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IMAGINONS LA NOUVELLE AFRIQUE ! WWW.INSPIREAFRIKA.COM NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015 #16 ET SI LE CHIC FAISAIT DU CHIFFRE ? FOCUS SUR LE ROYAUME DU CUIR ALPHADI LA DYNASTIE CONTINUE LOZA MALEOMBHO UN OVNI DANS LA MODE AFRICAINE

#16: Mode Africaine, et si le chic faisait du chiffre ?

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Le marché de l'habillement Africain représente environ 31 milliards de dollars aujourd'hui. Comment exploiter ce potentiel ? Comment professionnaliser l'industrie de la mode africaine ? Bonne lecture !

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I M A G I N O N S L A N O U V E L L E A F R I Q U E !

WWW.INSPIREAFRIKA.COM

NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015 #16

ET SI LE CHICFAISAIT DU CHIFFRE ?

FOCUS SUR LE ROYAUME

DU CUIR

ALPHADI LA DYNASTIE CONTINUE

LOZA MALEOMBHO UN OVNI DANS LA MODE AFRICAINE

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2 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION

©Thinkstock, CV-Champagne Nicolas Feuillatte RCS Reims 775 611 924 L’ABUS D’ALCOOL EST DANGEREUX POUR LA SANTÉ, À CONSOMMER AVEC MODÉRATION

©Thinkstock, CV-Champagne Nicolas Feuillatte RCS Reims 775 611 924

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3INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

LA RÉDACTION

INSPIRE AFRIKA MAGAZINE est édité par ANINKA MEDIA GROUP

A CONTRIBUÉ À CE NUMÉRO

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INSPIRE AFRIKA MAGAZINE - Edition 16 - Novembre - Décembre 2015

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RÉDACTRICE EN CHEFJOAN YOMBO

REDACTEUR EN CHEF ADJOINTLOUIS GILBERT BISSEK

CONCEPTION ET RÉALISATION GRAPHIQUEALISSA JAMES

DIRECTRICE GÉNÉRALECHRYS NYETAM

RESPONSABLE COMMERCIALANITA BAKAL

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RELATIONS PUBLIQUESIVAN NYETAM

REDACTRICE EN CHEF ANGLAIS CHRYS NYETAM

REDACTRICE CULTURESTELLA SANOGO

TRADUCTRICERAKY TOURÉ

CHARGÉES DES PARTENARIATS

AFRIQUEHYACINTHE ISSOMBO

AMÉRIQUEANITA BAKAL

EUROPEFRANCESCA NGAHANE

LOZA MALÉOMBHO, PRINTEMPS/ETÉ 2016 : COLLECTION ZAOULI. CREDITS PHOTO KLASSY FILMS STUDIOS. MODÈLE : AMENAN TANOH

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4 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

MODE AFRICAINE : ET SI LE CHIC FAISAIT DU CHIFFRE ?

INSPIR’START UP // 28Loza Maleombho

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SOMMAIRE

CARRIÈRE // 20Alphadi

4 QUESTIONS À // 42Valérie Ayena

EDITO // 5NEWS // 6

TENDANCES // 8Les bloggeurs contre attaquent

COUP DE COEUR // 12 A.A.K.S : sublimer l’artisanat

INSPIR’INTERVIEW // 16«Nous voulons des marques africaines en vitrine !»

CARRIÈRE // 20Alphadi, De père en fils

OSER INSPIRER // 24Une Africaine adoubée par la Fashion Week

INSPIR’START UP // 28Loza Maleombho met en valeur le «zaouli»

INSPIR’ASSOCIATION // 32Le Dessein d’Eric Coly

INSPIR’ECO // 36A quand le réveil du géant Africain ?

LES PENSÉES DE // 38Grace Kelly azizet

4 QUESTIONS À... // 42Valérie Ayena

FOCULTURE // 44Des prétendants de «marque» chez la Reine de Saba

OSER INSPIRER // 24Katia Bumba

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5INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

Peut-on vraiment parler d’une industrie de la mode en Afrique ? La question est dé-sormais sur toutes les lèvres. Selon Grace Kelly Azizet, _Directrice de l’agence Wild Flowers1_ la réponse est plus complexe qu’on ne le croit  : le secteur de la mode est en plein essor, mais de nombreuses notions restent à définir (p.38). Laura Eboa Songue, qui pilote le cluster Mode Africa France, a quant à elle, un avis plus tranché : « il manque encore des éléments structurants décisifs pour parler d’une réelle industrie »2. Si l’on considère qu’une industrie se caractérise par la production en quantité, l’organisation du travail, la diversifi-cation et l’accessibilité des biens, on pourrait en effet considérer que le continent a encore de nombreuses cartes à jouer.

Les professionnels s’accordent à dire que pour passer à l’étape suivante, l’enjeu pour la mode africaine est désormais de s’affirmer à l’interna-tional et de répondre à une demande globale. Mais la demande locale est-elle déjà satisfaite ?

Euromonitor International évalue le marché du vêtement et du « footwear » africain à 31 milliards de dollars, tandis que la Banque Africaine de développement évalue la classe moyenne sur le continent à près de 370 millions de personnes. Le potentiel à exploiter est donc énorme, à la seule échelle du continent.

Pendant qu’elle songe à habiller le Monde, l’Afrique ne devrait-elle pas songer en priorité à habiller l’Afrique  ? La mode Africaine reste encore assez inaccessible pour les africains du continent eux-mêmes  : peu d’exposition mé-

diatique, peu de marques dites « mainstream », (trop) peu de for-mations, pour ne citer que ces quelques exemples.

De fait, les marques qui ont com-pris qu’il fallait d’abord innover localement pour ensuite attirer les consommateurs et les inves-tisseurs à l’échelle globale, sont celles qui réussissent le mieux aujourd’hui. Innover ne signifie

pas seulement apporter des solutions techno-logiques. Il s’agit surtout de trouver des moyens disruptifs pour exploiter les faiblesses du conti-nent, et en faire des opportunités.

Des marques comme Kisua ou encore Made in Kigali le font très bien. La première a choisi de mettre en avant les meilleurs designers du continent en supportant pour eux les coûts de marketing et d’exposition à l’international. En échange, les designers co-produisent avec Kisua des collections capsules exclusives. La seconde quant à elle, travaille exclusivement avec des tailleurs locaux, et collabore actuelle-ment avec le ministère Rwandais du commerce pour créer un centre qui formera près de 3000 tailleurs.

Nos entrepreneurs du mois sont exactement sur la même dynamique : contourner les obstacles actuels pour réussir à standardiser le secteur. Un vrai défi !

Bonne lecture !

Joan YomboRédactrice en chef

PENSERDIFFÉREMMENT

1/ Agence conseil en stratégie de marque et communication 360° qui accompagne des créateurs responsables dans leur développement en France et à l’international. 2/ Il suffirait de trois fois rien pour que la mode africaine habille le monde, Le Monde.fr, Octobre 2015

EDITO

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4 QUESTIONS À // 42Valérie Ayena

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Black Fashion Week Paris

Les créateurs africains prennent la capitale de la mode en otage. Du 19 au 21 Novembre 2015, la black Fashion Week s’installe à Paris au sein du Carreau du Temple. Organisé par Adama Paris Fashion Events, cet évènement qui accueille plus de 1000 personnes par jour et plus de 10 créateurs, est une véritable vitrine d’expression du talent des designers du continent. RDV au 4 rue Eugène Spuller. Réservez vos places sur http://www.black-fashionweekparis.com

Ma Pause Digitale met les créateurs de contenus locaux à l’honneur – Cameroun

La 7ème édition du Forum “Ma Pause Digitale” se tiendra le 28 Novembre 2015 dans la ville de Douala. Cette conférence dont le but est de placer les nouvelles technologies au centre du développement en créant un espace d’échange entre les différentes parties prenantes, entend réunir 25 speakers et plus de 300 participants. Le thème de cet année, « Digitali-sation de l’écosystème technologique Camerounais : le pari des contenus locaux » est la preuve que les entrepreneurs du digital ont plus que jamais leur rôle à jouer. Si vous vous intéressez au digital, ne manquez pas cet évènement.

The Voice arrive en Afrique Francophone ! - Côte d’Ivoire

Savez-vous chanter? Avez-vous tou-jours rêvé d’avoir votre album produit par l’une des plus grandes maisons de production mondiale  ? Si vous pen-sez avoir une belle voix, alors n’hésitez plus. The Voice, arrive sur vos écrans et à partir de 2016, elle sera à la re-cherche de la meilleure voix d’Afrique Francophone. Diffusée sur la chaine

Panafricaine Vox Africa, l’émission réunira pendant 17 semaines tous les talents sélec-tionnés pendant les castings organisés en Afrique de l’ouest et en Afrique centrale. Nous avons hâte de voir l’émission à partir de Juin 2016.

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NEWS

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Careers in Africa: Qui est le meilleur employeur de l’année? Afrique du Sud

Du 20 au 22 Novembre 2015, Johannesburg accueillera le sommet de recru-tement Careers in Africa. Workshops, séances de coachings personnalisées, interviews et séances de networking seront au rendez-vous. De plus, l’Africa HR Conference inaugurera ce weekend riche en apprentissage, et à l’issue duquel un award sera décerné au meilleur employeur Africain de l’année 2015. Si vous souhaitez travailler en Afrique, cet évènement est pour vous. Plus d’in-formations sur www.careersinafrica.com/summits/johannesburg/

Retrouvez les saveurs africaines avec Moriba - Mali

Si vous n’avez jamais dégusté les produits de la marque Moriba, c’est le moment de le faire. A l’occasion des fêtes de fin d’année, la marque lance sa nouvelle liqueur de gingembre : une boisson transparente et brillante aux reflets ambrés qui se déguste en digestif et en apéritif. Sa réputation aphrodi-siaque quant à elle, reste à confirmer... Explorez toutes les saveurs de Moriba sur www.moriba.fr

Wharton African Business Forum

La 23ème édition du Wharton African Business Forum aura lieu du 13 au 14 Novembre 2015. L’évolution des services financiers, l’intégration de l’agriculture ou encore la création d’entreprises sociales durables sont trois des douze thèmes qui y seront abor-dés. Les intervenants sont ce que le continent a de mieux à offrir à l’instar de Saran Kaba Jones, fondatrice de Face Africa, ou encore Hakeem Belo-Osagie, chairman d’Etisalat Nigeria. Toutes les infor-mations sont disponibles sur www.wabf2015.whartonafrica.com

Nicolas Feuillate vous invite à découvrir D’Luscious

A l’approche des fêtes de fin d’année, la marque de cham-pagne Nicolas Feuillate nous in-vite à découvrir sa nouvelle cuvée: D’Luscious. Fabriquée en Cham-pagne, la fraîcheur et la douceur de ce champagne charmera et titillera vos papilles. Une véritable expérience de dégustation  ! La bouteille de D’Luscious se dis-tingue par sa couleur d’un brun chaud, qui évoque l’intensité du goût. D’Luscious est l’incarnation de la finesse et de l’élégance. La cuvée existe en 2 éditions spé-ciales : D’Luscious Gold et D’Lus-cious Rosé.

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8 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

TENDANCES //

LES BLOGGEURS CONTRE ATTAQUENT

Par Leyla Ismaily

L’époque où les férus de mode et de lifestyle devaient attendre la sortie de magazine tels que Vogue, African Woman, ou True Love1 pour savoir qu’elles sont les dernières tendances à la mode est révolue. De nos jours, ce sont les bloggeurs qui mènent la danse. Grace à Internet de plus en plus présent, leur aura a pris tellement d’importance qu’il est aujourd’hui difficile pour les créa-teurs de faire sans eux. Qui sont les e-influenceurs afro à suivre absolument ? Voici notre top 10.

