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1 Vers une lecture appropriative d’un outil de gestion des ressources humaines auprès des PME : une étude longitudinale du « DIAGRH » auprès de cinq entreprises Nivet B. *, Lièvre P. **, Trouvé P. *** * Groupe ESC Clermont, CRCGM EA 3849 ** Université d’Auvergne et Groupe ESC Clermont, CRCGM EA 3849 *** Groupe ESC Clermont, CRCGM EA 3849. Résumé Que sont devenues les prescriptions en GRH faites auprès de dirigeants de PME deux ans après le passage des intervenants ? Cet article se propose de réaliser une lecture appropriative au sens de Vaujany et Grimand (2005), d’un instrument DIAGnostic RH conçu par le réseau national des CCI, permettant de distinguer ainsi différents types de valeur associés à cet outil de gestion : valeur caution, valeur structurelle, valeur d’usage et valeur construite. Dans une première partie, nous proposons de faire état du champ des outils de gestion en général et des outils de gestion des ressources humaines en particulier, en accordant une place particulière aux théories qui proposent une perspective appropriative. Dans une deuxième partie, nous reconstituerons l’histoire de l’outil de gestion « DIAGRH », de sa conception à sa mise en oeuvre par l’entremise de consultants RH. Dans une troisième partie, nous proposons une étude de cas comparative réalisée auprès de cinq entreprises ayant été accompagnées dans la mise en oeuvre des prescriptions DIAGRH. Dans ce contexte, on aurait pu s’attendre à ce que la valeur structurelle de cet outil de gestion soit dominante, c'est-à-dire qu’elle se traduise par une stricte application des recommandations. Il n’en est rien. Mieux, celle-ci n’apparait pas. En revanche, c’est la valeur caution qui est dominante. Parallèlement, des valeurs en terme d’appropriation se font jour : valeur construite et valeur à l’usage. Nous tentons en conclusion de proposer quelques pistes explicatives des différentes valeurs prises par cet outil de gestion singulier. Mots-clés : outils de gestion, gestion des ressources humaines, perspective appropriative, PME.

2012 Nivet Lievre Trouve

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les outils de gestion

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1 Versunelectureappropriativedunoutildegestion desressourceshumainesauprs des PME : une tude longitudinale du DIAGRH auprs de cinq entreprises Nivet B. *, Livre P. **, Trouv P. *** * Groupe ESC Clermont, CRCGM EA 3849 ** Universit dAuvergne et Groupe ESC Clermont, CRCGM EA 3849 *** Groupe ESC Clermont, CRCGM EA 3849. Rsum QuesontdevenueslesprescriptionsenGRHfaitesauprsdedirigeantsdePMEdeuxans aprs le passage des intervenants ? Cet article se propose de raliser une lecture appropriative au sens de Vaujany et Grimand (2005), dun instrument DIAGnostic RH conu par le rseau national des CCI, permettant de distinguer ainsi diffrents types de valeur associs cet outil de gestion : valeur caution, valeur structurelle, valeur dusage et valeur construite. Dans une premire partie, nous proposons de faire tat du champ des outils de gestion en gnral et des outilsdegestiondesressourceshumainesenparticulier,enaccordantuneplaceparticulire auxthoriesquiproposentuneperspectiveappropriative.Dansunedeuximepartie,nous reconstitueronslhistoiredeloutildegestion DIAGRH ,desaconceptionsamiseen uvreparlentremisedeconsultantsRH.Dansunetroisimepartie,nousproposonsune tude de cas comparative ralise auprs de cinq entreprises ayant t accompagnes dans la mise en uvre des prescriptions DIAGRH. Dans ce contexte, on aurait pu sattendre ce que la valeur structurelle de cet outil de gestion soit dominante, c'est--dire quelle se traduise par une stricte application des recommandations.Il nen est rien. Mieux, celle-ci napparait pas. Enrevanche,cestlavaleurcautionquiestdominante.Paralllement,desvaleursenterme dappropriationsefontjour :valeurconstruiteetvaleurlusage.Noustentonsen conclusion de proposer quelques pistes explicatives des diffrentes valeurs prises par cet outil de gestion singulier. Mots-cls :outilsdegestion,gestiondesressourceshumaines,perspectiveappropriative, PME. 2 Introduction Lobjet de cette communication est de porter un regard sur le devenir de prescriptions faitespar des intervenants auprs de dirigeants de PME dans le cadre dun dispositif institutionnel dincitationlaGRHintitul DIAGRH (diagnosticIndividualisAccompagnement Gestion Ressources Humaines). En 2002, dans le cadre dune politique de modernisation de laGRHauservicedesPetitesetMoyennesEntreprises,initieparlesChambresde Commerce et dIndustrie, un des auteurs a particip la conception, lamise en uvre, au suividundiagnosticdesressourceshumaines,entantquechercheur,ilsepropose aujourdhuiderevisiterceparcoursetdendgagerdesconclusionsquantlaquestionde lusagequiatfaiteffectivementdecedispositif.Nousproposonsdapprhenderce diagnosticcommeun outildegestion ausensdeMoisdon(1997)c'est--direcomme toutschmaderaisonnementreliantdefaonformelleuncertainnombredevariables issues de lorganisation et destines instruire les divers actes de la gestion. Ainsi qualifi, cetoutildegestionestmettreenrelationavecunenvironnementbienprcis.Ennous interrogeantenparticuliersursondevenirnousadoptonsdeplusuneperspective appropriative,selonladfinitiondeGrimand(2006 :18) : Lirelesoutilsdegestiondans uneperspectiveappropriative,cestprendreactedeleurrationalitinteractive,cest sintresserlarencontredelacteuretdeloutil,danslecontexteduneorganisation singulire. Dansunepremirepartie,nousproposonsdefairetatduchampdesoutilsdegestionen gnraletdesoutilsdegestiondesressourceshumainesenparticulier.Dansunedeuxime partie, nous reconstituerons lhistoire de loutil de gestion DIAGRH : de sa conception sa mise en uvre. Dans une troisime partie, nous prsenterons une tude de cas comparative centresur5entreprisesquiontacceptle DIAGRH etdontnoustentonsdesuivreles diversmodesdappropriation.Enconclusion,nousdiscuteronsdesrsultatsdecette rechercheetnousproposeronsquelqueshypothsesexplicativesquantauxdiffrenciations observes en matire dappropriation. 