y toucher. Mais cette fois, il était libre de céder à la

tentation. Il tendit les mains et prit Qhuinn à la taille pour l’attirer contre lui, tout

en posant sa bouche au creux du cou de son copain. Il sentit les mains de Qhuinn

se crisper sur ses bras et le pousser en arrière jusqu’à heurter du dos le mur près

du lit. Qhuinn s’agrippa au montant de bois, derrière eux, et serra leurs deux

corps ensemble, poitrine contre poitrine, tandis que Blay léchait toujours la peau

de sa gorge. Contre ses lèvres, le sang battait fort dans les veines de Qhuinn. Et

Blay crevait d’envie de mordre pour sentir le sang riche et épais lui couler dans

la gorge. Il salivait rien qu’en imaginant le faire. Mais Qhuinn s’écarta— bien

trop vite à l’avis de Blay— relâchant sa prise contre le bois du lit.

Un moment, Qhuinn caressa des mains le torse de Blay, glissant aussi le long

de ses flancs, puis il se tourna pour s’asseoir sur le lit, attirant Blay entre ses

cuisses écartées.

— La dernière fois, j’ai fait n’importe quoi, dit-il sans quitter des yeux

l’estomac de Blay.

On aurait dit qu’il se parlait à lui-même.

Blay n’arrivait pas à détourner les yeux du visage parfait de son meilleur ami.

Les traits durs semblaient s’être adoucis— le mâle affichait même un air

heureux. Blay aurait bien aimé ressentir la même sérénité. Mais ses mains

tremblaient toujours sous l’effet de l’adrénaline.

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Du bout des doigts, Qhuinn caressa le ventre de Blay. Qui devint rigide de

tension. Sa peau se hérissa de chair de poule. Merde, mais pourquoi était-il aussi

tendu ?

Qhuinn glissa ses longs doigts dans les poches du pantalon de Blay. Et laissa

simplement ses mains peser à l’intérieur, avant d’approcher son visage pour le

frotter contre Blay. Qui poussa un long soupir— de quoi se vider complètement

les poumons.

Soudain, les yeux dépareillés remontèrent pour le regarder.

— Ça va ? Demanda Qhuinn avec un demi-sourire qui ne relevait qu’un coin

de sa bouche.

Tétanisé, Blay se força quand même à hocher la tête.

Qhuinn hocha la tête, et d’un coup de pied, expédia ses chaussures à l’autre

bout de la pièce. Puis il enleva ses mains et tomba en arrière sur le lit en disant :

— Viens.

Blay hésita un moment, puis enleva ses propres souliers, et s’étendit à côté de

son ami.

Aussitôt, Qhuinn roula sur lui, pressant son bas-ventre contre le sien. Les

deux mâles étaient aussi excités l’un que l’autre. Mais Blay tremblait toujours.

— Détends-toi, haleta Qhuinn contre la bouche de Blay.

Un souffle chaud caressait le visage de Blay. Qui tendit la bouche en avant

pour mordre la lèvre inférieure de Qhuinn, sentant le contact étrange de l’anneau

noir qui la perçait. Il noua aussi ses mains dans le dos ferme du mâle, pressant

ses doigts contre la peau brûlante.

Blay ferma les yeux quand Qhuinn libéra sa bouche pour glisser dans son cou,

traçant un chemin de feu sur sa clavicule… sa poitrine. Quand Qhuinn serra les

dents sur son mamelon, frottant le piercing rond de sa langue sur la peau

sensible, Blay eut un long frisson. Qhuinn passa ensuite à l’autre mamelon,

avant de descendre vers le ventre. Qu’il l’embrassa tout du long, et ses mains

suivaient le même chemin de ses lèvres.

Blay ouvrit les yeux quand le contact humide disparut. Qhuinn se mettait à

genoux entre ses jambes. Leurs regards se croisèrent un moment. Puis Qhuinn

détourna les yeux vers la ceinture de Blay qu’il ouvrit et arracha d’un coup sec.

Il détacha ensuite la fermeture éclair du pantalon, et à nouveau, regarda Blay.

Qui se redressa sur les coudes, ayant besoin du contact de Qhuinn. Comme si

l’autre mâle l’avait deviné, il se coucha à nouveau sur lui. Visage contre visage,

corps contre corps. En même temps, le poids de Qhuinn le forçait à s’étendre.

Blay noua ses mains dans les cheveux hérissés, aussi noirs et brillants que le

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pelage d’un geai, et se noya dans le regard brûlant qui ne le quittait pas.

Seigneur, qu’il était beau.

Le visage de Qhuinn emplissait son horizon. Et Blay examina de près les

traits qu’il connaissait par cœur. La larme rouge tatouée dans la peau de la joue

qui indiquait un lourd statut. La barbe noire qui commençait à repousser sur la

dure mâchoire. Les nombreux piercings que le mâle portait— sur le cartilage des

oreilles, aux sourcils, à la bouche, à la langue. Les paupières lourdes aux longs

cils noirs et recourbés. Et enfin les yeux étonnants qui avaient toujours été pour

Qhuinn une malédiction— la Glymera des vampires n’acceptant pas la moindre

imperfection physique chez un de ses membres.

Il est à moi.

— Qhuinn ? murmura Blay.

— Hmm ? marmonna le mâle en levant un sourcil interrogateur.

— Tu es à moi.

En réponse, Qhuinn eut un immense sourire qui exposa ses longues canines

blanches et pointues.

— Pas de problème. Ça me botte. Je veux bien être à toi.

Seigneur, pensa Blay. Combien de temps avait-il dû attendre pour que tout ça

devienne réalité ? Pour entendre ce vœu qui scellait le destin d’un vampire

dédié : « Je suis à toi » ? Il sentait un feu intérieur brûler en lui tandis que les

mots de Qhuinn résonnaient en boucle dans sa tête. « Á toi. Á toi… »

Qhuinn se pencha et l’embrassa, prenant et reprenant sa bouche, dans un

baiser qui dura un temps infini. Mais soudain, la passion revint en force. La

langue de Qhuinn se fit agressive, tandis que ses hanches pesaient plus

fortement contre Blay. Ensemble, les deux mâles poussèrent un long cri

rauque— mi-gémissement, mi-grognement.

Quand ils durent se séparer, à bout de souffle, Blay appuya sa tête dans

l’oreiller, renversant le cou sur lequel Qhuinn se jeta voracement. Blay sentit la

jouissance monter d’un seul coup, et lutta pour ne pas exploser trop vite.

Comme s’il le devinait, Qhuinn se mit à rire et se remit à genoux. Cette fois, il

enleva complètement le pantalon de Blay.

Puis il se releva pour se déshabiller aussi. Le corps nu du mâle était

absolument splendide. Mais Blay referma les yeux quand Qhuinn revint se

placer entre ses jambes… et qu’il frotta son visage contre son sexe raidi. Quand

son ami utilisa ses mains et sa langue, Blay perdit la tête et cria de plaisir.

Seigneur, avec un mâle aussi généreux en amour— et aussi doué de nature— il

n’allait pas durer longtemps. Il était déjà au bord de l’orgasme.

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— Regarde-moi, demanda Qhuinn d’une voix incroyablement sensuelle.

Blay rouvrit des yeux vitreux, et vit Qhuinn qui le caressait de la langue, les

yeux fixés sur lui. Bon sang, quelle sensation. Il comprenait soudain l’intérêt

d’avoir un piercing sur la langue. C’était une expérience incroyablement

sexuelle, à couper le souffle. Il se sentait vidé de toute énergie— N’arrivait plus

à respirer— Serrait désespérément les draps dans ses poings…

Et pourtant Qhuinn ne s’arrêtait pas. Et gardait le regard rivé sur lui tandis

que sa tête montait et descendait, que sa langue s’activait impitoyablement. Blay

releva les genoux, conscient que ses cris résonnaient dans la chambre. Conscient

aussi que Qhuinn se caressait d’une main… et gémissait en même temps que lui.

Quand Blay sentit monter son orgasme, il chercha d’abord à s’écarter, mais

Qhuinn l’en empêcha. Secoué de spasmes, Blay tordit et crispa ses deux mains

sur les cheveux noirs tandis qu’il se vidait à longues giclées brûlantes dans la

bouche de Qhuinn.

Quand il retomba en arrière, sans force, Qhuinn se redressa enfin, et se lécha

les lèvres avant de dire :

— Jouissif.

— Bon sang, haleta Blay, encore sous le choc.

Mais ce n’était pas fini. Qhuinn s’étendit contre Blay et lui chuchota à

l’oreille :

— Je veux que tu me prennes.

Nom de Dieu, pensa Blay, ça allait vraiment arriver. Si son trouillomètre

recommençait à déconner, son corps réagit d’instinct à l’appel de son

compagnon. D’un coup de rein, Blay éjecta le corps de Qhuinn qui pesait sur lui

et le fit rouler sur le lit, avant de le retourner. Il se serrer contre Qhuinn, le front

posé sur sa nuque, et inspira longuement. Leurs deux fragrances épicées se

mélangèrent dans ses narines et ses poumons. Alors seulement, il tendit la main

derrière lui, ouvrit le tiroir de sa table de chevet, en sortit un tube de lubrifiant,

et s’en humecta la paume. Il passa rapidement ses doigts sur son sexe, et revint

coller sa poitrine au dos de Qhuinn qui n’avait pas bougé. Prenant le mâle dans

ses bras, Blay fit courir ses lèvres sur les épaules et les omoplates. Les muscles

de Qhuinn se gonflèrent quand Blay prit le sexe de son ami dans la main, le

caressant sur toute sa longueur, avant de le faire rouler sur les muscles durs du

ventre qu’il avait si souvent regardé. De l’autre main, Blay saisit son propre sexe

qu’il orienta vers le cul parfait qui l’avait si souvent rendu fou. Il remua un

moment de haut en bas, cherchant l’ouverture du corps de Qhuinn. Quand il la

trouva, il inspira un grand coup, et commença à pénétrer son ami. Les deux

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mâles poussèrent ensemble le même grognement d’extase. Une fois le gland

entré, Blay s’arrêta un moment, essayant de réaliser qu’il était réellement en

train de faire l’amour à Qhuinn. Il secoua la tête, puis recommença ses lents

mouvements de va-et-vient pour compléter leur union.

Blay tenait le torse de Qhuinn à deux bras, et sentit les doigts de son ami

passer derrière lui pour se planter dans ses cuisses. Le visage caché dans la

nuque de Qhuinn, Blay avait les canines longues, douloureuses et avides. Il céda

soudain à son envie et les planta dans la peau du cou de Qhuinn. En même

temps, ses hanches eurent un mouvement spasmodique en avant, et Qhuinn

poussa en arrière— le faisant rentrer tout du long. La sensation était incroyable,

enivrante, unique. Blay baissa les mains, et se mit à faire l’amour à Qhuinn, en

le caressant au rythme de ses coups de reins.

Pour que l’acte soit absolument parfait, Blay avait besoin du sang de Qhuinn.

Il avait déjà planté ses canines dans la jugulaire du mâle, aussi il aspira. Et

Qhuinn poussa un sourd grondement, s’agrippant à la main qui le caressait.

Ensemble, ils ondulaient l’un contre l’autre, tandis que Blay savourait le sang le

plus parfait, plus pur, plus riche qu’il ait jamais goûté. C’était meilleur que le

plus onéreux des vieux portos, plus enivrant aussi. Il avait la sensation qu’il n’en

aurait jamais assez. Chaque atome de son corps, intérieur et extérieur, avait

envie de Qhuinn— besoin de Qhuinn. Pour la première fois de sa vie, Blay

comprit le sentiment qui poussait un mâle dédié à tuer tout être qui s’approchait

de ce qui lui appartenait. Dire qu’il avait si longtemps pensé que Qhuinn perdait

la tête avec sa possessivité. Il ressentait exactement la même chose. Et sa

fragrance de mâle dédié se répandit dans la pièce tandis qu’il marquait le mâle

pour sien.

Quand Qhuinn explosa dans sa main en poussa un long cri rauque, Blay avala

goulûment une dernière goulée de sang en jouissant lui aussi, puis lécha les

entailles pour les cicatriser avant de rouler sur le dos, cherchant désespérément à

retrouver son souffle. Il avait la sensation que son cœur allait exploser, et

s’échapper de sa cage thoracique. Á côté de lui, Qhuinn lui prit la main et la

porta à son cœur. Leurs doigts restèrent unis tout le temps qu’ils regardèrent

ensemble le plafond, en attendant que leurs lourdes respirations se calment.

— Tu es un super bon coup, Blay, dit Qhuinn lorsqu’il finit par rompre le

silence.

Blay tourna la tête pour regarder son copain.

— Et ça vient d’un professionnel, pas vrai ? Demanda-t-il avec un sourire.

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Qhuinn se mit à rire mais il avait retrouvé son sérieux quand il roula sur le

côté, se redressa sur un coude et se pencha vers Blay.

— L’expérience n’a rien à y voir, dit-il, les yeux graves. C’est uniquement

quand c’est important que c’est vraiment bon.

Blay hocha la tête, comprenant ce qu’il voulait dire.

— Oui, marmonna-t-il, je sais. C’était… incroyable.

— Tu m’as marqué, remarqua Qhuinn en humant sa peau.

— Tant mieux.

Blay espérait bien que chaque mâle ou femelle dans le monde vampire

comprendrait l’avertissement : Qhuinn était à lui.

Qhuinn se mit à rire, retomba sur le dos, et s’étira longuement.

Soudain, l’estomac de Blay émit un borborygme sonore.

— Merde, je crève la dalle.

— Je n’ai que de la pizza froide à te proposer, dit Qhuinn.

— Génial.

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Chapitre 19

— Tu aurais un truc à me prêter ? Demanda Qhuinn à Blay. Un short par

exemple.

Blay enfila un souple pantalon en nylon et un tee-shirt noirs avant de lui

lancer un short de sport. En général, Qhuinn ne portait pas de rouge. Mais,

c’était sans importance. Il le mit, et récupéra ensuite son tee-shirt blanc.

Pieds nus, ils marchèrent ensemble jusqu’au fond du couloir. Une fois arrivé

devant la porte de l’escalier qui montait à la salle de cinéma, Qhuinn eut un rire

bref.

— Pourquoi ris-tu ? Demanda Blay.

— Oh c’est rien. J’ai juste impression qu’on est déjà passé là tout à l’heure.

Avec un sourire heureux, il passa le bras autour des épaules de son copain.

Cette fois, pensa-t-il, ils pouvaient monter tranquillement. Il sentait la faim de

Blay et tenait absolument à l’assouvir, comme tout mâle dédié digne de ce nom.

Refermant le bras autour du cou du mâle, il frotta pour jouer les jointures de son

poing serré sur le crâne roux. En réponse, Blay lui envoya un coup de coude

dans les côtés. Ils éclatèrent de rire ensemble.

Une fois au second étage, Qhuinn ouvrit la porte en grand pour laisser passer

Blay. Qui resta figé à peine entré, les yeux rivés sur le logo de la Xbox qui

parcourait l’écran de veille, flottant d’un coin à l’autre.

— C’est là que tu voulais m’emmener ? Demanda Blay en jetant un coup

d’œil derrière son épaule. C’est notre rendez-vous ?

Qhuinn hocha la tête. Puis il avança jusqu’au bar où il récupéra deux Corona

dans la glace. Il en fit sauter les capsules.

— Waouh, il y a aussi de la bière, dit Blay en riant. C’est le grand jeu.

— Ouais, faut vivre dangereusement.

— Tu as quoi comme jeux ?

Qhuinn se sentait incroyablement heureux de voir à quel point Blay

accrochait à son idée de ranimer leurs meilleurs souvenirs de pré-trans.

— Halo et Guitar Hero, répondit-il en se penchant à travers le bar pour

tendre une bière à Blay. Prends ça.

— Merci, dit Blay qui se laissa tomber dans un fauteuil avant de savourer sa

bière.

— De rien. Ça me fait plaisir.

Et c’était la vérité. Ô combien. Rien ne lui plaisait davantage que de voir son

meilleur ami heureux. Ça le rendait malade de réaliser à quel point il avait été

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moche envers lui ces derniers mois. Il secoua la tête en y repensant. Bordel,

mais quel con !

— À quoi penses-tu ? Demanda Blay d’une voix douce.

Quand Qhuinn leva les yeux, il eut une curieuse sensation en croisant le feu

des prunelles bleu pâle— comme si Blay pouvait lire à travers lui.

— À te nourrir, mentit Qhuinn, puisque tu crèves la dalle.

Il ouvrit l’une des boîtes de pizza, la coupa en morceaux, et en empila

plusieurs dans une assiette qu’il fit glisser vers Blay.

Sans hésiter, Blay prit délicatement l’une des parts et y mordit avec entrain.

Qhuinn le regarda mâcher, puis avaler. Mais ensuite, Blay releva les yeux vers

lui.

— Je ne sais pas si je te l’ai déjà dit, Qhuinn, mais tu mens vraiment très mal.

En plus, je le sens. (Il tapota son nez.) Tu sais bien qu’il n’est pas facile de

mentir à un vampire.

Il eut un sourire qui découvrit ses longues canines, et continua à manger, mais

cette fois, sans quitter Qhuinn des yeux.

Ce fut Qhuinn qui dut détourner le regard. Il fit semblant d’étudier le contenu

de son assiette.

— C’était rien, marmonna-t-il. Je t’en ai déjà parlé d’ailleurs.

Il fit le tour du bar pour prendre un tabouret et s’asseoir à côté de Blay. Puis il

engloutit sa pizza en trois bouchées. Manifestement— par rapport à Blay— ses

manières à table laissaient nettement à désirer.

— Rafraîchis ma mémoire, demanda Blay.

Acculé, Qhuinn laissa retomber ses mains, et tourna la tête pour regarder son

copain.

— Je n’arrive pas à admettre d’avoir été aussi odieux envers toi, dit-il d’une

voix calme.

Puis il reprit une autre part de pizza. Ils mangèrent en silence jusqu’à être

rassasiés. Qhuinn était soulagé de voir que Blay n’insistait pas sur le sujet.

Il se releva et revint vers le bar pour chercher une autre pizza, qu’il coupa

aussi, et partagea entre eux deux. Ils l’avalèrent tout aussi vite que la première.

Puis Blay s’enfonça dans son siège, une main sur l’estomac.

— Ça va nettement mieux.

Qhuinn eut un gloussement, et regarda son copain qui levait les bras au ciel

pour s’étirer, faisant ainsi gonfler tous les muscles de ses bras épais.

— Tu as des bras d’enfer, s’exclama-t-il tout à coup. Je te les ai toujours

enviés.

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Blay baissa les bras, et les examina les sourcils levés, avant de se tourner vers

Qhuinn.

— Pourquoi ça ? Il n’y a rien à redire aux tiens.

— Ils ne sont pas aussi forts. Regarde un peu l’épaisseur de ton triceps, dit

Qhuinn en se penchant pour caresser le muscle du bout du doigt. Et tes épaules,

mec, c’est carrément incroyable.

Il laissa tomber sa main sur son genou.

— Bon d’accord, dit Blay en souriant. Merci. Mais si tu tiens absolument à

établir un catalogue de nos muscles respectifs, je dois avouer que tes

abdominaux sont étonnants. Je les ai toujours trouvés parfaits.

Un frisson sensuel électrisa Qhuinn qui se souvenait de l’épisode dans le

vestiaire— quand Blay lui avait avoué avoir aussi toujours eu envie de toucher

les muscles de son ventre. Il s’agita un peu pour dissimuler son érection, mais le

short était sacrément court. Il ne réussit pas mieux à cacher son désir à Blay que

son mensonge un peu plus tôt.

En captant son excitation, Blay réagit au quart de tour. Pétard, le vampire était

rapide. En une seconde, Blay fut debout devant lui, à l’embrasser voracement,

les poings serrés dans ses cheveux noirs. Quand Qhuinn ouvrit la bouche, un

grondement sourd émana de sa poitrine pour s’étouffer contre les lèvres de Blay.

Il sentit les mains de son copain se crisper dans ses cheveux, forçant sa tête en

arrière. Sa poigne était presque douloureuse, mais c’était carrément jouissif. Le

désir qui l’envahit fut si violent qu’il aurait pu en hurler.

Á l’aveuglette, Qhuinn glissa les mains sous le tee-shirt de Blay, découvrant

le torse lisse du vampire dont les muscles durcirent sous ses doigts. Puis Blay

s’écarta et arracha son tee-shirt avant de s’attaquer à celui de Qhuinn qu’il

enleva également. Bordel, le mec était déchaîné. Il plongea son visage dans le

cou de Qhuinn, mordillant, embrassant, léchant. Mais Qhuinn avait la sensation

que son sexe était une bombe prête à exploser, avec un minuteur à très court

terme. Il prit Blay par la taille et pressa son bas-ventre contre lui, serrant les

hanches du mâle entre ses cuisses. Puis ses doigts se crispèrent sur les reins

musclés pour incruster encore plus le corps dur contre le sien.

Les mains de Blay étaient toujours emmêlées dans ses cheveux, alors qu’il

grognait et gémissait dans son cou. On aurait dit qu’il savourait le plus délicieux

et décadent chocolat que l’argent pouvait acheter. Soudain, les bras de Blay le

lâchèrent et passèrent sous ses aisselles, le forçant à se lever. Blay glissa le long

du corps de Qhuinn, mordillant sa peau en chemin, avant de tomber à genoux, le

visage collé à ses abdominaux. Qhuinn secoua la tête. Ça ne lui paraissait pas

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bien de voir Blay agenouillé devant lui. Mais il n’arrivait pas à trouver le

courage de l’interrompre. Surtout pas quand une bouche brûlante engloutit son

sexe. Les jambes coupées, Qhuinn s’écroula contre le bar, serrant à deux mains

le visage de son copain, caressant les joues qui se creusaient au rythme saccadé

des succions.

Bordel, il n’allait pas durer longtemps. Déjà, il n’en pouvait plus. Il s’agrippa

à Blay pour le relever, le fit pivoter, le pencha en avant contre le bar. Puis il fit

glisser le pantalon souple qui tomba sur les chevilles du mâle. En le pénétrant,

Qhuinn poussa un grognement si sonore qu’il ne put entendre la réaction de

Blay. Il se mit à agiter les hanches de façon spasmodique, lancé dans une

frénésie aussi implacable qu’un train à pleine vitesse. Qhuinn se pencha

cependant en avant, serrant dans ses bras son copain, pour coller son visage dans

son dos. La peau brûlante du vampire vibrait contre ses lèvres, trahissant ses

gémissements.

Qhuinn finit par ralentir un peu son rythme, pour mieux savourer leur union.

Il fit glisser ses mains le long des bras du mâle jusqu’à atteindre les doigts qu’il

serra entre les siens. Pesant de tout son poids sur Blay, il continua à le marteler,

jusqu’à ce que l’orgasme qui montait en lui ne puisse plus être dénié. Il se vida

dans un long cri d’extase.

Lorsque Qhuinn se redressa, et s’écarta, il regretta immédiatement la chaleur

brûlante qui avait malaxé son sexe. Mais Blay se retourna, lui prit le visage à

deux mains, et l’embrassa goulument. Parfait, il en voulait encore. Et Qhuinn

était plus que d’accord. Tirant Blay par la main, il l’amena jusqu’à un fauteuil,

et se pencha pour dire à son oreille dans un murmure :

— Je te veux encore.

Il se laissa tomber sur le fauteuil, asseyant Blay sur ses genoux, dos à lui. Puis

Qhuinn glissa en arrière sur son siège, tandis que Blay s’empalait à nouveau. Sa

tête partit en arrière sous le choc de la pénétration. Blay s’agrippa à deux bras

aux accoudoirs et agita les hanches, tandis qu’il se soulevait en rythme au-

dessus de Qhuinn, comme un cavalier sur son étalon.

— Oh bordel, que c’est bon, cria Qhuinn.

Il tendit les mains pour caresser son copain, qui pressa son dos contre la

poitrine de Qhuinn, laissant tomber sa tête sur son épaule tandis qu’ils remuaient

ensemble. Sans interrompre ses caresses, Qhuinn serra ses deux bras autour de

Blay et le couvrit des pieds à la tête, extérieurement et intérieurement, de sa

marque à l’odeur épicée. Qhuinn n’aurait jamais pu imaginer que sa fragrance

soit aussi puissante.

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Quand le rythme s’accéléra, Qhuinn baissa les yeux, laissant les images

torrides de leurs deux corps imbriqués s’incruster à jamais dans son cerveau.

Bordel de merde, il allait encore jouir. Il resserra ses mains sur Blay en ayant la

sensation que son sexe explosait sous la pression de son orgasme. Sa jouissance

déclencha celle de Blay, et leurs cris résonnèrent dans la salle déserte, ricochant

de mur en mur. Les deux mâles restèrent ensuite un moment, immobiles,

essoufflés, heureux.

Puis Blay se dégagea et se coucha à même le plancher, bras et jambes écartés.

Qhuinn se laissa glisser dans son fauteuil, et regarda la poitrine de son copain

monter et descendre au rythme de sa respiration. Quand Blay finit par ouvrir les

yeux, ses prunelles étaient à nouveau lumineuses. Qhuinn était complètement

tétanisé par ce regard.

— Bordel, haleta-t-il, je t’aime vraiment.

Blay ne put retenir un rire.

— Moi aussi.

Avec un sourire, Qhuinn décida que la soirée qu’il avait organisée tournait

encore mieux que prévu.

— Tu es prêt à prendre une branlée dans Guitar Hero ? Demanda-t-il.

Á cette provocation, Blay se redressa sur un coude en ricanant.

— Contre moi, tu n’as aucune chance.

Qhuinn s’extirpa de son fauteuil, et remit son short.

— D’accord, on va voir ça. (Il s’approcha de Blay, et le regarda.) Tu sais, si

tu mets une chaussette sur ta queue, tu pourrais même être Flea, le guitariste de

RHCP. (NdT : Red Hot Chili Peppers, groupe de rock américain formé en 1983

à Los Angeles.)

Blay éclata de rire sonore.

— C’est ça. Je pense que je vais éviter de suivre ta brillante idée.

Qhuinn lui tendit la main pour l’aider à se relever, avant de redescendre les

marches vers les premiers sièges de la salle. Il récupéra deux guitares, et brancha

la Xbox. Lorsqu’il remonta vers Blay, son copain était rhabillé.

— Une bonne chose que John ne soit pas là, dit Qhuinn en tendant une

guitare à Blay. Cet enfoiré nous gagnait toujours.

— C’est vrai, répondit Blay. En attendant, tu peux commencer. Il est normal

de laisser un avantage aux plus faibles.

En entendant, ça, Qhuinn afficha un grand sourire. C’était vraiment comme

autrefois.

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— Tu vas voir ce que tu vas prendre, mec. (Il changea de ton.) Tu veux une

autre bière ?

— Bien sûr.

Mais quand on Qhuinn voulut contourner son copain pour aller jusqu’au bar,

Blay l’en empêcha en disant :

— Qhuinn… (Il se pencha pour déposer sa guitare sur un fauteuil, avant de

serrer Qhuinn dans ses bras.) Tu ne peux pas savoir ce que cette journée

représente pour moi.

Très doucement, Qhuinn tourna juste la tête, et effleura de ses lèvres la joue

du mâle.

— Je sais au moins ce qu’elle représente absolument tout pour moi, dit-il.

— Merci, chuchota Blay.

Qhuinn crut entendre un étranglement étrange dans la voix de son copain.

Aussi il s’écarta un peu et lui prit le visage à deux mains. Bien entendu, les yeux

bleus étaient remplis de larmes.

— Tu valais vraiment le coup d’attendre aussi longtemps, dit Blay.

Devant un tel aveu, Qhuinn embrassa à nouveau son copain, et ferma les

yeux, pour couper court à la violente émotion qui montait en lui. Il n’avait pas

l’habitude d’éprouver des sentiments aussi forts.

Les deux vampires restèrent serrés un moment, avant de se séparer pour

récupérer leur guitare.

— Tu ne m’avais pas proposé une bière ? Dit Blay.

Avec un sourire, Qhuinn se dirigea vers le bar.

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Chapitre 20

Dans la chambre obscure, Blay regardait Qhuinn dormir. Il avait une parfaite

vision nocturne, et savait son copain plongé dans un profond sommeil. Par

contre, il n’arrivait pas à fermer l’œil. Après ce qui s’était passé dans la journée,

il aurait pourtant dû s’écrouler à peine la tête posée sur l’oreiller. Il était épuisé.

Dans la salle de cinéma du second étage, lui et Qhuinn avaient vécu trois

intenses relations sexuelles, et joué à la Xbox cinq heures d’affilée. Quand ils

avaient fini par descendre se coucher, Qhuinn s’était d’abord longuement agité

dans le lit, à se tourner et se retourner, en empêchant Blay de dormir.

Malheureusement, quand son copain s’était enfin endormi, une heure plus tôt,

Blay ne l’avait pas suivi. Et depuis, il n’osait plus bouger pour ne pas le

réveiller.

Il tourna la tête pour jeter un coup d’œil sur le réveil posé sur sa table de

chevet. 16h00. Il leur restait encore quelques heures avant la tombée de la nuit.

Pour Blay, ça signifiait surtout encore quelques heures avant l’arrivée d’une

Élue. Il n’avait pas mentionné à Qhuinn ce petit détail. Cette sacrée tête de mule

aurait recommencé à prétendre en long et en large qu’il ne voulait boire ni de

Layla ni d’une autre— aussi Blay avait-il pris les choses en mains. Vu que Layla

était au déjà au courant de la situation entre eux, elle était le choix le plus

évident. Blay comptait bien obliger, d’une manière ou d’une autre, Qhuinn à

accepter sa veine, même s’il devait attacher le mâle et lui maintenir la bouche

ouverte pendant que Layla y laissait tomber son sang.

À nouveau, il reporta son attention sur Qhuinn. Endormi, son ami avait

l’innocence de l’enfance avec ses traits détendus et son visage adouci. Il avait

les deux mains serrées sous sa joue, et ses cheveux noirs barraient la blancheur

de l’oreiller. Il semblait avoir un sommeil serein. Aussi Blay ne céda-t-il pas à la

tentation de tendre la main pour vérifier que la présence de Qhuinn à ses côtés

n’était pas juste un rêve, né de son imagination.

Blay détournait la tête quand il sursauta. La chandelle posée sur la commode

venait de s’allumer. Il ramena les yeux vers Qhuinn… Qui le regardait, la tête

enfouie dans son oreiller, avec un sourire dont on ne voyait que la moitié.

— Je t’ai réveillé ? Demanda Blay à voix basse.

— Non, marmonna Qhuinn, en roulant sur le dos. Viens ici. J’ai envie de te

sentir tout contre moi.

Tout en parlant, il avait tendu les bras, et Blay s’y glissa sans se faire prier.

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Contre le torse de Qhuinn, la tête posée sur son cœur, Blay ferma les yeux,

quand son ami se mit à lui frotter le dos, de haut en bas.

— Tu n’as dormi longtemps, dit Blay.

Qhuinn ne répondit pas tout de suite. Blay se demanda même s’il s’était à

nouveau assoupi.

— C’est vrai, finit-il cependant par avouer à mi-voix. Mais c’est souvent le

cas en ce moment.

Bien sûr, pensa Blay, parce qu’il n’a pas pris une veine depuis trop

longtemps— la réaction normale de son organisme au manque de sang.

— Je sais très bien à quoi tu penses, marmonna Qhuinn.

Blay se mit à rire. Comme Qhuinn n’ajoutait rien, au bout d’un moment, il se

décida quand même à poser la question.

— Pourquoi refuses-tu de prendre une veine ?

— Je n’ai jamais dit ça.

Blay releva la tête pour croiser le regard de son copain.

— Pourrais-tu simplement répondre à la question ? (Il posa ses deux coudes

sur la poitrine de Qhuinn, et soutint son menton dans ses mains.) Tu ne fais

qu’éviter le sujet.

Qhuinn le regarda, avec des yeux étincelants dans la lumière ambiante de la

bougie.

— Tu n’as pas besoin d’être désagréable, ricana-t-il.

Blay secoua la tête, et sourit.

— Je n’ai pas l’intention d’être désagréable, mais j’aimerais bien avoir une

conversation sérieuse. Si nous restons—

Il s’interrompit net.

— ... ensemble, termina Qhuinn. Et pourquoi dis-tu ça ? Bien sûr que nous

restons ensemble.

Blay se sentit envahi un profond soulagement. Même si tout n’était qu’un

rêve, il priait le ciel de ne jamais se réveiller.

— À moins que tu ne sois pas certain de vouloir rester avec moi ? Insista

Qhuinn.

Blay roula les yeux. Alors là, c’était vraiment la question la plus con qu’il ait

jamais entendue, pas à dire. Il ramena son regard sur Qhuinn, et dit d’une voix

intense :

— Tu ne crois pas qu’on devrait sérieusement en parler ?

Qhuinn se renfrogna, et détourna le regard. Blay se redressa, s’étira, et soupira

longuement. Bien entendu, avec Qhuinn, tout était toujours compliqué. Tandis

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que le silence s’éternisait, Blay roula sur le dos, et réfléchit aux arguments qu’il

pourrait utiliser pour convaincre Qhuinn. Comment faire rentrer un peu de bon

sens dans une tête aussi dure ?

— Je n’ai jamais été normal, dit Qhuinn à voix basse, coupant court aux

cogitations de Blay. (Qui tourna la tête pour regarder son copain. Qhuinn avait

le regard rivé au plafond.) Toute ma vie, je n’ai souhaité que ça : Être normal.

Et si j’ai tellement lutté contre l’attirance que j’éprouvais pour toi— en plus du

fait évident que tu méritais bien mieux— c’était aussi à cause de cet a priori.

(Qhuinn lui jeta un regard en biais, et eut un petit rire, avant de recommencer à

fixer le plafond.) Ouais, prendre un mâle pour compagnon ne me semblait pas

normal. Parce que la Glymera ne l’accepte pas. Je ne voulais pas ajouter une

autre charge à toutes celles que je portais déjà.