Facebook: 710,513 Likes

Instagram: 328,000 Followers

Twitter: 21,700 Followers

Folake Kuye Hontoon, la créatrice du blog StylePantry, motive ses lectrices à prendre soin de leur apparence. Elle les pousse à paraitre belles, et par conséquent, à se sen-tir belles. Malgré ses occupations d’épouse et de mère, elle trouve toujours du temps pour soigner son look. Elle a aussi beau-coup d’humour. Sa personnalité lui a value d’être remarqué par la marque Demestiks à New York.

Crédit Photos: StylePantry.com

1/ STYLEPANTRY

- NIGERIA -

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9INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

2/ SHIRLEY’S WARDROBE - GHANA

4/ THIS IS ESS – KENYA

Facebook: 101,507 likes

Instagram: 53,600 Followers

Twitter: 6,560 Followers

Dirigé par Fatou N’Diaye, Black Beauty Bag est l’incarnation même de la mode et du lifestyle à l’africaine. Des marques telles que L’Oréal et Kookaï ont collaboré avec elle. Malgré sa notoriété et son succès, Fatou N’Diaye tient toujours à travailler avec des entreprises à taille humaine comme les plateformes Moonlook et Inyu.

Crédit Photos: Huffington Post

Facebook: 30,746 Likes

Instagram: 96,800 Followers

Twitter: 14,100 Followers

Sharon Mundia est la jeune Kenyane derrière ThisIsEss qui vous pousse à croire en vos rêves. Elle a transformé sa passion pour la mode en une entreprise lucrative lui permettant de voyager à travers le monde, arborant des tenues de designers Africains tels que Katungulu Mwendwa, Wambui Mukenyi, ou encore Kung’ara. Le fait d’exposer ses faiblesses et de parler de ses challenges permet à ses lecteurs de s’identifier à elle. Photo Credits: ThisIsEss.com

Facebook: 225,798 Likes

Instagram: 314,000 Followers

Twitter: 27,700 Followers

Au sein de la blogosphère, Shirley B. Eniang est sans aucun doute une force avec laquelle il faut compter. D’origine Ghanéenne et Nigériane et basée à Londres, Shirley n’est pas une bloggeuse comme les autres : elle est aussi vlogueuse2. Ses magnifiques photos sont toujours accompagnées de phrases courtes et efficaces. Elle travaille avec des marques telles que Banana Republic, Zara, TopShop, et River Island, pour ne citer qu’elles.

Crédit Photo: Shirley’s Wardrobe

3/ BLACKBEAUTYBAG – SÉNÉGAL & MALI

1/http://www.truelove.co.za. 2/ Le vlog est un blog qui utilise la vidéo comme principal support de contenu

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10 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

5/ I SEE A DIFFERENT YOU - AFRIQUE DU SUD

7/ LOVEFOLA - NIGERIA

Facebook: 22,727 Likes

Instagram: 26,200 Followers

Twitter: 13,100 Followers

Ce blog est représentatif du dynamisme actuel de l’Afrique. Justice et Innocent Mukheli avec leur ami d’enfance Vuyo Mpantsha, ont fait de «I See a Different You» une plateforme à mi-chemin entre la mode et le style documentaire. Cette année, ils sont les ambassadeurs officiels de Nikon et sont intervenus au TEDxSoweto en 2012, pour partager leur pas-sion pour la mode et la photographie.

Credits Photos: http://iseeadifferentyou.tumblr.com

Facebook: 8,704 Likes

Instagram: 31,200Followers

La marocaine Yasmina Olfi a un lien particulier avec tout ce qui est esthétique et beau. Au-delà

de la mode, cette jeune femme est à la recherche du beau dans tous les domaines : gastronomie,

nature, décoration… On peut le dire: elle a du gout!

Credits Photo: http://www.fashionmintea.com

Facebook: 316 Likes

Instagram: 31,100 Followers

Twitter: 1,468 Followers

LoveFola est connue sur internet sous plusieurs noms. Officiellement Fo-lasade Adeoso, elle est plus populaire sous le nom de “Queen of Head Wraps.” Son blog vous propulse dans un univers floral, artistique et colo-ré au sein duquel elle partage son appétence pour la Mode dans les rues de New York. Folasade est apparue dans Bust Magazine, Vogue It, Curb Appeal, Okay Africa, Afropunk, et Essence Magazine. Son blog sert aussi de boutique en ligne pour sa propre marque: 1953 The Collections.

Credits Photo: Huffington Post

6/ FASHIONMINTEA - MAROC

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11INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

8) THE CURVY AND CURLY CLOSET - SÉNÉGAL -

9/ TEETEE IS WITH ME – AFRIQUE DU SUD

10/ LOUX THE VINTAGE GURU - ZAMBIE -

Facebook: 6771 Likes

Instagram: 11,052 Followers

Twitter: 3,145 Followers

Gaëlle-Vanessa Prudencio est devenue une référence de la mode grande taille. Son blog, The Curvy and Curly Closet présente les tenues les plus adaptées aux femmes en forme. Elle a eu l’occasion de repré-

senter des marques européennes et Africaines telles que Belya ou encore Pauline et Julie.

Credits Photos: thecurvyandcurlycloset.com

Facebook: 6,881 Likes

Instagram: 5096 Followers

Twitter: 5,096 Followers

Thithi Nteta est une bloggeuse qu’on pourrait qualifier d’originale. Elle incarne à la fois la classe et la joie de vivre. Au-delà de tout, elle est authentique : sans suivre les tendances, elle ne représente que ce qui lui plaît. Jameson Whiskey, Glamour Magazine, et Garner Skin Natural Water sont les marques qui ont utilisé sa notoriété digitale pour augmenter leurs ventes.

Instagram: 12,200 Followers

Lourens Gebhardt est un homme qui a du style, un style vintage. Que ce soit en veste ou en peignoir, ce Zambien est la personification de l’élégance masculine. Il est presque le parfait gentleman.

Credit photo: Loux The Vintage Guru

Credits Photos: Teeteeiswithme.com

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12 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

COUP DE COEUR // GHANA

« SAVOIR SE VENDRE EST ESSENTIEL »

AKOSUA AFRIYIE-KUMI

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13INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

Inspire Afrika: Quand et pourquoi avez-vous décidé de rentrer au Ghana?

A.A.K: Tout simplement parce que le Ghana est mon pays d’origine. Ma famille y vit et j’ai beaucoup d’affection pour eux. J’ai décidé d’étudier en Angleterre principale-ment pour m’ouvrir l’esprit et avoir une expérience différente. Le but a toujours été de rentrer au Ghana, afin d’apporter ma pierre à l’édifice de l’industrie créative et artistique mais aussi, de créer une marque de luxe.

I.A.: Vous êtes la fondatrice et la directrice de création de A.A.K.S. Dites m’en plus sur votre marque et votre concept.

A.A.K.: A.A.K.S est une marque de luxe produisant des sacs «  fait main  » modernes, tout en mainte-nant l’empreinte africaine.L’attention au détail, le travail artisa-nal et les valeurs éthiques sont les aspects que nous valorisons lors de la conception de nos produits. Chacune de nos collections raconte une histoire différente à travers les détails, les couleurs et les formes. Chez A.A.K.S, nous contrôlons chaque étape de notre processus de production afin de nous assurer que le produit final reflète l’esprit de notre marque.

I.A.: Vous semblez n’utiliser que la fibre de raphia. Pouvez-vous nous expliquer ce choix ? Cette matière est-elle facile à trouver au Ghana ? Pensez-vous utiliser d’autres matériaux dans vos pro-chaines collections ?

A.A.K: Le raphia est très difficile à trouver au Ghana. Par un heureux

hasard, après avoir voyagé dans tout le pays, j’en ai trouvé dans une de nos fermes familiales au sud du Ghana. Quand je l’ai touché, j’ai immédiatement su que c’était la matière parfaite. Ce qui m’a le plus attiré, c’est la douceur et la résis-tance de ce matériau. Ses carac-téristiques - organique, naturelle, renouvelable et biodégradable – en font une matière attractive et en phase avec la vision que j’avais de ma marque.

I.A: Pouvez-vous expliquer à nos lecteurs le processus de produc-tion d’un sac AAKS depuis le ra-phia jusqu’au produit final?

A.A.K: La communauté avec la-quelle je travaille utilise une tech-nique traditionnelle de tissage qui est utilisée dans le nord du Ghana, pour produire les sacs.Aucune machine n’est utilisée lors

du tissage. Tous les sacs sont faits à la main, afin que chacun d’entre eux soit unique.Les artisans commencent par tres-ser le raphia. Il est ensuite trempé dans de l’eau bouillante. Cette eau est accompagnée de colorants naturels, et sert donc de teinture. Parfois nous utilisons l’écorce des arbres pour donner plus d’intensité aux couleurs utilisées. Ce proces-sus dure entre 10 et 30 minutes, la durée dépendant de la couleur que l’on souhaite avoir. Les fibres sont ensuite séchées au soleil. Les artisans se servent de leurs doigts pour donner au sac une forme par-ticulière.Une fois ces étapes passées, les produits sont transportés dans nos studios, à 12h en voiture, à Kumasi, pour les finitions  : nous utilisons à ce stade, des matières comme le coton et le cuir. Après un contrôle de qualité, les sacs sont prêts à être vendus en magasin.

I.A: Pour être concret, quel est l’impact de A.A.K.S sur la vie des femmes Rurales au Ghana?

A.A.K: Nous créons des emplois pour ces femmes. Nous assurons la continuité de la technique an-cestrale qu’est le tissage, car nous considérons que cet art doit être transmis de génération en généra-tion. Cette technique doit être valo-risée et devenir une source de reve-nus majeure pour les coopératives.

I.A: Sachant que chaque sac est fait main, comment maintenez-vous le niveau de qualité et com-ment évitez-vous les erreurs?

A.A.K: La qualité et l’uniformité de nos produits est maintenue grâce à des croquis et des mesures.

1/ Frères et sœurs en français

‘Chez A.A.K.S, nous contrôlons chaque étape

de notre processus de production afin de nous

assurer que le produit final reflète l’esprit de notre

marque.’

Tous ceux qui ont eu l’opportunité de toucher les produits A.A.K.S ont été subjugués par leur authenticité et leur finesse. Le travail d’Akosua Afriyie - Kumi a quelque chose de magique : ses sacs sont sublimes, à la fois extrêmement contemporains et très traditionnels. Après avoir obtenu une licence en Design de Kingston University de London, elle décide de retourner au Ghana (son pays d’origine), pour lancer sa marque A.A.K.S, qui signifie tout simplement Akosua Afriyie-Kumi and Siblings1….

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14 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

Cette pratique est due au fait que plusieurs de nos artisans ne savent ni lire ni écrire. Mais le fait de produire les sacs à la main est une plus-value : même si il y’a des erreurs, chaque produit est unique au monde. Les consommateurs en tirent une énorme satisfaction.

I.A: A.A.K.S est une jeune marque, et pourtant vos produits sont disponibles quasiment par-tout dans le monde. Comment faites-vous face aux problèmes de distribution?

A.A.K: Ce n’est pas chose facile pour une jeune marque que d’être distribuée dans des magasins pres-tigieux tels que Anthropologie, Re-formation, ou encore Kisua, en si peu de temps. Mais grâce aux ré-seaux sociaux, j’ai pu dans un pre-

mier temps identifier les magasins qui correspondaient à l’image que je souhaitais donner à ma marque. C’était ensuite assez simple de les contacter par email ou par télé-phone. Plusieurs d’entre eux ont eu un coup de cœur pour mes pro-duits, ce qui a joué en ma faveur. Si je peux me permettre de don-ner un conseil, je dirais que savoir se vendre est essentiel. Cela passe par le fait de travailler son image de marque.

I.A: Vous évoluez dans une indus-trie très compétitive. Comment faites-vous pour vous différen-cier de la concurrence en termes de marketing et de communica-tion stratégique ?