1.Outils de gestion et gestion des ressources humaines Lesorganisationsonttoujoursutilisdesoutilsdegestion,maisforceestdeconstateraujourdhuiquilsprolifrentetqueleursignificationsembleavoirvolu.Destravaux rcents se penchent sur cet objet particulier pour nous clairer.3 1.1.Penser les outils de gestion : un champ de recherche mergeant Les premiers travaux sur les outils de gestion ont t initis en Franceau sein du Centre de Recherche en Gestion de lEcole Polytechnique (CRG) et du Centre de Gestion Scientifique delEcoledesMinesdeParis(CGS)audbutdesannes80.LetravaildeBerry(1983) autour des technologies invisibles a constitu le point de dpart dun champ de recherche sur cettequestiondesoutilsdegestion :surleur nature (HatchueletWeil,1992),surla maniredontilsse contextualisent danslesorganisations(David,1996),surleurs diffrents modes dexistence (Moisdon, 1997)... Ces textes fondateurs ont clair en premier lieu la nature des outils de gestion. Hatchuel etWeil(1992 :123-125)ontdfiniunoutildegestioncomme unconglomratsingulier, constituparspcificationdetroislmentsdenaturediffrentemaiseninteraction :un substrat technique, une philosophie gestionnaire et une vision simplifie de lorganisation .Un substrattechnique .Ilsagitde labstractionquipermetunoutildegestionde fonctionner (David,1996 : 7)(exemples :lesrglesformellesutilises,leslments concrets mobiliss, les algorithmes ventuels). Une philosophie gestionnaire . Il sagit du systme de concepts qui dsigne les objets et les objectifs qui forment la cible de la rationalisation (Hatchuel et Weil, 1992 : 124) et qui confre au substrat technique une nature managriale . Une vision simplifie de lorganisation . Il sagit de la scne primitive qui est associe loutiletluiconfreune vertumobilisatrice (HatchueletWeil,1992 : 125).Celle-ci voqueles rlesquedoiventtenirunpetitnombredacteurssommairement,voire caricaturalement dcrits dans le fonctionnemenent de loutil (Hatchuel et Weil, 1992 : 125) et/oubrossegrandstraits lanatureetlalogiquedinteractiondessavoirsgnrs par loutil de gestion (David, 1996 : 12). Cettedfinitionpermetdedpasserlavisiontraditionnelledesoutilsdegestioncomme exclusivement instrumentale. Moisdon (1997) insiste sur le fait que les outils de gestion ne se rduisentpas normer,rendreconformeslescomportements (Moisdon,1997 :34-35), mais peuvent aussi favoriser la connaissance etlexploration du rel (Moisdon, 1997 : 8). Cesnouvellesperspectivesconfortentladoublefacedesoutilsdegestion :instrumentaleet symbolique. (artefactuelle et sociale ?) 4 EnfinDavid(1996)enrflchissantsurlamaniredontlesoutilsdegestion se contextualisent danslesorganisations,souligneleurancragedanslactioncollectiveen fonction de leur orientation soit plutt relation soit plutt connaissance.Cest cette vision renouvele dynamique des outils de gestion que nous retenons pour clairer notreobjetderecherche.Moisdon(1997)dsignecomme outildegestion toute formalisationdelactivitorganise(),toutschmaderaisonnementreliantdefaon formelleuncertainnombredevariablesissuesdelorganisationetdestininstruireles divers actes de gestion . Avec cette acception large du concept doutils de gestion, Moisdon nousinvitepenserlactionorganise.Loutildegestionestenfinuneentitmixteselon Grimand(2006 :17) associantduncotdesartefacts,matrielsousymboliques(des concepts,desschmas,desinterfacesdoutilsinformatiques),delautredesregistres daction, dusage qui vont donner leur sens . 1.2. Les outils de gestion en GRH Leschercheursdansledomainedesressourceshumainesnesontpasenrestedanscette rflexionsurlesoutilsdegestion.Depuislesannes90,Gilbertproposeunerflexion globale sur linstrumentation de gestion en GRH (Gilbert, 1998). A partir dune observation de la monte progressive des outils de gestion en Gestion des Ressources Humaines dans les entreprises, il propose de distinguer trois types doutils (Gilbert, 1998 : 39-41).-lesmodlesprescripteursdeconduites,ilsagitparexempledesmodlesdanalyse prvisionnelle des ressources humaines ou dun processus type de recrutement ; -les outils danalyse du contexte, nous trouverons dans cette catgorie les bilans sociaux, les mthodes dvaluation de la charge de travail ;-lesaideslagestionoprationnelle,danscettecatgorienousidentifieronslesgrillesde classification, les supports dapprciation de lentretien annuel Oiry(2001)travailledunemanirespcifiquesurtoutcequirelvedeladynamiquedes instrumentsdegestion,etplusparticulirementdesoutilsdegestiondescomptences.Ses travaux abordent les processus dessoufflement et de reconception des instruments de gestion danslesorganisations.Grimand(2006)quantlui,proposededvelopperunelecture appropriativedesoutilsdegestionensecentrantsurleregistredumanagementdes connaissances(2006).Cestcettelectureappropriativedesoutilsdegestionquenous comptons mobiliser pour tudier le devenir dun outil de gestion en GRH, le DIAGRH. 