Qhuinn s’arrêta un moment.

Blay le regardait, sans trop savoir quoi dire. Il n’arrivait pas à comprendre

comment sa question sur la nécessité de prendre du sang avait abouti à cette

conversation. Mais avant qu’il puisse intervenir, Qhuinn tourna la tête, et lui prit

la main. Ses yeux étranges— un vert, un bleu— brillaient de joie.

— En vérité, Blay, pour la première fois de ma vie, je me sens normal

aujourd’hui. Être avec toi est la seule chose que j’aie jamais connue qui me fasse

un tel effet. Si je refuse de prendre une veine, c’est parce que ça m’énerve. C’est

trop injuste, merde. Ton sang est fort, pur, parfait. Si une femelle le buvait, elle

en obtiendrait tout ce dont elle a besoin. Mais pour moi, ton sang est comme de

l’eau. C’est vraiment chiant.

Blay se rassit, sans lâcher la main de Qhuinn.

— Je comprends très bien ton sentiment. D’ailleurs, je ne suis pas normal

non plus et—

— Toi, tu es parfait, coupa Qhuinn.

Blay sourit.

— Et je te trouve tout aussi parfait. (Pour la première fois, Qhuinn ne discuta

pas une telle assertion.) Ce que je voulais dire, c’est que nous ne pouvons rien y

changer. Nous avons été créés comme ça, il faut faire avec. Tu as besoin de

sang.

— Je sais, soupira Qhuinn. Mais ça m’énerve quand même.

— Qhuinn, il n’en faut jamais beaucoup pour t’énerver. (Blay éclata de rire.)

De plus, tu as tort. Il n’y a rien de sexuel à prendre la veine d’une femelle. Nous

l’avons fait ensemble des centaines de fois.

Qhuinn eut un sourire timide.

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— Mais nous n’étions pas encore des mâles dédiés l’un à l’autre. Et si tu

veux mon avis, ça ne va pas être évident pour moi de te voir boire sur une autre.

Il y a des instincts sacrément violents qui nous échappent.

— Je pense qu’on peut gérer ça.

— On verra bien.

Blay regarda à nouveau son réveil.

— Oui, on le verra même d’ici peu, parce que Layla doit arriver dans une

heure. (Il s’attendait à une violente réaction. Mais à part lever un sourcil, Qhuinn

ne broncha pas.) J’ai pensé que ce serait plus facile avec elle, parce qu’elle est

déjà au courant pour nous deux.

Qhuinn se mit à rire.

— Tu parles ! Tous ceux qu’on va croiser le devineront immédiatement. On

n’a pas arrêté de mélanger nos fragrances, mec, et ça fait un cocktail plutôt

détonant. Je te parie que notre petit secret sera très vite éventé.

— Tant pis, dit Blay en haussant les épaules.

— Bon, alors Layla va venir, soupira Qhuinn qui se remit à fixer le plafond.

Il avait l’air si sombre que Blay lui prit le visage entre ses paumes. Et

l’embrassa avec ferveur. Qhuinn répondit avec le même élan, serrant la nuque de

Blay à deux mains pour l’attirer plus près. Tandis que leurs lèvres et leurs

langues se mêlaient et se caressaient, Blay fut tenté de continuer durant des

heures, mais c’était impossible. Ils devaient se préparer à accueillir l’Élue. Aussi

il s’écarta lentement, frotta son nez contre celui de Qhuinn, puis il posa son front

contre celui de son ami pour le regarder droit dans les yeux.

— Je voudrais juste te dire, murmura-t-il, tu es peut-être différent, mais

j’adore ça.

— Je vais prendre la veine de Layla, dit Qhuinn en fermant les yeux. Mais je

ne peux pas te promettre d’être capable de regarder quand tu le feras.

— D’accord, dit Blay.

— Et ne t’avise plus jamais de t’approcher de son cou, gronda Qhuinn.

Blay glissa sa bouche jusqu’à la veine qui battait le long de la gorge du mâle.

— Bien sûr que non, haleta-t-il contre la peau. Je préfère le tien.

Après avoir senti Qhuinn déglutir, Blay le lâcha et se rassit, puis roula hors du

lit.

— Tu es vraiment un allumeur, grogna Qhuinn en secouant la tête, tu devrais

avoir honte.

Quand le mâle étira son long corps sur le lit, son sexe dressé dessinait un mât

de tente sous les draps. Avec un éclat de rire, Blay partit vers la salle de bain.

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— Allez, prépare-toi, dit-il par-dessus son épaule avant de refermer la porte.

Une fois à l’intérieur, il s’adossa au panneau, et soupira. Ça n’allait pas être

évident.

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Chapitre 21

Qhuinn était dans la salle de bain, penché en avant, à se frotter énergiquement

les cheveux avec une serviette, quand il vacilla et se rattrapa de justesse au

comptoir de marbre du lavabo. Seigneur, il avait comme un vertige. Il laissa

tomber sa tête, et prit plusieurs profondes inspirations. Quand il pensa avoir

récupéré son équilibre, il rouvrit les yeux et vit la serviette par terre. Se pencher

pour la récupérer n’était pas une bonne idée. Il ouvrit son tube de gel, en mit une

noisette dans ses mains, et passa les doigts dans ses cheveux. Il se figea soudain

en apercevant son reflet dans la glace— comme si la mort le regardait en face. Il

détourna les yeux, ébouriffa une dernière fois ses cheveux, et quitta la salle de

bain, éteignant mentalement les lumières derrière lui.

Une fois dans sa chambre, il passa dans sa penderie, où il opta pour un jean

noir A&F et un pull noir au col en V. Il mit aussi ses bottes, sans se donner la

peine de serrer les crochets. Il était encore en train de mettre sa ceinture dans les

passants de son jean quand on frappa à la porte.

Il alla ouvrir, pensant qu’il s’agissait de Blay. Et trouva Layla dans le couloir.

En la voyant, il laissa retomber les bras, conscient qu’il serrait les poings.

— Qu’est-ce que tu fous là ? Demanda-t-il d’une voix dure.

Avec un regard effrayé, la femelle recula lentement, avant de dire :

— Mais messire, j’ai été convoquée.

— Certainement pas par moi.

— Non, messire. J’ai été convoquée par Blaylock.

Une brève seconde, Qhuinn eut la sensation d’être parfait salaud de la traiter

comme ça. Après tout, il l’avait un moment draguée avant de la laisser tomber

comme une vulgaire pétasse. Mais sa gêne ne dura pas quand il se souvint du

petit cinéma qu’elle avait joué à Blay. Ouais, en y repensant, il avait même

sacrément envie de lui arracher la tête. Il ne voyait pas comment il pourrait

prendre la veine de cette foutue salope en imaginant Blay à son cou.

Qhuinn termina d’enfiler sa ceinture, puis avança vivement jusqu’à Layla.

Une fois en face d’elle, il la pointa d’un doigt menaçant :

— Tu ne l’appelles pas Blaylock. Et dorénavant, à moins que je t’appelle

moi-même, tu ne fous pas un seul pied dans cette putain de chambre. C’est bien

clair ?

— Oui… messire, bafouilla-t-elle.

— Va t’asseoir, dit Qhuinn avec un geste vague vers un siège.

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Il traversa la chambre pour récupérer son téléphone sur sa table de chevet, et

appela Blay.

— Amène-toi, ordonna-t-il. Et vite.

En attendant son copain, il arpenta la pièce, les bras croisés sur la poitrine. Il

savait que Layla le regardait, mais sans oser émettre un mot. Blay finit par

arriver. Il entra sans frapper et poussa un soupir de soulagement en trouvant la

situation relativement stable. Le visage dur, Qhuinn surveillait Layla pour

s’assurer qu’elle ne faisait pas de l’œil à Blay. Après tout, le mec était

franchement magnifique dans un pantalon gris et une chemise blanche. Il portait

avec une ceinture haute couture et des mocassins de prix. Qhuinn eut un léger

sourire en remarquant que son pote avait aussi mis ses nouveaux boutons de

manchettes— avec le crâne et les tibias croisés.

— Pourquoi as-tu mis si longtemps ? Demanda Qhuinn.

— N’exagère pas. Ça ne fait pas une minute que tu m’as appelé.

Tous les deux se tournèrent en même temps pour regarder Layla.

— Votre lien est vraiment très fort, dit-elle à mi-voix.

— Non sans blague, grogna Qhuinn. Et maintenant écoute, voilà comment ça

va se passer—

— Qhuinn, coupa Blay. Tu n’as pas à être aussi désagréable. Elle nous rend

service. De plus, nous avons déjà pris sa veine auparavant, pas vrai ? Alors, elle

connaît le processus.

— Mon cul, répondit Qhuinn, en levant la voix. (Il se tourna vers Layla.) Il

ne boira pas à ton cou. Je te l’affirme. Et tu n’as pas intérêt à le toucher. Tu

restes assise là, comme une potiche, et tus fais ton boulot, compris ?

— Qhuinn, du calme. Assieds-toi, dit Blay en le tirant par le bras pour le

faire asseoir sur le lit. Reste tranquille. Ça va très bien se passer.

— Vas-y d’abord.

Blay se frotta la paume des mains sur le visage, et soupira.

— Je n’ai pas réellement besoin de sang, dit-il calmement. Aussi je

préférerais que tu commences. Parce que si tu t’énerves et que tu fiches le camp

sans avoir bu, on sera revenu à la case départ.

— Vas-y d’abord, répéta Qhuinn buté. Toi, l’Élue, viens ici.

Layla se leva, et approcha du mâle d’un pas prudent. Mais elle ne montra

aucune crainte en s’asseyant à ses côtés. Qhuinn lui prit la main, posa le poignet

fin sur sa cuisse, regarda Blay... Et remarqua qu’il frémissait à la vue d’un

contact physique entre lui et Layla. Pourtant, il se contint.

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Blay s’accroupit sur le tapis avant de placer une main sur l’avant-bras de

Layla et l’autre sur le genou de Qhuinn.

— Je vous remercie, Élue, murmura-t-il.

Il baissa la tête, et planta ses dents dans la veine offerte. Tandis qu’il aspirait,

Qhuinn ferma très fort les yeux, et attendit que la torture se termine. Il

chantonnait dans sa tête un air Metallica, (NdT : Groupe de heavy metal

américain formé en 1981,) pour faire passer le temps plus vite. Et ça semblait

fonctionner. Il ne rouvrit les yeux que quand Blay tapota sa jambe.

Avec un clin d’œil, Blay se releva, et s’assit de l’autre côté de Layla.

Qhuinn se redressa, et arpenta un moment le tapis de long en large. Aucun des

deux vampires ne dit un mot, tandis qu’ils attendaient avec patience qu’il se

décide. Qhuinn finit par se tourner vers Blay, en le regardant dans les yeux.

— Je vais le faire, haleta-t-il entre, d’une voix enrouée, le souffle court.

Blay ne changea pas d’expression, et continua à attendre.

— Élue, lève-toi, demanda Qhuinn doucement, sans quitter Blay des yeux.

La femelle se leva sans poser de questions. Qhuinn s’assit sur le lit, et indiqua

par geste à Layla de s’agenouiller devant lui. Lorsqu’elle lui obéit, la longue

robe blanche qu’elle portait s’écarta, révélant ses cuisses jusqu’à l’aine.

— Couvre-toi, ordonna Qhuinn, d’une voix dure.

— Je suis désolée, s’excusa-t-elle, en ramenant sur ses jambes les pans de sa

robe.

Quand Qhuinn sentit dans son dos le poids de la main de Blay, il tourna à

nouveau les yeux vers son copain.

— Ça va aller, murmura Blay.

Qhuinn hocha la tête, et inspira longuement. Puis il revint vers Layla et prit

son bras. Immédiatement, ses canines s’allongèrent, avides et douloureuses. La

salive lui envahit la bouche dès qu’il leva le poignet à ses lèvres. Il planta les

dents dans la peau et se mit à aspirer. Quand le sang coula dans sa gorge, la

frénésie commença. Bordel, il avait tant attendu qu’il risquait probablement de

la vider. Il avait les deux mains agrippées à son bras, à peine conscient que Blay

était assis à côté de lui. Secoué par le plaisir qu’il prenait à boire, il poussait

inconsciemment des gémissements d’extase. D’un seul coup, il huma une odeur

d’excitation sexuelle qui émanait de Layla. Mais il ne pouvait plus s’arrêter de

boire. Il en avait trop besoin.

— Layla, arrête, dit Blay d’une voix vibrante.

Qhuinn continuait à boire avidement.

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Tout se termina si brutalement que Qhuinn n’eut pas le temps de réaliser ce

qui se passait. Quand il leva les yeux, il vit que Blay écrasait Layla contre un

mur, et que les hurlements perçants de la femelle résonnaient dans la pièce. Il

fallut un moment à Qhuinn pour reprendre pied dans la réalité, puis il se

précipita sur son copain et voulut libérer l’Élue. Mais en vain. Blay tremblait de

rage, les deux mains serrées sur les épaules de la femelle qu’il secouait

violemment. Qhuinn essaya de lui faire lâcher prise, mais Blay était au-delà de

tout raisonnement conscient. D’un seul coup, les cris de Layla s’arrêtèrent net

parce que Blay l’avait saisie à la gorge.

— Blay, lâche-la, hurla Qhuinn, toujours accroché à son bras.

Tout à coup, la porte s’ouvrit brutalement. Vishous, Rhage et Butch entrèrent

en courant. Rhage et Butch s’occupèrent d’arracher Blay à sa proie, le prenant

chacun d’un côté et l’entraînant de l’autre côté de la pièce. Qhuinn regarda son

copain heurter du dos le mur avant de glisser par terre, comme une poupée

cassée, les jambes étendues devant lui. Blay secoua la tête, serra le haut de son

nez entre deux doigts, et commença à se balancer tandis que Rhage et Butch le

surplombaient et le regardaient faire, sidérés.

Après un bref coup d’œil à Layla, que Vishous examinait, Qhuinn traversa la

chambre pour aller s’agenouiller près de Blay.

— Blay, regarde-moi.

Mais Blay continuait à se balancer d’avant en arrière, le souffle court. Qhuinn

tendit le bras et arracha la main de son copain de son visage.

— Regarde-moi.

Il posa la main sur son épaule pour arrêter ce balancement dément. Cette fois,

Blay leva la tête, et croisa son regard. Seigneur, l’expression horrifiée de ses

yeux était bouleversante.

— Elle n’a rien, dit Qhuinn qui se retourna avec un geste de la main.

Regarde-la, elle est avec V. Elle n’a rien.

Quand il reporta son attention sur Blay, il remarqua que son copain ne le

regardait pas. Il leva les yeux pour vérifier ce que Blay fixait ainsi. Et tomba sur

Rhage et Butch qui les regardaient avec de grands yeux étonnés. Par contre,

Vishous, appuyé sur le mur à côté de Layla, ne semblait pas du tout surpris.

— Dites les mecs, vous pourriez nous laisser maintenant ? Demanda Qhuinn

d’une voix bien plus aimable que d’ordinaire.

Aucun des mâles ne bougea.

En voyant ça, Vishous s’écarta du mur, traversa la pièce, et posa une main sur

chacun de ses deux Frères.

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— Messieurs, je crois qu’on vous à demander de sortir.

Il eut un bref hochement de tête envers Qhuinn, tandis que les deux guerriers,

manifestement à contrecœur, quittaient la pièce.

Vishous revint à Layla, qu’il prit par le bras, avant de sortir de la chambre

avec elle.

— Seigneur, murmura Blay, j’aurais pu la tuer.

Qhuinn posa la main sur la joue de son copain pour le rassurer.

— Mais tu ne l’as pas fait. Je ne t’aurais pas laissé le faire. (Blay secoua la

tête, les yeux baissés.) Blay, ça va aller.

— Non, je ne crois pas.

— Je t’avais bien dit que ces conneries de mâle dédié étaient difficiles à

gérer.

Qhuinn s’installa à côté de Blay, assis par terre, le dos au mur, et tint son

copain par la main. Il ne sut pas au juste combien de temps ils restèrent ainsi

assis, en silence. Mais il avait la ferme intention d’attendre le temps qu’il

faudrait. Qhuinn ne quitta jamais des yeux la tête rousse appuyée sur le mur, les

yeux fermés. Blay n’ouvrit pas les yeux quand un violent coup sur la porte les fit

tous les deux sursauter.

L’odeur du tabac turc embauma la pièce quand Vishous entra.

— Alors, il a récupéré ? Dit le mâle en regardant Blay.

— Comment va-t-elle ? Demanda Blay.

— Très bien. Elle a quelques bleus, mais ils auront disparu dès demain. (Blay

referma les yeux, et ses lèvres remontèrent légèrement sur ses dents.) Allez,

mec, ne sois pas trop dur avec toi. Je suis revenu vous dire que Wrath vous

attend dans son bureau d’ici dix minutes. Tous les deux.

— Je suppose que tout le monde est au courant ? Demanda Qhuinn.

Vishous tira la visière de sa casquette Red Sox sur ses yeux, et ricana :

— À ton avis ? À partir du moment où la pipelette de la maison est au

courant, l’information circule vite.

Bien entendu, Vishous parlait de Rhage. Qhuinn et Blay prirent en même

temps une inspiration profonde, et poussèrent en même temps un long soupir. Ce

qui les fit rire tous les trois.

— Mais ne vous inquiétez pas, ajouta V. Bien sûr, Phury n’apprécie pas trop

de voir bousculer une de ses Élues, mais il s’en remettra. Et puis, chacun de

nous aurait réagi pareil à votre place, moi compris. Alors pas la peine de vous

faire du mauvais sang.

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Quand le Frère se détourna et quitta la pièce, Qhuinn passa le bras sur les

épaules de Blay, qu’il serra contre lui. Puis il embrassa les cheveux roux.

— Ça va aller. Je te le promets, dit Qhuinn en espérant qu’il ne faisait pas un

vœu impossible à tenir.

— Mais de quoi tu parles ? Je ne m’inquiète pas du tout, affirma Blay d’un

ton sarcastique.

— Tu es très beau dans ces vêtements, dit Qhuinn. Je n’ai pas eu l’occasion

de te le dire plus tôt.

Blay se redressa, et eut un demi-sourire.

— Merci. (Il marqua une pause.) Je peux te poser une question ?

— Bien sûr.

— As-tu pris assez de sang ?

— Ouais. (Qhuinn hocha la tête, et eut un sourire penaud.) À la fin, c’était

juste de la gourmandise.

Blay se pencha pour l’embrasser doucement. Qhuinn était certain que son

copain s’était inquiété que sa crise de folie ait été à ses dépens. Et que Blay se

sentait mieux que ce ne soit pas le cas.

— Pourquoi as-tu réussi à te retenir, et pas moi ? Demanda Blay.

— Grâce à Enter Sandman, répondit Qhuinn.

— Pardon ?

— D’abord, je n’ai pas regardé. Ensuite, je chantais dans ma tête Enter

Sandman, un air de Metallica. Et ça a bien marché. La prochaine fois, tu devrais

essayer.

Cette fois, Blay rit franchement.

— Ça serait aussi bien, dit-il. Mais la prochaine fois… je ne veux pas de

Layla.

— Ça, c’est sûr, approuva Qhuinn avec conviction. Bon, alors on y va ? Tu te

sens prêt ?

— Non, mais attendre n’arrangera pas les choses.

Qhuinn se releva, et tendit la main à Blay pour l’aider. Puis il l’attira dans ses

bras et le serra fort, avant de passer son bras autour de sa taille. Ils allèrent ainsi

jusqu’au bureau de Wrath, tout au bout du couloir. Qhuinn ne relâcha sa prise

que lorsqu’ils se retrouvèrent devant la porte. Il prit une grande inspiration avant

d’entrer, suivi de Blay. La Confrérie au grand complet était réunie, et tous les

yeux de la pièce se braquèrent sur eux, mais Qhuinn garda les siens dirigés sur

Wrath, assis derrière son énorme bureau. Le roi était aveugle, mais Qhuinn

sentit les prunelles cachées derrière d’épaisses lunettes noires lui brûler la peau.

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— Pas trop tôt, les garçons. Je vous… (Wrath s’arrêta net.) Nom de Dieu,

votre fragrance est sacrément puissante. Bon, maintenant tout le monde dehors,

je veux parler seul avec ces deux-là.

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Chapitre 22

— En y réfléchissant, dit soudain le roi en levant la main, j’ai changé d’avis.

Que tout le monde reste.

Il s’adossa à nouveau dans son fauteuil— son trône en fait— et se frotta le

menton. Blay sentit sa nuque vibrer sous la forte pulsation de son sang juste sous

sa peau.

— Tant mieux, dit une voix, ça va être super intéressant.

Blay tourna la tête vers Rhage qui souriait d’une oreille à l’autre. Comment

Vishous avait-il appelé son Frère ? « La pipelette de service ». Oui, ça lui allait

bien.

— J’avoue que tu m’as scié, Qhuinn, continua Hollywood. Je n’aurais jamais

cru que tu fonctionnais à voile et à vapeur. Mais faut dire que tes jeans serrés te

font un cul d’enfer.

— Ravi d’apprendre que tu mates mon cul, répliqua Qhuinn d’un ton

agressif. Est-ce que ça fait de toi une tante ?

— Hollywood a quand même une belle gueule, intervint Vishous.

Rhage éclata de rire.

— Tu n’es pas mal non plus, V, dit-il, mais tu serais bien plus agréable à

regarder sans tous ces poils ridicules qui te déshonorent le menton, mon Frère.

— Ça suffit ! Beugla Wrath en frappant du poing sur son bureau— ce qui fit

sursauter Blay. Il n’y a vraiment pas de quoi rire. Bon sang, vu l’odeur qui règne

dans cette pièce, je croirais presque que Fritz m’a flanqué dans la ventilation une

distillation de mâle dédié. (Il secoua la tête.) Mais ça m’étonnerait.

— À mon avis, dit Vishous, la fragrance est particulièrement puissante chez

eux parce qu’ils se sont marqués l’un l’autre. Vu que c’est un signe distinctif des

mâles, dans leur cas, c’est deux fois plus fort que… ce que tu émettrais pour

Beth par exemple.

— En général, mon Frère, tes avis sont exacts, dit Wrath d’une voix plus

calme.

Pour tenter de calmer son appréhension, Blay examina la pièce et ses

occupants. Les jumeaux, Phury et Zsadist, s’appuyaient contre un mur, côte à

côte, de l’autre côté de la pièce, dans le coin le plus éloigné. Phury semblait en

colère, et Zsadist— et bien, on aurait vraiment cru que le mâle n’avait rien à

foutre de ce qui se passait. Tohr, presque redevenu le guerrier qu’il avait été

autrefois, était assis à l’opposé des jumeaux, dans un affreux fauteuil vert olive.

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Curieusement, son ange gardien, Lassiter, n’était pas là. Près du bureau du roi,

Vishous et Butch partageaient un canapé. Les deux énormes mâles avaient la

même posture, jambes étendues devant eux, bras croisés sur la poitrine. Et on se

demandait comment le meuble délicat supportait un tel poids. En fait, Blay

savait que les pieds avaient été renforcés d’acier. De l’autre côté de Qhuinn, il y

avait John, debout, l’air grave. Et c’était le seul de toute la pièce à ne pas

dévisager Blay. Quant à Xhex, elle n’était pas là.

— Qu’est devenu l’avocat ? Demanda soudain Zsadist.

Que le mâle fasse montre d’un quelconque intérêt était si rare que tous les

autres se retournèrent vers lui, aussi surpris que Blay de sa question.

Butch intervint avant même que Blay ne puisse répondre— et d’ailleurs, il

n’avait aucune idée de ce qu’il aurait pu dire.

— Ouais, Qhuinn, dit l’ancien flic, c’est quand même ton cousin. Je trouve

gonflé de ta part de lui avoir piqué son—

— Il est à moi, gronda Qhuinn.

Butch leva les deux mains, comme pour se protéger.

— Du calme, mec. Je posais juste la question. Pas besoin de m’arracher la

tête.

Cette fois, Blay regarda Qhuinn. Qui semblait prêt à exploser. La mâchoire de

son copain remuait de droite à gauche, comme s’il grinçait des dents. Blay

n’était pas plus heureux que lui de toute cette attention braquée sur eux, mais il

faudrait bien un jour ou l’autre que Qhuinn apprenne à garder son calme. Au

moment même où il se faisait cette réflexion, Qhuinn tourna la tête vers le roi et

dit :

— On pourrait arrêter avec les conneries et en venir aux faits ?

Blay ferma les yeux, et serra très fort les paupières. Il n’arrivait pas à croire

que Qhuinn ait pu parler comme ça à Wrath en public.

— Fils, tu as sacrément intérêt à fermer ta gueule, répondit calmement le roi.

Il y eut plusieurs gloussements étouffés dans la pièce.

Blay inspira profondément, se souvenant qu’il était quand même la cause

essentielle de cette sommation. Et pourtant, il n’avait pas réussi à proférer un

seul mot depuis qu’il était entré dans le bureau. Réalisant soudain qu’il valait

mieux ne pas laisser Qhuinn continuer à le défendre, Blay réunit son courage et

leva la main.

— Puis-je dire quelque chose, Monseigneur ? Demanda-t-il.

Wrath poussa un soupir, et hocha la tête.

— Vas-y.

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Blay jeta un bref coup d’œil à Qhuinn, avant de concentrer son attention sur le

roi.

— Bien entendu, j’assume la pleine responsabilité de ce qui s’est passé avec

l’Élue. Mais avec tout le respect qui vous est dû, Monseigneur, je voudrais…. (Il

s’arrêta, et regarda à nouveau Qhuinn.) Nous voudrions ne pas avoir à exposer

les détails de notre relation privée. Après tout, je ne pense pas que quiconque ici

apprécierait de voir son couple décortiqué en public. Qhuinn a été plutôt brutal,

mais cette réunion a quand même débuté comme une tribune ouverte. Sans

vouloir vous offenser.

Tout le monde dans la pièce se figea un silence total tandis que Wrath

réfléchissait, les sourcils froncés. Blay ne craignait pas d’admettre que le roi lui

semblait plutôt terrifiant, et qu’il attendait sa réponse avec inquiétude.

— Très bien… Dit Wrath après un moment. Pour commencer, Qhuinn, ce

serait bien que Blaylock ici présent t’enseigne les bonnes manières. (Quelques

rires brisèrent la tension de la pièce, et soudain, l’atmosphère parut plus

détendue— sauf pour Qhuinn et Blay, bien entendu.) Ta requête est parfaitement

respectable, je l’accepte, et j’attends la même chose de tous les membres de la

Confrérie. Plus personne ne discutera de la façon dont chacun choisit d’utiliser

sa queue. C’est bien compris ? Insista Wrath en élevant la voix.

— Oui, Monseigneur, répondirent en chœur tous les vampires de la pièce.

— Hollywood ?

— Je suis là, ta Majesté, répondit le mâle.

— Est-ce que c’est bien compris ? Demanda Wrath, en insistant sur chaque

mot.

— Parfaitement, dit Rhage, d’un ton gouailleur.

— Bien. Et maintenant, revenons-en aux affaires en cours. (Wrath recula son

fauteuil, et posa ses lourdes bottes de combat sur son bureau, les chevilles

croisées. Blay aperçut alors Georges, le chien du roi, caché sous le bureau de

son maître. Wrath secoua la tête.) Nous avons un problème. Plus question que je

vous laisse désormais combattre ensemble.

— Il n’y a aucun problème, dit Qhuinn, la voix étonnamment calme. Il ne se

passera rien.

Cette fois, Phury se détacha du mur pour s’approcher de lui.

— Tu déconnes ou quoi ? Tu viens de constater ce qui se passe quand un

mâle dédié pète un câble. Si quelque chose arrive à Blaylock, tu ne pourras pas

mieux te contrôler. Et il y a de grandes chances pour ça fasse tuer l’un de vous.

Ou même les deux.

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— Je suis d’accord, intervint Blay.

Qhuinn tourna la tête vers lui d’un geste violent.

— Bordel, mais qu’est-ce que tu racontes ?

— Il a raison, Qhuinn. Nous en avons déjà discuté. Tu dois pouvoir te

concentrer sur John.

Blay détourna les yeux, mais Qhuinn lui agrippa le bras, et le secoua, le

forçant à croiser son regard.

— C’est complètement con ! hurla-t-il. Je n’ai jamais eu aucun problème

jusqu’ici à combattre à tes côtés, tout en gardant un œil sur John.

Blay arracha son bras de la prise de son copain.

— Est-ce que tu ne pourrais pas… (Il s’interrompit, et se frotta le visage à

deux mains, avant de les laisser retomber pour regarder à nouveau Qhuinn dans

les yeux.) Est-ce que tu ne pourrais pas— au moins cinq minutes dans ta vie—

fermer ta grande gueule ?

Cette fois, Qhuinn en resta bouche bée, absolument sidéré. Puis il eut un

grand geste des mains.

— D’accord. N’importe. D’ailleurs, j’en ai rien à branler.

Les bras croisés, le visage fermé, livide de rage, il s’appuya contre le mur.

Blay soupira, regrettant déjà son éclat— surtout dans ce contexte.

— Je suis désolé. Je ne voulais pas dire ça.

Mais Qhuinn ne répondit pas.

— Déjà une scène de ménage ? dit Rhage en ricanant.

— Nom de Dieu, Hollywood ! Aboya Wrath. C’est toi qui devais apprendre à

fermer ta gueule cinq minutes de suite. À moins que tu n’aimes trop t’entendre

parler ? (Wrath marqua une pause.). Ouais, je suppose que c’est le cas. Depuis le

temps que ça dure, c’est la seule réponse possible. (Il secoua la tête.) Bon, voilà

comment ça va se passer à partir d’aujourd’hui. Et j’en ai rien à foutre que ça

vous plaise ou non. Qhuinn, tu as un boulot à accomplir. Et c’est ce que tu

continueras à faire. Blay, tu sortiras avec les autres. La discussion est close. Ah

non, il reste encore le problème des Élues. Phury, que décides-tu à ce sujet ?

— Plus question qu’ils soient ensemble à l’avenir pour prendre une veine,

répondit le Primâle. Et si jamais un autre incident se produit, j’assisterai moi-

même aux sessions pour protéger la femelle.

Comme pour les gosses, pensa Blay, morose. Il était certain que Qhuinn allait

réagir à cette sentence. Mais ce ne fut pas le cas.

— Qhuinn ? Insista le roi. Je tiens à ce que tu n’oublies pas la raison

essentielle de ta présence ici. C’est bien compris ?

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— Oui, Monseigneur, marmonna Qhuinn.

— Bon, vous pouvez dégager, dit le roi. Tous autant que vous êtes.

Qhuinn fut le premier à quitter la pièce, bousculant presque Blay au passage.

Mais John posa le bras sur les épaules de Blay, et le raccompagna dans le

couloir, jusqu’à la porte de Qhuinn.

— Je suis là si tu as besoin de parler, indiqua John par signes. Je sais que

Qhuinn est une vraie tête de mule. Tu vas nous manquer au combat. Mais je

comprends.

— Merci mec, dit Blay qui envoya une claque sur la large épaule du mâle.

Bien sûr que John comprenait. Merde, en tant qu’ahstrux nohtrum de John,

Qhuinn était condamné à être son ombre. En vérité, Blay était effondré à l’idée

de ne plus sortir avec ses deux copains. Mais le plus important était qu’ils

restent tous en vie. La Confrérie avait besoin de ses soldats. La race avait besoin

de ses guerriers dans la guerre contre la Lessening Société.

— Bonne chance avec lui, indiqua John en désignant la porte de Qhuinn de la

main, puis il se mit à rire et retourna jusqu’à sa propre chambre. Blay souriait en

ouvrant la porte.

Il trouva Qhuinn étendus sur son lit— du moins du côté qui n’était pas

encombré de vêtements jetés en vrac. Le mâle avait un bras posé sur les yeux,

une botte sur le lit, l’autre posée au sol. Dès que Blay arriva près de lui, son

premier geste fut de lui ôter ses bottes, ce qui fut facile parce qu’elles n’étaient

pas attachées. Il les déposa côte à côte sur le sol. Puis ôta ses propres mocassins.

Même dans la chambre de Qhuinn— au milieu du désordre effroyable qui

l’entourait— Blay n’arrivait pas à accepter l’idée de poser des chaussures sur un

lit.

Il se coucha en partie sur Qhuinn, un bras sur son ventre, et frotta son visage

au creux de son cou. Mais l’autre ne bougea pas.

— Je suis désolé, murmura Blay en plantant un baiser sur la mâchoire rigide.

Je t’aime. (Toujours aucune réponse.) Combien de temps vas-tu m’ignorer ?

Seigneur, qu’est-ce que tu peux être entêté !

Qhuinn bougea si vite que Blay n’eut pas le temps de le réaliser. En un clin

d’œil, il se retrouva sur le dos, avec son copain assis à califourchon sur ses

hanches.

— Je ne trouve pas ça drôle, marmonna Qhuinn, tout en déboutonnant la

chemise de Blay.

— Mais je ne ris pas, protesta Blay. Je me suis même excusé.

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— Même si tu ne combats pas avec John et moi, je serai quand même inquiet

pour toi. De quoi niquer une partie de ma concentration, pas vrai ?

En sentant les mains de Qhuinn caresser de haut en bas sa poitrine nue, Blay

eut une réaction immédiate— son sexe devint lourd et rigide dans son pantalon.

— Nous pourrions sortir en alternance, dit-il. Comme ça, tu n’auras pas à

t’inquiéter pour moi. Et quand je serai dehors, tu pourras toujours noyer tes

soucis dans la tequila— ou bien améliorer ton jeu au billard en m’attendant. (Il

se mit à rire.)

