1
Éric TAMIGNEAUX, enseignant-chercheur, titulaire de la Chaire de recherche industrielle dans les collèges du CRSNG en valorisation des macroalgues marines, École des pêches et de l’aquaculture du Québec (ÉPAQ), Cégep de la Gaspésie et des Îles (Cégep-GIM); Lucie BEAULIEU, professeur-chercheur, Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF), Université Laval; Daniel BOURDAGES, technicien en aquaculture, ÉPAQ, Cégep-GIM; Oussama LAPOINTES, étudiant en aquaculture, ÉPAQ, Cégep-GIM; Sylvie TURGEON, professeur-chercheur, INAF, Université Laval; Eric GAGNON, chercheur-chimiste, Oléotek, Cégep de Thetford; Stéphanie PIEDDESAUX, chargée de projet, Merinov. CCTT des pêches, Cégep-GIM Colloque de l’ARC dans le cadre du 84e Congrès de l’Acfas, 10 mai 2016, Montréal Introduction Palmaria palmata est une algue rouge comestible. Elle est formée d’un crampon qui se prolonge en une fronde souple et large, découpées en plusieurs lobes (Figure 1). Cette algue constitue un excellent apport alimentaire car elle contient jusqu’à 30% de son poids sec en protéines (Mouritsen et collab., 2013), elle est pauvre en iode et elle est plus riche en fer et en vitamines que des végétaux terrestres comme l’épinard (McHugh 2003). Par ailleurs, elle contient beaucoup de fibres et d’éléments minéraux et elle est riche en acide eicosapentanoïque (EPA, oméga 3) (Le Gall et collab., 2004). Il s’agit donc d’un aliment santé. Sous l’appellation de dulse , cette espèce qui a une saveur de noisette est déjà récoltée et consommée comme légume de mer, comme condiment et en croustille en Europe du nord et en Nouvelle-Écosse (McHugh 2003). Certaines molécules extraites de cette algue ont des propriétés bénéfiques sur la santé, ce qui ouvre des perspectives d’utilisation par les industries nutraceutique et cosmétique. Cependant, l’exploitation des populations naturelles a atteint son maximum et la culture permettrait de stimuler la synthèse des molécules d’intérêt par ces algues. P. palmata peut se cultiver en suspension, dans des bassins, et elle peut être multipliée par simple fragmentation des frondes (Werner et Dring, 2011). La température optimale de croissance de cette espèce se situe entre 6 et 12° C (Werner et Dring, 2011, Corey et collab., 2012 ). Objectifs Les objectifs généraux du projet sont d’optimiser les rendements de culture de P. palmata en bassins et d’augmenter son contenu en protéines, en modifiant plusieurs paramètres comme l’âge des algues au moment de la récolte, la composition du milieu de culture, la biomasse des algues dans les bassins et le débit d’alimentation en eau de mer dans les bassins. Les objectifs spécifiques étaient de comparer les performances de productivité, de croissance et de contenu en protéines (1) des jeunes frondes vs les frondes plus âgées, (2) des frondes cultivées avec et sans ajout de nutriments, (3) des frondes cultivées à différentes densités, (4) des frondes cultivées avec différentes vitesses de renouvellement de l’eau dans les bassins. Matériel et méthodes Des thalles 1 an et de jeunes boutures 1 an de P. palmata provenant du bord de mer ont été cultivés entre février et avril 2016, à l’ÉPAQ, en Gaspésie, dans des bassins carrés (0, 55 m (L) x 0,55 m (l) x 0,45 cm (h); 0,3 m 2 de section) de 140 litres alimentés avec de l’eau de mer à température naturelle et éclairés par des néons (250 micromoles de photons m -2 s -1 ; photopériode 16:8 L:O), avec une aération au fond des bassins pour maintenir les algues en mouvement constant (5 secondes par rotation) (Figure 2 A et B). Différents débits entre 1 changement d’eau par semaine et 1 changement d’eau par heure et des densités entre 0,2 et 5 kg frais d’algues m -2 ont été testées et certains bassins ont été enrichis une fois par semaine en azote (NaNO 3 ), en phosphore (NaH 2 PO 4 -2H 2 O) et en minéraux traces (solution de métaux traces de Guillard’s F/2) de façon à obtenir une concentration finale de 1 millimole N et 200 