5 1.3Vers une lecture appropriative des outils de gestion La question du devenir des outils de gestion a t aborde par deschercheurs de disciplines varies ; nous choisissons de nous arrter sur une approche en construction et nous proposons den explorer ses diffrents aspects.Cadre thoriqueLesoutilsdegestion,technologiesimmatrielles,circulent,sedplacent,sediffusent,se transfrent. Ils ont inspir de nombreux travaux en sociologie, en ergonomie, psychologie . Nous nous appuierons sur les travaux rcents,en sciences de gestion,de De Vaujany (2005) etdeGrimand(2006,2007)quiintroduisentdenouvellesperspectivespourpenser lappropriation des outils de gestion en gnral et en ressources humaines en particulier en se fondantsurlalittratureprcdemmentcite.Lesdeuxauteursconvientapprhenderle processus dappropriation selon quatre regards afin den comprendre toute sa richesse.Unregardrationnel :loutildegestiondemeureunvecteurderationalisationprivilgi.En effetlacomplexitdanslaquelleseretrouventlesorganisationsconduitleursdirigeants toujoursrechercherdesreprsentationsdurelsimplifiespartirdesquellesilsserontplusaptesprendredesdcisions.Loutilconservedanscetteacceptionunvritableattrait,il donnelillusiondemaitriserlereloutoutdumoinsilendonneunclairagesatisfaisant ( envuedelaction ou adaptlaction ).Lesoutilsdegestionpeuventalorstre utiliss selon la vision traditionnelle : normer, rendre conformes les comportements. Dans le domainedelagestiondesressourceshumaines,dcrirelespostesparexempleafinde clarifierlesrlesdechacunpermettraitauxdirigeantsdestabiliserlescomportementsdes membres de leur organisation. Un regard socio-politique : loutilde gestion est peru comme un facteur de structuration des rapportssociaux.Ildonnedupouvoirceluiquilematrise,celuiquilimpose.Ildonne lieudesinterprtationsprivilgiantdesstratgiespersonnellesetsertlejeudesacteurs dcritparCrozieretFriedberg(1977).Lacteurutilisesesressourcesdelafaonlaplus judicieusepossible,comptetenudescontraintesorganisationnellesdumoment.Ilaun comportementstratgique,etloutildegestionpeutservirsondessein.Engestiondes ressources humaines, lentretien dvaluation peut comporter cette dimension politique. Unregardcognitif :loutildegestionestutiliscommeunsupportdapprentissage.Ilva permettre aux utilisateurs de sinterroger sur leurs pratiques et les faire voluer. En analysant les transformations quegnre loutildegestion par rapport aux pratiques prcdentes (par exemple:gaindetemps,meilleurevisibilit),lesacteursfontuntravailderflexivitetde 6 misedistance(Grimand,2007 :6).Engestiondesressourceshumaines,parexemple,un rfrentiel de comptences dveloppe une rflexion sur les attendus professionnels pour bien apprhender une fonction. Enfinunregardsymbolique(Grimand,2007 :p2) :Loutildegestionagitcommesupport identitaireetvecteurdeconstructiondusens.Lesoutilsdegestionontunintrtpour lorganisation parce quils sinscriventdans une relation et un projet plus ou moins souhait par lensemble des acteurs (dans laconception traditionnelle, au contraire, loutil de gestion est conu comme neutre axiologiquement).Ils sont lis laction collective. En gestion des ressources humaines, la mise en place dune charterappelant les valeurs de lentreprise peut ainsi contribuer renforcer le sentiment dappartenance. Cesregardsnesexcluentpas,ilsprsententlesnombreusesdimensions(relation,savoir, sens) que comportent les outils de gestion ettentent de rendre compte des mcanismes en jeu dansla miseenacte decesoutilsdegestionparlesutilisateurs.Ilsagitduprincipe dinsparabilitdveloppparHatchuel(2001)quisupposequetoutethoriedelaction collectivesappuiesurunprincipefondamentaldinsparabilitdessavoirsetdesrelations. Ilsontgalementlemritederepenserlesrapportsentreconceptionetusagedesoutilsde gestion et de remettre en cause le schmalinaire conception-utilisation. La perspective appropriativeDeVaujanyetGrimand(2005)nousproposentoutrecesquatreregardspourpenser lappropriationdesoutilsdegestioncohrentsaveclapropositionsuivante :toute appropriationdoutilsdegestionest unprocessuscontingent,ouvert,complexeet continu ,uneoppositiondesdiffrentstypesdevaleurdesoutilsdegestion :unevaleur caution,unevaleurstructurelleetunevaleurappropriative(construiteoulusage).(De Vaujany,1999 ;deVaujany,2005b ;deVaujanyetGrimand,2005b).Nousdfinirons brivement chacune de ces occurrences :LaValeurcaution : Loutilnestpasmobilisentantquetelmaisparcequilprocureune certainelgitimitsociale.Cestloutilquilfaut avoir pourtre enphase avecles diffrents milieux auxquels on appartient. Loutil est ici considr comme un faire valoir, un alibi.Ilyadanscecasunecontextualisationexternedeloutil,lacontextualisationoula mise en cohrence interne ntant pas recherche en priorit. Il ny a pas dans ce contexte de transfert de connaissance puisque loutil nest pas utilis en tant que tel. 7 LaValeurstructurelle :Lappropriationdeloutilestdansledroitfildelaprescription.Il sagit dune actualisation de la valeur intrinsque de loutil telle quelle a t envisage dans leprocessusdeconception.Noussommesdansunevisionrelativementdterministede loutildegestion.Ilyadanscetteperspectiveunvritabletransfertdeconnaissancevia loutil de gestion en direction de lorganisation. LaValeurconstruite :Lappropriationestunemiseenactedeloutilaveclapossibilitde r-invention et volution des usages. Il y a une premire appropriation dans le sens de la prescription, mais lusager nen reste pas l, ilrinvente (bricole) loutil pour ladapter sonenvironnement.Lemprisedelusageresticirevendiquedentredejeu. Lappropriationconduitunemodificationdeloutilparlorganisation.Ilya contextualisation interne de loutil. Il y a la fois transfert de connaissance puisquil y a une mise en acte de loutil mais aussi mergence de connaissance parce quil y a une rinvention de loutil. LaValeurlusage :Lappropriationestuneconceptionlusage,elleestlelieuotout commence.Lorganisationtransformeloutil,labsorbepourentirerunusagelcartde touteprescription.Ilyaunprocessusdinnovationaucurdelappropriation.Ilyanon seulementmergencedeconnaissance,maissurtoutlcartdelintentionlieloutil.Il sagit dune dmarche spontane, mergente et non dlibre. Nous proposons de lire avec ce cadre thorique, lintgration dun outil DIAGRH auprs de cinq petites et moyennes entreprises. 