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14-06-30 23:56 Bac philo : les 20 textes qu'il faut avoir lus pour s'en sortir - Le Nouvel Observateur Page 1 sur 16 http://tempsreel.nouvelobs.com/bac-2014/20140605.OBS9658/bac-philo-les-20-textes-qu-il-faut-avoir-lus-pour-s-en-sortir.html#Hobbes4 Économiseur d’énergie Safari Cliquer pour lancer le module Flash Bac philo : les 20 textes qu'il faut avoir lus pour s'en sortir Par Le Nouvel Observateur Publié le 08-06-2014 à 09h03 Mis à jour le 09-06-2014 à 10h43 Descartes, Pascal, Nietzsche, Kant... A l'approche des épreuves du bac philo, la noyade menace ? Rue des Ecole et "Le Nouvel Observateur" vous aident à y voir clair. Le compte à rebours a commencé : les bacheliers de Terminales générale et technologique plancheront le 16 juin pour le bac philo, toutes séries confondues. "L'usage de la raison est-il une garantie contre l'illusion", "Y a-t-il un devoir de mémoire"... Les pronostics vont bon train. Après avoir récapitulé les sujets tombés en philo (http://tempsreel.nouvelobs.com/education/20140520.OBS7801/bac-l-les-sujets-tombes-ces-3- dernieres-annees.html) dans les différentes séries ces trois dernières années, "le Nouvel Observateur" et Rue des Ecoles ont sélectionné pour vous les 23 textes qu'il faut avoir lus avant de se présenter à l'épreuve. Pour ne pas se noyer, pour ne pas se louper. Au sommaire (passer sur le titre pour accéder directement au texte) : 1. Le sujet La conscience : Descartes, Discours de la méthode La perception : Alain, 81 Chapitres sur l'esprit et les passions L'inconscient : Freud, Métapsychologie Autrui : Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception Education En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies permettant de vous proposer des services et offres adaptés à vos centres d'intérêt. En savoir plus Fermer ×

20 oeuvres essentielles pour la philo

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Liste et description de 20 oeuvres majeures en histoire de la philosophie

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    Bac philo : les 20 textes qu'il faut avoir lus pour s'en sortirPar Le Nouvel Observateur Publi le 08-06-2014 09h03

    Mis jour le 09-06-2014 10h43

    Descartes, Pascal, Nietzsche, Kant... A l'approche des preuves du bac philo, la noyade menace ? Rue des Ecole et"Le Nouvel Observateur" vous aident y voir clair.

    Le compte rebours a commenc : les bacheliers de Terminales gnrale et technologique plancheront le 16 juinpour le bac philo, toutes sries confondues. "L'usage de la raison est-il une garantie contre l'illusion", "Y a-t-il undevoir de mmoire"... Les pronostics vont bon train.

    Aprs avoir rcapitul les sujets tombs en philo(http://tempsreel.nouvelobs.com/education/20140520.OBS7801/bac-l-les-sujets-tombes-ces-3-dernieres-annees.html) dans les diffrentes sries ces trois dernires annes, "le Nouvel Observateur" et Ruedes Ecoles ont slectionn pour vous les 23 textes qu'il faut avoir lus avant de se prsenter l'preuve. Pour ne passe noyer, pour ne pas se louper. Au sommaire (passer sur le titre pour accder directement au texte) :

    1. Le sujet

    La conscience : Descartes, Discours de la mthode

    La perception : Alain, 81 Chapitres sur l'esprit et les passions

    L'inconscient : Freud, Mtapsychologie

    Autrui : Merleau-Ponty, Phnomnologie de la perception

    Education

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    Le dsir : picure (342-270 av. J.-C.), Doctrines et Maximes

    L'existence et le temps : Pascal, Penses, Lafuma 47 (1670)

    2. La culture

    Le langage : Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'ingalit parmi les hommes

    L'art : Hegel, Esthtique I

    Le travail et la technique : Marx, Le Capital, Livre I, 3e section, chapitre 7, 1

    La religion : Nietzsche, L'Antchrist

    L'histoire : Ricur, Histoire et vrit

    3. La raison et le rel

    Thorie et exprience : Claude Bernard, Introduction l'tude de la mdecine exprimentale

    La dmonstration : Pascal, De l'esprit gomtrique

    L'interprtation : Dilthey, Introduction l'tude des sciences humaines

    Le vivant : Kant, Critique de la facult de juger

    La matire et l'esprit : Merleau-Ponty, Signes

    La vrit : Bachelard, La Formation de l'esprit scientifique

    4. La politique

    La socit : Hobbes, Du Citoyen

    La justice et le droit : Rousseau, Du Contrat social

    L'tat : Montesquieu, De l'Esprit des Lois, Livre III, chapitre 9

    5. La morale

    La libert : Sartre, Cahiers pour une morale

    Le devoir : Kant, Fondements de la mtaphysique des murs

    Le bonheur : pictte (vers 50 vers 130), Manuel

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    Les prcieux extraits :

    1. Le sujet

    La conscience : Descartes, Discours de la mthode, 4e partie (1637)Thme : le sujet

    Si la formule "Je pense, donc je suis" est reste clbre, c'est qu'elle marque une rupture dans l'histoire de laphilosophie. Pour connatre soi et le monde, il faut, comme le souligne Descartes, partir de la conscience de soi etnon de l'exprience du monde voir ainsi le sujet pensant comme premire certitude.

    Je ne sais si je dois vous entretenir des premires mditations que j'ai faites ; car elles sont si mtaphysiques et sipeu communes, qu'elles ne seront peut-tre pas au got de tout le monde. Et toutefois, afin qu'on puisse juger si lesfondements que j'ai pris sont assez fermes, je me trouve en quelque faon contraint d'en parler. J'avais dslongtemps remarqu que, pour les murs, il est besoin quelquefois de suivre des opinions qu'on sait tre fortincertaines, tout de mme que si elles taient indubitables, ainsi qu'il a t dit ci-dessus, mais, pource [parce]qu'alors je dsirais vaquer seulement la recherche de la vrit, je pensai qu'il fallait que je fisse tout le contraire,et que je rejetasse, comme absolument faux, tout ce en quoi je pourrais imaginer le moindre doute, afin de voir s'ilne resterait point, aprs cela, quelque chose en ma crance, qui ft entirement indubitable. Ainsi, cause que nossens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu'il n'y avait aucune chose qui ft telle qu'ils nous la fontimaginer. Et pource qu'il y a des hommes qui se mprennent en raisonnant, mme touchant les plus simplesmatires de gomtrie, et y font des paralogismes, jugeant que j'tais sujet faillir, autant qu'aucun autre, je rejetaicomme fausses toutes les raisons que j'avais prises auparavant pour dmonstrations. Et enfin, considrant quetoutes les mmes penses, que nous avons tant veills, nous peuvent aussi venir quand nous dormons, sans qu'ily en ait aucune, pour lors, qui soit vraie, je me rsolus de feindre que toutes les choses qui m'taient jamais entresen l'esprit n'taient non plus vraies que les illusions de mes songes.

