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RÉPUBLIQUE D'HAÏTI BUREAU DU PREMIER MINISTRE Unité d'Appui à la Réforme Administrative PROGRAMME DES NATIONS UNIES POUR LE DEVELOPPEMENT Projet HAI/00/003 - Gouvernance et Décentralisation Octobre 2002 VERS UNE POLITIQUE NATIONALE DE DÉCENTRALISATION : SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DE LA CNRA

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RÉPUBLIQUE D'HAÏTI

BUREAU DU PREMIER MINISTRE Unité d'Appui à la Réforme Administrative

PROGRAMME DES NATIONS UNIES POUR LE DEVELOPPEMENT

Projet HAI/00/003 - Gouvernance et Décentralisation Octobre 2002

VERS UNE POLITIQUE NATIONALE DE DÉCENTRALISATION :

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DE LA CNRA

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VERS UNE POLITIQUE NATIONALE DE DÉCENTRALISATION : SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DE LA CNRA

Ce document a été préparé par Robert Denizé, consultant, sous la supervision de Antoine Ambroise, conseiller technique principal du Projet Gouvernance et Décentralisation – HAI/00/003.

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VERS UNE POLITIQUE DE DÉCENTRALISATION : SYNTHESE DES PROPOSITIONS DE LA CNRA

Table des Matières

INTRODUCTION ....................................................................................................... 5

1.- LE MODÈLE CONSTITUTIONNEL DE DÉCENTRALISATION ......................... 7 1.1.-L’organisation des Collectivités Territoriales ....................................................7 1.2.-Le rôle des Collectivités Territoriales................................................................8 1.3.-Les rapports entre l’État et les Collectivités Territoriales .................................8 1.4.-L’organisation d’institutions nationales liées à la décentralisation ...................9

2.- LE STATUT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES.................................... 10 2.1.-Le statut selon la Constitution.........................................................................10 2.2.-Les attributs de la personnalité morale et de l’autonomie ..............................10 2.3.-Les implications du statut ...............................................................................11 2.4.-Les propositions..............................................................................................12

3.- L’ORGANISATION TERRITORIALE ................................................................ 13 3.1.-Le cadre établi par la Constitution ..................................................................13 3.2.-Le découpage déterminé par la loi .................................................................15 3.3.-Les écarts entre la législation sur le découpage et la Constitution ................16 3.4.-L’inadéquation de la plupart des territoires avec le rôle des institutions........18 3.5.-Les propositions..............................................................................................19

4.- L’ORGANISATION POLITIQUE ....................................................................... 22 4.1.-Les dispositions constitutionnelles..................................................................23 4.2.-Les modalités de constitution des organes ....................................................24

4.2.1.- La composition des organes ..................................................................24 4.2.2.- Les modalités d’élection.........................................................................26 4.2.3.- La durée des mandats ...........................................................................28 4.2.4.- Les conditions d’éligibilité.......................................................................28 4.2.5.- Les incompatibilités ................................................................................29

TABLE DES MATIERES

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4.3.-Le fonctionnement des Collectivités Territoriales...........................................30 4.3.1.- Les modalités de prise de décision ........................................................30 4.3.2.- Les rapports entre le Conseil et l’Assemblée d’une Collectivité ............31 4.3.3.- Les rapports entre les Assemblées et leur représentant ......................32 4.3.4.- Les rapports entre Conseils et Assemblées de Collectivités de catégories différentes .........................................................................................33 4.3.5.- Les autres rapports entre les Collectivités Territoriales.........................34

5.- LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES ........................................................... 35 5.1.-Les vocations générales .................................................................................35 5.2.-Les vocations spécifiques...............................................................................35 5.3.-Le cadre du partage de compétences ............................................................39 5.4.-Les propositions de domaines de compétence ..............................................40 5.5.-Les critères de détermination des compétences spécifiques.........................41 5.6.-Les conditions de succès de la mise en œuvre..............................................42

6.- L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE ............................................................ 43

7.- LES FINANCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ............................. 44 7.1.-La fiscalité communale ...................................................................................44 7.2.-Les subventions de l’État ................................................................................46 7.3.-Les dépenses..................................................................................................48 7.4.-Les propositions..............................................................................................48

CONCLUSION......................................................................................................... 52

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE................................................................................ 54

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INTRODUCTION

La Commission Nationale à la Réforme Administrative a présenté un ensemble de propositions concernant la décentralisation dans divers documents préparés dans le cadre de son mandat d'élaborer une proposition de politique de décentralisation. Ces propositions visent, pour l’essentiel, la mise à disposition des éléments nécessaires à la finalisation du cadre légal et administratif des Collectivités Territoriales et de leurs rapports avec l’État. D’autres propositions concernent, de plus, certains aspects du cadre général de l'action publique ainsi que des réformes parallèles à entreprendre au niveau de l’État.

La Constitution de 1987 n’a, en effet, que partiellement défini le cadre

institutionnel des Collectivités Territoriales. Cependant, l’adoption des dispositions légales complémentaires nécessaires à la mise en place et au fonctionnement effectifs des institutions locales n’est toujours pas réalisée. La mise à jour des textes sur les Collectivités Territoriales antérieurs à 1987 se fait encore attendre et certaines des dispositions légales promulguées après 1987 font l’objet de nombreuses contestations, y compris du point de vue de leur constitutionnalité.

Malgré la tenue d’élections locales et l’installation des Conseils Municipaux et de

Section Communale, et malgré les prises de position réitérées des autorités en faveur de la décentralisation, la situation a très peu changé en ce qui concerne les aspects essentiels de l’organisation politico-administrative du pays et du fonctionnement des institutions. La contribution des Collectivités Territoriales à l’action publique demeure insignifiante, et, comme par le passé, l’État dispose de l’essentiel des ressources et moyens publics et exerce directement les responsabilités qui devraient relever des institutions locales. En même temps, l’existence des Collectivités créées par la Constitution de 1987 demeure quasi-virtuelle. Même les Communes, dont l’existence est déjà ancienne (1843), ne disposent que de ressources dérisoires et ne sont dotées que de compétences réduites, dont l'exercice est de plus, dans la pratique, limité à leur chef-lieu.

En fait, les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la décentralisation ont été,

jusqu’à présent, peu significatifs, et la plupart des actions nécessaires à la concrétisation des prescrits constitutionnels en la matière restent encore à entreprendre. En effet :

• les Collectivités Territoriales n’ont jamais encore toutes effectivement

fonctionné ; • le cadre légal, juridique et administratif devant régir l’organisation et le

fonctionnement de ces institutions n’est encore que partiellement établi ;

INTRODUCTION

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• les changements parallèles, prévus par la Constitution, dans le rôle, l’organisation et le fonctionnement d’institutions nationales n’ont pas encore été initiés ;

• les études et autres travaux nécessaires à l’élaboration de l’ensemble des

réformes liées à la décentralisation ne sont que très partiellement entamés.

Dans le cadre de son mandat sur la décentralisation, la CNRA a donc du, d’abord, concentrer ses activités sur la préparation de propositions concernant les éléments nécessaires à l’élaboration de dispositions légales et administratives devant permettre d’assurer, à la fois : l’application des dispositions constitutionnelles ; la mise en place, l’organisation et le fonctionnement effectifs des Collectivités Territoriales ; l’implantation de la démocratie au niveau local ainsi que la prise en charge locale de certains services publics et de préparer ainsi l’enclenchement du processus de décentralisation.

Le temps imparti et les moyens alloués n’ont cependant pas permis à la CNRA de mener à leur terme l’ensemble des tâches prévues avant l'expiration de son mandat en mars 2002. Des études complémentaires seront, par conséquent, nécessaires pour finaliser les travaux encore inachevés. L'élaboration d'une synthèse des propositions présentées par la CNRA a donc été décidée en vue de faire le point sur les acquis disponibles et de préparer une reprise éventuelle des activités d'appui à la décentralisation.

Cette synthèse a été réalisée à partir du rapport publié en décembre 2001 (Haïti face à la décentralisation, rapport de diagnostic et cadre d’orientation stratégique en vue de la définition de politiques publiques), d'une série de sept documents de travail publiés en mars 2002, ainsi que de divers rapports et documents internes.

Ce texte, présente donc les principales conclusions et propositions de la CNRA

concernant le modèle de décentralisation établi par la Constitution de 1987 ; la mise en place et le fonctionnement des institutions locales ; ainsi que les changements à entreprendre au niveau de l'Etat, particulièrement en ce qui concerne le statut, les vocations et compétences, l'organisation territoriale, politique et administrative ainsi que les finances des Collectivités Territoriales.

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1.- LE MODÈLE CONSTITUTIONNEL DE DÉCENTRALISATION

La Constitution n’a que partiellement établi le cadre institutionnel des Collectivités Territoriales, laissant ainsi à la loi la tâche d’apporter les précisions complémentaires nécessaires à la mise en place, à l’organisation et au fonctionnement de ces institutions. L’ensemble des dispositions constitutionnelles définit déjà cependant un modèle spécifique de décentralisation dont les principaux traits peuvent être brièvement présentés.

L’existence de trois catégories de Collectivités Territoriales (le Département, la Commune et la Section Communale) constitue la première caractéristique du modèle constitutionnel qui établit ainsi trois paliers distincts de représentation politique, de décision et de gestion des affaires publiques locales. La personnalité morale et l'autonomie sont aussi, explicitement ou implicitement, octroyées à ces Collectivités qui, de plus, peuvent bénéficier de monopoles légaux établis dans l’intérêt de la société et peuvent aussi entrer en litige avec l’État.

Les dispositions de la Constitution traitent aussi de l’organisation des Collectivités Territoriales, de leur rôle, de leurs rapports avec l’État ainsi que de certains aspects de l’organisation d’institutions nationales qui font partie intégrante du modèle de décentralisation.

1.1.-L’organisation des Collectivités Territoriales

Le cadre organisationnel des Collectivités Territoriales est ainsi caractérisé par : • Une organisation territoriale hiérarchisée, établie sur une base exclusivement

territoriale et partiellement confondue avec celle de l’État, avec : o la définition des Collectivités Territoriales à partir des divisions territoriales

instituées par la Constitution ; o l’emboîtement territorial de ces Collectivités ; o l’établissement de certaines correspondances directes entre les territoires

des Collectivités Territoriales et ceux de circonscriptions électorales, de divisions administratives et de circonscriptions de représentation de l’Exécutif.

• Une organisation politique démocratique basée sur :

o la présence au sein de chaque Collectivité Territoriale, d’un organe exécutif, le Conseil et d’un organe délibératif, l’Assemblée, généralement élus directement ou indirectement, mais dont la composition et les modalités de constitution ne sont pas toutes établies ;

o l’existence d’un organe de représentation des Départements, le Conseil Interdépartemental ;

o l’organisation de la représentation politique au sein du CID et des organes des Collectivités sur une base essentiellement territoriale.

LE MODÈLE CONSTITUTIONNEL DE DÉCENTRALISATION

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• L’intégration des Collectivités Territoriales au niveau décisionnel avec à la fois : o la représentation de chaque Collectivité dans l’Assemblée de la

Collectivité de niveau territorial immédiatement supérieur, les Départements étant représentés au CID ; et, de ce fait,

o l’intégration de l’ensemble des Collectivités Territoriales dans un dispositif politico-administratif et décisionnel représenté au niveau national par le CID.

1.2.-Le rôle des Collectivités Territoriales

Les dispositions constitutionnelles précisent aussi certains aspects du rôle des Collectivités Territoriales aux niveaux local et national :

• Des vocations et des missions différenciées selon les catégories de Collectivités Territoriales peuvent ainsi être déduites des dispositions constitutionnelles portant, entre autres, sur le statut, la composition des organes ainsi que certaines compétences de ces Collectivités, qui ont pour effet d’attribuer implicitement : o des fonctions essentiellement politiques, stratégiques et décisionnelles au

Département ; o des responsabilités principalement opérationnelles à la Commune ; o des fonctions de représentation et de défense des intérêts de la

population à la Section Communale.

• La participation des Collectivités Territoriales à la prise de décisions au niveau national est aussi établie en ce qui concerne : o la nomination de membres d’institutions nationales sur la base de

propositions soumises par les Départements (Conseil Electoral Permanent, Tribunaux d’Appel et de Première Instance) et les Communes (Tribunaux de Paix) ;

o la participation du CID, avec voix délibérative, aux séances du Conseil des Ministres portant sur les projets de décentralisation et de développement du pays ;

o l’assistance à apporter par le CID au Conseil des Ministres pour l’élaboration de lois portant sur les allocations de ressources et de moyens aux Collectivités Territoriales.

1.3.-Les rapports entre l’État et les Collectivités Territoriales La Constitution définit aussi certains aspects du cadre devant régir les rapports

entre l’État et les Collectivités Territoriales :

LE MODÈLE CONSTITUTIONNEL DE DÉCENTRALISATION

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• Des compétences partagées entre l’État et les Collectivités Territoriales dans le domaine de l’éducation et de l’alphabétisation ainsi qu’entre l’État et les Communes, pour l’enseignement agricole, professionnel, coopératif et technique de même que pour la gestion des biens fonciers du domaine privé de l’État sont ainsi stipulées.

• Des obligations de l’État envers les Collectivités Territoriales sont aussi

précisées, en ce qui concerne l’allocation de ressources à ces dernières, ainsi que l’assistance technique à fournir aux Communes par l’Administration Centrale qui doit aussi collaborer à l’élaboration des Plans de Développement des Départements.