2. Bref historiquede loutil de gestion DIAGRH Pour apprhender loutil DIAGRH, il est ncessaire de revenir sur sa gense ainsi que sur sa nature.Ladimensioninstitutionnellequilecaractriseintroduitunecomplexitetune ambivalence prsentes de la conception la mise en uvre. 2.1. Le DIAGRH : un outil fortement arrim la logique comptenceLoutil de gestion DIAGRH (DiagnosticIndividualis Accompagnement Gestion Ressources Humaines)sinscritdanslecourantdepensequisestcristallisautourdelanotionde comptence,notammentloccasiondesJournesinternationalesdelaformation 8 organisesen1998parleConseilNationalduPatronatFranais(CNPF)Deauville.Au cours de cette manifestation la logique comptence futprsente (par ses initiateurs) comme unviragecomparablelintroductiondutaylorismeetdutravailpostetcommeun lmentessentielderenouveaududialoguesocial (LarevuedesentreprisesCNPF, n600 :70-72).A cette occasion fut galement propose une dfinition de la comptence professionnelle : il sagitdunecombinaisondeconnaissances,savoirfaire,expriencesetcomportements s'exerantdansuncontexteprcis.Elleseconstatelorsdesamiseenuvreensituation professionnelle partir de laquelle elle est validable. C'est donc l'entreprise qu'il appartient delareprer,del'valuer,delavalideretdelafairevoluer.Cettevolontdassujettir, travers cette logique comptences, les contenus de formation aux besoins des entreprises seradailleurs confirme dans les travaux ultrieurs du CNPF devenu depuis le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF). Lescompagniesconsulairessemparentdecetteapprocheetvontladiffuserauprsdes entreprisesquellesaccompagnent.Ellessengagentdautantplussurcettevoiequelles pressententlelienentrecettelogiquecomptenceetleurinvestissementdansdesples dexcellence en matire de formation. A la fin des annes quatre vingt dix,elles disposent en effetdudeuximedispositifdeformationinitialeaprslEducationNationaleetdupremier entermedeformationprofessionnellecontinue.Ellescomprennentalorstouslesavantages quelles peuvent tirer de cette nouvelle logique pour renforcer leur position dans un contexte de concurrence accrue entre les organismes de formation.Dans un premier temps,non seulement elles font voluer leurs outils de formation vers une approchegestiondescomptences,maisds1998ellesconoiventundispositifde certification des comptences (le Certificat de Comptences en Entreprises : CCE), inspir dumodle des NVQs 1 britanniques pour rpondre aux besoins spcifiquesdes PME/PMI. Dans un deuxime temps, dbut 2001,ungroupe de travail est cre, compos de 10 CCI et de lACFCI (lAssociation des Chambres Franaises de Commerce et dIndustrie) lorigine dunnouveaurseauauseindesCCI :lerseauDEC(DveloppeursdelEmploietdes Comptences).Dansleprambuleendatedu18janvier2001delaChartequiprsidela crationdecenouveaurseau,unensembledejustificationsestainsiavanc : La valorisationdesressourceshumainesconstitueundfietunenjeupourlesentreprisesen 1 Surce dispositif des National Vocational Qualifications mis en place dans la priode thatchrienne, voir Ravet S., Loyte M. (1998). 9 gnral et les PME en particulier. De fait, la gnralisation des technologies de linformation etdelacommunication,lesmutationsdelconomie(lamondialisation,laconstruction europenne,louverturedesmarchs,ycomprisceluidelemploi)etleschangements lgislatifsetrglementairesencours(les35heures,lpargnesalariale,lesmesures dinsertion et de formation en faveur de certaines catgories de salaris) vont entrainer une transformation des modes traditionnels de gestion du personnel et des comptences. Dans un contexte de forte concurrence conomique, la diffrence entre entreprises se fera de plusenplussurlacomptence.Pourlesentreprises,maisaussipourlesindividus(salaris, indpendants,demandeursdemploi),lacquisition,lentretienetlareconnaissancedes comptences individuelles et collectives, seront, de plus en plus, vcus comme une ncessit, sinon une priorit . Face ces nouveaux dfis et non sans avoir rappel leurs activits historiques dappui et de soutienleursressortissants ,lesChambresdeCommerceetdIndustriesengagentalors dansunepolitiquedlibrmentorienteverslesPMEetlesTPE.Sans vouloiricitrierce qui serait de lordre explicite du service public soucieux de protger les petites structures face limpactdesfacteursexternes etcequirelveraitplusimplicitementdelaprospection dun nouveau segment de march, les CCI sassignent alorsune triple mission : - Identifierlesrellesattentesetdifficultsdeschefsdentrepriseenmatiredemploi,de gestion du personnel et dorganisation du travail ; - Sensibiliser les dirigeants de PME/TPE ces questions ; -Initieroumettreenuvredesrponsespertinentes(auniveaudelentreprise,dubassin demploi, de lagglomration, du pays, de la Rgion, de lEurope) (sic) . Cefaisant,lerseaudesChambresdeCommerceetdIndustriesinscritdanslalongue lignedespolitiquespubliquesquiontvis,depuislafindeladernireGuerreMondiale moderniser les PME-PMI. Mais elles le font cette fois-ci en arguant du dveloppement descomptences et desprioritsdelObjectifIIIduFondsSocialEuropenpourla priode 2000-2006. Insensiblement, les dirigeants des PME sont ainsi appels transformer qualitativement leur systme de gestion de la main duvre, prsent comme le point de dblocage privilgi pour amliorerlaperformancedelorganisation.Alpoque,laquasiabsencedoprateurs capables dapporter unappui aux PME/TPE sur le champ des ressourceshumaines adapt leur taille et leurs moyens, laisse le champ libre auxCCI qui en profitent pour laborerune offrecompltedaccompagnement,leDIAGRH.Lesactionsenvisagessexercentau 10 profitdesdirigeantsdePME/TPEetsontralisesenpartenariataveclesPouvoirsPublics, lesservicesdconcentrsdelEtatetenrelationaveclespartenaireslocaux(grandes entreprises,organisationsetsyndicatsprofessionnels,collectivitslocales,associations spcialises,consultants).Desortequunphnomnedeprofessionnalisationde lensemble de ces acteurs selon unmodle unique, celui de la comptence, pourrabientt se concevoir.2.2. Caractristiques structurelles et fonctionnelles de loutil DIAGRH Les enjeux pour les CCI sont tels, quau dtourde lanne2000,elles crentunrseau de conseillersdistinctsdesagentsdeformationdjexistants.CeserontlesDveloppeurs Emploi Comptences (DEC) invents en janvier 2001 par un Groupe Technique National quilaboreunguidedentretienaveclaidedunconsultantparisienprsentcomme spcialiste dans les missions RH en PME/TPE. Deux phases dexprimentation du DIAGRH en entreprises ont lieu en juin et septembre 2001 et