2004 - Famille Monoparentales

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    Colloque Femmes et insertion professionnelle 1Le Mans, 13 et 14 mai 2004

    Les familles monoparentales, des familles comme les autres maisdes parents plus vulnrables

    Olivier David & Raymonde SchetUMR CNRS 6590 Espaces gographiques et socits

    Universit Rennes2

    Malgr leur banalisation sociale, les familles monoparentales sont lobjet dune attentionparticulire de la part des acteurs politiques et sociaux. Apparu dans la littrature anglo-saxonne dans les annes 1960 sous les appellations one-parent family ou single-parentfamily , le terme monoparental a t progressivement retenu en tant que catgorie

    statistique. Les courants fministes nord-amricains y ont dailleurs largement particip.Toutefois, leur mergence dans les dbats traduit une volution sensible des reprsentations :la place des familles monoparentales a vari entre exclusion, rejet, invisibilit et banalisation.Cette volution est conscutive au dclin de la signification du mariage et la rupture du lienentre sexualit et nuptialit (Bumpass, 1994).

    La catgorie familles monoparentales ne va pas de soi. Les dfinitions sappuient surdiffrents critres, de nature juridique, dmographique, conomique ou encore subjective. Lecritre juridique dfinit la famille par le mariage. Les couples non maris, situation frquentedepuis longtemps dans certaines parties du monde ou en croissance rapide ailleurs, sont alorsconsidrs comme des familles monoparentales. Le critre dmographique, plus proche du

    vcu au quotidien, dfinit la famille monoparentale par labsence de conjoint. Il fautdistinguer les familles monoparentales de jure o il ny a pas de partenaire lgal ou deconcubin et les familles monoparentales de facto o lun des parents est absent pour unelongue dure et o lautre assume le rle de chef de mnage avec enfants. Le critreconomique considre quune famille est dirige par une femme ds lors que celle-ci est laprincipale pourvoyeuse des ressources du mnage. Le critre subjectif revient considrercomme monoparentales les familles se dclarant comme telles, mais il est fortementdpendant des contextes culturels.

    Sans vouloir considrer les familles monoparentales comme une catgorie fige, dont ladfinition ne reposerait que sur un seul critre, nous nous rangerons cependant derrire ladfinition dmographique, la fois plus simple apprhender mais aussi parce quelle couvreune large majorit des situations.

    Cette communication sappuie sur trois tudes que nous avons ralises entre 2001 et2003. La premire, commande par lObservatoire National de la Pauvret et de lExclusionSociale, analysait la pauvret des familles monoparentales en France. La deuxime et latroisime, ralises pour la Caisse Nationale des Allocations Familiales, proposaient unesynthse des connaissances sur la monoparentalit au niveau international pour lune,europen pour lautre. Le contenu de ces travaux nous autorisera sortir du seul cadrefranais, pour largir la rflexion quelques clairages internationaux.

    Ne comportant quun seul actif et trs majoritairement fminines, les famillesmonoparentales sont plus souvent dmunies que les autres, au point que la monoparentalitest frquemment associe la pauvret fminine. Pauvret conomique, mais aussi pauvretsociale puisque le vcu monoparental peut provoquer lisolement social et compromettre le

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    Manuscrit auteur, publi dans "N/P"

    http://hal.archives-ouvertes.fr/http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00291535/fr/
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    dveloppement des individus qui les composent (parents et enfants). Dans un premier point,nous prsenterons les caractristiques dmographiques des familles monoparentales. Ensuite,la somme des contraintes pesant sur la vie quotidienne des monoparents et de leurs enfantsnous orientera vers lanalyse des difficults dans laccs lemploi des parents seuls, souslangle notamment des discriminations lies au genre. La dernire partie mettra en videnceles impacts de la pauvret conomique et sociale sur les risques de marginalisation desfamilles monoparentales.

    DES FAMILLES COMME LES AUTRES ?

    Dun pays lautre, la structure de lensemble des mnages prsente des contrastesimportants. Dans le cas de la France, les deux transformations les plus significatives

    intervenues au cours des dernires priodes intercensitaires sont la croissance de la part desfamilles monoparentales et de la part des personnes seules (Cristofari & Labarthe, 2001).Lobservation par rapport aux seuls mnages avec enfants permet de prendre la mesure de lamonoparentalit en tant que phnomne social. Malgr leur banalisation, et malgr lecaractre plus souvent temporaire quautrefois de la monoparentalit, ces familles prsententdes spcificits dmographiques.

    Des ralits varies

    En 1996, dans lensemble de lUnion europenne, les carts taient importants entre despays faible monoparentalit (Espagne, Italie, Grce, Portugal, mais aussi Luxembourg,Pays-Bas et Autriche) et des pays o la proportion de familles monoparentales tait beaucoupplus leve (Danemark, Belgique, et surtout Finlande 19% - et Royaume-Uni 22%).

