13
Les écoles de la 2 e chance (E2C) s’adressent aux jeunes de moins de 26 ans sortis du système éduca- tif sans diplôme ni qualification professionnelle (enca- dré 1). Elles ont pour objectif l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, en privilégiant les sorties vers la formation qualifiante. Fondées sur une péda- gogie innovante, ces écoles proposent un parcours d’accompagnement individualisé sur plusieurs mois. Ce parcours est organisé autour de l’alternance de trois volets : remise à niveau dans les savoirs de base, stages en entreprises (clé de voûte du dispositif) et temps socioculturels et sportifs. Chacun de ces trois volets tient un rôle important dans la pédagogie de l’E2C. En fin de parcours, les E2C délivrent une attes- tation de compétences acquises, qui n’a pas encore de reconnaissance officielle. Chaque école est un organisme de formation indépen- dant et a ses propres spécificités. Des enquêtes mono- graphiques réalisées auprès de huit écoles permettent de décrire finement leur fonctionnement, leur orga- nisation et l’accompagnement qu’elles mettent en œuvre (encadré 2). Un doublement des sites et des effectifs accueillis entre 2009 et 2011 En 2013, les écoles de la 2 e chance ont accueilli 14 150 jeunes sur une centaine de sites (graphi- que 1). Le dispositif s’est beaucoup développé entre 2009 et 2011, avec un doublement des sites et des effectifs accueillis. Depuis 2011, la progres- sion reste soutenue, avec une augmentation annuelle L’ÉCOLE DE LA 2 E CHANCE, LA « GRANDE ÉCOLE » DES DÉCROCHEURS MOTIVÉS En France, une quarantaine d’écoles de la 2 e chance (E2C), réparties sur une centaine de sites, proposent un accompagnement global pour favoriser l’insertion sociale et profession- nelle des jeunes sortis sans diplôme du système scolaire, les « décrocheurs ». 14 000 jeunes ont été accueillis en 2013. Afin de mieux connaître le fonctionnement et les pratiques de ces écoles de la 2 e chance, la Dares a fait réaliser en 2012 une étude qualitative. D’après cette enquête monographique, les jeunes accueillis ont connu des ruptures scolaires, souvent associées à des difficultés sociales et personnelles. Leur entrée en E2C est souvent conditionnée à leur motivation. Toutes les écoles partagent les mêmes principes d’individualisation des parcours et d’alternance en entreprise. Toutefois, chacune possède son identité avec ses propres pratiques, en rapport avec son territoire d’implantation. Dans l’école, le parcours des stagiaires est orga- nisé en alternant successivement trois volets : une remise à niveau sur les savoirs de base, des stages en entreprise et des activités d’ouverture sur l’extérieur. Deux axes forts charpentent le modèle développé par les écoles : la stabilisa- tion du parcours des jeunes et le développe- ment de liens étroits avec les acteurs économiques locaux. Il est encore difficile de mesurer le devenir des jeunes à la sortie du dispositif, les pratiques de suivi étant trop hétérogènes entre les écoles. Analyses Dares publication de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques septembre 2014 • N° 068

2014-068 - L’École de la 2 - travail-emploi.gouv.frtravail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2014-068.pdf · Les écoles de la 2e chance (E2C) s’adressent aux jeunes de moins de 26 ans

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  • Les coles de la 2e chance (E2C) sadressent aux jeunes de moins de 26 ans sortis du systme duca-tif sans diplme ni qualification professionnelle (enca-dr 1). Elles ont pour objectif linsertion sociale et professionnelle des jeunes, en privilgiant les sorties vers la formation qualifiante. Fondes sur une pda-gogie innovante, ces coles proposent un parcours daccompagnement individualis sur plusieurs mois. Ce parcours est organis autour de lalternance de trois volets : remise niveau dans les savoirs de base, stages en entreprises (cl de vote du dispositif) et temps socioculturels et sportifs. Chacun de ces trois volets tient un rle important dans la pdagogie de lE2C. En fin de parcours, les E2C dlivrent une attes-tation de comptences acquises, qui na pas encore de reconnaissance officielle.

    Chaque cole est un organisme de formation indpen-dant et a ses propres spcificits. Des enqutes mono-graphiques ralises auprs de huit coles permettent de dcrire finement leur fonctionnement, leur orga-nisation et laccompagnement quelles mettent en uvre (encadr 2).

    Un doublement des sites et des effectifs accueillis entre 2009 et 2011

    En 2013, les coles de la 2e chance ont accueilli 14 150 jeunes sur une centaine de sites (graphi- que 1). Le dispositif sest beaucoup dvelopp entre 2009 et 2011, avec un doublement des sites et des effectifs accueillis. Depuis 2011, la progres-sion reste soutenue, avec une augmentation annuelle

    LcoLe de La 2e chance, La grande coLe

    des dcrocheurs motivsEn France, une quarantaine dcoles

    de la 2e chance (E2C), rparties sur une centaine de sites, proposent un accompagnement global pour favoriser linsertion sociale et profession-

    nelle des jeunes sortis sans diplme du systme scolaire, les dcrocheurs .

    14 000 jeunes ont t accueillis en 2013.

    Afin de mieux connatre le fonctionnement et les pratiques de ces coles de la 2e chance,

    la Dares a fait raliser en 2012 une tude qualitative.

    Daprs cette enqute monographique, les jeunes accueillis ont connu des ruptures

    scolaires, souvent associes des difficults sociales et personnelles. Leur entre en E2C est

    souvent conditionne leur motivation.

    Toutes les coles partagent les mmes principes dindividualisation des parcours et dalternance

    en entreprise. Toutefois, chacune possde son identit avec ses propres pratiques, en rapport

    avec son territoire dimplantation. Dans lcole, le parcours des stagiaires est orga-

    nis en alternant successivement trois volets : une remise niveau sur les savoirs de base, des stages en entreprise et des activits douverture

    sur lextrieur. Deux axes forts charpentent le modle dvelopp par les coles : la stabilisa-tion du parcours des jeunes et le dveloppe-

    ment de liens troits avec les acteurs conomiques locaux.

    Il est encore difficile de mesurer le devenir des jeunes la sortie du dispositif, les pratiques de

    suivi tant trop htrognes entre les coles.

    AnalysesDares

    publication de la direction de l'animation de la recherche, des tudes et des statistiques

    septembre 2014 N 068

  • DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 0682

    de 10 % du nombre de jeunes accueillis. Les coles sont implantes dans lensemble du territoire mtropolitain, except dans louest et le sud-ouest. Elles sont aussi prsentes dans les dpartements et territoires ultramarins (carte 1).

    9 jeunes sur 10 sans diplme

    Les jeunes entrs en E2C en 2013 ont 19,9 ans en moyenne, avec une proportion quilibre de femmes (51 %) et dhommes (49 %), (tableau 1). La parit homme-femme observe dans les effectifs accueillis peut sex-pliquer par labsence de ciblage de mtiers particuliers par les E2C et par une vigilance sur ce critre ds lorien-tation. 9 jeunes sur 10 nont pas de diplme de niveau V ou suprieur (niveaux VI, Vbis, V sans diplme et IV sans diplme). 32 % habitent dans des territoires de la politique de la Ville, cest--dire des quartiers ayant sign un contrat urbain de cohsion sociale (Cucs) ou des zones urbaines sensibles (Zus).

    Des parcours marqus par des ruptures scolaires et personnelles

    Le public vis par les coles de la 2e chance se concentre sur des franges de la population parti-culirement fragilises : des jeunes sortis sans diplme des systmes denseignement tradition-nel (tableau 1) et qui doivent faire face des diffi-cults sociales et humaines marques.

    Les jeunes rencontrs pour ltude prsentent une grande diversit de parcours avant leur entre dans lE2C. Cependant, tous les parcours sont marqus par des ruptures scolaires et souvent personnelles. La plupart des jeunes ont quitt prmaturment le systme ducatif. Certains ont dcroch progres-sivement, avec des difficults scolaires non prises en compte. Dautres ont abandonn leur filire scolaire aprs un chec un diplme ou la suite dune orientation par dfaut ou force. propos de son orientation scolaire, une stagiaire interro-ge dclarait : Moi je voulais faire compta mais on ma mise en secrtariat. Le secrtariat, a ne me plaisait pas .

    Dans les discours des jeunes, lcole classique est largement remise en cause dans sa capacit accompagner un apprentissage et orienter. Les ruptures se retrouvent aussi sur le plan person-nel et social. Les jeunes rencontrs cumulent les problmes dans plusieurs domaines : financiers,

    1 004 1 4281 918

    2 6693 713

    4 7375 704

    8 049

    11 454

    13 03614 150

    9 1115

    26

    3539

    49

    70

    96

    107105

    0

    2 000

    4 000

    6 000

    8 000

    10 000

    12 000

    14 000

    16 000

    2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

    Nom

    bre

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    Nom

    bre

    de s

    ites

    E2C

    Graphique 1 volution du nombre de jeunes accueillis et du nombre de sites E2C

    Source : Rseau E2C France.