• Le contrôle de l’État sur les Collectivités Territoriales est confié à la Cour

Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif qui exerce les principales responsabilités décisionnelles en la matière.

1.4.-L’organisation d’institutions nationales liées à la décentralisation Certains aspects de l’organisation et des structures d’institutions nationales ne

peuvent, cependant, être dissociés du modèle constitutionnel de décentralisation : • L’organisation de la représentation territoriale du Pouvoir Exécutif, définie

avec la nomination de représentants de l’Exécutif (Délégués et Vice-Délégués) chargés d’assurer la coordination et le contrôle des services publics dans les Départements et les Arrondissements, établit, non seulement, les premières modalités d’organisation de la prise en charge par l’État de ses responsabilités fondamentales mais aussi celles du cadre devant structurer les rapports entre l’Exécutif et les Collectivités Territoriales.

• La déconcentration des services publics, avec délégation de pouvoir, qui doit

accompagner la décentralisation et répondre à l’obligation faite à l’État d’étendre ses services sur toute l’étendue du territoire national, devra être effectuée sur la base des divisions administratives établies par la Constitution et déterminera ainsi le cadre des rapports entre l’Administration Publique et les Collectivités Territoriales.

• L’établissement de deux paliers territoriaux de l’organisation du système

judiciaire, le Département et la Commune, est déterminé, implicitement, par la participation des Assemblées Départementales à la nomination des juges des Tribunaux de Première Instance et d'Appel et des Assemblées Municipales à la nomination des juges des Tribunaux de Paix.

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2.- LE STATUT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES Le pouvoir de décision et d’intervention des Collectivités Territoriales, de même

que les modalités d’exercice de leurs compétences ou le type de rapports qu’elles peuvent entretenir avec d’autres institutions publiques, sont largement déterminés par leur statut juridique, qui est établi, d’abord, par la Constitution.

2.1.-Le statut selon la Constitution

La personnalité morale et l’autonomie ont été, en effet, explicitement ou implicitement, accordées à toutes les catégories de Collectivités Territoriales par la Constitution de 1987. Le Département a été ainsi doté, explicitement, de la personnalité morale et de l’autonomie tandis que la Commune bénéficie implicitement de ce statut, la Constitution lui ayant octroyé l’autonomie administrative et financière, dont l’exercice requiert la personnalité morale. La Section Communale est classée parmi les Collectivités Territoriales par la Constitution qui reste cependant muette sur son statut.

Les dispositions constitutionnelles accordent aussi aux Collectivités Territoriales

le droit de disposer de monopoles d’intérêt public et prévoient la possibilité de litiges entre l’État et ces dernières. En tant que Collectivité Territoriale, la Section Communale se voit donc accorder ces mêmes prérogatives, mais ne pourrait cependant les exercer sans la personnalité morale et l’autonomie qui lui sont, de ce fait, implicitement octroyées. D’ailleurs, la question de l’utilité de la création d’une catégorie de Collectivités Territoriales avec deux organes et des élus au suffrage universel direct, mais sans statut juridique pourrait aussi être posée…

En fait, la loi du 28 mars 1996 sur l’organisation de la Section Communale lui a

déjà accordé la personnalité morale et l’autonomie, mais la constitutionnalité de cette disposition a été et continue d’être contestée. Cette loi est, cependant, ambiguë, dans la mesure où d’autres de ses dispositions soumettent la Section Communale à des obligations incompatibles avec l’exercice de cette autonomie.

2.2.-Les attributs de la personnalité morale et de l’autonomie

La personnalité morale et l'autonomie des Collectivités Territoriales déterminent aussi certains aspects fondamentaux de leur organisation et de leur fonctionnement : • l’autonomie administrative et financière ; • des compétences attribuées par la Constitution et par la loi, dont l’exercice peut

être contesté en justice, notamment en matière de responsabilité civile ; • un patrimoine faisant partie de leur domaine privé ; • des ressources financières ; • le droit d’association.

LE STATUT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

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De plus, l’octroi du même statut à toutes les Collectivités Territoriales implique qu’aucune d’entre elles ne peut exercer de tutelle ou de contrôle sur une autre et que l’exercice de leurs compétences est limité à leur territoire. Les rapports entre ces Collectivités ne peuvent ainsi être établis que dans le respect de leur autonomie respective, sur la base d’exigences légales ou d’engagements contractuels librement consentis.

2.3.-Les implications du statut La libre administration des Collectivités Territoriales, implicite, avec la présence

d’élus à la tête de ces institutions dotées de la personnalité morale et de l’autonomie, est confirmée par les dispositions constitutionnelles qui leur accordent la possibilité d’entrer en litige avec l’État. Certains aspects du fonctionnement des Collectivités Territoriales, en particulier, leurs relations avec l’État, sont ainsi largement déterminés par l’exercice de ces prérogatives.

Des dispositions constitutionnelles confient, en effet, à la Présidence la responsabilité de veiller à l’exécution de la Constitution et à la stabilité des institutions ainsi que d’assurer le fonctionnement régulier des Pouvoirs Publics, et donc, le mandat d’intervenir dans ce cadre au niveau des Collectivités Territoriales. La Constitution confie aussi au Premier Ministre et à chacun des ministres la responsabilité de l’exécution des lois, attribuant ainsi au Gouvernement des responsabilités de contrôle de la légalité des actes des Collectivités Territoriales, tout en soumettant explicitement ces dernières au contrôle administratif et financier de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif, institution indépendante, chargée aussi de trancher les litiges entre l’État et les Collectivités Territoriales. La prise en compte des prérogatives constitutionnelles des Collectivités Territoriales dans l’application de ces dispositions a toutefois pour conséquence :

• de donner un caractère exceptionnel et conservatoire aux interventions

éventuelles de la Présidence, qui ne peuvent être effectuées qu’en cas de dysfonctionnement grave et dûment constaté des Collectivités Territoriales ;

• d’encadrer l’exercice des compétences des Collectivités Territoriales par

l’octroi de permis et d’autorisations administratives à codifier par la loi ;

• de faire porter le contrôle de l’Exécutif uniquement sur la légalité des actes des Collectivités Territoriales, contrôle qui ne peut être exercé qu’à posteriori ;

• de rendre obligatoire la soumission des décisions prises dans le cadre du

contrôle de légalité à la sanction de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif, seule habilitée à les rendre exécutoires ;

LE STATUT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

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• d’attribuer le contrôle administratif et financier interne des Collectivités Territoriales exclusivement à la Cour des Comptes ;

• d’octroyer aux Collectivités Territoriales la possibilité d’intenter des recours

devant la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif contre les décisions de l’Exécutif les concernant.

L’application des dispositions constitutionnelles régissant les rapports entre l’État

et les Collectivités Territoriales (y compris le rôle de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif), exige aussi que ces dernières ne puissent exercer que les compétences qui leur sont attribuées par la Constitution ou par la loi, et que ces compétences soient distinctes de celles de l’État. Dans ce cadre, l’établissement de relations contractuelles entre l’État et les Collectivités Territoriales devient alors possible.

2.4.-Les propositions

Les dispositions légales et administratives nécessaires à l’exercice des compétences des Collectivités Territoriales ainsi que des prérogatives liées à leur statut doivent toutefois être mises en place pour assurer l'application des prescrits constitutionnels. Ces dispositions devront d’abord inclure :

• la définition du statut et des prérogatives des Collectivités Territoriales ;

• l’établissement de normes nationales pour le fonctionnement des Collectivités Territoriales concernant, en particulier : les modalités d’exercice des compétences, la gestion du patrimoine propre, les procédures administratives et budgétaires, le régime de responsabilité civile… ;

• la définition des règles et procédures devant régir les rapports entre l’État et les Collectivités Territoriales : modalités du contrôle de légalité, attribution des responsabilités institutionnelles en la matière… ;

• les précisions à apporter sur le rôle de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif : modalités du contrôle administratif et financier, responsabilités et procédures de saisine par l’Exécutif ou par les Collectivités Territoriales, voies de recours administratifs et judiciaires de la population contre les décisions et actes des Collectivités Territoriales….

D’autres dispositions devront concerner : • la révision des dispositions de la loi du 28 mars 1996 sur l’organisation de la

Section Communale limitant l’exercice des prérogatives liées au statut de cette Collectivité ;

• la déconcentration de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif et son renforcement, ainsi que celui des structures chargées de la gestion des rapports entre l’État et les Collectivités Territoriales.

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3.- L’ORGANISATION TERRITORIALE

La Constitution de 1987 a défini les aspects essentiels de l’organisation territoriale du pays sur une base quasi-exclusivement territoriale. Les dispositions constitutionnelles ont, de plus, lié de manière indissociable le cadre territorial des Collectivités Territoriales et celui d’institutions nationales, tout en laissant au législateur la responsabilité d’établir le découpage territorial.

Le cadre d’organisation et de fonctionnement du système politico-administratif

est donc en grande partie déterminé par l’organisation territoriale. La mise en place et le fonctionnement des institutions prévues par la Constitution, de même que les actions des Pouvoirs Publics en la matière, seront donc, de ce fait, largement conditionnés par la conformité de la législation sur le découpage ainsi que des territoires délimités par ses dispositions, avec les exigences constitutionnelles.

3.1.-Le cadre établi par la Constitution

Le cadre territorial du système politico-administratif est déterminé par la Constitution selon laquelle le territoire de la République est divisé et subdivisé en Départements, Arrondissements, Communes, Quartiers et Sections Communales. Sur la base de ces divisions territoriales, la Constitution définit aussi les principaux traits de l’organisation territoriale de diverses institutions publiques.

Trois catégories de Collectivités Territoriales constituant autant de paliers

territoriaux de représentation politique, de décision et de gestion des affaires publiques locales (le Département, la Commune et la Section Communale) sont ainsi établies par la Constitution qui détermine aussi l’organisation, sur une base territoriale, de la représentation politique dans les organes de ces Collectivités en définissant :

• les circonscriptions électorales des Conseils Municipaux (les Communes) et des CASEC (les Sections Communales) ;

• des circonscriptions de représentation d’une Collectivité à l’Assemblée de la

Collectivité de niveau territorial supérieur (la Section pour l’Assemblée Municipale et la Commune pour l’Assemblée Départementale) et au Conseil Interdépartemental (le Département).

Des dispositions constitutionnelles organisent aussi le cadre de la participation

des Collectivités Territoriales à la nomination à des fonctions au sein d’institutions nationales, établissant ainsi :

• deux paliers implicites de l’organisation territoriale des Tribunaux, correspondant aux Collectivités dont les Assemblées ont la responsabilité de

L’ORGANISATION TERRITORIALE

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présenter des propositions en vue du choix des juges des Tribunaux d’Appel et de Première Instance (les Départements) et des Tribunaux de Paix (les Communes) et qui constituent aussi, de ce fait, des circonscriptions de base pour la nomination à ces fonctions ;

• les circonscriptions de base pour la constitution du Conseil Electoral

Permanent, correspondant aux Départements, dont les Assemblées sont chargées de présenter les propositions en vue du choix des membres de cette institution.

La Constitution définit aussi le cadre de l’organisation et de la gestion des

services de l’État ainsi que de la déconcentration de l’Administration Publique en établissant :

• deux paliers de représentation territoriale de l’Exécutif et de coordination des

services publics, placés sous l’autorité des Délégués et Vice-délégués (les Départements et les Arrondissements) ;

• deux niveaux territoriaux d’administration et de gestion des services publics,

constitués par les divisions administratives (les Arrondissements et les Sections Communales).

L’organisation de la représentation de la population au Parlement est, en outre,

déterminée par les dispositions constitutionnelles qui définissent, sur une base exclusivement territoriale, les circonscriptions électorales du Sénat (les Départements) et, sur une base quasi-exclusivement territoriale, celles la Chambre des Députés (les Communes, avec cependant des possibilités d’ajustement en faveur des agglomérations ainsi que des dispositions transitoires fixant un nombre minimum de Députés).

D’autres caractéristiques de l’organisation territoriale sont aussi déterminées par

l’utilisation quasi-exclusive, par la Constitution, de quatre des cinq divisions territoriales pour la définition des principaux traits du cadre territorial du système politico-administratif.

Une des divisions territoriales, le Quartier, ne joue ainsi aucun rôle dans

l’organisation politico-administrative, tandis que l’emboîtement des divisions administratives ainsi que des Collectivités Territoriales est établi, implicitement, par les dispositions constitutionnelles créant l’emboîtement des divisions territoriales.

En outre, l’organisation territoriale des Collectivités Territoriales ne peut être

considérée indépendamment de celle de l’État. Des circonscriptions de nomination de membres d’institutions nationales sont, en effet, définies à partir des Collectivités Territoriales, et, de plus, des correspondances directes sont établies, implicitement, entre le cadre territorial de ces Collectivités et celui de circonscriptions électorales,

L’ORGANISATION TERRITORIALE

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de divisions administratives et de circonscriptions de représentation de l’Exécutif, tous étant déterminés à partir des divisions territoriales.

Certains aspects de l’organisation des institutions définies sur la base des

divisions territoriales sont aussi fonction du nombre de ces divisions, et les caractéristiques du cadre territorial de ces institutions sont, en fait, celles des territoires des divisions territoriales. Ainsi, tout changement au niveau des divisions territoriales entraîne simultanément d’autres changements dans l’organisation et le fonctionnement des Collectivités Territoriales et de diverses institutions nationales.