    Mais, aussitt aprs, je pris garde que, pendant que je voulais ainsi penser que tout tait faux, il fallaitncessairement que moi, qui le pensais, fusse quelque chose. Et remarquant que cette vrit : je pense donc je suis,tait si ferme et si assure, que toutes les plus extravagantes suppositions des sceptiques n'taient pas capables del'branler, je jugeai que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de la philosophie que jecherchais.

    La perception : Alain, 81 Chapitres sur l'esprit et les passions (1917)

    Professeur de philosophie et auteur de nombreuses chroniques, Alain a considrablement influenc la pense duXXe sicle (Raymond Aron, Simone Weil, pour ne citer qu'eux). Dans cet extrait, il souligne le caractreparcellaire et confus de la sensation, et affirme que la perception est paradoxalement une construction del'esprit : percevoir, c'est dj penser.

    On soutient communment que c'est le toucher qui nous instruit, et par constatation pure et simple, sans aucuneinterprtation. Mais il n'en est rien. Je ne touche pas ce d cubique. Non. Je touche successivement des artes, despointes, des plans durs et lisses, et runissant toutes ces apparences en un seul objet, je juge que cet objet estcubique. Exercez-vous sur d'autres exemples, car cette analyse conduit fort loin, et il importe de bien assurer sespremiers pas. Au surplus il est assez clair que je ne puis pas constater comme un fait donn mes sens que ce dcubique et dur est en mme temps blanc de partout, et marqu de points noirs. Je ne le vois jamais en mme temps

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    de partout, et jamais les faces visibles ne sont colores de mme en mme temps, pas plus du reste que je ne lesvois gales en mme temps. Mais pourtant c'est un cube que je vois, faces gales, et toutes galement blanches.[] Revenons ce d. Je reconnais six taches noires sur une des faces. On ne fera pas difficult d'admettre quec'est l une opration d'entendement, dont les sens fournissent seulement la matire. Il est clair que, parcourantces taches noires, et retenant l'ordre et la place de chacune, je forme enfin, et non sans peine au commencement,l'ide qu'elles sont six, c'est--dire deux fois trois, qui font cinq et un. Apercevez-vous la ressemblance entre cetteaction de compter et cette autre opration par laquelle je reconnais que des apparences successives, pour la mainet pour l'il, me font connatre un cube ? Par o il apparatrait que la perception est dj une fonctiond'entendement [] et que l'esprit le plus raisonnable y met de lui-mme bien plus qu'il ne croit.

    L'inconscient : Freud, Mtapsychologie, "L'Inconscient" (1915)

    Si la vie psychique tait pleinement transparente et cohrente, l'hypothse de l'inconscient ne serait nullementncessaire. Or, comme le soutient le fondateur de la psychanalyse, c'est par l'interprtation des rves, des lapsusou encore des actes manqus que le sujet peut comprendre et gurir ses troubles psychiques

    On nous conteste de tous cts le droit d'admettre un psychique inconscient et de travailler scientifiquement aveccette hypothse. Nous pouvons rpondre cela que l'hypothse de l'inconscient est ncessaire et lgitime, et quenous possdons de multiples preuves de l'existence de l'inconscient. Elle est ncessaire parce que les donnes de laconscience sont extrmement lacunaires ; aussi bien chez l'homme sain que chez le malade, il se produit des actespsychiques qui, pour tre expliqus, prsupposent d'autres actes qui, eux, ne bnficient pas du tmoignage de laconscience. Ces actes ne sont pas seulement les actes manqus et les rves, chez l'homme sain, et tout ce qu'onappelle symptmes psychiques et phnomnes compulsionnels chez le malade ; notre exprience quotidienne laplus personnelle nous met en prsence d'ides qui nous viennent sans que nous en connaissions l'origine et dontl'laboration nous demeure cache. Tous ces actes conscients demeurent incohrents et incomprhensibles si nousnous obstinons prtendre qu'il faut bien percevoir par la conscience tout ce qui se passe en nous en fait d'actespsychiques ; mais ils s'ordonnent dans un ensemble dont on peut montrer la cohrence, si nous interpellons lesactes inconscients infrs. Or, nous trouvons dans ce gain de sens et de cohrence une raison, pleinement justifie,d'aller au-del de l'exprience immdiate. Et s'il s'avre de plus que nous pouvons fonder sur l'hypothse del'inconscient une pratique couronne de succs, par laquelle nous influenons, conformment un but donn, lecours des processus conscients, nous aurons acquis, avec ce succs, une preuve incontestable de l'existence de cedont nous avons fait l'hypothse.

    Autrui : Merleau-Ponty, Phnomnologie de la perception (1945)

    Fondateur, avec Sartre et Simone de Beauvoir, de la revue Les Temps modernes, Merleau-Ponty s'interroge icisur la nature de "l'autre" et montre qu'il ne saurait se rduire un corps matriel : autrui est immdiatement, etquand bien mme il serait considr comme inaccessible (en dehors de toute communication), reconnu commesujet dans un dialogue potentiel ce que Merleau-Ponty nomme "intersubjectivit".

    () l'objectivation de chacun par le regard de l'autre n'est ressentie comme pnible que parce qu'elle prend la placed'une communication possible. Le regard d'un chien sur moi ne me gne gure. Le refus de communiquer estencore un mode de communication. La libert protiforme, la nature pensante, le fond inalinable, l'existence nonqualifie, qui en moi et en autrui marque les limites de toute sympathie, suspend bien la communication, mais ne

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    l'anantit pas. Si j'ai affaire un inconnu qui n'a pas encore dit un seul mot, je peux croire qu'il vit dans un autremonde o mes actions et mes penses ne sont pas dignes de figurer. Mais qu'il dise un mot, ou seulement qu'il aitun geste d'impatience, et dj il cesse de me transcender : c'est donc l sa voix, ce sont l ses penses, voil donc ledomaine que je croyais inaccessible. Chaque existence ne transcende dfinitivement les autres que quand elle resteoisive et assise sur sa diffrence naturelle. Mme la mditation universelle qui retranche le philosophe de sanation, de ses amitis, de ses partis pris, de son tre empirique, en un mot du monde, et qui semble le laisserabsolument seul, est en ralit acte, parole, et par consquent dialogue.

    Le dsir : picure (342-270 av. J.-C.), Doctrines et Maximes

    Contrairement l'ide que se fait l'opinion commune, l'picurisme ne consiste ni donner libre cours ses dsirsni mener une vie de dbauche. Comme le montre ici picure lui-mme, tre hdoniste, ce n'est pas recherchertous les plaisirs mais atteindre le plaisir maximal, c'est--dire l'absence de troubles de l'me, par l'usage de laraison contre les passions.

    C'est un grand bien notre avis que de se suffire soi-mme, non qu'il faille toujours vivre de peu, mais afin que sil'abondance nous manque, nous sachions nous contenter du peu que nous aurons, bien persuads que ceux-ljouissent le plus vivement de l'opulence qui ont le moins besoin d'elle, et que tout ce qui est naturel est ais seprocurer, tandis que ce qui ne rpond pas un dsir naturel est malais se procurer. En effet, des mets simplesdonnent un plaisir gal celui d'un rgime somptueux si toute la douleur cause par le besoin est supprime, et,d'autre part, du pain d'orge et de l'eau procurent le plus vif plaisir celui qui les porte sa bouche aprs en avoirsenti la privation.