    SexeFemme ....................................................................................................... 51Homme ...................................................................................................... 49

    ge lentreMoins de 18 ans ........................................................................................ 9De 18 21 ans ........................................................................................... 67De 22 25 ans ........................................................................................... 2426 ans et plus ............................................................................................ 0

    Niveau de formation lentreBaccalaurat ou suprieur (IV avec diplme ou plus) ................................... 2Niveau baccalaurat sans diplme (IV sans diplme) ................................... 6CAP-BEP (V avec diplme) .......................................................................... 10Niveau CAP-BEP sans diplme (V sans diplme) .......................................... 29Premire anne CAP-BEP, sortie de 3e (V bis) ............................................... 36Sortie avant la 3e gnrale (VI) .................................................................... 17

    NationalitFranaise .................................................................................................... 92Autre ......................................................................................................... 8

    Type dhbergementHbergement autonome ............................................................................ 17Chez les parents ou dans la famille ............................................................. 69En foyer, en centre dhbergement et de rinsertion sociale, lhtel ......... 5Chez des amis ............................................................................................ 5Sans hbergement ou hbergement nomade ............................................. 1Autre ......................................................................................................... 3

    Situation familialeMari, Pacs, vie maritale ........................................................................... 6Clibataire.................................................................................................. 93Divorc, spar, veuf .................................................................................. 1

    Moyen de locomotion principalAucun ........................................................................................................ 11Transport en commun ................................................................................ 75Voiture, moto ............................................................................................. 7Cyclomoteur .............................................................................................. 4Vlo ........................................................................................................... 2Autre ......................................................................................................... 1

    Zone dhabitationQuartier de la politique de la ville ............................................................... 32 Dont zone urbaine sensible (Zus) ......................................................... 25Zone de revitalisation rurale (ZRR) ............................................................... 6

    Travailleur handicap .................................................................................. 2

    * Le suivi par les missions locales des jeunes en E2C est htrogne suivant les rgions. En particulier, moins dun stagiaire E2C sur deux est en contact avec la mission locale en Guadeloupe et en le-de-France.

    Champ : jeunes entrs en E2C en 2013 et reprs par la mission locale, soit 77 % des jeunes rellement accueillis par lensemble des E2C.

    Tableau 1 Caractristiques des jeunes accueillis en e2C en 2013 et en contact avec la mission locale*

    En %

    Source : Parcours 3 ; traitements Dares.

    Feuil1

    Graphique 1: volution du nombre de jeunes accueillis et du nombre de sites E2C

    anneStagiaires accueillisNombre de sites

    20031,0049

    20041,42811

    20051,91815

    20062,66926

    20073,71335

    20084,73739

    20095,70449

    20108,04970

    201111,45496

    201213,036107

    201314,150105

    Source: Rseau E2C France.

    Feuil2

    Feuil3

    Pice jointeG1.xls

    Feuil1

    Tableau 1: Caractristiques des jeunes accueillis en E2C en 2013 et en contact avec la mission locale*

    En %

    Sexe

    Femme51

    Homme49

    ge l'entre

    Moins de 18 ans9

    De 18 21 ans67

    De 22 25 ans24

    26 ans et plus0

    Niveau de formation l'entre

    Baccalaurat ou suprieur (IV avec diplme ou plus)2

    niveau baccalaurat sans diplme (IV sans diplme)6

    CAP-BEP (V avec diplme)10

    Niveau CAP-BEP sans diplme (V sans diplme)29

    Premire anne CAP-BEP, sortie de 3e (V bis)36

    Sortie avant la 3e gnrale (VI)17

    Nationalit

    Franaise92

    Autre8

    Type d'hbergement

    Hbergement autonome17

    Chez les parents ou dans la famille69

    En foyer, en centre dhbergement et de rinsertion sociale, l'htel5

    Chez des amis5

    Sans hbergement ou hbergement nomade1

    Autre3

    Situation familiale

    Mari, Pacs, vie maritale6

    Clibataire93

    Divorc, spar, veuf1

    Moyen de locomotion principal

    Aucun11

    Transport en commun75

    Voiture, moto7

    Cyclomoteur4

    Vlo2

    Autre1

    Zone d'habitation

    Quartier de la politique de la ville32

    Dont Zus25

    Zone de revitatlisation urbaine6

    Travailleur handicap2

    * Le suivi par les missions locales des jeunes en E2C est htrogne suivant les rgions. En particulier, moins dun stagiaire E2C sur deux est en contact avec la mission locale en Guadeloupe et en le-de-France.

    Source: Parcours3; traitements Dares.

    Champ: jeunes entrs en E2C en 2013 et reprs par la mission locale, soit 77% des jeunes rellement accueillis par lensemble des E2C.

    Feuil2

    Feuil3

    Pice jointeT1.xls

  • notamment dendettement (lis des abon-nements tlphoniques, internet), de sant (addictions, malnutrition, sant dentaire, diffi-cults psychologiques), de logement, de mobi-lit (notamment en zone rurale), de dlinquance. Chez les jeunes femmes, la rupture peut aussi faire suite larrive dun enfant : elles ont d quit-ter lcole ou leur formation pendant leur gros-sesse, puis font face des problmes de garde denfants. Le manque de soutien familial vient souvent sajouter aux difficults rencontres. Des jeunes migrants, matrisant mal le franais, et qui disposent parfois dune formation ou de diplmes non reconnus en France, figurent galement parmi les jeunes accueillis en E2C.

    et un enchanement de petits boulots

    Entre lcole et lE2C les jeunes ont souvent confi leur impression de navoir rien fait , en tout cas

    rien dutile selon eux. En ralit, ils ont souvent pris de nombreuses initiatives, plus ou moins fructueuses. La plupart des jeunes rencontrs dcrivent un processus de recherche quils jugent aprs coup erratique. Certains ont enchan des petits boulots, des formations courtes, dautres ont suivi des programmes dinsertion (1). Les expriences en entreprise ou en formation sont peu valorises par les jeunes, qui nen voient pas lutilit. Cette priode de transition semble davan-tage soumise aux alas et au hasard qu une matrise dun parcours personnel en vue dacc-der une situation durable.

    Le dclic dterminant pour linscription lE2C provient soit dun conseil extrieur (de la mission locale ou dun ami), soit dune pression des parents pour trouver quelque chose , ou bien dune dcision individuelle pour sortir de chez soi et faire quelque chose .

    Source : Rseau E2C France.

    Carte 1 Implantation des sites des coles de la 2e chance en 2012

    (1) Dans le cadre dun service civique, dun contrat dinsertion dans la vie sociale (Civis) ou encore de lEpide, tablissement public dinsertion qui accueille des jeunes dsocialiss, en manque de repres et pour lesquels le risque de marginalisation est important.

    3DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 068

  • DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 0684

    La mission locale, principal prescripteur vers les E2C

    Quatre coles sur les huit E2C tudies dpendent trs fortement des prescriptions de la mission locale (plus de 90 % des jeunes de lE2C ont t orients par les missions locales). Cest un atout pour favoriser les synergies dans lorientation et le suivi des jeunes. Du point de vue de lcole, cela constitue une contrainte, potentiellement dsta-bilisante quand le nombre de jeunes orients par la mission locale se rduit ou est irrgulier. Dans loffre des E2C, les missions locales apprcient en particulier la longueur de la formation et lop-portunit pour les jeunes dy entrer tout au long de lanne, contrairement dautres formations. Certains conseillers de mission locale rencontrs situent lE2C comme une offre de la dernire chance , qui serait propose la suite de prc-dentes orientations infructueuses. Daprs un conseiller de mission locale, lE2C ne doit pas tre la solution premire. On essaye dabord dautres choses car, aprs lE2C, si a plante on na pas grand-chose ! .

    En marge des orientations par les missions locales, cinq coles de lchantillon acceptent les candi-datures spontanes de jeunes (en proposant par exemple une prinscription sur internet) ou les orientations par dautres acteurs de linsertion du territoire (Ple emploi, Cap emploi, le conseil gnral, les clubs de prvention, les services de la justice, les acteurs socio-ducatifs). Daprs un permanent dune cole, un jeune qui vient de lui-mme prsente une garantie plus leve en termes de motivation par rapport une orienta-tion par un prescripteur ou une raction la pression des parents. Dans ces cas de candidature spontane, lE2C demande aux jeunes de prendre contact avec la mission locale.