micromoles P par semaine, avec un rapport N:P de 50:1. L ’ajout des fertilisants avait lieu juste avant la nuit, en fermant l’arrivée d’eau pendant 8 h. Les paramètres suivants ont fait l’objet d’une mesure hebdomadaire: température, salinité et pH de l’eau de mer, débit d’alimentation en eau de mer, intensité de l’éclairage et vitesse de rotation des frondes. Une fois par semaine, le contenu total en algues de chaque bassin était pesé (poids frais) et l’excès de biomasse était enlevée et séchée à l’étuve (40 ° C) pour analyses ultérieures. A cette occasion, 20 frondes étaient aussi mesurées individuellement (poids frais et longueur). Les algues étaient ensuite replacées dans leur bassin. La productivité des bassins et le taux de croissance spécifique des algues ont été calculés de la façon suivante : Taux de croissance spécifique (% j -1 ) = Productivité des bassins (poids frais m -2 j -1 ) M1 et M2= biomasse initiale et finale d’algues fraîches dans les bassins (g) T1 et T2 = jour de la prise de mesure initiale et finale (jour) S = section de la partie supérieure du bassin (m -2 ) Résultats Les résultats de ces travaux exploratoires mettent en évidence plusieurs tendances : Le taux de croissance spécifique (2,1 ± 0,2 % j -1 ) et la productivité des jeunes frondes 1 an (63 ± 6,3 g m -2 j -1 ) étaient plus élevés que ceux des frondes 1 an (1,1 ± 0,1 % j -1 ; 15,5 ± 3,5 g m -2 j -1 ) (Figure 3). Le taux de croissance spécifique (2,9 ± 0,8 % j -1 ) et la productivité (83,2 ± 13,2 g m -2 j -1 ) des jeunes frondes cultivées avec un ajout hebdomadaire de nutriments étaient plus élevés que ceux des fondes cultivées sans ajout de nutriment (2,1 ± 0,4 % j -1 ; 57,7 ± 6,4 g m -2 j -1 ) (Figure 4). Le taux de croissance spécifique (2,9 ± 0,8 % j -1 ) et la productivité (83,2 ± 13,2 g m -2 j -1 ) des jeunes frondes cultivées à une biomasse de 2,5 kg frais m -2 , étaient plus élevés que ceux des jeunes frondes cultivées à une biomasse de 5 kg frais m -2 (0,8 ± 0,1 % j -1 ; 39,2 ± 4,2 g m -2 j -1 ) (Figures 5 et 6). La température de l’eau des bassins a varié avec son temps de résidence dans les bassins. Avec168 changements par semaine (= 1 par heure) la température moyenne était de 2,9° C, proche de celle de l’eau de mer en milieu naturel entre février et avril, tandis qu’avec les débits les plus faibles, la température de l’eau des bassins était de 12°C. Le taux de croissance spécifique (3,4 ± 0,3 % j -1 ) et la productivité (93,7 ± 7,9 g m -2 j -1 ) des jeunes frondes dans le bassin avec 14 changements d’eau par semaine (= 2 par jour) et une température de 8,6° C étaient plus élevés que ceux des autres bassins (Figure 7). Le taux de croissance spécifique (4,9 % j -1 ) et la valeur de productivité (137 g m -2 j -1 ) les plus élevés ont été observés dans le bassin de jeunes frondes, avec ajout de nutriments et une biomasse de 2,5 kg frais m -2 . Conclusions et recommandations La biomasse dans le bassin et la fréquence de changement d’eau ont eu une influence significative (ANOVA, p< 0,05) sur les performances de croissance de P. palmata . L ’âge des frondes et l’ajout de nutriments semblent avoir aussi un effet. • Dans notre système expérimental, la productivité la plus élevée a été obtenue avec des jeunes frondes de l’année, cultivées avec une biomasse de 2,5 kg m -2 , un enrichissement hebdomadaire en nutriments et 2 changements d’eau par jour. • Les résultats se situent au milieu de la gamme des valeurs rapportées dans la littérature, soit des valeurs de taux de croissance spécifique entre 1 et 12 % j -1 et des valeurs de productivité entre 25 et 609 g m -2 j -1 . Les valeurs les plus élevées ont été obtenues par Pang et Lüning (2004) avec une biomasse de 4 kg m -2 et une intensité lumineuse de 1600 microeinsteins m -2 s -1 . • Les tendances observées ici devront être confirmées ensuite au moyen d’essais avec une réplication des traitements expérimentaux. Pour la suite des travaux, il est prévu de: • Tester une gamme de biomasse plus étendue (0,2– 3,5 kg m -2 ) • Tester un éclairage plus intense (LED) puisque Pang et Lüning (2004) suggèrent qu’un taux de croissance augmente en parallèle avec l’intensité lumineuse jusqu’à un seuil de 1600 micromoles de photons m -2 s -1 . A la fin du projet, des analyses de contenu en protéines seront réalisées sur les échantillons provenant de chacun des essais. Remerciements Les auteurs souhaitent remercier le Ministère de l’éducation et de l’enseignement supérieur et le Fond de recherche Nature et technologies et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada pour leurs contributions financières. Références citées dans le texte Corey P, Kim JK, Garbary DJ, Prithiviraj B et Duston J. (2012). Bioremediation potential of Chondrus crispus (Basin Head) and Palmaria palmata: effect of temperature and high nitrate on nutrient removal. J Appl Phycol., 24 : 441–448. Le Gall , L, S Pien et A-M Rusig (2004). Cultivation of Palmaria palmata (Palmariales, Rhodophyta) from isolated spores in semi-controlled conditions. Aquaculture, 229: 181-191. McHugh D (2003). A guide to the seaweed industry. FAO fisheries technical paper 441. FAO, Rome, 105 p. Morgan K C, P F Shacklock et F J Simpson. (1980). Some aspects of the culture of Palmaria palmata in greenhouse tanks. Botanica marina 32: 765-770. Pang S et K Lüning (2004). "Tank cultivation of the red alaga Palmaria palmata : effects of intermittent light on growth rate, yield and growth kinetics." J. Appl. Phycol. 16: 93-99. Mouritsen O G, C Dawcziynski, L Duelund, G Jahreis, W Vetter et M Shröder (2013). On the human consumption of the red seaweed dulse (Palmaria palmata (L.) Weber &Mohr). J. Appl. Phycol. 25: 1777-1791. Werner A et M Dring (2011). Cultivating Palmaria palmata. Aquaculture Explained no.27, Irish Sea Fisheries Board, 74 p. Figure 1. Palmaria palmata (Linnaeus) Weber & Mohr 5 cm = 2 1 2 1 2 1 2 1 100 0 50 100 150 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 Productivité par bassin (g m -2 j-1 ) Semaines de culture 1500 g par bassin (5 kg m -2 ) 750 g par bassin (2,5 kg m -2 ) 0 20 40 60 80 100 120 1500 g par bassin 750 g par bassin Productivité par bassin (g m -2 j -1 ) 0 20 40 60 80 100 120 Avec nutriment Sans nutriment Productivité par bassin (g m -2 j -1 ) 0 20 40 60 80 100 120 Jeunes frondes Vieilles frondes Productivité par bassin (g m -2 j -1 ) Figure 3. Comparaison de la productivité des bassins de culture en fonction de l’âge des frondes (moyenne ± erreur-type; n = 22). Les cultures ont duré 16 semaines, avec et sans ajouts de nutriments. Figure 5. Évolution hebdomadaire de la productivité des bassins de culture en fonction de la biomasse des jeunes frondes. Semaines 1 à 7 : biomasse de 5 kg frais m -2 . Semaines 8 à 16 : biomasse de 2,5 kg frais m -2 . Cultures avec ajout de nutriments. Figure 4. Comparaison de la productivité des bassins de culture de jeunes frondes en fonction de l’ajout de nutriments (N, P et métaux traces) (moyenne ± erreur-type; n = 8). Les cultures ont duré 8 semaines, avec une biomasse de 750 g d’algues par bassin (2,5 kg m -2 ). Figure 6. Comparaison de la productivité des bassins de culture en fonction de la biomasse des jeunes frondes (moyenne ± erreur-type; n = 8). Les cultures ont duré 8 semaines, avec ajout de nutriments. Figure 7. Comparaison de la productivité des bassins de culture de jeunes frondes en fonction de la vitesse de renouvellement de l’eau (moyenne ± erreur-type; n = 6) (barres). Les cultures ont duré 7 semaines, avec une biomasse de 750 g d’algues par bassin (2,5 kg m -2 ) et ajout de nutriments. Température de l’eau de mer dans les bassins (moyenne ± erreur-type; n = 7) (triangles). 0 2 4 6 8 10 12 14 0 20 40 60 80 100 120 1 3 7 14 168 Température de l'eau (° C) Productivité par bassin (g m -2 j -1 ) Nombre de changements d’eau par semaine Figure 2.A et B : Dispositif expérimental utilisé pour la culture de P. palmata. A B