A.A.K: Nous atteignons directe-ment notre cible à travers le story-

telling sur les réseaux sociaux, sur notre site web et sur les contacts personnels que nous avons. Ra-conter notre processus de confec-tion et montrer à nos clients qui fabrique leurs sacs fait partie inté-grante de notre business. Internet nous apporte une excellent visibili-té, et nous permet d’atteindre notre cible ou qu’elle soit.

I.A: Comment voyez-vous A.A.K.S dans 10 ans?

A.A.K: J’espère qu’A.A.K.S sera disponible dans tous les magasins à travers le monde, et je rêve bien sûr, d’avoir mon propre magasin dans une grande ville.

Propos recueillis par Joan Yombo

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INSPIR’INTERVIEW // OUGANDA

Nous y sommes! Nous avons toujours voulu interviewer un entrepreneur africain basé en Allemagne. Pourquoi? Réfléchissez-y : peu d’information circule sur la présence des africains dans ce pays. Serait-il possible pour vous de citer 10 marques africaines basées en Allemagne par exemple ?Beatrice Oola elle, le peut. Née et éduquée en Allemagne, cette ougandaise d’origine a créé l’Africa Fashion Day Berlin (AFDB) en 2012. Cette initiative est née de ses multiples voyages en Ouganda, au cours desquels, en discutant avec des créateurs, musiciens, et producteurs de films elle a réalisé que la culture africaine, notamment la mode s‘exportait de plus en plus.

BEATRICE OOLA

“NOUS VOULONS DES MARQUES AFRICAINES EN VITRINE! ”

Africa Fashion Day Berlin Edition 2015

16 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

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17INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

1/Laduma Ngxokolo et à l’origine de la marque de knitwear Maxhosa by Laduma

Inspire Afrika: L’AFDB est-il votre premier projet?Beatrice Oola: Oui, l’AFDB est mon premier projet entrepreneu-rial. Au départ, je travaillais dans l’industrie cinématographique et je concevais des programmes cinématographiques. Ensuite, j’ai occupé un poste de sty-liste. J’ai donc une expérience créative, et mon métier dans le cinéma m’a aidé à organiser et à canaliser cette créativité.L’AFDB était donc un moyen de mettre en valeur mon esprit créatif. De plus, je voulais rassembler les gens et créer une sorte de sy-nergie entre eux. De mon point de vue, les gens ne sont parfois pas assez conscients de leur identité (qui ils sont, d’où ils viennent et à quelle culture ils appartiennent). Cela se ressent surtout quand ils ont par exemple un père alle-mand et une mère d’origine afri-caine, ou encore quand les pa-rents sont séparés. C’est pour cette raison que je pense que nous avons tous besoin d’un espace d’expression, au sein duquel nous sommes sûrs de trouver des personnes qui nous ressemblent. I.A: Quel est l’objectif de l’AFDB?B.O: L’objectif est simple: Per-mettre aux designers africains d’avoir accès aux bonnes per-sonnes, afin qu’ils aient l’op-portunité de vendre leurs pro-duits et de faire du business. Nous voulons nous assurer que chaque créateur fasse du chiffre en construisant un network so-lide d’acheteurs, d’enseignes et de vendeurs. En définitive, nous voulons des marques africaines en vitrine. I.A: C’est exactement ce dont nous avons besoin : Nous voyons ces créateurs lors des

Fashion Week, mais on ne sait jamais où acheter leurs créa-tions…B.O: Exactement! Et c’est quelque chose que je vis chaque jour en Allemagne. Cependant, j’ai réalisé que le processus pour atteindre cet objectif n’est pas si simple : Un créateur peut avoir un très bon produit, mais le plus important c’est d’avoir la confiance de l’acheteur. Si un créateur participe à une Fashion Week une année sur deux, c’est mauvais pour les affaires. L’acheteur pensera que son bu-siness model n’est pas stable.Même si leur marché de réfé-rence reste le continent, les de-signers africains ont également besoin de vendre à l’étranger. Mais ils ont besoin d’accom-pagnement pour y arriver. C’est pour cette raison que nous leur cherchons des opportunités, et la première étape de cette dé-marche était de coopérer avec le PREMIUM International Trade Show, l’un des plus grands évè-nements européens dédiés à la mode. Là-bas, les designers africains peuvent présenter leur collection pendant 3 jours. A cette exposition, on retrouve des marques de renom telles que Hugo Boss, ou Karl Lager-feld. C’est donc une plateforme privilégiée pour rencontrer des acheteurs, échanger des idées, avoir des conseils, etc. I.A : Les marques africaines peuvent-elles vraiment trou-ver une place au sein du mar-ché Allemand ?B.O: Absolument! L’industrie

de la mode allemande change. Elle devient de plus en plus glo-bale. L’an dernier, le designer sud-africain Laduma Ngxokolo1

a gagné le « PREMIUM Berlin’s Young Talent prize ». C’est une preuve qu’il existe un intérêt pour la mode africaine. Si nous avions plus de magasins ici à Hamburg, les gens achèteraient des produits africains. Il y a clai-rement une clientèle. Il convient tout de même de noter que la qualité du produit est la principale caractéristique qui attire l’attention des ache-teurs et qui permet d’atteindre le statut de marque internationale. Si le produit n’est pas parfait à 100%, il est invendable. Tout dé-pend également du type de pro-duit : A mon humble avis, il est plus simple de pénétrer le mar-ché avec des accessoires, des chaussures, des sacs et des bijoux. Avec les vêtements, la tâche est beaucoup plus com-pliquée. I.A: L’Afrique est le creuset de la créativité. C’est un fait. Mais certains designers ne peuvent pas satisfaire la de-mande à l’échelle mondiale. La production en est encore à un niveau artisanal…B.O: Vous avez raison. L’indus-trie de la mode en Afrique fait face à de nombreux challenges. Je pense que les gouverne-ments gagneraient à profiter de cette créativité et de ce potentiel que nous avons: il faut créer des lois ainsi qu’un cadre propice aux affaires pour les créateurs. Ils doivent avoir un budget pour ces industries créatives.Il serait intéressant de savoir quel pays à un avantage comparatif sur la production de tel ou tel produit, et de mettre ces diffé-rents pays en relation pour une collaboration optimale. L’Ethio-pie par exemple est le royaume

‘Oubliez les photos impec-cables. Ce qui se passe

avant et après la création de chaque produit repré-sente un énorme travail.’

BEATRICE OOLA

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du cuir, alors que le Burkina Faso est un grand producteur de coton. Quelque chose doit être fait!Le marché de seconde main est aussi un problème que les gouver-nements doivent gérer. Réguler ce marché signifierait créer des em-plois. Les designers locaux pour-raient donc produire et vendre plus.Il y a un potentiel. Je vois des concepts intéressants chaque jour. Prenez l’exemple de Kisua, la bou-tique en ligne. C’est une manière innovante de s’assurer que l’indus-trie de la mode africaine fonctionne. Nous avons besoin de promouvoir

ce genre d’idée pour que notre mode soit reconnue ici en Europe. Les idées sont là et l’industrie se structure petit à petit. Nous avons des acteurs sur le continent qui joue

un rôle important. I.A: C’est drôle que vous men-tionniez Kisua parce que j’ai une citation de Samuel Mensah, PDG de Kisua, sur laquelle j’aimerais avoir votre opinion : « La base d’une marque de mode c’est la créativité. Le produit doit être désirable. Mais pour être hon-nête, la créativité ne représente que 20% de notre travail. Les 80% restant englobent l’aspect financier, la logistique, la chaine de distribution et le management de produit… »B.O: Je suis entièrement d’accord!

‘Les gens ici en Alle-magne me disent:

“Quand nous allons dans certains pays africains, on ne voit

pas beaucoup de gens porter des marques

africaines. Pourquoi?’

Beatrice Oola (3ème en partant de la gauche) entourée par quelques designers et influenceurs

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Propos Recueillis par Joan Yombo

Les aspects les plus importants comme il l’a dit, sont la coordina-tion, l’organisa-tion, le contrôle de production, le management, et la recherche. Il y a un grand volet administratif der-rière une marque. Oubliez les pho-tos impeccables. Ce qui se passe avant et après la création de chaque produit représente un énorme travail.En fait, les desi-gners africains doivent être édu-qués. Ils doivent savoir comment faire du profit avec leurs créa-tions. J’ai réalisé en travaillant avec eux que certains ne savent pas ce qu’est une feuille de commande. Comment vou-lez-vous travailler sans ce papier si important ? Dans le même ordre d’idée, certains n’ont pas de lookbook et ne

savent pas quelle est la différence entre un lookbook et un éditorial. Pour eux, l’essentiel est d’apparaitre dans un magazine au coté de célébrités. Mais tout ceci ne fait pas vendre.Avec l’AFDB, j’essaie aussi «d’éduquer» les créateurs à travers des workshops. Ils apprennent ainsi à se pré-senter et à présenter leur travail, à faire des recherches sur le marché et sur le produit de leur choix, etc.… Bien sûr, quand vous n’avez jamais fait tout cela vous n’avez pas les compétences nécessaires.J’ajouterais aussi qu’il est toujours intéressant d’avoir un mentor qui vous donnera des conseils. Pour vendre il faut comprendre le consommateur et connaître le produit. I.A : Certaines personnes pensent que les Fashion

Weeks en Afrique sont inutiles parce que les afri-cains ne consomment pas la mode africaine. Quelle est votre opinion?BO: En effet. Je le vis chaque fois que je vais en Ou-ganda. Je remarque que mes cousins ne portent pas de marques africaines. C’est dommage, mais je pense qu’il y a un lien avec l’histoire. C’est comme si le « Made in Africa » ne compte pas. Les produits doivent venir d’Europe pour être acceptés.Les gens ici en Allemagne me disent: “Quand nous allons dans certains pays africains, on ne voit pas beaucoup de gens porter des marques africaines. Pourquoi? C’est assez confus pour eux: On essaie de promouvoir toute cette créativité et tous ces produits, mais les africains eux-mêmes ne les valorisent pas.Heureusement, je constate que la nouvelle génération est fière de ses origines et plus consciente du réveil africain. Nous avons besoin de plus de campagnes afin d’expliquer aux gens pourquoi il est si important de consommer nos propres produits. Je pense à la cam-pagne de Diana Opoti, 100 days of African Fashion, qui est un exemple de promotion des marques locales. I.A : Revenons à l’AFDB. Comment avez-vous fi-nancé son lancement ? Avez-vous des astuces « financières » à partager avec nos lecteurs ?BO: Hum…. (Pause). Trouver de l’argent est un chal-lenge permanent. Avec la crise financière, j’ai réalisé que les gens ne sont plus prêts à investir. Les choses deviennent donc plus difficiles pour les jeunes entre-prises. C’est pour cette raison que nous devons être créatifs pour trouver des financements. Quand j’ai eu l’idée de l’AFDB, je pensais que ce serait un projet facile à financer parce que de nombreuses entreprises ici en Allemagne font des affaires avec l’Afrique. J’ai vite réalisé qu’elles n’étaient pas intéres-sées par les industries créatives et encore moins par la mode. Jusqu’ici, j’ai eu beaucoup de chance parce que j’ai toujours rencontré les bonnes personnes au bon mo-ment. Bien sûr, j’ai moi même investi de l’argent dans ce projet ; mais j’ai aussi fait appel au gouvernement. Je me suis débrouillée à avoir son support ainsi que celui de certaines entreprises, parce que le projet était tout nouveau, mais tout s’est arrêté l’année d’après. J’ai réussi à réaliser ce qui a suivi grâce à l’accompagne-ment de certains investisseurs fortunés et de quelques sponsorships. Je dois tout cela à mon réseau.J’ai aussi cherché à rentrer en contact avec des insti-tutions et organisations sur le continent. L’Afrique du Sud par exemple offre des avantages aux créateurs, en leur permettant d’aller à l’étranger pour améliorer leur travail. Je dirais pour terminer que le véritable outil de la jeune génération aujourd’hui, c’est Internet. Tout doit com-mencer par là.

