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Copyright©2016byErinWattCelivreestunefiction.Touteréférenceàdesévènementshistoriques,despersonnagesoudes

lieuxréelsseraitutiliséedefaçonfictive.Lesautresnoms,personnages,lieuxetévènementssontissusdel’imaginationdel’auteur,ettouteressemblanceavecdespersonnagesvivantsouayant

existéseraittotalementfortuite.

Tous droits réservés, y compris le droit de reproduction de ce livre ou dequelquecitationquecesoit,sousn’importequelleforme.

©2018,HugoPublishing34-36,rueLaPérouse

75116-Pariswww.hugoetcie.fr

Collection«NewRomance®»

dirigéeparHuguesdeSaintVincentOuvragedirigéparBénitaRolland

TraduitparCarolinedeHugo

ISBN:9782755631548

CedocumentnumériqueaétéréaliséparNordCompo.

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PourMargo,sonenthousiasmepourceprojet

n’aeud’égalquelenôtre.

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SOMMAIRE

Titre

Copyright

Dédicace

Chapitre1

Chapitre2

Chapitre3

Chapitre4

Chapitre5

Chapitre6

Chapitre7

Chapitre8

Chapitre9

Chapitre10

Chapitre11

Chapitre12

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Chapitre13

Chapitre14

Chapitre15

Chapitre16

Chapitre17

Chapitre18

Chapitre19

Chapitre20

Chapitre21

Chapitre22

Chapitre23

Chapitre24

Chapitre25

Chapitre26

Chapitre27

Chapitre28

Chapitre29

Chapitre30

Chapitre31

Chapitre32

Chapitre33

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Chapitre34

Chapitre35

Remerciements

Restezconnectées

Àproposdel’auteur

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CHAPITRE1

–Ella,vousêtesattendueaubureauduprincipal,melancemadameWeir, avant même que je sois entrée dans sa classe d’introduction aucalculintégral.

Jevérifiel’heure.–Maisjenesuismêmepasenretard!Ilestneufheuresmoinsune,etcettemontreesttoujoursparfaitement

exacte.C’estprobablementmonbien leplusprécieux.Mamèreprétendqu’elleappartenaitàmonpère.Avecsonsperme,c’estleseultrucqu’ilaitlaisséderrièrelui.

–Non,ilnes’agitpasd’unretard…pascettefois-ci.Sonregard,habituellement sévère,estpresquedoux.Mesboyauxse

tordent en déclenchant un signal d’alerte vers mon cerveau embrumé.MadameWeirestunepeaudevache,c’estpourçaquejel’aimebien.Elletraite ses élèves comme si nous étions ici pour vraiment apprendre lesmaths, pas pour ingurgiter une espèce de leçon de vie sur l’amour denotre prochain ou ce genre de conneries. Alors, si elle me lance desregards de sympathie, cela signifie sûrement que quelque chose de trèsmauvaissemijotedanslebureauduprincipal.

–Trèsbien.Jenevoispascequejepourraisrépondred’autre.Jeluifaislagrâce

d’un hochement de tête et je pars en direction des bureaux del’administration.

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–Jet’enverrailecoursparmail,melancemadameWeir.Je suppose qu’elle pense que je ne vais pas revenir. Cela dit, le

principalThomsonnepeutrienmebalancerdepireàlafigurequeceàquoij’aiétéconfrontéedepuislongtemps.

Avantd’entrerau lycéeGeorgeWashingtonenpremière, j’avaisdéjàtoutperdu.

MêmesimonsieurThompsons’est renducompteque jen’habitepasdans le secteurdu lycéeGW, je peux toujours raconterunbobardpourgagnerdutemps.Etsijedoischangerd’établissement,cequiseraitlepiredecequipourraitm’arriver,jem’enfiche.Jeleferai.

–Commentçava,Darlene?LasecrétairelèveàpeinelesyeuxdesonmagazinePeople.–Assieds-toi,Ella.MonsieurThompsonvaterecevoirtoutdesuite.Ouaip, on s’appelle par nos prénoms, Darlene et moi. Depuis mon

arrivéeaulycéeGW,ilyaunmois,j’aidéjàpasséuntempsfoudanscebureauàcausedemes innombrablespannesde réveil.Maisc’est cequiarrivequandvousbossezdenuitetquevousnevousglissezpasdansvosdrapsavanttroisheuresdumatin.

Jemetordslecoupourjeterunœilàtraverslaporteentrouvertedubureau de monsieur Thompson. Quelqu’un est assis sur le siège desvisiteurs,mais laseulechosequej’aperçois,c’estunemâchoirecarréeetdescheveuxbrunfoncé.Toutlecontrairedemoi.Jesuisonnepeutplusblonde,lesyeuxbleus.Uncadeaudemongéniteur,d’aprèsmamère.Levisiteurme rappelle les hommes d’affaires qui offraient des paquets dedollarsàmamanpourqu’elleprétendequ’elleétaitleurpetitecopined’unsoir. Certains types préfèrent même ça à la baise, toujours d’après mamère, bien sûr. Je ne suis pas allée jusque-là… pas encore. Et j’espèren’avoirjamaisàlefaire.C’estlaraisonpourlaquellej’aibesoindepassermonbac,pourensuitepouvoiraller en fac,obtenirundiplômeetavoirenfinunevienormale.

Certainsmômesrêventdevoyageràtraverslemonde,deposséderdesgrossesvoitures,debellesmaisons.Moi?Jeveuxavoirunappartementà

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moi,unfrigobienremplietunboulotquipayecorrectementetquisoitdepréférencetotalementinintéressant.

Lesdeuxhommesparlent,etparlent,etparlent.– Hé,Darlene ? Je suis en trainde rater le coursd’introductionau

calcul intégral, là. Je peux repasser quand monsieur Thompson seradispo?

J’essaiededireça lepluspolimentpossible,mais lesannéesque j’aipassées sans vraie présence adulte – mon absente et ravissante mèrecomptepourdubeurre–fontque j’aidumalàmontrer leminimumdedéférencequ’attendentlesadultesdequelqu’unquin’apasl’âgelégaldeboiredel’alcool.

–Non,Ella.MonsieurThompsonvabientôtavoirfini.Cettefois,ellearaison,parcequelaportes’ouvreetqueleprincipal

sort.Monsieur Thompson a dans les cinquante ans,mais on dirait qu’ilvient tout juste de terminer la fac. Il réussit quand même à avoir unsemblantd’autorité.

Ilmefaitsigne.–MademoiselleHarper,entrez,jevousprie.Entrer?EnprésencedeDonJuan?– Vous avez déjà quelqu’un dans votre bureau, je lui réponds en

soulignantl’évidence.Tout ça est sacrément suspect. Mes tripes me disent de décamper.

Mais si je m’enfuis, je laisse tomber la petite vie tranquille que j’aiplanifiéedepuisdesmois.

ThompsonseretourneetregardeDonJuan,quiselèvedesachaiseetmetendunemainlarge,

–Oui,c’estluilaraisondevotreprésence.Entrez,jevousenprie.Malgrémonintentionpremière, jepassedevantmonsieurThompson

etjeresteplantéelà,àl’entrée.Thompsonrefermelaporteetbaisselesstores.Cettefois,jesuisvraimentinquiète.

–MademoiselleHarper,sivousvoulezbienvousasseoir.

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Thompson me désigne la chaise que Don Juan vient de quitter. Jecroiselesbrasetjelesobservel’unetl’autred’unairbuté.Ilpeuttoujoursattendrepourquejem’asseye.

Thompsonsoupireetserassied.Ilsaitreconnaîtrelescasdésespérésquandiltombedessus.Çamemetencoreplusmalàl’aiseparceque,s’ilabandonne le combat, c’est qu’il y en a un autre, plus important, quis’annonce.

Ilramasseunepiledepapierssursonbureau.–EllaHarper,voiciCallumRoyal.Il faitunepause, commesi celamedisaitquelquechose.Royal, lui,

medévisagecommes’iln’avaitjamaisvuunefilledesavie.Jecomprendsque mes bras croisés font pointer mes seins en avant, alors je laissemaladroitementtombermesmainslelongdemoncorps.

–Raviedevousrencontrer,MonsieurRoyal.Il paraît évident pour tout le monde que je pense exactement le

contraire.Lesondemavoixletiredesasidération.Ilplongeenavantetavantmêmequej’aieeuletempsderéagir,mamaindroiteestpriseenétauentrelessiennes.

–MonDieu,commevousluiressemblez.Cesmotssontmurmuréstellementbasquenoussommeslesseuls,lui

etmoi,àlesentendre.Etcommes’ilsesouvenaitenfindelàoùilétait,ilmeserrelamain.

–Jevousenprie,appelez-moiCallum.Ilditçasuruntonétrange.Commes’ilavaitdumalàprononcerces

mots.J’ôtemamaindelasienne,cequimedemandeunpetiteffortparcequecesaletypeneveutpasmelâcher.IlfautquemonsieurThompsonseraclelagorgepourquecemonsieurRoyalmelaisseenfintranquille.

–C’estquoicebordel?Jesuisunemômededix-septansdansunepièceremplied’adultes,et

montonestdéplacé.Pourtantpersonneneréagit.MonsieurThompsonsepasseunemainnerveusedanslescheveux.

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–Jenesaispascommentdirecela,alorsj’iraidroitaubut.MonsieurRoyal,iciprésent,vientdem’annoncerquevosparentssonttouslesdeuxdécédésetqu’ilestvotretuteurlégal.

J’aiun instantd’hésitation. Justeun instant. Justeassezpourque lechocsetransformeenindignation.

–C’estdesconneries!Lejuronestsortidemaboucheavantquej’aiepuleretenir.– Ma mère m’a inscrite en classe. Vous avez sa signature sur les

formulairesd’inscription.Mon cœur bat àmille à l’heure, parce qu’en réalité, cette signature,

c’estlamienne.Jel’aicontrefaitepourgarderlecontrôledemavie.Bienque je sois mineure, c’était moi l’adulte de la famille depuis l’âge dequinzeans.

Je dois reconnaître quemonsieur Thompson neme réprimande paspouravoirjuré.

–Lespapiersquej’aisouslesyeuxindiquentpourtantquelarequêtedemonsieurRoyalestlégitime.

Etilagitebruyammentcespapiers.–Ouais?Ehbien,ilment.Jen’aijamaisvucetypedemavie,etsi

vousmelaissezpartiraveclui,leprochainpapierquevousaurezenmainvousannonceraqu’uneélèvedeGWadisparudansuntraficdetraitedesBlanches.

–Vousavezraison,nousnenoussommesjamaisrencontrés,répliqueRoyal,maisçanechangerienauxfaitsindiqués.

–Laissez-moiregarder.J’arrache les papiers desmains demonsieur Thompson. Je parcours

les pages sans vraiment lire ce qu’elles contiennent. Certains mots mesautentauxyeux,tuteur,décèsetlegs,maisilsnesignifientrienpourmoi.CallumRoyalesttoujoursunétranger.Pointfinal.

– Peut-être que votre mère pourrait venir et éclaircir la situation,suggèremonsieurThompson.

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–Oui,Ella,amenezvotremèreetjeretireraimademande,ditRoyalsuruntondoucereuxdontjeperçoistrèsbienladureté.

Ilestaucourantdequelquechose.Jemetourneversleprincipal.C’estluilemaillonfaible.–Jepourraisparfaitementfabriquertoutçasurl’ordinateurdulycée.

Jen’auraismêmepasbesoindePhotoshop.Etjeluijettelaliassedepapiers.Jelisledoutedanssesyeux,alorsje

décidedefairejouermonavantage.–Ilfautquejeretourneencours.Lesemestrecommenceàpeine,et

jen’aipasenviedeprendreduretard.Il se lèche les lèvres d’un air incertain, et je le fixe avec toute la

convictiondont jesuiscapable.Jen’aipasdepère.Jen’aicertainementpasdetuteur.Sij’enavaiseuun,oùétaitceconnardquandmamèresecassaitleculpourjoindrelesdeuxbouts,quandellesouffraitlemartyreavec son cancer, quand elle pleurait dans son lit d’hôpital parce qu’elleallaitm’abandonner?Ilétaitoù?

Thompsonpousseunsoupir.–Trèsbien,Ella,pourquoineretournes-tupasenclasse?Ilestclair

quemonsieurRoyaletmoidevonsencorediscuter.Royalobjecte.–Vousmeconnaissezetvousconnaissezmafamille.Cespapierssont

enrègle.Jeneseraispasvenuvouslesmontrersicen’étaitpaslavérité.Quelleenseraitlaraison?

–Ilyabeaucoupdeperversdanslemonde,jedisd’unairnarquois.Ilsontbiendesraisonsderaconterdesbobards.

Thompsonlèvelamain.–Ella,çasuffit.MonsieurRoyal,ceciestunesurprisepournoustous.

Lorsquenousauronscontactélamèred’Ella,nouspourronstirertoutcelaauclair.

Royal n’apprécie pas le contretemps et insiste sur le fait qu’il estquelqu’undetrèsimportantetqu’unmembredelafamilleRoyalnepeut

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pas mentir. Un peu plus, et il va invoquer George Washington et lecerisier 1.

Pendantquecesdeux-làsedisputent,jem’éclipse.–Jevaisauxtoilettes,Darlene.Etensuite,jevaisdirectencours.Ellegobemonbobardsansproblème.–Prendstontemps.Jeprévienstonprofesseur.Jenevaispasauxtoilettes.Jeneretournepasenclasse.Àlaplace,je

cours jusqu’àl’arrêtdebuset jeprendsla ligneGjusqu’auterminus.Delà,j’aitrenteminutesdemarchepourarriveràl’appartementquejelouepourenvironcinqcentsdollarsparmois. Ilyaunechambreàcoucher,une salledebainsmiteuse etun coin cuisinequi sent lemoisi.Mais çan’est pas cher et la propriétaire accepte le cash sans vérifier vosantécédents. Je ne sais pas qui est Callum Royal, mais je sais que saprésenceàKirkwoodestunemauvaise,une trèsmauvaisenouvelle.Cespapierslégauxn’ontpasétéphotoshopés.Ilssontenrègle.Maisilesthorsdequestionquejeremettemavieentrelesmainsd’unétrangervenudenullepart.

Maviem’appartient.C’estmoiquilavis.C’estmoiquilacontrôle.Je sorsmes livresde classe à centdollarsdemon sacàdos et je le

remplisdevêtements,d’articlesdetoiletteetdemesdernièreséconomies,milledollars.Merde.J’aibesoind’argentrapidementpourpouvoirquitterla ville. Je suis sacrément à sec. Ça m’a coûté deux mille balles dem’installer ici, en comptant les tickets de transport et les deuxmois deloyer, plus la caution. Çame fout les boules de devoir taper dansmesréserves,maisilestclairquejedoisfilerd’ici.

Encoreunefois,jem’enfuis.Voilàl’histoiredemavie.Mamanetmoi,onapassénotretempsàfuir.Fuirsespetitscopains,sespatronspervers,les services sociaux, la pauvreté. L’hospice est le seul endroit où noussommesrestéesuncertaintemps,etc’étaitparcequ’elleétaitentraindemourir.

Parfois, jemedis que la terre entière a décidé que je n’avais pas ledroitd’êtreheureuse.

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Jem’assiedssurleborddulitetjemeretiensdehurlermafrustrationet ma colère, et ok, ma peur aussi. Je m’autorise cinq minutesd’apitoiement surmon sort et ensuite, hop, je téléphone. J’emmerde laterreentière.

– Hé,George, j’ai réfléchià tapropositiondebosserauDaddyG, jedébitequandunevoixmasculinerépondauboutdufil,jesuispartante.

J’aifaitdustrip-teaseàlabarrechezMissCandy,unpetitcluboùjemedésapeennegardantqu’uncache-sexeetdescache-tétons.Jegagnepas mal, mais pas suffisamment. Il y a quelques semaines, George m’aproposé de passer aux choses sérieuses chezDaddyG, une boîte de nuintégral.J’airésistéparcequejen’envoyaispasl’utilité.Maintenantjelavois. J’ai la chance d’avoir hérité du corps de ma mère. De longuesjambes.Unetailledeguêpe.Messeinsnesontpasénormes,pasdugenre100D,maisGeorgeditqu’ilaimebienmon85Cquimedonnel’aird’uneado.Cen’estpasfaux,carmacarted’identitéditquej’aitrente-quatreansetquejem’appelleMargaretHarperetpasEllaHarper.Mamèremorte.C’est super-glauque quand on y pense, mais je m’efforce de ne pas ypenser.

Il n’y a pas desmasses de boulots qu’une fille de dix-sept ans peutfaireàmi-temps,quiluipermettentdepayersesfactures.Etaucunn’estlégal.Dealer.Monterdescasses.Fairedustrip-tease.J’aichoisiledernier.

–Putain,mapoulette,c’estunesacrémentbonnenouvelle,s’étrangleGeorge. J’ai une place ce soir. Tu seras la troisième.Mets un uniformed’écolièrecatholique.Lesmecsvontadorer.

–Combienpourcesoir?–Combiendequoi?–Decash,George.Combiendeliquide?–Cinqcentsdollarsettouslespourboiresquetupeuxrécolter.Situ

veux fairequelques strip-teasesenprivé, je te refilerai centdollarspourchaque.

Merde.Cesoir,jepourraisgagnermilledollarsfacilement.Jerefoulemonangoisseetmagêne.Cen’estpaslemomentd’avoirundébatmoral.

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J’aibesoindefric,etlestrip-teaseestpourmoilemoyenleplussûrd’engagner.

–Jeserailà.Réserve-m’enautantquetupeux.

1.LalégenderacontequeGeorgeWashington,enfant,auraitabattuuncerisierquesonpèreaimaitbeaucoup.Quandcedernierluidemandaquiavaitfaitça,Georgeluirépondit:«Père,jenepeuxvousmentir,c’estmoi.»GeorgeWashingtonfutdoncsurnommé«l’hommequinepouvaitmentir».(NdT,ainsiquepourlesnotessuivantes)

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CHAPITRE2

LeDaddyG est un endroit de merde. Mais c’est quand même bienmieuxquelesautresclubsenville.Etpuis,l’argent,c’estl’argent.

L’apparitiondeCallumRoyalaulycéem’aprislatêtetoutelajournée.Si j’avais un ordinateur portable et une connexion Internet, j’auraisgooglisécetype,maismonvieilordiestpétéetjen’aipasassezd’argentpourleremplacer.Jen’aipasvoulualleràlabibliothèquepourutiliserlesleurs.C’eststupide,maisj’avaispeurqueRoyalmetendeuneembuscadedanslaruesijequittaismonappartement.

Quiest-ce?Etpourquoipense-t-il qu’il estmon tuteur?Mamannem’ajamaisparlédelui.Jemedemandesiçapourraitêtremonpère,maiscespapiersdisaientqu’ilétaitmort,luiaussi.Etàmoinsquemamanm’aitmenti,jesaisquenompèrenes’appelaitpasCallum,maisSteve.

Steve. Ça m’a toujours paru bidon. Un peu comme si, quand votremômevousdemande«maman,parle-moidemonpère»etquevousnesavezpasquoirépondre,voussortiezlepremierprénomquivousvientàl’esprit:«Euh…ils’appelait…euh…Steve,mapuce.»

Mais je n’arrive pas à croire que maman m’ait menti. Nous avonstoujoursétéhonnêtesl’uneenversl’autre.

Jeme sors CallumRoyal de la tête, parce que ce soir je débute auDaddyG,et jenepeuxpasmepermettred’êtredistraiteparuninconnuentre deux âges qui porte un costard à mille dollars. Il y a déjà assezd’hommesmûrsdansceradepourm’occuperl’esprit.

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Leclubestblindé.Jesupposequelasoirée«écolièrecatholique»estunmustauDaddyG.Lestablesetlesalcôvesdelascèneprincipalesonttoutesprises,mais l’étagesupérieurquiabrite la logeVIPestdésert.Çan’ariend’étonnant.Iln’yapasbeaucoupdeVIPàKirkwood,cettepetiteville de la banlieue de Knoxville, dans le Tennessee. C’est une villeouvrière,avecprincipalementdesgenspauvres.Sivousgagnezplusde40KRparan,vousêtesconsidérécommepleinauxas.C’est laraisonpourlaquellejel’aichoisie.Lesloyerssontbas,etlesystèmescolairepublicestcorrect.

La loge est à l’arrière et elle est pleine de vie lorsque j’y entre.Desfemmesàmoitiénuesmedévisagent.Certainesmefontunsignedetête,uneoudeuxsourient,avantdeseremettreàréglerleursporte-jarretellesouàpeaufinerleurmaquillagedevantleurcoiffeuse.

Une,pourtant,seruesurmoi.–Cendrillon?J’acquiesce.C’étaitmonnomdescènechezMissCandy.Çasemblebiencorrespondreaumomentprésent.–Jem’appelleRose.Georgem’ademandédetemettreauparfumce

soir.Ilyatoujoursunemamanpouledanschaqueclub.Unefemmeplus

âgéequiserendcomptequ’elleestentraindeperdrelapartiecontrelagravité et décide de se rendre utile autrement. ChezMiss Candy, c’étaitTina,uneblondedécoloréevieillissantequim’avaitprisesoussonailedèsledébut.Ici,c’estRosalaroussevieillissantequiglousseenm’entraînantvers un portant rempli de costumes de scène. Je suis sur le pointd’attraperlecostumed’écolière,maisellem’arrête.

–Non,ça,c’estpourplustard.Metscelui-ci.Le truc suivantdont jemesouviens, c’estqu’ellem’aideàenfilerun

corset noir avecdes parements endentelle noire et un string assorti endentellenoire.

–Jevaisdanserlà-dedans?

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Je peux à peine respirer dans ce corset et j’ai besoin de l’aide dequelqu’unpourmeledélacer.

–Oubliecequisepasselà-haut.(Ellesemarrequandelleentendmarespirationhaletante.)Contente-toi de remuer ton cul, accroche-toi à labarredecerichardetçaseraparfait.

Jeluilanceunregardsurpris.–Jecroyaisquej’allaissurscène?–Georgenet’apasdit?Tufaisd’abordunnuméroenprivédansla

logeVIP.Quoi?Maisjeviensàpeined’arriver.D’aprèsmonexpérienceauMiss

Candy,ondansed’abordàplusieursreprisessurscèneavantqu’unclientdemandeunedanseenprivé.

– Çadoit êtreunde teshabituésde tonancienclub, supposeRoselorsqu’elle se rendcomptedemaconfusion.Crésusvientde se ramenercommesileslieuxluiappartenaient,ils’estcontentédefilerunbiftondecinqcentsàGeorgeet luiadit« tumel’envoies».(Ellemefaitunclind’œil.)Joue-lafineettuvasluisoutirerencorequelquesbilletsdecent.

Puiselleparts’occuperd’uneautredanseuseetmoi,jerestelà,àmedemandersijenesuispasentraindecommettreuneerreur.

J’aimebien jouer lesduresà cuireet,ouais, j’en suisune,dansunecertainemesure.J’aiconnulapauvretéetlafaim.J’aiétéélevéeparunestrip-teaseuse.

Jesaisbalanceruncoupdepoingquandc’estnécessaire.Maisjen’aiquedix-septans.Parfois,j’ail’impressionquejesuistropjeunepouravoirvéculaviequej’aivécue.Parfois,jeregardeautourdemoietjemedis,jenesuispasàmaplace.

Mais j’y suis. Je suis ici et je suis fauchée, et je veux être cette fillenormale que jeme donne unmal de chien à devenir, et il faut que jequittecette logeetque j’enfourchemabarreVIP,commeRoseme l’a siélégammentexpliqué.

George apparaît au moment où je sors dans le couloir. C’est uncostaud,avecunebarbefournieetungentilregard.

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–Est-cequeRoset’aparléduclient?Ilt’attend.Jedéglutisdifficilementenhochantlatête.– Je ne dois rien faire de particulier, n’est-ce pas ? Juste une lap

dancenormale?Ilglousse.– Sois aussi particulière que tu veux, mais si jamais il te touche,

Brunovalevideràcoupsdepiedaucul.Jesuissoulagéed’apprendrequechezDaddyG, la sacro-sainte règle

du « pas touche à la marchandise » est respectée. C’est beaucoup plusfacilededanserpourdestypeslibidineuxquandleursmainspoisseusesnevouscollentpasdetropprès.

–Tuvastrèsbient’ensortir,mapoulette.Ilmetapotelebras.–Ets’ilteposelaquestion,tuasvingt-quatreans,ok.Personne,passé

trenteans,nebosseici,tutesouviens?Jemanqueluidemander:«Etquelqu’unquiamoinsdevingtans?»

Mais jeserre les lèvres. Ildoitsavoirque jemensàproposdemonâge.Commelamoitiédesfillesici.Etj’aibeauavoireuuneviedifficile,jenefaiscarrémentpasmesputainsdetrente-quatreans.Aveclemaquillage,jepeuxpasserpourunefilledevingtetunans,maximum.

George disparaît dans la loge et je respire un grand coup avant dem’engager dans le couloir. C’est la ligne de basse bien épaisse quim’accueilledanslasalleprincipale.Surscène,ladanseusevientjustededéboutonnerlechemisierdesonuniformeetlestypessedéchaînentàlavue de son soutien-gorge transparent. Les billets pleuvent sur scène. Jen’aid’yeuxquepourça.Lefric.

J’emmerdetoutlereste.Pourtant, jemesensvraimentmalà l’idéededevoirquitter le lycée

GWettouscesprofsquiavaientl’airdesesentirconcernésparcequ’ilsenseignaient.Jetrouveraiunautrebahut,dansuneautreville.

Une ville que Callum Royal ne sera pas capable de découvrir. Jem’arrête soudain.Et je faisdemi-tourdans lapanique totale.Trop tard.

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Callum Royal a déjà traversé le salon d’accueil pour VIP à la lumièretamiséeetm’attrapefermementparlebras.

–Ella,dit-ilàvoixbasse.–Laissez-moitranquille.J’essaie d’avoir le ton le plus indifférent possible, mais ma main

tremblelorsquej’essaiedeluifairelâcherprise.Ilnelâchepas,pasavantqu’unautrepersonnagecharpenténesorte

del’ombre.–Aucuncontactphysique,prévientlevideurd’unairsinistre.Royallâchemonbrascommes’ilétaitbrûlant.Iljetteunregardsévère

àBruno, levideur,avantde revenir surmoi. Ilmedévisage,commes’ilfaisaituneffortsurhumainpournepasmatermonsemblantdecostume.

–Ilfautqu’onparle.Son haleine pue le whisky au point de me faire presque vomir. Je

répondsfroidement:–Jen’airienàvousdire,jenevousconnaispas.–Jesuistontuteur.–Vousêtesuninconnu.Àprésent,jeleprendsdehaut.–Etvousm’empêchezdetravailler!Ilouvrelabouche.Lareferme.Puisillance:–D’accord.Alors,vas-y,auboulot.Ilaunelueurmoqueusedanslesyeuxlorsqu’ilreculeendirectiondes

canapésenvelours.Ils’assiedenétendantlégèrementsesjambes.–Donne-m’enpourmonargent.Moncœursemetàbattreàcentàl’heure.C’esthorsdequestion.Je

nedanseraipaspourcethomme.Du coin de l’œil, je repère George qui monte les marches. Mon

nouveaupatronmeregardeavecimpatience.Gulp. J’ai envie de pleurer, mais je résiste. Au lieu de ça, je me

retourneversRoyal,l’airsûrdemoi.

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–Trèsbien.Tuveuxquejedansepourtoi,papa?Jevaisdanserpourtoi.

Sousmes faux cils,mes yeux se remplissent de larmes,mais je saisqu’elles ne couleront pas. Je me suis entraînée à ne jamais pleurer enpublic.Ladernièrefois,c’étaitsurlelitdemortdemamère,etaprèsledépartdesmédecinsetdesinfirmières.

CallumRoyal a un air chagrin pendant que je bouge devant lui. Jerouledeshanchessurletempodelamusique,commesic’étaitinstinctifchezmoi.Defait,çal’est.J’ailadansedanslesang.Çafaitpartiedemoi.Quandj’étaismôme,mamanavaitréussiàmettreassezd’argentdecôtépourme payer des leçons de danse classique et de danse jazz pendanttrois ans. Ensuite, l’argent a manqué et elle m’a donné des cours elle-même. Elle regardait des vidéos ou squattait des cours à la maison dequartierjusqu’àcequ’ilslavirent,puisrentraitàlamaisonetm’enseignaitcequ’elleavaitvu.

J’adore danser et je suis assez douée, mais pas assez stupide pourcroire que je vais faire carrière à moins de choisir le métier de strip-teaseuse.Non,macarrièreserapluspragmatique.Danslesaffairesouledroit,quelquechosequimepermettradevivredans l’aisance.Ladanse,c’estunrêvefoudepetitefille.

Je glisse mes mains langoureusement le long de mon corset. Royalpousseungrognement.Cependant,cen’estpas legenredegrognementquej’ail’habituded’entendre.Iln’apasl’airexcité.Ilal’air…triste.

–Ildoitêtreentraindeseretournerdanssatombe,dit-ild’unevoixrauque.

Jel’ignore.Pourmoi,iln’existepas.–Cen’estpasjuste.Ondiraitqu’ilvas’étrangler.Je rejettemes cheveux en arrière et je bombe le torse. Je sens que

Brunomesurveilledansl’ombre.Centdollarspourdixminutesdedanseetj’aidéjàtournoyédepuisau

moinsdeuxminutes.Jepeuxyarriver.Mais,detouteévidence,Royal,lui,

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nepeutpas.Encoreun tour, sesdeuxmainsm’agrippent fermement leshanches.

–Non,gronde-t-il,Steven’auraitpasvouludeçapourtoi.Avantquej’aieeuletempsdedireouf,jevoledanslesairsetjeme

retrouvesursonépaule.Jehurle:–Lâchez-moi!Il ne m’écoute pas, il m’emporte comme une vulgaire poupée de

chiffon.Mêmel’apparitionsoudainedeBrunoneparvientpasàl’arrêter.–Dégagedemonchemin!Brunofaitunpasenavant,illuirentrededans.– Cette fille adix-sept ans ! Elle estmineure, je suis son tuteur et,

Dieum’esttémoin,situfaisencoreunpas,touslesflicsdeKirkwoodvontdéboulerici,ettoiettouslesautresperversdecetteboîteirontentaulepourdétournementdemineure.

Brunoabeauavoirl’aird’unebrute,iln’estpasdébile.Ilrecule,l’airpaniqué.

Moi,jesuismoinscoopérative.MespoingsmartèlentledosdeRoyal,mesongleslacèrentsavestedeluxe.Jehurle:«Lâchez-moi!»

Iln’en fait rien,etpersonnene s’interposequand il sedirigevers lasortie.Lesclientssontbientropoccupésàmateretàhurlerenregardantla scène. Dans un flash, j’aperçois George s’approcher de Bruno qui luimurmurefurieusementquelquechoseàl’oreille,puisilsdisparaissentetjesuisfrappéeparuncourantd’airfrais.

Nous sommes dehors, mais Callum Royal ne me lâche pas pourautant.Jevoissesbelleschaussuresclaquersurlerevêtementfissuréduparking. J’entends un cliquetis de clés, un bip sonore, et me voilà ànouveauprojetéedanslesairspouratterrirenfinsurunsiègeencuir.Jesuisàl’arrièred’unevoiture.Laportièreclaque.Lemoteurgronde.

OhmonDieu!Cetypeestentraindemekidnapper.

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CHAPITRE3

MONSACÀDOS!Ilyatoutmonargentetmamontreàl’intérieur!Labanquettearrière

delavoituredecemonstredeCallumRoyalestletrucleplusluxueuxoùmesfessessesont jamaisposées.Dommagequejen’aiepasletempsdel’apprécier.Jemerueverslapoignéeetjel’actionne,maiscettemauditeportièrenes’ouvrepas.

Jemetourneversleconducteur.C’estcomplètementstupide,maisjen’aipas lechoix.Jeplongeenavantet j’attrape l’épauleduconducteur,dontlecouestaussigrosquemacuisse.

–Faitesdemi-tour,ilfautquej’yretourne!Ilrestedemarbre.Ondiraitunmurdebrique.Jelesecoueencoreun

peu,maisjesuissûrequemêmesijelepoignardaisdanslecou,cetypenebougeraitpasd’unpouce,àmoinsqueRoyalneluidisedelefaire.

Callumn’apasbougénonplusdesonsiègepassager.Jefinisparmerésigner à rester prisonnière de la voiture. Je teste la vitre, juste pourvérifier.Elleresteobstinémentfermée.

–Lasécuritéenfant?jemurmure,certainedelaréponse.Ilhochelégèrementlatête.–Entreautreschoses.Est-cequec’estçaquetucherches?Monsacàdosatterritsurmesgenoux.Jerésisteàl’enviedel’ouvrir

pourvérifierquemonargentetmespapierss’ytrouventencore.Sanseux,

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jesuiscomplètementàsamerci,maisjeneveuxrienluirévéleravantdecomprendrecequ’ilmeveut.

– Écoutez,Monsieur, je ne sais pas ce que vous voulez,mais il estévidentquevousavezde l’argent. Il y apleindeputespar ici qui vousferont tout ce que vous voulez sans vous attirer d’ennuis avec la loicommemoi.Déposez-moiauprochaincarrefour,et jevousprometsquevousn’entendrezplusjamaisparlerdemoi.Jen’iraipasvoirlesflics.JediraiàGeorgequevousêtesunancienclient,maisquenousavionsdesproblèmesàréglerentrenous.

–Jenecherchepasdepute.Jesuisicipourtoi.Après cette déclaration inquiétante, Royal enlève sa veste et me la

tend.Je voudrais bien être un peu plus entreprenante,mais c’est un peu

bizarre,çamemetmalàl’aised’êtreassisedanscettevoituredeluxeavecun typepour qui je viens justed’exécuterunepoledance. Jedonneraisn’importe quoi pour avoir une culotte de grand-mère. À contrecœur,j’enfilesavesteenignorantlagênedouloureusequemeprocurelecorsetetjeserrelespanscontremapoitrine.

–Jen’airienàvousoffrir.Lepeud’argentquej’aicachéaufonddemonsac,c’estsûrementdela

gnognottepourcetype.RienquecettevoituresuffiraitàacheterleDaddyGenentier.

Royalhausseunsourcilensignededénégation.Maintenantqu’ilesten bras de chemise, je peux voir samontre. C’est exactement lamêmeque…lamienne.Sesyeuxsuiventmonregard.

–Tul’asdéjàvue.Ce n’est pas une question, mais une affirmation. Il me tend son

poignet.Lamontreaunbraceletencuirnoir,desboutonsenargent,etungoussetenor18caratsencerclesoncadranbombé.Leschiffresetlesaiguillesbrillentdanslenoir.

Labouchesèche,jemens.–Jen’aijamaisvucetrucdemavie.

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–Vraiment?C’estunemontreOris.Suisse,faitemain.Jel’aireçueencadeau quand j’ai été diplômé de l’IUN 1. Mon meilleur ami, SteveO’Halloran, a reçu exactement la même quand lui aussi a obtenu sondiplômedel’IUN.Surledos,ilestgravé…

Nonsibisedpatriae.J’aicherchécequecelavoulaitdirequandj’avaisneufans,aprèsque

mamèrem’avaitracontél’histoiredemanaissance.Désolée,mapuce,maisj’aicouchéavecunmarin.Lesseuleschosesqu’il

m’alaissées,c’estsonprénometsamontre.Etmoi,jeleluirappelais.Ellem’avaitébouriffé lescheveuxetm’avaitditquej’étais lameilleurechosequiluisoitarrivée.Sonabsencemefaitmal,ànouveau.

–…Celasignifie:«Paspoursoi,maispourlapatrie».Ilyadix-huitans,lamontredeSteveadisparu.Ildisaitqu’ill’avaitperdue,maisilnel’ajamaisremplacée.Iln’enajamaisportéd’autre.

Royalrenifletristement.–Ils’enservaitcommeprétextepourêtretoutletempsenretard.Jemesurprendsàmepencherenavant,j’aienvied’ensavoirplussur

Steve O’Halloran, à quoi ressemblait ce donneur de spermatozoïdes, etcommentcesdeuxhommesseconnaissaient.Puisjereprendsledessus,jenevaisquandmêmepasmelaisseralleràdusentimentalisme.

– Sympatonhistoire,monpote,maisqu’est-cequeçaaàvoiravecmoi?

Je jette un coup d’œil à Goliath, sur le siège avant, et je hausse lavoix:

–Parceque,touslesdeux,vousvenezdekidnapperunemineure,etje suis quasi certaine que c’est considéré comme un crime dans lescinquanteÉtats.

SeulRoyalmerépond:–Lekidnappingestuncrime,quelquesoitl’âgedelapersonne,mais

comme je suis ton tuteur et que tu commettais des actes illégaux, c’estmondroitdet’empêcherd’allerplusloin.

Jemeforceàluirépondreparunriremoqueur.

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– Jene saispasqui vouspensezque je suis,mais j’ai trente-quatreans.

Jesaisismonsacàdosetj’ensorsmacarted’identitéenrepoussantàl’intérieurl’exactecopiedelamontrequeRoyalporteaupoignetgauche.

–Vousvoyez?MargaretHarper,trente-quatreans.Ilm’arrachelacarted’identitédesmains.–Unmètresoixante-dix.Cinquante-neufkilos.Ilmebalaieduregard.– Ondiraitplutôt45kilos,mais jesupposequetuasmaigridepuis

quetuesenfuite.Enfuite?Commentest-ilaucourant?Commes’illisaitdansmespensées,ilrenifleetajoute:–J’aicinqfils.Ilsm’ontfaittoutcequiétaithumainementpossible,et

je sais reconnaître une ado quand j’en vois une, même couverte demaquillage.

Jeregardefixementdevantmoi.Cethomme,quiqu’ilsoit,n’obtiendrariendemoi.

–SteveO’Halloranesttonpère.Ilsereprend.–Étaittonpère.Tonpères’appelaitSteveO’Halloran.Je tourne la tête vers la vitre pour que cet étranger ne voie pas la

douleurquejeressens.Bienentendu,monpèreetmort.Bienentendu.Magorge se serre, et j’ai cette sensationhorribledes larmesquime

piquent les yeux.Ce sont les bébés qui pleurent.Ce sont les faibles quipleurent.

Pleurerunpèrequejen’aipasconnu,c’estcomplè-tementnaze.En plus du ronronnement du moteur, je perçois le tintement d’un

verre et ensuite le bruit familier de l’alcool qui coule dans un verre àwhisky.Royalseremetàparler.

– Tonpèreetmoiétions lesmeilleursamisdumonde.Nousavonsgrandiensemble.Noussommesallésàl’universitéensemble.Nousavons

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décidédenousenrôlerdans lamarine suruncoupde tête.Nousavonsfinalement intégré lecorpsdesSeals 2,maisnospèresvoulaientprendreleur retraite, alors au lieu de rempiler, nous sommes rentrés chez nouspour reprendre les rênesde l’entreprise familiale.Nousconstruisonsdesavions,siçat’intéressedelesavoir.

Causetoujours,jepenseamèrement.Ilignoremonsilence,ouleprendcommeuneinvitationàpoursuivre.– Il y a cinqmois, Steve estmort dans un accident de deltaplane.

Mais avant qu’il meure, c’est dingue, c’est comme s’il avait eu uneprémonition(Royalsecouelatête),ilm’adonnéunelettreenmedisantquec’étaitsansdoutelecourrierleplusimportantqu’ilaitjamaisreçu.Ilm’aditquenouslelirionsensembleàsonretour,maisunesemaineplustard,safemmeestrentréedevoyageetm’aannoncéqueSteveétaitmort.J’aimis la lettredecôtépour…m’occuperdesproblèmesquesondécèsoccasionnait,avecsaveuve.

Des problèmes ?Qu’est-ce que ça voulait dire ?Onmeurt, et voilà,c’est tout, non ? En plus, je me demande pourquoi il prononce le mot«veuve»,commesic’étaitungrosmot.

– Deuxou troismoisplus tard, jeme suis souvenude la lettre.Tuveuxsavoircequ’ellecontenait?

Quel sale tentateur ! Bien sûr que je veux savoir ce quedisait cettelettre,mais jenevaispas lui faire leplaisirdeluirépondre.Jecollemajoueàlafenêtre.

Nous avons passé plusieurs pâtés de maisons avant que Royalcontinue.

–Lalettrevenaitdetamère.–Quoi?Souslechoc,jetournelatête.Le fait d’avoir réussi à attirer mon attention ne semble pas le faire

sauterdejoiepourautant,ilajustel’airlas.Lapertedesonami,demonpère,estgravéesursonvisage,etpourla

premièrefois,jevoisCallumRoyalpourcequ’ilprétendêtre,unhomme

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quiaperdusonmeilleuramietquiaeulasurprisedesavie.Pourtant, avant que j’aie eu le tempsdedire autre chose, la voiture

s’arrête.Àtraverslavitre,jevoisquenoussommesenrasecampagne.Ilyaunelonguebandedeterreplane,ungrandbâtimentmétalliqueetunetour.Àcôtédubâtiment,ungrosavionblancavecl’inscription«AtlanticAviation»peintedessus.Royalm’aditqu’ilconstruisaitdesavions,maisjenem’attendaispasàça.Jenesaispasàquoijem’attendais,maispasàun putain d’énorme avion capable de transporter des centaines depassagersàl’autreboutdumonde.

–Ilestàvous?J’aidumalànepashausserleton.–Oui,maisnousnenousarrêtonspas.Jeretirelamaindelagrossepoignéeargentéedelavoiture.–Quevoulez-vousdire?Pourl’instant,j’oublielechocdel’enlèvement,celuidel’existence,et

delamort,dudonneurdespermequiacontribuéàm’enfanter,celuidecette mystérieuse lettre, pour constater, bouche bée, que nousfranchissonslesportes,devantlebâtiment,etquenousroulonssurcequejepenseêtreunterraind’aviation.

Àl’arrièredel’avion,uneportes’ouvreet,lorsquelarampeatteintlesol,Goliathmontesurlepaninclinéetrouledirectementdanslasoutedel’avion.Jemeretournepourapercevoir,àtraverslepare-brisearrière,laporteserefermerlourdementsurnous.Puislesserruresdelavoiturefontunpetitclic,etjesuislibre.Enfinplusoumoins.

–Aprèstoi.CallumdésignelaportièrequeGoliathtientouvertepourmoi.Jesorsenessayantdemedonnerunecontenance.Même l’avionest

enmeilleurétatquemoiavecmoncorsetdestrip-teaseuseetmestalonshautsinconfortables.

–Ilfautquejemechange.Jesuiscontented’avoirréussiàparlersuruntonàpeuprèsnaturel.

Au fil des ans, j’ai pris l’habitude d’être humiliée et j’ai appris que la

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meilleuredesdéfenses,c’estl’attaque.Maislà,jesuisentrèsmauvaiseposture.JeneveuxpasqueGoliath,

ou quiconque parmi le personnel navigant, me voie dans cetaccoutrement.

C’est la première fois que je prends l’avion. Jusqu’à présent, ça atoujoursétélebus,aupire,desviréesenauto-stopavecdescamionneurs.Mais ce truc-là est géant, assez grand pour y loger une voiture. Il y asûrementuncoinquelquepartoùjepourraimechanger.

LeregarddeCallums’adoucit,ilfaitunsignedetêterapideàGoliath.–Noust’attendronsenhaut.Ilindiquel’extrémitédelapiècequiressembleungarage.–Derrièrecetteporte,ilyaunescalier.Montequandtuserasprête.Une fois seule, j’échange mon costume de strip-teaseuse pour des

dessousplus confortables, unepairede jeans large, undébardeur et unpull en flanelle boutonné que je porte habituellement ouvert, maisqu’aujourd’hui je boutonne jusqu’en haut en ne laissant que le dernierboutonouvert.JeressembleàunSDF,maisaumoinsjesuiscouverte.

Je fourre les trucsde strip-teasedansmonsacet jevérifiequemonargentesttoujourslà.Ill’est,ouf!EtlamontredeSteveaussi.Sanselle,jemesenstoutenueetpuisqueCallumestaucourant,autantlamettre.Dès l’instant où le bracelet est à mon poignet, je me sens mieux, plusforte.Jesuiscapabled’affrontertoutcequeCallumRoyalaàmedire.Jejettemonsacàdossurmonépauleet,toutenmedirigeantverslaporte,je me mets à gamberger. J’ai besoin d’argent. Callum Royal en a. J’aibesoind’unnouvel endroitpourvivre, et vite.Si j’arriveà lui extorquerassez d’argent, je m’envolerai vers ma destination suivante et jerecommenceraitoutdepuisledébut.Jesaislefaire.Çavaaller.

Toutvabiensepasser.Sijemeracontecebobardassezlongtemps,jevaisfinirparycroire…mêmesicen’estpasvrai.

Callumm’attendenhautdel’escalier.Ilmeprésenteaupilote.– EllaHarper, voici Durand Sahadi. Durand, c’est la fille de Steve,

Ella.

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–Ravidevousrencontrer,ditDurandd’unevoixétonnammentgrave.Toutesmescondoléances.

Ilhochelégèrementlatête.Ilesttellementchouettequejeseraisbienconnedel’ignorer.Jeserrelamainqu’ilmetend.

–Merci.–Mercibien,Durand.Callumrenvoiesonpiloteetsetourneversmoi.–Asseyons-nous.Jeveuxrentreràlamaison.Ilyauneheuredevol

pourBayview.–Uneheure?Vousavezprisl’avionjustepouruneheure?–Çam’auraitprissixheuresparlaroute,c’étaitbeaucouptroplong.

Çam’adéjàdemandéneufsemainesetunearméededétectivespourteretrouver.

Commejen’aipaslechoix,jesuisCallumversunensembledesiègesencuircrèmequientourentuneétonnantetableenboissombreincrustéed’argent.Ils’installedansl’und’entreeuxetmefaitsignedem’asseoirenfacedelui.Quelqu’unadéjàapportéunverreetunebouteille,commesisonéquipesavaitqu’ilnepeutpascarburersansalcool.

DerrièreCallum, ilyaunautreensemblede fauteuilsetunsofa.Jemedemandesi jepourraismedégoterunjobd’hôtessedel’airpourlui.Cetendroitestencoreplusconfortablequesavoiture.Jepourraishabiterici,sansproblème.

Jem’assiedsetjeposemonsacàdosentremesjambes.–Bellemontre,remarque-t-ilfroidement.–Merci.C’estmamèrequimel’adonnée.Ellem’aditquec’étaitla

seulechosequemonpère luiavait laissée,enplusdesonprénometdemoi.

Çanesertplusàriendementir.Sisonarméededétectivesprivésl’amenéjusqu’àmoiàKirkwood,ilenconnaîtprobablementplusquemoiàproposdemamèreetmoi.Etilsembleenconnaîtreencoreplussurmonpère,cequejemeursd’enviededécouvrir.

–Oùestlalettre?

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–Àlamaison.Jeteladonneraiquandnousseronsarrivés.Ilattrapeunportfolioencuiretensortunpaquetdebillets,legenre

deliassequ’onvoitaucinoche,avecunebandeblancheautour.–Jeveuxpasserunmarchéavectoi,Ella.Je sais quemes yeux sont ronds comme des soucoupes,mais je n’y

peuxrien.Jen’aijamaisvuautantdebilletsdecentdollarsdemavie.Ilpousselapilesurlasurfacesombrejusqu’àmoi.Peut-êtrequec’est

unjeutéléviséouungenredeconcoursdetéléréalité?Jeserreleslèvresetjemeraidis.Jenelaisseraipersonnemeprendrepouruneimbécile.

–Allez-y,dis-jeencroisantlesbrasetenfixantCallum,lesyeuxmi-clos.

–D’aprèscequej’aicompris,tufaisdustrip-teasepoursubveniràtesbesoins et pour pouvoir passer ton bac. Ensuite, je suppose que tuvoudraisaller à l’université et renoncerà tedéshabillerpour faireautrechose. Peut-être voudrais-tu devenir comptable, oumédecin, ou avocat.Cetargentestungesteensignedemabonnefoi.(Iltapedelamainsurlesbillets.)Ilyadixmilledollars.Chaquemoisquetupasserasavecmoi,tuaurasunenouvellepile,dumêmemontant.Siturestesjusqu’àlafindetesétudes secondaires, tu recevrasunbonusdedeuxcentmilledollars.Celapaieratonécole,tonlogement,tesvêtementsettanourriture.Situobtiensundiplôme,tuaurasunautrebonustoutaussisubstantiel.

–C’estquoil’arnaque?Ça me démange de prendre le fric, de dégotter un parachute et

d’échapper aux griffes deCallumRoyal. Au lieu de ça, je reste assise àattendredevoircequejevaisdevoirfairepourobtenirtoutcefric,toutenmedemandantintérieurementoùjeposeleslimites.

– Tuarrêtesde lutter.Tun’essaiesplusde t’enfuir.Tuacceptesmatutelle.Tuvisdansmamaison.Tuconsidèresmesfilscommetesfrères.Situfaisça,tupourrasvivrelaviedonttuasrêvé.(Ilfaitunepause.)LaviequeSteveauraitvouluquetuaies.

–Etqu’est-cequejedoisfairepourvous?

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J’ai besoin qu’il me dise les choses clairement. Les yeux de Callums’élargissent,etsonteintvireauvert.

–Rienpourmoi.Tuesunetrèsjoliefille,Ella,maistuesunejeunefille,etmoijesuisunhommedequarante-deuxansquiacinqfils.Maisrassure-toi, j’ai une petite amie très séduisante qui comble tous mesbesoins.

–Euhhh.(Jelèveunemain.)Trèsbien,jeneveuxpasensavoirplus.Callumritdeboncœuravantderedevenirsérieux.– Je saisque jenepeuxpas remplacer tesparents,mais je serai là

pourtoi,commeeux l’auraientété.Tuasperduta famille,Ella,mais tun’esplusseule.TuesuneRoyalàprésent.

1.L’IndianaUniversityNorthwest,unedesuniversitésdel’Étatd’Indiana.

2.LesSealssontlaprincipaleforcespécialedelamarinedeguerredesÉtats-Unis,l’USNavy.

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CHAPITRE4

Nous sommes en train d’atterrir, mais même en pressant mon nezcontrelehublot,jenevoisrien,ilfaittropsombre.Laseulechosequejedistingue,cesontlesfeuxclignotantssurlapisteendessous.Unefoisquenousnoussommesposés,Callumnemelaissepasletempsd’examinerlesalentours.

Nousneprenonspaslavoiturequiesttoujoursdanslasoute,elledoitêtreréservéeauxvoyages.Durandnousconduitàuneautreberlinenoire.Les vitres teintées sont si foncées que je n’ai pas la moindre idée despaysagesquenoustraversons,maisquandCallumentrouvrelavitre,jelesens.Lesel.L’océan.

Onestdoncauborddelamer.EnCarolineduNordouduSud?Àsixheures de Kirkwood, on doit être quelque part le long de la côteAtlantique,cequineseraitpasétonnant,vulenomdelaboîtedeCallum.Celadit,çan’aaucuneimportance.Laseulechosequicompte,c’estletasdebillets toutneufsdansmon sacàdos.Dixmille. Jen’arrive toujourspasàréaliser.Dixmilleparmois.Etunsacrépaquetenplusquandj’auraipassémonbac.

Ilyaforcémentunearnaque.Callumaeubeaum’assurerqu’ilneveutpasde…faveursspécialesenéchange, jenesuispasnéede ladernièrepluie. Il y a toujours un piège, qui va finir par apparaître. Mais, à cemoment-là,j’auraidixmilleballesenpochesijedoisfuirdenouveau.

Jusque-là,jejouelejeu.JesuissympaavecCallum.Etsesfils…

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Merde,jelesavaisoubliés,ceux-là.Ilaparlédecinq,non?Quel problème peuvent-ils représenter ? Cinq fils à papa pourris

gâtés?Ah.J’aieuaffaireàbienpire.Commelepetitcopaingangsterdemamère,Léo,quiaessayédemesauterquandj’avaisdouzeans,puism’aapprislabonnefaçondeserrerlepoingaprèsquejeluiavaisbalancéuncoupdanslebideetquej’avaismanquémecasserlamain.Çal’avaitfaitmarreret,ensuite,nousétionsdevenuslesmeilleursamisdumonde.Cestrucs d’autodéfense m’ont bien aidée avec le petit copain suivant demaman,quiavaitluiaussilamainbaladeuse.

Mamanavaitvraimentlechicpourchoisirlesmeilleurs.Mais je ne veux pas la juger. Elle a fait ce qu’elle devait faire pour

survivre,etpasuneseconde,jen’aidoutédesonamourpourmoi.Au bout d’une demi-heure,Durand ralentit devant un portail. Il y a

une séparation entre nous et le conducteur,mais j’entends le bip d’unetélécommande, puis un bruit mécanique, et nous redémarrons. Nousroulonspluslentementcettefois,jusqu’àcequelavoitures’arrêteetquelesportièressedéverrouillentd’unclic.

–Noussommesarrivésàlamaison,dittranquillementCallum.– J’ai envie de le reprendre, « ce truc-là n’existe pas »,mais jeme

retiens.Durandouvremaporteetmetendlamain.Mesgenouxtremblentun

peu.Troisautresvéhiculessontparquésdansungrandgarage,deuxSUV 1

noirsetunpick-up 2rougecerisequinesemblepasêtreàsaplace.Callumsurprendmonregardetsouritd’unairpiteux.–OnavaittroisRangeRover,maisEastonaéchangélesiencontrece

pick-up.Jelesoupçonnedevouloirplusdeplacepourallerbaiseràdroiteàgaucheavecsespetitescopines.

Il ne dit pas ça comme un reproche, mais plutôt d’un air résigné.J’imagine que Easton est l’un de ses fils. Je sens également un sous-entendu de… je ne sais pas trop quoi dans le ton de Callum. Del’impuissance, peut-être ? Je ne le connais que depuis quelques heures,

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maisjen’arrivepasàimaginerquecethommepuisseêtreimpuissant,etjeremontelagardeàvitessegrandV.

– Il faudraque lesgarçons t’emmènentencours lespremiers jours,ajoute-t-il, jusqu’à ce que je t’achète une voiture. (Il plisse un peu lesyeux.)Enfin,situasunpermisdeconduireàtonnom,surlequeltun’aspastrente-quatreans.

Jehochelatêteàcontrecœur.–Trèsbien.Et,soudain,jeréalisecequ’ilvientdemedire.–Vousallezm’offrirunevoiture?– Ce sera plus simple comme ça. Mes fils… (il semble chercher

soigneusement ses mots) ne se lient pas facilement avec les étrangers.Maistudoisalleràl’école,donc…Ilhausselesépaulesetserépète:

–Çaseraplussimple.Jenepeuxm’empêcherd’avoirdes soupçons. Il sepasseun truc ici.

Aveccethomme.Avecsesmômes.Peut-êtrequej’auraisdûplusmebattrepoursortirdesavoitureàKirkwood.Peut-êtrequeje…

Mespensées s’évanouissentdès l’instantoù je jetteunpremier coupd’œilsurlemanoir.

Non,lepalais.LepalaisRoyal.Littéralement.Cen’estpaspossible.Lamaisonn’aquedeuxétages,maiselles’étend

tellement que je n’arrive pas à en voir le bout. Et il y a des fenêtrespartout.Peut-êtrequel’architectequiaconçucebâtimentétaitallergiqueauxmurs,ouavaitvraimentlatrouilledesvampires.

–Vous…(mavoixsebrise)vousvivezici?–Nousvivonsici,corrige-t-il.C’estaussitamaisonàprésent,Ella.Ce ne sera jamais ma maison. Je n’appartiens pas à ce monde de

splendeur, j’appartiensà lamisère laplusnoire.C’estceque jeconnais.C’estlàquejesuisàl’aise,parcequelamisèrenementpas.Ellen’estpasemballéedansunjolipapiercadeau.Elleestcequ’elleest.

Cettemaisonestune illusion.Elleest lisseetbelle,mais lerêvequeCallumestentraind’essayerdemevendreestaussifragilequedupapier.

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Riennebrillepourtoujoursdanscemonde.L’intérieur du manoir Royal est aussi dément que l’extérieur. Des

dalles blanches veinées de gris et d’or, du genre de celles qu’on trouvechez les médecins et dans les banques, recouvrent le hall qui sembles’étendre sur des kilomètres. La hauteur de plafond est incroyable elleaussi,j’aienviedecrierpourentendrejusqu’oùiral’écho.

Desescaliersgrimpentdesdeuxcôtésdel’entréeetserejoignentsurun balcon qui domine le hall. Au-dessus dema tête, le lustre doit biencomptercentampoulesettellementdecristalques’ilmetombaitdessus,onneretrouveraitplusquedeséclatsdeverre.Ilnedépareraitpasdansun hôtel de luxe. Ça ne me surprendrait pas qu’ils l’aient pris dans cegenred’endroit.

Partoutoùseposemonregard,jevoislarichesse.Etpendantce temps,Callummeregarded’unair inquietcommes’il

pouvait lire dans mes pensées et qu’il se rendait compte que je suisvraimentsurlepointdepéterlesplombs.Pourvouslafairecourte,c’estparcequejen’appartienspasàcemonde,putain.

– Jesaisquec’estdifférentdecedonttuas l’habitude,dit-ilsuruntonbourru,maistuvast’yhabituer.Tuvasbienaimer.Jetelepromets.

Mesépaulessecrispent.–Nefaitespasdepromesses,MonsieurRoyal.Pasàmoi.Non,jamais.Sonvisagesefige.– Appelle-moi Callum. Et j’ai bien l’intention de tenir toutes les

promessesquejetefais,Ella.Toutcommej’aitenucellesquej’avaisfaitesàtonpère.

Quelquechoses’attendritenmoi.–Vous,euh…(Lesmotssortentdifficilement.)Vousaimiezvraiment

mon…euh…Steve,hein?– C’était mon meilleur ami, répond simplement Callum. Je lui ai

toujoursfaitconfiance.Çadoitêtrechouette.Laseulepersonneàquij’aijamaisfaitconfiance

adisparu.Morteetenterrée.Jepenseàmamanet,toutàcoup,elleme

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manquetellementquemagorgesenoue.–Hum…Jeluttepourparaîtredétendue,maisjesuisauborddeslarmes,prête

àcraquer.–Alors,vousdevezavoirunmaîtred’hôtelouuntruccommeça?Ou

unegouvernante?Quiest-cequis’occupedecetendroit?– J’aidupersonnel.Tuneseraspasobligéede laverpar terrepour

gagnertonargent.Sonsourires’évanouitdevantmonregardglacé.–Oùestmalettre?Callumdoitsentirquejesuisvraimentsurlepointdecraquer,parce

queletondesavoixsefaitplusdoux.– Écoute, il est tard. Et tu as eu assez d’émotions aujourd’hui.

Pourquoi est-ce que nous ne poursuivrions pas cette conversationdemain?Pourl’instantj’aimeraisquetuaiesunebonnenuitdesommeil.

Ilmeregardecommes’ilétaitaucourant.–J’aicommel’impressionqueçanet’estpasarrivédepuislongtemps.Ilaraison.J’inspire,puisj’expiretrèslentement.–Oùestmachambre?–Jevaistemontrer…Ils’interromptlorsquedespassefontentendreenhaut,etunelueur

d’approbationilluminesesyeuxbleus.– Vous voilà. Gideon est à l’université, mais j’avais demandé aux

autresdedescendret’accueillir.Ilsnem’écoutentpastoujours…Et pas cette fois-ci, apparemment, parce que quels que soient les

ordresqu’ilaitdonnésauxjeunesRoyal,ilssemblentlesavoirignorés.Etmoi avec. Pas un seul regard ne se pose sur moi lorsque quatre têtesbrunesapparaissentàlarampedubalcon.

Mamâchoires’entrouvrelégèrementavantquejelaclaquefermementenm’armantdecouragefaceàcespectacle,là-haut,quim’agresse.Jenevaispasleurlaisservoiràquelpointjesuisdéconcertée,maisputaindemerde,jesuisvraimentdéconcertée.Non,jesuisintimidée.

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Les garçons Royal ne sont pas comme je les imaginais. Ils neressemblentpasàdesgossesde richesBCBG. Ils ressemblentàdevraisvoyous,ilssemblentcapablesdenefairequ’unebouchéedemoi.

Chacun d’eux est aussi grand que leur père, unmètre quatre-vingt-cinq, facile,avecdifférentstypesdemusculature.Lesdeuxàdroite sontles plus maigres, les deux à gauche sont très baraqués, avec des brassculpturaux.Personnenepeutêtreaussimusclésansavoirbossédur,sanssueretsouffrirpourledevenir.

Àprésent,lanervositémegagneparcequepersonneneditunmot.NieuxniCallum.Mêmeenétantassezloin,jemerendscomptequetoussesfilsonthéritédesesyeux.Bleuvifetperçants,tousintensémentbraquéssurleurpère.

–Lesgarçons,finit-ilpardire,venezdirebonjourànotreinvitée.(Ilsecoue la têtecommepour secorriger.)Venezdirebonjouraunouveaumembredenotrefamille.

Silence.C’estàfairefrémir.Celui au milieu esquisse un petit sourire narquois, juste un petit

mouvementducoindelabouche.Ilsemoquedesonpère,posesesavant-brasmuscléssurlarambarde

etsetait.–Reed.LavoixdeCallumrésonne.–Eaton.Illanceunautrenomàtouteallure.–Sawyer.Puisunautre.–Sebastian.Descendez.Toutdesuite.Ils ne font pas un geste. Je réalise que les deux de droite sont

jumeaux. Ils ont le même regard et la même pose insolente quand ilscroisentleursbrassurleurpoitrine.

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L’undesjumeauxjetteuncoupd’œilsurlecôté,enlançantunregardquasi invisibleverssonfrèreà l’extrêmegauche.Unfrissonmeparcourtl’échine. C’est celui-là qu’il faut craindre. C’est celui-là qu’il me faudrasurveiller.

Et il est le seul quime fait un signe de tête d’une lenteur calculée.Quandnosregardssecroisent,moncœursemetàbattreunpeuplusvite.Decrainte.Peut-êtrequedansd’autrescirconstances,moncœurbattraitpour d’autres raisons. Parce qu’il est magnifique. Ils le sont tous. Maiscelui-cimefaitpeur.Etjemedonneunmaldechienpourlecacher.

Jesoutienssonregardensignededéfi.Descendsici,Royal.Ramène-toidonc.Sesyeuxbleufoncésefermentlégèrement.Ilsentledéfisilencieux.Il

perçoitmadéfianceet iln’aimepasça.Puis il s’éloignede larambarde.Lesautresl’imitentcommes’illeurenavaitdonnél’ordre.Ilsquittentleurpèredesyeux.

Lebruitdeleurspasrésonnedanslamaisoncaverneuse.Desportesseferment.

Àcôtédemoi,Callumsoupire.–Jesuisdésolé.Jepensaisqu’enlesprévenant,ilsauraientletemps

desepréparer,maisilestclairqu’ilsontencorebesoindedigérertoutça.–Toutça?Ilveutdiremoi.Maprésencechezeux,monlienavec leurpèreque

j’ignoraisjusqu’àaujourd’hui.–Jesuiscertainqu’ilsserontplusaccueillantsdemainmatin.Ondiraitqu’ilchercheàs’enconvaincrelui-même.Maiscequiestsûr,

c’estquemoi,ilnem’aabsolumentpasconvaincue.

1.SUVsignifie«sportutilityvehicle».Onl’appelleaussi«crosssover».

2.Unpick-upestunvéhiculeutilitairemunid’unplateauàl’arrière.

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CHAPITRE5

Jemeréveilledansunlitinconnuetjen’aimepasça.Paslelit.Lelitestsuper.Ilestdouxetfermeàlafoisetlesdrapssontsoyeuxcommedusatin, pas comme les trucs merdeux qui grattent, dont j’ai l’habitudequand il m’arrive de dormir dans un lit avec des draps. La plupart dutemps,c’estplutôtdansunsacdecouchage.

Ce lit-ci sent le miel et la lavande. Tout ce luxe et ce confort sontinquiétants, parce que mon expérience m’a enseigné que ce qui estagréableestgénéralementsuivid’unetrèsmauvaisesurprise.

Une fois, maman est rentrée à lamaison et m’a annoncé que nousdéménagions dans un endroit beaucoup mieux. Un homme grand etminceestvenunousaideràfairenospauvresbagages,etquelquesheuresaprès,nousétionsdans sapetitemaison.C’était adorable, il y avaitdesdoubles rideaux aux fenêtres et, malgré la petitesse des lieux, j’avaismêmemaproprechambreàcoucher.Plus tard,pendant lanuit, j’aiétéréveillée par des cris et un bruit de verre brisé.Maman s’est précipitéedansmachambre,m’asortiedemonlitetavantquej’aieeuletempsdedireouf,nousétions loin.Cen’estquedeuxpâtésdemaisonsplus loinque j’ai vu le bleu se former sur sa pommette. Les choses agréables nesignifientdoncpasforcémentdesgensbien.

Je m’assieds et détaille mon environnement. Toute la chambre estdécoréepourunevraieprincesse,uneprincessevraimentjeune.Ilyaunequantité ridicule de rose et de frous-frous. Il ne manque plus que des

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affiches de Disney, bien que je sois certaine que les affiches sont tropvulgairespour cet endroit, tout commemon sacàdos,posépar terreàcôtédelaporte.

Lesévénementsd’hiertournentenboucledansmatête,etjem’arrêtesurlaliassedebilletsdecentdollars.Jesautedulitetj’attrapemonsac.Je feuillette la liasse et j’écoute le bruit du papier qui craque sousmesdoigts dans la chambre silencieuse. Je pourrais prendre ça et ficher lecamp.Dixmilleballes,çamepermettraitdevivreunbonmoment.

Mais…si jereste,CallumRoyalm’enapromisbienplus.Le litet lecouvert, dixmille chaquemois jusqu’à ce que j’obtiennemonbac, justepour aller en classe ? Pour habiter au manoir ? Pour avoir ma proprevoiture?

Jeglissel’argentdanslapochesecrèteaufonddusac.Jevaisattendreune journée. Rien ne m’empêche de partir demain, ou la semainesuivante,oudansunmois.

Dèsqueleschosestournentmal,jemecasse.Unefoismonargentàl’abri,jevidelecontenudemonsacsurlelitet

je fais le point. Côté vêtements, il y a deux jeans skinny, la paire debaggiesquejeportaispournepasattirerl’attention,cinqtee-shirts,cinqculottes,unsoutien-gorge,lecorsetdanslequelj’aidansélanuitdernière,unstring,unepairedetalonsaiguilledestrip-teaseuseetunerobesympaqui appartenait àmamère.Elle est courte, noire etmetmes formes envaleur. Il y a une trousse de maquillage pleine de produits quiappartenaient à ma mère, mais aussi des restes des différentes strip-teaseusesquenousavonscroiséesenchemin.L’ensemblevautaumoinsmilleballes.

J’aiaussimonlivredepoèmesd’Auden 1qui,jesuppose,estletrucleplusromantiqueetleplusinutilequejetrimballe,maisjel’aitrouvéquitraînaitsurlatabled’uncafé,etl’exergueétaitexactementlamêmequel’inscriptionsurmamontre.Jen’aipaspu le laisser.C’étaitunsignedudestin, bien que d’habitude je ne croie pas à cesmachins-là. Le destin,

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c’estpourlesfaibles,cesgensquin’ontpasassezdepouvoiroudevolontépourtransformerleurviecommeilsl’entendent.

Jen’ysuispasencoreparvenue.Jen’aipasencorelepouvoirnécessaire,maisj’yarriveraiunjour.Je

caresselacouverturedulivre.Peut-être que je pourrai me dégotter un boulot de serveuse à mi-

temps.Une rôtisserie, ça serait bien. Comme ça, je n’aurais pas à taperdans mes dix mille dollars, que je considère à présent commeintouchables.

Uncoupàmaportemefaitsursauter.–Callum?–Non,c’estReed.Ouvre.Je jetteun coupd’œil àmon tee-shirtXXL. Il appartenait à l’undes

ancienspetitscopainsdemamère.Ilmedescendpresqueauxgenouxetjeneveuxpasaffronterleregardaccusateurd’undesfilsRoyalsansêtreparfaitementarmée.Cequisignifieêtreentièrementhabilléeetcouverted’unebonnecouchedemaquillagededureàcuire.

–Jenesuispasprésentable.–Jen’enairienàfoutre.Tuascinqsecondes,ensuitej’entre.Lesmotssontprononcéssuruntonfroidetautoritaire.Merde.Jene

doutepasunesecondequesil’envieluiprend,ilpeuttrèsbiendéfoncermaporte.

Jemeprécipiteetj’ouvreviolemment.–Qu’est-cequetuveux?Ilmerepousse toutaussiviolemment,etbienquemontee-shirt soit

assez long pour couvrir mon intimité, j’ai le sentiment d’êtrecomplètementnue.Jedétesteça,etlaméfiancequej’airessentiehiersoirsetransformeaussitôtenvéritabledétestation.

–Jeveuxsavoiràquoitujoues.Ilfaitunpasenavant.Jesaisquec’estpourm’intimider.C’estuntype

quiutilisesonphysiqueàlafoiscommearmeetcommeappât.

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– Je crois que tu devrais en parler à ton père. C’est lui qui m’akidnappéeetamenéeici.

Reedavanceencored’unpas,noussommestellementprochesl’undel’autre qu’à chaque respiration nos corps se frôlent. Il est vraimentbandant, j’ai la bouche sèche et des picotements à des endroits que jecroyais qu’un connard comme lui n’aurait jamais pu stimuler. Mais j’aiégalement appris de mamère que, parfois, votre corps peut aimer destrucsquevotretêtedéteste.Ilfautjustequecesoitvotretêtequidécide.

C’étaitundesesfameuxavertissements,son«faiscequejedis,pascequejefais».

Cetypeestunsalaud,etilteveutdumal,ai-jehurlésilencieusementàmoncorps.

Mestétonssemettentàdurcirmalgrémonavertissement.–Ettut’esbeaucoupdébattue,hein?Ilregardeavecdédainlespointesquisesontforméessousl’épaisseur

toute fine de mon tee-shirt. Je n’ai plus rien d’autre à faire que deprétendrequemesseinssonttoutletempspointésenavant.

–Jetelerépète,tudevraisparleràtonpère.Jefaisdemi-tourenfaisantcommesiReedRoyalnemettaitpaslefeu

àtoutesmesterminaisonsnerveuses.Jemedirigeverslelitsurlequeljeramasseuneculotte.

Commesijen’enavaisvraimentrienàfoutre,j’ôtecellequeporteetjelalaissetombersurlamoquetteblanccassé.

J’entends le sifflement d’une respiration saccadée derrièremon dos.Unàzéropourl’équipedesvisiteurs.Aussinonchalammentquepossible,j’enfilema nouvelle culotte en la faisant glisser le long demes cuisses,sousmontee-shirt.Jesenssesyeuxglissersurmoncorps,commes’ilsmetouchaient.

– Tu devrais te rendre compte que quel que soit le jeu auquel tujoues,tunepeuxpasgagner.Pascontrenoustous.

Sa voix est devenue plus grave, plus rauque. Mon show lui fait del’effet.Deux-zéro.Jesuisvraimentheureusedeluitournerledos,comme

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ça, il ne peut pas se rendre compte que moi aussi je suis émoustillée,uniquementparsavoixetsonregardsurmoi.

–Situparsmaintenant,ilnet’arriveraaucunmal.Noustelaisseronsemporter tout ce que papa a pu te donner, et aucun de nous net’embêtera.Siturestes,onvatellementtecasserquetudevraspartirenrampant.

J’enfilemonjeanet,toujoursdedos,jecommenceàenlevermontee-shirt.S’ensuiventuneespècedegloussementetdesbruitsdepasrapides.Samain enserremon épaule etmaintientmon tee-shirt en place. Ilmeretournecommeunecrêpe.Ilsepenchesurmoi,saboucheeffleuremonoreille.

–Dernièresnouvelles,bébé.Tupeuxfaireunstrip-teasedevantmoitousles jours, jenetebaiseraipaspourautant,tuaspigé?Tuaspeut-êtrepuembobinermonpèreavectonpetitcul,maisnous,onconnaîttonnuméro.

LesoufflechauddeReedglisselelongdemoncou,et j’aitouteslespeinesdumondeànepasfrissonner.Est-cequej’aipeur?Est-cequejesuisallumée?

Quipeutsavoir.Moncorpsesttellementtourneboulé.Merde.Est-ce que je suis la fille demamère, ou quoi ? Parce qu’aimer les

hommesquivoustraitentmalc’est,c’était,putain,laspécialitédeMaggieHarper.

–Fous-moilapaix,dis-jefroidement.Sesdoigtsagrippentmonépauleunmomentavantdemerepousser.

Jetrébucheetmerattrapeauborddulit.–Ontesurveilletous,lance-t-ild’unevoixsinistreavantdes’éclipser.Jemedépêchedefinirdem’habiller.Mesmainstremblent.Àpartirde

maintenant, j’aurai toujours des vêtements sur moi dans cette maison,même dansma propre chambre à coucher. Il n’est pas question que jebaisselagardeunesecondedevantcesalauddeReed.

–Ella?

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Jesursauteetjemetourned’unbondpourvoirCallumdeboutdevantmaporteouverte.Jeglapisenposantmamainsurmoncœurquibat.

–Callum,vousm’avezfaitpeur!–Désolé.Iltientunmorceaudepapierfroissédanssamain.–Talettre.Jeleregarde,l’airétonné.–Je…ah,merci.–Tunecroyaispasquej’allaisteladonner,n’est-cepas?–Pourdirevrai,jen’étaispassûrequ’elleexiste.–Jenetementiraipas,Ella.J’aibiendesdéfauts.Lesbêtisesdemes

fils pourraient remplir un livre plus long queGuerre etPaix,mais je nementirai jamais. Et je ne vais pas te demander autre chose que demedonnermachance.

Ilglisselafeuilledepapierdansmamain.– Quandtuauras fini,descendsprendre lepetitdéjeuner. Ilyaun

deuxièmeescalierauboutducouloirquimèneàlacuisine.Viensquandtuvoudras.

–Merci.Ilmesouritchaleureusement.–Jesuissiheureuxquetusoislà.Pendantunmoment,j’aicruqueje

neteretrouveraisjamais.–Je…jenesaispasquoidire.S’iln’yavaiteuqueCallumetmoi, jecroisque j’auraisétésoulagée

d’être là, peut-êtremême reconnaissante,mais aprèsma rencontre avecReed,j’étaiseffrayée,voireterrorisée.

–Toutvabien.Tuvast’habitueràtoutça,jetelepromets.Ilmelanceunclind’œilquiestcensémerassureretdisparaît.Jemejettesurmonlitetj’ouvrelalettreentremblant.

CherSteve,

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Jenesaispassiturecevrascettelettreunjouretsitucroirasce que tu vas lire. Je l’envoie à la base navale de Little Creekavec ta carte d’identité. Tu l’avais laissée ici, avec un bout depapier et ta montre. J’ai gardé la montre. Je ne sais pascomment,maisjemesuissouvenuedecefichunuméro.

Quoiqu’ilensoit,allonsdroitaubut.Tum’as renduedingueavec cette folie que nous avons vécue ensemble lemois qui aprécédé ton départ pour Dieu sait où. Quand jeme suis renducomptequej’étaisenceinte, tuétaispartidepuis longtemps.Lestypes à la base n’ont pas eu la moindre envie d’écouter monhistoire.Jesupposequetoinonplus,àprésent.Maissijamaistul’as,tudevraisvenir.J’aiuncancer.Çamebouffelecolon.Jetejure,jelesensàl’intérieurdemoi,commeunparasite.

Mapetitefillevaseretrouverseule.Elleestrésistante.Solide.Plussolidequemoi.Jel’aime.Etsi jenecrainspaslamort, j’aipeur qu’elle se retrouve seule. Je sais qu’entre nous, ce n’étaitpas autre chose qu’une histoire physique, mais je te jurequ’ensemble, nousavonscréé laplusbelledes chosesqui soitaumonde. Tu vas te haïr si tu ne cherches pas aumoins à larencontrer.

EllaHarper.JeluiaidonnécenomàcausedelapetiteboîteàmusiquekitchquetuavaisgagnéepourmoiàAtlanticCity.J’aipenséquetuaimeraisbiença.

Bon,j’espèrequeturecevrascettelettreàtemps.Ellenesaitpas que tu existes, mais elle a ta montre et tes yeux. Tu t’enrendrascomptedèsquetulaverras.

Sincèrement,MaggieHarper

Jefoncedanslasalledebains,elleaussirosebonbon,pourmepasserungantdetoilettesurlafigure.