1 j 2 Références citées dans le texte Introduction - (g mvega.cvm.qc.ca/arc/doc/29TamigneauxEric_ARC-Acfas_2016...Colloque de l’ARC dans le cadre du 84e Congrès de Acfas, 10

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: 1 j 2 Références citées dans le texte Introduction - (g mvega.cvm.qc.ca/arc/doc/29TamigneauxEric_ARC-Acfas_2016...Colloque de l’ARC dans le cadre du 84e Congrès de Acfas, 10

Éric TAMIGNEAUX, enseignant-chercheur, t itulaire de la Chaire de recherche industrielle dans les collèges du CRSNG en valorisation des macroalgues marines, École des pêches et de l’aquaculture du Québec (ÉPAQ), Cégep de la Gaspésie et des Îles (Cégep-GIM); Lucie BEAULIEU, professeur-chercheur, Institut sur la nutrit ion et les aliments fonctionnels (INAF), Université Laval; Daniel BOURDAGES, technicien en aquaculture, ÉPAQ, Cégep-GIM; Oussama LAPOINTES, étudiant en aquaculture, ÉPAQ, Cégep-GIM; Sylvie TURGEON, professeur-chercheur, INAF, Université Laval; Eric GAGNON, chercheur-chimiste, Oléotek, Cégep de Thetford; Stéphanie PIEDDESAUX, chargée de projet, Merinov. CCTT des pêches, Cégep-GIM

Colloque de l’ARC dans le cadre du 84e Congrès de l’Acfas, 10 mai 2016, Montréal

Introduction Palmaria palmata est une algue rouge comestible. Elle est formée d’un crampon qui se prolonge en une fronde souple et large, découpées en plusieurs lobes (Figure 1). Cette algue constitue un excellent apport alimentaire car elle contient jusqu’à 30% de son poids sec en protéines (Mouritsen et collab., 2013), elle est pauvre en iode et elle est plus riche en fer et en vitamines que des végétaux terrestres comme l’épinard (McHugh 2003). Par ailleurs, elle contient beaucoup de f ibres et d’éléments minéraux et elle est riche en acide eicosapentanoïque (EPA, oméga 3) (Le Gall et collab., 2004). Il s’agit donc d’un aliment santé. Sous l’appellat ion de dulse, cette espèce qui a une saveur de noisette est déjà récoltée et consommée comme légume de mer, comme condiment et en croustille en Europe du nord et en Nouvelle-Écosse (McHugh 2003). Certaines molécules extraites de cette algue ont des propriétés bénéfiques sur la santé, ce qui ouvre des perspectives d’ut ilisat ion par les industries nutraceutique et cosmétique. Cependant, l’exploitat ion des populat ions naturelles a atteint son maximum et la culture permettrait de st imuler la synthèse des molécules d’ intérêt par ces algues. P. palmata peut se cult iver en suspension, dans des bassins, et elle peut être mult ipliée par simple fragmentat ion des frondes (Werner et Dring, 2011). La température optimale de croissance de cette espèce se situe entre 6 et 12° C (Werner et Dring, 2011, Corey et collab., 2012).