    Une slection fonde sur le volontariat et la motivation

    La slection des jeunes se fait aussi sur la moti-vation. La mesure de la motivation intervient ds lorientation par la mission locale mais, face aux enjeux du recrutement, les coles ont galement mis en place des processus de slection trs struc-turs. Il sagit de dtecter chez les candidats une relle volont de sengager. Daprs un perma-nent dune E2C, lun des critres, cest quon doit sentir chez le jeune quil sait o il est et quil a envie de sen sortir . Un autre permanent donne comme exemple : quelquun qui dit : je viens ici parce que mon conseiller, a commence mal ! . La mobilisation initiale des jeunes est une condition cl de la russite de leur parcours en E2C, lcole venant renforcer une motivation exis-tante, mme si elle est fragile au dpart. Au sujet dun candidat qui na pas russi convaincre, un

    permanent dclare : sil ne se bouge pas, on ne peut rien faire pour lui . La motivation est un gage de moindre dperdition au cours de la formation dans lE2C. Cest aussi un facteur de plus grande russite lissue du parcours car les entreprises reprennent ce mme critre lors de leurs recrutements.

    La slection lentre est plus ou moins forte selon la libert de recrutement accorde par le partena-riat avec la mission locale. Les pratiques de recru-tement sont trs disparates entre les coles, selon les habitudes locales et la mise en place ou non de jurys de slection. Quelques coles qui reoivent de nombreuses candidatures peuvent slection-ner les jeunes. Pour dautres qui ont plus de mal recruter, le processus de recrutement doit assu-rer des entres suffisamment importantes et rgulires de groupes de jeunes tout au long de lanne.

    En guise de premier contact, les coles organisent rgulirement des runions dinformation collec-tives pour susciter le volontariat chez les jeunes. La dure de ces runions varie entre 1h et 2 h 30 selon les E2C de lchantillon. Ensuite, les jeunes volontaires suivent le processus de recrutement qui est propre chaque cole. Dans la majorit des coles, un entretien individuel est propos aux volontaires. Cet entretien est conduit par un permanent de lcole (formateur de lquipe pdagogique, responsable du recrutement, direc-teur) ou, dans une seule cole du panel tudi, par un binme de formateurs. Il a pour objectif principal de mesurer la motivation du jeune. Dans les coles visites, il dure de 15 45 minutes. Certaines E2C le positionnent directement lis-sue de la runion dinformation collective. Quand lentretien est long, il peut permettre didentifier les difficults sociales des jeunes et de proposer un appui spcifique.

    Deux coles de lchantillon organisent des jurys de recrutement lentre la place de lentre-tien de motivation individuel, limage dun premier entretien dembauche dans une entre-prise. linstar des entretiens individuels, ces jurys valuent principalement la motivation et le volon-tariat du jeune. Ils sont composs de permanents de lcole, de partenaires de linsertion (mission locale) et dacteurs conomiques locaux.

    Une priode dessai pour valider le recrutement dans lE2C

    Certains jeunes abandonnent entre lorientation et lentre relle en E2C, du fait dune motiva-tion souvent fragile au dpart. Dans les E2C visi-tes, cet abandon concerne environ 2 jeunes sur 10. Deux coles visites cherchent limiter ce phnomne en rduisant le temps entre lorien-tation et lintgration. Lune accueille tous les 15 jours une permanence de la mission locale

  • dans ses locaux (dans cette cole, linscription en mission locale est un pralable obligatoire pour entrer dans lE2C). Lautre simpose daccueillir les jeunes dans les 48 heures aprs lorientation par la mission locale et propose une entre sous 15 jours maximum.

    Dans toutes les coles, la validation du recru-tement se fait au terme dune priode dessai, appele aussi priode dintgration. Dans les coles visites, la dure de cette priode est de 2 7 semaines. Cette priode dessai permet de

    mesurer la motivation du jeune et ltat de ses acquis sur les savoirs de base. Elle permet dob-server le respect du rglement intrieur de lcole (horaire, assiduit, tenue vestimentaire, ) par le jeune. Un stagiaire rsume ainsi sa priode des-sai : On vient ici et le premier mois cest un mois dessai. On passe des tests pour voir notre niveau scolaire. Et il y a le comportement qui joue. Le comportement, cest la ponctualit et bien se tenir, a veut dire avoir une bonne attitude, suivre en cours. la suite du mois, on a un entretien [avec la directrice] pour savoir si on continue ou

    Encadr 1

    Les CoLes de La 2E ChaNCe

    Le concept dcole de la 2e chance (E2C) est n dune initiative europenne et sinscrit dans le cadre de lEurope de la connaissance . En 1995, le livre blanc Enseigner et apprendre. Vers une socit cognitive pose les principes fondateurs du dispositif. Le projet E2C a t prsent comme lun des outils promus par la Commission europenne pour investir dans lintelligence et pour rduire le nombre de jeunes ne poursuivant pas leur terme leurs tudes ou leur formation.

    Ces coles devaient respecter cinq principes clefs :

    - un public cible exclusivement compos de jeunes qui ne sont plus, en aucune manire, soumis lobligation scolaire ;

    - un partenariat actif des collectivits territoriales, des services sociaux, des associations sociales et du secteur priv ;

    - une approche pdagogique cible sur les besoins, les aspirations et les capacits de lindividu et stimulant un apprentissage actif et construc-tif avec un rle central donn lacquisition de comptences en informatique et dans les autres technologies nouvelles ;

    - un emploi du temps flexible permettant la combinaison de lapprentissage de qualifications de base (lire, crire, compter, sexprimer) et des modules de formations pratiques raliss par et dans les entreprises ;

    - une implantation dans des quartiers dfavoriss o vivent et se rencontrent les jeunes afin de favoriser une stratgie intgre de rnova-tion urbaine qui vise donner la fois de nouvelles perspectives aux jeunes et leur environnement.

    Cest dans le respect de ces principes que lE2C de Marseille voit le jour en 1997, suivie par sept autres coles jusquen 2004. Ces huit E2C forment un groupe dcoles pionnires, qui sont encore aujourdhui motrices dans la stratgie et la rflexion sur lavenir des E2C. En 2004, les coles se fdrent autour du Rseau E2C France. Les coles cres par la suite sont nes du succs des anciennes et des volonts locales. Elles ont consolid le concept du dispositif en bnficiant de lappui des coles pionnires et sont aussi source dinnovations. En 2007, le disposi-tif entre dans le paysage institutionnel avec la loi n 2007-297 du 5 mars 2007 relative la prvention de la dlinquance et linscription dans le code de lducation. Aux termes de larticle L. 214-14 du code de lducation, les coles de la 2e chance proposent une formation des personnes de seize vingt-cinq ans dpourvues de qualification professionnelle ou de diplme. Chacune dentre elles bnficie dun parcours de formation personnalis. Ces coles dlivrent une attestation de fin de formation indiquant le niveau de comptence acquis de manire faciliter laccs lemploi ou une certification inscrite au rpertoire national des certifications professionnelles . Le dcret n 2007-1756 du 13 dcembre 2007 relatif aux E2C prcise le cadre dapplication du dispositif et cre les articles D214-9 D214-12 du code de lducation. partir de lanne 2009, ltat sengage dans le financement de ces coles dans le cadre du Plan Espoir Banlieues, lanc en 2008, ce qui permet de favoriser lessaimage du dispositif.

    Pour assurer la qualit du dispositif, le Rseau des E2C met en place en 2009 un processus de labellisation. Le rfrentiel de labellisation prcise les principes et pratiques des E2C en France, sur avis conforme des ministres chargs de lducation et de la formation profession-nelle. Les structures de formation rpondant ces critres se voient dlivres le label cole de la 2e chance pour une dure de quatre ans, renouvelable.

    En 2012, le budget de fonctionnement de lensemble des E2C slve 65 millions deuros, hors investissement et rmunration des stagiaires (tableau A). lorigine dun tiers des financements, les rgions sont les principaux financeurs des E2C, en tant quacteurs pivots de la forma-tion professionnelle. Dautre part, la rgion est lunique organisme qui finance la rmunration des bnficiaires comme stagiaires de la forma-tion professionnelle. Ltat et le Fonds social europen (FSE) assurent respectivement 21 % et 20 % du financement des coles. Les coles bnficient aussi dapports de fonds privs via la collecte de la taxe dapprentissage et le mcnat (12 %). Le cofinancement runit en outre les collectivits territoriales et lAgence nationale pour la cohsion sociale et lgalit des chances (Acs), qui participent respectivement hauteur de 11 % et 3 %. Pour consolider les financements des E2C, confrontes une baisse des crdits du FSE, le dcret n 2009-221 du 24 fvrier 2009 permet aux coles de collecter la taxe dapprentissage.