    L'habitude d'une nourriture simple et non pas celle d'une nourriture luxueuse, convient donc pour donner la pleinesant, pour laisser l'homme toute libert de se consacrer aux devoirs ncessaires de la vie, pour nous disposer mieux goter les repas luxueux, lorsque nous les faisons aprs des intervalles de vie frugale, enfin pour nousmettre en tat de ne pas craindre la mauvaise fortune. Quand donc nous disons que le plaisir est le but de la vie,nous ne parlons pas des plaisirs voluptueux et inquiets, ni de ceux qui consistent dans les jouissances drgles,ainsi que l'crivent des gens qui ignorent notre doctrine, ou qui la combattent et la prennent dans un mauvais sens.Le plaisir dont nous parlons est celui qui consiste, pour le corps, ne pas souffrir et, pour l'me, tre sanstrouble.

    Car ce n'est pas une suite ininterrompue de jours passs boire et manger, ce n'est pas la jouissance des jeunesgarons et des femmes, ce n'est pas la saveur des poissons et des autres mets que porte une table somptueuse, cen'est pas tout cela qui engendre la vie heureuse, mais c'est le raisonnement vigilant, capable de trouver en toutecirconstance les motifs de ce qu'il faut choisir et de ce qu'il faut viter, et de rejeter les vaines opinions d'oprovient le plus grand trouble des mes.

    L'existence et le temps : Pascal, Penses, Lafuma 47 (1670)

    Philosophe attach Port-Royal, Pascal montre ici comment notre capacit imaginer l'avenir est un vritableobstacle au bonheur : la facult humaine qui nous permet de concevoir le temps dans son tendue se rvle eneffet une entrave, dans la mesure o elle nous fournit les moyens de ne pas considrer le prsent dans sa valeurpropre.

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    Nous ne nous tenons jamais au temps prsent. Nous anticipons l'avenir comme trop lent venir, comme pourhter son cours ; ou nous rappelons le pass, pour l'arrter comme trop prompt : si imprudents, que nous erronsdans les temps qui ne sont pas ntres, et ne pensons point au seul qui nous appartient ; et si vains, que noussongeons ceux qui ne sont plus rien, et chappons sans rflexion le seul qui subsiste. C'est que le prsent,d'ordinaire, nous blesse. Nous le cachons notre vue, parce qu'il nous afflige ; et s'il nous est agrable, nousregrettons de le voir chapper. Nous tchons de le soutenir par l'avenir, et pensons disposer les choses qui nesont pas en notre puissance, pour un temps o nous n'avons aucune assurance d'arriver.

    Que chacun examine ses penses, il les trouvera toutes occupes au pass et l'avenir. Nous ne pensons presquepoint au prsent ; et, si nous y pensons, ce n'est que pour en prendre la lumire pour disposer de l'avenir. Leprsent n'est jamais notre fin : le pass et le prsent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Ainsi nous nevivons jamais, mais nous esprons de vivre ; et, nous disposant toujours tre heureux, il est invitable que nousne le soyons jamais.

    2. La culture

    Le langage : Rousseau, Discours sur l'origine et les fondements de l'ingalit parmi les hommes(1775)

    Toute reprsentation sensible est singulire ; seule la notion (ou le concept) permet de dsigner une gnralit.Or, comme le rvle Rousseau dans ce texte, il est ncessaire, pour passer d'un objet particulier au concept, derecourir aux mots et la syntaxe. Ainsi, penser, c'est d'abord parler.

    D'ailleurs, les ides gnrales ne peuvent s'introduire dans l'esprit qu' l'aide des mots, et l'entendement ne lessaisit que par des propositions. C'est une des raisons pour quoi les animaux ne sauraient se former de telles ides,ni jamais acqurir la perfectibilit qui en dpend. Quand un singe va sans hsiter d'une noix l'autre, pense-t-onqu'il ait l'ide gnrale de cette sorte de fruit, et qu'il compare son archtype ces deux individus ? Non sansdoute ; mais la vue de l'une de ces noix rappelle sa mmoire les sensations qu'il a reues de l'autre, et ses yeux,modifis d'une certaine manire, annoncent son got la modification qu'il va recevoir. Toute ide gnrale estpurement intellectuelle ; pour peu que l'imagination s'en mle, l'ide devient aussitt particulire. Essayez de voustracer l'image d'un arbre en gnral, jamais vous n'en viendrez bout, malgr vous il faudra le voir petit ou grand,rare ou touffu, clair ou fonc, et s'il dpendait de vous de n'y voir que ce qui se trouve en tout arbre, cette image neressemblerait plus un arbre. Les tres purement abstraits se voient de mme, ou ne se conoivent que par lediscours. La dfinition seule du triangle nous en donne la vritable ide : sitt que vous en figurez un dans votreesprit, c'est un tel triangle et non pas un autre, et vous ne pouvez viter d'en rendre les lignes sensibles ou le plancolor. Il faut donc noncer des propositions, il faut donc parler pour avoir des ides gnrales ; car sitt quel'imagination s'arrte, l'esprit ne marche plus qu' l'aide du discours.

    L'art : Hegel, Esthtique I (1829)

    Dans cet essai consacr l'art, Hegel s'attache d'abord dtruire un certain nombre de prjugs : ainsi, celuiselon lequel la qualit de l'uvre d'art serait fonction de son degr d'imitation de la nature. Mais une uvre quise contenterait de copier au mieux une ralit existante ne serait qu'une occupation futile : ce n'est pas l que seloge l'essence de la cration artistique.

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    C'est un vieux prcepte que l'art doit imiter la nature ; on le trouve dj chez Aristote. Quand la rflexion n'en taitencore qu' ses dbuts, on pouvait bien se contenter d'une ide pareille ; elle contient toujours quelque chose qui sejustifie par de bonnes raisons et qui se rvlera nous comme un des moments de l'ide ayant, dans sondveloppement, sa place comme tant d'autres moments. D'aprs cette conception, le but essentiel de l'artconsisterait dans l'imitation, autrement dit dans la reproduction habile d'objets tels qu'ils existent dans la nature,et la ncessit d'une pareille reproduction faite en conformit avec la nature serait une source de plaisirs. Cettedfinition assigne l'art un but purement formel, celui de refaire une seconde fois, avec les moyens dont l'hommedispose, ce qui existe dans le monde extrieur, et tel qu'il y existe. Mais cette rptition peut apparatre comme uneoccupation oiseuse et superflue, car quel besoin avons-nous de revoir dans des tableaux ou sur la scne, desanimaux, des paysages ou des vnements humains que nous connaissons dj pour les avoir vus ou pour les voirdans nos jardins, dans nos intrieurs ou, dans certains cas, pour en avoir entendu parler par des personnes de nosconnaissances ? On peut mme dire que ces efforts inutiles se rduisent un jeu prsomptueux dont les rsultatsrestent toujours infrieurs ce que nous offre la nature. C'est que l'art, limit dans ses moyens d'expression, nepeut produire que des illusions unilatrales, offrir l'apparence de la ralit un seul de nos sens ; et, en fait,lorsqu'il ne va pas au-del de la simple imitation, il est incapable de nous donner l'impression d'une ralit vivanteou d'une vie relle : tout ce qu'il peut nous offrir, c'est une caricature de la vie (...) C'est ainsi que Zeuxis peignaitdes raisins qui avaient une apparence tellement naturelle que les pigeons s'y trompaient et venaient les picorer, etPraxeas peignit un rideau qui trompa un homme, le peintre lui-mme. On connat plus d'une de ces histoiresd'illusions cres par l'art. On parle dans ces cas, d'un triomphe de l'art. (...)