Objectifs Les object ifs généraux du projet sont d’optimiser les rendements de culture de P. palmata en bassins et d’augmenter son contenu en protéines, en modif iant plusieurs paramètres comme l’âge des algues au moment de la récolte, la composit ion du milieu de culture, la biomasse des algues dans les bassins et le débit d’alimentat ion en eau de mer dans les bassins. Les object ifs spécif iques étaient de comparer les performances de productivité, de croissance et de contenu en protéines (1) des jeunes frondes vs les frondes plus âgées, (2) des frondes cult ivées avec et sans ajout de nutriments, (3) des frondes cult ivées à dif férentes densités, (4) des frondes cult ivées avec différentes vitesses de renouvellement de l’eau dans les bassins.

Matériel et méthodes Des thalles ≥ 1 an et de jeunes boutures ≤ 1 an de P. palmata provenant du bord de mer ont été cult ivés entre février et avril 2016, à l’ÉPAQ, en Gaspésie, dans des bassins carrés (0, 55 m (L) x 0,55 m (l) x 0,45 cm (h); 0,3 m2 de sect ion) de 140 litres alimentés avec de l’eau de mer à température naturelle et éclairés par des néons (250 micromoles de photons m-2 s-1; photopériode 16:8 L:O), avec une aérat ion au fond des bassins pour maintenir les algues en mouvement constant (5 secondes par rotat ion) (Figure 2 A et B). Dif férents débits entre 1 changement d’eau par semaine et 1 changement d’eau par heure et des densités entre 0,2 et 5 kg frais d’algues m-2 ont été testées et certains bassins ont été enrichis une fois par semaine en azote (NaNO3), en phosphore (NaH2PO4-2H2O) et en minéraux traces (solut ion de métaux traces de Guillard’s F/2) de façon à obtenir une concentrat ion f inale de 1 millimole N et 200 micromoles P par semaine, avec un rapport N:P de 50:1. L’ajout des fert ilisants avait lieu juste avant la nuit, en fermant l’arrivée d’eau pendant 8 h. Les paramètres suivants ont fait l’objet d’une mesure hebdomadaire: température, salinité et pH de l’eau de mer, débit d’alimentat ion en eau de mer, intensité de l’éclairage et vitesse de rotat ion des frondes. Une fois par semaine, le contenu total en algues de chaque bassin était pesé (poids frais) et l’excès de biomasse était enlevée et séchée à l’étuve (40 ° C) pour analyses ultérieures. A cette occasion, 20 frondes étaient aussi mesurées individuellement (poids frais et longueur). Les algues étaient ensuite replacées dans leur bassin. La productivité des bassins et le taux de croissance spécif ique des algues ont été calculés de la façon suivante : Taux de croissance spécif ique (% j-1) = Product ivité des bassins (poids frais m-2 j-1) M1 et M2= biomasse init iale et f inale d’algues fraîches dans les bassins (g) T1 et T2 = jour de la prise de mesure init iale et f inale (jour) S = sect ion de la part ie supérieure du bassin (m-2)

Résultats Les résultats de ces travaux exploratoires mettent en évidence plusieurs tendances : • Le taux de croissance spécif ique (2,1 ± 0,2 % j-1) et la productivité des jeunes frondes ≤1 an (63 ± 6,3 g m-2 j-1)

étaient plus élevés que ceux des frondes ≥ 1 an (1,1 ± 0,1 % j-1 ; 15,5 ± 3,5 g m-2 j-1) (Figure 3). • Le taux de croissance spécif ique (2,9 ± 0,8 % j-1) et la productivité (83,2 ± 13,2 g m-2 j-1) des jeunes frondes

cult ivées avec un ajout hebdomadaire de nutriments étaient plus élevés que ceux des fondes cult ivées sans ajout de nutriment (2,1 ± 0,4 % j-1 ; 57,7 ± 6,4 g m-2 j-1) (Figure 4).