    Cette rpartition moyenne sur lensemble des coles masque des carts importants dans le financement de chaque cole. Ces carts sont lis lidentit de chaque cole et limplication des porteurs de projets initiaux.

    Tableau A Financement des coles de la 2e chance en 2012

    Part du financement (en %)

    Cot de fonctionnement (en milliers deuros, hors rmunration

    des stagiaires et investissement)

    Ensemble des E2C (France entire) ........................................................ 64 870 100,0

    Conseil rgional ......................................................................................... 21 662 33,4tat ............................................................................................................ 13 545 20,9Fonds social europen (FSE) ........................................................................ 12 921 19,9Autre (dont taxe dapprentissage et mcnat) ............................................ 7 587 11,7Collectivits territoriales (autres que conseil rgional) .................................. 6 952 10,7Acs ........................................................................................................... 2 203 3,4

    Source : Dlgation gnrale lemploi et la formation professionnelle (DGEFP) ; traitements Dares.

    5DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 068

    Feuil1

    Tableau A: Financement des coles de la 2e chance en 2012

    Cot de fonctionnement (en milliers deuros, hors rmunration des stagiaires et investissement)Part du financement (en %)

    Ensemble des E2C (France entire)64,870100

    Conseil rgional21,66233.4

    tat13,54520.9

    Fonds social europen (FSE)12,92119.9

    Autre (dont taxe d'apprentissage et mcnat)7,58711.7

    Collectivits territoriales (autres que conseil rgional)6,95210.7

    Acs2,2033.4

    Source: Dlgation lemploi et la formation professionnelle (DGEFP); traitements Dares.

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    Pice jointeTA.xls

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    pas. On a aussi notre mot dire. a doit aussi tre notre choix .

    Dans la majorit des E2C, la priode dessai inclut un stage de dcouverte de lentreprise. Cest un stage court dobservation, o le jeune peut montrer quil est prt respecter les contraintes inhrentes au monde du travail (tre lheure, tre assidu). Les jeunes les moins motivs aban-donnent pendant ce stage. Dans les coles visi-tes, entre 10 % et 25 % des jeunes narrivent pas au terme de leur priode dessai. Labandon est linitiative du jeune dans la grande majorit des cas. Les dparts peuvent survenir pour des raisons de non motivation, de refus du cadre ou de comportements mettant en pril le groupe. Au terme de la priode dessai, un bilan est ralis, qui entrine ou refuse lentre en formation au sein de lE2C. Ce bilan est ralis en entre-tien individuel ou par une commission o sont prsents plusieurs permanents, voire des conseil-lers de la mission locale. Si la priode dessai est valide, le jeune signe son contrat dengage-ment en formation. Il devient alors stagiaire de la formation professionnelle et reoit ce titre une rmunration mensuelle (2), verse par la rgion. Les stagiaires qui nont jamais travaill auparavant touchent entre 130 euros et 400 euros par mois, en fonction de leur ge. La rmunration slve 650 euros par mois pour les stagiaires ayant dj travaill ou prsentant une situation personnelle spcifique (handicap, parent isol).

    Lindemnisation perue en tant que stagiaire de la formation professionnelle ne semble pas tre un motif dattractivit pour les jeunes. Elle appa-rat cependant essentielle pour stabiliser ceux qui ont charge de famille. Le recours la sanc-tion financire immdiate la suite de retards ou dabsences non justifis vise responsabiliser les jeunes et les rendre plus assidus.

    Un modle de formation structurant pour le jeune

    Le cadre dapprentissage propos par les E2C se veut global, pour parvenir un effet structurant pour le jeune. Il intgre la fois une dimension ducative et de formation. Lapproche, la fois professionnelle et sociale, est favorise par le fait que le cursus est relativement long. Dans les coles tudies, le parcours moyen dure de 6 8 mois, plein temps (35 heures par semaine). Dans deux territoires visits, il peut staler jusqu plus de 30 mois : dans lun des deux cas, le parcours tho-rique insiste sur la formation des jeunes (jusqu 24 mois), rsultant de la volont forte de lcole de dvelopper laccs la formation qualifiante ; lautre propose une phase de formation en alter-nance qui peut durer jusqu 24 mois.

    Le cadre est aussi trs structur, face un public en manque de repres. Les entres rgulires

    sous la forme de promotions de 12 18 jeunes environ assurent des taux dencadrement levs (encadr 2). Le parcours cherche offrir aussi de la souplesse, il laisse la place au ttonnement et valorise les essais. Il peut tre interrompu tout moment, si le jeune a loccasion de saisir une opportunit demploi ou de formation.

    Chaque cole suit son propre modle de parcours type, avec une succession de plusieurs tapes progressives. Les objectifs successifs de ces parcours convergent autour de quatre points cls. En premier lieu, il sagit de stabiliser les jeunes dans le parcours de formation en tablis-sant une relation de confiance. Dans un deuxime temps, lobjectif est de consolider la motivation du jeune et de linscrire dans une dynamique de projet professionnel. Troisimement, cest lauto-nomie du jeune dans son apprentissage au sein de lE2C qui est recherche. Enfin, lultime tape du parcours est lorientation vers une forma-tion qualifiante, un contrat en alternance ou un emploi. Les coles privilgient les sorties vers la formation qualifiante, dans loptique dassurer une insertion durable des jeunes. Cependant, les stagiaires aspirent le plus souvent travailler le plus rapidement possible pour gagner leur vie.

    Une individualisation des parcours, fil conducteur de la pdagogie

    Lindividualisation du parcours est une priorit affirme par toutes les coles et constitue un fil conducteur de la pdagogie des E2C. Ds le dpart, les coles cherchent tablir une relation de confiance entre le jeune et les permanents de lcole. Chaque promotion accueillie est sous la responsabilit dun formateur rfrent. Celui-ci a donc une position privilgie pour porter cette relation individualise. Une relation de confiance peut aussi stablir avec un autre permanent, selon les affinits du jeune ou la spcificit des sujets abords. Laccompagnement individua-lis dans la dure se ralise par des temps rgu-liers de bilans et permet aux permanents de bien connatre les jeunes. Lindividualisation intervient aussi dans les temps collectifs. Une attention indi-viduelle est porte aux jeunes dans le groupe. La composition des groupes nest pas fige et peut voluer selon le parcours individuel des jeunes.

    Nanmoins, certains permanents notent le manque de temps formalis dentretiens indivi-duels. En effet, si les permanents disent veiller se rendre disponibles aux demandes dentretiens individuels de la part des jeunes, certains craignent de passer ct de jeunes en difficult qui ne viendraient pas spontanment les solliciter. Une permanente expliquait : Tous les jeunes nont pas la mme capacit venir spontanment solli-citer un change. Mme si les temps en groupe sont essentiels pour dautres raisons, ces temps

    (2) Fixe par le dcret n 88-368 du 15 avril 1988.

  • en tte tte manquent, surtout que certains jeunes sont trs diffrents pris en tte tte ou dans le groupe . ce titre, la densit de len-cadrement est un facteur essentiel. Une des E2C souligne ainsi que laccompagnement qualitatif et lindividualisation staient dtriors lorsque le portefeuille tait temporairement pass plus de 20 jeunes par rfrent suite un afflux de jeunes.

    Les jeunes rencontrs rendent compte de la qualit de la relation noue avec les permanents. Ils se sentent soutenus, remis en confiance et non renvoys ou laisss seuls face leurs difficults. Ils soulignent aussi lengagement des permanents vis--vis deux comme un vecteur de dynamisation et de motivation.

    Un double accompagnement, professionnel et personnel

    Toutes les E2C ont mis en place un ple social pour rpondre au besoin dappui social des jeunes. Il sagit de trouver des solutions aux problmes lis au logement, la sant, aux gardes denfant,

    la mobilit et au surendettement. LE2C labore le diagnostic des difficults rencontres et fait ensuite largement appel des partenaires spci-fiques pour les traiter. Le premier moment cl pour identifier les difficults est celui de lentre-tien individuel de motivation. Laccompagnement social est ensuite pris en compte en continu.

    Pour lever les freins lis la mobilit, les coles multiplient les antennes dans les zones rurales. Dans lune des E2C, une convention permet ses stagiaires de louer des mobylettes un tarif prfrentiel. Elle prte galement des vlos aux stagiaires pour se rendre sur leur lieu de stage. Toujours concernant la mobilit, une autre cole a fix ses horaires de cours en fonction des horaires de train et a mis en place un systme de navette entre la gare et ses diffrents sites. En matire de sant, une E2C a dvelopp un partenariat avec un centre de soins de mdecins la retraite (soins gratuits, dlivrance de mdicaments disponibles sans ordonnance, dlivrance de certificats mdi-caux pour la pratique du sport au sein de lcole). Une autre a instaur une visite mdicale obliga-toire pendant la phase dintgration. Face au surendettement, les coles aident les jeunes dans

    Encadr 2

    UNe eNqUte qUaLItatIve poUr mIeUx CoNNatre Le FoNCtIoNNemeNt et Les pratIqUes des CoLes de La 2E ChaNCe

    Afin de mieux connatre les pratiques mises en uvre par les coles de la 2e chance, la Dares a fait raliser des enqutes monographiques au 4e trimestre 2012 dans huit coles de la 2e chance. Cette tude qualitative a t ralise par le cabinet dtudes Pluricit.