La mise en place et le fonctionnement du système politico-administratif établi par

la Constitution seront donc conditionnés par le découpage territorial qui devra assurer l’adéquation des divisions territoriales avec l’organisation et le rôle des institutions dont elles constituent le cadre territorial.

3.2.-Le découpage déterminé par la loi Le découpage territorial actuel est déterminé par la loi, qui, selon la Constitution,

établit le nombre et les limites des divisions et subdivisions territoriales. Aujourd’hui, selon la législation en vigueur, le territoire national comprend : 9 Départements, 41 Arrondissements, 135 Communes, 57 Quartiers et 565 Sections Communales.

Sur la base de ces divisions territoriales, sont donc aussi établies, d’office, selon

la Constitution :

• 709 Collectivités Territoriales (9 Départements, 135 Communes et 565 Sections Communales) ;

• au moins 9 juridictions d’Appel et de Première Instance et au moins 135

juridictions de Paix ;

• 50 circonscriptions de représentation de l’Exécutif et de coordination des services publics (9 Délégations et 41 Vice-délégations) ;

• 606 circonscriptions administratives (41 Arrondissements et 565 Sections

Communales). A ce nombre, il convient d’ajouter les 9 Départements et les 135 Communes qui sont ou devraient être, d’office, des divisions administratives de l’État ;

• 9 circonscriptions électorales du Sénat et au moins 135 circonscriptions

électorales de la Chambre des Députés, vu les dispositions de l’article 90 qui prévoient l’élection d’un Député par Commune avec la possibilité pour la loi d’augmenter ce nombre jusqu’à trois pour les grandes agglomérations.

L’ORGANISATION TERRITORIALE

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Etablies, à l’origine, par les autorités coloniales et modifiées périodiquement depuis l’Indépendance, les délimitations actuelles reflètent encore un ordre passé qui visait, avant tout, le contrôle policier de la population ainsi que de l’écoulement, vers les ports, de la production agricole d’exportation, dans un cadre militaire, au profit de l’urbain et au détriment du rural. L’évolution du découpage a été initiée sur cette base et guidée ensuite par des considérations surtout politiciennes qui ont résulté en une augmentation constante du nombre des divisions territoriales dont beaucoup ont été délimitées de manière tout à fait arbitraire…

La plupart des délimitations ne tiennent pas compte des ensembles

géographiques, ni des caractéristiques du cadre naturel ou de l’organisation sociale, ni des circuits économiques locaux. Aussi, le découpage, trop souvent artificiel, de la plupart des divisions territoriales ne leur permet généralement pas de constituer des cadres d’intégration d’activités économiques, ni d’échanges socioculturels.

Les divisions territoriales ont aussi des limites très imprécises et très mal définies du point de vue légal. De plus, leur superficie et leur population varient beaucoup :

• de 4 à 287 km2 et de 1.000 à 54.000 habitants pour les Sections Communales,

• de 9 à 646 km2 et de près de 5.000 à plus d’un million d’habitants pour les Communes,

• de 172 à 1.946 km2 et de 44.000 à près de deux millions d’habitants pour les Arrondissements,

• de 1.632 à plus de 5.000 km2 et de 262.000 à près de trois millions d’habitants pour les Départements.

3.3.-Les écarts entre la législation sur le découpage et la Constitution

La conformité de la législation sur le découpage avec les exigences constitutionnelles n’est, en fait, que partielle. Bien des dispositions légales antérieures à 1987, mais déterminant encore certains aspects du cadre territorial de Collectivités Territoriales et d’institutions nationales, n’ont toujours pas encore été mises en conformité avec la Constitution.

Les lois en vigueur établissent ainsi :

• l’organisation territoriale des services déconcentrés de l’Administration Publique, le plus souvent sur la base de Départements (9 ou 10) et de Districts (entre une dizaine et une soixantaine), généralement déterminés par les Ministères concernés ;

• les circonscriptions électorales de la Chambre des Députés (83) ; • les juridictions d’Appel (5), de Première Instance (15) et de Paix.

L’ORGANISATION TERRITORIALE

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La législation sur le découpage délimite aussi 31 Communes ne comportant qu’une ou deux Sections Communales, 135 chefs-lieux de Commune et deux niveaux de divisions territoriales, le Quartier et la Section Communale, dont aucun ne couvre l’ensemble du territoire national.

Les écarts évidents entre le cadre établi par les dispositions constitutionnelles et certains aspects de la législation en vigueur constituent une sérieuse entrave à la mise en place et au fonctionnement des institutions prévues par la Constitution, ainsi qu’en témoignent :

• l’inefficacité prévisible de la coordination des services publics à effectuer par

les Délégués et surtout les Vice-Délégués, les découpages utilisés par l’Administration Publique n’étant pas uniformes et n’étant, de plus, que rarement conformes, à la fois, aux divisions administratives et aux circonscriptions de représentation et de coordination de l’Exécutif ;

• l’organisation de la représentation de la population à la Chambre des

Députés sur la base de dispositions transitoires, plutôt que des dispositions définitives de la Constitution, plus de quinze ans après sa promulgation;

• l’impossibilité de procéder à la nomination des juges des Tribunaux d’Appel

selon les modalités prévues par la Constitution, le nombre de ces Tribunaux étant inférieur à celui des Départements ;

• l’emboîtement incomplet des divisions administratives ainsi que des

Collectivités Territoriales, vu la nécessité de juxtaposer les Sections Communales, les Quartiers et les chefs-lieux de Commune pour obtenir une couverture complète du territoire national à cet échelon territorial ;

• les difficultés pratiques de fonctionnement du quart des Assemblées

Municipales où ne seraient représentées qu’une ou deux Sections Communales et un chef-lieu de Commune et qui pourraient donc ne compter que deux ou trois membres ;

• l’absence de structures politico-administratives locales, équivalentes au

CASEC et à l’ASEC sur une partie du territoire national (les chefs-lieux de Commune, non prévus par la Constitution, et donc, sans statut, et les Quartiers sans rôle dans l’organisation politico-administrative) ;

• la nécessité de l’adoption de dispositions particulières pour permettre la

représentation des chefs-lieux de Commune et des Quartiers à l’Assemblée Municipale (les délégués de ville), et l’existence, de ce fait, de deux catégories de représentants, élus sur des bases différentes (au suffrage direct ou par les ASEC), au sein de cette Assemblée.

L’ORGANISATION TERRITORIALE

18

3.4.-L’inadéquation de la plupart des territoires avec le rôle des institutions

L’adéquation des territoires délimités par le découpage actuel avec la vocation et le rôle des institutions dont ils constituent le cadre territorial n’est, en outre, que très partielle. L’exercice effectif des fonctions de représentation politique, de coordination et de gestion administratives, de desserte en services publics prévues par la Constitution se trouve, de ce fait, sérieusement entravé.

L’imprécision des limites est, en effet, la source de conflits entre responsables

d’entités territoriales limitrophes, de problèmes fonciers, de contestations électorales, de difficultés de gestion des questions territoriales au niveau central et d’un manque de fiabilité des données concernant, en particulier, la superficie et la population des divisions territoriales.

De plus, les disparités constatées dans les populations de divisions territoriales

de même niveau ainsi que les chevauchements dans les populations de divisions territoriales de niveaux différents ont pour conséquence que :

• la représentation politique, organisée sur une base quasi-exclusivement territoriale, est très inégale, avec une importante sous-représentation des populations des divisions territoriales les plus peuplées ;

• l’application du principe de subsidiarité dans l’organisation des structures

administratives de même que dans l’attribution de compétences aux différentes catégories de Collectivités Territoriales devient très difficile ;

• l’attribution de compétences techniques et administratives, à la fois distinctes

et uniformes à chaque catégorie de Collectivités Territoriales devient aussi difficilement réalisable.

En fait, les caractéristiques des territoires de la plupart des divisions territoriales

ne permettent pas un exercice adéquat du rôle des institutions prévues par la Constitution :

• les territoires des Départements, généralement composés de sous-ensembles distincts n’entretenant le plus souvent que peu de rapports les uns avec les autres, ne constituent un cadre adéquat que pour la coordination politique et administrative, ce qui correspond, en fait, à la vocation des Collectivités Territoriales et des institutions nationales dont ils constituent le cadre territorial. Ces territoires peuvent cependant permettre d’organiser la représentation politique si on considère que la sous-représentation au niveau national des Départements les plus peuplés (au Sénat, au CID, au CEP) constitue une discrimination positive en faveur de zones historiquement défavorisées et marginalisées du pays ;

L’ORGANISATION TERRITORIALE

19

• les territoires des Arrondissements correspondent souvent à des bassins ou sous-bassins versants et présentent ainsi une certaine unité géographique. Leur économie, à la fois rurale et urbaine est relativement intégrée et ils constituent aussi, généralement, le cadre d’échanges socio-culturels internes. Ces territoires sont, de plus, les seuls à fournir, en majorité, un cadre et une échelle relativement appropriés à la planification et à la promotion du développement économique et social, à la gestion des ressources naturelles ainsi qu’à la mise en place de réseaux pyramidaux de services publics ;

• la plupart des Communes ne disposent pas d’un territoire approprié à

l’organisation et la gestion d’activités visant l’amélioration du cadre et des conditions de vie de leur population, qui constituent la vocation essentielle des Collectivités Territoriales Communales. Les économies de ces territoires, composés souvent de fractions de bassins versants, sont généralement peu intégrées. C’est d’ailleurs à cet échelon que la traditionnelle opposition ville-campagne s’exprime encore avec le plus d’intensité. La représentation de la population organisée sur la base des Communes sera aussi très inégale (à l’Assemblée Départementale, à la Chambre des Députés, malgré les ajustements possibles en faveur des agglomérations) ;

• les territoires des Sections Communales, aux limites très souvent artificielles,

sont exclusivement ruraux, sauf dans les zones d’expansion des agglomérations. Ces territoires, qui, selon certains spécialistes, ne constituent pas un cadre approprié pour la gestion locale de la desserte en services de proximité, ne permettent pas non plus une représentation équitable de la population à l’Assemblée Municipale. Cependant, l’équité dans la représentation de la population à cette Assemblée pourrait être assurée si on interprète l’article 67 de la Constitution (…formée notamment d’un représentant de chaque Section Communale...) de manière à ce que le nombre de représentants des Sections soit établi en fonction de l’importance de leur population. Cette option, choisie par la loi du 28 mars 1996, est cependant considérée par beaucoup comme étant contraire à la Constitution.

Dans le cadre de la Constitution de 1987, ces problèmes ne peuvent être résolus

que par des changements dans le découpage territorial.

3.5.-Les propositions

Les actions à entreprendre par les Pouvoirs publics en vue d’assurer la mise en place et le fonctionnement effectifs de l’organisation politico–administrative et des institutions politiques prévues par la Constitution devront donc viser, à la fois l’emboîtement des Collectivités Territoriales, l’octroi de compétences distinctes et uniformes à chaque catégorie de Collectivités Territoriales, une représentation plus équitable de la population aux Assemblées Municipales et Départementales ainsi que l’élimination des dispositions particulières, actuellement nécessaires pour

L’ORGANISATION TERRITORIALE

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assurer la représentation des chefs-lieux de Commune et des Quartiers à l’Assemblée Municipale et l’implantation d’institutions politiques locales sur tout le territoire national.

Ces actions devront aussi avoir pour objectifs, une coordination efficace des

services publics, l’implantation de réseaux pyramidaux de service public, une représentation plus équitable de la population à la Chambre des Députés et la nomination des juges des Cours d’Appel conformément à la Constitution.

Les actions des Pouvoirs Publics devront donc inclure la mise en conformité de

la législation sur le découpage territorial avec les dispositions constitutionnelles en la matière. En même temps, la mise en adéquation des territoires avec les exigences liées à l’organisation et au fonctionnement des institutions publiques organisées sur une base territoriale devra aussi être effectuée.

Les actions proposées devront donc concerner d’abord : • la création de Sections Communales sur le territoire des chefs-lieux de

Commune et l’intégration des Quartiers dans les Sections Communales existantes ;

• la révision du nombre et des limites des Sections Communales existantes sur

la base de critères de superficie et de population ;

• la révision du nombre et des limites des Communes, également sur la base de critères de superficie et de population ;

• l’ajustement, lorsque nécessaire des limites des Arrondissements et des

Départements en fonction des autres changements effectués et, le cas échéant, la réunification de certains Arrondissements arbitrairement subdivisés.

Les actions envisagées devront aussi permettre : • la réduction des disparités existant dans la superficie et, surtout, la population

des Sections Communales ainsi que des Communes et, en même temps, la différenciation des caractéristiques territoriales et démographiques de ces deux niveaux de divisions territoriales ;

• la définition précise des limites des divisions territoriales ainsi que leur

implantation sur le terrain.

L’ORGANISATION TERRITORIALE

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L’application de toutes les dispositions constitutionnelles sur l’organisation politico-administrative et le fonctionnement des institutions va aussi rendre nécessaire :

• l’uniformisation des découpages utilisés par l’Administration Publique et leur

mise en conformité avec les divisions administratives ainsi qu’avec les circonscriptions de représentation et de coordination de l’Exécutif ;

• le renforcement du rôle politique des structures départementales relevant de

l’Exécutif ;

• l’établissement d’au moins une juridiction d’Appel par Département ;

• la définition des circonscriptions électorales de la Chambre des Députés selon les dispositions définitives de la Constitution.