• Le taux de croissance spécif ique (2,9 ± 0,8 % j-1) et la productivité (83,2 ± 13,2 g m-2 j-1) des jeunes frondes cult ivées à une biomasse de 2,5 kg frais m-2, étaient plus élevés que ceux des jeunes frondes cult ivées à une biomasse de 5 kg frais m-2 (0,8 ± 0,1 % j-1 ; 39,2 ± 4,2 g m-2 j-1) (Figures 5 et 6).

• La température de l’eau des bassins a varié avec son temps de résidence dans les bassins. Avec168 changements par semaine (= 1 par heure) la température moyenne était de 2,9° C, proche de celle de l’eau de mer en milieu naturel entre février et avril, tandis qu’avec les débits les plus faibles, la température de l’eau des bassins était de 12° C.

• Le taux de croissance spécif ique (3,4 ± 0,3 % j-1) et la productivité (93,7 ± 7,9 g m-2 j-1) des jeunes frondes dans le bassin avec 14 changements d’eau par semaine (= 2 par jour) et une température de 8,6° C étaient plus élevés que ceux des autres bassins (Figure 7).

• Le taux de croissance spécif ique (4,9 % j-1) et la valeur de productivité (137 g m-2 j-1) les plus élevés ont été observés dans le bassin de jeunes frondes, avec ajout de nutriments et une biomasse de 2,5 kg frais m-2.

Conclusions et recommandations • La biomasse dans le bassin et la fréquence de changement

d’eau ont eu une inf luence signif icat ive (ANOVA, p< 0,05) sur les performances de croissance de P. palmata. L’âge des frondes et l’ajout de nutriments semblent avoir aussi un effet.

• Dans notre système expérimental, la productivité la plus élevée a été obtenue avec des jeunes frondes de l’année, cult ivées avec une biomasse de 2,5 kg m-2, un enrichissement hebdomadaire en nutriments et 2 changements d’eau par jour.

• Les résultats se situent au milieu de la gamme des valeurs rapportées dans la lit térature, soit des valeurs de taux de croissance spécif ique entre 1 et 12 % j-1 et des valeurs de productivité entre 25 et 609 g m-2 j-1. Les valeurs les plus élevées ont été obtenues par Pang et Lüning (2004) avec une biomasse de 4 kg m-2 et une intensité lumineuse de 1600 microeinsteins m-2 s-1.

• Les tendances observées ici devront être confirmées ensuite au moyen d’essais avec une réplicat ion des traitements expérimentaux.

Pour la suite des travaux, il est prévu de: • Tester une gamme de biomasse plus étendue (0,2–

3,5 kg m-2) • Tester un éclairage plus intense (LED) puisque Pang et Lüning

(2004) suggèrent qu’un taux de croissance augmente en parallèle avec l’ intensité lumineuse jusqu’à un seuil de 1600 micromoles de photons m-2 s-1 .

A la f in du projet, des analyses de contenu en protéines seront réalisées sur les échantillons provenant de chacun des essais.

Remerciements Les auteurs souhaitent remercier le Ministère de l’éducation et de l’enseignement supérieur et le Fond de recherche Nature et technologies et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada pour leurs contributions f inancières.