Beatrice Oola (3ème en partant de la gauche) entourée par quelques designers et influenceurs

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ALPHADI : MONUMENTAL !

Par Louis Gilbert BISSEK

L’élixir de jouvence existe. 30 ans de carrière et pas une ride. Alphadi est un des précurseurs de la mode africaine - comme Chris Seydou, Pa-thé’O - qui ont tracé le chemin pour les jeunes créateurs. On ne parle pas d’Alphadi, on le vit. On contemple son œuvre comme on écouterait un classique du jazz produit pour créer un enchantement perpétuel, et qui accom-pagnerait nos jours et bercerait nos nuits. Seidnaly Sidahmed, de son vrai nom, est une Icône de la culture africaine, aussi iconique que cette ‘chéchia’ mythique dont il ne se sépare jamais. «Prince du désert», «Magicien du désert» - pour son ascendance noble Touareg et berbère et sa naissance à Tombouctou au Mali - ou encore «Yves Saint-Lau-rent Africain», les surnoms affluent, mais l’Homme demeure, traverse les époques, en ambassadeur du stylisme et de la mode africaine, auxquels il est viscéralement associé.

« Chaque jour est un jour de beauté en Afrique »

CARRIÈRE // NIGER

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Crédits : Stéphane Tourné

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InoxydableOn oublierait qu’il a commencé sa vie professionnelle par des études universitaires en tourisme et marketing à Paris, avant d’intégrer la fonction publique nigérienne comme directeur du tourisme au Ministère.Mais c’était sans compter sa passion pour la mode et la création. À aller vers son risque et à imposer sa chance, il renonce en 1983 à une carrière de haut fonctionnaire, pour se dévouer exclusivement à la mode et créer la marque éponyme en 1985. Une gageure! Tant le confort matériel et le prestige que procure une telle position sociale était certain, surtout dans un pays de 17.6 millions d’habitants, considéré comme l’un des plus pauvres de la planète et dont la Banque Mondiale estime le PIB par habitant à 403.4 dollars. Pourtant, cette plongée dans l’abîme n’était que la suite logique d’une fréquentation assidue des défilés de mode et des cours de l’Atelier Chardon Savard, durant sa formation académique à Paris.En 1987, la Fédération Française de la Couture et du Prêt à Porter lui décerne, à Paris, son premier prix : l’Oscar du Meilleur styliste Africain. C’est le début d’une grande carrière. 30 ans plus tard, qu’est-ce qui fait encore courir cet infatigable créateur ? Ce n’est certainement plus les lauriers - Prix de la fondation Prince Claus des Pays-Bas (1998); élevé au grade de Chevalier de l’ordre du mérite français par le Président Jacques Chirac (2001) - ni les titres honorifiques - Ambassadeur de bonne volonté et Commandeur de l’ordre des Palmes académiques du Niger -, ni même la notoriété - régulièrement classé1 parmi les hommes les plus influents d’Afrique, il a été reçu par le Président Obama au Sommet de l’Entrepreneuriat de Washington en 2010 pour représenter le Niger et a été nommé Artiste pour la Paix par l’UNESCO2 en 2015.Son moteur est de ne jamais avoir renoncé à son ambition de voir les Africains porter des bijoux et des vêtements locaux, ce qui l’a consacré comme l’un des plus ardents promoteurs de la mode africaine. C’est donc à dessein qu’Alphadi fonde en 1994 la Fédération Africaine de Couture (FAC), qu’il préside encore aujourd’hui. A ce titre, il sensibilise les investisseurs et les décideurs politiques africains sur l`importance du secteur de la Mode et du Textile comme vecteur de développement économique, social et culturel. « Mon combat a toujours été de donner une chance à la culture africaine d’être connue, de se développer. Que la culture remplace définitivement notre manière de tendre la main «, martèle-t-il. Il est essentiel de rappeler qu’en 2004, Alphadi a défilé en Haute Couture, à Paris, au musée GALLIERA, avec des bustiers en plaques d’argent ciselé par des artisans Touaregs, des manteaux en bogolan dont un a été offert et fait partie des collections du musée.

Le FIMA: un rêve, une visionPour cet idéaliste: « Chaque jour est un jour de beauté en Afrique ».ALPHADI est gage de qualité dans l’univers globalisé de la mode. La marque habille les élégant(e)s d’Afrique - dont plusieurs Premières Dames3 - et présente des vêtements, bijoux, accessoires, fragrances4 et maroquinerie dans cinq (05) boutiques à travers le monde. Ses collections - street-wear et Haute Couture - mobilisent aujourd’hui 200 employés et comptent des partenariats prestigieux comme celui avec la marque Wrangler pour Alphadi Jean’s en 1999. Ces collections recherchent toutes une chose: «refléter l’âme de l’Afrique»; comme le créateur aime le répéter; en y incorporant des tissus faits à partir d’écorces d’arbres d’Ouganda ou des motifs Songhaï, Zarma, Bororo, Haoussa et Touareg. Alphadi est non seulement un visionnaire; une marque déposée;

mais aussi un laboratoire de solutions pour l’Afrique et son secteur de la mode; qui crée des emplois, stimule une industrie et affine des savoir-faire. Ainsi, ses vêtements sont fabriqués dans sept (07) ateliers situés au Niger, au Mali, en Côte d’Ivoire et au Maroc. Mais le Festival International de la Mode en Afrique (FIMA) est son œuvre phare. Semaine de la mode lancée en 1998 et organisée tous les deux ans, le FIMA en est - courant novembre 2015 - à sa 10ème édition, avec 2000 participants et 1400 emplois créés à chaque évènement. Ce festival - pionnier en Afrique – a pour but d’encourager les nouveaux talents et de leur offrir des opportunités économiques et une visibilité. C’est aussi l’occasion de montrer au reste du monde la diversité, l’originalité et la richesse des cultures africaines. De plus, elle a été stimulée par l’envie d’Alphadi de désenclaver une zone en proie à la rébellion touarègue, en ramenant la vie et le tourisme en plein désert de Tiguidit, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. L’évènement

1/ les 50 africains les plus influents du Monde en 2014 de l’hebdomadaire Jeune Afrique (27 avril - 10 mai 2014) 2/ Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture. 3/ Hinda Déby Itno (Tchad), Djéné Kaba Condé (Guinée-Conakry) et Danielle Mitterand (France), portent ou ont porté ses vêtements 4/ Parfum AÏR.

Alphadi en compagnie de son fils aîné Moulaye . Crédits : CORALIE RABADAN

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permettra de construire une route de 80 kilomètres entre Agadez et le site et d’implanter un réseau électrique.Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître: 26 créateurs prestigieux - dont Yves Saint-Laurent, Christian Lacroix, Kenzo, Thierry Mugler, Paco Rabanne, Trussardi, Pathé’O -; 300 modèles Haute Couture; 110 mannequins renommés - Katoucha, Satya Oblet, Alek Wek, Anna Getaneh -; et cinq chefs d’états africains installés dans 1500 tentes équipées y prennent part. Alphadi réalise alors un de ses plus beaux rêves : réunir des créateurs africains aux côtés des plus grands créateurs occidentaux. 20 ans plus tard, l’enthousiasme ne fléchit pas. Pour l’édition 2015, 350 stylistes ont déposé leur candidature pour le «concours jeunes créateurs», pour une dizaine de places seulement. Il faut dire que les heureux lauréats sont entièrement pris en charge au Niger durant le festival et que la chanteuse vedette nigériane, Yemi Alade, sera présente.Depuis la 1ère édition, le FIMA - qui s’est imposé comme un outil du développement infrastructurel, économique, touristique

et social du Niger - a inspiré d’autres évènements auxquels Alphadi n’a pas hésité à prodiguer des conseils aux initiateurs, comme: le Salon international de la Mode Africaine de Dakar (SIRA Vision) de la styliste Collè Sow Ardo ou encore la Black Fashion week d’Adama Ndiaye.

À la postéritéUn Seidnaly peut en cacher un autre. Dans l’ombre du Maître, Moulaye Seidnaly, aîné d’une fratrie de six, apprend. Mais il n’en pense pas moins!

Aussi entreprenant que son père, le jeune homme de 28 ans croit en l’Afrique et le communique. Responsable du développement de la marque ALPHADI et coordinateur général des évènements du FIMA - qui inclut la «caravane Alphadi»5, les présélections et les conférences de presse - depuis 2012, ce pur produit de Mod’Art International de Paris; l’Ecole de Création et de Management de la Mode; et de l’Institut Supérieur du Commerce (ISC) de Paris, voit large. Il met sur pied un projet d’agence de communication qui a déjà pris corps: Afrique Prestige. L’ambition est tridimensionnelle. D’abord, elle fournit des conseils en communication, évènementiel, RP6 et digital aux créateurs de mode qui veulent asseoir leur marque; puis les accompagne dans la commercialisation et la distribution des produits. Plus tard, elle évoluera vers une plateforme média dédiée à l’art, la mode et la culture sur le continent. En effet, c’est du constat qu’être entrepreneur dans le secteur de la mode demande du temps car le retour sur investissement n’est pas immédiat, qu’il a imaginé cette structure. «Dans l’entreprenariat, il faut réfléchir différemment. Encore plus quand on n’est pas dans le secteur des énergies fossiles et des matières premières qui sont extrêmement lucratifs à échéance courte.», analyse-t-il. La charité bien ordonnée commençant par soi-même, Moulaye Seidnaly met déjà son savoir-faire au service de la marque Alphadi et du FIMA. Par ailleurs, Moulaye Seidnaly a conscience que la formation professionnelle est une donnée majeure de la croissance du continent. En cela, il rejoint ALPHADI qui répète inlassablement: «La mode et la culture sont des industries qui peuvent hisser l’Afrique au rang des nations prospères»7

Pour cela, Alphadi a taillé un projet à sa mesure: construire à Niamey l’Ecole Supérieure de la Mode et des Arts (ESMA). L’idée est de former les nouveaux designers africains - sur des cursus bac+3 et bac+5 - à l’économie de la mode, au stylisme, au management, ainsi que des formations diplomantes pour les «petites mains». Se faisant, l’académie panafricaine aidera ses étudiants à exercer leur métier dans leurs pays d’origine, pour contribuer aux économies locales en ouvrant des boutiques, en fabriquant des produits et en créant des emplois. Les premières promotions débuteront avec une cinquantaine d’étudiants pour atteindre peu à peu 200 étudiants et plus. Le parrain de cette école est le prestigieux brodeur François LESAGE, qui a officié pour Monsieur Saint Laurent, la maison Chanel et Jean-Paul Gaultier, qui a accepté spontanément lorsqu’Alphadi lui a présenté ses mythiques bustiers brodés.Le projet bénéficie d’ores et déjà d’un soutien national - le gouvernement nigérien a cédé 3000m² de terrain - et international - l’Union Africaine, l’Union Européenne et la Coopération française et luxembourgeoise ont été sollicitées. Alphadi a même déjà collaboré avec l’Atelier Chardon-Savard, pour en concevoir les programmes. L’ESMA bénéficiera aussi sans doute – comme pour tout ce qu’Alphadi entreprend en Afrique - d’un plébiscite populaire, celui de Moulaye en premier. Après tout, Confucius ne dit-il pas: «Quand Père et Fils sont d’accord, la famille prospère.» ?La maison ALPHADI a de beaux jours devant elle...