Qhuinn souleva le bas de son tee-shirt qu’il enleva et jeta n’importe où

derrière lui. Instinctivement, Blay tendit les mains et les serra sur la taille de

Qhuinn, caressant du pouce les muscles pelviens dont il ne se lassait pas.

Qhuinn se pencha pour l’embrasser dans le cou.

— Et toi ? Murmura-t-il contre sa peau. Est-ce que tu t’inquiéteras pour

moi ?

— Bien sûr, répondit Blay. Mais je sais que tu peux te défendre.

En entendant ça, Qhuinn se redressa.

— C’est quoi ces conneries ? Tu crois que je n’ai pas confiance en toi ? Que

je te pense incapable de te défendre ?

Sa voix restait calme, et il traçait du doigt la ligne de la lèvre inférieure de

Blay.

— Non, grogna Blay, en frottant son sexe contre Qhuinn.

Quelle curieuse conversation à avoir dans un lit avant l’amour, pensa-t-il. Il

n’était pas vraiment concentré sur ce qu’il disait. Il crevait surtout d’envie de

prendre Qhuinn— c’était sa seule priorité. Le reste pouvait attendre.

Qhuinn leva un sourcil interrogateur, comme si Blay s’était exprimé à voix

haute.

— Tu veux me baiser ? Demanda-t-il en ricanant.

À cette suggestion, la respiration de Blay devint difficile. Il continua à

caresser les abdominaux serrés de son copain.

— Oui, haleta-t-il. Comme ça. Dans cette position. Je veux pouvoir te voir en

te prenant.

— Comme ça ? Comme une pute ?

Le ton était franchement provocateur, la voix gouailleuse. Sans pouvoir s’en

empêcher— et malgré le risque de déclencher un nouvel éclat— Blay décida de

remettre son copain à sa place.

— Pourquoi pas ? Tu agis comme une pute.

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Curieusement, Qhuinn éclata de rire, sans cesser de caresser du doigt les

lèvres de Blay, dans un effleurement léger et aguichant.

— Très bien, Blay, je vais faire la pute pour toi. Mais d’abord, je veux sentir

ces lèvres sur ma queue. Vas-tu faire ça pour moi ? (Il s’interrompit quand Blay

lécha son doigt, et gémit.) Oui, je crois que tu vas le faire.

Seigneur, sa voix était si rauque, si sensuelle. Electrisé, Blay ne put

s’empêcher de se frotter à nouveau contre son copain.

— Ne t’inquiète pas, mon grand, après c’est ton tour, promit Qhuinn.

Blay tendit la main vers la boucle de la ceinture de Qhuinn, et l’ouvrit. Puis

Qhuinn se mit à genoux et s’approcha plus près. Blay lui entoura les hanches de

ses bras, et tendit le cou pour poser la bouche sur son ventre qu’il embrassa

voracement. Qhuinn s’agrippa au montant de bois du lit pour se maintenir en

place tandis qu’il gémissait sous l’assaut. Blay lécha la peau tendue, la mordilla,

l’aspira, y laissant des marques rouges qui disparaîtraient d’ici quelques heures.

— Bordel, haleta Qhuinn, laissant tomber l’une de ses mains dans les

cheveux roux.

Blay leva les yeux et croisa le superbe regard brillant de Qhuinn. Puis il

descendit la fermeture éclair du jean pour libérer le sexe du mâle.

Cette fois, les deux mains de Qhuinn se nouèrent dans ses cheveux tandis que

Blay s’activait sur lui, caressant d’abord les bourses douces avant de revenir au

sexe érigé. Qu’il engloutit dans sa bouche et suça, alternant les coups de langue

sur le gland et la hampe, les succions et les morsures, guidé par les

gémissements de plaisir que son ami ne pouvait retenir.

Quand son rythme devint plus régulier, les mains de Qhuinn se crispèrent

dans ses cheveux, guidant sa tête d’avant en arrière, tandis que ses reins allaient

et venaient en cadence.

— Tu es né pour me sucer, haleta Qhuinn. (En réponse, Blay planta les

doigts dans les fesses fermes, incitant le mâle à baiser sa bouche encore plus

fort.) Bordel, je vais jouir.

Effectivement, Qhuinn explosa peu après au fond de sa gorge, et Blay avala le

flot brûlant de son orgasme, savourant le goût de la jouissance qu’il avait offerte

à celui qu’il aimait. Blay regarda le visage de Qhuinn. Les cernes sous ses yeux

avaient disparu, les joues avaient retrouvé leur saine couleur dorée, et le regard

vairon était aussi magnifique que d’habitude.

Encore essoufflé, Qhuinn se retira et tendit la main pour récupérer dans sa

table de chevet du lubrifiant qu’il déposa sur le ventre de Blay. Puis il se leva,

enleva son pantalon et celui de son copain. Ensuite, il récupéra le tube et en

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versa dans ses mains. Il prit le sexe de Blay, le caressant de haut en bas, tandis

que Blay s’arcboutait dans le lit sous le choc de la sensation.

Puis leurs yeux se croisèrent.

— Viens, dit Blay doucement, en tirant sur la main de Qhuinn.

Qhuinn l’enjamba et positionna d’une main le sexe de Blay sur lequel il

s’empala lentement, centimètre par centimètre. Lorsque la pénétration fut

complète, les deux mâles haletaient, le corps couvert de sueur. Blay releva les

genoux pour soutenir Qhuinn qui commençait à onduler. Quand le rythme

s’accéléra, Qhuinn frotta ses deux mains sur la poitrine de Blay, pinçant les

mamelons dressés.

— C’est bon ? Demanda-t-il.

— Ô que oui, répondit Blay.

— Alors vas-y plus fort, ordonna Qhuinn.

Blay se mordit la lèvre et leva les hanches, suivant la violente cadence des

mouvements de son copain, les mains serrées sur sa taille. Plus vite, plus fort,

plus profond. Le claquement de leurs corps l’un contre l’autre, les respirations

rauques, les gémissements et les cris, l’odeur du sexe et des fragrances mêlées—

et par-dessus tout la vision de Qhuinn qui le chevauchait— c’était le spectacle le

plus incroyable que Blay ait jamais vu, imaginé, rêvé.

Puis Qhuinn chuchota son nom tout en malaxant son propre sexe d’une main

brutale.

— Oh merde ! Hurla Blay tandis que tout son corps se convulsait.

Dès que son orgasme explosa, Qhuinn le suivit, éclaboussant son estomac de

longues giclées brûlantes avant de s’écrouler sur lui.

Blay resta vautré, bras et jambe écartés sur le lit, flottant dans un état de

béatitude totale, vidé de toute force, les yeux clos. Il était presque endormi

quand Qhuinn se souleva et s’écarta de lui.

— Hey, dit Qhuinn doucement, viens prendre une douche.

Blay grogna, mais n’ouvrit pas les yeux. Il ne savait pas si c’était dû au sexe,

au sang qu’il avait pris plus tôt, au stress de la soirée, mais il était complètement

HS.

— Ne me dis pas que tu ne peux plus bouger ? Demanda Qhuinn en riant.

Sans répondre, Blay secoua la tête. Mais quand il sentit Qhuinn passer au-

dessus de lui pour quitter le lit, il réussit à soulever un bras pour l’interrompre.

— Où vas-tu ? Marmonna-t-il.

— Chercher au moins une serviette pour te nettoyer. Sinon, tu vas dormir

couvert de sperme, dit Qhuinn en éclatant de rire.

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Effectivement, il revint peu à peu avec un linge mouillé qu’il passa sur le

ventre de Blay. Il y eut un « ploc » quand Qhuinn jeta la serviette par terre avant

de remonter dans le lit auprès de lui. Blay roula sur le côté, entremêla ses jambes

avec celles de son copain, et serra ses bras autour de lui. Il sentit les mains de

Qhuinn lui caresser les bras.

— Blay ?

— Hmm ? Répondit-il.

— J’étais vraiment furieux contre toi, tu sais, mais ça n’a pas duré. Même

quand tu m’as traité d’entêté.

— Tu es entêté, marmonna Blay.

— Je sais, dit Qhuinn en riant, avant de lui caresser la joue. Blay ?

— Hmm ?

— Je t’aime.

Cette fois, Blay réagit. Il ouvrit les yeux, avec un sourire heureux.

— Je sais.

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Chapitre 23

Un bourdonnement strident, pénible et répétitif vrillait aux oreilles de Qhuinn.

« Non » grogna-t-il en roulant sur lui-même, tirant l’oreiller sur sa tête. Il ne

savait pas du tout depuis combien de temps il dormait, mais il avait encore

sommeil. Malheureusement, le bruit horrible devenait de plus en plus fort.

Qhuinn s’assit, et regarda autour de lui dans la chambre d’un œil vitreux. Il lui

fallut quelques secondes pour réaliser que le téléphone de Blay sonnait.

Il se laissa retomber dans le lit.

— Hey, réveille-toi, dit-il à Blay d’une voix pâteuse. (Il le secoua par

l’épaule. Le mec dormait à plat ventre, les bras allongés au-dessus de la tête, et

ne bronchait pas.) Y’a ton putain de téléphone qui fait ch— Hey, tu ne pourrais

pas éteindre cette saloperie ?

Cette fois, Qhuinn envoya un coup de poing dans les côtes de son pote, pas

assez fort pour lui faire mal, mais suffisamment pour le faire sursauter.

Blay leva la tête, avec un regard menaçant dans ses yeux bleus ensommeillés.

— Mais qu’est-ce que tu fous ?

— C’est ton téléphone qui me gonfle, se plaignit Qhuinn.

— Désolé, dit Blay en bâillant. Je n’ai rien entendu.

Qhuinn le regarda quitter le lit, et se pencher en avant pour farfouiller dans les

poches de son pantalon à la recherche de son téléphone. La vision de ses reins

nus était si tentante que Qhuinn en eut des fourmillements dans les doigts. Mais

Blay se relevait déjà, le téléphone à la main. En fait, le truc avait fini par

s’arrêter.

— Ça n’était pas la peine de me frapper, andouille, protesta Blay en se

frottant les côtes.

— Peuh, ne sois pas douillet. Je n’ai pas tapé fort.

Sur ce, il roula sur lui-même, tourna le dos à Blay, et renfonça sa tête dans les

oreillers.

— Hey, maman, dit Blay. (Quand le mâle s’assit sur le rebord du lit, Qhuinn

sentit le matelas s’enfoncer sous son poids.) Non, ça va. Il fallait que je me lève

de toute façon.

Qhuinn était heureux d’entendre Blay parler à sa mère. Il savait que le mec

regrettait de ne pas voir ses parents plus souvent. Qhuinn aussi d’ailleurs. Les

parents de Blay avaient été bien plus attentifs envers lui que sa propre famille

durant son enfance. Vivre au manoir, à travailler pour la Confrérie, avait séparé

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Blay de sa famille depuis bien trop longtemps. Surtout après les raids des

lessers, parce que les parents de Blay avaient dû quitter Caldwell quand Lash—

Blay se leva et se dirigea vers la salle de bain.

— J’ai pris une veine la nuit passée, disait-il à sa mère. C’est pour ça que je

suis aussi fatigué.

Qhuinn retint un ricanement. La nuit avait été active, et son copain avait

d’autres raisons d’être fatigué.

Il regarda le magnifique mâle nu refermer la porte de la salle de bain derrière

lui, puis roula sur le dos, bâilla, et s’étira longuement. Se penchant en travers du

lit, il récupéra son propre téléphone sur la table de chevet. Sacré nom d’un

chien, 16:00. Ils avaient dormi quatorze heures d’affilée.

Il avait reçu un texto de John. « On sort ce soir ? »

« Oki » répondit-il. Pourtant, il était effondré. Ce n’était pas qu’il refusait

d’aller se battre. Non, il avait réellement envie de descendre quelques lessers.

Mais il aurait voulu que Blay vienne avec eux. Un grognement sonore de son

estomac coupa court à ses pensées moroses. Il avait faim, et Blay serait

certainement dans le même état. Aussi appela-t-il la ligne intérieure de la

cuisine.

— Bonsoir, maître Qhuinn, répondit Fritz.

Qhuinn leva les yeux au ciel.

— Fritz, appelez-moi Qhuinn. Juste Qhuinn. Hey, pourriez-vous nous monter

un plateau pour deux.

— Bien sûr, messire.

— Merci, dit Qhuinn. (Son et estomac s’exprima à nouveau.) Au fait, Fritz…

mettez-en pour quatre.

— Je m’en occupe tout de suite, affirma le doggen. Je vous monterai ça dans

dix minutes.

En raccrochant, Qhuinn se demanda pourquoi Blay était aussi long. Il alla

jusqu’à la salle de bain, et entrebâilla la porte. Blay était dans la douche, les

mains posées contre le mur de marbre tandis que l’eau des quatre jets lui

martelait le crâne. Le corps figé, il ne sembla pas remarquer que Qhuinn venait

d’entrer.

Qhuinn avança jusqu’aux toilettes pour une urgence irrépressible. Du coin de

l’œil, il eut l’impression de voir son copain bouger… mais lorsqu’il s’approcha

de la porte vitrée, Blay n’avait fait que lever la tête pour recevoir l’eau sur le

visage. Et il avait les yeux clos.

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Qhuinn en profita pour examiner à loisir le corps nu, la façon dont l’eau

chaude suivait le tracé des muscles longs. Des jets latéraux massaient le dos lisse

et le cul parfait, créant de petits ruisseaux qui dégoulinaient le long des cuisses

épaisses. Le mec était magnifique— tentant— humide. Qhuinn se mordilla la

lèvre, et baissa les yeux sur lui-même. Ouaip, manifestement, sa queue était tout

aussi intéressée par le spectacle. C’était vraiment incroyable l’effet que Blay

avait sur lui.

Sans plus attendre, il ouvrit la porte vitrée, ce qui fit sursauter Blay. Mais le

mâle se contenta de lui jeter un coup d’œil, avant de poser le front sur le mur de

marbre.

— Hey, marmonna-t-il.

Qhuinn se colla contre son dos, et posa ses bras sur ceux de Blay, mêlant ses

doigts aux siens. Puis il embrassa la peau mouillée entre les omoplates.

— Ça va ? Demanda-t-il à voix basse tandis que l’eau écumante tombait sur

eux deux.

— Ouais.

Qhuinn continua à embrasser le dos et les épaules de son copain, tout en

glissant ses bras autour de sa taille, frottant d’un geste apaisant sa poitrine et son

ventre dur.

— Tu sembles tendu, dit-il en mordillant la nuque ployée, mais il arrêta

quand Blay tourna la tête pour le regarder.

Blay affichait son habituel sourire, si bouleversant, et les yeux bleus étaient

tendres et lumineux Un visage d’amant, pensa Qhuinn, le souffle coupé. Il

examina, éperdu, les cheveux trempés collés contre son front, les gouttes d’eau

posée comme des larmes sur les longs cils, la bouche renflée et entrouverte….

Seigneur, il n’avait qu’une envie, c’est de pencher Blay en avant pour le prendre

avec frénésie, mais il tenait d’abord à savoir ce qui tourmentait son copain.

— Tu es sûr que ça va ?

— Oui, je t’assure, dit Blay. Surtout maintenant que tu es là.

— Tu es magnifique, murmura Qhuinn, les lèvres collées à la peau dorée.

Puis il fit tourner Blay vers lui, et l’embrassa doucement, caressant sa langue

de la sienne. Il poussa un gémissement, puis s’écarta, et prit une barre de savon

posée dans un creux du mur de marbre.

Quand il récupéra aussi une boule de mousse accroché à l’une des têtes de la

douche, Blay demanda :

— Tu es sûr d’avoir besoin de truc-là ?

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— Ouais, bien sûr. (Qhuinn faisait déjà mousser le savon contre son éponge.)

C’est bien mieux que d’avoir à utiliser un gant à chaque fois.

— Ça fait un peu gay, tu ne trouves pas ? Dit Blay en riant.

— Je m’en fiche. La dernière fois que j’ai vérifié, il y avait un mec dans mon

lit. Et tu ne semblais pas t’en plaindre.

— Je n’ai pas dit que je m’en plaignais, protesta Blay en riant toujours. Je

trouve ça marrant.

Blay sortit de la douche. Qhuinn se savonna rapidement, se lava les cheveux,

et laissa l’eau brûlante le rincer. Lorsqu’il émergea à son tour, il trouva Blay

devant le lavabo, une serviette autour de la taille, devant le miroir, un peigne à la

main.

— Hey, passe-moi une serviette. (Blay ne bougea pas. Ne répondit pas.)

Blay ? Tu pourrais me passer une serviette ? (Aucune réponse.) Blaylock !

Cette fois, Blay sursauta, et se retourna, affolé :

— Quoi ?

— Peux-tu me passer une serviette ?

— Oh… Oui… Désolé.

En lui tendant la serviette, Qhuinn vit son copain examiner son ventre— et ne

put s’empêcher de rire. Du coup, Blay releva les yeux. Et Qhuinn se figea.

Manifestement, quelque chose n’allait pas du tout. Il attacha la serviette à sa

taille, et prit son ami par le bras avant qu’il puisse se détourner. Il posa la main

de Blay sur ses abdominaux.

— C’est à toi, mon chou, dit-il avec un sourire. Tu peux regarder, tu peux

toucher— tout est à toi.

Blay lui rendit son sourire. Quand il se pencha pour l’embrasser brièvement,

Qhuinn retint son visage entre ses paumes.

— Qu’est-ce qui ne va pas ? Dis-le-moi, insista-t-il, quand Blay ne répondit

pas.

— Je vais voir mes parents ce soir, dit le mâle, après un silence.

— Et c’est ça qui t’embête ? Je ne vois pas pourquoi. Je pensais qu’ils te

manquaient.

Blay s’écarta jusqu’au comptoir de marbre, et se regarda dans le miroir.

Qhuinn le suivit, et s’assit d’un bond sur le comptoir. Blay croisa les bras, baissa

les yeux, et avoua tout à coup :

— Je vais leur dire, Qhuinn.

— Leur dire quoi ? (Il n’avait aucune idée de ce que son ami racontait.)

— Que je suis gay.

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— Oh, dit Qhuinn avec un soupir. (Il posa le bras sur les épaules de Blay

pour le rassurer.) Tes parents te soutiendront toujours, quoi que tu fasses,

affirma-t-il.

Les parents de Blay étaient des gens fiables. Qhuinn se souvint de la façon

dont il l’avait accueilli chez lui, après qu’il ait tenté d’assassiner son cousin

Lash. Bien que la famille entière ait risqué d’être bannie de la Glymera, ils

n’avaient pas hésité à protéger Qhuinn qui ne partageait aucun lien de sang avec

eux. À côté d’un geste pareil, les préférences sexuelles de Blay n’étaient que de

la gnognotte. Et soudain, il comprit ce qui ennuyait réellement son ami : La

Glymera n’accepterait pas davantage sa sexualité. À cause de Blay, sa famille

pouvait encore être bannie.

— Tu t’inquiètes de ce que dira la Glymera ? Demanda Qhuinn, tout en

connaissant déjà la réponse.

Blay se tourna pour le regarder.

— Bien sûr, mais je dois quand même le dire à mes parents. Ça fait trop

longtemps que je me cache. Ce qui doit arriver… arrivera… Je présume.

Qhuinn se pencha pour l’embrasser.

— Tes parents t’aiment— inconditionnellement. Tu as beaucoup de chance.

— Je sais, dit Blay avec un regard intense.

— Oh, répondit Qhuinn avec un sourire. Tu vas aussi leur parler de nous ?

— Ça te gêne ?

— Non, dit-il en secouant la tête. Je préfère même. Parce que tes parents

m’aiment bien, et ça que pourrait aider ton cas.

— Je n’en suis pas si sûr. Ma mère va peut-être te haïr en découvrant qu’elle

n’aura jamais de petits-enfants à cause de toi. (Il eut un rire bref.)

Qhuinn sauta du comptoir et avança jusqu’à Blay, dont les mains se posèrent

immédiatement sur ses hanches. Qhuinn leva les yeux au ciel.

— Hey, protesta Blay. Tu as dit que c’était à moi.

— C’est vrai, dit Qhuinn, je suis à toi. (Il redevint grave.) Veux-tu que je

vienne avec toi ?

— Pas ce soir.

— D’accord. Mais appelle-moi si tu as besoin de moi. Promis ?

— Promis.

— Parfait. (Il scella la promesse d’un baiser, puis demanda :) Tu as faim ?

— Je crève la dalle.

— Bon, je nous ai fait monter un plateau dans la chambre. Bien entendu, ça

doit être glacé maintenant.

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En tirant Blay par la main Qhuinn affichait un sourire béat, sans pouvoir s’en

empêcher. Il n’arrivait pas à se souvenir d’avoir jamais été aussi heureux qu’à

présent. Blay avait complètement changé sa vie, et lui appartenir était devenu

une véritable nécessité. La seule chose qui contrariait Qhuinn était d’avoir mis

autant de temps à le réaliser.

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Chapitre 24

Blay était dans un fauteuil, un livre ouvert sur les genoux. Mais il n’arrivait

pas à lire. Les mots se brouillaient sous ses yeux. Sa chaîne stéréo diffusait

pourtant un de ses airs de jazz favori, et le son pur et mélodieux des saxophones

résonnait autour de lui dans la chambre. Il n’écoutait pas— et ne cessait de

répéter mentalement le discours qu’il comptait tenir à sa mère. « Mahman, il

faut que je te parle. Mahman, je suis gay. Mahman, je ne prendrai jamais une

femelle comme compagne. Mahman, tu n’auras pas de petits-enfants.

Mahman… »

Il soupira. Serait-il vraiment capable de le faire ? Quel intérêt au fond ? Ça en

valait-il à peine ?

Quand la réponse entra par la porte, Blay se sentit aussitôt coupable de sa

dernière pensée. Parce que son amant secouait la tête, comme s’il devinait le

doute qui avait agité Blay. Seigneur, quel mâle ! Personne ne portait un pantalon

de cuir aussi naturellement que Qhuinn. Avec ses Glock à la ceinture et ses

dagues à la poitrine, c’était un véritable guerrier— une machine à tuer. Pendant

que Qhuinn avançait à grands pas jusqu’à la chaîne stéréo pour en couper son,

Blay étudiait la façon dont le cuir noir collait aux longues— si longues jambes

musclées. Le bas du pantalon se perdait dans les bottes de combat. En plus,

Qhuinn portait un tee-shirt Under Amour noir sous le harnais qui se croisait sur

son torse. Il était beau à mourir. Et incontestablement, ça en valait la peine.

— Bordel, mais comment arrives-tu à lire avec une musique aussi nulle qui te

beugle aux oreilles ? Demanda Qhuinn, en s’asseyant à ses côtés.

Bon sang, pensa Blay, il est encore plus beau de près. Avec ses cheveux de

jais tout ébouriffés, ses cils si longs qui soulignaient la couleur unique de ses

yeux— un bleu, un vert. Une barbe noire qui repoussait ombrait la mâchoire

dure, et la bouche ferme souriait légèrement— assez pour que Blay aperçoive

l’éclat argenté du piercing de sa langue. Pas à dire, ça en valait la peine.

— Hey… Hou-hou…? Blay ?

— Désolé, marmonna Blay.

— Tu lis vraiment ?

Blay baissa les yeux, et referma son livre qu’il posa sur sa table de chevet.

— Non, répliqua-t-il sèchement, je regardais juste les images.

— Je vois, dit Qhuinn qui s’adossa à son siège et le considéra. Tu veux en

parler ?

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Ils se regardèrent dans les yeux un moment. De quoi au juste devaient-ils

parler ? Blay finit par ouvrir la bouche, mais il la referma sans dire un mot.

Qhuinn leva un sourcil, et attendit.

— Et si tu regrettes un jour d’avoir laissé tomber les femelles ? Jeta Blay

d’un seul coup. Et si tu as envie d’en reprendre une ?

Il vit immédiatement que Qhuinn n’appréciait pas la question. Son copain

ferma les yeux, et secoua la tête, les lèvres serrées. Puis il poussa un long soupir.

— Je n’arrive pas à croire que tu aies pu dire ça. (Soudain il se leva.) Debout.

Quand Blay ne bougea pas, Qhuinn l’attrapa par le col de son polo, et le

releva de force, à moitié étranglé. L’anoxie de Blay ne s’arrangea pas quand il

fut plaqué violemment contre le mur de la chambre. Il n’avait pas encore

retrouvé son souffle qu’une bouche brutale se posait sur la sienne, tandis qu’une

langue brûlante le pénétrait. Qhuinn resserra encore sa poigne sur son cou,

collant sa lourde poitrine sur son torse, tandis que son coude pesait sur son

estomac.

Blay manquait sévèrement d’oxygène quand Qhuinn releva enfin la tête—

quittant ses lèvres pour embrasser le creux derrière son oreille.

— As-tu la moindre idée de l’effet que tu me fais ? Gronda le mâle en

pressant ses hanches contre les siennes. (Son sexe faisait une bosse énorme dans

son pantalon de cuir.) Tu me fais bander, précisa Qhuinn inutilement sans cesser

de mordiller sa gorge.

Blay n’arrivait pas à bouger. Aussi il laissa ses bras pendre de côté, tout son

poids affalé contre Qhuinn. Il sentait les mains de son ami toujours serrées sur

son col. Et la sombre fragrance aux lourdes odeurs d’épices qui émanait du mâle

l’enivrait. Sans force, Blay avait la sensation d’être un mannequin accroché au

mur.

Puis le regard brillant de Qhuinn apparut devant lui.

— Toutes ces femelles, cracha le vampire dans un feulement rauque, ne

signifiaient rien pour moi. (Il claqua à nouveau le corps de Blay contre le mur—

fort.) Rien du tout.

Il resta silencieux un moment, à respirer lourdement, puis continua d’une voix

plus calme :

— Je ne sais pas quoi faire pour te prouver que je t’aime— et que le seul rêve

de ma vie est de rester à tes côtés— alors dis-le-moi, bordel ! Dis-moi quoi faire

et je le ferai. Je te prendrai comme compagnon. Je l’annoncerai à la Glymera et

à la population vampire tout entière. Je ferai graver ton nom dans mon dos. Je

saignerai pour toi. Je souffrirai pour toi. Je ferai n’importe quoi pour toi. Je ne

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veux personne d’autre que toi. Et si nécessaire, je passerai le reste de ma vie à te

le prouver.

Tandis qu’ils restaient encore silencieux, face à face, à se regarder, Blay eut la

sensation d’être un parfait salaud d’avoir simplement évoqué le sujet.

— C’est bien compris ? Demanda Qhuinn, et sa voix n’était plus qu’un

souffle.

— Oui. (Blay hocha la tête.)

Bien sûr, Qhuinn méritait sans doute une meilleure réponse, mais à l’heure

actuelle, Blay n’arrivait plus à aligner deux idées cohérentes.

Qhuinn posa son front sur celui de Blay, et l’embrassa doucement, avant de

s’écarter. Quand il relâcha sa prise autour de son cou, il lissa du mieux qu’il put

le tissu froissé. Mais les dégâts étaient irréversibles.

— Tu vas devoir te changer.

Blay se contenta de hocher à nouveau la tête, soulagé que Qhuinn soit enfin

calmé.

— Tu as opté pour un style cool ce soir ?

Cool ? Blay baissa les yeux sur lui-même, avant de se souvenir qu’il portait

un jean et un polo blanc.

— Oui, effectivement, répondit-il.

Qhuinn mit la main dans sa poche, et en sortit les boutons de manchettes qu’il

lui avait offerts, ceux avec le crâne et les os croisés.

— Tu les as oubliés dans ma chambre.

— Merci, dit Blay tandis que Qhuinn les déposait dans sa paume.

— De rien. (Qhuinn mit les mains sur les hanches, et se balança d’avant en

arrière.) Alors, tu veux prendre le Hummer ou te dématérialiser directement

chez tes parents ?

Blay s’écarta du mur, contourna son ami, et alla poser ses boutons sur sa table

de chevet.

— Je préfère me dématérialiser.

— Très bien, c’est plus sûr, répliqua Qhuinn qui semblait soulagé.

Blay retint en soupir avant de dire d’une voix moqueuse :

— Et oui aussi, je t’appellerai en arrivant, ne t’inquiète pas.

Il était certain que Qhuinn s’apprêtait à le lui demander. L’autre mâle ricana,

la tête penchée de côté. Seigneur, il était sacrément sexy comme ça. Blay ne put

retenir son sourire— en fait, tout son visage s’illumina.

Du coup, Qhuinn laissa tomber ses mains, et tendit les bras vers lui.

— Viens ici, pour un dernier câlin avant que je m’en aille.

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Serré contre son ami, Blay passa les doigts dans les cheveux noirs raidis par le

gel. Qhuinn le serra fort contre lui, frottant son visage dans le creux de son cou.

— Tu vas me manquer, dit Blay doucement.

— Tu vas me manquer aussi.

Qhuinn releva la tête et sourit.

Blay pressa ses hanches contre Qhuinn, tout en lui léchant délicatement la

lèvre inférieure. Il sentit le mâle crisper ses mains sur sa taille, et gémir dans sa

bouche, tandis que leur baiser devenait plus passionné.

Ils sursautèrent ensemble quand ils furent interrompus par un grand coup sur

la porte. Qhuinn grogna de mécontentement. Blay se contenta d’aller ouvrir la

porte. John et Xhex étaient dans le couloir, armés de pied en cap, prêts à sortir.

— Génial, se plaignit Qhuinn. Alors elle vient aussi ?

— Ça serait vraiment plus facile que vous vous entendiez, indiqua John par

signes.

— Si ta princesse la boucle, j’envisagerai peut-être ça, aboya Qhuinn aussi

brutalement que d’ordinaire.

— C’est toi qui ferais bien de la boucler, répondit Xhex. Et si tu m’appelles

encore une fois "princesse", je m’occuperai de ton cas.

— J’aimerais bien que tu essaies, femelle.

— Ça suffit, dit John en agitant les mains, avant de se tourner vers Blay : Tu

n’as pas idée à quel point je regrette que tu ne viennes pas.

Blay éclata de rire.

— Ils sont aussi butés l’un que l’autre, pas vrai ?

— N’importe quoi, coupa Xhex, furieuse. Nous serons en bas quand tu

décideras de nous honorer de ta présence.

Sur ce, la sympathe se détourna et s’éloigna d’un pas vif. John leva les yeux

au ciel, et la suivit, refermant la porte derrière lui.

— Je sens qu’on va se marrer, dit Qhuinn en reprenant Blay dans ses bras.

Où en étions-nous au juste ?

— Arrête un peu de la charrier.

— Mais de quoi tu parles ? Marmonna Qhuinn contre sa peau.

— Qhuinn, on ne s’adresse pas comme ça à une dame.

Qhuinn se mit à rire, et releva la tête.

— On ne peut pas vraiment dire que Xhex soit une dame. (Il planta un autre

baiser dans le cou de son copain.)Mmm… Quand je reviendrai… je veux

prendre une autre douche avec toi... (Il s’arrêta, et lécha l’oreille de Blay.) Et

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cette fois, je vais te pencher en avant— et te prendre— plus fort encore que tu

ne l’as jamais été.

— Vraiment ?

Avec un sourire, Blay planta les mains dans les cheveux ébouriffés de

Qhuinn, tira dessus, et promena la pointe allongée de ses canines le long de sa

gorge.

— Bordel, grogna Qhuinn. Il faut que je me barre avant de te sauter dessus.

Le mâle avait déjà le souffle court. Mais Blay ne le lâcha pas, il prit le lobe de

son oreille entre ses dents, puis poussa Qhuinn pour le mettre dos au mur, près

de la porte. Ensuite, il fit glisser ses mains le long du corps de son copain, et lui

saisit fermement le sexe tout en suçant son oreille. Qhuinn réagit en se cabrant.

Et Blay se sentit tout-puissant sur lui— tout en crevant d’envie de le prendre.

Tout de suite. Il aurait voulu le faire jouir, et voir ce merveilleux visage

s’empourprer de plaisir, et hurler sous ses coups de boutoir... Il lui fallut tout son

courage pour arrêter, mais il le fit néanmoins.

— Je t’attendrai, dit-il à Qhuinn en reculant.

Qhuinn vacilla contre le mur, puis se pencha en avant, les mains sur les

genoux, et inspira profondément. Plusieurs fois. Quand il se redressa, il jeta un

coup d’œil à Blay et grogna :

— Douce vierge de l’Au-delà ! Quand je reviendrai, tu me paieras ça, mec.

Je vais te baiser si fort que tu n’arriveras plus à marcher une semaine durant.

Mais il l’embrassa tendrement sur la joue avant de se détourner pour sortir.

— Hey, dit Blay. (Qhuinn resta immobile, la main sur la porte, à le regarder.)

Sois prudent.

— Appelle-moi, répondit le mâle, puis il disparut dans le couloir.

Blay garda longtemps les yeux fixés sur la porte. Seigneur Dieu ! Ô que oui,

ça en valait la peine.

Il enleva son polo froissé, et en passa un autre, avant d’enfiler des chaussures

et de quitter sa chambre. Sa nervosité revenait en force. Une fois au rez-de-

chaussée, il traversa le billard désert, ouvrit la porte-fenêtre, et avança sur la

terrasse devant le manoir, jusqu’à la piscine dont l’eau brillait sous la lune. Blay

s’étendit sur une des chaises longues en teck. La fragrance de Qhuinn était restée

sur lui. Sur sa peau et ses cheveux. Partout.

Bon sang. Ses parents comprendraient la vérité dès qu’ils s’approcheraient de

lui. Et ce n’était pas la façon dont il souhaitait le leur annoncer.

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Peut-être prenait-il la voix de la facilité, mais qu’importe. Il allait le faire.

Blay ouvrit son téléphone. Prit une profonde inspiration et composa le numéro

de sa mère. Qui répondit à la première sonnerie.

— Bonjour mon fils.

— Hey, mahman.

— Pourquoi n’es-tu pas déjà parti ? Demanda-t-elle.