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Nepleurepas,Ella.Il n’y a aucune raison de pleurer. Jeme penche sur le lavabo et je

mouille mon visage en faisant comme si toute l’eau qui coule dans lavasqueprovenaitdurobinetetpasdemesyeux.

Une fois calmée, jeme passe une brosse dans les cheveux et je lesrelève en queue-de-cheval. Jeme tartine de BB crème pour cachermesyeuxrouges,etc’esttout.

Avantdepartir, je remets toutdansmon sacàdoset je le jette surmonépaule.Jevaisl’emporterpartouttantquejeneluiaipastrouvédecachette.

Jepassequatreportesavantdetrouverl’escalierdeservice.Lecouloirdevantma chambre est tellement large qu’on pourrait sans problème yfaire rouler une des voitures deCallum. Bon d’accord, cet endroit a dûêtreunhôteljadis,parcequ’ilmeparaîtridiculequ’unemaisondefamillesoitsigrande.

Lacuisine,enbasdesescaliers,estgigantesque.Ilyadeuxfours,unîlotcentralrecouvertdemarbreetunnombreénormedeplacardsblancs.Jevoisunévier,maispasderéfrigérateurnidelave-vaisselle.

Peut-être y a-t-il une seconde cuisine dans les entrailles de cettemaison,etonvam’yenvoyerpourrécurerlessols,malgrécequem’aditCallum hier. Ce qui ne me dérangerait pas, en fait. J’aimerais mieuxgagner de l’argent en faisant un vrai boulot qu’en allant à l’école et enétant une môme normale, parce que qui est payé pour être normal ?Personne.

Au fond de la cuisine, une énorme table trône devant un océan deportes-fenêtres.

Les frèresRoyalsontassissurquatredesseizechaises.Tousportentununiforme, leurs chemisesblanchespendent surunpantalonen toile.Des blazers bleus sont posés sur le dossier de certaines des chaises. Etainsihabillé,chacundesgarçonsestsublime,avecunpetitcôtémauvaisgarçon.

Ondiraitlejardind’Éden,beaumaisremplidedangers.

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–Commentaimes-tutesœufs?demandeCallum.Il s’approche du fourneau avec une spatule dans unemain et deux

œufsdans l’autre. Jen’ai pas l’impressionqu’il soit très à son aisedanscetteposition.Uncoupd’œilrapideauxgarçonsconfirmemessoupçons.Callumnedoitpascuisinersouvent.

–Desœufsbrouillés,ceseraparfait.Etenplus,c’estimpossibleàrater.Ilhochelatêteendésignantlaported’ungrandplacardblancderrière

lui.–Ilyadesfruits,desyaourtsaufrigoetdesbagelsderrièremoi.Jeme dirige vers le placard sous le regard de quatre paires d’yeux

froids et inquisiteurs. C’est un peu comme un premier jour dans unenouvelleécole,quandlesautresontdécidédedétesterlanouvelle,justepour leplaisir.Unelumières’allumeet le froidnefrappeauvisage.Desfrigosencastrés.Pourquoivoudriez-vousquelesautrespuissentvoirquevouspossédezunfrigo,jevousledemande?Bizarre.

Jesorsunebarquettedefraisesquejeposesurlecomptoir.Reedjettesaserviette.–J’aifini.Quiest-cequiveutquejeledépose?Lesjumeauxreculentleurschaises,maisl’autre,Eatonjecrois,secoue

latête.–Moi,jepasseprendreClairecematin.–Lesgarçons…lanceCallumensigned’avertissement.–Toutvabien.Jeneveuxpasêtrelacaused’unebagarreousourcedetensionentre

Callumetsesfils.– Tout va bien, papa, se moque Reed. (Puis il se tourne vers ses

frères.)Onpartdansdixminutes.Ils le suivent comme un seul homme. Ou comme une bande de

troufions,c’estpeut-êtreplusexactcommeanalogie.–Jenesaispaspourquoiilssonttellementfurieux.J’avaisprévudete

conduire à l’école de toute façon. J’espérais juste qu’ils seraient un peu

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plus…accueillants.Uneodeurd’œufsbrûlésnousfaitnousretournertouslesdeuxversla

cuisinière.–Merde,jure-t-il.(Jem’approchepourdécouvriruntructoutmarron.

Ilmesouritd’unairpiteux.)Jenecuisinejamais,maisjenepensaispasquejepouvaisraterdesœufs.Visiblement,j’avaistort.

Alors, comme ça, il ne cuisine jamais, mais il le fait pour une filleétrangère qu’il a ramenée chez lui ? Pas étonnant qu’ils éprouvent duressentiment.

–Vousavezfaim?Parcequemoi,jemecontentetrèsbiendefruitsetdeyaourt.

Jen’aipaseusouventl’occasiondemangerdesfruitsfrais.N’importequoidefraisestunsignedeprivilège.

–Enfait,jemeursdefaim.Ilditçaavecunairpitoyable.–Jepeuxvousfairecuirequelquesœufs…(etavantmêmequej’aie

letempsdepoursuivre,ilsortunpaquetdebacondufrigo)avecdubaconsivousenavez.

Pendantquejecuisine,Callumsepenchesurlecomptoir.–Alorscinqgarçons,hein?C’estbeaucoup.–Leurmèreestmorteilyadeuxans.Ilsnes’ensontjamaisvraiment

remis.Aucund’entrenousnes’enestremis.Mariaétaitlecimentdenotrefamille.

Ilpasseunemaindanssescheveux.–J’étaistrèssouventabsentavantsamort.AtlanticAviationtraversait

desmomentsdifficilesetjecherchaisàsignerdescontratsdanslemondeentier.

Ilpousseungrossoupir.– Les affaires, j’ai réussi àm’en sortir…Pour la famille, je n’ai pas

encoretotalementréussi.Si j’encroisceque j’aivu, jenepensepasqu’ils soientsur labonne

voie,maisaprèstout, lesqualitésparentalesdeCallumnemeregardent

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pas. J’émets un bruit de gorge évasif que Callum prend pour unencouragement.

– C’estGideon leplusvieux. Il est à l’université,mais il rentreà lamaisonleweek-end.Jepensequ’ilaunepetitecopineenville,maisjenesaispasquic’est.Tuvaslerencontrercesoir.

Bon.Enfinpasvraiment.–Super!Supercommeunlavement.– Je veux t’emmener au lycée pour t’y inscrire.Quand ce sera fait,

Brooke,c’estmapetiteamie,m’aproposédet’emmenerfairedescourses.Jepensequetupourrascommencerlescoursdèslundi.

–J’airatécombiendetemps?–Lescoursontcommencéilyadeuxsemaines.J’aivutesnotes,je

pensequetuserasparfaitementauniveau,merassure-t-il.Jefixelesœufsenfronçantlessourcils.– Vous devez avoir de sacrément bons détectives privés pour avoir

obtenumesbulletinsscolaires.–Tuasbeaucoupbougé,maisquandj’aidécouvertlenomdefamille

detamère,çan’apasétébiendifficilededevinerlasuiteetd’obtenirtoutcedontj’avaisbesoin.

–Mamanafaitdumieuxqu’elleapu.Jepointemonmentonenavant.– Elle faisait du strip-tease. Est-ce qu’elle t’a forcée à faire pareil ?

réagitCallum,aveccolère.–Non,c’estmoiquiaichoisidelefaire.Jejettesesœufsdanssonassiette.Iln’aqu’àsefairecuiresonstupide

bacontoutseul.Personneneditdumaldemamandevantmoi.Callumm’attrapeparlebras.–Écoute,je…– Est-ce que j’interromps quelque chose ? lance une voix glaciale

depuislaported’entrée.

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Jemeretourned’uncouppourvoirReed.Savoixestglacée,maissesyeuxlancentdeséclairs.Iln’aimepasquejesoisprochedesonpère.Jesais que c’est débile, mais quelque chose me pousse à me rapprocherencoreplusdeCallum,àpresquemeglissersoussonbras.Callumobserveson fils, pour le coup, il ne comprend pas la raison de ma proximitésubite. Le regard de Reed m’apprend que lui a très bien compris lemessage.

Jelèvelamainetlaposesurl’épauledeCallum.–Non,jepréparaisjustelepetitdéjeunerdetonpère.Jesourisingénument.Le regard de Reed devient encore plus noir, si tant est que ce soit

possible.–J’aioubliémaveste.Ilcontournelatableetlaramassesurledossierd’unechaise.–Onsevoitaulycée,Reed,jeraille.Il me lance un dernier éclair avant de se retourner pour partir. Je

baisselamain.Callummeregarded’unairébahi.–Tujouesaveclefeu.–C’estluiquiacommencé.Callumsecouelatête.–Etdirequejepensaisqu’élevercinqgarçonsétaittouteunesacrée

aventure.Apparemment,jen’aiencorerienvu!

1.WystanHughAudenestunpoèteaméricaind’origineanglaise,considérécommel’undes

plusimportantsetinfluentsduXXesiècle.

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CHAPITRE6

Callum me conduit au lycée que je vais fréquenter pour les deuxprochaines années. Enfin, c’est Durand qui conduit. Callum et moisommes assis à l’arrière. Il farfouille dans une pile de documents quiressemblentàdesplanspendantquejeregardelepaysageparlavitre,enessayantdenepaspenseràcequis’estpasséplustôtdansmachambreavecReed.

DixminutespassentavantqueCallumlèveenfinlatêtedesonboulot.– Désolé, je rattrapemonretard.J’aiprisunpeude tempsaprès la

mortdeSteve,etleconseild’administrationmetannepourquejebouclelesdossiers.

Je suis tentée de lui demander à quoi ressemblait Steve, s’il étaitsympa,cequ’il faisaitpourprendredubon temps,pourquoiaprèsavoirfaitl’amouravecmamère,ilestpartisansunmot.Maisjemetais.Unepartie de moi ne veut pas savoir qui était mon père. Parce que sij’apprends des trucs sur lui, il deviendra réel. Il pourraitmême devenirquelqu’undebien.C’estplusfacilepourmoidepenseràluicommeàunsaletypequiaabandonnémamère.

Jemontrelespapiersdudoigt.–Cesontdesplanspourvosavions?Ilhochelatête.– Nous concevons un nouvel avion de combat. Une commande de

l’armée.

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MonDieu.Ilnesecontentepasdeconstruiredesavions.Ilconstruitdesavionsdeguerre.C’estdulourd.Maisceladit,vulamaison,cen’estpassiétonnantqueça.

–Etmonpè…Steve,ildessinaitdesavions,luiaussi?– Il était plutôt dans la partie tests. Moi aussi, dans une certaine

mesure,maistonpèreavaitunevéritablepassionpourlevol.Monpèreaimaitvoler.Jerangecetteinformationdansuncoindema

tête.Commejerestemuette,lavoixdeCallumsefaitplusdouce.–Tupeuxmeposertouteslesquestionsquetuveuxàsonsujet,Ella.

JeconnaissaisStevemieuxquepersonne.–Jenesuispassûred’êtreprêteàapprendrequoiquecesoitsurlui,

jerépondsenhésitant.–Compris.Maisquandtuserasprête,jeseraiheureuxdeteparlerde

lui.C’étaitungrandbonhomme.Je ravalemonenviede lui répondrequeçanedevaitpasêtreun si

grandbonhommequeças’ilaabandonnémamère,maisjen’aipasenvied’endiscuteravecCallum.

ToutesmespenséesausujetdeSteves’évanouissentlorsquelavoitureatteint unportail de plus de sixmètres de hauteur. Est-ce ainsi que lesRoyal vivent ? En passant d’une porte à l’autre en voiture ? Nous leslaissonsderrièrenouspoursuivreuncheminpavéquimèneàungrandbâtimentdestylegothiquerecouvertdelierre.J’observelesalentoursendescendantdevoitureetjedécouvredesbâtimentssimilaires,disséminéssur lecampusdel’écolepréparatoired’AstorPark,surdeskilomètresdepelouse verdoyante. Je comprends alors pourquoi le nom de l’écolecomprendlemot«parc».

– Restez dans le coin, lance Callum à Durand à travers la vitreouverteduconducteur.Jevousappelleraiquandnousauronsfini.

Lavoiturenoiredisparaîtderrièrelaported’ungarageàl’autreboutdel’allée.Callumsetourneversmoi.

–MonsieurledirecteurBeringernousattend.

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J’ai du mal à cacher mon étonnement en le suivant sur les hautesmarches qui mènent aux portes d’entrée. Cette école est démente. Ellesuinte le fric et les privilèges. La pelouse impeccablement tondue et lacour immense sont désertes. Dans le lointain, j’aperçois des taches decouleur,cesontdesélèvesquijouentaufootball.Callumsuitmonregard.

–Tupratiquesunsport?–Euh,non.Enfin,jesuisassezathlétique.Ladanse,lagymnastique,

cegenredetrucs.Maisjenesuispastrèsbonneensport.Ilfaitlamoue.– C’estbiendommage.Si tu rejoinsuneéquipe, tuesdispenséede

coursd’éducationphysique.Jevaismerenseignerpourvoirs’iln’yapasune possibilité dans une des équipes de pom-pom girls. Ça pourrait teconvenir.

Pom-pomgirl?Ouais,d’accord.Maispourçailfautdupeps,etjesuisla fille lamoins pêchue qui soit. Nous entrons dans un hall digne d’undécordefilm.

De grands portraits d’anciens élèves sont accrochés aux murslambrissésdechêne.Sousnospieds,leparquetesttoutlustré.Quelquestypesenblaserbleutraînentdansuncoin.Ilsmejettentdescoupsd’œilcurieuxaupassage.

– ReedetAaton jouentau football.Notreéquipeestnuméroundel’État.Etlesjumeauxjouentaulacrosse.Situobtiensuneplacedansuneéquipe de pom-pom girls, tu pourrais te retrouver en train de lesapplaudir,undecesquatre.

Jemedemandes’ilserendcomptequ’ilestentraindemedonneruneraison supplémentaire pour ne pas devenir pom-pom girl. Pas questionquejemetrémousseenlevantlesbrasaucielpourencourageruntrouduculcommeReed.

Jemurmure:–Peut-être.Maisjepréféreraismeconcentrersurmesétudes.Callumentredanslasalled’attentedubureauduproviseurcommes’il

étaitdéjàvenudescentainesdefois.C’estprobable,carlasecrétaireaux

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cheveuxblancslesaluecommeunvieilami.– Monsieur Royal, c’est bien agréable de vous voir dans des

circonstancesagréables,pourunefois.Illuirépondparunsourirenarquois.–Dites-moi,est-cequeFrançoispeutnousrecevoir?–Toutàfait.Entrezdonc.

Larencontreavecleproviseursepassemieuxquejel’imaginais.Jeme

demande si Callum lui a filé du fric pour qu’il ne pose pas trop dequestions surmesantécédents.Mais ildoit êtreaucourantdecertaineschoses,parcequ’ilcommenceparmedemandersijeveuxqu’onm’appelleEllaHarperouEllaO’Halloran.

–Harper,jerépondssèchement.Je ne vais pas abandonner le nom de ma mère. C’est elle qui m’a

élevée,pasSteveO’Halloran.On me donne mon emploi du temps qui inclut un cours de gym.

Malgré mes protestations, Callum explique au proviseur Beringer quej’aimeraisbiendevenirpom-pomgirl.Seigneur!Jenecomprendspascequecethommeacontrel’éducationphysique.

Lorsquenousavonsterminé,Beringermeserrelamainetm’expliquequemaguidescolairem’attenddans lehalld’entréepourme faire faireunevisiterapidedeslieux.JelanceunregardpaniquéàCallum,maisilestclairementbientropoccupéàdiscuterdugreendutrou9,qu’iltrouveassezcoton.Apparemment,Beringeret lui sontpartenairesdegolf,et ilmefaitsignedesortirenm’expliquantqueDurandvarappliqueraveclavoituredansuneheure.

En quittant le bureau, jememordille les lèvres. Je ne sais pas quoipenserdecetteécole.Académiquement,j’aientendudirequ’elleétaitautop.Maistoutlereste…lesuniformes,lecampussuper-chic…çanemecorrespond pas. Je l’avais déjà compris, mais ça se confirme à l’instantmêmeoùjeretrouvemaguidescolaire.

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Elle porte la jupe bleu marine et le chemisier blanc qui composentl’uniforme de l’école, et tout chez elle pue le fric, depuis sa coupe decheveuxparfaite jusqu’àsafrenchmanucure.Elleseprésente,SavannahMontgomery.

– Oui, ces Mongomery, dit-elle d’un air suffisant, comme si j’étaisdanslesecretdesdieux.

Jen’aipaslamoindreputaind’idéedequielleest.Elleestenpremière,commemoi,etellepassebienvingtsecondesà

mejauger.Ellefroncelenezdevantmesjeansserrésetmondébardeur,mesbottesdel’arméeéculées,mescheveux,mesonglesnonmanucurésetmonmaquillageappliquéàlava-vite.

–Tuvasrecevoirtestenuesd’uniformeceweek-end,m’informe-t-elle.La jupe n’est pas négociable, mais il existe desmoyens de tricher avecl’ourlet.

Ellemelanceunclind’œilenlissantsajupequiluiarriveàpeineenbas des cuisses. Les autres filles que j’ai aperçues dans le hall d’entréeportaientlesleursauxgenoux.

– Quoi, si tu faisunepipeauxprofs, tuobtiens l’autorisationde laraccourcir?

Sesyeuxbleuglaciers’écarquillentdepanique.Puiselleaunpetitriregêné.

–Hum,non,tuglissesunbilletdecentàBeringerquandlesprofsseplaignent,etilregardeailleurs.

Çadoitêtrechouettedevivredansunmondeoùonpeutrefilerdesbilletsdecentdollarsauxgens.Moi,jesuisunefilleàundollar.C’étaitengénéraltoutcequelestypesglissaientdansmonstring.JedécidedenepasenparleràSavannah.

–Bon,laisse-moitefairefaireletourdupropriétaire.Ilmesuffitd’uneminuteàpeinepourmerendrecomptequ’ellen’ena

rienàcirer.Cequ’elleveut,cesontdesinfos.–Uneclasse,uneclasse,lestoilettesdesfilles.(Sondoigtsijoliment

manucurédésignelesdifférentesportesdevantlesquellesnouspassons.)

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Alors, commeça,CallumRoyal est ton tuteur légal ?…Une classe,uneclasse,lasalledespremières.Commentçasefait?

Jerépondssèchement.–Ilconnaissaitmonpère.– C’était l’associédeCallum,n’est-cepas?Mesparents sontallésà

sesfunérailles.Savannahrepoussesescheveuxnoisettesursonépauleetouvreune

sériedeportes.–Lesclassesdespremièresannées.Tunevaspaspasserbeaucoupde

tempsici.Lesclassesdepremièresontdansl’aileEst.Àpropos,tuhabiteschezlesRoyal,hein?

–Oui.Jenedonnepasdedétails.Nouspassonsdevantunelonguerangéedecasiersquineressemblent

en rien aux casiers étroits et rouillés de l’enseignement public que j’aifréquentétoutescesannées.Ilssontbleumarine,delalargeurd’aumoinstroiscasierstraditionnels.Ilsbrillentdanslalumièredusoleilquipénètreparunmurdefenêtresdanslehall.

Niunenideux,nousvoicià l’extérieur.Nousempruntonsunsentierpavédepierresrondes,bordédechaquecôtépardesarbressplendides.Savanahmemontreunautrebâtimentcouvertdelierre.

– C’est l’aile des premières. Tous tes cours y auront lieu. Saufl’éducationphysique.LagymalieusurlapelouseSud.

AileEst.PelouseSud.Cecampusestridicule.–Tuasdéjàrencontrélesgarçons?Elle s’arrêteenpleinmilieuducheminetme fixedesesyeuxnoirs.

Ellemejaugeànouveau.–Ouaip.(Jeluirendssonregard.)Pasvraimentimpressionnant.Ellemerépondparunrireeffrayé.– Dans ce cas, tu fais partie de la minorité. (Son visage redevient

sombre.)Lapremièrechosequetudoissavoir,c’estqu’ici lesRoyalsontlesmaîtres,Eleanor.

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–Ella,jelacorrige.Ellemefaitunsignedelamain.–Commetuveux.Ilsfontlaloietilslafontrespecter.–Ettoi,tulessuiscommeunbravepetittoutou.Unlégersoupçondedédaineffleureseslèvres.–Situnelefaispas,lesquatreannéesquetupassesicisontatroces.– Ehbienmoi, jem’en fouscomplètementde leurs règles,dis-jeen

haussant les épaules. Je vis peut-être dans leur maison, mais je ne lesconnaispaset jeneveuxpas les connaître. Je suis iciuniquementpourobtenirmondiplôme.

– Bon, je pense que c’est lemoment de te donner une autre leçonconcernantAstor.Ellehausselesépaules.Laseuleraisonpourlaquellejesuissympaavectoi…

Attendez,c’estçasafaçond’êtresympa?–…C’estparcequeReedn’apasencorepromulguédedécretRoyal.Jehausseunsourcil.–Cequisignifie?–Cequisignifiequ’ilsuffitd’unmotdeluiettuneserasplusrienici.

Insignifiante.Invisible.Oupireencore.Là,jememarre.–C’estcensémefoutrelesjetons?–Non.C’estjustelavérité.Onattendaitquetuarrives.Onavaitété

prévenus,onnousavaitditd’attendrelesordres.–Quiça?Reed?Leroid’AstorPark?Merde,jevaisfairepipidans

maculotte!– Ils n’ont pas encore décidé ce qu’ils allaient faire de toi.Mais ils

vont le faire bientôt. Je ne te connais que depuis cinqminutes,mais jepeuxdéjàtedirequelleseraleurdécision.

Ellegrimaceunsourire.– Nous autres, les filles, nous avons un sixième sens. Ça ne nous

prendpaslongtempspourcomprendreàquionaaffaire.Jeluiretournesonsourire.

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–Non,c’estvrai.Notre échange de regards ne dure que quelques secondes. Assez

longtemps toutefois pour lui faire comprendre que je me fouscomplètement d’elle, ou de Reed, ou de cette hiérarchie sociale qu’ellesemblevisiblementrespecter.

– Allons, Eleanor, viens, je te montre le stade de foot. C’est uneinstallationdepointe,tusais.

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CHAPITRE7

Labalade avecSavannah s’achève après la visitede l’intérieurde lapiscine olympique. S’il y a un truc qu’elle semble apprécier, c’est masilhouette.

– Le look sous-alimenté est à lamode,m’informe-t-elle sur un tonbrusquequi,jecommenceàlecroire,estnaturelchezelle.Tudoispenserque je suis une salope,mais je suis simplementhonnête.Astor Park estuneécoled’ungenrecomplètementdifférent.Jesupposequetuétaisdansle public ? poursuit-elle en montrant de la main mes jeans skinny defriperie.

–Ouais,etalors?L’écolec’estl’école,jesaisbienqu’ilyadifférentestribus.Lesmômespauvres,lesmômesriches…

Ellelèvelamainpourm’interrompre.– Non. Ici, c’est différent de tout ce que tu as pu connaître

auparavant. Le gymnaseque tu as vu tout à l’heure ?Audépart, c’étaitcenséêtrepour l’équipede foot,mais ila suffique la familledeJordanCarringtonfasseunehistoire,etilaimmédiatementouvertaupublic,saufà certains moments particuliers. Entre cinq heures et huit heures dumatin, et entre deux heures et huit heures l’après-midi, c’est réservé aufoot.Lerestedutemps,c’estouvertàtoutlemonde.Sympa,hein?

Jenesaispas sielleplaisante,mais l’accès limitémeparaît stupide.Curieuse,jeluidemande:

–PourquoilesCarringtonont-ilsfaituneobjection?

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–AstorParkestuneécolepréparatoireavecungrandP.Savannahcontinue.Iln’yapasdeboutonmarche/arrêt.–DanscetÉtat,chaquefamilleveutyenvoyersesmômes,maisc’est

trèssélectif.Ilnesuffitpasd’avoirdel’argentpouryentrer.Tousceuxquisontacceptés,mêmelesboursiers,sonticiparcequ’ilsontquelquechosed’unique. Ils peuvent être des as du foot, ou faire gagner des prixnationaux à l’équipe scientifique, ce qui implique des articles dans lapressenationale.Dans lecasdeJordan,elleestcapitainede l’équipededanse,cequiselonmoi,n’estpasbienloindustrip-tease…

Merde, j’espère que ce n’est pas pour ça que Callum l’a suggéré cematin.

– Mais elles gagnent, et Astor adore voir son nom figurer dans lesjournaux,souslarubriquevainqueurs.

–Alors,pourquoisuis-jeici?jemurmuredansunsouffle.MaisSavannahpossèdeuneouïedesuper-hérosettoutenouvrantla

ported’entrée,ellemerépond:–TuesuneRoyal,enquelquesorte.QuelgenredeRoyal,c’estencore

à voir. Cette école va te manger toute crue si tu es faible, alors je teconseilledeprofiterdetoutcequepeutt’offrirlenomdeRoyal,mêmesitudoisleprendredeforce.

La portière d’une voiture claque, et une blonde platine filiforme, enjeanssuper-moulantsetstilettosvertigineux,s’avanceànotrerencontre.

–Salut,euh…L’inconnuetendunemaindevantellecommesielleseprotégeaitles

yeuxdusoleil,cequiestcomplètementinutilevuqu’elleporteunepairedelunettesénormesquiluimangenttoutlevisage.

Maguidemarmonnedoucement.–C’estlapetiteamiedeCallum.Inutiled’êtresympaavecelle,c’est

justeunextra.Etsurcesdernièresbonnesparoles,Savannahdisparaîtenmelaissant

aveccepetitboutdefemme.

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–TudoisêtreElaine.JesuisBrooke,l’amiedeCallum.Jesuisvenuetechercherpourfairedescourses.

Puisellefrappedesmains,commesic’étaitletrucleplusexcitantquiexistait.

–Ella,jelareprends.–Oh,jesuisdésolée!Jesuistellementnulleaveclesnoms.Puis,avec

ungrandsourire,elleajoute:Onvabiens’amuseraujourd’hui!J’hésite.– Hum. Nous ne sommes pas obligées d’aller faire des courses. Je

peuxtrèsbienattendreiciquelebusarrive.–Ohmachérie,glousse-t-elle,iln’yapasdebusici.Enplus,Callum

m’ademandédet’emmenerfairedescourses,alorsc’estcequ’onvafaire.Ellem’agrippelebrasavecuneforceétonnanteetm’entraînejusqu’à

la limousine. À l’intérieur de laquelle il y a Durand. Je commence àl’apprécier, celui-là. Je lui lance un « Salut Durand » avant de jeter unregardàBrooke.Puisjepropose:

– Que dirais-tu si je m’asseyais devant avec Durand pour que tupuissesterelaxeràl’arrière?

–Non.Jeveuxfairetaconnaissance.Ellemepoussesurlabanquettearrièreets’yengouffreàmasuite.–Raconte-moitout.Jesoupirevaguement,jen’avaispasvraimentl’intentiondebavarder

aveclacopinedeCallum.Etjem’enveux,parcequeBrooken’arienfaitd’autre que d’être sympa avec moi. Je ne juge pas les gens comme çad’habitude. Jedécidedebaisserunpeu lagarde.Enplus, ilme semblequeBrookeestplusmontypequelesRoyal,surtoutsi lescamaradesdeclassedesgarçonsl’affublentdutitred’extra.

Pourtant,elleal’airjeune.Vraimentjeune.UnpeucommesiCallumpouvaitêtresonjeunepère.

– Il n’y a pas grand-chose à dire, je lui réponds en haussant lesépaules. Jem’appelleEllaHarper.CallumprétendqueSteveO’Halloranestmonpère.

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Brookehochelatête.–Oui,ilmel’aditcematin.N’est-cepasincroyable?Ilm’araconté

qu’ilt’avaitretrouvéeilyajustequelquesheuresetqu’ilétaitdésoléquetamèresoitdécédée.

Ellem’attrapelamainenréduisantunpeusonlargesourire.– Ma mère est morte quand j’avais treize ans. Une rupture

d’anévrisme.J’aieulecœurbrisé,alorsjesaiscequeturessens.Quandellemeserrelamain,jesensuneboulemonterdansmagorge.

Jedoisdéglutirdeuxfoisavantdepouvoirrépondre:–Jesuisdésolée.Elle ferme les yeux un instant comme si elle luttait elle aussi pour

contrôlersesémotions.– Eh bien, nous sommes toutes les deux dans unmeilleur endroit,

non?Callumm’asauvée,moiaussi,tusais.– Toi aussi tu faisais du strip-tease ? je lui demande à brûle-

pourpoint.LesyeuxdeBrookes’élargissentunpeuetellelaisseéchapperunpetit

rireavantdeposerunemainsursabouche.–C’estçaquetufaisais?–Cen’étaitpasdunuintégral.Jeme recroquevilledevant son fou rire en souhaitantn’avoir jamais

abordélaquestion.Ellesereprendetrecommenceàtapotermamain.–Excuse-moi,jenerispasdetoimaisdeCallum.Iladûêtremortifié.

Encemoment,ilessaietellementd’êtreunbonpèrepoursesfilsetjesuiscertainequedetrouversajeunepupilledansunclubdestrip-teaseadûêtretrèschoquantpourlui.

Rougissanteetgênée,jefixelafenêtre.Cettejournéeavraimentmalcommencé.DepuislessentimentsbizarresqueReedadéclenchésenmoijusqu’à la balade pleine de condescendance avec Savannah et maconfession embarrassante à la petite amie de Callum. Je déteste avoir

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l’impressiondenepasêtreàmaplace.Lepremierjourdansunenouvelleécole.Lepremiertrajetenbus.Lepremier…

Unetapesurmonfrontinterromptmespensées.–Eh,neteperdspasdanstaboîtecrânienne,monchou.JeregardeBrookepar-dessusmonépaule.–Jenemeperdspas.–Conneries.(Elleprononcecejurondoucementettendrement.Elle

posesamainsurmajoue.)Jen’aipasfaitdestrip-tease,maisc’estparcequej’aipréféréfairepirepourm’ensortir.Jenetejugeraipas.Jamais.Cequiest important,c’estquetunesoisplus là-basetquetun’aies jamaisbesoind’y retourner.Si tu joues le jeu, tu seras tranquillepour toute tavie.

Elleretiresamainetmedonneunetapelégère.–Maintenant,sourisunpeu,parcequ’onvafairedescourses.Jenevaispasvousmentir,çamevaparfaitement.–Combienest-cequeçavacoûter?Je suisdéjàalléedansuncentre commercial, lesprixgrimpentvite,

même en soldes,mais si onme fournit un uniforme scolaire, je n’auraibesoinqued’unoudeuxarticles.Unautrepantalon.Peut-êtreunoudeuxhauts.Laplagen’estpasloin,alorsunmaillotdebain,çaseraitpasmal.Jevaispouvoirm’ensortirpourquelquescentainesdedollars.

LevisagedeBrooks’éclaire.Ellesortunecartedecréditqu’elleagitedevantmesyeux.

– Tu teposes lamauvaisequestion.C’estCallumquipaieet, crois-moi, même s’il raconte que sa boîte était au bord de la faillite il y aquelques années, ce mec pourrait acheter et vendre tout le centrecommercial,ilauraitencoreassezdefricpouravoirleputaind’orgasmelepluscherdumonde.

Çamelaissesansvoix.Nous arrivons dans un centre en plein air, avec de minuscules

boutiquesquivendentdeminusculesvêtementsàdesprixexorbitants.Jen’arrivepasàmedéciderpourquoiquece soit.Millecinqcentsdollars

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pourunepairedechaussures?Ellessontenorouquoi?Brookeprendleschosesenmainetpassearticleaprèsarticleàlavendeuse.

Il y a tellement de sacs et de boîtes que j’ai peur que Durand soitobligé d’échanger la limousine contre une camionnette. Au bout dudixièmemagasin, jesuisépuisée,etvulesoupirqu’ellepousse, jepensequeBrooken’enestpasloinnonplus.

– Je vais m’asseoir un instant pour boire quelque chose de fraispendantquetutermines.

Elle s’écroule surunechaiseenvelourset fait signeàunevendeusequiaccourtimmédiatement.

–Quepuis-jevousservir,MadameDavidson?–Unmimosa.Elle me fait un signe de la main avec la carte noire qu’elle a déjà

tellementfaitchaufferquejesuisétonnéequ’ellen’aitpasfonduentresesdoigts

– Continue,achète.Callumseradéçusi tureviensà lamaisonsansquelecoffresoitremplidepaquets.Ilabienspécifiéquetuavaisbesoind’absolumenttout.

–Mais…je…Jesuiscomplètementlarguée.Déposez-moidansunWalmartouzut,

mêmedansunGap,et jecroisquejepourraitrèsbienm’ensortir.Maisici ? Aucun de ces vêtements n’a l’air portables. Mais Brooke m’ignorecomplètement.Elleetlavendeuseentamentuneconversationpassionnéepour savoir ce qui, de la flanelle grise ou du tweed gris, est le plustendance.

Je prends la carte de crédit à contrecœur. Elle pèse plus lourd quetoutes les cartes de crédit que j’ai pu avoir en main jusqu’ici. Je medemandes’ilyauneautrecarteàl’intérieuretqu’ainsiBrookes’arrangepourpouvoiracheterlamoitiédumagasinsansqu’ellesoitrejetée.Jelaquitte et j’achète quelques trucs supplémentaires, en frémissant devantleur prix. Je suis franchement soulagée quandDurand apparaît et nousramèneauchâteaudesRoyal.

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Sur le chemin du retour, Brooke papote et m’explique commentassortiraumieuxmesachatspourcréerdeparfaitsensembles.Certainesdesessuggestionsmefontrigoleretjesuisstupéfaitedem’apercevoirquejen’aipaspasséunsimauvaismomentqueçaavecelle,aujourd’hui.Sonenthousiasmeestunpeuexagéré,biensûr,etelleestunpeutropgentille,mais peut-être que j’ai été injuste en doutant des goûts féminins deCallum.Quoiqu’ilensoit,Brookeestquandmêmeamusante.

– Merci pour la conduite,Durand, jedis quandnousnous arrêtonsdevantlaported’entréedumanoir.

Ilarrête lavoitureau lieudefaire le tourde lamaisoncommehier,quandnoussommesarrivésdeKirkwood.

DurandaideBrookeàsortirdelavoitureetàgrimperlesescaliers.Jesuisàlatraîne,commesij’étaisl’extradontaparléSavannahàproposdeBrooke.

–Jevaismonterlessacs,lance-t-ilpar-dessussonépaule.Tout cela me donne une impression de malaise et d’inutilité. Je

devraisvraimentmetrouverunboulot.Peut-êtrequesij’avaismonargentàmoietquelquesamis,jepourraismesentirnormaledenouveau.

Quandjerêvaisàmonavenir,celan’incluaitpasdeslimousinesnidesmanoirs,desfashionistasoudesmarquesdecréateurs.Lependuledemaviesebalançaitbientroploin,dansladirectionopposée.

Callumnousaccueilledanslehall.Durandportelessacsàl’intérieur.–Mercipourvotreaide,ditCallumauchauffeur.Chérie!BrookesemblerevivreenentendantlesondelavoixdeCallum,elle

sejettesurlui.–Nousnoussommesamuséescommedesfolles!Callumhochelatêteensigned’approbation.–Çamefaitplaisir.(Ilmeregarde.)Gideonestarrivé.Jeveuxtele

présenter, sansplusattendre.Après ça,pourquoinepas commanderundéjeunertardif?

–Gideon.LesyeuxdeBrookes’allument.

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– Cela fait trop longtemps que je n’ai pas vu cet amourde garçon.(Elle se dresse sur la pointe des pieds et embrasseCallum sur la joue.)Tonidéededéjeunermesembledélicieuse.J’aifaim.

Savoixaiguëmefaitpresquerougir.Callum,unpeugêné,s’éclaircitlavoix.

–ViensElla,jeveuxqueturencontresmonfilsaîné.Ilyaunegrandefiertédanssavoix.Curieuse,jelesuisàl’arrièrede

la maison, où une sublime piscine carrelée de bleu et blanc se marieparfaitementaveclapelouseimpeccablementtondue.

Dans la piscine, une flèchehumaine fend l’eau endouceur avecdesmouvements d’une grande pureté. À côté de moi, Brooke soupire. Oupeut-être bien qu’elle gémit. L’un ou l’autre son s’explique devant lespectaclequenousoffrentlesmusclesciselésdel’aînédesRoyal.

Je comprends pourquoi Brooke était tout excitée en entendant sonnom.Maisc’estunpeubizarre,vuqu’elle sortavec sonpère. Jemedisquelesadultessontdesgenscompliqués.Cen’estpasàmoideporterunjugementsur leurrelation.Aprèsdeuxautres longueurs,Gideons’arrêteetsehissehorsde lapiscine.MoulédanssonSpeedo, ilestclairquecetypen’aaucunproblèmephysique.

–Papa!Ils’essuielevisageavecuneserviettequ’ilpasseensuiteautourdeson

cou.Ilnesemblepasremarquerqu’ilgoutteetmetdel’eaupartoutsurledeck.

–Gideon,jeteprésenteEllaHarper,lafilledeSteve.Sonfilsmejetteunregard.–Alors,tul’asretrouvée.–Oui.Ilsparlentdemoicommesi j’étaisunchiotabandonné.Callumpose

unemainsurmonépauleetmepousseenavant.–Contentedeteconnaître,Gideon.J’essuiemamainsurmonjeanetlaluitends.–Pareil.

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Ilmeserrelamainet,malgrélafroideurdesonton,jetrouvequ’ilestplusamicalquequiconquedanscettemaison,àpartsonpère.

– J’aiquelquescoupsde filàpasser.Maisavantça, jedoisprendreunedouche.Àplustard.

Il passe devant nous. Lorsque nous nous tournons pour le regarders’éloigner,jesurprendsleregarddeBrooke,quimechoque.Sesyeuxontune expression d’avidité, lamême que celle qu’avaitmaman quand elleregardaitquelquechosed’extravagantdontelleavaitenviemaisqu’ellenepouvaitpass’offrir.

Callum n’a pas l’air de s’en apercevoir. Il a dirigé son attention surmoi. Toutefois, je ne peux m’empêcher de continuer à penser àl’expression de Brooke. Elle avait l’air complètement dingue du fils deCallum.Suis-jelaseuleàm’enapercevoir?Arrête,Ella,cenesontpastesoignons.

–Etsiondéjeunait,àprésent?suggèreCallum.Ilyaunsuperpetitcaféàcinqminutesd’ici.Ilsserventdesmerveilleuxproduitsdelaferme.C’esttrèsfrais.Léger.

–D’accord.Jesuisprêteàtoutpoursortird’ici.–Jeviens,moiaussi,ditBrooke.– En fait,Brooke,si tuesd’accord, j’aimeraispasserunmomenten

têteàtêteavecElla,maintenant.Sontonindiqueclairementqu’ilsefichequ’ellesoitd’accordoupas,

parcequec’estcommeça,etpasautrement.

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CHAPITRE8

Le déjeuner en compagnie de Callum est étonnamment agréable. Ilm’enditplussurSteve,bienquejeneluiaiepasposédequestions.Maisilavouequeparlerde lui lui faitdubien.Callumadmetqu’iln’a jamaisété trèsprésentpour ses filset sa femme,maisquedèsqueSteveavaitbesoinde lui, il laissait tout tomber.Apparemment, ce lien entreSEALsétaitinaltérable.

Ilnesemoquepasdemoiquandjeluidemandesic’estlàqu’ilssontdevenuspotes,aucontraire,ilm’expliquequeleterme«BUD/S 1»estlenomd’unprogrammed’entraînementde laNavy.Aprèscedéjeuner, j’ail’impressiondemieuxcernerRoyalSenior,ilestdévoué,assezdéterminéetnecontrôlepastoutàfaitsavie.Nousneparlonspasdesesfils,maisjemecrispelorsqu’ilpousselaported’entrée.

–Ilsvontchangerd’avis,ditCallumpourm’encourager.Nousretrouvonslesgarçonsdansunegrandepièce,aufonddel’aile

droitedelamaison.Calluml’appellelasalledejeux.Avecsesmurspeintsen noir, l’endroit est immense. Les garçons nous accueillent dans unsilencedemortet lesaffirmationsdeCallummeparaissentsoudainpeuconvaincantes.

– Que faites-vous tous ce soir ? demande Callum sur le ton de laconversation.

D’abord,personnenerépond.Lesplus jeunesse tournentversReed,vautré sur un tabouret de bar, un pied sur le sol et l’autre posé sur le

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barreauleplusbasdusiège.Gideonestadosséaubar,ilregardecequisepasse,lesmainsposéessurlecomptoir.

–Gideon?lequestionneCallum.Sonaînéhausselesépaules.–JordanCarringtondonneunefête.Reed se retourneetdévisageGideonen faisant lamoue, comme s’il

étaituntraître.–VousallezemmenerEllaàcettefête,ordonnesonpère.Ceseraune

bonnechosequ’ellepuisserencontrersesnouveauxcamaradesdeclasse.–Ilyauradel’alcool,deladrogueetdusexe,railleReed.Tuveux

vraimentqu’elleaillelà-bas?– Je préférerais rester à la maison ce soir, j’essaie de dire, mais

personnenefaitattentionàmoi.– Alors tous les cinq,vous ferezattentionàelle.C’estvotre sœurà

présent.Callumcroiselesbrassursapoitrine.Leursvolontéss’affrontent,etil

veutgagner.Enplus,cettehistoired’alcool,dedrogueetdesexen’apasl’airdutoutdel’inquiéter.Génial.C’estvraimentdingue.

–Ahbon,tul’asadoptée,lanceReed,sarcastique.Jesupposequejenedevraispasêtresurpris.Fairedesconneriessansnousenparler,c’esttaspécialité,n’est-cepas,papa?

Jereprendslaparole.–Jeneveuxpasalleràcettefête.Jesuisfatiguée.Jeseraicontente

deresteràlamaison.–Bonneidée,Ella.(Callumdécroisesesbrasetenposeunsurmon

épaule.)Toietmoi,onvaregarderunfilm.UnmuscledelamâchoiredeReedsemetàtressaillir.–Tuasgagné.Ellepeutveniravecnous.Onpartàhuitheures.Callumbaisselebras.Iln’estpasaussiaveuglequejelepensais.Les

garçonsneveulentpasquejeresteseuleaveclui,etCallumlesait.LesyeuxbleuglacierdeReedsetournentversmoi.

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– Tu ferais bien demonter et de t’arranger pour être présentable,frangine.Tunepeuxpas foutreen l’air tesdébutsdans legrandmondeaveccelook.

–Reed…l’avertitCallum.L’expressiondesonfilsestl’innocencemême.–J’essayaisjusted’êtreutile.Appuyé sur une queue à côté de la table de billard, Easton semble

retenirunsourire.Gideonal’airrésignéetlesjumeauxnousignorentdefaçondélibérée.

Un vent de panique m’envahit. Les fêtes au lycée auxquelles j’aiparticipé,enfinlaseule,c’étaitdestrucsentee-shirtetenjean.Lesfilles,bien sûr, s’étaient un peu fringuées, mais toujours dans un styledécontracté.J’aimeraisbiensavoirsicettefêteseratrèshabillée,maisjeneveuxpasoffriraux frèresRoyal leplaisirdevoiràquelpoint je suislarguée.

Puisquehuitheures,c’estdansdixminutes,jegrimpeàtoutevitessedansmachambreoùjedécouvretousmespaquetsbienrangésaupieddemon lit. Jeme rappelle vaguement les conseils de Savannah. Si je doisrester dans le coin pendant deux ans, il faut que je fasse bonneimpression.Etensuite, jememetsàpenseràautrechose.Qu’est-cequej’en ai à foutre ? Je n’ai pas besoin que ces gensm’apprécient, je veuxjustepassermonbac.Maisenfait,si,j’enaiquelquechoseàfoutre.Jemedéteste pour ça, mais je ne peux résister au besoin désespéré que j’aid’essayer. Essayer d’être intégrée. Essayer de faire de cette expériencescolaireautrechosequelesprécédentes.

Ilfaitchauddehors,alorsjechoisisunejupecourtebleumarineetunhautbleu clair etblancen cotonet soie. Il coûteaussi cherque tout lerayon vêtements de Walmart, mais il est tellement joli que je soupired’aiseen l’enfilant.Dansunautre sac, j’attrapeunepairede chaussuresplatesbleumarineavecunegrossebouclerétroenargent.Jemebrosselescheveuxetjelesrassembleenunequeue-de-cheval,maisfinalement,je décide de les laisser lâchés. Jemets un bandeau argenté que Brooke

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m’afaitacheter,«lesaccessoires,c’estunmust»,a-t-elleinsisté.C’estlaraisonpourlaquellej’aiégalementunsacremplidebracelets,decolliers,d’écharpesetdesacsàmain.

Dans la salle de bains, je fouille dans ma trousse à maquillage etj’essaied’avoir lamain laplus légèrepossible. Il s’agitd’obtenirun lookéthéréenespérantquetoutletempsquej’aipassédanslesclubsdestrip-tease et les bars ne se voie pas dans ma façon de faire. Je n’ai pasl’habitudedesfêtesdelycéens,maisdetravailleravecdesfillesdetrenteansquiveulentparaîtredixansdemoinsetdontladeviseest«situnemetspasaumoinstroiscouchesépaissesdefonddeteint,tun’arriverasàrien».

Une fois prête, j’examine mon reflet dans le miroir, j’y vois uneétrangère.J’ail’airtiréeàquatreépinglesetbiencommeilfaut.OndiraitSavannahMontgomery, pas EllaHarper.Mais c’est peut-être bien ainsi.Sauf qu’il n’y a rien d’encourageant dans le regard que me jettent lesfrèresRoyalquandjelesretrouvesurleparking,cinqminutesplustard.Gideon a l’air surpris. Les jumeaux et Easton reniflent. Reed a un petitsouriregoguenard.

Est-cequejevousaiditqu’ilsportenttousdesjeanstaillebasseetdestee-shirtslarges?Lesenfoiréssesontpayématête.

–Onvaàunefête,frangine,pasprendrelethéaveclareine.LavoixgravedeReednem’émoustillepasdutout,cettefois.Ilsefout

demoiànouveau,etçal’amuse.–Vouspouvezattendrecinqminutesquejemechange?jedemande

fermement.–Nan.Ilesttempsd’yaller.Il s’avance à grandes enjambées vers une des Range Rover sans se

retourner.Gideonme jette un nouveau coupd’œil, puis un autre à sonfrère.IlpousseunsoupiretrejointReeddanslavoiture.

Lafêtealieuàl’intérieurdesterres,loindel’océan.C’estEastonquim’emmène.Lesautresgarçonssontpartisdevantetçan’apasl’airdelui

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plaired’êtrecoincéavecmoi.Ilneditpasgrand-chosependantletrajet.Iln’allume pas non plus la radio, du coup le silence rend le trajet assezdésagréable. C’est uniquement quand il arrive à l’entrée principale d’unmanoirdetroisétagesqu’ilmelance:«Sympatonbandeau».

Jerésisteàuneviolenteenviedeluifaireravalersonsouriresuffisantd’unegiflebiensentie.

– Merci. Il m’a coûté cent trente dollars. Merci à la carte noiremagiquedetonpère.

Ducoup,sonregards’assombrit.–Faisgaffeàtoi,Ella.Jeluisourisenouvrantlaportière.–Mercipourlabalade,Easton.Reed et Gideon sont là, de dos, sous les colonnades du porche

d’entrée.Ilssontengrandediscussionàvoixbasse.J’entendsGideonjurerd’un air ennuyé, puis « Ce n’est pas malin, frangin. Pas pendant lasaison».

– Maisqu’est-cequetuenasà foutre?murmureReed.Tunousasclairement fait comprendre dans quel camp tu étais, et ce n’est plus lenôtre.

–Tuesmonfrère,etjem’inquiètepour…Ils’interromptquandils’aperçoitquenousarrivons.Ilssecrispenttouslesdeux,puisReedsetournepourm’accueilliret

quandjedisaccueillir,çasignifiequ’ildérouleunelistesansfindecequejepeuxetnepeuxpasfaire.

–NoussommeschezJordan.Sesparentspossèdentdeshôtels.Netebourrepas lagueule.Ne faispashonteànotre famille.Nenous tournepasautour.N’utilisepas lenomdeRoyalpourobtenirquoiquece soit.Jouelesputes,etontefaitsortiràcoupsdepiedaucul.Gidm’aditquetamèreétaitunepute.N’essaiepascettemerdeici,tuaspigé?

VoilàdonclesfameuxdécretsRoyal.–Vatefairemettre,Royal.Ellen’étaitpasprostituée,àmoinsquetu

considèresladansecommefaisantpartiedusexe,etsic’estlecas,tavie

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sexuelledoitêtrebiennaze.Jesoutienssonregardnoir.– Vas-y,montre-moi le pire de ce que tu peux faire. Tu n’es qu’un

pauvreamateurcomparéàceparquoijesuispassée.Surce,jelaisselesfrèresRoyalscotchéssurplaceetj’entrecommesi

j’étais chez moi. Et immédiatement, je le regrette, parce que tout lemonde, dans le premier salon, se retourne pour me dévisager. Lemartèlementdesbassesproduitunbruitsourddanstoute lamaison, lesmurs tremblentet le sol vibre sousmespieds.Deséclatsdevoixetdesrires me parviennent de derrière l’embrasure d’une porte voûtée, à magauche.Deuxoutroisfillesenhautsmoulantsetjeansskinnymejettentdesregardsdédaigneux.Ungrandtypeenpolomefaitunsourireencoinenlevantsabouteilledebièreàseslèvres.

Je me retiens de ressortir immédiatement, mais si je peux merecroquevilleretdeveniruneciblepourlesdeuxansquiviennent,jesuiscapable de subir cet affront. Lemieux que je puisse faire, c’est de fairefacequandc’estnécessaireetdemecoulerdanslemoulechaquefoisquej’enai lapossibilité.Jenesuis laputedepersonne,maisc’est inutiledefairedesvagues.Alors,jemecontentedesourirepolimentàtousceuxquimedévisagent,etlorsqueleursregardsglissentdemoiverslesRoyal,j’enprofite pour filer dans le couloir le plus proche. Je continue à avancerjusqu’àcequej’aietrouvélecoinleplustranquille,unpetitrecoinobscur,toutauboutd’uncouloir.Ondiraitque j’ai trouvé lecoin idéal, iln’yapersonne.

–Ilestencoretôt,ditunevoixfémininequimefaitsursauter.Maismêmeplustard,cettepartiedelamaisonesttoujoursvide.

–OhmonDieu,jenet’avaispasvue.Jeposeunemainsurmoncœurquibatlachamade.–Onmeleditsouvent.Mesyeuxs’habituentàl’obscurité.Jem’aperçoisqu’ilyaunfauteuil

dans le coin. La fille qui est assise dessus se lève d’un bond. Elle estvraiment petite, elle a des cheveux noirs qui lui arrivent au cou et un

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minuscule grain de beauté sur sa lèvre supérieure. Et elle a des formespourlesquellesjemedamnerais.

–JesuisValérieCarrington.LasœurdeJordan?–Etmoi…–EllaRoyal,poursuit-elleàmaplace.–Harper,enréalité.Jeregardeautourd’elle.Est-cequ’elleétaitentraindelireàlalampe

depoche?Jeremarqueuntéléphonesurlapetitetableàcôtédufauteuil.Elleenvoyaitdestextosàsonpetitcopain?

–Tutecaches?–Ouaip.Jet’offriraisbienunechaise,maisiln’yenaqu’uneici.– Moi je sais pourquoi jeme cache, je lui réponds avec honnêteté,

maistoi,quelleesttonexcuse?SituesuneCarrington,tuhabitesbienici?

Ellepouffederire.–JesuislacousinepauvredeJordan,pardeuxfoisdéplacée.Uncas

decharitéabsolue.EtjepariequeJordanneluioffrepaslamoindrechancedel’oublier.

Jehausselesépaules.– Secacher,cen’estpasunemauvaisesolution.Si tut’enfuis, tuas

unechancedevoirlejoursuivant.Dumoinsc’estmathéorie.–Pourquoitutecaches?TuesuneRoyalàprésent.Ilyaunsoupçondemoqueriedanssavoixquimefaitréagir.–CommetoituesuneCarrington?Ellefroncelessourcils.–J’aipigé.Jepasseunemainsurmonfront,jemesensvraimentminable.–Jesuisdésolée.Jen’avaispasl’intentiondetefaireflipper.Maisces

derniers jours ont été durs. Je suis éreintée, et en plus je suiscomplètementpaumée.

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Valériehoche la tête etme regarde sans riendirependantquelquesinstants.

–Bon,d’accordEllaHarper,elleaccentuecommesiellevoulaitfairelapaix,essayonsdetrouveruntrucquiteréveille.Tusaisdanser?

–Ouais,plusoumoins,j’aiprisdescoursquandj’étaispetite.–Çavaêtremarrant,alors.Ramène-toi.Ellemeguideàtraverslecouloir,dansunrecoin,sousunescalier.–S’ilteplaît,nemedispasqu’onteforceàdormirsousl’escalier!– Ah ! non. J’ai ma propre chambre en haut. C’est le quartier des

employés,etlefilsdelafemmedeménageestunami.Ilestpartiàlafacetilalaissésonancienmatosdejeuici.Onjouaittoutletemps,mêmeauDDR 2.

Jeluiavoue:– Jenesaispasdutoutcequec’est.Mamanetmoin’avionsmême

paslatélédansnotredernierappartàSeattle.–DanceDanceRevolution.Tucopieslesmouvementsquiapparaissent

surl’écranetplustudansesbien,plustuobtiensdespoints.Jesuisassezbonneà ce jeu-là,mais si tu asdesnotionsdedanse, jenedevrais pascomplètementt’écraser.

Quand elle me sourit, je manque l’embrasser parce que ça faittellementlongtempsquejen’aipaseud’amie.Jenemerendaismêmepascomptequeçamemanquaitàcepoint.

–Tamétaitnul,avoue-t-elleAu ton mélancolique de sa voix, je comprends qu’il lui manque.

Beaucoup.–Ilrevientsouvent?JepenseàGideonquirentrechezluitouslesquinzejours.– Non. Il n’a pas de voiture, donc on ne se verra pas avant

Thanksgiving.C’estsamèrequivaallerlevoir,etj’iraiavecelle.Ellesemblesoudaintoutexcitéeàl’idéedecevoyage.–Maisunjour,ilenauraune.–C’esttonpetitcopain?

Page 78: 34-36, rue La Pérouseekladata.com/6yZlvg72ZGfZDcwYgt5FWf1H_kg/HT1PDPEW.pdf · Thompson se retourne et regarde Don Juan, qui se lève de sa chaise et me tend une main large, – Oui,

–Ouais.Ellemeregarded’unairaccusateur.–Pourquoi?Çateposeunproblème?Jelèvelamainensigned’apaisement.–Biensûrquenon.Jesuiscurieuse,c’esttout.Elle hoche la tête et ouvre la porte d’une petite pièce avec un lit

soigneusementfaitetunetéléd’unetaillestandard.– Et comment sont les Royal chez eux ? me demande-t-elle en

installantlejeu.Jemens:–Sympas.–Vraiment?(Elleal’airsceptique.)Parcequ’ilsn’ontpasétésympas

avectoi.Ouàtonsujetplutôt.Unsentimentridiculedeloyautévis-à-visdecesenfoirésmepousseà

lafermer.–Nâân,ilss’améliorent.JerépètelesparolesdeCallum,maisellesnemeparaissentpasplus

crédibles que dans sa bouche. Pour changer de sujet, je montre latélévision.

–Prêteàdanser?–Ouais.Valérie accepte sans problème mon changement de sujet. Elle sort

deux«vinecoolers 3»d’unminifrigoetm’entendun.–Jeboisànousquinouscachonsetquinousamusonsquandmême.Cejeuesttrèscool.C’estbeaucouptropfacilepournous.Valérieest

une super-danseuse, mais j’ai grandi là-dedans et je suis parfaitementcapable de réaliser n’importe quel déhanché ou mouvement du bras.Valériedécidequenousdevonsnousdonnerdeshandicaps.Nousfaisonsunepauseensirotantnosvinecoolers.Pluselleboit,moinselleyarrive,tandisquechezmoil’alcoolestmagiqueetlamusiquemetransporte.

–Mince,mavieille,tuasladansedanslesang!metaquine-t-elle.Tudevraistentertachancedansunedecesémissionsdedanseàlatélé.

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–Nâân.(J’avaleuneautregorgée.)Çanem’intéressepasdepasseràlatélé.

–Ehbien,tuastort.Jeveuxdire,regarde-toi.Tuessexy,mêmedansce déguisement de sale petite richarde, et avec ta façon de bouger, tuseraisunestar.

–Çanem’intéressepas,jetedis.Ellesemarre.–Trèsbien,commetuveux.Ilfautjustequej’aillefairepipi.Jerigole,moiaussi,quandelledélaisselejeuaumilieud’unechanson

pourallerauxtoilettes.Elleauneénergiefolle,jel’aimebien.Jemedisqu’ilfautquejepense

àluidemandersiellevaàAstorPark,elleaussi.Ceseraitsympad’avoirune copine lundi.Mais lemorceau change et lamusiquem’entraîne denouveau.

PendantqueValérieestauxtoilettes,commence«TouchMyself»desDivinylsetjemeremetsàdanser.Paspourjouer,maisavecmespropresmouvements.Unedanselascive,torride.Dugenredecellesquiaccélèrentmonpoulsetcouvrentmespaumesdesueur.

L’imageinopportuneducorpssexyetdesyeuxbleusdeReedapparaîtdevantmoi.Merde, ce Royal trou du cul a envahimes pensées, je suisincapablede l’oublier. Je ferme lespaupières et j’imagine sesmainsquiglissentlelongdemeshanchesetmeserrentcontrelui.Sajambepasseentrelesmiennes…

Lalumières’allumeetjem’arrêtebrusquement.–Oùest-il?medemandelediableenpersonne.–Qui?jedemandesilencieusement.Je n’arrive pas à croire que j’étais en train de fantasmer sur Reed

Royal,letypequicroitquejebaiseavecsonpère.–Lecrétinpourquitudanses.Reedtraverselapièceetm’attrapelebras.–Jet’avaisprévenuedenepasjouertessalestoursàmespotes.–Iln’yapersonneici.

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Mon esprit embrumé par l’alcool est trop lent pour comprendre cequ’ilveutdire.Lachassed’eaudestoilettessemetenmarche.

–Ahouais?Ilmerepousseetouvreengrandlaportedestoilettes.Unhurlement

de panique se fait entendre et il bredouille une excuse en refermant laported’uncoupsec.

Jenepeuxm’empêcherd’arborerunsourirenarquois.–Est-cequejet’aiditquej’étaislesbienne?Ilnemetrouvepasdrôledutout.–Pourquoitunem’aspasditquetuétaisavecValérie?– Parce que c’était plus marrant de te voir tirer des conclusions

hâtives.Etmêmesijet’avaisditavecquij’étais,tunem’auraispascrue.Tuasdéjàdécidéquij’étais,etrienneteferachangerd’avis.

Ilfroncelessourcils,maisnemecontreditpas.–Viensavecmoi.–Laisse-moiréfléchir.Je tapote du doigt ma lèvre inférieure, comme si j’étudiais

sérieusementsoninvitationfoireuse.Ilalesyeuxrivéssurmoi.–Okay,j’aidécidé,c’estnon.–Tun’aimespascetendroit,dit-il.–C’estça,MonsieurlePerspicace.Ilignoremessarcasmes.– Ouais, eh bien moi non plus, je n’aime pas ça. Alors, voilà le

marché. Si tu ne viens pas avec moi et que tu ne fais pas un putaind’effort, mon père va continuer à te forcer à aller à toutes ces soiréesmerdiques.Maissitubougestesfessesd’icietquetoutlemonderaconteàsesparentsqu’ilt’avue,alorsmonpèretelâchera.Pigé?

–Pasvraiment.Reedserapproche,etunefoisencorejesuisécraséeparsataille.Ilest

tellementgrand.Sigrandqu’onpourrait lesurnommer« laperche»,ouuntrucdugenre,s’ilétaitplusmaigrichon.Maisilnel’estpas.Ilestgrand

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etmusclé,et l’alcoolmefaitperdremesmoyensetmerendtoutechoseensaprésence.

Ilcontinueàparlersansimaginermespenséessalaces.– Simon père pense que tu es un pauvre petit agneau solitaire, il

continueraàessayerdenousrassembler.Oupeut-êtrequ’enfait,c’estceque tuveux?C’estça?Tuveuxqu’on tevoieavecnous.Tuveuxallerdanscesfêtes.

Sesaccusationsréveillentmonespritembrumé.–Parceque,c’estbienconnu,j’aipasséuntempsfouavectoicesoir.Il ne réagit pas, même s’il sait que j’ai raison. Ça n’est pas grave.

Parfait.Jem’écrie:–Viens,Valérie,onvas’amuser.– Je ne peux pas. J’ai la honte. Reed Royal m’a vue aux chiottes,

gémit-elleàtraverslaporte.–Cetrouduculestparti.Enplus,tuessansdoutelachoselaplus

attiranteetlaplusconvenablequ’ilaitvuecesoir.Reedfaitlesgrosyeux,maisilsortquandjementionnesondépart.Valériefinitparsortir.–Pourquoidevons-nousquitternotrepetitcoindeparadis?–Pourvoiretêtresvues,jeluirépondshonnêtement.–Beurk.C’estjusteépouvantable.–Jen’aijamaisprétendulecontraire.

1.Budsignifie«pote»,enanglais.

2.Dance Dance Revolution est un jeu vidéo qui consiste à « danser » avec ses pieds unechorégraphiepréenregistréeetaffichéesurunécran.

3.Un«vinecooler»estunmélangedevinrougeetdejusdefruit.

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CHAPITRE9

Lapremièrepersonnequenousrencontronsenentrantdanslapièce,Valérieetmoi,c’estSavannahMontgomery.Elleportedesjeansmoulantsdéchirésauxgenouxetunhautquiluiarriveaunombril.EllealesyeuxcolléssurGideonquiluitourneledosetdiscuteavecunautretypeadosséaumur.

Comme si elle faisait la relation entreGideon etmoi, elle tourne latêtedansmadirection.Ellenemefaitaucunsigne,nemeditpasbonjour,maisnousnousdévisageonsrapidement,puisellesetourneverssacopinepourluidireuntruc.

Lamusiquehurle.Toutlemondeboit,danseousedonneenspectacledanstouslescoins.Derrièredesportescoulissantes,j’aperçoisunegrandepiscineenformedeharicotdontlalumièrebleuâtrelancedesombressurles visages des mômes installés autour. Il y a du monde partout. C’estassourdissant,ilfaitlourd,etjeregrettedéjàlatranquillitédesquartiersdupersonnel.

–Ilfautvraimentqu’onvienneici?murmureValérie.JecroiseleregarddeReedquinousobservedepuislebarenboisde

chêne,àl’autreboutdelapièce.Eastonestaveclui,ettousdeuxhochentlatêteensigned’avertissementlorsquejecroiseleurregard.

–Oui,illefaut.Elleprendunairrésigné.–Trèsbien.Mais,ducoup,autantenfiniraveccettemerde.

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Valérieestunevéritableaubaine.Ellepassesonbrasautourdumienetmeprésenteàtout lemondeenmurmurantdescommentairesàmonoreille.

– Cette nana, Claire ? Elle baise avec Easton Royal. Elle adoreraconter partout qu’elle est sa petite amie, mais tout le monde saitqu’Eastonn’apasdepetiteamie.

–Thomas?C’estunvraiconnard,maissonpèreestsénateur,etsesmauvaiscoupssonttoujourseffacés.

–Net’approchesurtoutpasdeDerek.C’estuneusineàchlamydia.Jem’étranglederirependantqu’ellem’emmèneversunautregroupe,

troisfillesenminijupespastelassorties.–Lydia,Ginnie,Francine,voiciElla.Valérieleurfaitunsignedelamainpuism’éloignedelabandePastel

avantqu’ellespuissentouvrirlabouche.– Tu t’es déjà demandé si certaines personnes naissaient sans

cerveau?Tuenaslapreuvesouslesyeux.Cesfillest’offrentuneparfaitedéfinitiondumot«imbécile».

Je ne vais pas vousmentir, ces présentationsm’amusent beaucoup,surtout d’ailleurs les potins qui les accompagnent. Je remarque quepersonnenemeditautrechosequ’unsimple«Salut»àpeinemurmuré,avantderegarderlesréactionsdesfrèresRoyald’unairinquiet.

–Bon,leplussimpleestfait,ditValérieensoupirant.Ilesttempsdeterrasserledragon.

–Ledragon?–Macousine.Autrementdit,lareinedesabeillesd’AstorPark.Jete

préviens,elleestsuper-possessivequandils’agitdesRoyal.Jesuisquasicertainequ’elleestdinguedescinq,mêmedesjumeaux.

Enparlantdes jumeaux,nous rencontronsSawyerennousdirigeantvers lapiscine. Je saisque c’est luiparcequ’il porteun tee-shirtnoir etque,plus tôtdans la soirée, j’ai entenduGideonappelerSébastien celuiqui portait un tee-shirt blanc.Unepetite rousse le serredeprès.Elle le

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couvredebaisersdanslecou,cequinel’empêchepasdemetranspercerduregardlorsquenousnouscroisons.

–LapetiteamieduplusjeunedesRoyal,meditValérie.LaurenouLaura, quelque chose comme ça. Désolée, je ne connais pas bien lesTroisième.

Enrevanche,elleestparfaitementinforméepourtouslesautres.Pourune fille qui aime se cacher, Valérie est un puits sans fond de potins.Finalement, observer les choses en douce est certainement lameilleurefaçond’obtenirdesinformations.Ellem’avertit:

–Prépare-toi.Ellepourraitfortbiensortirsesgriffes.Lesgriffesenquestionappartiennentàuneravissantebrunedansune

robedesoievertequiluicouvretoutjustelescuisses.ElletrônedansunfauteuildevelourscommesielleseprenaitpourCléopâtre,ouDieusaitqui. Ses amies prennent la pose, elles aussi, dans des robes tout aussiriquiqui.

Lespoilsdemanuquesehérissent.Entournantlatête,jevoisReedetEaston qui passent les portes-fenêtres. Reed me dévisage. Très vite, ilhumectesalèvreinférieureetmoncœurfaitunbond,cequim’énerve.Ilestbeaucouptropattirant.

Valériecomplimentesacousine.–Jordan,tasoiréeestgéniale,commetoujours.Labrunesouritd’unairsatisfait.– Ça m’étonne de te voir te balader ici et là, Val. D’habitude, tu

préfèresteplanqueraugrenier,non?–Cesoir,j’aidécidédevivredangereusement.Jordanexaminelesjouesrougissantesdesacousine.–C’estcequejevois.Tuasbeaucoupbu?Valérieouvredegrandsyeuxetsetourneversmoi.–VoiciElla.Ella,jeteprésenteJordan.Puisellemontrelesautresfillesdudoigt.–Shea,Rachel,Abby.Seulel’uned’ellesmejetteunregard.Shea.

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–TuasdéjàrencontrémasœurSavannah,dit-ellefroidement.J’acquiesce.–Ouais.Unechouettefille.Elle plisse les paupières. Je pense qu’elle essaie de deviner si jeme

moqueoupas.Jordanreprendlaparole.Sesyeuxnoisetteétincellent.–Bon.Ella.CallumRoyalesttonnouveaupapa,hein?Jeremarquequetoutel’arrière-courestmaintenantsilencieuse.Même

la musique qui vient du salon semble s’être arrêtée. Je sens tous lesregards braqués sur nous. Plus précisément sur Jordan. Ses copines ontl’airde jubiler. Jemeprépareà l’attaque,parceque clairement, c’est cequiseprépare.

Jordanserassiedetcroiseseslonguesjambesdefaçonséduisante.–Çafaitquoidefairedespipesàunvieux?demande-t-elle.Quelqu’unrenifle.Quelquesgloussementsmechatouillentledos.Ma

gorge se serre.Cesgens se foutentdemoi. Je comprendsque lesRoyalontparléàleurscopains,sansdoutebienavantquej’arrive.Personneicin’ajamaissongéàmelaisserlamoindrechance.

Je suis horrifiée à l’idée de me mettre à pleurer. Non. Eh merde !J’emmerde Jordan et tous les autres. Je ne viens peut-être pas d’unefamillequi« faitdesaffairesdans l’hôtellerie»,mais jevauxmieuxquecette pute. J’ai survécu à bienpire que ce qu’elle pourrait supporter. Jeclignedesyeux,enaffichantuneexpressionindifférente.

– Ton père n’est pas simal, si c’est ce que tu veux savoir,mais jetrouveçasuper-flippantqu’ilmetire lescheveuxetmeforceà l’appelerpapa.Est-cequetoutvabiencheztoi?

Valériepouffederire.UnedescopinesdeJordan,choquée,pousseunpetitcri.Lesyeuxde

Jordans’embrasentuninstant,avantqu’unelueurderaillerien’yretrouvesaplace.Elleaunpetitrireétranglé.

–Tuavaisraison,dit-elleàquelqu’underrièremoi.C’estunemoins-que-rien.

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Inutiledemeretournerpourcomprendrequ’elles’adresseàReed.Àmescôtés,Valérieseraidit.

–Tuesunevraiesalope,tusais?dit-elleàsacousine.– Mieux vaut être une salope qu’une occasionnelle, répond Jordan

avec un petit sourire. (Puis, avec un signe de la main, elle poursuit.)Foutez-moilecamp.C’estmasoirée,j’essaiedem’amuser.

Nous sommes renvoyées. Valérie fait demi-tour et je la suis, maisquandnousatteignonslaporte,jemedétournepourallerversReed.

Sesyeuxbleusne laissent rien filtrer,mais samâchoire secrispeunpeuquandilmevoit.Jemurmureàsonoreille:

– Voilà. J’ai faitmondevoirdeRoyal. Passeme chercher quand ceseral’heurederentrer.

Etjelelaissesurplacesansmeretourner.Ilestuneheuredumatinquandnousquittonslasoirée.Eastonmonte

mechercherdans lachambredeValérie.Noussommesvautréessursonliten trainderegarderSoyou thinkyoucandance.Valériea téléchargétouteunesaisonetm’aforcéeàregarderplusieursépisodes,eninsistantpourquejeposemacandidatureàl’émission.

Easton m’annonce que nous partons, puis attend là pendant quej’embrasseValérieetquejeluidisqu’elleaintérêtàmeretrouveràl’écolelundi.

Dehors,jem’aperçoisqueGideonetlesjumeauxsontdéjàpartisavecl’unedesRangeRover,cequisignifiequejesuisobligéederentreravecReedetEaston.Reeds’installeauvolant,sonfrèreàcôtédeluietmoijemeglisseà l’arrièrependantqu’ilspoursuivent leurconversationcommesijen’étaispaslà.

–Onvaécraserl’équipedeWyatt.Lamoitiédeleurligned’attaqueaobtenusondiplôme l’andernier,ducoup la route jusqu’àDonovanseracomplètementdégagée.

Reedgrogneensigned’approbation.– Ensuite, on va affronter Devlin High, ce sera un putain de jeu

d’enfant.Leurquaterbacka lagueuledebois lamoitiédutempset leur

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ligne de receveurs à lamain tellementmolle que ce sera une véritableplaisanterie.

Eastonpérored’unevoixanimée, sanssa tensionhabituelledans lesépaules.Oubienilestbourré,oubienilcommenceenfinàacceptermaprésence.

J’essaiedemejoindreàleurconversation.–Vousjouezàquelleplace,lesgars?Ethop!Çasuffitpourquesesépaulesseraidissentdenouveau.–Défenseurdedeuxièmeligne,ditReedsansmêmeseretourner.–Ailierdéfensif,marmonneEaston.Etilsrecommencentàm’ignorer.Eastonraconteàsonfrèrelaturlute

qu’ils’estoffertecesoir.– C’estcommesiellenes’appliquaitplusqu’àquarantepourcentà

présent. Avant, c’était vraiment du cent pour cent, tu sais ? Elle mebouffaitlabitecommesielleétaitenchocolat,etmaintenant,c’estjustequelquescoupsdelangueetpuissionsefaisaitdescâlins?J’aihorreurdeça.

Reedpouffederire.– Elle seprendpour tapetitecopine.Lespetitescopinesn’ontplus

besoindefairedesefforts.–Ouais.Ilestpeut-êtretempsdelalaissertomber.–Vousêtesdesporcs,dis-jedepuislabanquettearrière.Eastontourneversmoisonregardbleumoqueur.–Maisnesommes-nouspaslesSeigneurstout-puissants,Madamela

travailleusedusexe?Jeserrelesdents.–Jenesuispasunetravailleusedusexe.–Hmmm.Ilseretournesursonsiège.–Jenelesuispas.Unsentimentd’impuissancemesubmergesoudain.

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– Vous savez quoi ? Je vous emmerde, tous les deux. Vous nemeconnaissezpas.

–Noussavonstoutcequenousavonsbesoindesavoir,ditReed.–Vousnesavezriendutout.Jememordsleslèvresetjetournelatêteversmavitre.Noussommesenvironàmi-chemindumanoirdesRoyallorsqueReed

s’arrête brutalement au bord de la route. Je croise son regard dans lerétroviseur,maissesyeuxsonttotalementinexpressifs.Ilaboie:

–Terminus.Descends!Ilmeprendparsurprise.–Quoi?– Eastetmoidevonsallerailleurs.Nousallonspar ici(ilmontre la

gauche)etlamaisonestparlà.(Ildésignelarouteenfacedenous.)C’estlemomentdetemettreàmarcher.

–Mais…–Troiskilomètres,cen’estpaslamort.Ilal’airdeprendresonpied.Eastonestdéjàhorsdelavoiture,ilm’ouvrelaportièrearrière.–Bouge-toi,frangine.Onn’apasenvied’êtreenretard.Jesuisstupéfaite.Ilmetiredelavoitureetmepoussesurlebas-côté

delaroute.Sérieusement,est-cequ’ilsvontm’abandonnerici?Ilestuneheuredumatinetilfaitnuitnoire.

Ilss’enfichentroyalement.Eastonsautesurlesiègepassager,claquela portière et me fait un petit signe de la main. Le SUV démarre entrombe,etReedtourneàgaucheenmerecouvrantdepoussière.

J’entendsleurséclatsderireàtraverslafenêtregrandeouverte.Jeneversepasunelarme.Jememetsàmarcher.

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CHAPITRE10

Lelendemainmatin, jeprendsseulemonpetitdéjeuneràlacuisine.J’aimalauxjambes,etmespiedssonttoutmeurtrisd’avoirmarchétroiskilomètresdansdeschaussuresneuvesquin’étaientpasencorefaites.J’airêvéqueReedmepoursuivaitdansuntunnelnoircommeducharbon,savoixgrave semoquaitdemoidans l’obscurité, sonhaleinechaudedansmon cou me faisait frissonner. Je me suis réveillée avant qu’il puissem’attraper, mais j’aime à penser que lorsqu’il y est parvenu, je l’aiétranglé.

Jenesuispasimpatiented’alleràl’écolelundi,etcesdixmilledollarsdans mon sac à dos me crient : Pars. Cours. Recommence. Mais il y atellementplusd’argentenvue…

Peut-être que les Royal ont raison. Peut-être que je suis une pute.Même si je ne couche pas pour de l’argent, j’accepte celui de Callumcontred’hypothétiquesfaveursfutures.Brookem’aditqu’ill’avaitsauvée,maisj’aicomprisàlafaçondontilssontl’unavecl’autrequ’ilscouchentensemble.

Desbruitsdepassefontentendredanslecouloir.Eastonentredanslacuisine.Ilesttorsenuetporteunpantalondejogginggrisquiluidescendsurleshanches.Jem’efforcedenepasfixersestablettesdechocolat.Maisje laissemon regard s’arrêter sur la longue coupure qu’il a à la tempedroite. Iladûpasmalsaigner,maisàprésentc’estunefine lignerouge

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longuededeuxcentimètresetdemiquidépareavecsapeauparfaitementlisse.

Sansmefaire lemoindresigne, il sortdu jusd’orangedufrigoet leboitàmêmelabouteille.

Noteperso:nepasenboire,saufsijeveuxchoperunherpès.Jemeconcentre surmonyaourt, je fais commes’iln’étaitpas là. Je

n’aiaucuneidéedel’endroitoùReedetluisontalléslanuitdernièreetdel’heure à laquelle ils sont rentrés, et je ne suis pas sûre de vouloir lesavoir.

Je sens qu’ilm’observe.Quand je tourne la tête, il se penche sur lecomptoir.Sesyeuxbleussuivent lemouvementdemacuillèreversmeslèvres,puisredescendentsurl’ourletdemapetitechemisedenuit.

