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Normes de qualit pour les produits agroalimentaires en Afrique de lOuest

Etude ralise par Arlne Alpha, Ccile Broutin, Gret

Avec la collaboration de Joseph Hounhouigan et Victor Anihouvi, facult des Sciences agronomiques du Bnin

Agence Franaise de Dveloppement Dpartement de la Recherche AFD 2009 Normes de qualit pour les produits agroalimentaires en Afrique de lOuest

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Avertissement Les analyses et conclusions de ce document sont formules sous la responsabilit de ses auteurs. Elles ne refltent pas ncessairement le point de vue de lAgence Franaise de Dveloppement ou de ses institutions partenaires. Directeur de la publication : Jean-Michel SEVERINO Directeur de la rdaction : Robert PECCOUD

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Remerciements Les auteurs remercient Claude Torre et Jean-Ren Cuzon du dpartement du Pilotage stratgique et de la prospective de lAFD, pour leur appui et leurs commentaires dans la relecture du rapport.

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Sommaire

RSUM EXCUTIF .............................................................................................9 EXECUTIVE SUMMARY......................................................................................13 SYNTHSE...........................................................................................................15 SYNTHESIS .........................................................................................................35 INTRODUCTION..................................................................................................55

PARTIE I ENJEUX, SYNTHSE DES TUDES FILIRES ET RECOMMANDATIONS.....59 1. NORMES DE QUALIT ...................................................................................61 1.1. quelles dimensions de la qualit sintresse-t-on ?................................61 1.2. Qui labore les normes de qualit ? .........................................................62 1.3. Contrle et culture qualit ........................................................................64 2. ENJEUX DES NORMES DE QUALIT POUR LES PRINCIPALES FILIRES VIVRIRES DE LA RGION AFRIQUE DE LOUEST.....................................67 2.1. Attentes des consommateurs ..................................................................67 2.2. Dans quel objectif laborer des normes ?.................................................70 2.3. Quelle adquation entre les normes actuelles et les pratiques sociales ? ........................................................................72 2.4. Normes sur le march de lUE..................................................................75 2.5. Impacts des normes sur les oprateurs....................................................78 2.6. Quel dispositif institutionnel de normalisation aux niveaux national et rgional ? ................................................................................845

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3. SYNTHSE DES TUDES FILIRES.............................................................91 3.1. Une grande diversit de produits proposs aux consommateurs ..............91 3.2. Des critres de qualit organoleptiques et fonds sur des relations interpersonnelles en Afrique .......................................................................92 3.3. Des critres de qualit avant tout sanitaires...............................................92 3.4. Des enjeux de qualit diffrents lexportation et sur les marchs locaux.....93 3.5. Des caractristiques diffrentes entre filires artisanales et industrielles .....93 3.6. Ncessit de normes spcifiques pour le secteur artisanal de transformation .....................................................................................94 3.7. Un Programme Qualit largir aux spcificits du secteur artisanal et informel .................................................................................................96 3.8. Des appuis pour le secteur artisanal et un partage des cots entre acteurs publics et privs............................................................................97 4. VALORISER LA QUALIT : QUELS SIGNES DE QUALIT METTRE EN PLACE ? ....................................................................................99 4.1. Marques prives et cahier des charges .....................................................99 4.2. Labels de qualit et indications gographiques (IG) .................................101 5. LES RGLES DORIGINE : DAUTRES BARRIRES NON TARIFAIRES AU MARCH UE ?........................................................................................107 5.1. Suivre lvolution des rgles dorigine concernant le march6

europen.................................................................................................109 5.2. Comment assouplir les rgles dorigine ? ................................................110 6. RECOMMANDATIONS SUR LA DMARCHE DLABORATION DE NORMES.................................................................................................111 6.1. Priorit aux normes pour le march rgional............................................111 6.2. Priorit aux normes fondes sur les pratiques sociales (normes intermdiaires ou dynamiques, drogations)............................................112 6.3. Harmonisation et coordination des politiques et des dispositifs nationaux ................................................................................................114 6.4. Dialogue public priv ............................................................................115 6.5. Incitations conomiques pour les oprateurs ..........................................117 6.6. Mesures daccompagnement..................................................................120

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PARTIE II TUDE DE LA FILIRE GARI ET DE LA FILIRE POISSON ..........................121 7. LA FILIRE GARI..........................................................................................123 7.1. Sur quels aspects de la filire amliorer la qualit ? ................................124 7.2. Dynamiques dinnovation et bnfices en matire de qualit ..................139 7.3. Risques dviction lis aux cots de la mise aux normes........................146 7.4. Quels enseignements pour llaboration de normes de qualit ? ............149 8. LA FILIRE POISSON ..................................................................................153 8.1. Sur quels aspects de la filire amliorer la qualit ? ................................153 8.2. Dynamiques dinnovation et bnfices en matire de qualit ..................175 8.3. Risques dviction lis aux cots de la mise aux normes........................180 8.4. Quels enseignements pour llaboration des normes et quel partage des cots entre acteurs publics et privs ? ...................................................187 CONCLUSION ...................................................................................................197 ANNEXES...........................................................................................................203 LISTE DES SIGLES ET ABRVIATIONS ..........................................................211 BIBLIOGRAPHIE ...............................................................................................217

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Rsum excutif

Llaboration de normes de qualit, entendue au sens large couvrant la qualit sanitaire, organoleptique, technique et les signes de qualit, peut tre un lment dterminant de lamlioration de la comptitivit des filires agroalimentaires et du dveloppement. Les normes sont souvent traites du point de vue de laccs des produits agroalimentaires du Sud aux marchs des pays du Nord. Le niveau des normes est alors la plupart du temps considr comme une barrire non tarifaire qui peut tre fortement contraignante pour les oprateurs lexportation. Mais cela nest pas toujours le cas et dpend notamment de lappui que peuvent recevoir les oprateurs pour se mettre niveau. Par ailleurs, les enjeux de normes de qualit concernent aussi les produits agroalimentaires consomms et changs sur les marchs nationaux et rgionaux du Sud.9

En Afrique de lOuest, les consommateurs sont de plus en plus sensibles la qualit des produits agroalimentaires, du fait de llvation des niveaux de vie, de lurbanisation et de lmergence dun comportement consumriste. Llaboration de normes de qualit au niveau rgional peut encourager les oprateurs se saisir de lopportunit que constitue cette segmentation du march pour mieux valoriser leurs produits et amliorer leurs revenus, tout en satisfaisant aux exigences des consommateurs. Le Programme Qualit mis en place dans la zone de lUnion conomique et montaire ouest-africaine (UEMOA) puis tendu la Communaut conomique des Etats dAfrique de lOuest (CEDEAO) a pour linstant principalement vis la construction dun dispositif institutionnel rgional et lappui aux acteurs tourns vers lexportation. Pour le march rgional, lenjeu porte la fois sur le niveau et sur le processus dlaboration des normes de qualit.

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Rsum excutif

Ltude sur llaboration de normes de qualit en Afrique de lOuest a t commandite par lAgence Franaise de Dveloppement (AFD) et ralise par le Groupe de recherche et dchanges technologiques (Gret) et la facult des Sciences agronomiques du Bnin. Lobjectif est de mettre en lumire, partir dtudes de cas sur le gari et le poisson, les enjeux et les questions lis la dfinition de normes rgionales, et de proposer un outil daide la dcision aux personnes en charge de la normalisation dans les pays dAfrique de lOuest et dans le Programme Qualit. Des entretiens ont t conduits avec les services tatiques, les oprateurs, les consommateurs et les organismes de recherche et dappui au dveloppement au Sngal, au Bnin puis dans le cadre de missions au Ghana et en Cte dIvoire. Le prsent rapport sarticule autour de deux parties. Une premire partie, gnrale, prsente les enjeux des normes de qualit, une synthse des tudes filires, des analyses transversales sur les signes de qualit et les rgles dorigine, ainsi que des recommandations pour llaboration de normes rgionales. La seconde partie, axe sur les filires tudies, illustre les questions souleves concernant les demandes des consommateurs, les pratiques des oprateurs et ladquation entre les normes et les pratiques. Il ressort que les efforts de normalisation dans les pays sont surtout dicts par la ncessit de maintenir des dbouchs lexportation vers lUnion europenne (UE). Ce prisme tend laisser lcart un secteur artisanal, qui joue un rle essentiel dans10

lemploi, la lutte contre la pauvret, et lapprovisionnement des marchs africains. Lenjeu, dans ce secteur, est de passer de procds traditionnels (visant la qualit organoleptique) et relativement adapts des circuits courts, dautres pratiques permettant datteindre des marchs plus loigns, tout en assurant linnocuit des produits. Les milliers de petits oprateurs artisanaux ne sont pas en mesure dans limmdiat dappliquer les procdures industrielles et les normes internationales. Ils dveloppent par ailleurs diverses pratiques pour amliorer la qualit de leurs produits, mieux les valoriser et ainsi saisir les opportunits rmunratrices offertes par la segmentation croissante des marchs. Dans ce contexte, lapproche des normes intermdiaires ou dynamiques, fondes sur les pratiques sociales et la notion de progressivit dans le niveau des normes, apparat particulirement pertinente. La concertation entre lensemble des acteurs

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Rsum excutif

pour dfinir les critres de qualit et les guides de bonnes pratiques dhygine est primordiale. La mise en place dincitations conomiques et de mesures daccompagnement (formation, quipement des laboratoires danalyse et des services de contrle, etc.) doivent complter le dispositif.