    On peut dire d'une faon gnrale qu'en voulant rivaliser avec la nature par l'imitation, l'art restera toujours au-dessous de la nature et pourra tre compar un ver faisant des efforts pour galer un lphant. Il y a des hommesqui savent imiter les trilles du rossignol, et Kant a dit ce propos que, ds que nous nous apercevons que c'est unhomme qui chante ainsi, et non un rossignol, nous trouvons ce chant insipide. Nous y voyons un simple artifice,non une libre production de la nature ou une uvre d'art. Le chant du rossignol nous rjouit naturellement, parceque nous entendons un animal, dans son inconscience naturelle, mettre des sons qui ressemblent l'expressionde sentiments humains. Ce qui nous rjouit donc ici c'est l'imitation de l'humain par la nature.

    Le travail et la technique : Marx, Le Capital, Livre I, 3e section, chapitre 7, 1 (1867)

    Loin que le travail permette de raliser les potentialits de l'individu, il a, du fait de l'avnement de l'industrie,renou avec son sens originaire d'instrument de torture. La consquence en est une perversion du travail, quin'est plus un but ni une expression de soi mais une alination. Marx montre que le travailleur est devenutranger lui-mme, plus proche de l'animalit que de l'humanit.

    La force de travail est donc une marchandise que son possesseur, le salari, vend au capital. Pourquoi la vend-il ?Pour vivre.

    Mais la manifestation de la force de travail, le travail, est l'activit vitale propre l'ouvrier, sa faon lui demanifester sa vie. Et c'est cette activit vitale qu'il vend un tiers pour s'assurer les moyens de subsistancencessaires. Son activit vitale n'est donc pour lui qu'un moyen de pouvoir exister. Il travaille pour vivre. Pour lui-mme, le travail n'est pas une partie de sa vie, il est plutt un sacrifice de sa vie. C'est une marchandise qu'il adjuge un tiers. C'est pourquoi le produit de son activit n'est pas non plus le but de son activit. Ce qu'il produit pourlui-mme, ce n'est pas la soie qu'il tisse, ce n'est pas l'or qu'il extrait du puits, ce n'est pas le palais qu'il btit. Cequ'il produit pour lui-mme, c'est le salaire, et la soie, l'or, le palais se rduisent pour lui une quantit dtermine

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    de moyens de subsistance, peut-tre un tricot de coton, de la menue monnaie et un logement dans une cave.Et l'ouvrier qui, douze heures durant, tisse, file, perce, tourne, btit, manie la pelle, taille la pierre, la transporte,etc., regarde-t-il ces douze heures de tissage, de filage, de perage, de travail au tour ou de maonnerie, demaniement de la pelle ou de taille de la pierre comme une manifestation de sa vie, comme sa vie ? Bien aucontraire. La vie commence pour lui o cesse l'activit, table, au bistrot, au lit. Par contre, les douze heures detravail n'ont nullement pour lui le sens de tisser, de filer, de percer, etc., mais celui de gagner ce qui lui permetd'aller table, au bistrot, au lit. Si le ver soie tissait pour subvenir son existence de chenille, il serait un salariachev.

    La religion : Nietzsche, L'Antchrist (1896)

    Dans ce texte extrmement critique, Nietzsche fait du christianisme un tissu de mensonges, une pure fiction quel'homme a cre pour chapper la souffrance que la ralit lui fait subir. Rcusant donc toute validit lareligion ou la morale chrtienne, Nietzsche condamne par-l l'homme lui-mme, auteur de ces inventions parcequ'il a t incapable de vivre autrement que dans le ressentiment et la frustration.

    Dans le christianisme, ni la morale, ni la religion ne touchent un point quelconque de la ralit. Rien que descauses imaginaires ("Dieu", "l'me", "moi", "esprit", "libre arbitre" ou mme l'arbitre qui n'est "pas libre") ; rienque des effets imaginaires ("le pch", "le salut", "la grce", "l'expiation", "le pardon des pchs"). Une relationimaginaire entre les tres ("Dieu", "les esprits", "l'me") ; une imaginaire science naturelle (anthropocentrique ; unmanque absolu du concept des causes naturelles) ; une psychologie imaginaire (rien que des malentendus, desinterprtations de sentiments gnraux agrables ou dsagrables, tel que les tats du grand sympathique, l'aidedu langage des signes d'idiosyncrasies religieuses et morales) ("le repentir", "la voix de la conscience", "latentation du diable", "la prsence de Dieu") ; une tlologie imaginaire ("le rgne de Dieu", "le jugement dernier","la vie ternelle").

    Ce monde de fictions pures se distingue trs son dsavantage du monde des rves, puisque celui-ci reflte laralit, tandis que l'autre la fausse, la dprcie et la nie. Aprs que le concept nature fut invent en tantqu'opposition au concept "Dieu", "naturel" devint quivalent "mprisable", tout ce monde de fictions a saracine dans la haine contre le naturel ( la ralit ! ). Elle est l'expression du profond dplaisir que cause laralit Mais ceci explique tout. Qui donc a seul des raisons pour sortir de la ralit par un mensonge ? Celuiqu'elle fait souffrir. Mais souffrir, dans ce cas-l, signifie tre soi-mme une ralit manque La prpondrancedu sentiment de peine sur le sentiment de plaisir est la cause de cette religion, de cette morale fictive : un tel excsdonne la formule pour la dcadence

    L'histoire : Ricur, Histoire et vrit (1955)

    L'opinion commune veut que les faits historiques soient donns au lecteur avec la plus grande objectivitpossible. Dans cet extrait, Ricur, sans s'opposer cette ide, rvle que l'objectivit de l'histoire se distinguetoutefois de celle des sciences dites "dures" : elle est en effet une objectivit sous-tendue par la subjectivit del'historien et par celle du lecteur par-l, elle devient vritablement une "histoire des hommes" ; sans cela, ellen'est qu'assemblage de faits.

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    Nous attendons de l'histoire une certaine objectivit, l'objectivit qui lui convient : c'est de l que nous devonspartir et non de l'autre terme. Or qu'attendons-nous sous ce titre ? L'objectivit ici doit tre prise en son senspistmologique strict : est objectif ce que la pense mthodique a labor, mis en ordre, compris et ce qu'elle peutainsi faire comprendre. Cela est vrai des sciences physiques, des sciences biologiques ; cela est vrai aussi del'histoire. Nous attendons par consquent de l'histoire qu'elle fasse accder le pass des socits humaines cettedignit de l'objectivit. Cela ne veut pas dire que cette objectivit soit celle de la physique ou de la biologie : il y aautant de niveaux d'objectivit qu'il y a de comportements mthodiques. Nous attendons donc que l'histoire ajouteune nouvelle province l'empire vari de l'objectivit.