Il y eut un silence sur la ligne. Que devait-il dire ? Et comment devait-il le

dire ?

— Euh, mahman, il faut que je te dise quelque chose.

— Bien sûr, fils. Je t’écoute.

— Je ne sais pas comment te le dire— ni comment tu vas le prendre.

Rappelle-toi bien que je t’aime d’accord ?

— Blaylock, je t’aime aussi. Qu’est-ce qui se passe ? Tu as des problèmes ?

— Non, aucun problème. Aucun, je t’assure. (Tout au contraire, pensa-t-il, il

ne s’était pas senti aussi bien depuis très longtemps.) Mahman… Je suis

amoureux de Qhuinn, avoua-t-il.

D’avoir prononcé les mots à haute voix lui fit du bien. Mais la ligne resta

silencieuse. S’il n’avait pas entendu sa mère respirer à l’autre bout du fil, il

aurait même cru qu’elle avait raccroché.

— Mahman ?

— Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Demanda-t-elle, effondrée. Quand

est-ce arrivé ?

— Je ne sais plus au juste. Mais ça fait très longtemps que je le sais. (Je t’en

prie, mahman, essaie de me comprendre, priait-il intérieurement.)

— Il est au courant ?

— Oui. Nous sommes ensemble dorénavant, dit-il, désireux d’être clair sur

ce point.

Elle eut un long soupir, hoqueta— puis il l’entendit pleurer au téléphone.

— Mahman, je suis désolé… Je sais que ce n’est pas ce que tu voulais pour

moi, ni ce que tu espérais. Mais il fallait que je te le dise. J’en ai assez de me

cacher. (Il s’arrêta un moment, à écouter ses sanglots.) Mahman, je suis

tellement heureux avec lui, ajouta-t-il doucement.

— Blaylock, tu es mon fils, et je t’aimerai toujours. Mais…

Blay ferma les yeux. Et les sentit se remplir de larmes. Il ne voulait pas

entendre ce qui allait suivre ce « mais ».

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— Nous avons déjà eu du mal à reconstruire nos vies après l’attaque, dit sa

mère. Tout commence à s’arranger. Et maintenant ceci ? Jamais la Glymera ne

l’acceptera. (Sa voix avait viré à l’aigu sur la dernière phrase.)

Blay n’arrivait pas à y croire. Que sa mère choisisse sa place dans la société

vampire plutôt que le bonheur de son fils lui paraissait incroyable. Il refusait d’y

croire. Il savait— il avait toujours su— qu’il y avait un risque qu’elle réagisse

ainsi, mais au fond de son cœur, il avait souhaité obtenir son soutien.

— Je suis désolé que tu le prennes comme ça, mahman, murmura-t-il, tandis

que les larmes glissaient sur ses joues.

— Blaylock… (La violence de ses sanglots lui coupa la parole.) J’ai besoin

de temps pour y penser. Donne-moi du temps. Je dois y aller, dit-elle en

raccrochant.

Blay eut la sensation de rester des heures— mais ce ne fut probablement que

quelques minutes— à écouter la ligne sonner « occupé » à son oreille. Puis il

referma son téléphone, se releva, et s’approcha de la piscine. Où il jeta son

appareil dans l’eau, le regardant lentement couler jusqu’au fond. Ensuite, il

s’essuya les joues du dos de la main. Complètement assommé, il revint au

manoir, traversa le grand hall, prit la porte sous l’escalier vers le tunnel qui

menait au centre d’entraînement. Une fois sous terre, il se mit à courir

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Chapitre 25

La nuit avait été calme, sans le moindre lesser au tableau de chasse. Que

foutaient donc ces enfoirés au lieu d’arpenter les rues ? Xhex, John et Qhuinn

avaient fini par abandonner tout espoir d’en croiser un.

Dans le restaurant de Trez et iAm, Qhuinn était assis au bar, où il n’arrêtait

pas de jouer avec le clapet de son téléphone, surpris et inquiet à la fois. Il n’avait

rien reçu de Blay. Ni appels manqués. Ni texto. Rien.

Il inspira profondément, puis se tordit la nuque de droite à gauche jusqu’à

entendre un craquement sonore. Ensuite, il tapota des doigts sur la surface lisse

du bar devant lui. Il s’efforçait de rester calme. Il n’allait quand même pas péter

un câble dès le premier soir. Non ?

— Pourquoi ne l’appelles-tu pas ?

La voix de Xhex le fit sursauter.

Qhuinn leva les yeux, et regarda autour de lui. La femelle et lui étaient seuls

au bar. Merde de merde. Perdu dans ses pensées, il n’avait même pas remarqué

que John s’était tiré.

— Il est juste allé pisser, dit-elle.

Qhuinn lui jeta un coup d’œil. Puis fixa à nouveau son téléphone. Il décida de

donner à John une minute de tranquillité, avant d’aller vérifier ce qu’il foutait.

— Alors ? Insista Xhex. Tu l’appelles ? Ou tu continues à bâiller sur ton

portable ?

— Qu’est-ce que ça peut te foutre ? Répliqua-t-il.

— Rien. (Elle leva les yeux au ciel.) D’accooord, continue à ressasser ton

gros chagrin. J’en ai rien à branler.

Qhuinn regarda la femelle vider ce qui restait dans sa bouteille d’eau. Avait-il

vraiment besoin d’avoir une telle conversation avec elle ? Merde, après tout elle

le détestait. Et n’arrêtait pas de lui balancer des vannes.

— Il trouve que je suis trop protecteur, finit-il par dire.

Elle tourna la tête vers lui d’un geste vif.

— Non sans blague ? Je ne peux pas lui donner tort.

— C’est pour ça que je ne l’appelle pas, continua Qhuinn d’un ton sec, avant

de prendre une gorgée de sa bière.

Il posa son téléphone sur le bar et se remit à y jouer du tambour avec ses

doigts. Pas question qu’il dise un mot de plus. Rien de tout ça ne regardait Xhex.

D’ailleurs, de quel droit le jugeait-elle trop protecteur ?

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— J’aime ta façon d’être, dit-elle, en interrompant ses pensées.

— Pardon ? Dit Qhuinn qui la regarda, plutôt scié.

— Ta façon d’être, répéta-t-elle. Ce que tu fais envers John. J’aime ça. Je

suis bien plus rassurée quand il est dehors— à combattre— de savoir que tu es

avec lui. Bien sûr, je le sais capable de se défendre. Mais quand même, ça me

rassure que tu sois là.

— Serait-ce de la gratitude que j’entends dans ta voix ? Demanda Qhuinn,

gouailleur.

Xhex haussa les épaules et détourna la tête, prétendant regarder la télévision

au fond du bar. Mais Qhuinn savait qu’un tel aveu avait coûté à la femelle.

Surtout envers lui. Ça énervait Qhuinn de le reconnaître, mais lui et Xhex avait

des points communs. D’après Blay, ils étaient tous deux incapable d’exprimer

leurs sentiments sans les noyer sous une bonne dose d’ironie. Et se montraient

toujours agressifs pour cacher ce qu’ils ressentaient vraiment.

— J’aime que tu sois devenue sa shellane, admit-il, avant de se lever pour

chercher John.

Il aurait pu expliquer à Xhex que sa présence auprès de John avait libéré (en

partie) Qhuinn d’une tâche qui l’avait auparavant occupé sept jours sur sept—

vingt-quatre heures par jour. Mais il ne tenait pas à trop gonfler son ego. Aussi il

n’ajouta rien.

D’ailleurs, en y réfléchissant, il trouvait lamentable que John et Xhex puissent

combattre ensemble alors que Blay avait été écarté. Ouais, c’était carrément

injuste. Mais qu’importe.

John alla vérifier dans la salle de bain : Elle était déserte. Pas de John.

— Bordel, John, marmonna-t-il entre ses dents. Ça n’est vraiment pas le bon

soir pour que tu joues au con.

Il sortit en courant de la salle de bain, et fouilla des yeux la pièce principale.

Avant de revenir jusqu’au bar où Xhex était toujours assise devant la TV. Mais

seule.

— Non mais quel enfoiré !

Il avait déjà le cœur qui tapait. Et vraiment pas besoin d’emmerdes

supplémentaires. Enragé, il sortit son téléphone, et tapa le numéro préenregistré

du mâle.

— Je sais que tu es muet, connard, mais t’es barré où ? Hurla-t-il dès que

l’appel fut pris.

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En entendant John siffler, Qhuinn alla vérifier toutes les autres pièces du

restaurant. En arrivant dans le bar panoramique, il écoutait toujours John

respirer dans son téléphone.

— Tu me vois, enfoiré? Demanda-t-il.

Quand John sifflota pour répondre « oui », Qhuinn finit par le repérer, assis à

l’extrême coin de la grande salle, caché derrière la masse imposante de Trez. Le

gardant en ligne de mire Qhuinn s’effondra sur un tabouret au bar, et poussa un

énorme soupir de soulagement.

Ça lui faisait beaucoup trop de stress pour une seule nuit, pensa-t-il. Il allait

téléphoner à Blay, point final. Mais après plusieurs sonneries, son appel passa

sur le répondeur, et il raccrocha. Puis il recommença. Encore et encore. En vain.

Blay ne répondait pas.

Qhuinn avait des mains qui tremblaient quand il envoya un texto.

— Désirez-vous une autre bière ?

Qhuinn fit un tel bond qu’il en lâcha son téléphone— qui rebondit sur le sol.

Une petite humaine blonde, serveuse au bar, venait de lui parler avec un gentil

sourire. Ce n’était pas une prostituée comme celles qu’il avait jadis fréquentées,

aussi bien au Screamer qu’au ZeroSum. En fait, Qhuinn sentait qu’aucune invite

sexuelle n’émanait d’elle.

— Non merci, répondit-il aimablement.

Tout en pensant que Blay aurait été fier de ses bonnes manières, Qhuinn offrit

à la serveuse un léger sourire, avant de récupérer son téléphone qui— une

chance pour lui— fonctionnait encore. Il le rouvrit, rappela Blay. Et retomba à

nouveau sur le répondeur. Il vérifia ses derniers messages, pour s’assurer qu’il

n’en avait pas manqué un de Blay. Non. Rien. Aussi il envoya à Blay un autre

texto. « Si CT pour marqer le cou, G compris. Rappel-moi. » Il referma son

téléphone, en frappa le bar avec, avant de poser ses coudes sur le bois ciré, pour

se cacher le visage dans les mains. Un poids énorme lui pesait sur le cœur. Il se

mordit même les lèvres pour ne pas gémir. Merde. Blay savait bien que le laisser

sans nouvelle le rendrait malade d’inquiétude. Alors ? Pourquoi— pourquoi le

faisait-il ?

— Tu sembles plutôt nerveux, cousin.

Oh, génial. Pas à dire, la soirée ne cessait de s’améliorer. Qhuinn laissa

tomber ses mains, et regarda Saxton, assis à côté de lui, un verre de scotch à la

main.

— Fous-moi la paix, Sax, dit-il à mi-voix. Ce n’est vraiment pas le moment.

Même à ses propres oreilles, sa voix manquait de conviction.

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— Du calme. Je ne cherche pas à créer d’ennuis. Et je te signale que c’est toi

qui es venu t’asseoir à côté de moi.

Qhuinn hocha machinalement la tête, l’esprit ailleurs. Il aurait voulu que Blay

réponde. Il avait besoin d’entendre sa voix. D’être certain que tout allait bien.

Sur une impulsion, il récupéra son téléphone, et appela le manoir.

— Ouais. (La voix était sèche.)

— Qui c’est ? Demanda Qhuinn, surpris que ce ne soit pas un doggen qui

décroche.

— Zsadist.

— Z, c’est Qhuinn.

— Je sais. Qu’est-ce que tu veux ?

— Tu as vu Blay ?

— Il était au centre d’entraînement il y a une heure, quand j’ai quitté le

gymnase.

— Était-il—

— Non, coupa Zsadist. Ça n’allait pas.

— Compris. Merci.

Qhuinn raccrocha, et se retourna. Xhex avait rejoint John et Trez, et le trio

papotait dans la stalle du fond. Qhuinn ne rêvait que de retourner au manoir— et

de voir ce que faisait Blay. Mais il était encore tôt, et il savait qu’aucun des deux

autres ne voudrait rentrer.

— Tu portes bien sa fragrance, dit Saxton, attirant ainsi son attention.

(Qhuinn remarqua que son élégant cousin avait un autre verre en face de lui.) De

toute évidence, je me suis trompé quant à tes sentiments envers Blaylock. J’ai

agi d’une façon lamentable, et je m’en excuse. Je tenais à te le dire. J’ai envisagé

plusieurs fois déjà de prendre contact avec toi, mais j’ai pensé que tu préférerais

m’éviter.

— Exactement, jeta Qhuinn.

Ouais, il préférait nettement ne plus jamais revoir son cousin— de toute sa

vie. Il haïssait l’idée que Blay ait été avec lui. Il haïssait l’image toute cette

perfection vampire et aristocratique. Bordel, mais qu’est-ce qu’il foutait au

juste— assis là— à côté de Saxton ? Après un moment de silence, Qhuinn

continua :

— Tu savais parfaitement ce que je ressentais pour Blay. Et ça ne t’a pas

arrêté. Tu n’as pas pu t’empêcher de lui faire des avances. Et ça n’a rien à voir

avec ce que tu m’as dis. (Il réfléchit, pesant l’intérêt de vider son sac avant de

s’en aller. Il regarda Saxton droit dans les yeux.) De toute la famille, tu as

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toujours été le seul à m’accepter malgré ma tare. Du moins, c’est ce que je

croyais. Tu étais le seul en qui j’avais confiance. Et tu m’as tiré dans le dos.

Alors désolé, mais j’ai du mal maintenant à croire à tes excuses.

— Je comprends tes sentiments pour moi.

— Vraiment ? Dit Qhuinn d’une voix moqueuse, en levant les sourcils.

Après avoir à nouveau vérifié que John n’avait pas bougé, il reprit son

téléphone et tenta une dernière fois d’appeler Blay. Aucune réponse— bien sûr.

Et merde, il devait absolument foutre le camp de là.

— J’étais jaloux de toi, dit Saxton, en vidant son verre.

— C’est ça, ricana Qhuinn.

— C’est pourtant la vérité. Tu vois j’ai toujours eu l’habitude de voir les

mâles me tomber dans la main. Mais pas Blaylock. Il n’a jamais voulu de moi.

Alors bien sûr, ça me l’a rendu quasiment irrésistible. Il ne pensait qu’à toi.

Qhuinn se leva, sans répondre. Il voulait retrouver Blay. Sentir ses bras autour

de lui. Et ne jamais le laisser s’éloigner.

— Je suis parfaitement conscient que mes explications ne justifient en rien

ma façon d’agir, continua Saxton. Disons que c’était une crise de rupture. (Il eut

un rire sans joie.) J’ai attaqué là où tu étais vulnérable, cousin.

— Je dois y aller, dit Qhuinn à mi-voix.

— Attends.

Qhuinn ne put s’empêcher de se retourner. Et les deux vampires se fixèrent

d’un regard intense. Le mâle blond était parfaitement habillé. Et raffiné. Tout

comme Blay, pensa Qhuinn en grimaçant intérieurement.

— Je suis heureux de voir que tu es enfin honnête envers toi-même, dit

Saxton. Je te souhaite bonne chance. Et je suis désolé. Vraiment.

Les excuses de Sax semblaient sincères, mais Qhuinn restait réticent. Il avait

trop souffert de leurs dernières rencontres. Bordel de merde, c’était à cause de ce

mec qu’il avait pleuré pour la première fois de sa vie. Bien sûr, l’autre ne le

saurait jamais— parce que Qhuinn n’avait pas l’intention de lui en faire part—

mais quand même. Il faudrait bien plus que des mots pour effacer un truc pareil.

— J’accepte tes excuses, dit-il d’une voix brusque. Mais je n’ai plus

confiance en toi.

Cette fois, Qhuinn s’en alla pour de bon. Il n’arrivait pas à admettre qu’il

laissait Saxton s’en tirer comme ça. Bordel, est-ce qu’il perdait son agressivité ?

C’était sans doute à cause de Blay— et il n’était pas certain d’apprécier le

changement.

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— Johnny, on se barre, dit Qhuinn en se plantant devant la table des trois

vampires, interrompant sans façon leur conversation.

— Déjà ? S’étonna John en regardant sa montre. Il est encore tôt.

— Je sais. Mais j’ai vraiment besoin de rentrer.

Qhuinn croisa le regard de Xhex et le retint. Il comptait sur elle pour

convaincre son hellren de bouger son cul, sinon il allait attraper le mec par les

tifs et l’emporter manu militari.

— Allez, John, on y va, dit Xhex, entrant dans le jeu.

Sans plus discuter, John haussa les épaules, et acquiesça, avant de faire glisser

son énorme corps hors de la banquette.

— Il ne va pas du tout apprécier, dit-il à Qhuinn. Il va même être furax.

— J’en ai rien à foutre qu’il soit furax. Je veux savoir s’il va bien.

— Pourquoi ? Qu’est-ce qui ne va pas ?

— Je ne sais pas encore, avoua Qhuinn.

— Allons-y, dit John en serrant l’épaule de Qhuinn.

De sa main libre, John prit le bras de Xhex et, après avoir fait leurs adieux à

Trez, ils quittèrent tous les trois le restaurant.

Peu après, ils se matérialisèrent ensemble devant le manoir, et Qhuinn fronça

tout droit dans la chambre de Blay. Merde, il n’était pas la. Qhuinn jeta sur le lit

son blouson et ses armes, avant de repartir au pas de course vers le centre

d’entraînement.

Dès qu’il sortit du tunnel pour entrer dans le bureau, Qhuinn sut

immédiatement que Blay était dans le gymnase. Il ralentit son pas, entra en

silence dans la grande salle aux matelas bleus, et étudia Blay. Qui massacrait un

punching-ball en frappant dessus comme un malade mental. Le mec était torse

nu, mais il portait le même jean que précédemment. Il avait le corps trempé de

sueur— et le regard vide, comme hanté. Sa concentration était si intense que

Qhuinn était presque inquiet de s’en approcher.

— Blay ? Demanda-t-il enfin. Que se passe-t-il ?

Blay lui jeta un coup d’œil, sans cesser de marteler le sac pendu aux gradins.

— Pourquoi es-tu déjà revenu ? Aboya-t-il.

Avant de répondre Qhuinn hésita un moment. Et envisagea de mentir. Il

pouvait très bien prétendre que la nuit avait été très calme— ou que Xhex avait

eu des vapeurs de femelle, et demandé à rentrer à la maison. Mais Blay saurait

qu’il mentait.

— Je voulais m’assurer que tu allais bien. Tu ne m’as pas téléphoné.

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Cette fois, Blay s’arrêta net, et resta les bras ballants, ses gants de boxe aux

mains. Et Qhuinn souffrit du regard vide de son copain. Mais Blay explosa

soudain de colère :

— Bordel, je ne suis pas un gosse. Je n’ai pas à te tenir au courant de mes

faits et gestes.

Qhuinn ne put s’empêcher de lever les yeux au ciel.

— Vraiment ? Et c’est tout ce que tu as à dire ? Tu savais parfaitement que

ça me rendrait malade que tu ne me donnes aucune nouvelle alors que je

m’inquiétais de la réaction de tes parents. Je t’ai appelé une centaine de fois. Tu

aurais juste pu me prévenir que tu étais toujours vivant. Ça m’aurait rassuré.

Blay balança les bras, agitant des poings menaçants, et sa voix tonna en

disant :

— Tu t’inquiétais pour moi, Qhuinn ? Tu me crois incapable de me

débrouiller sans toi pour me tenir la main ? Fous-moi la paix, bordel. Je n’ai pas

à supporter ça. J’ai survécu seul pendant que tu baisais toutes tes putains. Alors

je ne vois pas ce qui a changé.

— Merde, c’est un coup bas, Blay.

Qhuinn avança jusqu’au mur où les accessoires de boxe étaient accrochés. Il

récupéra une paire de gants. Et les enfila. Il ne savait pas ce qui s’était passé,

mais pas question de rester planté là, à échanger des insultes avec Blay. Ça

faisait trop mal. Il voulait bien que son copain passe sa frustration sur lui,

d’accord, mais pas en débitant de telles conneries.

— Qu’est-ce que tu fabriques ? Demanda Blay, un peu calmé.

— Si tu veux te battre avec moi, fais-le plutôt avec tes poings.

— Je ne veux pas me battre avec toi.

Qhuinn pencha la tête, et leva un sourcil sceptique.

— Ne me dis pas que tu as la trouille, se moqua-t-il, en se mettant à sautiller

autour de Blay, tout n balançant les bras.

— Je n’ai pas peur de toi, gronda l’autre mâle.

— Alors arrête de déconner, et prouve-le.

Blay se mit en garde, et commença à tourner, face à lui. Qhuinn leva aussi les

deux poings devant son visage, et envoya quelques crochets d’approche. L’un

d’eux prit Blay au dépourvu, sur la mâchoire.

— Si tu ne montes pas ta garde, tu vas te faire massacrer, dit Qhuinn

aimablement.

— Ne me dis pas comment combattre, grinça Blay.

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— Tu es vraiment d’une humeur de chien, mec. (Qhuinn lui mit un autre

crochet léger, de l’autre côté de la mâchoire.) Tu devrais quand même monter ta

garde.

— Si tu dois boxer, fais-le franchement. Arrête de danser comme une

femelle.

Cette fois, c’en était trop. Dès que Blay écarta le bras pour ajuster un coup,

Qhuinn balança plein pot un direct du droit dans l’ouverture. Son poing atteignit

Blay à l’œil, et le fit valdinguer en arrière. Le mâle s’étala à plat sur le dos. Il se

rassit aussitôt, leva ses gants, et se tint la tête à deux mains.

— Oh la vache ! grogna-t-il, sonné.

Bien entendu, Qhuinn regrettait déjà son geste. Il s’accroupit en face de son

copain.

— Fais-moi voir ça, dit-il d’une voix ferme.

Il enleva ses gants et les jeta de côté. Quand Blay ne bougea pas, il lui enleva

de force les mains du visage, lui ôta ses gants, et lui pencha la tête en arrière.

Merde. L’œil enflait déjà, avec un énorme hématome, et une coupure sur la

pommette. Une goutte de sang dégoulinait sur sa joue comme une larme de

sympathe.

— Je t’avais bien dit de monter ta garde, dit Qhuinn.

Tout en tenant le menton de Blay dans la main, Qhuinn lui tourna la tête de

côté. Puis il se pencha et lécha l’entaille, scellant la plaie. Puis il embrassa

doucement la zone meurtrie autour de l’œil, avant de caresser du doigt la joue de

son copain.

— Je suis désolé de t’avoir frappé, dit-il à mi-voix.

Cette fois, quand Blay leva les yeux, Qhuinn fut soulagé en les voyant. Le

regard du mâle était encore triste, mais au moins, il était désormais concentré.

Ayant perdu la vacance étrange et affolante qu’il avait eue plus tôt.

— J’aurais dû me méfier. (Blay eut un rire bref.) Et ne pas me battre avec toi.

Tu es bien trop rapide.

— Non, c’est surtout que tu voyais trouble. (Qhuinn fit une pause, et

s’installa sur le matelas entre les jambes de Blay.) Et je ne parle pas de ton œil.

Quand Blay secoua la tête, s’apprêtant à dire quelque chose, Qhuinn

interrompit.

— Arrête, ne dis pas que tu ne le pensais pas. Manifestement, ça continue à

te peser.

Blay tendit la main, pour prendre celle de Qhuinn.

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— Ce n’est pas vrai, dit-il d’une voix pressante. Merde, je ne sais même pas

pourquoi je t’ai dit ça. Ni pourquoi je t’ai attaqué comme ça.

Qhuinn le regarda, sans répondre.

— Je t’assure, insista Blay. Le passé n’a plus d’importance. Je veux l’oublier.

Ce qui compte maintenant, c’est que tu sois avec moi. (Blay ferma les yeux, et

sa voix devint un murmure.) J’ai tellement besoin de toi, Qhuinn… J’ai

tellement— besoin— de toi.

Bien entendu, Qhuinn voulait connaître tous les détails de que ce qui s’était

passé ce soir, mais lui et Blay avaient tout le temps du monde d’en discuter.

Pour l’instant, le plus important était de réconforter son copain. Que Qhuinn ne

voulait pas voir dans cet état.

Lorsqu’il prit le visage du mâle entre ses paumes, les prunelles bleues

s’écarquillèrent.

— Tu veux qu’on aille se soûler ? proposa Qhuinn.

À cette offre inattendue, Blay eut un pauvre sourire. Même avec un œil poché,

il était toujours adorable. Et la façon dont il regardait Qhuinn— dont il avait

besoin de lui— c’était à la fois enivrant et merveilleux. Seigneur, pensa Qhuinn,

je l’aime tant. S’il ne répétait pas ces mots à son pote chaque seconde du jour et

de la nuit, c’était uniquement pour ne pas être traité d’obsédé. Et pourtant… il

était. Ô que oui.

Á cette idée, Qhuinn eut un léger rire, et détourna les yeux.

— Pourquoi ris-tu ? demanda Blay.

— Pour rien, répondit Qhuinn en haussant les épaules.

Blay se mit à genoux et s’approcha de Qhuinn— qu’il poussa en arrière pour

l’étendre sur le matelas bleu du gymnase. Puis il s’assit sur lui, et lui releva les

deux bras au-dessus de sa tête. L’immobilisant.

— Tu mens. À quoi pensais-tu ?

Puisqu’il n’avait plus l’usage de ses bras, Qhuinn leva les jambes, et les

enroula autour de la taille de Blay. Qu’il serra contre lui.

— Tu pensais m’avoir coincé ? Demanda Qhuinn en riant.

Il savait pouvoir utiliser ses jambes pour écarter Blay de lui— mais pourquoi

l’aurait-il fait ? Ce n’est pas ce qu’il voulait. Il adorait sentir Blay peser sur lui.

Oui mais… un petit combat entre eux pouvait mener à un interlude intéressant.

Et avec tous ces matelas alentour— les possibilités étaient infinies.

Blay se pencha pour mordiller le cou de Qhuinn, avant de lui planter un baiser

sur l’oreille.

— À quoi pensais-tu ? Insista-t-il. Dis-le-moi.

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— À l’obsession que j’ai pour toi, admit Qhuinn. Et à quel point je t’aime.

(Blay posa son front contre le sien, et sa fragrance de mâle dédié émana de tout

son corps.) Embrasse-moi.

Blay se pencha et posa sa bouche sur la sienne, tandis que ses mains se

serraient sur les poignets de Qhuinn. Qui noua davantage ses jambes contre le

corps de son copain—

Quelqu’un s’éclaircit la gorge avec ostentation.

Á cette interruption inopportune, Blay releva vivement la tête, mais sans

changer de position. Jetant un coup d’œil de côté, Qhuinn vit que Vishous et

Rhage venaient d’entrer dans le gymnase. Après un hochement de tête, V

continua tranquillement jusqu’à son casier, dont il sortit différents affaires…

tandis que Rhage restait planté à les regarder avec des yeux écarquillés.

— Nom de Dieu, Blay, s’exclama enfin le mâle. Tu veux qu’on aille chercher

le flic ? À ta place, je déposerais une plainte pour violence domestique.

— Plus tard peut-être, dit Blay en riant, avant de continuer à embrasser

Qhuinn.

Ce n’était pas du tout le genre de Blay d’être aussi expansif en public—

même si c’était pour clouer le bec à Rhage. Mais Qhuinn, par contre, était plus

que d’accord pour suivre.

— Bon sang, faites ça dans une chambre, dit Rhage en secouant la tête.

Sans regarder le Frère, Blay releva la tête et dit à Qhuinn :

— Je veux bien me soûler la gueule... Mais d’abord, je pense qu’il nous faut

une douche.

Qhuinn leva les sourcils, avec un grand sourire.

— Voilà une proposition qui me plaît.

— Je m’en doute, dit Blay d’une voix sensuelle. D’ailleurs, tu m’avais fait

une promesse.

— Oh, gémit Qhuinn. Tu as de la chance. Je m’en souviens très bien.

— Le dernier dans la douche est une bille, dit Blay.

Avec un grand rire, il se redressa d’un bond et partit en courant, aussi rapide

que le vampire qu’il était. Quand Qhuinn se leva pour le suivre, il vit que Rhage

le regardait, bouche bée. Devant l’expression abasourdie du Frère, il ne put

s’empêcher d’éclater de rire. Hollywood qui restait sans voix ? C’était rare.

Quand Vishous regarda aussi son Frère, il eut un rire bref, avant de lui

envoyer une grande claque dans le dos.

— Tu vieillis, Hollywood. Ces jeux-là ne sont plus de ton âge. (Il regarda

Qhuinn.) N’oublie pas de te laver les oreilles, gamin.

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Chapitre 26

Blay examinait les dégâts de son visage dans la glace quand Qhuinn entra en

trombe dans la salle de bain. Le mâle avança directement jusqu’à la douche,

alluma l’eau, et arracha son tee-shirt qu’il fit passer par-dessus sa tête.

Étonné du silence de son copain, Blay se retourna, et le regarda enlever, l’une

après l’autre, ses lourdes bottes de combat. Quand Qhuinn se redressa et croisa

son regard, Blay eut un rire moqueur.

— Tu ne m’as pas raté, dit-il en pointant son œil.

— Tu l’as bien cherché.

En trois longues enjambées, Qhuinn parcourut l’espace qui les séparait, prit

Blay par le bras, et l’attira jusque dans la douche où il le flanqua sous le jet,

entrant aussi dans la cabine derrière lui. Les deux mâles portaient encore leurs

pantalons. Blay s’appuya contre le mur du fond tandis que Qhuinn restait planté

en face de lui, les sourcils froncés, paraissant plongé dans une profonde

réflexion. Puis il passa ses mains dans ses cheveux mouillés, sans se soucier de

l’eau qui dégoulinait le long de son corps musclé et collait à ses jambes et ses

hanches le cuir de son pantalon.

Soudain, Blay ne supporta plus le silence, ni la distance physique entre eux. Il

tendit la main, glissa ses doigts sous la ceinture de Qhuinn, et l’attira vers lui.

Mais Qhuinn se raidit, et posa les paumes de chaque côté du visage de Blay, les

bras tendus. Dans la lumière tamisée de la salle de bain, les yeux vairons

brûlaient d’un feu intense.

— Quelque chose ne va pas ? Demanda Blay après l’avoir examiné un

moment en silence.

— Ton accusation— au sujet de ces putes… (Qhuinn eut une moue

dégoûtée.) Il faut qu’on en parle.

— Maintenant ? Tu veux en parler maintenant ?

À son avis, ce n’était ni le bon endroit, ni le bon moment, pour discuter d’un

tel sujet. En vérité, il aurait même préféré ne plus jamais l’évoquer. Il avait

regretté ses paroles dès qu’elles avaient quitté ses lèvres. Et espéré aussi que ses

excuses, dans le gymnase un peu plus tôt, seraient suffisantes. Et pourtant, il

était conscient de se mentir. Parce qu’il continuait à y penser. Il ne savait pas

pourquoi— mais ça lui pesait encore.

Et manifestement, Qhuinn le savait.

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— Oui, dit Qhuinn, accentuant le mot d’un hochement de tête. Je n’ai pas

l’intention de te baiser avant que ce problème soit réglé

— Peut-être aurions-nous dû en parler avant d’entrer sous la douche ?

suggéra Blay.

Qhuinn baissa les yeux vers la poitrine nue de Blay, tandis qu’il enlevait l’une

de ses mains du mur pour caresser du doigt son torse sur toute la longueur. Il

s’arrêta à la ceinture du jean, en ouvrit le bouton, et descendit la fermeture

éclair.

— Personnellement, je trouve qu’on est très bien ici, dit-il d’une voix rauque,

en remontant les yeux vers ceux de son copain. Alors, ces putes ? Qu’est-ce que

ça t’a fait ?

Seigneur, un simple effleurement des doigts de Qhuinn suffisait à lui faire

bouillir le sang. Comment avoir une conversation sérieuse dans cet état ?

Impossible. Il baissa les yeux, surpris quand même que Qhuinn les ait flanqués

sous la douche avec leurs pantalons. En plus, son copain allait avoir du mal à

s’extirper de son cuir mouillé. Mais bon sang, le voir comme ça était la vision la

plus sexy qui soit. Un guerrier— incroyablement beau— à moitié nu— et tout

mouillé… Mmm.

Qhuinn posa son index sous le menton de Blay pour lui faire relever la tête.

— Si j’ai laissé nos pantalons en place, mec, c’est pour avoir une chance de

te parler. Parce que si tu étais à poil, je t’aurais déjà sauté dessus. (Avec un rire

rauque, il se pencha vers Blay et huma profondément le creux de son cou.) Déjà,

tu ne me facilites pas les choses. Je sens ton sang qui bout... de désir pour moi.

» (Il s’interrompit, baissa la main, et saisit le sexe de Blay, raide et

douloureux dans son pantalon.) Tu en as vraiment envie, pas vrai ?

Incapable de répondre, Blay se contenta de haleter, et Qhuinn s’écarta d’un

geste vif, jusqu’à coller son dos à l’angle opposé de la douche. Il croisa les bras,

et eut un sourire sec.

— Plus vite tu parleras, plus vite on pourra baiser.

— Bordel, grommela Blay, pas trop heureux de la situation. Tu deviens

sadique.

Le visage grave, Qhuinn fit un pas en avant.

— Dis-moi ce que ça t’a fait ?

Il y eut un long silence. Blay pesa sa réponse… se souvenant de toutes les fois

où il avait dû voir Qhuinn baiser frénétiquement tous ceux et celles qui le lui

demandaient— n’importe qui, sauf lui. Qhuinn n’avait pas arrêté de le

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repousser, encore et encore. Qu’est-ce que ça lui avait fait ? En y réfléchissant, il

n’y avait qu’un seul mot pour décrire son ressenti.