–Tuaimescequetuvois?jeluilanceenprenantuneautrecuillerée.–Pasvraiment.J’écarquillelesyeuxetjefaisungesteendirectiondesacoupureavec

macuillère.–Qu’est-cequis’estpassé?Tut’escognédansletableaudeborden

faisantunepipeàtonfrèrelanuitdernière?Ilsemarreettournelesyeuxverslaportederrièremoi.–Tuentendsça,Reed?Notrenouvellesœurpensequejet’aisucéla

nuitdernière.Reedentredanslacuisine,luiaussiesttorsenu,enbasdejogging.Il

neregardemêmepasdansmadirection.–Fautvoirsiellepeuttedonnerquelquestuyaux.Elleal’airdes’y

connaîtreenbites.Jeluifaisundoigtd’honneur,maisilmetourneledos.Eastonlevoit,

lui,etunsouriresedessinelentementsurseslèvres.–Chouette.J’aimebienlesnanasquirésistentunpeu,lance-t-il.Ilselèveets’approchedemoi,lespoucesglissésdanslaceinturede

sonjogging.–Tuendisquoi,Ella?(Ilprononcemonnomcommesic’étaitune

insulte.)Tuveuxnousmontrercequetusaisfaire?

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Mon cœur s’arrête. Je n’aime pas du tout son regard bestial. Il estdebout,justeenfacedemoi.Sonsourires’élargit,ilglisseunemaindanssonpantalonpourattrapersaqueue.

–Tuesnotresœuràprésent,pasvrai?Alors,vas-y.Ilsecaresse.–Fileuncoupdemainàtonfrère.Jen’arrivepasàrespirer.J’ai…lesjetons.Jejetteuncoupd’œilàReed,assissurlecomptoir,brascroisés.Ila

l’airdes’amuser.Lesyeuxbleusd’Eastonsevoilent.–Qu’est-cequisepasse,sœurette?Tuasperdutalangue?Impossible de lui répondre. Mes yeux cherchent désespérément la

portequimèneauxescaliers.L’autreportesetrouvederrièremoi,maisjeneveuxpas tourner ledos àEaston si j’ai besoinde courir chercherdel’aide.

Illitlapeurdansmonregardetsemetàrire.Etjustecommeça,samainsortdesonpantalon.

–Aïe,regardeça,Reed.Elleapeurdenous.Ellepensequ’onvaluifairedumal.

Reed rigole lui aussi. Depuis son perchoir, sur le comptoir, il mesourit.

–Cen’estpasnotretruc.Onn’apasdeproblèmespournousenvoyerenl’air.

Leharcèlementsexueln’arienàvoiravecs’envoyerenl’air,çaaàvoiraveclepouvoir,ai-jeenviederépondre,maisjemerendscomptequej’aieupeurpourrien.Ilsn’ontpasbesoindemefairedumal.Ilsontdéjàlepouvoir.C’est…c’étaitde l’intimidation.Un jeu. Ilsvoulaientmemettremalàl’aise,etilsontréussi.

Nousnousdévisageonstouslestroissansbouger,etvoilàqueCallumentredanslapièce.Ilfroncelessourcilsquandils’aperçoitqu’Eastonmefrôleetquesonautrefilsseplanquesurlecomptoir.

–Est-cequetoutvabien?

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LesfrèresRoyalmefixent,ilss’attendentàcequejelesdénonce.Jenelefaispas.–Toutvasuper-bien.Jereprendsunebouchéedeyaourt,maismonappétits’estenvolé.–Vosfilsetmoifaisonsmieuxconnaissance.Voussaviezqu’ilsontun

humourhallucinant?Easton grimace un sourire. Quand son père détourne le regard, sa

mainfrôleànouveausabite.–Tut’esbienamuséeàlafête,hiersoir?demandeCallum.Reedmeregardeenhaussantlessourcils,ils’attendcettefoisàceque

jeraconteàsonpèrequ’ilsm’ontabandonnéesurleborddelaroute.Çaaussi,jelegardepourmoi.Jemens:

–C’étaitsuper.Super-fun.Callummerejointàtable.Iltentedefairelelienentrelesgarçonset

moi,maissonattentionestuniquementattiréeparReedetEastonquinecherchentpaslemoinsdumondeàcacherleurssentiments.

–Qu’est-cequetuaimeraisfaireceweek-end?–Jesuisbien,nevouspréoccupezpasdemoi.Ilpivotesursachaise.Enlevantlementon,ildemande:–Etvousdeux?Cequisignifiequ’allons-nousfaireavecElla.Çamefaitgrimaceretje

sens immédiatement cette tension apparaître entremes omoplates, quej’aidécidédebaptiser«ladouleurdesRoyal».

–Onadestrucsprévus,murmureReed,etilquittelapièceavantqueCallumpuisseouvrirlabouche.

Celui-cisetourneversEaston,quilèvelesmainsaucieletclignedesyeuxinnocemment.

–Nemedemandepas.Jesuisceluidumilieu.Jefaiscequelesautresmedisentdefaire.

Callumfroncelessourcilset,malgrélatension,jerenifledoucement,lenezdansmonbol.

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Eastonne faitquecequ’ilveutbien faire.Personnene l’a forcéàsepalucheretàmefairedespropositions.Ilaimebienjoueràcejeu-là,ilyjoue sans que personne ne l’y incite. C’est pratique pour lui de fairecommesiReedétaitlemeneur,çaluiôtetouteresponsabilité.

–Ehbien,peut-êtrepeux-tumedirequelssontlesplansqueReedaconçuspourtoi,luilanceCallum.

Eastonsetait.Pourlui,cen’estpaslamêmechosededésignerReedcommeleaderetdesefairetraiterdemarionnetteparsonpère.

–Jusqu’àprésent,tunet’esjamaissouciédecequejefaisaisleweek-end.

Il remet labouteillede jusd’orangeau frigo.Puis,avecunregardàsonpèreassezhaineuxpour lui faireattraperdescheveuxblancssur-le-champ,ilsortàsontour.

Callumsoupire.–Cen’estpasencorecetteannéequejevaisgagnerlepremierprix

dumeilleurpapa,n’est-cepas?Jetapotelatableavecmacuillèreàplusieursreprises,parcequej’ai

mieuxàfairequ’àfourrermonnezdanscequinemeregardepas.MaisCallum me plonge au beau milieu d’un vrai bordel, et les dommagescollatérauxpourraientêtretrèsviolentss’ilneparvientpasàmaîtriserlasuitedesévénements.

– Écoutez, ne le prenez pas mal, Callum, et bien entendu, vousconnaissezmieux vosmômes quemoi,mais pourquoime jetez-vous entraversdeleurchemin?Honnêtement,jepréfèrequ’ilsm’ignorent.Çanemefaitpasdepeinequ’ilsn’apprécientpasmaprésence,etlamaisonestassezgrandepouréviterdenouscroiserpendantdesjoursentiers.

Il m’observe un moment, comme s’il tentait de deviner si je suissincère.Ilfinitparsouriretimidement.

–Tuasraison.Çan’apastoujoursétécommeça.Ons’entendaitbienavant,mais depuis lamort de leurmère, plus rien ne va. C’est triste àdire,mais ces garçons sontpourris gâtés. Ils auraient bienbesoind’unebonnedosedevraievie.

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Etc’estmoi,ladosedontilparle?Jefroncelessourcils.–Jenesuispasuncoursderattrapage.Etvoussavezquoi?J’aieu

l’expériencede lavraievie,et c’est trèsmoche.Jen’imposerai jamais lavraievieauxgensquej’aime.J’essaieraiplutôtdelesprotéger.

Jemelèvedetableetjelelaissetoutseul.Àl’extérieurdelacuisine,jetrouveReed,cachédanslehall.–Tum’attendais?J’assumecomplètementletonlégèrementnarquoisdemavoix.Reed m’examine attentivement. Ses yeux bleus magnifiques

s’attardentsurmesjambesnues.–Jemedemandejusteàqueljeutujoues.– J’essaie de survivre, lui dis-je honnêtement. Tout ce que je veux,

c’estréussiràallerlafac.–EtempocherunbonpaquetdefricdesRoyal?Jemehérisse.Cetypen’abandonneradoncjamais.– Peut-être avec quelques-uns de vos cœurs en prime, dis-je

doucement.Etensuite,avecunecertainehardiesse,jelèveundoigtetj’effleureses

pectoraux nus en griffant doucement sa peau avec mon ongle. Ça luicoupelesouffle,c’estpresqueimperceptible,maisquandmême.

Moncœurs’emballeetmonsangsemetàpulserdansdesendroitsdemoncorpsquejeneveuxabsolumentpasassocieràReedRoyal.

–Tujouesunjeudangereux,grince-t-il.Jelesaistrèsbien.MaisjeneveuxpaslaisserReedserendrecompte

qu’ilm’atouchée.Jebaisselamainetserrelepoing.–Jeneconnaispasd’autrefaçondejouer.Cet instantdevérité le laissesansvoix.J’enprofitepourm’esquiver.

J’aimeraisme persuader que j’ai gagné ce round,mais j’ai le sentimentquechaquerencontreavecReedaltèrequelquechosed’essentielenmoi.

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Je passe la journée à explorer lamaison et les jardins.À côté de lapiscine se dresse une poolhouse entièrement construite en verre danslaquelleilyauncanapé,quelqueschaisesetunekitchenette.

Unescalierdescendàlamer,maisc’estpleinderochers,onnepeutpas appeler ça une plage, à moins d’aller plus loin le long du rivage.Cependant,c’estsplendide,et jem’imaginetrèsbieninstalléelàavecunlivreetunetassedechocolatchaud.

J’aidumalàmedirequec’estçamavie,àprésent.Silaseulechoseque j’ai à faire, c’est de supporter les insultes des frères Royal pendantdeuxans,ceseradugâteaucomparéàtoutcequej’aivécuavant.

Jen’ai plus àm’inquiéter d’avoir assez àmanger oude savoir où jevaisdormirlesoir.Plusbesoind’allerd’unevilleàl’autrenidechercheràmarquer des points le plus rapidement possible. Plus besoin d’être auchevetdemamanetde la regarderhurleret se tordrededouleurparcequenoussommestroppauvrespourpouvoiracheterlemédicamentquilasoulagerait.

Cessouvenirsdéclenchentenmoiunchagrin immense.ToutcommeCallum,mamann’étaitpas lameilleuremèredumonde,maisellea faitdumieuxqu’ellepouvait,etjel’aimais.Quandelleétaitencorevivante,jen’étaispastotalementseule.

Ici,devantl’immensitédel’océan,sansâmequivivedanslesenvironsà part unmartin-pêcheur et quelques mouettes au loin, la solitudemesaisitviolemment.Peum’importecequeditoutentedefaireCallum, jeneseraijamaisuneRoyal.

Peut-êtrequejevaisrentrerlireàl’intérieur.Lagrandemaisonestsilencieuse.Lesgarçonssontsortis.Callumm’a

laisséunmotpourdirequ’ilétaitpartitravailler,aveclemotdepasseduWi-Fi, son numéro de portable et celui deDurand. Sous lemorceau depapier,ilyaunepetiteboîteblanche.J’ailarespirationquis’emballe.Jesoulèveavecprécautionlesmartphonequ’ellecontientcommes’ilétaitencristalderoche.Avecmonvieuxtéléphoneportable,jepouvaispasseret

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recevoirdesappels.Maisaveccelui-là…j’ai l’impressionque jepourraishackertouteunebasededonnées.

Je passe tout le reste de l’après-midi à jouer avecmon téléphone, àchercher des grosses conneries et à regarder des vidéos atroces surYouTube.C’estgénial.

Versdix-neufheures,Callumm’appellepourmedirequeledînerestprêt.Jeleretrouvedanslepatio,encompagniedeBrooke.

–Çatevasinousdînonsàlamaison?medemande-t-il.J’examinelesplatstousplusappétissants lesunsquelesautreset le

patiosijolimentéclairé,etj’essaiedenepasécarquillerlesyeuxdevantcespectacle.Quipourraitnepasaimerça?

–C’estparfait.Pendantledîner,jedécouvreuneautrefacettedeBrooke.Unefacette

étrangeetvulnérable,quilafaitbaisserlesyeuxetjouerdescilsdevantCallum. Et Callum ? Ce type qui dirige un groupe d’aéronautiquemilitaire?Ilgobetoutçaavecuneparfaitecandeur.

–Tuveuxunpeuplusdevin,monchéri?luidemandeBrooke.LeverredeCallumestencorepratiquementplein.–Non,çavatrèsbien.(Illuifaitungrandsourire.)Jesuisentrainde

dînerencompagniedesdeuxplus jolies femmesquisoient.Lesteakestparfaitement cuit, et je viens tout juste de conclure un accord avecSingaporeAirlines.

Brookeapplauditdesdeuxmains.– Tu es vraiment incroyable. Je t’ai déjà dit à quel point tu étais

incroyable?Elle se penche vers lui, ses seins s’écrasent contre son bras, et elle

dépose un baiser mouillé sur sa joue. Il me jette un rapide coup d’œilavantdesereculer.Brookefaitunpetitbruitdésappointé,maisserassiedsursachaise.

Jemeplongedanslacontemplationdemonsteak.Jenesaispassij’aidéjàmangéunmorceaudeviandeaussitendre.

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– Le steak, c’est très grossissant. Comme toutes les viandes rouges,d’ailleurs,m’expliqueBrooke.

– Ellan’apasàs’enfairepourça,répondCallumavecunecertainebrusquerie.

–Tuleregretterasplustard,meprévientBrooke.Je baisse les yeux sur le succulent morceau de viande, puis sur la

silhouettefiliformedeBrooke.Jecroisquejecomprendsd’oùellevient.Commemoi, elle est pauvre. Elle dépendde la générositédeCallumetellecraintsansdoutequesielleperdaitsabeauté,ilsedébarrassed’elle.Jenesaispassiellearaisonoutort,maiscelan’invalidepassesconseils.Celadit,j’aifaim,etjeveuxmangercesteak.

–Mercidutuyau.CallumétouffeungloussementetBrookefaitlamoue.Uneexpression

que je n’arrive pas bien à décoder traverse son visage. Quelque choseentre le désappointement et la désapprobation. Ses lèvres pulpeuses secrispent un peu, elle se tourne vers Callum et engage avec lui uneconversationàproposd’unefêteàlaquelleilssontallésavantquej’arrive.

La culpabilité rend ma bouchée de viande suivante un peu moinssavoureusequelapremière.Jel’aivexéeet,maintenant,ellemerejette.ÀpartValérie,c’étaitleseulvisageamiquej’avaisdanscenouvelendroit,etvoilàquejel’aiperdu.

– Nous devrions peut-être organiser une fête de bienvenue dans lafamille pour Ella ? suggère Callum en tentant de m’inclure dans laconversation.

EtCallum.Ilaétéabsolumentparfaitdepuisqu’ilm’atraînéehorsduDaddyG,maisunefêteaveclesconnardsdulycée?Jepréféreraisqu’onm’arrachelesonglesunparun.

Jereposemafourchetteàcôtédemonassiette.–Jen’aipasbesoind’unefête.Vousm’avezdéjàdonnétoutcedont

j’avaisbesoin.BrookeposesatêtesurlalargeépauledeCallum.

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– Callum, ne t’en fais pas pour ça. Ella va se faire des amis à sonrythme,n’est-cepasmachérie?

J’acquiesce.–C’estvrai.Je lui adressemon plus beau sourire et ça a l’air demarcher parce

qu’ellesedétend.–Trèsbienalors.Pasdefête.– Callum est le meilleur, n’est-ce pas ? dit Brooke en tripotant le

boutonduhautdesonchemisier.Elleagitdefaçonpossessive,commesielleessayaitdedéfendreson

territoire.J’aimerais lui fairecomprendreque jenesuispasunemenacepourelle,maisjenesaispassiellemecroira.

– Nous sommesces colombesblessées.Heureusement,une foisquenousallonsmieux,ilnenousrenvoiepas.

–PersonnenerenverraElla,c’estuneRoyal.JeregardeBrookefixementet,vusonvisagefermé,elles’estfortbien

renducomptequ’iln’apasmentionnésonnomàelle.– Vraiment? Je croyaisquec’était la filledeSteve. Il ya certaines

chosesquetunouscaches?Ilsetendcommesiellevenaitdelefrapper.–Quoi?Non.Biensûrquec’estlafilledeSteve.Callumadumalàdéglutir.– Il a disparu, alors Ella faitmaintenant partie dema famille, tout

comme les garçons auraient fait partie de la sienne s’il m’était arrivéquelquechose.

–Bienentendu.Jevoulaisjustedirequetuesgénéreux.Savoixbaissedeplusieurstons.Tellementgénéreux.À chaque mot, elle se rapproche un peu plus de lui, jusqu’à être

pratiquementsursesgenoux.IlprendsafourchettedanssamaingaucheetpassesonbrasautourdelachaisedeBrooke.Ilmelanceuncoupd’œilquisignifie,jemesersd’elleautantqu’ellesesertdemoi.

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J’aipigé,çayest.Cethommeaperdusafemmeetsonmeilleuramien très peu de temps. Je sais ce que ça fait de perdre quelqu’un, et siBrookeremplitcevidepourCallum,tantmieuxpourlui.

Maisjen’ainulleenvied’assisteràlasuite.–Jerentrepourprendreun…Jen’aipas le tempsde finirmaphrase,Brookeestdéjà surCallum.

J’ouvre de grands yeux lorsqu’elle l’enjambe en lui tirant les oreillescommeàuncheval.

–Non,pasici,Brooke.Sonregardsetournedansmadirection.Jemedirigerapidementvers

lacuisine.Par-derrière,jel’entendsquirassureCallum.–Elleadix-septans,chéri.Elleenconnaîtsûrementpluslongsurle

sexequenousdeuxréunis.Etsicen’étaitpaslecas,lesgarçonsvontladéniaisertrèsrapidement.

Çamefaitfrémir.JenesaispasqueltrucbandantBrookeaconcocté,maisj’entendsCallumgémir:

–Attends.Attends,Brooke.Elleluirépondavecunriredegorge,puislachaisedeCallumsemet

àgrincer.Merde,c’estungrandpatio.Eastonsortdelacuisinelorsquej’yentreenfin.Ilregardederrièremoi

cequisepassedanslepatiod’unaircomplètementimperturbable.–BienvenueauRoyalPalace,dit-il.Puisunsourireespiègleluifendlaboucheetilsemetàhurler:– N’oublie pas de te couvrir quand tu vas le sortir. On n’a aucune

envied’avoird’autresenfants illégitimesquinouspiquenttoutnotrefricdanslafamille.

Monsourires’évanouittoutnet.–Tuasprisdescoursavecunenfoiréouc’estinnécheztoi?Eastonhésiteuninstant,maisensuitec’estcommesiReedétaitassis

sursonépaule,ilposeunemainsursonsexe.–Pourquoiest-cequetunemontespasavecmoi,quejetemontreà

quelpointc’estnaturelchezmoi?

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–Laisse-moipasser.Cequejefaislepluscalmementpossible.Jenememetspasàcourir

avantd’avoiratteintl’escalier.Quandjesuisensécuritédansmachambre,jefaislalistedetoutesles

raisonsquej’aiderester.Jemerappellequejen’aipasfaim.J’aidixmilleballesdansmonsac, jene faispasde strip-teasepourdesvieux salacesquimetendentdesbilletsd’undollar.Jepeuxtoutàfaitsupporterdeuxansdepropositionssexuellesetd’agressionsverbalesdesfrèresRoyal.

Mais jerestedansmachambrependanttout lerestede lasoirée.Jepassemon temps à chercher des boulots à temps partiel en utilisant letout nouveau MacBook qui est apparu comme par miracle sur monbureau.Iln’yaaucuntransportpublicquipassedevant lamaison,maisj’airepéréunarrêtdebuslanuitdernièrequin’estpastroploin,àquatrecentsmètresenviron.

Lelendemain,j’yvaisàpiedetjemerendscompteenregardantmamontrequeçameprenddixminutesenmarchantvite,etquec’estplutôtàhuitcentsmètres.Leshorairesdudimanchenesontpaspratiques,ilnepassequ’unbustoutes lesheureset ilss’arrêtentàdix-huitheures. Ilvafalloirquejetrouveunboulotoùjepeuxterminertôtledimanche.

Pendant que je rentre, Gideon arrive au volant d’un SUV flambantneuf.Ilesttoutdécoifféetiladesmarquesrougessurlevisage.Sic’étaitquelqu’und’autre, jepenseraisqu’ilvientde faire l’amour,mais ila l’airtropencolèrepourça.Peut-êtrequ’ils’estbattu?

–Qu’est-cequetufais?aboie-t-il.–Jemarche.–Monte.Ils’arrêteetm’ouvrelaportière.–Tunedevraispastebaladercommeçatouteseule.–Çaal’airtranquillecommeendroit.Lesmaisons sont grandes. Les jardins sont grands. En outre, ça n’a

poséaucunproblèmeàsesfranginsdem’abandonneraumilieudenullepartl’autrenuit.

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–Leplusgranddangerque j’airencontrécematin,c’étaitungrandmecmal intentionnéquiaessayédemefairegrimperdanssoncamion.Heureusementquejenesuispasnéedeladernièrepluie.

Unpetitsourireforcétorduncoindesabouche.–Commejen’ainibonbonsniglaces,jesuisdoncquelqu’unquetu

peuxconsidérercommesûr.–Nan,justekidnappeurfoireux.–Tumontes,oubienoncontinuedebloquerlacirculation?Jejetteuncoupd’œilderrièrelui.Uneautrevoitureapproche.Et pourquoi pas, après tout ? Ce n’est pas un long trajet. Gideon

n’ouvrepaslabouchependantqu’ilconduit,ilsecontentedesefrotterlebras deux ou trois fois. Quelques minutes plus tard, il ralentit devantl’entréeetgaresavoitureauparking.

–Mercipourlaconduite,Gideon.Comme il ne me suit pas à l’intérieur, je jette un coup d’œil en

directionduSUV.–Tunevienspas?Illèvelatêteverslamaison.–Non.J’aibesoindenager.Longtemps.Puis il frotte à nouveau ses bras comme s’ils étaient poussiéreux et

qu’iln’arrivaitpasàenlevercettepoussière.Ilsurprendmonregardetfaitlamoue.

J’aienviedeluidemandersitoutvabien,maislesignedenepasallerplus loin que je lis sur son visagem’en dissuade. Jeme contente de leregarderd’un air inquiet, commepour l’inviter àm’endire plus. J’ai vuqueçan’allaitpas, j’essaie la télépathie.Tout ceque je récolte, c’estunmouvementdemâchoirecrispé.

Callumalaisséunautremotsurmonlit.Jegrimpesurcenuagetoutdeblancetroseetjemepelotonnecontrelatêtedelitpourlelire.

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Désolé pour le dîner d’hier soir. Ça ne se reproduira plus.Durand va te conduire en classe demainmatin.Dis-lui à quelleheureildoitvenir.

P.S. Ta voiture va bientôt arriver. Je voulais qu’elle soitparfaite,etlaseuledelabonnecouleursetrouvaitenCalifornie.

OhSeigneur,pourvuqu’ellenesoitpasrose.JevaismourirsijedoisconduireunevoituredeBarbie.

Jemereprendsd’unseulcoup.Jen’arrivepasàcroirequej’aipupensercela.Unevoiture,c’estune

voiture. Je devrais être reconnaissante de pouvoir en conduite une.Qu’est-cequ’onenaàfoutredesacouleur?Sielleestrose,j’iraidéposerunbaiser sur son aile couleur bubble-gum.BonDieu ! Ilme suffit d’unweek-endpourmemétamorphoserensalegossetropgâtée.

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CHAPITRE11

Lelendemainmatin,jemelèveauxaurores.Jenevaispasrefairelesmêmeserreursquepourlafête.JelaissedecôtélesjolieschaussuresqueBrookem’aachetéesetj’enfiledestennisentoileblanche.Jelesassocieàunjeanskinnyetuntee-shirt.

J’hésite.Est-cequej’emportemonsacàdosouest-cequejelelaisse?Sijele

prends, n’importe quel petit punk pourraitme le piquer. Si je le laisse,c’est un des membres de la famille Royal qui pourrait s’en charger. Jedécide de l’emporter, même si l’idée de trimballer avec moi dix milledollarsmerendlégèrementparano.

JecroiseCallumdanslacuisine.Ilpartbosseretal’airsurprisdemevoir debout de si bonne heure. Je lui raconte un bobard en prétendantquejevaisrejoindreValériepourlepetitdéjeuner.Ilal’airfoudejoiequejemesoisfaituneamie.

Après avoir vidé une tasse de café, je rejoins Durand à l’extérieur.Noussommesdeuxheuresavantledébutdescours.

–Mercidebienvouloirmeconduire.Ilmerépondavecunsimplehochementdetête.Je lui demande deme déposer devant une boulangerie, à quelques

minutes à peine de l’école, et dès que j’entre, je suis saisie par la plusdélicieusedesodeurs.Derrièrelecomptoirsetientunefemmedumême

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âgequemamèreavecdescheveuxblondscommelesblés,serrésdansunpetitchignonbasdedanseuse.

– Bonjour ma belle, que puis-je pour toi ? me demande-t-elle, lesmainssurlacaisseenregistreuse.

– Je m’appelle Ella Harper et j’aimerais postuler au poste d’aide-vendeuse. L’annoncedisait que les horaires étaient compatibles avec lesheuresdecours.JesuisàAstorPark.

–Hmmm,tuesuneélèveboursière,alors.Jenelareprendspas,parcequec’estpresquevrai.Jebénéficied’une

bourse de Callum Royal. Je retiens mon souffle, le temps qu’ellem’examine.

–Tuasdel’expérienceenboulangerie?–Aucune,jereconnais,maisj’apprendsviteetjetravailleraiplusdur

quetoutescellesquevousavezdéjàembauchées.Leslonguesjournéesneme font paspeur, je peux commencer lematin très tôt et rester tard lesoir.

Ellepinceleslèvres.– Je ne suis pas fan à l’idée d’embaucher des lycéennes.Mais… tu

pourrais peut-être faire un essai. Disons une semaine. Il faudra que tuservestescamarades.Çaneteposepasdeproblèmes?

–Absolumentpas.–Certainsdecesmômesd’AstorParkpeuventêtreassezdifficiles.Traduction:l’écoleestpleinedetrousducul.–Jevousassure,laclientèlen’estpasunproblèmepourmoi.Ellepousseunsoupir.– Très bien. J’ai vraiment besoin de quelqu’un pourm’aider. Si tu

vienssansfautependantsixjoursetquetuarrivesàl’heure,leboulotestàtoi.

Jeluifaisungrandsourire,ellemetsamainsursoncœur.– Tu aurais dû sourire plus tôt, ma belle. Ça transforme

complètement tonvisage.Tusais,plus tu sourisetplus tu toucherasdepourboires.Rappelle-t’en.

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Je ne souris pas si facilement que ça. En fait, çame faitmal.Monvisagen’enapasdutoutl’habitude,maisjecontinuetoutdemême,parcequej’aimeraisbienplaireàcettegentilledame.

–Jecommenceàpétriràquatreheures,maistupeuxarriveràcinqheuresetdemie.J’aibesoindetoi tous les joursde lasemaine, jusqu’audébutde tescours.Et les jeudisetvendredis, il faudraque tureviennesaprèsetquetutravailles jusqu’àlafermeture,àvingtheures.Est-cequecelarisqued’interféreraveccertainesdetesactivitéspériscolaires?

–Non.–Mêmelevendredi?–Jesuisbienplusintéresséeparceboulotqueparn’importequelle

activitéàl’école.Ellerecommenceàmesourire.– Trèsbien.Prends-toiunscone, jevais te faireuncafé.Au fait, je

m’appelle Lucy. Le rush va commencer dans une heure environ. Tu vaspeut-être changer d’avis quand tu te rendras compte que tu es tombéedansunemaisondefous.

Lucy avait raison, la boulangerie est bondée, mais ça m’est égal.M’activer derrière un comptoir et servir des pâtisseries pendant deuxheures, ça m’empêche d’être inquiète en me demandant ce qui va sepasserlorsquejevaisentreraulycée.

Çamefaitbizarredeporterununiforme,maisjesuissûrequejevaism’yhabituer trèsvite. Je remarqueque lesautres fillesont imaginédestrucs pour avoir l’air plus sexy. Comme me l’a dit Savannah, elleschangent la longueur de leurs jupes, et la plupart d’entre elles ont leurchemiseàmoitiéboutonnéepourlaisservoirladentelledeleursoutien-gorge.Moi, jen’aipasenvied’attirerl’attention.Monourletdescendsurmesgenouxetmachemiseestboutonnéepresquejusqu’aucol.

J’aiinitiationaucalculintégral,économieetanglaiscematin.Valérien’estdansaucundecescours,maisSavannahestdanslestroisetEastondanslecoursd’anglais.Ilestassisaufonddelaclasseavecsescopainset

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il ne m’adresse pas la parole. Je m’en fiche. J’espère même qu’il vacontinuerdem’ignorertoutlesemestre.

Être transparente semble être le thème de la journée. Personne nem’adresselaparoleàpartmesprofesseurs,etaprèsavoirtentéplusieursfoisdesourireàcertainsélèvesdanslecouloirsansobtenirderéponse,jefinisparlaissertomberet,moiaussi,jefaiscommes’ilsn’existaientpas.

C’estseulementàl’heuredudéjeunerquejecroiseunvisageamical.–Harper!Ramènetesfessesparici.Valériemefaitsigne,depuislebaràsaladesdelacafétéria.Enfait,letermedecafétérian’estsansdoutepaslebonpourdécrire

cetendroit.Lesmurssontrecouvertsdelambris,leschaisessonttapisséesde cuir et la zone self-service ressemble au buffet d’un grand hôtel. Àl’autreextrémitéde lapièce,unmurentierdebaiesvitréescoulissantesouvertessurl’extérieur,oùunendroitaétéaménagépourquelesélèvespuissentmangerquandletempslepermet.Nousnesommespasencorefin septembre, le soleil brille. Jeme dis que je mangerais bien dehors,avantdeme rendre compte que Jordan et ses copines y sont déjà, toutcommeReedetEaston.Ducoup,jedécidederesteràl’intérieur.

Valérieetmoiposonsnosplateauxsurunetablevidedansuncoindelapièce.Jeregardeautourdemoietjeréalisequetouslesélèvesontl’airplusâgés.

–Iln’yapasdepremièresannées?Ellesecouelatête.–Ilsdéjeunentuneheureplustôt.–D’ac.Jeplongemafourchettedansmespâtesetjecontinueàobserverles

lieux.Personne ne croise mon regard. C’est comme si Valérie et moi

n’existionspas.–Tut’habituesàtonmanteaud’invisibilité?medemandeValériequi

enconnaîtunboutsurlaquestion.Enfait,tudevraisl’arborercommeun

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signedefierté.Celasignifiequecessalopesderichardesnes’intéressentpasassezàtoipourtetorturer.

–Commentfont-elles?– Commed’habitude.Ellesbomberontdes saloperies sur toncasier,

ellesteferonttrébucherdanslescouloirs,ellesmettrontdeshorreurssurtoienligne.Jordanetsesminionssonttrèsinventives.

–Donc,elleestl’équivalentféminindeReed?–Ouaip,exactement.Etsiçanetenaitqu’àelle,elleseraitdansses

brasenpermanenceetellebaiseraitavecluitouteslesnuits.Mais,hélas,mapauvrecousinenesemblepascapabledegardersonhommepourelletouteseule.

Jepouffederire.–Commentest-cequetufaispourtoutsavoirsurtoutlemonde?Valériehausselesépaules.–J’observe.J’écoute.Jemesouviens.–Trèsbien.Alors,dis-m’enplussurlafamilleRoyal.Ça me fait bizarre de lui demander ça, mais après toutes mes

mésaventuresaveclesfrèresRoyal,j’ensuisvenueàlaconclusionquejedevaisfourbirmesarmespourmieuxmedéfendrecontreeux.

Manouvelleamiesemetàgémir.–Ohnon,nemedispasquetuenpincesdéjàpourl’und’entreeux.–Euh…Jamaisdelavie.Jem’efforced’oublierlafaçondontmoncœursemetàbattredèsque

ReedRoyalpénètredansunepièce.Horsdequestiondecraquerpourcemec,merdealors.C’estuntrouduculetjeneveuxrienavoiràfaireaveclui.

–Jeveuxsimplementsavoircontrequijemebats.Ellesedétend.–Bon.Ok.Jet’aidéjàditpourEastonetClaire.L’undesjumeauxà

unepetitecopine,l’autreestunsalaud,commesesfrèresaînés.Reed,jene suis pas sûre. La moitié des filles du lycée crient sur tous les toitsqu’ellesontfaitl’amouraveclui,maisquisaitsic’estvrai?Laseuledont

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je suis sûre, c’est Abby, la copine de Jordan. Tu peux me croire, macousinen’étaitpasfranchementravie.

–Quoid’autre.Desscandales?Desrumeurs?J’ail’impressiond’êtreunflicquiquestionneunsuspect.– Leur père a une petite copine assez nulle. Je crois que ça dure

depuisdeuxoutroisans.Me reviennent en mémoires les simagrées de Callum et de Brooke

pendantledîner.– Jesais toutcequ’il fautsavoirsur lapetitecopine, je répondsen

soupirant.–Bien…quoid’autre…Leurmèreestmorteilyaquelquetemps.Valériebaissed’unton.–D’uneoverdose.–Vraiment?–Ohoui.C’étaitpartoutauxnouvellesetdanstouslesjournaux.Je

croisqu’ilsontparlédesomnifèresqu’onluiavaitprescrits,ouuntrucdugenre,maisçaainterféréaveclesautresmédicamentsqu’elleprenait.Jeneconnaispastouslesdétails,maisjecroisquesonmédecinaétémisenexamen.

Malgrémoi,j’éprouvedelapeinepourlesRoyal.Ilyadesphotosdeleurmèresurlemanteaudelacheminée,danslesalon.C’étaitunejoliebrune au regard doux. Chaque fois que Callummentionne son nom enpassant,ladouleurirradiesonregard.Ildevaitvraimentl’aimer.

Jemedemandesielleétaitprochedesesfils,etjemesenssubitementtrès tristepourReedet ses frères.Personnenedevrait jamaisperdre samèretroptôt.

J’aiappristoutcequeValériesavaitsurlesRoyal.Nouschangeonsdesujet et je lui parle de mon nouveau boulot. Elle me promet de venirm’embêterdeuxfoisparsemaineaprèslescours,etnouspassonslerestede l’heure de déjeuner à rire et à apprendre à mieux nous connaître.Lorsquenousrangeonsnosplateaux,j’aidécidé,jelagardedéfinitivementcommeamie.

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–Jen’arrivepasàcroirequ’onaitzérocoursencommun,seplaint-ellequandnousquittonslacafétéria.C’estquoicemerdier?Quit’aforcéeàt’inscrireàtouscescoursdemaths,desciencesetdedroitdesaffaires?Tu auraismieux fait de prendre enseignement pratique commemoi. Ilsnousappren-nentànousservird’unecartedecrédit.

– C’estmoi qui les ai choisis. Je suis ici pour apprendre, pas pourperdremontemps.

–Intello!–Morveuse!Nous nous quittons devant ma classe de chimie, après nous être

échangénosnumérosdetéléphonependantledéjeuner.Ellemeprometdem’envoyerunmessageplustardetelles’enva.

Quandj’entredanslelabodechimie,leprofesseurselèvecommes’ilm’attendait.Ilalatailled’unHobbitetunebarbetouffuequisembleluidévorerlevisage.Ilseprésente,monsieurNeville.

J’essaie de ne pas regarder les autres élèves, mais j’ai déjà repéréEastonàl’unedestables.Ilestleseulàn’avoirpersonneaveclui.Merde.Çacraint.

– C’estunplaisirdevousrencontrer,Ella,ditmonsieurNeville.J’aijetéuncoupd’œilàvotredossieretj’aiétéimpressionnéparvosnotesensciences.

Jehausselesépaules.Lesmathsetlessciencessontfacilespourmoi.Jesaisquejetiensmondonpourladansedemamère.Maiselleavaitunmaldechienàcalculerunpourboiredetêtequandonallaitdîner.Jemesuis toujours demandé si je tenaismon aptitude pour le calcul demonpère.Steve,leSEALdelaNavy/lepilote/lemultimillionnaire.

– Quoi qu’il en soit, monsieur Royal a appelé le directeur cettesemaine pour lui demander de vous mettre en binôme avec Easton cesemestre.

Nevillebaisselavoix.–Eastonpourraitapprendreàêtreplusdiscipliné,etcelafaitsensde

vousmettreensembleaulaboratoire.Vouspourrezréviserensembleàla

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maison.Ohjoie!Jepousseunsoupiretjemedirigeverslatabled’Easton.Je

glissemon sac à dos sous la chaise à côté de la sienne. Il n’a pas l’airheureuxdemevoir.

–Bordeldemerde,murmure-t-il.Jeluirépondsentremesdents,–Etcen’estpasdemafaute,c’estuneidéedetonpère.Ilregardedroitdevantlui,mâchoireserrée.–Bienentendu.Contrairement à mes cours de la matinée, le cours de chimie me

sembleinterminable,sansdouteparcequeEastonestassisàcôtédemoietqu’il fait latronchequatre-vingt-dixpourcentdutemps.Lesdixpourcentrestants,ilmelanceunsourirenarquoisensebalançantsursachaiseet m’intime l’ordre de mélanger la solution dans laquelle nous devonscultiverdescristaux.

Àl’instantoùlaclochesonne,jebondisdemachaisepouréchapperàmonsympathique«frère».

Jesorsdelaclasseàtouteallure.Jemeprépareàmerendreàmonprochain cours quand je me rappelle que je dois aller chercher monmanuel dansmon casier. Tous les cours que j’ai choisis sont des coursavancésetnécessitentdesmanuelsdeplusdemillepages.Jen’aipasputouslesprendredansmonsacàdos.

Malheureusement,JordanCarringtonetsescopinessontdéjàdanslecoin. Toutes les quatre s’arrêtent et se marrent quand elles me voient.Aucuned’ellesnemedit bonjour. Jem’en fiche. Jene leurdispasnonpluset j’essaiedenepas faireattentionquand jepassedevantelles.Cesont peut-être des salopes,mais ce sont de ravissantes salopes. Dans lecouloir,touslesgarçonslesmatent.Eastonaussi.Ilsorttranquillementducoursdechimieetsedirigeverselles.

Leurgroupe s’arrêtedevant la rangéede casiers et Jordanmurmurequelquechoseà l’oreilled’Eastonenposant samainmanucurée sur sonbras.

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Il hausse les épaules, et cegeste tend sonblazerbleu sur ses largesépaules.C’estindéniablementlemecleplusbandantàdixkilomètresàlaronde,mêmesilesdeuxtypesquilerejoignentnesontpasdégueusnonplus.

Je les ignore, je trouvemon casier et j’entre la combinaison.Encoredeuxcoursavantlafindelajournéeetonarrêteraenfindemedévisager.Je rentrerai au manoir et je ferai mes devoirs, puis j’irai me coucher.M’occuperl’espritetoubliercesconneries.Voilàmanouvelledevise,etjevaism’ytenir.

Je suis soulagée quand le verrou s’ouvre à mon premier essai. Jen’étaispassûreducode,maislaporteducasiers’ouvrefacilementet…

Unemontagned’ordurestombeparterre.Je suis tellement surprise que je crie, et aussitôt jememaudis. Des

rireséclatentderrièremoi.Jefermelesyeuxententantdefairerefluerlerougequiaenvahimesjoues.

Jeneveuxpasqu’ilsmevoientrougir.Je ne veux pas qu’ils s’imaginent que cette montagne d’ordures

puantesàmespiedsmedérangetantsoitpeu.Jeshootedansunepeaudebananeetjerespireparlabouchepourne

passentircettepuanteurdesalimentspourrissantsquimedonneenviedepleurer.Laporteestpleinedetrucsencoreplusdégoûtants,desserviettesenpapierusagées,desmouchoirs,untamponpleindesang…

Jenepleureraipas.Lesrirescontinuent.Jelesignore.Jeramassemonmanueld’histoire

mondiale au fond de l’étagère de mon casier de luxe. Ensuite, je faistomber d’une chiquenaude les bouts de papier journal accrochés à laserrureetjerefermeviolemmentlaporte.

Lorsque je me retourne, tous les yeux sont braqués sur moi. J’enremarquesurtoutunepaire,noisette,quibrilledeméchanceté.CelledeJordan.Ellemefaitunpetit signemajestueuxde lamain.Je fais ledosrondet jeglissemonmanuelsousmonbras.Ungrandtypeauxbouclesbrunespouffelorsquejepassedevantlui.OhmonDieu!J’aiunmorceau

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dePQcolléàmasemelle.Jeravalemahonte,jesecouelepiedpourm’endébarrasseretjecontinuemonchemin.

Eastonprendunairennuyélorsquejem’approche.Jem’arrêtedevantJordanenhaussantlessourcilsetjeluisourisd’unairnarquois,moiaussi.

– C’est toutceque tupeux faire,Carrington?Jesuisuneordure?TsssTsss.Jesuisdéçuepartonmanqued’imagination.

Son regard frémit, mais je suis déjà passée, comme si je n’en avaisabsolumentrienàfoutre.

Unnouveaupointmarquéparl’équipevisiteurs.Plusoumoins.Parcequejesuislaseuleàsavoirquejesuisàdeuxdoigtsd’éclaterensanglots.

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CHAPITRE12

Jeréussisànepaspleurerdetoutelajournée,maisunepartiedemoicrèved’enviedemevenger,pourqu’ilssesouviennentdujouroùilsontmisdesorduresdansmoncasiercommeétantlejourleplusfaciledeleurvie.

Valériem’envoieuntextopendantlecours.

–Çava?J’aiapprispourlecasier.Jordanestunesalope.– Çava, je réponds.C’était débile, et comme tu le disais, elle n’a

aucune d’imagination. Des ordures ? Elle a piqué l’idée dans uneémissiondeDisney?

–Ah,nedispasça.Ellevadevoirtrouveruntrucpireencore.–Troptard.–Jeviendraifleurirtatombe!

Merci bien. Je repose mon téléphone, le prof regarde dans ma

direction.Lorsquelejolicarillonretentitpournousprévenirquelecoursest terminé, je rangemes affaires dansmon sac et je sors. J’espère queDurandm’attendetquejevaispouvoirmeréfugierdansmachambredeprincesse.Lemélangederoseetblanccommenceàmeplaire.

Leparkingestpleindebruit,degensetdevoituresdeluxe,maispasdeDurandenvue.

–Harper.Valérieapparaîtàmadroite.Tonchauffeurn’estpaslà?

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–Non,jenelevoispas.Elleclaquedelalangueavecbienveillance.–Jeteproposeraisvolontiersdeteramener,maisjesupposequetu

n’asaucuneenviedemonterdanslamêmevoiturequeJordan.–Tuasraison.– Tudevraisvenirpourtant.Après la findescours, çapeutdevenir

dangereuxici.–Ici,enpleinjour?Çacraint.Valériefroncelessourcils,ellesemblepréoccupée.–Jordanpeutêtresuper-rusée.Nelamésestimepas.Jeserremonsacàdosetjememaudisdetrimbalerautantdefricsur

moi.Ildoitbienyavoirunendroit,danstoutcemonceaudebriquesquiappartientauxRoyal,oùjepourraisleplanquer.

– Comment fait-elle pour ne pas se faire choper ? SavannahMontgomerym’aditqu’ici,toutlemondeétaitspécial.Alorspourquoiest-cequec’estJordanquimèneladansesichacunaquelquechosed’uniqueàoffrir?

–Lesrelations,répondcarrémentValérie.LesCarringtonnefontpaspartie du club des dix comme les Royal, mais ils connaissent tout lemonde. Ils ont fait des affaires avec des célébrités, avec des famillesroyales.LatantedeJordan,ducôtédesonpère,estmariéeàuncomteitalien.SiellevientàNoël,nousdevronsluidonnerdu«LadyPerino».

–C’estsurréaliste.– Alors Jordan, par extension… (Elle s’interrompt.) Fais gaffe. Elle

arrive.Je me prépare pendant que Jordan s’approche. Comme tous les

Alphas,elleaunemeutequilasuit.Ondiraitunepubpourdudentifrice,des kilomètres de dents blanches et de longues chevelures raides quicinglentl’airderrièreelles.

– Si ça peut t’être utile, les cheveux de Jordan sont frisés. Chaquematin, elle doit passer une heure avec son fer à défriser, memurmure

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Valérie.Elle n’a pasmieux à balancer sur Jordan ? Parce que savoir qu’elle

passe un temps fou sur ses cheveux ne m’aide pas beaucoup. Je luirépondssèchement:

–Ça,çam’estvraimentutile!Valériemefaitunpetitsourireetpassesonbrassouslemienpourme

réconforter. Jordan s’arrête à deux pas demoi et renifle plusieurs fois,ostensiblement.

–Tupues,medit-elle.Etçanevientpasdesorduresdetoncasier.Çavientdetoi.

–Mercipourl’info.Jecroisquejevaismedoucherdeuxfoisparjouraulieud’uneàprésent,jerépondstranquillement.

Maisintérieurement,jem’inquiète,est-cequejepuevraiment?Ellesoupireetrepoussesachevelurederrièresonépaule.–C’estlegenred’odeurqu’aucunedouchenepourrajamaisenlever.JequestionneValérieduregard.Enréponse,elleécarquillelesyeux.

Jerépondsgaiement:–Bond’accord,c’estbonàsavoir.Jordanveutme fairepasserpourune idiote.Lemieuxque jepuisse

faire,c’estdenepasentrerdanssonjeu.Maismonabsencederéactionnela désarme pas. Elle continue, sans doute parce qu’elle adore s’écouterparler.

–Enfait,lesfillescommetoisuintenttoujoursledésespoir.Là, ellem’abieneue.C’est toutà fait ça, l’odeurd’unclubde strip-

tease.Jem’efforcedehausserlesépaules.– Jene saispascequeveutdire « fille commemoi»en languede

pute,maisjesupposequec’estmoche.Cequejen’arrivepasàpiger,c’estlaraisonpourlaquelletuimaginesquej’enaiquelquechoseàfoutredecequetupensesdemoi.Lemondeestvraimentimmense,Jordan.Lefaitque turemplissesmoncasierdemerdeouque tum’insultesn’auraplus

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aucuneimportance,dansdeuxans.Putain,çacomptedéjàtellementpeuaujourd’hui.

Elle reste bouche bée, Valérie se planque pour étouffer un éclat derire.

JenesaispascequelegrandretourdeJordanpeutsignifier,maisilyacommeunmouvementdesurprisederrièremoi.JecomprendsquiestlàavantmêmequeleslèvresimpeccablementrougesdeJordanprononcentsonnom.

–Reed,jenet’avaispasvu,dit-elledansunsouffle.Ilyacommeuneincertitudedanssavoixquimesurprendunpeu.Je

medemandeenquoi consisteexactement ledécretanti-ElladeReed. IlfaudraquejeposelaquestionàValérie.

–Tuesprête?demande-t-il,etjenesaispass’ils’adresseàmoiouàJordan.

Et à la façon dont son regard passe de moi à un point situé à 30centimètresderrièrema tête, jecomprendsqu’ellenonplusn’enestpascertaine.

–Jemedemandaissituvoulaisvenirrévisertoncontrôled’anglais?finit-ellepardemander.

–J’aidéjàterminé,répond-illaconiquement.Jordan pince ses lèvres. C’est une vraie claque, et nous le savons

toutes.J’aipresquedelapeinepourelle…presque.–SalutReed.Unevoixdifférente,plusdouce,s’élève.C’estcelled’unefilledélicate,

auxcheveuxd’ornattésqui entourent sonvisage commeunecouronne.Autourdesesgrandsyeuxbleus,sescilsdésespérément longstremblentcommedesplumesdansl’attentedesaréponse.

–Abby,dit-il,ettoutsonvisages’adoucit.C’estchouettedetevoir.Lamoitié des filles du lycée clament sur tous les toits qu’elles ont fait

l’amouravec lui,maisqui sait si c’estvrai.La seuledont je suis sûre, c’estAbby,lacopinedeJordan.

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VoilàdonclafillequiaréussiàattraperReed,dumoinsunefois.Jecomprendspourquoi.Elleestsublime.Jordanaussi,maisAbbyestdouce,contrairement à Jordan et àmoi. C’est ça qui plaît à Reed ? Des fillesdoucesquiparlenttoutbas?Pasétonnantqu’ilnes’intéressepasà…

Attendez,àquoiest-cequepense?Jemefichedesavoirsij’intéresseReed.Ilestlebienvenucheztouteslesfillesfalotesetidéalistesqu’ilveut.

–Tum’asmanqué,dit-elle,etsontonderegretnousmettoutesmalàl’aise.

– Ça a été très charrette cet été, lui répondReed enplongeant sesmainsdanssespoches.

Ilne regardepasAbbydans les yeuxet son tonaquelque chosededéfinitif.

Elles’enrendcompte,elleaussi.Sesyeuxdeviennenthumides.C’estpeut-être terminépourReed,maispaspourelle.C’estdouloureusementévident.Ellemefaitdelapeine.

Lorsque Reed pose une main lourde sur mon épaule, je manquesursauter.Etjeneratenilesregardsmalveillantsdesfillesaudentifricenil’expressiondecolombeblesséed’Abby.SiReedtouchequelqu’un,cen’estpascenséêtremoi.

–Tuesprête,Ella?murmure-t-il.–Ahhh,jesupposequeoui?Cet échangeme déclenche des démangeaisons dans les épaules. Du

coup, jenediscutepasquandReedm’entraînevers le camiond’Easton.Quandnousl’atteignons,jemedégage.

–OùestEaston?–Ilramènelesjumeaux.–Alorscommeça,tutesersdemoipouréchapperàtonex?jelui

demande,pendantqu’ilouvrelaporteetmepousseàl’intérieur.–Cen’estpasmonex.Ilclaquelaportière.Reed fait le tourde lacamionnette,et jevoisValériequime faitun

signe de lamain. Derrière elle, Jordanme lance des regards assassins.

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Abby,elle,ressembleàunchiotàquionauraitflanquéuncoupdepied.–Metstaceinture,m’ordonneReedendémarrant.Jeluiobéis,parcequec’estunequestiondesécurité.–OùestpasséDurand?JefaisunsigneàValériequilèvelepouceenl’air.J’espèrequeJordan

ne l’a pas vue, sinon elle risque fort de devoir quitter sa chambre pouremménagerdansunplacardàlacave.

–Etpourquoic’esttoiquimeconduis?– Je voulais te parler. (Il se tait unmoment.)Est-ce que tu essaies

d’embarrasserlafamille?Choquée, je me tourne vers lui et je ne peux m’empêcher de

remarquercombiensesavant-brasmuscléssontsexyquandilempoignelevolant.

– Tupensesque j’ai remplimoncasierd’orduresmoi-même? je luidemande,incrédule.

–JeneteparlepasdelaconneriepuériledeJordan.Jeteparledetonboulotàlaboulangerie.

– D’abord, comment es-tu au courant, Monsieur le harceleur ? Etdeuxièmement,enquoiest-ceembarrassant?

– Primo, j’aientraînementde foot tous lesmatins,aboie-t-il. J’aivuDurand te déposer là-bas. Et secundo, cela sous-entend que nous neprenons pas soin de toi. Au déjeuner, quelqu’un a demandé si Callumavaitachetélaboulangerieetsic’étaitpourçaquelapetitedernièredesRoyalytravaillait.

Jem’enfoncedansmonsiègeetjecroiselesbras.– Bon, doux Jésus, je suis navrée que tu aies eu à répondre à une

question gênante pendant ton déjeuner. Ça a dû être tellementdésagréable. Tellement plus que de se retrouver nez à nez avec untamponusagédanstoncasier.

Lorsqu’ilsemetàsourire, jeperdscomplètementlaboule.Toutemafrustrationettoutmonchagrinremontentd’unseulcoup.J’enaiassezde

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jouer les filles calmesetgentilles. Jemesoulève, jemepencheet je luibalanceungrandcoupsurlesommetducrâne.

–Merde.Pourquoitufaisça,bordel?–Parcequetuesunconnard!Je le frappe à nouveau, en cachant mon pouce dans mon poing,

commemel’aapprisl’ancienpetitcopaindemamère.Reedmerepousseviolemmentcontrelaportièrepassager.–Assieds-toi,bordel!Tuvasnousfaireavoirunaccident.–Jeneveuxpasm’asseoir!(Jemejettesurlui.)J’enaimarredetoi,

detesinsultesetdetesamishorribles.– Peut-être que si tu joues franc jeu avec moi, je rappellerai mes

chiens.Àquoitujoues?Ilmelancedesregardsnoirsenmerepoussantduboutdesonbras.

J’essaiedel’atteindre,maisjen’attrapequeduvent.–Tuveuxsavoiràqueljeujejoue?Jeveuxobtenirmondiplômeet

alleràl’université!C’estçamonjeu!–Pourquoiest-cequetuesvenueici?Jesaisquetuasprisdufricà

monpère.–Jen’aijamaisdelaviedemandéàtonpèredem’amenerici!–Tunet’espasbeaucoupdéfendue,lance-t-il.Tun’aspasrésistédu

tout.L’accusation fait mouche, en partie parce que c’est vrai, mais aussi

parcequec’estinjuste.–Ouais,c’estvrai,jen’aipasrésisté,parcequejenesuispasidiote.

Tonpèrem’aoffertunavenir,etj’auraisétévraimentdébilederefuser.Sicelafaitdemoiunevoleuseouuneaventurière,alorsjesupposequec’estce que je suis.Maismoi, je ne suis pas le genre de personne qui forcequelqu’unàmarcherseuledanslanuit,pendantplusdetroiskilomètres,dansunendroitinconnu.

J’observeavecsatisfactionunelueurderegretdanssesyeux.–Alors,tuadmetsquetun’aspashonte,crache-t-il.

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–Oui,etçanemeposepasdeproblème,jeluibalanceenretour.Lahonteetlesprincipessontfaitspourlesgensquin’ontpasbesoindefaireattentionauxpetitsdétails,dugenrequ’est-cequejevaispouvoiracheteravec un dollar pourmanger aujourd’hui, ou bien, est-ce que je paie lesfacturesdesmédicamentsdemamèreouunpeud’herbepouratténuersadouleuruneheureoudeux?Lahonte,c’estunluxe.

Jemerassieds,jesuisvidée.J’arrêted’essayerdemebattrecontrelui.Detoutefaçon,c’estimpossible.Ilesttropfort.Ehmerde!

– Tu n’as pas lemonopole du chagrin. Tu n’es pas le seul à avoirperdu ta mère. Oh, pauvre Reed Royal. Il est devenu un vrai connardparcequ’ilaperdusamaman.

–Tais-toi.–Non,toi,tais-toi.Avantmêmequejeprononcecesmots,jemerendscompteduridicule

de la situation et j’éclatede rire. Il y auneminute, nousnoushurlionsdessuscommesinousavionscinqans.Jeristellementfortquejememetsàpleurer.Oualors, jepleuraisdepuis ledébutetçasonnaitcommedesrires.Jemepencheetjecachematêteentremesgenoux,jeneveuxpasqueReedvoiequ’ilm’acassée.

–Arrêtedepleurer,murmure-t-il.–Arrêtedemedirecequejedoisfaire,jehoquette.Il finitparse taireet jesuisparvenueàretrouvermoncalmequand

nousarrivonsauportailetquenouspénétronsdansleparc.Est-cequej’aivraimentditquejen’avaispashonte?Cen’estpasvrai

du tout.Et je suismortifiéed’avoirpleurépendantcinqbonnesminutesdevantReedRoyal.

–Tuasfini?medemande-t-illorsqu’ilsegareetcoupelemoteur.–Vatefairefoutre,jerépondsd’unairlas.– Je veux que tu arrêtes de travailler dans cette putain de

boulangerie.–JeveuxqueJordandécouvresubitementqu’elleaducœur.Maison

n’obtientpastoujourscequ’onveut,pasvrai?

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Ilfaitunpetitbruitensignedefrustration.–Callumnevapasaimer.– Oh mon Dieu ! Tu changes les règles en permanence. Ne

m’approchepas,Ella.Montedanslavoiture,Ella.Nesaignepasmonpèreàblanc,Ella.Netrouvepasdeboulot,Ella.Jenesaispascequetuveuxdemoi.

–Noussommestouslesdeuxdanslemêmecas,dit-ilsombrement.Je ne veuxmême pas répondre à ça. Alors, j’ouvre la portière et je

descends.Çametitille, jemedisque jepeuxpeut-êtreencoresauver lafaceetjemeretournebrusquementverslui.

–Oh,etaufaitReed,netesersplusdemoipouréviterunedetesex.–Ellen’estpasunedemesex,hurle-t-il.Jenedevraispastrouverçatellementjouissif,maispourtant,c’estle

cas.

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CHAPITRE13

Une fois à l’intérieur, je me rue dans les escaliers pourm’enfermerdansmachambre.Jejettemeslivresscolairessurmonlitetjechoisislepremierexercicesurlequeljetombe,maisj’aidumalàmeconcentrersurmes devoirs. Je suis encore tellement en colère à cause de ce qui s’estpasséentreReedetmoi.

Lapartierationnelledemoncerveaucomprendpourquoij’aicraqué.Ily a moins d’une semaine, toute ma vie a été bouleversée. Callum m’aarrachéedeKirkwoodetm’aamenéedanscettevilleétrangeetdanssamaisonluxueuse,oùjemesuisretrouvéefaceàsesconnardsdefils.Lesfrères Royal ont passé leur temps à me brusquer depuis mon arrivée.Leursamism’ontfoutulahonteàcettefêteetilsm’onthumiliéeaulycéeaujourd’hui.Etenplus,ReedRoyalédictesesrèglesd’orpuisleschangeen permanence. Quelle fille normale de dix-sept ans ne perdrait pas laboule?

Mais l’autre partie demoi-même, celle qui essaie à tout prix demeprotégerendissimulantmesémotions…cettepartie-làm’engueulepourm’être laissée aller à pleurer devant Reed. Pour lui avoir permis de serendrecomptequejen’étaispassûredemoi,quej’étaisvulnérabledanscenouveaumondedanslequelonm’ajetée.

Jemedétested’êtresifaible.Jeparvienstoutdemêmeàterminermesexercices,maismaintenant

ilestsixheuresetmonestomaccriefamine.

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Seigneur, je n’ai pas envie de descendre. Si seulement je pouvaiscommanderauroomservice.Çaressembletellementàunhôtel,ici.

Arrêtedetecacher.Neluidonnepascettesatisfaction.Si je saute le dîner, Reed saura qu’il a gagné, et je ne peux pas le

laissergagner.Jenevaispas le laissermecasser.Pourtant,mêmeaprèsavoirdécidéd’affrontercetenfoiré,jecaletoujours.Jeprendsunelonguedouche et jeme lave les cheveux, jeme change et j’enfile unepaire deboxers noirs minuscules et un débardeur rouge. Puis je brosse mescheveuxhumides.EtjeregardesurmontéléphonesiValérienem’auraitpasenvoyéunSMS.Et…

Ok,assezprocrastiné.Monventrevideconfirme,ilgargouillependantquejedescendslavoléed’escaliers.

Danslacuisine,jetombesurundesjumeauxdevantlacuisinière,quiplongeune spatule dans ce qui ressemble à unplat denouilles. L’autrejumeauexaminel’intérieurduréfrigérateurenronchonnant.

–Mince,JecroyaisqueSandraétaitrentréedevacances.–C’estdemain,luirépondsonfrère.– Bordeldemerde!Depuisquandlescuisinièresprennent-ellesdes

vacances ? J’enaimarrede faire la cuisine.Onauraitdûaller au restoavecpapaetReed.

Monfrontseplissependantquej’enregistrel’info.Un,cesmômessontvraiment gâtés. Ils ne peuvent même pas se préparer à manger eux-mêmes ? Et deux, Reed est allé dîner dehors avec Callum ? Est-ce queCalluml’amenacéavecunflingue?

Le jumeauaufourneaumeremarque,cachéedans l’embrasurede laporte,etilfroncelessourcils.

–Tuveuxquoi?Jehausselesépaules.–Jeregardejustetondînerquibrûle.Ilfaitdemi-touretsemetàgémirquandilvoitlafuméequis’échappe

desacasserole.–Bonsang!Seb,passe-moiunemanique!

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MonDieu,cesgarçonsnesontvraimentpasaidés!Qu’est-cequ’ilvabien pouvoir faire d’une manique ? La réponse arrive lorsque Sawyerattrape la manique que lui tend son frère et saisit la poignée de lacasserolequi,àmoinsd’êtredéfectueuse,n’apasdepoignéebrûlante.Jem’amuseenregardantlesgarçonsquitententdesauverleurdîneretjenepeuxm’empêcherdepoufferderirequand l’huilebouillantesautede lacasserole et brûle Sawyer au poignet, là où il n’est pas protégé par lamanique.

Ilhurlededouleuretsonfrèrefermelegaz.Puistousdeuxregardentdésespérémentlepouletetlesnouillestoutcramés.

–Tuveuxdescéréales?demandeSébastien.Sawyersoupire.Malgré l’horrible odeur de brûlé qui se dégagede la casserole,mon

ventre continue à crier famine. J’ouvre donc les placards pour en sortirdifférentsingrédients,sousleregardinquietdesjumeaux.

–Jefaisdesspaghettis.Vousenvoudrez?Ilyaunlongsilence,puisl’und’euxmarmonneun«oui».L’autrefait

demême.Je cuisine en silence pendant qu’ils s’asseyent à table en dignes et

paresseuxhéritiersRoyalqu’ilssont.Aucunnemeproposesonaide.Vingtminutesplustard,noussommestouslestroisentraindedîner.

Pasuneparolen’estéchangée.Eastonentreàlafindurepas,ilplisselesyeuxlorsqu’ilmevoitmettre

monassiettedanslelave-vaisselle.Puisilregardelatableoùsesfrèresensontàleurdeuxièmeassiettéedespaghettis.

–Sandraestrentrée?Sébastiansecouelatête,labouchepleine.Sonjumeaumedésignedelatête.–Elleafaitlacuisine.–Elleaunnom,jedisavecbrusquerie.(Puisjemurmureentremes

dentsenquittantlacuisine.)Etnemeremerciezsurtoutpas,espècesdesalesingrats!

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Au lieu de retourner dans ma chambre, je pousse jusqu’à labibliothèque. Callumme l’amontrée l’autre jour. Je suis impressionnéepar le nombre incroyable de livres qu’elle contient. Il y a des étagèresconstruitessur-mesurequicourentdusolauplafondetunevieilleéchellepouratteindrelesrangéesduhaut.Dansundescoinsdelapièce,ilyaunespace lecture très cosy avec deux fauteuils capitonnés en face d’unecheminéemoderne.

Jen’aipasenviedelire,maisjem’écrouledansl’undesfauteuils.Jehumel’odeurdevieuxcuiretdelivres.Alorsquemonregardglissesurlemanteaudelacheminée,moncœursemetàbattreplusvite.Desphotossontexposéessur lerebordenpierreetsur l’uned’elles,undétailattiremonattention.OnyvoitCallumenuniformede laNavy,unbraspasséautourde l’épauled’ungrand typeblond, lui aussi enuniforme. Je suissûre que c’est Steve O’Halloran, mon père. Je fixe le visage fin de cethomme.Sesyeuxbleussemblent regarder l’objectifavecespièglerie.J’aisesyeux.Etmescheveuxsontdumêmeblondquelessiens.

Lorsquej’entendsdesbruitsdepasderrièremoi,jemeretournepourvoirEastonpénétrerdanslabibliothèque.

–J’aiapprisquetuasessayédetuermonfrèreaujourd’hui,lance-t-ild’unevoixlaconique.

–Çaluipendaitaunez.Je lui tourne ledosmaisquand ilavance, jemerendscompteen le

regardantducoindel’œilquesonregardestfroidcommelapierre.– Soyons clairs, est-ce que tu pensais vraiment que tu pourrais

débarquericiettejeterdanslesbrasdemonpèresansqueçanousposeproblème?

–Jenemesuispasjetéedanslesbrasdetonpère,jesuissapupille.– Ouais?Regarde-moienfaceetdis-moiquetunebaisespasavec

monpère.Pourl’amourdeDieu.Jeserrelesdents,jefixesonregardbornéetje

prononcelentement:

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– Jenebaisepasavec tonpère.Commentpeux-tu insinuerun trucpareil?

Ilhausselesépaules.–Cen’estpasuneinsinuation.Illesaimejeunes.Il fait visiblement référence à Brooke, mais je ne fais aucun

commentaire. Mon regard glisse à nouveau sur la photo posée sur lemanteaudelacheminée.

–OncleSteveétaitunebombe.Ilsuffisaitqu’ilentredansunepiècepourquelesnanasbaissentleurculotte.

Doubleoups.Jen’aipasdutoutenviedesavoirçaàproposdemonpère.

–Àquoiressemblait-il?jedemandeàcontrecœur.–Ilétaitchouette,jesuppose.Onnelevoyaitpassouvent.Ilpassait

toutsontempsdanslebureaudemonpère.Touslesdeuxrestaientdesheureslà-dedansàdiscuter.

Eastonal’airamer.– Aïe,alorscommeça, tonpèreaimaitmieuxmonpèrequevous?

C’estpourçaquetumedétestesautant?Ilrouledegrosyeux.–Fais-toiunefaveur,arrêtedeprovoquermonfrère.Situcontinuesà

l’emmerder,tuvasprendredescoups.–Pourquoiest-cequetumemetsengarde,frangin?Cen’estpasce

quevousvoulez,mevoirsouffrir?Ilne répondpas. Il secontentedes’éloigner,etmevoilàànouveau

seuledanslabibliothèque.Jecontinueàexaminerlaphotodemonpère.

Jemeréveilleàminuit,ausondevoixétoufféesdanslecouloirdemachambre. Je suis complètement endormie, mais je reconnais tout demême la voix de Reed, et bien que je sois couchée, je me metsimmédiatementàfrissonner.

Jenel’aipasrevudepuisnotrebagarredanslavoiture.Quandilestrentré après son dîner avec Callum, j’étais déjà enfermée dans ma

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chambre.Enentendantlebruitsourddesespasetlesportesclaquer, jem’étaisdoutéequeledînernes’étaitpastrèsbienpassé.

Je ne sais pas pourquoi je me glisse hors de mon lit ni pourquoij’avancesurlapointedespiedsjusqu’àmaporte.Espionner,cen’estpasmonstyle,maisjeveuxsavoircequ’ilditetàquiilledit.Jeveuxsavoirsic’estdemoiqu’ilparle.Peut-êtrequec’estvraimentvaniteux,maisjeveuxquandmêmelesavoir.

–…Entraînementdumatin.C’estEastonquiparleàprésentetj’appuiemonoreillecontrelaporte

pouressayerdemieuxentendre.–…D’accordpourarrêterpendantlasaison.Reedmarmonnequelquechoseentresesdents,quejenecomprends

pas.–J’aipigé,ok?Moinonplus,jenesuispasraviqu’ellesoitlà,maisce

n’estpasuneraisonpour…Laphrased’Eastonesttronquée.–Ilnes’agitpasd’elle.J’entends ça très clairement. Et je ne sais pas si je suis soulagée ou

déçuedesavoirqu’ilsneparlentpasdemoi.–…Alors,jeviensavectoi.–Non,répondReedsèchement…J’yvaistoutseulcesoir.Il va quelque part ? Bon sang, où va-t-il si tard, un jour d’école ?

L’inquiétudemesaisit,cequimefaitpresquemarrerparceque,toutd’uncoup,jemefaisdusoucipourReedRoyal,legarsquej’aiattaquédanslavoitureunpeuplustôt?

–Etvoilà,tuparlescommeGidàprésent,accuseReed.–Ouaisehbien,peut-êtrequetu…Ce qu’ils disent redevient incompréhensible. C’est franchement

frustrant,jesaisquejeratequelquechosed’important.Jesuistentéed’ouvrirmaportepourretenirReed,maisc’esttroptard.

Deuxsériesdepas résonnentdans l’entrée,uneporteclaque.Ensuite, iln’yaplusqu’unesériedepas,àpeineaudible,quidescendlesescaliers.

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Etquelquesminutesplustard,lebruitd’unmoteursemetàvrombirdanslacour.

JesaisqueReedestparti.

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CHAPITRE14

Le lendemain matin, je tombe sur Reed adossé à la camionnetted’Easton,dansl’allée.Ilportedeschaussuresdetennis,delongsshortsdegym et un tee-shirt fendu sur les côtés. Il est sexy comme ce n’est paspermis.Ilaenfoncéunecasquettedebase-ballbassursonfront.

Jeregardeautourdemoi,maislalimousinenoireresteinvisible.–OùestDurand?–Tuasprévud’alleràlaboulangerie?–Tuasprévud’yfoutrelefeupourquejeneternissepaslenomdes

Royalenytravaillant?Ilbougonnequelquechose.Jeluirépondsdemême.–Alors?murmure-t-il.Jefroncelessourcils.–Oui,jevaistravailler.–J’aiunentraînementdefootball,alorssituveuxquejetedépose,je

tesuggèredegrimpertoutdesuitedanslavoiture,parcequesansça,tuvasdevoiryalleràpied.

Et il ouvre la portière côté passager avant de faire le tour, côtéconducteur.

JechercheDurand,ànouveau.Merde,oùpeut-ilbienêtre?QuandReedmet le contact, jemedécide.Quelmalpeut-ilme faire

pendantvingtminutesdeconduite?

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–Ceinture,aboie-t-il.–J’arrive,uneminute.Jelèvelesyeuxaucieletjem’exhorteàlapatience.Reednedémarre

pasavantquej’aiebouclémaceinture.– Tu as un syndrome prémenstruel masculin ou bien tu es d’une

humeur de chien vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sursept?

Ilnerépondpas.Jem’enveux,maisjenepeuxdétacherlesyeuxdelui.Jenepeuxpas

empêchermon regard de dériver sur le côté, vers sa gueule de star decinéma, son oreille parfaitement ciselée, encadrée par ses cheveuxsombres.Tous lesRoyal ont les cheveuxbruns.CeuxdeReedvirent aunoisette.

Deprofil,sonnezaunebosseminusculeetjemedemandequelfrèrele lui a cassé.Ce n’est pas possible d’être aussi bandant. Et il a ce côtémauvaisgarçonquid’habitudenemebranchepasvraiment,maisqui lerendencoreplusexcitant.Jemedisqu’enfait,j’aimelesvoyous.

Attendez,qu’est-cequejesuisentraind’imaginer,bordel?Jen’aimepas lesvoyous,et jen’aimepasReed.C’est leplusgrosconnardque j’aijamais…

–Pourquoiest-cequetumemates?demande-t-il,l’aircontrarié.Jerepoussemespenséesdémentesetluiréponds:–Etpourquoipas?–Tuapprécieslespectacle,hein?raille-t-il.Jeréponds,l’airdenepasytoucher:–Nan,j’essaiejustedemémoriseràquoiressembleleprofild’unâne.

Tusais,commeça,sionmedemanded’endessinerunencoursd’art,jepourraim’eninspirer.

Ilgrogne,etcelaressemblevaguementàunrire.Pourlapremièrefoisensaprésence,jecommenceàmedétendre.Lerestedutrajetpassevite,presquetropvite.Jeressensune légère

déception lorsque la boulangerie apparaît, ce qui est quand même nul

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puisquequejen’aimepascetype.–Tuvasmedéposertouslesjours,oujustecematin?jeluidemande

lorsqu’ilfreinedevantLaBaguetteFrançaise.– Çadépend.Pendant combiende tempsas-tuprévudepoursuivre

cettefarce?–Cen’estpasunefarce.Onappelleçagagnersavie.Je descends du camion avant qu’il ait le temps deme balancer une

autrerépliquedébile.–Hé,ilm’appelle.–Quoi?Jeme retourne et je le regarde en face pour la première fois de la

journée.Jeportemamainàlabouche.Lecôtédesonvisage,celuiquejenepouvais pas voir pendant le trajet, est tout contusionné. Sa lèvre estgonflée.Sapaupièreestentailléeetilaunhématomesurlapommette.

–OhmonDieu,qu’est-cequit’estarrivé?Je lève les doigts sur son visage, sans réaliser quemes piedsm’ont

portéedelaboulangeriejusqu’aucamion.Ilreculepouréviterlecontact.–Rien.Mamain,inutile,retombelelongdemoncorps.–Çan’apasl’aird’êtrerien.–Puisquetuledis.Ildémarreengrimaçantetmelaissesurplace,àmedemandercequ’il

abienpufairelanuitdernièreetpourquoiilm’arappelées’iln’avaitriend’important àme dire.Mais je sais une chose. Si j’avais été frappée auvisage aussi violemment, moi aussi j’aurais été en rogne le lendemainmatin.

Malgrémoi,jepenseàReedpendanttoutmonservicedumatinàlaboulangerie.Lucyme jettedesregards inquiets,maiscommeje travailledur,elleneditrien.

Aprèsmonservice,jecoursàl’école,maisjenevoispasReed.Nisurle chemin qui mène en cours de gym ni dans les couloirs, pas même

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pendantledéjeuner.C’estcommes’iln’étaitmêmepasàAstorPark.À la fin des cours, c’est la grosse limousine qui m’attend. Durand

m’ouvre laporte sansattendre,ducoup jenepeuxmêmepas flânerunpeusurleparking.C’estmieuxcommeça,medis-je.PenseràReedRoyalnepeutrienm’apporterdebien.

Jepasse tout le trajetde retouràme sermonner,mais lorsquenouspassonsleshautesportesenferforgé,Durandattiremonattention.

–MonsieurRoyalvoudraitvousvoir,melance-t-ildesavoixdebassequandlavoitures’arrêtedevantlesescaliersdel’entréeprincipale.

Je reste assise comme une idiote, le temps de comprendre que«MonsieurRoyal»signifieCallum.

–Hum,d’accord.–Ilestdanslapoolhouse.–Lapoolhouse,jerépète.Est-cequejesuisconvoquéeaubureaudu

directeur,Durand?Sonregardcroiselemiendanslerétroviseur.–Jenecroispas,Ella.–Çan’estpastrèsencourageant.–Vousvoulezquejevousfassefaireunpetittouravantd’yaller?–Est-cequ’ilvoudratoujoursmevoir?Durandhochelatêtedebasenhaut.–Alors,autantyallermaintenant.Jesoupired’unairdramatique.Lecoindesesyeuxseplisseunpeu,cequicorrespondchezluiàun

grandsourire.Je jette mon sac à dos en bas des escaliers et je fais le tour de la

maison.Jetraverselelongpatiojusqu’auboutdelacour.Lapoolhouseestentièrementvitréesurtroiscôtés.Ildoityavoirun

truc particulier dans le verre, parce que, par moments, le côté le plusprochedelapiscineestréfléchissant.Onnepeutplusvoirautravers.

Jeréaliseenm’approchantquelesmurssontenfaitcomposésd’unesérie de portes coulissantes et qu’elles sont grandes ouvertes afin de

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permettreàlabriseocéaniquedetraverserjusqu’àlamaison.Callumestassisdanslecanapé,faceàl’océan.Ilseretourneaubruit

demespassurlesolcarrelé.Ilm’accueilleenhochantlatête.–Ella.Tuaspasséunebonnejournéeàl’école?Pasd’orduresdansmoncasier?Pasdecoupfourrédans levestiaire

desfilles?–Çaauraitpuêtrepire.Ilmefaitsignedem’asseoiràcôtédelui.–C’étaitl’endroitfavorideMaria,medit-il.Quandtouteslesportes

sontouvertes,onentendl’océan.Elleaimaitseleverdebonneheurepourvenircontemplerleleverdusoleil.Unjour,ellem’adit,chaquematinestun spectacle magique. Le soleil repousse le rideau noir d’encre pourrévéler une palette de couleurs incroyable, que seuls les plus grandspeintrespourraientégaler.

–Vousêtescertainqu’ellen’étaitpaspoète?Ilsourit.–Elleétaitassezpoétique.Elledisaitaussiquelemouvementrythmé

desvaguescontrelerivagecomposaitunmorceaudemusiqueaussipurquelaplusbelledesorchestrations.

Nousl’écoutons.Leroulementdesvaguessurlesable,puisleurrecul,commesiellesétaienttiréesenarrièreparunemaininvisible.

–C’esttrèsbeau,jereconnais.Callum pousse un gémissement. D’une main, il attrape son

sempiternelverredewhisky,maisdansl’autre,tellementcrispéequesesarticulations sont toutes blanches, il serre la photo d’une femme auxcheveuxnoirsetauxyeuxsibrillantsqu’ondiraitqu’unsoleil irradieducadre.