5/ En prélude à chaque édition du FIMA, Alphadi sillonne plusieurs mois durant l’Afrique pour révéler les talents de la mode et de la musique. 6/ Relations publiques 7/ Alphadi: L’Afrique, c’est chic! par Laure Dansart, in ClichyMag/ décembre 2012 - janvier 2013

«La mode et la culture sont des industries qui peuvent hisser l’Afrique au rang des nations prospères»

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OSER INSPIRER // RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Katia BUMBALa Queen Bee

Par Louis Gilbert BISSEK

Robe: Imperial bee, Collection «festival de Cannes» par Kate Bee;

Chaussures: Louboutin

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Mademoiselle BumbaPourtant, Katia Bumba ne laisse rien paraître. «Je suis à vous», se contente-t-elle de dire.Sous les traits d’une demoiselle coquette, courtoise et affable, se cache une femme d’affaires passionnée de mode et suffisamment persuasive pour convaincre le top model Noémie Lenoir d’être l’égérie de son premier concept store: Aloha Paris. En effet, à 25 ans, Katia Bumba n’est pas à son coup d’essai. Deux ans plutôt, à peine diplômée en marketing et communication de l’IPAG Business School de Paris, elle lance avec sa sœur ainée; Nathalie; une boutique dédiée au prêt-à-porter de luxe féminin. Située Rue du Faubourg Saint Honorée, dans le très chic VIIIème arrondissement, Aloha Paris propose aux citadines des vêtements, des chaussures et des sacs haut de gamme en édition limitée et réalisés par de jeunes créateurs du monde entier. Même si son parcours académique n’a pas été exclusivement consacré à la mode, elle l’a conçu pour être, à l’issue de sa formation, le plus polyvalent possible. «Une école de commerce me permettait de me recycler davantage qu’une école de mode ou de

stylisme», dit-elle pragmatiquement. Co-présidente et co-fondatrice de l’association «IPAG’MOD for charity» dans son ancienne académie, elle s’enrichit professionnellement comme assistante commerciale dans la maison Haute Couture Alexander Mc Queen à Londres; responsable des relations publiques en France pour le bijoutier espagnol Elena Canter; ou encore community manager dans le magazine français de mode et de lifestyle féminin Be Magazine, à Paris. Globe-trotter, Katia Bumba n’a jamais fait des frontières hexagonales une limite à son apprentissage, en se donnant les moyens de maîtriser remarquablement le français, l’anglais, l’espagnol, le lingala1 et des bases de mandarin.

I’m ... Kate Bee Kate Bee est à Katia Bumba, ce que Sasha Fierce2 est à Beyonce Knowles: la matérialisation artistique de son alter ego. «Kate est l’anglicisme de mon prénom et Bee est la première lettre de mon nom. Kate Bee est la femme telle que je l’imagine: féminine, confiante, bosseuse et à l’aise avec son corps.» dit-elle, en avouant s’être imprégnée du discours féministe de Beyonce

«Entre le papier et la vraie vie il y a un monde!» s’exclame soudain Katia Bumba au bout de 45min d’échange. Fou rire général, ou plutôt énième fou rire complice entre les cinq protagonistes de l’entretien.45 min plus tôt - le 24 septembre à 19h00 - sous le ciel orageux de ce début d’automne parisien, c’est le regard pétillant, le sourire large et les bras grands ouverts qu’elle nous accueillait sur le palier de son appartement, malgré notre retard. C’est notre première rencontre. «Je vous attendais!» lance-t-elle sans rien perdre de sa bonne humeur, «nous devrons malheureusement nous dépêcher, car j’ai un RDV dans une heure et demie». A peine nerveuse, détendue même, elle saisit lentement son téléphone et y chuchote quelques mots d’excuses pour le retard inévitable qu’elle accusera sur son prochain RDV. La pression a changé de camp, pour devenir nôtre...Quotidien banal d’un entrepreneur sur qui le soleil ne se couche jamais, direz-vous avec raison. Mais la période est particulière. A quelques jours du début de la saison de la mode avec l’ouverture annuelle de la Fashion Week de Paris en octobre, chaque seconde compte pour la jeune créatrice. Ses journées déjà longues se sont rallongées. Difficile en effet de passer outre la pression lorsque le 03 octobre, la première collection de votre toute nouvelle marque - Kate Bee - doit être présentée en mondovision dans un établissement luxueux des Champs Elysées - l’Hôtel California - juste après le défilé «Elie SAAB». «Kate Bee» joue dans la cour des grands.

INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015 25

1/ Langue bantoue parlée en République démocratique du Congo, en République du Congo, et dans une moindre mesure en République centrafricaine. 2/ I’m... Sasha Fierce est le troisième album de la superstar mondiale du rnb

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alias Queen Bee (Reine des abeilles). L’emblème de la marque n’est donc certainement pas hasardeux: une abeille. Le lancement tonitruant et le calendrier chargé de «Kate Bee» augurent d’ores et déjà un avenir prometteur. En effet, 20 des 27 pièces de la première collection qui ont été présentées à la «Fashion Week de Paris» sont attendues au Concours des créateurs à Nice le 19 novembre et au Show Room des Galeries Lafayette en décembre. Et Katia Bumba veut aller plus loin. Elle observe le continent Africain et ses nombreuses « Fashions Weeks» - notamment la toute nouvelle «Brazza Fashion Night» - avec intérêt, ce d’autant plus qu’elle juge que: «l’Afrique est le futur de l’humanité», et que sa sœur et partenaire en affaires est directrice d’une boutique de prêt-à-porter en République du Congo. Styliste autodidacte, c’est avec beaucoup d’aplomb et

d’imagination que Katia Bumba a dessiné les pièces de la première collection de Kate Bee: «Festival de Cannes» - pour laquelle elle s’est inspirée de la montée des marches du célèbre Festival de Cannes à laquelle elle est sensible - aidée en cela par une styliste confirmée. Pour les matières de ses robes, plutôt que de s’inspirer de tissus stéréotypés africains comme le wax, elle a opté pour des matières nobles comme la crêpe de soie et le satin, alliées à de la mousseline ou des perles et strass signées Swarozski: « J’ai choisi de ne pas utiliser le wax dans mes créations. Certains l’utilisent mal. Le Wax n’est pas complètement africain et c’est ce que beaucoup oublient. Il y a des gens qui portent du wax et qui n’ont jamais mis un pied en Afrique. » Résume-t-elle. Un brin insouciante, mais avec conviction, elle mesure le chemin parcouru et à parcourir en confiant: « Mes secrets d’entrepreneuse sont la prise de risque, le courage, l’estime de soi et la confiance en mes collaborateurs. Mes business plans d’étudiante me semblent si lointain et inutiles... Vous savez, entre le papier et la vraie vie il y a un monde !»

Fou rire général...

‘Kate Bee est la femme telle que je l’ima-gine: féminine, confiante, bosseuse et à

l’aise avec son corps.’

Robe: Hervé Léger; Chaussures: Louboutin

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28 INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

INSPIR’START UP // RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

LOZA MALEOMBHO

Propos Recueillis par Louis Gilbert BISSEK

«Je souhaite aider les artisans à étendre leurs activités.»

Loza Maléombho, Printemps/Eté 2016 : collection Zaouli

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29INSPIRE AFRIKA MAGAZINE / NOVEMBRE - DÉCEMBRE 2015

Inspire Afrika  : Comment vous est venue l’idée de lancer votre marque ? Loza Maleombho  : J’ai commencé la marque lorsque j’étais encore à New-York. Ce qui me motivait c’était de pouvoir exploiter les ressources tradi-tionnelles et textiles que nous avons en Afrique pour les rendre accessibles à l’international. J’ai effectué plusieurs stages chez des stylistes à New-York, pour apprendre le métier et découvrir comment ça se passait au niveau de la production et du développement d’une marque, etc… Une fois que je me suis sentie prête j’ai commencé à dévelop-per ma marque.

I.A  : Pourquoi avez-vous attribué à votre marque le nom Loza Maleom-bho ?L.M  : J’ai choisi de l’appeler Loza Maleombho parce que c’est un nom qui n’est pas commun et qui reflète aussi mes origines africaines. Mon père étant de Centrafrique. J’ai hérité de son nom. C’était un hommage à ma famille et c’était aussi un moyen de faire parler mes traditions personnelles de façon artistique, tout au long de mon travail.

I.A : Vous avez créé votre marque en 2009 aux Etats-Unis et vous l’avez relocalisée en 2012 en Côte d’Ivoire. Comment s’est passée cette reloca-lisation ? L.M  : Sur le plan administratif, c’est beaucoup plus long dans un pays comme la Côte d’Ivoire. Du point de

vue artistique, la relocalisation a été instantanée. L’inspiration est venue d’elle-même grâce aux ressources matérielles. Sur ce plan-là, je n’ai pas eu de gros challenges. Financièrement, ça a été difficile au départ, mais ça a pu finalement se faire.

I.A  : De quels métiers avez-vous eu besoin pour construire votre équipe ? A-t-il été facile de trouver les compétences nécessaires ? L.M  : Beaucoup de tailleurs en Côte d’Ivoire font du prêt-à-porter. C’est quelque chose que l’on remarque tout de suite. Cependant, ces tailleurs ne sont pas forcément qualifiés aux stan-dards internationaux des finitions et des tailles normales, parce que c’est du sur mesure et surtout que leur tra-vail -aux tailleurs ivoiriens - est artisa-nal, donc en quantité faible. C’était donc difficile au départ de les former à des modèles à respecter sur plusieurs quantités et sur plusieurs tailles. C’était donc un challenge de compétences et de mentalités, parce que c’est un concept nouveau de faire de la produc-

tion en grande quantité.

I.A  : Vous êtes également célèbre pour vos sandales. Combien de temps faut-il pour en produire une ? Comment décidez-vous le nombre de sandales à confectionner par an ?L.M  : Par semaine, je fais 100 à 200 paires. En allant sur le schéma africain, il y a tellement de choses qui peuvent arriver entre-temps et qui font varier la temporalité de la production (mariages, baptêmes...etc). Donc pendant un mois, on peut avoir 500 à 600 paires de sandales et le mois d’après, ne rien produire. Ce n’est pas toujours récur-rent. Tout dépend de la demande. Au début je fonctionnais sous forme de pré-commande. Au fur et à mesure nous avons évolué et nous confection-nons désormais les sandales avant de les lancer sur le marché.

I.A  : Quelles sont vos matières de prédilections ?L.M : J’utilise beaucoup le pagne Kita qui est originaire du Ghana. C’est un pagne tissé artisanalement, très coloré et avec beaucoup de motifs. Il est fait à base de coton naturel, donc 100% coton. J’utilise aussi le pagne Baoulé; qui est fabriqué en Côte d’Ivoire et dont le tissage est différent de celui du pagne Kita; ainsi que la toile de jute et tout ce qui peut accompagner comme le coton léger, la soie ou l’organza.

Vous avez peut-être vu ses tenues ou ses célèbres sandales déambuler sur les trottoirs des quartiers chics de Lagos, Cape Town ou New-York, lorsque Solange Knowles l’a adoubé - sur son blog saintheron.com - et que les fashionistas du monde entier l’ont adopté. Ivoiro-centrafricaine - sa mère est ivoirienne et son père est centrafricain - née au Brésil et ayant grandi et étudié aux Etats-Unis, LOZA MALEOMBHO, 30 ans, puise son inspiration dans le patrimoine culturel africain. Ce n’est donc pas par hasard qu’elle a choisi de relocaliser sa marque éponyme en Côte d’Ivoire en 2012 - un pays nanti d’une soixantaine (60) d’ethnies - après sa création en 2009 aux Etats-Unis, afin de faire valoir la richesse culturelle africaine sur la scène internationale.Créatrice de mode 2.0, l’instrument digital est un de ses meilleurs alliés, qu’il s’agisse de sa boutique - e-shop - ou de la médiatisation et du marketing de ses réalisations. Toutefois, ce Vogue Talent 20151 vit sur la terre ferme. LOZA MALEOMBHO a employé jusqu’à une quinzaine de tailleurs ivoiriens indépendants, avant de s’attacher les services de quatre (04) salariés permanents. Son rêve est désormais de former et hisser le savoir-faire des couturiers africains aux normes internationales, pour que leurs talents éclosent au grand jour. Si vous deviez donc trouver une tenue ou des spartiates - sandales - originales et audacieuses pour la prochaine soirée B.C.B.G2 du club hippique ultra select de votre commune, il y a fort à parier que vous trouverez votre compte parmi les 200 à 300 vêtements annuels et les 500 à 600 sandales mensuelles produits par Loza Maleombho.Et si le nouveau bobo3 était africain? Rencontre avec la femme de qui émanera la révolution.