— Mal, admit-il enfin. J’ai eu mal. À en crever.

Une expression de douleur passa sur le visage de Qhuinn. Qui se rapprocha, et

plaça la main sur la poitrine de son copain, au niveau du cœur.

— Continue, murmura-t-il.

Blay le regarda, admirant une fois encore les yeux uniques et si beaux. Il se

mit à parler d’une voix étranglée :

— Avant que je t’avoue être gay, ça ne me gênait pas trop. J’aimais bien te

voir en pleine action, même si j’étais quand même un peu jaloux. Mais ensuite,

quand tu as su ce que j’éprouvais réellement pour toi, c’est devenu plus difficile.

J’étais de plus en plus jaloux, presque aigri. Je t’en voulais. (Blay secoua la

tête.) Je n’arrivais plus à le supporter. J’avais la sensation que tu faisais exprès

de t’exhiber devant moi pour me rappeler que je ne pourrais jamais t’avoir. Et la

goutte d’eau a été cette fille chez le tatoueur... C’était si cruel. Même si tu ne

pouvais pas me rendre les sentiments que j’avais pour toi, tu restais quand même

mon meilleur ami. Et pourtant, (il haussa les épaules,) tu semblais te foutre de ce

que j’éprouvais. Du mal que tu me faisais.

— Blay, je sais que ça parait con, dit comme ça, mais je pensais te rendre

service. Je pensais que si tu me détestais, tu réaliserais mériter bien mieux que

moi. Ce n’est pas une excuse, je sais, mais je te jure que j’étais sincèrement

persuadé d’agir au mieux de tes intérêts. J’ai été nul, je te l’ai déjà dit. Et ça me

tue de t’avoir fait mal. Vraiment. Mais pour que ça marche entre nous, il faut

oublier le passé. Pas question que cette accusation me retombe sur la tronche à

chaque dispute que nous aurons.

Blay ne put s’empêcher de rire. Ah, ils avaient l’air fin, plantés là sous la

douche, encore à moitié habillés, à s’expliquer ainsi, cœur à cœur.

Et c’était une bonne chose aussi que le manoir possède de très nombreux

chauffe-eau, sinon la douche serait déjà glacée.

— Qu’y a-t-il de si drôle ? Demanda Qhuinn.

— Ta façon de parler. Ça fait très adulte, répondit Blay avec un sourire. (Puis

il se pencha en avant, prit le visage de son copain entre ses mains, et l’embrassa

doucement.) Je te pardonne.

Et soudain, aussi simplement que ça, ce fut vrai. Peut-être avait-ce été le

problème tout du long : Qu’il n’ait pas encore vraiment pardonné à Qhuinn…

Mais entendre le mâle reconnaître ses torts à voix haute— et même en offrir une

explication— avait vidé la plaie. Et Blay était conscient aussi de la tristesse de la

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voix de Qhuinn et de la sincérité de ses excuses, c’était important pour lui.

Maintenant, enfin, il pouvait pardonner. Pour de bon.

— Et tu le penses vraiment ? Insista Qhuinn.

— À 100 %. (Blay serra les deux mains sur la taille de Qhuinn, et colla son

corps contre le sien.) Et maintenant… on peut passer aux choses sérieuses ?

— Bordel, oui, gronda Qhuinn, en montrant les dents. (Glissant ses longs

doigts sous le pantalon de Blay, il lui agrippa les reins à deux mains, tandis que

sa bouche se posait sur sa jugulaire.) Est-ce que je peux abuser de toi ? Faire

tout ce que je veux ?

Surpris, Blay réfléchit une minute. Était-ce prudent d’accepter à l’aveuglette

une telle demande ? Après tout, niveau sexe, Qhuinn était bien plus audacieux

que lui. Mais les lèvres de son copain couraient le long de son cou, mordillaient

le lobe de son oreille, et la décision lui échappa.

— Oui, haleta-t-il.

Qhuinn recula d’un pas, prit le poignet gauche de Blay, et chercha quelque

chose dans son pantalon. En entendant un cliquètement métallique, Blay

écarquilla les yeux— et plus encore quand il vit les menottes dans la main de

son copain. Qhuinn referma le premier bracelet sur son poignet, avant de le

regarder, l’air carrément démoniaque. Les yeux dans les yeux, il referma le

second bracelet sur l’autre poignet de Blay.

— Ben dis donc, tu sembles bien monté, dit Blay.

— Ô que oui.

Sans rien ajouter, Qhuinn produisit une autre paire de menottes. Et l’attacha à

celle qui serrait déjà les poignets de Blay, puis il le força à lever les bras au-

dessus de sa tête, tandis qu’il fixait le dernier bracelet libre au jet de la douche.

Blay ferma les yeux, se concentrant sur le toucher des mains fortes qui lui

caressaient les bras, descendaient le long de ses flancs, passaient dans son dos.

Partout où les doigts l’effleuraient, sa peau frémissait, comme électrisée. Puis

Qhuinn s’immobilisa. Quand Blay releva les paupières, il vit que son ami le

regardait. Les cheveux noirs dégouttaient sur le front haut, collant les mèches

au-dessus du regard perçant. Le mâle mordillait sa lèvre inférieure. Ce qui attira

le regard de Blay. Elle était si renflée, si rouge, si tentante, avec cet anneau qui

la perçait au milieu. Il eut un geste de la tête, mais Qhuinn recula, hors de

portée.

— Non, murmura-t-il, c’est moi qui décide de ce que tu peux faire.

— Et quels sont tes projets ? Demanda Blay. Me torturer à mort ?

— Non, répondit Qhuinn, en l’embrassant doucement. Plutôt te baiser à mort.

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Il accentua la pression de ses lèvres, serrant à deux mains la nuque de son

copain.

Blay n’était pas certain de pouvoir le supporter. Il aurait voulu toucher

Qhuinn. Il en avait terriblement besoin. Mais les lèvres du mâle quittèrent sa

bouche poursuivre la ligne de sa mâchoire, tandis que ses mains s’attaquaient à

son jean, descendant sur ses hanches le tissu raide et mouillé. La langue de

Qhuinn suivit sa veine dans son cou, puis descendit sur sa poitrine pour titiller

ses mamelons. Blay sentit le piercing de Qhuinn frotter sur cette zone si

sensible.

Son copain s’écarta le temps de lui enlever son pantalon. Puis il remonta ses

mains sur ses jambes tandis que sa bouche se posait sur son ventre. Blay brûlait

de désir, les muscles frémissants, et son corps arqué tira sur les menottes qui le

maintenaient. Il laissa tomber sa tête quand une langue chaude effleura son sexe.

Bon sang. Qhuinn était à genoux devant lui, et le piercing de sa langue envoyait

des éclairs de feu partout où il se posait. Blay se cabra une nouvelle fois sous la

sensation grisante. Qhuinn prit enfin son sexe dans sa bouche, et eut une longue

aspiration, avant de s’écarter pour dire en regardant Blay :

— Je vais bien m’occuper de toi, mais n’oublie pas que c’est moi qui décide

quand— où— et comment. Pas question que tu jouisses sans que je te le dise.

C’est compris ?

Malgré son ton autoritaire, la voix de Qhuinn n’était que séduction et

promesses brûlantes.

Blay hocha la tête— puis regarda, tétanisé, la plus belle BAP qu’il ait jamais

vue se refermer sur sa queue. Oh bordel ! Qhuinn avait incontestablement une

« bouche à pipe ». Blay ferma les yeux lorsque la tête brune s’agita d’avant en

arrière, le caressant à une cadence rapide et régulière— tandis que les piercings

agissaient à tous les bons endroits. Douce Vierge Scribe, pensa Blay, il n’aurait

jamais pensé être un jour aussi reconnaissant envers un piercing...

Quand Qhuinn accéléra son rythme, Blay se mordit la lèvre pour s’empêcher

de remuer des hanches. Sa respiration devenait de plus en plus difficile. Il oublia

même être attaché et, instinctivement, voulut baisser les bras, tirant si fort que sa

peau se déchira. Merde, il ne fallait pas qu’il arrache la tête de douche.

Au moment même où il s’apprêtait à jouir, Qhuinn s’écarta. Nooon— c’était

une vraie torture.

— Merde, gémit-il, j’y étais presque.

— C’est moi qui décide, lui rappela Qhuinn avant d’ordonner : Tourne-toi.

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Il aida Blay à se retourner, et lui poussa le visage contre le mur. Puis il lui

saisit les hanches et se pencha sur lui, le mordillant sur la nuque.

— Je croyais que tu devais me baiser à mort, protesta Blay, toujours haletant.

Il voulait retrouver sur son sexe la chaleur humide de la bouche de Qhuinn. Il

voulait jouir au fond de sa gorge, plus fort qu’il ne l’avait jamais fait. Il était si

proche— Bordel, Qhuinn avait arrêté juste avant qu’il n’explose.

Ignorant manifestement sa demande, Qhuinn lui caressa le dos, de haut en

bas, d’un geste apaisant.

— Tu as un dos parfait et superbement musclé, dit-il, avant de baisser ses

mains jusqu’aux reins de Blay, envoyant un éclair de feu à travers tout le corps

ployé devant lui. Et un cul d’enfer.

Il y eut un long silence, troublé seulement par l’eau qui coulait, la respiration

rauque de Blay, et le frottement des mains de Qhuinn sur sa peau.

Puis Qhuinn s’écarta, et Blay l’entendit enlever (avec difficulté) son pantalon

de cuir.

— Alors, demanda le mâle, ça te plaît d’être attaché ?

— Je n’en suis pas encore certain, répondit Blay. (Pour l’instant, il se sentait

quelque peu mal à l’aise.)

— Je veux que tu aimes ça. Je vais m’assurer que tu apprécies cette position.

Blay sentit quelque chose de froid couler dans son dos, où Qhuinn avait versé

du savon. Puis le mâle le frotta, et les bulles glissèrent le long de ses jambes.

Qhuinn pressa enfin son corps nu contre le sien, et Blay sentit l’énorme sexe

rigide du mâle frotter contre lui. Il ondula des hanches, cherchant désespérément

une pénétration, mais Qhuinn l’en empêcha.

— Arrête, marmonna-t-il, avant de se pencher pour lui embrasser l’oreille.

Dis-moi d’abord ce que tu veux ?

Que tu me baises, faillit hurler Blay. Que tu me plantes ta putain de queue

jusqu’au fond des tripes.

— Touche-moi, gémit-il seulement.

Il sentit la pointe des canines du mâle lui égratigner l’oreille et ses mains se

serrer à sa taille puis glisser vers l’avant, sous son nombril.

— Où exactement veux-tu que je te touche ? (La respiration devint plus

rauque à son oreille, tandis que la main de Qhuinn agrippait son sexe.) Ici ?

— Oui, haleta Blay.

Grâce au savon, Qhuinn pouvait glisser sa paume le long de son érection d’un

mouvement ample et fluide.

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— Ça te plaît d’être attaché pendant que je te baise ? Demanda Qhuinn, la

bouche sur son épaule.

Blay hocha la tête. Il était crispé de partout, tendu, électrisé— et crevait

d’envie de trouver un apaisement à sa tension sexuelle. En fait, il n’arrivait

même pas à aligner deux mots pour former une réponse cohérente. Qhuinn le

caressa de plus en plus vite, tandis que son autre main glissait le long de son

épine dorsale, jusqu’à ses reins. Puis il se positionna derrière lui, et s’apprêta à

entrer… avant de s’arrêter encore.

— Seigneur, gémit Blay, tu me tues.

Qhuinn répondit en le pénétrant d’un doigt, sans cesser de caresser son sexe.

Puis il rajouta un second doigt— et remua les deux mains en cadence.

Une chance pour Blay que son copain soit ambidextre.

Sous le choc des sensations qui enflammaient son corps, Blay poussa un cri

rauque— et laissa tomber sa tête en arrière sur l’épaule de Qhuinn, lui offrant sa

gorge. Aussitôt, il sentit de longues canines s’approcher de son cou. Bon sang, si

le mâle prenait en plus sa veine, Blay risquait l’overdose. Il avait à peine eu

cette idée que Qhuinn émit un grondement sourd, et le mordit. Il suffit de deux

succions sur sa jugulaire pour que Blay explose— le jet de sa jouissance

ricochant sur le marbre. Qhuinn continua ses triples attentions aux endroits

sensibles, prolongeant son orgasme, encore et encore.

Sans quitter sa veine, Qhuinn saisit son propre sexe et se positionna derrière

Blay qu’il prit soudain, en quelques coups de reins violents, jusqu’à l’enfiler

complètement. Alors seulement, il relâcha son cou— scella les deux entailles—

s’agrippa à sa taille— et commença à le marteler.

— Mets un pied sur le siège, ordonna Qhuinn.

Blay obéit. Il leva le genou droit et s’appuya du pied au rebord de marbre

creusé dans le mur devant lui. Qhuinn pesa sur son échine, le penchant plus en

avant, tandis que les menottes cliquetaient contre le tuyau. Blay grimaça un peu

sous la brûlure de ses poignets, mais ce fut vite oublié quand Qhuinn s’enfonça

encore plus profondément en lui.

— Oh, Blay, bordel, que c’est bon, marmonna le mâle.

Blay tourna la tête et se mordit le bras, tout en écoutant les gémissements de

plaisir que poussait son ami. Entendre ainsi son nom— entre deux

halètements— encore et encore— c’était pour lui un merveilleux chant d’amour.

Et même aux prises à une frénésie sexuelle, alors que ses hanches pistonnaient

sans répit le corps ployé, les mains de Qhuinn restaient douces et aimantes. Blay

sentait leur moindre caresse sur sa taille ou dans son dos.

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Enfin, Qhuinn se pencha encore et posa son front entre les omoplates de Blay,

avant de s’enfoncer une dernière fois, le corps agité de spasmes, tandis qu’il

jouissait en serrant son amant contre lui. Puis il se figea, et sa respiration se

calma peu à peu.

— Je t’aime, Blay, dit-il en embrassant son échine dorsale.

— Je t’aime aussi… Mais ce serait encore plus vrai si tu me libérais, ajouta

Blay.

Avec un rire sonore, Qhuinn se redressa, et alla chercher dans son pantalon la

clé des menottes.

Une fois libéré, Blay se frotta immédiatement les poignets. Bordel, il avait

dégusté. Il remua aussi ses épaules nouées, et se tordit le cou d’un côté à l’autre.

— Ça va ? Demanda Qhuinn.

— Oui, à condition que tu ne n’abuses pas davantage de moi cette nuit. (Blay

eut un ricanement.) D’ailleurs, où as-tu trouvé ces menottes ? Elles sont à

Butch ?

— Non, je les ai piquées parmi divers trucs confisqués aux lessers, répondit

Qhuinn. Assieds-toi.

Sans attendre d’être obéi, il prit Blay par l’épaule, et le poussa sur le siège de

marbre. Manifestement, le mâle était toujours d’humeur autoritaire. Réprimant

un sourire, Blay regarda son copain s’approcher de lui, une bouteille de

shampooing à la main. Qhuinn en mit quelques gouttes sur ses paumes, avant de

reposer la bouteille et de faire mousser le mélange. Quand leurs yeux se

rencontrèrent, Qhuinn eut un bref sourire, avant de lui frotter les cheveux.

— Que s’est-il passé ce soir ? Demanda-t-il tout en s’activant.

Á ces mots, Blay sentit son cœur sombrer. Jusqu’à maintenant, perdu dans sa

passion pour Qhuinn, il avait réussi à oublier cette horrible scène avec sa mère.

Il ferma les yeux, refusant de se remettre à pleurer.

Sans rien ajouter, Qhuinn se contenta d’attendre et de lui masser le crâne. Au

bout d’un long moment, Blay leva les mains pour se frotter le visage, effaçant

aussi la trace d’une larme unique qui perlait au coin de sa paupière.

Mais Qhuinn lui prit les mains, et le fit se relever. Puis il plaça sous le jet pour

rincer le shampooing de sa tête, le savon de son corps. Il lui envoya ensuite une

claque sur les fesses.

— Allez, bouge ton cul, mec. On va se sécher vite fait, histoire d’aller se

pieuter sans attendre. J’ai besoin de te tenir dans mes bras.

Blay hocha la tête, sans faire confiance à sa voix tremblante. Ils sortirent

ensemble de la douche, et Qhuinn les sécha tous les deux. Ils empruntèrent

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ensuite deux peignoirs de bain, traversèrent le centre d’entraînement désert

jusqu’au bureau de Tohr pour accéder au long tunnel qui remontait vers le

manoir. Une fois dans le grand hall, ils filèrent directement dans leur chambre

sans croiser personne. La porte à peine ouverte, Blay alla droit jusqu’au lit où il

s’étendit, à plat sur le dos, tandis que Qhuinn rangeait ses armes et son

blouson— du moins, les enlevait du lit pour les jeter sur un fauteuil.

Puis Blay regarda Qhuinn s’approcha du lit et se pencher sur lui. Les lèvres

soyeuses du mâle tracèrent un chemin en travers de son ventre— sur sa

poitrine— dans son cou, s’attardant doucement pour lécher la morsure qu’il lui

avait faite un peu plus tôt.

Blay sentit une autre larme glisser le long de sa tempe en voyant Qhuinn

prendre son poignet, et y lécher aussi les coupures provoquées par l’acier des

menottes. Il soigna de même son autre main, avant de peser de tout son poids sur

Blay, tandis que ses lèvres caressaient doucement la tuméfaction de son œil.

Blay essaya de se retenir, mais en vain— et un gémissement plaintif lui échappa.

Qhuinn s’écarta un peu, et le regarda longuement. Si le mâle lui avait

autrefois brisé le cœur, son amour et ses attentions permettaient à Blay de se

reconstruire aujourd’hui.

Qhuinn posa ses deux coudes et ses avant-bras de chaque côté du visage de

Blay, caressant les cheveux roux encore mouillés.

— Laisse-leur un peu de temps, dit-il à mi-voix. Á tes parents... Ils s’y feront

petit à petit. Tu verras, ça finira par s’arranger.

— J’espère, murmura Blay, conscient que Qhuinn essayait surtout de le

rassurer.

Qhuinn roula sur le dos et le prit dans ses bras. Blay se serra fort contre son

ami, posa la tête sur son épaule, le bras sur son torse.

— J’ai fait tomber mon téléphone dans la piscine, avoua-t-il. C’est pour ça

que je n’ai pas pu t’appeler.

Qhuinn pressa sa joue sur les cheveux roux de Blay, tandis que sa main lui

caressait le dos. Après un long silence, il demanda :

— Exprès ?

— Oui.

— Ça n’est pas grave. On t’en trouvera un autre.

— Je suis désolé d’avoir passé ma frustration sur toi.

— Je suis désolé de t’avoir poché un œil. Maintenant dors. Avec un peu de

bol, tu guériras durant la nuit. Comme ça, tu ne ressembleras plus à une femme

battue au petit déjeuner.

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Blay se mit à rire, avant de fermer les yeux, enivré par la fragrance sombre

qui émanait de Qhuinn.

— Je te raconterai tout demain, promit-il.

— Pas de problème. J’attendrai que tu sois prêt.

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Chapitre 27

— Je voudrais pouvoir sortir cette nuit.

Qhuinn était plutôt nerveux en formulant sa requête à Wrath.

— Je croyais que c’était déjà le cas. Toi et John n’êtes-vous pas programmés

pour sortir ?

Qhuinn était le premier à reconnaître que, assis derrière son somptueux

bureau, le Roi aveugle était un mâle gigantesque. Et sacrément terrifiant. Wrath

s’adossa à son fauteuil, et balança ses lourdes bottes de combat sur le paquet de

dossiers en cours qui encombrait son bureau. Qhuinn jeta un coup d’œil à

Georges, allongé sur le tapis, et tapota légèrement son genou. Le chien du roi se

releva lentement de sa confortable position, et trottina jusqu’à lui pour poser sa

grosse tête contre sa jambe.

— Salut, Georges, murmura Qhuinn, en frottant le chien derrière les oreilles.

— En fait, fils, c’est une nuit de congé que tu cherches, pas vrai ?

Qhuinn n’arrivait pas à comprendre la raison de sa nervosité. Wrath allait

simplement lui dire oui ou non— pas de quoi en faire un pataquès. Bien sûr, il

espérait plutôt un agrément. Aussi il déglutit péniblement, et répondit :

— Oui, j’aimerais pouvoir quitter le manoir sans John.

Il était impossible de deviner quelque chose sur le visage figé du roi. Le mec

était sacrément doué pour cacher tout ce qu’il pensait. Mais après un moment, il

s’éclaircit la gorge, et demanda :

— Combien de temps ?

— Quelques heures.

— Et tu comptes aller où ?

— Hmm… (Qhuinn réfléchit. En fait, il n’avait pas été aussi loin dans ses

projets. Il n’avait jamais pensé atteindre ce point de la conversation sans se faire

foutre à la porte.) Aucune idée.

— Je présume que tu emmèneras Blay avec toi.

Waouh… Se retrouver en ville— seul— avec Blay. Depuis combien de temps

ça ne leur était-il plus arrivé ?

Qhuinn hocha la tête, bien que le roi ne puisse pas le voir.

— Oui.

Wrath releva ses pieds, et se pencha pour décrocher son téléphone. Il tapa

quelques chiffres, et mit le haut-parleur de l’appareil.

— Ouais ? Répondit Vishous.

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— Mon frère, Qhuinn veut se barrer ce soir avec son pote en ville. Pourrais-

tu te charger de garder un œil sur John ?

— Bien sûr, répondit V d’une voix sardonique. Je suis très doué comme

baby-sitter. N’oublie pas de prendre une photo des deux clampins avant qu’ils

ne sortent courir le guilledou. Histoire de garder un souvenir.

Wrath riait en raccrochant le téléphone. Mais Qhuinn leva les yeux au ciel.

Quand diable sa relation avec Blay serait-elle prise au sérieux ?

— Tu as cinq heures, dit le roi. À compter de maintenant. Et pas question de

combattre. Arrange-toi pour que je n’aie pas à regretter ma décision.

— Merci beaucoup, Monseigneur.

D’un bond, Qhuinn se releva, et fonça vers la porte, pressé de se barrer avant

que le roi ne change d’avis.

Blay était encore enfoui sous les couvertures quand Qhuinn retourna dans sa

chambre. Dès que Qhuinn s’assit à côté de lui, Blay ouvrit immédiatement les

yeux, le visage inquiet.

— Où étais-tu ? Demanda-t-il très vite.

Qhuinn releva des sourcils interrogateurs. Son compagnon avait peur. Mais de

quoi ? S’inquiétait-il que Qhuinn ait disparu ? Blay poussa un long soupir, et se

laissa retomber sur l’oreiller, puis il passa la main dans ses cheveux roux.

— Je suis désolé. C’était juste un rêve idiot. Mais tellement réaliste. J’y ai

vraiment cru…

Qhuinn ne le quittait pas des yeux, puis il tendit la main pour caresser la barbe

rousse qui poussait sur ses joues. Les yeux saphir se braquèrent aussitôt sur lui,

et la respiration de Qhuinn s’étrangla dans sa gorge.

— Tu es déjà habillé, remarqua Blay.

Qhuinn se força à détourner le regard pour vérifier ce qu’il portait— une

chemise noire, et son jean préféré de chez A&E. Il releva les yeux sur Blay, et

sourit, frottant une dernière fois le pouce sur sa joue avant de retirer sa main.

— J’ai demandé une audience à Wrath.

— Et c’est pour ça que tu t’es fait tout beau ? Dit Blay en riant.

— En tout cas, j’ai réussi à nous obtenir une nuit libre. Et ne me demande pas

comment j’ai fait. Aucune idée. Je suis juste rentré dans son bureau. Je lui ai

demandé si on pouvait sortir sans John. Et il a dit oui. Il m’a donné cinq heures.

(Qhuinn regarda sa Rolex.) En fait, pour être précis, on n’a plus que quatre

heures trois quart. Alors je te suggère de sortir du lit, et de t’activer.

— Il t’a dit oui ? Insista Blay. Juste comme ça ?

Qhuinn haussa les épaules.

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— Il m’a posé quelques questions, mais en gros oui, ça a été juste comme ça,

dit-il avec un sourire.

Blay se rassit dans le lit, laissant les couvertures lui tomber à la taille, révélant

la peau dorée qui recouvrait ses muscles puissants et souples. Qhuinn détourna

vivement la tête des que le mâle sortit du lit. S’il souhaitait quitter le manoir, il

devait se concentrer sur autre chose que sur le corps nu de son copain. Aucune

raison pour le moment d’étudier de trop près chaque centimètre carré exposé de

cette peau lisse, ou la façon dont les muscles gonflaient au moindre

mouvement— au bras— à la poitrine— au ventre. Pour se changer les idées,

Qhuinn avança jusqu’à la télé, récupéra sa télécommande, et commença à

zapper à travers les chaînes. Il ne tourna pas la tête pour regarder Blay s’habiller.

Un seul coup d’œil à ce cul d’enfer et il était foutu.

— Dépêche-toi, dit-il, les yeux rivés sur l’écran.

Une demi-heure après, Blay sortit de la salle de bain, avec une chemise

blanche à col en pointe, et un pantalon chocolat. Il était tout aussi magnifique

qu’un peu plus tôt, à poil.

— Où allons-nous ? Demanda le mâle. Suis-je correctement habillé ?

— Tu es superbe, répondit Qhuinn à mi-voix. (Il traversa la chambre,

s’approcha de Blay, et sortit de sa poche un téléphone.) Voici ton nouveau

portable. V l’avait déposé pour toi chez Wrath. Il t’a laissé le même numéro.

Quand Blay tendit le bras pour récupérer l’appareil, Qhuinn remarqua qu’il

portait ses boutons de manchettes, et eut un sourire heureux.

— Merci, dit Blay en regardant son téléphone. (Sa voix était un peu triste, il

baissa la tête, en soupirant.) J’ai appelé ma mère, hier soir, et je l’ai prévenue

que j’étais amoureux de toi. Et ça l’a fait pleurer. Elle m’a raccroché au nez en

disant qu’elle avait besoin de temps. Tu sais, je ne pensais vraiment pas qu’elle

réagirait comme ça.

Qhuinn fit un pas en avant, et serra Blay contre lui, laissant la fragrance du

mâle lui envahir les sinus. Très vite, il s’écarta. Il essayait de faire baisser sa

tension, mais depuis qu’il était entré dans la pièce, il crevait d’envie de sauter

sur Blay. Comme tout vampire digne de ce nom, Qhuinn avait un parfait odorat,

et certaines émotions étaient impossibles à cacher. Il sentait l’excitation sexuelle

de Blay, mais ce serait pour plus tard.

— On n’a plus que quatre heures, chuchota Qhuinn. Il faut qu’on y aille.

— Si tu le dis, répondit Blay. Qu’as-tu prévu ?

— As-tu envie de passer chez tes parents ?

— Je n’en sais vraiment rien, dit Blay.

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Il alla jusqu’à la commode, d’où il sortit son portefeuille qu’il mit dans sa

poche. Qhuinn avança vers lui.

— Tu sais, ta mère est probablement encore sous le choc. Ça l’aiderait sans

doute de te voir en personne. Et après tout, que risques-tu ? (Blay hocha la tête,

et Qhuinn le prit par les épaules.) Et je serai avec toi. Tu ne seras pas seul.

— D’accord. Mais pas maintenant. Pour une fois que j’ai la chance de sortir

avec toi, je ne veux personne entre nous.

— Alors on y va, dit Qhuinn en lui prenant la main.

Ils prirent la BMW de Blay et se promenèrent pendant une heure dans

Caldwell. Blay décida soudain qu’il mourait d’envie d’avaler un Big Mac, aussi

ils s’engagèrent dans la file d’un Mac drive et y commandèrent deux menus Best

Off chacun, avec un grand coke. Ils durent attendre un moment, parce que la

serveuse dans la cabine— une petite brune manifestement troublée par Blay—

fit tomber un premier verre sur le ciment. Bien entendu, le mâle lui sourit

aimablement, en lui assurant que ce n’était pas grave. Qhuinn sentit monter sa

jalousie, mais il réussit à la contenir. Nom de Dieu, il n’allait quand même pas

s’en prendre à une gamine humaine qui travaillait à Mac Do ? Arrête de jouer au

con, mec, s’ordonna-t-il à lui-même.

— Toujours tes bonnes manières, marmonna Qhuinn, tandis que Blay lui

tendait le sac qui contenait leurs sandwiches.

Blay ignora cette remarque et dit :

— Je vais t’emmener dans mon ancienne tanière. C’est un endroit secret.

— Ta tanière ? Quand il y allais-tu ? demanda Qhuinn avec curiosité.

Blay haussa les épaules.

— Je venais souvent ici quand j’étais pré-trans, et même plus tard. En

général, pour m’éloigner de toi.

Avec un bref sourire, il jeta un coup d’œil à Qhuinn, avant de reporter son

attention sur la route. Il s’engagea peu après dans une longue allée bordée des

deux côtés d’arbres gigantesques.

— Dans le parc ? Demanda Qhuinn.

— Ouais, mais dans un endroit très reculé du parc.

Blay roula un moment sous les frondaisons des arbres, puis tourna sur une

petite allée qui montait vers la colline. Arrivé en haut, il fit demi-tour, puis

recula de quelques mètres, avant de couper le moteur.

— Voilà, c’est là.

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Qhuinn ne tenta pas de sortir de la voiture. Il resta à regarder Blay. Dans

l’obscurité de l’habitacle, avec la lueur de la lune qui soulignait ses traits ciselés,

le mâle était magnifique.

— Je t’assure que la vue dehors est bien plus intéressante, dit Blay

doucement.

— Ça m’étonnerait, répondit Qhuinn. Est-ce que tu viens encore ici ?

— Non, dit Blay en secouant la tête. La dernière fois, c’était le soir où j’ai

rompu avec Saxton. C’est un très bon endroit pour s’éclaircir les idées. (Il

s’arrêta, sortit deux cokes du sachet en papier et continua :) Et dans notre cas,

c’est un très bon endroit pour pique-niquer. Allez viens.

Blay ouvrit sa portière et sortit de la voiture.

Qhuinn regarda Blay jusqu’à ce que sa silhouette se fonde dans l’obscurité,

puis il attrapa le sac Mac Do et sortit à son tour. Il alla rejoindre son copain sur

la margelle en pierre qui bordait le parking, où il posa le sac, avant de s’asseoir

lui aussi. Tranquillement, ils prirent chacun leur part de nourriture, et

commencèrent à manger.

Quand Qhuinn finit par regarder autour de lui, il se figea. De là où ils étaient

installés, ils surplombaient la colline, avec une vue à couper le souffle sur la

ville de Caldwell qui s’étalait devant eux.

— Bon sang, haleta-t-il.

— C’est beau, non ? Demanda Blay, avant d’attaquer son Big Mac.

Incontestablement— et encore, le mot ne suffisait pas. Qhuinn n’aurait jamais

pensé que la ville illuminée la nuit pouvait offrir une vision aussi incroyable. En

fait, il avait du mal à croire qu’il s’agissait de ces mêmes quartiers où il

combattait tous les soirs avec la Confrérie, de ces mêmes ruelles sombres que

hantaient aussi les ennemis de leur race. Vu d’ici, ce soir, tout était différent,

magique. Il était seul— au-dessus du monde— avec Blay— sans personne entre

eux.

Ils mangèrent en silence, savourant le moment : Leur intimité complice, la

vue époustouflante, et l’air pur de la nuit.

Quand Blay eut terminé, il leva la tête et regarda les étoiles. Pendant ce

temps, Qhuinn ramassa les débris dans le sac. Puis il sauta du mur, et s’approcha

d’une poubelle proche pour s’en débarrasser. Quand il revint, il resta debout,

entre les jambes de Blay, et posa les bras sur ses cuisses.

— Comment as-tu trouvé un endroit pareil ? demanda-t-il.

— Mon père m’emmenait souvent ici quand j’étais jeune.

— Tu ne me l’as jamais dit.

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— Si je l’avais fait, ça n’aurait plus été un secret. (Blay sourit, se redressa.)

Maintenant, ce sera notre secret, ajouta-t-il en l’embrassant.

Qhuinn ferma les yeux, savourant la douceur et la tendresse des lèvres de

Blay contre les siennes. Quand il releva les paupières, il croisa le regard bleu qui

brillait sous la lumière des étoiles. Et en resta tétanisé, comme ensorcelé,

quelques secondes plus.

— Je veux que tu sois mon compagnon, dit-il enfin.

Blay posa son front sur le sien, et prit le cou de Qhuinn entre ses mains.

— Tu crois qu’on nous en donnera l’autorisation ? Demanda-t-il.

Qhuinn haussa les épaules. Il ne voyait pas pourquoi leur relation ne serait pas

traitée avec le même respect qu’une autre.

— Pour Wrath et la Confrérie, continua Blay, je pense que ça ne posera

aucun problème— sauf que la Vierge Scribe ne nous donnera probablement pas

sa bénédiction. Mais j’accepte ta proposition.

Il eut un rire heureux, et Qhuinn sourit, puis l’embrassa légèrement avant de

s’écarter. Quand il se tourna pour admirer à nouveau Caldwell, étalé devant eux,

Blay se mit derrière lui, les bras serrés autour de sa taille, la bouche posée sur sa

nuque.

— Tu es prêt ? Demanda Qhuinn, en posant une main sur le bras de Blay.

— Non. (Blay soupira, puis se mit à rire.) Mais si on attend que je le sois, ça

nous prendra bien plus de temps que celui qui t’a été accordé. Alors tant pis.

Qhuinn pivota sur lui-même, et le prit dans ses bras, le serrant fort.

— Nous serons bientôt unis. Je ferai tout pour ça. (Il sentit les lèvres de Blay

sourire contre son cou, ce qui lui fait plaisir.) Allez, on passe voir tes parents.