–C’estMaria?jedemandeenmontrantlecadre.–Elleestbelle,n’est-cepas?J’acquiesce.Callumsepencheetvidesonverred’untrait.Illepose,justeletemps

deseresservir.

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–Mariaétaitlelienquiunissaitnotrefamille.Ilyadixansenviron,Atlantic Aviation a traversé unemauvaise passe. Une série de décisionshasardeuses,pluslarécession,ontcompromisl’héritagedemesfils.Jemesuisjetéàcorpsperdudansunetentativedesauvetage,cequim’aéloignédemafamille.Mariamemanquait.Depuistoujours,elledésiraitavoirunefille,tusais?

Je ne peux que hocher la tête à nouveau. Ce n’est pas évident desuivreundiscourssiétrangementdécousu.Jen’aipaslamoindreidéedelàoùilveutenvenir.

– Elle t’auraitadorée.Elle t’auraitpriseàSteveetélevéecommesaproprefille.Ellevoulaittellementavoirunefille.

Je reste assise sans bouger. Cette histoire triste ne me dit rien quivaille.

– Mes fils me rendent coupable de sa mort, dit-il soudain. (Cetteconfessioninattenduemestupéfie.)Ilsenontledroit.Voilàlaraisonpourlaquelle je les laissefairen’importequoi.Oh, jesuisaucourantdeleurspetites rébellions, mais je n’arrive pas à leur imposer quoi que ce soit.J’essaiede les rassembler et je suis le premier à reconnaître que je suisunemerde.Etquej’aimerdéavecmafamille.

Ilpasseunemaintremblantedanssescheveuxenréussissantmalgrétoutàgardersonverre,commesil’objetencristalétaitladernièrechosequilereliaitànotremonde.

–Jesuisdésolée.C’esttoutcequejetrouveàdire.–Tutedemandessansdoutepourquoijeteracontetoutça.–Unpeu.Ilmelanceunpauvresourirecrispéquimerappelletellementceluide

Reedquemesintestinsseretournent.–Dinahveutterencontrer.–QuiestDinah?–LaveuvedeSteve.Monpoulss’accélère.

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–Oh.–Jel’aitenueàl’écartparcequetuvenaisjusted’arriver,etbon,je

voulaisquetumeposesdesquestionsausujetdeSteve.ElleetSteve,verslafin…

Ilhésite.–Çan’allaitpas.Jeremontemagarde.–J’ail’impressionquejenevaispasappréciercequevousêtessurle

pointdemedire.–Tuestrèsperspicace.Surce,ilvidesondeuxièmeverre.–Elleexigequetuviennesseule.Je suis donc supposée rencontrer la femme de feu mon père, que

Callumdétestetellementqu’ilsetorcheauwhisky,etsanspersonnepourmesoutenir?Jesoupire:

–Quandj’aiditquemajournéeauraitpuêtrepire,jenepensaispasàcegenrededéfi.

Ilrenifle.–Dinahm’afaitremarquerquemesliensavectoiétaientplusténus

quelessiens.Elleestlaveuvedetonpère.Jen’étaisquesonamietsonassocié.

Unfrissonmeparcourtlapeau.–Est-cequevousêtesentraindemedirequevotretutellen’estpas

légale?–Ellen’estquetemporaire,jusqu’àcequ’ellesoithomologuée.Dinah

pourraittrèsbienlacontester.Jenepeuxpasresterassise.Jemelèveetmarchedelongenlarge.Je

mesenssoudainsistupide.Jemesuislaisséealleràcroirequejepourraisme sentir chezmoi ici,même siReedmedéteste,même si les stupidesélèvesd’AstorParkprennentleurpiedàmetourmenter.Toutesceschosesétaient supposées n’être que des nuisances temporaires. Callumm’avait

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promisunavenir,bordel.Etmaintenant, ilm’annoncequecette femme,Dinah,peutmel’enlever?

–Sijen’yvaispas,ellevacommenceràfairedesproblèmes,c’estça?–C’estàpeuprèsça.J’aiprismadécision.JemetourneversCallum.–Alors,qu’est-cequ’onattend?

Durandnousconduitenvilleets’arrêtedevantungratte-ciel.Callum

me dit qu’il m’attendra dans la voiture, ce qui me rend encore plusnerveuse.

–Çacraint,dis-jefaiblement.Ilsepencheetmeprendparlebras.–Tun’espasobligéed’yaller.–Quelautrechoixest-cequej’ai?–Ella,melance-t-illorsquejeposelepiedàl’extérieur.–Quoi?–Steveauraitvouluquetuviennes.Quandilaapprisqu’ilavaitune

fille,ilaétédéchiré.Jetejure,ilt’auraitaimée.Rappelle-t’en.QuoiqueprétendeDinah.

Avec ces paroles pas si encourageantes que ça dans les oreilles, jelaisse Durand m’accompagner à l’intérieur. L’entrée de l’immeuble deDinah est splendide, mais les beaux murs de pierre, les luminaires encristal et les boiseries aux tons chauds nem’impressionnent pas autantqu’ilsl’auraientfaitavantmonarrivéechezlesRoyal.

–EllevientvoirDinahO’Halloran,expliqueDurandauportier.–Vouspouvezmonter.Durandmepousselégèrement.–Dernierascenseur.AppuyezsurPcomme«Penthouse».L’ascenseurmoquettéetrecouvertdeboiserieestpresquetotalement

silencieux.Iln’yapasdemusique,paslemoindrebruitmécaniquepouraccompagner sa montée. Il s’arrête beaucoup trop vite. Les portes

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s’ouvrentetj’entredansuncouloirlargeetcourt.Aubout,ilyauneporteàdoublebattant.

Putaindemerde.Elleoccupetoutl’étage?Une femmehabilléecommeuneemployéedemaisonouvreunedes

porteslorsquejem’approche.–MadameO’Halloranvousattenddanslesalon.Puis-jevousapporter

quelquechoseàboire?–Del’eau,jecroasse.Jeveuxbiendel’eau,s’ilvousplaît.Mes tennis s’enfoncent dans la moquette épaisse. Je suis la jeune

femmeàtraverslehalljusqu’ausalon.J’ail’impressiond’êtreunagneauqu’onmèneàl’abattoir.DinahO’Halloranestassisesousungrandtableaureprésentantunnuféminin.Lescheveuxd’ordumodèlesontdétachésetelle regarde par-dessus son épaule, ses yeux verts, séducteurs, fixent lespectateur.C’est…ohmonDieu,levisagedecettefemme,c’estceluideDinah.

–Tuaimes?medemandeDinah,unsourcilhaussé.J’enaibeaucoupd’autres,maiscelui-ciestleplusconvenable.

Convenable ? Mais, Madame, je peux voir votre raie du cul sur cetableau.Jemens:

–C’estchouette.Quiauraitl’idéed’exposersesproprestableauxdenuchezlui?Je fais mine de m’asseoir sur un des sièges, mais la voix aiguë de

Dinahm’arrêtenet.–T’ai-jeautoriséeàt’asseoir?Jemefigeenrougissant.–Non,jesuisdésolée.Jerestedebout.Ellemedéshabilleduregard.– Alors, comme ça, c’est toi la fille qui, selon Callum, est celle de

Steve.Tuasdéjàfaituntestdepaternité?Untestdepaternité?–Hum,non.Ellesemetàrire.C’estunsonvoilé,atroce.

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– Alors, comment sais-tuque tun’espas labâtardedeCallumqu’iltentedefairepasserpourcelledeSteve?Çal’arrangeraitbien,luiquiatoujoursclamésurtouslestoitsqu’ilétaitfidèleàsapetitefemme.Or,tuseraislapreuvevivantequ’ilnel’étaitpas.

LafilledeCallum?Brookel’avaitsuggéré,maisCallumavaitprisl’airoffensé. Et ma mère m’avait dit que mon père s’appelait Steve. J’ai samontre. Pourtant, j’ai la nausée, même si je redresse les épaules pourparaîtresûredemoi.

–JenesuispaslafilledeCallum.–Oh,etcommentlesais-tu?– Parce que Callumn’est pas le genre de type à ignorer qu’il a un

enfant.–TueschezlesRoyaldepuisseulementunesemaineettucroisles

connaître.Ellesemoquedemoi,puissepencheenavant,lamaincrispéesurle

brasdesonfauteuil.– Steve et Callum étaient des vieux compagnons des SEAL. Ils ont

partagé plus de femmes que les enfants ne partagent de jouets à lamaternelle.

Jesuisbouchebée.–Jenedoutepasquetaputedemèrelesaitbaiséstouslesdeux.Cetteinjurevis-à-visdemamèremetirebrusquementdematorpeur.–Neparlezpasdemamère.Vousnelaconnaissezpas.–J’ensaisbienassez.Dinahreculedanssonfauteuil.– ElleétaitpauvrecommeJobetelleatentédefairechanterSteve

pourluiextorquerdel’argent.Commeçan’apasmarché,elleaprétenduqu’elle avait un enfant de lui. Sauf qu’elle ne savait pas queSteve étaitstérile.

Les accusations de Dinah me font penser à des spaghettis qu’ellejetterait contre le mur dans l’espoir qu’ils s’y collent, un peu commeJordanavecsestampons.Jecommenceàenavoirassezdecesconneries.

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– Alors, faisonsuntestdepaternité.Jen’ai rienàperdre.Si jesuisuneRoyal,jepourraiexigerunsixièmedeleurfortune.Çameparaîtunmeilleurdealqued’êtresimplementlapupilledeCallumRoyal.

Ma bravade ne passe pas bien auprès de Dinah, elle redouble sesattaques.

–TucroisqueCallumRoyalenaquelquechoseàfairedetoi?Cethommen’apasréussiàgardersafemmeenvie.Elles’esttuéeplutôtquede rester avec lui. Voilà le genredepersonne avec qui tu frayes. Et sesfils ? Ils sont pourris par le fric et les privilèges, et il les laisse fairen’importequoi.J’espèrequetut’enfermesàdoubletourlanuit.

Inconsciemment, mon esprit retourne à cette première matinée,lorsque Easton avait glissé sa main dans son pantalon et m’avait toutbonnementmenacée.Jeserrelesdents.

– Pourquoi m’avez-vous demandé de venir ? Je ne comprends pasl’intérêtdecettevisite. Ilmesemblequec’estsurtout l’occasiondevousmoquerdemoietdememettremalàl’aise.

Dinahmelanceunsourireglacial.–Jevoulaissimplementvoiràquij’avaisaffaire.Ellehausseunsourcil.–Etjedoisdirequejenesuispasvraimentimpressionnée.Noussommesdeux,danscecas.–Voilàmonconseil,poursuit-elle.PrendstoutcequeCallumapute

donner et fiche le camp. Cettemaison est un véritable cancer pour lesfemmes,etunjourviendraoùelletomberaenpoussière.Jetesuggèredepartirquandilenestencoretemps.

Elle tend lamain et attrapeune clochette.Aupremier tintement, labonneapparaîtcommeunbrave toutouobéissant.Elleporteunplateauavecunverred’eau.

– MademoiselleHarpernousquitte, luiannonceDinah.Ellen’apasbesoindeverred’eau.

Jen’arrivepasàquitterleslieuxaussivitequejelevoudrais.Callumattenddanslehalld’entréelorsquejejaillisdel’ascenseur.

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–Tuvasbien?medemande-t-ilimmédiatement.Jemefrottelesbras.Jenemerappellepasavoirdéjàeuaussifroid.– Steve est vraimentmonpère ? je lui demandeàbrûle-pourpoint.

Dites-lemoi.Ilnesemblepaschoquélemoinsdumondeparmaquestion.–Oui,biensûr,répond-ilcalmement.Callum se penche comme s’il voulait m’embrasser, mais je recule,

toujoursbouleverséeparlesrévélationsdeDinah.Jen’aipasbesoinqu’ilmeréconforte.J’aibesoindelavérité.

–Pourquoidevrais-jevouscroire?(JerepenseauxparolescyniquesdeDinah.)Vousnem’avezjamaisapportédepreuvesdecettepaternité.

– Tuveuxdespreuves?Trèsbien, jevaist’endonner.LesrésultatsADN sont dans mon coffre, à la maison. Et Dinah les a déjà vus. Sonavocatenaunecopie.

Jesuischoquée.Ellem’adoncmenti?Oubienest-celui lementeurdelabande?

–VousavezfaituntestADN?–Jenet’auraispasramenéeicisanscertitudes.J’airécupéréquelques

cheveuxdeStevedanssasalledebainsaubureau,etmondétectiveprivéaprisunéchantillondestienspourcomparer.

Commenta-t-il…Oublionsça,jeneveuxmêmepassavoircommentils’yestprispour

mettrelamainsurmonADN.–Jeveuxvoirlesrésultatsdutest.–Commetuvoudras,maistupeuxmecroirequandjetedisquetues

la filledeSteve.Je l’ai sudès l’instantoù je t’aivue.Tuassamâchoirevolontaire. Ses yeux. Je t’aurais reconnue dans n’importe quel groupecommeétant la fille de Steve.Dinah est en colère et elle a peur.Ne telaissepasatteindre.

Quejenemelaissepasatteindre?Cettefemmevienttoutjustedelancerassezdebombesàretardement

etd’insinuationspourmefaireperdrelatête.

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Jesuisincapabled’affronterçapourlemoment.Absolumentpas.Jeveuxjuste…–Allons-y,dis-jed’unairhébété.Dans lavoiture, jen’arrivepasà regarderCallumdans lesyeux.Les

parolesdeDinahtournentencoreetencoredansmatête.–Ella,quandj’aiperdumafemme,j’aitraverséunepériodesombre.C’estunefaçonpour luidereconnaîtrecequ’ilpensequeDinahm’a

dit.Jeluirépondssansleregarder.–Cettepériodesombre?Jecroisquevousyêtesencore.Ilsesertunautreverre.–Peut-êtrebien.Lerestedutrajetsepassedansleplusgrandsilence.

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CHAPITRE15

MarencontreavecDinahm’obsèdetrois joursdurant.Elletourneenboucledansmoncerveaumalade.Lucydoitpenserqu’elleaembauchéunrobot,vulepeud’émotionquejemontre.J’aipeurdememettreàpleureràchaqueinstant.Maisellemegardeparcequej’arriveàl’heuretouslesmatinsetquejebossesansmeplaindre.

Travaillerestunsoulagement.Quandc’estanimé,j’arriveàoublieràquelpointmaviepartensucette.Etcen’estpaspeudiresil’onsaitquej’aiquittéSeattlepourfuir lesservicessociauxàl’enfancequiessayaientdemeplacerdansunefamilled’accueil,quej’aipasséunesemainesurlesroutesavantd’atterriràKirkwood.J’avaiscruqu’imiterlasignaturedemamère décédée était une folie,mais ce n’était rien, comparé à la familleRoyaletàsonentourage.

C’estplusdifficiled’éviterlesujetenclasse,parcequeValn’arrêtepasdemedemandercequinevapas.Mêmesi j’adoreVal, jenepensepasqu’ellesoitprêteàentendretoutecettemerde,etquandbienmêmeelleleserait…jen’aipasenviedepartagertoutça.

Callumm’amontré les tests ADN lorsque nous sommes rentrés à lamaison,maisçan’arienchangé.Ledouteacontinuéàmerongerpendanttroisjoursentiers,jusqu’àcematin,quandjemesuistraînéehorsdemonlitaprèsuneautrenuitblancheetquejemesuisforcéeàmerappeleruneévidence:mamèren’étaitpasunementeuse.

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Jepeuxcomptersurlesdoigtsd’unemaincequemamèrem’aditsurmonpère. Il s’appelaitSteve. Ilétaitblond.C’étaitunmarin. Il luiavaitdonnésamontre.Toutcela,plustoutcequeCallumm’adit,etajoutéaufaitqu’ilexisteuneréelleressemblanceavecl’hommedelaphotodanslabibliothèque, me pousse à penser que Dinah O’Halloran, pour parlercrûment,estunevraiegrossemerde.

–Tuvoisquelqu’un?LaquestionabruptedeReedmesortdemespensées.Jesuisassisesur

lesiègepassagerdesonRange-Rover,àessayerd’arrêterdebâiller.–Quoi?Pourquoitumedemandesça?–Tuasdescernessouslesyeux.Tuaserrécommeunzombiedansla

maisondepuismardi et, apparemment, tunedorsplusdepuisplusieursjours.Voilà.Tuvoisquelqu’un?Tusorsendoucepourleretrouver?

Ilalamâchoirecrispée.–Non.–Non,répète-t-il.–Oui,Reed.Non.Jenesorsavecpersonne,ok?Etmêmesic’étaitle

cas,çaneteregardepas.– Tout ce que tu fais me regarde. Lemoindre de tesmouvements

m’affecte,moietmafamille.–Ouah!Çadoitêtrechouettedevivredansunmondeoùtouttourne

autourdesoi.–Qu’est-cequetuas,alors?demande-t-il.Tun’espluslamême.–Jenesuisplusmoi-même?Commesitumeconnaissaisassezpour

devinerça.Jefaislamoue.Jevaistedire,jeteraconteraitousmessecretssitumediscequetu

fousdehorstouteslesnuitsetpourquoiturevienscouvertdecoupuresetdebleus.

Sonregardfrémit.–Ouais.C’estbiencequejecroyais.Jecroiselesbrasenessayantdecontenirunbâillement.

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Reed fixe le tableau de bord d’un air irrité. Ses grandes mains secrispentsurlevolant.

Ilmeconduittousles joursauboulotàcinqheuresetdemie,puisilcontinuejusqu’àl’écolepoursonentraînementdefootballquidébuteàsixheures.Eastonfaitpartiedel’équipe,luiaussi,maisilyvadesoncôté.Jepense que c’est parce que Reed veut passer du temps seul avec moi.Commeça,ilpeutm’interroger,commeillefaitsansarrêtdepuisquecesconduitesennuyeusesontdébuté.

–Tunevaspaspartir,n’est-cepas?Il y a comme une note de défaite dans sa voix, en plus de la dose

habituelledecolère.–Nan.Jeneparsnullepart.Ilmetsonclignotantpoursegarerets’arrêtedevantlaboulangerie.– Quoi ? Jemurmure, lorsque ses yeux bleus perçants se tournent

versmoi.Seslèvressecrispent.–Lematch,cesoir.–Ehbienquoi?L’horloge sur le tableau de bord indique cinq heures vingt-huit. Le

soleiln’estpasencore levé,mais levoletde ladevanturedeLaBaguetteFrançaiseestrelevé.Lucyestdéjàlà,quim’attend.

–Monpaternelveutquetuviennes.La«douleurRoyal»seréveilleentremesépaules.–Tantmieuxpourlui.Reed me regarde comme s’il avait un mal de chien de ne pas

m’étrangler.–Tuviensaumatch.–Oublie.Jen’aimepaslefootball.Enplus,j’aidutravail.Jemepencheverslapoignéedelaportière,maisilbonditàtraversle

siège et m’attrape la main. Une vague de chaleur envahit mes doigts,descend le long demes bras jusqu’àmon entrejambe. J’ordonne àmoncorps, ce traître, de se lever et jem’efforce de respirer dans ce parfum

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masculin, épicé, qui chatouillemesnarines. Pourquoi est-ce qu’il sent sibon?

–Jemefichedecequetuaimesoupas.Jesaisquetusorsàdix-neufheures.Amène-toiàlademie.Tuviens.

Savoixestsourde,imprégnéede…cen’estplusdelacolère,elleestlourdede…jenesaispasquoi.Toutcequejesais,c’estqu’ilesttropprèsde moi pour que je me sente à l’aise, et que mon cœur batdangereusementvite.

– Jenevaispasaller àunde ces stupidesmatchsde football pourvousencourager,toiettesamisdébiles!

Jehurle,enrepoussantsamain,cequimefaitfrissonneruninstant.ÀCallumdesedémerderavecça.

JemeglissehorsduSUV, je claque laportièreet jemedépêchedetraverserletrottoirsombredevantlaboulangerie.

J’arriveenclassejusteavantlapremièresonnerie.J’ai justeletempsde faireunarrêt rapide aux toilettes pour enfilermonuniformed’AstorPark avant d’assister àmes cours dumatin tout en luttant pour ne pasm’endormir.Audéjeuner,j’avaletellementdecaféqueValdoitm’arrêter,maisaumoinsjemesensmieux.

Jem’assiedsàcôtéd’Eastonencoursdechimie.Jelesalueavecunecertaineréticence.

–Tuasronfléencoursd’anglais,cematin,dit-ilavecunsourire.–Pasdutout.J’étaisparfaitementréveillée.Vraiment?Àprésent,jen’ensuisplussisûre.Eastonouvredegrandsyeux.–Aïe,frangine.Tutravaillestropdur.Jemefaisdusoucipourtoi.Moiaussi,j’ouvredegrandsyeux.JesaisquelesfrèresRoyalnesont

pascontentsquejetravaille.Callumnonplusn’apasappréciéquandjeleluiaidit.Ilainsistépourquejemeconcentresurmesrésultatsscolaires,sansmedisperser,maisjen’aipaschangéd’avis.Lorsquejeluiaiexpliquéqu’avoirunboulotétaitimportantpourmoi,etquej’avaisbesoind’autrechosequedel’écolepouroccupermontemps,ilalâchél’affaire.

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Oudumoinsc’estcequejecroyais.Cen’estquequandlaclochedemondernier coursde la journée retentit que je réalise queCallum s’estservidesonpouvoirpourmejouerundesestours.

Unegrande femmegracieusem’abordequand jesorsde laclassedemathématiques.Ellebougecommeunedanseuse,et jenesuisdoncpassurprisequandelleseprésentecommel’entraîneurdel’équipededanse.

–BonjourElla,ditmadameKelley,enm’observantintensément.Tontuteurm’aditquetudansesdepuistonenfance.Quelgenredecoursas-tusuivi?

Jesuistrèsgênée.Jemens.– Je n’ai pas vraiment eu de formation. Je ne sais pas pourquoi

monsieurRoyalvousaditça.Jecroisqu’ellelitparfaitementenmoi,parcequ’ellehausseunsourcil.– Pourquoinemelaisses-tupas jugerparmoi-même?Tuvasvenir

faireunessaiaprèstescourscesoir.Unealarmeretentitdansmatête.Quoi?Pasquestion.Jeneveuxpas

rejoindre l’équipededanse.Danser, c’est justeunpasse-tempsà la con.Et… oh merde, est-ce que Savannah ne m’a pas dit que Jordan étaitcapitainedel’équipe?Ducoup,jeneveuxvraimentplusessayer.

–Jetravailleaprèsl’école,dis-jesèchement.–Tutravailles?Madame Kelley prononce ce mot comme si ce concept lui était

inconnu.Maisjesupposequ’avecmonboulotàmi-temps,jefaispartiedelaminoritéàAstorPark.

–Àquelleheure?–Troisheuresetdemie.Ellefroncelessourcils.–Bon,moncoursneseterminepasavantquatreheures.Humm.Elleréfléchit.– Tu sais quoi, ma capitaine va prendre le relais. Carrington sait

parfaitementcequenousrecherchons.Tupeuxluimontrercequetusaisfaireàtroisheures,cequitelaisselargementletempsd’alleràtontravail.

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Mapaniqueestmultipliéepartrois.JevaispasseruneauditiondevantJordan?Plutôtcrever.

MadameKelleyremarquemonembarras.–MonsieurRoyaletmoicomptonssurtaprésence,Ella.Chaqueélève

d’Astor Park est sollicité pour apporter sa contribution à l’école. Uneactivité extrascolaire sera une façon saine et productive d’occuper tontemps.

FichuCallum.Lefaitqu’elleutiliseexactementlatournuredephraseque j’avaisemployéeavec lui– occupermon temps–meconfirmequec’estbienluiquisecachederrièretoutça.

– Passe au gymnase après ton dernier cours. Tu peux mettre tesvêtementsd’éducationphysique.

Elle me tapote le bras et disparaît avant que j’aie le temps deprotester.

Ungémissementmontedemagorge,mais jeparviens à le réfréner.Lesmembresde la familleRoyal sontvraimentcapablesde tout. Jen’aiaucune envie de faire partie de l’équipe de danse, mais je saispertinemmentquesijenemepointepasàcetessai,madameKelleyvaenréférer à Callum. Et que s’il est suffisamment en colère, il pourrait trèsbienmeforceràquittermonboulot.Oupire,l’écolepourraitdéciderquejen’airiende«spécial»àoffrir,etmonsieurBeringermejetteradehors,cequineplairavraimentpasàCallum.

Ethonnêtement,çanemeplairaitpasnonplus.Cetteécoleestàdesannées-lumière des lycées publics que j’ai fréquentés, du point de vueacadémique.

Je n’arrive absolument pas à me concentrer pendant mon derniercours. L’idée d’avoir à faire cet essai me remplit d’effroi, et quand jetraverselapelouseSudaprèslasonnerie,j’ail’impressiondeparticiperàunmarathon.J’auraisbienaimédemanderàValcommentfairepourm’ensortir,vuqu’elleestuneexcellentedanseuseetquepersonnenel’aforcéeàfaireunessai.

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Lorsque jepénètredans levestiairedes filles, il estvide,mais il yauneboîterectangulaireposéesurlelongbancverni,entrelesrangéesdecasiers.

ELLAest inscrit sur le couvercleetune feuilledepapierestpliéeendeuxàcôtédemonnom.

Monventre senoue.Lesmains tremblantes, j’arrache lepapier et jel’ouvre.

Désoléemachère,Mais nous n’acceptons pas les sales strip-teaseuses dans

l’équipe. Toutefois, je suis sûre que le club Excalibur, en ville,seraitravidetefairefaireunessai.Enfait, jecroistellemententoiquejet’aimêmeachetéunetenuepourtonaudition.Leclubest situé au croisement de l’avenue Ordure et de l’avenueCaniveau.

Bonnechance!Jordan

Elle a griffonné son nom de façon toute féminine, et la jubilationtransparaît derrière chaque lettre. Mes mains tremblent encore pluslorsquej’ouvrelaboîteetquejesoulèvelepapierdesoie.Quandjevoiscequisecacheàl’intérieur,lahontemenouel’estomac.

La boîte contient uneminuscule culotte rouge, des stilettos de 12,5centimètresdehautetunsoutien-gorgeendentellerougeavecdesglandsnoirs.Cettelingerieestmocheetdemauvaisgoût,elleneressemblepasdutoutàcequejeportaischezMissCandy,àKirkwood.

JemedemandequelfrèreRoyalleuraparlédemonboulotdestrip-teaseuse.Callumadûseconfierà ses fils,alors lequelaparlé?Reed?Easton?Jepariequec’estReed.

Un nouveau sentiment éclipsema honte. C’est de la rage. Une ragefroide, qui déferle en moi et descend jusqu’au bout de mes doigts en

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produisant des picotements. J’en aimarre de tout ça. J’en aimarre desjugements,desinsultesetdesmoqueries.JechiffonnelemotdeJordanetle lance à travers la pièce. Puis je fais demi-tour et jemedirige vers lasortie.Àmi-chemin,jemefige.Monregards’arrêtesurlessous-vêtementsmiteuxsurlebanc.

Voussavezquoi?Ellespensentquejesuisunemoins-que-rien?Jevaisleurmontrerce

quec’est.Peut-être est-ce la colère, ou la frustration, ou ce sentiment

d’impuissance dans ma poitrine, mais je ne contrôle plus mon proprecorps.Jeretiremesvêtementscommesij’étaisenpiloteautomatique.Jesuis tellement furieuse que je peux sentir ma colère. J’en bavelittéralement. Seigneur, j’écume. J’enfile les oripeaux de dentelle, je lesremontesurmeshanches,jemetslesoutien-gorgeenplaceetjemedirigeverslaporte.Pascellequimèneàl’extérieur,maiscellequiouvresurlegymnase.

Je laisse les stilettos sur le banc, je vais avoir besoin de tout monéquilibre.

Mes pieds nus frappent le sol. La colère guide chacun de mes pas,ainsiqu’unsentimentd’injustice.Cesgensnemeconnaissentpas.Ilsn’ontpas ledroitdeme juger.J’ouvre laporteengrandet jepénètredans legymnase.Latêtehauteetlesmainssurleshanches.

Quelqu’unmeremarqueetpousseuncri.–Bordeldemerde!Unevoixmasculineluiréponddepuisl’autreboutdugymnase,làoù

lacloisonquiséparelespoidsetlematérield’exercicesausolduresteduterrainaétéenlevée.

Un bruit métallique résonne dans le gymnase, comme si quelqu’unavaitlaissétomberdeshaltères.

Jeralentis.Toutel’équipedefootestlà,quisoulèvedespoids.Jejetteuncoupd’œilrapidedansleurdirectionetjesensmesjouesquiprennent

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feu.Chaquepaired’yeuxmasculinsmedéshabille.Toutes lesmâchoiressontgrandesouvertes.Saufune.Uneseuleresteparfaitementclose,etlesyeuxbleusdefeudeReedmetranspercent.

Jedétourneleregardetjemedirigeverslegroupedefillesquifontdesétirementssurunepiledetapisbleus.Jememetsàroulerunpeudeshanches.Elless’arrêtenttoutesaubeaumilieudeleurétirement,lesyeuxécarquillés.

Lasurprise,surlevisagedeJordan,disparaîtrapidementetsemueeninquiétude. Quand elle croise mon regard, je jure qu’elle se met àtrembler. La seconde suivante, elle se relève et croise les bras sur sapoitrine.

Elle porte un short et un débardeur moulants. Elle a relevé sescheveux noirs en queue-de-cheval. Son corps est long et tonique. Etmusclé.Maislemienaussi.

–Tun’asaucunedignité,n’est-cepas?Ellesouritd’unairsatisfait.Jem’arrête devant elle. Je ne dis pas unmot. Toutes les personnes

présentesnousregardent.Non,ellesmeregardent.Jesuisàmoitiénue,etjesaisquejesuisbelle,mêmedanscecostumeminable.Jen’aipeut-êtrepasdesparentsmilliardairescommetouscesmômes,mais j’aihéritéducorpsdemamère.

Cesfilleslesavent.Uncertainnombredecoupsd’œilenvieuxcroisentmoncheminavantdeserenfrogner.

–Qu’est-cequetuveux?medemandeJordan.Jemefichedecequ’aditmadameKelley.Tuneferaspasd’essai.

– Non ? (Je simule un regard innocent.) Oh, j’en avais tellementenvie.

–Ehbien,çan’arriverapas.Jeluilanceunsourire.–C’esttropdommage.Jemouraisd’enviedetemontrercommenton

faitdanslesbas-fonds.Maisjesupposequejepeuxencore.

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Avantqu’ellepuisserépondre,jerepliemonbrasetjeluibalanceuncoupdepoingdanslafigure.

Immédiatement, c’est la panique. La tête de Jordan recule sous lechoc, et son cri dedouleur seperddans leshuéesmasculines. L’undesgarçonss’écrie«uncombatsingulier!»,maisjen’aipasletempsdevoirquic’estparcequeJordansejettesurmoi.

La chienne, elle est costaude.Nous roulons sur les tapis, et soudainelleest surmoi,elle lève lepoing.J’esquiveet jenous fais roulersur lecôtéenluidonnantuncoupdecoudedansleventreavantd’attrapersaqueue-de-cheval et de tirer dessus de toutes mes forces. Ma vision esttroublée. Je luibalanceunautrecoupsur la joue,etelle répondenmelacérantlebrasgaucheavecsesongles.

–Lâche-moi,espècedesalepute,hurle-t-elle.J’ignoreladouleurquimontedemonbrasetjelèvelepoing.–Essaiedem’enempêcher.Je lâche le coup, mais avant de pouvoir atteindre sa petite gueule

suffisante,jesuissoulevéedanslesairs.Des bras musclés m’enserrent la poitrine et m’entraînent loin de

Jordan.Jemedébatsentrelesbrasdemonravisseur.–Lâche-moi!Il gronde à mon oreille. Je n’ai pas besoin de me retourner pour

comprendrequec’estReed.–Calme-toi,putain.Àunmètredelà,lesamiesdeJordanl’aidentàserelever.Elletouchesajouetuméfiéeetmeregardefixement.Ellesembleprête

àrecommencer,maisSheahetRachellaretiennent.Et l’adrénalinequi couledansmesveinesme fait sautiller surplace.

Maisjesaisquejesuissurlepointdem’écrouler.Jecommencedéjààmesentir faibleetramollo, tout lehautdemoncorpstrembledans lesbrasdeReed.

–Laisse-la-moi,Reed,hurleJordan.

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Sescheveuxontglissédesaqueue-de-chevalettombentsursesyeuxfous.Unhématomeestentraind’apparaîtresursapommette.

–Cetteputemériteun…–Çasuffit!Il lui coupe violemment la parole. Son expressionmenaçante se fait

plus hésitante lorsque Reedme relâche. Il enlève son tee-shirt plein desueur,etlamoitiédesfillessemettentàreluquersesabdospendantquel’autremoitiécontinueàmejeterdesregardsméprisants.

Reedmetendsontee-shirt.–Enfileça.Je ne réfléchis pas à deux fois. Je glissema tête dans son tee-shirt.

Quandelleressortdel’encolure,Jordanmelancedesregardsassassins.– Maintenant, fous le camp ! aboieReed.Habille-toi et rentre à la

maison.Voilà qu’un homme d’une trentaine d’années à la calvitie naissante

s’avance dans la salle. Il porte un uniforme d’entraîneur et un siffletautourducou,maisjenesaispassic’estl’entraîneurenchef,parcequej’ai déjà aperçu Easton avec le coach Lewis. Ce doit être l’entraîneuradjoint,ouuntrucdugenre.Ilal’airlivide.

– Ces filles ne vont nulle part, sauf dans le bureau du directeur,annonce-t-il.

L’airennuyé,Reedsetourneversletype.–Non,masœurrentreàlamaison.Jordan,elle,peutallerlàoùvous

voulez.–Reed,cen’estpastoiquidécides.Reedsembleimpatient.– C’est fini.Terminé.Elles se sontcalmées. (Ilnous jetteunregard

acéré.)N’est-cepas?Jehochelatête.Jordanfaitpareil.–Donc,nefaisonspasperdresontempsàBeringer.Reed a un ton de voix sans appel, puissant, avec un soupçon

d’amusement, comme s’il prenait son pied à donner des ordres à cet

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hommeplusâgé.– Parce que nous savons pertinemment tous les deux qu’il ne fera

rien.MonpèrelepaieraetEllanerécolterariend’autrequ’unetapesurlamain.LepèredeJordanferalamêmechose.

L’entraîneurserrelesdents,maisilsaitqueReedaraison,parcequ’ilnediscutepas.Aprèsunlongmoment,ilseretourneetsouffledanssonsifflet.Lesonstridentnousfaittoussursauter.

–Jenevousvoispasvouslever,Mesdemoiselles,lance-t-ilensuite.Les joueurs qui nous encourageaient à nous battre se dépêchent de

retourneràleursbarresd’exercice,commes’ilsavaientlefeuaucul.Reedresteavecmoi.– Va-t’en,ordonne-t-il.Nousavonsunmatchcesoir,etmaintenant,

mes gars sont distraits parce que tu es fringuée commeunemoins-que-rien.Fouslecamp!

Ils’éloigne,torsenu.Sondosmusclé luitdans lesoleilcouchantquiinondelapièce.Quelqu’unluipasseunautretee-shirt,ill’enfileenallantvoir son frère. Easton croisemon regard un instant. Son expression estimpossibleàdécrypter,puis ilsetourneversReed,et lesdeuxmembresdelafamilleRoyalsemettentàdiscuteràvoixbasse.

–Salope,siffleunevoix.J’ignoreJordanetjem’éclipse.

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CHAPITRE16

Je n’assiste pas aumatch de football. Rien ne pourrait me forcer àalleraulycéecesoir 1,pasaprèstoutcequis’estpasséaujourd’hui.Jesuistout de même arrivée entière à la boulangerie. Encore écumante aprèsmon combat, je me suis démenée comme une furie dans la petiteboutique. En sortant, Lucym’a fait une réflexion sur la jeunesse, sur savitalité,etm’aexpliquéàquelpointçaluimanquait.J’aifailli luihurlerdessus qu’àmoins d’apprécier les trous du cul et les garces, elle n’avaitfranchementrienàregretter,avantdemerappelerqu’ilnefallaitpasquejehausselavoixdevantmapatronne.

Je n’arrive toujours pas à réaliser que j’ai agressé physiquementJordan Carrington. Pourtant, je serais prête à recommencer. Sans lamoindrehésitation.Lasalopel’avaitbiencherché.

Cesoir, laseulechosedont j’aienvie,c’estdemeplanquerdansmachambreenfaisantcommesilerestedumonden’existaitpas.CommesilesRoyalet leursamis snobinardsn’existaientpas.Pourtant,malgrémasolitude volontaire, je ne peux m’empêcher d’allumer la radio et dechercherunestationlocalequidiffuselematch.

Bien entendu, on ne parle que des frères Royal. Reed défonce unquaterback de l’équipe adverse. Easton prend un coup qui fait gémir lecommentateur:

–Alorsça,c’estunchoc!

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– Ils vont sentir leur douleur un peu plus tard dans la soirée, cesdeux-là.

L’autrecommentateurapprouve.C’estAstorParkquigagne.JemurmureironiquementAllezl’équipe,en

éteignantlaradio.Je faismes devoirs pourme distraire,mais je suis interrompue par

l’arrivéed’un textodeValérie.Ellem’annoncequ’il yaune fête ce soir,chezuncertainWade.Etelleproposedevenirchezellepourdansertoutelanuit,àlaplace.Jedéclinel’invitation.Jenesuispasd’humeuràfairecommesi toutallaitbiendansmavie. Jedétestecetteécole. Jedétestecesgens,exceptéValérie,mais jene suismêmepas sûrequemonamiesingulière,sipleined’énergie,suffiseàmefairesupportercettetorture.JefinispardescendreàlacuisineoùjeretrouveBrookeentraindesiroterunverredevin.Elleporteuneroberougesoyeuse,dessandalesàtalonshauts,etelleal’airimpatiente.

Jetenteunsalut.Ellehochelatête.– Toutvabien? je luidemandeenattrapantunsachetdechipsde

maïsdansunplacard.Et je reste plantée là, mal à l’aise d’être contrainte d’engager la

conversationavecelle.– Callumestenretard,m’explique-t-elled’unevoix tendue.Ondoit

prendrel’avionpourallerdîneràManhattancesoiretiln’esttoujourspasrentré.

–Oh!Ah!Jesuisdésolée.Ilsprennentl’avionpourManhattanjustepourallerdîner?Quidonc

faitça?–Jesuiscertainequ’ilnevapastarder.Ilaprobablementétéretenu

aubureau.Ellerenifle.– Bien sûr qu’il a été retenu au bureau. Il vit pratiquement tout le

tempslà-bas,bordel,aucasoùtun’auraispasremarqué.

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Son juronme fait sursauter. L’expression sur son visage se fait plusdoucequandBrookes’aperçoitdemagêne.

– Je suis désolée, mon chou. Oublie. Je suis super-irritableaujourd’hui.

Ellesourit,maissesyeuxrestentdemarbre.–Pourquoiest-cequetunemetiendraispascompagniependantque

jel’attends?Commentças’estpasséàl’écoleaujourd’hui?–Questionsuivante!En réponse, j’obtiens un véritable éclat de rire. Les yeux brillants,

Brooketapesurlachaisevideàcôtéd’elle.–Assieds-toietracontetoutçaàBrooke.Jem’assieds,sansvraimentsavoirpourquoi.Jedéglutis,–Riendespécial.J’aisimplementfiléuneracléeàquelqu’un.Elleaunpetitrirechoqué.–Oh,Seigneur!Etjenesaispaspourquoi,maisjeluidéballetoutel’histoire.Lafaçon

dont Jordan m’a humiliée. Comment j’ai retourné la farce à monavantage. Comment j’ai foutu mon poing sur la figure de cette garce.Lorsque j’ai terminé, je suis toute surprisede voirBrookeme tapoter lebras.

– Tu avais parfaitement le droit de te mettre en rogne, dit-ellefermement.Ettuasbienfaitderemettrecettesalopeàsaplace.

JemedemandesiCallumauraitlamêmeréactiondefiertéétranges’ilsavaitcequej’aifaitàJordan.Çam’étonnerait.

–Jemesensmal,j’avoue.Habituellementjenesuispasquelqu’undeviolent.

Brookehausselesépaules.–Parfois,c’estnécessairedefaireunedémonstrationdeforce,surtout

dans ce milieu. Dans le monde des Royal. Tu penses que la filleCarringtonsera la seuleà te reprocher làd’où tuviens?Sûrementpas.

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Résigne-toi à avoir des ennemis, Ella. Beaucoup d’ennemis. La familleRoyalesttrèspuissante,ettuenfaispartiedésormais.

–Tuvasforcémentinspirerdelahaineetdelajalousiechezceuxquit’entourent.

Jememordsleslèvres.–JenesuispasunevraieRoyal.Pasparlesang.–Non,maistuesuneO’Halloranparlesang.Ellesourit.– Crois-moi, c’est plutôt séduisant. Ton père était un homme très

riche.Callumaussi est unhomme très riche. Par conséquent, tu es unefilletrès,trèsriche.

Brookeprenddélicatementuneautregorgéedevin.–Ilvafalloirt’habituerauxcommérages,monchou.Prépare-toiàce

que,lorsquetuentresdansunepièce,desmurmuress’élèventautourdetoi,quitedisentquetun’asrienàfairelà.Habitue-toi,etneleslaissepast’atteindre.Rendscouppourcoup.Nesoispasfaible.

Ondiraitunchefdeguerrequiprononceundiscourspourgalvanisersestroupesavantlabataille.Jenesaispassijedoissuivresonconseiloupas. Je ne peux nier que je me sens mal d’avoir rectifié le portrait deJordan.

Nousentendonss’ouvrirlaported’entrée,etpeuaprès,Callumentredanslacuisine.Ilporteuncostumechicetilal’aircrevé.

– Nedis rien, ordonne-t-il avantmêmequeBrooke ait eu le tempsd’ouvrirlabouche.(Puisilsembleseradoucirunpeu.)Jesuisdésolépourleretard.Leconseild’administrationadécidédeseréuniraumomentoùje partais. Mais laisse-moi le temps de me changer, et Durand nousdéposera au terrain d’aviation. Salut Ella. Comment ça s’est passé àl’école?

–Super.(Jemensensautantdutabouret.J’éviteleregardamusédeBrooke.)Amusez-vousbien.Jevaisfinirmesdevoirs.

JesorsprécipitammentdelacuisineavantqueCallumcomprennequejenesuispasalléeaumatchauquelilvoulaitquej’assiste.Jecoursvers

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ma chambre de princesse et je passe les deux heures suivantes àm’arracherlescheveuxsurd’horribleséquationsmathématiques.Ilestunpeu plus de onze heures du soir quand ma porte s’ouvre violemment.Eastonentresansfrapper.

–Maispourquoiest-cequetunefrappespas,bordel?–Noussommesenfamille.Onnefrappepasenfamille.Sescheveuxnoirssonthumidescommes’ilsortaitdeladouche,etil

porteunbasde joggingetun tee-shirtmoulant. Ila l’airenpétard. IlaunebouteilledeJackDanielsàlamain.

–Qu’est-cequetuveux?–Tun’espasvenueaumatch.–Etalors?–Reedt’avaitditdevenir.–Etalors?jerépète.Eastonfroncelessourcils.Ilfaitunpasdansmadirection.– Alors, il faut que tu préserves les apparences. Papa veut que tu

t’impliques dans cette merde. Il te protégera aussi longtemps que tujoueraslejeu.

– Je n’aime pas lesmatchs. Tes frères et toi ne voulez pas demaprésenceauprèsdevous.Moinonplus.Àquoibonfairesemblant?

–Naan,tuasenviedenouscoller.Ilserapprocheencoreetcollesabouchecontremonoreille.Jesens

son souffledansmon cou,mais jene senspas l’odeurde l’alcool. Il n’adoncpasencoretapédanssabouteille.

–Etpeut-êtrequemoi,j’aienviedetecoller.Jeplisselespaupières.–Qu’est-cequetufaisdansmachambre,Easton?–Jem’emmerdeettueslaseuleprésentedanscettemaison.Il s’écroule sur mon lit, se rejette en arrière en s’appuyant sur ses

coudesetposelabouteilledewhiskyàcôtédelui.–Valériem’aditqu’ilyavaitunefêteaprèslematch.Tuauraispuy

aller.

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En grimaçant, il soulève son tee-shirt et me montre un vilainhématomesursescôtes.

–J’aipasséunsalequartd’heuresurleterrain.Jen’aipasenviedesortir.

Jesuispleinedesuspicion.–OùestReed?–Àlafête.Commelesjumeaux.Ilhausselesépaules.–Commejetel’aidit,onn’estquetouslesdeux.–J’étaissurlepointdemecoucher.Sonregards’attardesurmesjambesnueset jesaisqu’ilremarquela

façondontmontee-shirtmoulemapoitrine.Sansaucuncommentaire,ilremonteàlatêtedemonlitetposesatêtesurmesoreillers.Jeserrelesdentslorsqu’ilattrapelatélécommandesurmatabledenuit,qu’ilallumelatéléetsemetàzapper.

–Sors,jeveuxdormir.– Ilest trop tôtpoursecoucher.Arrêtede jouer lesgarcesetviens

t’asseoir.Bizarrement, il n’y a pas trace de malice dans sa voix. Juste de

l’humour.Maisjesuisencoreméfiante.Jem’assiedsaussiloindeluiquepossible,surmonmatelas.

En souriant, Easton détaille ma chambre à coucher toute rose etlance:

–Monpèreestvraimentunnaze,hein?Jenepeuxm’empêcherdeluirendresonsourire.–Jesupposequ’ilnesaitpascommentonélèvelesfilles.–Non,maislesgarçonsnonplus,murmure-t-ildansunsouffle.–Aïe,etc’estlàquetutemetsàtoutmedéballersurtonpère?Papa

n’étaitjamaislà,papam’ignorait,papanem’ajamaisaimé?Ilécarquillelesyeuxetignoremessarcasmes.–Monfrèreestfurieuxcontretoi.–Tonfrèreesttoutletempsenpétard.

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Eastonne répondpas. Ilporte labouteilleà ses lèvres.Macuriositéprendledessus.

–Trèsbien,jemerends.Pourquoiest-ilenrogne?–Parcequetut’esbattueavecJordan.–Ellel’abiencherché.Ilreprendunegorgée.–Ouais,c’estvrai.Messourcilsmontentenflèche.–Comment,pasderemontrances?Pasde«tusalislebeaunomde

Royal,Ella.Tuesunehontepournoustous»?Ilesquisseunsourire.–Naan.Ilsouritànouveau,avecespièglerie,cettefois.– C’était le spectacle le plus torride auquel j’ai assisté depuis

longtemps.Vousvoirvousroulerparterrecommeça…Tum’asoffertdequoialimentermesfantasmespendantdesannées.

–Çacraint.Jeneveuxriensavoirdetesfantasmes.–Biensûrquesi.Ilavaleencoreunegorgéeetmetendlabouteille.–Tuenveux?–Nonmerci.–Bordeldemerde,arrêtedefaireladifficile.Laisse-toivivreunpeu.

(Etilpousselabouteilledansmamain.)Bois!Je bois. Je ne sais pas vraiment pourquoi je fais ça. Peut-être parce

que je veux en ressentir les effets. Peut-être parce que, depuis monarrivée,c’est lapremière foisqu’unautremembrede la familleRoyal,àpartCallum,estsympaavecmoi.

Lesyeuxd’Eastonbrillentde contentementquand j’avaleunebonnelampée.Ilpasseunemaindanssescheveuxetsursaute.Jeleplains.C’estun sacré hématome. Nous restons assis en silence pendant un certaintempsennousrepassantlabouteille.J’arrêtedeboirequandjesensque

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jesuisunpeupompette.Ilmelanceuncoupdecoudedanslescôtes,toutengardantlesyeuxrivéssurl’écrandetélé.

–Tuneboispasassez.–Jen’enveuxplus.Jemepencheenarrièreetjefermelesyeux.–Jen’aimepasêtrebourrée.Jem’arrêtequandjesuisgaie.–Tun’asjamaisétéivre?–Si.Ettoi?–Non,répond-ilinnocemment.Jerenifle.–Hum,hum.Tuétaissansdoutedéjàalcooliqueàdixans.Àl’instantmêmeoùjeprononcecesmots,jememetsàsoupirer.–Quoi?Ilmeregardecurieusement.Ilestbeaucoupplusséduisantquandilne

faitpaslamoueouqu’ilnesouritpasaveccepetitairsûrdelui.–Rien,justeunsouvenirdébile.Jeferaisbiendechangerdesujet.Engénéral,j’évitedeparlerdemon

passé.Maiscesouvenirm’obsèdeàprésent,etjenepeuxpasm’empêcherderigoler.C’estunpeucompliqué,enfait.

–Tum’intrigues,àprésent.– J’avais dix ans la première fois que je me suis tapé une cuite,

j’avoue.–Vraiment?–Ouais.Mamèresortaitaveccetype,Léo.Quiavaitdesantécédentscriminels,maisça,jeneledispasàEaston.– Nous vivions à Chicago à l’époque, et un week-end, il nous a

emmenéesjouerauCubs.Ilbuvaitdelabière,etjen’aipasarrêtédeluiendemander.Maismamèrerépondaitqu’iln’enétaitpasquestion,etluiqu’unepetitegorgéenepouvaitpasmefairedemal.

Jefermelesyeuxetjemereplongedanscettechaudejournéedejuin.– Donc, j’ai essayé et j’ai trouvé ça immonde. Léo a trouvé très

marrante la tête que j’ai faite. Du coup, chaque fois que maman nous

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tournaitledos,ilmepassaitsabouteilleetpissaitdanssonfrocderireenme regardant faire la grimace. Je n’ai pas dû boire plus qu’un quart decettebouteille,maisj’étaiscomplètementsaoule.

Eastonéclatede rire. Jeme rends compteque c’est lapremière foisquej’entendsunvéritableriredanslepalaisRoyal.

–Tamèreaflippé?– Oh mon Dieu, oui, tu aurais dû voir ça. Je n’arrêtais pas de

trébucherdansl’allée.Unepetitefillededixansquibégayaitcommeunepoivrote:«Tutun’veuxpaaasm’ach’terdehotdooog?»

Touslesdeux,nousrionstellementquelematelassemetàtremblersousnous.C’estagréable.Maishélas,çanedurepaslongtemps.

Eastonsetaitsoudainunmoment,avantdesetournerversmoi.–Tuétaisvraimentstrip-teaseuse?Jemefige.J’ailemot«non»surleboutdelalangue.Maisqu’est-ce

queçapeutbienfaire,àprésent?Enclasse,touslesmômesvontraconterquej’aifaitdustrip-tease,sanssedemandersic’estvraioupas.

Alorsjehochelatête.Ilal’airimpressionné.–C’estunvraitrucdedureàcuire.–Non,pasdutout.Il se tourne, et son épaule frôle la mienne. Je ne sais pas si c’est

intentionnel,maisquandsonvisageseretrouveen facedumien, jesaisqu’ilestparfaitementconscientducontactentrenosdeuxcorps.

–Tusais,tuesvraimentbandantequandtunerâlespas.Ilalesyeuxfixéssurmabouche.Jesuis tétanisée,maiscen’estpas lapeurqui faitbattremoncœur.

Lesyeuxd’Eastonbrillentdedésir. Ilsont lamêmenuancequeceuxdeReed.

–Tudevraisyalleràprésent,j’aienviedemecoucher.–Non,tun’enaspasenvie.Ilaraison.Jen’enaipasenvie.Mespenséessontconfuses.Jepenseà

Reed,àsamâchoirepuissanteetàsonvisageparfait.Eastona lamêmemâchoire.Avantdepouvoirmeretenir, je la toucheduboutdesdoigts.

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Un bruit étouffé s’échappe de sa bouche. Sa barbe gratte. Je suisstupéfaitelorsquejesensmonterunevaguedechaleurentremesjambes.

–Ilafalluquetuviennespourtoutfoutreenl’air,murmure-t-il.Etseslèvressepressentcontrelesmiennes.Mon pouls s’accélère sous l’impulsion de l’alcool que j’ai ingéré. En

retenantmarespiration,jedétachemeslèvresdessiennesavantquenotrebaisern’ailleplusloin.

Jesouffleunboncoup,prêteàfairecommes’ilnes’étaitrienpassé,maisj’aisous-estimélesex-appeald’EastonRoyal.Ilestsplendide.Ilaleregard lourd, lamâchoirebiendessinée, commeson frère.Son imbéciledefrère.Pourquoiest-cequejenepeuxpasm’ôterReeddelatête?

Easton passe ses doigts dans mes cheveux et m’attire à lui, denouveau.Ses lèvrescaressent lesmiennes,brièvement,avantdereculer.Sonregardfixeestunevéritableinvitation.

J’effleuresajoueet jefermelesyeux.C’estunsignalclair.Jenemerendais pas compte à quel point j’avais envie d’un contact humain. Leslèvres tièdes d’un garçon sur les miennes, ses mains qui caressent mescheveux.Jesuispeut-êtrevierge,maisj’aidéjàflirtéàdroiteàgauche,etmoncorpsserappellecombienc’estbon.Jeprendsappuisurlapoitrined’Easton,nosbouchesserencontrentànouveau.

Lachosedontjemesouviensensuite,c’estqu’ilestsurmoi,etquelepoidsdesoncorpsm’écrasecontrelematelas.Ilremueleshanchesetleplaisirm’envahit,mefaitfrissonnerdedésir.

Easton m’embrasse à nouveau. Profondément et fiévreusement. Salanguepénètredansmaboucheaumomentprécisoùunevoixincréduleaboie:

–Tutefousdemagueule?Eastonetmoinousnousséparonsetnos têtesse tournentenmême

temps vers la porte d’entrée où se tient Reed, qui nous fixe d’un airincrédule.

–Reed,commenceEaston.Maisc’estinutile.Sonfrèrefaitdemi-touretdisparaît.

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Le bruit des pas de Reed est aussi fort que les battements de moncœur.

Àcôtédemoi,Easton,roulesurledos.Ilfixeleplafondetmurmure:–Merde!

1.Littéralement,«Mêmeleschevauxsauvagesnepourraientmetraîner…»enréférenceaumorceaudesRollingStones,«WildHorses».

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CHAPITRE17

Une seconde passe. Deux. Trois. Puis Easton se jette du lit et courtaprèsReed.Jel’entendscrierdanslecouloir,

–J’étaisbourré.Et la brûlure de l’humiliation, une honte comme je n’en ai jamais

ressenti,medévore.Ilm’aembrasséeuniquementparcequ’ilétaitsaoul.–Peuimporte,Easton,tun’enfaisqu’àtatête,commetoujours.Reed semble fatigué, etmon cœur stupide, affamé et solitaire, celui

quiapermisàEastondem’embrasser,souffrepourReed.–Vatefairefoutre,Reed.Tuvoulaisquej’arrêtelesantalgiquesetje

l’ai fait, mais je me suis fait rentrer dedans par unemontagne de 140kilos,mescôtesmefontunmaldechien.C’étaitoubienlabièreoubienl’oxy 1.Tuchoisis.

Lavoixd’Eastondiminuepeuàpeu,etjen’entendspaslaréponsedeReed. Malgré moi, je me lève, je cours à ma porte et je sors dans lecouloir,justeàtempspourlesvoirdisparaîtredanslachambredeReed.Mespiedsnusne fontaucunbruitquand jemedirige sur lapointedespiedsjusqu’àlaporte,àprésentclose.

– Pourquoiest-cequetun’espasrestéà la fête?Abbytecherchaitpartoutaprès lematch, luidemandeEaston.C’étaituncoupfacile,monpote.

Reedrenifle.–C’estpourçaquejesuisici.Jenepeuxpasyretourner.

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–Pourquoies-tusortiavecelle,alors?Jeretiensmonsouffle,parceque j’ai trèsenviedesavoir,moiaussi.

C’estquiexactement,letypedeReed?Ilyaungrandbruit,puisunautrecoup,commesionjetaitquelque

chosesurlemur.–Elle…ellemerappelaitmaman.Douce.Calme.Pascollante.–CommeElla,ditEastonavecunriresarcastique.Unautrecoup,cettefoisplusétouffé.–Hé,tuasfaillimetoucheravecceballon,enfoiré!Etilssemettentàrire,touslesdeux.Est-cequ’ilsrientdemoi?– Ne l’approche pas, East. Tu ne sais pas avec qui elle a traîné,

l’avertitReed.À présent, j’ai l’impression qu’ils jouent au catch, en discutant

négligemmentdemaviesexuelle.– Elle est réellement strip-teaseuse ?demandeEastonauboutd’un

moment.Ellemel’adit,maiselleapumementir.–C’estcequ’aditBrooke,etc’étaitdansledossierdepapa.Brookeleuraditquejefaisaisdustrip-tease?J’aibienfaitdeluifaire

confiance !Etqueveut-ildireenaffirmantqueCallumaundossier surmoi?

–Jenel’aijamaislu.Ilyavaitdesphotos?L’excitationdanslavoixd’Eastonmefaitleverlesyeuxauciel.–Ouais.–Desesstrips?Ilal’airtoujoursplusexcité.– Nan. C’était juste des photos de trucs normaux. Elle a eu trois

boulots l’été dernier. Elle bossait dans un routier le matin, elle étaitvendeuse dans une épicerie l’après-midi et dansait dans une boîte pourmômeslesoir.

–Bordel.C’estcoton.Easton a presque l’air impressionné. Mais pas Reed. Lui a l’air

dégoûté.

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–Commentest-cequeJordanl’aappris?– Undes jumeauxa craché lemorceau,probablementpendantque

quelqu’unluifaisaitunepipe.– C’est Sawyer, alors. Il est incapable de la fermer quand il a une

boucheautourdesaqueue.–C’estvrai.Untiroirclaque.–Tusais,tupourraisl’utiliser.Jeveuxdire,sielletientàtoi,sers-toi

d’elle.Ne la lâchepas.Essaiedesavoircequ’elleveutréellement.Jenesuistoujourspasconvaincuqu’iln’yarienentrepapaetelle.

–Elleaditqu’ellenebaisaitpasaveclui.–Ettul’ascrue?–Peut-êtrebien.L’incrédulitédeReedgagneEaston.–Aveccombiendemecstucroisqu’elleestallée?– Qui sait ? Les croqueuses de diamants de son genre écartent les

jambespourquelquespoignéesdedollars.J’aienviedecrier,jenesuispasunecroqueusedediamants!J’aienvie

de hurler. Et ces enfoirés se trompent totalement sur mes « activitéssexuelles ». Jusqu’à présent, je n’ai jamais taillé une pipe. Sur l’échellegraduéedusexe,jesuisplusprochedeprudequedepro.

– Tu crois qu’elle pourraitm’apprendre quelque chose ? demandeEaston.

–CequeçafaitdechoperuneMST.Maissituveuxlabaiser,vas-y,jem’enfiche.

– Vraiment ? Parce que tu balances ce ballon tellement fort qu’ondiraitqueçatefaitquelquechose.

Lebruits’arrête.–Tuasraison.Çamefaitquelquechose.Mamainglissejusqu’àmagorge.Pom.Pom.Pom.Ilsserenvoientle

ballon.Oubienc’estl’espoirquigonflemoncœur.

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–Jem’inquiètepourtoi.J’aipeurquetusouffres,quetuchopesunemaladie,jenesaispas.Mais,celadit,jemecontrefousd’elle.

Jebaisselesyeuxsurmamain.Jem’attendsàyvoircoulerlesangdelablessurequ’ilvientdem’infliger.Maisiln’yarien.

Monréveilsonneàcinqheures.J’ai les yeux gonflés et j’aimal partout. J’ai un peupleuré avant de

m’endormir,mais cematin, je suis pleined’unenouvelledétermination.InutiledechercheràmefaireaimerdesRoyal,surtoutdeReed.LaveuvedeSteveestunesalope,maisc’estflagrant,alorsaumoinsjesaisàquoim’enteniravecelle.EtplusencoreavecEaston.S’iltentedeseservirdemoi,jemeserviraidelui.

Aprèstout,jen’aiplusaucunsecret.IlssonttousécritsnoirsurblancdanslerapportquedétientCallum.

Jelacemestennisetjejettemonsacàdossurmonépaule.Ilestplusléger de dix mille dollars. J’ai décidé que c’était trop stressant de mebalader avec une telle somme sur moi, alors je les ai planqués sous lelavabodemasalledebains.J’espèrequ’ilssontenlieusûr.

C’estassezdéroutantdeme lever si tôtunsamedimatin,maisLucym’ademandédevenirl’aideravecunecommandedegâteau,etjen’aipaspu refuser. En plus, j’ai besoin de tout le liquide supplémentaire que jepeuxobtenir.

Danslecouloir,j’essaied’êtreaussisilencieusequepossible,afindenepas réveiller les Royal. Je suis tellement concentrée en descendantl’escalier sur la pointe des pieds que je manque tomber à la renverselorsquelavoixgravedeReeds’élèvederrièremoi.

–Oùvas-tu?Hmmm,çaneteregardepas.Jemedisquesijenerépondspas,ilva

rentrerdanssachambre,toutsimplement.–Detoutefaçon,jem’entamponne,finit-ilparmurmurerfaceàmon

silence.

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Aprèsquelaportedesachambres’estrefermée,jemefileunebaffepourm’être encore aliéné quelqu’un d’autre, et jem’enfuis par la ported’entrée.Ilfaitencoresombrequandj’arriveàl’arrêtdubus.Jegrimpeàl’abridupetitcaretjetented’oubliertoutcequinetournepasronddansmavie.

Montalent,sitantestquej’enaieun,cen’estpasladanse.C’estmacapacitéàcroirequedemainserameilleurqu’aujourd’hui.Jenesaispasvraimentd’oùjetienscetoptimisme.Peut-êtredemaman.Quelquepart,en chemin, j’ai commencé à croire que si j’arrivais à dépasser cettemauvaise expérience, cette journée pourrie, le lendemain m’apporteraitquelquechosedemeilleur,depluslumineux,denouveau.

J’y crois encore. Je continue à croire que quelque chose de bonm’attendquelquepart. Il faut justeque jecontinueàavancer jusqu’àcequemon tour arrive, parce que c’est sûr, c’est sûr, rien de tout cela nepourraitarrivers’iln’yavaitpasquelquepartunerécompenseauboutduchemin.

Jeprendsuneprofonde inspiration.Le selde lamerdonneungoûtfrais et acidulé à l’air. Aussi horribles que soient les Royal, aussiépouvantablequesoitDinahO’Halloran,çavamieuxaujourd’huiqu’ilyaune semaine. J’ai un lit bien au chaud, de beaux vêtements, plein denourriture.Jesuisinscritedansuneécolegéniale.J’aiunecopine.

Çavaallermieux.Vraiment.Enarrivantà laboulangerie, jemesensmieuxquetouscesderniers

jours.ÇadoitsevoirparcequeLucymecomplimente.–Tuessuperbecematin.Ah,êtrejeune,denouveau!Lerêve!Elleglousse,avecuneperplexitéfeinte.– Toi aussi, tu es splendide, Luce, je lui réponds en attachantmon

tablier. Et ça sent délicieusement bon. C’est quoi ? je lui demande endésignantdespetitsgâteauxenformededômes.

– Cesontdesmini-painsdesinge.C’estde lapâteàpainparfuméeavecdespetitsboutsdecannelleetmélangéeàducarameletdubeurre.

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Tuenveuxun?Je hoche la tête avec tant d’enthousiasme que je manque me

décrocherlamâchoire.–Jecroisbienquej’aieuunorgasme,rienqu’enlessentant.Lucyéclatederire,sesbouclescourtesgigotentautourdesatête.– Ehbien, prends-enun, et ensuite je vais temontrer comment en

fairequatredouzainesenplus.–Jen’attendsqueça.Les mini-pains de singe rencontrent un véritable succès. Nous les

vendons tous avant huit heures du matin, et Lucy m’expédie dansl’arrière-boutique pour en préparer d’autres. À midi moins le quart,Valériemontre leboutdesonnezet jesuisdetellementbonnehumeurquejelaprendscarrémentdansmesbras.

–Qu’est-cequetufaisici?jeluidemandejoyeusementenlaserrantbienfortavantdelarelâcher.

–Jepassaisdanslecoin.Quoideneuf?ritValérie.Tuasbaisélanuitdernièreouquoi?

–Non,maiscematin,j’aieuunorgasmegrâceàdespâtisseries.Surce,j’attrapeungâteau,toutjustesortidufour,surl’étagèreetje

luitends.Valérieenprendunpetitmorceauet semetàgémirquand lesucre

touchesalangue.–OhmonDieu!–N’est-cepas?jerigole.– Est-ce que Durand vient te chercher, ou bien tu veux que je te

dépose chez toi ? Aujourd’hui, j’ai une voiture ! dit Valérie la bouchepleine.

–Avecplaisir.J’ôtemontablieretjemedépêchederécupérermesaffaires.–Jepeuxyaller,Luce?Ellemefaitsignequeoui,occupéequ’elleestavecunclient.

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LavoituredeValérieestunvieuxmodèleHondaquisembledéplacéaumilieudesMercedes,desLandRoveretdesAudiquisontgaréesdansleparkingextérieur.

–C’estlavoituredelamèredeTam,m’explique-t-elle.J’aiproposédeluifairequelquescourses.

–C’estcool.Timidementjepoursuis:– Callumm’a dit que j’allais avoir une voiture, alors quand elle va

arriver,tupourrasl’emprunterautantquetuvoudras.–Wouah,merci.Tuesvraimentlameilleurecopinequisoit.(Ellerit

etmeregardedanslesyeux).Enfait,jesuispasséevoirsituvoulaissortirquelquepartcesoir.

Mabonnehumeurs’atténuelégèrement.J’espèrequ’ellenevapasmedemanderd’allerdansunefête,parcequel’idéedepasserdesheuresaveclesmômesd’AstorParkendehorsdescoursnem’emballepas.

–Ben,j’aidesdevoirs…Valérietendunemainetmepince.–Ouille,pourquoitufaisça?Jemefrottelebrasengrimaçant.– Fais-moi un peu confiance. Je ne vais pas t’emmener à une fête

d’Astor.Enfin,ilpourrayavoirquelquesmômesquetuconnais,maisc’estunclubenvillequiautoriseparfoisl’entréedesmoinsdevingtetunans,comme ce soir. Il y aura desmômes de partout, pas seulement d’AstorPark.

– Jen’aipasencoredix-huitans. (Je retombesurmonsiège.)Et laseulecarted’identitéquej’aimedonnetrente-quaranteans.

–Çanefaitrien.Tuescanon.Ilstelaisserontentrer,ditValérie,l’airsûred’elle.

Elle avait raison. Ils ne nous demandent pas nos papiers à l’entréequandnousarrivonsauclub,plustardcettenuit-là.

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Le videur braque sa lampe torche sur Valérie, puis surmoi, détaillenoscheveuxcrêpés,nosminirobesmoulantesetnostalonshauts,etnouslaissepasseravecunclind’œil.

L’endroitressembleàunancienentrepôt.Lesbassesfonttremblerlesmursetdes lumières stroboscopiques illuminent lapistededanse.Droitdevant,ilyaunescènesurlaquelledesfillesdansentlascivement.

–Nousallonsdanserlà,cesoir,mecrieValérieàl’oreille.Du regard, je suis la direction de son bras. Au-dessus de la scène,

quatre cages, assez grandes pour contenir quelqu’un, sont suspendues àdifférenteshauteurs.Danschacuned’elles,ilyadesdanseurs.Dansl’une,ungarçonetunefillesetrémoussentl’uncontrel’autre,etdanslestroisautres,ilyaunefilleseule.

–Pourquoi?jedemanded’unairsoupçonneux.–Pourpasserdubontemps.Tammemanque,j’aienviededanseret

dem’amuser.–Onnepeutpasdansersimplementsurscène?Valsecouelatête.–Non.Lamoitiéduplaisirdeladanse,c’estl’appréciationdelafoule.Jeladévisage,stupéfaite.–Çaneteressemblevraimentpas.Elleritensecouantsonnuagedecheveux.– Je ne suis pas une petite souris. J’aime danser etme donner en

spectacleetici,jepeuxlefaire.QuandTamm’aemmenéeici,nousavonsmislefeuàlabaraque.

Ellesemordlalèvreetsonregarddevientunpeuvaguelorsqu’elleseremémorelasuitedelasoiréepasséeavecsonpetitami.Alors,commeça,Valestunpeuexhibitionniste.Quil’auraitcru?Jesupposequecesontlesplusdiscrètesqui lesont.Çanem’a jamaisposédeproblèmededanserdevantdesgens,maisjenesuispasaccroàçacommesemblel’êtreVal.Unefoisquejememetsàdanser,jemeperdsdanslamusiqueetj’oubliecomplètement qu’on me regarde. Peut-être que c’est un réflexe deprotectionquej’aiappristrèstôt,quandjemesuismiseàfairedustrip-

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tease à quinze ans. Mais quelle qu’en soit la raison, quand le rythmem’entre dans la peau, qu’il n’y ait personne ou des centaines despectateurs autour de moi, c’est la musique qui me fait bouger, pas lepublic.

–D’accord.Jesuispartante.Elleal’airravie.–Génial.Unecageoudeux?Siondansaitensemble?Onvaleuren

mettrepleinlavue.Les mecs, chez Miss Candy, adoraient quand deux filles dansaient

ensemble.Exactementcommel’autrejour,lesjoueursdefootballontprisleurpiedennousnousregardantnousbattre,Jordanetmoi.

Valérieapplaudit.–Attends-moiici.Jereviens.Je l’observe qui trotte vers un typedansune cabine. Je pensais que

c’était un DJ, mais en fait, je crois qu’il contrôle l’entrée des cages. Ilsdiscutent,etletypelèveundoigt.Valériesepenchepar-dessuslabarrièreet l’embrasse sur la joue.Une foisqu’elle a réussi à le convaincrequ’onallaitfaireleshow,ellerevientversmoiencourant.

–Encoreunechanson,etc’estànous.Elleattrapedeuxsodassurleplateaud’uneserveusequipassaitparlà

etm’entendun.Valn’estpasvraimentpatiente.Ellesautenerveusementd’unpied sur l’autre.Tape samain contre sa cuisse. Finalement, elle setourneversmoi.

–Pourquoiest-cequeJordanditquetuesunestrip-teaseuse?– Parce que j’en étais une. J’ai fait des strip-teases pour payer les

médicaments de ma mère, et quand elle est morte, j’ai continué pourpouvoirmepayeruntoit.

Elleestbouchebée.–Putaindemerde!Maispourquoitun’espasalléechezquelqu’unde

tafamille?– Je ne savais pas que j’en avais une. Du plus loin que je me

souvienne,iln’yajamaiseuquemamanetmoi.Etaprèssamort,jen’ai

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pas voulu aller en famille d’accueil. J’ai entendu des horreurs sur lesystème,et jemesuisditque j’avaispris soind’elleetdemoidepuis silongtemps,continueràm’occuperdemoipendantencoredeuxans,çanemeposeraitpasdeproblème.

–Ouah.Tuesvraimentbientropimpressionnantepourmoi,déclareVal.

Jerenifle.–Pourquoiça?S’effeuillercontredufric,cen’estpasuntrucqueles

gensadmirenthabituellement.MonespritrepartversReedsanslevouloir.Luinepensevraimentpas

quec’estunecompétencedontjedevraismevanter.–Tuasvraimentducran,ditVal.Etc’estçaquiestadmirable.–Cran?Quiparledecran?–Moi.(Ellesouritetmeprendparlamain.)Cran.Cran.Cran.Jememetsà rire,parcequeValestadorableetque son sourireest

contagieux.Ellem’embarque.–Allons-y.C’estànous.Jelalaissem’entraînerjusqu’enbasdel’escalier.Lecoupleprécédent

estdéjàparti, laportede lacageestgrandeouverte.Nousgrimpons lesmarchesetnousentronsàl’intérieur.Valfermelaportederrièrenous.

–Onvabiensemarrer!hurle-t-ellepourcouvrirlamusique.Etc’estcequenousfaisons.Oncommencepardansercôteàcôte,en

faisantnosproprestrucs.C’estcommelejeuvidéo,maisenlive.Lestypesendessous s’arrêtentdedanser. Ils semettent ànous regarder, et leursregardsadmiratifscommencentàmefairedel’effet,cequejen’auraispascrupossible.J’aidéjàeudesdizainesdemecsquimemataient,maisc’estlapremièrefoisquej’apprécied’êtreadmirée.Jecaressemesflancsetjeglisse sur le sol de la cage. Val se presse contre les barreaux, elle lesenlaceensetordantsurlamusique.

Etlorsquejecommenceàmerelever,jelevois.Reed.Ilestappuyéaubar,unebouteilledebièreàlamain.Ilestbouchebée.Desurprise?De

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désir ? Je n’en suis pas sûre,maismême à cette distance, je ressens lafièvredesonregardposésurmoi.

J’avoue,c’estluiletypeleplusbandantdelaboîte.Ilestplusgrandque presque tout le monde, plus musclé, plus tout. Je ne peuxm’empêcher d’admirer la façon dont son tee-shirt noir moule son torseparfait, et je me mets à sentir des picotements le long de la colonnevertébrale.

J’humecte mes lèvres, je pousse sur mes pieds. Les mains de Valatterrissent autour dema taille. Sur nos talons, nous faisons presque lamêmetaille.Jesenssesseinsquis’enfoncentdansmondos,alorsqu’elleutilisemoncorpscommeunebarrepourréalisersespropresmouvements.

Lesacclamationsdelafouleau-dessousdenousredoublent,maispourmoi,leseulquicompte,c’estReedRoyal.Jeleregarde.

Ilmeregarde.Je suce mon doigt, puis lentement, je le sors de ma bouche. Il ne

baissepaslesyeux.Je glisse mon doigt le long de mon cou, jusqu’au creux entre mes

seins, puis sur mon ventre. Le bruit monte de plus en plus. Ma maindescendencore.LesyeuxdeReedsontfixéssurmoi.Ilremueleslèvres.Ella…Ella…Ella…

Valériem’attrapeparlatailleetposesatêtesurmonépaule.–Lemorceauestterminé.Tuesprête?Jeregardeendirectiondubar,maisReedestparti.Jesecouelatête.

Est-cequej’aiimaginétoutcetruc?Est-cequ’ilétaitvraimentlà?–Ouais,jemarmonne,jesuisprête.Toutmoncorpspalpite.Jenesuispasinexpérimentéeaupointdene

pascomprendrecequisepasseentremescuisses.C’estjusteque…jenesaispassijevaisréussiràmesoulagerenmecaressant.

– Super les filles, vraiment bien, nous crie le videur quand noussortons.Vousavezlacagepourvouscesoir.

–Merci,Jorge,ditVal.Illuitenddeuxbouteillesd’eau.

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–Quandtuveux,bébé.Quandtuveux.–Ilteveutvraiment,jeluidislorsquenousnouséloignons.–Ouais,maismoi,jeneveuxpersonned’autrequeTam.Elleengloutitsoneauetpasselabouteillefroidesursonfront.–Maisjelesens,encemoment.Tuvoiscequejeveuxdire?Àmonhumblesurprise,oui,jevoistrèsbien.–Bon,ilfautquej’aillefairepipi.Tuviens?Jesecouelatête.–Jet’attendsici.Pendant qu’elle disparaît dans la foule, je termine ma bouteille et

j’examine le club. Il est beaucoup plus plein à présent et je remarquequelquesregardsinsistantsrivéssurmoi.J’entreencontactvisuelavecungarsmignon,coifféàlapunk.Ilporteunjean,untee-shirtmoulantetdesConverse. La lumière stroboscopiqueaccroche sonpiercingde sourcil etceluidesalèvresupérieure.

Il a l’air… confortable. Comme si je le connaissais. Comme si nousétionsfaitsdelamêmeétoffe.Jeluiadresseunsourirehésitant,qu’ilmeretourne. Je le vois murmurer quelque chose à un de ses amis, puisavancerversmoisurlapistededanse.Jemeredresse…

–Hé,salutpetitefrangine.Viens,ondanse.Eastona surgidenullepart, songrandcorpsmedomine.Legarçon

quivenaitversmois’arrête.Merde.–Lâche-moiunpeu.Est-ceque jedois lui faire signeque toutvabien?Qu’Eastonneva

paslemordre?Eastonsurprendmonregardetdévisagelegarsauxpiercingsjusqu’à

cequecelui-cilèvelesmainsensignederedditionetretourneàsatable.–Oùenétions-nousdéjà?demandeEastoninnocemment.Ahoui,on

danse.Jesoupireetjemerends.Eastonm’aclairementfaitcomprendrequ’il

vireraittouslesautresmecscesoir.Ilm’attrapeparlatailleetm’emportelittéralementjusqu’àlapistededanse.