loutil est finalis lautomne de la mme anne.Une Formation-Action est alors imposeaux conseillers des CCI avec obligation de suivrelemoduleintitul: MaitriserlediagnosticressourceshumainesenPME ,envue d un accompagnement efficace et individualis du chef dentreprise (Charte du rseau des dveloppeurs de lemploi et des comptences). Le livret daccompagnement de la formation des dveloppeurs (encadr 1), futurs consultants en PME, est en soi trs instructif. Il rvle de faon peine voile la complexit des enjeux et lambivalencedela philosophiegestionnaire 2sous-jacenteauxoutilsutilissetaux actionsentreprises,coinceenpermanenceentreunedmarcheobjectivantedexpertetle contournementdesdifficultstransfrerpurementetsimplementdanslesPME-TPEdes outilscomptences,enmajoritissusdumodledelagrandeentreprise,entrelavolont dapporterunremdeauxlacunesdesPMEenmatiredeGRH,etdonccelledelgitimer laction des CCI auprs des entreprises et celle de professionnaliser en mme temps un corps detechniciensincompltementrompuauxoutilsdeGRH.Cestpourquoi,leprocessus alternant de formation des conseillers rclamant de leur part un vritable engagement - et le diagnosticlui-mme,endpitdeleur exhaustivit maintesfoissouligne,nensontpas moins ouverts , adaptables et perfectibles ,enattentedeconfrontationsplus pousses avec le terrain. 2 Complexit et ambivalence quHatchuel et Weil (1992) nont visiblement pas totalement apprhendes. 11

Encadr 1 La bonne volont dsarme des consultants qui saffrontent aux PME-TPE Cette formation-action dune dure de 5 jours (3 + 2) constitue le moment privilgi pour remettre le DIAGRH chacundesparticipantsquiestalorsenmesuredesappropriercetoutil.Le conseiller sengage dans unprocessus daccompagnement des PME en Ressources Humaines (RH). La Formation-Action a pour objectif de renforcer ses savoir-faire dans la dmarche de diagnostic RH, et ainsi de faire connaitre et reconnaitre ses interventions auprs des entreprises.LobjectifdecetteformationestdtrecapabledemenerundiagnosticRH,delentretien laccompagnement du chef dentreprise, en utilisant de faon adapte le DIAGRH ; -Identifier les enjeux majeurs des PME et acqurir une vision transversale des Ressources Humaines de la PME ; maitriser les techniques et outils essentiels des RH adapts la PME ; -Intgrerleslmentsclsduquestionnementaudirigeant,pourasseoirsacrdibilitetinstaurerla relation de confiance permettant de dceler les priorits exprimes ou non ;-EtrecapabledeffectuerdanslesmeilleuresconditionslarestitutiondudiagnosticRHauprsdu chef dentreprise et de btir le plan daction adapt. La formation sadresse aux conseillers en entreprises des C (R) CI, mobiliss sur lappui conseil aux PME en Ressources Humaines et qui sinscrivent dans une dmarche de professionnalisation dans le respect de la charte qualit du rseau DEC. La formation-action, vise oprationnelle, alterne des phases dapports de contenu RH, de mise en situation,dchangesdevcuprofessionneletdapplicationterrain,entroisphasesindissociableset complmentaires : Session 1 (3 jours) Intersession (quelques semaines) Session 2 (2 jours). LeDIAGRHestdfinicommeunprocessusdaccompagnement ;[il]estune premiretape.Dans un premier temps, les CCI adapteront la rponse lentreprise en fonction des comptences dont elles disposent.LobjectifdurseauDECestdepoursuivrelacrationdautresoutils (spcifiques/thmatiques) et la professionnalisation des conseillers . Source : Direction de la Politique de Formation et de lEmploi, ACFCI, 2002. Danslaphaseinitialedelopration,lACFCIformeraainsiaudiagnostic,selonces modalits, environ une centaine de conseillers des CCI, dorigine varie, issus pour la moiti dentre eux des services conseils et pour lautre moitides services formation, ce dispositif daccompagnementrompantaveclapprochetraditionnelledveloppeparlesconsulaires : dsormais,lentreprisenedoitplustreabordedefaonparcellaireenvalorisantles fonctionsproductivesettechniques,maistraversuneapprochetransversalede lorganisation. Loutil DIAGRH, quant lui doit se drouleren 3 tapes : -Lentretien de diagnostic :Lesconseillerspassentenrevueaveclechefdentrepriseetlaidedunguidedentretien toutes les dimensions de la GRH en insistant sur huit thmatiques (lorganisation du travail, 12 lerecrutement,laformation,larmunration,lagestiondescomptences,lesrelations sociales,linformationetlacommunication,lemanagementdupersonnel).Cerecueil dinformationsestralisenprenantencomptelhistoiremaisaussilesperspectivesde dveloppement de lentreprise. -La synthse de lentretien : Aprsavoiranalyslesdonnesrecueillies,lesconseillersprsententauchefdentreprise, lorsdundeuximerendez-vous,unpremierbilandelaGRHdanslentreprisequisertde base de discussion et dchange entre les parties. De fait, le dirigeant est invit commenter ce diagnostic pour, in fine, le valider lorsquil est jug conforme la situation et aux moyens de lentreprise.-Les recommandations :Sur la base des suggestions dactions, le chef dentreprise dcide de la mise en uvre avec la CCI,outoutautrepartenaire,desprioritsretenuesetdelaprogrammationmoyenterme des autres solutions retenues. (Documents ACFCI) Souhaitantcapitalisersursesdiagnostics,lACFCIencouragelesconseillersfaire remonter leurs diagnostics afin quils soient analyss au niveau national.Cette exigence est trspeurespecte. Cequilamneen2006remettreencauseloutilDIAGRHconsidr commetropcontraignantetdifficilemettreenuvreauprofitdunnouveloutilDIAGC (DiagnosticComptences),dmarcheallgesefocalisantuniquementsurlesaxes principaux :lagestiondurecrutement,descomptencesetdelaformation.Preuvesilen tait, que ladaptation des outils de GRH aux PME-TPE nest pas de tout repos.2.3. Les prescriptions : prtentions et limites Pour raliser au mieux la troisime tape recommandations ou propositions dactions , les conseillersdesCCIontreulesconsignessuivantes lorsdeleurformationlamaitrisede loutil : Ledocumentderecommandationsdoittreundocumentdecommunication,ildoittre court et aller lessentiel. Le rapport doit tre positif et donc dboucher sur des amliorations. Il ne sagit pas dun constatdefaillite,mmesilesdysfonctionnementssontimportants,ilfautredonnerau lecteurunnouveausouffle.Uncataloguedemesuresplusoumoinsdisparatesnapportera rien la rsolution de problmes. 