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4.- L’ORGANISATION POLITIQUE

La Constitution ne définit que certains aspects de l’organisation politique des Collectivités Territoriales. Des précisions complémentaires ont été apportées par la loi du 28 mars 1996, mais certaines des dispositions de cette loi font l’objet de nombreuses contestations. De toute façon, l’édifice légal en la matière demeure encore incomplet.

La définition de l’organisation politique des Collectivités Territoriales est

cependant indispensable tant à la mise en place et au fonctionnement de ces institutions qu’à l’établissement de la démocratie et de l’État de Droit. Les dispositions constitutionnelles et légales concernant l’organisation politique des Collectivités Territoriales déterminent, en effet :

• le cadre de gestion des affaires publiques locales, et en particulier, de l’attribution de compétences aux Collectivités Territoriales ainsi que de l’exercice de ces compétences;

• la légitimité électorale des institutions politiques locales et de leurs organes; • le cadre de la vie politique locale et, particulièrement, de la représentation de

la population et de ses rapports avec les institutions politiques locales, de la représentation des Collectivités Territoriales dans les Assemblées de niveau territorial supérieur et au CID, ainsi que de l’articulation des intérêts locaux en vue de leur intégration dans des décisions de portée nationale.

Ce faisant, les dispositions sur l’organisation politique des Collectivités

Territoriales déterminent aussi le cadre : • de l’implantation de la démocratie au niveau local; • de la participation de la population aux affaires publiques locales; et • de la décentralisation. L’organisation politique des Collectivités Territoriales, en plus d’être conforme

aux prescrits constitutionnels, doit donc aussi refléter l’application des principes à la base de la mise en place et du fonctionnement des institutions démocratiques. Les dispositions sur l’organisation politique doivent ainsi :

• assurer l’équité dans la représentation de la population ; • favoriser le pluralisme politique et l’alternance démocratique ; • fonder l’organisation interne des Collectivités Territoriales sur la légitimité

électorale de leurs organes ; • promouvoir la transparence et garantir la légitimité démocratique des

décisions politiques ; • assurer la satisfaction des critères usuels de citoyenneté dans le choix des

élus ; • éliminer les incompatibilités professionnelles ou de fonction ainsi que les

conflits d’intérêts potentiels pouvant affecter les élus.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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Pour combler les insuffisances du cadre existant, des propositions, basées sur les dispositions constitutionnelles ainsi que sur l’analyse de la législation en vigueur, ont été élaborées en vue de préciser les modalités de constitution des organes des Collectivités Territoriales ainsi que les aspects essentiels de leur fonctionnement.

4.1.-Les dispositions constitutionnelles

La Constitution a doté les Collectivités Territoriales d'un organe délibérant, l'Assemblée, et d'un organe exécutif, le Conseil. Les dispositions constitutionnelles établissent aussi un organe de représentation des Départements, le Conseil Interdépartemental. La Constitution définit aussi partiellement l’organisation politique des Collectivités Territoriales en stipulant que :

• Les Conseils administrent les Collectivités Territoriales ; • Les Assemblées assistent les Conseils dans leur tâche ;

• Les Conseils Municipaux et Départementaux rendent compte à leur

Assemblée respective ;

• L’Assemblée Municipale fait rapport au Conseil Départemental. L’Assemblée Départementale fait rapport à l’Administration Centrale ;

• Les membres des Conseils d’Administration des Sections Communales sont élus au suffrage universel direct sur l’ensemble du territoire de la Collectivité ;

• Les Conseils Municipaux sont élus au suffrage universel direct sur l’ensemble

du territoire de la Collectivité ;

• La composition de l’Assemblée Municipale est partiellement définie. On y retrouve, notamment, un représentant de chaque Section Communale ;

• Le Conseil Départemental est élu par l’Assemblée Départementale ; ses

membres ne sont pas nécessairement tirés de cette Assemblée ;

• L’Assemblée Départementale est composée exclusivement de représentants des Assemblées Municipales ;

• Le Conseil Interdépartemental est formé d’un représentant de chaque

Assemblée Départementale désigné en son sein par cette dernière ;

• La durée du mandat de tous les membres des Conseils Départementaux, Municipaux et de Section Communale est de quatre (4) ans, renouvelables ;

L'ORGANISATION POLITIQUE

24

• Pour être membre d’un des Conseils Départementaux, Municipaux ou de Section Communale , il faut :

o être Haïtien ; o être âgé d’au moins 25 ans ; o jouir de ses droits civils et politiques ; o n’avoir jamais été condamné à une peine afflictive et infamante ; o avoir résidé dans la Section Communale deux (2) ans avant les

élections du CASEC ou avoir résidé dans la Commune ou le Département trois (3) ans avant les élections du Conseil Municipal ou du Conseil Départemental ;

o s’engager à résider dans la Collectivité Territoriale concernée pendant la durée du mandat.

4.2.-Les modalités de constitution des organes

Les dispositions sur l’organisation politique des Collectivités Territoriales doivent d’abord définir les modalités de constitution de leurs organes, y compris la composition de ces organes, les modalités d’élection, la durée des mandats, les conditions d’éligibilité ainsi que les incompatibilités avec la fonction de membre d’organe de Collectivité Territoriale. Jusqu’à présent, ces dispositions ne sont établies, pour l’essentiel, que par la Constitution et par la loi du 28 mars 1996 sur la Section Communale. 4.2.1.- La composition des organes

La Constitution a établi l’organisation de la représentation politique au sein des Collectivités Territoriales sur une base territoriale. Les dispositions constitutionnelles n’ont cependant pas précisé la composition des Assemblées de Section Communale et n’ont que partiellement défini celle des Assemblées Municipales.

La loi du 28 mars 1996 a prévu l’élection d’un ou plusieurs représentants de

chaque Section Communale à l’Assemblée Municipale, en fonction de la population. Cette loi a aussi créé le poste de Délégué de Ville pour assurer la représentation des chefs-lieux de Commune et des Quartiers à l’Assemblée Municipale. Le nombre de ces Délégués est aussi fixé en fonction de la population. L’Assemblée Municipale est donc composée de deux catégories de membres, élus sur des bases différentes. Toujours selon cette loi, l’Assemblée de Section Communale est composée de représentants d’habitations et de regroupement d’habitations à délimiter en fonction de la population.

L’ensemble des dispositions constitutionnelles et légales sur la composition des organes des Collectivités Territoriales a les conséquences suivantes vu les grandes

L'ORGANISATION POLITIQUE

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disparités existant dans la population des Collectivités Territoriales de même catégorie :

• la population des Départements les plus peuplés est très sous-représentée au CID. Ce déséquilibre est cependant considéré comme une discrimination positive en faveur des Départements les moins peuplés qui ont été historiquement marginalisés ;

• la population des Communes les plus peuplées est également très sous-

représentée à l’Assemblée Départementale ;

• les dispositions de la loi du 28 mars 1996 permettent une représentation équitable de la population des habitations à l’Assemblée de Section Communale de même que de la population des Sections Communales à l’Assemblée Municipale. La constitutionnalité des dispositions concernant le nombre de représentants des Sections communales à l’Assemblée Municipale est cependant contestée. Les dispositions concernant le nombre des Délégués de ville permettent aussi une représentation relativement équitable de la population des chefs-lieux de Commune et des Quartiers à l’Assemblée Municipale.

Les dispositions légales en vigueur ne permettent cependant pas aux chefs-lieux

de Commune et aux Quartiers de disposer de structures politico-administratives locales équivalentes au CASEC et à l’ASEC. Leur population est donc privée de représentation et d’institutions politiques à ce niveau.

Dans le cadre de la Constitution de 1987, les problèmes sus-mentionnés ne peuvent être résolus que par des changements dans le découpage territorial déjà présentés au chapitre 3. Propositions

• Etendre les Sections Communales à l’ensemble du territoire national, ce qui permettra à toute la population de disposer de structures politico-administratives locales. Une telle mesure éliminerait aussi la nécessité de dispositions particulières pour assurer la représentation des chefs-lieux de Commune et des Quartiers à l’Assemblée Municipale et permettrait de n’avoir qu’une seule catégorie de membres de cette Assemblée.

• Procéder à la délimitation des nouvelles Sections Communales ainsi qu’à la

révision du nombre et des limites de Sections Communales actuelles en vue, entre autres, de minimiser les disparités existant entre les effectifs de leur population ; ce qui favoriserait l’équité dans la représentation politique de ces populations tout en rendant inutile la multiplication du nombre de représentants de Sections Communales à l’Assemblée Municipale.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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4.2.2.- Les modalités d’élection

La Constitution a partiellement défini les modalités d’élection de l’ensemble des Conseils ainsi que de l’Assemblée Départementale mais n’a rien précisé en ce qui concerne les autres Assemblées. Les lois n’ont toujours pas entièrement complété les dispositions constitutionnelles. Seule la loi sur la Section Communale, a été promulguée, mais la conformité de plusieurs de ses dispositions avec la Constitution continue d’être contestée. Selon les dispositions constitutionnelles et légales en vigueur :

• les CASEC sont élus au suffrage universel direct par cartel ; • les membres des ASEC sont élus au suffrage universel direct sur la base de

circonscriptions électorales constituées d’habitations ou de regroupements d’habitations, et, en attendant la délimitation de ces circonscriptions, au suffrage universel direct, par cartel ;

• les Conseils Municipaux sont élus au suffrage universel direct par cartel ; • les représentants des Sections Communales à l’Assemblée Municipale sont

élus par les ASEC ; • les Délégués de ville, représentants des chefs-lieux de Commune et des

Quartiers à l’Assemblée Municipale sont élus au suffrage universel direct par cartel ;

• les modalités précises d’élection des Conseils Départementaux ainsi que des représentants des Sections Communales à l’Assemblée Municipale, de l’Assemblée Départementale et de cette dernière au CID ne sont pas définies : consensus ? vote ? majorité nécessaire ?…

La mise en place des Collectivités Territoriales va cependant exiger que les

modalités d’élection des membres de tous leurs organes soient précisées et soient conformes aux exigences de la démocratie. Propositions pour la Section Communale :

• Les modalités d’élection des membres des CASEC, actuellement élus par cartel, devraient être maintenues, dans la mesure où la présence dans un même organe exécutif, d’élus de tendances politiques différentes ne ferait que compliquer inutilement le fonctionnement de cet organe.

• L’élection par cartel des membres de l’ASEC est profondément anti-

démocratique et va à l’encontre de la représentativité territoriale, et exclut toute possibilité de pluralisme politique au sein de ces Assemblées. Cette disposition devra donc être modifiée au plus tôt.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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• En attendant la délimitation des circonscriptions électorales des Assemblées de Section Communale, on pourrait procéder à l’élection de leurs membres à la proportionnelle, au scrutin de liste. Il faut noter cependant que, dans ce cas, la représentation dans les Assemblées de Sections Communales ne se ferait pas sur une base territoriale. De plus, l’introduction de la proportionnelle apporterait des complications supplémentaires aux opérations électorales et exigerait d’importants efforts de vulgarisation ainsi qu’un renforcement significatif des capacités de gestion du processus.

• On pourrait aussi, après avoir fixé le nombre de sièges de l’ASEC, procéder à

l’élection de tous les membres de cette Assemblée au suffrage universel direct sur toute l’étendue du territoire de la Section. Les sièges seraient alors attribués, dans l’ordre décroissant, aux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix, jusqu’à l’attribution de tous les sièges. Il faut noter, cependant, que cette proposition alternative de modalités transitoires ne permettrait pas, non plus, la représentation de la population sur une base territoriale.

pour la Commune :

• L’élection par cartel des membres des Conseils Municipaux devrait être

maintenue, pour les mêmes raisons que celles mentionnées dans le cas des CASEC.

• Peut-on confier à l’ASEC qui n’est que l’un des deux organes de la Section

Communale, la prérogative de désigner seule, le représentant de la Section Communale à l’Assemblée Municipale comme le fait la loi ? La légitimité et la représentativité de l’ASEC seraient-elles supérieures à celles du CASEC ? La Constitution n’ayant pas précisé les modalités de l’élection du représentant de la Section Communale à l’Assemblée Municipale, il semble préférable que ce dernier soit élu au suffrage universel direct lors des élections des membres des CASEC et des ASEC.

• Le poste de Délégué de ville, créé pour permettre la représentation des

chefs-lieux de Commune et des Quartiers, perdrait sa raison d’être et disparaîtrait avec l’adoption des propositions sur l’organisation territoriale présentées au chapitre 3.

pour le Département :

La Constitution a déjà défini certaines des modalités d’élections des membres de l’Assemblée, du Conseil et du CID. Les précisions complémentaires suivantes pourraient être apportées aux modalités de ces élections :

• procéder à l’élection des représentants des Assemblées Municipales aux Assemblées Départementales et de ces dernières au CID au vote public, nominal et à la majorité des deux tiers des sièges des Assemblées électives.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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• procéder à l’élection de chacun des membres du Conseil Départemental au

vote public, nominal et à la majorité des deux tiers des sièges de l’Assemblée Départementale.

4.2.3.- La durée des mandats Selon la Constitution, la durée des mandats des membres des Conseils Départementaux, Municipaux et de Section Communale est de quatre ans, renouvelables.