Ils s’écartèrent de la margelle et revinrent vers la voiture. Mais alors que

Qhuinn en faisait le tour vers le côté passager, il y eut un coup de feu— et Blay

tomba à genoux.

— Bordel de merde, hurla Qhuinn, en plongeant à l’abri de la voiture.

L’odeur de talc flotta dans l’air. C’était un putain de lesser… Et Blay était

blessé. D’où diable étaient sortis ces fumiers ?

— Blay ? Appela-t-il, tout en sortant son arme de sa botte. (Il rampa pour

faire le tour de la voiture.) Blay ?

Blay était assis contre la portière. Il tourna la tête, voulut parler mais n’y

réussit pas. Au lieu de ça, il toussa. Du sang coulait de sa poitrine.

— Oh Seigneur, non, marmonna Qhuinn, en sortant son téléphone de sa

poche. (Au même moment, il vit un lesser courir entre les arbres.) Du renfort !

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hurla-t-il sans même s’inquiéter de qui lui répondait. Dans le parc— la colline la

plus au nord. Vite !

Il lâcha son appareil et bondit à découvert, l’arme en avant. Il tira d’instinct,

avec l’adrénaline qui ravageait son système nerveux, et atteignit le lesser entre

les yeux. Qhuinn sortit son couteau et sauta de tout son poids sur le mec à terre.

Qu’il avait la ferme intention de découper en rondelles.

— Espèce de salopard ! Hurla-t-il, tandis que son couteau plongeait et

replongeait.

Qhuinn continua, aveuglé par la rage, jusqu’à ce que deux mains puissantes

l’attrapent sous les aisselles et l’arrachent à sa proie.

— Je m’en occupe, dit Rhage, d’une voix grave. Blay a besoin de toi.

Quand Qhuinn tourna la tête, il vit Zsadist agenouillé devant Blay, qui était

appuyé à la BMW. Le Frère avait ouvert la chemise de son copain, exposant la

plaie béante de son torse.

— Blay, murmura Qhuinn.

— Il faut le ramener le plus vite possible à Doc Jane, dit Zsadist. Qhuinn,

viens m’aider à le mettre dans la voiture.

Mais Qhuinn ne pouvait pas bouger. Sa respiration— courte, sifflante— lui

brûlait la poitrine. Ou peut-être était-ce de voir Blay ainsi blessé, tout

sanguinolent ?

— Blay, chuchota-t-il encore.

La lourde paume de Rhage claqua sur son épaule.

— Reprends-toi, Qhuinn. Le temps presse. Monte avec Blay à l’arrière de la

voiture. Je vais vous ramener au manoir. Va aider Z, ordonna-t-il en relevant

Qhuinn par le bras.

Pendant que Qhuinn et Zsadist installaient Blay sur le siège arrière, Rhage

sortit de son harnais de poitrine une de ses dagues noires, et d’un geste vif,

renvoya ce qui restait du lesser à l’Omega. Il y eut un claquement sourd, et un

éclair de lumière, puis Hollywood revint. Dès qu’il fut au volant, Zsadist se

dématérialisa.

Pendant que la voiture redescendait la colline, Qhuinn examina Blay qui

gisait, inerte, les yeux clos. Il posa la main sur le cou du mâle, cherchant le

pouls. Qui était faible.

— Ne t’avise pas de mourir ! Gronda-t-il.

Il caressa du doigt les yeux fermés de Blay— il ne restait plus qu’une trace

légère de l’hématome de la veille.

— Blay, ne déconne pas, je ne peux pas vivre sans toi.

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Chapitre 28

Un des Frères— Rhage ou Zsadist— devait avoir prévenu le manoir de ce qui

s’était passé, parce qu’une civière attendait Blay dès que la voiture se gara dans

le parking souterrain. Blay y fut étendu, et emporté avant même que Qhuinn ne

puisse cligner d’un œil. Ne sachant quoi faire d’autre, il resta dans la BMW, la

poitrine douloureuse.

— Qhuinn, respire, dit Mary en s’installant à côté de lui. (Elle se mit à

genoux, et posa sa petite main sur son épaule.) Respire.

Ce ne fut qu’en l’entendant que Qhuinn réalisa être en hyperventilation.

Machinalement, il obéit, et força ses poumons à prendre de longues aspirations

régulières, tandis qu’elle lui frottait le dos d’un geste apaisant, au niveau des

omoplates. Qhuinn avait tous les muscles du corps noués de tension.

— Très bien, continue à respirer.

Une vraie mère poule, pensa Qhuinn. Le genre d’attention qui aurait dû le

hérisser. Pourtant, curieusement, il n’arrivait pas à la repousser. Il releva les

yeux vers la petite femelle. Qui était penchée vers lui, et l’examinait de ses yeux

gris foncés, attentifs et inquiets.

— Ça va mieux ? Demanda-t-elle.

Quelle question grotesque ! Comment pouvait-elle espérait qu’il aille mieux

alors que Blay était en train de mourir ? Non, il n’allait pas mieux. Il allait même

très mal. Il n’arrivait plus à bouger. Ses bras et jambes étaient devenus des poids

inertes accrochés à son corps. Blay était peut-être déjà mort, et Qhuinn ne le

savait pas— parce qu’il s’effondrait comme une lavette et laissait Mary le

consoler et jouer la psy avec lui.

— Es-tu blessé, Qhuinn ? demanda-t-elle.

Elle avait dû deviner sa douleur— ou la lire sur son visage.

— Non, aboya-t-il.

Malgré l’agressivité de sa voix, elle continua à lui frotter le dos avant de dire :

— Jane est un excellent chirurgien. Blay est en de bonnes mains. Ça doit te

soulager de savoir—

— Écoutez, coupa Qhuinn en s’écartant d’elle, je n’ai pas besoin d’une

séance de thérapie, ni de consolations maternelles, d’accord ?

Cette fois, Mary recula. Elle s’assit sur ses talons, et tira sur l’ourlet de son

sweat gris fumée, bien assorti à ses yeux.

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— Je sais d’expérience qu’il n’est pas facile de rester seul dans des périodes

comme celles-ci, dit-elle de sa voix douce et mélodieuse. Je ne suis pas venue

pour une séance de thérapie, ni pour des consolations maternelles. Je suis venue

en tant qu’amie. Mais si tu préfères rester seul, ce n’est pas grave. Je m’en vais.

Alors qu’elle commençait à s’écarter, Qhuinn la retint par la jambe de son

pantalon. Elle avait raison. Il n’avait pas envie d’être seul. Seigneur, qu’est-ce

qu’il pouvait être con, parfois.

— Restez.

Ce fut tout ce qu’il put dire. Mais ça suffit. Mary s’installa à côté de lui, le dos

appuyé au dossier de cuir de la BMW— et ils restèrent ensemble, en silence.

Longtemps.

Oui, Qhuinn eut vraiment l’impression d’avoir attendu des heures avant que

Vishous ne réapparaisse. Le mâle portait un ensemble de chirurgie vert—

couvert de sang. Et son expression était sombre. Á sa vue, la main de Mary se

posa sur celle de Qhuinn— qu’elle serra.

— La balle est logée près du cœur, dit le Frère. Il a perdu beaucoup de sang.

En fait, ça lui a déjà provoqué deux arrêts cardiaques. Mais Jane l’a récupéré.

Maintenant, elle s’apprête à l’opérer. D’après elle, ça ressemble beaucoup à ce

qu’elle a déjà fait sur moi, autrefois. (Il s’arrêta, et passa sa main gantée dans ses

cheveux noirs et épais.) Je ne vais pas te mentir, mec. Il risque gros. Mais nous

ferons pour lui tout ce qui est possible. Vraiment.

— Il… il est déjà mort deux fois ? Dit Qhuinn, horrifié.

— Techniquement parlant, oui. Vu que son cœur s’est arrêté. Mais nous

l’avons vite ranimé.

— Oh, bordel.

Qhuinn fit un bond, sortit de la voiture, se plia en deux, et vomit son dîner sur

le ciment du parking.

— Je ne me sens pas bien, gémit-il.

La main gantée de Vishous l’agrippa par le bras, et le releva, le forçant à

s’appuyer contre la carrosserie.

— Je dois y retourner, dit le mâle. Mary ? Tu devrais le conduire jusqu’à

l’infirmerie. Il serait mieux allongé dans l’une des chambres de repos.

— Bien sûr, répondit Mary.

— Ne le laisse pas mourir, supplia Qhuinn, en regardant Vishous.

Des yeux couleur de diamant— brillants, blancs et glacés— plongèrent dans

les siens durant un long moment. Puis Vishous s’écarta sans répondre, et

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retourna dans le centre d’entraînement, et vers la clinique que Doc Jane y avait

installée pour la Confrérie.

Qhuinn sentit le bras de Mary passer sous le sien.

— Allez viens, on va quitter cette voiture.

Mais ils n’arrivèrent pas jusqu’à la chambre. À peine eurent-ils traversé les

longs couloirs qui menaient à la clinique, que Qhuinn s’arrêta. Il tomba

lourdement assis sur le banc devant la salle d’opération, les yeux rivés à la porte.

Sans insister, Mary s’installa à côté de lui.

Peu après, Qhuinn fut vaguement conscient que John venait d’arriver, et qu’il

l’encadrait de l’autre côté.

Qhuinn se pencha en avant, posa les coudes sur ses genoux, et se cacha le

visage dans les paumes. Attendre était une vraie torture. Ne rien savoir… Il

entendait différents bruits émerger de la salle d’opération, et soudain, ce fut

encore pire, à la limite de l’insupportable—

— On le perd ! (La voix de Doc Jane, violente, avec une urgence

immanquable) Le défibrillateur, vite ! On le perd...

Qhuinn fit un bond en avant et se jeta sur la porte qu’il ouvrit en trombe…

juste à temps pour voir Vishous soulever deux palettes d’un chariot qui contenait

du matériel médical. Le mâle les frotta l’une contre l’autre, tout en comptant : «

Un, deux, trois. »

Puis Vishous pressa les palettes sur la poitrine de Blay. Il eut un « bip bip » et

le corps du mâle s’arc-bouta comme électrocuté, avant de rebondir sur la table.

Qhuinn poussa un cri rauque.

— Faites-le sortir ici, beugla Jane en le regardant. John, fais-le sortir.

Vishous se retourna et lui jeta un bref coup d’œil, avant de reporter son

attention sur Blay. Qhuinn sentit les bras de John l’encercler, et l’attirer de force

hors de la pièce. Dont la porte se referma.

Quand Qhuinn retomba sur son banc, il mit les deux mains sur ses oreilles, en

se balançant d’avant en arrière.

— Non, non, non, non, chantonna-t-il, encore et encore, tandis que les larmes

dégoulinaient sur ses joues. Non, non, non, non—

***

Quand Qhuinn se réveilla, il était étendu dans un lit d’hôpital. Curieux. Il

n’avait aucun souvenir de s’être endormi. Ni même d’être venu dans cette

chambre, en fait. En tournant la tête, il vit Mary qui dormait dans un fauteuil

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près de son lit. Il vérifia de l’autre côté, pour voir si John était lui aussi à ses

côtés… mais non, il n’y avait que Mary avec lui dans la pièce.

Et elle avait dû l’entendre remuer, parce qu’elle ouvrit les yeux, et se redressa

vivement pour s’approcher du lit.

— Hey, tu es réveillé, dit-elle avec un sourire.

— Que s’est-il passé ? demanda-t-il. (Bordel, sa voix était complètement

cassée.) Je suis tombé dans les pommes ?

— Pas vraiment. V t’a injecté un tranquillisant quelconque.

— Quoi ? Mais pourquoi ? Ça fait combien de temps que je dors ? S’écria

Qhuinn en se redressant, rejetant les couvertures qui le recouvraient.

— Tu as eu une crise d’angoisse— une attaque de panique. (Elle jeta un coup

d’œil sur sa montre.) Tu as dormi cinq heures.

Et soudain, il se souvint. La poitrine serrée, il écarquilla les yeux en regardant

Mary, tandis qu’une question muette résonnait entre eux : « Est-il vivant ? »

— Oui, il s’en est sorti, dit-elle avec un sourire. L’opération est terminée, et

il est en salle de réveil. Toujours inconscient, mais Vishous a dit que tu pouvais

aller le voir dès que tu serais prêt.

Qhuinn sortit du lit, et baissa les yeux sur Mary— cette précieuse petite

humaine qui était restée avec lui cinq heures durant. Impulsivement, il la prit

dans ses bras et la serra fort.

— Vous devriez retourner auprès de votre hellren, dit-il en la relâchant, se

sentant coupable d’avoir volé autant de son temps.

— Oh, Rhage est resté avec moi durant quelques heures. En fait, il est reparti

juste avant que tu te réveilles. (Elle eut un geste de la main.) Blay est dans la

chambre juste à côté, la porte à droite.

— Merci, Mary, dit Qhuinn en s’inclinant devant elle. Merci d’être mon

amie.

Une fois dans le couloir, Qhuinn resta un moment la main posée sur la

poignée, les yeux fermés, le front appuyé contre la porte. Il était terrorisé. Il ne

cessait de voir et de revoir dans sa tête l’image de Vishous posant ses palettes

sur la poitrine de Blay— avec un voltage si puissant que le choc avait soulevé le

corps de la table. C’était peut-être la dernière vision qu’il aurait de son ami. Il

savait bien qu’ouvrir cette porte n’allait pas répéter cette horrible scène, mais

quand même— il n’arrivait pas à tourner cette foutue poignée.

Lentement, très lentement, il le fit pourtant, et poussa la porte. Lorsqu’il entra,

son cœur rata un battement, et son sang se figea dans ses veines. La première

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chose qu’il vit fut que des yeux bleu foncé le fixaient, de l’autre côté de la pièce.

Qu’est-ce que… ?

John se releva du fauteuil dans lequel il montait la garde près du lit, jeta un

coup d’œil sur le corps inerte, puis regarda à nouveau Qhuinn.

— Je suis resté là en t’attendant, indiqua-t-il par signes. Je savais que tu

n’aimerais pas qu’il soit seul.

Qhuinn recula jusqu’à heurter du dos le mur de la chambre, espérant ainsi

couper court à ses tremblements. Il gardait les yeux fixés sur John, incapable de

regarder le lit.

— Tu ne veux pas t’approcher ?

Quand Qhuinn hocha la tête— mais sans bouger— John traversa la pièce à

grands pas pour venir devant lui. Il resta immobile un moment, puis posa les

deux paumes sur les épaules de Qhuinn. Qui se raidit, essayant de se concentrer

sur les éclats bleu marine de ce regard superbe… avant de laisser tomber son

front sur la poitrine de son copain en réprimant un sanglot. Seigneur, qu’il se

sentait faible. Il n’était pas certain de tenir debout sans le soutien de ces bras

puissants. Lorsqu’il finit par s’écarter, il cligna plusieurs fois des yeux pour

effacer les larmes qui lui gonflaient les paupières.

— Je vous laisse, dit John. Je serai dehors si tu as besoin de moi.

— Merci mec, répondit Qhuinn d’une voix étranglée.

— Tu as été là pour moi autrefois. C’est bien normal que je te renvoie

l’ascendeur. (Puis il envoya une claque amicale sur l’épaule de Qhuinn avant de

quitter la pièce.)

Une fois seul, Qhuinn glissa lentement le long du mur jusqu’à tomber le cul

par terre, et remonta ses jambes contre sa poitrine avant de les serrer à deux

bras. Puis il posa la tête sur ses genoux. Il n’arrivait toujours pas à regarder

Blay. Aussi, il se concentra plutôt à écouter la respiration du mâle. Après avoir

compté une centaine d’inspirations, lentes et régulières, il finit par lever la tête.

D’abord, ses yeux se posèrent sur la poitrine qui montait et descendait sous le

drap— ce qui le rassura sur le fait que Blay était en vie. Puis, il vit la perfusion

plantée dans sa main, et suivit des yeux le tuyau qui montait jusqu’à un sac

rempli de fluides transparents et accroché au mur derrière le lit. Ensuite, Qhuinn

nota les différents fils qui sortaient de la chemise d’hôpital. Chacun d’eux était

connecté à un écran d’ordinateur, où s’affichaient les lignes saccadées qui

marquaient les battements du cœur de Blay. Heureusement, le son était coupé.

Qhuinn ne pensait pas pouvoir supporter de sitôt un autre « bip bip ». Enfin,

Qhuinn posa les yeux sur le visage de son ami. Aucun tube n’émergeait ni de

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son nez ni de sa bouche, et le teint de Blay était aussi doré et sain que

d’ordinaire.

— Blay ? dit-il.

Après un long silence, il eut un demi-sourire, et se mit à parler à mi-voix.

— Tu te souviens quand nous étions pré-trans ? Nous avions tellement envie

de devenir des adultes, et trouvions que la transition n’arrivait pas assez vite. (Il

eut un rire bref.) Une idée très con, pas vrai ? Tu as été le premier à passer le

change. Je me souviens aussi de la première fois où je t’ai vu après ça. Bordel,

tu étais sacrément chouette. Je n’arrêtais pas te regarder. (Il réfléchit un

moment.) En fait, j’ai toujours eu envie de toi. Tu le savais ? Tu as toujours été

le seul qui comptait pour moi.

Il soupira, et appuya la tête contre le mur derrière lui. Au bout d’un long

moment, il ramena son attention sur Blay.

— Tu vas te réveiller, dis ? Je t’en prie—

Il fut interrompu par la porte qui s’ouvrait, ce qui le fit sursauter. Il tourna la

tête. Doc Jane avança jusqu’au lit avant de remarquer sa présence, dans le coin

de la chambre.

— Oh, salut. Qu’est-ce que tu fais par terre ?

— Comment va-t-il ? Demanda Qhuinn.

La femelle regarda Blay. Puis l’écran de son ordinateur.

— Tous les signes vitaux sont bons. Et même de mieux en mieux.

L’opération a été difficile, mais il semble bien récupérer. Il va avoir besoin de

sang, bien sûr. Je ne sais pas quand il se réveillera, mais Phury ne doit pas tarder

avec Selena. Si Blay est toujours inconscient, il faudra faire couler du sang

directement dans sa gorge. Ce sera mieux que rien.

— Phury va demander que je sorte, dit Qhuinn, sèchement. Je ne veux pas

sortir.

Elle regarda un moment, avant de rectifier la position des différents tuyaux

qui émergeaient de la poitrine de Blay. Puis elle sortit de sa poche une seringue,

qu’elle remplit du liquide de l’un des sacs— sans doute un analgésique. Avec

soin, elle leva la main de Blay, et injecta le contenu de sa seringue directement

dans l’intraveineuse.

Ensuite, le regard vert forêt de la femelle revint vers Qhuinn.

— Pourquoi ne pas t’approcher ? (Elle attendit un moment, mais Qhuinn ne

bougea pas.) D’accord, comme tu veux. Je reviendrai quand Selena arrivera.

Qhuinn resta encore une heure tranquille, avant que la porte ne s’ouvre à

nouveau. Phury devait savoir qu’il était là, parce qu’il tourna immédiatement

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vers lui ses yeux dorés en entrant dans la chambre. Le Primâle était un immense

guerrier, avec une longue chevelure qui tombait plus bas que ses épaules.

Derrière lui, entrèrent Vishous, Doc Jane et l’Élue Selena— une femelle aux

cheveux noirs et aux yeux bleus. Qhuinn était bien certain que Vishous était là

pour le surveiller, au cas où il s’attaquerait à elle.

— Allez-y, dit Vishous en se plaçant près de Qhuinn.

Doc Jane ouvrit les lèvres de Blay tandis que Selena s’entaillait le poignet

avec ses dents. Dès que l’Élue porta la blessure à la bouche de Blay, Phury fit un

pas vers Qhuinn— qui secoua la tête, en levant les yeux au ciel. Mais on le

prenait pour qui ? Comme s’il pouvait nuire à la santé de Blay… N’importe— il

se fichait bien qu’on le traite en gamin irresponsable tant que c’était pour Blay.

Il ferait n’importe quoi pour Blay.

Une fois l’opération terminée, tout le monde quitta la chambre, sauf Vishous.

Qui croisa ses bras épais et s’appuya contre le mur.

— Désolé pour la piquouze, dit-il. Tu étais en train de craquer, et il nous était

difficile d’opérer Blay tout en s’inquiétant pour toi. C’est pour ça qu’on t’a

éliminé du tableau.

— Vous lui avez sauvé la vie, et c’est tout ce qui compte pour moi.

Vishous posa les yeux sur le corps étendu, et Qhuinn suivit son regard.

— Tu m’as demandé de ne pas le laisser mourir. J’ai fait de mon mieux pour

que ça n’arrive pas.

Vishous quitta la pièce avant même que Qhuinn n’ait pu remercier.

D’ailleurs, il se sentait vaseux. Certainement les suites de la « piquouze » de

Vishous. Qhuinn bâilla, puis s’étendit sur le sol, et ferma les yeux.

Peut-être ce cauchemar aurait-il disparu à son réveil.

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Chapitre 29

Blay entrouvrit les yeux. La lumière était faible dans la chambre, mais ça

suffit cependant à lui envoyer un choc douloureux dans les pupilles. Il cligna

plusieurs fois des paupières, et fut enfin capable de regarder autour de lui. Où

était-il

Et soudain, tout lui revint. Le coup de feu… Il avait été blessé. Vu qu’il

portait une chemise d’hôpital et que différents tubent en émergeaient, il supposa

avoir survécu—

Qhuinn ? Qhuinn avait-il lui aussi été blessé ? Il s’agrippa au matelas de son

lit et tenta de se redresser, mais les fils attachés à son torse n’étaient pas assez

long. Il tendit la main vers l’écran. En essayant de l’éteindre, il tourna le bouton

du son. Et sursauta au bruit de son rythme cardiaque. Il l’écouta, une bonne

minute, avant de débrancher un à un les différents fils. Lorsqu’il arracha le

dernier, l’écran ne montra plus qu’une ligne plate. Et l’alarme se mit aussitôt à

sonner.

Un cri émergeant du coin de la pièce lui fit tourner la tête. Et Blay croisa les

yeux vitreux de Qhuinn. Qui inspira longuement. En fait, l’air passait sur les

lèvres parcheminées de son copain avec autant de difficulté que s’il venait de

courir un marathon. Qhuinn portait encore les mêmes habits que le soir où ils

étaient sortis ensemble— mais ils étaient éclaboussés de taches noires : Du sang

lesser. Qhuinn était pas mal débraillé, les manches de sa chemise relevées

jusqu’aux coudes, un côté de son pantalon coincé dans sa botte détachée. Ses

cheveux habituellement hérissés par le gel étaient tout écrasés, ce qui lui faisant

une crête sur le côté. Juste au-dessus des yeux, de ses merveilleux yeux

dépareillés. Pourquoi était-il couché par terre ? Alors que Blay s’apprêtait à

poser la question, la porte s’ouvrit en grand. Doc Jane s’arrêta net en le voyant

conscient… alors qu’elle était déjà au milieu de la pièce.

Elle pressa la main sur son cœur.

— Tu m’as foutu une sacrée frousse, dit-elle en poussant un grand soupir de

soulagement, avant de s’approcher de lui pour écarter ses cheveux roux de son

front. Ça fait du bien de te revoir. Tu as mal ? Demanda-t-elle en se penchant

pour éteindre l’alarme de l’appareil.

— Non.

Après avoir secoua la tête, Blay regarda à nouveau Qhuinn, qui le fixait aussi,

mais qui désormais respirait normalement.

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— Les mecs, je vous laisse tranquilles une minute. (Doc Jane posa la paume

sur son épaule.) Appuie sur le bouton rouge si tu as besoin de quoi que ce soit.

Blay hocha la tête pour signifier qu’il avait compris, mais sans quitter Qhuinn

des yeux.

La porte se referma sur le chirurgien.

— Hey, dit Blay, d’une voix rauque et basse.

— Hey, répondit Qhuinn après un long moment.

— Qu’est-ce que tu fiches par terre ?

Qhuinn se souleva lentement, se redressa, et tira sur sa chemise dont les pans

étaient encore coincés dans son pantalon. Il s’approcha du lit, d’un pas prudent,

tout en repoussant d’une main tremblante les cheveux qui lui tombaient dans les

yeux. Il arborait un sourire forcé, et se mordait la lèvre. Il posa les deux paumes

sur la rambarde métallique du lit, et examina attentivement la poitrine de Blay

avant de remonter sur son visage.

L’expression du mâle était si sombre que Blay ne put s’empêcher de sourire.

— Qhuinn, ne prends quand même pas cet air—

Le mâle réagit si vite qu’il n’y eut qu’un tourbillon depuis le pied du lit

jusqu’à l’évier où il se pencha pour vomir. Le son de ses hoquets secs et

douloureux rendit Blay nauséeux, mais il aurait voulu pouvoir l’aider. Il

s’agrippa à la rambarde de son lit, essayant de la soulever pour poser les pieds

par terre. Aussitôt, Qhuinn jeta un coup d’œil derrière lui.

— Ne bouge pas de ce pieu, dit-il fermement, tandis que ses spasmes

devenaient des inspirations laborieuses.

Mais Blay cherchait toujours le loquet qui ferait tomber la rambarde.

L’intraveineuse dans sa main n’arrangeait pas ses affaires.

— C’est pénible ce truc, grommela-t-il, en arrachant le cathéter.

Au moment même, Qhuinn se retournait. Il y eut un jet de sang qui fusa de

l’entaille.

— Mais t’es con ou quoi ?

Qhuinn lui attrapa le bras et lécha la blessure pour la cicatriser. Puis il reposa

doucement la main de Blay sur le lit, en faisant une grimace dégoûtée :

— Ton sang est saturé de morphine. (Il prit et une carafe sur la table de

chevet, se servit un verre d’eau et l’avala d’un trait.) Tu es vraiment chiant.

Crois-le ou pas, mais il y avait une bonne raison pour que cette seringue soit

plantée dans ton bras.

— J’ai envie de te planter autre chose, ricana Blay.

Qhuinn leva les yeux au ciel, mais il finit par sourire à demi.

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— Pour l’instant, tu n’es pas en état de le faire. (Qhuinn souleva le drap de

Blay.) En plus, tu pisses avec un tuyau. (Il leva un sourcil, et laissa retomber le

drap.) Tu comptes arracher aussi ce truc-là ?

Manifestement, Blay n’aimait pas du tout l’idée d’avoir un cathéter planté

dans la queue. Il n’avait cependant pas l’intention de risquer d’endommager son

matériel en l’arrachant.

— Je vais attendre un peu, dit-il à mi-voix.

Devant son air boudeur, Qhuinn se mit à rire, et lui caressa la joue du doigt.

Puis son visage redevint sérieux.

— J’ai vraiment cru te perdre, murmura-t-il.

Blay tendit la main, pour la poser sur celle de Qhuinn.

— Ça s’est passé quand ? Demanda-t-il, sans trop savoir combien de temps il

était resté inconscient.

— La nuit dernière.

— Tu l’as tué ?

Qhuinn ne répondit pas, mais au regard qui brûla dans ses yeux, Blay comprit

tout ce qui s’était passé. Il connaissait ce regard. Qhuinn le portait toujours après

avoir tué. Mais cette fois-ci, il était encore plus intense. Un feu quasiment

démoniaque.

— Je t’aime, dit Blay, heureux de voir Qhuinn s’adoucir un peu à ces mots.

— Personne ne te touchera et en sortira vivant.

En fait, Qhuinn ne paraissait pas du tout démoniaque en disant ça. Plutôt

triste. Et sincère. Il était évident qu’il pensait ce qu’il disait.

Blay eut un sourire.

— Est-ce ta façon de répondre "je t’aime aussi" ?

— Sans doute. (Qhuinn ne put s’empêcher de rire.)

Plutôt que répéter au mâle son habituel sermon comme quoi il ne voulait

personne pour défendre son honneur, qu’il n’était pas une lavette, et qu’il savait

se défendre, Blay décida de laisser filer. Après tout, il avait quand même réussi à

se retrouver à l’hosto, avec un trou dans la poitrine. Difficile d’argumenter

sérieusement dans cette position.

— Et bien… (Il s’arrêta.)

— Et bien quoi ? Insista Qhuinn, les sourcils levés, ce qui laissa ses mèches

lui tomber dans les yeux. (Il secoua la tête de côté, pour repousser ses cheveux

en arrière.)

— Et bien, je suppose que j’ai de la chance, répondit Blay.

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Qhuinn posa à nouveau les mains sur la rambarde métallique, en la serrant si

fort que ses jointures étaient toutes blanches. Blay posa l’une des siennes sur

celles de son ami. Après un moment, Qhuinn se détendit et serra les doigts de

Blay.

— C’est moi qui ai de la chance, marmonna-t-il, en baissant soudain les

yeux.

— Ça va ? Tu es tout vert. On dirait que tu ne vas pas tarder à retourner vers

cet évier.

Qhuinn posa les coudes sur la rambarde et serra les doigts dans ses cheveux

tout en se penchant en avant.

— Merde, grogna-t-il. Je ne sais même pas pourquoi j’ai envie de dégueuler.

— Tu devrais peut-être t’allonger, suggéra Blay.

— Je vais—

La porte s’ouvrit en grand, lui coupant la parole. Sidéré, Blay regarda sa mère

qui entrait en courant, tandis que Rocke, son père, marchait plus lentement

derrière elle.

— Oh, mon chéri, que la Vierge Scribe en soit remerciée : Tu es vivant, dit

sa mère d’une voix rapide. (Elle se serra contre Qhuinn, près de la rambarde

pour caresser le visage de Blay.) J’ai essayé sans arrêt de te rappeler— mais en

vain. J’ai fini par joindre la ligne principale de la Confrérie. Et c’est ainsi que

j’ai appris que tu avais été blessé. (Elle posa la main sur le bras de Qhuinn.)

Qhuinn, tu aurais vraiment dû me prévenir, tu sais. Blaylock, ton père et moi

étions malades inquiétude.

Blay regarda Qhuinn, et aucun des deux ne répondit. D’ailleurs, Qhuinn avait

toujours aussi malade. Blay finit par jeter un coup d’œil à son père, qui se tenait

tranquillement au pied de son lit. Puis il revint vers sa mère.

— Je ne savais pas que tu cherchais à me joindre, dit-il.

Blay vit les larmes couler le long des joues de sa mère. Puis elle prit Qhuinn

dans ses bras, et le serra contre elle, posant la tête contre son épaule. De l’autre

main, elle touchait toujours son fils. Et elle le regarda pour dire :

— Je suis désolée, mon cœur, vraiment désolée. Tu ne sais pas à quel point

ton père et moi… (Elle s’arrêta, et jeta un bref coup d’œil à son hellren qui

hocha la tête pour l’inciter à continuer.) Nous avons toujours su à quel point

vous étiez attachés l’un à l’autre. Si, pour être heureux, vous devez être

ensemble, que cela soit. Nous l’acceptons. En fait, je ne comprends pas pourquoi

j’ai réagi ainsi. C’était parfaitement ridicule. Tu es mon fils, Blay. Et Qhuinn, tu

sais très bien que je t’ai toujours considéré comme faisant aussi partie de la

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famille. Nous vous aimons tous les deux, sans conditions, et je vous promets de

ne plus jamais, rien dire ou faire qui puisse vous laisser croire que je n’accepte

pas votre façon de vivre.

Tout en parlant, elle ne cessait de pleurer, et sa voix se cassait presque chaque

mot.

Le père de Blay avança, se plaça de l’autre côté de Qhuinn, et lui posa la main

sur l’épaule.

— Nous sommes vraiment se heureux que tu sois vivant, mon fils, dit-il en

regardant Blay. Nous sommes heureux que vous soyez tous les deux en vie.

Blay était si ému qu’il n’arrivait pas à parler. De voir ainsi ses parents, chacun

d’eux tenant Qhuinn dans ses bras, chacun d’eux le regardant tendrement, c’était

assez pour le rendre le plus heureux qu’il ne l’ait jamais été. Au fond de lu, il

savait à quel point il était important pour Qhuinn d’être accepté par ses

parents— encore plus que lui. Et au moment même où cette idée lui venait,

Qhuinn posa le bras sur l’épaule de sa mère, la serra contre lui et lui embrassa la

tempe.

— Je dois vraiment faire un brin de toilette, dit ensuite Qhuinn en regardant

Blay.

— Tu reviens ensuite ? Demanda Blay.

— Bien sûr.

Blay n’en était pas certain. À son avis, si Qhuinn s’approchait d’un lit, il

s’endormirait comme une masse. Peut-être était-ce égoïste de sa part de

souhaiter que son copain revienne. Qhuinn avait vraiment l’air malade, et ce

serait mieux pour lui qu’il se repose. Mais Blay ne pouvait s’en empêcher. Il

voulait Qhuinn. Il avait besoin de Qhuinn près de lui.

— Tu en es sûr ? Demanda Blay.

Qhuinn s’arrêta, hésita un moment, puis se pencha pour embrasser la joue de

Blay, avant de murmurer à son oreille :

— Je te l’ai déjà dit, murmura-t-il, je serai toujours là pour toi.

Et Blay sentit contre sa peau les lèvres du mâle sourire.

Quand Qhuinn se redressa, la mère de Blay et le serra dans ses bras, puis son

père.

— À très bientôt, Qhuinn, dit Rocke.

— Bien sûr, dit Qhuinn, avant de sortir

En attendant son retour, le temps passa plutôt vite pour Blay. Son père réussit

à comprendre comment manœuvrer son lit, aussi il le haussa, ce qui permit à

Blay de s’asseoir. Ensuife, il fut heureux de parler à ses parents, d’échanger les

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nouvelles. Ils n’évoquèrent plus le fait qu’il soit gay, ou qu’il ait choisi de

former un couple avec Qhuinn. Tout était normal— comme autrefois— et il

savait que ses parents étaient sincères. Ils ne comptaient pas le traiter

différemment.