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Executive Summary

Establishment of quality standards (understood in the broadest sense of covering sanitary, organoleptic, technical quality and signs of quality) can be a decisive element in improving the competitiveness of agrifood commodity chains and economic development. Standards are often addressed from the viewpoint of the access that agrifood products from developing countries (the South) have to the markets of developed countries (the North). The degree of standards is, in this case, usually seen as a non-tariff barrier that can be highly restrictive for export operators. But this is not always the case and depends notably on the support that operators can receive in order to upgrade. In addition, the stakes presented by quality standards also concern the agrifood products consumed and traded on national and regional markets in the South. In West Africa, consumers are increasingly sensitive to the quality of agrifood products, in connection with rising standards of living, urbanisation and the emergence of consumerism. The elaboration of regional quality standards can encourage operators to grasp the opportunity offered by this type of market segmentation to better showcase their products and increase their incomes, while meeting consumers demands. The Quality Programme set up in the West African Economic and Monetary Union (WAEMU) zone, and then extended to the Economic Community of West African States (ECOWAS), has until now been primarily aimed at building a regional institutional system and supporting export-oriented operators. For the regional market, the challenge involves both the level of quality standards and the process of elaborating on them. The study on the elaboration of quality standards in West Africa was commissioned by the Agence Franaise de Dveloppement and produced by the Groupe de recherche

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Executive Summary

et dchanges technologiques (Gret) and the Facult des Sciences Agronomiques du Bnin. The goal was to use case studies on gari and fish to shed light on the stakes and questions involved in setting regional standards and offer a decision-making tool for people in charge of setting standards in West African countries and the Quality Programme. Interviews of state services, operators, consumers, and research and development support organisations were conducted in Senegal and Benin and then in the framework of field trips to Ghana and Cte dIvoire. The study is presented in the form of thematic fact sheets organised in two parts. The first general part presents the stakes of quality standards, a summary of commodity chain studies, crosscutting fact sheets on signs of quality and rules of origin, and recommendations for the elaboration of regional standards. The second part, focused on the commodity chains studied, illustrates the questions raised in regard to consumers demands, operators practices, and how well standards and practices match each other. The results show that countries efforts to set standards are above all dictated by the need to maintain export outlets in the European Union (EU). This prism tends to leave the non-industrial sector on the sidelines, although it plays a crucial role in employment, poverty alleviation and African market supply. The challenge for this sector is to move from traditional processes that target organoleptic quality and are suited to relatively short distribution circuits, to other practices that enable one to reach more distant markets while ensuring that products are not harmful. Thousands of small non-industrial14

operators are not able to adopt industrial procedures and international standards at this time. However, they are developing diverse practices to improve the quality of their products, better showcase them and thereby grasp the remunerative opportunities offered by the growing market segmentation. In this context, the intermediate or dynamic standards approach based on social practices and the notion of progressivity in standards seems particularly relevant. Consulting all those involved in order to define quality criteria and good hygiene practice guidelines is crucial. Establishing financial incentives and support measures (training, equipment for testing laboratories and enforcement services, etc.) must complete the system.

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Synthse

Les normes de qualit sur les produits agroalimentaires tendent se dvelopper en Afrique de lOuest. Cette tendance est, pour une part, structurelle. Elle rsulte des exigences croissantes des consommateurs africains, lies llvation des niveaux de vie et lurbanisation. Elle est aussi devenue un impratif, car les normes sont un lment de plus en plus dterminant des changes agricoles et alimentaires. Les oprateurs doivent prendre en compte les normes de qualit pour assurer leurs dbouchs lexportation. Lapplication de normes de qualit peut galement tre un moyen pour les oprateurs de mieux valoriser leurs produits et damliorer leurs revenus lorsquelles sont adaptes leurs capacits de production et dorganisation. En Afrique de lOuest, llaboration au niveau rgional de normes de qualit et la promotion de la qualit seffectue dans le cadre du Programme Qualit, adopt dans lUEMOA en 2005 et en cours dextension la CEDEAO. Le niveau et le processus dlaboration des normes sont considrer avec attention pour que les normes puissent jouer leur rle incitatif damlioration de la comptitivit et des revenus des oprateurs, en mme temps que satisfaire les exigences des consommateurs. Cette synthse rsume une tude portant sur llaboration des normes de qualit en Afrique de lOuest. Elle est illustre par deux exemples de filires, celle du poisson et celle du gari. Le poisson et le gari sont respectivement exports vers lUE et fortement consomms dans la rgion. Des entretiens ont t conduits au Sngal, en Cte15

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Synthse

dIvoire, au Bnin et au Ghana avec les services tatiques, les oprateurs, les consommateurs et les organismes de recherche et dappui au dveloppement dans ces pays. Lobjectif est de mettre en lumire, partir de ces tudes de cas, les enjeux et les questions lis llaboration des normes et de proposer un outil daide la dcision aux personnes en charge de la normalisation dans les pays de lAfrique de lOuest et dans les instances du Programme Qualit.

Normes de qualit : de quoi parle-t-on ?On entend par normes de qualit des produits agroalimentaires les normes qui recouvrent lensemble des dimensions de la qualit : la qualit sanitaire, mais aussi organoleptique ou sensorielle, la qualit technique (calibre, granulomtrie, couleur, etc.), nutritionnelle, ainsi que la matrise et la gestion de la qualit (conditionnement, traabilit, mthode de la matrise des points critiques [Hazard Analysis of Critical Control Point - HACCP], tiquetage, etc.). Ce large champ de la qualit conduit traiter de la promotion de la qualit, en particulier des signes de qualit (labels, indications gographiques). Les normes peuvent concerner des produits, des procds, ou des mthodes de production ainsi que des prescriptions en matire demballage, de marquage ou dtiquetage. Elabores par les pouvoirs publics, elles sont destines, le plus souvent,16

tre prises en compte dans les textes lgislatifs et rglementaires. Ds lors quelles sont traduites dans ces textes, les normes deviennent dapplication obligatoire. Notons quen Afrique, par le pass, les pouvoirs publics ont pu laborer des textes sans tenir compte de normes qui visaient protger la sant des consommateurs et/ou faciliter lexportation ; do aujourdhui parfois un dcalage entre lgislation et normes. Les agences de normalisation produisent galement des normes, dapplication volontaire, le plus souvent la demande des oprateurs pour le dveloppement stratgique et conomique de leurs secteurs dactivits ou pour protger leurs marchs, et la demande de ltat pour des raisons de sant publique et dinformation des consommateurs. Il sagit par exemple de lAssociation sngalaise de normalisation (ASN) au Sngal, de Malinorm au Mali ou de Codinorm en Cte dIvoire. De plus en plus, les entreprises du Nord dveloppent des normes prives dans le cadre de leurs relations commerciales avec leurs fournisseurs.

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Concernant les normes rendues obligatoires par la lgislation, le contrle de leur mise en application est une ncessit. Il en va de leur crdibilit aux yeux des oprateurs et des consommateurs. Mais cela implique un cadre juridique et rglementaire efficient, des services dinspection sur sites, des laboratoires accrdits, des systmes dassurance qualit, et, de faon transversale, du personnel, des moyens financiers, etc. ; autant dlments qui font souvent dfaut en Afrique de lOuest. Au Sngal par exemple, nombre de normes publiques nont pas donn lieu des dcrets dapplication. Des textes rglementaires imposant des critres de qualit sanitaire et/ou des obligations commerciales ne sont pas appliqus (et pas toujours applicables), et les capacits et les moyens des laboratoires sont limits. Sagissant des normes dapplication volontaire, leur contrle nest, par dfinition, pas une ncessit. La mise en place dune norme volontaire peut tre un lment dun dispositif dappui lamlioration de la qualit, notamment auprs des petites entreprises, qui ne pourraient pas continuer produire si la norme devenait obligatoire. Le respect dune norme volontaire est en outre gnralement valoris par lentreprise vis--vis de ses clients.