    Lobjectif des monographies tait dapporter des lments de diagnostic, danalyse et de prconisation sur les quatre volets suivants :

    - la trajectoire antrieure des jeunes, leur orientation vers lcole et leur recrutement par celle-ci ;

    - le fonctionnement des coles : parcours au sein de lcole et organisation de laccompagnement ;

    - les relations que les E2C entretiennent avec les entreprises et les organisations professionnelles : mode dintermdiation des E2C, rle et attentes des entreprises ;

    - le suivi des jeunes aprs la sortie de lE2C (droulement du suivi, situation des jeunes).

    La mthodologie est celle dune enqute de terrain, combinant tude de documents et entretiens semi-directifs auprs des principaux acteurs concerns. Ltude a t ralise sur plusieurs sites de France mtropolitaine, slectionns de manire reprsenter la diversit des situations des coles (tableau B). Les critres de slection taient lanciennet, le nombre de sites, le type de territoire dimplantation (urbain, rural), la taille et le statut vis--vis de la labellisation.

    Au sein de chaque territoire, les entretiens ont t conduits auprs des principaux acteurs concerns : jeunes en cours de formation ou sortis du dispositif, personnels pdagogiques et administratifs des coles, entreprises partenaires, missions locales, organismes de formation. Au total, 153 entretiens ont t raliss auprs de 54 jeunes, 54 professionnels dE2C et 45 partenaires. Les jeunes rencontrs taient tous volontaires et choisis sur proposition des coles elles-mmes. Les quipes de terrain ont rencontr des difficults pour joindre les jeunes qui avaient aban-donn ou rompu avec lE2C.

    Tableau B Caractristiques des coles slectionnes pour ltude

    Avant 2004

    Oui

    Agglomration

    Association spcifique

    Entre 2 et 4

    Plus de 500

    11 12* 18* 22* 14 14* 4 12

    Entre 100 et 250

    Plus de 500Entre 250 et 500

    Plus de 500Entre 250 et 500

    Moins de 100Entre 100 et 250

    Entre 2 et 4 Plus de 4 Entre 2 et 4 Entre 2 et 4 Entre 2 et 4 Un seul site Un seul site

    Organisme de formation

    Organisme de formation

    Organisme de formation

    Association spcifique

    Association spcifique

    Association paritaire

    Organisme de formation

    Agglomration Rgion Dpartement Agglomration Dpartement Dpartement Agglomration

    Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui

    Avant 2004 Avant 2004Entre 2005 et 2010

    Entre 2005 et 2010

    Entre 2005 et 2010

    Aprs 2010Entre 2005 et 2010Date de cration

    Labellise E2C en 2012

    Territoire

    Mode de portage initial

    Nombre de sites

    Nombre de stagiaires en 2012

    Nombre de jeunes par permanents en 2012(* en 2011)

    cole hcole Gcole Fcole ecole dcole Ccole bcole a

    Source : Dares, monographies E2C.

    7DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 068

    Feuil1

    Tableau B: Caractristiques des coles slectionnes pour ltude

    cole Acole Bcole Ccole Dcole Ecole Fcole Gcole H

    Date de crationAvant 2004Avant 2004Avant 2004Entre 2005 et 2010Entre 2005 et 2010Entre 2005 et 2010Aprs 2010Entre 2005 et 2010

    Labellise E2C en 2012OuiOuiOuiOuiOuiOuiOuiOui

    TerritoireAgglomrationAgglomrationRgionDpartementAgglomrationDpartementDpartementAgglomration

    Mode de portage initialAssociation spcifiqueOrganisme de formationOrganisme de formationOrganisme de formationAssociation spcifiqueAssociation spcifiqueOrganisme paritaireOrganisme de formation

    Nombre de sitesEntre 2 et 4Entre 2 et 4Plus de 4Entre 2 et 4Entre 2 et 4Entre 2 et 4Un seul siteUn seul site

    Nombre de stagiaires en 2012Plus de 500Entre 100 et 250Plus de 500Entre 250 et 500Plus de 500Entre 250 et 500Moins de 100Entre 100 et 250

    Nombre de jeunes par permanents en 2012 (* en 2011)1112*18*22*1414*412

    Source: Dares, monographies E2C.

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  • DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 0688

    leurs dmarches avec leur banque (rchelonne-ment de la dette).

    linverse, la plupart des E2C nont pas de solu-tion de restauration collective le midi alors que la plupart des jeunes accueillis sont sujets la malnutrition. Une seule des coles rencontres rpond ce besoin travers son restaurant pda-gogique, lcole profitant dune spcialisation sur les mtiers de bouche.

    Une relle stabilisation des jeunes, mais des ruptures prmatures

    La majorit des jeunes rencontrs dclarent une confiance et une image de soi restaures. Ils tmoignent dune progression effective dans lap-propriation de leur parcours. La mise en place de bilans ds quune action est termine (3), le recours systmatique lcrit ou la saisie informatique facilitent cette appropriation. Les jeunes sont la fois acteurs et relecteurs de leur parcours. Des rites de restitution obligatoires et rguliers sont mis en place : entretien de recru-tement, prsentation dun bilan de parcours. Dans certaines coles, les jeunes disposent dun portefeuille de comptences. Il sagit dun clas-seur qui retrace leur parcours, avec les tapes de leur programme de remise niveau et le bilan des stages raliss. Cependant, ces supports crits ne sont pas toujours adapts au public. propos du portefeuille de comptences, un permanent dune cole souligne que les jeunes sont beaucoup dans limmdiatet et ne mesurent pas toujours son intrt . Des mesures sont tudies pour mieux susciter ladhsion des stagiaires, en fonc-tion de limplication des coles dans le domaine de la recherche pdagogique.

    Ladhsion des jeunes est renforce par le haut niveau de ressources mobilis, sur le plan finan-cier comme sur les ressources humaines et mat-rielles. Dans les projets les plus avancs, la qualit des locaux, la communication ambitieuse, le rle important jou par limage, et mme le sigle E2C rappellent les codes dune grande cole . Certaines des E2C visites sont implantes dans des zones urbaines sensibles, des zones indus-trielles ou danciens sites industriels rhabili-ts. Cependant, le territoire dimplantation ne semble pas constituer un facteur dterminant sur la qualit des locaux. Cest plus leur caractre valorisant qui importe. Lide est de marquer une rupture physique (taille), spatiale (implantation excentre des immeubles du quartier), dimage (architecture, couleurs). Ces critres sont plus en cohrence avec le projet valorisant et inno-vant dune E2C. Sur le terrain, on ressent lim-pact de ces efforts sur les infrastructures : dans deux coles visites situes la limite dun quar-tier prioritaire de la politique de la ville, les locaux donnent limage dun campus ou dune ambiance

    dentreprise. Dans deux autres coles, les locaux paraissent peu valorisants, voire inadapts (une de ces coles est engage dans un projet de dm-nagement). Cette situation provient dune diver-gence de point de vue entre dcideurs publics et acteurs conomiques sur le dimensionnement de lE2C lors de la conception du projet.

    Cependant, des ruptures en cours de parcours restent possibles. Dans les coles visites, entre 15 % et 35 % des stagiaires sortent prmatur-ment de leur parcours. Il peut sagir dabandons, de dmissions ou dexclusions. Les priodes dab-sence sont relativement frquentes et suscitent une vigilance particulire de la part des coles. Les coles visites ragissent rapidement aux situa-tions dabsentisme, les sanctions sont graduelles et peuvent conduire jusqu lexclusion. En plus de ces sorties prmatures, de 4 % 10 % des jeunes accueillis sortent du dispositif, selon les E2C, pour des motifs dits non matrisables (maternit, dmnagement, incarcration, mala-die, dcs).

    Lmergence du projet du jeune, le dfi de lE2C

    LE2C a pour mission premire de renforcer la motivation des jeunes pour consolider un ou plusieurs projets professionnels. De nombreux jeunes arrivent sans projet professionnel dfini ou avec des projets peu ralistes. Lenjeu est de prendre en compte leurs aspirations, leurs capaci-ts et leurs comptences, ainsi que les besoins et les exigences du march de lemploi local. Toutes ces dimensions ne sont pas compatibles immdia-tement. Le dfi des E2C est donc de co-construire avec le jeune un projet conciliant aspirations, capacits et dbouchs rels. La dmarche est progressive, de manire faire voluer le projet sans se dcourager.