Lorsque le chirurgien privé de la Confrérie revint, ses parents lui firent leurs

adieux, sa mère pleurant à nouveau.

Une fois seul avec Doc Jane, Blay fut heureux d’être enfin débarrassé de ce

foutu cathéter. Puis la femelle l’aida à sortir du lit, et à marcher dans la chambre.

Très vite, il se sentit faible, aussi retourna-t-il volontiers se coucher.

Á peine était-il rassis que Phury les Selena entrèrent, et Blay prit la veine de

la femelle.

Il se reposait de son ingestion de sang lorsque la porte s’ouvrit à nouveau.

Qhuinn pointa la tête avant d’entrer. Les yeux ensommeillés, Blay tenta de lutter

contre sa fatigue.

Qhuinn sortait manifestement de la douche, et sa fragrance de mâle dédié,

sombre et épicée, embauma la pièce. Blay sourit en voyant que les cheveux de

Qhuinn lui tombaient toujours dans les yeux.

— Tes cheveux sont trop longs, dit-il.

— Je sais, dit Qhuinn en les repoussant en arrière. Il faut que je les coupe.

— Ça va mieux ? Demanda Blay tandis que son copain s’approchait du lit.

Oui, on dirait.

En fait, avec ce tee-shirt blanc serré qui moulait chaque fibre de ses

abdominaux, le mec était même carrément bandant.

— Ça va maintenant, répondit Qhuinn. Le bon docteur m’a donné quelque

chose pour m’éviter de dégobiller toutes les cinq minutes. Elle a prétendu que

j’avais un estomac fragile, ricana-t-il. En fait, j’ai même réussi à becter un

morceau en passant dans la cuisine du manoir. Et toi ? Comment va ?

— Eh bien, je ne pisse plus dans un tuyau. Aussi je considère que mon état

s’améliore.

— Tu t’es nourri aussi. (Qhuinn ne posez pas vraiment une question, c’était

plutôt une affirmation.) Je sens le parfum fleuri de Selena dans la chambre.

Phury est-il resté avec vous en garde du corps ?

— Non, répondit Blay. Il était juste dans le couloir. Vu que tu n’étais pas là,

il a supposé que la femelle ne risquait rien.

Ils restèrent ensuite un long moment silencieux, à se regarder. Mais Blay

n’arrivait plus à garder les yeux ouverts.

— Tu as besoin de dormir, dit Qhuinn.

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— Et toi aussi, marmonna Blay, avant de suggérer : Pourquoi ne dormirais-tu

pas avec moi ?

Qhuinn récupéra la manette télécommandée, et appuya sur le bouton qui

faisait descendre le lit. Blay ferma les yeux, tandis que son matelas reprenait une

position horizontale.

Puis Qhuinn baissa la rambarde métallique, s’étendit contre Blay, avant de la

remonter.

— Pourquoi la remets-tu ? demanda Blay.

— Il vaut mieux, sinon je vais finir par terre.

— Dis tout de suite que je prends toute la place, dit Blay d’une voix

moqueuse.

Qhuinn eut un petit rire. Puis éteignit mentalement les lumières. Blay lui prit

la main. Puis il bâilla, et se cala plus confortablement le corps dur de Qhuinn. Il

s’endormait déjà quand il sentit le bras du mâle peser sur sa taille. Il eut un léger

sursaut.

Oh, désolé. Je t’ai fait mal ? demanda Qhuinn en enlevant son bras.

— Non, tu m’as juste surpris, répondit Blay en bâillant encore.

Du coup, Qhuinn remit son bras. Ils étaient si serrés l’un contre l’autre dans

l’espace restreint que Blay ne pouvait plus bouger. Le visage de Qhuinn était

pressé contre sa joue. Divin. Il inspira longuement, puis soupira.

— Blay ?

— Hmm ?

— Alors ? Comment c’était avec tes parents ?

— Génial.

— Tant mieux. J’en suis heureux. (Blay sentit des lèvres fermes du mâle

contre sa peau, posant de petits baisers sur sa mâchoire et son oreille.) Jamais, je

ne pourrais te quitter.

Blay tourna la tête, jusqu’à ce qu’il soit face à face, puis ils s’embrassèrent,

très lentement.

— Jamais je ne pourrais survivre sans toi, dit Qhuinn.

— Tu n’auras pas à le faire, marmonna Blay, sans être certain d’être audible.

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Chapitre 30

Dans sa chambre au manoir de la Confrérie, Qhuinn sortit de la douche, se

sécha, et enroula ensuite sa serviette humide autour de sa taille. Pour une fois, il

était heureux de ne pas devoir sortir combattre cette nuit. Ça faisait déjà une

semaine que Blay avait été blessé, et cet horrible épisode le hantait encore. Il

avait beau essayer de se concentrer sur le temps qu’ils avaient passé ensemble—

avant que tout ne tourne mal— ou évoquer un avenir où lui et Blay pourraient

être unis… Rien à faire. Ses efforts ne duraient pas. Dès que Qhuinn fermait les

yeux, il entendait à nouveau le bruit du coup de feu, revoyait Blay qui saignait,

allongé sur le sol— Ces souvenirs l’obsédaient.

Sans prendre la peine de se raser, Qhuinn récupéra une autre serviette pour

frotter ses cheveux récemment coupés, puis il se rhabilla avant d’aller rejoindre

Blay dans sa chambre. C’était deux portes plus loin dans le couloir aux statues,

et il entra sans frapper. En fait, il se demandait parfois pourquoi compliquer les

choses en gardant deux chambres séparées. Après tout, quand Qhuinn n’était pas

à Caldwell pour combattre, ou au centre souterrain pour s’entraîner, il était dans

la chambre de Blay. Mais dès qu’il y entra, il se souvint que son ami était un

maniaque de l’ordre… Et sut exactement pourquoi il n’avait pas ramené de ses

affaires (et son bordel) dans cette chambre. Du moins, pas encore.

La chambre était déserte. Mais Blay n’était pas loin.

— Hey, me revoilà, cria Qhuinn.

Il s’étendit sur le canapé devant la télé, récupéra la télécommande, et se mit à

zapper parmi les chaînes.

— Je suis là, dit Blay qui sortit la tête de sa penderie, avec un sourire, avant

de disparaître à nouveau à l’intérieur.

Qhuinn fronça les sourcils. Il avait bien vu du cuir ? Il bondit hors du canapé

et fonça jusqu’à la penderie. En effet, Blay avait bien un pantalon de cuir, avec

un tee-shirt noir et serré. Qhuinn passa derrière lui, mit ses deux bras autour de

sa taille, et l’embrassa sous l’oreille.

— À quoi tu joues ? Demanda-t-il. À assortir la couleur de tes vêtements ?

— Non, répondit Blay en riant. Doc Jane affirme que je suis comme neuf.

Donc, je sors ce soir avec Rhage.

Sous le choc, Qhuinn laissa retomber ses bras, et recula.

— C’est quoi ces conneries ? Tu étais quasiment mort il n’y a pas une

semaine.

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Blay se retourna pour lui faire face. Quand leurs yeux se rencontrèrent, la

respiration de Qhuinn se bloqua dans sa gorge, et il dut mettre les deux mains

sur ses hanches pour que son copain ne voie pas à quel point il tremblait. Il

n’était pas question que Blay mette un pied hors du manoir sans lui.

— Je viens juste de te le dire, dit Blay calmement, le toubib a dit—

— J’en ai rien à foutre de ce qu’elle a dit ! Coupa Qhuinn sèchement. Ça ne

fait qu’une semaine, c’est bien trop court.

— Dis-moi un peu, dit Blay d’un ton sarcastique, depuis quand es-tu une

référence médicale ?

Puis il repoussa Qhuinn et retourna dans la chambre. Où il s’assit dans un

fauteuil pour attacher ses bottes.

— Blay—

— Franchement, continua Blay, ça me gonfle que tu me croies susceptible

d’être blessé chaque fois que je mets un pied dehors. La semaine passée n’était

qu’un accident. Nous n’étions pas prêts à combattre. Nous sommes laissés

surprendre. Ce qui ne sera pas le cas ce soir. Alors arrête de jouer au taré trop

protecteur.

— Je suis toujours prêt à combattre ! (Cette fois, Qhuinn hurlait carrément.)

Et la semaine dernière est un bon exemple de la vitesse à laquelle une situation

peut déconner et tourner au désastre. Ça fait une semaine que tu ne t’entraînes

plus et tu t’imagines apte à sortir ? Je suis d’ailleurs surpris que Wrath l’ait

autorisé. En fait, est-il seulement au courant ?

— Merde, n’hésite surtout pas à aller le lui rapporter, dit Blay se relevant.

Qhuinn, furieux, le regarda entrer dans la salle de bain.

— Ras-le-bol de ces conneries, marmonna Blay entre ses dents avant de

refermer la porte.

Qhuinn fonça derrière lui et enfonça le panneau qui claqua violemment contre

le mur. Surpris, Blay se retourna pour le regarder.

— Ces conneries ? (Il respira un grand coup.) Ces conneries ! Va te faire

foutre, Blaylock.

Blay grimaça en l’entendant utiliser son nom complet. Mais Qhuinn était au-

delà de ça. Il était fou de rage.

— As-tu la moindre idée de ce que j’ai traversé— bordel, de ce que je

traverse encore ? Dit-il d’une voix glaciale. Chaque fois que je ferme les yeux,

je te revois étendu sur le sol, couvert de sang— ou sur cette table d’opération

quand V a dû t’électrocuter parce que ton cœur s’était arrêté. Ça fait des jours et

des jours que je n’arrive plus à dormir tellement j’ai peur de te perdre. Et si par

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hasard je m’endors, je me réveille en nage à cause de mes cauchemars. Alors

oui— peut-être que je suis un taré trop protecteur— peut-être que je raconte des

conneries— mais j’estime avoir de bonnes raisons de le faire. Ne me pousse pas

à bout, Blay. Je serais capable t’attacher et de te bâillonner si ça devait te

protéger. Je— ne— peux— pas— te— perdre.

Qhuinn tremblait de tout son corps. Il aurait voulu agripper Blay par les

épaules, et le secouer jusqu’à ce qu’un peu de bon sens lui entre dans la tête. Au

contraire, il envoya un violent coup de poing contre le mur, puis quitta la salle

de bain en trombe. Une fois dans la chambre, il s’appuya contre le mur, et se

laissa glisser au sol.

— Et merde, hurla-t-il en regardant sa main massacrée, qu’il se mit à frotter.

Peu après, Blay était accroupi devant lui. Qhuinn ne leva pas les yeux, et

continua à se masser la main.

— N’avais-tu pas promis à Fritz de ne plus rien casser dans la maison ?

Demanda Blay d’une voix calme. Je vais devoir faire quelque chose pour cacher

cette marque dans mon mur.

Quand Blay prit la main de Qhuinn, la porta sa bouche, et embrassa les

jointures abîmées, Qhuinn leva les yeux pour le regarder. Et toute la colère qu’il

éprouvait encore disparut dès qu’il croisa les merveilleux yeux bleus de son

copain.

— Pourquoi ne me l’as-tu pas dit dès le début ? Demanda Blay. Mon cœur

s’est-il vraiment arrêté ?

Qhuinn eut du mal à retrouver sa voix.

— Ouais. Trois fois. (Il y eut un silence.) Je n’ai jamais eu aussi peur de ma

vie. C’était comme si mon propre cœur avait été arraché.

— Qhuinn, chuchota Blay. Que veux-tu au juste ?

Qhuinn tendit la main, et la posa sur la poitrine de Blay, au niveau du cœur.

Dont il sentait chaque battement résonner à travers sa peau.

— C’est trop tôt pour que tu sortes.

— D’accord. Je ne sortirai pas ce soir. J’attendrai. (Blay se leva, tendit la

main à Qhuinn.) Et maintenant, viens.

— Où ? Demanda Qhuinn.

Il saisit la main tendue, et laissa Blay le relever. Quand ils furent debout face

à face, Blay le poussa contre le mur, posa les mains sur ses hanches, la bouche à

son oreille qu’il l’embrassa tendrement.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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— Doc Jane a dit que je pouvais reprendre mes activités physiques, dit son

copain en glissant dans son cou, le léchant tout du long, ce qui envoya des

éclairs de feu à travers tout son corps. Donc, tu n’as plus d’excuses.

Qhuinn se mit à rire. Il n’arrivait pas à croire qu’il ait pu rester chaste toute la

semaine. Mais il avait été trop inquiet qu’une quelconque activité sexuelle

puisse ralentir la guérison de Blay. Son copain revint à son oreille et dit :

— Et si on baisait ?

Qhuinn ne perdit pas une seconde. Il embrassa Blay avec passion, lui tenant

sa nuque à deux mains. Il glissa sa langue sur sa lèvre inférieure, puis dans sa

bouche. Il était fou de joie : Blay était vivant. Et n’irait nulle part ce soir. En

réalisant ça, il le serra dans ses bras, et l’écrasa contre lui.

Blay marmonna quelque chose dans sa bouche tout en poussant de la main

contre la poitrine de Qhuinn, pour l’écarter. Mais Qhuinn céda pas, et l’entraîna

jusqu’au lit.

— Qhuinn ? Demanda Blay, dès que sa bouche fut libérée. Qu’est-ce qui ne

va pas ?

— Quoi ? Tout va très bien. Je te veux, c’est tout

— Tu m’embrasses comme si c’était la dernière fois.

Qhuinn le regarda. Il était étendu sur Blay, serrant tout son corps contre son

ami. Soudain il cacha son visage contre son cou et inspira profondément,

laissant la fragrance du mâle envahir ses poumons. Blay était vivant, se répéta-t-

il, encore et encore. Une semaine plus tôt, quand il avait cru ne plus jamais vivre

un tel moment… quelque chose d’infiniment précieux lui avait été dérobé. Á ce

souvenir, il se mit à trembler.

Et soudain, il fut repoussé et se retrouva sur le dos, avec le corps dur de Blay

penché sur lui. Le feu de son regard bleu ramena Qhuinn au présent.

— Je vais très bien, chuchota Blay en lui posant la main sur la joue. Je ne te

quitterai pas. Je te l’ai promis, Qhuinn, je ne te quitterai jamais.

Mais Qhuinn n’arrivait pas à arrêter ses tremblements. Il fut atterré à l’idée de

s’effondrer une nouvelle fois. Blay passa les doigts à travers ses cheveux noirs,

et secoua la tête.

— Qhuinn, on a le droit de pleurer quand on en a besoin.

Ces mots précipitèrent la débâcle. Qhuinn attrapa son ami par le cou, et le

serra. Et tout ce qu’il retenait en lui depuis le moment où il avait entendu ce

coup de feu… explosa soudain. Heureusement, il ne pleura pas. Il se contenta de

pousser un cri rauque, puis son corps se détendit, et resta inerte entre les bras de

Blay.

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— Je suis là, dit Blay. Je resterai toujours avec toi.

Au bout de quelques minutes, Qhuinn relâcha son étreinte éperdue autour du

cou de Blay.

— Faut vraiment que j’arrête avec ça, grommela-t-il à mi-voix, tandis que la

honte l’envahissait. Je ne sais vraiment pas ce qui déconne chez moi.

Blay écarta un peu la tête pour pouvoir le regarder dans les yeux.

— Tu exprimes davantage tes émotions, dit-il avec un sourire. Je ne vois pas

du tout le problème.

— Tu ne vois pas ? Bordel, je deviens pire qu’une femelle. Si ça continue, je

finirai par avoir des nichons.

Cette fois, le sourire de Blay tourna nettement sarcastique.

— Je ne le dirai à personne.

— T’as sacrément intérêt, dit Qhuinn en levant la tête pour l’embrasser.

Sinon, je devrai te tuer moi-même.

— Vu que c’est l’idée de ma mort qui t’a mis dans cet état, répondit Blay en

riant, je ne peux pas dire que ta menace m’impressionne beaucoup.

Qhuinn éclata de rire, puis redevint sérieux en regardant attentivement le

visage magnifique de son copain qu’il avait devant les yeux.

— J’aimerais être aussi solide que toi.

Blay secoua la tête.

— Tu es l’être le plus solide que je connaisse. Moi y compris.

— Ça prouve bien que tu ne connais rien, dit Qhuinn. Tu devrais sortir

davantage.

— Peut-être, mais j’ai un amant très possessif qui ne rêve que de m’attacher

pour me garder dans sa chambre. Tu sais, il lui arrive même d’utiliser des

menottes.

— Des menottes ? (Qhuinn fit une moue.) Hmm-hmm. Il faudra qu’on

recommence. (Il attira Blay vers lui, pour pouvoir à nouveau l’embrasser,

savourant le moindre centimètre carré de sa peau.) Mais pas ce soir. Ce soir, je

veux sentir tes mains sur moi.

D’un coup de rein, il tenta de renverser Blay pour le rouler sous lui, mais le

poids de son copain le cloua en place.

— Non, murmura le mâle. Laisse-moi prendre soin de toi. (Blay lui embrassa

le menton, puis l’arrête du nez, et enfin les lèvres.) Tu ne me laisses jamais

prendre soin de toi— alors pour une fois, s’il te plaît…

C’était absurde, pensa Qhuinn. Blay prenait sans arrêt soin de lui— à chaque

minute de chaque journée--simplement en existant, en étant lui-même. Il ouvrit

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la bouche pour le dire, mais le doigt de son copain qui suivait le tracé de ses

lèvres l’en empêcha.

— Tes lèvres m’ont manqué, dit Blay puis il introduisit son doigt dans la

bouche de Qhuinn, pour caresser le piercing sur sa langue. Et ça aussi.

Blay eut un sourire lumineux, le visage soudain illuminé d’une lueur

passionnée qui n’existait que pour Qhuinn. Qui en était conscient, et infiniment

reconnaissant. Par contre, il préférait que Blay ne réalise pas combien un tel

sourire l’émouvait. Sinon, le mâle serait peut-être tenté d’en user, comme une

arme secrète, pour obtenir de Qhuinn tout ce qu’il voulait.

— Je veux juste t’embrasser, dit Blay comme s’il avait lu dans ses pensées.

Puis il se pencha— et le fit.

Ce fut un baiser lent, tendre, et incroyablement familier. Un baiser parfait.

Qhuinn ferma les yeux, se concentrant sur le toucher délicat de son copain… qui

lui caressait les flancs, avant de passer sous son tee-shirt. Qhuinn frémit à ce

contact, peau contre peau. De son autre main, Blay lui releva les deux poignets

au-dessus de la tête. Et les maintint, fermement, tandis qu’il continuait à caresser

son torse, son ventre, glissant doucement jusqu’à la ceinture de son pantalon.

Qu’il déboutonna.

Puis Blay se pencha de côté, et écarta lentement le jean sombre, libérant le

sexe de Qhuinn. Qui priait désespérément pour ne pas exploser trop vite

tellement il était tendu, avide, impatient. La première caresse de Blay fit jaillir

des étoiles lumineuses derrière ses paupières closes, et il eut un long frisson

tandis que leurs lèvres se mêlaient à nouveau en un baiser passionné.

Puis Blay se souleva pour se déshabiller, exhibant une érection massive, avant

de se recoucher que Qhuinn. Qui gémit tandis que leurs bas-ventres se frottaient

l’un contre l’autre. Blay recommença à le caresser, dans un rythme plus rapide.

Bordel, que c’était bon. Trop— il n’avait pas envie de jouir aussi vite, mais

pourtant, il ne pouvait plus se retenir. Ça allait arriver— très bientôt. Il laissa

retomber sa tête en arrière sur le lit. Quand la bouche de Blay mordilla sa

mâchoire jusqu’à son cou, Qhuinn explosa avec un cri rauque. Blay continua ses

caresses, poussant son orgasme à continuer, encore et encore, avant de jouir à

son tour.

Lorsque ce fut terminé, Blay retomba de tout son corps contre lui, ils restèrent

un moment serrés l’un contre l’autre, haletants. L’air était saturé d’épices

sombres et de sexe.

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Une fatigue sans nom pesa soudain sur les paupières de Qhuinn. Pour une

fois, il ne lutta pas contre le sommeil. Blay s’écarta de lui, se colla contre son

flanc, et murmura à son oreille :

— Je ne te quitterai jamais.

— Je te crois, marmonna Qhuinn, en s’endormant.

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Chapitre 31

Du bout du doigt, Blay suivait le dessin des muscles abdominaux de Qhuinn.

Il aurait préféré utiliser sa langue, mais vu qu’il savait que son ami avait très mal

dormi ces derniers jours, il ne souhaitait pas le réveiller. Aussi il se contentait de

ces légères caresses. Qhuinn ne bougeait pas. Il n’avait même pas ces infimes

frémissements sous les paupières qui indiquaient d’ordinaire qu’il rêvait. Ça

faisait trois heures qu’il était dans la même position, et seul le mouvement

régulier de sa respiration indiquait qu’il vivait. Étendu ainsi, en statue de gisant,

il était magnifique, et Blay ne pouvait pas le quitter des yeux.

Seigneur, il n’arrivait pas à imaginer dans quel état il se serait retrouvé si les

rôles avaient été inversés, la semaine passée— en voyant Qhuinn sur une table

d’opération, le cœur arrêté. D’un côté, ça le gonflait que personne ne l’ait

informé de ce léger détail, mais d’un autre— il aurait préféré aussi ne pas savoir.

Cliniquement, il était quand même mort… trois fois. Et c’était une idée à donner

la nausée. Pire encore, Qhuinn aurait très bien pu être celui qui avait reçu la

balle. Au début, Blay avait tenté de repousser l’incident tout au fond de sa

mémoire, mais maintenant, c’était devenu impossible. Et il avait de sacrés

cauchemars en perspective. Pour un bon bout de temps. Comme Qhuinn, en fait.

Ouais, chacun son tour.

Blay revint au présent quand Qhuinn se tourna vers lui, jetant les deux bras

autour de sa taille, cachant le visage contre sa poitrine. En se laissant retomber

sur le lit, Blay serra son ami dans ses bras. Toujours endormi, Qhuinn poussa un

grognement sourd, et se détendit dans cette nouvelle position. Machinalement,

Blay caressa la nuque de son copain, tout en songeant au tatouage qui la

marquait—

— En-dessous, je me ferai tatouer la date de notre union, marmonna Qhuinn.

Blay se figea. Il n’avait pas réalisé que Qhuinn était réveillé. Il lui fallut

quelques secondes aussi pour comprendre ce qu’il avait dit. Le tatouage sur la

nuque de Qhuinn— 18 août 2008, en Langage Ancien— était la date du jour où

il était devenu l’ahstrux nohtrum de John.

— Moi, je me ferai graver ton nom sur le dos, répondit Blay.

Qhuinn souleva la tête pour le regarder.

— Ça aussi, je le ferai, dit-il, mais pour toi, je préférerais pas.

— Et pourquoi ça ? Demanda Blay.

Qhuinn posa les lèvres sur la poitrine de Blay.

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— Ton corps est parfait, sans la moindre marque. (Il fit glisser ses lèvres vers

le cou.) J’adore ça.

Il finit par arriver aux lèvres de Blay, et l’embrassa brièvement, avant de

laisser retomber sa tête.

— Tu es sans espoir, dit Blay avec un soupir.

Qhuinn roula sur le dos, les mains sur la poitrine, mêlées à celles de Blay.

— Je suis surtout désespérément amoureux, dit-il d’un ton dramatique, qui

lui fit rire tous les deux.

— Désespérément gay, ajouta Blay.

— En y réfléchissant, (Qhuinn approcha la bouche de l’oreille de Blay, et

poussa un gémissement,) j’aimerais voir mon nom gravé dans ton dos quand je

te baise— ça me rappellerait que tu es bien à moi. Ouais, ça serait plutôt

chouette.

Blay secoua la tête, et se mit à rire.

— Comme je le disais, c’est sans espoir. (Il s’arrêta, s’assit sur le lit, et

s’appuya contre le mur.) Mais qu’importe. Je suis peut-être gay, mais je suis

aussi mâle. Et je veux le nom de mon compagnon gravé dans mon dos— que ça

te plaise ou pas. Ne t’imagine surtout pas que je serai ta compagne.

— Mmm, plutôt fougueux, hein ? Gronda Qhuinn. J’aime ça.

— Tant mieux, dit Blay doucement. Mais pas la peine de se prendre la tête.

Ce n’est pas comme si notre union était programmée incessamment sous peu.

Qhuinn roula hors du lit, et frotta ses mains sur son tee-shirt, comme si son

geste allait en effacer tous les plis.

— Alors, qu’est-ce qu’on fait maintenant ? Demanda-t-il. Ça te dit de passer

un moment au centre d’entraînement ?

Blay connaissait bien son copain. Et savait, juste en le regardant, que Qhuinn

cachait quelque chose— ou du moins cherchait à changer de sujet.

— Qu’est-ce que tu me caches ?

— Je ne vois pas du tout ce que tu veux dire. (Qhuinn releva les sourcils, l’air

innocent.) Je demandais seulement si tu voulais venir avec moi au gymnase.

Blay se leva, et croisa les bras sur sa poitrine.

— N’importe quoi. Je te connais. Tu as changé de sujet, et tu mens très mal.

Parle.

— Je ne suis pas certain d’apprécier ton humeur ce matin. Tu me sembles

très… autoritaire.

— C’est vraiment l’hôpital qui se moque de la charité.

Qhuinn eut un soupir, fit le tour du lit, et s’assit en face de Blay.

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— D’accord. C’est juste que j’ai parlé à Wrath. Je lui ai demandé si nous

pouvions être unis aussi vite que possible. Il ne m’a pas encore donné sa

réponse. Mais il n’a pas dit non. C’est plutôt bon signe, pas vrai ?

Blay en laissa retomber ses bras, et regarda les yeux dépareillés de Qhuinn

levés vers lui. Il réfléchissait. Le roi n’avait pas dit non… mais il n’avait pas dit

oui non plus. Alors—

— Pourquoi tu fais cette tête ? (Qhuinn tendit le bras et prit sa main.) Tu n’es

plus d’accord? Je t’en ai parlé, et tu as accepté.

— Je sais, dit Blay. Mais la réponse du roi est sans importance, Qhuinn.

Nous sommes ensemble, et c’est tout ce qui compte. C’est ce que j’ai toujours

voulu. J’aimerais simplement que les choses puissent être normales.

— Normales ? Tu crois que c’est possible avec moi ?

Blay se mit à rire.

— Tu sais bien ce que je veux dire. J’ai la sensation que nous sommes

montés dans un grand-8 depuis quelques temps. Nous sommes ensemble. Et tout

le monde au manoir l’a découvert. Et puis cette histoire avec mes parents. Et

ensuite, cet accident avec le lesser. Tout va trop vite.

— Non, sans blague ? Tu regrettes l’époque où nous passions nos journées à

jouer à des jeux vidéo ?

Qhuinn eut un sourire, et Blay le regarda, tétanisé. Malgré l’aspect imposant

du mâle, malgré ses piercings et son visage dur, ce sourire espiègle rappelait le

pré-trans qu’il avait été— quand la vie était bien plus facile pour eux deux.

— Hey, j’ai une idée, continua Qhuinn. Et si je m’installais ici avec toi ? Ce

serait un bon départ vers la normalité.

Voilà qui coupa court aux idées nostalgiques de Blay. Qui jeta un coup d’œil

autour de lui, dans sa chambre parfaitement coordonnée. Partager son lit avec le

mâle était une chose, mais gérer au quotidien son linge sale jeté n’importe tout

en était une autre.

Qhuinn secoua la tête.

— Je n’arrive pas à croire que tu doives réfléchir avant d’accepter.

Il y eut un coup sur la porte, ce qui interrompit leur discussion. Blay alla

ouvrir, et trouva Fritz dans le couloir.

— Bonsoir, messire, dit le doggen avec un profond salut. Le roi et la reine

désirent vous voir.

— Le roi et la reine ? répéta Blay, sidéré, tandis que Qhuinn s’approchait à

côté de lui.

— Que se passe-t-il, Fritz ?

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— Oh messire, vous êtes là aussi, dit le doggen avec un sourire. C’est parfait.

Je devais également vous présenter la même sommation.

Qhuinn envoya une grande claque sur l’épaule du vieux mâle.

— Merci, mec. (Puis il prit la main de Blay, et l’attira derrière lui tira dans le

couloir.) Allons-y.

Ils restèrent silencieux tandis que Qhuinn traînait littéralement Blay derrière

lui. Quelques secondes après, ils étaient tous les deux devant la porte du bureau

du roi, sur le palier, en face du grand escalier. Qhuinn s’arrêta, et fit face à Blay.

Avec un sourire, il tendit la main, et lissa les cheveux roux ébouriffés.

— Du calme, mec. Tu l’as dit toi-même, ce qu’ils décideront n’a pas

d’importance.

Blay esquissa un faible sourire, tandis que Qhuinn frappait à la porte. Le roi

leur cria d’entrer.

Le roi et la reine étaient tous les deux assis derrière le bureau— Beth sur les

genoux de Wrath, avec ses longs cheveux noirs qui flottaient dans son dos. Elle

eut un gentil sourire en les voyant, aussi belle que d’ordinaire. Quant à Wrath—

et bien, le roi était aussi terrifiant que d’habitude aux yeux de Blay.

— Asseyez-vous, les garçons, dit le roi.

En silence, ils s’installèrent tous les deux sur le canapé d’ordinaire réservé à

Vishous et Butch.

— J’ai discuté avec ma reine de votre union, dit Wrath de sa voix grave, et

nous avons décidé qu’elle aurait lieu ici même, au manoir, comme celles de tous

les autres. Je procéderai à la cérémonie demain, à la nuit tombée. Beth et Mary

ont déjà commencé les préparatifs avec Fritz.

Avec un sourire, Beth quitta les genoux du roi.

— Nous avons aussi quelque chose pour vous, dit-elle. (Elle alla jusqu’à une

armoire contre le mur. Quand elle se retourna, elle tenait deux fatakas de

cérémonie en soie noire, deux ceintures, et deux dagues au manche orné de

bijoux.) Voici vos tenues de cérémonie, dit-elle.

— Génial, s’exclama Qhuinn. Merci.

Blay resta silencieux, sans savoir quoi dire ou penser. Qhuinn tendit la main

pour prendre la sienne.

— Blay ? Demanda la reine en remettant les tenues noires à leur place. Tu

vas bien ?

— Euh… oui— Merci, je vais très bien.

— Tu consens à cette cérémonie, n’est-ce pas, Blaylock ? Demanda le roi.

Blay eut du mal à déglutir. Oui, il n’avait jamais rien voulu d’autre à ce point.

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— Bien sûr, répondit-il, la gorge serrée. C’est juste… Je ne sais pas trop.

J’imaginais en fait, que ce serait plus difficile.

— Pourquoi ? Demanda le roi. Je vais te dire un truc, j’en ai jamais rien eu à

foutre de suivre les Anciennes Lois. À ce que j’ai constaté, vous vous êtes tous

les deux sacrément dédiés. Chaque fois que vous entrez dans une pièce, votre

fragrance me frappe comme un raz-de-marée. Vous refuser une cérémonie

officielle ne semble… anormal.

— Je vous remercie, Monseigneur.

— De rien. Maintenant fichez-moi le camp. J’ai quelque chose d’urgent à

voir avec ma reine, dit le roi avec un sourire sensuel.

— Wrath !

— Ouais, on se barre, dit Qhuinn en riant.

Ils retournèrent ensemble jusqu’à la chambre de Blay.

— Si ça doit être réglé demain soir, encore heureux qu’on ait déjà discuté de

savoir si on se faisait ou non graver un nom dans le dos, remarqua Qhuinn.

— Il n’y avait rien à discuter, dit Blay en riant. J’avais décidé de porter ton

nom dans mon dos, point final.

— Ouais, c’est ce que j’ai cru comprendre. (Qhuinn eut un sourire.) Bon

maintenant bouge ton cul, et fonçons au gymnase. Tu as une revanche à prendre.

— Encore de la boxe ? Se plaignit Blay. Ne me dis pas que tu tiens à me

pocher l’autre œil.

— Peut-être pas… si tu penses à monter ta garde.

Ils quittèrent ensemble la chambre en riant.

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Chapitre 32

Blay et Qhuinn restèrent une éternité sur le ring de boxe du gymnase. En fait,

d’après Qhuinn, ils n’étaient pas vraiment de même niveau, mais s’entraîner

avec son copain était bien plus drôle actuellement que ça n’avait été le cas tous

ces derniers mois.

Bien sûr, pour suivre ses conseils, Blay s’appliquait davantage à monter sa

garde. Le dernier round se termina pour Qhuinn avec un chouette bleu qui lui

durerait quelques jours.

Ils passèrent ensuite sous la douche, et restèrent silencieux le temps de se

sécher et de se rhabiller.

Qhuinn examina un moment Blay, assis sur un banc devant la rangée des

vestiaires, penché en avant pour attacher ses chaussures. Le mec paraissait

plongé dans ses pensées.

— Qu’est-ce qui se passe de si important dans ta tête ? Demanda Qhuinn.

Blay releva les yeux, sans lâcher son lacet.

— Quoi ?

— Je te trouve bien trop silencieux. Pourtant, j’ai fait attention à te ménager

cette fois, et tu n’as pas d’œil au beurre noir. Tu devrais être content.

Quand Blay se redressa avec un petit rire, Qhuinn s’installa à califourchon sur

le banc en face de lui.

— Qu’est-ce qu’il y a ? Demanda Blay, en levant les sourcils.

— Je ne sais pas, justement. C’est bien pour ça que je t’ai posé la question en

premier.

— Mais de quoi tu parles ?

Blay haussa les épaules, et s’apprêta à se lever. Mais Qhuinn le retint par le

bras.

— Réponds-moi !

— Qhuinn, il faut que je finisse de m’habiller.

Sans le lâcher, Qhuinn étrécit son regard d’un air insistant, tout en parcourant

des yeux le visage de son ami.

— Arrête de faire ça, se plaignit Blay en riant. Tu as un regard agressif.