    Les situations actuelles sont le rsultat dune croissance dont lintensit et la chronologieont t variables selon les pays. La croissance de la part des familles monoparentales a timportante au Royaume-Uni (comme aux Etats-Unis, au Canada et en Australie) ds lesannes 1970 ; elle sest acclre dans les annes 1990.

    Le phnomne a ensuite t observ dans de nombreux pays dont la France.Relativement stable jusquen 1982 (722 000 en 1968, 775 000 en 1975, 887 000 en 1982), le

    nombre de familles monoparentales avec au moins un enfant de moins de 25 ans a ensuitenettement augment pour atteindre 1 175 000 en 1990 et 1 495 000 en 1999.

    La croissance est encore plus rcente en Europe du Sud. En Italie, le souci de disposerde donnes prcises permettant didentifier les caractristiques des familles monoparentales,ne sest concrtis quau recensement de 2001. La baisse rapide des niveaux de fcondit dansce pays explique celle du nombre de jeunes familles monoparentales qui, ailleurs, ont retenulattention. La population italienne connat cependant, elle aussi, une croissance desnaissances choisies hors mariage et des sparations et, globalement le pays participe latransition des modles familiaux.

    Les familles monoparentales hberges (le mnage comprend plusieurs familles dont

    une famille monoparentale) doivent tre distingues des familles monoparentales isoles (lemnage se rduit la famille monoparentale) tant elles prsentent des caractristiques

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    dmographiques propres. Ces familles monoparentales hberges sont particulirementnombreuses au sud de lEurope. Elles reprsentent, par exemple, plus de 40% du total desfamilles monoparentales espagnoles. Toutes familles monoparentales confondues, les niveauxeuropens sont compris entre 9% (Espagne et Luxembourg) et 23% (Royaume-Uni). EnFrance, en 1999, 21% des familles monoparentales dont la personne de rfrence avait moinsde 30 ans vivent dans un mnage complexe, le plus souvent avec un ou deux de leursascendants (Algava, 2002).

    Quel que soit le pays, cest un nombre croissant dadultes qui, pendant leur vie deparents, sont concerns par la monoparentalit. Lanalyse des caractristiquesdmographiques des monoparents ne prend pas en compte la dimension diachronique. Ellerepose sur les critres de statut matrimonial, dge, et de genre. Les volutions observes dansles statuts matrimoniaux et dans les modalits de constitution des familles monoparentales,combines avec celles de la fcondit, ont eu des rpercussions sur les effectifs et lescaractristiques dmographiques des enfants vivant dans les familles monoparentales.

    Les statuts matrimoniaux et les modes de constitution des familles

    Dans lensemble de lUnion europenne en 1996, 21% des parents sans conjoint taientclibataires, 22% veufs et 57% spars ou divorcs (Chambaz, 2000). Cette situation est lersultat dvolutions importantes dans les statuts matrimoniaux.

    La premire est le dclin du veuvage comme statut matrimonial des parents seuls (de55% des monoparents franais en 1962 11% en 1999). Cette diminution sexplique dabordpar la baisse de la mortalit prcoce. La carte de la part des veufs et veuves dans le total des

    familles monoparentales franaises est troitement corrle celle de la surmortalit prcoce(Schet et al., 2002).

    Sparations et divorces (57% des monoparents franais en 1999 contre 36% en 1962)ont le plus contribu laugmentation du nombre et de la part des familles monoparentales.Les pays o celles-ci reprsentent une part importante des familles avec enfants charge sontceux o les couples sont les plus instables et les divorces et sparations les plus frquents.Cest le cas du Royaume-Uni.

    La croissance de la part des monoparents clibataires (32% des monoparents franais en1999 contre 9% en 1962) a accompagn la banalisation des unions libres. Ces clibataires,particulirement nombreux au Danemark ou en Irlande, ne sont plus les filles mres

    stigmatises dautrefois. Toutefois, dans certains pays, et notamment au Royaume-Uni, lesjeunes mres seules clibataires restent nombreuses.

    Avec le recul de lge moyen au mariage et la maternit observ depuis les annes1960, les naissances chez des femmes seules jeunes ou trs jeunes ont t de plus en plus malacceptes, de plus en plus stigmatises, et au final ont constitu un enjeu politique majeurdans les pays les plus concerns, savoir les Etats-Unis et le Royaume-Uni. En Angleterre etau Pays de Galles, le nombre de conceptions chez des jeunes filles ges de 13 19 ans afortement progress dans les annes 1980 pour atteindre un maximum en 1990 (68 ) avantde diminuer lgrement (63 en 1999). Le taux de fcondit des femmes britanniques demoins de 20 ans est de loin le plus lev dEurope : il est cinq fois plus lev que le taux le

    plus faible, observ chez les jeunes femmes nerlandaises. Neuf fois sur dix, ces naissancesont lieu hors mariage et trois fois sur dix elles ne sont dclares que par la mre.