La loi a fixé à quatre ans, renouvelables, la durée du mandat des membres des Assemblées de Section Communale. La durée du mandat des membres des autres organes des Collectivités Territoriales n’a pas encore été fixée.

Propositions

• Afin de simplifier le processus électoral, la durée du mandat des membres de toutes les Assemblées des Collectivités Territoriales devrait être fixée à quatre ans, renouvelables, comme pour les Conseils. De plus, dans la mesure où les membres du Conseil Départemental, dont le mandat est de quatre ans, sont élus par l’Assemblée Départementale et doivent leur légitimité à cette dernière, il semble que la durée du mandat des membres de cette Assemblée devrait également être de quatre ans. Le même raisonnement tient aussi pour les membres de l’Assemblée Municipale qui nomment les membres de l’Assemblée Départementale.

• Selon cette proposition, la durée du mandat des membres du CID ne pourrait

évidemment pas dépasser quatre ans, mais pourrait être plus courte. 4.2.4.- Les conditions d’éligibilité

La Constitution a déterminé les conditions d’éligibilité des membres des Conseils

Départementaux, Municipaux et de Section Communale. La loi du 28 mars 1996 a déterminé les conditions d’éligibilité des membres des Assemblées qui doivent satisfaire aux mêmes conditions que les membres des Conseils mais qui peuvent être âgés de 18 ans (au lieu de 25) et doivent être nés haïtiens (au lieu d’être seulement haïtiens). La mise en place d’exigences de nationalité plus restrictives pour les membres des Assemblées que pour les membres des Conseils ne paraît pas justifiable.

La Constitution stipule aussi que les membres des Conseils Départementaux ne sont pas forcément tirés de l’Assemblée Départementale, mais que le représentant de cette dernière au CID doit être élu en son sein, sans apporter ce genre de précision pour les autres représentants à élire par les Assemblées.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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La loi accorde aux Assemblées Municipales et de Section Communale la

possibilité de choisir des représentants en dehors de ces Assemblées, c’est-à-dire la possibilité de choisir des représentants ne bénéficiant d’aucune légitimité populaire.

Les dispositions légales concernant les conditions d’éligibilité des membres des organes des Collectivités Territoriales doivent être équitables. Ces dispositions doivent aussi assurer la légitimité électorale des membres de ces organes. Propositions

• Pour des raisons évidentes de justice, d’équité et de cohérence, soumettre

les membres des Assemblées aux mêmes exigences concernant la nationalité que celles imposées par la Constitution dans le cadre des conditions d’éligibilité des membres des Conseils.

4.2.5.- Les incompatibilités

Selon la Constitution, il y a incompatibilité entre la fonction de membre du CEP et les fonctions publiques ou électives. Selon la loi, la fonction de membre du CASEC est incompatible avec celles de membre de l’ASEC, de l’AM, de la police ou du corps judiciaire ainsi qu’avec celles de Délégué, de Vice-Délégué, de Député et de Sénateur. Toujours selon la loi, la fonction de membre de l’ASEC est incompatible avec celles de membre du CASEC, du Conseil Municipal, de la police ou du corps judiciaire ainsi qu’avec celles de Délégué, de Vice-délégué, de Député et de Sénateur.

On peut constater cependant que les dispositions légales en vigueur, peut-être parce que trop précises, ne sont pas suffisamment restrictives et n’empêcheraient pas, par exemple un fonctionnaire du Ministère de l’Intérieur d’être président de CASEC…En outre, ces dispositions permettent théoriquement à un membre d’ASEC de se voir confier successivement les mandats de membre de l’Assemblée Municipale, de membre de l’Assemblée Départementale et de représentant au CID.

Dans la mesure où on voit mal comment un seul individu pourrait adéquatement

s’acquitter des tâches nécessaires à l’exercice effectif et simultané de tous ces mandats, les possibilités de cumul devront être limitées par la loi. Propositions

• Les fonctions de membre de Conseil de Collectivité Territoriale devraient être

incompatibles avec un emploi dans la Fonction Publique Nationale, excepté dans l’enseignement.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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• Les fonctions de membre d’organe de Collectivité Territoriale devraient être incompatibles avec celles d’employés, de concessionnaires ou de contractants de ces Collectivités Territoriales.

• Le cumul des mandats de membre d’organe de Collectivité Territoriale devrait

être interdit. Si tel est le cas, des modalités de remplacement des membres d’Assemblées à qui est confié un autre mandat ( à l’Assemblée Départementale, au CD ou au CID) devront aussi être établies par la loi.

4.3.-Le fonctionnement des Collectivités Territoriales

Les dispositions sur l’organisation politique des Collectivités Territoriales définissent aussi certains aspects de leur fonctionnement, en particulier en ce qui concerne les modalités de prise de décision et différents types de rapports entre les organes ainsi qu’entre les Collectivités. 4.3.1.- Les modalités de prise de décision

La Constitution n’établit aucune modalité de prise de décision dans les organes des Collectivités Territoriales. Ces modalités doivent cependant assurer la légitimité et la transparence de ces décisions ainsi que le fonctionnement adéquat des institutions. Propositions

• Pour assurer un fonctionnement régulier des Conseils Départementaux, Municipaux et de Section Communale et minimiser l’impact de conflits éventuels, confier au Président l’essentiel des responsabilités décisionnelles de ces organes, les deux autres membres étant considérés comme des suppléants, à qui certaines tâches précises pourraient être assignées par la loi, mais ne pouvant exercer des prérogatives décisionnelles que par délégation écrite du Président.

• Pour assurer la transparence et la légitimité des décisions des Assemblées :

o les réunions des Assemblées sont publiques ; o la tenue des réunions des Assemblées exige un quorum d’au moins 50%

plus un des membres ; o les décisions des Assemblées sont généralement prises au vote public,

nominal et à la majorité des membres présents ; o la prise de certaines décisions importantes à spécifier par la loi (budget,

contrats, nominations de juges…) a lieu au vote public, nominal et à la majorité des deux tiers des sièges de l’Assemblée.

• Pour assurer la transparence du fonctionnement des Collectivités Territoriales

ainsi que le respect du droit à l’information des citoyens, les comptes-rendus

L'ORGANISATION POLITIQUE

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des délibérations, les délibérations et les actes des Collectivités Territoriales doivent être affichés et portés à la connaissance du public par tout moyen utile. De plus, les contribuables des Collectivités Territoriales doivent pouvoir prendre connaissance et obtenir copie, à leur frais, des délibérations et divers actes des autorités locales ainsi que des budgets et comptes des Collectivités.

4.3.2.- Les rapports entre le Conseil et l’Assemblée d’une Collectivité

En ce qui concerne les rapports entre le Conseil et l’Assemblée d’une Collectivité, la Constitution stipule que :

• les Conseils administrent les Collectivités Territoriales ; • les Assemblées assistent les Conseils dans leur tâche ; • les Conseils Municipaux et Départementaux rendent compte à leur

Assemblée respective.

La Constitution établit aussi : • la représentativité politique et la légitimité électorale directes des Conseils

Municipaux et de Section Communale, élus au suffrage universel direct sur l’ensemble du territoire de leur Collectivité ;

• la représentation des Sections Communales à l’Assemblée Municipale ; • le rôle de représentation des Assemblées Municipales attribué aux

Assemblées Départementales composées de représentants des Assemblées Municipales ;

• l’absence de représentativité politique et de légitimité populaire du Conseil Départemental.

La loi a établi de son côté : • le fonctionnement séparé du CASEC et de l’ASEC auxquels sont attribuées

des responsabilités distinctes ; • les prérogatives décisionnelles exclusives de l’ASEC concernant la politique

de développement ainsi que le budget de fonctionnement et de développement de la Section Communale.

Les autres rapports entre les organes d’une Collectivité Territoriale ne sont pas

définis. La codification par la loi des rapports entre les organes de ces Collectivités est cependant indispensable à leur bon fonctionnement. De plus, les modalités des rapports entre les organes au sein d’une Collectivité Territoriale, en particulier en ce qui concerne les prérogatives décisionnelles, doivent respecter la légitimité électorale et la représentativité des membres de ces organes.

Les membres du Conseil Départemental sont élus par l’Assemblée Départementale, sans disposer d’un mandat populaire. Leur légitimité ne leur est donc conférée que par le choix de l’Assemblée qui, elle, est composée de représentants des Assemblées Municipales.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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Les Conseils Municipaux et de Section Communale ainsi que les Assemblées Municipales et de Section Communale disposent, cependant, chacun de leur propre légitimité.

La loi du 28 mars 1996, de même que la plupart des projets ou propositions de loi existants préconisent un fonctionnement séparé des Conseils et des Assemblées. Cette loi octroie aussi à l’Assemblée de Section Communale la responsabilité exclusive des décisions sur le budget et le plan de développement sans égard pour la légitimité du Conseil pourtant élu au suffrage universel direct sur l’ensemble du territoire de la Section et, en principe, sur la base d’un programme politique censé orienter la préparation du budget et du plan de développement. Propositions

• L’ensemble des décisions relevant de la Collectivité Territoriale Départementale devrait donc relever en dernière instance de l’Assemblée Départementale, le Conseil Départemental étant, avant tout, chargé de l’exécution de ces décisions. A ce titre, les membres du Conseil Départemental devraient pouvoir assister aux réunions ainsi que participer à la préparation des décisions de l’Assemblée Départementale.

• En ce qui concerne les Communes et les Sections Communales, dans la

mesure où le Conseil et l’Assemblée disposent chacun de leur propre légitimité électorale, l’adoption d’un mode de fonctionnement séparé des deux organes exige la définition précise des attributions et des prérogatives décisionnelles de chacun d’eux. De plus, les conditions dans lesquelles l’Assemblée peut imposer certaines décisions au Conseil devront être établies, de même que les modalités de l’exercice d’un droit de veto du Conseil sur certaines décisions de l’Assemblée, incluant les possibilités pour l’Assemblée de passer outre à ce veto.

4.3.3.- Les rapports entre les Assemblées et leur représentant

Les dispositions constitutionnelles font à peine mention des rapports entre les Assemblées et leur représentant et précisent seulement que :

• l’Assemblée Départementale est formée d’un représentant de chaque Assemblée Municipale ;

• chaque Assemblée Départementale désigne un membre du Conseil Interdépartemental ;

• les représentants des Assemblées Départementales au CID sont chargés d’assurer la liaison entre l’Exécutif et leur Département.

La définition des rapports qui doivent exister entre les Assemblées et leur

représentant est cependant indispensable à la mise en place de règles de fonctionnement des Assemblées Départementales et du CID.

L'ORGANISATION POLITIQUE

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En effet, le représentant d’une Assemblée doit-il : • être considéré comme ayant été mandaté une fois pour toutes par

l’Assemblée qui l’a choisi et disposant donc de sa liberté d’opinion au sein de l’organe ou il siège ? ou au contraire,

• se consacrer exclusivement à la promotion et à la défense des choix et prises

de position de l’Assemblée qui l’a délégué ?

La définition des rapports entre les Assemblées et leur représentant devra aussi tenir compte du rôle et des exigences de fonctionnement des Assemblées Départementales et du CID. Propositions

• Les membres des Assemblées Départementales doivent être considérés comme des élus à part entière.

• Les membres du CID doivent défendre les décisions et prises de position de leur Assemblée Départementale d’origine à laquelle ils doivent régulièrement faire rapport.

4.3.4.- Les rapports entre Conseils et Assemblées de Collectivités de catégories différentes

La Constitution, en stipulant que l’Assemblée Municipale fait rapport au Conseil Départemental rend obligatoires certains rapports entre ces organes de Collectivités différentes. La loi du 28 mars 1996 a introduit d’autres modalités de rapports entre organes de Collectivités de catégories différentes :

• les budgets de fonctionnement et de développement de la Section Communale doivent être soumis à l’approbation du Conseil Municipal et Départemental ;

• l’Assemblée de Section Communale veille à l’exécution des décisions d’intérêt local prises par les Assemblées et Conseils Municipaux et Départementaux ;

• le CASEC veille au respect des … arrêtés, règlements, mesures, communiqués, avis promulgués par … le Conseil Municipal et Départemental. Le CASEC doit aussi adresser un rapport semestriel de gestion au Conseil Municipal.

La Constitution a aussi octroyé explicitement ou implicitement la personnalité

morale et l’autonomie aux Collectivités Territoriales. Ces dispositions impliquent qu’aucune Collectivité Territoriale ne peut exercer de tutelle sur une autre.

L'ORGANISATION POLITIQUE

34

Propositions • L’expression « l’Assemblée Municipale fait rapport au Conseil Départemental »

ne peut être comprise que comme une obligation de transmission d’actes, d’informations ou de dossiers.

• Les dispositions de la loi de mars 1996 sur les obligations des CASEC envers les

Conseils Municipaux et Départementaux sont aussi incompatibles avec l’autonomie de la Section Communale. Ces dispositions doivent donc être abrogées.

4.3.5.- Les autres rapports entre les Collectivités Territoriales

La Constitution est muette sur les autres rapports entre les Collectivités Territoriales. La personnalité morale et l’autonomie des Collectivités Territoriales ont cependant pour implication que ces dernières peuvent entretenir entre elles, des relations contractuelles, dans les limites de leurs compétences et dans le respect de la Constitution et de la loi.