Enjeux des normes de qualit dans les principales filires vivrires dAfrique de lOuestLes enjeux de qualit sont prsents ici autour de plusieurs questions cls prendre en compte pour llaboration de normes de qualit au niveau rgional. Quelles sont les attentes des consommateurs ? Les consommateurs jouent un rle crucial dans les innovations mises en place par les oprateurs et lamlioration de leurs pratiques en matire de qualit. On observe, en Afrique de lOuest, lmergence dun consumrisme et dune demande pour des produits de qualit. Ce consumrisme se heurte encore de nombreuses rsistances : absence dune culture de la rclamation (faute notamment dinformations sur les produits), faiblesse du pouvoir dachat qui relgue la qualit au rang de proccupation secondaire, sentiment souvent rpandu que les problmes de sant se posent surtout aux europens, perception empirique de la qualit par les oprateurs ( mon produit

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Synthse

se vend donc il est bon, de qualit ). Mais la demande des consommateurs pour la qualit constitue une tendance structurelle, lie au mode de vie citadin (dveloppement des libres-services, de la restauration collective, etc.) et llvation du niveau de vie et dducation (information sur les risques sanitaires). La demande de qualit rsulte galement dune prise de conscience des risques sanitaires, avec la mdiatisation de cas dintoxication alimentaire dans les pays de la rgion et des crises sanitaires internationales. De plus en plus de consommateurs, de faon concomitante avec le dveloppement des associations de consommateurs, sont sensibles la qualit sanitaire, en particulier pour les viandes et les produits laitiers ( la nourriture ne doit pas rendre malade ). Les modes de qualification de la qualit renvoient la propret du vendeur et de lenvironnement, la relation de confiance avec le vendeur, au conditionnement en sachets, etc. La qualit organoleptique est galement souvent primordiale pour les produits traditionnels (couscous de mil, gari, poisson fum). Dans quels objectifs laborer des normes ? Rpondre aux enjeux de sant publique est gnralement la priorit des normes de qualit. Le risque microbiologique, li lhygine de la production de la matire premire, des prparations, du transport, du conditionnement et de la mise sur march, constitue le risque alimentaire majeur. Lamlioration de la comptitivit par la qualit est galement un enjeu essentiel. En Afrique de lOuest, la mdiocre qualit de certains18

produits pse sur leur comptitivit face aux importations sur les marchs locaux et rgionaux. Dans un contexte de libralisation, o les produits imports sont parfois de meilleure qualit, et la comptitivit des prix de plus en plus aigu, lamlioration de la qualit des produits locaux est un levier de leur comptitivit. dfaut, les consommateurs risquent de se tourner davantage vers les produits imports. Llaboration de normes de qualit peut aussi rpondre des proccupations de dfense commerciale et se traduire par une rgulation de lentre dans le secteur (autorisations, surveillance, quotas doprateurs, etc.). Quel est le niveau dadquation entre les normes et les pratiques sociales ? En Afrique de lOuest, les normes actuelles sont souvent en dcalage avec des lois et dcrets dapplication, datant pour beaucoup des annes 1960 et rarement

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Synthse

rviss depuis. Elles reprennent gnralement les normes des pays dvelopps pour les mmes produits, ou pour des produits similaires lorsquil nexiste pas de norme internationale (par exemple les produits traditionnels ferments). Or, les normes internationales refltent peu les conditions et intrts des pays en dveloppement, car ces derniers nont pas les moyens de participer efficacement aux travaux normatifs. Elles sont fondes sur des conditions de production et de commercialisation (circuits longs avec des dlais importants entre production et consommation) trs diffrentes de celles de nombreux pays africains. Le risque dadopter des normes internationales est quelles ne soient pas strictement appliques ou adaptes, quelles soient donc dcrdibilises (application tolrante ), et entranent des sanctions arbitraires. Cependant, lappui lapplication de normes internationales peut permettre de lever ce risque. Dans le secteur agricole, notamment horticole, cet appui a permis des petits producteurs de sinsrer dans des filires dexportation. Pour les produits agroalimentaires, llaboration de normes et de dcrets dapplication a permis de protger le march intrieur de certaines industries (minoterie, concentr de tomates, etc.) ou de faciliter les exportations industrielles (poisson). On observe cependant quelle na pas t utilise pour stimuler les marchs nationaux et rgionaux et dvelopper ainsi le march des petites entreprises. Quelles sont les normes sur le march europen ? Les normes europennes sont gnralement considres comme tant leves et contraignantes, voire inapplicables, pour de nombreux oprateurs des pays en dveloppement. Les normes sur la qualit sanitaire sont intgres dans des rglements et constituent des normes obligatoires (traabilit, contrle de lhygine, limites maximales de rsidus). Paralllement aux normes publiques, on observe une multiplication de codes de bonnes pratiques, mis en place par des oprateurs privs europens (par exemple GlobalGap, labor par des chanes europennes de grandes et moyennes surfaces). Lensemble de ces normes, obligatoires ou volontaires (mais de fait incontournables), compose un systme daccs au march exigeant. Quels sont les impacts conomiques des normes sur les oprateurs ? Il convient, avant ddicter des normes, de raliser des tudes dimpact ex-ante sur la situation conomique des oprateurs. Des analyses cot/bnfice doivent permettre19

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dapprcier les avantages en termes de gains ou de fidlisation des clients, de niveau de prix de vente, comme le cot financier et organisationnel de la mise en conformit. Le respect des normes de qualit permet aux oprateurs daccder de nouveaux marchs (notamment dexportation), de diffrencier leurs produits de ceux de la concurrence et de justifier un prix plus lev auprs des consommateurs. Certains segments de march, croissants et solvables, offrent aux oprateurs des opportunits damlioration de leurs revenus. Les cots de la mise en conformit renvoient principalement au risque dexclusion des oprateurs, en particulier les plus petits dentre eux, avec des consquences sur lemploi et le niveau de vie des oprateurs. Un premier enjeu porte sur la possibilit mme de respecter des normes de qualit. Par exemple, la traabilit dans la filire lait serait trs difficile mettre en place dans les mini-laiteries, du fait que la production de nombreux petits leveurs est rassemble dans un mme bidon par le collecteur. Un autre enjeu porte sur le niveau du cot de la mise en conformit, qui peut tre prohibitif ou techniquement impossible sans changement complet des modes de production pour les petits oprateurs artisanaux. Le dveloppement des normes prives tend galement favoriser les gros oprateurs et les industriels. Les oprateurs en aval prfrent contractualiser sur la base dun cahier des charges avec les plus gros fournisseurs ou intgrer la filire, avec des rpercussions fortes en termes dorganisation de la filire : la concentration des20

importateurs, des supermarchs et des distributeurs, rpond ainsi une concentration des fournisseurs, au dtriment des plus petits producteurs et exportateurs, mme si, dans certains cas, des petits producteurs ont pu tre intgrs dans des filires dexportation de produits non transforms (filires horticoles). Les cots de mise en conformit sont toutefois variables (pas ncessairement levs), et de plus en plus de programmes dappui sont proposs par les tats et/ou les bailleurs. Les facteurs de variation sont multiples : la situation de dpart des entreprises, lenvironnement institutionnel (qualit des infrastructures et des services tels que routes, nergie, accs leau potable, dispositif de gestion des dchets, etc.), la qualit des structures administratives, la mise disposition de personnel technique local, dorganismes locaux de certification, de laboratoires, et les relations entretenues avec les importateurs, etc.

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Quel dispositif institutionnel de normalisation et de promotion de la qualit mettre en place en Afrique de lOuest ? Llaboration de normes rgionales pose la difficult spcifique de lharmonisation des politiques, de la conception de dmarches et dorganismes communautaires, surtout lorsque les situations sont disparates. La rgion a mis en place, ces dernires annes, un cadre juridique relatif la qualit, notamment sanitaire, des aliments. Le Programme Qualit constitue un pas important dans ce sens, avec certains Organismes nationaux de normalisation (ONN) qui fonctionnent bien, tandis que dautres sont en dveloppement ou viennent de se crer.

Encadr 1. Le Programme Qualit de lUEMOACe dispositif a t mis en place avec ladoption dun schma dharmonisation des activits daccrditation, de certification, de normalisation et de mtrologie dans lUEMOA (rglement no 1/2005/CM/UEMOA) et la cration de trois structures :

le Systme ouest-africain daccrditation et de certification (SOAC) ; le Secrtariat rgional de la normalisation, de la certification et de la promotion de la qualit (NORMCERQ) ; le Systme ouest-africain pour la mtrologie (SOAMET). Le Programme a connu des avances significatives en matire dadoption de normes rgionales : 22 projets de normes ont t labors, dont neuf pour le secteur agricole et agroalimentaire et 33 sont au stade de lenqute publique. On peut galement citer parmi les rsultats : ladhsion de la plupart des ONN des tats membres de lUEMOA lInternational Organization for Standardization (ISO) ; lquipement de tous les ONN en matriel informatique et leur dotation en documents normatifs et rglementaires ; la formation de cadres nationaux en normalisation ; la cration dun prix rgional de la qualit. 21

La deuxime phase de ce programme comprend, dune part, un appui lUEMOA pour la mise en uvre du Rglement n 01/2005/CM/UEMOA et le renforcement des structures techniques rgionales de promotion de la qualit et, dautre part, lextension des activits du programme la CEDEAO et la Mauritanie.