13 Parcontrelechoixdunangledattaque,avecdestapesetdesmoyensbienidentifis, apparaitra plus prometteur. On est dans le domaine des ressources humaines et le rapport doit tre constructif. (Charte du rseau des dveloppeurs de lemploi et des comptences). Cesconsignestransmisesauxconseillersintervenantspeuventparaitrepeuenrapportaux enjeuxannoncs:commentconcilierunedmarchedecommunicationavecunedmarche danalyse qui se veut exhaustive ? Sagit-il pour le conseiller de transmettre aux dirigeants de PMEla visiondumonde laquellecelui-cidoitsesoumettre,ousagit-ildepartirdes dysfonctionnements de lorganisation et de prconiser des amliorations ? Il semble que lon oriente le conseiller vers une mission impossible. En2003unepremireexploitationdesDIAGRHsurlabasedunchantillondecinquante sept entreprises est effectue par lACFCI, elle fait apparaitre des plans dactions peu fournis. LeGroupedeTravailNationalestalorschargderaliserhuit GuidesdeGestiondes RessourcesHumainesdurseauD.E.C. ,ensappuyantsurlexpertisede2nouveaux consultantsformateursenRessourcesHumaines.En2004lesconseillersdesCCIayant ralis des DIAGRH sont invits participer une nouvelle formation dune dure de 2 jours : Maitriserlaccompagnementindividualisengestiondesressourceshumainesde dirigeants de PME-PMI . Les objectifs de cette formation sont triples : - Organisersesressourcestechniquesennavigantdansleshuit GuidesdeGestiondes Ressources Humaines du rseau D.E.C. ; -Approfondir ses connaissances pour faciliter la prise de recul et lapproche globale ; -Renforcersapratiquedaccompagnementendisposantdoutilsmaitriss,dansune dynamique de dveloppement global des ressources humaines. (Direction de la Politique de Formation et de lEmploi, ACFCI, 2004). Lors de leur confrontation avec le terrain, les conseillers CCI se retrouventparfois dsarms facedessituationscomplexes ;lagestiondesressourceshumainesestavanttoutune pratique,lesdirigeantslessollicitentdeplusenplussurle comment pluttquesurle pourquoi . Les huit guides apportent aux praticiens des recommandations, des modles et des fiches pratiques. En 2005, une nouvelle exploitation des DIAGRH est ralise sur la base de 234 entreprises ; 2 problmatiques fortes se dgagent : 14 EnttedesproccupationsdesdirigeantsdeTPE-PMEledveloppementducapital humain : la gestion des comptences (56 %), le recrutement (53%) et la formation (40 %) sont les trois premiers problmes cits par les chefs dentreprise. Autre source majeure de difficults, le management des ressources humaines : Larmunration(39%)lestableauxdeborddelagestiondupersonnel(38%),la communication(37%)etlorganisationdutravail(34%)illustrentbienlesdifficultsdes dirigeants de PME dans la gestion des quipes. LedocumentdesynthsedelACFCIseconclutparuneapprciationdela professionnalisationdesconseillersdesCCIquiontsutraduireenpropositionspuisen actions adaptes aux besoins et contraintes des entreprises les difficults recenses. A preuve, lesproccupationsprioritairesdesTPEetPME(capitalhumainetmanagementdes ressources humaines) ont nourri les plans dactions proposs. Lchantillonsurlequelportelexploitationdesdonnes2005estde234entreprises correspondantauxentreprisesaccompagnesavecloutilDIAGRHsurtoutleterritoire national ;cequirestefaibleauregarddelacentainedeconseillersforms lamaitrisede loutil. Ces DIAGRH sont raliss en fait par un petit nombre de conseillers : une quinzaine. CesconseillersappartiennentdesCCIquiontsouhaitaffichuneorientationfortedans laccompagnement RH des entreprises, ce qui sest traduit pour la plupart dentreeux une cration de poste dans le meilleur des cas ou un amnagement de leur poste prcdent dans les autres cas. Fortdecesconstats,lACFCIproposeen2006unnouveloutil LeDIAGC (Diagnostic Comptences)pouraccompagnerlesentreprisesdansledveloppementdeleurs comptences , au dtriment du DIAGRH jug trop contraignant et chronophage. Le DIAGC propose un diagnostic et un accompagnement principalement orient autour des 3 dimensions majeures de lentreprise : -la formation -le recrutement -la gestion des comptences, En adquation avec les thmatiques exprimes le plus souvent par les chefs dentreprise et les enjeux actuels des CCI et leur stratgie. 15 OnrenforceaveccetoutilDIAGClerisquedelastandardisationdesprescriptionsetdes recommandations dj perceptible avec le premier modle DIAGRH. Les tudes empiriques qui suiventse fondent sur le premier outil DIAGRH. 3. Etude de cas comparativeNousnousappuyonssurdestudesdecasafindemobiliserlemodleproposparde VaujanyetGrimand.Lasituationdecinqentreprisesobservessurunedurerelativement longue de six vingt quatre mois permet de reprer des volutions dans le temps, relatives au processus dappropriation de loutil de gestion DIAGRH. 3.1. La mthode de ltude de cas Notre dmarche de recherche est exploratoire. Elle se fonde sur des tudes de cas. Le recours lutilisation de cas se justifie thoriquement, et linstar dautres mthodes, comme un outil au service duchercheur. Comme le rappelle David (2003) ltude decas permet de traiter unmatriauempiriquetrsvari,cequiconstituelunedesesforces. Nousreprendrons avecDavidladfinitionproposeparYin :unetudedecasestunerechercheempirique qui tudie un phnomne contemporain dans uncontexte rel, lorsque les frontires entre le phnomneetlecontextenapparaissentpasclairement,etdanslaquelleonmobilisedes sources empiriques multiples (1994 : 25). Cettedfinitionpermetsurtout,selonDavid,dedistinguerltudedecasde lexprimentation,delhistoireetdelenqute.Cestunedfinitiontechnique,quinese comprendquenregarddundomainedevalidit.Ltudedecasestapproprielorsquese poseunequestiondutypecommentoupourquoiproposdunensemble contemporain dvnements, sur lesquels le chercheur a peu ou pas de contrle (Yin, 1994 : 20).Ltudedecasestunestratgiederecherchequipermet llaborationdeconjectures explicatives de lobservation. 