35

5.- LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES La Constitution de 1987 n’a défini explicitement que les vocations générales de l’ensemble des Collectivités Territoriales. Les dispositions constitutionnelles ont, cependant, aussi octroyé des compétences à ces dernières et à certains de leurs organes, ainsi qu’à l’État. Ces dispositions, ainsi que celles qui établissent la représentativité politique et la légitimité électorale de ces organes, déterminent aussi, implicitement, les vocations spécifiques des différentes catégories de Collectivités Territoriales de même que les aspects essentiels du cadre de la répartition des compétences entre l’État et ces dernières.

5.1.-Les vocations générales La Constitution fait des Collectivités Territoriales un des piliers du nouvel État haïtien, les intègre dans un nouveau projet de société et établit leurs vocations générales qui consistent à :

• participer à la mise en place d'un régime politique dont les principaux objectifs sont :

o la citoyenneté et l’épanouissement des individus ; o l’institutionnalisation d’un régime politique qui renforce la

souveraineté populaire ; o la cohésion sociale et culturelle ainsi que l’équité économique ; o la décentralisation et la participation

• assurer la représentation politique de toute la population dans les décisions

nationales ou locales ;

• stimuler les initiatives locales en vue du développement économique, social et culturel ;

• assurer partiellement ou complètement la desserte en certains services

publics ou collectifs ;

• assurer la concertation et la participation de toute la population aux grandes décisions nationales.

5.2.-Les vocations spécifiques

Les vocations spécifiques des différentes catégories de Collectivités Territoriales peuvent être déduites de la composition et des modalités de constitution de leurs organes ainsi que des tendances qui se dégagent de l’octroi de certaines compétences par la Constitution. Les vocations de la Collectivité

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

36

Départementale sont ainsi implicitement définies comme étant essentiellement politiques et stratégiques, celles de la Collectivité Communale, surtout opérationnelles, mais aussi politiques et celles de la Collectivité de Section Communale, avant tout politiques, mais pouvant inclure pour des raisons pratiques, un aspect opérationnel limité. La Collectivité Territoriale Départementale assure l’intégration et la représentation des intérêts et des volontés des Communes qui la constituent, en vue, principalement, de l’exercice des compétences qu’elle partage avec l’État.

Collectivité Territoriale la plus étendue, le Département bénéficie explicitement, selon la Constitution, de la personnalité morale et de l’autonomie, et est doté d’une Assemblée composée d’élus indirects représentant chacune des Assemblées Municipales. L’Assemblée Départementale :

• désigne, en son sein, un représentant au Conseil Interdépartemental ; • soumet au choix du Président de la République les listes de personnes parmi

lesquelles seront nommés les juges des Cours d’Appel et des Tribunaux de Première Instance ;

• prépare la liste des personnes parmi lesquelles seront choisis les membres du Conseil Electoral Permanent ;

• élit le Conseil Départemental et l’assiste dans sa tâche; et • fait rapport à l'administration centrale de la gestion du Conseil Départemental.

Le Conseil Départemental, dont les membres ne sont pas forcément tirés de

l'Assemblée Départementale : • administre le Département ; • supplée à toute vacance du Conseil Municipal en attendant la tenue de

nouvelles élections ; • élabore, avec la collaboration de l’Administration Centrale, le plan de

développement du Département ; et • rend compte de sa gestion à l’Assemblée Départementale. Le Conseil Interdépartemental, composé d’un représentant de chaque

Assemblée Départementale, constitue un mécanisme assurant la participation des Départements à certaines décisions de portée nationale intégrant les Collectivités Territoriales dans l’exercice de compétences auparavant exclusives à l’Exécutif.

Les membres du CID sont chargés d’assurer la liaison entre l’Exécutif et leur Département respectif et participent, avec voix délibérative, aux séances du Conseil des Ministres portant sur :

• les projets de décentralisation ; • les projets de développement du pays au point de vue social, économique,

commercial, agricole et industriel.

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

37

Le CID est aussi chargé d’assister le Conseil des Ministres dans l’élaboration de la loi fixant la portion et la nature des revenus publics attribués aux Collectivités Territoriales.

La Constitution a donc créé un espace de concertation multicommunale, le Département, dont l’Assemblée constitue le cadre d’intégration des volontés et des intérêts communaux en vue de leur prise en compte, au niveau politique, dans certaines décisions de l’Exécutif via la participation du CID au Conseil des Ministres, et de leur inclusion, au niveau technique et administratif, dans le plan de développement du Département, élaboré par le Conseil Départemental, en collaboration avec l’Administration Centrale. La Collectivité Départementale paraît donc conçue pour jouer avant tout un rôle stratégique dans les décisions nationales, à la fois politique et décisionnel.

La Collectivité Territoriale Communale est, avant tout, chargée de participer à l’organisation et à l’amélioration du cadre et des conditions de vie de sa population.

Seule Collectivité Territoriale relativement fonctionnelle avant 1987, la Commune

bénéficie aussi, explicitement, selon la Constitution, de l’autonomie administrative et financière. Le Conseil Municipal, élu au suffrage universel :

• administre la Commune ; • est le gestionnaire privilégié des biens fonciers du domaine privé de l’État

situés dans les limites de la Commune ; • peut bénéficier à sa demande de l’assistance d’un Conseil Technique fourni

par l’Administration Centrale ; • rend compte de sa gestion à l’Assemblée Municipale.

Formée, notamment, d’un représentant de chaque Section Communale,

l’Assemblée Municipale, dont la composition n’est que partiellement définie et dont les modalités d’élection des membres ne sont pas précisées:

• assiste le Conseil Municipal dans sa tâche ; • soumet au choix du Président de la République la liste des personnes parmi

lesquelles seront nommés les Juges de Paix ; • est obligatoirement consultée préalablement à toute transaction concernant

les biens fonciers du domaine privé de l’État situés dans la Commune ; • délègue un représentant à l’Assemblée Départementale; et • fait rapport au Conseil Départemental de la gestion du Conseil Municipal.

Ces dispositions et, en particulier, la composition de ses organes, donnent donc

à la Commune un rôle d’intégration des intérêts généraux de cette Collectivité avec, notamment, ceux de chacune des Sections Communales qui la constituent, en vue, à la fois, de leur représentation à l’Assemblée Départementale et de la gestion des affaires publiques communales. La Commune est donc un acteur politique

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

38

important, non seulement au niveau local, mais aussi au niveau départemental et, indirectement , au niveau national, vu la composition du CID à partir des Assemblées Départementales, elles-mêmes constituées uniquement de représentants des Assemblées Municipales.

La Commune, semble aussi être, selon la Constitution, la seule Collectivité

Territoriale prévue pour assumer d’office des responsabilités de gestion et de mise en œuvre d’éléments du cadre de vie des populations urbaines et rurales. Son caractère opérationnel en fait à la fois un cadre et un agent direct de développement, ce qui est d’ailleurs confirmé par ses attributions de gestion de biens fonciers du domaine privé de l’État et par l’obligation faite à l’Administration Centrale de fournir de l’assistance technique à son Conseil, qui bénéficie, de plus, de la légitimité du suffrage universel direct.

La Collectivité Territoriale de Section Communale paraît être, avant tout, un mécanisme de représentation et de défense des intérêts de sa population.

La plus petite Collectivité Territoriale est administrée par le Conseil

d’Administration de Section Communale, élu au suffrage universel, et assisté par une Assemblée de Section Communale, dont la composition n'est pas définie, mais dont les membres, dans le cadre de la Constitution de 1987, ne peuvent qu’être élus au suffrage universel. La Section Communale dispose, en outre, d’un représentant à l’Assemblée Municipale. Les modalités de nomination ou d'élection de ce représentant ne sont pas non plus définies dans la Constitution.

La Section Communale ne bénéficie constitutionnellement ni de la personnalité morale, ni de l’autonomie, ni d’attributions particulières. Cependant, dans la mesure où elle dispose d’organes politiques, élus au suffrage universel direct, et peut entrer en litige avec l’État, la Section bénéficie, implicitement du même statut que les autres Collectivités Territoriales. Cadre premier de la démocratie locale, la Section Communale doit aussi assurer, en plus de la représentation et la défense des intérêts de sa population, l’intégration de ces intérêts dans les décisions communales, la mobilisation de la communauté ainsi que la participation et le pluralisme politique à ce niveau.

L’existence, à cet échelon territorial, d’une structure politico-administrative

autonome et jouissant des prérogatives de la libre administration, fournit aussi des arguments en faveur de l’octroi à cette Collectivité, de responsabilités opérationnelles orientées sur la desserte en certains services d’intérêt local difficilement dispensés à un autre échelon territorial. De toute façon, ces responsabilités ne pourraient être que très spécifiques et complémentaires à celles de la Commune et de l’État.

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

39

5.3.-Le cadre du partage de compétences

Le cadre du partage de compétences entre l’État et les différentes catégories de Collectivités Territoriales est établi par les vocations de ces dernières, telles que présentées dans les pages précédentes, de même que par les compétences qui ont déjà été attribuées par la Constitution à ces Collectivités ainsi qu’à l’État.

La Constitution a, en effet, octroyé à l’État un ensemble de compétences opérationnelles qui ne peuvent être transférées aux Collectivités Territoriales. Ces compétences concernent :

• la santé (obligation d’assurer à tous les citoyens…les moyens appropriés

pour garantir le maintien et le rétablissement de leur santé) ; • l’éducation et la formation (mise à disposition, gratuitement, aux élèves du

primaire, de fournitures classiques et de matériel didactique, éducation des handicapés et des surdoués, établissement dans chaque Section Communale des structures propres à la formation sociale, civique et économique de la population, financement de l’enseignement supérieur) ;

• la sécurité sociale (établissement d’une caisse de pension de retraite,

protection de la famille) ;

• l’agriculture (réforme agraire, encadrement technique et financier des agriculteurs, établissement des structures nécessaires pour assurer la productivité maximale de la terre et la commercialisation interne des denrées) ;

• la gestion des finances de la République ; • la police nationale ;

• la protection du patrimoine (mise en valeur et protection des sites naturels,

création et entretien de jardins botaniques et zoologiques, protection du patrimoine culturel, des monuments historiques et autres vestiges du passé).

La Constitution a aussi octroyé aux Collectivités Territoriales des compétences

partagées avec l’État. Ainsi, l’éducation, la scolarisation et l’alphabétisation relèvent des responsabilités de l’État et de l’ensemble des Collectivités Territoriales. Les Communes partagent avec l’État la responsabilité de l’enseignement agricole, professionnel, coopératif et technique, assurent la gestion des biens fonciers du domaine privé de l’État et participent aussi au choix des juges de Paix.

Les Départements exercent aussi conjointement avec l’Exécutif, des

responsabilités décisionnelles concernant la décentralisation et l’allocation de ressources aux Collectivités Territoriales ainsi que le développement économique et

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

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social et l’aménagement du territoire aux niveaux départemental et national. Les Départements participent aussi au choix des juges des Tribunaux d’Appel et de Première Instance ainsi que des membres du CEP.

La Constitution confie, enfin, l’administration des Collectivités Territoriales à leur Conseil, tout en octroyant, explicitement ou implicitement, aux institutions décentralisées les compétences liées à leur statut, et, en particulier à l’exercice de leur libre administration.

5.4.-Les propositions de domaines de compétence Divers domaines de responsabilité dans le cadre desquels serait effectuée la

détermination des compétences des différentes catégories de Collectivités Territoriales peuvent ainsi être établis à partir des dispositions et des implications de la Constitution.

Le Département, à vocation essentiellement politique et stratégique, pourrait se

voir confier de nouvelles compétences ayant trait à : • la programmation d’investissements publics ; • la protection de l’environnement ; • l’organisation territoriale de la desserte en certains services ainsi que la

localisation de grands réseaux d’infrastructures et d’équipements ; • le suivi de la mise en œuvre de politiques publiques.

Les compétences de la Commune, dont la vocation est avant tout opérationnelle

et axée sur l’amélioration du cadre et des conditions de vie de la population, pourraient concerner les domaines suivants :

• la promotion du développement économique et social ; • les services sociaux ; • la voirie et les réseaux divers, les infrastructures et les équipements ; • l’assainissement ; • l’enseignement primaire et professionnel ; • l’aménagement urbain.

La Section Communale, chargée de la représentation et de la défense des

intérêts de la population, pourrait être dotée de compétences portant sur : • le respect des droits de ses habitants; • la participation aux décisions d’implantation d’équipements sur son territoire ; • l’exercice du droit de préemption de ses habitants sur les terres du domaine

privé de l’État ; • la salubrité publique ainsi que la gestion de certains services de proximité.

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

41

5.5.-Les critères de détermination des compétences spécifiques La détermination des compétences spécifiques à octroyer aux différentes

catégories de Collectivités Territoriales, dans le cadre des domaines de responsabilité proposés, devra cependant prendre aussi en compte des considérations additionnelles ayant trait à la légitimité, la cohérence et l’efficacité de l’action publique.

La Constitution n’a pas établi de correspondance entre le pouvoir d’intervention

directe des Collectivités Territoriales et la légitimité électorale de leurs organes. D’une manière générale, cependant, le pouvoir d’intervention directe est octroyé, de préférence, aux Collectivités dont les organes, et, en particulier, les organes exécutifs sont élus au suffrage universel direct. La prise en compte de la légitimité électorale dans la détermination des compétences des Collectivités Territoriales aurait donc pour conséquence que le pouvoir d’intervention directe ne pourrait être attribué au Département.