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– Tuesbandante ce soir. Si tun’étais pasma sœur, je te sauteraisdessus.

– Tu m’as déjà sauté dessus. (Je hausse un sourcil devant son airahuri.)Hiersoir?

Ilsemarre.–Ahouais,ça.Ramène-toi,ondanse.Quelquestypesluijettentdesregardsaupassageetluicrientuntruc

dugenre«tuasgagnélegroslot».Jelesignore,parcequesiEastonestlà,c’estbienReedquej’aidûvoirplustôt.Reedpourquij’aidansé.Reedquim’adévoréedesyeuxetm’atellementalluméequej’aieul’impressionquetoutmoncorpss’embrasait.

– Je suisquasi certaineque tu sauterais surn’importequidans tonétat,jeremarque.

Lesmainsd’Eastonglissentsurmataille.–Jesaismeretenir.Pasbeaucoup,maisquandmêmeunpeu.–Heureusementquej’aimarquélalimite,dis-jesèchement.Ilm’attireplusprèsmais,étrangement,iln’apaslamainbaladeuse.Je

passemesbrasautourdesoncouenmedemandantàquoinousjouons.– Tunousasoffertunbeau spectacle. J’aurais bienaimé te voir te

désaper.–Commenced’abord,etsituesbon,jetesuivraipeut-être.Iljubile.Ilaimecetteidée.–Petitefrangine,jenepeuxpastemontrermesbijouxdefamille.Ils

sontsichouettesqueleursimplespectacletedégoûteraitdesautresmecspourtoujours.

J’éclatederiremalgrémoi.–Tuesvraimenttoomuch,Easton.– C’est vrai. (Il acquiesce d’un air solennel.) C’est pour ça que je

coucheavecn’importequi.Parcequ’aucune filleneparvientà s’occuperdemoienentier.

Cetteaffirmationmefaitécarquillerlesyeux.

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– Siça te rassurede teracontercegenredebobard,vas-y,n’hésitepas.

–Oh,c’estcequejefais,net’inquiètepas.Il penche sa tête en avant, vers la mienne, et l’odeur d’alcool me

soulèvelecœur.–MonDieu,tupueslabière.Jelerepousseunpeupourmettreunelégèredistanceentrenous.Ilsourit,maiscen’estpasjolijoli.– Je suis alcoolique, tu ne le savais pas ? J’ai des problèmes

d’addiction.J’aihéritéçademamère,commetamère,elle, t’a refilé saputasserie.Cesontdessuper-cadeaux,non?

Si je n’avais pas discerné la douleur dans ses yeux, je lui auraisrépondu que je préférais m’habiller comme une pute que de me noyerdansl’alcool,maisjeconnaiscettedouleur,alors,aulieudeluibalanceruneréponsevacharde,j’attiresatêtecontremonépaule.

–OhEaston,mamèrememanque,àmoiaussi,jemurmuredanssescheveuxmoitesdesueur.

Il frissonneetmeserreunpeuplus fort. Il tournesonvisagecontremoncouetposeseslèvressurmaveinejugulaire.Cen’estpasvraimentérotique. C’est plus… comme s’il cherchait un réconfort auprès dequelqu’unquinelejugepas.

Derrièrelui,jeremarqueunepaired’yeuxflamboyants.Reed.Et j’enai tellementassez.Eastonpeutvouloir seservirdemoi,mais

moiaussi,jepeuxmeservirdelui.Nous voulons tous les deux quelque chose… du réconfort, de

l’affection, une façon d’oublier le reste du monde. Je relève la têted’Easton.

–Qu’est-cequ’ilya?murmure-t-il.–Embrasse-moi,commesituenavaisenvie,luidis-je.Ses yeux s’assombrissent et sa langue pointe et passe sur sa lèvre

inférieure.C’estsexyendiable.

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MonregardglissesurReedquimejettetoujoursdesregardsnoirs.Jerépète:

–Embrasse-moi.Ilbaisselatêteetmurmure:–Çan’apasd’importancequetuprétendesquejesuisReed.Jefais

commesituétaisquelqu’und’autre,moiaussi.Sesmots se perdent quand sa bouche touche lamienne. Ses lèvres

sontchaudes.Etsoncorps,fortetferme,quiressembletellementàceluide son frère, se presse contre le mien. Je m’offre à lui. Nous nousembrassons encore et encore, et nous nous laissons emporter par lamusique,jusqu’àcequequelqu’unnoussépareetnousentraînehorsdelapistededanse.

Unvideurmécontentcroiselesbras.–Pasdesexesurlapistededanse.Ilesttempsderentrer.Eastonrejettelatêteenarrièreetéclated’unrirehystérique.Levideur

necèdepasetnousmontredudoigtlasortie.Jechercheautourdenous,maisReedaencoreunefoisdisparu.

–OùestReed?jedemandebêtement.–IldoitêtreentraindebaiserAbbysurleparking,répondEaston.Heureusement, ilestdistraitpar larecherchedequelquechosedans

sapoche. Ilnevoitpasàquelpoint sesparolesmeblessent. Il finitpartrouvercequ’ilcherchait.Ilmetendsontrousseaudeclés.

–Jesuistropbourrépourconduire,frangine.JechercheValérie,quimeditqu’ellesedébrouillerapourrentrerde

soncôté.Elleattend son tourdans l’escalierpouruneautredansedansunecage.Résignée,jesorsavecEaston.L’alcooladûfairesoneffet,parcequ’ils’appuiesurmoidetoutsonpoids.

–Oùes-tugaré?Ilmedésignelagauche.–Là.Non,attends.Ilsetournesurladroite.Là.

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J’aperçoissacamionnetteetnousnousdirigeonslentementverselle.Troisplacesplusloin,ilyaleSUVdeReed.Il…bouge.

Easton regarde laRover, luiaussi, etdonneuncoup sur le capot. Ilpartd’ungrandéclatderire.

–Quandlecamiongigote,évited’yposertesmenottes.SavoircequisepassedansceSUVmeturlupinependanttoutletrajet

du retour. Au moins, je n’ai pas besoin de refiler des barbituriques àEaston,ils’écroulecinqminutesaprèsquej’aidémarré.

Arrivésaumanoir,jel’aideàsortirdelacamionnetteetàgrimperlesescaliers. Il entre dans ma chambre et trébuche sur mon lit, tête lapremière.Aprèsplusieursessaisinfructueux,j’abandonnel’idéedelefairesortiretjevaisfaireuntouràlasalledebains.Quandj’ensors,ilronfledéjàcommeunsonneur.J’hésiteàallermecoucherdanssachambre,puisjedécidedelecouvriretdedormirsouslescouvertures.J’attrapeunplaidet le jette sur lui. Un bâillement secouemon corps lorsque j’enlève cesboutsdetissuqueValappelleunerobeetquejeleslaissetombersurlesol.Jegardemaculotteetjemeglissesouslescouverturespourattendrelesommeil.

JemeréveillefaceauvisageencolèredeReed.Jejetteuncoupd’œilducôtéoùdormaitEaston,maiscelui-ciadisparu.

–Jet’aiditdenepast’approcherdemesfrères!–Jenesuispasobéissante.Je commence à m’asseoir et je serre les draps contre ma poitrine.

J’avais oublié que j’avais enlevé ma robe et que je ne portais que maculotte.

–Lesexe,c’estlesexe,répond-ilmystérieusement.Sijedoistebaiserpourquetunefoutespasmafamilleenl’air,jeleferai.

Puisilsortenclaquantmaporteviolemment.Jeresteassise,jesuissouslechoc.Qu’est-cequ’ilabienpuvouloirdire?

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1. Abréviation d’Oxycontin. Cemédicament opiacé plus puissant que la codéine, est utilisécommedrogueauxUSA.

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CHAPITRE18

Aprèsceréveilaussibrutal,jen’aiaucunechancedemerendormir.JenemedonnepaslapeinedecouriraprèsReedpourluidemandercequ’ilvoulaitdire,jesaisqu’ilnemerépondrapas.Maismaintenantilest–jevérifie sur le réveil – sept heures du matin et je suis complètementréveillée.

Super.Je ne travaille pas le week-end et je redoute déjà cette journée.

Connaissant Callum, il va nous proposer toute une série d’activités etobligersesfilsàyparticiper.Plutôtmourirtoutdesuite.

Jemetraînehorsdulit.Jeprendsunedoucherapideavantd’enfilerunerobebain-de-soleiljaunequej’aiachetéelorsquenoussommesalléesfairedescoursesavecBrooke.D’aprèslalumièrequidiffuseàtraverslesrideaux, je sais que la journée va être splendide. Et quand j’ouvre lafenêtre, un courant d’air chaud surprenant pénètre dans la pièce. Noussommespratiquementfinseptembre.Ilnedevraitpasfaireaussibeau.

Est-ce que Gideon rentre à la maison aujourd’hui ? La semainedernière,ilétaitrentrélevendredisoir.Ilnevasansdoutepasarriveràlafinduweek-end,maisj’auraisbienaimélevoir.Peut-êtrequ’ilréussiraitàdistrairesonpèreetsesfrères,etqu’ainsiilsoublieraientmaprésence.

Je sors de ma chambre au moment précis où s’ouvre la porte deSawyer.UnepetiterousseavecquiilflirtaitàlafêtedeJordansort.Illasuitenl’attrapantparlataillequandilsepenchepourl’embrasser.

Page 183: 34-36, rue La Pérouseekladata.com/6yZlvg72ZGfZDcwYgt5FWf1H_kg/HT1PDPEW.pdf · Thompson se retourne et regarde Don Juan, qui se lève de sa chaise et me tend une main large, – Oui,

Elleritdoucement.– Il faut que j’y aille. Il faut que je rentre avant que mes parents

s’aperçoiventquej’aidécouché.Illuimurmurequelquechoseàl’oreilleetellesemetàrireànouveau.–Jet’aime.–Moiaussi,bébé,jet’aime.Cemômen’aqueseizeans,etsavoixestaussichaudeetrauqueque

celledesesfrères.–Tum’appelles.–Biensûr.En lui souriant, Sawyer tend la main et replace une mèche de ses

cheveuxrouxderrièresonoreille,et…OhmonDieu,cen’estpasSawyer.Mamâchoire s’en décroche. Cette vilaine brûlure sur samain, celle

qu’ilachopéecettesemainequandilaratéledîner,adisparu.Maiselleétaitlàhier,jemesouvienstrèsbiendel’avoirvue.

Cequi signifiequece type,avec lapetiteamiedeSawyer,n’estpasSawyer.C’estSébastian.Jemedemandesilafillelesait.Ellegloussedeplaisirquandill’embrassedanslecou.

–Arrête.Ilfautquej’yaille!Peut-êtrequ’ellelesait.Lorsqu’ils se séparent, ils remarquent tous les deuxma présence, et

pendant un instant, la fille a l’air d’hésiter. Elle murmure un rapide«salut»avantdedescendrelesescaliers.

Sawyer, non, Sébastian, me dévisage puis disparaît dans sa… non,danslachambredesonfrère.

Trèsbien.Çanemeregardepas.Dans la cuisine, je tombe sur l’autre jumeau attablé, en train de

manger des céréales. Je regarde samain.Ouaip, la brûlure est bien là.Justepourfaireletest,jelanceun«bonjourSebastian».

–Sawyer,sourit-ilavantd’enfourneruneautrecuilleréedecéréales.

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Jeretiensmarespiration.Ehben!CesgarçonssetapenttouslesdeuxlapetitecopinedeSawyer?C’estgonflé.Ettordu.

Jemeremplisunboldecéréalesetjem’installeaucomptoirpourlemanger. Quelques minutes plus tard, Sébastian entre dans la cuisine.Lorsqu’ilpassedevantlatable,Sawyermurmureun«mercifrangin».

C’estplusfortquemoi,j’éclatederire.–Quoi?murmureSawyer.– Est-ce que ta petite copine sait qu’elle a passé la nuit avec ton

frère?Sonvisagesecrispe,maisilneleniepas.Àlaplace,ilmemenace:–Disunseulmotàceproposet…Jelecouped’unautreéclatderire.–Relax,lespetitsRoyal.Vouspouvezjoueràtouslesjeuxsexuelsles

plusglauques.Meslèvresresterontscellées.Callumentredanslacuisine.Ilporteunpoloblancetdeskakis.Ses

cheveuxnoirssontgominés,etpourunefois,onn’apasl’impressionqu’ilsortdirectementduplacardàalcools.

–Bon,vousêtesdeboutlesgarçons,lance-t-ilauxjumeaux.Oùsontlesautres?Jeleuraiditdedescendreàseptheuresetquart.

Ilsetourneversmoi.– Tu es ravissante,mais tu devrais peut-être enfiler des vêtements

plusappropriéspournaviguer.Jeleregarded’unairéberlué.–Naviguer?–Jenetel’aipasdithiersoir?Nousallonstousfairedubateauce

matin.Quoi?Non, ilneme l’apasdit.Etsi j’avaissu, jemeseraiéclipsée

avec la petite amie de Sawyer et je me serais planquée dans le coffred’unevoiture.

– Tu vas adorer leMaria, me dit Callum, tout excité. Il n’y a pasbeaucoupdevent,doncjenepensepasqu’onvasortirlesvoiles,maisçaseraquandmêmeamusant.

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Moisurunbateau,encompagniedesRoyal?Enpleinemer?JenesuispassûrequeCallumcomprennelasignificationdumot«amusant».

Eastonentreentitubant.Ilaenfiléunshortcargoetuntee-shirtsansmanches,avecenprimeunecasquettedebase-ballbienenfoncéesur lecrâne. Ça ne fait aucun doute, il a la gueule de bois, et j’ai soudain lavisiondubateauquitangueetd’Eastonquirendsonpetitdéjeunerpar-dessusbord.

–Reed,crieCallumendirectiondelaported’entrée.Il fautyaller.Ella,vatechanger.EtmetsleschaussuresbateauqueBrooket’aachetées.Ellet’enaacheté,n’est-cepas?

Jen’enaipaslamoindreidée,parcequelemot«chaussuresbateau»nefaitpaspartiedemonvocabulaire.Jeréfléchisàcommentéchapperàcettevisioncauchemardesquequ’ilvientjustededépeindredevantmoi,

–Callum,j’aibeaucoupdedevoirs…–Apporte-les.(Illèveunemainetseremetàhurler.)Reed!Merde.Jecroisbienquejevaisallerfairedubateau.

LeMariaestexactementcequevouspouvezimaginerd’unbateaude

milliardaire. Un bateau. Ah ! C’est un yacht, bien entendu, et j’ail’impression de tourner dans un clip de rap lorsque, debout contre lebastingage,jesiroteuneflûtedeCristal 1queBrookem’aglisséependantqueCallumregardaitailleurs.Ellem’alancéunclind’œilenmedisantdeprétendre que c’était du sirop de gingembre si Callum me posait laquestion,cequ’ilnefaitjamais.

Callum avait raison. C’est magnifique d’être sur l’eau. L’Atlantiques’étendautourdenousàl’infini,calmeetmajestueux.

JesuisalléeàlamarinaenvoitureavecCallumetBrooke.Lesgarçonsontpris leSUVdeCallum.Cequiaétéunvrai soulagement,parcequel’idéed’êtreassisedanslavoituredeReedaprèsl’avoirvutressautersurleparkinglanuitdernièremerendaitmalade.

Jemedemandeavecquiilétait.SadouceettendreAbby,jesuppose.Jenesuispascertainequ’ilsoitsatisfaitpourautant.J’aientendudireque

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lesexeétaitcensévouscalmeretvousdétendre,ortoutlecorpsdeReedesttendudepuisquenoussommesmontésàbord.

Ilestdel’autrecôtédubastingage,aussiloindemoietdeCallumqu’ilest humainement possible sans tomber par-dessus bord. Sur le pontsupérieur,quiabriteuncoinrepasetunjacuzzi,Brookeprendunbaindesoleilàpoil.Sescheveuxdorésbrillentdanslalumière.Ilnefaitpasassezchaud pour se mettre en maillot de bain, sans parler de faire dunaturisme,maisçasembleluiêtrecomplètementégal.

–Alors,qu’enpenses-tu?(Callummemontrelamer.)C’estpaisible,non?

Pas vraiment. Il n’y a pas de paix possible quand Reed Royal vousobserve.Non,plutôtqu’il vousdévisage, et c’est cequ’il faitdepuisuneheure.

Easton est encore en bas à bricoler Dieu sait quoi, et les jumeauxdormentàpoingsfermésdansdeschaiseslongues,ducoupCallumestlaseulecompagniequej’ai,etvisiblementçaneplaîtpasàReed.

–Chéri!appelleBrooke,viensmepasserdelacrèmesolairedansledos!

Callum évitemon regard, sans doute parce qu’il ne veut pas que jevoieledésirdanssesyeux.

–Jepeuxtelaisserunmomenttouteseule?–Biensûr.Allez-y.Jesuissoulagéed’êtreunpeuseule,maisçanedurepas.Latension

remonte lorsque Reed s’approche demoi avec des airs de prédateur. Ilposesesavant-brassurlarambardeetregardedroitdevantlui.

–Ella.Jenesaissic’estunesalutationouunequestion.Jelèvelesyeuxau

ciel.–Reed.Maisilnepoursuitpas.Ilsecontentederegarderl’eau.Jeluijetteuncoupd’œil,etmoncœursemetàfairedesoubresauts

pénibles,commechaquefoisqueReedestdanslesparages.

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Il est lemâlepersonnifié.Grandet large, sa silhouette splendideestparfaitementdessinée.J’ailabouchesèchelorsquejeporteleregardsursesbrasauxmuscleslisses,éclatantsdepuissance.

Il faitbientrentecentimètresdeplusquemoi,etquandilse tourneenfin,jedoisleverlatêtepourpouvoirleregarderdanslesyeux.

Ces yeux bleus me détaillent et s’arrêtent brièvement sur monminusculeshortenjeanetmonhautàemmanchuresaméricainesquimeserreunpeuaucou.Ilfixeensuitemeschaussuresbateaubleumarineetblanc,etlecoindesabouchefriselégèrement.

Jemedemandes’ilvaencoresemoquer,maissonsemblantdesouriredisparaîtquandungémissement, suivid’unhalètement, se faitentendreau-dessusdenous.

–Oui.La voix de gorge deBrooke nous scotche sur place.Un grognement

mâleluirépond.Apparemment,çaneposeaucunproblèmeàCallumdes’envoyerenl’airenprésencedesesfils.Jetrouveçadégoûtant,maisenmême temps, jeneparvienspasà ledétester,pasaprèsqu’ilm’aavouéque sa femme luimanque toujours. La douleur vous fait faire des trucsdingues,parfois.

Reedpousseunjuron.–Allons-y.Ilm’attrapelamainavecunepoignedefer,cequim’obligeàlesuivre

danslesescaliersquidescendentaupontinférieur.–Oùallons-nous?Ilnerépondpas.Ilpousseuneporteetentredanslapièceprincipale,

luxueusementmeublée avec des canapés en cuir et des tables en verre.Reedtraverselacuisineetlecoinrepasenunéclair.Ilsedirigeverslescabinesàl’arrièredubateau.

Ilfrappeàuneporteenchêne.–East.Réveille-toi,bordel.Onentendungémissement.–Fous-moilapaix.J’aimalaucrâne.

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Reed entre dans la cabine sans frapper. Derrière ses larges épaules,j’aperçoisEastonétendusurungrandlitavecunoreillersurlatête.

–Lève-toi,ordonneReed.–Pourquoi?–J’aibesoinquetuoccupespapa,ditReedd’unairsardonique.Enfin,

il est déjà assez occupé pour le moment, mais je veux que tu sois surplace,aucasoù.

Eastonrepoussel’oreillerets’assiedengémissant.–Tusaisquejeprotègetoujourstesarrières,maisécoutercettenana,

c’estpourmoiunvéritablecauchemar.Cespetitsbruitsqu’ellefaitquandpapa…

Ils’arrêteaumilieudesaphraseens’apercevantdemaprésence.Je ne peux pas voir le regard de Reed, mais il doit être assez

convaincant,carEastonselève.–Pigé.–Éloigneaussilesjumeaux,ditReed.Sonfrèredisparaîtsansdireunmot.Aulieuderesterdanslacabine

d’Easton, Reed entre dans celle d’à côté etme fait signe de le suivre àl’intérieur.

Jenebougebas,lesbrascroisés.–Qu’est-cequetuveux?–Parler.–Alors,fais-leici.–Entrelà-dedans,Ella.–Non.–Si.Jebaisselesbrasetj’entredanscettecabine.Ilyaquelquechosechez

cetype…illanceunordreetj’obéis.D’abord,jemedéfends,biensûr.Jemebatschaquefoiset,chaquefois,c’estluiquigagne.

Reedfermelaportederrièremoietpasseunemaindanssachevelureindomptée.

–J’airéfléchiànotreconversationdel’autrefois.

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–Nousn’avonspaseudeconversation.C’esttoiquiasparlétoutseul.Etmonpouls s’accélèreparcequ’àprésent, jeme rappelle cequ’il a

dit.Si je dois te baiser pour que tune foutes pasma famille en l’air, je le

ferai.–Jeveuxquetutetiennesàdistancedemesfrères.–Hé,tuesjalouxouquoi?CommediraitCallum,jejoueaveclefeu,maisjem’enficheunpeu.

J’enaimarrequecetypemedisecequejedoisfaire.– J’ai pigé, tu es habituée à un certain style de vie, dit Reed en

ignorantmavanne.Jepariequetouslesmecsfaisaientlaqueuepourtesauterdanstonancienneécole.

Mon cœur s’arrête de battre quand il saisit le bas de sa chemise. Ilhausselesépaules.

–Tuasdesbesoins.Jenepeuxpastelereprocher,etouaisc’estvrai,jenet’aipasfacilitélatâcheàAstorPark.Iln’yapasgrandmondequiaitassez de couilles pourme contredire et te demander de sortir avec lui.Maistulesfaisbanderpourtant,tousautantqu’ilssont.

Où diable veut-il aller comme ça ? Et pourquoi… oh mon Dieu,pourquoienlève-t-ilsachemise?

Je reste sansvoixdevant son torsenu. Ilades tablettesdechocolatquime fontbaver,et sesobliquessemblentdélicieusement fermes.Moncorpssemetàbouillir.Jeserrel’intérieurdemescuissespourretenirmespalpitations, mais ça ne fait qu’empirer. Oh ouais, il est parfaitementconscientdel’effetqu’ilproduitsurmoi.Sesyeuxluisent.

–Monfrèreestunboncoup,maispasaussibonquemoi.Reeddéboutonnesonshortetouvre sa fermetureÉclair. Jenepeux

plus respirer. Je suis figée surplacependant qu’il baisse son short et lejetteauloin.

Mes jambes se mettent à trembler. Où que je regarde, je ne voisqu’unepeaulisseetdorée,etdesmusclesbandés.

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–Voilàledeal,dit-il.Monfrèreetmonpèretesontinterdits.Siçatedémange,tuviensmevoir.Jem’enoccuperai.

Il pose sagrandepaumedemain sur sespectorauxet la fait glisserensuiteplusbas.

C’est commesi jemanquaisd’oxygène. Jenepeux rien faired’autrequedesuivrelatrajectoiredecettemain.Elleglissesursesabdospuissursonventre,s’arrêtejusteau-dessusdesonaine,puisglisseplusbaspourfouillerdansl’élastiquedesonboxer.

Reedentoureavecsesdoigtssonsexeenérectionetquelqu’unsemetàgémir.Jepensequec’estmoi.Çadoitêtremoi,parcequ’ilsourit.Ilsebranledoucement.

–Tulaveux?Tupeuxl’avoir.Tupeuxlalécher,lasucer,labaiser,tout ce que tu veux, bébé.Dumoment que c’est avecmoi, rien qu’avecmoi.

Moncœurbatencoreplusvite.Reedpenchelatête.–Onestd’accord?C’est son ton calculateur qui me sort de ma transe. L’horreur et

l’indignation remontent à la surface, et je fais un pas en arrière enmecognantcontrelesommier.

–Vatefairemettre,jebalbutie.Monexplosiondecolèrenel’impressionnepas.J’humecte mes lèvres. Ma bouche est plus sèche que le Sahara et,

pourtant,jenemesuisjamaissentieaussivivante.Nimesstrip-teasesnimes efforts pour repousser les petits copains de maman aux mainsbaladeuses nem’ont préparée à ça. Peut-être qu’il y avait des types quifaisaient laqueuepour sortiravecmoi,maismoi, jemeconcentrais surmon travail, sur les traitements demamère, sur le fait de simplementsurvivre. Je n’arrive même pas à me rappeler la tête d’un seul de mescamaradesdeclassedel’andernier.

L’imagedeReeddeboutdevantmoi,sexy,bronzéetnu,avecsaqueuedanslamain,resteragravée,elle,pourtoujoursdansmamémoire.

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Il a tout ce que peut désirer une fille : un corps puissant, un beauvisagequiresterabeaupendantencoredesannées,del’argentetcepetittrucenplus.Ducharisme,jesuppose.Lacapacitéàvousfairefondred’unseulregard.

Le fruit défendu se balance devant moi, juteux, rouge et délicieux,maiscommedanslescontesdefées,ReedestleVilaindéguiséenPrincecharmant. Y goûter serait une énorme erreur. Et même s’il m’attire, jerefuse de faire l’amour pour la première fois avec quelqu’un qui meméprise.Quelqu’unqui tentedeprotéger son frère, pourtant tout à faitcapabledemedétruireentouteinnocence.

Maisjeneveuxpasnonpluspartirsansygoûter,parcequejenesuispasforteàcepoint…niassezstupide.

Ilmedéteste,maisilmedésire.Ilnerelâchepassesmouvementsdeva-et-vientsursonsexe.Ilsecontentedebanderencoreplussesmusclesenanticipantmoncontact.C’estçadontparlaitValériependantquenousdansions, l’autre soir. Je n’ai pas répondu à la foule, mais les regardsbrûlantsqueposaitReedsurchacundemesgestesmefaisaientmesentirvivante.Jesavaisquesij’étaisdanslatêtedeReedencemoment,toutcequejeverrais,ceseraitmoi,unpointc’esttout.

Jemusardejusqu’àunfauteuildansuncoin,avecunpeignoirdebainposédessus.Je tiresur laceintureet j’enroule labandede tissu-épongeautourdemesdoigts.

–Toutcequejeveux?jeluidemande.Il ferme lesyeuxun instantet les rouvreavec tantdedésirau fond

quemesgenouxs’entrechoquentpresque.–Oui,Tout.Maisjusteavecmoi.Ondiraitquesaréponseluiaétéarrachée.Jememoquedelui.–Pourquoies-tutellementenmanque?Tuasbaisélanuitdernière.Unhoquetdedégoûtmontedesagorge.–Jen’aipastirémoncouplanuitdernière.C’esttoiquil’asfaitavec

East.

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– Et tun’étaispasen trainde secouer laRangeRover,peut-être, siviolemment que les pneus sont presque tombés ? dis-je sur un tonsarcastique.

–C’étaitWade.Ildoitpercevoirmaconfusion,parcequ’ilpoursuit:– C’est l’arrière d’Astor Park, un pote à moi. Les chiottes étaient

pleines.Etilnepouvaitplusattendre.Une sorte de soulagement m’envahit. C’est peut-être la seule façon

poursafiertédenouslaisserunechanced’êtreensemble.Peut-êtrequejepourrais l’avoir. C’est peut-être une bonne chose. Ma récompense. Jedécidedeletester.

–Jeveuxt’attacher.Samâchoiresecrispe.Ilpensesansdoutequec’estmontruc,quelque

chosequej’aidéjàfaitdesdizainesdefois.–D’accord,bébé,toutcequetuveux.Ilneserendpas.Ilmeprovoque.Jem’enveuxd’avoirpupenserun

seul instant que je représentais autre chose pour lui que l’aubaine d’uncorpsagréable.

Jem’approchedelui,deplusenplusrésolue.–C’estchouette,n’est-cepas?Ilm’observe prudemment lorsque je lui fais signe deme tendre ses

poignets.Ettoutenfeignantlanonchalance,j’arriveàpeineàretenirunhalètementquandsamaineffleuremonventrenu.

Je me fais la remarque : il faudra être plus couverte que ça enprésencedeReedpourmapropreprotection.

Jenesuisniunboy-scoutniunmarin.Jenesaisfairequ’unesortedenœud,unnœudde lacetdechaussure. Je faisdeux toursautourde sespoignets, et nous retenons tous les deux notre respiration quand laceinturefrappeledevantdesonboxerunefois,puisdeux.

–Tumetues,grince-t-ilentresesdents.–Tantmieux,jemurmure,maismesmainstremblenttellementque

j’arriveàpeineàfaireunsimplenœud.

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–Tuaimesça,quejesoisàtamerci?–Noussavonstouslesdeuxquetun’esjamaisàmamerci.Ilmurmure quelque chose dans un souffle à propos demoi qui n’y

connais rien, mais je l’ignore. Je cherche un endroit où l’attacher. Legrandtrucsurlesbateaux,c’estquetoutestfixéausol.Ilyaunebouclebrillanteencuivreàcôtédufauteuiletj’yemmèneReed.

En le faisant s’asseoir, je m’agenouille entre ses genoux avec laceinture entre les mains. Il est assis là comme un dieu, un dieu Thotmoderne,surveillantsonesclaveàsespieds.

Entremes cuisses, lespalpitationsdeviennentpresquedouloureuses.Toutcequej’entends,c’estunepetitevoixdiaboliquequimeditqu’iln’yauraitaucunmalàça.

Ce type me désire tant qu’il n’a pas débandé une seconde. Sous lecoton,sonsexeattendjustequejeletouchecommeilmel’aordonné.Jen’aijamaiseudesexeentreleslèvres.Jemedemandecequeçafait.

Je ne peux pasm’en empêcher, jem’avance et je baisse son boxer,assezpourlibérersonsexe.Ilsedressequandjeletouche.Ohwouah.Sadouceurmesurprend.Ondiraitduvelours.

« Tu es… parfait », ai-je envie de lui dire, mais j’ai peur qu’il semoquedemoi.

Jelaissecourirmesdoigtslelongdesonmembreetjerespireàfond.Ledésiraccélèremespulsationssanguines.

–C’estçaquetuveux?demandeReed.C’est censé être une raillerie, mais ça ressemble plutôt à une

supplication.Jeregardesonérection,ellem’intimide.Ilyauneperledeliquide séminal au bout et… je la lèche. Mais ça ne me suffit pas. J’yretourne, jelèchesonglandcommesionétaitaumoisdejuin,enpleincagnard,etquec’étaituncônedeglacequiallaitfondreentremesdoigts.Sesmainsliéesviennentseposersurlesommetdemoncrâne.

–Bordel.Suce-moi.Bordel.Suce-lacommejesaisquetusaissibienlefaire.

Sesparolescruellesdéchirentlebrouillarddemondésir.Jemecabre.

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–Commetusaisquejesaissibienlefaire?J’ai tellement baissé la garde quema vulnérabilité que j’ai tenté de

dissimulerrejaillit.– Commetu…(Ilhésiteun instant, troublépar ladouleurdansma

voix,maisquelquechose ledécide.)Commetu l’asdéjà faitdesmilliersdefois.

–D’accord,jerépondsavecunpetitrirefêlé.Alors,ilfautquetusoisbienattaché,parcequejeconnaisdestrucsdonttun’asmêmepasidée.

Je tireviolemmentsur laceintureet je lapassedans l’anneausur lesol.Jel’attachetrèsserrée.Ilm’observe,leregardluisant.J’aienviedelecogner,devraimentluifairemal.Maisilsaitendurerladouleurphysique,alorslaseulechosequejepuissefaire,c’estdeluifairecroirequejevaisfoutreenl’airsaprécieusefamille,d’unetellefaçonqu’ilseraincapabledelareconstruire.Exactementdelafaçonqu’ilademefoutreenl’air.

Jegrimpesurlachaise.Mesgenouxsontappuyésdepartetd’autredesescuissesépaisses.Enpassantmesdoigtsdanssescheveux,jetiresatêteenarrièrepourqu’ilmeregardedanslesyeux.

– Je sais que tume veux. Je sais que tumeurs d’envie que jemeremetteàgenoux.Mais tuneme reverraspasàgenouxdevant toi,pasavantlafindestemps.Mêmesitumepayais,jenetetoucheraispas.Jenetetoucheraispas,mêmesitumesuppliaisdelefaire.Mêmesitumedonnaistonâme,quetum’aimaisplusquelesoleilaimelejour,ouquelaluneaimelanuit.Jebaiseraisplutôttonpère.

Jelerepousseetjedescends.– Tu sais quoi ? Peut-être que je vais y aller tout de suite. Jeme

souviensqu’Eastonm’aditqu’ilaimaitlesjeunes.Jemedirigevers laporteavecuneassuranceque jenepossèdepas

véritablement.Reedsedébatcontresesliens,maismonnœudtoutsimpleleretientprisonnier.

–Reviensicietdétache-moi,gronde-t-il.–Naan.Ilvafalloirquetut’ensortestoutseulcettefois.

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J’arriveàlaporteetjeposelamainsurlapoignée.Enmeretournant,lamainsurlahanche,jememoque:

–Situvauxmieuxqu’Easton,alorsétantdonnésonexpérience,tonpèredoitêtreincroyable.

–Ella,reviensicitoutdesuite!–Non.Je lui fais un grand sourire et je sors.Derrièremoi, je l’entends qui

criemonnom.Lesons’amenuisepeuàpeu,jusqu’àcequesavoixnesoitplusqu’unmauvaissouvenir.

Surlepont,Callumsiroteunverrependantqu’Eastondortàcôtédeluidansunechaiselongue.

–Ella,çava?Callumselèved’unbond.Jelissemescheveux,l’airimperturbable.– Trèsbien.En fait… jepensaisàSteveet…ehbien, j’aimerais en

savoirplussurlui,situveuxbienm’enparler.LevisagedeCallums’illumine.–Oui,biensûr.Vienst’asseoir.Jememordslalèvreenfixantmespieds.–Onnepourraitpasallerquelquepartdeplustranquille?–Biensûr.Quedirais-tudemacabine?–Çaseraitparfait,jeminaude.Sabouches’entrouvrelégèrement.–Mince,cesourire.C’estceluideSteve.Viens.Ilpasseunbrasautourdemonépaule.– Steveetmoiavonsgrandiensemble.Songrand-père,quia fondé

AtlanticAviationaveclemien,étaitunmarin.Steveetmoipassionsdesheuresàécouterseshistoiresdepaw-paw.Jesupposequec’estpourçaqu’onatellementvoulus’enrôler.

Eastonrelève la têtequandCallumm’emmènedanssacabine. Ilmeregarde, puis regarde le bras de Callum. Je m’attends à une réflexionvachardequejemériteprobablementcettefois.Àlaplace,ilsecontente

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demedévisagercommesijevenaisdelefrapperàl’estomac,oucommesijeluiavaismenti,cequiestencorepire.

Je laisseCallumjacasserausujetdecebonvieuxStevependantdixminutes,avantdel’interrompre.

– Callum, tout cela est très intéressant et je vous remercie de lepartageravecmoi,mais…(J’hésite.)Ilfautquejevousposeunequestionquimeturlupinedepuisl’instantoùj’aiposéunpieddansvotremaison.

–Biensûr,Ella.Tusaisquetupeuxmedemandern’importequoi.–Pourquoivosfilssont-ilssimalheureux?JepenseauvisageperpétuellementmaussadedeReedet jedéglutis

avecpeine.– Pourquoi sont-ils si en colère ? Nous savons tous deux qu’ils ne

m’aimentpas,etjevoudraisbiensavoirpourquoi.Callumsepasselamainsurlevisage.–Ilfautjustequetusoispatiente.Ilschangerontd’avis.Je repliemes jambes sousmoi sur lematelas. Il n’y aqu’une chaise

danslacabine,Callums’yestinstallé,etmoij’aiprislelit.C’est bizarre d’être là, assise sur unmatelas, et de parler avecmon

nouveaupère,demonpère,récemmentdécouvertmaisdécédé.–Vousmel’avezdéjàdit,maisjen’ycroispas,dis-jecalmement.Etje

necomprendspas.Jeveuxdire,est-cequec’estàcausedel’argent?Est-cequ’ilsvousenveulentvraimentdem’avoirdonnédel’argent?

–Cen’estpasl’argent.C’est…merde…jeveuxdirezut.Callumbégaie.–Seigneur,j’aivraimentbesoindeboireuncoup.(Ilritunpeu.)Mais

jesupposequetunevaspasm’yautoriser.–Pasmaintenant.Jecroise lesbras.Callumveutque jesoisdureavec lui?Jepeux le

faire.–Franchement,sansbaratin.C’estbiencequetuveux,n’est-cepas?Jesouris.–C’estexact.

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Ilpenchelatêteenarrière,versleplafond.– J’en suisarrivéàunpointoùmes relationsavec lesgarçons sont

tellement altérées que si j’amenais mère Teresa à la maison, ilsl’accuseraientdevouloirmesauterdessus.Ilspensentquej’aitrompéleurmèreetquej’aicausésamort.

Jedoisfaireuneffortpourgardermabouchefermée.Ok.Wouah.Ehbien,çaexpliqueunpeuleschoses.Jeprendsuneinspiration.

–Etc’estvrai?– Non, je n’ai jamais trompé leurmère. Je n’en aimêmepas eu la

tentation,pasuneseulefoispendantnotremariage.Quandj’étaisjeune,Steveetmoiavonsfaitdesbêtises,maisaprèsavoirépouséMaria,jen’aijamaisregardéuneautrefemme.

Ilal’airsincère,maisjenesuispasprêteàgobertoutecettehistoire.– Alors pourquoi vos mômes sont-ils toujours d’une humeur

massacrante?–Steveétait…(Callumdétourneleregard.)OhElla,jevoulaisavoir

le tempsde t’apprendreàaimer tonpère,pas te raconter tous les trucsmerdiquesqu’ilafaitsparcequ’ilsesentaitseul.

JedoistirersurtouteslesficellespourforcerCallumàmeracontercequ’iltentetellementdemecacher.

– Écoutez, jenecherchepasàêtredésagréable.Mais jeneconnaispasSteve,etmaintenantqu’ilestmort,jeneleconnaîtraijamais.Cen’estpasunepersonneréellepourmoi,pascommeReedouEaston,ouvous.VousvoulezfairedemoiuneRoyal,maisjen’yparviendraijamaissitousles membres de cette famille me rejettent. Pourquoi est-ce que jereviendraisaprèsmondiplômedansunlieuoùjesensquejenesuispasdésirée?

Mes tentatives de chantage affectif sont un succès. Callum se remetimmédiatementàparler,etjesuisréellementtouchéedevoiràquelpointilveutquejefassepartiedesafamille.

–Steveestrestélongtempscélibataire.Ilaimaitbiensevanter,etjecrois que quand les garçons étaient plus jeunes, ils pensaient que leur

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oncle Steve était l’exemple même de la virilité. Il leur racontait deshistoiressurnotrefollejeunesse,etjenel’aijamaisempêché.Nousavionsbeaucoup voyagépournos affaires, et Steve en aprofité. Je te prometsquejen’aijamaisrienfait,moi,maiscertainsnel’ontpascru.

Commesesenfants.Commesafemme.Ilremuesursachaise,visiblementcettehistoirelemetmalàl’aise.– Maria est tombée en dépression et je n’ai pas reconnu les

symptômes. En y repensant, j’ai réalisé que sa froideur et son humeurchangeanteétaient les symptômesd’unemaladiegrave,mais j’étais tropoccupéàsortir lasociétédurouge,pendantlarécession.Elleprenaitdeplus en plus de comprimés, elle n’avait que les garçons commecompagnie. Quand elle a fait son overdose, j’étais à l’autre bout dumonde,àTokyo,entraindefairesortirSteved’unbordel. Ilsontpenséquec’étaitdemafaute.

Peut-êtreavaient-ilsraisondevousaccuser,ai-jepensé.–Steven’étaitpasunmauvaisgarçon,maistu…tuenes…lapreuve

vivante,jesuppose.Lapreuvequ’ilmemenaitparleboutdunezdansdestrucsquiontfinipartuerleurmère.

Sesyeuxmesupplientdelecomprendre,voiredeluipardonner,maiscen’estpasmoiquipeuxluioffrircela.

–Quandilareçulalettredetamère,ilachangé.Ilestsubitementdevenu un autre homme. Je te jure, il aurait été un père attentif,passionné.Ilvoulaitdesenfantsetilétaitfoudejoiequandilaappristonexistence.Ilauraitvoulus’occuperimmédiatementdetoi,maisilyavaitcevoyageprévudelonguedateavecDinah.Ilsallaientfairedudeltaplanedansunendroitapparemmentinterdit,maisSteveavaitréussiàsoudoyerunofficielducoinpourqu’il les laisse faireune sortie. Ildevait aller techercherdèssonretour.Neledétestepas.

–Jeneledétestepas.Jeneleconnaismêmepas.Je…Jemelève,mespenséessonttoutembrouillées.D’unecertainefaçon,

dans l’esprit des filsRoyal, lamort de leurmère et la responsabilité deSteve sont liées, et je suis une cible vivante bien commode. Je ne peux

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rienfairequilesfassechangerd’opinion.Jelecomprendsàprésent.Maisc’estmoiquiaidemandéàCallumdemedirelavérité,jenevaispasleluireprocher.

–Merci,dis-jed’unevoixéteinte.J’apprécievotrefranchise.Mêmesij’étaisunmodèledevertu,ilsmedétesteraientquandmême.

JepourraisêtrecommeAbbyet…Une pensée surgit dans mon esprit et j’ouvre la bouche avant de

réfléchir.–ÀquoiressemblaitMaria?–Charmante.Elleétaitdouce,gentille.Ellefaisaitàpeineplusd’un

mètrecinquanteetelleavaitl’âmed’unange.Il sourit,etàcet instant, jecomprendsqu’ilaimaitMaria.Jen’aivu

qu’uneseulefoiscette lueurdevéritableamour,c’étaitdans lesyeuxdemamère.Elleétaitunpeularguée,maisellem’aimait.

Mariaainspirélemêmeamouràsesfils.CetteAbby,c’estsacopieetle contraire de tout ce que je suis. Ça ne devrait pas me déranger,pourtant c’est le cas, parce quemême si je déteste devoir l’admettre, lavéritéc’estquejevoudraisqueReedressentelamêmechosepourmoi.Cequiestlesentimentleplusstupidequej’aijamaissuscité.

1.Cristal est la cuvéeemblématiquede lamarque françaisedechampagneLouisRoederer,crééepourletsarAlexandreIIen1876.

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CHAPITRE19

Reednemejettepasunseulregardpendanttout letrajetduretourjusqu’au rivage, ni quand nous reprenons la route pour lamaison. Sonsilenceestsuffisammentéloquent. Ilest furieuxet ilva leresterunbonmoment. Je prétends avoir chopé une insolation pour éviter le dîner,parceque jesuis incapabledesupporter toutunrepasencompagniedeReedqui, oubien ignoremonexistence, oubienm’envoiedes piques àchaqueoccasion.Jesaisquejel’aicherché,maismêmeEastonmefaitlatête lorsque je monte dans ma chambre, je me demande si je n’ai pascommisd’erreur.

– Je croyais que tu n’allais pas baiser avecmon père, siffle-t-il surmonpassage.

–Jenel’aipasfait.J’aijustevoululefairecroireàReed.CommeEastonsembleencoredouter,jesoupire:–Toutcequenousavonsfait,Callumetmoi,c’estdeparlerdeSteve.Etdetamère,maisjesupposequ’Eastonn’apprécieraitpascelavuson

humeuractuelle.Iln’estpascalmélemoinsdumondeparmaconfession.–Nejouepasdetoursàmonfrère.Tul’asallumé,etmaintenantilva

falloirqu’ilsesorteçaducrâne.Jeblêmis.–Qu’est-cequetuveuxdire?Je redoute sa réponse. Il va courir rejoindre Abby après ? Ça me

donne envie de vomir sur les chaussures bateau d’Easton. Ilme fait un

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signedelamain.– Rien.Vous feriez bienoudebaiser ensemble, oude vous tenir à

distancel’undel’autre.Jevotepourladistance.–C’estnoté.Jecommenceàouvrirlaportedemachambre,maisEastonm’attrape

lebras.–Jesuissérieux.Situasbesoindequelqu’un,viensmevoir.Çam’est

unpeuégal.Ough.J’enaivraimentsoupédecesRoyal.– Purée,Easton, c’est tellementgénéreuxde tapart.Est-ceque ton

offresexuelleàdeuxballesaunedatedepéremption?Oubienest-ceunticketutilisablequandjeleveux?

Je rentre dans ma chambre et je lui claque la porte au nez. Il estencoretôt,maisjedécidedememettreaulitparcequ’ilfautquejesoisàlaboulangerieavantl’aube,puisquej’ailleencours,etcesoir,jeneveuxplusparleràpersonnedanscettemaison.

Je me glisse sous les couvertures et j’essaie de m’endormir, sans yparvenirvraiment.Jemeréveilleàchaqueclaquementdeporte,àchaquebruitdepasdevantmachambre.

Au beau milieu de la nuit, j’entends des murmures furieux dans lecouloir.Lesmêmesqueceuxquej’aientendusl’autrenuit.EastonetReedse disputent. Je regarde l’heure. C’est à peu près la même heureégalement,justeaprèsminuit.

– J’y vais, dit Reed froidement. La dernière fois, tu étais en pétardquandjenet’aipaslaisséveniravecmoi,etmaintenantturâlesquandjet’invite?

Oh,ça,c’estlabagarregarantie.– Hé, excuse-moi de me faire du souci pour ta gueule, elle est

tellement au-dessus de ton cul, tu ne verras pas le poing arriver, luibalanceEaston.

Ouaip.Labagarreestbienpartie.–Aumoins,moi,jenebavepasdevantlafilledeSteve.

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–Ouais,c’estvrai,répondEastonironiquement.C’estpourçaquejet’aitrouvéàmoitiénu,ficeléàunechaise.Parcequetun’asvraimentpasenvied’elle.

IlsavancentdanslecouloiretjenepeuxplusentendrelaréponsedeReed en entier, mais ça ressemble à un truc du genre « je préféreraispéchoJordanquetrempermaqueuedanscetrou».

Follederage,jerepoussemescouverturesetmejettehorsdulit.Cesdeux-làontdessecretsqu’ilsneveulentpasquejedécouvre?Ehbien,sic’est la guerre dans la maison Royal, je vais avoir besoin de toutes lesmunitionsdontjepeuxdisposer.

Jecoursàmonplacardet j’attrapelepremiervêtementsur lequel jetombe,c’est-à-direuneminijupe.Cen’estpas levêtement leplusdiscretquisoit,maisjen’aipasdetempsàperdre.Jesautedanslajupe,j’enfileuntee-shirt,jeglissemespiedsdansmessneakersetjemefaufilehorsdemachambreleplusdiscrètementpossible.

Jedescendslesescalierssurlapointedespieds.Iln’yapersonnedanslacuisine,mais j’entendsdesbruitssourdsà l’extérieur.Uneportièredevoiture claque. Merde. Il faut que je me dépêche. Heureusement, lesjumeaux laissent toutes leurs affaires, leurs clés, leurs sacs, bref toutesleursmerdesdansleschiottes.

Jetraverselacuisineencourantjusqu’auxw.-c.etj’attrapelepremiersweat-shirtquejetrouve.Ilyadesclésetducashdanslapocheavant.Parfait.Enmebaissantquandjepassedevantlafenêtredelaportevitrée,je jette un coup d’œil dehors et j’aperçois la Range Rover de Reed quidescendl’allée.

J’ouvrebrusquementlaporteet jemeruedanslegarage.LeboutondelacléallumeleSUVdesjumeaux.Jepousseunsoupirdesoulagementetjegrimpededans.

Cen’estpasfaciledesuivrequelqu’unenvoituredansuneruecalme,enpleinenuit,sanssefairerepérer,maisj’yparvienscarReednes’arrêtepasetnefaitpasdebrusquedemi-tourpourseretrouverenfacedemoi.

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Il me conduit au centre-ville, puis par plusieurs chemins de traverse,jusqu’àcequenousnousarrêtionsdevantuneporte.

Reedgareson4x4.Jecoupelemoteuretj’éteinslesphares.Auclairdelune,jedistingueàpeinelesdeuxfrèresquidescendentdelaRoveretescaladentensuiteunebarrière.

Dansquelpétrinjesuisentraindemefourrer?Est-cequ’ilsdealentdeladrogue?Ceseraitdébile.Lafamilleestpleineauxas.Dansletee-shirt que je porte, il y a cinq cents dollars en coupures de vingt et decinquante,rouléesencigare.Etjemettraismatêteàcouperquesij’avaisfouillé tous lesvêtementsqui traînaientdans leschiottes, j’aurais trouvédel’argentdanschacund’eux.

Alors,qu’est-cequ’ilspeuventbienfaire?Je cours à la barrièrepour voir si je peuxdistinguer quelque chose,

maisjediscernejusteunerangéedelonguesstructuresrectangulairesquionttoutesàpeuprèslamêmetaille.PasdeReednid’Easton.Ignorantlavoixintérieurequimecriequec’estcomplètementdébiledegrimpersuruneclôtureetdemejeterdanslenoir,jelefais.

Quandjem’approchedesbâtiments,jeréalisequecenesontpasdesbâtimentsmais des containers, ce qui signifie que je dois être dans unchantier naval.Mes sneakers ont des semelles de caoutchouc, je ne faisaucunbruit.Quandjem’approched’Eastonquitendunpaquetdebilletàuninconnuensweat-shirt,personnenem’entend.

Jereculeetjemecachederrièreuncontainer.J’enfaisletourcommeuneespionnedansunfilmd’actionpourri.EntreEastonetl’inconnu,ilyaun cercle improvisé, installé dans un espace dégagé, au bout de quatrecontainers.Età l’intérieurducercle, il yaReed,en jean,piedset torsenus.

Il replie un de ses bras devant lui, avant de tendre l’autre. Puis ilsautille sur ses pieds comme s’il essayait de se détendre. Lorsque jedécouvre l’autre type, torse nu, tout devient clair. Les sorties nocturnessecrètes, lesmarques de coups inexpliquées sur son visage. Easton doit

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êtreentraindepariersursonfrère.Merde,Eastonluiaussidoitparticiperàdescombats,sijemerappellebienl’engueuladeentreeux,l’autrenuit.

– Je pensais bien qu’on était suivis, mais Reed n’a pas voulum’écouter.

Jeme retourneet jedécouvreEaston justederrièremoi. Je répondsavantqu’ilaitletempsdem’engueulerpourlesavoirsuivis.

–Qu’est-cequetuvasfaire,tuvascafter?jememoque.Illèvelesyeuxaucielpuismetireenavant.–Allez,avance,espècedefauxjeton!Toutçaestdetafaute.Autant

quetuyassistes.Jelelaissemetraînerjusqu’aucercle,maisjeproteste,–Jesuislacausedecetruc?Commentpeux-tudireça?Easton,pousselesgensetsefrayeunpassagejusqu’aupremierrang.–TuasbienattachéReedsurunechaise,culnu?–Ilavaitgardésonslip,jemarmonne.Eastonm’ignoreetcontinue:–Tulelarguesentraindebanderplusdurqu’unsous-marinieraprès

unemissiondeneufmoisaufonddesocéans?S’ilteplaît,frangine,ilatellementd’adrénalinedanslecorpsquec’est,oulecombatou…etilmeregardeenhésitant…labaise,etcommetunel’aspasbaisé,voilà,c’estça.Hé,grandfrère,tapetitefrangineestvenueteregarder!

Reedseretourne.–Maisqu’est-cequetufaisici,bordel?Jerésisteàl’enviedemecacherderrièrelegrandcorpsd’Easton.– Je suis juste venue encourager la famille. Allez, les Royal, je

commence,mais jemedisquetouscestypesdoiventsansdouteutiliserdespseudos.Jelèvelepoing:Allezlafamille!

–East,sic’esttoiquil’asamenéeici,jetejurequejevaistebotterleculdimancheprochain.

Eastonlèvelesmains.–Monpote,jet’avaisditquequelqu’unnoussuivait,maistun’asrien

vouluentendreavec tout tondélire sur la façondont tuallaisdonnerà

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quelqu’un…(ilpenchesatêteversmoi)uneleçon.Reedfroncelessourcils.Ilaclairementenviedemejeterdehorsdans

lenoir.Avantqu’ilpuissefairequoiquecesoit,l’autretype,torsenuavecdescuissescommedestroncsd’arbre,luitapesurl’épaule.

–Vousavezterminévotrepetiteréuniondefamille?J’aimeraisbienterminercecombatavantleleverdusoleil.

LacolèredanslesyeuxbleusdeReedsetransformeenamusement.–Cunningham,tunevaspasdurerplusdecinqminutes.Oùestton

frangin?Cunninghamhaussesesépaulesmassives.–Ilsefaitsucerparunefilledepassage.Maisn’aiepaspeur,Royal.

Jenevaispas trop t’amocher.Jesaisque tudoismontrer ta joliepetitegueuleàAstorParkdemain.

–Tunebougespas,meditReedenpointantlesoldudoigt.Bouge,etçavaallermalpourtoi.

–Parcequeçaallaitbienjusqu’àprésentpeut-être?jecraque.–Arrêtedeparleretcommenceàtebattre, lancequelqu’undansla

foule.Sijevoulaisassisteràunsoapopéra,jeseraisrestéàlamaison!Eastonbalanceungrandcoupdansl’épauledeReed,etReedluirend

lecoup.Cunninghams’avancejusqu’aucentreducercleetfaitsigneàReedde

lerejoindre.Reedn’hésitepasuneseconde.Iln’yapasdepetitspasdedanse, pour semesurer l’un à l’autre. Reed se jette sur Cunningham etpendantcinqbonnesminutes,ilséchangentdescoups.

Je tressaille à chaque coup porté par Cunningham, mais Easton secontentederireetd’encouragerReed.

–PariersurReed,c’estgagneràtouslescoups,braille-t-il.Jecroiselesbrasautourdemataille.Callumdisaitqu’ilétaitaufond

du trou,mais est-cequ’il se rendcompteque ses fils y sonteuxaussi ?Qu’ils débarquent ici et qu’ils prennent coup après coup pour sedébarrasserdessouvenirsquileshantent?

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Et qu’est-ce que ça dit demoi, quemes paumes soientmoites, toutcommed’autrespartiesdemonanatomie?Quemarespirations’accélèreetquemoncœurbattelachamade?

JenepeuxpasquitterReeddesyeux.Sesmusclesluisentauclairdelune, et il est si incroyablement beau dans cet échange animal quequelquechosedeprimalsedéclencheenmoi,sansquejesachecommentyremédier.

–Çat’excite,pasvrai?mechuchotesciemmentEastonàl’oreille.Jefaisnondelatête,maistoutmoncorpshurleoui,etalorsqueReed

portesoncoupfinal,uncoupquienvoievaldinguerCunninghametlefaittomber face contre terre, je sais que s’ilme faisait signe avec son petitdoigt,jeseraisincapablederésister.

Pascettefois-ci.

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CHAPITRE20

C’est moi qui conduis pour rentrer au manoir, avec Easton à mescôtés,parcequeReeddéclarequ’ilnemefaitpasconfiancepourfairelaroute toute seule. J’ai envie de lui rétorquer que je suis arrivée sansencombreauchantiernaval,maisjerestemuette.Ilestclairquecesoir,ilnefautpasfairechierReed.

Ils’estbattucontredeuxautrestypesaprèsCunningham,etil leurafichuuneraclée,àeuxaussi.Eastonacomptésesgainssurlecheminduretour,ilsontgagnéhuitmilledollars.C’estunegoutted’eau,comparéàtoutcequ’ilspossèdent,maisEastonm’expliquequel’argentesttoujoursplusagréablequandvousavezsaignépourl’obtenir.

Cela dit, Reed n’a pas saigné. Je ne pensemême pas qu’il aura desbleusdemain.C’estdireàquelpointilaétésauvageetpuissantquandilabalancésespoings,encoreetencore,surcestypes.

Dans l’allée, je coupe lemoteur,mais je reste dans la voiture parcequeReedn’estpasencoresortidelasienne.Eastonnerestepasdanslesparages, ilenfournesonfricdanssapoche,descendduSUVetsedirigeverslaportelatéralesansseretourneruneseulefois.

Cen’est quequand je voisReed se glisser horsdu siège conducteurque je fais pareil.Nous restons plantés à troismètres l’unde l’autre, etnousnous regardons.Son regardduret samâchoire serréedéclenchentenmoi une sorte d’épuisement. Je suis tellement fatiguée, et pas parce

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qu’ilestpresquedeuxheuresdumatinetquejesuisdeboutdepuisseptheuresdumatin.

JesuisfatiguéedelahainequedégagetoutlecorpsdeReedchaquefois qu’il me regarde. Je suis fatiguée de me battre contre lui. Je suisfatiguéedecesjeux,decettetensionetdecettehostilitésansfin.

Jefaisunpasverslui.Ilmetourneledosetdisparaîtsurlecôtédelamaison.Non. Pas cette fois. Il ne peut pas me fuir comme ça. Je vais l’en

empêcher.Jeluicoursaprès,enremerciantintérieurementleslampesàallumage

automatiquequientourentlamaison.Ellesmeguidentlelongdel’alléeetensuiteplusloin,surlecheminquimèneàlagrève.

Reed a une longueur d’avance sur moi, et l’avantage de vivre icidepuissanaissance.Avecuneparfaiteaisance,ilescaladelesrochersquibordentlaplagepourfinalementatteindrelerivage.

Jemefrayeunpassageentrelesrochersetlesable,quandjel’aperçoisquijetteseschaussuresetseschaussettesauloinetentredansl’eau.Ilnesemblepasdérangéparlefaitquelebasdesonjeansoittouttrempé.

Ilesttard,maisilnefaitpasnuitnoire.Laluneestsortie,elleéclairesonbeauvisage.Ilalesépaulesbaissées,ilpassesesdeuxmainsdanssescheveuxlorsquejefinisparlerejoindre.

–Onnes’estpassuffisammenttorturéscommeçaaujourd’hui?medemande-t-ild’unevoixlasse.

Jepousseungrossoupir.–Çaaétéunejournéeplutôtbienremplie,hein?–Tum’asligotéàunechaise,chuchote-t-il.–Tul’avaisbienmérité.Nousrestonssilencieuxunmoment.J’enlèvemeschaussuresetjefais

unpasenavant.Jememetsàhurlerquandl’eauglacéememouille lespieds.Reedsemarre.

–C’esttoujoursaussifroid,l’Atlantique?–Ouais.

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Jeregardel’eauet j’écoute lebruitdesvaguesquiviennents’écrasersurlerivage.Puisjesoupire,encoreunefois.

–Onnepeutpascontinuercommeça,Reed.Ilnerépondpas.–Jesuissérieuse.Je l’attrapepar lebraset je le faisseretournerfaceàmoi.Sesyeux

bleussonttotalementinexpressifs,cequivautmieux,jesuppose,queseshabituelsregardsméprisants.

–Jeneveuxplusmebattre.Jesuisfatiguéedelutter.–Alors,va-t’en.– Je l’ai déjàdit, je veux rester ici. Je veuxaller à l’école etpasser

mondiplôme,etensuitealleràlafac.–Situledis.Jepousseunprofondgémissement.–Tuveuxquejetediseautrechose?Trèsbien,j’aipleindetrucsàte

raconter. Je ne baise pas avec ton père, Reed. Et je ne le ferai jamais.Parce que primo, ça craint, et deuzio, ça craint. Il est mon tuteur, etj’apprécietoutcequ’ilafaitpourmoi.Unpointc’esttout.Ceseratoujourstout.

Reedenfoncesesmainsdanssespochesetneditrien.– Tout ce que nous avons fait aujourd’hui, Callum et moi sur le

bateau,c’estdediscuter.Ilm’aparlédemonpère,ethonnêtement,jenesaistoujourspasquoipenserdetoutça.Jen’aijamaisrencontréSteve,etd’aprèscequej’aiapprissurlui,jenesaispassijel’auraisaimé.Maisjenepeuxpaschangerlefaitquec’estmonpère,ok?Ettunepeuxpasmelereprocherenpermanence.Jen’aipasdemandéàStevedemettremamèreenceinte,commejen’aipasdemandéàtonpèredefaire irruptiondansmavieetdemeramenerici.

Ilraille.– Tu veuxdire que tu préférerais continuer à te foutre à poil pour

gagnerdufric?

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– En ce moment précis ? Ouais, je lui réponds franchement. Aumoins, je savais à quoi m’attendre. Je savais à qui je pouvais faireconfianceetquijedevaisfuir.Ettupeuxdirecequetuveuxàproposdustrip-tease, mais personne, jamais, nem’a traitée de salope ou de putependanttoutletempsoùj’aitravaillédanslesclubs.

Reedlèvelesyeuxauciel.–Parcequec’estuneprofessiontellementrespectable!–C’estunefaçondegagnersavie,jerétorque.Etquandtuasquinze

ansetquetuessaiesdepayerlesmédicamentsdetamèremourante,c’estunmoyendesurvivre.Tunemeconnaispas.Tunesaisriendemoi,alorstu n’as pas le droit de me juger. Tu n’as pas le droit de raconter deshorreurssurquelquechosedonttun’aspaslamoindreidée.

Ses épaules se tendent à nouveau. Il avance encore d’un pas etéclaboussemeschevilles.

–Tunemeconnaispas,jerépète.Ilmejetteunregardnoir.–J’ensaisbienassez.–Jesuisvierge,tulesavais,ça?Lesmots sortent dema bouche sans que je puisse les retenir, et la

surprise lefaitsursauter. Ilsereprendtrèsvite,etsonvisageprenduneexpressioncynique.

–Biensûr,Ella,tuesvierge!–C’estlavérité.Lagênemefaitrougir,bienque jenesachepasvraimentcequime

gêne.–Tupeuxcontinueràpenserquejesuisuneputain,maistuastout

faux.Mamère est tombéemalade lorsque j’avais quinze ans, bon sang,quandest-cequej’auraistrouvéletempsdebaiseràdroiteàgauche?

Ilritméchamment.– Le prochain truc que tu vas me dire, c’est que tu n’as jamais

embrasséunmec,n’est-cepas?

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–Non.J’aifait…certainstrucs.(Mesjouessontécarlates,àprésent.)Maispaslegrandtruc.Pasletrucdonttum’accusesenpermanence.

–C’estlàquetuvasmedemanderdefaireunefemmedetoi?Jetressailledevantl’insulte.–Tuesunevéritableordureparfois,tusaisça?Ilsecontentedefairelamoue.Jechuchote:–Jeteracontetoutçauniquementparcequejeveuxqueturéalises

quetuesvraimentinjuste.J’aipigé,tuasdesproblèmes.Tudétestestonpère, et tamère temanque, et tu aimes te battre juste pour le fun. Çadéconnesecdanstatête,c’estévident.Jenem’attendspasàcequenoussoyonsamis,hein?Jen’attendsriendetoi,enréalité.Maisjeveuxquetusachesquej’enaimaclaquedeça…decettequerelleentrenous.Jesuisdésoléepourcequej’aifaittoutàl’heure.Jesuisdésoléedet’avoirligotéà cette chaise et de t’avoir fait croire qu’il y avait quelque chose entreCallumetmoi.Mais,àpartirdemaintenant,j’arrêtedemebattre.Parle-moicommetuveux,distoutcequetuveuxàmonpropos,continueàagircommeunsalaud,jem’enfiche.J’arrêtedejouer.C’estterminé.

Commeilrestesilencieux,jesorsdel’eauetjerentreàlamaison.J’aidit tout ce que j’avais à dire, et je pensais tout ce que j’ai dit.Avoir vuReeddémolir quelqu’un cette nuit a vraiment tout remis en perspectivepourmoi.

LesfrèresRoyalsontencoreplus larguésquemoi. Ilssouffrentet ilstirent sur tout cequibouge, et la cible laplusévidente, c’estmoi.Maisleurrépondrenefaitqu’envenimerleschoses.Çanefaitqu’alimenterleurcolèrecontremoi.Jerefusedésormaisdem’engager.

–Ella.LavoixdeReedm’arrêtealorsquej’atteinsledecksupérieur.Jem’arrêteàcôtédelapiscineetjedéglutisenlisantunsemblantde

remordsdanssesyeux.Ilmerejoint.D’unevoixfêlée,ildit:–Je…Derrièrenous,uneautrevoixnousfaitsursauter.–Qu’est-cequevousfaitesdehorsàcetteheure-ci,lesenfants?

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Je cachemon irritation quandBrooke apparaît aux portes du patio.Elleestenpeignoirdesoieblanche,sescheveuxblondstombentsurunedesesépaules.Elletientunebouteilledevinrougedanslamaindroite.

JeremarquequeReedgrimaceausondesavoix,maisquandilprendlaparole,c’estsuruntonfroidetindifférent.

–Onestoccupés.Vatecoucher.–Tusaisquejenepeuxpasdormirsitonpèren’estpascollécontre

moi.Brookeréussitàdescendrelesescalierssanstrébucher.Ellevientvers

nous,etjesoupireendécouvrantsonregardaviné.Callumestunprodelacuite,maisc’estlapremièrefoisquejevoisBrookeivre.

–OùestCallum?Jetendsunemainversellepourlaretenir.–Ilestalléaubureau,gémit-elle.Undimanchesoir.Iladitqu’ilavait

uneurgence.Jenepeuxm’empêcherderessentirde lasympathiepourelle. Ilest

tellement évident que Callum n’est pas investi dans sa relation avecBrooke, et tout aussi évident qu’elle veut tellement qu’il l’aime. Je suisdésoléepourelle.

–Jenesavaispasquebaisersasecrétaireétaitconsidérécommeuneurgence,lanceReedsuruntonmoqueur.

LesyeuxdeBrooketranspercentReed.Jefaisunpasversluipourleprotéger.

–Laisse-moiterameneràl’intérieur,jedisàBrooke.Danslesalon.Jevaisallertechercherunecouvertureet…

Ellesedébat.–C’esttoi,maintenant,lamaîtressedemaison?Savoixmontedangereusementdanslesaigus.–Parcequetuesdinguesitupensesquetureprésentesquoiquece

soit pour les Royal. Et toi (elle se tourne vers Reed avec une lueurmauvaisedanslesyeux),tuasintérêtàarrêterdemeparlersurceton.

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Larépliquequej’étaissûred’entendrejaillirdelabouchedeReednesort pas. Je lui lance un regard interrogatif, mais c’est terminé. Sonexpressionestfermée,presqueabsente.

– Unjour, jevaisdevenirtamère.Tudevraisapprendreàêtreplusgentilavecmoi.

Brookes’avanceentitubantversluietpasseunemainmanucuréesursajoue.IlrepousselamaindeBrooke.

–Jeseraimortavant.Ilpassedevantelleetpartendirectiondesbaiesvitrées.Jeluicours

aprèsenabandonnantlapetiteamiedeCallumdanslepatio.Cettefois,c’estmoiquil’appelle.–Reed.Ils’arrêtedevantlesescaliers,danslacuisine.–Quoi?– Qu’est-ce… qu’est-ce que tu allais dire avant que Brooke nous

interrompe?Ilseretourne.Sesyeuxbleusmedévisagentméchamment.–Rien,murmure-t-il.Absolumentrien.Derrièremoi, j’entendsungros bruit. Jen’ai envie qued’une chose,

c’estdecouriraprèsReed,maisjenepeuxpaslaisserBrooketouteseule,complètementsaouleauborddelapiscine.

Jecoursverselleet je la trouveen trainde tituberdangereusementtoutprèsdubord.

–Viens,Brooke.Je l’attrapepar lebras.Cette fois, elleme suitdocilementetappuie

soncorpsfrêlecontrelemien.– Ils sont toushorribles,gémit-elle.Ne t’approchepasd’eux, il faut

quetuteprotèges.–Çavaaller.Tuveuxmonteroutupréfèresresterdanslesalon?Brookefrissonne.–AveclefantômedeMariaquim’observe?Elleestlà.Elleesttoutle

temps là. Lorsque je serai la patronne, on déménagera.On rasera cette

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maisonetonéradiqueradéfinitivementMaria.Çameparaîtassezpeuprobable. Je l’entraîne,moitiéen laportant,

moitiéenlatirantdanslesalonoù,ouais,ilyaunportraitdeMariaau-dessus de la cheminée. Brooke fait un signe de croix avec ses doigtslorsquenouspassonsdevant.

Jemeretiensderiredevantleridiculedelachose.Lesalonestenfaitune pièce longue qui court le long de l’avant de lamaison. Il y a deuxcoinssalondistincts.JepousseBrookejusqu’ausecond,leplusprochedelafenêtreetleplusloinduportraitdeMaria.

Ellesejetteavecreconnaissancedanslecanapé,repliesesgenouxetglisse sesmains sous sa joue.Ses larmesont fait couler sonmaquillage.Elleressembleàunepoupéetragique,ondiraitunedecesstrip-teaseuses,tellement sûre que le type friqué qui lui a donné un pourboire de centdollarsvareveniretva l’enlever.Bienentendu, ilne le fait jamais. Il sesertd’elle,c’esttout.

–Brooke,siçatefaittellementsouffrird’êtreavecCallum,pourquoirestes-tu?

– Tu crois vraimentqu’il existequelquepartdeshommesquine teferontpassouffrir?C’estçaquefontleshommes,Ella.Ilstefontsouffrir.

Ellesortsamainetm’agrippelepoignet.–Tudevraispartird’ici.CesRoyalvonttedétruire.–Peut-êtrequejeveuxêtredétruite,dis-jelégèrement.Elle me laisse partir en ôtant sa main, puis se pelotonne sur elle-

même.–Personneneveutêtredétruit.Nousvoulonstousêtresauvés.–Ildoitquandmêmeyavoiruntypebienquelquepart.Ça la fait rire. Hystériquement. Elle n’arrive plus à s’arrêter. Je la

laisse,jemontelesmarchesaveclesondesonrirequimetitilleledos.Leriredecettefemmequinecroitpaspossibledetrouverunhommequinelafassepassouffrir.

Pourquoiest-cequesaconvictionmefaitl’effetd’unpoignardplantédansmondos,jel’ignore.

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CHAPITRE21

Le lendemain matin, Reed ne me dépose pas au boulot. Quand jequitte lamaison, il estdéjàparti à sonentraînementde football, cequin’étonnepas.

Jesuispratiquementsûrequelanuitdernière,ilnes’attendaitpasàune offre de trêve. Il doit probablement être en route pour l’école àprésent et il doit se creuser la tête pour savoir si ma proposition étaitsincèreousic’étaitjusteunenouvelleruse.

Çan’enétaitpasune. Jem’en tiensà ladécisionque j’aiprisehier.J’arrêtedefairechierlesRoyal.

JeprendslebusetjetravailleauxcôtésdeLucypendanttroisheures.Ensuite, je vais à pied à l’école, je cours enfiler mon uniforme auxtoilettes.

Quand jesorsdes toilettes, je tombesur la filleavec laquelleEastonétaitcensésortiravant.Claire,jecrois.Enmevoyant,ellepinceleslèvres.Etellemepassedevantensifflantuneinsulteentresesdents.

Salope!Ces trois syllabesme font l’effet d’un coupde poing dans le ventre.

J’hésite, jemedemande si j’ai bien entendu,mais lorsque je traverse lehall, toutes les premières années me jettent des regards noirs. Desgarçons,jereçoisdessouriresetdespetitsrictusnarquois.Ilesttoutàfaitévident, que pour une raison ou une autre, je suis le sujet brûlant dumoment.

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Cen’estquequandValériemeretrouvedevantmoncasierquejesuismiseaucourant.

–Pourquoiest-cequetuessortieavecEastonRoyal?medemande-t-elled’unevoixétouffée.

Mon livrede calculmanqueme tomberdesmains.Attendez, c’est àproposd’Easton ?Maisnous étionsdansma chambrequandnousnoussommesembrassés,etReedn’asûrementpasbavé.Alors,pourquoiest-cequetoutlemondeestaucourant?Leclub.Merde.LesouvenirjaillitdemamémoirelorsqueValériesemetàrire.

–Tusais,j’auraisdûtesurveillerdeplusprèscettenuit,metaquine-t-elle.Maisonn’amêmepasbu!Cequisignifiequetuasfaitçaavecluienétantsobre!Dois-jeprogrammeruneintervention?

Jesoupire.–Peut-être.LesfillesqueValm’avaitprésentéesàlasoirée,cellesqu’elleappelle

les Pastels passent devant nous. Toutes les trois me dévisagent enchuchotantentreelles.

–C’étaitstupidedemapart.Jen’aipasvraimentréfléchi.Non,jenepensaisqu’àuneseulechose,àReed,etàlafaçondontil

medévisageaitquandj’étaisdanslacage.–Alors,toutlemondeestaucourant?Ellesourit.–Oh,ilslesavent.Toutlemondeneparlequedeçacematin,etla

premièreclochen’amêmepasencoresonné.Claireestfurax.J’imagine.EtsiClaireestencolère,jemedoutedecequeJordanva

diredetoutça.Unepauvrefillecommemoi,quiposesessalesmainssurunmembredesaprécieusefamilleRoyal?Çadoitlarendredingue.

–Ettoi?Tuesfurax?jedemandeàlaseulepersonnedontl’opinioncomptepourmoi.

Valériepouffederire.–Parcequetuasfourrétalanguedanslabouched’Easton?Qu’est-ce

quej’enaiàfaire!

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C’est la réponseque j’espérais, et jem’yaccroche lorsquenousnousséparonsdanslecouloirpournousrendreànoscoursdumatin.Aucuneimportance que tout le monde murmure sur mon passage, ou que lesnanasme jettent des regards assassins quand je rentre dans la salle declasse.L’avisdeValérieestleseulquicomptepourmoi.

Celadit, à l’heuredudéjeuner, jene suispas loindem’arracher lescheveux. Chaque fille quime croise semble prête àme trucider. Eastonaggraveencoreleschosesenfaisantundétourpourvenirmedirebonjourdevantmoncasierenmeserrantlonguementdanssesbras.Ilfeintdenepas remarquer que tout le monde nous dévisage, mais moi j’en suisparfaitementconsciente,etc’estinsoutenable.

–TuesElla,n’est-cepas?Jeviensderangermesmanuelsdansmoncasierquanduntypeaux

cheveuxblondshérisséss’approche,enpoloderugbyrayé.Laquestionestridicule,ilsaitparfaitementbienquijesuis.J’imagine

quetouscesmômessontensembleenclassedepuislejardind’enfants,ettout lemonde saitparfaitementquiest la «nouvelle »Royalà laprépad’AstorPark.

–Ouais,jerépondsd’unairindifférent.Ettues?–DanielDelacorte.Ilmetendlamain,puislabaissemaladroitementquandjenelaserre

pas.–Jevoulaismeprésenterdepuisunmoment,mais…Ilhausselesépaules.–C’étaitinterditparReed?Ilacquiescetimidement.Seigneur,touscesgenslecraignentvraiment.–Alors,pourquoiest-cequetuteprésentesmaintenant?Jerécolteunnouveauhaussementd’épaules.– Deuxdemescopainsétaientauclub samedi soir. Ilsdisentqu’ils

t’ontvueavecEaston.–Et?

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J’attendsuneinsultequelconque,maisçanevientpas.Jeletoise.–Comment?Tunevaspasmetraiterdeputeparcequejesuissortie

avecEastonauclub?Ilsouritavechumour.– Si je devais traiter de putes toutes les filles qui sont sorties avec

Easton,ilneresteraitpluspersonnedanscetteécole.Jenepeuxm’empêcherd’éclaterderire.–Jesuissérieux,insisteDaniel.LesflirtsalcoolisésavecEastonsont

unvéritableritedepassageàAstorPark.–Tuparlesd’expérience?jeluidemandepoliment.Ilesquisseunsourire.Cegarçonestmignon,jeluireconnaisça.– Heureusement, non. En fait, je voulais te demander si tu voulais

dîneravecmoiundecesjours.Unevaguedesoupçonmetraverse,etDanieldoits’enrendrecompte,

parcequ’ilajoute:–Jenetedemandepasdesortiravecmoi.Onpourraitfaireçaentre

copains,situpréfères.JeveuxsimplementconnaîtrelafillequiaréussiàfairetournerlatêteàtoutelafamilleRoyal.