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Au niveau des tats, llaboration des normes implique des cots non seulement au niveau du processus dlaboration, mais galement au niveau du contrle de lapplication de ces normes. Le systme qui prvaut en Afrique de lOuest est, en effet, un systme tatique : ladministration de ltat et ses services dconcentrs sont responsables de lapplication des normes. Celle-ci ncessite des investissements publics et un accompagnement sur la dure. Or, les tats ont des moyens limits : peu de laboratoires quips pour effectuer les analyses et/ou disposant de ressources humaines formes ; pas de systme de veille sanitaire ou dobservatoires permettant de dvelopper une approche de gestion du risque. Face la faiblesse des moyens (humains, techniques, financiers), un principe de faisabilit doit guider llaboration de normes, avec des ambitions mesures. La mutualisation des ressources lchelle de la rgion et la priorit vers des actions permettant des conomies dchelle sont galement des moyens de rduire les contraintes. Ces actions renvoient par exemple la mise en place dun centre de ressources permettant une sensibilisation des oprateurs et une diffusion de linformation (indiquant notamment quelles sont les normes locales, rgionales, sur les marchs dexportation, comment se mettre aux normes, quels sont les programmes dappui, comment y accder, quelles sont les volutions du Programme Qualit, etc.).

Valoriser la qualit : quels signes de qualit mettre en place ?22

Les marques et les labels sont des signes de conformit et de reconnaissance de la qualit, au cur dune politique de promotion de la qualit. Les oprateurs cherchent travers ces signes faire de la qualit reconnaissable pour mieux se dmarquer et se positionner sur les marchs. Cela permet la fois de garantir au consommateur lorigine et les caractristiques du produit, et au producteur de valoriser ses efforts de qualit par une meilleure rmunration. La mise en place dune marque commerciale, individuelle ou collective, implique llaboration dun cahier des charges prcis. Ce dernier stipule les exigences en matire de procds de transformation, rgles dhygine, spcifications de la matire premire, conditionnement, etc. La prise en compte des conditions de production et des attentes des consommateurs apparat primordiale dans llaboration dun cahier des charges adapt, permettant dassurer une stabilit de la qualit.

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Synthse

La valorisation de lorigine gographique, lorsquelle renvoie des caractristiques spcifiques du produit, matrielles (matire premire, terroir) ou immatrielles (savoirfaire, rputation), peut galement apporter une plus-value conomique importante. De nombreux produits traditionnels africains sont associs une origine gographique : le gari du Bnin ou du Ghana, lhuile de palme de Guine, le poisson brais du Sngal (ktiakh), loignon rouge de Galmy au Niger, etc. Lintrt des indications gographiques est la fois de valoriser les produits et de protger leur typicit. Cependant, elles ncessitent la mise en place dun dispositif technique et institutionnel lourd et coteux, ainsi quune expertise scientifique et technique. Les acteurs doivent tre organiss pour mettre en uvre une dmarche volontaire de qualification, laborer un cahier des charges avec des critres contrlables. Lappui des collectivits locales et le soutien de politiques publiques sont galement indispensables, les tats devant tre en capacit de faire des contrles, et dimposer des sanctions aux fraudeurs.

Rgles dorigine : dautres barrires non tarifaires au march europen ?Si les normes sont souvent considres comme des obstacles aux marchs du Nord, les rgles dorigine sont galement des barrires non tarifaires dterminantes. Les rgles dorigine de lUE sont considres comme tant particulirement strictes. Lobjectif pour lUE est de se prmunir contre les risques de rexportation, surtout lorsque le procd de fabrication induit de multiples intrants, comme pour les prparations et les conserves de poisson. Les pays dAfrique de lOuest, en tant que pays du groupe Afrique-CarabesPacifique (ACP), bnficient de rgles dorigine prfrentielles, notamment pour les produits de la pche. Mais la simplification de ces rgles reste un enjeu majeur dans les discussions avec lUE et dans la rforme en cours sur les rgles dorigine de lUE. ce jour, laccs hors taxe de conserves de thon au march europen ncessite que ces produits soient entirement obtenus dans les pays ACP, avec des dispositions plus favorables lUE (par exemple limmatriculation UE des navires, sachant que les pays dAfrique de lOuest ne disposent pas de flotte thonire).23

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Recommandations en matire de normes internationales et rgionalesLes normes internationales ont un niveau dexigence de qualit lev, le plus souvent en inadquation avec les capacits techniques et conomiques des acteurs privs (notamment les micro et petites entreprises) et des acteurs publics dAfrique de lOuest. Plusieurs leviers sont possibles pour assurer une meilleure adquation. Accrotre la participation aux travaux des instances internationales de normalisation permet de contribuer la dfinition des normes et de les contester le cas chant. Cela implique de disposer de moyens humains et financiers suffisants. Influer sur les normes prives constitue un levier important, qui exige de la part des oprateurs dtre structurs en organisations professionnelles et de pouvoir peser dans la ngociation avec les entreprises prives. Le renforcement des capacits des oprateurs pour se mettre niveau est un autre levier, pour lequel tats et oprateurs peuvent solliciter divers soutiens (programmes dassistance technique, protocoles daccord, jumelages, accords de partenariat public-priv Nord-Sud, etc.).

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Encadr 2. Les normes intermdiaires ou dynamiquesLlaboration de normes intermdiaires ou dynamiques (on encore transitoires) repose, dans une premire tape, sur un diagnostic prcis de la qualit des produits. Ceci suppose de raliser un nombre important danalyses microbiologiques et physico-chimiques des produits et des plats et de les mettre en relation avec les pratiques des oprateurs pour laborer des seuils ralistes, accessibles et assurant linnocuit des produits aprs cuisson. La deuxime tape consiste promouvoir des guides de bonnes pratiques dhygine, par filire ou produits, fonds sur la mthode HACCP. Ces guides peuvent aussi servir de base llaboration de manuels de procdures dans des entreprises semi-industrielles et industrielles. Ces normes peuvent tres rvises rgulirement au fur et mesure de lamlioration de la qualit pour pouvoir atteindre les niveaux des normes internationales.

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Pour llaboration de normes propres lAfrique de lOuest (en lien avec le niveau international, mais tenant compte des spcificits de la rgion), la priorit devrait porter sur les produits changs sur les marchs locaux et rgionaux. Les enjeux sont particulirement importants pour les produits traditionnels typiques, pour lesquels aucune norme internationale nexiste (gari, poisson fum, couscous de mil, graines de nr fermentes, etc.). Lapproche des normes intermdiaires ou dynamiques apparat particulirement pertinente. Il convient de rappeler que le niveau des normes en Europe ou aux tats-Unis ne sest pas construit en un jour. Il est le fruit dun durcissement progressif li une demande sociale de plus en plus exigeante. Des formations, de nombreux appuis et conseils techniques, laccs des quipements ont permis aux oprateurs de sadapter au fur et mesure la rglementation. Des investissements publics importants ont t consentis (amnagements, infrastructures, laboratoires, etc.). La mise en place de drogations des normes et de rglementations dj tablies sinscrit dans cette approche (par exemple, la drogation accorde aux producteurs fermiers reposant sur des circuits courts et la vente directe aux consommateurs dans la rglementation franaise et europenne). Cette pratique permet de diffrencier lartisanal et lindustriel en tenant compte de la diffrence de risque entre des produits artisanaux vendus dans des circuits courts et des produits industriels qui empruntent des circuits de plusieurs semaines, avec de nombreux intermdiaires. Les critres visuels (absence de moisissure, couleur, etc.) peuvent constituer des bases pour les normes intermdiaires nationales et rgionales, tandis que les critres physico-chimiques et microbiologiques sont plus difficiles mettre en place et rendre obligatoires. Il sagirait alors de privilgier de bonnes pratiques dhygine et des amnagements qui limitent les risques sanitaires. Lintrt dun montage au niveau rgional est multiple : conomie dchelle, mutualisation des ressources, incitation lintgration rgionale, harmonisation rglementaire ; mme si la contrepartie est lacceptation dune certaine perte de souverainet nationale par les tats. Il se justifie galement par des produits communs ou proches, fabriqus dans les mmes conditions dans plusieurs pays, et le commerce dj dvelopp de produits alimentaires. Cette harmonisation ne doit pas impliquer un nivellement par le bas, qui rsulterait dune comparaison mcanique des normes nationales. Outre lapplication de principes gnraux

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tels que la reconnaissance mutuelle, lquivalence, la transparence, elle peut sappuyer sur les pratiques mises en uvre par les oprateurs pour amliorer la qualit. La concertation entre lensemble des acteurs concerns (tat, oprateurs, associations de consommateurs, recherche, laboratoires, ONG) constitue un lment cl de llaboration de normes adaptes. Elle est un outil majeur pour reconnatre les acteurs et les responsabiliser, amliorer lefficacit des systmes de contrle et aller vers une approche plus prventive que curative. Le soutien des associations de consommateurs est galement important dans la perspective de favoriser un mouvement rgional de la qualit. Des incitations conomiques pour encourager les oprateurs adopter une dmarche de gestion de la qualit pourraient tre mises en place. Elles se limitent actuellement, pour lessentiel, lorganisation de prix nationaux et rgionaux de la qualit dans le cadre de politiques de promotion de la qualit. Ces prix sadressent de fait quasi exclusivement des oprateurs du secteur formel, essentiellement de gros oprateurs (socits de service et industries), laissant gnralement de ct la grande majorit des oprateurs intervenant dans le secteur artisanal et informel. Dautres mesures peuvent tre envisages, telles que des subventions, des exonrations de taxes. Des mesures daccompagnement (accs des formations, au crdit, subvention de services dexpertise) savrent galement ncessaires. Des programmes de mise niveau ont vu le jour, comme au Sngal, o des subventions et laccs des facilits de26

financements sont prvus mais les conditions et critres dligibilit (prfinancement, chiffre daffaires) favorisent galement les plus grosses structures.