Références citées dans le texte Corey P, Kim JK, Garbary DJ, Prithiviraj B et Duston J. (2012). Bioremediation potential of Chondrus crispus (Basin Head) and Palmaria palmata: effect of temperature and high nitrate on nutrient removal. J Appl Phycol., 24 : 441–448. Le Gall, L, S Pien et A-M Rusig (2004). Cult ivation of Palmaria palmata (Palmariales, Rhodophyta) from isolated spores in semi-controlled condit ions. Aquaculture, 229: 181-191. McHugh D (2003). A guide to the seaweed industry. FAO fisheries technical paper 441. FAO, Rome, 105 p. Morgan K C, P F Shacklock et F J Simpson. (1980). Some aspects of the culture of Palmaria palmata in greenhouse tanks. Botanica marina 32: 765-770. Pang S et K Lüning (2004). " Tank cult ivat ion of the red alaga Palmaria palmata : ef fects of intermittent light on grow th rate, yield and grow th kinetics." J. Appl. Phycol. 16: 93-99. Mouritsen O G, C Dawcziynski, L Duelund, G Jahreis, W Vetter et M Shröder (2013). On the human consumption of the red seaweed dulse (Palmaria palmata (L.) Weber &Mohr). J. Appl. Phycol. 25: 1777-1791. Werner A et M Dring (2011). Cult ivat ing Palmaria palmata. Aquaculture Explained no.27, Irish Sea Fisheries Board, 74 p.

Figure 1. Palmaria palmata (Linnaeus) Weber & Mohr

5 cm

=𝑀𝑀2 −𝑀𝑀1𝑇𝑇2 − 𝑇𝑇1

𝑆𝑆

�𝑙𝑙𝑙𝑙𝑀𝑀2 − 𝑙𝑙𝑙𝑙𝑀𝑀1𝑇𝑇2 − 𝑇𝑇1

� 𝑥𝑥 100

0

50

100

150

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16

Prod

uctiv

ité p

ar b

assi

n (g

m-2

j-1)

Semaines de culture 1500 g par bassin (5 kg m-2) 750 g par bassin (2,5 kg m-2)

0

20

40

60

80

100

120

1500 g par bassin 750 g par bassin

Prod

uctiv

ité p

ar b

assi

n (g

m-2

j-1 )

0

20

40

60

80

100

120

Avec nutriment Sans nutriment

Prod

uctiv

ité p

ar b

assi

n (g

m-2

j-1 )

0

20

40

60

80

100

120

Jeunes frondes Vieilles frondesPr

oduc

tivité

par

bas

sin

(g m

-2 j-

1 )

Figure 3. Comparaison de la productivité des bassins de culture en fonction de l’âge des frondes (moyenne ± erreur-type; n = 22). Les cultures ont duré 16 semaines, avec et sans ajouts de nutriments.

Figure 5. Évolution hebdomadaire de la productivité des bassins de culture en fonction de la biomasse des jeunes frondes. Semaines 1 à 7 : biomasse de 5 kg frais m-2. Semaines 8 à 16 : biomasse de 2,5 kg frais m-2. Cultures avec ajout de nutriments.

Figure 4. Comparaison de la productivité des bassins de culture de jeunes frondes en fonction de l’ajout de nutriments (N, P et métaux traces) (moyenne ± erreur-type; n = 8). Les cultures ont duré 8 semaines, avec une biomasse de 750 g d’algues par bassin (2,5 kg m-2).

Figure 6. Comparaison de la productivité des bassins de culture en fonction de la biomasse des jeunes frondes (moyenne ± erreur-type; n = 8). Les cultures ont duré 8 semaines, avec ajout de nutriments.

Figure 7. Comparaison de la productivité des bassins de culture de jeunes frondes en fonction de la vitesse de renouvellement de l’eau (moyenne ± erreur-type; n = 6) (barres). Les cultures ont duré 7 semaines, avec une biomasse de 750 g d’algues par bassin (2,5 kg m-2) et ajout de nutriments. Température de l’eau de mer dans les bassins (moyenne ± erreur-type; n = 7) (triangles).

0

2

4

6

8

10

12

14

0

20

40

60

80

100

120

1 3 7 14 168

Tem

péra

ture

de

l'eau

(°C

)

Prod

uctiv

ité p

ar b

assi

n (g

m-2

j-1)

Nombre de changements d’eau par semaine

Figure 2.A et B: Disposit if expérimental ut ilisé pour la culture de P. palmata.

A B