Les décisions d’octroi de compétences aux Collectivités Territoriales devront

aussi répondre à la nécessité de préserver la cohérence de l’action publique et devront donc assurer :

• l’emboîtement des compétences, vu l’emboîtement des divisions territoriales ; • l’attribution de compétences distinctes à l’État ainsi qu’aux différentes

catégories de Collectivités Territoriales, afin de minimiser les doubles emplois et les possibilités de conflits de compétences ;

• le continuum à maintenir entre les fonctions de l’État et celles des

Collectivités Territoriales ; • l’attribution de responsabilités complémentaires, bien que distinctes, aux

structures de l’Administration Publique et aux Collectivités Territoriales ayant en commun le même cadre territorial, afin de renforcer l’intégration et l’articulation de leurs actions.

En même temps, la recherche de l’efficacité de l’action publique va aussi exiger : • l’application du principe de subsidiarité, compte tenu des caractéristiques des

divisions territoriales (en particulier, la superficie et la population), ainsi que des vocations des Collectivités Territoriales ;

• l’octroi de certaines compétences aux Collectivités Territoriales pour assurer

l’impact total souhaité de leur mise en place ;

LES VOCATIONS ET COMPÉTENCES

42

• le maintien parmi les compétences de l’État de la responsabilité de certains services publics en fonction de leur importance ou de la nécessité de garantir la qualité de ces services ;

• la prise en compte de l’incapacité structurelle de l’Administration Publique à

fournir convenablement certains services à toute la population.

La législation en vigueur attribue aux Communes un ensemble de compétences qu’elles n’ont jamais été en mesure d’exercer. Les travaux à entreprendre sur la répartition des compétences devront donc examiner la situation en vue de leur attribuer, d’office, les responsabilités qu’elles exercent déjà. En même temps, la loi sur la Section Communale octroie à cette Collectivité des compétences qui semblent, pour la plupart, calquées sur celles de la Commune. Les articles concernés de cette loi devraient donc être abrogés au plus tôt.

5.6.-Les conditions de succès de la mise en œuvre La mise en œuvre de la répartition des compétences entre l’État et les

différentes catégories de Collectivités Territoriales sera aussi conditionnée, entre autres, par la capacité de ces dernières à exercer les compétences qui leur auront été attribuées. La situation des Collectivités Territoriales va donc, en toute probabilité, imposer que les transferts effectifs de compétences ne soient effectués que très progressivement.

En même temps, ces transferts de compétences pourront difficilement être

réalisés sans la prise de mesures parallèles qui devront inclure :

• la clarification des compétences de l’État ;

• la répartition des attributions entre l’Administration Centrale et les différents niveaux de l’Administration Territoriale ;

• la déconcentration de l’Administration Publique ;

• le renforcement administratif et technique des Délégations et Vice-

délégations ;

• des transferts de ressources et de moyens aux Collectivités Territoriales, en fonction des transferts de compétences ;

• l’élaboration d’un cadre de gestion des services publics intégrant le rôle de

l’État, des Collectivités Territoriales, des ONG et du secteur privé.

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6.- L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE

Les dispositions constitutionnelles confient l’administration des Collectivités Territoriales à leur Conseil, mais ne traitent pas de leur organisation administrative interne.

Des propositions ont donc été élaborées afin d'établir les bases de l’organisation administrative des Collectivités Territoriales et d'assurer le fonctionnement de ces institutions. Ces propositions concernent :

• l'organisation générale de l'administration : o création et mise en place des services administratifs et techniques

nécessaires au fonctionnement des organes et à l’exercice des compétences ;

o nomination d’un Secrétaire Général à la tête de l’ensemble des services,

qui sera aussi chargé d’assurer la permanence de l’institution ;

o possibilité pour les Collectivités Territoriales de créer des structures spécialisées pour la gestion des services marchands.

• le fonctionnement des services :

o octroi par la loi, d’un statut aux agents et employés des Collectivités Territoriales ;

o élaboration et mise en application de procédures réglant le

fonctionnement des services administratifs et techniques.

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7.- LES FINANCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Les ressources à la disposition des Collectivités Territoriales, bien qu’elles aient considérablement augmenté ces dernières années, demeurent encore très réduites par rapport à celles de l’État et représentent moins de 3% du budget national et une proportion encore moindre de l’ensemble des dépenses publiques. En termes absolus, ces ressources sont de l’ordre de trente à quarante gourdes par habitant par an, ce qui est nettement inférieur à la moyenne calculée pour quelques pays d’Afrique de l’Ouest dont la situation est comparable à la nôtre (85 à 125 G par habitant).

L’analyse des principaux aspects des finances des Collectivités Territoriales, particulièrement en ce qui concerne la fiscalité locale, les subventions de l’État et la gestion des dépenses, ont cependant permis de préparer un ensemble de propositions visant l’amélioration de la situation.

7.1.-La fiscalité communale

La fiscalité locale a été établie depuis le dix-neuvième siècle pour permettre aux Communes de disposer de ressources propres (les dépenses des Sections Communales et des Départements, devenus Collectivités Territoriales depuis la promulgation de la Constitution de 1987, sont financées par l’État). Les Communes sont ainsi bénéficiaires d’un ensemble d’impositions locales qui inclut :

• la patente ; • la contribution foncière sur les propriétés bâties (CFPB) ; • les certificats de vente de bétail ; • les droits d’alignement ; • la taxe d’étalonnage ; • les concessions de terrain dans les cimetières ; • la vente des animaux épaves ; • la taxe sur les animaux épaves ; • la taxe sur les échoppes, tonnelles, ajoupas ; • les certificats de bonne vie et mœurs ; • la taxe sur les matériaux et denrées sur la voie publique. • la taxe sur le numérotage des maisons ; • les droits d’abattage des animaux ; • le produit de l’expédition d’actes administratifs • la taxe sur les jeux autorisés ; • le produit de certaines amendes.

Il existe aussi d’autres rubriques d’imposition dont la perception n’est pas

systématique, et, de plus, certaines mairies (et aussi certains CASEC) collectent des taxes et impôts non prévus par la loi.

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

45

La fiscalité communale est aussi caractérisée par :

• les rendements insignifiants de la plupart des taxes, 80 à 95% des recettes

communales étant fournies par deux taxes : la patente et surtout la CFPB ;

• la perception de la plupart des recettes communales par les agences de la Direction Générale des Impôts ;

• l’absence de distinction entre les taxes, les redevances (ex : concessions

dans les cimetières, les droits d’abattage, les taxes d’étalonnage…), les amendes (ex : taxe sur les matériaux sur la voie publique ou sur les animaux épaves…), et, dans le cas des certificats de bonne vie et mœurs, des actes administratifs qui, de plus, n’ont aucun lien avec les compétences des Communes ;

• l’absence quasi-totale d’activités de collecte de taxes en dehors des villes et

des bourgs.

La faiblesse des recettes constitue une autre caractéristique de la fiscalité communale, dont les rentrées, ces dernières années, n’ont pas dépassé 75 millions de gourdes par an. La réticence de bien des maires à taxer leurs administrés, l’indifférence des agents de la DGI, les compétences limitées du personnel communal, l’opacité des procédures de l'administration fiscale, les déficiences dans la tenue des rôles, l’obsolescence de certaines taxes, les problèmes de communication entre les maires et la DGI, la pauvreté de la population, la résistance des contribuables font partie des raisons le plus souvent mentionnées. Il est certain cependant que les taux de recouvrement sont faibles et ont été estimés à moins de 50% pour la CFPB et un peu plus pour la patente qui, ensemble, fournissent l’essentiel des recettes communales. Une assistance technique financée par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) avait permis, entre 1995 et 1998, des améliorations substantielles des recettes des Communes les plus importantes, cependant, l’augmentation ces dernières années, du montant des subventions semble avoir été accompagnée dans bien des Communes, d’une réduction sensible de l’effort fiscal.

Une actualisation de la fiscalité communale permettrait sans doute des augmentations substantielles, en termes relatifs, du rendement des principales taxes communales (en particulier la CFPB et la patente) et pourrait aussi faciliter le financement de certains services publics par des redevances. Cependant, l’augmentation du rendement de la CFPB et de la patente profiterait surtout aux Communes les plus riches et les plus urbanisées. De toute façon, vu la pauvreté généralisée et la concentration des activités économiques et des groupes de revenu intermédiaire et élevé à Port-au-Prince, le rendement de la fiscalité communale, même s’il peut augmenter en termes relatifs, demeurera, en termes absolus, très limité.

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

46

D’autres sources de revenus sont disponibles pour les Communes selon la

législation en vigueur. Il s’agit des emprunts, des revenus du patrimoine ou d’activités rentables, du produit de certaines amendes et des dons et legs. Cependant, seules les Communes de l’agglomération de Port-au Prince obtiennent parfois des avances de caisse tandis que le rendement des autres rubriques est insignifiant. Les dons provenant de la communauté internationale ou d’organisations de la diaspora ne sont pas comptabilisés et, de toute façon, ne sont généralement pas destinés à la Commune.

En fait, les recettes de la plupart des Communes sont tout à fait dérisoires. Les quatre Communes de l’agglomération de Port-au-Prince (Port-au-Prince, Pétionville, Carrefour et Delmas) collectent environ les trois quarts de l’ensemble des recettes communales, tandis que les rentrées des onze Communes générant le plus de recettes représentent près de 90% du total. En d’autres termes, les ressources propres de 122 de nos 133 Communes n’atteignent même pas, en moyenne, deux gourdes par habitant et par an. De fait, les dépenses des Communes sont financées, pour l’essentiel, par les subventions de l’État, qui représentent plus de 80% de l’ensemble des ressources communales et la quasi-totalité des rentrées de la plupart des Communes.

7.2.-Les subventions de l’État Les transferts et subventions de l’État ont augmenté significativement ces

dernières années, surtout depuis la mise en place du Fonds de Gestion et de Développement des Collectivités Territoriales (FGDCT).

Ce fonds, créé en 1996, pour financer les activités des Collectivités Territoriales,

et, en priorité, les salaires du personnel des services administratifs et les indemnités des élus locaux, est alimenté par le produit de nouvelles taxes internes établies à cette fin :

• 20% du prix de vente du paquet de cigarettes ; • 5% sur les primes d’assurance ; • 20 gourdes sur les plaques ou vignettes d’immatriculation de véhicules ; • 8 gourdes par appel téléphonique international ; • 2% de majoration des bordereaux de douane (avec certaines exceptions) ; • 25 gourdes par billet d’avion à destination de l’étranger ; • 1% de retenue sur tout salaire de plus de cinq mille gourdes ; • 1% du revenu net imposable de tout contribuable ; • 5% des montants gagnés à la loterie.

Il n’est toutefois pas facile d’établir de liens entre ces taxes et les activités des Collectivités Territoriales ni avec aucune politique nationale, économique, fiscale ou autre. De plus, certaines taxes paraissent inéquitables (les surtaxes sur les salaires et les revenus, acquittées presque uniquement par les fonctionnaires et par les

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

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employés des sociétés étrangères et des banques), contre-productives (les surcharges sur les primes d’assurance), ou allant à l’encontre des politiques en vigueur (la majoration des droits de douane). Ce mode d’abondement expose aussi le fonds à des fluctuations de rentrées en fonction du rendement des taxes qui pourraient en compliquer la gestion tandis que le choix de financer les Collectivités Territoriales par de nouvelles taxes nationales au lieu d’une réallocation des ressources existantes n’est sans doute pas de nature à soulever l’enthousiasme des contribuables pour la décentralisation.

Ces nouvelles taxes ont cependant fourni au fonds des ressources qui totalisaient, pour l’exercice 2000-2001, un montant de 181 millions de gourdes, devant, en principe être mis à la disposition des Collectivités Territoriales. Le Ministère de l’Intérieur, chargé de la répartition des subventions en attendant le fonctionnement effectif du Conseil Interdépartemental et des Conseils Départementaux, a établi la formule suivante pour les allocations aux Collectivités :

o Mairies………………………………………………………. 50% o CASEC……………………………………………………….30% o Assemblées de Section Communale………………………3% o Assemblées Municipales…………………………………….4% o Assemblées Départementales……………………………...3% o Conseils Départementaux…………………………………...7% o Conseil Interdépartemental………………………………….3%

Une autre formule a été établie pour le partage des allocations entre les

mairies : o 1er Groupe (4 Communes)…………………………………..1% o 2ème Groupe (12 Communes)……………………………..10% o 3ème Groupe (117 Communes)……………………………85% o Fonds d’urgence……………………………………………….4% Le souci de favoriser les Communes les moins bien loties sur le plan des

recettes apparaît clairement dans la formule de répartition des subventions entre les mairies, tandis que l’allocation aux Assemblées de montants calculés à partir du nombre de membres et des coûts de fonctionnement plutôt que d’un pourcentage des rentrées simplifierait probablement ce volet de la gestion du FGDCT.

Les informations de la CNRA sur le FGDCT n’ont pas permis de connaître les montants effectivement distribués aux Collectivités Territoriales au cours de ces dernières années. Elles montrent, cependant, que les ressources à la disposition des Communes les plus défavorisées avaient, en général, au moins quadruplé, dès 1998.