1/ Elle a été nommée parmi les 11 stylistes émergents de l’année 2015, pour le concours Vogue Talents organisé par le magazine de mode Vogue Italia 2/ bon chic bon genre 3/ bourgeois-bohème

C’est aux Etats-Unis que j’ai plutôt eu des avantages grâce à l’AGOA1, qui permet aux africains d’exporter leur produit en Amérique sans

avoir à payer de taxe.

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4/ African Growth and Opportunity Act adopté en mai 2000, permet de soutenir l’économie des pays africains en leur facilitant l’accès au marché américain s’ils suivent les principes de l’économie libérale.

I.A  : Quel impact jugez-vous avoir sur les artisans de votre région ? L.M  : Je ne peux pas parler d’un im-pact important pour l’instant parce que je pense que je peux aller beau-coup plus loin, mais je souhaite aider les artisans à étendre leurs activités. Je travaille beaucoup avec des fabricants de chaussures, de bijoux et de tissus. Je pense que sur le long terme l’impact sera beaucoup plus important.

I.A  : Dans quels pays écoulez-vous le mieux vos produits en ligne et quels y sont les restrictions et/ou avantages que vous y avez rencon-tré? L.M : Pour l’instant je vends essentiel-lement au Nigéria, en Afrique du Sud et aux Etats-Unis. Je dirais que ce sont mes plus gros clients. C’est aux Etats-Unis que j’ai plutôt eu des avantages grâce à l’AGOA1, qui permet aux afri-cains d’exporter leur produit en Amé-rique sans avoir à payer de taxe.

I.A : Quels sont les avantages et les inconvénients d’avoir un e-shop ?L.M  : L’avantage c’est que le proces-sus est très rapide : le client est chez lui, il clique sur un bouton. A partir

de là, le transfert d’argent et la com-mande sont instantanés, et cela me permet d’organiser très vite la livrai-son du produit. C’est donc beaucoup plus facile à gérer. Cela permet de faire des économies sur la location d’une boutique et sur tout ce qui concerne la main d’œuvre. Les inconvénients viennent du fait que le client ne peut pas essayer le produit à l’avance. Il y a donc la politique de retour de produits, qui peut être un inconvénient. Je n’ai pas souvent eu ces problèmes là, mais quand ça arrive, je permets aux clients de renvoyer le produit et/ou de faire un échange.

I.A : En quoi les concours auxquels vous avez participé vous ont-ils aidé  ? Pensez-vous que c’est la meilleure stratégie pour se faire connaître ou de gagner en crédibi-lité ? L.M  : C’était pour moi une façon de soumettre mes collections. La pre-mière fashion week africaine à laquelle j’ai participé est celle de Lagos, suite à laquelle j’ai reçu le prix de «styliste émergent de l’année». Cela m’a don-né beaucoup de visibilité en Afrique et dans la diaspora. Stratégiquement

parlant, ce n’est pas forcément le fait de gagner des concours qui donne de la crédibilité à une marque. Tout est dans l’image que renvoie la marque. Si la marque est cohérente, qualitative et très présente sur les réseaux sociaux, on a un avantage. Les réseaux sociaux donnent aux marques jeunes et indé-pendantes une chance de se lancer. Je mettrais plus l’accent sur les réseaux sociaux pour se lancer.

I.A  : Des conseils pour celles qui veulent se lancer dans votre métier ? L.M : La première chose est qu’il faut avoir du courage. Il faut vraiment avoir une idée précise de ce qu’on a l’inten-tion de faire. Il faut être sûr que c’est ce qu’on a envie de faire. Quand on crée une marque de vêtements, il est nécessaire de s’assurer que l’image est cohérente tout au long des saisons. Tout ce qui est visuel et «branding» doit être lié à l’image de la marque. Il ne suffit pas de faire un vêtement et de le vendre. Il y a toute une équipe derrière. Il faut que le produit soit de qualité et suive les standards internationaux. Ce sont les points les plus importants.

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2015

Ma Pause Digitale @Mapausedigitalewww.mapause-digitale.net

DOUALA 28NOVEMBRE

‘LE PARI DES CONTENUS LOCAUX’

Digital Marketing E - Reputation Brand Content

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INSPIR’ASSOCIATION // SÉNÉGAL

ERIC COLY : «  JE SAIS QUE C’EST POSSIBLE »

Bonjour Éric, pouvez-vous vous pré-senter aux lecteurs du magazine?

Je suis Éric Coly, jeune entrepreneur social originaire du Sénégal.Après 11 ans en finance1, je me suis rendu compte que je n’étais pas heu-reux et que rien ne me poussait à me lever tous les matins. J’ai donc décidé de provoquer le destin, et de me diri-ger vers ce que j’aimais vraiment. Ce

n’était pas facile au début, car j’ai dû quitter un excellent job. J’ai décidé de créer une plateforme qui mettrait en lien la mode et l’éducation des filles, 2 thématiques qui me tiennent particuliè-rement à cœur.

Pourquoi la mode ?

J’ai été fortement inspiré par ma mère, qui très jeune, m’a sensibilisé à

la mode, dont elle était une véritable passionnée. Ainsi, j’ai souvent été son assistant vestimentaire lorsqu’elle se préparait pour se rendre à des soirées ou à des galas. J’estime avoir eu de la chance de ce point de vue-là.La mode est selon moi un excellent moyen pour mettre en avant les œuvres d’art des filles que nous suivons.

Saviez-vous que : les femmes représentent 2/3 de la population illettrée mondiale (774 millions en tout); Plus de 65 millions des jeunes filles âgées de 6 à 12 ans ne vont pas à l’école dans les pays en développement ; et qu’une femme active réin-vestit en moyenne 90% de ses revenus dans les dépenses familiales, contre 30 à 35% seulement pour un homme ?Éric Coly lui, n’a pas eu besoin de ces chiffres pour comprendre que l’éducation est un enjeu majeur pour les jeunes filles africaines. En créant la marque de vêtements éthiques « Le Dessein » - distribuée à Los Angeles - il s’est lancé un pari ambitieux : contribuer à l’éducation de ces filles, à travers l’art et la mode. Le pari est en voie de réussite puisqu’en 3 ans, « Le Dessein » a permis à 30 jeunes filles d’aller à l’école.

1/ Éric travaillait dans une banque d’investissement

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“Le Dessein”. Voilà un nom bien curieux pour une association. Peux-tu nous en dire plus  ? Que signifie “Luh deh – san »?

«Le dessein» signifie l’objectif, le pro-jet. C’est cela qui représente totale-ment l’état d’esprit dans lequel j’étais à l’époque. Par ailleurs, ce nom a une double connotation qui illustre très bien l’association  : « Dessein » qui se prononce «  Dessin  » phonétiquement fait donc allusion à la fois à un projet, mais aussi au fait que les filles dessinent les motifs des collections que nous créons. «  Luh-deh-san  » permet simplement aux anglo-saxons de prononcer correctement le nom de l’association.

Comment en êtes-vous arrivé à associer édu-cation des jeunes filles et mode  ? Ces notions semblent éloignées...

L’idée de départ quand je créais l’association était de faire comprendre aux jeunes filles qu’elles ont de la valeur. Je voulais leur redonner confiance en elles-mêmes.Une fois qu’une de ces filles se rend compte qu’elle a de la valeur, automatiquement les autres filles qui sont dans la même situation s’en rendent compte aussi... C’est une maladie contagieuse ! (Rires ...)Aujourd’hui, je suis fier de dire que de nombreuses femmes à travers le monde portent des vêtements aux-quels j’ai participé. J’aimerais que ces jeunes filles puissent dire la même chose. En dehors de l’argent qu’elles peuvent gagner, elles voient la valeur de leur travail.

Comment se passe la fabrication d’une collection avec les filles ?

Le processus de fabrication varie entre 6 mois et un an. La production des vê-tements commence en même temps que les ateliers de dessins dédiés aux filles. Les filles proposent leurs dessins,

et quelques-uns sont sélectionnés, pour faire partie de la collection. Les dessins sont intégrés aux vêtements. A ce niveau, nous faisons un arbitrage entre le style du dessin et le vêtement. Nous choisissons minutieusement les tailles adéquates, les formes, les cou-leurs, etc. Une fois la production ter-minée, la collection est présentée à travers divers défilés de mode, princi-palement aux Etats-Unis.

Comment ça se passe sur place pour les filles ? Savent – elles toutes dessiner ? Sont-elles rémunérées ?

Les filles ont un professeur de des-sin. A chaque fois, elles passent une à deux semaines à apprendre à dessiner correctement et sont coachées afin de pouvoir proposer leurs créations pour les vêtements. Vous vous doutez bien que les vêtements ne se vendraient pas si les dessins n’étaient pas assez aboutis.25% des bénéfices réalisés sur la vente des vêtements sont redistribués aux associations avec lesquelles nous travaillons au Libéria2 et à Haïti. Ces dernières s’occupent de répartir cor-rectement les fonds dans les écoles et

s’assurent que chaque fille puisse en utiliser une partie.

Pourquoi n’avoir choisi que le Libé-ria pour mener vos actions  ? Il y’a tellement de pays en Afrique. Par ailleurs, on se serait attendu à ce que vous choisissiez le Sénégal en premier.

Pour être honnête, j’ai rencontré ma principale collaboratrice par hasard, lors d’une soirée. Le courant est pas-

sé naturellement. Nous avons commencé à échanger, et je me suis rendu compte qu’elle possédait une fondation au Libéria, qui facilitait l’accès à l’éducation à des jeunes filles. J’ai donc rencontré au bon moment, une personne qui avait déjà consacré sa vie à cette cause qu’est l’éducation des filles. Le choix du Libéria était complètement fortuit.D’ici 2016, je compte tout de même retourner au Sénégal, pour me rapprocher d’autres fondations.

Finalement, qu’est-ce que « Le Dessein » : une marque de vêtements ? Une associa-tion ?

Le Dessein est une marque portée par une association. L’une ne pourrait pas exister sans l’autre.

Qu’est-ce qui vous ins-pire au quotidien?

Je suis issu d’une famille très avant-gar-diste en matière de droits des femmes. Ma grand-mère a été la première sage-femme de sa ville et est allée à la fac en 1921. Ma mère quant à elle, a entamé des études de pharmacie et mes deux sœurs sont avocate et diplômée d’un Master de Santé Publique à Londres. De fait, au quotidien, je vois le potentiel de ces femmes. Je vois de quoi elles sont capables. Je sais qu’il y’a encore du chemin à parcourir, mais je sais que c’est possible.

Propos Recueillis par Joan Yombo

«25% des bénéfices réalisés sur la vente des vêtements sont redistribués aux associations

avec lesquelles nous travaillons au Libéria1 et à Haïti.»

2/ Au Libéria il s’agit de l’association More Than Me Academy

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INSPIR’ECO

TEXTILE: A QUAND LE RÉVEIL

DU GÉANT AFRICAIN ?

En 2015, l’industrie globale de la mode représente 1 500 milliards de dol-lars1. Pourtant, l’Afrique ne représente que 31 Milliards de dollars. La part du continent dans ce marché est appelé à se développer malgré elle : Die-sel et Tommy Hilfiger, pour ne citer que ces marques, souhaitent travailler avec l’Ethiopie. De plus, les chiffres prouvent qu’il y a une réelle opportu-nité dans cette industrie. Il y a encore 20 ans, des entreprises tel que Woo-din ou Pathé’O - respectivement crées et dirigées au Ghana et en Côte d’Ivoire - , voyaient le jour sur le continent et attiraient des consommateurs de la haute société. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, alors que de plus en plus de personnes souhaitent porter du « Made in Africa ». Certains pays ont décidé de tirer leur épingle du jeu, même si le chemin est encore long.