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    Bien quelles soient souvent penses comme le produit de la dissolution des valeursfamiliales, les maternits prcoces renvoient aussi encore aux modalits traditionnelles deconstitution de la famille dans les milieux populaires o le mariage et la maternit taientporteurs dun espoir de promotion sociale (Martin-Papineau, 2001).

    Les enfants des familles monoparentales

    En 1996, dans lensemble de lUnion europenne, 13% des enfants de moins de 25 ans charge vivaient au sein dune famille monoparentale, les pourcentages variant de 6% en Grce 23% au Royaume-Uni (Whitten, 1998). En ralit, un nombre croissant denfants estconfront la monoparentalit.

    Dans un contexte de tendance la baisse ou la stabilisation des niveaux faibles destaux de fcondit, la progression du nombre denfants vivant dans une famille monoparentaleest dabord la consquence des ruptures familiales. Au Royaume-Uni, le nombre denfants dudivorce a doubl entre 1971 et 1981, passant de 82 000 159 000, pour ensuite se stabiliser ce niveau ; un quart des enfants ns en 1979 a t confront au divorce de ses parents avantdavoir atteint ses 16 ans (Social Trends, 2000).

    La part des enfants vivant avec un seul parent progresse avec lge des enfants. EnFrance, o 15% des enfants de moins de 25 ans vivaient en 1999 dans une famillemonoparentale, les taux passent de 9% pour les 0-2 ans, 12% pour les 3-6 ans, 14% pour les7-11 ans, 16% pour les 12-17 ans, 19% pour les 18-24 ans. Au Danemark, o 16% des enfantsde moins de 18 ans vivent dans une famille monoparentale, les chiffres passent de 11% pour

    les moins de 0 5 ans 20% pour les 15-17 ans (donnes au 1 janvier 2002).Les enfants de familles monoparentales sont donc plus gs que ceux des couples. En

    effet, la monoparentalit intervient le plus souvent aprs une squence de vie en couple. Dansla mesure ou aprs un divorce ou une sparation, les enfants sont dautant plus confis leurmre quils sont jeunes, les enfants vivant avec leur pre sont en moyenne plus gs que ceuxqui vivent avec leur mre.

    Les familles monoparentales sont de taille plus rduite que les autres. En Finlande, parexemple, en 2000, les pres seuls ont en moyenne 1,38 enfant et les mres seules, 1,56, alorsque les moyennes sont de 1,64 pour les couples cohabitants et 1,94 pour les couples maris.Les contrastes entre les familles monoparentales et les couples avec enfants sontparticulirement importants en Irlande, pays o les familles nombreuses restent frquentes : lamoiti des familles monoparentales recenses en 1996 comptent un seul enfant (cest le caspour 26% des couples avec enfants) alors que celles de trois enfants et de quatre enfants etplus reprsentent respectivement 13% et 9% des familles monoparentales contre 22% et 18%pour les couples avec enfants. Cette prpondrance des petites familles ne doit pas faireoublier les familles monoparentales de trois enfants et plus : au Royaume-Uni, les enfantsvivant dans une famille monoparentale fminine comptant trois enfants et plus sont plusnombreux que ceux vivant dans une famille monoparentale fminine dun seul enfant.

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    Les familles monoparentales ? Avant tout des mres seules.

    La diminution constante du veuvage et limportance des sparations contribuent larduction constante de la part des familles monoparentales masculines dans le total des

    familles monoparentales. Celles-ci sont donc trs majoritairement diriges par des femmes(84% des parents seuls en Europe). Cette forte fminisation des parents isols estparticulirement marque au Portugal (94% de femmes). Du fait dun ge au mariage et lapaternit plus tardif, les pres seuls sont gnralement plus gs que les mres qui sont dans lamme situation : la moiti ont plus de 44 ans contre 38 ans pour les femmes (Whitten, 1998).

    Avec moins de veufs et de veuves, plus de spar(e)s et divorc(e)s, la monoparentalitapparat de plus en plus clairement comme le rsultat du choix des parents (Bumpass, 1994).Les caractristiques des familles monoparentales ont t profondment transformes par lesmutations de la structure de lensemble des mnages : aprs avoir t surtout le fait de veuves(55,9 % des familles monoparentales fminines en France en 1968) et de filles mres demilieux dfavoriss, la monoparentalit concerne aujourdhui dabord des femmes divorcesou spares, de tous milieux sociaux lexception du monde agricole o les famillesmonoparentales sont relativement sous-reprsentes.

    Une analyse rtrospective des trajectoires familiales permet destimer qucomportements inchangs, une femme franaise sur trois ou quatre se trouverait au moins unefois dans sa vie en situation dlever seule son ou ses enfants de moins de 25 ans (Algava,2003). La monoparentalit ne peut donc plus tre pense comme un tat mais bien comme unesquence de la vie dune proportion croissante de parents, squence dautant plus courte quele parent et ses enfants sont jeunes. Cette banalisation de la monoparentalit et sa diffusion tous les milieux sociaux ont dbouch sur une plus grande diversit des profils. Pourtant,aucune donne ne semble remettre en cause le constat que les familles monoparentales sont

    plus que les autres, lexception des familles nombreuses avec un seul actif, concernes par lapauvret.