Illustration sur deux filires : le gari et le poissonLanalyse des filires gari et poisson a permis de mettre en vidence des points communs. Les spcificits propres chaque filire sont rsumes dans les encadrs. La prdominance des critres visuels pour les produits artisanaux Sur les marchs locaux, on observe une grande diversit de qualit de gari et de poisson transform (fum, sal-sch, brais-sal-sch, etc.). Cette diversit

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correspond des demandes de qualit sur des critres et des niveaux diffrents. Les consommateurs sont le plus souvent sensibles aux critres visuels et aux gots, et le mode de qualification des produits repose le plus souvent sur des relations de proximit et interpersonnelles avec le vendeur. La demande de qualit sanitaire sexprime en milieu urbain, o laccs linformation sur les risques est plus important, loffre de produits plus varie et les relations plus impersonnelles. Lorsque le produit est emball (ce qui constitue dj un critre de qualit pour les consommateurs) ou provient de zones loignes, les informations sur la qualit en matire dtiquetage (date limite de consommation, composition, conditions de conservation par exemple) deviennent ncessaires. Concernant lexportation de poisson congel et de conserves de poisson (plus marginalement de poisson fum), les normes de qualit portent avant tout sur la qualit sanitaire des produits. Les exigences de la rglementation europenne et des normes prives ont oblig tats et oprateurs consentir dimportants efforts pour se mettre niveau. Des contraintes spcifiques entre filires artisanales et industrielles Le mode de fabrication du gari et de transformation du poisson destin au march africain est essentiellement artisanal et informel. Cela pose des contraintes spcifiques en matire dlaboration de normes de qualit. Les filires sont constitues de nombreux petits oprateurs, aux capacits dinvestissement limites pour apporter des changements dans leurs modes de fabrication. Linformation sur les normes et le contrle de leur respect, lorsquil sagit de normes obligatoires, sont rendus difficiles par le caractre informel des activits, mme si lidentification des oprateurs nest pas toujours une difficult (concentration des activits de transformation du poisson dans des sites proches des quais de pche, par exemple). Dans les filires halieutiques tournes vers lexportation, les oprateurs sont des industriels, aux capacits dinvestissement bien plus importantes et qui parviennent donc plus facilement rpondre aux exigences des marchs dexportation, dautant quils bnficient dappuis des tats et des bailleurs de fonds. Des enjeux de qualit diffrents lexportation et sur les marchs locaux Les diffrences dans les modes de transformation, de distribution et de consommation entre le poisson destin lexportation et celui consomm localement27

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impliquent des enjeux de qualit diffrents. Ainsi, le poisson sch-sal prsente des risques beaucoup plus faibles que le poisson frais congel. Ce dernier est distribu sur des distances plus longues et est consomm moins rapidement avec des risques de rupture de la chane du froid alors que la salaison et la fermentation limitent les risques de dveloppement microbien. Les modes de cuisson rapide et labsence de pratique de prparation avant cuisson en Europe ncessitent de surveiller plus troitement la qualit microbiologique des produits. linverse, en Afrique, les mnagres procdent plusieurs lavages, nettoyages, parfois traitements (citron, vinaigre) et font cuire longuement les produits. Les diffrences entre les filires tournes vers les marchs locaux et rgionaux et celles tournes vers lexportation militent pour le dveloppement dapproches distinctes de normalisation. Face aux contraintes auxquelles font face les artisans, il apparat difficile de reproduire les normes europennes ou internationales. Le travail de normalisation dans le secteur artisanal peut sappuyer sur les savoirfaire traditionnels des artisans ou leurs pratiques innovantes, qui permettent dassurer une certaine qualit des produits (sanitaire et organoleptique). Ces pratiques ne sont pas toujours perues par les oprateurs comme des dmarches qualit quils pourraient valoriser auprs des consommateurs, mais elles rpondent de fait des critres de qualit dans la mesure o elles contribuent rduire les risques. La norme peut consister systmatiser et professionnaliser une pratique, de mme quencourager une amlioration des pratiques (notamment par des solutions techniques) afin de conserver les caractristiques des produits tout en assurant leur innocuit.28

Dautres pratiques dangereuses pour la sant des consommateurs (et parfois des producteurs) doivent au contraire tre prohibes. Des leviers daction pour amliorer la qualit dans le secteur artisanal Les efforts effectuer doivent dsormais concerner en priorit le secteur artisanal. Pour linstant, les appuis proposs par les tats comme par les bailleurs sont surtout concentrs vers les secteurs dexportation qui sont obligs de se mettre aux normes pour ne pas perdre leurs marchs. Les produits concerns par le Programme Qualit restent principalement ceux tourns vers lexportation sur le march europen. Amliorer la qualit des produits transforms implique dlargir les interventions lamont des filires (production de manioc, pche). Cela est valable pour les produits

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lexportation (traabilit, exigences de la rglementation) comme pour les marchs nationaux et rgionaux. Lencadrement technique et financier des oprateurs apparat incontournable lorsquune norme implique de nouvelles solutions techniques. En matire de qualit sanitaire, il importe dagir au niveau des tapes critiques du procd de fabrication (par exemple la fermentation pour le gari), mais aussi sur lenvironnement de fabrication du produit. Des investissements publics sont ncessaires pour amliorer les sites de fabrication, le plus souvent dans un tat dinsalubrit important. Les appuis en matire dquipement et dinfrastructures auprs des institutions en charge de la normalisation et de la qualit sont aussi importants que le renforcement de capacits. La difficult faire respecter une norme ne vient pas ncessairement dun dficit de dispositif ou de moyens humains, mais dquipement pour faire fonctionner le dispositif (quipement informatique, matriel danalyse, vhicules, laboratoires, etc.).

ConclusionLanalyse gnrale et ltude des deux filires (gari, poisson) montrent que les efforts de normalisation sont surtout dicts par la ncessit de maintenir des dbouchs lexportation vers lUE. Ce prisme tend laisser lcart un secteur artisanal, qui joue un rle essentiel dans lemploi et la lutte contre la pauvret et dans lapprovisionnement des marchs africains. Lenjeu, dans ce secteur, est de passer de procds traditionnels, visant la qualit organoleptique, et relativement adapts des circuits courts, dautres pratiques permettant datteindre des marchs plus loigns, tout en assurant linnocuit des produits. Les milliers de petits oprateurs artisanaux ne sont pas en mesure, dans limmdiat, dappliquer les procdures industrielles et les normes internationales. Ils dveloppent par ailleurs diverses pratiques pour amliorer la qualit de leurs produits, mieux les valoriser et ainsi saisir les opportunits rmunratrices offertes par la segmentation croissante des marchs. Lapproche des normes intermdiaires ou dynamiques, fondes sur les pratiques sociales et la notion de progressivit dans le niveau des normes, apparat particulirement pertinente. La concertation entre lensemble des acteurs pour dfinir les critres de qualit et les guides de bonnes pratiques dhygine est primordiale. La mise en place dincitations conomiques et de mesures daccompagnement (formation, quipement des laboratoires danalyse et des services de contrle, etc.) doivent complter le dispositif.29

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Encadr 3. La filire gariIl existe de nombreux garis, en fonction de la varit des tubercules utiliss et du mode de prparation. Trois techniques sont couramment utilises : la technologie traditionnelle rpage manuel, la technologie traditionnelle rpage mcanis et la technologie semimcanise (tamis vibrant, dfibreuse, schoir gaz, etc.). Quelle que soit la technologie, certaines tapes du processus de fabrication sont dterminantes pour assurer une qualit sanitaire et organoleptique. La fermentation est cruciale pour liminer la toxicit du gari, et rpondre aux critres organoleptiques de qualit (nuances de texture, de got et de couleur en fonction de la dure de fermentation). La matrise de la cuisson est importante pour rduire la teneur en eau, favoriser une bonne conservation et prvenir les moisissures. Lenvironnement de la production, le conditionnement et le transport sont galement des aspects essentiels de la qualit. Le gari est gnralement fabriqu en plein air, sur des sites o il ny a pas dinstallations sanitaires ni deau courante, o les effluents ne sont habituellement pas collects, les pluchures pas toujours rcupres, ce qui favorise la prolifration des insectes et des ravageurs. Le conditionnement est ralis dans des conditions dhygine trs insatisfaisantes (pas de salle de conditionnement, pas de port de gants de travail, etc.).