Ghana - Collier Fringe with benefits Christie Bown

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L’Afrique du Sud doit confirmer son statut de leader

L’industrie de l’habillement, le textile, le cuir et le footwear représentent 8% du Produit Inté-rieur Brut de l’Afrique du Sud. Cependant ce secteur d’activités connait un déclin : il employait 80 000 personnes en 2013 contre 181 000 en 2002. Mais les activités pourraient reprendre, sachant que 25 à 30% des vêtements vendus en Afrique du Sud sont fabriqués dans le pays. De plus, l’investissement du gouvernement à travers le ‘Clothing and Textile Competitiveness Programme’ - dont le but est de créer une croissance considérable dans le secteur - est un coup de pouce non-négligeable à l’industrie.

Le Nigeria mise sur l’éducation et le financement

En Août dernier, la Bank of Industry du Nigeria a ouvert un fond de 4,5 Millions d’Euros (1 milliard de Naira) afin d’accompagner les entreprises dirigées par des femmes et opérant dans le domaine de la mode et du textile. Chacune d’elles aura la possibilité d’emprunter jusqu’à 22.000euros (5millions de Naira) afin de développer son entreprise. Mais le Nigéria a aussi une dynamique éducative. 450 diplômés sortent chaque année de la Yaba College of Technology Fashion school, pour ne prendre que cette école. Ils sont formés à rendre l’industrie de la mode profitable à travers plusieurs métiers. En sus, le Nigéria est réputé pour la qualité de ses peaux et son savoir-faire ancestral en matière de tannage. Il approvisionne de nombreuses marques de luxe européennes comme Fendi, Her-mès et Bottega Veneta. 

L’Ethiopie : prochaine reine du cuir

L’Ethiopie souhaite s’imposer comme le leader mondial du tannage. En 2012, l’exportation du cuir représentait 123 millions de dollars, soit 73% des exportations du pays. Mais l’Ethiopie ne compte pas qu’exporter du cuir. Ce pays fournit plus de 160 000 pièces par mois à H&M, le numéro 2 mondial du textile et compte produire quatre fois plus de pièces dans 5 ans. La 4ème économie d’Afrique Subsaharienne de par sa croissance et le deuxième pays le plus peuplé du continent - avec 94,1 millions d’habitants -, est aussi le pays où les revenus annuels dépassent très rarement les 400$/an. S’il réussit a attiré plus de multinationales, il pourra sans aucun doute créer plus d’emplois, et à long-terme, augmenter le revenus moyen de sa population.

Le Ghana : grand perdant

Mais les pays Africains sont souvent soumis à des changements brutaux. Au Ghana, l’industrie du textile perd 69 Millions d’euros2 (300 Billion de Cedis Ghanéen) chaque année. Ce pays qui comptait 40 entreprises dédiées au textile et à la confection d’accessoires il y a encore 20 ans ne compte plus que 4 usines de textile. Plusieurs pays, tel que le Cameroun ou la Côte d’ivoire, ont vu leur industrie textile mourir. La question s’impose : Le réveil est-il pour bientôt ?

Chrys Nyetam

Nigeria - Collection TKO Madam de Zashadu

1/ Banque Africaine de Développement 2/ Revenue Agencies Governing Board du Ghana

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LES PENSÉES DE ... // GABON

Peut-on réellement parler de « marques » ou d’industrie de la mode en Afrique ?Grace Kelly Azizet, Directrice Générale de Wildflowers – agence de stratégie et de communication pour créateurs – estime qu’il est difficile de répondre à cette question par un simple oui ou non. Le secteur de la mode est en plein essor, et de nombreuses notions restent à définir. Voici l’avis de cette professionnelle qui connait la mode africaine comme sa poche.

GRACE KELLY AZIZET

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Définissons le « Made in Africa »

L’un de nos objectifs au sein de l’agence Wildflowers, est de sensibiliser la jeunesse africaine à la fierté de consommer africain. D’après une étude que nous avons menée sur le « Made In Africa » (en collaboration avec Afrikrea), pour 64% des afropolitains, le « Made in Africa  » se définit par le fait que le créateur soit africain. Alors que pour nous en agence, le terme s’emploie lorsque les produits sont fabriqués en Afrique. Ceux qui pensent comme nous ne représentent que 54% des personnes que nous avons interrogées.

Parlons de la notion de « marque » dans le contexte Africain

Il est toujours complexe, quand on évoque l’idée du «Made in Africa», de parler tout de suite de « marque ». L’industrie de la mode est en plein développement. Par conséquent, il existe plusieurs « tribus » comme nous les appelons au sein de l’agence : On a tout d’abord des entrepreneurs dont la base de travail est l’artisanat africain. On les retrouve dans des circuits de distribution tels que les ventes privées ou les plateformes de commerce en ligne spécialisées. Ces artisans vont sublimer le «Made in Africa» en utilisant le wax, mais en proposant des produits qui ne sont pas vraiment différenciant. Ils n’ont pas de points de vente ou de site internet propres pour présenter leur univers. Malheureusement, cette catégorie représente environ 80% du marché de la mode africaine selon notre étude. Avec ces artisans, on est sur du prix d’appel et même sur du produit d’appel. Forcément, ils génèrent du volume, mais en termes de structure et de visibilité, on n’a pas de marque forte qui ressorte. La marque Nana Wax - créée par Maureen Ayité - se démarque, même si elle est en train d’évoluer vers la catégorie premium.Ensuite, on a les afro-hipsters, qui sont des marques en devenir parce qu’elles travaillent sur leur branding. Leurs créations ont une identité visuelle et une signature claires. Leur cible est définie et leur visibilité est grandissante parce qu’elles se créent un univers propre, notamment à travers un site internet et une présence sur les réseaux sociaux. Les marques Laurence Airlines, et Château Rouge, même si

elles ne sont pas sur le même créneau, appartiennent à cette tribu.La tribu leader quant à elle est composée de créateurs qui sont sur un segment haut de gamme, voire luxe. Leurs marques sont en phase de structuration, leurs produits sont de plus en plus différenciant  : en les voyant, on sait immédiatement à quelle marque les associer. Dans cette catégorie je vois des marques telles que Duro Olowi, Zashadu ou Madibo.

« Les Africains ne consomment pas assez le Made In Africa »

Les Africains issus de la diaspora estiment qu’ils ont constamment porté des marques étrangères et aujourd’hui, l’afro optimisme qui les anime voudrait qu’ils valorisent et revendiquent leur culture par le prisme du textile, de la gastronomie ou de la presse. C’est pour cette raison que de plus en plus de personnes au sein de la diaspora africaine consomment du «  Made in Africa ». Sur le continent, notamment en Afrique Centrale, les africains sont intéressés par les marques occidentales dont ils connaissent le logo et l’identité graphique. Maintenant, de plus en plus de personnes issues de la diaspora reviennent et apportent une certaine prise de conscience en proposant des initiatives locales. Ce qui change la donne. Par conséquent, deux groupes existent désormais sur le continent : les afro-responsables qui le revendiquent, et ceux qui sont beaucoup moins réceptifs à cette tendance, parce qu’ils consomment déjà les produits locaux et n’éprouvent pas le besoin de valoriser l’Afrique : ils y vivent. Pour cette dernière catégorie, l’Afrique ne représente pas l’émergence et la croissance dont on

nous parle constamment. Leur réalité est différente. Ils sont dans une misère économique qui fait qu’ils ne ressentent pas le besoin de valoriser cela à leur niveau.

Les bons élèves du continent en matière de structuration de l’industrie de la mode … Les pays qui montrent l’exemple sont le Nigéria et l’Afrique du Sud, qui ont toujours été fiers de leur culture. Les pays d’Afrique Francophone sont un peu plus à la traîne. En Afrique centrale, il n’existe pas d’initiative forte qui permette de montrer une fierté culturelle revendiquée et valorisée à l’échelle internationale. Au final, la question culturelle est très sensible. Les stylistes, les sculpteurs et tous ceux qui exercent un métier lié à l’art en général, sont peu considérés. Pour structurer l’industrie de la mode dans ces pays il faudra créer un écosystème capable de proposer des initiatives impactantes et inciter tous les acteurs à suivre la même dynamique. Par ailleurs, ces initiatives doivent être visibles. Et qu’on le veuille ou non, notre diaspora a un rôle à jouer en ce sens.

Intéressons-nous aux Fashion Week sur le continent …

Il y en a de plus en plus. Prenons l’exemple de l’Afrique du Sud. L’African Fashion International est une organisation qui regroupe près de 5 Fashion Week extrêmement qualitatives. Dans certains cas, il existe en moyenne deux Fashion Week par pays. A Brazzaville par exemple, on a la Brazza Fashion Week et la Congo Fashion Week. Au Gabon il existe la Libreville Fashion Week et la Port-Gentil Fashion Week. Il faut noter toutefois que toutes ces Fashion Week ne se valent pas. Il y a toujours un problème de leadership et d’égo dans nos pays qui fait qu’au lieu de se rassembler pour avoir plus de visibilité, chacun préfère organiser sa Fashion Week dans son coin. Or, Les Fashion Week légendaires, celles qui ont pignon sur rue (New York, Londres, Milan, Paris) se sont structurées autour d’une fédération ou d’un Council, avec une ville de référence. Cette ville

GRACE KELLY AZIZET

Un sac de la marque africaine Zashadu

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centralise l’ensemble des évènements ayant pour mission d’accompagner tous les créateurs de manière à attirer le maximum d’acheteurs et de journalistes. Cette stratégie permet d’avoir un impact plus important sur l’industrie et de la valoriser à l’international. En Afrique francophone, les Fashion Week sont nombreuses, plus ou moins visibles, et manquent de qualité. Très souvent les équipes ne sont pas formées et ne vont pas chercher l’information. Ce ne sont pas de véritables Fashion Week, juste des défilés, de l’évènementiel sans objectifs clairs et précis, sans dynamique de développement et sans vision. Les organisateurs ont tendance à penser que seuls, ils peuvent tout faire ; alors que seul, on ne peut rien faire.

… Et à la pertinence des Fashion Week Africaines organisées à l’étranger.

Au début, je trouvais le concept beaucoup trop communautaire, et certains acheteurs n’aiment pas le côté communautaire, surtout en France. Pour eux, si une marque africaine veut être présentée, il faut qu’elle s’inscrive dans le calendrier des collections normales, qu’elle fasse appel à la fédération française de prêt-à-porter et qu’elle demande à être rajoutée dans le programme des défilés de façon à ce que les acheteurs viennent la découvrir. Même si les créateurs africains ont à cœur de faire de la mode et créent des pièces qui paraissent désirables, ils ne savent pas qu’il faut aller taper à la porte de la fédération pour intégrer ce calendrier. Un créateur qui voulait être présenté à la Fashion Week Parisienne de Septembre 2015, y aurait présenté sa collection printemps été 2016 par exemple.De manière générale, le créateur doit connaître son volume de production, son prix de revient, et doit être prêt à faire des concessions sur son prix final. S’il n’est pas accompagné et conseillé, il peut tout simplement ne pas rencontrer les acheteurs. Je trouvais aussi qu’il y avait un côté afro-militant qui ne correspondait pas à l’industrie de la mode. Mais mon point de vue a évolué depuis. Les personnes qui créent les Fashion Week à l’étranger n’ont pas une excellente connaissance de l’industrie, mais elles souhaitent tout

de même valoriser la mode africaine par le biais de l’évènementiel. C’est ce que la Black Fashion Week et le groupe Adiré à New York font. Ce n’est pas forcément très structuré _car ces personnes ne savent pas comment faire appel aux acheteurs _ mais c’est intéressant car cela permet aux créateurs d’avoir de la visibilité, de commencer à communiquer et à se préparer à rencontrer la presse. Beaucoup vont négliger les webzines et les bloggeurs, mais ce sont des acteurs importants  : ils connaissent la cible de ces créateurs, l’étudient et communiquent avec elle au quotidien. Cependant, le fait qu’il existe plusieurs évènements de la sorte a permis à l’industrie de la mode de se rendre compte qu’il se passait quelque chose au niveau de l’Afrique.