Il n’a pas non plus été possible de connaître les détails de l’affectation actuelle des quelque cent millions de gourdes que représentaient les subventions de l’État aux Collectivités Territoriales au cours des années précédant la création du FGDCT. Des subventions continuent cependant à être accordées, entre autres pour le

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

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paiement des salaires, à la discrétion de l’Exécutif. Ainsi, les quatre Communes de l’agglomération de Port-au-Prince, qui ne bénéficient, en principe, que de 1% des montants réservés aux Communes par le FGDCT reçoivent aussi en plus des allocations traditionnelles (carnaval, fêtes patronales...), d’autres subventions sous forme d’allocations ponctuelles de fonds, de matériel ou d’équipement, ou même de prise en charge directe par l’État de certaines de leurs responsabilités.

7.3.-Les dépenses

Les dépenses des Collectivités Territoriales, malgré leur augmentation substantielle, n’ont cependant pas fait l’objet de mesures particulières concernant l’application des normes administratives en la matière.

Les budgets, lorsqu’ils existent, ne sont que des documents sommaires dont les

rubriques peuvent varier d’une collectivité à l’autre et qui ne peuvent en aucun cas constituer des outils de gestion. A part une approbation éventuelle du Ministère de l’Intérieur, les procédures suivies pour l’adoption et l’exécution des budgets semblent soumises à la discrétion des responsables concernés, qui, de plus, ne sont astreints, dans la pratique, à aucun contrôle, ni obligation de rendre des comptes. Les procédures comptables les plus élémentaires sont ainsi ignorées, d’autant plus que, certaines dépenses sont exécutées directement par le Ministère de l’Intérieur et que, vu le bas niveau des salaires, les qualifications des responsa-bles locaux sont généralement très insuffisantes et que, de toute façon, les dossiers importants ont tendance à disparaître à chaque renouvellement des Conseils…

Par ailleurs, même les Communes qui pourtant ont des responsabilités opérationnelles relativement importantes, consacrent l’essentiel de leurs ressources au paiement de salaires, les autres rubriques étant généralement inférieures à 10% des dépenses totales. Dans de telles conditions, l’augmentation des ressources des Collectivités Territoriales et, en particulier, des Communes, n’a évidemment eu qu’un impact très limité sur l’état des équipements et sur la fourniture des services publics locaux qui pourront difficilement être améliorés sans des réformes sérieuses de la gestion locale.

7.4.-Les propositions Un ensemble de propositions concernant les finances des Collectivités

Territoriales a été élaboré en vue de l’amélioration de la situation. Ces propositions devront permettre d’assurer à la fois : • La viabilité financière des Collectivités Territoriales ; • L’autonomie et la libre administration des Collectivités ; • Le financement adéquat des services publics ; • La transparence et la rigueur de la gestion des fonds publics.

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

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La mise en place des conditions devant permettre des évaluations fiables des

besoins de financement des Collectivités Territoriales, c’est-à-dire des dépenses liées à l’exercice de leurs compétences en plus de celles requises pour le fonctionnement de leurs organes, constitue un préalable à une amélioration durable de leur situation financière et de la gestion de leurs ressources. Ces conditions incluent :

• une répartition claire des compétences entre l’État et les différentes catégories de Collectivités Territoriales ;

• la réforme du cadre de gestion des services publics pour définir et intégrer le rôle de l’État, des Collectivités Territoriales, du secteur privé et des ONG dans ce domaine ;

• la définition de normes de desserte pour les services publics ; • l’estimation des besoins minimum des Collectivités Territoriales en personnel

administratif. Les actions proposées concernent, à la fois, les ressources des Collectivités

Territoriales, la gestion de leurs finances et le renforcement de leur autonomie. La mobilisation de ressources additionnelles au profit des Collectivités

Territoriales va ainsi exiger : • la réforme de la fiscalité locale :

o clarification de la confusion entre taxes, redevances et amendes et élimination de la plupart des taxes locales,

o modernisation des modalités de calcul et de perception de la CFPB et de la patente,

o octroi aux Collectivités Territoriales de la possibilité de fixer les taux et les seuils des taxes locales, la loi fixant l’assiette et les modalités d’application,

o redéfinition des rapports entre les Collectivités Territoriales et la DGI pour permettre le suivi de la perception par ces dernières;

• la rationalisation de la gestion des services marchands :

o définition des services payants, o octroi aux Collectivités Territoriales de la responsabilité de fixer les tarifs

des services payants et de percevoir les redevances, o octroi de la possibilité de créer des structures spécialisées pour la gestion

de certains services et de leur déléguer la perception des redevances;

• la réorganisation des mécanismes de subvention : o abondement du FGDCT par un pourcentage des dépenses publiques

prévues à voter chaque année dans le cadre de l’adoption du budget et affectation au Trésor Public des taxes alimentant actuellement ce Fonds,

o octroi de subventions distinctes pour le fonctionnement et les investissements

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

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o inscription des dotations de l'État aux Collectivités Territoriales au budget de la République,

o établissement par la loi des formules et critères de distribution des subventions aux Collectivités Territoriales;

• la recherche de nouvelles sources de financement :

o adoption d'une réglementation concernant les emprunts des Collectivités Territoriales,

o octroi aux Communes d’un pourcentage des revenus des biens du domaine privé de l’État dont elles participent à la gestion,

o réalisation d’études sur les possibilités de création de nouvelles taxes locales (par ex : taxes sur les propriétés non-bâties),

o canalisation des ressources de la coopération internationale destinées à des interventions d’intérêt local à travers les Collectivités Territoriales.

Les propositions portent aussi sur la mise en place du cadre de gestion des

finances des Collectivités Territoriales ainsi que sur : • les règles et procédures budgétaires :

o obligation d’adopter chaque année un budget équilibré et présentant les prévisions et autorisations de toutes les recettes et de toutes les dépenses, dans la forme prévue par la loi et adoption, le cas échéant, de budgets annexes pour les structures chargées de la gestion de services spécifiques,

o établissement d’une nomenclature budgétaire normalisée et de normes de comptabilité publique applicables aux Collectivités Territoriales et définition de procédures d’adoption des budgets précisant le rôle de chacun des organes,

o limitation des dépenses des Collectivités Territoriales à celles liées à l’exercice des compétences et au fonctionnement des organes,

o présentation séparée de dépenses de fonctionnement et d’investissement, o limitation des dépenses obligatoires au remboursement des emprunts,

dettes et autres obligations financières, à l’entretien du patrimoine, à la rémunération des employés et aux autres dépenses mandatées par la loi, obligation d’octroi de crédits suffisants pour les dépenses obligatoires avant l’inscription au budget de dépenses facultatives ;

• les modalités d’exécution du budget :

o exécution du budget par le président du conseil qui remplit la fonction d’ordonnateur, mise en œuvre par les services de la Collectivité,

o établissement par la loi des conditions d’engagement ainsi que des procédures d’exécution des recettes et des dépenses

o versement mensuel et automatique aux Collectivités Territoriales, du produit des taxes et impôts locaux ainsi que des subventions destinées au fonctionnement ;

LES FINANCES DES COLLECTIVITES TERRITORIALES

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• le contrôle financier : o définition des responsabilités du contrôle de légalité, limité à la vérification

de la conformité des actes financiers à la loi et aux règlements en vue de la saisine éventuelle de la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif,

o définition des modalités du contrôle de la Cour des Comptes, o adoption de dispositions établissant l’obligation de rendre disponibles au

public les budgets et comptes des Collectivités Territoriales, ainsi que les rapports y relatifs,

o octroi aux services de l’État, à chacun des organes et aux groupes de citoyens d’une Collectivité Territoriale de la possibilité de demander un audit financier à la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif.

D’autres propositions concernent le renforcement de l’autonomie de gestion des

Collectivités Territoriales : • l’affectation des ressources des Collectivités Territoriales :

o financement des services payants (au moins des coûts de fonctionnement) par les redevances,

o utilisation du produit des taxes locales pour financer les services non-payants et affectation des subventions aux investissements et au fonctionnement des organes,

o affectation exclusive des dons et legs et autres dépenses extraordinaires aux investissements ;

• le renforcement des capacités administratives des Collectivités Territoriales :

o mise à disposition d’assistance technique, o mise en place de programmes de formation pour les agents et employés

des Collectivités Territoriales ; • le patrimoine des Collectivités Territoriales :

o élaboration de législation sur le patrimoine des Collectivités, o transfert de biens et octroi de subventions de l'Etat en vue de la

constitution d’un patrimoine initial.

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CONCLUSION

La Constitution de 1987 a assigné à la décentralisation un rôle fondamental dans la concrétisation des réformes qu'elle prescrit. Au-delà de l’amélioration des services publics et de la mise en place d’un régime politique et administratif unique sur l’ensemble du territoire national, il s’agit, avant tout, de la construction de l’État de Droit, de l'implantation de la démocratie ainsi que de l’intégration de la population et de sa participation à tous les aspects de la vie nationale.

L’installation de la totalité des organes des Collectivités Territoriales, indispensable à la mise en place effective de ces institutions a été maintes fois différée, mais devra un jour être réalisée. Cette mise en place risque, cependant, de s’effectuer alors qu le cadre légal et juridique et administratif et, en particulier, le rôle, les responsabilités et l’organisation interne, tant des Collectivités Territoriales que de leurs organes ne sont encore que très partiellement définis. Les déficiences du cadre existant risquent fort de reléguer dans l’informel le fonctionnement de ces Collectivités tout en ouvrant la porte à toutes sortes de déviations et d’abus, comme on l’a déjà vu dans le cas de bien des CASEC et de Conseils Municipaux. Une telle situation pourrait aussi compromettre sérieusement l’avenir de la démocratie locale ainsi que la crédibilité des Collectivités et du processus de décentralisation face à la désaffectation et au scepticisme croissants d’une population dont les attentes dans le domaine sont, par ailleurs, souvent confuses.

En même temps, de nombreux travaux restent encore à réaliser, le temps imparti et les moyens alloués n’ayant pas permis à la Commission Nationale à la Réforme Administrative de mener à leur terme l’ensemble des activités prévues pour la préparation de la décentralisation. En effet, comme on peut le constater à la lecture de ce document, certains aspects fondamentaux de l'organisation et du fonctionnement des Collectivités Territoriales ne font toujours pas l'objet de consensus. Les questions concernant le choix des représentants des Assemblées au sein ou en dehors de ces dernières, le fonctionnement conjoint ou séparé des organes, les modalités de constitution des Assemblées de Section Communale, pour ne citer que celles-là, devront donc être tranchées dès que possible. En même temps, de nombreux détails des propositions présentées devront aussi être précisés. Ce n’est qu’alors que pourront être tenues les consultations publiques prévues en vue de finaliser les travaux déjà entamés sur l’élaboration de la politique nationale de décentralisation à partir de laquelle le cadre légal des Collectivités Territoriales et de la décentralisation sera mis en place.

L'adoption d'une législation conforme aux prescrits de la Constitution ne

constituera cependant qu'une des étapes initiales de la mise en œuvre de la décentralisation. La mise en place et le fonctionnement des institutions locales devront être ensuite assurés, et les réformes au niveau national, concernant, en particulier, le cadre général de l'action publique ainsi que l'organisation des structures étatiques devront aussi être réalisées. En même temps, devront être

CONCLUSION

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créées progressivement tant au niveau national qu'au niveau local, les conditions nécessaires à l'organisation des transferts de compétences et de moyens aux Collectivités Territoriales et à la prise en charge locale de nouvelles responsabilités.

Parallèlement, le consensus sur les objectifs et les orientations de la

décentralisation devra être continuellement recherché, tandis que le recours à l'aide externe, indispensable vu l'état des finances publiques, va aussi rendre nécessaire une coordination efficace des appuis de la coopération internationale dans ce domaine.

Face à la complexité des tâches à réaliser et à la faiblesse des moyens

disponibles, la poursuite des efforts nécessaires à la mise en œuvre de la décentralisation sera largement conditionnée par l'adoption par les Pouvoirs Publics, d'une démarche globale permettant d'orienter et de coordonner l'ensemble des actions à entreprendre. L'élaboration d'une telle démarche, qui permettrait aussi de fixer les objectifs à atteindre, d'établir les priorités d'action et de faire face aux éventuelles urgences, devrait sans doute être initiée dès la reprise des activités de préparation de la décentralisation.

Quelle que soit l'approche choisie cependant, l'aboutissement réussi du

processus de décentralisation dépendra, avant tout, d'une volonté et d'une détermination politiques qui ne se sont, toutefois, que rarement manifestées jusqu'à présent...

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BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE Principaux documents utilisés pour l'élaboration de cette synthèse Commission Nationale à la Réforme Administrative : Haïti face aux défis de la

décentralisation (Rapport de diagnostic et cadre d'orientation stratégique en vue de la définition de politiques publiques) préparé par Charles Cadet, décembre 2001

Commission Nationale à la Réforme Administrative, Unité de décentralisation et des

Collectivités Territoriales - Documents de travail - mars 2002 : #1 : Problématique de la décentralisation et réalité des Collectivités Territoriales #2 : Définition et statut des Collectivités Territoriales #3 : Organisation politique #4 : Organisation territoriale #5 : Vocations et compétences des Collectivités Territoriales #6 : Financement des Collectivités Territoriales #7 : Relations des Collectivités Territoriales avec l'État

Commission Nationale à la Réforme Administrative : Matériaux pour l'élaboration

d'une proposition de politique nationale de décentralisation (document de travail) octobre 2002