    Une des premires tapes est de faire rapidement dcouvrir diffrents mtiers aux stagiaires. Daprs une permanente dune E2C, lide est de fouil-ler dans tous les mtiers, quils aient ou pas leur projet . Certaines coles ciblent particulirement les mtiers en tensions sur le territoire. Souvent, les jeunes sont incits ne pas se focaliser sur un seul projet, afin de construire des projets profes-sionnels possibles, cest--dire ralistes et rali-sables . Dvelopper plusieurs projets en parallle, par exemple un projet de cur et un projet de raison permet de ne pas opposer de fin de non-recevoir immdiate certains projets et de ne pas apparatre comme des briseurs de rves .

    (3) Bilan de fin de stage, bilan lissue dun enseignement.

  • La remise niveau dans les savoirs de base

    La remise niveau seffectue sur les savoirs de base : lire, crire, compter. Certaines coles dve-loppent aussi des enseignements informatiques ou dune langue trangre. Lenjeu est ce moment-l de franchir les ractions spontanes daversion pour lcole et dviter labandon. Pour poursuivre ces objectifs, les coles sefforcent dindividualiser la pdagogie. Les tests de posi-tionnement, effectus pendant la priode dessai, permettent dajuster les objectifs du programme individualis de remise niveau. Chez les jeunes rencontrs, ces temps de tests ne sont pas vcus comme une preuve pour les mettre en difficult ou les rabaisser , mais comme un moyen posi-tif de savoir de quoi ils ont besoin et de conso-lider leur motivation sur les formations venir. La progression des squences pdagogiques est aussi individualise. Ainsi, formateurs et stagiaires disposent dun programme modulable selon le niveau du groupe et des jeunes dont les contenus intgrent et associent savoirs, savoir-faire et savoir-tre, et projets individuels. Pour favoriser lint-rt des jeunes, les formateurs crent directement des exercices adapts aux projets professionnels ou aux situations de vie que pourraient rencon-trer les stagiaires. Par exemple, un jeune avec un projet de peintre devra matriser les calculs daires. Les valuations ont dabord un but de formation et constituent un levier dapprentissage suppl-mentaire. Chaque module fait aussi lobjet dune valuation pour mesurer les acquis.

    La pdagogie dveloppe par les coles se veut active et innovante. Toutefois, des pratiques scolaires classiques , dconnectes du champ professionnel ou utilisant des supports pdago-giques moins adapts de jeunes adultes existent, tout en restant minoritaires. Dans lune des coles visites, lobjectif de matrise des savoirs de base semblait tre dlaiss au profit de lacquisition de savoirs professionnels spcifiques.

    Les stages en entreprises, une approche progressive du monde du travail

    Le temps pass en entreprise reprsente entre 40 et 55 % du parcours en E2C. Comme pour la remise niveau, le parcours en entreprise est progressif et va de pair avec la construction dun ou plusieurs projets professionnels. Les jeunes entrant en E2C nont pas eu de liens avec le monde du travail ou y ont connu de mauvaises expriences. Daprs le rseau E2C France, prs des deux tiers des jeunes accueillis en 2012 nont aucune exprience professionnelle. Il sagit donc de les familiariser avec le monde de lentre-prise. Un contact rapide avec lentreprise pourra permettre de rompre avec les reprsentations

    ngatives de lentreprise souvent rencontres chez les jeunes. Le stage est positionn comme une rampe de lancement professionnel pour acqurir de lexprience et connatre le mtier, son langage et ses codes, pour initier un rseau professionnel et se faire remarquer. Lindividualisation se joue sur le type de stages mobiliss, leur dure et leur nombre, selon les priorits de progression parta-ges par le jeune et son rfrent.

    Les premiers stages, raliss la plupart du temps pendant la priode dessai, sont rgulirement utiliss comme des stages de savoir-tre en entreprise et visent dcouvrir des mtiers. Ils sont gnralement trouvs par lE2C pour commencer rapidement lexprience en entre-prise. Un objectif port par lensemble des coles est douvrir le jeune des projets professionnels diffrents, notamment sur des secteurs dactivit en recrutement ou des mtiers en tension sur le territoire. Cest une priode intense, avec beau-coup de mises en situation en entreprise ( Depuis 5 mois, jai fait 5 stages ! ). Plus le parcours du jeune avance au sein de lE2C, plus les stages contribuent construire ou confirmer son projet professionnel. Progressivement, le stagiaire est invit faire lui-mme ses recherches de stage. Le cas chant, il peut bnficier de supports mis disposition par lcole, de lappui du ple entreprise de lcole et de sa renomme. Un jeune de lE2C voque ses recherches de stages : On a nos feuilles de dmarches. On doit aller voir les entreprises. Les premires fois cest diffi-cile, aprs on shabitue et on fait comme si de rien ntait daller voir des entreprises ! . Des chances pour trouver les stages peuvent tre fixes pour mettre volontairement la pression sur les stagiaires. Par ailleurs, les stages trouvs par les jeunes permettent de consolider le rseau den-treprises partenaires, en complment ou la place dune prospection plus directe.

    Pour dvelopper leur autonomie, les jeunes apprennent progressivement des mthodes de recherche demploi. Certaines E2C proposent des ateliers de rdaction de CV et de lettres de moti-vation, dautres organisent des simulations den-tretien dembauche, parfois en prsence de chefs dentreprise volontaires. Des fiches mtiers sont utilises pour que les stagiaires dcouvrent plus prcisment un mtier, et le travail peut aller jusqu lappropriation du vocabulaire propre chaque mtier.

    Les stages donnent lieu un suivi en interne par des chargs de relations ou de mission entreprises de lE2C et en externe par un tuteur de lentre-prise. De manire gnrale, les coles ne posent pas dexigences particulires sur la mise en uvre du tutorat. En pratique, il sagit dun tutorat de terrain , technique, confi un salari qui peut suivre le stagiaire au quotidien. Pour le suivi en interne, les permanents de lE2C essaient de nouer des relations de qualit avec les reprsen-tants des entreprises travers trois moments dans

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  • DARES ANALYSES Septembre 2014 - N 06810

    le stage. En dbut de stage, le charg de mission entreprise peut tre amen prsenter directe-ment le jeune lentreprise. Sinon, il peut sentre-tenir par tlphone avec le tuteur et sassurer de la prsence du stagiaire. De la mme manire, un suivi intermdiaire peut tre effectu soit par tl-phone, soit par un entretien sur le lieu de stage. la fin du stage, un bilan est ralis pour valuer la satisfaction du jeune suite ce temps dimmer-sion. Pour les coles ralisant un suivi distance, celui-ci est prsent comme un moyen de dve-lopper lautonomie du jeune dans sa relation avec lentreprise. En filigrane, apparat le manque de disponibilit des permanents pour assurer le suivi in situ de lensemble des stages. En cas de difficult dans les relations entre le jeune et son employeur, les employeurs interrogs apprcient quand le charg de mission entreprises assure la mdiation.

    Les activits socioculturelles et sportives, pas suffisamment intgres dans le parcours

    Le troisime volet de laccompagnement ralis en E2C concerne louverture lenvironnement extrieur et la connaissance de soi. Lintention des coles est de rduire lcart culturel et social entre les jeunes stagiaires et les acteurs conomiques ou leurs futurs collgues. En plus dune connais-sance limite du monde professionnel et dun faible niveau de formation, des facteurs socio-culturels risquent en effet de limiter la capacit des jeunes une insertion socioprofessionnelle durable. Les obstacles les plus souvent voqus sont des relations sociales pauvres, une connais-sance limite de soi-mme et une perception rduite de lenvironnement proche et plus loin-tain. Ces obstacles limitent la capacit des jeunes rechercher un emploi (moins de rseau) et sintgrer dans une quipe de travail.

    Les coles proposent donc des activits sociocul-turelles et sportives trs diversifies, obligatoires ou optionnelles. Lune dentre elles distingue ainsi quatre axes dintervention : dcouverte du monde, mobilit, dcouverte des mtiers et un dernier axe regroupant hygine, sport et sant. Plus prcisment, on retrouve par exemple dans ces activits des visites groupes en entreprise ou en centre de formation, la pratique rgulire dun sport collectif, des visites culturelles (muse, visite dune ville, court sjour ltranger) ou des activi-ts autour de la citoyennet. Quand ces activits sont bien articules avec les autres volets de lac-compagnement, avec des objectifs communs et une pdagogie cohrente, la valeur ajoute pour linsertion des jeunes semble relle.