3.2. Prsentation de ltude de cas Nousavonsretenucinqentreprises.Cetchantillonnapasfaitlobjetduneslectionde notrepart,maisilsestimposdanslecadreduncontratterritorial3quiproposaitle diagnosticetlaccompagnementRH.Toutesvolontaires,cesentreprisessouhaitaient bnficier de ce dispositif pour rsoudre un certain nombre de difficults propres chacune. 3 Le Gouvernement a instaur en fvrier 2003 une procdure de contrat de site visant permettre aux territoires victimes de restructurations de reconstruire leur tissu conomique. 16 - elles ont toutes bnfici dun accompagnement sur plusieurs mois ;- lintervention dont elles ont fait lobjet a eu lieu entre 2006 et 2008 ; - elles ont toutes les cinq des effectifs compris entre 10 et 50 salaris ; - elles ont toutes les cinq une motivation pour lintervention propose. Et enfin toutes les cinq taient confrontes des problmes de GRH. Lintervention en GRH aconsistchaquefoisintroduireunoutildeGRHausensdeMoisdon(1997).Les donnes disponibles sur la situation de ces cinq entreprises couvrent une priode relativement longue, de quelques mois quelques annes, ce qui permet de reprer des volutions. 5 journes de suivi ont t ralises par le consultant dans chacune des entreprises. Les5entreprisesengagesdansleprocessusdaccompagnementont,aumomentde lintervention, des motivations et attentes diffrentes. Il est souligner que seul 20% du cot de la prestation daccompagnement a t imput aux entreprises, les 80% restants ont t pris en charge dans le cadre du contrat territorial (financement DATAR). Tableau 1 : Les motivations des entreprises pour un accompagnement en GRH EntrepriseBAMSN Motivationsdun accompagnement en GRH Souhaitde transmettre lentrepriseet dvaluerle capital humain Miseenconformit aveclaLoidu4 Mai2004et adoptiondune certificationqualit enjeuconomique pourmaintenir lactivitdesous-traitance. Performancede lorganisation ; Obtentiondela certification qualit. Amliorationdes processusRHen rapportavecde nouveauxenjeux conomiqueset anticipationdes dparts la retraite. Souhaitdefaire voluerune fonction administrative degestiondu personnelvers unefonction RHafinde rduireleturn overetles conflits. Plan dactionsRfrentielsdes fonctionsetdes comptences ; Recensementdes comptencescls dtenuesparles collaborateursClarificationdes rleset responsabilits ; Processusclset matricede dfinitiondes responsabilits ; formalisationdu plandeformation avecrecueildes besoins Rfrentielsde fonctionsetde comptences ; procdurede recrutementet miseenplacede nouveaux supports pourlesentretiens professionnelset plan de formationRactualisationde lorganigrammeen intgrantune matricedes fonctions ; recompositiondu comitde direction ; volution des fiches deposteset prparationaux entretiens annuels Positionnement delafonction RHdans lorganigramme etintroduction deprocessus RH : recrutement, entretien et plan de formation. La question qui nous proccupe et laquelle nous allons tenter de rpondre en mobilisant la grille de valeurs des outils de gestionest celledu devenir de ces prescriptions. 3.3. Une lecture appropriative de la mise en uvre du DIAGRH17 Nous avons attribu la valeur caution de la mise en uvre de loutil de gestion DIAGRH aux entreprises B, A et N : LentrepriseBestuneentreprisefamilialecreen1983parledirigeantactuel,lactivit estcelledunescieriespcialiseprincipalementdanslesplanchespaletteetdemanire plus marginale dans le mobilier urbain. Les mtiers sont trs physiques et tenus par des gens peuqualifis(doriginerurale,cumulantpourunepartiedentreeuxuneactivitagricole) ; ils ont tout appris sur le tas. Toutefois de vritables savoir faire se sont dvelopps dans cette entreprise,lescollaborateurssonttrsexpriments.Comptanttransmettresonentreprisele dirigeant souhaite donner le plus de valeur possible son patrimoine et la valorisation de son personnel dont lanciennet moyenneest leve (14 ans)en fait partie, cest ce qui motive sonengagementdansledispositif.Ilrecherchelalgitimitsocialeapporteparlesacteurs du champ institutionnel. Lentreprise A est galement une entreprise familiale reprise par le fils 21 ans (tout juste diplm dun DUT en mcanique et productique) suite au dcs du pre crateur et dirigeantdelentreprise.Lessentieldelactivitestuneactivitdesous-traitancepourdesgrands comptes :rparationdepicesmcaniquesenurgence,ralisationdepicesmcaniqueset ingnieriedeconceptionpourlaralisationdeprototypes.Lentreprisecompte13salaris. Avec lintervention, le dirigeant souhaite dune part se mettre en conformit avec laLoi sur le champ des ressources humaines ; il se rfre la Loi du 4 mai 20044 et sinterroge sur la mise en place du DIF et des entretiens professionnels et, dautre part, envisage de mettre en placeunecertificationqualit:ISO9001,version2000,celle-citantsouventvoquepar sesclients.Danscecas,ledirigeantrecherchelamiseenconformitaveclalgislationen coursetladoptiondenormesetstandardsprescritsdanslachainedevaleurlaquelleson entreprise appartient. Lentreprise N a t cre en octobre 1990. Elle tait au dpart spcialise dans le moulage depltrepourchemines,etsestdepuistenduedautresactivits :laconceptionet fabrication de produits techniques pour chemines et poles, lactivit de ramonage ainsi que 4 La Loi du 4 mai 2004 a introduit des innovations majeures en matire de formation professionnelle continue : DIF, Professionnalisation, obligation de conduire des entretiens professionnelsElle remplace la Loi de 1971. 