    Cette attente en implique une autre : nous attendons de l'historien une certaine qualit de subjectivit, non pas unesubjectivit quelconque, mais une subjectivit qui soit prcisment approprie l'objectivit qui convient l'histoire. Il s'agit donc d'une subjectivit implique, implique par l'objectivit attendue. Nous pressentons parconsquent qu'il y a une bonne et une mauvaise subjectivit, et nous attendons un dpartage de la bonne et de lamauvaise subjectivit, par l'exercice mme du mtier d'historien.

    Ce n'est pas tout : sous le titre de subjectivit nous attendons quelque chose de plus grave que la bonne subjectivitde l'historien ; nous attendons que l'histoire soit une histoire des hommes et que cette histoire des hommes aide lelecteur, instruit par l'histoire des historiens, difier une subjectivit de haut rang, la subjectivit non seulementde moi-mme, mais de l'homme.

    Mais cet intrt, cette attente d'un passage par l'histoire de moi l'homme, n'est plus exactementpistmologique, mais proprement philosophique : car c'est bien une subjectivit de rflexion que nous attendonsde la lecture et de la mditation des uvres d'historien ; cet intrt ne concerne dj plus l'historien qui critl'histoire, mais le lecteur singulirement le lecteur philosophique , le lecteur en qui s'achve tout livre, touteuvre, ses risques et prils.

    3. La raison et le rel

    Thorie et exprience : Claude Bernard, Introduction l'tude de la mdecine exprimentale(1865)

    Pre de la mdecine exprimentale, Claude Bernard montre le lien ncessaire qui unit la thorie l'exprience.Une exprience sans thorie est aveugle puisqu'elle ne sait pas ce qu'elle doit voir. Une thorie sans expriencereste sourde, puisqu'elle ne se met pas l'coute de la ralit.

    Le savant complet est celui qui embrasse la fois la thorie et la pratique exprimentale. 1 Il constate un fait ; 2 propos de ce fait, une ide nat dans son esprit ; 3 en vue de cette ide, il raisonne, institue une exprience, enimagine et en ralise les conditions matrielles. 4 De cette exprience rsultent de nouveaux phnomnes qu'ilfaut observer, et ainsi de suite. L'esprit du savant se trouve en quelque sorte toujours plac entre deuxobservations : l'une qui sert de point de dpart au raisonnement, et l'autre qui lui sert de conclusion. ()

    L'observateur et l'exprimentateur rpondraient donc des phases diffrentes de la recherche exprimentale.L'observateur ne raisonne plus, il constate ; l'exprimentateur, au contraire, raisonne et se fonde sur les faitsacquis pour en imaginer et en provoquer rationnellement d'autres. Mais, si l'on peut, dans la thorie et d'une

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    manire abstraite, distinguer l'observateur de l'exprimentateur, il semble impossible dans la pratique de lessparer, puisque nous voyons que ncessairement le mme investigateur est alternativement observateur etexprimentateur. ()

    On voit donc que tous les termes de la mthode exprimentale sont solidaires les uns des autres. Les faits sont lesmatriaux ncessaires ; mais c'est leur mise en uvre par le raisonnement exprimental, c'est--dire la thorie, quiconstitue et difie vritablement la science. L'ide formule par les faits reprsente la science. L'hypothseexprimentale n'est que l'ide scientifique, prconue ou anticipe. La thorie n'est que l'ide scientifique contrlepar l'exprience.

    La dmonstration : Pascal, De l'esprit gomtrique (1658)

    Les expriences et thories scientifiques de Pascal sont encore reconnues aujourd'hui. Mais cette aura ne doit pasfaire oublier l'humilit qui devrait accompagner tout esprit scientifique ; en effet, il est impossible de toutdmontrer telle est la thse de Pascal. Le modle mathmatique est un langage formel qui ne peut rendreraison des principes sur lesquels pourtant il se fonde.

    Ces choses tant bien entendues, je reviens l'explication du vritable ordre, qui consiste, comme je disais, toutdfinir et tout prouver. Certainement cette mthode serait belle, mais elle est absolument impossible : car il estvident que les premiers termes qu'on voudrait dfinir, en supposeraient de prcdents pour servir leurexplication, et que de mme les premires propositions qu'on voudrait prouver en supposeraient d'autres qui lesprcdassent ; et ainsi il est clair qu'on n'arriverait jamais aux premires. Aussi, en poussant les recherches de plusen plus, on arrive ncessairement des mots primitifs qu'on ne peut plus dfinir, et des principes si clairs qu'onn'en trouve plus qui le soient davantage pour servir leur preuve. D'o il parat que les hommes sont dans uneimpuissance naturelle et immuable de traiter quelque science que ce soit dans un ordre absolument accompli. Maisil ne s'ensuit pas de l qu'on doive abandonner toute sorte d'ordre. Car il y en a un, et c'est celui de la gomtrie,qui est la vrit infrieur en ce qu'il est moins convaincant, mais non pas en ce qu'il est moins certain. Il nedfinit pas tout et ne prouve pas tout, et c'est en cela qu'il lui cde ; mais il ne suppose que des choses claires etconstantes par la lumire naturelle, et c'est pourquoi il est parfaitement vritable, la nature le soutenant au dfautdu discours. Cet ordre, le plus parfait entre les hommes, consiste non pas tout dfinir ou tout dmontrer, niaussi ne rien dfinir ou ne rien dmontrer, mais se tenir dans ce milieu de ne point dfinir les choses claires etentendues de tous les hommes, et de dfinir toutes les autres ; et de ne point prouver toutes les choses connues deshommes, et de prouver toutes les autres. Contre cet ordre pchent galement ceux qui entreprennent de toutdfinir et de tout prouver et ceux qui ngligent de le faire dans les choses qui ne sont pas videntes d'elles-mmes.

    L'interprtation : Dilthey, Introduction l'tude des sciences humaines (1883)

    La connaissance scientifique de la nature se fonde sur l'explication, c'est--dire la mise au jour des causes quiproduisent un effet. Cependant, l'application de ce type de savoir, affirme Dilthey, n'est pas adapte au mondehumain. Afin de comprendre les individus, il faut chercher interprter les actes de l'esprit, donner du sens leurs actions et leurs penses.

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    Les concordances que nous pouvons enregistrer dans le domaine social restent quant au nombre, la significationet la prcision, bien loin derrire celles que nous constatons dans la nature en partant de la base solide desrapports dans l'espace et des proprits du mouvement. Le mouvement des astres non seulement dans notresystme plantaire, mais mme celui d'toiles dont la lumire ne parvient nos yeux qu'aprs des annes et desannes se rvle soumis la loi, pourtant bien simple, de la gravitation, et nous pouvons le calculer longtemps l'avance. Les sciences sociales ne pourraient apporter l'intelligence de pareilles satisfactions. Les difficults quepose la connaissance d'une simple entit psychique se trouvent multiplies par la varit infinie, les caractressinguliers de ces entits, telles qu'elles agissent en commun dans la socit, de mme que par la complexit desconditions naturelles auxquelles leur action est lie, par l'addition des ractions qui s'amassent au cours denombreuses gnrations addition qui nous empche de dduire directement de la nature humaine, telle que nousla connaissons aujourd'hui, les traits qui taient propres des temps antrieurs, ou de dduire logiquement l'tatactuel de la socit de certains caractres gnraux de la nature humaine. Pourtant ces difficults se trouvent plusque compenses par une constatation de fait : moi qui, pour ainsi dire, vis du dedans ma propre vie, moi qui meconnais, moi qui suis un lment de l'organisme social, je sais que les autres lments de cet organisme sont dumme type que moi et que, par consquent, je puis me reprsenter leur vie interne. Je suis mme de comprendrela vie de la socit.