J’hésiteencore,alorsilpousseungrandsoupir.–Jepeuxvoirtontéléphone?Sanssavoirpourquoi,jesorsmontéléphonedemapochearrièreetje

luipasse.Sesdoigtseffleurentrapidementl’écrantactile.–Voilà.Tuasmonnuméromaintenant.Alors,qu’endis-tu?Réfléchis

etsitudécidesdedîneravecmoi,envoie-moiuntexto.–Hum.Ok.Biensûr.Danielsouritànouveauetmefaitunpetitsigneavantdemettreles

bouts.Je le regardepartir, lesyeux rivés sur son joli cul. Ila lecorpsd’un

athlète, et je me demande subitement s’il fait partie de l’équipe defootball. J’espèrequenon,parceque sans ça,Reedapprendra sûrement

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que Daniel m’a proposé de sortir avec lui pendant l’entraînement del’après-midi.

Maisj’aisous-estimélebouche-à-oreilledecetteécole.Seulementcinqminutesplustard,toutlemondeestcourantdelapropositiondeDaniel.

Je suis à deux pas de la cafétéria quand je reçois un message deValérie.

–Danielt’ainvitéeàsortiraveclui?Jeréponds:

–Ouais.–Tuasaccepté?–J’aiditquej’allaisyréfléchir.–Neréfléchispastrop.C’estundesplussympas.Unautretextoarrivepeuaprès.

–C’estlecapitainedel’équipedelacrosse 1.Ellerajouteça,commesicelafaisaitunedifférence.En haussant les yeux au ciel, je rentre dans la cafétéria et repère

immédiatementVal ànotre tablehabituelle,dans le coin.Elle sourit enmevoyant,reposesontéléphoneetdit:

– Ok. Raconte-moi tout. Il a mis un genou à terre. Il t’a offert desfleurs?

Pendantuneheure,ellemebombardedequestionsàproposd’untypeàquijen’aiparléquedeuxminutes.

Maisfranchement,çamechangeagréablementdufestivaldemessesbassesdelamatinée,etçamepermetdeneplusêtreobsédéeparcequediraReedquandill’apprendra.

1.Sportcollectifd’origineamérindienne.

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CHAPITRE22

JenevoispasReedavantlafindescours,etquandjelerencontre,iln’estpasentraindecourirpourmedemanderd’éviterDaniel.Aulieudeça,ilestpenchéàlaportièrecôtéconducteur,ilbavardeavecAbby.Etladouceblondes’appuieàlaRoverdeReed,unemainsurlahanche.Cettescènemedonneenviedevomir.

–Ilsontl’airbienensemble.JemeretournepourdécouvrirSavannahàcôtédemoi.Nousnenous

sommespas reparlédepuis le jouroùellem’a fait visiter le campus,ducoupjesuissurprisedelavoir.

–J’imagine.– J’aientendudirequeDanielDelacorte t’avait invitéeàsortiravec

luiaujourd’hui.Ellepassesamaindanssescheveuxraides.–Apparemment,c’estlejourdesragots,j’ironise,maisoui.–N’yvapas,lance-t-ellebrusquement.Sansça,tuvasleregretter.Après avoir lancé cette bombe, elle grimpe sur le trottoir et court

jusqu’àsavoiture,enmelaissantbouchebéeetbienembarrassée.Avant que je puisse comprendre le sens de son avertissement, un

cabriolet de sport décapotable passe dansmon champde vision.Danielmesouritdepuislesiègeduconducteur.

–Chouettevoiture.Jeregardel’intérieur.C’estnoiretpleindecadranslumineux.

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–Quelengin!–Merci.C’estuncadeaudemesparentspourmesseizeans.J’étaisun

peuinquietquandj’aiapprisqu’elleavaitquatrecentschevaux.Jemesuisdemandé simonpère trouvait que j’avais besoinde compenser quelquechose.

Jesouris.Lefaitqu’ilpuissesemoquerdeluimelerendsympathique.–Etc’estlecas?–Ella,ilclaquedelalangueenplaisantant,tuescenséemerassurer

surlefaitquejen’airienàcraindrecôtéattributsmasculins.–Etcommentjelesaurais?jeletaquine.Ilsepenchesurletableaudebordetmefaitsignedem’approcher.– Je vais te dire un secret. Nous, les hommes, avons des ego très

fragiles.Ilvauttoujoursmieuxnousfairedescomplimentspourquenousnenoustransformionspasenpsychopathes.

– Tu n’as rien à craindre côté attributs masculins, je répondsdocilement.

– Voilà, ça, c’est une gentille fille. (Il hoche la tête en signed’approbation.)Jetedéposecheztoi?

Je me relève et je cherche des yeux Easton, les jumeaux ou mêmeDurand,mais lesRoyalne sontpas là, à l’exceptiondeReedquinemevoitpas.Ilreportetoutesonattentionsursonangéliquecopine,cellequiluirappellesamère.

Danielsuitmonregard.–AbbyetReed,s’amuse-t-il,voilàuncouplefaitl’unpourl’autre.–Pourquoitudisça?J’ail’airembêtée,etjelesuis,maisjeregrettedenepasl’avoirmieux

dissimulé.–Reedestdifficile,pascommeEaston.Jenel’aivuqu’avecuneseule

fillecesdeuxdernièresannées.Jecroisquec’estellequ’illuifaut.–Alors,pourquoiilsnesontpasensemble?NousregardonstouslesdeuxReedapprochersatêtedecelled’Abby,

commes’ilallaitl’embrasser.

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–Quit’aditqu’ilsnel’étaientpas?LesobservationsdeDanielnesontpasréfléchies,ilnecherchepasà

meblesser,maisladouleurdiffuseenmoi.–Tuaseuletempsderéfléchiràmaproposition?Mes yeux quittent Reed pour se poser sur Daniel. Daniel est le

stéréotype du garçon riche. Un peu comme j’imaginais les Royal : lescheveuxblonds, les yeuxbleus etunvisagequipourrait orner lesmursdes musées de Grande-Bretagne. Les Royal ont l’air de voyous encomparaisondesonstyleélégantdécontracté.N’importequellefilleseraitfolledejoiequeDanielluidemandedesortiraveclui.Quejeneressentepaslamoindreexcitationpourluiprouvequej’aiunvraiproblème.

–Jesuisunpeularguéeencemoment,jelepréviens.Ilyasûrementdebienmeilleurspoissonspourfaireuncourt-bouillon.

Ilm’étudiependantunmomentensouriant.–Jen’arrivepasàsavoirsituessaiesdemelaissertombergentiment

ou si tu n’as pas assez confiance en toi. Dans tous les cas, jen’abandonneraipas.

Je suis sauvée quand un coup de klaxon retentit derrière nous. Ennous retournant,nousnous rendonscomptequeReedamanœuvréafinderapprochersaRover tellementprèsque lesailesdesdeuxvoituressetouchentpresque.Lajuxtapositiondesdeuxvéhiculesestpresquerisible,avec laRoverquidomine lapetitedécapotableàdeuxplaces.Ondiraitqu’ellepiaffed’enviederoulersurlavoituredeDaniel.

Daniel se renfoncedans le siègeduconducteuretmet lemoteurenmarche.Avecunregardasseznarquois,ilsalueReeddelatête.

–Siquelqu’unsurcompense,jecroisquecen’estpasmoi.Surce,ildémarreetlaisselaplacequeReedoccupetrèsvite.Daniela

tort. Reedn’a aucun besoin de surcompenser. Son SUV surdimensionnéluicorrespondparfaitement.

–Tuvassortiraveclui?medemandeReedaumomentoùjerefermelaportièrepassager.

–Daniel?

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–Unautremect’afaituneproposition?J’auraisbienaiméqu’ilneportepasdelunettesdesoleil.Jenepeux

pasvoirsesyeux.Est-ilencolère.Frustré?Content?–Non,justeDaniel.Etj’yréfléchis.(Jecherchesonregard.)Ilyades

raisonsdenepaslefaire?Unmuscledesamâchoiretressaute.S’ilentrouvre lamoindreporte,

jesaisirail’occasion.Allez,Reed.Allez.Ilmejetteuncoupd’œilrapideavantdesetournerverslaroute.–Jecroisqu’onaparléd’unetrêvelanuitdernière,pasvrai?J’aimeraisquecesoitplusqu’unetrêve,etcettepenséemesurprend.

Uncessez-le-feuestunechose,maisadmettrequejeveuxagirsurnotreattractionmutuelle?Çamesembleêtreuneerreurdangereuse.

–Ouais,untrucdanslegenre,jemurmure.–Alors,jeseraisunconsijetedisaisdenepassortiraveclui.Non,jepense,tumediraisjustequetutiensàmoi.–Jenecroispasquetenircomptedubien-êtredel’autreviolenotre

trêve,dis-je.Reedhausselesépaules.–Situmedemandess’ilvatefairedumal,jeterépondraiquenon.

On ne l’a jamais entendu se vanter dans les vestiaires des filles d’aveclesquelles il sortait?Jecroisque tout lemonde leconsidèrecommeuntypebien. Il faitpartiede l’équipede lacrosse.Cesmecsont tendanceàrester entre eux, alors je ne le connais pas vraiment bien, maissuffisamment, je suppose.Si j’avaisune sœur, çanemeposerait pasdeproblèmequ’ellesorteaveclui.

Cen’étaitpasçamaquestion!jehurlementalement.Àvoixhaute,jel’abordeautrement.

–Est-cequetoietAbbyvousvousremettezensemble?–Nousn’avonsjamaisétéensemble,répond-ilabruptement.–Vousaviezl’airdebienvousentendre,là.Danielditquevousêtes

faitsl’unpourl’autre.

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– Ah bon ? répond Reed sur un ton amusé. Je ne savais pas queDanielétaitconcernéparmavieamoureuse.

–Alors,Abbyfaitpartiedetavieamoureuse?Jeluidonnelebâtonpourmefairebattreavectoutesmesquestions.–Qu’est-cequetumedemandes,exactement?Il tourne à droite, et du coup je ne peux pas voir son visage. Trop

embarrasséepouraborderlesujet,jemerenfoncedansmonsiège:–Riendutout.L’instantd’après,Reedsoupire.–Écoute,jevaispartiràlafacl’annéeprochaine.Etcontrairementà

Gideon, je ne vais pas revenir les week-ends. J’ai besoin de passer dutemps loinde cette ville.De cette famille.Abby etmoi on a eudubontemps,c’estvrai,maisellenefaitpaspartiedemonaveniret jenevaispas labaisouiller, ni personned’autred’ailleurs, justepourmevider lescouilles.

Et voilà, j’aima réponse.Même s’il est attiréparmoi,bienque j’aieremarquéqu’ilaprissoindenepasledire,ilnevarienfaire.Ilvapartirleplusvitepossible.Jedevraisadmirercettesorted’honnêteté,maisjen’yarrive pas. Une partie idiote en moi aimerait qu’il me dise que s’il medésire suffisamment, aucun principe ne pourra l’empêcher de m’avoir.MonDieu,jenesuisqu’unepauvrepetitechose.

Je me détourne pour regarder la ville qui défile devant mes yeuxpendantqueReednousramèneàlamaison.

Finalement,fatiguéedemetaire,jeluidemandeàbrûle-pourpoint,–Pourquoiest-cequetutebats?Pourl’argent?Illaisseéchapperuncinglantéclatderire.–Seigneur,non,jemebatsparceque,commeça,jemesensbien.–Parcequetut’interdisdefairel’amouravecAbby?Ducoup,tudois

sortir et dégommer quelques types pour te débarrasser de ce quit’encombreintérieurement?

Cesparolesm’ontéchappé…

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Reed s’arrête. Il semble surpris que nous soyons déjà arrivés à lamaison.Ilretireseslunettesdesoleiletmeregardedroitdanslesyeux.

Magorgedevienttoutesèche.–Qu’est-cequ’ilya?Ilsepencheetcaressemescheveux.Sespoucessontàdescentimètres

demapoitrine et je prends surmoi pour ne pasme rapprocher encoreplusdelui.

–Tucroisvraimentquec’estAbbyquimegardeéveillétoutelanuit?–Jen’ensaisrien.J’hésite.Jen’aipasenviequecesoitça.Je retiens ma respiration. J’attends qu’il me réponde, mais il se

contentedelâchermescheveuxetd’attraperlapoignéedelaporte.Sansseretourner,illance:– Daniel est un mec bien. Peut-être que tu devrais lui donner sa

chance.

Je reste assise dans la voiture après son départ pour retrouver lamaîtrisedemoi.Aucundenousn’aétévraimentexplicite,maisjesaisquec’estdansl’airàprésent.Jeluiaimontrémessentiments,etilm’aditdelesgarderpourmoi.Ill’afaitdélicatement,maislecouteauleplusproprepeuttoutdemêmeprovoqueruneblessuredouloureuse.

Lorsque j’entredans lamaison,Brookeest installéeà lapiscine.Ellesemble s’être remise de sa beuverie de la nuit dernière. Elle parle avecReed.Deboutdevantsachaiselongue,ilestraidecommelajustice.Ellecaresse son mollet nu. Je l’ai déjà vue faire avec Gideon, et je medemandepourquoilesgarçonsacceptentça.Jesaisqu’ilsnepeuventpasl’encadrer.S’ilestunechosequeCallumpourraitfairepouraméliorersarelationavecsesfils,c’estdelafoutredehors.

Seuleetirritée,jeparsàlarecherched’Easton.Ilestvautrésursonlit,en train de regarder une émission dans laquelle ils démontent unevoiture,puislaremontentpourqu’elleressembleàunvéhiculededessinanimé.Ilsouritquandilm’aperçoit.

–Alorscommeça,nousfaisonsunetrêve,hein?

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–Est-cequecemotexistevraiment?jeluidemandeenentrantdanslapièce.

–Çasonnecommeunmot,alorsçadoitenêtreun.– Conmerdeur, ça sonneaussi commeunvraimot,mais je teparie

quetuneletrouveraspasdansledictionnaire.–Tumetraitesdeconmerdeur?–Naan,tuesjusteunsalecon.–Wouah,mercipetitesœur.–Tusaisqu’onalemêmeâge,n’est-cepas?Jehausselesyeuxaucieletjegrimpesurlelitàcôtédelui.Eastonse

poussepourmefairedelaplace.–Depuistoujours,jesuisplusvieuxetplussagequemonâge.–Ah,ah.Biensûr.–Sérieusement.Reedditqu’onesttouspotesàprésent.C’estpourde

vrai,oubientujouesencoreàunnouveaujeu?Jebougonne:–D’abord,jen’aijamaisjouéàaucunjeu.Etouais,jepensequec’est

pourdebon.Ilal’airplussoulagéquecequej’auraisimaginé.–Celadit,jevoulaisteposerunequestion.Qu’est-cequetupensesde

DanielDelacorte?–Pourquoituveuxlesavoir?– Ilm’ademandédesortiravec luiaprèsavoirentendudirequetu

m’avais embrassée. Apparemment, c’était une sorte de baiserd’adoubement.

Eastonremuesonsourcild’unefaçoncomique.–Jesuisunmagicien,tuvois?–Tuessurtoutimpossible.Jeluijetteunoreilleràlatête,qu’ilrattrapeetglissesoussapoitrine.–Pourquoitum’asembrassée?–J’étaisexcité.Tuétaislà.J’aieuenviedet’embrasser.Ilhausselesépaulesetsetourneànouveauverslatélévision.

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Jelesentaisbien.J’enavaisenvie.ToutestsisimplepourEaston.Ilest dirigé par des pulsions primaires. Manger, boire, embrasser,recommencer.

–Ettoi,pourquoitum’asembrassé?Mes raisons me semblent plus compliquées. Je voulais rendre Reed

jaloux.Jevoulaismeprouveretprouveràtouslesgensdansceclubquej’étaisdésirable.Jevoulaisuncontact tendreetaffectueuxde lapartdequelqu’un, n’importe qui. Finalement, mes raisons ne sont pas sidifférentesdecellesd’Easton.

–J’enavaisenvie.–Tuveuxundeuxièmetourdemanège?mepropose-t-ilentapotant

sajoue.Enriant,jesecouelatête.–Pourquoiça?Ilresteimperturbabledevantmonrefus.–Parceque,parceque,c’esttout.Jedétournelesyeux.– Non, non, tu ne vas pas t’en sortir comme ça. Je veux que tu le

dises. Que tu dises à ton grand frère que tu en pinces pour ton autregrandfrère.

Jeluimens.–Tut’imaginesdestrucs.Jen’enpincepaspourReed.–Conneries.–Non,j’insiste,maisEastonvoitclairenmoi.–Merde,Ella,j’aibesoind’unécranchaquefoisquevousêtesàmoins

d’unmètrecinquantel’undel’autre.Ilsourit,maisredevientsérieuxpresqueimmédiatement.–Écoute,jet’aimebien.Jenepensaispasqueçaseraitpossible,mais

c’estlecas,etcommejet’aimebien,j’éprouvelebesoindeteprévenirquenousdébloquons touscomplètement,nous lesRoyal.Onestdesaffairesaupieu,maisendehors?Noussommescommeunouraganforcequatre.

–EtDaniel?

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– C’estun typebien.Cen’estpasuneordure commemoi.Tous lesgarsdel’équipedelacrossel’apprécient.Sonpèreestjuge.

–Ilyadesrumeursleconcernant?–Pasquejesache.Tuprévoisdetelefaire?–Savannahadit…–N’écoutepasunmotdecequ’ellepeuttedire,m’interromptEaston.Jeluijetteunregardsuspicieux.–Pourquoi?–ElleetGidsontsortisensemblel’annéedernière.Je suis bouche bée. Sérieusement ? Savannah et Gideon ? Je me

rappelle notre tour du campus, son explication très directe de la façondontlesRoyalcontrôlaientl’école,mais jenemerappellepasqu’elleaitmontrélamoindreémotionenenparlant.Saufque…ellel’avaitdévisagépendantlasoiréedeJordan.Ellel’avaitregardéméchamment,commesielletentaitdel’effacermentalement.

– Savannah était une collégienne un peu gauche, poursuit Easton.Appareildentaire.Coiffureassezbizarre.Jenesaispascequ’ellefaisaitàsescheveux.Peut-êtreunecoupedifférente, jenesaispas.Quoiqu’ilensoit,quandelleestarrivéeen seconde,elleavait complètement changé.Gidluiajetéunregardetsel’estmisedanslapoche.Maisàpeuprès,aumoment de la mort d’oncle Steve, les choses ont changé. Il l’a laisséetomberd’unseulcoup,etdepuiselleestcomplètementaigrie.

–Dingue,jesiffle.SavannahetGideon!Jen’arrivevraimentpaslesimaginerencouple.

–Jetel’aidit.Ouraganforcequatre.Ilfaitlegested’écraserquelquechoseavecsonpoing,puissoupireet

seretourneverslatélé.

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CHAPITRE23

Le lendemain matin, Daniel m’attend devant mon casier. Bien queReed et Easton m’aient tous les deux donné leur approbation, je suistoujourspartagéeausujetdeDaniel.MaisilfautquejemesorteReeddelatête.Çaaumoins,c’estclair.

Danielaàpeineletempsdemedirebonjourquej’énoncelaloi.–Ilfautquejetedisefranchementquejesuistoutsaufsûredemoi,

je lui expliquemaladroitement. En cemoment, je vis des changementsénormesdansmavie,etjenepeuxrienentreprendredesérieux.

– Je comprends, promet-il. (Il se penche et dépose un baiser trèstendresurmajoue.)Tuesadorable.Jepeuxattendre.

–Jesuisadorable?Personned’autrequemamèrenem’ajamaisditça.

Jepensequejel’aimebien,enfait.

Chaque jour,Danielme retrouve devantmon casier,me raconte untrucmarrantpuismequitteenm’embrassantsurlajoue.Eastonsemoquedemoi le soir, mais chaque fois que je regarde Reed en espérant uneréponse, il reste impénétrable. Je n’ai pas la moindre idée de ce qu’ilressentàproposdetoutel’attentionquemeporteDaniel,maisaumoins,notre trêve court toujours. Même Callum a remarqué la différence aumanoirRoyal.Quandilestpassédevantmachambrel’autresoiretqu’il

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nousavus,Eastonetmoi,regarderlatéléensemble,jevousjurequesamâchoireafaillisedécrocher.

Le vendredi, j’apporte à Daniel un beignet aux pommes, parce qu’ilm’aditquec’étaitsapâtisseriepréférée.Et,cette fois, ilm’embrassesurleslèvres.C’estdouxetsecmais,étrangement,pasdésagréabledutout.

Ungrosbruitauboutduhallm’effraieetjesursaute,manquantfairetombersoncadeau.

Danielm’arrachelapâtisseriedesmains.–Hé,doucement!ilnefautpasgâcherlanourriture.C’estunegrave

violation de la Convention de Genève. Je vais devoir te coffrer pour techâtier.

Sesyeuxpétillent.– Est-ceque tuessaiesdesortiravecmoiparceque j’aiaccèsàdes

pâtisseries?jeluidemandeenfaisantsemblantd’êtresuspicieuse.–Oh.(Ilposesamainsursapoitrine.)Jesuisdécouvert.Est-cequeje

vaisavoirdesproblèmes?Sessingeriesmetirentunsourire.–Ohh,jet’aifaitsourire,etc’estmauvaissigneparceque,mabelle,

ce sourire estunassassin. Je croisquemoncœur s’est arrêténet. (Il sefrappelapoitrine.)Écoute.

Danielestsiouvertementringardettellementjoyeuxquejedécidedejouerlejeu.Jeposematêtecontresapoitrineetj’écoutelesbattementsréguliersdesoncœur.

À côté de moi, j’entends quelqu’un qui bâille bruyamment. C’estEastonquicollesondoigtenbasdesagorge.Ilnousfaitlesgrosyeuxetpoursuit son chemin. À côté de lui, Reed ne lève pas la tête. Il esttellementsexyavecsachemised’uniformequipendhorsdesonpantalonquejedoisfaireuneffortpourregarderailleurs.

Danielsemarre.–Alors,tuviensaumatchcesoir?–Jepense.Jem’interdisdemeretournerpourregardercequefaitReed.

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–Mais jen’arriveraisansdoutepasavant ladeuxièmemi-temps.Jebossejusqu’àdix-neufheureslevendredi.

–Etpourlafêted’après-match?–J’yvaisavecEaston.Hiersoir,noussommestombésd’accord,c’estluiquim’emmèneàla

fêted’après-match.Valrestechezelle,ellearendez-voussurSkypeavecTam.Cequi craint,parceque jem’amusebeaucoupplusquandelle estdanslesparages.

PendanttoutenotrediscussionàEastonetmoi,àproposdumatchetdequellevoiturenousallonsprendrepourallerà lafête,Reedestrestéplanté là, sans bouger. Il était muet comme une tombe, et j’ai eu bienenviededelesecouerpourqu’ilmedisequelquechose.Maisçarompraitsûrementlatrêve.

Je n’arrive pas àme décider. Est-ce que je préfère lamaison RoyalcalmeavecunReedsansvoix,oucelleoùilmehurledefoutrelecampenmemenaçantavecsaqueue?

–Pigé.Onpeutseretrouverlà-bas,non?–D’accord.Il me lance un de ses sourires à un million de dollars, et je me

demandepourquoijeneluidispasoui,toutsimplement.

Lafêtesedérouledansl’hôtelparticulierd’undesjoueursdelacrosse.Je ne le connais pas. C’est un dernière année, comme Reed, etapparemment un véritable geek en sciences. Lui et un autre type de lasection scientifique sont en traindepréparerdes cocktails qu’ils serventensuite dans des béchers en verre. Ils se donnent à fond, ils ontmêmeenfilédesblousesblanchesdelaboratoirequ’ilsportentgrandesouvertespourmontrerleursabdos,cequiannihiledéfinitivementlestéréotypedufortenthèmebinoclard.

Jechoisisundaïquiri-fraise,bienquelebarmantentedemerefileruntrucvertàl’aspectbizarre.

Eastonrefuseletout.

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– Moi je carbure à la bière, déclare-t-il. Tout le houblondansmoncorpsvaréagirsij’ingèreuntrucsucré.

Unefoisquej’aiprismonbécher,Eastonm’entraîneplusloinpourmemettreengarde.

–Cetrucpeutêtrehyper-fort,vas-ymollocesoir.J’enprendsunegorgée.–Çaressembleàunsmoothie.– Exactement.Ces types sontpassésmaîtresdans l’artde saouler à

morttoutlemonde,sansquepersonnenes’enrendecompte.–Ok.Jem’entiendraiàunverre,c’esttout.Çame touche qu’Easton s’inquiète pourmoi. Personnene l’a jamais

fait.JebalaielapièceduregardàlarecherchedeReed,maisjenelevoisnullepart.C’estpathétique.

JedemandeàEaston:–Reedvientcesoir?–Jenesaispas.Probablementqueoui.Jel’aivuavecAbbyàlafindu

match.En réponse, je siffle la moitié du bécher d’un seul coup. Easton

cherchemesyeux.–Çavaaller?–Jemens:jesuisautop.–Situasbesoindequoiquecesoit,jenesuisqu’àuncoupdefilde

distance,dit-ilenmemontrantsonmobile.Maispourlemoment,ilfautquej’aillem’envoyerenl’air,petitesœur.

Ilmeclaqueunebisesurlajoueetpartendirectiondelapiscine.Daniel apparaît à l’instant où Easton s’en va. Ses yeux brillent

d’espièglerie.– Mon Dieu, je pensais que ton chaperon n’allait jamais te lâcher.

Viens,jevaisteprésenterauxautres.Il passe un bras autour demon épaule et m’entraîne de groupe en

groupe.Desmômesqui,àl’école,nem’auraientmêmepasdonnél’heureme saluent subitement, me sourient, me font la conversation, et nous

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parlonsdumatchquenotreéquipeagagnécesoir.Del’équipeadversedelasemaineprochaine,quenousallonsécraser.Del’espècedeHobbitquenousavonsenchimieetquetoutlemondedétesteetduprofd’artqu’onadoretous.

Cetteexpérienceestquasi féerique.J’ignoresic’estparcequeDanielestlà,ouquel’annoncedelatrêveaveclesRoyalapeuàpeuatteintlepetitpeuple,maistoutlemondeestsympa.Leurssouriressontfrancsetleséclatsderirecontagieux.

–Tut’amusesbien?murmureDanielàmonoreille.Jemepencheverslui.–Oui,vraiment,dis-je,surprise.Reed est dehors, quelque part, et cette fois, c’est lui et Abby qui

s’agitentdanssonRangeRover,pasWadequejeviensdevoiràl’intérieuravecunefillesurlesgenoux.Bonetalors?C’estbienqueDanielsoitlà,avecsonbrassolidepasséautourdemesépaulesetsoncorpstièdecontrelemien. Une étrangemollessem’envahit. L’alcool détruitmes défenses,commemel’avaitditEaston,etunsignald’alarmes’allumequelquepartdansmanuque.

–Laisse-moit’offrirundeuxièmeverre,proposeDaniel.–Jepense…Jelèvelesyeuxverslui,sansbiensavoircequejepense.–Elleabesoind’allerauxtoilettes.Je fronce le nez devant cette intruse. C’est Savannah Montgomery.

Qu’est-ce qu’elle fait ici ? Avant que je puisse protester, elle me traînedanslasalledebainslaplusprocheetfermelaporte.

–Maisqu’est-cequisepasse,bordel?Ellesetourned’unairhésitant,avantdeselancercarrément:–Jenet’aimepasbeaucoup…–Sansblague.Merci.–Maisjenelaisseraismêmepasmapireennemiesefairebaiserpar

Daniel.Jeredoubledeconfusion.

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–Qu’est-cequinevapasavecDaniel?ReedetEastonm’ontditquec’étaituntypebien…

Ellemecoupe.–Tuveuxunconseil?Neprendsjamaispourargentcomptantceque

teditunmembredelafamilleRoyal.Cette aigreur dont m’a parlé Easton est à présent douloureusement

évidente.Elleestvisibledanssamâchoirecrispée,danssadictionhachée.–J’aibiencomprisquetunelesaimespas,dis-jedoucement.Onm’a

ditpourtoietGideon…Ellem’interromptànouveau,sesyeuxvertssontremplisdedédain.– Tu sais quoi ? J’ai changé d’avis. Toi et Daniel vous allez

parfaitementbienensemble.Passeunbonmoment,Ella.Sur ce, Savannah me jette une serviette humide qui m’atteint au

visage et trempe ledevantdemon tee-shirt.Déconcertée, je ramasse laserviette et je tire sur le tissu mouillé. Mais qu’est-ce qui vient dem’arriver,bordel?

Daniel m’attend à l’extérieur de la salle de bains, une expressioninquiètesurlevisage.

–Qu’est-cequinevapas?Tut’esfritéeavecSavannah?– Pas vraiment. Je ne comprends pas ce qui s’est passé, si ce n’est

qu’elleétaitenpétardetqu’ellem’atrempémontee-shirt.Je lui montre le tee-shirt d’Astor Park que j’ai emprunté à un des

jumeauxetdontj’avaisresserréledospourqu’ilm’aille.–Tuveuxunautretee-shirt?Jepeuxenprendreundanslachambre

deFarris,dit-ilenm’indiquantl’étage.–Non,çava,ilvasécher.(Jesecoueletissu.)Ilestassezfin,ilvavite

sécher.Ilhochelatête.– Écoute, je ne veux pas dire du mal d’elle, mais Sav n’est pas

quelqu’undetrèsheureuxcesderniers temps.Ne la laissepasdéteindresurtoi.

–Oui,j’aibiencompris.

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–Ilssontentraind’installerunjeudefléchettesdanslapièceàcôté.Çatedit?

–Biensûr,pourquoipas?Ilmetendunebouteilled’eau.– Je ne sais pas si tu la veux, vu que tu es déjà trempée,mais j’ai

pensé que tu pourrais en avoir envie. Ces boissons que concocte Farrissonttrèsfortes.

–Merci.J’ouvre labouteille,et jeremarquequelebouchonest intact.Daniel

entre très clairement dans la catégorie des braves types, et je seraisvraimentstupidedenepasluilaisseraumoinsunechance.

Son bras heurte mon épaule pendant que nous avançons dans lecouloir.

– Tu sais, Daniel… (et je reprends ma respiration), je crois qu’ondevraitsortirensemble.

–Ouais?Ilestrayonnant.–Certainement.–Trèsbienalors.Ilmetireversluietm’embrassesurlatempe,dansungesteagréable,

rassurant.–Maisd’abord,allonsfilerlapâtéeauxautresauxfléchettes.Lacible,untrucdebar,estinstalléedanslapoolhouse,àl’arrièrede

lapropriétédeFarris.Deuxautresfillessontdéjàvautréessuruncanapéencuir,cequimerassure.Danieln’apasprismadécisiondesortiravecluicommeunaccordpourpassertoutdesuiteàlacasserole.

–JeteprésenteNadineetZoé.Ellessontducoin.Zoémetendunemainmolle.–OnvaàaulycéedeSouthWest.–C’estcontrevotreéquipequ’onajouécesoir,non?–Ouais,elleconfirme.Etmaintenant,onfêteça.Jememarre.

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–Maisvousavezperdu!–Alors,ilfautnousconsoler.ElleetNadinecontinuentàrirebêtement.–Heureusement,nousavonsHugh.Hughestuntypenerveux,àpeineplusgrandquemoi.Iltireunetaffe

de je ne sais quoi, ce qu’il est en train de fumer, et il se contente dehocherlatête.

Danielfaitunclind’œilauxfilles.– Bon,Ellaetmoiavonsunrencardaveclacible.Vousvoulezvous

joindreànous,touslestrois?–Non,onsecontenteraderegarder.Hughadoreregarder,pasvrai,

Hugh?Hughleurenvoiesafuméeàlafigure,cequilesfairerireencoreplus

fort. Ça n’est pas difficile de comprendre que ces filles sont totalementbourréesoudéfoncées.

–Tuveuxlarougeoulajaune?Danielmemontredeuxfléchettes.–Larouge.Ilmepasselesfléchettesrougesetm’entraînejusqu’àlacible.Avantque jepuisse lancerma fléchette, je sensunepiqûre surmon

avant-bras.–Ouille!Jemefrottelebras.C’étaitquoicetruc?Illèvelafléchettejauned’unairgêné.–Jet’aipiquéavecmafléchette.–Merde,Daniel,çafaitmal!Çan’estmêmepasdrôle.Ilfixelapointedesafléchetteenfronçantlessourcils.–Jesuisdésolé.J’aidûtepiquertropfort.Jem’efforcedemedétendre.–Bonmais…nerecommencepas,d’accord?Ilmeprenddanssesbras.–Çan’arriveraplus.

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Je le laisse me serrer contre lui un moment, parce que ça me faitvraiment du bien. Quand il me lâche, il faut que je me retienne enm’appuyantàlatable.Jen’aiplusd’équilibre.Çadoitêtreleseffetsdelaboisson.Onfaitunepartie,puisuneautre.

Je joue comme un pied. J’atteins plus souvent le mur que la cible.Daniel me vanne en me disant qu’il espère que je n’aurai jamais àparticiperàHungerGames.

Àlatroisièmepartie,mabouchedevientétonnammentsèche.J’essaied’attraperma petite bouteille d’eau,mais je lamanque, elle s’écrase auloin.

–Ohmince.Désolée.J’entendslesfillesricanerderrièremoi.Jetombesurmesgenouxetje

cherchequelquechosepouressuyerlesol.Montee-shirt.Montee-shirtestabsorbant et il est déjàmouillé. Enplus, ce vêtementmegêne. En fait,tous mes vêtements me grattent. Mon soutien-gorge est trop serré, etl’élastiquedema culotteme rentre dans la peau.À chaquemouvementquejefais,lesfilsdelindemajupem’irritentleshanches.Ilfaudraitquej’enlèvemesvêtements.

–C’estunebonneidée,approuveDaniel.J’aidûparleràhautevoix.–Mesvêtementsmegênent,j’avoue.–Oui,mettons-noustousàpoil,gueuleunedesfillesdepuislesofa.J’entendsdesfroissementsd’étoffeetd’autresricanements.–Matêteestcoincée,seplaintl’uned’elles.–Pourquoiest-cequevousnevousfilezpasuncoupdemain,toutes

lesdeux?suggèreHugh.Jemerelèveenm’appuyantsurl’épauledeDaniel.Zoéenlèvelehaut

deNadineetletendàHugh.Illejetteàterreetserenfoncedanslesofa.–Jeferaismieuxd’yaller,dis-jeàDaniel.Je me doute de ce qui va se passer entre eux trois, et je n’ai pas

vraimentenvied’yassister.

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Danielmeplaquecontreluietpassesonbrasautourdemataille.Saréactionphysiqueà la scènequi sedérouledevantmoiestparfaitementclaire.

–OùestReed?(Jemedétourneviolemment.Lespicotementsquejesensentremescuissesmefontpenseràlui.)J’aibesoindelui.

–Maisnon,tum’as,moi.Danielsebranledoucementcontremoi.–Non.(Jelerepousse.)Jesuisdésolée,Daniel.Jenecroispas…Je

nesuispas…Jelèveunemainjusqu’àmatêteetjelapasse,toutetremblante,dans

mescheveux.Ledésirpulsedansmesveines.J’entendsmoncœurquibat,fortetvite,dansmesoreilles.J’essaiedemeconcentrer.

–JeveuxReed.–Seigneur,espècedepauvreidiote!Contente-toidefermerlesyeux

etprendstonpied.Sa voix n’est plus sympa du tout. Elle est froide et mécontente. Il

attrapelebasdemontee-shirt.J’essaiedeluiarracherlesmainsmaismesmouvementsmanquentdecoordinationetilm’ôtemonhautavantmêmequejepuisseprotester.

J’entendsHughquidemande:–Commentçavaparici?Savoixestforte,proche.Trèsproche.–Elleestdéfoncée,c’esttout.Jeluiairefilédelamolly 1.Ellecroyait

quejel’avaispiquéeavecunefléchette.Danielà l’air ravide sonmauvais coup. J’essaiede lui envoyermon

poingdanslafigure,maismonbrasesttroplourd.Hughs’arrête.– Mon pote… tu crois qu’on devrait faire ça avec Ella Royal ? Je

croyaisqu’onallaitsecantonneràdesfillesquinesontpasducoin,aprèslacousinedeSavannah.Cen’estjamaismalindedéconnersiprèsdechezsoi.

Danielhausselesépaules.

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– Les Royal ne peuvent pas la saquer. Elle ne dira rien. C’est unemerde. C’est la première fois que ça me prend une semaine pourharponnerquelqu’un.

Il prend mon visage entre ses mains, et c’est si bon. J’aimeraistellementqueReedsoitlàetquecesoitsesmains.

Jebalbutiesonnom.–Qu’est-cequ’elledit?Danielsemarre.–JecroisquecettepetitepouletteenpincepourEastonetReed.Il malaxe violemment mes seins, et son contact me fait gémir à

nouveau.– Merde, elle est en chaleur, ricane Hugh. Génial. Je peux l’avoir

quandtuaurasterminé?–Biensûr.Laisse-moifairemontruc,aprèselleseratouteàtoi.– Tucroisqu’elleest relâchée jusqu’àquelpoint?J’aientendudire

qu’elleavaitdeskilomètresaucompteur.–Jenesaispasencore.Jen’arrivepasàluifaireécartersesputains

decuisses.Ilmepoussesurunechaiseetglisseungenouentremesjambes.–Pourquoituneluidonnespasunpeudecoke?Çalaréveilleraitun

peu.–Ouais,bonneidée.La pression disparaît dès que Daniel se lève et se dirige vers le

comptoir.Paniquée,jeleregardefouillerdansuntiroir.– Où est-ce que Farris planque cettemerde… je croyais que c’était

là…ah,peut-êtredanslefrigo.J’entendsdesbribesdevoixàl’extérieurdelapoolhouse.–Ella…l’avue…Daniel…lapiscine…–Reed.(Jem’efforcedemelever.)Reed.(Jetitubeenpassantdevant

lesdeuxfillesquisonttropoccupéesàs’embrasser.)–Hé,arrête-toi.

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Daniel fermeviolemment le tiroiretmecourtaprès. Il jettesamainsurlaporteavantquej’aiepul’ouvrir.

–Tuvasoù?–Ilfautquejeparte.J’insisteenattrapantlapoignée.–Non,tunevasnullepart.Turestesici.Nous nous battons pour ouvrir la porte. Daniel a quelque chose de

brillantetacérédanslamain.–Hugh,viensmefileruncoupdemain,s’ilteplaît.Jetapecontrelaporte.–Reed!Reed!Danielm’injurieetHughmetireenarrièredetoutessesforces,mais

c’est trop tard. La porte s’ouvre et Reed apparaît. Ses yeux bleus seremplissentderagequandilnousvoittouslestrois.

Jeplongeverslui.Daniel,toutàsasurprise,melâcheetjetombeparterre.

–C’estquoicebordel?– Merde, mon pote, elle est défoncée, répond Daniel avec un rire

nerveux. Il a fallu que je l’amène ici pour ne pas qu’elle s’offre enspectacle.

–Non,non.Je proteste, en essayant dem’asseoir,mais tout est embrouillé dans

matête.Jen’arrivepasàtrouvermesmots.JenepeuxqueregarderReeddésespérément. Il vamedétester àprésent. Il va vraiment croireque jesuisunepute.Mesdernièresforcesm’abandonnent.Jesuisfoutue.

D’autres gens arrivent et cinq paires de grands pieds semettent enligne devantmes yeux. Le nombre de ceux qui viennent assister àmonhumiliationaugmente.

Je baisse la tête sur le sol carrelé dans l’espoir qu’il s’ouvre et qu’ilm’avaletoutentière.

–Tuasdeuxpossibilités,commenceReed.(Savoixestforteetcalme,commes’ilsaluaitunpotedeclasselematin.)Oubientut’excuses,tudis

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lavérité,etunseuld’entrenoustecasseralagueule.Outumens,etonvase relayer pour transformer ta tronche en purée de wasabi. Fais bienattentionàcequetudis.

Est-cequec’estàmoiqu’ilparle?Peut-êtrebien.Jelèvelatêtepourprotesterquejen’airienfaitdemal,maisquandjeregardeenl’air,jevoisun mur de Royal. Tous les frères sont là. Chacun d’entre eux, mêmeGideon.Ilsontlesbrascroisésetdestêtesdetueurs.Aucund’euxnemeregarde.

Je jette un coup d’œil derrière mon épaule à Daniel qui a les brasballants.Uneseringuependouilleentresesdoigts.

Ils’éclaircitlavoix.–Reed,jen’airienfaitdutout…–Jecroisquetuasfaitlemauvaischoix.J’entendsEastonmarmonner:–Unchoixfranchementstupide,enplus.QuittantDanieldesyeux,Reedsepencheversmoietmeprenddans

sesbras.Ilmeserrecontresapoitrine.Undesesbrasestglissésousmesfesses, l’autreestsolidementpasséautourdemesépaules.Cetypeaétémon ennemi, la source de tant de douleurs émotionnelles. Mais, en cemoment,jemecolleàluicommes’ilétaitleseulréconfortquejepuissejamaistrouverencemonde.

UnefoisdanslaRangeRover,jememetsàpleurer.–Reed,ilyauntrucquinevapaschezmoi.–Jesais,bébé.Maisçavaaller.Ilposeunemainfraîchesurmajambeetlasensationestdingue.–J’aienviequetumetouches,dis-jeententantdefaireremontersa

mainplushaut.Il grogne. Sa main resserre son emprise sur ma jambe, juste une

seconde,puisill’enlève.–Non,jeproteste.C’estbon.

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–Daniel t’ashootéeà l’ecstasy,Ella.Tuesdansunétatd’excitationsexuelledueàladrogue,jeneveuxpasprofiterdetoi.

–Mais…j’argumenteenmejetantsurlui.–Non,aboie-t-il.Maintenant,s’ilteplaît,pourl’amourdeDieu,est-ce

quetupeuxrestertranquilleetmelaisserconduire?Je me recule, mais cette sensation de picotements sur ma peau ne

s’arrête pas pour autant. Je frottemes jambes l’une contre l’autre pourcalmerladouleur,etçam’aideunpeu.JepréféreraisquecesoitReedquime touche,maismes propresmainsme font du bien. Je ne crache pasdessus.J’ail’impressionquemapeauestvivante.Jeglissemesmainssousletee-shirtquej’aiempruntéàReedpourmecaresser.

–Ella,s’ilteplaît.Tumetues.Embarrassée,j’essaiedem’arrêter.Jem’excused’unepetitevoix:–Jesuisdésolée.Jenesaispascequim’arrive.–Rentronsàlamaison.Ilal’airépuisé.Leresteducheminenvoitureestatroce.Jedoismobilisertoutemon

énergiepourparvenirànepasmetoucher.Reedstoppelavoiture.Ilouvremaportièreengrandetjetombedans

ses bras. Nous gémissons tous les deux, moi de soulagement, lui defrustration.

D’autresportièresdevoituresclaquentetlesautresfrèresRoyalnousrejoignent,avecSawyerquicourtdevantpournousouvrirlaporte.

Gideonprendlaparole.–Lanuitvaêtrelonguepourelle.Ilfautquel’undevousluivienne

enaide.–Dequellefaçon?grinceReed.–Tusaisbien.Gideonbaisselavoix.–Merde.–Vousvoulezquejem’enoccupe?demandeEaston.Jeglisse.Reedmerattrape,sapoignesefaitplusferme.

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–Non.Personned’autrequemoi.C’estlecerveauembruméqu’ilmeporteenhautdesescaliersetqu’il

medéposesurmonlit.Quandilrecule,consterné,jetentedelerattraper.–Nemequittepas.– Jenetequitteraipas,promet-il.Jevais justechercherungantde

toilette.Jemeremetsàpleurerdèsqu’ildisparaîtdanslasalledebains.–Jenesaispaspourquoijesuistellementémotive.–Tuescaméeàmort.Àlamolly.Àlacoke.EtDieusaitcequ’ilt’a

donnéd’autre.Reedal’airécœuré.Jechuchote:–Jesuisdésolée.–Jenesuispasencolèrecontretoi.Ilposelegantdetoilettemouillésurmonfront.–Jesuisencolèrecontremoi.C’estmoiquiaifaitça.Eastonetmoi.

Jet’aifourréelà-dedans.JesuisReedleDestructeur.Ilal’airtriste.Tunelesavaispas?–Jen’aimepascenom.Il s’assied à côté de moi en passant et repassant le gant sur mon

visage,surmoncouetmesépaules.C’estdivin.–Ouais,etcommentvoudrais-tum’appeleràlaplace?J’ouvrelaboucheetjelance:–MonReed.

1.Lamollyestunedroguedésinhibantetrèspopulaireauseindela jeunessedesUSA.Elleprovoqueuneformed’euphorie,unedistorsiondessensetunemultiplicationdesémotions.

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CHAPITRE24

Touslesdeux,nousavonslarespirationcoupée.–Ella,commence-t-il,maisilneterminepassaphrase.Ilsecontente

demeregarderm’asseoir.Jeluiprendsdesmainsleganthumideetjelejetteparterre.Sontee-shirtnetardepasàsuivrelegant.–Ella,essaie-t-ilànouveau.Maisj’enaimaclaquedesestentativespourresternoble.J’aienviede

lui, là,toutdesuite.Jegrimpesursesgenouxetj’enserresatailleentremesjambes.

–Demande-moipourquoiDanielétaittellementencolèrecontremoi,toutàl’heure.

Reedessaiededesserrermesjambes.–Ella…–Demande-moi.Une seconde passe, il arrête de vouloirme repousser. Sesmains se

posentsurmeshanches.Unfrissonmeparcourttoutlecorps.– Pourquoiétait-ilsiencolèrecontretoi?medemandeReedd’une

voixrauque.–Parcequejen’arrêtaispasdediretonnom.Sesyeuxétincellent.–Parcequec’esttoi.Çaatoujoursététoi,etjesuisfatiguéedelutter

contreça.

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Unnuagepassedanssesyeux.–Monfrère…Jerépète.–C’esttoi,toujourstoi.Jecroiselesmainsderrièresanuqueetilsemetàgémir.–Tun’aspasl’espritclair.– Cen’estpasàcausedesdrogues, jemurmure.Jen’aiplus l’esprit

clairdepuisquejet’airencontré.Illaisseéchapperunautregémissement.–J’ail’impressiondeprofiterdetoi.J’attiresatêtecontrelamienne.–J’aienviedetoi,Reed.Nemeforcepasàtesupplier.Et voilà qu’il cède. D’une main, il se met à fourrager dans mes

cheveux,del’autreilmeserreviolemmentcontrelui.–Tun’aurasplusjamaisàdemander.Jevaistedonnertoutcequetu

veux.Saboucheeffleurelamienne,d’aborddoucement.Légèrecommeune

plume,commes’il tentaitdemémoriser la formedemes lèvresavec lessiennes. Et ensuite, au moment où je vais en redemander, il glisse salangue entremes lèvres entrouvertes etm’embrasse si intensément quematêtesemetàtourner.

Nous tombons à la renverse sur lematelas. Sesmains trouventmeshanchesetmetirentcontrelui.Saboucheestcolléeàlamienne,elleestvorace, exigeante. Je mets toute mon âme dans ce baiser. Tout monamour, toute ma solitude, tous mes espoirs, toute ma tristesse. Reedprendletoutetmedonnetoutenretour.

Nousnouslovonsdanslesbrasl’undel’autreetsabouchetrouvelespoints de pulsation derrière mon oreille et à la base de mon cou. Ilm’embrasse comme s’il ne pouvait plus s’arrêter. Il pousse une de sescuisses entre mes jambes, et même à travers mon slip et son jean, jetrouvelesoulagementdontj’avaisbesoin.Enfinpresque.Cen’estpastout

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à fait suffisant, et je montre mon mécontentement en poussant ungémissementtorturé.

Ilsedressesursescoudesetmeregarde, lesyeuxmi-clos, les lèvresgonfléesparnosbaisers.C’est lemec leplus sexyde la terre,et ilestàmoi.Aumoinspourcesoir.

–Encore,jesupplie.Ilsourit,seretournesurlecôtéetglisseunemainentremesjambes.

Uneondedechocsecouemoncorps.–C’estmieux?murmure-t-il.Etdeloin.Jeme tortille, etunautre sourireétire les coinsde saboucheavant

quesonregards’enflammedenouveau.Sapaumefaitdespetitscercles,samaininsisteàl’endroitdemondésir.

Mon corps ressemble à un fil tendu, quelques secondes avantl’explosion.Littéralementquelquessecondes,parcequ’ilsuffitd’unautrefrottement de samain pour que le plaisir explose enmoi. Je halète, jetremble, sidérée par la violence de ce que je ressens. Peut-être est-ce àcausedesdrogues,mais jepréfèrepenserque c’estReed.Sonmurmured’encouragementàvoixbassependantque je remuecontre samain.Lapreuvedesonexcitationquiappuiecontremahanche.

Nos lèvres se rejoignent ànouveauet je l’embrasse avecuneardeurrenouveléeparcequeledésirrevient,plusvitequenouslepensionsl’unetl’autre.Jel’attrapeenletirantparlesépaulesjusqu’àcequ’ilsoitau-dessusdemoi.

Nosbouchesse trouventànouveau,et ilgémitquand jemecambrepourmefrottercontrelui.Larigiditédesonsexeestlaseulechosequimeprocuredusoulagement.Ilesténorme,ilestprêt,maisquandj’essaiedel’atteindre,ilrepoussemamain.

–Non,dit-ild’unevoixtorturée.Cen’estpasmoi,ça.Pascettenuit.Pasquandtues…

Droguée, jepensequ’il veutdire ça,mais jene suisplusdéfoncéeàprésent.Oudumoinspasparautrechosequelui.

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Saboucheserefermesurmoncou,ill’embrasseetlesuceenremuantsoncorpscontrelemien.Leplaisirmonte,maissonjeannousgêne.Jeneveuxpasêtrelaseuleàprendremonpied.Jeveux…

Il repoussemamain encore une fois, tout en reculant. Il ne va pasbienloin.Lachaleurirradiemapeaulorsquesesbaisersdescendentversmes seins.Ses lèvres caressentmon téton.Quand sa langue sortpour ygoûter,jevoisdesétoiles.Quandsaboucheserefermedessus,jenepeuxplusrespirer.Chacunedesestaquineriesmefaitgrimperauxrideaux.Àsoncontact,moncorpssetendtoutentierversl’insaisissable.Ilbougedenouveau, il attrapemonautre tétonavec sabouche.Ensuite, ildescendplusbas,versmonbas-ventre.Jechuchote:

–OhmonDieu!Mesterminaisonsnerveusesgrésillent.Jesupplie:–Reed!–Toutvabien,bébé,jetetiens.Jesaiscedonttuasenvie.Moncœurs’arrêtedebattrequandilatteintmonentrejambe.Jesens

samainqui tremblequand ilbaissemaculotte.Unerespirationhachée,c’est tout ce qu’il laisse passer avant de poser sa bouche surmoi. Cettesensation inconnue me fait pousser un cri. C’est bon. C’est si bon. Salangue trouve un point sensible, ce qui fait tressaillir mes hanches. Unprofondgémissements’élève.Jememordslalèvreinférieurepouressayerde rester silencieuse, mais Reed est en train de me rendre folle. Jemanquem’évanouir,j’attrapesatêtepourluitirerlescheveux.Illèveversmoisesyeuxcharbonneux:

–Tuveuxquej’arrête?–Non.Il continue. Sa langue est magique, elle me lèche à un rythme

implacable. Il grommelle un son comme si ma réponse était aussimerveilleusequetoutesleschosesqu’ilmefait.

Ses doigts glissent jusqu’en haut demon entrejambe. Il lève la têtepourmedemanderlapermission.Jelaluidonneavecunhochementde

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tête inquiet. J’en ai tellement envie. Il ferme les yeux en enfilantdoucementundoigtenmoi.Ilserrelesdents.

–Tuessuper-étroite.–Jetel’avaisdit,jeréussisàdired’unevoixétranglée.Ilrit.–Oui,c’estvrai.(Ilretiresondoigtetglisseunemainsurmacuisse.)

Jevaistefaireprendretonpied.–Jeprendsdéjàmonpied,jeprotesteenramenantmesjambes.Unsourireinsolentetfamiliermerépond.–Tun’asencorerienvu.Il se réinstalle entre mes jambes en les écartant tellement avec ses

épaules que je devraismemettre à rougir,mais tout ce que je ressens,c’estde l’excitation.Avecundesesbrasenrouléautourdemacuisse, ilplongesondoigtàl’intérieurdemoncorps.

Lesmusclesdemesjambesseraidissent.Mesdoigtsagrippentsescheveux,maisiln’arrêtepasdem’embrasser,

mêmequandmajouissanceexploseenvagues,danslesquellesjemenoie.Lorsque je commence à redescendre, il se relève et s’allonge àmes

côtés en me prenant dans ses bras. Ses lèvres trouvent mon cou et ilrespireprofondément.

–Pourquoiest-cequetuesvenueici?Jenecomprendspassaquestion.–Je…tusaispourquoi,tonpère…–Jeveuxdirepourquoi,maintenant?Sesparolespleinesdefrustrationmefrappentdepleinfouet.–Peut-êtrequ’àunautremoment,loind’ici,toietmoi,çaauraitété

uneautrehistoire.–Jenecomprendspascequetudis.–Jedisqueçanepeutpassereproduire.(Illèvelatêteetjevoisson

chagrin.) Il faut que je quitte cet endroit de merde et que je mereconstruise,quejedeviennequelqu’undemieux.Quelqu’un…dedigne.

Savoixsecassesurcederniermot.

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– Digne, je murmure en écho. Pourquoi penses-tu que tu n’es pasquelqu’undedigne?

Il reste silencieuxunmoment. Samain caressemachinalementmonépaule.

–Çan’apasd’importance.Oublieça,finit-ilpardire.–Reed.Il s’assied et ôte le tee-shirt de rechange qu’il avait enfilé dans la

voiture. L’autre, celui qu’il avait enlevé pour me le passer quand nousavonsquitté la fête,estabandonnésur le solàcôtédureste le restedemesvêtements.

– Ferme les yeux, Ella, bougonne-t-il en s’installant contre moi denouveau.(Ilesttorsenuàprésentmaisilagardésonjean.Ledenimmegratte la jambe quand je la pose sur lui.) Ferme les yeux, c’est tout, etendors-toi.

Mavoixestétoufféecontresapoitrine.–Tumeprometsquetunepartiraspas?–Jetelepromets.Jemeblottisencoreplus,enmeperdantdanslachaleurdesoncorps

etlesbattementsréguliersdesoncœurcontremonoreille.Quandjemeréveillelelendemainmatin,Reedn’estpluslà.

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CHAPITRE25

– Ça va, petite sœur ? me demande Easton depuis la table de lacuisinelorsquej’entreenchancelantcommesiundix-huittonnesm’étaitpassédessus.

–Non.Jemesensmal.Jeme remplis un verre d’eau à l’évier, je l’avale et jem’en sers un

autre.Lavoixd’Eastonestpleinedesympathie.–Tut’esbienexplosélatronche,hein?Çam’estarrivéàmoiaussi,la

premièrefoisquej’airencontréMolly.–Molly?s’écrieCallumd’unairintéressé.Tuasunenouvellecopine,

Easton?Qu’est-cequiestarrivéàClaire?JevoisEastonquiluttepournepaséclaterderire.– Claireetmoi,c’estterminé.Maiscettemôme,Molly,estvraiment

cool.Ilmelanceunregardespiègle.J’ai tropmalaucrânepouresquisser lemoindresourire.Callumme

regarde,ilal’airvisiblementeffrayé.–Ella,tuastrèsmauvaisemine.L’airsoudainsoupçonneux,ilseretourneverssonfils.–Dansquelgenredeproblèmesl’avez-vousentraînéehiersoir?– Juste les problèmes habituels de boisson. Apparemment, Ella ne

tientpasl’alcool.

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JeluilanceunregardreconnaissantdansledosdeCallum.JesupposequelatrêvedesRoyalcomprendaussilefaitdesecouvrirmutuellement.Nonquejemesoisdroguéevolontairementlanuitdernière.JeserrelespoingsenmeremémorantleregardvicieuxdeDanieletlafaçondontilm’atripotée.

–Tuasbuhiersoir?Callumsetourneversmoi,lèvrespincées.–Unpetitpeu,j’admets.–Oh,allezpapa,nejouepaslespèressévèresavecnous,luibalance

Easton.C’esttoiquim’asfilémapremièrebièrequandj’avaisdouzeans.–Etmoionze,reprendGideonenentrantdanslacuisine.Ilesttorsenuetilaunegrosseestafiladesurlespectoraux.Ilmejette

uncoupd’œilpleindesympathie.–Commenttutesens?–Ellealagueuledebois,répondEastonàmaplace,avantdelancer

unregardacéréàsonfrèrependantquesonpèreregardeailleurs.MaisCallumestencoreencolèrecontremoi.–Jeneveuxpasquetuboivesexcessivement.– Tu es jaloux à l’idée qu’elle te détrône en tant que Champion

d’IvresseExcessivedelaFamilleRoyal?ironiseEaston.–Çasuffit,Easton.–Eh,jenefaisaisquepointerdudoigtl’hypocrisiedelachose,papa.

Etapparemmentladoubleéchelledevaleur.Tutefichesroyalementquenousnousbourrionslagueule,alorspourquoiElla?

Callumregardealternativementsonfilsetmoi,puissecouelatête.–Jesupposequejedevraisêtrecontentquevousvousserrieztousles

coudes,àprésent.Des bruits de pas résonnent dans le couloir, et j’ai la respiration

coupée quand Reed entre dans la cuisine. Un pantalon de survêtementnoirluipendsurleshanchesetsontorsemuscléestlégèrementhumide,commes’ilvenaitdesortirdeladouche.Ilnemejettepasunregardensedirigeantversleréfrigérateur.

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Mon humeur chute, même si je ne savais pas vraiment à quoim’attendre.Meretrouverseuleauréveilétaitunmessagetrèsclair.Etcequ’ilm’adithier,queçanepeutpassereproduire,rendleschosesencoreplusclaires.

–OhElla,s’écriesoudainCallum,j’avaisoubliédetedire.Tavoiturearrivedemain,commeça,tupourrasterendrepartoi-mêmeàtontravail,lundi.

BienquejesoissoulagéequeCallumparvienneenfinàprononcerlemot « travail » sans froncer les sourcils, je suis également assezdésappointée.Devant le frigo, ledosdeReedsecrispe.Luiaussi saitcequecelasignifie.Plusdecovoituragepournous.

–C’estsuper,dis-jedoucement.– Bon,quelssont lesplansdesunsetdesautrespouraujourd’hui?

demandeCallum en jetant un coup d’œil autour de lui. Ella, je pensaisquetoietmoinouspourrionsaller…

–J’airendez-voussurlajetéeavecValérie.Nousallonsdéjeunerdansun restaurant de poissons qui donne sur lamer, dont elleme parle enpermanence.

Ilparaîtdéçu.–Bond’accord.Çaal’airsympa.Quelqu’unveutfairequelquesballes

de golf avec moi ? Ça fait des siècles que nous n’y sommes pas allésensemble.

AucundesfrèresRoyalnerépondàsonoffre,etlorsqueCallumsortdelacuisineavecunairdechienbattu,jenepeuxm’empêcherdefroncerlessourcils.

–Vousnepouvezpasfaireunpetiteffort,lesgars?–Crois-moi,onfaitdesefforts.C’estGideonquimerépond,etsonricanementmauvaismeprendau

dépourvu.Quandils’éclipse,jedemandeàEaston:–Qu’est-cequ’ila?–Aucuneidée.

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Pour une fois, Easton n’en sait pas plus que moi. Reed doit savoirquelquechosequenousignoronsparcequ’ilfaitlamoueetlance:

–FichezlapaixàGid.Et il sort, lui aussi. Il nem’a pas regardée, pas une seule fois, et le

chagrinquim’étreintestbienpirequen’importequellegueuledebois.LedéjeuneravecValérieesttrèssympa,maisjel’abandonneassezvite

parcequematêtemefaitunmaldechien,commesionyenfonçaitdespoignardsrouillés.Elleritetmeditquepluslagueuledeboisestforte,meilleureadûêtrelafête.JelalaissecroirelamêmechosequeCallum,c’est-à-direquej’aiunpeutropbuetquemaintenantjelepaie.

Je ne sais pas pourquoi je ne lui parle pas de Daniel. Val est monamie,etelle serait lapremièrepersonneàdéfoncerDanielpourcequ’ilm’afait.Maisquelquechosemeretient.C’estpeut-êtredelahonte.

Jenedevraispasme sentirhonteuse.Non jenedevraispas. Jen’airienfaitdemal,etsij’avaiseuneserait-cequelepluspetitsoupçonqueDanielétaituntelpsychopathe,jeneseraisjamaisalléedanslapoolhouseaveclui.Jamais.

Maischaquefoisquejepenseàlanuitdernière,jemerevoisentraind’enlevermes vêtements etmurmurer le nomdeReed pendant que lesmainscollantesdeDaniel tripotaientmoncorps.Jepenseàçaet jesuisrempliedehonte.

Et jen’arrivemêmepasàmedistraireenpensantàcequiestarrivéaprès,aubonmoment,quandjemurmuraislenomdeReedpourd’autresraisons. Je ne peux pas y penser, parce que çame rend triste. La nuitdernière, Reed me désirait, il s’est offert à moi comme s’il en avaitvraimentenvie,etàprésentilmelereprend.

Valériemedéposeaumanoiretdémarreentrombedanslavoituredesagouvernante.Ellem’aditaudéjeunerquesonpetitamivenaitleweek-endprochain, j’ai hâtede le rencontrer.Vu le tempsqu’ellepasseàmeparlerdelui,j’ail’impressiondeleconnaîtredéjà.

C’estencoreunbelaprès-midi,alorsjedécided’enfilermonmaillotdebainetdem’allongerunmomentaubordde lapiscine. J’espèreque le

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soleilvameremettreunpeud’aplomb.J’attrapeunlivreet jem’installedans une chaise longue, mais je n’ai que vingt minutes de tranquillitéavant que Gideon se ramène en Speedo. De tous les Royal, Gideon estprobablementceluiquialemoinsdegraisse.Ilauncorpsdenageur,etEastonm’aracontéqu’ilavaitobtenuuneboursecomplètedelafacgrâceàlanatation.Lesjumeauxsontpersuadésqu’ilvaremporterunemédailled’orauxprochainsjeuxOlympiques,maisc’estunebonnechosequ’iln’yait pas d’officiels qui traînent dans le coin aujourd’hui, parce qu’ils lerejetteraient immédiatement.Sesattaquessont inégalesetsonallureestlente,d’unefaçonpresquealarmante.

Maispeut-êtrequejem’inquiètepourrien.Jeveuxdire,jenel’aivunager qu’une seule fois. Peut-être qu’aujourd’hui, il se ménage toutsimplement.

–Ella,m’appelle-t-ilensortantdelapiscine,environuneheureplustard.

–Ouais?Ils’avanceversmoienfaisantgoutterdel’eaupartoutsurledeck.–Ilyaunefêtesurlaplagecesoir.ÀlapropriétéWorthington.Ilsepassesaserviettesurlapoitrine.–Jeveuxqueturestesàlamaison.Jehausseunsourcil.–C’esttoileresponsabledemonagenda,maintenant?–Cesoir,oui,jelesuis.Etsontonnetolèreaucunediscussion.–Jesuissérieux.Net’approchepasdecettefête.Aprèshier,jen’avaisaucuneintentiondemerendreàuneautrefête,

maisjen’appréciepassoninterdiction.–Onverra.–Onneverrariendutout.Turestesàlamaison.Ildisparaîtàl’intérieur,etquelquecinqminutesplustard,Eastonsort

etsedirigeversmachaise.–BrentWorthingtonfaitune…

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–Unefête,jetermine.Ouijesuisparfaitementaucourant.Ilpassesamainsurmonmenton.–Tun’yvaspas.–JevoisquetuasparléavecGideon.Son expressionme révèle qu’en effet il l’a fait, et il tente une autre

approcheenmebalançantsonsouriresuper-craquant.–Écoute,tun’asaucuneraisond’yaller,petitesœur.Prendsunenuit

derepos,détends-toi,regardedessoapopéras…– Des soap opéras ? Tu crois que je suis uneménagère de plus de

cinquanteans?Ilpouffederire.–Trèsbien,alorsregardedesfilmsporno.Maistunevienspasavec

nouscesoir.–Nous?Reedyvaaussi?Easton soupire, et rien que la façon dont il évite mon regard me

hérisse.Qu’est-cequ’ilsontbienpuplanifierpourcesoir?Lapaniquemesaisit.Est-cequeDanielysera?Est-cequec’estpourçaqu’ilsveulentmeteniràl’écart?

ImpossibledeposerlaquestionparcequeEastonestdéjàentraindese carapater. En soupirant, je reprends mon livre et j’essaie de meconcentrersurlechapitrequejesuisentraindelire.Jesuisinquiète.

–Hé!JelèvelesyeuxpourdécouvrirReedquis’approche.Pourlapremière

foisaujourd’hui,ilcroisemonregard.Il laissetombersongrandcorpsdansunechaise longueàcôtéde la

mienne.–Commenttutesens?Jemetsmonlivredecôté.– Mieux.Jen’aiplusdemartèlementsdans latête,mais jemesens

encorefaible.Ilhochelatête.–Tudevraismangerquelquechose.

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–C’estfait.–Mangeunpeuplus.–Crois-moi,jesuisgavée.Seslèvresesquissentunsourire.–Valériem’afaitengloutirunequantitéindécentedecrevettesetde

pattesdecrabeàmidi.Seslèvress’étirentunpeuplus.Souris,jelesupplieensilence.Souris-moi.Touche-moi.N’importequoi.Maislesourirenevientpas.– Écoute,àproposdecequis’estpassécettenuit…(Il s’éclaircit la

gorge.)J’aibesoindesavoirquelquechose.Jeplisselefront.–D’accord.–Est-cequetu…est-cequeje…(Ilsouffleungrandcoup.)Est-ceque

tuaseul’impressionquej’aiprofitédetoi?–Quoi?Biensûrquenon.Maisl’intensitédanssonregardnes’atténuepas.– Il fautque tu sois francheavecmoi.Si tuas l’impressionque j’ai

profitédetoiouquej’aifaitquelquechosequetunevoulaispas,ilfautquetumeledises.

Jemeredresseetjemepencheversluipourattrapersonvisageentremesdeuxmains.

–Tun’asrienfaitquejenevoulaispasquetufasses.Sonsoulagementestflagrant.Quandjecaressesamâchoireavecmon

pouce,sarespirations’accélère.–Nemeregardepascommeça.–Comment?jemurmure.–Tulesaisbien.Engrognant,ilôtemesmainsdesonvisageetselèved’unbond.–Çanepeutpasrecommencer.Jel’empêcherai.Lafrustrationm’envahit.–Pourquoiça?

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–Parcequecen’estpasbien.Jenesuispas…jeneveuxpasdetoi,okay.

Etavecunrictus,ilpoursuit.–J’aivouluêtresympaavectoicettenuit,parcequetuétaisdéfoncée

à l’ecstasy et que tu avais besoin d’être soulagée. Je t’ai rendu service,maisc’esttout.Jen’aipasenviedetoi.

Il s’éloigneavantque jepuisse lui répondre.Ouplutôt,avantque jepuisseletraiterd’énormementeur.

Ilneveutpasdemoi?Conneries.S’iln’avaitpasvouludemoi,ilnem’auraitpasembrasséecommes’ilétaitunhommeaffamépourquij’étaisla seule sourcedenourriture. Iln’auraitpasadorémoncorps commesic’était leplusbeau cadeauqu’on lui ait jamaisoffert, il nem’aurait passerréedanssesbraspendantquejem’endormais.

Il me ment et, maintenant, mon degré d’inquiétude atteint dessommets.Passeulementde l’inquiétude,maisausside ladétermination,parce qu’il est clair que Reed Royal a des secrets que je n’arrive pas àdécoder.

Maisjevaislefaire.Jevaistoutdécouvrir.Pourquoi il garde les autres à distance, pourquoi il a l’impression

d’être indigne, pourquoi il prétend qu’il n’y a rien entre nous alors quenoussavonstouslesdeuxlecontraire.Jevaisdécouvrirtoussessecrets,bordel.

Cequiveutdire…Jepensequejevaisalleràuneautrefête,cesoir.

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CHAPITRE26

J’aibesoinderenforts,ouaumoinsd’infos.D’aprèscequ’aditGideon,lesWorthingtonvivent sur la côte, et ils sontassezprochespourque jesois capable d’entendre du bruit chez eux, depuis le manoir Royal. IlsdoiventégalementavoirdesenfantsdumêmeâgeenvironquelesfrèresRoyal.Maisc’estàpeuprèstoutcequejesaissureux.

Heureusementpourmoi,jeconnaislareinedespotins.Valérierépondàmapremièresonnerie.

–Tuveuxencoredesfruitsdemer?Jetel’aidit,lameilleurefaçondefairepasserunegueuledebois,c’estdemanger.

L’idéed’avalerneserait-cequ’uncoquillagesupplémentairemedonnelanausée.

–Nonmerci.JemedemandaissituavaisterminédeskyperavecTametsituvoulaisrappliquericipourespionnerlesRoyalavecmoi.

Valérieretientsarespiration.–J’arrive.–Hé,jeluilanceavantqu’elleraccroche,tuasunevoiture?–Non.Ettunepeuxpasdemanderàundetesfranginsdevenirme

prendre,n’est-cepas?medemande-t-elled’unairtriste.–Net’enfaispas.Durandvapassertechercher.Etc’estsûr,quandje

vais dire à Callum que je veux inviter une copine, il va se portervolontaire.

–Oh,Callum.Super.Ilestsexypourunvieux.

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–Arrête,Valérie.Ilaaumoinsquaranteans.– Et alors ? C’est ce qu’on appelle un renard argenté. Tu sais qui

adoreça?–Jen’enaipaslamoindreidée.UnedesPastel?– OhSeigneur,non.Ces fillesne sauraientpasquoi faire faceàun

mâle adulte, alors un homme qui a quelques dizaines années aucompteur… C’est la grande sœur de Jordan ! Elle a vingt-deux ans etramèneenpermanencedesvieuxchezelle.Ledernierendateavait lescheveuxgrisetjetejurequ’ilétaitplusâgéqu’oncleBrian.Jen’arrivepasàsavoirsielleestsuper-perverseetquecestypessontlesseulsàsavoirlacontenteroubiensielleaunproblèmeavecl’imagepaternelle.

–Lafaçondontj’aiinsultéJordanpendantlafêteapeut-êtreunpeutropfaitmouche,alors?

–Çan’asûrementpasdûaider,répondgaiementValérie.– Je vais raccrocher, je suis vraiment sur le point de rendre mon

déjeuner.Jeposeletéléphoneetj’essaied’effacerdemonespritdesvisionsde

Callumentraindefairedestrucspervers.Heureusement,Durandest libreetValériearrivebientôtaudomaine

Royal.–Ouah,cetendroitesttellement…Ellecherchelemotjuste,toutendétaillantmachambreàcoucher.Je

luienproposeplusieurs.–Juvénile?Girly?UnhommageratéàlaSaint-Valentin?Ellesejettesurlecouvre-litdésespérémentrose.–Intéressant.–C’estunefaçoncommeuneautredevoirleschoses.Je m’assieds sur la chaise de ma coiffeuse recouverte de fourrure

blanche et j’observe Valérie écarquiller les yeux devant les voilagestransparentsquipendentdulitàbaldaquin.

–Tuveuxboirequelquechose?J’aimêmeunminifrigoparici.J’ouvrelaporteenverrequisetrouvesouslacoiffeuse.

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–Sûr.Jeveuxbienuntrucsanssucre.Sionfaitabstractiondurose,c’estunechambregéniale.Unpostedetélé,unchouettelit.

Elletâteledessus-de-lit.–Ilestensoie?J’ailamaindanslefrigoquandellelâchecettebombe.–Jedorssurunecouvertureensoie?–Techniquementparlant,tudorsendessous.Enfin,jeveuxdire,tu

n’es pas obligée, mais tu es censée dormir sur le drap et sous lacouverture.

Valérieal’airpréoccupée,commesimonéducationavaitététellementbizarreque j’ignorais toutdesdraps.Hélas, ellen’estpas très loinde laréalité.

–Jesais,grossemaligne.JesorsunCocaLightquejeluitends,puisjem’enouvreun.– C’est juste bizarre. Je suis passée des sacs de couchage aux

couverturesensoie,ouplutôt,excuse,auxcouvre-lits.JemereprendsavantqueValérielefasse.Maisassezdepapotagessur

laliterie.J’aibesoind’infos.–Raconte-moitoutcequetusaisàproposdesWorthington.–LesWorthingtondesTélécomoulespromoteurs?demande-t-elle,

laboucheposéesurl’ouverturedesacannette.–Jen’ensaisrien.Ilshabitenttoutprèsd’icietilsorganisentunefête

surlaplagecesoir.– Oh, alors ce sont les Télécom. Ils habitent à cinqmaisons d’ici,

environ.Ellelèvesacannette.–Tuasunplateau?Jeluilanceuncahierpourqu’ellepuisseposersacannettedessus.– BrentWorthingtonestendernièreannée. Ilest super-coincé,cela

dit plus à propos de son nom qu’à propos d’argent. Les parents de sapetiteamieLindsayontdûsedéclarerenfailliteilyadeuxoutroisansetont retiré Lindsay d’Astor Park parce qu’ils ne pouvaient plus payer les

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fraisdescolarité,maisBrentn’ajamaisrompuavecelleparcequeLindseyestuneDAR.

–QuisontcesDAR?Valériesemarreetsecouelatête.–Non,cen’estpasunnomdefamille.ÇaveutdireDaughtersofthe

AmericanRevolution.Sonarbregénéalogiqueremonteauximmigrantsquiont fait la traversée sur les trois premiers vaisseaux qui sont venusd’Angleterre.

–C’estuntrucimportant?–Ouaip.Alors,qu’est-cequisepasse?–LesRoyalvontlà-bascesoiretilsm’ontinterditd’yaller.– Pourquoi?Ces fêtessont trèspépèrespourdestrucsde lycée. Ils

fermentàclétouteslespiècesdelamaison,parcequeBrentneveutpasque quiconque baise dans les chambres. Les invités sont autorisés àutiliser un seul w.-c., et il est situé dans le patio, à l’extérieur. Lapoolhouseestfermée,elleaussi.Brents’adresseàuntraiteuretdemandeàtoutlemondedes’habillercommepourpartirencroisière.Luiportesavesteduclubdeyachtingetlesfillesdoiventimpérativementêtreenrobe.Sansexception.

Ça craint. Si les Royal m’avaient raconté ça, ils n’auraient pas eubesoindem’interdiredevenir.Pourtantilsl’ontfait,cequiveutdirequ’ilvasepasserquelquechoseàquoiilsneveulentpasquej’assisteouquejeparticipe.

–Est-cequeDanielDelacorteestinvité?Elleréfléchitenhochantlatête.– Ouais. Son père est juge d’instruction. Je crois qu’il a prévu de

suivre son exemple, et c’est toujours utile d’avoir des juges dans soncarnetd’adresses,non?

Ça me semble tout à coup une évidence. Voilà pourquoi les richess’enrichissent toujours plus. Ils tissent des liens au lycée, et quand ilsvieillissent,ilscontinuentàserendredesservices.

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–Ils’estpasséuntrucentretoietDaniell’autresoir?Jesaisquetuétaisbourrée,maisJordanaditquetuétaistellementpartiequeReedadû teporterpour te faire sortirde chezFarris. Iln’apas… fait quelquechose?

Elle semble inquiète. Je n’ai aucune envie de raconter à Valériel’horreurdecettenuit,mais comme jevais l’impliquer, il fautque je luilâchequelquechose.

–Ilacruquej’étaisunefillefacile.Jenelesuispas.EtlesRoyaln’ontpas apprécié qu’on emmerde leur sœur, enfin leur presque-sœur. C’esttout.

Ellesefrottelevisage.–Merde,quelletâche!Maisaufait,pourquoisuis-jeicisilesRoyal

sontsurlepointdesevenger?–Jenesaispass’ilsl’ontprévu,maistroisd’entreeuxm’ontditqu’il

étaithorsdequestionquej’ailleàlafêtedeWorthington,cesoir.LeregarddeValéries’éclaire.–ÇameplaîtbienquetutefichesdecequepensentlesRoyal.Elleselèveetcourtouvrirlaportedemonplacard.–VoyonsvoirquellesrobesapprouvéesparWorthingtontupossèdes.Je termine tranquillement mon Coca pendant que Valérie fouille et

rejettetousmesvêtementslesunsaprèslesautres.– Il te faut plusde fringues.Même lesCarrington remplissentmon

placarddetoutcedontj’aibesoin.C’estpourlesapparences,tusais.JenepensaispasqueCallumétaitaussipingreavectoi.