    La perception des jeunes lgard de ces acti-vits oppose deux aspects. Certains expri-ment leur enthousiasme de dcouvrir des

    activits nouvelles : a nous montre des choses auxquelles on pensait mme ne pas avoir accs. a nous montre tout ce quon est capable de faire aussi. . Dautres font part de leur scepticisme sur le lien entre ces activits et la recherche dinser-tion professionnelle : Au dbut, je me suis dit, houla ! Moi je veux de la remise niveau, pas aller me promener, je me demande ce que a apporte quoi ! .

    De fait, la structuration et les ambitions de ce volet dactions socioculturelles varient fortement dune E2C lautre. Souvent, ces activits dpendent des opportunits locales (prsence dun gymnase proximit) ou sont lis aux caractristiques des permanents de lE2C (leurs propres centres din-trts, leur rseau). Par ailleurs, elles manquent gnralement dune inscription plus large et plus systmatique dans les rseaux culturels ou sportifs locaux. La diversit des pratiques sexplique aussi par labsence de principes communs : les activits socioculturelles ne sont pas prcisment dfinies dans le rfrentiel de labellisation des E2C.

    Des permanents avec des profils diversifis

    chacun des trois volets de laccompagnement correspond un profil de permanents dE2C. On distingue les formateurs de remise niveau (ou formateurs rfrents), les chargs de relation entreprises et les animateurs de la vie sociale et collective. Souvent, les formateurs rfrents jouent aussi le rle danimateurs de la vie sociale et collective. Les permanents rencontrs ont dj eu la plupart du temps une exprience profession-nelle antrieure, principalement dans lenseigne-ment ou la formation professionnelle, le travail social ou lanimation, ou en entreprise dans le commerce ou le marketing. On trouve aussi des salaris ayant eu des parcours atypiques, ouverts sur linterculturel, la recherche pdagogique ou la communication, avec notamment des expriences ltranger.

    Le rfrentiel de labellisation attache une atten-tion particulire la qualit du personnel des E2C. Ainsi, la majorit des salaris dispose dun diplme de bac+4 ou 5 et la quasi-totalit sont en contrat dure indtermine.

    Un ancrage territorial fort

    La proximit des E2C avec leur territoire dimplan-tation est un autre axe fort qui ressort de ltude. Toutes les coles partagent cet objectif de bn-ficier dun ancrage territorial fort. La dimen-sion territoriale est inhrente au projet, puisque la cration dune E2C est le rsultat dun appel doffre de la rgion, qui est lautorit comptente sur la formation professionnelle. Une cole peut

  • tre rayonnement rgional, dpartemental ou se concentrer sur une seule ville.

    Chaque E2C se construit comme une rponse aux besoins des acteurs conomiques du terri-toire. Daprs un prsident dune E2C, lanalyse du territoire fait partie de lADN des coles. Ds ltude de faisabilit pour la cration dune nouvelle cole, le projet est pens pour tre insr dans le tissu local avec une analyse des vides en termes de formation et un diagnos-tic du march du travail local. Certaines coles se positionnent en partie sur des mtiers en tension. Par exemple, une cole visite a mis en place un plateau technique restauration en rponse aux besoins du secteur de lhtellerie-restaura-tion. Une autre cole a dvelopp un partenariat avec des acteurs du secteur de la mtallurgie, un secteur en tension dont limplantation est histo-rique sur le territoire. Le diagnostic est ensuite mis jour en continu grce la proximit des coles avec le tissu conomique local.

    Lors de leur cration, la moiti des coles visi-tes ont, ds le dbut t portes par des asso-ciations cres spcifiquement pour le projet. Les quatre autres coles visites ont t construites partir de structures prexistantes, des organismes de formation ou des associations dinsertion. Au terme des interrogations ralises, il semble que le portage juridique initial ne constitue pas un facteur primordial dans la russite du projet.

    Il apparat que les E2C les plus rcentes doivent continuer sapproprier les mthodes, outils et supports pdagogiques crs par les E2C plus anciennes. Une meilleure coopration entre les coles permettrait aux nouvelles coles de bnfi-cier de lexprience des coles existantes.

    Une place cruciale des acteurs conomiques locaux

    Les relations avec le monde conomique se crent et se consolident de trois faons : travers la prsence dacteurs conomiques dans les instances de gouvernance de lE2C, les liens des chargs de relation entreprise avec les partenaires conomiques de lcole et les retours des stages et travaux raliss par les jeunes.

    Sept des huit coles visites ont des liens troits avec les branches professionnelles prsentes sur le territoire et avec les chambres consulaires, particulirement les chambres de commerce et dindustrie (CCI). Souvent, ces dernires sont prsentes dans les instances de gouvernance des coles, avec un haut niveau de reprsentation : dans certaines coles, le prsident de lE2C est aussi prsident de la CCI. Les CCI peuvent notam-ment mettre des locaux disposition de lE2C. En outre, les liens avec la CCI permettent de faciliter la prise de contact avec les entreprises, en jouant

    sur sa notorit et son rseau. Enfin, la prsence des acteurs relais du monde conomique dans la gouvernance diffuse une forte culture dentreprise au sein de lE2C, avec un impact sur la gestion (tableaux de bord, objectifs de rsultats) et sur les pratiques pdagogiques (mise en place dun pointage des stagiaires). Quand cette exigence de rsultats est trop pousse, il peut y avoir un impact ngatif sur la slection des entrants, la qualit des pratiques pdagogiques ou la fiabilit du mode de calcul des taux de sortie.

    Les E2C manant de structures dinsertion sociale prexistantes semblent rencontrer plus de diffi-cults pour tablir une telle dynamique avec les entreprises. Il semble donc important de veiller impliquer les entreprises et rseaux de profession-nels ds le projet de conception de lE2C.

    Des entreprises volontaires, attires par la prslection de jeunes motivs

    Les entreprises partenaires des coles sont toutes volontaires. Selon les E2C, les entreprises sont rassures par le srieux et la reconnaissance offi-cielle des coles. Les partenaires voient dans lE2C une autre entreprise, avec des processus simi-laires, les structures sociales quelles ont pu connatre par ailleurs ne fonctionnent pas comme a du tout ajoute un permanent dune E2C.

    Les entreprises rencontres reconnaissent une trs bonne expertise mtier et un profession-nalisme des permanents. Elles valorisent aussi la relation personnalise noue avec le charg de relation entreprise : avoir un seul et mme inter-locuteur est un vrai plus . Le suivi des jeunes en stage est aussi apprci, toutefois certaines entreprises aimeraient tre mieux informes des suites des stages raliss. Pour laccueil de jeunes en stage, elles font confiance la slection sur la motivation exige pour lentre en E2C, un tri est fait au dpart. Ce ne sont pas des jeunes qui dbarquent comme a . LE2C est aussi un moyen de faciliter les recrutements, pour embau-cher la suite dun stage par exemple. Les entre-prises qui cherchent recruter y voient un moyen intressant pour trouver un personnel non qualifi mais sans problmes comportemen-taux . Un reprsentant dune grande entreprise interrog considre lE2C comme un expert quali-fi, pour laider gagner du temps et diversi-fier son recrutement : On est noy sous les CV. a permet dhumaniser et de prslectionner. a permet de recruter des profils que je naurais pas reus sinon . Pour les grandes entreprises, le partenariat se concrtise souvent dans le cadre daccords nationaux sur la responsabilit sociale de lentreprise (RSE).

    En plus de laccueil de jeunes en stages, les parte-naires conomiques peuvent tre sollicits sous

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    dautres formes, plus adaptes leur profil. Certaines entreprises militantes souhaitent simpliquer aux cts de lE2C mais ne peuvent pas toujours accueillir de stagiaires. Il sagit le plus souvent de structures de linsertion par lac-tivit conomique, de plateaux techniques dor-ganismes de formation ou dentreprises plus classiques qui souhaitent sengager dans linser-tion professionnelle des jeunes. Les chargs de relations entreprises leur proposent divers modes dintervention pour concrtiser leur mobilisation : prsentation aux jeunes de leur activit et de leur environnement professionnel (au cours dune visite sur site ou au sein de lE2C), participation des jurys de slection lentre, des speed-dating (4), ou une plus simple sollicitation travers des enqutes mtiers ralises par les jeunes par tlphone. Les entreprises peuvent aussi soute-nir financirement lE2C travers le mcnat ou la taxe dapprentissage, que les coles label-lises sont habilites collecter depuis le dcret du 24 fvrier 2009. Parmi les huit E2C visites, la moiti reoivent un financement priv allant de 4 % 40 % de leur budget total de fonctionne-ment (hors rmunration des stagiaires et inves-tissement). Les quatre coles de lchantillon ne bnficiant pas de ressources prives sont portes par des structures prexistantes (organismes de formation ou associations dinsertion) ou alors trop rcentes pour avoir dvelopp une stratgie de financement priv.