— Tu préférerais que je t’agresse avec ma langue ? (Qhuinn agita les sourcils

de façon exagérée.) Parce que je peux le faire aussi.

Blay sourit, et secoua la tête.

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— Mais que veux-tu savoir au juste, demanda-t-il doucement. Si je suis

fatigué ? Oui, c’est le cas. Si je suis tourmenté ? Non. Si j’ai un souci

quelconque ? Non plus. Est-ce que j’ai répondu à ta question ? J’espère que oui.

Est-ce que j’ai été sincère ? Absolument.

— Est-ce que tu fais le mariole ? Dit Qhuinn sur le même ton. Absolument.

Il se pencha en avant, et caressa de son nez la gorge de Blay. Puis il ferma les

yeux, savourant l’odeur musquée de la peau fraîchement lavée. Du bout des

doigts, il repoussa en arrière les cheveux roux encore humides.

— C’est ici-même que tu m’as sucé pour la première fois, chuchota-t-il.

— Je n’ai pas oublié, répondit Blay.

En entendant l’amusement dans sa voix, Qhuinn sut que Blay devait sourire.

Il redressa la tête pour vérifier qu’il ne s’était pas trompé.

— Es-tu sûr que tu veux de cette union demain ? Demanda-t-il sur une

impulsion.

— Oui. (Blay eut un petit rire.) C’est ça qui t’inquiète ?

— Je tiens à en en être certain. Parce que je trouve que tu réagis bizarrement

depuis notre rendez-vous avec Wrath.

— Bizarrement ? (Blay se pencha vers Qhuinn, et le regarda, comme s’il

hésitait à dire quelque chose qu’il avait pourtant sur le bout de la langue.)

Qhuinn…

Mais Qhuinn s’écarta brusquement, parce que John venait d’entrer dans la

pièce. Et agitait les mains vers eux.

— Je vous cherchais, les mecs.

— Tu as un timing absolument déplorable, grogna Qhuinn.

Blay tourna la tête pour voir à qui il s’adressait.

— Désolé, je ne voulais pas vous interrompre.

— Tu n’interromps rien du tout, dit Blay en se levant, pour avancer vers John,

à qui il envoya une claque sur le dos. (Puis il se tourna vers Qhuinn.) Tu viens ?

— Dans une minute, répondit Qhuinn.

Il regarda les deux autres quitter les vestiaires. Puis il se leva, s’approcha de

son casier, et colla son front contre le métal froid. Merde de merde. Peut-être

avait-il trop précipité les choses, pensa-t-il. Non. (Il secoua la tête.) Il ne voulait

pas que la paranoïa devienne sa seconde nature. Il inspira longuement, ferma les

yeux, et souffla—

Puis il sentit une main se poser sur son épaule. Et sursauta si violemment qu’il

se heurta la tête contre son casier.

— Aïe, s’exclama-t-il, en posant la paume sur son front.

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— Je n’arrive pas à croire que tu ne m’aies pas entendu revenir, dit Blay, qui

attrapa son ami par les épaules pour le faire se retourner. Ça va ?

Qhuinn sentit Blay lui enlever la main qu’il tenait sur son visage.

— C’était un coup bas, protesta-t-il d’une voix moqueuse. Mais tu pourras

dire que tu as marqué au moins un coup avec moi ce soir. Je me suis fait plus

mal que sur le ring.

Blay éclata de rire. Puis il prit Qhuinn par le menton. Et les coins de sa

bouche se relevèrent en un sourire timide.

— Hey, je n’en doute pas. Tu sais, la seule chose que je me demande au sujet

de cette union est si… tu ne le fais uniquement pour moi.

Tétanisé, Qhuinn fixa les yeux bleus si brillants qui renvoyaient la lumière

des néons.

— Qhuinn ? Insista Blay.

Qhuinn cligna plusieurs fois des yeux, puis se força à revenir à la

conversation. Qu’est-ce que Blay lui avait demandé ? Ah oui…

— Je le fais pour toi, répondit-il. Mais aussi pour moi. Pour nous deux.

Blay laissa retomber ses bras.

— Alors, ça me va. Et toutes tes questions m’ont collé une sacrée migraine.

Tu sais, je pense à quelque chose. Il m’arrivera certainement de réfléchir parfois

sans forcément ne penser qu’à toi.

Qhuinn leva les yeux au ciel, et ouvrit son casier.

— Tu as raison, je me suis joué un film. (Il sortit un tee-shirt Black Sabbath et

s’arrêta un moment :) J’ai toujours pensé être à moitié timbré.

— À moitié seulement ?

— Très drôle, Blay. Tu es en forme ce soir, dit Qhuinn d’une voix moqueuse.

— C’est toi qui l’as dit, pas moi. (Blay avança, et colla Qhuinn contre le

casier métallique.) Je n’arrive pas à croire que quelqu’un d’aussi arrogant et

prétentieux que toi puisse douter de lui-même.

— Tu as raison, je—

— Bien entendu, le coupa Blay. J’ai toujours raison. Tu as intérêt à t’y faire.

Qhuinn agrippa son copain par sa chemise, eut un geste brusque, et inversa

leurs positions. Il se pencha en avant, collant son torse dur contre celui de Blay,

pressant ses deux avant-bras sur la paroi métallique de chaque côté de son

visage. Puis il approcha sa bouche contre son oreille, et murmura :

— Je devrais te mettre à genoux. Pour que tu me supplies de te prendre

comme compagnon.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Blay le repoussa d’un coup sec, et ils éclatèrent de rire ensemble quand

Qhuinn trébucha en reculant.

— D’ailleurs, continua Qhuinn, si tu es à genoux, n’oublie pas de jouer avec

mes baballes. (Puis il tendit la main et claqua la porte de son casier, avant de

prendre le visage de Blay entre ses paumes.) Tu sais, tu es vraiment le seul à me

poser un problème. Pour tout le reste, je sais exactement quoi faire. Ouais, je

suis même un foutu expert.

— Je ne voulais pas—

— …mais, coupa Qhuinn, (il se pencha et baissa la voix,) si tu répètes un jour

à qui que ce soit à quel point je peux être ridicule, je te massacre. C’est bien

clair ?

Leurs lèvres se joignirent en un baiser très doux, à peine un effleurement.

— Je retrouve le Qhuinn que je connais et que j’adore, dit Blay, quand ils se

séparèrent. Promis juré craché, je ne répéterai jamais rien.

Qhuinn s’écarta, et dit d’une voix ferme :

— Parfait. Et si on allait voir ce que cet enfoiré de John voulait ? Et ce qu’il te

l’a dit ?

— Non, mais il nous attend dans ta chambre.

— Dans ma chambre ? S’étonna Qhuinn tandis qu’ils quittaient ensemble le

vestiaire, avant de prendre le couloir qui les ramènerait au bureau, puis au tunnel

vers le manoir.

— Je lui avais envoyé un SMS pour qu’il vienne nous aider.

— Nous aider à faire quoi ?

— Á déménager tes affaires jusque dans ma chambre. Dans notre chambre

maintenant.

En entendant ça, Qhuinn s’arrêta net, et Blay fit encore deux pas avant de

réaliser qu’il marchait tout seul. Avec un sourire, il se retourna pour faire face à

son ami.

— Pourquoi ? Tu pensais qu’on allait garder des chambres séparées ?

— Non, dit Qhuinn, mais vu à quel point je suis bordélique, et la façon dont

tu passes ton temps à temps à t’en plaindre, je pensais que… ce serait peut-être

préférable

Blay éclata de rire, puis il se rapprocha, et posa le bras sur les épaules de son

ami. Qhuinn l’agrippa par la taille et le regarda.

— Bordélique ? Répéta Blay. Je ne pense pas que ce mot suffise à exprimer le

désastre qu’est ta chambre. J’ai toujours la sensation qu’une bombe vient

d’exploser quand je rentre chez toi.

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Lorsqu’il s’écarta, Qhuinn le retint et demanda :

— Alors… pourquoi ce déménagement ?

— Ça nous donnera un sujet de dispute.

Qhuinn en resta comme deux ronds de flan, puis il laissa glisser ses mains

sous le tee-shirt de Blay, et dans son dos. La peau brûlante était si douce sous

ses doigts que son sexe réagit immédiatement. Serrant à deux mains la taille de

Blay, il le poussa en arrière contre le mur du tunnel, puis il continua à relever le

fin tissu pour dénuder le ventre, et le torse de son copain. Il se pencha, et posa sa

bouche sur une aréole sombre qu’il mordilla. Quand Blay poussa un

gémissement étouffé, Qhuinn se pressa encore davantage contre lui.

Puis il l’embrassa, dans le cou d’abord, puis sur la mâchoire, juste sous

l’oreille, avant de lui mordre le lobe.

— Un sujet de dispute ? Tu penses qu’on en aura besoin ?

Qhuinn leva le bras, et passa les doigts entre les mèches rousses de Blay. Qui

plaquait se deux mains contre le mur derrière lui, comme pour s’empêcher de

tomber. Puis il réagit, et se laissa peser contre Qhuinn, la tête renversée en

arrière. Qhuinn frotta ses hanches contre les siennes, et sentit les doigts de son

copain se serrer sur ses reins.

— Qhuinn, haleta Blay. Nous devrions…

— Tu vois, c’est un parfait exemple de nos divergences d’opinion, dit Qhuinn

en relevant la tête, pour poser son front sur celui de Blay. Je veux te baiser, et tu

vas prétendre que ce n’est pas une bonne idée. Pas vrai ?

Il sourit contre la bouche de Blay. Qui l’embrassa.

— John nous attend.

— Bien sûr, grogna Qhuinn en se redressant. John… Toujours à jouer les

emmerdeurs, celui-là. Même sans le faire exprès. (Il attrapa Blay par la nuque, et

l’écarta du mur.) D’accord, allons-y. Je suis impatient d’emménager dans mes

nouveaux locaux.

Il plaisantait, mais un peu plus tard dans le tunnel, il ajouta :

— Tu sais, je vais essayer d’être plus… rangé.

— D’accord, dit Blay, en riant.

— Tu n’as pas l’air de m’en croire capable.

— Effectivement, répondit Blay, mais je m’en fiche. Je te veux quand même

avec moi.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Durant tout le reste de la nuit, ils déménagèrent d’une pièce à l’autre, portant

les affaires de Qhuinn dans la chambre de Blay. Ils ne s’arrêtèrent que pour

manger, parce que Fritz, très gentiment, leur monta régulièrement des plateaux.

Une fois son barda déplacé, Qhuinn se sentait à moitié mort de fatigue, mais

Blay insista pour qu’ils vident les cartons et les valises et rangent tout leur

contenu dans les placards avant de se coucher. Il aimait bien savoir que tout était

en ordre au moment où il fermait les yeux.

Bordel, pensa Qhuinn consterné, c’était là un syndrome quasi obsessionnel

qu’il lui faudrait du temps pour digérer. Manifestement, lui et Blay étaient aux

antipodes. Mais quelle importance après tout ? Qhuinn espérait bien qu’ils

réussiraient à trouver un terrain d’entente, quelque part vers l’équateur. Bien

entendu, ça impliquait des concessions de sa part. Ou du moins… un petit effort.

Si on avait suivi son avis, il aurait simplement demandé aux doggens de

s’occuper du déménagement. Il ricana en revoyant le regard horrifié de Blay à

cette suggestion. Selon lui, les doggens avaient déjà bien assez travail. Le mec

avait vraiment bon cœur.

— Je vais me pieuter, indiqua John par signes. Á demain, les mecs.

— À demain, répondit Qhuinn.

— Merci pour ton aide, John, rajouta Blay.

Une fois John sorti, Blay se retourna et regarda Qhuinn enlever son tee-shirt

et tomber à la renverse sur le lit.

— Mais qu’est-ce que tu fais ?

— Ne t’inquiète pas, je rangerai ce tee-shirt avant de m’endormir, dit Qhuinn

en mettant le vêtement en boule sur son visage.

Il entendit Blay ricaner doucement. Puis sentit le lit bouger tandis que son ami

se couchait près de lui. Soudain, le tee-shirt fut enlevé, et Blay, appuyé sur un

coude, le regarda.

— Laisse tomber, dit le mâle. Je vais le ranger pour toi.

Mais il ne bougeait pas, et caressait des yeux le corps allongé de Qhuinn. Qui

roula sur lui-même, et passa le bras autour de son ami.

— Ne me regarde pas comme ça, marmonna-t-il, le visage caché contre sa

poitrine. Je n’ai plus aucune force pour participer à une quelconque activité

physique.

Blay éclata de rire.

— Il y a quelques heures, tu étais prêt à t’activer contre le mur du tunnel.

— On n’y repensera après le mariage, gémit Qhuinn.

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— Nous ne sommes pas humains, se moqua Blay. Entre vampires, c’est une

union, pas un mariage.

Collé contre Blay, Qhuinn était déjà prêt à dormir, écoutant battre le cœur du

mâle contre son oreille, dans le cocon de son corps chaud, entouré de son odeur.

C’était incroyablement réconfortant.

— Je te promets de me rattraper plus tard, dit-il, avec un soupir las.

Blay l’embrassa sur le sommet de la tête.

— Oui, je n’en doute pas.

Sans ouvrir les yeux, Qhuinn eut un sourire, puis il se pelotonna plus près,

ordonna mentalement aux lampes de s’éteindre, et s’endormit comme une

masse.

***

La nuit suivante arriva très vite. Et Qhuinn se retrouva planté devant sa

penderie, à caresser des doigts le satin noir du fakata de cérémonie qu’il

porterait pour son union.

Il avait encore du mal à croire que ce soir même, il allait prendre Blay pour

compagnon. Du mal à croire que Wrath et les autres Frères l’acceptaient. Bien

entendu, Rhage n’arrêtait pas de se foutre d’eux— et Vishous en rajoutait une

couche— mais ce n’était que des… plaisanteries. L’important était que leur

relation était reconnue digne d’une cérémonie officielle. Pour Qhuinn, c’était

tout ce qui comptait. Non seulement pour lui, mais aussi pour Blay.

Pour la première fois de sa vie, il avait le sentiment de faire réellement partie

d’une famille qui l’acceptait pour ce qu’il était. Sans le juger.

— Tu cherches une échappatoire ? Demanda Blay, accoudé à l’embrasure de

la porte.

— Non, dit Qhuinn en marchant vers lui.

Lorsqu’il approcha, Blay baissa immédiatement la main sur son pantalon qui

glissait.

— Sincèrement, comment fais-tu pour que ce truc tienne en place ?

Qhuinn baissa les yeux, et vit que la soie noire était très basse sur les hanches

de Blay.

— J’ai un cul plus ferme que le tien, répondit-il en ricanant. (Blay éclata de

rire.) Allez, va t’habiller, sinon je vais penser que c’est toi qui cherches à te

tailler.

— Certainement pas.

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On frappa à la porte, et Blay s’écarta pour aller répondre. Qhuinn émergea de

la penderie, et le regarda traverser la pièce et ouvrir la porte.

— Vous vous en sortez tous les deux ? Demanda Mary en entrant. D’ailleurs,

vous ne devriez pas être ensemble pour vous habiller. Ça porte malheur de voir

son compagnon avant la cérémonie.

— C’est de la superstition, protesta Qhuinn en riant.

— Pas du tout. C’est la tradition.

Par-dessus l’épaule de la petite humaine, Blay sourit à son ami.

— Tu sais, je crois qu’on n’a vraiment pas besoin de titiller le mauvais sort.

Mes parents devraient être arrivés à présent. Je vais descendre à leur rencontre.

Á tout de suite, dit-il, en s’approchant de Qhuinn pour un baiser rapide.

Qhuinn hocha la tête, et regarda Blay récupérer le reste de son costume avant

de disparaître. Puis il se tourna vers Mary qui avait un gentil sourire aux lèvres.

— Qu’y a-t-il de si drôle ? Demanda-t-il.

— Rien du tout. Mais je suis si fière de toi.

— Fière de moi ?

Tout en parlant, il retourna dans sa penderie pour récupérer la veste de son

fakata. Il l’enfilait lorsqu’il ressortit, mais Mary s’approcha de lui, et lui

repoussa les mains pour mieux ajuster son col. Elle resta ensuite face à lui pour

attacher la ceinture autour de sa taille.

Qhuinn la regarda, examinant le visage attentif, le sourire tendre, et les petites

mains qui s’agitaient autour de lui.

— Tu sais, Mom, je peux m’habiller tout seul.

Depuis l’accident de Blay, Mary était devenue pour Qhuinn une amie très

chère. Mais il se moquait régulièrement de son besoin de jouer les mères poules

avec lui.

— Je sais, dit-elle, de sa voix douce. C’est juste que je suis si—

— …fière de moi, coupa Qhuinn. Oui, tu me l’as déjà dit.

— Eh bien, c’est la vérité, affirma-t-elle en poussant Qhuinn. (Qui, bien

entendu, ne remua pas d’un pas, aussi elle recula pour regarder sa montre.) Où

est ta dague ? Il est presque l’heure de descendre pour la cérémonie.

En la regardant, Qhuinn réalisa qu’il était heureux qu’elle soit là.

— Tu sais, tu es vraiment une femelle extraordinaire.

Elle sourit.

— Tu te rappelles, au cours de notre première conversation, je t’ai dit que tu

étais un mâle de valeur. (Qhuinn hocha la tête.) Tu ne m’as pas crue alors.

J’espère que c’est le cas présent. Et manifestement, Blay le pense aussi.

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Qhuinn savait que l’influence de Blay l’avait changé, mais quand même… Il

n’en était pas encore à admettre être un mâle de valeur. Sans l’exprimer à haute

voix, il se contenta de serrer gentiment Mary contre lui. Et la laissa ensuite

s’écarter pour aller chercher la dague posée sur la commode— un objet superbe

et orné de joyaux— qu’il accrocha à sa ceinture.

— En principe, je suis prêt, dit-il en se tournant vers Marie, les bras écartés.

De quoi j’ai l’air ?

— Tu es magnifique.

— Merci.

***

Un peu plus tard, débout en haut des marches, Qhuinn s’arrêta un moment

pour regarder en bas. Il vit que tous les Frères étaient déjà alignés dans le grand

hall, et que tous portaient le même costume de soie noire que lui et Blay. Et tous

avaient aussi des dagues magnifiques à leurs côtés. Il ne vit pas Blay. Mais les

parents du mâle étaient au pied des escaliers, à côté de Wrath. Et John se tenait

de l’autre côté du roi. Un peu plus loin, Beth, Cormia, Marissa, Jane et Xhex,

formaient un demi-cercle. Elles étaient toutes plus belles les unes que les autres,

dans leurs longues robes multicolores.

Fritz entra, portant un plateau d’argent avec un pichet d’eau et un saladier de

sel. Le vieux majordome avança jusqu’à une petite table placée près de Vishous,

où il déposa son fardeau. Puis il s’écarta, et se plaça derrière le roi. Qhuinn

n’avait pas encore remarqué Bella, mais il la vit soudain, émergeant de la

cuisine, avec Nalla dans les bras.

Ce fut alors qu’il vit Blay, penché vers la petite femelle qui s’était accrochée à

son doigt. L’enfant riait de toutes ses dents.

Qhuinn resta figé, tandis qu’un frémissement lui parcourait le corps.

Le silence était tombé sur le grand hall, et il sentit tous les regards monter

vers lui. Mais il ne voyait que Blay… qui finit par relever les yeux lui aussi.

Puis le mâle se redressa lentement, et fit face.

— Magnifique, marmonna Qhuinn entre ses dents.

Il sentit la main de Mary se poser dans son dos, et le pousser en avant.

— Allons-y, chuchota-t-elle, en commençant à descendre les escaliers.

Il la suivit. Arrivée au bas des marches, la femelle s’éclipsa et alla se placer

près de Beth tandis que Qhuinn restait figé, devant le roi. Il avait toujours les

yeux fixés sur Blay.

— Avance, Blaylock, ordonna Wrath d’une voix tonnante.

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Blay obtempéra, et vint se placer en face de Qhuinn. Puis il tendit la main, et

la posa sur celle de son ami… et ce contact suffit pour ce que Qhuinn cesse de

trembler.

— Blaylock, dit le roi, ce mâle demande à ce que tu le prennes pour

compagnon, l’acceptes-tu ?

Blay déglutit avec difficulté, puis il répondit :

— Oui, je l’accepte.

— Qhuinn, ce mâle est disposé à t’accepter. Es-tu prêt à te montrer digne de

lui ? Á te sacrifier pour lui ? Á le défendre contre tous ceux qui voudraient lui

nuire ?

— Je le suis.

— Et toi Blaylock, ferais-tu la même chose pour ton compagnon ?

— Oui, dit Blay d’une voix ferme.

— Ce soir, dit Wrath, nous célébrons une union unique dans l’histoire de la

Confrérie. Ma reine et moi considérons qu’il s’agit d’une bonne union, d’une

très bonne union entre deux mâles de valeur qui méritent une cérémonie

honorable et un rituel traditionnel comme tous les autres Frères l’ont reçu avant

eux. (Le roi plaça une lourde main sur l’épaule de chacun des deux mâles.)

Guerriers, je déclare la présentation terminée. Enlevez vos tuniques, et

agenouillez-vous devant la Confrérie.

Qhuinn et Blay se déshabillèrent et tendirent leurs vêtements à la mère de

Blay. Puis ils s’approchèrent et se mirent à genoux devant les Frères, côte à côte,

la tête baissée.

Vishous avança, et se plaça devant Qhuinn.

— Qhuinn ? Quel est le nom de ton compagnon ?

— Il est nommé Blaylock, répondit-il.

Vishous dégaina sa dague, et grava dans le dos offert la première lettre du

nom de Blay. Qhuinn resta immobile sous la brûlure de la lame. Rhage avança

en suivant, et répéta la même procédure. Et Qhuinn se mordit les lèvres, pour ne

pas s’exprimer sa douleur. Un par un, chacun des Fère avança, jusqu’à ce que le

nom à huit lettres soit entièrement gravé, en Langage Ancien.

Puis Vishous revint une fois encore, portant l’eau et le sel, et Qhuinn serra les

poings, sachant ce qu’il attendait. Juste avant que l’eau salée ne grave à jamais

les entailles dans son dos, il sentit la main de Blay se poser sur la sienne. Il jeta

un coup d’œil à son ami, avant de refermer les yeux quand le sel brûla ses

blessures à vif. Sa peau eut un long frémissement, et il serra les dents. Il entendit

le grondement approbateur des Frères.

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Puis peu à peu, la douleur s’apaisa.

Mais soudain, il ressentit une violente nausée lui tordre l’estomac... à l’idée

que Blay allait subir la même torture, juste sous ses yeux, sans qu’il puisse

intervenir. Voilà qui allait être nettement plus insoutenable que ce qu’il venait

d’endurer. Il agita les doigts pour mieux retenir ceux de Blay, et pencha la tête.

Il était incapable de regarder. Mais il ne put s’empêcher d’écouter lorsque

Vishous se plaça devant son ami :

— Blaylock ? Quel est le nom de ton compagnon ?

— Il est nommé Qhuinn.

Blay serra de plus en plus les poings au fur et à mesure que les lettres étaient

gravées dans son dos. Et il fallut toute la force morale de Qhuinn pour

s’empêcher de gémir en devinant la souffrance de son ami. Une fois de plus, il

se mordit la lèvre, avec la sensation que c’était son cœur qui était découpé à vif.

Quand Qhuinn entendit les Frères grogner leur approbation devant la façon

magistrale dont Blay endurait la souffrance, il se sentit immensément fier de lui.

En aimant quelqu’un, pensa-t-il, il faut parfois se sacrifier. Et donner tout ce

que l’on a en soi. Sans marchander. Il faut être prêt à tout risquer, sans rien

attendre en retour.

Quand la voix merveilleuse de Zsadist s’éleva et interrompit ses pensées,

Qhuinn comprit que tout était fini. Il avait laissé Blay choisir la musique, et ne

savait même pas quelle était la chanson que le Frère entonnait. (NdT : When you

love someone, de Bryan Adams.) Mais quelle importance ? C’était merveilleux.

Il avait la sensation que chaque mot parlait directement à son âme.

En même temps que Blay, il se releva, sans lâcher la main de son ami, tandis

que la voix du ténor vibrait tout autour d’eux. Qhuinn se retourna, et saisit Blay

dans ses bras, et le serra fort contre lui, front contre front.

Puis il murmura :

— Je t’aime.

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Épilogue

Dans leur chambre, un peu plus tard, lorsqu’il sortit de la salle de bain et vit

Blay— planté devant la commode où il farfouillait dans un tiroir— Qhuinn

s’arrêta net avec la sensation que son nom marqué dans le dos du mâle était une

illusion.

Il s’approcha et Blay leva la tête, croisant son regard dans le miroir suspendu

en face de lui.

— Tu as fini ta douche ? Demanda-t-il.

— Ouaip. Et ça é été sacrément agréable d’enlever cette saloperie de sel, dit

Qhuinn, en caressant le dos de Blay… là où son nom apparaissait. Incroyable, tu

as déjà cicatrisé.

— Ça te plaît ?

Qhuinn leva les yeux vers le miroir.

— Bien entendu, répondit-il doucement.

— Ça faisait sacrément mal, pas vrai ? Dit Blay en riant.

Qhuinn laissa sa main glisser plus bas sur le dos du mâle avant de répondre :

— Ne m’en parle pas.

— Tu aurais pu te contenter de faire graver "Blay", ça aurait été moins

douloureux.

Blay tenta de se retourner, mais Qhuinn l’en empêcha en le retenant par les

épaules. Il fit glisser ses mains tout le long des bras épais, jusqu’aux mains

posées sur le dessus de la commode. Entremêlant ses doigts à ceux de son ami,

Qhuinn chuchota :

— Blaylock, (il s’interrompit le temps de l’embrasser dans le cou,) ne bouge

plus.

Tandis que Blay restait figé, Qhuinn s’écarta de quelques pas jusqu’à la table

de chevet, qu’il ouvrit pour en sortir quelques cordes qu’il avait placées là un

peu plus tôt. Il les jeta sur le lit, en même temps qu’un tube de lubrifiant. Puis il

revint jusqu’à Blay, et se colla contre lui.

— Très bien, tu es obéissant.

Il remit sa main gauche sur celle de Blay, et plaça l’autre sur le ventre de son

ami, avant de glisser sous la ceinture de son boxer. Ses doigts rencontrèrent le

sexe rigide du mâle. Manifestement, Blay était tout aussi excité que lui.

— Je vois que ton arme est déjà chargée, dit-il en pesant lourdement sur le

dos de son ami. J’aime ça.

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FAN-FICTIONS – TOME 1

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Il se mit à le caresser d’un geste régulier, et Blay gémit, en laissant tomber sa

tête. Mais Qhuinn le rattrapa par les cheveux, et l’obligea faire face au miroir,

sans pour autant perdre son rythme.

— Regarde-moi, chuchota-t-il à l’oreille de Blay, avant de mordiller la veine

qui courait le long de son cou. Ça me fait bander de te voir.

Il garda les yeux fixés sur ceux de Blay, à travers le miroir, tout en accélérant

le rythme de ses caresses. Il avait la bouche ouverte, et des canines énormes

dépassaient de ses lèvres. Qhuinn allait de plus en plus vite, et Blay renversa la

tête en arrière sur son épaule. Mais à nouveau, il l’en empêcha.

— Regarde-toi ! Ordonna-t-il. Regarde ta queue, si longue et si dure dans ma

main. Je veux l’avoir dans ma bouche. Je veux la goûter. Et c’est ce que je vais

faire.

Il s’arrêta, et caressa du pouce le gland gonflé et déjà prêt à jouir.

— Bordel, Qhuinn, gémit Blay. J’y étais presque.

— Dommage, tu vas devoir attendre, se moqua Qhuinn.

— Certainement pas longtemps, dit Blay, le souffle court.

— Je te l’interdis, dit Qhuinn.

Il relâcha le sexe de son ami, puis posa la paume sur sa nuque, le penchant en

avant. En même temps, il plaça son avant-bras autour de sa taille, et frotta son

propre sexe contre les reins durs du mâle. Blay se laissa tomber en avant, les

coudes appuyés sur le dessus ciré de la commode.

— Je t’interdis de jouir avant que je te le dise, dit Qhuinn, mais sa voix n’était

pas très ferme.

Il s’écarta et se déshabilla, laissant tomber ses vêtements sur le sol, n’importe

comment.

— Redresse-toi, ordonna-t-il.

Quand Blay obéit, Qhuinn le fit pivoter, jusqu’à ce qu’ils soient face à face.

Puis il se mit à l’embrasser, partout, de plus en plus passionnément. Avant de

s’écarter une nouvelle fois.

— Couche-toi sur le lit.

Blay ricana, et ne bougea pas.

— Si tu veux jouir, tu as intérêt à te magner… tout de suite.

Cette fois, Blay obtempéra, et Qhuinn le suivit. Quand son ami s’étendit au

beau milieu du lit, Qhuinn s’installa à califourchon sur ses hanches, puis

récupéra ses cordes. Il entoura la première autour du poignet droit de Blay. Qui

le regarda faire avec un sourire.

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— Tu as remarqué les progrès que j’ai faits ? dit Qhuinn. Cette corde ne

t’abîmera pas la peau comme l’avaient fait les menottes.

— Tu es plein d’attentions, dit Blay, le souffle court.

De sa main libre, il caressa la cuisse de Qhuinn, mais se retrouva vite écarté,

tandis que sa main était elle-aussi attachée à la tête du lit. Et Qhuinn secoua la

tête, en faisant les gros yeux.

— Tu n’aimes pas que je te touche ? Demanda Blay.

Qhuinn se pencha pour l’embrasser brièvement.

— J’adore que tu me touches, affirma-t-il. Mais pas maintenant.

Il se souleva, et glissa jusqu’au bout du lit, tout en récupérant discrètement le

tube de lubrifiant qu’il y avait jeté un peu plus tôt. Il prit dans la main un des

pieds de Blay, et déposa une pluie de baisers sur sa cheville, avant de faire

remonter ses lèvres. Puis il plia les jambes de son ami, lui faisant poser les pieds

à plat sur le lit, les genoux pointés vers le plafond. Lentement, très lentement, il

caressa de la bouche l’intérieur des cuisses fermes. Et la respiration de Blay

s’accéléra.

Qhuinn lui jeta un coup d’œil, entre ses cils. Blay avait fermé les yeux.

Parfait. Discrètement, il ouvrit le tube et répartit du lubrifiant sur ses doigts.

Lorsqu’il posa la bouche sur le sexe de Blay, sa langue en caressa d’abord le

gland— il savait parfaitement que son ami aimait ça.

— Qhuiiinn, gémit Blay.

Qhuinn ouvrit en grand la bouche, et l’engloutit complètement. D’une succion

régulière, il caressa la hampe de haut en bas. En même temps, il introduisit ses

doigts dans le corps de Blay et le pénétra profondément. Blay se cambra avec un

cri rauque, tirant à deux bras sur les cordes qui le retenaient.

— Bordel, haleta-t-il.

Qhuinn força davantage sa main en avant, et mordilla Blay à l’aine, savourant

le goût unique de sa peau dorée. Puis ses canines allongées se plantèrent dans la

fémorale du mâle, et il laissa le sang riche et épais dégringoler dans sa gorge

tandis que ses caresses faisaient plus rythmées. Blay hurlait de plaisir, le corps

arqué, savourant la double sensation de la pénétration de son corps et de la

succion de son sang.

— Qhuinn, je t’en prie.

D’un coup de langue, Qhuinn scella sa morsure, et se mit à genoux, entre les

jambes ouvertes de son copain.

— Tu me pries de quoi ?

— De me baiser, dit Blay, les yeux luisants de désir. Je n’en peux plus.

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Qhuinn passa les coudes sur les genoux de Blay, et souleva le corps offert.

— J’ai bien l’intention de te baiser, dit-il, en glissant son sexe là où ses doigts

avaient préparé le chemin.

Quand il se rua en avant, la sensation brûlante du corps de Blay se refermant

sur son sexe douloureux de tension était si intense qu’il sentit sa peau se

recroqueviller sur elle-même. Avant de continuer, il se pencha et posa sa bouche

sur celle de son amant.

— Tu es tout pour moi, dit-il, contre ses lèvres.

Puis il fit onduler ses hanches d’un mouvement lent d’abord, mais qui devint

vite de plus en plus puissant et saccadé. La respiration des deux mâles était

rauque, et ponctuée de grognements. Puis Qhuinn se laissa tomber sur les coudes

et souleva Blay plus haut pour pouvoir le prendre plus profondément.

Quand la jouissance monta, inexorable, il saisit le sexe de son ami et dit :

— Jouis avec moi, Blay.

Ils trouvèrent ensemble l’extase… et Qhuinn se laissa retomber de tout son

poids sur le corps étalé sous lui. Il resta longtemps ainsi, le souffle court. Puis il

se souleva, et regarda le visage de son compagnon.

— À mon avis, on doit repasser sous la douche, marmonna Blay, qui avait du

mal à garder les yeux ouverts.

En riant, Qhuinn posa son front sur le front moite du mâle.

— Dis-moi encore que tu m’aimes, Blay, demanda-t-il.

— Je t’aime.

Qhuinn regarda Blay dans les yeux.

— Dis-le-moi encore.

— Je t’aime.

— Encore, chuchota-t-il.

— Détache-moi… demanda Blay, avec un sourire heureux.

Qhuinn tendit la main et relâcha les cordes liées au bois du lit, et Blay baissa

les bras. Puis il les jeta autour du corps de Qhuinn.

— Je t’ai toujours aimé, dit-il en l’embrassant sur le bout du nez, et je

t’aimerai toujours. Je suis à toi.

— Á moi, dit Qhuinn dans un souffle.

— Pour toujours.

Devant l’expression de son ami, Qhuinn comprit que c’était la vérité.

— Pour toujours, répéta-t-il, comme un vœu éternel.

FIN