JerépliquepourdéfendreCallum:– Il ne l’est pas. J’ai dû aller faire du shopping avec Brooke, et les

endroitsoùellem’aemmenéeétaientbientropchers.Valérielèveunemainauciel,– Mais tout est cher par ici. Tu n’as qu’à te dire que c’est une

extensionde tonuniforme.Enplus, si tuesmal fringuée, lesgensvontpenserlamêmechosequemoi,queCallumestavareavectoi.Ahha!

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Ellesortunerobebain-de-soleilbleumarineavecdespetitesmancheset une profonde encolure en V bordé de dentelle blanche. Je ne merappelle pas l’avoir vue, ce qui signifie que Brooke a dû la choisir endouce.

– Ça, c’est bien. (Elle a une encolure profonde, qui annonce lacouleur.)Jesuissexysanspourautantmefairepayercinquantedollars,etencash,s’ilvousplaît.

–Jem’enremetsàtonjugement.Pourmonancien travail, il aurait falluune encolure sacrément plus

profondeque ça pour que les billets pleuvent. Je traverse la pièce pourallermechanger.Ilcommenceàêtretardetjeveuxêtresûred’arriveràlafêteavantledébutdeshostilités.

–Jepeuxt’empruntercelle-là?demandeValérieensedrapantdansunerobeendentelleblanche.

–Sers-toi.Elleaquelquescentimètresdemoinsquemoi,etvulalongueurdela

robe,ellevaluiarriveràmi-cuisses.–Parsimplecuriosité,j’aibesoindecombienderobes?Deux,çameparaîtdéjàbeaucoup.–Unevingtaine.Jemeretourned’unseulcoup.Elleal’airtoutàfaitsérieuse.–Tuplaisantes.–Non.Elleraccrochelarobedansleplacardetcommenceàcomptersurses

doigts.–Iltefautdesrobesd’après-midi,desrobespourlebateau,desrobes

poursortirenboîte,pour lecountryclubetpour lesnight-clubs, (j’ai latêtequitourne),desrobespourgarden-parties,desrobespouraprèslescours,desrobespourlesmariages,desrobespourlesenterrements…

–Tuasditdesrobespourlesenterrements?jel’interromps.Valériememontredudoigtenclignantdel’œil.–C’étaitpourvérifiersitum’écoutais.

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Elle semarre quand je lève les yeux au ciel et elle commence à sedéshabiller.

– Tu as besoin de beaucoup plus de vêtements. Les apparences, çacompte,mêmepourlesRoyal.

Savoixestétouffée,elleestentraind’enleversontee-shirt.– Parexemple,si tudis lamoindrechosenégativesurMariaRoyal,

sesfilsdeviennentfous.Reedafailliêtreinculpépourcoupsetblessuressur un môme de South East High qui l’avait traitée de suicidée auxmédicaments.

–IlavaitaccuséMariades’êtresuicidée?jem’exclame,choquée.Valériejetteunrapidecoupd’œilautourd’elle,commesiellecraignait

devoirReedluisauterdessus.Ellebaisselavoixetdit:– C’est une rumeur, et les Royal n’aiment pas ça. Ils ont même

poursuivilemédecindeMariapourfauteprofessionnelle.–Etilsontgagné?– Ça c’est arrangé, le type a arrêté de pratiquer la médecine et a

quittél’État,alors…oui?–Wouah.– Quoi qu’il en soit, poursuit Valérie, ils protègent férocement leur

mèreetjepensequec’estimportantpoureuxquelesgenscroientqu’ilstetraitentbien.

Je suis frappée au cœur. C’est ça que fait Reed ? Il se contente desauvegarder la réputation de sa famille ? Non, ce n’est pas possible.Toutes ces chosesquenousavons faites ici, sur cedessus-de-lit en soie,étaientintimes,çan’avaitrienàvoiraveclaréputationdesRoyal.

Enregardantl’heure,jemerendscomptequejedoismedépêcher.Jemechangeàtoutevitesse,maislorsquejemeregardedanslaglace,ilyaunproblème.

–Val,cetteencolureesttropprofonde.Jemeretournepourluimontrermonsoutien-gorgeblancquisortun

peu.Ellehausselesépaules.

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–Tun’asqu’àl’enlever.Metsunebrassièresituaspeurqu’onvoietestétons.

–Jesupposequetuasraison.Mêmesil’idéed’êtredanslemêmeendroitqueDanielsansmettrede

soutien-gorgenem’emballepas.Ça nous prend encore une demi-heure pour nous coiffer et nous

maquiller. C’est moi qui le fais pour Valérie. Elle est sidérée par laquantitédeproduitsdemaquillagequej’aiaccumulée.

–Tuaspeut-êtrebesoinderobes,maistonkitdemaquillageestunevraiebombe.com.

–Merci,maisferme-laàprésent,situneveuxpasquejetemettedurougeàlèvressurlesdents.

Je la menace avec le tube de rouge et elle m’obéit, elle ferme labouche.

Unefoisprêtes,nousattendonsledépartdesRoyal.Ilyadesportesquiclaquentetdesbruitsdepasdansl’escalier.Maisl’und’euxs’arrêteàmaporte.

Uncoupassourdissantmefaitsursauter,suiviparlavoixd’Easton.–Çavalà-dedans?Onvarentrertôt.Jefaissemblantd’êtreenpétard.–Jem’enfiche,etnefrappeplusàmaporte.Jesuisencolèrecontre

toi.Contrevoustous.–MêmeReed,plaisanteEaston.–Voustous.–Ah,allez,frangine,toutçac’estpourtonbien.Soudain,jen’aiplusbesoindefairesemblant.– Vous, les Royal, vous ne pourriez pas savoir ce qui est bon pour

moi,mêmesiunlapindePlayboyvouslemettaitsouslenez.Valérielèvesesdeuxpoucesensigned’encouragement.Eastonpousse

unénormesoupir.– Bien entendu que je ne pourrais rien voir si j’avais un lapin de

Playboydevantmoi.Jeseraisbientropoccupéàmatersesnichons.

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Valérienepeutpluss’arrêterderigoler.–Nerispas,tunefaisquel’encourager.– J’aientenduet,oui,çam’encourage, lanceEastondederrièrema

porte. On sera de retour dans une ou deux heures. Attends-nous, onregarderaunfilmtousensemble.

–Va-t’en,Easton.Ilprendsescliquesetsesclaques.–Eastonestadorable.Sijen’étaispasaussiamoureusedeTam,jelui

courraisaprès,avoueValérie.–Jenecroispasqueleproblème,cesoitdel’attraper.–Non,alorsc’estquoi?–Delegarder.

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CHAPITRE27

Noschaussuresàlamain,Valérieetmoi,nouslongeonslelittoralendirectiondelapropriétédesWorthington.

– Qu’est-cequi empêche les étrangersde venir squatter la fête ? jedemandeaveccuriosité.Ilsuffitdelongerlaplageetd’entrerensuitedanslamaison,non?

–Ilsserendraientcomptequetun’asrienàfairelàjusteenregardanttes vêtements. En plus, les seules personnes qui ont accès à cette plagehabitent au bord, et à moins que tu puisses t’offrir une baraque à dixmillionsdedollars,tunefoulerasjamaiscesable.

–Est-cequ’ilsvontnousrenvoyer?Cettepenséenem’étaitpasvenueàl’esprit,c’estlapremièrefoisque

jevaisdanscegenredesoirée.– Nan,parcequetut’appellesEllaRoyaletque,mêmesi jesuisun

moutonnoir,monnomdefamille,c’estCarrington.Nousn’allons toutefois pas assez loin pour pouvoir rencontrerBrent

Worthington,parcequelescinqfrèresRoyalsontplantésàlalisièredelapropriété. Ils préparent un mauvais coup, je m’en doutais. Et c’estclairementunplanpourchoperDaniel.Contrequid’autrepourraient-ilsenavoir?

Maissiquelqu’unméritedesevenger,c’estbienmoi.Jem’approchedeleurgroupeetilsnemeremarquentmêmepas.

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–Hé,frangin,qu’est-cequevousmijotez? jedemandeàGideonenluilançantunegrandeclaquedansledos.

Reedpivotesurlui-mêmeengrondant:–Qu’est-cequetufaislà?Jet’avaisditderesteràlamaison.Gideonbaisselesyeuxsurmoienfronçantlessourcils.–Moiaussi.Eastonajoutealorssongraindesel.–Moiaussi.–Etvousdeux?jedemandeauxjumeaux,tousdeuxvêtusd’unshort

kakietd’unpoloLacoste.Ilsme regardent innocemmentenclignantdesyeux. Iln’yaaucune

façondelesdifférenciercesoir,cequiestprécisémentcequ’appréciesansdoute leur petite copine. Il va falloir que j’en marque un des deux aurougeàlèvresavantlafindelasoirée.

– Première nouvelle, je ne suis pas un chien. Je ne reste pas bientranquille juste parce que vous m’en donnez l’ordre. Pourquoi suis-jecenséeresteràpartcesoir,detoutefaçon?Est-cequelesboissonssontbourréesdedrogue,iciaussi?

Derrièremoi,Valériepousseun cride surprise, cequimevaut cinqcoupsd’œilréprobateurs.

–Non,répondGideon,maissileschosesdevaientmaltourner,papaseramoinsencolères’ilsaitquetudorssagementaufonddetonlit,àlamaison.

–OuquetuesentraindetepeloteravecValérie,intervientEaston.Mais au lit et à la maison, c’est ça qui compte pour lui, ajoute-t-ilrapidementquandc’estàsontourdefairefaceàdesregardsdereproche.

– Taprésencepourraitmettre lapuceà l’oreilledeDaniel,poursuitReed,lessourcilsdeplusenplusfroncés.

Valéries’avanceàmescôtés.–Sileplan,c’étaitdenepassefaireremarquer,Eastondevraitavoir

salanguefourréedanslabouchedequelqu’un,ReeddevraitêtreentraindediredesmotsdouxàAbby(retenez-moi),Gideondevraitfairesestrucs

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de fac, et vous deux (et elle pointe un doigt vers l’un puis l’autre desjumeaux) vous devriez être en train demonter un canular à quelqu’unparceque,bordel,c’estvraimentimpossibledevousreconnaître.

Easton cache un fou rire en toussant pendant que les jumeaux fontminederegarderailleurs.ReedetGideonéchangentunlongregard.CesonteuxquidécidentpourlesautresfrèresRoyal.Dumoinscettenuit.

–Puisquevousêtesici,inutiledevousfairerentreràlamaison,maisils’agitd’uneaffairequineconcernequelesRoyal.

Gideon lanceun regardappuyéàValériequi comprend l’allusionauquartdetour.

–Soudain,j’aitrès,trèssoif.Jecroisquejevaisallermefaireoffrirunecoupedechampagneparnoshôtes.

AprèsledépartdeValérie,jemefrottelesmainsl’unecontrel’autre.–Alors,c’estquoileplan?–ReedvalancerunebagarreetfilerunebranléeàDaniel.–C’estunplanmerdique.À nouveau, ils se tournent tous vers moi. Je dois avouer qu’être le

centre de l’attention de cinq membres de la famille Royal, c’est assezimpressionnant.

Je me concentre sur Reed et Gideon, ce sont eux que je doisconvaincre.

– Vous pensez que vous allez réussir à pousser Daniel à se battre,justecommeça?

Lesdeuxfrèreshaussentlesépaules.–Etjesuissûrequevouscroyezqueçavamarcher,parcequetous

lesdeuxvousêtesprêtsàvousbattrepourdéfendre l’honneurdevotrefamille.Maiscetypen’aaucunhonneur.Iln’ariend’uncombattantfair-play.C’estlegenredetypequiestcapablededroguerunefilleparcequ’iln’apasassezconfianceenluiouqu’iln’apaslapatienced’attendrequ’elleluicède.C’estunlâche.

JedésignedelamainlecorpsincroyablementmusclédeReed.–Reedpèsedixkilosdeplusqueluietilal’habitudedesebattre.

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–Elleestaucourantpourlescombats?m’interromptGideon.Reedacquiesce,etGideon lèvesesdeuxmainsversnouscommes’il

enavaitsoupédenosconneriesdelycéens.–Ilvaquandmêmefalloirqu’ilsedéfende,argumenteReed.– Je te parie à cent contre un qu’il va se marrer et dire qu’il sait

pertinemmentquetuvasgagner.Etensuite,situtentesd’allerplusloin,c’esttoiquipasseraspourleméchant.

–Jem’enfiche.–Trèsbien.Sivousvoulezjustelerouerdecoups,ehbien,allez-y.Jeleurmontrelapelousequicommenceàseremplir.–Reednepeutpasdonnerlepremiercoup,lanceEaston.Déconcertée,jeregardealternativementunfrèreaprèsl’autre.–Pourquoi,c’estunedevosrèglesduclubdeboxe,ouquoi?–Non.PapaasurprisReedentraindesebattreilyaquelquesmois.

Iladitques’il le reprenaitencoreune fois, ilexpédierait les jumeauxàl’écolemilitaire.

Wouah, c’est diabolique. Je sais que Reed n’en aurait rien à faired’aller à l’école militaire, ou en tout cas, pas tant que ça, mais qu’ildétesteraitquelesjumeauxsoientobligésd’yaller.Callumn’enfinitpasdemesurprendre.

–Alors,tunepeuxplusjamaisfrapperquelqu’un?– Non, sauf pourme défendre ou pour défendre unmembre de la

famille. C’étaient ses termes exacts, siffleReed entre ses dents. Si tu asunemeilleureidée,accouche.

Je n’en ai pas, et ils le savent bien. Gideon hoche la tête et mêmeEastonal’airdéçu.Jefixelecielbleunuit,puis l’océan,puis lamaison,puisànouveaulesfrères.Etuneidéejaillitdansmonesprit.

–Est-cequelesWorthingtonontunepoolhouse?–Ouais,répondReedl’airinquiet.–Oùest-elle?LapoolhousedesRoyal,elle,estpratiquemententièrementenverre,

pour pouvoir regarder l’océan d’un bout à l’autre de la piscine. Je tire

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Reedparlebras.–Montre-moi.Reedm’aideàmontersurlesrochersetmeguidejusqu’àlapelouse.Il

memontre une structure sombre, juste au bord du deck en ciment quientoureunegrandepiscinerectangulaire.

–Worthingtonlafermeàclé.– Pourquepersonnenepuisse faire l’amourdedans.Valérieme l’a

dit.Toutcelaestparfait.Jemetournevers les jumeaux.Sawyerfaitungestedeprotestation.

Enfin,jeprésumequ’ils’agitdeSawyeràcausedelatracedebrûluresursonpoignet.

–S’ilfautquejem’habilleenfemme,necomptezpassurmoi.– Il faut récupérer Valérie, parce que je vais avoir besoin d’elle. Et

j’aurai besoin des jumeaux. Les autres feront comme s’ils passaient unesoirée normale. Quand le moment sera venu, Sawyer viendra vousprévenir.Ilfaudraquevousrassembliezleplusdemondepossibleautourdelapiscine.Etpréparez-vousàfilmer,peut-être.

Eastonmeglissealors,–Qu’est-cequetunousmijotes,p’titefrangine?–Iln’yariendepirequelavengeanced’unefemmeblesséeoud’une

filledroguéecontresongré,jerépondsmystérieusement,avantdepartiràlarecherchedeValérie.

JelatrouveentraindebavarderavecSavannah,àmi-cheminentrelaplageetlapiscine,cequitombeparfaitementbien.

–Hé,jepeuxvousparleruneminute?ValériedoittraînerdeforceSavannah,maisjemedébrouillepourles

isolertouteslesdeuxdansuncoin.Jem’adressed’abordàSavannah.– Voilà, je voulaism’excuser de ne pas t’avoir écoutée l’autre nuit.

J’étaisseule, jevoulaisêtreavecquelqu’un,maisc’était impossible,alorsjemesuisditquej’allaismerabattresurDaniel.C’étaituneerreur.

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Elle pince les lèvres, mais mes regrets véritables ou notre hainecommunepourDanielfinissentparromprelaglace.

–J’acceptetesexcuses,dit-ellebrusquement.–OhSav’,nesoispasaussiculcoincé,grondeValérie.Onesticipour

fairepayerDaniel.Pasvrai,Ella?Savannah hausse un sourcil et me dévisage, soudain intéressée.

J’acquiesceavecenthousiasme.–Voilàleplan.Aprèsquejeleuraiexpliquétouslesdétails,Valériepoussedescrisde

joie,maisSavannahrestesceptique.–Tucroisvraimentqu’ilvagoberça?–Savannah,cemecdroguedesfillespourbaiseravecelles.Ilneva

pasrefusercetteoffre.C’estundéliredepouvoirpourlui,etonvaluienservir.

Ellehaussejolimentlesépaules.–D’accord.J’ensuis.Allonsrabattresoncaquetàcetaré.

Danielestassisdansunfauteuilauborddelapiscine,uneHeineken

dansunemain,et l’autreposéesur lacuissed’unetoute jeunefille.Elledoit être en première année. Un violent désir de justice m’envahit ànouveau. Il faut absolument l’arrêter. Comme l’a dit Savannah, il esttempsdeluirabattresoncaquet.J’adopteletonleplusdocilepossible:

–Salut,Daniel.IllèvelatêteetcherchelesRoyaldanslafoule.Ilnelesvoitpas,du

coupilserenfoncedanssonfauteuilenserrantplusfortlafillecontrelui,commesic’étaitunbouclier.

–Qu’est-cequetuveux?Jesuisoccupé.Jefrottelesolenbétonduboutdemaballerine.– Je voulais m’excuser pour l’autre nuit. J’ai… j’ai réagi de façon

excessive.TuesDanielDelacorteetmoi…(jeluttecontrel’enviederire)jenesuispersonne.

Lafillesemetàbouger,malàl’aise.

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–Hum,jecroisquej’entendsmasœurquim’appelle.Jedoisyaller.Elles’échappedelamaindeDaniel.Commeilproteste,jepoursuis.–Jen’enaiquepouruneminute.Ensuite,ilseratoutàtoi.Danielironise:– Uneminute, c’est tout?Engénéral, çadureplus longtempsavec

moi.La fille glousse et part en courant. Je comprends.C’est franchement

bizarredevoirquelqu’unsefairehumilier.Dèsqu’elleesthorsdeportéedevoix,lesouriredistraitdeDanielsetransformeenregardnoir.

–Àquoitujoues?–Jeveuxunesecondechance.(Jemepenchedefaçonàluimettre

messeinssouslenez.)J’aicommisuneerreur.Situm’avaisditcequetuvoulais,simplement,jen’auraispassurréagicommeça.

Seigneur, je n’arrive pas à croire que je doive lui raconter desconneriespareilles.

Sonregardplongedanslesprofondeursdemondécolletéetilsemetàselécherleslèvrescommeunhorribleporc.

–LesRoyaln’avaientpasl’airravis.–Ilsétaientfurieux,parcequej’aifaitunescène.Ilsveulentquejela

fermeetquejerestedansmoncoin.–Pourtant,tuesvenuecesoir.–Leurpèrelesaobligésàm’emmener.Ilfroncelessourcils.–Alorscommeça,tuveuxleurfoutrelahonte,c’estça?–Honnêtement?Enquelquesorte,oui.(Jemens,parcequejemedis

quefairechierlesRoyal,celadoitluiplaire.)J’enaimarrequecesconsme forcent à être ce que je ne suis pas. (Je hausse les épaules.) J’aimefaire la fête, j’aimem’amuser.J’aiessayéd’êtrebiencomme il fautpourleurfaireplaisir,mais…cen’estpasmoi.

Danielsembleintrigué.– Donc, arrêtons de faire semblant. Quoi que tu désires, je suis

partante,etpasuniquementmoi.

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Jedésignevaguementunpointderrièremoi.–TuconnaisValérie,n’est-cepas?(Ilhochelatêteenregardantde

nouveaumapoitrine.)Jeluiaiparlédetesamies,ZoéetNadine.Etelleestintéressée.Onpourrait…

Je traîne et je posemamain contre le genoudeDaniel. J’avance labouchetoutcontresonoreille.

–Ons’estditqu’onpourraittemontrercequesaventfairelesfillesd’AstorPark.Onestdesdanseusestouteslesdeux,tusais

–Ouais?Ilalesyeuxquibrillent.–Ettupourrasfairetoutcequetuveuxavecnous,jesusurre.Àprésent,ilal’airvraimenttrèsintéressé.–N’importequoi?–N’importequoi…toutcequetuveux.Tupeuxfilmersituveux.Tu

pourraisavoirenviedegarderdessouvenirs.–Où?Sa main glisse entre ses cuisses. Beurk, est-ce qu’il va se branler

commeça,enfacedemoi?Jeserrelesdentspournepasvomirpartoutsursesgenoux.

–Àlapoolhouse.J’aiforcélaserrure.Retrouve-nouslà-basdanscinqminutes.

Etjem’éclipsesansmeretourner.Sij’aimaljugéDaniel,çanevapasmarcher et je vais devoir avaler mon chapeau devant les frères Royal.Maisjenecroispasmetromper.DanielDelacorteal’opportunitéd’avilirdeux « moins-que-rien » et de prendre des photos d’elles, qu’il pourramontrer à tous ses potes pervers. Il n’est pas question qu’il rate cetteoccasionenor.

Lorsque j’entredans lepetitbâtiment,Valériebonditd’unedesdeuxchaisesqu’elleetSavannahontinstalléesdevantlesbaiesvitrées.Commecelle des Royal, cette poolhouse est presque entièrement construite enverre,afindenepasobstruerlavuesurlamerdepuislamaison,maisellepossèdedesvoletsquelesfillesonttousfermés.

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–J’aimebienlafaçondontvousavezdécorécetendroit,jeplaisante.Valérieme jettequelque choseque j’attrapeauvol.Une ceinturede

peignoir.–Merci.Onvoulaituntrucminimaliste.Savannahetmoiavonspensé

queçamettraitmieuxenvaleurnotreinstallationartistique.Laceinture,çava?

ToutenrepensantauyachtetàReed,jeluiréponds:– Ça fera l’affaire. (Je l’enroule autour de ma taille.) Où est

Savannah?–Jesuisdanslestoilettes,souffle-t-elle.Uncoupviolentsurlaporteannoncel’arrivéedeDaniel.Jemurmure:–Quelespectaclecommence!Etjevaisouvrirlaporte.

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CHAPITRE28

–J’aibienfaillicroirequetutefichaisdemoi,maisjeviensdevoirlesRoyalentraindepicoler.ReedsembleprêtàsetaperAbbycesoir.

DanielmedéshabilleeffrontémentduregardavantdesetournerversValérie.

– Et toi,Val, jen’aurais jamaiscruquetuétaisunecochonne.Maisj’auraispeut-êtredûm’endouter.

Parcequenoussommestouteslesdeuxdesmerdesdeclasseinférieure,jeterminepourlui.

LabouchedeValériesetordd’unairmoqueur.Commeelleneréussitpas vraiment à faire semblant d’être chaud braise pour Daniel, je medépêchededétournersonattention.

–Qu’est-cequetuveuxfaireenpremier?Jeluipasseunemainsurl’épauleetjel’attireversunetableaumilieu

de la pièce. Ça a dû être trop difficile de la bouger pour Valérie etSavannah.

–Etsivousfaisiezçatouteslesdeuxensemble?suggère-t-il.– Pas de préludes ? On y va direct ? (D’une main plus forte que

nécessaire, je le pousse contre la table.) Je crois que tu as besoind’apprendreàteretenir.Onvad’aborddanserunpeupourtoi.

Ilsepencheenarrièreencroisantlesbrasetnousfaitunsignedetêtedédaigneux.

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–Trèsbien.Maisjeveuxvousvoirvouscaresseretmemontrerdelachair.

Valérieretrouvesesespritsets’avance.–Qu’est-cequetudiraissiontefaisaitunmassage?Ont’enadéjà

fait?–Unmassage?Biensûr, j’enaiautantquejeveuxauclubdemon

père.– Mais avec deux filles et un happy end ? (Elle agite ses doigts.)

CommeleditElla,neprécipitonspasleschoses.Nouspouvonstefaireunmassage, et ensuite tu nous regarderas faire nos trucs ensemble. Aprèstout,c’esttoiquidevraisjouirlepremier.

Danielréfléchituninstantàsonoffreetfinitparaccepter.– Ouais, ça me paraît bien. Vous, mes salopes, vous pouvez bien

attendrevotretour.Puis il fait un clin d’œil pour nous faire comprendre que le mot

« salopes » est censé être une vanne. Aucune de nous ne rit et ça medemande un effort surhumain pour ne pas lui foutremon poing sur satronchedeprétentieux.

–Laisse-noust’aideràenlevertesvêtements,dis-jegentiment.Fort heureusement, Daniel ne se doute de rien. Il ne serait pas

franchement rassuré avec Reed ouGideon,mais il l’est avec deux fillestrashqui,siellesn’avaientpasdesparentsriches,seraientprobablemententraindevendreleurscorpsdanslarue.Voilàcommentfonctionnesoncerveau, cequi rendcrédiblenotrepetitehistoire.Parcequ’il estDanielDelacorte,lefilsd’unjuge,lejoueurdelacrosse,untypeàlaréputationenor,quepersonnenesuspecteraitd’êtreuntelsalaud.Jenedoutepasune seconde que la cousine de Savannah appartienne à une branchemoinsaiséedesafamille.

Valérie et moi nous armons de courage pour réussir à toucher soncorps,maisheureusement,iln’apasbesoind’aide.Ilbaissesonshort,sonboxer,etenlèvesontee-shirtavantqu’onaiteuletempsdedireouf.

–Ilyaquelqu’uniciquibande,murmureValérie.

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Danielselècheleslèvres.–Oùveux-tuquejememette?Elleposesesmainssurseshanchesetfaitsemblantderéfléchir.–Qu’est-cequetudiraisdelà?Elledésigneuntasdecoussinsjustedevantlesfenêtres.Danielvas’agenouillersurlescoussins.– N’oubliezpasde faireattentionàvosdents.Couvrez-lesavecvos

lèvres.Je pense alors que c’est le dernier ordre qu’il me donnera, avant

d’attraper nonchalamment une coupe de fruits sur la table et de luifrapperlatêteavec,àtoutevolée.

Ilsecabreenhurlant:–Merdealors!Abasourdi,ilpasseunemainsurl’arrièredesoncrâne.–Jet’avaisditquelevasen’étaitpasassezsolide,s’écrieSavannahen

sortantdelasalledebains.AvantqueDanielaitletempsdes’enfuir,elledirigeversluiunflacon

delaqueetluienenvoieunebonnegicléedanslafigure.–Salopes!Touteslestrois,vousêtesmortes!hurleDaniel.Iltrébucheverslagaucheetseheurteauxbaiesvitrées.Nouséclatonsderiretouteslestrois,etjerappelleàSavannah:–Jeneveuxpasletuer,jeveuxjustelemettreK.-O.–Quedirais-tuduchandelier?Je balance la lourde arme en argent et j’atteins Daniel à l’épaule.

Savannah le cogne à la tête avec celui qui fait la paire, et Daniels’effondre.

Valérieattrapeuneceintureetm’enpasseuneautre.–Tuasraison,Ella,cetypeestunevraieordure.Aussivitequepossible,nousleficelonscommeunedinde.Commeil

estdanslesvapes,c’estfaciledeluiattacherlesmainsderrièreledos,deluilierleschevillesensemblepuisderelierchevillesetpoignetsavecuneceinture.

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Jeramasseunebananeparterre.–Dommagequ’onn’aitpasderubanadhésif,onauraitpuluiscotcher

çaaucul.–Çaauraitétégénial,gazouilleValérie.Savannahfroncelessourcils.–J’aiuntrucàluimettreaucul.Ellelèvesajambe,lalanceenarrièreetluibalanceuncoupdepied

d’une violence comme je n’en ai jamais vu, même dans un film.Apparemment, lui avoir balancé un chandelier de plus de deuxkilogrammessurlatêten’apassuffiàcalmersacolère.

L’impactde sonpieddélicat sur le culdeDaniel estétonnant.Ça leréveille,etilpousseunhurlementdedouleur.UnsouriremauvaiséclairelevisagedeSavannah.Valérieetmoi lavoyonssepenchersur luiet luimurmurerquelquechoseàl’oreille,quelquechosequilefaitfrissonner.

Puiselleseredresseetpasseunemaindanssescheveuxpourbienleslisserautourdesajoliepetitetête.

–Jesuisprête.Jeneveuxpaspasseruneminutedeplusaveccetteespèced’ordure.

–Attendez,ditValérie.Nous nous retournons pour la voir lancer une pomme en l’air. Un

sourires’épanouitlentementsurmonvisage.–Tupensesàlamêmechosequemoi?jedemande.Ceplanestdiabolique.J’adoreça.Savannahsemetàrire,ellerittellementfortqu’ellearriveàpeineà

nousaideràouvrirlabouchedeDanieletàyglisserlapomme,maisungarçonàpoiletdanslesvapes,çanenousposepastropdeproblèmes

–Allons-y.JecoursverslaporteetjeretrouveSawyerderrière.–Onestprêtes.–Nousaussi,répond-ilavecunpetitsourire.Vousl’aveztué?Parce

quec’estcequ’ilm’asembléenentendantsesglapissements.

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– Je crois que Savannah en avait l’intention, mais nous l’avonsretenue.

–J’aitoujoursbienaimécettenana,ditSawyer.Jemepencheenarrièreetjefaissigneauxfillesdesortir.Savannah

etValériepassentparlesportescoulissantesquimènentàlaplage.Unefois qu’elles sont sur la grève, j’allume les lumières et j’ouvre les voletsroulants. Les Worthington nous ont facilité la tâche. Pendant que leslumières s’allument et que les volets s’ouvrent, Sawyer et moi nouscouronsrejoindrelesfillesquiattendentauxcôtésdeSébastian.

Lorsquenousarrivons,Sebposeunemain sur l’épauledeValérie etl’autresurcelledeSavannah.

– Je n’arrive pas à croire qu’on va rater le spectacle, dit-il d’un airtriste.

Çam’emmerde,moiaussi,maisnousavonsconvenuquecen’étaitpasune bonne chose pour moi et les filles d’être au milieu de la foulelorsqu’onvadévoilerDaniel. Sin’importe lequelde ses copains supposeque c’est nous qui sommes derrière tout ça, il pourrait s’en prendre ànous.Lesjumeauxnousservirontdegardesducorpsencasdebesoin.

Nousattendonsentendantl’oreilleauxsonsquinousrévéleraientqueDaniel,ficeléetexposécommeunporcpourunbarbecue,estvisiblepartous.Lespremierssonsquinousparviennentsontdescrisd’horreur.Puisuncriquenousn’arrivonspasàdiscerner,etensuitelesilence.Aprèscequi me paraît être un long moment, mais doit sembler une éternité àDaniel, nu et attaché, il y a un fort « Ohmon Dieu ! » et « Putain demerde,c’estDanielDelacorte?».D’autresvoixs’yjoignent,jusqu’àcequechaqueinvitésemetteàcommenterlascènequisedérouledevantlui.

Ilyadesapplaudissements,dessifflements,descris.Pouruneraisoninconnue, je me mets à trembler. Je tremble si fort qu’il faut que jem’appuieàSawyer.Ilpasseunbrasautourdemoietmefrictionnedelamain.Jebégaie:

–Je…jenesaispaspourquoijemesenssifaible.–Tuasunechuted’adrénaline.

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Ilplongeunemaindanssapocheetmetendunpaquetdebonbonsàlamenthe.J’enmetsdeuxdansmabouche.Jem’appliqueàbienmâcher,et peut-être est-ce l’apport de sucre qui m’aide ou bien le fait de meconcentrer surautre choseque sur le coupauquel j’ai participé,mais jem’arrêtedetrembleretjecommenceàmeréchauffer.

–Oùestlerestedel’équipeRoyal?Sébastianme jetteun regardamusécommes’il savaitpertinemment

dequelRoyaljeparle.–Ilesttémoindel’humiliationdeDanielaveclerested’AstorParket

ils’assurequ’oncolportelavéritablehistoire.–Lavérité.Qu’ilaététabasséparunefille.–Troisfilles,jecorrige.–C’estunemeilleurehistoires’iln’yenaqu’une,s’amuseSawyer.–Maisvousnevoulezpasenavoirlecrédit,vousaussi?–Officiellement?Naan.(Sawyersourit.)Çafiniraitparreveniraux

oreillesdepapaetilnenouslâcheraitplusjusqu’ànotreservicemilitaire.Maisonsauraquec’estnousquil’avonsfait,etc’esttoutcequicompte.

Unrassemblementauboutdel’embarcadèreattiremonattention.LestroisautresRoyalarrivent.Sawyerm’attrapeparlebrasetm’entraînesurlaplage.Valérienouscriequ’ellerentreenvoitureavecSavannahetjeluifaisunrapidesignede lamain toutencourantavec les jumeaux.Leursfrèresnesontpasloinderrière.

–Tuauraisdûvoirsatête,commenceGideon.–Mec,saqueueétaittouteriquiqui,rigoleEaston.–Est-cequ’elleavaitrétrécioubienilestvraimentcommeça?–L’hématomesursonfrontavaitl’airsérieux.Est-cequec’esttoiqui

luiasfait?Reedal’airimpressionné.– Wouah,wouah,wouah. (Je lève lesmains.) Jenepeuxpas vous

répondreàtousenmêmetemps.–Tuasfaitdubonboulot.

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Gideonmesurprendenmepassantvigoureusementlamaindanslescheveux.

– C’était parfait, dit Reed d’une voix traînante, et son regardapprobateurmefaitchaudaucœuretmeremueàl’intérieur.

Eastonmeprenddanssesbrasetmefaittournoyerdanslesairs.–Tuesunecheffe,Ella.Rappelle-moideneplusjamaist’emmerder.Un ensemble de cris et d’invectives nous fait nous retourner vers la

maisondesWorthington.Eastonmefaitglisserausoletnousdécouvronsune foulemassée sur le sommetde ladune.Onentendungros splash,est-cequequelqu’unesttombédanslapiscine?

–IlvientdepousserPennyLockwooddanslapiscine!criequelqu’unavantd’éclaterderire.

–Levoilà,ditGideonensoupirant.Lui, c’est Daniel, qui charge à travers la foule. Même dans la nuit

noire,nousnousrendonsbiencomptequ’ilestfoufurieux.– Ne le laisse pas te mordre, il pourrait bien avoir la rage, me

murmureEastonàl’oreille.Daniels’arrêteauborddelapelouseetparcourt le littoraldesyeux.

Quandilnousvoit,ilhurle,nousmontredudoigtetsautedanslesabledansunmouvementathlétiquesurprenant.

–Regardez-moiça!C’estimpressionnant.– N’oublie pas qu’il fait partie de l’équipe de lacrosse,me rappelle

Sawyer.– Je vais vous tuer.Vous tous ! En commençant par toi, espècede

raclure.Reedesquisseunsourireensetournantversnous.–Çasonnaitcommeunemenace,pasvrai?Eastonhochelatête.– Jepensequ’Ellaestengranddanger.Tusaisquepapan’aimerait

pasça.Heureux comme je ne l’ai jamais vu, Reed me pousse derrière lui

pendantqueDanielcourtsurlesable,uniquementvêtudesonshortkaki.

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Depetitséclatsdelumières’allumentquanddenombreuxparticipantsàla fête décident d’immortaliser cette scène. LesRoyalme repoussent enarrièreetjedoisjouerdescoudesentrelesjumeauxpourpouvoirvoircequisepasse.

J’arrivejusteàtemps,parcequ’aumomentoùjeparviensàglissermatêteentrecettemontagnedemusclesquereprésentent lesRoyal,Danielse jette sur Reed en grondant. Reed fait un pas en avant et lance sonpoingcontrelamâchoiredeDaniel.

Daniels’écroulecommeunepierre.

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CHAPITRE29

C’est pleins d’entrain que nous regagnons le manoir. J’envoie unrapide texto à Valérie pour m’assurer qu’elle est rentrée bientranquillementavecSavannah.Elleme répondque toutbaigne.En fait,lesCarringtonhabitentàdeuxpasdesMontgomery.

Eastonmarchedevantmoi.Les jumeaux,quisontdevantnous,rientencore de la scène que nous avons laissée chez lesWorthington. Leursvoixparviennentjusqu’ànous.

–Ill’amisK.-O.endeuxtempstroismouvements,glousseSawyer.–C’estunnouveaurecordpourReed,acquiesceSebastian.Reed et Gideon traînent derrière nous. Chaque fois que je me

retourne,jelesvoispenchésl’unversl’autre,engrandediscussion.Ilestévidentquecesdeux-làpartagentdessecretsqueniEastonnilesjumeauxne connaissent, et çamedérange, parce que je commençais vraiment àcroireàladeviseRoyaldu«tousunis».

Nousatteignonslamaison,maisjem’arrêtedevantlesmarches.–Jevaisallerfaireunpetittourauborddel’eau,dis-jeàEaston.–Jet’accompagne.–J’aienvied’êtreunpeuseule.Nem’enveuxpas.–Pasdutout.Ilsepencheetdéposeunbaisersurmajoue.– Ce soir, c’était vraiment une vengeance de première classe, p’tite

sœur.Tuesmonnouveauhéros.

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Une fois Easton parti, je laisse mes chaussures sur un rocher et jemarchepiedsnussurlesable.Lalumièredelalunem’éclaireetjen’aipasfait vingt pas que j’entends quelqu’un derrière moi. Pas besoin de meretournerpourcomprendrequec’estReed.

–Tunedevraispastebaladertouteseuleici.– Quoi ? Tu crois queDaniel va surgir de derrière un rocher pour

m’attaquer?Reedarriveàmahauteur.Jem’arrêteetjemetourneverslui.Comme

d’habitude,labeautédesonvisagemesaisit.–C’estpossible.Tul’assacrémenthumiliécesoir.Autantenrire.–Ettoi,tul’asmisK.-O.Ilestprobablementchezluiàcetteheure,en

traindesepasserdelaglacesurlafigure.Reedhausselesépaules.–Ill’abiencherché.Je fixe l’eau, et luime regarde. Je sens son regard quime brûle la

peauetjemeretourneversluiavecunsouriredésabusé.–Vas-y,dis-les.–Quoi?–D’autresmensonges.Tusais,dugenrequelanuitdernière,c’était

justepourmerendreservice,quetunevoulaispasvraiment,bla-bla-bla.Àmagrandesurprise,iléclatederire.–OhmonDieu!Est-cequej’aibienentenduunrire?ReedRoyalrit,

lesamis.Quelqu’undevraitappelerleVatican,unvéritablemiracledivinvientdeseproduire.

J’obtiensunautregloussement.–Tuestellementchiante,grommelle-t-il.–Ouais,maistum’aimesbienquandmême.Ilsetait,puisilpousseunsoupiravantdepoursuivre:–Ouais,peut-êtrebien.Jefaissemblantd’êtrestupéfaite.–Deuxmiraclesenuneseulenuit?C’estlafindumonde?

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Reedattrapeunemèchedemescheveuxettiredessus.–Çasuffitcommeça.Je m’approche de l’eau, mais elle est encore plus froide que

d’habitude.Jepoussedescrisstridentsquandelletouchemesorteilsetjerecule.

–Jedétestel’Atlantique.LePacifique,c’esttellementmieux.–TuhabitaissurlacôteOuest?Ilal’aircurieuxmalgrélui.–Ouest,Est,Nord,Sud,onahabitépartout.Onn’estjamaisrestées

longtempsaumêmeendroit.Jecroisqueleplus long,çaaétéunan,àChicago.Oupeut-êtreàSeattle,deuxans,maisçanecomptepasparcequemamanétaitmaladeetquenousn’avionspaslechoix.

–Pourquoiest-cequevousbougiezautant?– À cause de l’argent, en général. Simaman perdait son boulot, il

fallait qu’on fasse nos valises pour aller là où il y avait de l’argent àgagner. Ou alors elle tombait amoureuse et on déménageait avec sonnouveaupetitami.

–Elleaeubeaucoupdepetitscopains?Savoixestdure.Jeluirépondshonnêtement.– Ouais, elle tombait souvent amoureuse. Et puis, très vite, elle ne

l’étaitplusvraiment.Jeleregarded’unairnarquois.–C’estdudésirça,pasdel’amour,ditReedenhaussantlesépaules.–Peut-être.Maispourelle,c’étaitdel’amour.Jemarqueunehésitation.–Est-cequetesparentss’aimaient?Jen’auraispasdûposercettequestion,parcequ’ilseraiditcommeun

boutdebois.–C’estcequeprétendmonpère.Maisputain,iln’ajamaisagicomme

unhommeamoureux.JecroisqueReedatort.QuandonentendCallumparlerdeMaria,il

est évident qu’il l’aimait profondément. Je ne sais pas pourquoi ses fils

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refusentdelevoir.–Ellevousmanquebeaucoupàtous,hein?Jechangedesujet,pourquelquechosedeplussûr,maiscelan’efface

paslatensionsursonvisage.Reednerépondpas.–C’estnormal.Mamanmemanquechaquejour.C’était lapersonne

quicomptaitleplusdansmavie.–C’étaitunestrip-teaseuse.Saréponsedédaigneusemenouelesépaules.– Etalors?Ellepayaitnos facturescommeça.Çanousassuraitun

toit.Çapayaitmescoursdedanse.Desyeuxbleusperçantsmefixent.–Est-cequ’ellet’aforcéeàfairedustrip-teasequandelleesttombée

malade?–Non.Ellenel’ajamaissu.Jeluiracontaisquej’étaisserveuse,cequi

étaitvrai.J’aifaitça,etj’aiaussitravaillédansuncamion-pizza,maisçane suffisait pas à payer ses frais médicaux, alors j’ai piqué sa carted’identitéetj’aitrouvéunboulotdansundesclubsenville.

Jesoupire.–Jenem’attendspasàcequetucomprennes.Tun’asjamaiseuàte

soucierdegagnerdel’argent.–Non,c’estvrai.Je ne sais pas qui de nous deux a bougé le premier, mais nous

marchonsànouveau.D’abordàquelquespasdedistance,maisplusnousavançons, plus nous nous rapprochons l’un de l’autre, au point que nosbrasnussetouchentàchacundenospas.Sapeauesttièdeetlamiennemechatouilleàchaquefrôlement.

–Mamèreétaitgentille,finit-ilparmerévéler.C’est aussi ce quem’aditCallum. Jepense à la femmequeSteve a

épousée, Dinah, cette horrible mégère qui a des tableaux d’elle à poilpartout chez elle, et je me demande comment les deux amis ont puépouserdesfemmessidifférentes.

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–Ellesesouciaitdesautres.Trop,peut-être.Elleavaitunfaiblepourleshistoirestristes.Ellesedonnaitbeaucoupdemalpouraiderlesautres.

–Elleétaitgentilleavectoi?Avectesfrères?Reedhochelatête.–Ellenousaimait.Elleétaittoujourslàpournous,ellenousdonnait

des conseils, elle nous aidait à faire nos devoirs. Et, chaque jour, ellepassaitunmomentseuleavecchacund’entrenous.Jesupposequ’ellenevoulaitpasquenousnoussentionsnégligésouquenouspensionsqu’elleavait son préféré. Et le week-end, on faisait toujours des trucs tousensemble.

–Commequoi?jedemande,curieuse.Ilhausselesépaules.–Desmusées,lezoo,dukiting.–Dukiting?Ilhausselesyeuxauciel.–Duvolencerf-volant,Ella.Nemedispasquetun’enasjamaisfait.–Nan.Maisjesuisalléeauzoounefois.Undescopainsdemaman

nousavaitemmenéesdanscezoodemerde,aumilieudenullepart. Ilsavaientuneoieetunlamaetcepetitsingequim’avaitjetéducacadessusquandnoussommespassésdevantlui.

Reedéclatederire.C’estlesonleplussexyquej’aijamaisentendu.– Et ensuite, il s’est avéré que le zoo était une couverture pour un

traficdedrogue.Lepetitcopainétaitvenuacheterdel’herbe.Aucundenousnefaitdecommentairesurl’énormedifférencedenos

enfancesrespectives,maisjesaisquenousypensons,luicommemoi.Nous continuons àmarcher. Ses doigts frôlent lesmiens. Je retiens

monsouffle,jemedemandes’ilvameprendrelamain,maisilnelefaitpasetladéceptionesttropforte.

Jem’arrêteetjeleregardedroitdanslesyeux.Cen’estpasunebonneidée,parcequejesaisqu’ilpeutlireledésirsurmonvisage.Cequirendsonregardimpénétrable,ducoupjeravalemafrustration.

–Tum’aimesbien.

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Samâchoiretressaille.–Tuasenviedemoi.Encoreuntressaillement.–Merde,Reed,pourquoineveux-tupasl’admettre?Àquoiçasertde

mentir?Commeilnerépondpas,jefaisdemi-touretjem’éloigneenfrappant

le sable avec mes pieds nus. Soudain, je suis tirée en arrière et mesépaules heurtent violemment une large poitrine d’homme, ce qui mecoupelesouffle.

LementondeReedvientseposersurmonépaule,seslèvressontàunmillimètredemonoreille.

–Tuveuxquejeteledise?Parfait,jevaisledire.J’aienviedetoi.J’aiuneenviedinguedetoi.

Jesenssonsexequisepressecontremesfesses,etjecomprendsqu’ilnementpas.Alorsqu’unfrissonparcourtmacolonnevertébrale,Reedmefaitfairevolte-faceetsabouches’écrasesurlamienne.

Sonbaiserestassezchaudpourtransformerl’Atlantiqueenlave.Meslèvres s’ouvrent, sa langue glisse entre elles, elle dévore ma bouche siavidementqu’ellemelaissepantelante.Jem’accrocheàseslargesépaulesetjefaisensuiteglissermesmainssursataillefine.

Il gémit et m’attrape les fesses en roulant des hanches afin que jepuisse le sentir le plus possible. Ensuite, après un autre baisercomplètementplanant,ilmerelâcheetreculeenchancelant.

–Jeparsenfacl’annéeprochaine,dit-ild’unevoixrauque.Jepars,etil ya toutes les chancesque jene revienne jamais. Jene suispasassezégoïste pour débuter quelque chose que je ne peux pas terminer. Je nevaispastefairesubirça.

Jem’en fiche, j’ai envie de dire. Jeme contenterais de lui n’importecomment,mêmesic’estpouruntempstrèscourt,maisjeneprononcepaslesmots,parcequejesaisqu’ilsneleferontpaschangerd’avis.

– Rentrons à la maison, marmonne-t-il quand mon silence seprolonge.

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Jelesuissansmotdire,meslèvrespicotentencoreaprèssonbaiser,lecœurencorelourddesonrejet.

Je viens tout juste de m’assoupir quand la porte de ma chambres’ouvre engrinçant. Je lève la tête, àmoitié groggy.Quelques secondesplustard, jesuisparfaitementréveillée.Reedgrimpedansmonlit. Ilnedit pas un mot. La pièce est trop sombre pour que je puisse voirl’expressiondesonvisage,maisjesenslachaleurdesoncorpslorsqu’ilseglissecontremoi.Etlachaleurdesamainquandilcaressemajoueavantd’attrapermonmentonetdetournermatêteverslasienne.

–Qu’est-cequetufais?jemurmure.Savoixsembledouloureuse.–J’aidécidéd’êtreégoïste.Lebonheuréclatedansmapoitrine.Jeglissemesbrasautourdeson

couetjeleserreplusfort.Seslèvresplanentsurlesmiennes,maisilnem’embrassepas.

–Justecesoir,dit-il.–Tuavaisdéjàditçalanuitdernière.–Cettefois,c’estvrai.Ilm’embrasse,etlamoindreprotestationquej’auraispuexprimerse

perddanslecontactavidedenoslèvres.Il gémit quandma langue touche la sienne. Ses hanches puissantes

roulent contre moi, sa queue dure frotte ma cuisse. Je bouge afin quenousnousnousretrouvions faceà face,chacunsur lecôté,nosbouchesscelléesl’unecontrel’autre.

– Merde, s’étrangle-t-il, et ses mains plongent sous mon tee-shirt.Dansmonslip.

Sesdoigtsmetaquinent,appuientsurlespointssensiblesquimefontgémir contre ses lèvres. Nous nous caressons, nos mains passent etrepassentsurnospeauxnues.Aucundenousneprendlamoindrepausepourrespirer.Nousnousdévorons.

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Jen’aipasàattendrebienlongtempspourquelatensioninternedemoncorpsexploseenmilliersdepetitesétincelles.Leplaisirm’envahitdeplusenplus,jehalètecontresabouche.Reedtrembleet,cettefois,c’estmoiquiavalesongémissementdeplaisir.

Ensuite, nous restons allongés, mêlés l’un à l’autre. Nous nousembrassonspendantcequimeparaîtdurerdesheures. Jeneveuxplusjamaisqu’ilparte.Jeveuxqu’ilrestedanscelitpourtoujours.

Maisexactementcommelaveille,lorsquejemeréveillelelendemainmatin,iladisparu.

Jemedemande si j’ai rêvé,mais quand jeme retourne, je sens sonodeursurmesoreillers.Sonshampoing,sonsavon,sonafter-shaveépicé.Ilétaitlà.C’étaitréel.

Lemanqueme frappe de plein fouet, etmême le soleil qui brille àtraverslesrideauxn’arrivepasàeffacermadéception.

Maiscettedéceptionestremplacéed’unseulcoupparunsentimentdepaniquelorsqu’uncriperçanttraverselemanoir.Jecroisqueçavenaitdusalon de devant. Je saute du lit, j’ouvrema porte en grand. C’est alorsqu’unautrehurlementmedéchirelestympans.

C’estBrookequihurle:–Tunevaspast’ensortircommeça!Pascettefois,CallumRoyal!

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CHAPITRE30

J’atteins la rampe au moment précis où Easton se rue hors de sachambre.Sescheveuxnoirssontenbatailleetsesyeux injectésdesanglorsqu’ilmerejoint.

–C’estquoicettemerde?marmonne-t-il.Nous regardons tous deux vers le bas, en direction du salon, où

BrookeetCallumsefontface.C’estpresquecomique,parcequ’elleaaumoinsunetêtedemoinsqueluietque,ducoup,ellenereprésentepaslamoindremenacepourlui.

– J’ai ledroitd’être ici ! hurleBrooke, en tapant sur lapoitrinedeCallumd’undoigtàl’ongleaiguisé.

– Non, pas du tout. Tu n’es pas une Royal et tu n’es pas uneO’Hallorannonplus.Tun’espasàtaplacedanscettemaison.

– Alors, dis-moi où est ma place ? Pourquoi est-ce que je doissupporter toutes tes conneries ? Tu me traites comme si j’étais tamaîtresse,pastacompagne!Oùdoncestmabague,Callum?Oùestmaputaindebague?

JenepeuxpasvoirlevisagedeCallum,maisjediscerneparfaitementlatensiondanssesépaules.

–Lecorpsdemafemmeestencoretiède!hurle-t-il.À côté demoi, Easton se crispe, lui aussi. Je tends lamain vers la

sienne.Ilmeserretellementfortqu’ilmefaitmal.

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–Tut’attendsàcequejemeremarie,commesiçan’étaitpasgrand-chose…

– Ça faitdeuxans ! l’interromptBrooke.Elleestmortedepuisdéjàdeuxans.Réveille-toi!

Callumtitube,commesiellel’avaitfrappé.–Jenetelaisseraiplustedéfiler.C’estterminé.Brookes’avancebrusquementetl’attrapeparlepandesachemisede

soirée,qu’ellefroisseentresesdoigts.–J’enaimarredetoi,tum’entends?C’estfini!Surce,ellelerepousseetfileverslaporte.Lebruitdeseshautstalons

résonne sur le sol enmarbre. Callum ne cherche pas à la rattraper, etquand elle s’en rend compte, elle se retourne enpointantundoigt verslui.

–Sijepassecetteporte,jenereviendraijamais!Unevoixplusfroideluirépond:–Faisattentiondenepasteprendrelaporteensortant.Eastonpouffederire.–Tu…tu…tuesunmonstre!glapitBrooke.Elleouvrelaportesiviolemmentqu’uncourantd’airtraverselesalon

etquejelesensjusqu’audeuxièmeétage.Sa tête blonde et sa minirobe disparaissent sur le seuil. Elle fait

claquerlaportedetoutessesforces.Lesilenceretombesurlesalon.Jedécèleunmouvementsurlecôté.

Jeme retourne pour découvrir les autresmembres de la famille Royal,juste derrière nous. Les jumeaux ont l’air endormis. Gideon, lui, a l’airchoqué. Le visage de Reed est impassible,mais je jurerais entrevoir unéclairdetriomphedanssesyeux.Eastonnecherchemêmepasàcachersajoie.

–Est-cequec’estvraimentarrivé?nousdemande-t-ilensecouantlatête,l’airstupéfait.

Callum entend la voix de son fils et il lève la tête vers la ramped’escalier. Il a l’air touché,maispaseffondré,que sapetiteamievienne

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toutjustedelelarguer.– Papa, l’appelle Easton, avec un immense sourire. Ça, c’est un

homme,etunvrai.Viensicimefaireun«highfive»!Sonpèreasoudainl’airlas.AulieuderépondreàEaston,Callummeregardefixement.– Puisque tu es réveillée, Ella, pourquoi ne viens-tu pas un instant

dansmonbureau?Ilfautquenousayonsunepetiteconversation.Etilquittelesalon.Jememordslalèvre,j’hésiteàlerejoindre.Jemesouvienstoutd’un

coupqu’iladitàBrookequ’ellen’étaitniuneRoyalniuneO’Halloran,etmonangoisse augmente. J’ai l’impressionqu’ils se querellaient à proposdeSteve.Cequiveutdire,indirectement,àproposdemoi.

–Vas-y,murmureReedlorsqu’ilvoitquejenebougepas.Comme d’habitude, j’obéis à ses ordres, sans même m’en rendre

compte.Ondiraitbienqu’ilmedomine,etjenesuispassûred’apprécier.Maisjesuisincapabledel’empêcher.

Jedescendsl’escaliersurdesjambeschancelantesetjerejoinsCallumdanssonbureau.Iladéjàouvertl’armoireàliqueursetseverseunverredescotchbientassélorsquej’entredanslapièce.

–Est-cequevousallezbien?jedemandedoucement.Ilmemontreleverredanssamain,leliquideéclabousselesparois.–Çava,çava.Jesuisdésolédet’avoirréveilléecommeça.–Alors,c’estvraimentterminéentrevous?Jene peuxm’empêcher d’éprouver de la peine pourBrooke. J’ai pu

découvrirsoncôtésalope,biensûr,maiselleaaussiétégentilleavecmoi.Enfin, c’est ce que je crois. Brooke Hudson est une fille difficile àcomprendre.

–Probablement.(Ilsirotesonverreàpetitesgorgées.)Ellen’avaitpascomplètementtort.Attendredeuxans,c’estlongpourunefemme.

Callum pose son verre sur son bureau et passe une main dans sescheveux.

–Lalecturedutestamentestprévuepourdansdeuxsemaines.

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Jeleregardesanscomprendre.–Letestament?–Oui,celuideSteve.Jenecomprendstoujourspas.–Maisçan’apasdéjàeulieu?Jecroyaisquevousm’aviezditqueles

obsèquesavaientdéjàeulieu.– C’estvrai,mais toutn’apasencoreété réglé.Dinahetmoiavons

commencé les démarches après la mort de Steve, mais la lecture dutestamentaétéajournéejusqu’àcequ’onpuisseteretrouver.

JepariequeDinahaapprécié.–Faut-ilvraimentquej’yaille?Est-cequeDinahn’héritepasdetout,

puisquec’estsafemme?–C’estbienpluscompliquéqueça.Iln’entrepasdanslesdétails.–Maisoui,ilfautquetuyailles.Jeviendraiaussi,entantquetuteur

légal,ainsiqueDinahetnosavocats.ElleestpartieàParishiersoir,maisellerevientdansdeuxsemaines,etalorsnouspourronstoutréglertout.Çasepasserabien,jetelepromets.

En la présence de Dinah O’Halloran ? Cause toujours. Ce seradouloureux,plutôt.

Maisjemecontentedehocherlatêteetdedire:–Ok.Sijedoisyaller,j’irai.Ilhochelatêteluiaussietattrapesonverre.

Callumdécolle un peu plus tard pour aller jouer au golf. Il prétend

quemarcherpendantlesdix-huittrousl’aideàavoirl’espritplusclair.Jem’inquièteenmedemandant jusqu’àquelpoint ilaprévudese torcheravantdemerappelerqu’ilestadulteetquejen’aiquedix-septans,alorsjememordslalangue.

Unparun,lesmembresdelafamilles’envont.Gideonpartavantledéjeuner pour rentrer à la fac. Il a toujours l’air plus heureux quand ilrepartquequandilarrive.

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Bientôt,iln’yaplusquemoidanslamaison.Jemeréchauffeunrestedequicheetj’envisageensuited’allerfaireuntoursurlaplage.CelafaitunmoisàpeinequejesuisarrivéechezlesRoyal,maiscemoisaétébienrempli, plein de vie. Il se passe toujours quelque chose. Pas toujoursquelquechosedebien,maisjen’aipasétéseuleuninstant,etmaintenantjeréalisequejen’aimepaslasolitude.C’estagréabled’avoirdesamisetde la famille autour de soi, même si cette famille est super-dysfonctionnelle.

Je me demande si c’est la raison pour laquelle Gideon continue àrentrerrégulièrement.

–Est-cequetum’asgardéunpeudecetrucauxœufs?LavoixdeReedmefaitsursauter.Je pose unemain surmon cœur comme pour l’empêcher de sauter

horsdemapoitrine.–Tum’asfaitpeur.JecroyaisquetuétaispartiavecEaston.–Nan.Iltraverselapiècepourregarderpar-dessusmonépaule.–Qu’estcequ’ilyad’autredanslefrigo?–Delanourriture,jeluiréponds.Ilmetirelescheveuxavecespièglerie,dumoinsc’estcequejecrois,

etvaexaminerlespossibilitésquis’offrentàlui.Laportedansunemain,ilsetientdeboutdevantlefrigo.–Unproblème?Jem’arrêtedemangerpouradmirerleslignessexydesoncorps,etla

façondontsesmusclesbougentpendantqu’ilfarfouilleàlarecherchedenourriture.

–Jesupposequetunevoudraspasmefaireunsandwich?dit-il.–Sûrementpas.Ilclaquelaporteetmerejointàtable,ilmepiquemonassietteetma

fourchette et engloutit la moitié de la quiche avant même que j’aie letempsdeprotester.

–C’étaitàmoi!

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Jeplongeetjetentedelesluireprendre.–Sandravoudraitquetupartagesavecmoi.Ilmerepoussed’uneseulemain…encore.Merde. Il fautque jememetteà fairede lamusculation.J’essaiede

récupérermonassiette,etcettefois,Reednemerepoussepas.Ilmetireàluietlasurprisemefaitperdrel’équilibre.Jefinisparm’écroulersursesgenoux,avecmesjambesdepartetd’autredeseslargescuisses.

J’arrête de me tortiller pour me libérer sans succès quand il posefermement unemain sur mes fesses. Puis il m’embrasse, et je ne peuxm’empêcherde répondreavec forceà sonbaiser. Je veuxqu’il fasse cesbruitsdegorgequim’indiquentquejel’excite.

–Tuesparticematin,dis-jequandilmerelâche.Soudain, j’aimerais pouvoir ravalermes paroles, parce que je crains

qu’ilmedisequelquechosequivamefairedelapeine.–Jen’enavaispasenvie,répond-il.–Pourquoies-tuparti,alors?Toutemafiertéestàterre,maismafaiblessenel’arrêtepas.Ilpassesesdoigtsdansmescheveux.– Parceque jedeviensfaiblequandils’agitdetoi.Jen’aipasassez

confianceenmoipourresterdans ton lit toute lanuit.Putain, lamoitiédestrucsauxquelsjepensesuffiraitàmefairefoutreentaule.

Sesparolesm’étourdissentdeplaisir.–Tupensestrop.Il produit un son incompréhensible, d’impatience, de cynisme,

d’humour?Etilm’embrasseànouveau.Trèsvite,cebaisernenoussuffitplus.Jemebaissepourtirersursachemise.Sesmainscourentsurmoncorps,sousmontee-shirt,souslaceintureélastiquedemonshort.Jemedonneàlui,àlarecherchedel’apaisementqueseulReedsaitm’apporter.

Unbruitdepassourdàl’extérieurdelacuisinenousfaitsursauter.–Tuasentenduquelquechose?jechuchote.Reed se lève dans unmouvement souple et puissant et, tout enme

portantdanssesbras,sortdanslehall.Ilestvide.Ilmeposeparterreet

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medonneunelégèretapesurlesfesses.–Etsituallaisenfilerunmaillotdebain?–Hum,etpourquoijeferaisça?Jeveuxjusteretourneràtable,m’asseoirsursesgenouxpendantqu’il

m’embrassecommeunfou,maisilestdéjàentraindesortir.–Parcequ’onvaallernager,lance-t-ilpar-dessussonépaule.Jegrimpelesescaliersensoupirant.Enarrivantenhautdesmarches,

je vois Brooke qui sort dema chambre. Ou dumoins, c’est ce qu’ilmesemble.

Je m’arrête tout net, la colère et le soupçon me tordent le ventre.Qu’est-ce qu’elle pouvait bien faire dansma chambre ? Ehmerde,monargentestlà-dedans.Etsijamaisellemel’avaitpris?

Je la détaille rapidement,mais elle n’a pas de sac et ses vêtementssontsimoulantsqu’illuiestimpossibledecacheruneliassedebilletssurelle.Celadit,ellen’arienàfaireici,etj’affichemonmécontentementenavançantverselle.

–Qu’est-cequetufaisici?Elleavanceversmoienprenanttoutsontemps.– Eh bien eh bien,mais voilà la petite orpheline, Ella, la nouvelle

maîtresseduchâteauRoyal.– Je croyais que tu avais dit à Callum que tu partais et que tu ne

reviendraisjamais,dis-jeprudemment.– C’est ce que tu espères, se moque-t-elle en balançant ses longs

cheveuxblondssurlecôté.Sijamaiselleaunjouréprouvédel’amitiépourmoi,c’estbienfinià

présent.Inutile deme battre, alors je l’évite, je fais un pas de côté et jeme

placedevantlaportedemachambre.– N’entre pas dans ma chambre. Je suis sérieuse, Brooke. Si je te

prendsànouveausurlefait,jelediraiàCallum.–C’estvrai.Callum.Tonsauveur.L’hommequit’atiréedelafangeet

quit’aamenéedanssonpalais.

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L’amertumeselitdanssesyeux.– Ila fait lamêmechoseavecmoi.Moiaussi, ilm’asauvée,tut’en

souviens ? Mais devine quoi, ma poulette, nous sommes des produitsjetables.Noussommestoutesdesproduitsjetablespourlui.(Ellelèveunemainparfaitementmanucuréeversmonvisage.)Tavieest transformée,n’est-ce pas ? Comme celle d’une princesse de conte de fées. Mais lescontesdeféesn’existentpas.Lesfillescommenousrentrenttoujoursdansleurcitrouilleàlafindubal.

Jemerendscomptequesesyeuxbrillentdelarmes.–Brooke,dis-jegentiment.Laisse-moit’appeleruntaxi,d’accord?Moncœurs’attendritenfaced’elle.Ellesouffreetelleabesoind’aide.

Jenesaispascequejepeuxfaireàpartlafairerentrerchezelle.–Ilsefatigueradetoiaussi,continueBrookecommesijen’avaisrien

dit. (Ma réponse lui importe peu. Elle a juste besoin qu’on l’écoute.)Retiensbienmesparoles.

– Mercipour tesconseils, jerépondssèchement,mais jepensequ’ilesttempspourtoid’yaller.

J’essaiedeladirigerverslesescaliers,maisellemerepousseetvasecognercontrelemurd’enface.Deseslèvresrougecerises’échappentdeséclatsderirehystériques.

–J’aieulesRoyaldanslecreuxdelamainbienpluslongtempsquetoi,machérie.

J’enaimarredel’écouter.ElleveutjusteseplaindreetdiredumaldelafamilleRoyal.Mapatienceestàbout,alorsjerentredansmachambre,jefermelaportedetoutesmesforcesetjecoursàlasalledebains.D’unemain tremblante, je tâte l’intérieur du placard.Quandmamain frôle lepaquetdebillets,jepousseunénormesoupirdesoulagement.Ilfautquejedéplacemonargentàunendroitauquel j’auraiseuleaccès.Aussivitequepossible.

– Qu’est-cequinevapas?medemandeReedà l’instantoù j’entredanslepatio.

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Jenepeuxluirépondretoutdesuite,jesuissansvoix.JenesaispascommentjepeuxfonctionneravecReedfaceàmoi,simplementvêtud’unshort de surf qui semble sur le point de lui tomber des hanches. Sapoitrine est un véritablemur demuscles, et j’ai unmal de chien àmeconcentrer.Ma dispute avec Brooke perd de son importance lorsque letypeleplussexydumondeestdeboutdevantmoi.

–Ella?demande-t-ild’unevoixamusée.– Quoi ? Oh, je suis désolée. C’était Brooke. Elle sortait de ma

chambre.Dumoins,jecroisquec’étaitdemachambre.LachambredeCallumestdel’autrecôtédelamaison.Lalargecage

d’escalierséparelamaisonendeux.Leschambresdesgarçonssontd’uncôté, celle de Callum de l’autre. Les chambres d’amis sont au premierétage. Brooke n’avait absolument aucune raison de se trouver de notrecôtédelamaison.

Reedfroncelessourcilsetsedirigeverslaporte.– Elle est partie. J’ai vu sa voiture descendre l’allée lorsque je suis

sortie.–Ilfautqu’onchangelecodeduportail,murmure-t-il.–Mmmmhmmm.Jenepeuxmeretenirdecontinueràlemater.Avantquej’aiepufairelemoindremouvement,Reedmeprenddans

sesbrasetmejettedanslapiscine.Jerecrachedel’eauenremontantàlasurface.

–Pourquoituasfaitça?jehurleenrepoussantmescheveuxtrempésdemonvisage.

Ilsouritd’unairdiabolique.–Tusemblaisavoirbesoindeterafraîchirunpeu.–Tupeuxparler!Jeremontesurlebordcarreléetjefaisunmouvementverslui.Iln’apasdemalàs’enfuir.Inutiledetenterdelerattraper.Ilestplus

grandetplusrapidequemoi.Jevaisdevoirrecouriràlaruse.Jefaissemblantdemecognerlepiedcontreunechaiselongue.

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– Ouille ! je braille en chancelant au bord du bassin, et en mepenchantpourattrapermonpied.

Reedseprécipiteversmoi.–Çava?Jelèvemonpiedcenséêtreblessépourqu’ill’examine.–Jemesuiscognél’orteil.Ilsepencheetjelepoussedansl’eau.Ilrefaitimmédiatementsurface

ensecouantlatêteetilsourit.–Jet’ailaisséefaire.–Tuparles!Jeregarde, fascinée, l’eauruisselersursoncorps. Ilmefait signede

venirlerejoindre.– Nous sommes tous les deuxmouillés à présent, alors tu pourrais

aussibienramenertonjolipetitculdanslapiscine.–Pourquoi?Pourquetupuissesmefairecouler?–Jeneteferaipascouler.(Illèvedeuxdoigts.)Paroledescout.Jeregardesesdoigtsducoindel’œil.–Jetrouvequeçaressembleplusàunsalutvulcain 1qu’àuneparole

descout.Ilfrappelasurfacedel’eaudetoutessesforcesetunevagueénorme

m’éclabousse.– Petitemaligne, le salutvulcain,c’estavecquatredoigts.Alors,ne

meforcepasàsortir.– Je viens juste parce que j’en ai envie, pas parce que tu me

l’ordonnes.Reedfaitlesgrosyeuxetm’éclabousseànouveau.Jeprendsmonélanetjecours,jem’élèvehautdanslesairsetjeme

metsenboulepourretomberjusteàcôtédeReed.Jel’entendshurlerderirelorsquejem’enfoncedansl’eau.

Onpassedixminutesàessayerdesefaireboirelatasse.Pendantcetemps,j’aipeut-êtreessayédebaisserunpeusonshort,et

samainadûfrôler lehautdemonbikini.Moncorpsréagitauquartde

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tour à cette caresse très légère. La fois suivante où je plonge vers seshanches,ilm’attrapelespoignetsetmeramèneàlasurface.Ilmetraîneenarrièrejusqu’àcequ’ilsoitassissurlereborddelapiscineetquejesoisdeboutdansl’eau,devantlui.

–Tucroisquetupeuxmedéculotter,hein?Jefeinsl’étonnement.–Jenageais,c’esttout.Jesuisinnocente,Monsieurlecommissaire.Je lèvemespoignets toujours emprisonnés.Reedpasseundoigt sur

mapoitrine.–Tun’aspasl’aird’uneinnocente.En signe de vengeance, je glissemon pied derrière sonmollet et je

sourisd’unairnarquoisquandilbasculesurlecarrelage.– Il faitun froiddecanard ici, jedis.N’importequiauraitenviede

sortir.–Situasfroid,jevaisteréchauffer,moi.Il repoussemonhautdebikinid’unemain, jusqu’àcequemesseins

soientcomplètementàl’air.Jecroisquejusqu’àprésent,j’aitoujoursfermélesyeuxquandilm’a

touchélà,etc’estétonnammentérotiquedeleregardermeprendredanssaboucheenplein jour. Ilmemordille toutdoucement,puis lèchemontétonavantd’ouvrirlaboucheetdesemettreàlesucer.

Bordel.Jehalète:–Je…euh…jecroisquejevaismenoyerlà-dedans.Illèvelatêteetmelanceunregardcoquin.–Ceseraitinacceptable.Ilmesortdel’eauetm’emportedanslapoolhouse.

Nousnousjetonssurlesofaenhaletant.Reedroulesurledosetme

placesurlui,àcalifourchonsursescuisses.Noussommestrempéstouslesdeux,mais peum’importe quemes cheveux dégoulinent sur sa poitrine

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nue.Jesuistropoccupéeàgémirparcequesesmainss’accrochentàmonhautdebikinietqueseshanchessebalancentcontremoi.

Ildéfaitleslanièresautourdemoncouetdansmondos,etmonbikinitombeenfin.Sonregarddevientinstantanémentlubrique.

–Jet’aidésiréeàlasecondemêmeoùjet’aivue,m’avoue-t-il.–Vraiment,jeletaquine,tuveuxdirelorsquejesuisentréecheztoi

etquetuesrestéàmedévisagerduhautdel’escalier?–Ohoui.TuesentréefringuéecommeuneSDF,aveccettechemise

deflanelleboutonnéejusqu’aucouettonregardflamboyantposésurmoi.C’étaitletrucleplustorridequej’aiejamaisvu.

–Jepensequenousn’avonspaslamêmedéfinitiondumottorride.Ilsemetàrire.Enparlantdetorride,sapoitrineestenfeu.Ellebrûlemesmainsqui

caressent ses pectoraux. Quand je me penche pour l’embrasser, il merépond avec tant d’avidité que j’en ai le souffle coupé. Nos lèvress’épousentsiparfaitement.Je laissecourirmesmainssur sapoitrine, sarespirations’accélère.Sesmusclestremblentsousmesdoigts.

J’adorel’idéequec’estmoiquil’excite.J’exciteReedRoyal,letypequifroncelessourcilsaulieudesourire,quigardesesémotionssousclé,quilescacheaurestedumonde.

Ilnecacheplus riendu toutencemoment.Sondésir se lit sur sonvisage.Jelesenslorsqu’ilsepressecontremoi.

Je baisse la tête pour l’embrasser de nouveau. Il me fait gémir enjouantdespoucessurmestétons.

Larespirationhachée,jeploiesursesmains.Unsoupirdefrustrations’échappedesabouche.

–Jesuisànouveauégoïste,murmure-t-il.–J’aimeçaquandtueségoïste,jesouffle.Ilaunrireétranglé,puisnousfaitroulerànouveauetglisseunemain

dansmonbasdemaillotdebain.–Jeveuxtedonnerduplaisir.

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Seslèvrestrouventlesmiennes,lajouissancemetraverse.Jefermelesyeuxetjesurfesurdesvaguesdesensationsindescriptiblesjusqu’àcequenos respirations soient assez haletantes pour recouvrir de buée tous lespanneauxdeverredanslapoolhouse.

–Reed.Seul son nom surgit demon environnement rempli de brume.Mon

cerveau ne fonctionne plus. La seule chose que je puisse faire, c’est delaisserleplaisirmonterenmoiettoutemporter.

Quand jeredescendssur terre, ilmesouritd’unairassezcontentdelui.

Je ferme un peu les paupières, je voudrais le gifler pour avoir lepouvoirdemefaireperdreainsilecontrôle,maisc’estunepenséeidiote,parceque,ohmonDieu,quec’étaitbon!

Maisçaneseraitpasmauvaisnonplusd’éleverunpeuledébat.Jelepousseànouveausur ledoset jememetsà l’embrassersur lapoitrine.Chaque centimètre carré. La respiration de Reed se fait plus saccadée.Lorsquemeslèvressedirigentversl’élastiquedesonshort,ilseraidit.Jelève les yeux pour voir sa tête. Il semble être en attente. Mes doigtstremblentenjouantavecsaceinture.

–Reed?–Mmm?Sesyeuxsontfermésàprésent.–Tupeuxmedirecommentfaire…hum…Jemarmonneunvague…«tusais».Ilouvregrandslesyeux.J’ail’impressionqu’ilseretientderire,cequi

mecontrarie.–Ah.Ouais…biensûr.Jemehérisse.–Ouais,biensûr?Jenevaispaslefairesituneveuxpas…–J’enaienvie.Ilrépondsivitequec’enestcomique,etc’estmoiquirisàprésent.–J’enaivraiment,vraimentenvie.

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Ilbaisserapidementsonshort.Moncœurbattrèsfortlorsquej’approchemeslèvres.Jeveuxfaireça

bien,maiscommejesensqu’ilm’observe,j’aienviedemedépêcher.–Tunel’asvraimentjamaisfaitavant?medemande-t-ild’unevoix

rauque.Jesecouelatête.Pouruneraisonquej’ignore,çaal’airdevraiment

l’embêter.–Qu’est-cequinevapas?Monfrontseplisseaufuretàmesurequesonvisagesecrispe.–Jesuisunvraisalaud.Touscestrucsquejet’aiditssurleyacht…

tudevraismedétester,Ella.–Maiscen’estpaslecas.Jecaressesongenou.–Apprends-moicommentfaireçabienpourtoi.–C’estdéjàbien.Sonregardestvoilé,etilattrapel’arrièredematêtedansunemainen

glissantdoucementsesdoigtsdansmescheveux.Sonautremainattrapel’unedesmiennesetposedélicatementmesdoigtsautourdesonsexe.

–Sers-toiaussidetamain,murmure-t-il.Jeluidonneunpetitcoupdepompe.–Commeça?–Ouais…commeça…C’est…bon…Enm’enhardissant,jeglisseleboutdesonglanddansmaboucheetje

lesuce.Ilmanquesauterdusofa.–C’estencoremeilleur,gronde-t-il.Je souris, j’aime les bruits qu’il fait. Je manque d’expérience, mais

j’espèrequemonenthousiasmecompenseraparcequej’aivraimentenviedeluifaireplaisir.J’aienviequ’ilperdelecontrôle.

Il continue à caressermes cheveux, etmon souhait est exaucé plusvitequejenelepensais.Ilexplosesousmoientremblantviolemment,et

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quandjegrimpesurluiensuite,ilmeserrefortcontreluiendisant«jeneméritepasça».

Jeveuxluidemandercequ’ilveutdire,maisjen’enaipasl’occasion.Noussommesinterrompuspardescoupsviolentssurl’unedesvitres.

–P’titesœur,grandfrère,labaise,c’estterminé.C’estEaston,ilritenfrappantdupoingsurlavitre.–Vatefairevoir,luirépondReed.–J’aimeraisbien,maispapavientd’appeler.Ilestentrainderentrer

etilveutnousemmenertousdînerdehors.Ilseralàdanscinqminutes.Merde. Reed s’assied et passe une main dans ses cheveux. Puis il

regardenoscorpsnusetsourit.–Onferaitmieuxdes’habiller.Papavafaireuncacanerveuxs’ilnous

trouvecommeça.–Ahbon?Depuis lapremière foisquece trucadébutéavecReed, jeme laisse

aller àme demander commentCallum réagirait s’il était au courant. Jepense queReed a sans doute raison. Je suis à Bayview depuis unmoisseulement, et Callum est déjà hyperprotecteur avecmoi.Merde, il étaitprotecteuravecmoiavantmêmedemeconnaître.

Callumn’aimeraitpasça.Mon regard s’arrête sur les fesses nues de Reed lorsqu’il se lève et

enfilesonshort.Callumdétesteraitça.