    Un positionnement complmentaire loffre de service du territoire

    Le contour des E2C sadapte leur territoire dim-plantation. Selon les stratgies rgionales, les caractristiques des publics peuvent tre modi-fies. Ainsi, certaines coles accueillent des mineurs, dautres souvrent aux 26-30 ans. Ces choix traduisent la fois une volont stratgique locale des dcideurs publics et un besoin propre au territoire. Laccueil de mineurs est souvent subi par les coles car il impacte fortement les rsultats sur les sorties vers lemploi, ncessite des adap-tations pdagogiques et implique de nouer des relations avec les parents des jeunes. Une cole accueillant des mineurs mne par exemple un travail plus approfondi pour proposer des sorties vers lapprentissage. Un permanent rencon-tr estime que le dispositif nest pas adapt aux mineurs et poursuit : Les mineurs, cest plus difficile. Ce sont encore des ados. Il faut tre plus vigilant sur le respect des horaires, ils ont plus de problmes de comportement. Le lien est plus fort avec la famille, quon est amen contacter plusieurs reprises .

    Parmi les sites visits, une cole prend en compte le problme de lillettrisme, une autre expri-mente laccueil de jeunes atteints de dficiences mentales. Une cole interroge participe la plateforme dcrocheurs sur le territoire.

    Une attestation de fin de formation non reconnue officiellement

    En fin de formation, le stagiaire reoit une attes-tation de comptences acquises (Aca). Ce docu-ment synthtise le nombre dheures de formation effectues, les savoirs de base acquis et les comptences professionnelles valides en entre-prise. Les personnels des E2C rencontrs ont exprim des avis mitigs sur lintrt de lAca. En labsence de reconnaissance officielle, lat-testation ne peut pas tre valorise auprs des employeurs. Par ailleurs, elle nest pas ncessaire pour les entreprises dj partenaires de lE2C. En outre, parce quils la reoivent parfois plusieurs semaines aprs leur sortie, et par courrier, certaines jeunes lui accordent peu dimportance. Nanmoins, des coles saisissent lopportunit de promouvoir le jeune en organisant une cr-monie de remise de lattestation en prsence des entreprises daccueil.

    En dehors de lAca, deux des coles tudies dlivrent des attestations de comptences ou diplmes reconnus par lducation nationale. Lune est habilite faire passer le Brevet infor-matique et internet (B2I) et les premiers niveaux du diplme dtudes en langue franaise option professionnelle (Delf). Lautre permet aux stagiaires dobtenir une attestation de comp-tence sur les gestes professionnels du ou des mtiers acquis, dlivre par le Rectorat dans le cadre du dispositif acadmique de validation des acquis (Dava).

    Laprs E2C, un suivi consolider

    La plupart des coles considrent que le jeune est sorti la fin de son parcours dans lE2C, cest- -dire au bout de 6 8 mois aprs son entre. La sortie du jeune peut tre avance sil accde un contrat de travail dun mois ou plus ou une formation qualifiante. Ceux qui nont pas trouv demploi ou de formation au terme du parcours dans lcole sont orients vers la mission locale. Selon la situation du jeune, il est possible de prolonger laccompagnement au-del du dlai habituel, sous rserve dune drogation de la rgion.

    Aprs la sortie du parcours au sein de lE2C, le rfrentiel de labellisation prvoit un suivi du jeune pendant un an. Les modalits prcises de ce suivi ne sont pas clairement dfinies, et celui-ci est ralis de faon ingale dans les coles visites.

    Le rfrentiel de labellisation prvoit un suivi des jeunes jusqu 12 mois aprs leur sortie de leur parcours dans lE2C. Sur le terrain, ce suivi est encore une pratique trs htrogne et encore insuffisamment travaill par les coles. Or, au regard des entretiens raliss (5), il semblerait

    (4) Le speed-dating permet de faire se rencontrer dans le cadre de salons ou forums sur lemploi, des entreprises et des candidats pour des entrevues de quelques minutes.

    (5) Entretiens auprs des jeunes sortis mais dont un certain nombre a t difficile joindre.

  • quil y ait un taux dabandon significatif des jeunes dans les phases demploi ou de formation qualifiante qui suivent le parcours dans lE2C. Le suivi mis en place par les coles apparat insuf-fisant au regard des difficults dintgration des jeunes dans leur nouveau milieu professionnel, que ce soit une entreprise ou un organisme de formation. Une dirigeante dentreprise regrette le manque de suivi pendant le contrat de 6 mois quelle avait sign avec une stagiaire de lE2C : Jaurais souhait quils suivent plus ce contrat et cette jeune fille, qui tait gentille mais pas dans la ralit des choses .

    Deux modes de suivi sont pratiqus par les coles : un suivi dominante administrative et un suivi dominante accompagnement. Le suivi adminis-tratif est un processus systmatique et formalis visant rendre compte de la situation du jeune des chances fixes aprs sa sortie. Les rgles de ralisation sont fixes par le rseau E2C, en vue dlaborer des rsultats sur les sorties lchelon national. Malgr ces rgles, le suivi est ralis de faon trs htrogne par les coles et ne permet pas de fournir des rsultats robustes sur leur devenir. Il se fait gnralement par tlphone et se heurte aux changements de numros de tl-phone des jeunes. Le mode de calcul des sorties varie dune E2C lautre, notamment pour dter-miner ce quest une sortie positive . Un contrat de travail de quinze jours suffira dans une E2C, dun mois pour une autre et de trois mois pour une troisime. De leur ct, ceux qui financent les coles calculent habituellement des taux de sortie six mois. De mme, le recensement de la situa-tion du jeune peut se situer des horizons diff-rents : au moment de sa sortie de lE2C, en fin danne civile, puis 3, 6, 9 et 12 mois aprs sa sortie. Lhomognisation des pratiques de suivi est un axe de progrs sur lequel travaille le Rseau E2C.

    Lautre mode de suivi repr est un suivi plus qualitatif, dominante daccompagnement. Il sagit de prvenir les ruptures quand le jeune est en emploi ou en formation ou alors de continuer encourager les jeunes quand ils rencontrent des problmes dinsertion. Un jeune homme en emploi a fait appel la mdiation de lE2C aprs sa sortie : Je leur ai dit que ctait pas top un moment Et ils sont venus sur place. Ils ont fait une rencontre trois, a a calm les choses . De lavis de plusieurs responsables dE2C, cest plutt un axe de progrs dvelopper. Il est peu prati-qu actuellement du fait dun manque de moyens ddis. Ce suivi est mobilis la demande du jeune, de lentreprise ou de lorganisme de forma-tion. Les liens troits tablis entre le jeune et un permanent jouent un rle primordial. Parfois, le jeune peut refuser un suivi par lE2C, sil sestime suffisamment autonome. Dans lune des coles, le suivi systmatique est quasi impos aux jeunes sans solutions, dans un souci de respecter les exigences du label, ce qui nest pas toujours bien peru par les jeunes.

    Enfin, le suivi en emploi ou en formation, a aussi une autre finalit : nourrir et consolider la relation avec les entreprises ou les organismes de forma-tion concerns. Ces derniers apprcient tout parti-culirement la continuit du lien avec lcole, une fois le jeune sorti de lE2C.

    (1995), Enseigner et apprendre. Vers une socit cognitive , Livre blanc sur lducation et la formation, Commission europenne. Pluricit (2012), Analyse transversale des monographies des coles de la 2e chance Rseau E2C, Cahier des charges pour labelliser une cole de la 2e chance.Rseau E2C (2013), 2012 & perspectives , Rseau E2C France, avril.Rseau E2C (2014), Lactivit en 2013 , Rseau E2C France, avril.

    Pour en savoir plus

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    Wali Rostam (Dares)

    DARES ANALYSES et DARES INDICATEURS sont dits par le ministre du travail, de lemploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.Direction de lanimation de la recherche, des tudes et des statistiques (Dares), 39-43, quai Andr Citron, 75902 Paris cedex 15.www.travail-emploi.gouv.fr (Rubrique tudes, Recherches, Statistiques de la Dares) Directrice de la publication : Franoise Bouygard.Rdactrice en chef : Marie Ruault. Secrtariat de rdaction : Marie Avenel, Evelyn Ferreira - Maquettistes : Guy Barbut, Thierry Duret, Bruno Pezzali. Conception graphique et impression : ministre du travail, de lemploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.Rponse la demande : [email protected] Abonnement aux avis de parution de la Dares (http://travail-emploi.gouv.fr/etudes-recherches-statistiques-de,76/avis-de-parution,2063/bulletin,2064/abonnement,13777.html)Dpt lgal : parution. Numro de commission paritaire : 3124 AD. ISSN 2109 - 4128 et ISSN 2267 - 4756.