Des normes sur le gari existent au niveau du Codex Alimentarius et au niveau national au Bnin et au Ghana. Les critres physico-chimiques se retrouvent dune norme lautre mais 30 une harmonisation simpose sur les limites admises. Dans les faits, le respect des normes varie sensiblement dun type de gari un autre et suivant les critres. Pour les petits artisans, la qualit sentend avant tout comme la qualit de la relation avec le client : un produit de qualit est un produit pour lequel il ny a pas de plainte ou de rclamation. Les proccupations en matire dhygine alimentaire portent beaucoup sur les conditions dinsalubrit des sites de fabrication, non pas tant pour lamlioration de la qualit des produits, juge bonne par les oprateurs, que pour celle des conditions de travail. Certaines units semi-industrielles sinscrivent dans une dmarche de qualit pour rpondre aux exigences des marchs (supermarchs nationaux, marchs extrieurs africains, europens et/ou amricains). Ces types doprateurs collaborent avec des chercheurs pour la mise au point des nouveaux procds et doutils de gestion de la qualit, notamment lHACCP. Des exportateurs officiels de gari demandent galement des analyses de contrle de conformit.

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Les consommateurs ont gnralement des exigences faibles en matire de qualit nutritionnelle et sanitaire. Cependant, la catgorie croissante de consommateurs des classes aises, voire moyennes, rsidant essentiellement dans les villes, est sensible aux modes de qualification indirecte (aspects sanitaires, nutritionnels, origine, marque, etc.), et non pas seulement aux modes de qualification directe (aspects sensoriels).

Les oprateurs dveloppent des pratiques pour rpondre ces demandes de qualit. Il existe un savoir-faire traditionnel. On observe le dveloppement de formes de traabilit (origine du manioc bien connue des transformatrices), de standardisation de la qualit par le mode dorganisation (transformatrices travaillant toujours avec le mme client), de promotion de lorigine gographique (gari de la rgion de Savalou au Bnin), de conditionnement en sachet, denrichissement nutritionnel ou dajout dautres produits, et damliorations technologiques (rpeuse, presse, cuiseurs, etc.). Ces pratiques peuvent permettre aux oprateurs de mieux vendre leurs garis. Le gari en sachet se vend dans les supermarchs de Cotonou entre 375 et 550 FCFA/kg contre 150 200 FCFA/kg pour le gari vendu en vrac. Le gari haut de gamme de Savalou se vend autour de 550 FCFA/kg. Le prix du gari enrichi avec du sucre, du lait concentr ou du lait de coco peut atteindre 850 FCFA/kg.

Des normes sur le gari adaptes au contexte, donc tenant compte de son caractre artisanal, peuvent consister en une standardisation de certaines pratiques dj favorables la qualit. Il peut sagir par exemple de spcifier des standards sur la dure de la fermentation en fonction des types varitaux et des types de gari fabriquer. Lappui aux oprateurs est toutefois ncessaire. Les cots de changements techniques et organisationnels peuvent tre levs (connaissance, formation, quipement, relations entre les acteurs de la filire, etc.). Les cots sociaux peuvent galement tre importants. En Cte dIvoire, les principaux freins ladoption de machines industrielles renvoient aux cots financiers (pour des performances juges non convaincantes par certains oprateurs), et aux cots sociaux quimpliquerait le renvoi de 300 400 journaliers. Au Bnin, plusieurs groupements de femmes bnficient dappuis techniques et financiers des structures gouvernementales, des ONG ou des chercheurs pour produire du gari ordinaire conditionn en emballage, ainsi que du gari enrichi. 31

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Encadr 4. La filire poissonLe poisson est consomm et chang sous une large gamme de formes suivant les marchs de consommation. Pour le march rgional, il sagit essentiellement de poisson sal-sch, ferment, fum et brais-sch. Le poisson congel est galement export par le Sngal et la Mauritanie dans la sous-rgion. La filire pour la consommation rgionale est artisanale, largement informelle et domine par les femmes, qui oprent le plus souvent individuellement et parfois en groupement. Pour le march europen, les exportations sont principalement du poisson congel et en conserves (thon) en provenance du Sngal, de la Mauritanie et de la Cte dIvoire. Des exportations de poissons fums, braiss et schs, destination du march de niche ethnique (demande des migrants), tendent se dvelopper. Il sagit dune filire industrielle, dans laquelle interviennent gnralement de gros oprateurs du secteur formel (ils doivent tre certifis), sauf en amont (pche artisanale).

Les enjeux de qualit pour le poisson se posent ds ltape du dbarquement, dans le dlai entre la capture et la transformation pour viter sa dgradation. Pour les poissons destins aux marchs locaux et rgionaux, des enjeux spcifiques se posent au niveau des sites et des techniques de transformation. Les sites prsentent de nombreux vecteurs dinsalubrit : mauvais amnagement, vtust des locaux, problmes dapprovisionnement en eau et en lectricit, attaques dinsectes au moment du schage, absence de systmes de gestion des dchets, etc. Certaines femmes en viennent adopter des pratiques 32 dangereuses pour la sant, telles que lutilisation de pesticides, comme le DDT, pour viter les infestations du poisson par des insectes, ou de sachets en plastique pour le braisage lorsque les ressources en bois sont insuffisantes. En matire de procd de transformation, lhumidit finale du poisson est un critre important matriser, qui dpend de la dure et de la conduite du fumage (type de fumoir, bois utilis) ou de la dure et de la technique du salage. La qualit organoleptique dpend aussi du type de salage (taille des cristaux, quantit de sel) et de schage. Pour le march europen, les enjeux de qualit renvoient la difficult de respecter les normes europennes aux tapes de fabrication du poisson congel (tempratures prcises).

Le dispositif rglementaire et les normes sur le poisson sont bien tablis au Sngal et en Cte dIvoire. Mais les textes sont souvent anciens, calqus sur ce qui se fait en France

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ou en Europe, et ne couvrent pas les produits artisanaux de manire dtaille et exhaustive. Sur le march europen, les normes sanitaires exigent des entreprises exportatrices des obligations de moyens (infrastructures de production), de rsultats quant aux produits et de contrle exercs par les autorits comptentes (depuis janvier 2006 les laboratoires danalyse doivent tre munis dune accrditation reconnue au niveau international). Les contrles sont dans lensemble bien effectus pour lexportation, mais ils sont bien plus rares concernant le secteur artisanal. De fait, les oprateurs exportant vers lUE sont en conformit avec les normes europennes (taux de rejet des analyses limit). Au contraire, les pratiques artisanales sont gnralement loignes des normes existantes et peuvent poser de srieux problmes de sant publique.

Les attentes en matire de qualit sont encore peu exprimes par les oprateurs du secteur artisanal comme par les consommateurs. Les transformatrices artisanales ont surtout des revendications concernant lamnagement des sites et laccs des technologies amliores (subvention, crdit dinvestissement). Les oprateurs mettent toutefois en uvre de nouvelles pratiques pour amliorer la qualit sanitaire des produits. Dans la filire industrielle, au Sngal, ltat a trs tt entrepris une politique de mise aux normes des entreprises de pche industrielle, actuellement tendue la pche artisanale. Dans la filire artisanale, lamnagement des quais de pche (installation de fabriques de glace, de chambres froides, etc.) comme des sites de transformation (eau, lectricit, assainissement, etc.) sobserve le long de la cte. Des innovations sont galement ralises dans les pratiques de transformation (fours parpaing et fours chorkor au lieu du braisage terre). 33 Les amliorations ralises en matire de qualit profitent en partie lensemble des oprateurs, comme par exemple les investissements sur les sites. Cependant, elles engendrent aussi de nouveaux cots (cotisations, transport de laire de dbarquement au site de transformation, stockage). Une normalisation de ces changements sans mesures daccompagnement pourrait entraner lexclusion de nombreux petits oprateurs. La plupart des propritaires ayant bnfici dappuis pour squiper en fours sont des hommes autrefois peu prsents, qui captent un march porteur chappant aux femmes (en raison notamment de leurs difficults daccs des crdits moyen-terme). Certains groupements butent aussi sur la contrainte de solvabilit de la demande intrieure et sur les difficults de se lancer dans lexportation pour largir les dbouchs.