18 laventeetlinstallationdepolesetdechemines.Ellecompte3sites,leffectifestde20 salarismaisilestenconstantevolution.Linterventionsestfaitelademandedela responsabledupersonnel(pousedudirigeant)quisouhaiteorientersonmtierversune fonctionplusressourceshumaines.Elleconstatequesamissionesttrsadministrativeet quelle subit les dcisions. Les deux derniers recrutements de commerciaux, postes cls dans lentreprise,sesonteffectussanselle.Ellerechercheplusderesponsabilitsauseinde lorganisation.Atraverslaccompagnement,ellerechercheuneprofessionnalisationlui permettantdtreimpliquedavantageauniveaustratgique.Danscecasl,lpousedu dirigeantrechercheunelgitimitdesonrleetdesafonctionentantqueresponsabledes ressources humaines au sein de lentreprise. Le fait de participer cette action organise par les institutionnels est un blanc seing quelle pourra faire valoir en interne. Nous avons attribu la valeur construite de la mise en uvre de loutil de gestion DIAG RH lentreprise S. Lentreprise S a t cre en 1962 et le dirigeant actuel, ancien salari a pris ses fonctions degranten1990.Lentreprisesepositionnesurlesecteurdurotomoulage.LentrepriseS appartientungroupeinternationaletdveloppetroisactivits :lasignalisationroutire,la sous-traitanceetlemobilierurbain.Unedmarchequalit(ISO)atinitie.Elleapermis damliorer les processus internes mais elle na pas pu tre mene son terme. Et comme les clientsnelexigentpaspourlinstant,ledirigeantsesatisfaitdecetteinterruption. Lentrepriseemploie47salaris.LedirigeantdelentrepriseSsouhaiteamliorerses processusRH,carendpitduneactivitporteuse,lahaussedescotsdematirepremire survenuedepuisledbutdelanne2005aunimpactsurlaperformancedelentreprise. Anticiper les dparts la retraite et sentourer de nouvelles comptences sont donc les dfis prochainsdecetteentreprise.Noussommesdanslecadreduneentrepriseindustrielle bnficiantdundbutdestructurationetdemthodesdegestiontransmisesparleGroupe. LademandedinterventionenGRHsinscritdansunevolontdamliorerlesdispositifs existants. Les outils de gestion sont mis en acte avec une finalit bien prcise. Nousavonsattribula valeurlusage delamiseenuvredeloutildegestionDIAG RH lentreprise M 19 LentrepriseMatcreen1998parsondirigeantactuel.En2002unchangementde statutatopr,avecunpassagedelEURLlaSARL.(Ledirigeantayantprfrau dpartcreruneentrepriseunipersonnelleresponsabilitlimite,carildmarraitseulet souhaitait assumer tous les risques). La SARL dispose de 11 salaris. Lactivit principale de lentrepriseestlemarquageindustrielsurtoutsupportplatou3Dselondiffrentes techniques : gravure sur laser, gravure mcanique (50% du CA), srigraphie, tampographie et impressionnumrique.Innover,rflchirdenouveauxproduitseststratgiquepour lentrepriseM.Ledirigeantserapprochedesuniversitsetdesgrandescolesetsuitun parcoursdeformationcontinuedispenseparlaCCI,intitule Professionchef dentreprise aucoursdelaquelle,ilreoitdescoursenstratgie,marketing,contrlede gestion,GRH,systmedinformation.Saprioritestdintroduiretouscesoutilsdegestion danssonorganisationafindelarendreplusperformanteetdobtenirlacertificationqualit ISO9001version2000,notreinterventionsesituantdanscetteprparationavecuneforte demande doutils de la part du dirigeant. Nous sommes face un dirigeant de PE converti lancessitdoptimiserlepilotagedesonentreprisetraversuneinstrumentationde gestion.Acteurdelinstrumentation,cedirigeantexprimenteetadaptecheminfaisantles outils son environnement. 20 Tableau 2 : Synthse des rsultats obtenus EntreprisesBAMSN Valeurdeloutilde gestion DIAGRHValeur cautionIlsagitdansla perspectivedune successionde mettrelentreprise enphaseavecles attentes du march, donnerune lgitimation sociale Valeur cautionLesdonneurs dordreimposent desstandards cetteentreprise pourquellereste unacteurdela chaine de valeur Valeur lusage Ledirigeantest convaincudes bienfaitsdeloutil dusimplefaitde sonutilisation maisinterroge aussiloutil,le testeetlefait voluer de manire rflexive Valeur construiteLedirigeant souhaitefaire voluerdes pratiquesdeGRH djadoptes ;cestsurtoutlaco-constructionlocale etcheminfaisant qui compte. Valeur caution Attentedune lgitimitdela fonctionRH ; lpousedu dirigeantsouhaite saffirmer et prendre plusdeplacedans lorganisation Discussion, conclusionLe principal constat de cette recherche est que la grille mobilise de De Vaujany et Grimand fonctionne pour investir le devenir doutils de gestion.Alalecturedecemodlelavaleurstructurellenapparaitpas.Pourquoinelaretrouve-t-on pas,alorsqueladmarcheduDIAGRHestfondesurcetteidedapplicabilitdes prescriptions faites par les conseillers des CCI, sappuyant sur la vision mcaniciste de loutil de gestion ? Dun point de vue gestionnaire, il pourrait tre voqu un travail insuffisamment pouss lors de la conception de loutil. Loutil provient des pratiques de la grande entreprise et nintgre paslescaractristiquesdesmondessociauxdelaPME.Laquestionseposealors :siles spcificits des PME taient prises en compte est-ce quela valeur structurelle rapparaitrait ? 21 Bibliographie :BeletD. 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Lafonction commercialeest externalise (VRP) RecrutementPasdecrationde poste,seulement remplacementdes salarisretraits/ Pasdepr-requis, seulement motivationPratiquedu bouche oreille Pasde recrutement envisag,Pr-requistechniques exigs, en relation aveclesacteurs du recrutement Turn over Difficults Procdureexiste, recrutementde proximitRecrutementen cours,pasde procdure, recours lintrim FormationUniquementles formations obligatoireset formationsurle tas Formation dadaptationaux nouvelles machines, formationsurle tas Formations obligatoireset formations dadaptationauposte detravail,formation sur le tas Prioritaux formations techniques et formation interne Prioritpourles formations obligatoireset formationsurle tas RmunrationSalairefixe+ primedassiduit +primedefin danne Salairefixe+ primesau rendement Salairefixe+primes en juillet et dcembre Salairefixe+prime dintressement,+ plandpargne,+ primedepanieret mutuelle Salairefixe+ intressement+ primes Gestiondes Comptences Aucune pratiqueAucune pratiqueUnentretienconduit unefois/an,maispas de supports Desentretienschaqueanne,mais paspourlensemble dessalarisetpas formaliss Pas de pratique 24