    DES FAMILLES SOUS CONTRAINTES

    La frquence de la pauvret des familles monoparentales trouve son origine dans lamonoparentalit, qui limite le nombre de revenus dans le mnage et qui pose avec une acuitrenforce la question de la conciliation entre travail et famille, mais aussi dans le fait que cesfamilles sont avant tout diriges par des femmes.

    Une plus grande frquence de la pauvret

    En 1996, en France, les taux de pauvret montaire des familles monoparentalesfminines calculs partir des revenus corrigs, cest--dire en prenant en compte les revenusdu patrimoine et les loyers fictifs, taient de 19,8% pour lensemble des famillesmonoparentales, et de 23,9% lorsque les mres taient inactives, contre 8,5% pour lensemble

    des familles avec enfants (Loisy & Crenner, 2000). A nombre denfants identique, entrecouples et familles monoparentales, les taux de pauvret montaire varient du simple plus

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    du double : 14% contre 5,9% avec un enfant charge, 20% contre 6,5% avec deux enfants charge, 24% contre 11% avec trois enfants et plus. De plus, entre 1985 et 1995, la situationsest dgrade puisque le taux de pauvret des familles monoparentales est pass de 11,8% 17% (Herpin & Olier, 1998).

    La situation franaise nest pas exceptionnelle : les familles monoparentaleseuropennes ont en moyenne un niveau de vie1 infrieur de 11% celui des mnages avecenfants comptant un seul actif, de 23% celui de lensemble des mnages avec enfants, et de27% celui de lensemble des mnages (Whitten, 1998 ; Chambaz, 2000). Le risque depauvret est pour elles deux fois plus lev que pour lensemble des mnages. Le dficit deniveau de vie est faible au Portugal, en Grce, en Italie, en Espagne, o lhbergement et lasolidarit familiale sont intenses, et au Danemark. Le dficit de niveau de vie par rapport auxautres familles avec enfants et le taux de pauvret des familles monoparentales sontparticulirement levs en Allemagne, au Royaume-Uni (un tiers des famillesmonoparentales) (Eurostat), et encore plus aux Etats-Unis. Dans ce pays, en 2000, les taux de

    pauvret taient de 11,5% pour les familles monoparentales-hommes et de 24,7% pour lesfamilles monoparentales-femmes contre 4,7% pour les couples avec enfants (US Census).

    La sensibilit des familles monoparentales la pauvret est dautant plus forte que lasituation de parent seul gnre des surcots. Les dpenses lies au logement et la garde desenfants psent particulirement lourd dans le budget des familles monoparentales (Herpin &Olier, 1998), et cela mme si les transferts sociaux rduisent fortement la pauvretconomique de ces familles.

    En Europe, en 1996, les revenus sociaux reprsentent en moyenne 34% des ressourcesdes familles monoparentales contre peine 10% pour lensemble des familles avec enfants.Sans transferts sociaux, la proportion de familles monoparentales pauvres dpasserait une

    famille sur deux. Limpact des transferts sociaux sur la rduction de la pauvret a unegographie qui est celle des politiques sociales : il est faible dans les pays de lEuropemditerranenne, maximal au Danemark (42% des familles monoparentales isoles sontpauvres avant transferts sociaux et 3% aprs) et significatif en Finlande, Autriche, Irlande,Belgique, Pays-Bas, France, mais aussi au Royaume-Uni. Dans ce pays, en labsence detransferts sociaux, plus de 75% des familles monoparentales isoles seraient pauvres. Dans lespays du sud de lEurope (Grce, Italie, Portugal, Espagne), les transferts privs jouent un rlepresque aussi important dans la rduction de la pauvret que les transferts sociaux. Cestransferts passent notamment par lhbergement : lexception du Portugal, les famillesmonoparentales hberges ont des niveaux de vie suprieurs ceux des famillesmonoparentales isoles, limpact de lhbergement tant maximal en Espagne (Chambaz,2000).

    Pour des raisons variables, cette pauvret des familles monoparentales a dabord tperue partir de la question de la pauvret des enfants. Sintresser la pauvret des enfantsde famille monoparentale peut poser problme dans la mesure o cela peut suggrer que cestla monoparentalit en elle-mme qui serait porteuse de risques pour les enfants. Cest le casaux Etats-Unis o les politiques en direction des familles en appellent la ncessit de rduirele nombre de familles monoparentales pour rtablir la famille normale. Mme si une grandeprudence est de rigueur, les donnes imposent de ne pas luder la question.

    1 Le niveau de vie retenu par Eurostat est un niveau de vie standardis dnomm niveau de vie PPA : la Parit

    de Pouvoir dAchat est un taux de conversion sur la base des prix dune slection de produits comparables quitient compte du pouvoir dachat rel de la monnaie (avant leuro). Les montants obtenus en application de cetaux sont appels standards de pouvoir dachat (SPA).