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Les appuis de ltat, des ONG et des bailleurs de fonds, en matire de mise niveau des oprateurs de la filire artisanale sont une ncessit. Dans la filire industrielle dexportation vers lUE, les entreprises ont bnfici dappuis consquents (par exemple le Programme SFP financ par lUE Strengthening Fishery Products Health Conditions). Mme si des difficults persistent avec lextension de la rglementation europenne la pche artisanale, la ncessit daccrditer les laboratoires, le risque dviction, le dispositif dappui est bien en place et ractif. Des incitations conomiques sont galement proposes. En Cte dIvoire, toute entreprise du secteur thonier exportant au moins 80 % de sa production vers lUE peut bnficier dexonrations ou dabattements de droits et taxes (sur leau, llectricit, le tlphone et les produits ptroliers). linverse, le secteur artisanal de la transformation a peu bnfici dappuis au Sngal comme en Cte dIvoire.

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Quality standards for agrifood products are spreading in West Africa. This trend is partially structural. It is related to the growing demand by African consumers, in connection with rising standards of living and urbanisation. It is also imperative because standards are increasingly a decisive element in the agricultural and food trade. Operators must take standards into account to ensure export outlets. Applying quality standards can also be a way for operators to better showcase their products and increase their incomes when they have the production and the organisational capacity to do so. In West Africa, the regional development of quality standards and the promotion of quality is being accomplished within the Quality Programme, adopted in WAEMU in 2005 and currently being expanded within ECOWAS. The level of standards and their elaboration must be considered carefully, so that standards can act as an incentive for improving operators competitiveness and increasing their incomes while satisfying consumers demands. This synthesis summarises a study on the development of quality standards in West Africa. It is illustrated by two examples of commodity chains: one for fish; and the other for gari (also known as cassava or manioc). These products are exported respectively to the European Union (EU) and are widely consumed in the region. Interviews of state services, operators, consumers and research-and-development organisations were conducted in Senegal, Cte dIvoire, Benin and Ghana. The goal is to use these case studies to shed light on the challenges and questions related to setting standards, and to offer a tool (in the form of fact sheets), to aid the decision35

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making of those in charge of setting standards in West African countries and within the various bodies of the Quality Programme.

Quality Standards: What Are They?Quality standards for agrifood products encompass all aspects of quality: sanitary quality, organoleptic or sensory quality, technical quality (calibre, grading, colour, etc.), nutritional quality, and quality control and management (market preparation, traceability, HACCP methods, labelling, etc.). This vast field also relates to the promotion of quality, and in particular to how quality is signified (labels, geographical indications). Standards can concern products, processes and production methods, as well as regulations on packaging, marking and labelling. Set by government authorities, they are in most cases destined to be included in laws and regulations. When standards are included in such legal texts, compliance to them becomes mandatory. One should note that in the past in Africa, government authorities were able to establish laws and regulations that were not based on standards for protecting consumer health and/or facilitating exports, and today this sometimes leads to a disconnect between laws and standards. Standardisation agencies also issue standards whose application is voluntary, usually at the request of operators attempting to protect their markets, or for the strategic and economic development of their sector, as well as for reasons of36

public health and consumer information. Some of these agencies are the Association Sngalaise de Normalisation (ASN) in Senegal, MALINORM in Mali, and CODINORM in Cte dIvoire. Increasingly, companies in the North are setting private standards in the context of commercial relationships with their suppliers. In regard to standards made mandatory by law, verifying compliance is a necessity; credibility in the eyes of operators and consumers depends on it. But this implies an effective legal and regulatory framework, on-site inspection services, accredited laboratories, quality control systems, and across-the-board staff and financial means all of which are often lacking in West Africa. In Senegal, for example, many public standards do not have application decrees. Regulations that impose sanitary quality criteria and/or commercial obligations are not always enforced (and not always enforceable), and laboratories have limited capacities and resources.

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In regard to voluntary standards, their verification is by definition not a necessity. Setting up voluntary standards can be an element in a quality improvement support system, notably for small companies that could not continue production if the standards became mandatory. Furthermore, companies usually publicise compliance to voluntary standards to their clienteles.

Issues Underlying the Development of Quality Standards in the Major Food-Commodity Chains of West AfricaThe issues underlying the development of quality standards are presented below, centred on several key questions that should be taken into account when elaborating standards at the regional level. What Do Consumers Expect? Consumers play a crucial role in the innovations applied by operators and in improving the quality of operators practices. The emergence of consumerism and demand for quality products can be seen throughout West Africa. This consumerism still runs up against much resistance: lack of a service-complaint culture (due notably to a lack of product information); low purchasing power that makes quality a secondary concern; an often widespread feeling that health concerns are mostly an issue for Europeans; and an empirical perception of quality among operators (my product sells, therefore it is good quality). But consumers demand for quality is a structural trend connected to an urban lifestyle (the growth of self-service shops, restaurants, etc.) and rising standards of living and levels of education (information on sanitary risks). The demand for quality also comes from a new awareness of health risks, given media coverage of food-poisoning cases in the region and international health crises. Simultaneously, with the growth of consumers associations, more and more consumers are sensitive to sanitary quality, in particular for meat and dairy products (food should not make you sick). Methods of qualifying quality refer to the cleanliness of the seller and surroundings, a trusting relationship with the seller, packaging in bags, etc. Organoleptic quality is also often primordial for traditional products (millet couscous, gari, smoked fish).37

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Why Elaborate Standards? Responding to public health concerns is generally the main priority of quality standards. Microbiologic riskwhich is linked to hygiene in the production of raw materials, product preparation, transportation, market preparation, and saleis the major food risk. Improving competitiveness through quality is also a crucial concern. In West Africa, the mediocre quality of certain products harms their competitiveness in local and regional markets in relation to imports. In the context of liberalisation, when imported products are of sometimes better quality and price competition is more and more acute, improving the quality of local products can help increase their competitiveness. If quality is not improved, there is a risk that consumers will turn increasingly to imported products. The establishment of quality standards can also be a response to tradeprotection concerns, and they can be expressed as sector-entry regulation (authorisations, supervision, operator quotas, etc.). How Well Do Standards Fit Social Practices? In West Africa, current standards often do not match laws and application decrees, many of which date from the 1960s and have rarely been revised since then. They generally copy developed countries standards for the same products or similar products when international standards do not exist (for example, traditional fermented products). Yet, international standards reflect only few of the conditions and interests of developing38

countries since they do not have the means to participate effectively in setting standards. International standards are based on production and sales conditions (long distribution circuits with lengthy delays between production and consumption) that are very different for numerous African countries. The risk of adopting international standards is that they may not be strictly applied or adapted and would thus lose credibility (tolerant application) and bring about arbitrary sanctions. However, supporting the application of international standards can limit this risk. In the agricultural sector, notably horticulture, this support has enabled small farmers to enter export sectors. For agrifood products, setting standards and issuing application decrees has made it possible to protect the domestic market for some industries (the milling industry, tomato paste, etc.) or facilitate industrial exports (fish). One can note, however, that the application of standards has not been used to stimulate national and regional markets and to develop the small enterprises market.

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What Are the Standards on the European Market? European standards are generally seen as high and restrictive, even inapplicable, for numerous operators in developing countries. Sanitary quality standards are included in regulations and are part of the mandatory standards (traceability, hygiene inspections, maximum residue limits). In parallel with public standards, there has been an expansion in the codes of practice, fostered by private European operators (for example, GlobalGap, developed by European supermarket and superstore chains). The full set of these standards, both mandatory and voluntary (but unavoidable in practice), results in a demanding market-access system. What Economic Impact Do Standards Have on Operators? Before setting standards, one must conduct ex ante impact assessments of the operators economic situation. Costbenefit analyses must allow for the evaluation of the advantages, in terms of clientele growth or loyalty, and sales prices, as well as the financial and organisational cost of compliance. Compliance with quality standards allows operators to access new markets (notably export markets) and differentiate their products from their competitors in order to justify higher prices for consumers. Some growing and solvent market segments offer operators opportunities to increase their incomes. The costs associated with compliance primarily raise the issue of the risk of excluding operators, especially the smallest, with consequences on employment and operators standard of living. A first challenge involves the very possibility of complying with quality standards. For example, traceability in the dairy sector would be very difficult to set up in mini-dairies because the milk produced by numerous small farmers is placed in the same milk cans by collectors. Another challenge involves the amount that compliance would cost, which may be prohibitive or technically impossible without completely altering the modes of production for small, non-industrial operators. The development of private standards also tends to favour large operators and industrialists. Downstream operators prefer to sign contracts based on a set of specifications with the largest suppliers, or to integrate the commodity chain, which has hefty repercussions on commodity chain organisation. The concentration of importers,39

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supermarkets and distributors is echoed by a concentration of suppliers, to the detriment of the smallest producers and exporters, even though in some cases (horticultural commodity chains) small producers have been able to enter unprocessedproduct export chains. The costs of compliance are, however, variable (and not necessarily high), and states and/or donors offer more and more support programmes. There are multiple factors in the variation of this cost: companies starting situations; the institutional context (quality of infrastructure and services such as roads, energy, access to drinking water, the waste-management system, etc.); the quality of administrative structures; the availability of local technical staff, local certification bodies and laboratories; relationships with importers, etc. What Type of Institutional System for Standard-Setting and Quality Promotion in West Africa? The establishment of regional standards poses specific difficulties in terms of policy harmonisation, method design, and community organisation, especially when situations are diverse. In recent years, the region has established a legal framework for food quality (notably sanitary quality). The Quality Programme is an important step in this direction, with some national standardisation bodies (NSBs) that already work well, and others under development or newly created.40

At the national level, the setting of standards implies costs for the standardsdevelopment process and for standards enforcement. The prevailing system in West Africa is in fact a state system: the government and its decentralised services are responsible for standards application. This requires public investments and long-term support. Yet, states have limited resources: few laboratories are equipped to conduct the tests and/or have trained human resources; and there are no sanitation-monitoring systems or observatories that would make it possible to develop a risk-management approach. The second phase of the Quality Programme includes: 1/ support to WAEMU for the implementation of Regula-tion No 01/2005/CM/UEMOA and strengthening regional technical structures for quality promotion on the one hand, and 2/ extending the activities of the programme to ECOWAS and Mauritania on the other hand.