    Le vivant : Kant, Critique de la facult de juger (1790)

    Cherchant dterminer la spcificit de l'tre vivant, Kant l'oppose dans ce texte la machine : contrairement cette dernire, le vivant ne jouit pas seulement d'une force motrice mais aussi d'une force formatrice . D'autrepart, le vivant se distingue galement de l'art humain, dans la mesure o il s'organise de lui-mme, sansintervention d'aucun artiste extrieur.

    Dans une montre une partie est l'instrument du mouvement des autres, mais un rouage n'est pas la cause efficientede la production d'un autre rouage ; certes une partie existe pour une autre, mais ce n'est pas par cette autre partiequ'elle existe. C'est pourquoi la cause productrice de celles-ci et de leur forme n'est pas contenue dans la nature (decette matire), mais en dehors d'elle dans un tre, qui d'aprs des ides peut raliser un tout possible par sacausalit. C'est pourquoi aussi dans une montre un rouage ne peut en produire un autre et encore moins unemontre d'autres montres, en sorte qu' cet effet elle utiliserait (elle organiserait) d'autres matires ; c'est pourquoielle ne remplace pas d'elle-mme les parties, qui lui ont t tes, ni ne corrige leurs dfauts dans la premireformation par l'intervention des autres parties, ou se rpare elle-mme, lorsqu'elle est drgle : or tout cela nouspouvons en revanche l'attendre de la nature organise. Ainsi un tre organis n'est pas simplement machine, car lamachine possde uniquement une force motrice ; mais l'tre organis possde en soi une force formatrice qu'ilcommunique aux matriaux, qui ne la possdent pas (il les organise) : il s'agit ainsi d'une force formatrice qui sepropage et qui ne peut pas tre explique par la seule facult de mouvoir (le mcanisme).

    On dit trop peu de la nature et de son pouvoir pour des productions organises, quand on l'appelle un analogon del'art ; on imagine alors l'artiste (un tre raisonnable) en dehors d'elle. Elle s'organise au contraire elle-mme danschaque espce de ses produits organiss ; dans l'ensemble, il est vrai, d'aprs un mme modle, mais avec lesmodifications convenables exiges pour la conservation de soi-mme suivant les circonstances. (...) Pour parler entoute rigueur, l'organisation de la nature n'offre rien d'analogue avec une causalit quelconque nous connue. Labeaut de la nature peut juste titre tre nomme un analogon de l'art parce qu'elle n'est attribue aux objets qu'enrelation la rflexion sur l'intuition externe de ceux-ci, c'est--dire seulement en raison de la forme de leur surface.Mais la perfection naturelle interne, celle que possdent les choses, qui ne sont possibles que comme fins

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    naturelles et qui pour cette raison s'appellent tres organiss, ne peut tre pense et explique par aucune analogieavec un pouvoir physique quelconque connu de nous, c'est--dire un pouvoir naturel, et puisque nous apparentonsnous-mmes la nature au sens large, elle ne peut mme pas l'tre d'aprs une analogie exactement proportionneavec l'art humain.

    La matire et l'esprit : Merleau-Ponty, Signes (1960)

    Merleau-Ponty expose dans cet extrait la rvolution qui s'est opre au XXe sicle dans la conception du corps etsurtout dans la relation entre corps et esprit. Souscrivant cette ide selon laquelle le corps n'est pas la "prison"de l'me (Platon), Merleau-Ponty met bas le dualisme et propose pour dire l'entrelacs de la matire et del'esprit la notion de "chair".

    Notre sicle a effac la ligne de partage du "corps" et de l'"esprit" et voit la vie humaine comme spirituelle etcorporelle de part en part, toujours appuye au corps, toujours intresse, jusque dans ses modes les plus charnels,au rapport des personnes. Pour beaucoup de penseurs, la fin du XIXe sicle, le corps, c'tait un morceau dematire, un faisceau de mcanismes. Le XXe sicle a restaur et approfondi la notion de la chair, c'est--dire ducorps anim.

    Il serait intressant de suivre, dans la psychanalyse par exemple, le passage d'une conception du corps qui taitinitialement, chez Freud, celle des mdecins du XIXe sicle, la notion moderne du corps vcu. Au point dedpart, la psychanalyse ne prenait-elle pas la suite des philosophies mcanistes du corps, et n'est-ce pas ainsiqu'on la comprend encore souvent ? le systme freudien n'explique-t-il pas les conduites les plus complexes et lesplus labores de l'homme adulte par l'instinct et en particulier l'instinct sexuel, par les conditionsphysiologiques par une composition de forces qui est hors des prises de notre conscience ou qui mme s'estralise une fois pour toutes dans l'enfance, avant l'ge du contrle rationnel et du rapport proprement humainavec la culture et avec autrui ? Telle tait peut-tre l'apparence dans les premiers travaux de Freud, et pour unlecteur press ; mais mesure que la psychanalyse, chez lui-mme et chez ses successeurs, rectifie ces notionsinitiales au contact de l'exprience clinique, on voit paratre une notion nouvelle du corps qui tait appele par lesnotions de dpart.

    La vrit : Bachelard, La Formation de l'esprit scientifique (1938)

    noncer une opinion est gnralement reconnu comme un signe de savoir et d'engagement. Or, Bachelard rfutetoute validit l'opinion en matire de science : il affirme qu'il faut mme la combattre chaque instant afind'approcher une quelconque vrit. Contrairement l'opinion qui affirme, la science doit, pour tre elle-mme,interroger.

    La science, dans son besoin d'achvement comme dans son principe, s'oppose absolument l'opinion. S'il luiarrive, sur un point particulier, de lgitimer l'opinion, c'est pour d'autres raisons que celles qui fondent l'opinion ;de sorte que l'opinion a, en droit, toujours tort. L'opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins enconnaissances. En dsignant les objets par leur utilit, elle s'interdit de les connatre. On ne peut rien fonder surl'opinion : il faut d'abord la dtruire. Elle est le premier obstacle surmonter. Il ne suffirait pas par exemple, de larectifier sur des points particuliers, en maintenant, comme une sorte de morale provisoire, une connaissancevulgaire provisoire. L'esprit scientifique nous interdit d'avoir une opinion sur des questions que nous ne

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    comprenons pas, sur des questions que nous ne savons pas formuler clairement. Avant tout, il faut savoir poser desproblmes. Et quoi qu'on dise, dans la vie scientifique, les problmes ne se posent pas d'eux-mmes. C'estprcisment ce sens du problme qui donne la marque du vritable esprit scientifique. Pour un esprit scientifique,toute connaissance est une rponse une question. S'il n'y a pas eu de question, il ne peut y avoir connaissancescientifique. Rien ne va de soi. Rien n'est donn. Tout est construit.