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    En 1996, 21% de lensemble des enfants de lUnion europenne vivaient dans unmnage faible revenu2. A lintrieur de ce groupe, plus dun enfant sur cinq (23%)appartenait une famille monoparentale. En dautres termes, pour ces enfants vivant dans unefamille monoparentale, le risque de vivre dans un mnage faible revenu tait deux fois pluslev que pour les autres (Mejer & Siermann, 2000). Ce risque est fonction de lintensit de lapauvret des familles monoparentales : le taux de pauvret3 des 2,3% denfants espagnols quivivent dans une famille monoparentale est de 31,6% alors quil nest que de 6,7% pour les21,3% denfants sudois vivant dans une famille monoparentale (Unicef, 2000). Aux Etats-Unis, le risque calcul sur la base dune pauvret relative (50% du revenu mdian du pays) est3,5 fois plus lev : en 1997, 55,4% des enfants de familles monoparentales taient pauvrescontre 15,8% de lensemble des enfants. Cette pauvret des enfants concerne dabord ceux quivivent dans les familles monoparentales les plus vulnrables, cest--dire le plus souvent, lesfamilles monoparentales fminines, jeunes, inactives, avec plusieurs enfants.

    Les familles monoparentales ne sont en effet pas toutes gales face aux risques de

    pauvret. La pauvret des familles monoparentales a sa gographie (figure 1). Le nombredenfants est discriminant. Ainsi, malgr des prestations sociales plus levs, les famillesmonoparentales franaises comptant trois enfants et plus, pourtant plus ges et plus souventdivorces que lensemble des familles monoparentales, sont les plus concernes par lapauvret. La dimension ethnique peut galement tre importante. Aux Etats-Unis, les carts semaintiennent entre les femmes blanches non hispaniques seules avec des enfants (en 2000,16,9% dentre elles taient pauvres) et les femmes hispaniques et noires de mme statutfamilial (leurs taux de pauvret taient respectivement de 34,2% et 34,6%). Le facteur le plusdiscriminant est cependant la situation au regard de lemploi.

    2 Enfants charge de moins de 18 ans. Le seuil de pauvret montaire, fix 60% du revenu quivalent mdian

    par personne dans chaque tat membre, nest donc pas comparable au seuil officiel de pauvret des Etats-Unis.Source : Panel communautaire des mnages. Troisime vague lexception de la Finlande et de la Sude.3 Ici, pauvret relative dfinie sur la base dun revenu infrieur 50% du revenu mdian du pays.

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    Figure 1

    et une insertion plus dlicate sur le march de lemploi

    Les parents seuls sont contraints de travailler pour subvenir aux besoins du mnage. Les

    taux dactivit des mres seules sont donc le plus souvent suprieurs ceux des mres vivanten couple. Une typologie des relations lemploi se dessine par grandes rgions

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    gographiques. Dans les pays nord-europens, les taux dactivit des mres seules sontglobalement levs, gnralement suprieurs 70% pour une mre avec un enfant. En Sude,la proportion de parents seuls qui travaillent est trs leve puisquelle est de lordre de 90%,alors quelle oscille entre 50 et 70% dans la plupart des pays de lOCDE (OCDE, 2001). Lespays o les niveaux dactivit des parents seuls sont les plus levs sont aussi gnralementceux o les taux de pauvret des familles monoparentales sont les plus bas.

    Les mres franaises levant seules des enfants ont des taux dactivit plus levs quecelles de tous les autres pays de lUnion europenne. En 1999, 85% des mres sans conjointsont actives (contre 74% de celles qui vivent en couple), mais seulement les deux tiers dentreelles exercent un emploi (Algava, 2002 ; Algava, 2003). De plus, lemploi ne les prserve pasde la pauvret : 40% dentre elles ont un bas revenu du travail (cest--dire infrieur aux 2/3de la mdiane des revenus individuels du travail). Ces chiffres indiquent clairement que lesmres isoles, parce quelles sont seules, mais aussi parce quelles sont femmes et mres, sontconfrontes des discriminations et contraintes qui les handicapent face au march du travail.

    La plus forte participation des mres seules au march du travail saccompagne dunegrande sensibilit au chmage. En France, en 1999, leur taux de chmage est de 23% contre15% pour les mres en couple. Les mres nayant jamais vcu en couple ou nayant jamais tmaries sont les plus touches : les taux de chmage sont respectivement de 31 et 27% contre18% pour les mres de familles monoparentales constitues suite une rupture du mariage ouau dcs du conjoint (Algava, 2003).