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Box 1. WAEMUs Quality ProgrammeThis system was set up via the adoption of a harmonisation schema for accreditation, certification, standardisation and metrology activities in WAEMU (Regulation No. 1/2005/CM/UEMOA), and the creation of three structures:

The Systme Ouest Africain dAccrditation et de Certification (SOAC), or the West African Accreditation System; The Secrtariat Rgional de la Normalisation, de la Certification et de la Promotion de la Qualit (NORMCERQ), or the Regional Secretariat for Standardisation, Certification and Quality Promotion; and The Systme Ouest Africain pour la Mtrologie (SOAMET), or the West African Metrology System.

The Programme has made significant progress towards the adoption of regional standards: 22 standards have been drafted, nine of which are for the agricultural and agrifood sector, and 33 are at the public enquiry stage. Among the results, one can also cite: the adhesion of most WAEMU countries national standards bodies (NSBs) to the ISO; the equipping of all NSBs with computer equipment and the provision of standards and regulatory documents to them; the training of national executives in setting standards; and the creation of a regional quality award. 41

Faced with limited means (human, technical and financial resources), the principle of feasibility must guide the development of standards, with moderate ambitions. The regional pooling of resources and prioritising actions that allow economies of scale are also means to lessen costs and constraints. These actions involve, for example, setting up a resource centre to raise operators awareness and to disseminate information: what the local and regional standards are; what they are for export markets; how to comply with the standards; what support programmes exist and how to access them; what changes have been made to the Quality Programme, etc.

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Showcasing Quality: What Signs of Quality Can Be Established?Brands and labels are signs of compliance and the recognition of quality, and they are at the heart of a policy designed to promote quality. Through these signs, operators seek to make quality recognisable in order to better differentiate themselves and to better position themselves within markets. Brands and labels make it possible both to guarantee the origin and characteristics of a product to consumers, and give value to producers efforts to improve quality by providing them with higher remuneration. Establishing a commercial brandwhether individual or collectiveimplies creating specific specifications. They stipulate requirements for processing processes, hygiene rules, raw material specifications, market preparation, etc. Taking into account production conditions and consumer expectations is primordial when elaborating appropriate specifications that make it possible to ensure a degree of stability in product quality. Showcasing geographic origin when it evokes specific product characteristics, either physical (raw materials, land) or intangible (know-how, reputation), can also provide considerable economic value-added. Numerous traditional African products are associated with a geographic origin: gari from Benin or Ghana; palm oil from Guinea; roast-dried fish (kethiakh) from Senegal; Galmy red onion from Niger, etc. The aim of geographical designations is both to showcase products and protect their typical42

features. However, such designations require the establishment of a heavy and costly technical and institutional system, as well as scientific and technical expertise. Actors must be organised to implement a voluntary qualification process and develop specifications with verifiable criteria. The support of local governments and the backing of government authorities are also indispensable, since states must be able to conduct verifications and impose penalties for fraud.

Rules of Origin: Another Non-Tariff Barrier to the European Market?While standards are often viewed as obstacles to Northern markets, rules of origin are also decisively non-tariff barriers. The EUs rules of origin are seen as particularly

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strict. The EUs objective is to protect itself from the risks of re-exportation, especially when the production procedure uses multiple inputs, such as for prepared or conserved fish. Since they are part of the Africa-Caribbean-Pacific (ACP) group, West African countries benefit from preferential rules of origin, notably for fishery products. However, simplifying these rules is still a major focus in discussions with the EU and in the current reform of EU Rules of Origins. Today, tax-free access to the EU market for canned tuna requires these products to be entirely obtained in ACP countries, with provisions that are more favourable to the EU (for example, allowing EU registration of ships, given that West African countries do not have a tuna-fishing fleet).

Recommendations on International and Regional StandardsInternational standards demand high levels of quality, which are not usually suited to the technical and economic capacities of private (notably micro and small enterprises) and public actors in West Africa. Several levers are possible to ensure better suitability. Increased participation in the work of international standards bodies would make it possible to contribute to the definition of standards and contest them if needed. This implies having sufficient human and financial means. Influencing private standards is an important lever, one that requires operators to be structured in professional organisations and be able to have a say in negotiations with private companies. Capacity building for operators to upgrade their processes is another lever, one for which states and operators can request various forms of support (technical assistance programmes, memoranda of understanding, twinning, North-South public-private partnership agreements, etc.). In elaborating standards specific to West Africa (in connection with international standards but taking into account the regions particularities), priority should go to products traded on local and regional markets. The stakes are particularly important for typical traditional products for which there are no international standards (gari, smoked fish, millet couscous, fermented nitta grains, etc.). The intermediate, or dynamic, approach to standards seems particularly relevant.43

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Box 2. Intermediary, or Dynamic, StandardsSetting intermediary or dynamic (or even transitional) standards depends in the first stage on a precise diagnostic of product quality. This implies conducting a large number of microbiological and physicochemical tests on products and dishes and connecting them to operators practices, in order to establish realistic thresholds that are accessible and that ensure the innocuousness of products after cooking. The second stage consists of promoting good hygiene guidelines for each sector, based on the HACCP method. These guidelines can also be used as the basis on which to develop procedural manuals at semiindustrial and industrial companies. These standards can be revised regularly, as quality improves, to attain the level of international standards.

It is appropriate to remember that European or American standards were not established overnight. They are the result of progressive tightening in connection with increasingly exacting social demand. Training courses, a large amount of support and technical advice, and access to equipment have allowed operators to adapt to44

evolving regulations. Large public investments have been made (developments, infrastructures, laboratories, etc.). The establishment of exemptions to already existing standards and regulations is part of this approach (for example, the exemption granted to farmers relying on short commodity chains and direct sale to consumers in French and European regulations). This practice makes it possible to differentiate between nonindustrial and industrial products, taking into account the different level of risk between non-industrial products sold via short commodity chains and industrial products that have commodity chains lasting several weeks and involve numerous intermediaries. Visual criteria (lack of mould, colour, etc.) can form the basis of national and regional intermediary standards, while physicochemical and microbiological criteria are more difficult to establish and make mandatory. In this case, the goal is to foster good hygiene practices and changes that limit sanitary risks.

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There are multiple reasons why the regional establishment of quality standards is interesting: economies of scale, pooling of resources, encouragement of regional integration, regulatory harmonisation, etc., even though the corollary is that states must accept a certain loss of national sovereignty. The regional approach is also justified by shared or similar products produced under the same conditions in several countries, and the already developed food trade. This harmonisation must not imply levelling down, which would be the result of a mechanical comparison of national standards. In addition to the application of general principles, such as mutual recognition, equivalence and transparency, regional standards can be based on the practices operators already use to improve quality. Consulting all those involved (states, operators, consumer associations, research, laboratories, NGOs) is a key element in setting suitable standards. Consultation is a major tool to acknowledge actors and make them accountable, improve the efficiency of verification systems and move towards an approach that focuses more on prevention then on remedy. The support of consumer associations is also important toward the prospect of fostering a regional quality movement. Financial incentives to encourage operators to adopt quality-management methods could be set up. Such incentives are currently limited mainly to the provision of national and regional awards for quality within the framework of quality-promotion policies. In practice, these awards almost exclusively address formal sector operators, mainly large operators (service companies and industries), and generally ignore the vast majority of operators in cottage industries or the informal sector. Other measures can be envisaged, such as subsidies or tax exemptions. Support measures (access to training and credit, subsidised expertise services) are also necessary. Upgrading programmes have been launched, as in Senegal where subsidies and access to financing facilities exist, but their terms and eligibility criteria (pre-financing, turnover) also favour the largest operators.45

Examples of Two Commodity Chains: Gari and FishAn analysis of the commodity chains for gari and fish reveals commonalities. The specificities of each commodity chain are summarised in the boxes below.

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The Predominance of Visual Criteria for Non-Industrial Products On local markets, one can see a wide range of quality for gari and fish (smoked, salt fish, roasted salt fish, etc.