    4. La politique

    La socit : Hobbes, Du Citoyen (1642)

    Si la socit peut tre l'objet de critiques htives, c'est qu'on oublie les bienfaits primordiaux qu'elle apporte.Selon Hobbes, hors de la socit, la libert reste strile puisqu'elle ne peut se dployer au sein d'une violencediffuse.

    Il est vrai que hors de la socit civile chacun jouit d'une libert trs entire, mais qui est infructueuse, parce quecomme elle donne le privilge de faire tout ce que bon nous semble, aussi elle laisse aux autres la puissance denous faire souffrir tout ce qu'il leur plat. Mais dans le gouvernement d'un tat bien tabli, chaque particulier ne serserve qu'autant de libert qu'il lui en faut pour vivre commodment, et en une parfaite tranquillit, comme onn'en te aux autres que ce dont ils seraient craindre. Hors de la socit, chacun a tellement droit sur touteschoses, qu'il ne s'en peut prvaloir et n'a la possession d'aucune ; mais dans la rpublique, chacun jouitpaisiblement de son droit particulier. Hors de la socit civile, ce n'est qu'un continuel brigandage et on est expos la violence de tous ceux qui voudront nous ter les biens et la vie ; mais dans l'tat, cette puissance n'appartientqu' un seul. Hors du commerce des hommes, nous n'avons que nos propres forces qui nous servent de protection,mais dans une ville, nous recevons le secours de tous nos concitoyens. Hors de la socit, l'adresse et l'industriesont de nul fruit : mais dans un tat, rien ne manque ceux qui s'vertuent. Enfin, hors de la socit civile, lespassions rgnent, la guerre est ternelle, la pauvret est insurmontable, la crainte ne nous abandonne jamais, leshorreurs de la solitude nous perscutent, la misre nous accable, la barbarie, l'ignorance et la brutalit nous tenttoutes les douceurs de la vie ; mais dans l'ordre du gouvernement, la raison exerce son empire, la paix revient aumonde, la sret publique est rtablie, les richesses abondent, on gote les charmes de la conversation, on voitressusciter les arts, fleurir les sciences, la biensance est rendue toutes nos actions et nous ne vivons plusignorants des lois de l'amiti.

    La justice et le droit : Rousseau, Du Contrat social (1762)

    "La raison du plus fort est toujours la meilleure" dit La Fontaine dans Le Loup et l'Agneau. Reprenantl'expression clbre de "droit du plus fort", Rousseau la dtruit en rvlant son inanit : le plus fort n'a nul besoind'un droit qui le protgerait, et celui qui veut associer le droit la force ne montre rien d'autre que sa prcarit.

    Le plus fort n'est jamais assez fort pour tre toujours le matre, s'il ne transforme sa force en droit, et l'obissanceen devoir. De l le droit du plus fort ; droit pris ironiquement en apparence, et rellement tabli en principe. Maisne nous expliquera-t-on jamais ce mot ? La force est une puissance physique ; je ne vois point quelle moralit peutrsulter de ses effets. Cder la force est un acte de ncessit, non de volont ; c'est tout au plus un acte deprudence. En quel sens pourra-ce tre un devoir ? Supposons un moment ce prtendu droit. Je dis qu'il n'enrsulte qu'un galimatias inexplicable ; car, sitt que c'est la force qui fait le droit, l'effet change avec la cause : touteforce qui surmonte la premire succde son droit. Sitt qu'on peut dsobir impunment, on le peut

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    lgitimement ; et, puisque le plus fort a toujours raison, il ne s'agit que de faire en sorte qu'on soit le plus fort. Or,qu'est-ce qu'un droit qui prit quand la force cesse ? S'il faut obir par force, on n'a pas besoin d'obir par devoir ;et si l'on n'est plus forc d'obir, on n'y est plus oblig. On voit donc que ce mot de droit n'ajoute rien la force ; ilne signifie ici rien du tout. Obissez aux puissances. Si cela veut dire : Cdez la force, le prcepte est bon, maissuperflu ; je rponds qu'il ne sera jamais viol. Toute puissance vient de Dieu, je l'avoue ; mais toute maladie envient aussi : est-ce dire qu'il soit dfendu d'appeler le mdecin ? Qu'un brigand me surprenne au coin d'un bois,non seulement il faut par force donner sa bourse ; mais, quand je pourrais la soustraire, suis-je en conscienceoblig de la donner ? Car, enfin, le pistolet qu'il tient est une puissance. Convenons donc que force ne fait pas droit,et qu'on n'est oblig d'obir qu'aux puissances lgitimes.

    L'tat : Montesquieu, De l'Esprit des Lois, Livre III, chapitre 9 (1748)

    S'interrogeant sur les diffrents types de gouvernement, Montesquieu prsente ici le despotisme et cherche enanalyser le fonctionnement. En montrant que la crainte est le principe mme du rgime despotique, il souligne la fois sa force et sa fragilit, et prouve (s'opposant ainsi par avance aux philosophes des Lumires) qu'il nesaurait exister de "despotisme clair".

    Comme il faut de la vertu dans une rpublique, et dans une monarchie, de l'honneur, il faut de la CRAINTE dansun gouvernement despotique : pour la vertu, elle n'y est point ncessaire, et l'honneur y serait dangereux.Le pouvoir immense du prince y passe tout entier ceux qui il le confie. Des gens capables de s'estimer beaucoupeux-mmes seraient en tat d'y faire des rvolutions. Il faut donc que la crainte y abatte tous les courages, et yteigne jusqu'au moindre sentiment d'ambition.

    Un gouvernement modr peut, tant qu'il veut, et sans pril, relcher ses ressorts. Il se maintient par ses lois et parsa force mme. Mais lorsque, dans le gouvernement despotique, le prince cesse un moment de lever le bras ; quandil ne peut pas anantir l'instant ceux qui ont les premires places, tout est perdu : car le ressort du gouvernement,qui est la crainte, n'y tant plus, le peuple n'a plus de protecteur.C'est apparemment dans ce sens que des cadis ont soutenu que le grand seigneur n'tait point oblig de tenir saparole ou son serment, lorsqu'il bornait par l son autorit.

    Il faut que le peuple soit jug par les lois, et les grands par la fantaisie du prince ; que la tte du dernier sujet soit ensret, et celle des bachas toujours expose. On ne peut parler sans frmir de ces gouvernements monstrueux. Lesophi de Perse, dtrn de nos jours par Mirivis, vit le gouvernement prir avant la conqute, parce qu'il n'avaitpas vers assez de sang.

    L'histoire nous dit que les horribles cruauts de Domitien effrayrent les gouverneurs, au point que le peuple sertablit un peu sous son rgne. C'est ainsi qu'un torrent, qui ravage tout d'un ct, laisse de l'autre des campagneso l'il voit de loin quelques prairies.