    Ces mres seules sont particulirement sensibles aux carts de salaires inhrents auxdiscriminations de genre sur le march du travail. Les diffrences relles de salaires entre lesmres seules et les pres en couple sont en effet renforces par le fait que ces mres intgrentplus souvent des emplois prcaires (OCDE, 2001). Bien que le diplme noffre aux autres

    quune protection relative, les mres seules peu diplmes sont celles qui occupent le plussouvent des emplois prcaires faiblement rmunrs et de courte dure. Elles se retrouventfrquemment au chmage. Lcart de niveaux de diplme entre mres en couples et mresseules est plus marqu pour les plus jeunes : en France, seulement 26% des femmes seulesges de moins de 35 ans ont un diplme gal ou suprieur au baccalaurat contre 41% decelles qui vivent en couple (Algava, 2002).

    Les contraintes qui psent sur les parents seuls, et sont exprimes en terme de difficult concilier les temps professionnels et familiaux, provoquent des discriminations du ct deloffre de travail. Ces contraintes simposent aux mres isoles qui nont pas de partenairepour partager les tches domestiques et le soin aux enfants, et qui doivent assumer un travail,

    source de revenu essentielle pour la famille. Pour elles, lajustement ne peut se faire par uneplus grande participation du pre aux activits domestiques et donc par une redistribution destches entre le pre et la mre. Il passe donc par une adaptation du travail, dautant plusmarque que les enfants sont jeunes et nombreux. Lvolution des rythmes de travail poseencore plus fortement quavant les problmes concrets daccs aux services daccueil desenfants. Les mres seules soucieuses du bien-tre de leur cellule familiale peuvent avoir unintrt mitig pour un retour immdiat lemploi.

    Les configurations spatiales de lactivit et de linactivit des monoparents sont lersultat de la combinaison entre comportements rgionaux en matire dactivit et situationsconomiques des zones demploi (figure 2). A la fin des annes 1990, la part desmonoparents4 ayant un emploi est leve en Bretagne, en Alsace, en Ile-de-France ou encore

    4 Daprs fichier PERSPICAF des allocataires CNAF (1998).

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    dans le nord des Alpes ; elle est par contre faible dans les rgions o les taux dactivitfminins sont plus faibles (nord de la France, Languedoc-Roussillon, Corse). Les niveauxdactivit des monoparents sont galement faibles dans danciens bassins industriels o ladivision sexue du travail laissait peu de place aux femmes sur le march local de lemploiindustriels (Vierzon, Montceau-les-Mines, Le Creusot, Desize). Trs proche de celle de lapauvret des familles monoparentales, la carte des disparits spatiales de linactivit de cesfamilles peut tre considre comme une mise en image de la variabilit des modesdajustement entre vie professionnelle et vie familiale, et des enjeux des ingalits de genrepour des familles monoparentales trs fortement fminines.

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    DE LA PAUVRETE AU RISQUE DE MARGINALISATION

    La pauvret nest jamais unidimensionnelle. Les conditions de vie lies aux aspects nonconomiques de la pauvret sont un facteur supplmentaire de vulnrabilit pour les famillesmonoparentales fminines. Les ingalits de genre croisent les ingalits sociales pourdboucher sur une norme ingalit de destins sociaux (de Certaines et al., 2000). Lesconditions de logements et les capacits maintenir ou tisser des rseaux sociaux alors quesimpose la ncessit de faire face sont deux domaines dmergence de la pauvret desconditions de vie des familles monoparentales.

    Les familles monoparentales face aux marchs du logement

    La rupture des couples saccompagne souvent dune rgression rsidentielle ; lafaiblesse des revenus dune grande partie des familles monoparentales limiteconsidrablement les possibilits de choix rsidentiels. La question du logement est abordersous plusieurs aspects.

    Tout dabord le confort. En Finlande, o les normes sont leves, 81% des famillesmonoparentales bnficient des principaux lments de confort (sanitaires et chauffage)contre 91% des couples avec enfants de moins de 18 ans. Les carts dans laccs au confort

    selon le type de mnages sont beaucoup plus marqus dans les espaces o globalement loffrede logement est de moindre qualit.

    La question du statut et du type de logement est beaucoup plus discriminante Lesmonoparents sont moins souvent propritaires de leur logement et beaucoup plus souventlocataires que les autres familles avec enfants : en France, 30% des mres seules et 54% despres seuls sont propritaires de leur logement contre 65% des couples avec enfants (Algava,2002) ; en Finlande, pays de forte tradition daccession la proprit, les taux sontrespectivement de 55% contre 83% ; en Autriche, de 31% contre 64% (Strell, 1999). Lesfamilles monoparentales sont particulirement prsentes dans le parc locatif social. En France,en 1999, 59% des mres seules locataires vivent en HLM contre 46% des couples avec

    enfants (Algava, 2002). En Angleterre et au Pays-de-Galles, 31 % des monoparents avecenfants dpendants vivent dans le logement social (rented from council) contre 9,2 % desparents avec enfants.

    Surreprsentes dans certains segments du parc de logement, les famillesmonoparentales des pays dvelopps vivent moins souvent dans une maison individuelle etplus frquemment dans lhabitat collectif que les autres familles avec enfants.