A propos des agences de mannequins en Afrique

Il y a un manque incroyable d’agences de mannequins sur le continent alors que nous avons un potentiel énorme. Il est vrai que l’univers du mannequinat est extrêmement codifié. Pour structurer ce secteur, il faut des gens qui y ont travaillé et qui serviront de référents à ceux qui souhaitent entrer dans ce secteur. Le groupe Elite est plutôt bien implanté en Afrique et est souvent partenaire de bons évènements locaux. Cependant, j’ai l’impression qu’il y a souvent un problème au niveau des représentants de ces agences dont la formation n’est pas adaptée aux réalités du continent. Ils ne savent pas, ou ne cherchent pas à mettre suffisamment en avant leur initiative, et ne donnent pas de poids à leur action. Sur la Brazza Fashion Night par exemple, nous avons dû recourir à un casting sauvage pour trouver des modèles. Nous n’avions pas le choix, car il n’y avait pas d’agence de

mannequins capable de nous fournir un book homogène dont les mannequins puissent être représentatives de l’image qu’on voulait donner à l’évènement.

A propos du retail

La question du retail est assez particulière en Afrique. D’un côté nous avons tous les cabinets de conseil en stratégie (McKinsey, EY, etc.) qui disent que l’Afrique est le nouveau marché du retail, et que beaucoup de choses vont se faire dans les années à venir. Concrètement, il y a effectivement des marchés, comme celui du Nigéria, qui sont en phase de maturation avec de nombreux centres commerciaux, et des concept-stores qui se créent. Prenons par exemple Alara store qui est le premier concept-store 100% made in Africa, et qui est un exemple type de ce que sera le retail de demain en Afrique  : un magasin présentant de jeunes créateurs africains et des marques de luxe occidentales qui souhaitent rencontrer les jeunes consommateurs africains. Le Maroc, et de plus en plus le Ghana, sont dans la même catégorie que le Nigéria. L’Angola et le Mozambique sont en phase de devenir des acteurs du retail. L’Afrique du Sud quant à elle possède un marché déjà mature. Ensuite, il y a des marchés au potentiel incroyable comme le Gabon, le Rwanda et l’Ethiopie. Mais le secteur de la distribution y est encore en friche ; il n’y existe pas encore de points de vente clés où les créateurs peuvent distribuer. Dans ces marchés, les créations de centres commerciaux sont encore en pourparlers ou en phase de création. Je prends l’exemple de ABC Mall de Libreville, qui commence à avoir des boutiques. Mais ces dernières ne sont pas encore visibles et ne proposent pas une offre Made in Africa. Du coup, les créateurs ne seront pas au courant que ces boutiques existent et on ne pourra pas structurer le secteur. Malheureusement en Afrique, les gens ne se rencontrent pas pour créer du business. C’est un problème de vision et de structure et les choses ne changeront que quand une pédagogie sera mise en place.

Propos Recueillis par Chrys Nyetam

Les produits de la marque Zashadu

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Valérie AyenaPicture by Mirjana Photography Dubai

4 QUESTIONS À... // CAMEROUN

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Valérie Ayena

Inspire Afrika : Bonjour Valérie. Remporter le concours de Miss Cameroun vous a permis de participer à Miss Monde. Pensez-vous que votre carrière de mannequin ait bénéficié de votre participation à ce concours international ? Valérie AYENA  : Il faut tenir compte du fait que Miss Cameroun n’a rien à voir avec le mannequinat. Si l’on parle bien de ma carrière en tant que mannequin à l’international, je pense qu’avec ou sans Miss Monde, j’aurais pu y arriver. Ce qui est difficile dans le métier, c’est de se trouver au bon endroit au bon moment, et surtout d’être entouré des bonnes personnes. Je ne souhaite pas paraÎtre prétentieuse, mais mon agent pense que si je n’avais pas fait la rupture en 2013 pour participer à Miss Cameroun, j’aurais pu me retrouver sur des podiums importants à l’international. Miss Cameroun a donc été une expérience autre que celle du mannequinat. Mon contrat en tant que Miss Cameroun m’empêchait de travailler sur d’autres campagnes parce que je représentais l’image du Cameroun.

IA  : Quelles activités avez-vous mené après Miss Cameroun  ? Comment se porte votre carrière de mannequin ? VA  : La transition a été difficile au début. Il a fallu que je reprenne les castings, et que je refasse du sport pour retrouver les mensurations adéquates. Durant mon mandat de Miss Cameroun on me reprochait d’être trop mince. Quand je suis revenue dans le mannequinat je ne répondais plus aux critères. J’ai participé à la campagne MadeOfblack et ensuite, j’ai eu une opportunité aux Emirats où je suis installée pour le moment avec mon agence MMG events Dubaï. En dehors de ma carrière de mannequin, je continue à mener des actions caritatives que j’ai commencées durant mon mandat. J’ai été nommée ambassadrice de l’association OCOS (One Child One Smile) basée au Cameroun, qui milite pour le droit à l’éducation des enfants orphelins. Je profite de votre média pour sensibiliser les gens et je les invite à regarder nos pages Facebook et Instagram. On m’a également proposé dernièrement d’organiser une semaine de la mode au Tchad, mais pour l’instant, le projet est encore embryonnaire, on verra bien avec les sponsors que nous aurons.

IA : Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées en tant que mannequin noir à l’international et comment

les avez-vous surmontées jusqu’à présent ? VA : La mode est un milieu fermé et difficile à intégrer même si il a l’air très ouvert au monde. Etre noire rend les choses encore plus difficiles. Lorsque nous participons à des castings, les recruteurs essaient toujours de nous ranger dans des catégories  : On doit avoir des profils soit à la Naomi Campbell, soit à la Grace Jones ; je vous épargne les sous catégories. Je me souviens avoir participé à un casting au cours duquel on m’a dit que je ne suis pas noire mais plutôt « Cappuccino ». Ceux qui me font passer le casting me classent dans une catégorie différente de la fille très noire de peau et ils se tourneront généralement plus vers elle. C’est compliqué, car même si le monde change, les critères de beauté eux demeurent. Moi Valérie, noire avec

mon gros nez par exemple, je peux ne pas correspondre à certains critères de beauté. Mais je suis optimiste, et sur le plan personnel, je réussis tout de même à mener ma petite carrière, à m’occuper de ma famille et à me faire plaisir. 

IA  : Quel conseil donneriez-vous aux jeunes filles qui souhaitent être mannequins mais qui n’ont pas eu la chance de participer à des concours de beauté nationaux ou internationaux comme vous ? VA : Je le dis encore, la carrière de mannequin n’a rien à voir avec le fait d’être une Miss de beauté. Une fille peu importe d’où elle vient, peut être un excellent Top-Model. Il faut d’abord comprendre qu’il s’agit d’un métier très difficile. On ne choisit pas d’être mannequin  : on naît mannequin, en ayant les dispositions physiques naturelles qui permettent d’exercer ce métier. Il est nécessaire d’avoir les bonnes mensurations au niveau des hanches et du buste, et d’avoir la bonne taille. Il peut y avoir des exceptions, mais c’est rare. Il faut aussi avoir une bonne condition physique, pouvoir tenir debout longtemps, avoir une aisance à marcher avec des talons hauts et puis tout simplement y croire. Quelqu’un qui souhaite être mannequin doit cultiver son potentiel, prendre son courage à deux mains et frapper à la porte des agences. Si on n’a pas la chance de se faire découvrir, Internet permet d’entrer en contact avec de nombreuses agences à travers le monde. Cette personne doit trouver quelqu’un qui croit en elle.

«La carrière de mannequin n’a rien à voir avec le fait d’être une Miss de beauté. Une fille peu importe d’où elle vient, peut être un excellent

Top-Model.»

Propos recueillis par Ivan Nyetam

Après avoir été découverte en 2011 alors qu’elle était étudiante à l’Institut Supérieur de Management en option communication au Cameroun, Valérie Ayena décroche son premier contrat en tant que mannequin en Afrique du Sud. Deux ans plus tard, elle est la première Miss Cameroun à participer au prestigieux concours Miss Monde. En 2014, elle est choisie par la marque Guinness pour la campagne « MadeofBlack ». Et la jeune Valérie Ayena, qui est « Made of Confidence » ne s’arrête pas là. Aujourd’hui, elle est un mannequin professionnel Africain, qui a su trouver sa voie dans un monde très codifié. Loin des podiums, des strass et des paillettes, Valérie a accepté de se livrer à nous en 4 questions.

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FOCULTURE // ETHIOPIE

CUIR ÉTHIOPIEN : DES PRÉTENDANTS DE « MARQUE » CHEZ LA REINE DE SABA

Crédit Photo www.Maikimiko.com

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1/ Source : leséchos.fr

Elles sont nombreuses, ces marques dures à cuire qui foncent sur le cuir éthiopien  : Diesel, Calvin Klein, Delta Plus, Wrangler, Tommy Hilfiger à titre d’exemple. Elles courent vers ces salaires d’ouvriers dix fois inférieurs à ceux de leurs homologues asiatiques. Elles fuient le scandale qui pourrait éclabousser leur belle image quant aux conditions de tra-vail souvent décriées dans les ateliers bangladeshi. De plus, avec la croissance reconnue des pays africains, il devient économiquement intéressant d’y assurer une base. En effet, selon les prévisions de l’OCDE, la croissance économique afri-caine devrait atteindre les 5% en 2016. Aujourd’hui, on peut sans effort se trouver des éti-quettes Made in Ethiopia sur de nombreux produits de ces grandes marques à travers le monde.

Qui dit transformation, dit ma-tières premières !Les investisseurs venus de Turquie, d’Arabie Saoudite, de Chine, d’Angleterre mais aussi originaires d’Ethiopie ont misé sur l’Abyssinie pour installer leurs manufactures de textile et de cuir. Le pays compte déjà plus d’une cen-taine d’usines, installées en moins d’une décennie.  Autre avantage, le cheptel éthiopien est reconnu comme le plus im-portant d’Afrique. Selon l’ONU, il comptait plus de 72 millions

de têtes en 2014. Le gouverne-ment Ethiopien offre également aux investisseurs des avan-tages fiscaux à l’exportation, que demander de plus ?

L’envers du palais…Si l’Ethiopie est sacrée « Prin-cesse  » du cuir, le chemin est encore long avant de détrôner la reine Bangladeshi. En 2013, l’Ethiopie représentait 120 en-treprises textiles pour 100 mil-lions de dollars d’exportations. Le Bangladesh en comptait 5 000 qui exportaient pour plus de 20 milliards de dollars1. Les investisseurs étrangers dénon-cent le manque de productivité et l’absentéisme des ouvriers éthiopiens, mais aussi les délais de livraison allongés du fait de la mauvaise qualité des routes. La Banque mondiale applaudit certes le choix du textile comme l’un des moteurs économiques éthiopiens, mais déplore les énormes barrières de la bureaucratie.

Pour autant, la quatrième éco-nomie africaine, ses 97 mil-lions d’habitants et ses 45 millions d’hectares agricoles disponibles, regorge d’autant d’atouts qui feront d’elle, à n’en point douter, un espace à conquérir à moyen terme.

En déclarant en 2013 vouloir tester les fournisseurs éthio-piens de cuir, le numéro 2 mondial de la mode H&M jeta sous les projecteurs de la filière le pays de la Reine de Saba. Ni une ni deux, voici que les prétendants affluent du monde entier, sans doute à la recherche de coûts de production plus compétitifs incluant bien entendu une main d’œuvre low-cost. Exit la Chine et le Bangladesh, bonjour Addis-Abeba !

Par Stella Sanogoh

Crédit Photo www.Maikimiko.com

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