1.Le salut vulcain est,dans l’universdeStarTrek, ungestede lamain consistant enunemainlevée,paumeenavantaveclesdoigtsécartésenformede«V»etlepoucetendu.

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CHAPITRE31

–Ella!Trenteminutesplustard,Callumm’appelledepuislebasdesescaliers.–Descends,j’aiquelquechoseàtemontrer!Jeroulesurmoi-mêmeetjeplaqueunoreillersurmatête.Jen’aipas

envie de quitterma chambre. J’étaismontéeme changer pour le dîner,mais en fait, je suis restée allongée sur mon lit pour repenser au trucgénialquis’estpassédanslapoolhouse.

Jen’aiaucuneenviededescendrevoirCallumetdemedemandercequ’ilferaitoucequ’ildiraits’ilétaitaucourantpourReedetmoi.Jeveuxjusteresterdanscecoconroseetmesouvenirtrèsfort.Cequenousavonsfaitdanslapoolhouseétaitsibon,riennedoitvenirinterféreravecmonsouvenir.

Mais ses appels insistants deviennent difficiles à ignorer. SurtoutquandEastonsemetàfrapperàmaporte.

–Allez,ramène-toi,Ella.Jemeursdefaim,etpapanenouslaisserapaspartiraurestauranttantquetuneseraspasdescendue.

–Jeviens.Jemejettehorsdulitetj’enfilemeschaussuresbateau.Ellessonten

train de devenirmes préférées. Elles sont tellement confortables. Jemedemandependantun instantsi jenecommetspasun terrible impairenportant des chaussures bateau en dehors d’un bateau, avant de déciderquejem’enficheroyalement.

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Lorsquej’atteinsl’escalierdudeuxièmeétage,touslesmembresdelafamille Royal sont en bas, qui m’attendent, avec chacun un souriredifférent sur levisage.DepuisuneesquissechezReed jusqu’à labouchefendued’uneoreilleàl’autrechezCallum.

– Est-ce que l’un de vous voudrait bien fixer le plafond ?Vousmemettezmalàl’aise,jebougonne.

Callumaungesteimpatient.–Viensdehors,nousallonsdécouvrirensemblecequisetrouvedans

l’allée.Malgré moi, je ressens une vague d’excitation. Ma voiture, ou du

moinslavoiturequeCallumaachetéepourmoi,doitêtrearrivée.J’essaiedenepasdévaler l’escalier,maisEastonenaassezd’attendre.Ilgrimpelesmarchesquatreàquatreetilmetirejusqu’auhalld’entrée.Là,lerestedesRoyalmepousseàl’extérieur.

Au milieu de l’allée, au pied des larges marches, attend unedécapotabledeuxplaces.L’intérieurestrecouvertdecuircrèmeetdeboissombre vernis. Les chromes des jantes brillent si fort que je cligne desyeux.

Mais rien n’est aussi impressionnant que sa couleur. Pas rose, non.Maisd’unvraibleuroi, lemêmebleuquiornait l’avionquim’aamenéeici,lemêmequesurlescartesprofessionnellesdeCallum.

Jemetourneverslui,ilhochelatête.–Jel’aifaitpeindredansnosateliersdeCalifornie.C’estnotrebleu

roi,saformuleestbrevetéeparAtlanticAviation.La main de Reed exerce une légère poussée sur mes reins et je

trébucheendirectionde lavoiture.Elleest sibelle, sipropre, sineuve,quejenevaispasoserlaconduire.

–Tuesprêteàallerl’essayer?–Pasvraiment,j’avoue.Ils semettent tousà rire,pasdemoi,maisd’unbon rire, généreux.

Moncœursemetàbattretrèsfort.Est-cequec’estvraimentmafamille?Cettepenséefaitdisparaîtremesdernièresréticences.

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Callummetendlesclésainsiqu’unefeuilledepapier.–C’estlacartegriseàtonnom.Quoiqu’ilarrive,cettevoitureestà

toi.Cequisignifiequesi jedécidedepartir,pourquelqueraisonquece

soit,ils’attendàcequej’emportelavoitureavecmoi.Cequiestdingue,parcequej’aipeurjustedem’asseoirdedans.

–Allezviens.Allonsfairefaireuntouràcebébé.Reedouvrelaportièrepassageretseglisseàl’intérieur.Devant tous ces regards impatients, je n’ai pas d’autre choix que de

m’installer à laplacedu conducteur.Reedm’expliquecommentavancermonsiège,ilbaisselevolantetallumelaradio,letrucleplusimportant.

Etensuite, il suffitd’appuyersurunbouton, lemoteurrugitetnousvoilàpartis.

– Jedéteste conduire, j’avoueenmedirigeant vers la routeàdeuxvoiestrèstranquillequimèneàlarésidenceRoyal.

Jesuiscrispéesurlevolantet jenemesenspascapablederouleràplus de quarante kilomètres à l’heure. Les maisons, le long de ceboulevard bordé d’arbres, sont ou bien entourées de murs, ou bien lesalléesquiymènentsonttellementlonguesqu’onnepeutriendiscerneràpartdescheminsbituminésnoyéssouslesarbresetlesbougainvillées.

LavoitureestassezpetitepourqueReedpuissetendresonbrasetleposersurledossierdemonsiège.Ilpassesesdoigtsdanslesmèchesdemescheveux.

–Alors,c’estunebonnechosequetum’aies,parcequemoi, j’adoreconduire.

–Vraiment?jeluidemandetranquillement,assezcontented’avoiràregarderlarouteplutôtquesesyeuxbleus.Tuveuxdire,jet’ai?

–Ouais,jepensequetum’as.Ettoutlerestedutrajet,j’ail’impressiondevoler.–Ondiraitqueçavousaplu,nouslanceCallumennousaccueillant.–C’estlemeilleurtourquej’aiejamaisfait.Etensuite,commejesuisfolledejoie,jemejettedanssesbras.

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–Vousêtestropgentil,Callum.Merci.Mercipourtout.Callumestabasourdiparmonexplosiondejoie,maisilmeserredans

ses bras. Les garçons nous séparent en se plaignant qu’ils ont le ventrevide, et nous allons tous dans une rôtisserie plus bas, où les Royalmangentcommequatre.

Quand nous rentrons à la maison, je cours dans ma chambre pourajouterletourenvoitureàmalistedeschosesmerveilleusesquisesontproduitesdansmavie.Jeleplacejusteaprèslapipe.

Cettenuit-là,Reedseglissedansmonlit.–J’étaisentraindefaireunrêvemerveilleux,jemarmonnequandil

secollecontremoi.–C’étaitquoi?–Tuentraisdansmachambreettumegardaisdanstesbrastoutela

nuit.– J’aime bien ce rêve, chuchote-t-il à mon oreille avant de faire

exactementça,meserrerdanssesbrasjusqu’àcequejem’endorme.Lorsquejemeréveille,iln’estpluslà,maismesdrapssententencore

sonodeur.Jeleretrouveenbas,affalésurlatabledelacuisine.– Tu n’as pas d’entraînement ? je demande l’air de rien, sans oser

espérerqu’ilveuilletoujoursmeconduireauboulot.–Jenepeuxpastelaisserseulesurlaroute,sitôt,dansunenouvelle

voiture.Ilvafalloirquetulabousillesunpeuavantdesavoirlaconduire,encoreàmoitiéendormie.

J’essaied’oublierquemoncœurbatlachamadedansmapoitrine.–Hé,jedormaisentouteinnocencequandungrosoursestentréeta

décidéquemonlitluiconvenaitparfaitement.Ilmetirelescheveux.–Jecroisquetutetrompesdecontedefées,là.– Et lequel serait le bon ? Aladin, parce que tu as décidé de

m’emmener faire un tour en tapis volantmagique ? je lui demande enfaisantminedevoler.

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Reedéclatederire.–C’estçaquetupensesdemabite?Qu’elleestmagique?Jerougistellementviolemmentqu’ilritencoreplusfort.–Mince,tuesvraimentvierge,n’est-cepas?Lesjouesencorebrûlantes,jelèvemonmajeur.–Voilàcequejepensedetoietdeton,hum…joujoumagique.– Bite, il me lance entre deux éclats de rire. Allez, Mademoiselle

l’ingénue,dis-le,bite.–Tuesunetêtedenœud,çac’estbienvrai.Etjelematetoutletempsquenousmettonsàatteindrelavoiture.Reedréussitenfinàrecouvrersonsérieuxlorsqu’ilbouclesaceinture.

Ilsepenchepourm’embrasseret,hop,macolèredisparaîtenunéclair.Je flotte littéralement dans les airs pendant toutemamatinée à La

BaguetteFrançaiseet jerestedebonnehumeurpendanttoutela journéeaulycée.JetombesurReedplusieursfoisdesuite,maishormisquelquesregards échangés en secret et un clin d’œil de sa part, nous ne nousadressonspaslaparole.Çam’estégal,parcequejenesuispassûred’êtreprêteàannonceràtoutlemondeàAstorParkquejesorsavecuntypequiestenquelquesortemondemi-frère.

Au déjeuner, Valérie etmoi nous sommes sidérées quand Savannahnousfaitsignedevenirnousasseoiravecelleestsescopines.Jesupposeque l’opérationDémolition-de-Daniel-Delacorte futun succèsàplusieursniveaux,mêmesiSavannahnesemblepastotalementàl’aiseavecmoi.

Aprèsl’école,jefaismesdevoirssurlapelouseSudenattendantqueReed et Easton aient terminé leur réunion d’équipe. Reed meraccompagne ensuite à la propriété, un bras passé sur mes épaulespendanttoutletrajet.Enrentrant,nousdécouvronsqueCallumestpartien voyage d’affaires auNevada, ce qui signifie que nous allons avoir lamaisonpournousjusqu’ausamedi.Ouais,génial.

Cesoir-là,Reedentredansmachambresansfrapperpendantquejelis.

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–Bienentendu,entre,jet’enprie,jeluilanced’untonsarcastique.Jeroulesurledoset jeleregardeposerunénormeboldepop-corn

surmatabledenuit.–Merci.Nem’enveuxpas.Tuveuxuntrucàboire?Ilexaminelecontenudemonfrigo.–Tun’asrienlà-dedansquinesoitpasmarqué«sanssucre»?Ils’éloigneetsortsatêtedanslecouloir.–Rapportedelabière.Ellan’aquedesmerdesderégime.J’entendsun«d’accord»étoufféauboutducouloir.Jeremontejusqu’àlatêtedelit.–J’aibienpeurd’avoiràtedemandercequisepasse.–Onvaregarderlematch.–Quiça,on?–Toi,moietEaston.Nous,explique-t-il.Etilgrimpesurmonlit.Jedoismedéplacerpourqu’ilnem’écrasepas.Jeregardeautourde

moiavecinquiétude.MonlitestassezgrandpourReedetmoi,maispourEaston,Reedetmoi?

–Jenecroispas.–Biensûrquesi!Reed m’attrape et me tire entre ses jambes, en m’installant

confortablementcontresapoitrine.Easton arrive un peu plus tard et s’assied à la place que j’ai

abandonnée.Ilnes’étonnemêmepasdenoustrouverdansunepositionaussiagréable.Reedposeleboldepop-cornentrenousetallumelatélé.

– Où sont les jumeaux ? je demande.Mon lit est rempli par deuxgéantsRoyal, alors si on ajoute les jumeaux, ça sera commeessayer defaireentrerunepoitrine95Cdansun85A.

–IlsvontchezLauren,répondEastonavantdefourrerunepoignéeentièredepop-corndanssabouche.

–Touslesdeux?

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– Neposepasdequestions si tune veuxpas connaître la réponse,suggèreReed,etjemetaissur-le-champ.

Mêmesij’avaisd’autresquestions,jenesuispassûrequej’obtiendraisdesréponses.Unefoislematchcommencé,c’estcommesijen’étaispluslà. Reed et Easton poussent des acclamations, des hurlements, et secongratulent l’un l’autre. Jepasse le tempsenadmirant lesbelles fessesmusclées à l’écran, en souriant aux commentaires bourrés de sous-entendus,dustylecommentuntypequialaballedoitfoncerdansletrou,oul’équipeadverseneréussitpasàpénétrerassezprofondlazonearrière.

Aucun des deux frères n’apprécie mes observations. Alors, je mecontente de rester entre les jambes de Reed et de profiter de leurcompagnie.Detempsentemps,Reedsepencheetmecaresseledos,oupasseunemaindansmescheveux.Sesgestessontsimples,commesinousétionsencoupledepuisdesannées.Ilyadesfaçonsbienpiresdepasserlanuit,medis-je.

Lescoreestassezserré,etauboutd’unmoment,jem’assoupis,gavéedepop-cornetbarbéeparlejeu.C’estlasonneriedutéléphoned’Eastonquimeréveille. Il sort répondreetReeds’allongeàcôtédemoicommemonchauffagepersonnel.

–C’étaitqui?jedemandeàmoitiéendormie.–Quisait?Tudormais?–Non,jemereposelesyeux,c’esttout.Onenestoù?–LesLionssontentraind’écraserlesTitans.– Ce sont les vrais noms des équipes ou bien tu es en train de les

inventer?–Cesontlesvraisnomsdeséquipes.Il paraît amusé. Son doigt tiède musarde le long de la ceinture

élastiquedemonshort.Jem’étire,enressentantcettechaleur, familièredepuispeu,sepropagerdansmesos.

–Est-cequ’onafinideregarderlefootball?C’est plus une suggestion qu’une question. Les yeux bleus de Reed

s’embrument.Ilgrimpesurmoietmemaintientprisonnièreentresesbras

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etsesjambes.–Ouais,jecroisqu’onenafiniavecça.Satêtedescendlentementetjelèchemeslèvresavecimpatience.– Qu’est-ce qui se passe, les Lions viennent demarquer ou quoi ?

demandeEastonquientreentrombe.Reedsoupireenreculant.–Tuvoiscommeceseraitchouettesilesgenssemettaientàfrapper

avantd’entrer,jemurmure,pendantqueEastonattrapelatélécommandeetmontelevolume.

Reed se contente de croiser les bras en grognant. Nous observonsEastonquisemetàfairelescentpas.

L’équipeenbleuetargent, avecdes lions sur ses casques,occupe leterrain.L’équipeadverse,avecunTen flammes sur ses casques,ne faitpasuntrèsbonboulot,ellen’arrivepasàprotégersazonedescores.

Pendant les vingtminutes suivantes, l’équipe bleu et argentmarquetouchdownsurtouchdown,jusqu’àcequ’ilségalisent.

Eastonesthorsdelui.Aumomentducoupdesiffletfinal,ilestaussiblancquelesvoilagesauxfenêtres.

– Qu’est-ce qui se passe ? Combien tu as misé sur ce match ?demandeReed.

J’aihéritédesproblèmesd’addictiondemamère.Oh,Easton!Easton hausse les épaules, il essaie de faire comme si ce n’était pas

grave.–J’aicequ’ilfaut,frangin.Reed serre les dents, comme s’il se retenait pour ne pas hurler sur

Easton.Ilfinitpardire:–Situasbesoindequoiquecesoit,jesuislà.Eastonnousfaitunsourirelas.–Ouibiensûr.Jedoispasseruncoupdefilàprésent.Nefaitesrien

que je ne ferais pas moi-même, nous lance-t-il sur un ton faussementjoyeux.

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–Eastonaunproblèmedejeu?jedemandeàReedunefoisqu’ilarefermélaportedesachambre.

Reedpousseunsoupirexaspéré.–Peut-êtrebien.Jenesaispas.Jepensequ’ilboitetqu’iljoueparce

qu’il s’ennuie,pasparcequ’il est accro.Mais jene suispaspsy,n’est-cepas?

Je cherche quelque chose à dire, mais je ne trouve que « je suisdésolée».

–Nitoinimoin’ypouvonsrien.En regardant lesmouvements que fait lamâchoire de Reed, je sais

qu’ilnelepensepasuneseconde.–Jevaismecoucher.Reed se lève. Je replie mes jambes sous moi, je me retiens de le

supplierderester.–Okay,dis-jed’unetoutepetitevoix.Sessourcilssefroncent.–Jenecroispasquejeseraisdebonnecompagniecesoir.–Çava.Jemelèvepourallerauxtoilettes.Est-ceque jesuisblesséequ’ilne

veuillepasresteravecmoicesoir?Unpetitpeu.Ilm’attrapeparlepoignetlorsquejepassedevantlui.– Jesuis justeénervéet jeneveuxpast’entraînerdansquoiquece

soit…– Est-cequec’estundiscoursdugenre« cen’estpas ta faute, c’est

moi»?Parcequecesontlespires.Personnen’aenvied’entendreça.Unsourirecontraintapparaîtlentementsurseslèvres.–Non.C’estplutôtun«tuesbientropbandantepourtondiscoursà

lanoixetj’aiunmaldechienànepaslaissertraînermesmainssurtoi».Jemetourneversluietjeplanteundoigtdanssalargepoitrine.–Quit’aditquejevoulaisquetugardestesmainspourtoi?Ilattrapemondoigtetm’attireàlui.–Tuesvraimentprête,Ella?Prêteàallerjusqu’aubout?

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J’hésite,etc’estlaréponsequ’ilattendait.Enposantsatêtecontrelamienne,ilmecaresselajoueavecsonnez.

– Tu ne l’es pas, et ce n’est pas grave, parce que je peux très bienattendre,maisdormiravectoiestunevéritabletorture.Toncorpspressécontrelemien…etjemeréveille…

Il s’interrompt,mais je comprends ce qu’il veut dire parce que c’estvraipourmoiaussi.J’aisoudainmalàdesendroitsoùjen’auraisjamaispensépouvoiravoirmal.

–Onpourraitfaired’autrestrucs.Jemelècheleslèvresenpensantàlapoolhouse.Ilgrogneetplongesatêtedansmoncou.–Iln’yapaslefeu.Sérieusement.Onvaprendrenotretempsetfaire

çabien.Avec une autre profonde inspiration, il me repousse doucement et

recoiffeunemèchedemescheveux.–Onestd’accord?Iln’yaaucuneraisondenepasêtred’accord.JeconnaisassezReed

poursavoirqu’une foisqu’iladécidéquelquechose, çaprendun tempsfoupour le fairechangerd’avis,cequisignifieque jevaispasser lanuittouteseule.

–Onestd’accord.Jemehissesurlapointedespiedspourl’embrassersurlajoue,mais

Reedtournelatêteetnoslèvresserencontrent.Le long et tendre baiser qu’il me donne calmerait n’importe quel

chagrin.Lasensationdesoncorpssidurcontrelemienn’yestpaspourriennonplus.

Et les derniers relents de mon sentiment d’abandon s’évanouissentlorsque Reed se glisse dans mon lit, plus tard dans la nuit.Silencieusement, j’enroule son bras autour demoi et je tombe dans unprofondsommeil.

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CHAPITRE32

Lejeudi,Valériem’abordependantlapausedéjeuner.–Qu’est-cequisepasseentreReedettoi?J’essaiedeprendrel’airleplusinnocentpossibleenrépondant.–Qu’est-cequetuveuxdire?–Apparemment,hierilt’aaccompagnéejusqu’enbioetilapassésa

maindanstescheveux.Jelaregardefixementavantd’éclaterderire.–EtçasignifiequeReedRoyalm’afaitunesuper-déclaration?jelui

demanded’unairincrédule.Elleacquiesce.– Reed ne joue jamais les chevaliers servants.Même quand il était

censésortiravecAbby…Enentendantça,jefroncelenez.Jedétesteentendreleursdeuxnoms

danslamêmephrase.Valériem’ignoreetpoursuit:– … il l’évitait. Il ne l’embrassait jamais devant son casier. Il ne la

tenait jamaisparlamain.Biensûr,elleallaitàsesmatchsdefoot,maisluiétaitsurleterrain,alorscen’étaitpascommes’ilsflirtaientpendantlesmatchs.

Elleregardedanslevagued’unairpensifcommesiellelesrevoyait.Jemeretiensdebâiller.

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–Laseulefoisoùonlesavusensemble,c’étaitdansunefête.Alorsouais,lefaitqu’ilt’aittouchéeintentionnellement,c’esténorme.

Je baisse les yeux sur mon plateau de blancs de poulet bio élevélocalementetlégumesfraispourqueValérieneserendepascomptequepourmoiaussi,c’esténorme.Lasensationdesesdoigtseffleurantlabasedemoncoumardimatinestrestéegravéedansmamémoire.Lorsquejereprendslecontrôle,jejetteuncoupd’œilàValérie.

–Nousavonsdécidédefaireunetrêve.C’esttoutcequejereconnais.Ellemejetteunregardinquiet,maisn’insistepasparcequec’estune

amie.Avecespièglerie,jemepenchesurlatable,jeluiprendslamainetje

lapressecontremapoitrine.–Tueslapremièredansmoncœur,Val.–Y’aintérêt,mapoulette.Ellemepinceleseinetjerepoussesamain.Elleenfourneunecarotte

en rigolant. Lorsquenousavons terminénotredéjeuner, ellem’annoncequ’ilvayavoirunesoirée«plusdedix-huitans»auMoonglowclub.

J’hésite,mapremièreréactionestd’envoyeruntextoàReedpourluidemandercequ’ilfait,maisjeréalisequeçaferaitdelapeineàValérieetque,quoiqu’il sepasseentreReedetmoi, jedois continuerà vivremavie.Alors,jehocherésolumentlatête.

–J’ensuis.Ellemedonneunetapefraternellesurl’épauleetnousnousdirigeons

ensembleversnoscasiers.Jeluidemandeavecunpetitsourire.–Est-cequ’onvadanserdansunecage?–Est-cequelepapeestcatholique?–Est-cequ’ilvamefalloiruneautretenue?Elleprendunairinquietenhochantlatête.–Ondiraittonpremierjourd’école.Tun’asdoncrienapprisdepuis

quetuesici?Biensûrqu’iltefautunenouvelletenue.Nousdécidonsd’allerfairedescoursesensembleplustard.

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– Jepasserai teprendreaprès leboulot, luidis-jeenmesouvenantquej’aiunequatrerouesflambantneuvequim’attendàlamaison.

Elles’arrêtebrusquementetm’attrapeparlebras.–Qu’est-cequetuveuxdire?Tuaseuunevoiture?–Unedécapotable.UncadeaudeCallum.Elle siffle longuement, assez fort pour que toutes les têtes dans un

rayondetroismètressetournentversnous.Elleapplaudit,–Tuesvenueavecàl’école?Jeveuxlavoir.–Ahnon.Je cale. J’essaie de trouver une excuse plausible pour expliquer que

c’estReedquim’aaccompagnéecematin.– Je suis venue avec Reed. Il a entraînement de football lematin,

alorsc’estpluslogiquedepartagerlamêmevoiture.Valérielèvelesyeuxauciel.– Pendant encore combien de temps allez-vous prétendre tous les

deuxqu’iln’yarienentrevous?Jeretiensunsourire.–Pendantaussilongtempsquequelqu’unvoudrabienlecroire.Etjenevaispasplusloin.

Commejem’endoutais,Valérieadoremapetitevoiture.Etjepioche

dans mon magot afin de m’acheter des vêtements pour ce soir. Ellem’emmènedansuncentrecommercialnormaloùlesprixsontchers,maispasaupointque j’aie l’impressiondeporterunmoisdesalairesurmoi.AumanoirRoyal, jenouscoiffeetjenousmaquilletouteslesdeuxpournouscomposerunlookd’enferspécialnight-club.

– Je suis une bombe, déclare Valérie lorsqu’elle s’examine dans lemiroir.JevaisfaireunselfiepourTam.

–Jepeuxleprendrepourtoi.Elleme tend son téléphone et je prends deux photos qu’elle envoie

immédiatement à sonpetit ami.Cesdeux-là ont l’air d’avoir une super-

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relation,même s’il n’est pas venu la semaine dernière, comme il l’avaitpromis.Valn’apaseul’airtropperturbée.

–Commentfaites-vous?JepenseàReedàl’université,etjemedemandecommentjevaisfaire

pour supporter qu’il côtoie tantde jolies filles plus âgées.Valérie prendunephotodemoiavantderépondre:

–Ilfautquejeluifasseconfiance.Jeluienvoiebeaucoupdephotos.–Desphotosdenus?– Ouaip. Des photos coquines, la plupart du temps en baissant la

tête…àtouthasard.Ellefaitlagrimace.– Ce n’est pas que je ne lui fais pas confiance, mais imagine que

quelqu’unluivolesontéléphone,parexemple.–C’estvrai.(J’hésite.)Tamétaittonpremiermec?–Est-cequetumejuges?demande-elleaveccuriosité.Jelèvelesmainsenl’air.–Non,absolumentpas.Iln’yaaucunjugementlà-dedans.Ellemeregarded’unairincrédule.–Attends,tun’asjamaisfaitl’amour?Jebaisselatêteetj’avoue:–Non,jamais.–Jamais?Wouah.AlorsjejugedifféremmenttarelationavecReed,

parcequecetypenesortiraitjamaisavecquelqu’unsanspasseràl’acte.–Je…Je…Je…jebégaye,sanstrouvermesmots.– Cen’estpas ceque jevoulaisdire.S’il est avec toi, je tegarantis

qu’ilnebaisepasàdroiteàgauche.QuandilsortaitavecAbby,jenel’aijamaisvudragueruneautrefille.

–Ouais,ok.Jeme sens toute chose. Je n’avais jamais imaginé qu’il puisse faire

l’amouravecquelqu’und’autre.Est-cequec’estpourçaqu’ilnememetpaslapression?

Valériemeprendparl’épaule.

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– C’était une réflexion stupide. Je ne voulais pas dire ça.Honnêtement. J’essayais d’être drôle et je me suis plantée. Tu mepardonnes?

–Biensûr.Jelaserrecontremoi,maisaufond,ledoutes’estinstallé.Quelques minutes plus tard, nous quittons ma chambre dans nos

minirobes, nos talons hauts et nos cheveux crêpés. Easton sort de sachambreaumêmemomentetlaisseéchapperunlongsifflement.

–Vousallezoùcommeça?–AuMooglow.Ilyaunenouvellerave.Ilhausseunsourcil.–Tul’asditàReed?–Non,jedevrais?Jen’aipasvuReeddepuiscematin.–Trèsbien.Àplus,lanceEaston,etildévalelesescaliers.–Àplusoùça?jeluicrie.– Où crois-tu donc ? il renifle. Si je dis à Reed que tu portes une

simplebandedetissuetquetuvasdanserdansunecage,tuvasavoirunRoyalàtespieds.

– Je suppose que ça veut dire queReed et Easton seront là-bas cesoir?demandeValérie.

Jenecherchemêmepasàdissimulermonsouriredesatisfaction.On nous escorte aux cages, Valérie et moi, avant même que nous

puissions faire un pas à l’intérieur. Je suppose qu’ils se souviennent denous. Nous faisons le spectacle pendant deux chansons, avant quej’entendequelqu’unquim’appelle.Jeregardeenbasàtraverslesbarreauxetj’aperçoisEastonquicriemonnom,avecsesmainsenentonnoirautourdesabouche.

Ilmemontrelebar.JesuissonbrasendirectiondeReed,appuyéaubar,danspratiquementlamêmepositionquelepremiersoiroùValérieetmoiavonsdansé.Maiscettefois-ci,ilnedisparaîtpas.

Ilattend.

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Ilattendquejedescendedemacage.Ilattendquejetraversetoutelapièce.Ilattendquej’arrivedevantlui.Etpendanttoutcetemps,sesyeuxflamboyantsdétaillentchaquepas

quimerapprochedelui.Je m’arrête à trente centimètres de lui. Je lui demande d’une voix

enrouée:–Àquoitupenses?Ilfixed’unairentendumesseinsetmeslonguesjambesexposéesaux

regardssousmajupenoiremoulante.–Tusaistrèsbienàquoijepense.Ilrespireungrandcoup.Maiscommenoussommesenpublic,jedois

mecontenterd’ypenser.Je lève une main jusqu’à son épaule et là, ce type qui déteste les

marquesd’affectionenpublic laprendet lapose sur ses lèvres. Je senssonhaleinechaudesurmapaumeetsoudain,d’unmouvementbrusque,ilm’attirecontrelui.

– Tu rends la moitié des mecs présents complètement dingues,grogne-t-ildansmescheveux.

–Seulementlamoitié?–L’autremoitiéestamoureused’Easton,m’explique-t-il.Ilplonge lesmainsdansmescheveuxet lesdescendle longdemon

dos, jusqu’en bas.Un petit pincementm’installe entre ses jambes.Nousretenons notre souffle quand nos corps entrent en contact. Je réussis àarticuler:

–J’aienviededanser.Il vide son verre d’un coup, le repose sur le bar etmeprendpar la

main.–Allons-y.Surlapistededanse,nousrestonsserrésl’uncontrel’autre.L’unede

sescuissespuissantessefrayeuncheminentremesjambes,et ilmefaitplierlesgenouxcommesijelechevauchais.

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Jepasse lesbrasautourdesoncouet jem’accrocheà lui, je lui faisconfiance.

– J’ai pratiquement fait exploser mon pantalon pendant que tudansais,medit-ilàl’oreille.

–Ahouais?Çateplaîtdenousvoirdanserensemble,Valetmoi?Jeletaquine.Jesaisbienquec’estlefantasmedetouslesmecs.– Il y avait quelqu’un d’autre là-haut avec toi ? (Il me caresse les

cheveux.)Jen’aivuquetoi.Jefondslittéralement.–Continueàparlerainsi,ettupourraisbienavoirdelachance.Sa respiration devient haletante et ses doigts se resserrent sur ma

peau.–Tuveuxsortird’ici?Allumée,impatiente,complètementenmanque,jehochelatêted’un

airimpuissant.–Laisse-moitrouverEastonetleprévenirquenouspartons.Ilmeserrelamainetsepenchepourdéposerunbaisersurmatempe.

Cesimplebaisersuffitàmefairemouiller.–Jevaisaubarboireunverred’eau.Jesuiscomplètementdéshydratée.–Ok.Jereviensdansuneseconde.Reed est avalé par la foule. Je pars dans la direction opposée en

essayantderetenir l’attentiond’unbarman.Valestencoreenhautdanslescages,ellecontinueàdansercommeunefolle.

Ungarçonmignonauxcheveuxbrunsbizarrementcoifféssetientfaceàmoi.Ilporteunechemiseauxmanchesrouléessurunshortécossais.Ilme semble vaguement familier. Je me demande s’il ne va pas à AstorPark?

–EllaRoyal,c’estça?J’aiabandonnél’espoirqu’onm’appelleparmonvrainomdefamille.

Je tendsunbilletdedixdollarsentremesdoigts,et l’unedesbarmaidsmefaitunsignedumenton.

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–Del’eau,dis-jeenarticulantsilencieusement.La fille hoche la tête etmet lamonnaie dans le bocal à pourboires.

C’est beaucoup pour de l’eau, mais j’ai soif et je me dis que c’est lameilleurefaçond’êtreservierapidement.

–Ouais,jesuisElla.TuesàAstorPark?– ScottGastonburg. (Il pose un coude sur le comptoir.) Je peux te

poserunequestion?–Biensûr.J’attrapemonverred’eaudesmainsde labarmaidenluihurlantun

merci.– Je me demande si tu as commencé par les jumeaux et que tu

avancesdansl’échelledesâges,oubienest-cequetupassesd’unRoyalàl’autreaupif?

Jesursautetellementquejerenverselamoitiédemonverre.–Vatefairemettre.Illèvesesmainsenl’air.–J’aimeraisvraimentbien,bébé,maisjenem’appellepasRoyal.Je résiste à la tentation de balancer le reste de mon verre sur sa

tronchedeconnard.–Jet’emmerde.Jecognemonverresurlecomptoiretenmeretournant,jetombesur

Reed.Ilmejetteuncoupd’œil,etfaceàl’expressioninsolenteduvisagedu

shortécossais,ilcomprendtoutdesuitecequisepasse.Ilfermeàmoitiélesyeuxetmepoussederrièrelui.–Qu’est-cequetuviensdeluidire?demande-t-il.–Cen’estrien.Rien.Allons-y,dis-jeenl’attrapantparlebras.OubienScottmanquesérieusementd’instinctdepréservationoubien

l’alcooldoitluidonnerducourage,parcequ’ilricaneetdit:–Ellievientdemeproposerdebaiseravecmoi,maisjeluiairappelé

quejenesuispasunmembredelafamilleRoyal.Jenesuismêmepasun

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cousin,maishé,jemeproposedevousendébarrasserquandelleenaurafiniavecvous,lesmecs.

LepoingdeReedpartsivitequejen’aipasletempsderéagir.Quandje réalise enfin ce qui se passe, Scott est par terre et Reed le roue decoups. Malgré le niveau de la sono, j’entends les craquements de sesarticulationscontrelesos.

–Reed!Reed!Arrête!jehurleetjeletireparlesépaules,maisilesttropoccupéàdémolirScott.

D’autres gens essaient de m’aider, même si je pense que certainsd’entreeuxencouragentactivementlescombattants.

Finalement, trois videurs traversent la foule et écartent Reed, enlaissant Scott par terre, avec le nez qui pisse le sang et une paupièrecomplètementtuméfiée.

–Ilvafalloirquetusortes,lancel’undesvideursvêtud’untee-shirtnoir.

–D’accord.Reedsedébatpouréchapperauvideuretm’attrapeparlepoignet.Je

comprendscequ’ilveutavantqu’ilouvrelabouche.Jelerassure:–JevaischercherEaston.Reed acquiesce du menton. Il lève un doigt en direction d’un des

videurs,untypeblondquidoitboufferdesstéroïdesaupetitdéjeuner.–Turestesavecelle.S’illuiarriveencorequelquechose,dèsdemain

cetendroitseraferméetremplacéparunjardind’enfants.Jen’attendspasqueReedetlesvideurstombentd’accord.Ilestgrand

tempsqueReedsorted’ici.Ilestbourréd’adrénalineetjevoisbienqu’ilfautqu’ilquittecebaravantquel’enviedesebattrenelereprenne.

–Eastonestducôtédestoilettes,mecrie-t-ilpendantquelesvideursl’escortentverslasortie.

J’aiperdulatracedeVal,maisjedoisd’abordretrouverEaston.Toutenmedépêchant, j’entendsdes chuchotements autourdemoi. Lesgensquiétaientlesplusprochesdelabagarrecommencentàjaser.

–Qu’est-cequis’estpassé?

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– Je crois qu’on vient d’assister à la proclamation d’un autre éditRoyal.DitesquelquechosedemalsurEllaRoyaletvousboirezvosrepasàlapaillependantlessixprochainsmois.

–Çadoitêtreunesacréeaffaireaupieu,remarquequelqu’un.–Riendetelquelesexetrash.Cessalopesvouslaissentfairetoutce

quevousvoulez.J’ai les oreilles en feu et je suis tentée de réagir commeReed, avec

violence,mais je ne peux pasm’arrêter parce que je viens d’apercevoirEastondanslecouloirdestoilettes.Jefendslafoule,maisEastonn’entrepasdanslestoilettes.Ilcontinuelecouloirjusqu’àlaportedesortie.

– Excusez-moi, je murmure en remontant la queue des filles quiattendentleurtour.

Jepassedevantuncouplequifaitsapetiteaffairedansuncoinpassisombrequeça.

–Easton,jel’appelle,maisilnes’arrêtepas.Jesaisqu’ilm’entend,parcequejevoissoncorpsquiréagitausonde

mavoix.Maisilsecontentedecontinueràavancer.Jememetsàcouriret jepasse laportequelques secondesaprès lui.Et là, je reste figée surplace.

Il est dans l’allée de derrière avec deux autres types, et ça neressemblepas vraiment àune sympathiquepause clope.Ohnon !Dansquoiest-cequeEastons’estencorefourré?Lesdeuxtypessonttrèsbruns,les cheveux gominés. Ils portent des tee-shirts blancs et des jeans taillebasse,tellementbasquejepariequededosonvoitleursboxers.Maisjen’enaiaucuneenvie.Unechaîneenmétalpendàlaboucledelaceinturedel’und’entreeux.

–Rentreàl’intérieur,Ella.Lavoixd’Eastonestdureetfroide.–Attends,ditletypeàlachaîne.Tupeuxpayertadetteavecellesi

tuveux.(Ilsetientlesexe.)Prête-moicettesalopependantunesemaine,etnoussommesquittes.

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Mavied’avantlesRoyalétaitrempliedecegenredetrucssordides,etjesaisreconnaîtreunsalecoupquandj’envoisun.LematchdefootdelundisoirmerevientimmédiatementenmémoireetjelanceàmonsieurChaîne:

–Combien?–Ella…commenceEaston.Jeluicoupelaparole.Combieniltedoit?–Huitmille.Jemanquem’évanouir,maisàcôtédemoiEaston,lui,faitcommesi

c’étaitdel’argentdepoche.–Jel’aurailasemaineprochaine.Toutcequevousavezàfaire,c’est

d’attendretranquillement.Maissic’étaitjustedel’argentdepoche,ilneseraitpaslà,dansune

ruellesombre,entraind’êtremenacé,etmonsieurChaînelesaittrèsbien.– Ouais, d’accord.Vous autres lesmômesde richards, vous vivez à

crédit,maispasmoi.Jedoispayermesfactures.Alors,aboulelefric,outoutlemondevasavoirqu’onnefaitpasmarcherTonyLoreno.

Les épaules d’Easton se tassent un peu et il rectifie légèrement saposition.Merde. Il se prépare à se battre, et nous le savons tous. Tonyglisseunemaindanssapocheetlapeurmeterrasse.

–Stop.(Jeprendsmesclésdansmonsac.)J’aitonfric.Attends-moiici.

–Maisqu’est-cequetufous,Ella?aboieEaston.Aucund’euxnem’attend.Ilsmesuiventtousjusqu’àmavoiture.

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CHAPITRE33

Toutenouvrantmoncoffre, je cherchedesyeux laRangeRoverdeReed.Jenelavoisnullepart,cequisignifiequ’ils’estsansdoutegarédel’autrecôtédubâtiment.

J’éprouve un immense soulagement, parce que l’arrivée de Reed aubeaumilieude cettepetite épreuvede force serait lapiredes choses. Ils’est déjà battu contre un type ce soir, et je sais qu’il n’hésiterait pas àrecommencer,surtoutpourdéfendresonfrère.

–T’aspasintérêtàsortirunflinguedelà-dedans,siffleTonyderrièremoi.

Jelèvelesyeuxauciel.–C’estça,monpote, jegardeunvéritablearsenaldefusilsd’assaut

dansmoncoffre.Ducalme.Jesoulèvelamoquettequirecouvrelecompartimentpourlarouede

secourset j’attrape lesacenplastiqueque j’aicachésous lecric.J’aiunpoidsénormedanslapoitrinependantquejecomptehuitmilledollarsenbillets.Eastonneditpasunmot,ilm’observeenfronçantlessourcils.

IllesfronceencoreplusfortquandjebalancelesbilletsàTony.– Voilà. Vous êtes quittes à présent. Ce fut un plaisir de faire des

affairesavectoi,dis-jedemonairleplussarcastique.En souriant, Tony reste là et compte son fric. Deux fois de suite.

Quandilrecommenceunetroisièmefois,Eastongronde:–Toutestlà,enfoiré.Foutez-lecamp.

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– Fais gaffe,Royal, le prévient Tony. Je pourrais très bien faire unexempleavectoi,justeparcequej’enaienvie.

Mais nous savons qu’il ne le fera pas. Un passage à tabac ne feraitqu’attirerl’attentionsurnousetsursonpetitbusiness.

– Oh,et tupeuxallerparierailleursàprésent,poursuit froidementTony.Tonfricn’estplusassezbonpourmoi.J’enaimarredevoirtasaletronche.

Surce, lesdeux typesmettent lesbouts,Tonyglisse lecashdanssapochearrière,etouais,jepeuxvoirsoncaleçonsoussonpantalon.

Quandilssontpartis,jemetourneversEaston.– Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? Comment peux-tu te brancher

avecdessalestypesdanssongenre?Ilsecontentedehausserlesépaules.L’adrénaline déferle dans mes veines, je le fixe avec une totale

incrédulité.Onauraitpuêtreblessés.Tonyauraitpu le tuer.Et il resteplantélà,commes’iln’enavaitrienàfaire.Lecoindesalèvreestmêmelégèrementrelevé,commes’ilseretenaitdesourire.

–Tutrouvesçamarrant?jehurle.Avoirétépratiquementtué,çatefaitbander,c’estça?

Ilfinitparouvrirlabouche.–Ella…–Non,ferme-la,c’esttout.Jeneveuxrienentendre.Jeplonge lamaindansmonsac, j’attrapemon téléphoneet j’envoie

un texto à Reed pour le prévenir que je rentre avec Easton et qu’on seretrouveraàlamaison.

Je tiens toujours le sac en plastique de l’autremain et je le remetsdans le coffre en essayant de ne pas penser à quel point il est vide, àprésent.Huitmilleballessesontenvolées,plustroiscentsautresquej’aidépensées aujourd’hui pendant mes courses avec Val. Jusqu’à ce queCallummedonnemonallocationdedixmilledollarsdumoisprochain,jen’aiplusquemilleseptcentsdollarsdansmacagnottespécialévasion.Jen’avais pas prévu de m’enfuir, pas après tous ces changements positifs

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dansmavie,maisàcetinstantprécis,jesuistentéedeprendrelefricetdemetirer.

–Ella…commenceEaston.Jelèvelamain.–Pasmaintenant.Ilfautquej’appelleVal.Jecomposesonnuméro,enespérantqu’ellel’entendedanslevacarme

delaboîte.Heureusement,ellerépond.–Hé,est-cequetoutvabien?JefixeEaston.–Àprésent,oui.Tupeuxnousrejoindredehorsàlavoiture?Leclub

nenouslaisseraplusentrer.–J’arrive.–Ella…tenteànouveauEaston.–Jenesuispasd’humeur.Il ferme son clapet et nous attendons Val dans un silence tendu.

Quand elle arrive, je force Easton à s’asseoir à l’arrière, à l’étroit. Valouvre labouchepourobjecterquelque chosemaisdécide, avec sagesse,queçaneserviraitàrien.

Jelaraccompagnedansunsilencedemort.–Tum’appellesdemain?dit-elleensortant.Eastonlasuithorsdelavoiture.–Ouais,etjesuisdésoléepourcesoir.Ellemepardonneenmesouriant.–Lamerde,çaarrive,mapuce.Cen’estpasgrave.–’nuit,Val.Elle me fait au revoir de la main et disparaît dans la maison des

Carrington.Doucement,Eastonseglissesurlesiègepassager.J’agrippelevolantdetoutesmesforceset jetentedemeconcentrer

surlaconduite,maisc’estdifficile,j’aienviedeflanquerunegifleautypeassisàcôtédemoi.

Au bout d’environ cinqminutes, ma respiration se calme et la voixd’Eastons’élève.

Page 331: 34-36, rue La Pérouseekladata.com/6yZlvg72ZGfZDcwYgt5FWf1H_kg/HT1PDPEW.pdf · Thompson se retourne et regarde Don Juan, qui se lève de sa chaise et me tend une main large, – Oui,

–Jesuisdésolé.Ilal’airsincère.Jemetourneversluipourleregarder.–Tudevrais.Ilhésite.–Pourquoicaches-tudel’argentdanstoncoffre?–Parceque.C’estune réponse stupide,mais c’est tout cequ’ilobtientdemoi. Je

suistropenpétardpourluiendonneruneautre.MaisEastonmeprouvequ’ilmeconnaîtmieuxquejelecrois.–C’estmonpèrequitel’afilé,n’est-cepas?C’estcommeçaqu’ilt’a

convaincuedevenirvivreavecnous,etàprésenttuleplanquesaucasoùtuauraisbesoindequitterlaville.

Jeserrelesdents.–Ella.Jesursautequandilposesamainsurlamienne,etqu’ensuite,satête

vientsecalersurmonépaule.Sescheveuxmechatouillentetjem’efforcedenepasypasserlamain.Ilneméritepasd’êtrecâliné.

–Tunepeuxpaspartir,murmure-t-ilenrespirantdansmoncou.Jeneveuxpasquetupartes.

Il dépose un baiser surmon épaule,mais il n’y a rien de sexuel là-dedans.Riende romantiquedans la façondont samain secrispe sur lamienne.

–Taplaceestici.Tuescequiestarrivédemieuxànotrefamille.Ilmeprendparsurprise.Ok.Wouah.–Tuesunedesnôtres.Jesuisdésolépourcesoir,vraiment,Ella,s’il

teplaît…nesoispasencolèrecontremoi.Macolèrefonddoucement.Ondiraitunpetitgarçon,etàprésent,je

nepeuxplusm’empêcherdeluicaresserlescheveux.–Jenesuispasencolère.Maisputain,Easton,ilfautquetuarrêtes

de jouer. La prochaine fois, je ne serai peut-être pas là pour te sortird’affaire.

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–Jesais.Tun’auraispasdûavoiràlefairecesoir.Jeteprometsquejeterembourseraijusqu’auderniercentime…

Illèvelatêteetm’embrassesurlajoue.–Mercidel’avoirfait,vraiment.Ensoupirant,jemeremetsàfixerlaroute.–Derien.

À la maison, Reed nous attend dans l’allée. Il regarde Easton, puis

moi,d’unairsoupçonneux,maisjerentreavantqu’ilpuissedemandercequi s’estpassé ce soir.Eastonpeut le luidire.Moi, je suis trop fatiguéepourrevenirlà-dessus.

Jerentredansmachambreetjemedéshabille.Jeremplacemarobeparletee-shirttropgrandquimesertdechemisedenuitavantd’allermedémaquiller et me laver les dents. Il n’est que vingt-deux heures, maiscettescèneavecTonym’avidée,alorsj’éteinslalumièreetjememetsaulit.

Reedarrivedansma chambreaumoinsuneheureplus tard, cequim’indiquequeEastonetluiontdûavoirunelongueconversation.

–Tuasdéfendumonfrèrecesoir.Savoixenrouéemontede l’obscuritéet lematelas s’enfonceunpeu

quand il se glisse à côté demoi. Ilmeprenddans ses bras sans que jerésistelemoinsdumonde,etjeposematêtecontresapoitrine.

–Merci,dit-il.Ilsembletellementémuqueçamemetmalàl’aise.– Je n’ai fait que payer sa dette. Ce n’est pas grand-chose, je lui

répondsenminimisantmonrôledanslesévénementsdelasoirée.–Nedéconnepas.C’esténorme.Ilcaressemanuque.–Eastonm’aditpourl’argentdanstavoiture.Tun’étaispasobligée

deledonneràcebookmaker,mais jetesuistellementreconnaissantdel’avoir fait. Je lui ai botté le cul pour s’être acoquiné avec ce type. Sonautrebookmakerestréglo,maisLoreno,lui,ilcraintvraiment.

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–Espéronsqu’ilarrêteradefaireappelàdesbooksaprèscequis’estpassécesoir.

Je ne suis pas du tout convaincue qu’il le fera. Easton alimente lefrissonenpariant,enbuvantetenbaisanttoutcequibouge.Ilestcommeça.

Reedme remonteunpeuetnousnousmettonsà rire tous lesdeuxquand les draps s’enroulent autour de nos jambes. Il les repousse, puisapprochemonvisageetm’embrasse.Ilmecaresseàtraversmontee-shirt,salanguecherchelamienne,puisildit:

–Tum’enveuxd’avoircognécesaletype,cesoir?Jesuistropdistraiteparsescaressespourcomprendresaquestion.–Tut’esbattuavecTony?–Non,ceconnarddeScott.Sesmusclesseraidissent,–Personnen’aledroitdeteparlercommeça.Jeneleslaisseraipas

faire.Jesourisetjemepenchepourl’embrasserànouveau.–Peut-êtrequeçasignifiequelquechoseàmonsujet,maisjetrouve

çabandantquandtutetransformesenhommedescavernespourmoi.Ilsourit.–Tun’asqu’àdireunmot,etjetefileuncoupsurlatêteavantdete

traînerdansunecave.J’éclatederire.–Ouille,c’esttellementromantique.–Jen’aijamaisditquej’étaisdouépourça.Savoixsefaitplusrauque.–Maisjesuisdouépourd’autrestrucs.C’est absolument vrai. Nous nous taisons lorsque nos lèvres se

rencontrentànouveau.Quandsondoigtseglisseenmoi,j’oublietout,leclub, le bookmaker et les supplications d’Easton pour que je ne partejamais.Merde,j’oubliemêmemonnom.

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Reedestlaseulechosequiexiste.Àcetinstantprécis,ilestlecentredemonunivers.

Le week-end passe rapidement. Callum rentre le samedi matin, ducoupReedetmoisommesobligésdenouscacherdanslapoolhousepournous bécoter. Le samedi soir, Valérie et moi sortons dîner. Je finis parcraqueretjeluiracontetouteslescochonneriesqueReedetmoifaisonsensemble. Elle est ravie, mais déclare que quoi qu’il en soit, nous nefaisonspas encore la chose la plus cochonne de toutes, et semet àmetaquinerenmetraitantdefilleprude.

MaisjeneregrettepasqueReedaitdécidéd’yallerdoucement.Unepartdemoiestprêteà sauter cedernierobstacle,mais il continueà seretenir, comme s’il avaitpeurd’y aller. Jenevoispaspourquoi, vuquenous nous envoyons en l’air quotidiennement, en nous arrangeantautrement.

Le lundi,Reedme conduit àmonboulot, et àmongrand regret, lajournéed’écolefileàtoutevitesse.C’estaujourd’huiqu’alieulalecturedutestament,maisbienquejesuppliemamontrederalentir,laclochesonneetjedescendsl’escalierprincipalpourattendrelalimousine.

Callumneditpasgrand-chosependantqueDurandnousconduitenville,maislorsquenousatteignonslebeaubâtimentquiabritelesbureauxdu cabinet d’avocats Grier, Gray et Devereaux, il me lance un sourired’encouragement.

–Çavapeut-êtreêtredur,meprévient-il.MaissachequeDinahaboieplusqu’ellenemord.

Je n’ai pas revu la veuve de Steve depuis notre rencontre dans sonpenthouse, et je n’ai aucune envie de remettre ça. Elle non plus,apparemment,parcequelorsqueCallumetmoipénétronsdanscebureautrèschic,ellesemetàfairelamoue.

On me présente quatre avocats et on m’installe dans un sofa trèsconfortable.Callumestsurlepointdes’asseoiràcôtédemoiquandl’undeshommesdeloiseretourneetqu’unpersonnageconnus’avance.

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–Qu’est-cequetufaislà?aboieCallum.Jet’aibienpréciséquetunedevaispasvenir.

Brookeresteimperturbable.–Jesuisicipoursoutenirmameilleureamie.Dinah apparaît à ses côtés et les deux femmes s’étreignent. Elles

pourraient fort bien passer pour des sœurs, avec leurs longs cheveuxblondsetleurssilhouetteslongilignes.Jeréalisesoudainquejeneconnaisriendeleurhistoire,etj’auraissansdoutedûledemanderàCallumilyalongtemps,parcequ’apparemmentellessonttrèsproches.

S’il faut choisir un camp, je suppose que Brooke et moi sommesennemies.JesuisducôtédesRoyal.Brookelesaittrèsbien,jelelisdanssonregarddédaigneux.Jesupposequ’ellepensaitquejeseraisavecelle.Qu’elle,Dinah etmoi ferions équipe contre les horriblesmâlesRoyal etqu’àprésentjelatrahis.

– Je lui ai demandé de venir, explique froidement Dinah.Commençonsàprésent.NousavonsréservéchezPierre 1cesoir.

Noussommessurlepointdenousasseoirpourécouterlesdernièresvolontés de son défunt mari et elle s’inquiète à l’idée de perdre saréservationpourledîner?Cettefemmen’estvraimentpaspossible.

Unautrehommesortdugroupe.–JesuisJamesDrake,l’avocatdemadameO’Halloran.IltendlamainàCallum,quiregardecettemain,puisDinahd’unair

incrédule.Jeneconnaisrienàcegenredechoses,mais ilestclairqueCallum

est embarrassé et mécontent que Dinah ait amené Brooke et un autreavocatavecelle.

Callums’assiedàcontrecœurdanslesofatandisqueBrookeetDinahs’installent en face de nous. Puis les avocats s’asseyent sur différenteschaises, pendant que celui qui est derrière le bureau, leGrier deGrier,GrayetDevereaux,remuequelquespapiersets’éclaircitlavoix.

– Voici les dernières volontés et le testament de Steven GeorgeO’Halloran,commence-t-il.

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L’hommede loiauxcheveuxgrisénumèreensuite touteune listedetrucs légaux à propos de legs à diverses personnes dont je n’ai jamaisentenduparler,dedonsd’argentàdesbonnesœuvres,etquelquechoseausujetd’uneassuranceviepourDinah.Sonavocatsemetàfroncerlessourcils. Ce n’est pas bon signe pour Dinah. Il y a aussi des donssubstantielspourlesfilsdeCallum,aucasoù–etl’avocattousseunboncoupavantdelirecetteligne–«Callumaitdépensétoutesafortuneenalcooletenblondesavantquejemeure».

Callumsecontentedesourire.«Etquelsquesoient leséventuelsproblèmes juridiquessoulevéspar

mamort,jelaisse…»Je suis trop occupée à me demander ce que peuvent bien être ces

problèmesjuridiquespourécouterlerestedelaphrasedeGrier,ducoupjesursautelorsqueDinahpousseunhurlementoutragé.

–Quoi?Non!Jenelaisseraipasfaireça!JemepencheversCallumpouravoiruneexplicationdecequevient

dedire l’avocat et je suis stupéfaitepar sa réponse.Apparemment, c’estmoi le problème juridique. Steve m’a laissé la moitié de sa fortune,quelque part à hauteur de… Je me sens mal quand Callum me dit lechiffre.Putaindemerde.Lepèrequejen’aijamaisrencontrénem’apaslaissédesmillions.Ilnem’apaslaissédesdizainesdemillions.

Ilm’alaissédescentainesdemillions.Jevaistomberdanslespommes.C’estsûr.–Etunquartdel’entreprise,ajouteCallum.Lesactionsserontmisesà

tonnomlorsquetuaurasvingtetunans.À l’autreboutde lapièce,Dinahse lèved’unbond,vacillant sur ses

talonsaiguillevertigineuxenseretournantpourdévisagerlesavocats.–C’étaitmonmari!Toutcequiluiappartenaitestàmoi,etjerefuse

departageraveccettetraînéequin’estpeut-êtremêmepassafille!–LetestADN…commenceCallum,trèsencolère.– Ton test ADN ! lui renvoie-t-elle à la figure. Et nous savons tous

jusqu’où tu es capable d’aller lorsqu’il s’agit de protéger ton précieux

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Steve ! (Elle se retournevers lesavocats.)J’exigeunautre test,qui soiteffectuépardesgensquejechoisiraimoi-même.

Grierhochelatête.–Nousseronsheureuxdesatisfairevotrerequête.Votremarialaissé

plusieurséchantillonsd’ADNquisontconservésdansunlaboratoireprivéàRaleigh.Jemesuismoi-mêmeoccupédel’enregistrement.

L’avocatdeDinahpoursuitsuruntonrassurant:– Nous allons faire un test comparatif avec Mademoiselle Harper

avantdepartir.Jepeuxsuperviserlachose.Lesadultescontinuentàdiscuteretàsequereller,pendantquemoi,je

reste assise, abasourdie. Mon esprit n’arrête pas de tourner autour desmots « centainesdemillions ».C’est plusd’argent que je n’en ai jamaisrêvé,etquelquepart,jemesenscoupabled’enhériter.JeneconnaissaispasSteve.Jeneméritepaslamoitiédecetargent.

Callum remarquemondésarroi etme serre lamain,pendantque labouchedeBrookesetorddedégoût.J’ignore lesregardshostilesqu’ellem’envoieetjemeconcentresurmarespiration.

JeneconnaissaispasSteve.Ilnemeconnaissaitpas.Maisassiselà,àtenterd’encaisserlechoc,jemerendssoudaincomptequ’ilm’aimait.Ouque,dumoins,ilvoulaitm’aimer.

Et mon cœur saigne de n’avoir jamais eu la chance de pouvoir luirendresonamour.

1.CélèbrerestaurantfrançaisàBridgehampton.

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CHAPITRE34

Des heures après la lecture des dernières volontés, je suis encorecommeanesthésiée.Complètementchamboulée.Jenesaispasquoifairedecettebouledouloureusequej’aidansleventre,alorsjemepelotonnedansmonlitetj’essaiedemeviderlatête.Jem’interdisdepenseràSteveO’Halloranetaufaitquejeneleconnaîtrai jamais.Jenepensepasauxmenacesdeprocès queDinahaproférées contreCallumetmoi lorsquenous avons quitté le cabinet d’avocats, auxmots violents que Brooke ahurlés àCallumquand il a refusédedîner avec ellepour «parler ». Jesupposequ’elleveutlerécupérer.Çan’ariend’étonnant.

Reed finit par entrer dans ma chambre. Il ferme la porte, puis merejointsurlelitetmeprenddanssesbras.

–Papanousademandédetelaissertranquilleunmoment.Alors,jet’ailaissédeuxheures.Maisc’estterminé.Parle-moi,bébé.

J’enfouismonvisagedanssoncou.–Jen’aipasenviedeparler.–Qu’est-cequis’estpasséchezlesavocats?Papan’apasvoulunous

direquoiquecesoit.Merde, iladécidédemefaireparler.Engrognant, jem’assiedset je

croisesonregardpréoccupé.– Je suis multimillionnaire, dis-je tout de go. Pas juste une bonne

vieillemillionnaire de base,mais unemultimillionnaire. Çame fout lesjetons.

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Ilsourit.–Jesuissérieuse!Qu’est-cequejevaisbienpouvoirfairedetoutce

fric?–Investis-le.Donnes-enauxbonnesœuvres.Dépense-le.Reedserapproche.–Tupeuxfairetoutcequetuveux.–Je…neleméritepas.Laréponsearriveavantquejepuissel’empêcher,etl’instantsuivant,

toutesmesémotionsremontentà lasurface.Je lui raconte la lecturedutestament, la réaction de Dinah, et que j’ai réalisé que Steve meconsidérait commesa fillemêmes’ilnem’avait jamais rencontrée.Reedne fait aucun commentaire pendant tout mon long discours, et jecomprendsquec’estcequej’attendaisdelui.Jen’aipasbesoind’avisoudeconseils,j’aisimplementbesoinqu’onm’écoute.

Quand je finisenfinparme taire, ilm’embrasse,un longetprofondbaiser,etlaforcedesoncorpscontrelemienapaisemonanxiété.

Ses lèvresparcourentmoncou, la lignedemamâchoire,majoue.Àchaquebaiser,jel’aimeunpeuplusfort.C’estunsentimentterrifiant,quiselogedansmagorgeetdéclenchechezmoiuneénormeenviedefuir.Jen’ai jamais aimé avant. J’aimais ma mère, mais ce n’est pas la mêmechose. Ce que je ressens à présent me… consume. C’est chaud,douloureuxetpuissantetçaremplitmoncœur,çapulsedansmesveines.

ReedRoyalestenmoi.C’estuneimage,mais,ohmonDieu,j’aienviequecesoitaussilaréalité.J’aienviedeluietjevaisl’avoir,etmesmainsdeviennentfrénétiqueslorsqu’ellestententd’ouvrirsabraguette.

–Ella,grogne-t-ilenmeprenantlesmains.Non.–Si,jeluimurmuredanslabouche.J’enaienvie.–Callumestlà.Cerappel,c’estcommesijerecevaisunseaud’eauglacéesurlafigure.

Son père pourrait frapper à ma porte n’importe quand, et il le feraprobablement. Je sais que Callum a senti à quel point j’étais perturbéequandnoussommesrentrésàlamaison.

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Mevoilàtotalementfrustrée.–Tuasraison.Onnepeutpas.Reedm’embrasseànouveau, ilm’effleuresimplementles lèvresavec

tendresseavantdeserelever.– Est-cequeçavaaller?Eastonetmoi,onétaitcenséssortirboire

quelquesbièresavecdespotesdel’équipedefoot,maisjepeuxannulersituveuxquejereste.

– Non,çava,vas-y.Jedoisencoredigérerpource fric, jeneseraissansdoutepasd’agréablecompagniecesoir.

–Jeseraideretourdansuneheureoudeux,mepromet-il.Onpourraregarderunfilmouuntrucdugenresituestoujoursréveillée.

Après son départ, jeme remets en boule et je finis parm’endormirpendantdeuxheures,cequivacomplètementperturbermonrythmedesommeil.C’estlasonneriedutéléphonequimeréveille.Jem’inquièteendécouvrant le numéro de Gideon qui s’affiche sur mon écran. J’ai lesnumérosdetouslesfrères,maisGideonnem’ajamaisappelée.

Jeréponds,encoreunpeudanslesvapes.–Hé?–Quoideneuf?Tuesàlamaison?Sa réponse est pour lemoins laconique. Je suis immédiatement sur

mesgardes.Iln’aprononcéquequatremots,maisjedécèlequelquechosedanssavoixquimefaitpeur.Ilestencolère.

–Ouais,pourquoi?–Jesuisàcinqminutesdelà…Vraiment?Un lundi?Gideonne rentre jamaisde la facpendant la

semaine.–Onpeutallerfaireuntourenvoiture?J’aibesoindeteparler.Jememetsillicoàfroncerlessourcils.–Pourquoionnepeutpasparlerici?–Parcequejeneveuxpasquequelqu’unpuissenousentendre.Je m’assieds dans mon lit. Sa demande me met mal à l’aise. Bien

entendu, il ne va pas me trucider sur le bord de la route, mais me

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demanderdevenirfaireuntour,c’esttrèsétrange,surtoutdelapartdeGideon.

– C’estàproposdeSavannah,ok?murmure-t-il.Et jeveuxqueçaresteentretoietmoi.

Jemedétendslégèrement.Maispastotalement.C’estlapremièrefoisqueGideonmeparledeSavannah.JenesuisaucourantdeleurhistoirequeparEaston.Maisjedoisreconnaîtrequejesuisterriblementintriguée.Jeréponds:

–Onseretrouvedehors.Son gros SUV m’attend déjà dans l’allée lorsque je descends les

escaliers extérieurs. Je grimpe sur le siège passager et Gideon démarresans dire unmot. Son visage, de profil, semble demarbre, ses épaulessonttendues.Etilrestesilencieuxjusqu’aumomentoùilsegaresurunepetiteplacecinqminutesplustardetqu’ilcoupelemoteur.

–TubaisesavecReed?Jerestebouchebée.Moncœursemetàbattreàtoutevitesse.Jene

m’attendaispasàceregardfurieux.–Hum…Je…Non,jebalbutie.C’estlavérité.–Maisvousêtesensemble,insisteGideon.Voussortezensemble?–Pourquoiest-cequetumedemandesça?–J’essaied’estimerlesdégâtsquejevaisdevoircontrôler.Desdégâtsàcontrôler?Maisqu’est-cequ’ilveutdire,bonDieu?–OnnedevaitpasparlerdeSavannah?jedemandeavecdifficulté.–Ils’agitdeSavannah.Etdetoi.EtdeReed.Sarespirationsemblemalaisée.–Quoiquetusoisentraindefaire,tudoisarrêter.Dèsmaintenant,

Ella.Tudoisymettrefin.Monpoulss’accélèreencore.–Pourquoi?Ilpasseunemaindanssescheveux,cequiluifaitbaisserlégèrement

la tête.Monattentionestattiréeparune légèremarquerougedans son

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cou.Ondiraitunsuçon.–Reedesttaré,dit-ild’unevoixrauque.Ilestaussibousilléquemoi,

etécoute-moibien,tuesunechouettefille.Ilyad’autrestypesàAstor.Reedvabientôtpartirenfac.

Les paroles de Gideon se précipitent, c’est une suite de phrases quin’ontaucunsens.

–JesaisqueReedestperturbé,jecommenceàdire.– Tu n’as pas idée à quel point, pas idée du tout, m’interrompt-il.

Reedetmoi,etmonpère,onaçaencommun.Onfoutenl’airlaviedesfemmes.Onlesembarquejusqu’auborddelafalaiseetonlesfaitsauter.Tuesquelqu’undebien,Ella.MaissiturestesicietquetucontinuesavecReed,je…

Ils’interrompt,ilrespireavecpeine.–Tuquoi?Ilagrippesiviolemmentsonvolantquesesarticulationsblanchissent,

maisilnemedonneaucuneexplication.–Tuquoi,Gideon?–Il fautquetuarrêtesdeposerdesquestionsetquetutemettesà

écoutercequ’ontedit,aboieGideon.Arrêteçaavecmonfrère.Tupeuxêtrecopineaveclui,commetul’esavecEastonoulesjumeaux.Maisnetelancepasdansunerelationamoureuseaveclui.

–Etpourquoipas?– Bon sang, tu es toujours aussi chiante ? J’essaie de te sauver, de

t’éviterd’avoirlecœurbriséoudetefiniravecuneboîtedesomnifères,finit-ilparexploser.

Oh!Jecomprendsàprésent.Samères’estsuicidée…OhmonDieu,est-cequeSavannahafaitunetentative,elleaussi?

Reedetmoi,onadépasséceproblème,maisjenesuispassûrequeGideonsoitprêtàentendreça.Etj’imaginequ’ilnevapaslâcherl’affairesi jen’acceptepas sademande ridicule.Bon, trèsbien. Jevaisaccepter.Reed etmoi, on se cachedéjà deCallum.Onpourra tout aussi bien secacherdeGideon.

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–Okay.Jeme penche en avant et je pose unemain sur la sienne en signe

d’apaisement.–JevaisrompreavecReed.Tuasraison,ons’amuseensemble,mais

cen’estpasvraimentsérieux.Jemens.Ilsepasseunemaindanslescheveux.–Tuenessûre?Jehochelatête.–Reeds’entape.Ethonnêtement,siçateprendtroplatête,jesuis

sûrequ’ilserad’accordpourreconnaîtrequeçan’envautpaslapeine.JeserrelamaindeGideon.–Relax,okay?Jeneveuxpasfoutreenl’airlabonneambiancede

cettemaison.Çanemeposepasdeproblèmesd’arrêter.Gideonsedétend,ilpousseunlongsoupir.–Okay.Bon.J’ôtemamain.–Onpeutrentreràprésent?Siquelqu’unpassedanslecoinetnous

voitgaréslà,demainàl’école,lamachineàrumeursvas’emballer.Ilrigoledoucement.–C’estvrai.Je tourne la tête vers l’extérieur pendant qu’il démarre. Nous ne

parlonspaspendantlecheminduretouret ilnedescendpasdevoiturelorsqu’ilmedépose.

–Turentresàlafac?–Ouais.Il démarre en trombe,mais je ne sais pas pourquoi, je ne crois pas

qu’il retourneà l’université.Dumoinspas ce soir. Je suis égalementunpeudéboussoléepar sademandedéliranted’éviter toute relation intimeavecReed.

EnparlantdeReed, saRover est garéedevant le garage, ce quimeréconforte un peu. Il est de retour. Et toutes les autres voitures sontparties,mêmela limousine,cequisignifiequenousallonsêtreseuls.Je

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medépêched’entreretjegrimpelesescaliersquatreàquatre.Arrivéeenhaut, jetourneàdroite,vers l’aileOuest.Toutes lesportessontgrandesouvertes, à l’exception de celle de la chambre de Reed. Les jumeaux etEastonsontinvisibles,etmachambreestvide,elleaussi.

JenesuisencorejamaisalléedanslachambredeReed.C’esttoujoursluiquivientmevoir,maiscesoir,jenevaispasattendrequ’ilseramène.Gideonm’a vraiment secouée, et Reed est le seul qui puisse m’aider àcomprendrelecomportementétrangedesonfrère.

J’arrivedevantsaporteetjelèvelamainpourfrapper,maisavecunpetitsourirejemedisquepersonnedanscettemaisonnefrappejamaisàma porte. Et je décide de rendre à Reed lamonnaie de sa pièce. C’estpuéril,jesais,maisj’espèrelefairesursauterassezpourqu’ilcomprennequec’estimportantdefrapperavantd’entrerquelquepart.

J’ouvrelaported’uncoup.–Reed,je…La suite reste coincée dansma gorge. Je trébuche, jem’arrête et je

pousseuncridesurprise.

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CHAPITRE35

Les vêtements jonchent le sol, commed’obscènes signes depiste. Jesuiscettepistedesyeux.Desescarpinsàtalonsaiguillegisentsurlecôté.Deschaussuresdesports’yintercalent.Unechemise,unerobe,dessous-…

Jefermelesyeux,commepoureffacer les images,maisquandje lesrouvre, rienn’achangé. Ilyades trucsendentellenoire,des trucsquejamais jeneporterais, qui semblent avoir été jetéspar terre juste avantqueleurpropriétairenesejetteelle-mêmesurlelit.

Monregardremonteverslehaut,glissesurdesmolletsmusclés,desgenoux, par-dessus une paire de mains fermement serrées l’une contrel’autre.Au-dessusdesonventrenuettendu,jem’arrêteuninstantsursapoitrine,làoùsoncœurestcensésetrouveret,enfin,jeleregardedanslesyeux.

–OùestEaston?jedemandeàbrûle-pourpoint.Mon cerveau rejette cette scène. Je superpose une autre histoire à

celle que j’ai devant les yeux. Une histoire où j’aurais déboulé dans lachambre d’Easton, où Reed, l’esprit embrumé par l’alcool, se seraitintroduitparerreur,luiaussi.

Mais Reed se contente de me fixer d’un regard glacé, comme si jen’avaispasàluiposerdequestions.

Reednesortirait jamaisavecquelqu’un, j’entendsValmemurmureràl’oreille.Désespérée,jeluilance:

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–Etlestypesavecquitudevaissortirboiredesbières?J’offreàReedtoutesleschancespossiblesdemeraconterautrechose

quecequej’aidevantlesyeux.Raconte-moiunbobard,putain!Maisilresteobstinémentmuet.Derrièrelui,Brookeselèvecommeunfantôme,etlaterres’arrêtede

tourner.Letempss’étirelors-qu’ellesemetàcaresserledosdeReed,sesépaules,avantdeposerenfinunemainmanucuréesursapoitrine.

Évidemment,elleestnue.ElleembrasseReeddanslecou,toutenmeregardant.Etilnebougepas.Pasunseulmuscle.

–Reed…Sonnomn’est plus qu’un chuchotement, une griffuredouloureuse à

traversmagorge.–Tondésespoiresttrèstriste.(LavoixdeBrookesonnecommeune

erreurdanscettechambre.)Tudevraispartir,àmoinsque…Elleétendunejambenueetl’enrouleautourdeshanchesdeReedqui

porteencoresonbasdejoggingencotonblanc.–Àmoinsquetuaiesenviederegarder?Dansmagorge, ladouleuraugmentealorsqu’elle reste lovéecontre

luietqu’ilnefaitaucuneffortpourlarepousser.Samaindescendlelongdesonbrasetquandelleatteintsonpoignet,

ilbougelégèrement.C’estunmouvementimperceptible.Jeregardeavecterreursesdoigtsglissersursesabdos,etavantqu’ellepuisseattrapercequi, je commençais à le croire, m’appartenait, je fais demi-tour et jem’enfuis.

J’aieutort.Tortàproposdetellementdechosesquejen’arrivepasàlesénumérer.

Commenousn’arrêtionspasdedéménager,j’aicruquej’avaisbesoinderacines.Quandleénièmepetitcopaindemamans’estmisàvraimentmereluquer,jemesuisdemandésij’avaisbesoind’unefigurepaternelle.Quand j’étais toute seule la nuit pendant qu’elle travaillait de longuesheures épuisantes comme serveuse, comme strip-teaseuse et Dieu sait

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quoid’autre,pourpouvoirmenourriretm’habiller,jepriaispouravoirdel’argent.

Etmaintenant,j’aitoutcelaetc’estencorepirequ’avant.Je cours dans ma chambre et je remplis mon sac à dos avec mon

maquillage, mes deux paires de jeans skinny, cinq tee-shirts, des sous-vêtements,lecostumedestrip-teasedeMissCandyetlarobedemamère.

Jeretiensmeslarmesparcequepleurernevapasmefairesortirdececauchemar.

Unpiedaprèsl’autre.Ilrègneunsilencedemortdanslamaison.L’échodeséclatsderirede

Brooke lorsque je luiavaisditqu’ilyavaitunhomme justeetbondanscettemaisontourbillonnedansmoncrâne.

J’imagine Brooke avec Reed. Sa bouche sur elle, ses doigts qui latouchent.Une fois à l’extérieur, je titubeet jememetsàvomir. L’acideremplitmabouche,maisjepoursuismonchemin.Lavoituredémarreauquartdetour.Jepasseunevitesseet,lesmainstremblantes,jedescendsl’allée. J’espère encore cette scène de cinéma pendant laquelle Reed vasortirdelamaisonencourant,enmecriantderevenir.

Maisçan’arrivepas.Iln’yapasderetrouvaillessouslapluie,etleseulliquide,cesontmes

larmesquejenepeuxretenirpluslongtemps.LavoixmonocordeduGPSmeguideversmadestination.Jecoupelemoteur,jesorslespapiersdelavoitureetjelesglissedansmonlivred’Auden.Audenaécritquelorsquelegarçontombeduciel,calamitéaprèscalamité, ila toujoursunavenirpossiblequelquepartetqu’ilnesertàrienderuminersursaperte.Maisa-t-ilconnuunesouffrancecommelamienne?Aurait-ilécritcelas’ilavaitvécumavie?

Je pose mon front sur le volant. Mes épaules sont secouées desanglots, et j’ai à nouveau des haut-le-cœur. Je sors en vacillant de lavoitureetc’estsurdesjambeschancelantesquejemedirigeverslagareroutière.

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– Ça va, ma p’tite ? me demande la préposée, l’air inquiet. (Sagentillessemetiredenouveauxsanglots.)Jeluimens:

–Magrand-mèrevientdemourir.–Oh,jesuisdésolée.Alors,tuvasàsesfunérailles?Je hoche la tête en signe d’acquiescement. Elle tape sur son

ordinateur.Sesongleslongsclaquentsurleclavier.–Aller-retour?–Non,cen’estpaslapeine.Jenecroispasquejerentrerai.Elleposesesmainssursonclavier.–Tuessûre?Unaller-retour,c’estmoinscher.–Iln’yaplusrienpourmoiici.Riendutout,jerépète.Jecroisquec’estàcausedel’angoissequ’ellelitdansmesyeuxqu’elle

arrête de me poser des questions. Elle imprime silencieusement monbillet.Jeleprendsetjegrimpedanslecarquinem’emmènerapasassezloin,assezvite.

ReedRoyalm’adétruite.Jesuistombéeducieletjenesuispassûredepouvoirmerelever.Pascettefois.

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Remerciements

Lorsquenousavonsdécidédemettreencommunnosidéesetd’écrireensemblecelivre,nousnenousdoutionspasqu’ilallaitdevenirtellementaddictif,quenousallionsdevenircomplètementaccroauxpersonnagesetà l’univers quenous avions créés.Dès le tout début, l’élaborationde ceprojet fut un réel plaisir, mais nous n’aurions pas été capables de leconcrétisersansl’aidedesquelquespersonnesformidables:

Nospremièreslectrices,Margo,ShaunaetNina,quinenousdétestenttoujourspas,malgrél’horriblesuspenseàrépétitionquenousleuravonsfaitvivre.

Notre attachée de presse, Nina, et son enthousiasme contagieux etpermanentpourceprojet.

MeljeanBrooks,pouravoircrééunconceptdecouverturequis’adaptesimerveilleusementàcettesérie!

Et, bien sûr, nous sommes pour toujours redevables à toutes lesblogueuses, les critiques et les lectrices qui ontpris le tempsde lire, derelateretdes’extasiersurcelivre.C’estvotreappuietvotreretourquiontfaitdetoutceprocessusuneaventurepassionnante!

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Restezconnectées

Ellareviendra-t-elleaumanoirRoyal,remplideproblèmesroyaux,oubienReedl’a-t-ilperduepourdebon?Etêtes-vouscurieusedesavoirquiditcecidansLeprincebrisé?

« Tu es sublime et tellement bandante qui si je reste ici pluslongtemps,tavirginitévaseretrouverparterre,quelquepartpasloindelaculottequetuportaishier.»

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Àproposdel’auteur

ErinWattestnéeducerveaudedeuxauteursàsuccèsquipartagentun même amour pour les super-livres et une véritable addiction àl’écriture. Toutes deux possèdent une imagination débordante decréativité. Leur plus grand amour (après leur famille et leurs animauxdomestiques,bienentendu)? Inventerdes idéesdrôlesetparfois folles.Leurplusgrandecrainte?Arrêterdelefaire.

Vouspouvezlescontactersurleurmessageriecommune:[email protected]