    En ce qui concerne le cot, on peut rappeler que le logement reprsente un poste dedpenses important dans le budget des familles monoparentales (Olier & Herpin, 1996).Trouver un logement adapt aux besoins et financirement supportable est souvent difficile :en 1993, les familles monoparentales finlandaises avec au moins un enfant de moins de 7 ans

    et celles dont le plus jeune enfant est g de 7 17 ans consacrent respectivement, enmoyenne, 33,5% et 31,1% de leur budget au logement, contre 21,8% pour les couples avec

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    enfants. Le cot plus rduit pourrait tre le seul avantage de lhabitat social (Laferrre, LeBlanc, Pigeois, 2000).

    La monoparentalit apparat souvent comme un phnomne urbain. Les familles

    monoparentales reprsentent 26% des familles avec enfants Helsinki contre 13,5% pourlensemble de la Finlande (Strell, 1999). En France, les carts entre zones demploi urbaniseset zones plus rurales sont souvent marqus : dans des zones demploi comme celles deRennes, Nantes, Angers, Bordeaux, Toulouse, Strasbourg, la part des familles monoparentalesest nettement suprieure ce quelle est dans les zones demploi voisines, plus rurales, o lapart des familles monoparentales-hommes est plus leve (Schet et al., 2002). Faut-il enconclure quen cas de passage la monoparentalit, les femmes tendraient partir vers la villealors que les hommes resteraient davantage l o ils vivent et travaillent dj ?

    Les carts internes aux agglomrations se font sur la base dune diffrenciation entrevilles-centres et couronnes priurbaines. Dans leur tude sur lvolution de la population deWallonie, Oris et al. (2001), montrent comment, dans lingale capacit des groupes sociaux mettre en uvre des stratgies rsidentielles, les familles monoparentales apparaissentparticulirement dfavorises : la proportion de femmes ges de 25 39 ans vivant seules ouseules avec des enfants est de 36% pour lensemble des centres urbains wallons (elle atteint44% Lige) contre 24% dans les petites villes et le milieu priurbain, et 19% dans lescommunes rurales. En consquence, 22% des enfants de moins de 15 ans des centres urbainsvivent dans une famille monoparentale contre 13% des enfants des petites villes, 12% de ceuxdes communes priurbaines et 11% de ceux des communes rurales.

    Si les caractristiques de statut et de localisation diffrencient nettement les famillesmonoparentales des couples avec enfants, ce sont bien sr les plus pauvres dentre elles quisont victimes des processus sgrgatifs en milieu urbain. Comme pour toutes les familles les

    plus dfavorises, leur marge de choix est limite. Les familles monoparentales franaisessont nombreuses dans les quartiers de la politique de la ville. Les structures familiales desquartiers en ZUS (Zone urbaine sensible) sont caractrises par la surreprsentation desfamilles monoparentales et des familles nombreuses. Dans son Atlas des contrats de ville2000-2006, la Dlgation interministrielle la ville indique que, parmi les quelques 730 000familles rsidant en ZUS et ayant au moins un enfant de moins de 25 ans, prs de 30% sontmonoparentales contre 17,4% au plan national, cette spcificit stant accuse au cours de ladernire dcennie. Ces familles monoparentales qui habitent en ZUS se distinguent des autrespar plusieurs traits qui sont souvent associs une plus grande vulnrabilit : elles ont enmoyenne plus denfants charge, ladulte responsable est plus souvent jeune ; dans prs de 9familles monoparentales sur 10, cet adulte est une femme et la moiti dentre elles nont pasdemploi (DIV, 2002).

    Les familles monoparentales faibles revenus ont donc accs des formes de logement(parc ancien dgrad, de plus en plus rare en raison des oprations de rgnration urbaine, ethabitat social) qui sont loignes du modle dominant de logement pour les familles, savoirla maison avec jardin en proprit. Face des reprsentations qui tendent considrer quelespace idal pour habiter avec des enfants est la campagne, lessor de la priurbanisation etla redistribution des populations au travers des mobilits rsidentielles provoquent des effetsde tri social et de marginalisation (Winchester, 1990) dont les familles monoparentalespeuvent tre les victimes.

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    La vie au quotidien : le poids de lisolement

    Rappeler combien les familles monoparentales fminines souffrent tout particulirementdes phnomnes de relgation permet de prendre le contre-pied des tudes (surtout prsentes

    aux Etats-Unis mais pas absentes en Europe) qui portent sur les rpercussions de la structurefamiliale sur le devenir psychologique, physique et criminel des enfants lorsquils atteignentlge adulte. Demble, ces tudes font de la monoparentalit, et plus particulirement delabsence de pre, un handicap pour les enfants. Lintensit des sgrgations oblige poser laquestion de limpact dun environnement urbain dgrad et subi sur le bien-tre des enfants.Comment ne pas sinterroger sur leffet quartier alors que lvolution des espaces urbainsfranais a t telle que 23% des jeunes de moins de 15 ans habitant en zone urbaine sensibleen 1999 vivent dans une famille monoparentale contre 16% en 1990 (DIV, 2002) ? Cesenfants, qui sont perus comme risque et comme un risque pour les autres, ont desrelations ambivalentes leur environnement, partages entre sentiment dappartenance etconstruction identitaire, et raction face au regard ngatif port sur ces espaces de vie non