    5. La morale

    La libert : Sartre, Cahiers pour une morale (1947)

    Sartre connat ds 1939 un succs la fois philosophique et littraire : le roman La Nause, tout comme l'essaiL'tre et le nant, l'imposent rapidement comme une figure essentielle du XXe sicle. Dans cet extrait, il montrepar un exemple choquant que rien de ce qui advient l'homme ne lui te sa libert ; s'opposant radicalement au

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    dterminisme tel qu'il est entendu traditionnellement, l'existentialisme pose en effet l'essence de l'homme commelibert inalinable.

    Me voil tuberculeux par exemple. Ici apparat la maldiction (et la grandeur). Cette maladie, qui m'infecte,m'affaiblit, me change, limite brusquement mes possibilits et mes horizons. J'tais acteur ou sportif ; avec mesdeux pneumos, je ne puis plus l'tre. Ainsi ngativement je suis dcharg de toute responsabilit touchant cespossibilits que le cours du monde vient de m'ter. C'est ce que le langage populaire nomme tre diminu. Et cemot semble recouvrir une image correcte : j'tais un bouquet de possibilits, on te quelques fleurs, le bouquetreste dans le vase, diminu, rduit quelques lments.

    Mais en ralit il n'en est rien : cette image est mcanique. La situation nouvelle quoique venue du dehors doit trevcue, c'est--dire assume, dans un dpassement. Il est vrai de dire qu'on m'te ces possibilits mais il est aussivrai de dire que j'y renonce ou que je m'y cramponne ou que je ne veux pas voir qu'elles me sont tes ou que je mesoumets un rgime systmatique pour les reconqurir. En un mot ces possibilits sont non pas supprimes maisremplaces par un choix d'attitudes possibles envers la disparition de ces possibilits.

    Et d'autre part surgissent avec mon tat nouveau des possibilits nouvelles : possibilits l'gard de ma maladie(tre un bon ou un mauvais malade), possibilits vis--vis de ma condition (gagner tout de mme ma vie, etc.), unmalade ne possde ni plus ni moins de possibilits, qu'un bien portant ; il a son ventail de possibles comme l'autreet il a dcider sur sa situation, c'est--dire assumer sa condition de malade pour la dpasser (vers la gurison ouvers une vie humaine de malade avec de nouveaux horizons).

    Autrement dit, la maladie est une condition l'intrieur de laquelle l'homme est de nouveau libre et sans excuses.Il a prendre la responsabilit de sa maladie. Sa maladie est une excuse pour ne pas raliser ses possibilits denon-malade mais elle n'en est pas une pour ses possibilits de malade qui sont aussi nombreuses...

    Ainsi suis-je sans repos : toujours transform, min, lamin, ruin du dehors et toujours libre, toujours oblig dereprendre mon compte, de prendre la responsabilit de ce dont je ne suis pas responsable. Totalement dterminet totalement libre. Oblig d'assumer ce dterminisme pour poser au-del les buts de ma libert, de faire de cedterminisme un engagement de plus.

    Le devoir : Kant, Fondements de la mtaphysique des murs, 1785

    Penser qu'on accomplit un devoir quand on escompte en tirer du mrite est une posture commune que Kantrcuse pourtant. En effet, agir en vue d'un quelconque mrite, c'est ne plus agir simplement par devoir, demanire dsintresse, mais pour une rcompense : Kant explique ainsi la tendance des moralistes (du

    xviie sicle par exemple) nier l'existence d'actions effectues selon le pur devoir.

    Si nous avons tir jusqu'ici notre concept du devoir de l'usage commun de la raison pratique, il n'en faut nullementconclure que nous l'ayons trait comme un concept empirique. Loin de l, si nous appliquons notre attention l'exprience de la conduite des hommes, nous nous trouvons en prsence de plaintes continuelles et, nousl'avouons nous-mmes, lgitimes, sur ce fait qu'il n'y a point d'exemples certains que l'on puisse rapporter del'intention d'agir par devoir, que mainte action peut tre ralise conformment ce que le devoir ordonne, sansqu'il cesse pour cela d'tre encore douteux qu'elle soit ralise par devoir et ainsi qu'elle ait une valeur morale.Voil pourquoi il y a eu en tout temps des philosophes qui ont absolument ni la ralit de cette intention dans lesactions humaines et qui ont tout attribu l'amour-propre plus ou moins raffin ; ils ne mettaient pas en doute

  • 14-06-30 23:57Bac philo : les 20 textes qu'il faut avoir lus pour s'en sortir - Le Nouvel Observateur

    Page 16 sur 16http://tempsreel.nouvelobs.com/bac-2014/20140605.OBS9658/bac-philo-les-20-textes-qu-il-faut-avoir-lus-pour-s-en-sortir.html#Hobbes4

    pour cela la justesse du concept de moralit ; ils parlaient au contraire avec une sincre affliction de l'infirmit etde l'impuret de la nature humaine, assez noble, il est vrai, suivant eux, pour faire sa rgle d'une ide si digne derespect, mais en mme temps trop faible pour la suivre, n'usant de la raison qui devrait servir lui donner sa foique pour prendre souci de l'intrt des inclinations, soit de quelques-unes d'entre elles, soit, si l'on met les chosesau mieux, de toutes, en les conciliant entre elles le mieux possible.

    Le bonheur : pictte (vers 50 vers 130), Manuel

    Attendre que le bonheur vienne de l'extrieur, c'est tout faire pour se rendre malheureux. l'inverse, commel'affirme ici pictte, c'est en tant matre de soi sans vouloir ce qui nous chappe que nous pouvons trouver lebonheur

    Manuel I1. Parmi les choses qui existent, certaines dpendent de nous, d'autres non. De nous, dpendent la pense,l'impulsion, le dsir, l'aversion, bref, tout ce en quoi c'est nous qui agissons ; ne dpendent pas de nous le corps,l'argent, la rputation, les charges publiques, tout ce en quoi ce n'est pas nous qui agissons. 2. Ce qui dpend denous est libre naturellement, ne connat ni obstacles ni entraves ; ce qui n'en dpend pas est faible, esclave, exposaux obstacles et nous est tranger. 3. Donc, rappelle-toi que si tu tiens pour libre ce qui est naturellement esclaveet pour un bien propre ce qui t'est tranger, tu vivras contrari, chagrin, tourment ; tu en voudras aux hommescomme aux dieux ; mais si tu ne juges tien que ce qui l'est vraiment et tout le reste tranger , jamais personnene saura te contraindre ni te barrer la route ; tu ne t'en prendras personne, n'accuseras personne, ne feras jamaisrien contre ton gr, personne ne pourra te faire de mal et tu n'auras pas d'ennemi puisqu'on ne t'obligera jamais rien qui pour toi soit mauvais.

    Manuel VCe qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, ce sont les jugements qu'ils portent sur les choses. Ainsi lamort n'a rien de redoutable, autrement elle aurait paru telle Socrate ; mais le jugement que la mort estredoutable, c'est l ce qui est redoutable. Ainsi donc quand nous sommes contraris, troubls ou peins, n'enaccusons jamais d'autres que nous-mme, c'est--dire nos propres jugements. Il est d'un ignorant de s'en prendre d'autres de ses malheurs ; il est d'un homme qui commence s'instruire de s'en prendre lui-mme ; il est d'unhomme compltement instruit de ne s'en prendre ni un autre ni lui-mme.

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