    dsirables (Reay & Lucey, 2000).Difficile, la vie au quotidien peut aussi ltre pour le parent seul, en loccurrence le plus

    souvent pour la mre seule. Obliges de faire face en solo, les mres de famillesmonoparentales souffrent largement du manque de temps. Les volutions rcentes et en coursen matire dorganisation et de temps de travail ne sont pas sans risques pour les femmes danslensemble, pour les mres seules en particulier : le dveloppement des horaires atypiques etdu juste--temps dans les dlais de prvenance soulvent de dlicats problmes dorganisationpersonnelle (Silvera, 2002) pour tous les actifs concerns, pour les mres seules plusparticulirement.

    La contrainte spatio-temporelle pse dautant plus que les parents seuls, et surtout les

    mres seules, sont moins motoriss que les autres chefs de mnage. En 2001, plus dunefamille monoparentale franaise sur quatre ne possde pas de voiture contre seulement 5% descouples avec enfants. En Angleterre et au Pays-de-Galles, 46 % des monoparents ne disposentpas de vhicule contre 7 % des couples avec enfants. Si dans les villes, cette moindremotorisation peut tre compense par une plus grande proximit des transports en commun,ce nest pas le cas en milieu rural. Est-ce le hasard si les zones demploi rurales o une forteproportion des familles monoparentales ne possde pas de voiture sont aussi des zonesdemploi o les taux dactivit de ces familles sont faibles ?

    Consquence de cette moindre mobilit, les familles monoparentales pauvres, plus quetoutes autres familles, vivent dans des espaces de vie gographiquement restreints et ont une

    exigence de proximit au quotidien. Labsence de voiture favorise lisolement physique ; ellepeut aussi provoquer lisolement social en inhibant la participation des activits pendant lessoires et les week-ends, quand les transports en commun se rarfient (Winchester, 1990).Quand la monoparentalit fait suite une rupture, celle-ci peut dboucher sur un loignementpar rapport aux amis et un renforcement oblig des liens avec sa propre famille (de Certaines,2000). Ce risque de perte dautonomie et de repli est particulirement net pour les famillesmonoparentales hberges. Fort logiquement, la nature et lingale intensit des liens sociauxstructurent la typologie en sept groupes des familles monoparentales italiennes propose parRossana Trifoletti et al. (2001) :

    - les mres seules la maison qui prolongent leur condition antrieure de filles ;

    - les mres (ou pres) seules qui reviennent la maison et pour lesquelles la cohabitationest la solution qui sest impose dans lurgence ;

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    - les mres seules plus indpendantes qui peuvent mobiliser un rseau familial tendupar choix ;

    - les mres seules qui utilisent et peuvent choisir de manire interchangeable des

    ressources familiales denses et un rseau damis (avec souvent des dynamiques de solidaritcommunautaire propres aux minorits ethniques) ;

    - les mres seules qui substituent la solidarit et la vitalit du rseau damis la famillequi fait dfaut ou lgard de laquelle elles cherchent rduire leur dpendance ;

    - les mres seules seules qui dpendent de laide sociale et des structuresinstitutionnelles ;

    - les mres seules qui doivent aussi prendre soin dun parent g.

    CONCLUSION

    Lvolution des modles familiaux et des modes de constitution des familles a largementcorn lopprobre qui pesait sur les filles mres et a favoris la banalisation des famillesmonoparentales. La tendance au politiquement correct a plutt favoris la tendance affirmerque les familles monoparentales sont des familles comme les autres. Lobjectif de lacommunication tait donc de montrer la ncessit de ne pas oublier que le fait dtre parentseul entrane des contraintes et des surcots auxquels seule une minorit privilgie des mres

    seules (celles qui sont cadres) peut faire facilement face. Pour un plus grand nombre, lamonoparentalit, mme temporaire, saccompagne encore de pauvret et de pauprisation.Oris et al. (2001) font dailleurs des pourcentages denfants de moins de 15 ans vivant dans unmnage monoparental et de femmes de 45 64 ans vivant seules ou en situationmonoparentale, deux des variables de lindicateur synthtique de bien-tre de la populationdes communes de Wallonie.

    La frquence des situations de pauvret chez les familles monoparentales tient lexistence dun vaste espace social de vulnrabilit situ lintersection entre les troisdimensions familiale, conomique, spatiale, de leur vulnrabilit (figure 3). Dans cet espacecontextualis, des dimensions sociales dingalits de genre interagissent avec des dimensionsde genre dingalits sociales : prcarit sociale, pauvret conomique, et pauvret des

    conditions de vie font systme, au risque dune aggravation mutuelle et dune dstabilisationcumulative.

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    Figure 3

    Rfrences

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