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6 Croissance des gouttelettes dans les nuages chauds 6.1 Croissance par diffusion Les gouttelettes de nuage grandissent par diffusion de la vapeur d'eau vers la goutte. La vapeur d'eau est transférée vers la goutte par diffusion aussi longtemps que la pression de vapeur environnante est supérieure à la pression d'équilibre de la goutte. Quand la vapeur se condense il y a dégagement de chaleur latente, ce qui augmente la température de la goutte et diminue sont taux de croissance. La goutte devient plus chaude que son environnement et il y a de la diffusion de chaleur vers l'environnement. La condensation est ainsi un processus de diffusion double. La vapeur d'eau se diffuse vers la goutte et de la chaleur se diffuse vers l'environnement. Dans le cas de l'évaporation d'une goutte, le processus se renverse. La diffusion de la vapeur se réalise vers l'environnement et la chaleur de l'environnement vers la goutte. En premier, nous allons trouver une équation de croissance d'une seule goutte qui existe dans un champ de vapeur d'extension infinie. Considérons une gouttelette dont la taille dépasse la valeur r*. La gouttelette continue à grossir par condensation des molécules d'eau si la pression partielle de la vapeur dans l'air environnant dépasse la tension de vapeur de l'air autour de la gouttelette. Soit une gouttelette de rayon au temps t: L'équation de diffusion de la vapeur d'eau est où on considère que D v ne dépend pas des coordonnées spatiales x i . Dans des conditions de stationnarité, le flux 25

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6 Croissance des gouttelettes dans les nuages chauds

6.1 Croissance par diffusion

Les gouttelettes de nuage grandissent par diffusion de la vapeur d'eau vers la goutte. La vapeur d'eau est transférée vers la goutte par diffusion aussi longtemps que la pression de vapeur environnante est supérieure à la pression d'équilibre de la goutte. Quand la vapeur se condense il y a dégagement de chaleur latente, ce qui augmente la température de la goutte et diminue sont taux de croissance. La goutte devient plus chaude que son environnement et il y a de la diffusion de chaleur vers l'environnement. La condensation est ainsi un processus de diffusion double. La vapeur d'eau se diffuse vers la goutte et de la chaleur se diffuse vers l'environnement. Dans le cas de l'évaporation d'une goutte, le processus se renverse. La diffusion de la vapeur se réalise vers l'environnement et la chaleur de l'environnement vers la goutte.

En premier, nous allons trouver une équation de croissance d'une seule goutte qui existe dans un champ de vapeur d'extension infinie.

Considérons une gouttelette dont la taille dépasse la valeur r*. La gouttelette continue à grossir par condensation des molécules d'eau si la pression partielle de la vapeur dans l'air environnant dépasse la tension de vapeur de l'air autour de la gouttelette.

Soit une gouttelette de rayon au temps t:

L'équation de diffusion de la vapeur d'eau est

où on considère que Dv ne dépend pas des coordonnées spatiales xi. Dans des conditions de stationnarité, le flux de masse de la vapeur d'eau, , sur une sphère de rayon r (la gouttelette d'eau) est égal au flux de vapeur au travers de la surface de la goutte:

En intégrant de la surface de la goutte jusqu'à l'infinie (une distance assez loin de la goutte pour pouvoir être considéré comme un environnement non perturbé) et en supposant nous obtenons:

le taux de croissance stationnaire sera

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La chaleur latente libérée par condensation à la surface de la goutte sera diffusée vers l'environnement selon l'équation de diffusion de la chaleur:

La variation de la masse peut être donnée en termes de changement de rayon:

La combinaison des deux équations de diffusion détermine le taux de croissance d'une goutte par diffusion. Mason (1971) obtient une expression approximative pour le taux de croissance par diffusion:

Quand S<1 cette équation décrit l'évaporation d'une goutte. Dans cette équation la croissance de la goutte dépend seulement des conditions de l'environnement (S,T,p) et n'exige pas la connaissance de la température de la goutte. Notez que, dans cette équation, on a négligé les effets de solution et de courbure. Ces effets sont négligeables quand la goutte dépasse la taille de quelques microns.

Le terme K représente le terme thermodynamique associé à la conduction de la chaleur, et D est associé à la diffusion de la vapeur. La conductivité thermique K la diffusivité Dv de la vapeur varient avec la température.

Comme K et D dépendent de la pression et de la température, l'intégration analytique est impossible. Si on considère que les conditions ambiantes demeurent constantes nous pouvons obtenir la variation de r dans le temps avec S, K et D constants:

On voit que la croissance est parabolique, ce que veut dire que le taux de croissance du rayon diminue avec la valeur de r. La distribution de la taille des gouttelettes a tendance à devenir plus étroite.

Exemple:

t0 t0 + t

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r1 = 1 m

r2 = 10 m

r1 = 10 m

r2 = 14 m

Si alors la gouttelette s'évapore. Nous pouvons calculer la distance

parcourue par une goutte de taille r avant d'évaporer complètement. La figure 6.1 montre graphiquement la distance parcourue par une goutte, en fonction de sa taille, en chute dans un environnement sous-saturé (S = 0.8) et isotherme (T = 280 K)

0.000001

0.000010

0.000100

0.001000

0.010000

0.100000

1.000000

10.000000

100.000000

1000.000000

10000.000000

1 10 100 1000Original Drop Radius (m)

Fall

Dist

ance

(m)

Figure 6.1 : Distance parcourue par une goutte en fonction de sa taille avant son évaporation totale. S = 0.8 et T = 280 K. (P. Durkee)

6.2 Croissance d'une population de gouttelettes

Dans les nuages naturels, toute une population de gouttelettes croit simultanément et est en compétition pour la vapeur d'eau disponible pour la condensation (sursaturation). Lorsque les gouttelettes sont assez nombreuses et grosses, le taux de condensation aurait tendance à dépasser le taux de production de la sursaturation et le processus de croissance s'arrête.

La sursaturation se réalise dans la nature principalement à cause du refroidissement adiabatique dû à l'ascension des particules d'air. L'augmentation de la sursaturation à un

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temps donné est déterminée par le taux de production et le taux de condensation selon l'expression:

où est la vitesse verticale de l'air et est le taux de condensation mesuré en kilogramme de matière condensée par kilogramme d'air, par seconde.

6.2.1 Profil du rapport de saturation (S)

Au dessous de la base du nuage S < 1, et le taux de «consommation», C, est très petit ou nul. La variation du rapport de saturation avec z devient pratiquement égale aux taux de production, P.

Au niveau de condensation S = 1. Au dessus de ce niveau les premiers noyaux de condensation sont activés et la «consommation» de vapeur d'eau, C, augmente à cause de la formation de gouttelettes dont le rayon est supérieur au rayon critique.

S continue d'augmenter mais à un taux de plus en plus petit.

Quand le taux de production est exactement égale au taux de «consommation», c'est-à-dire, la population de gouttelettes «consomme» tout l'excès de vapeur par rapport à la saturation. L'activation de nouveaux noyaux de condensation s'arrête, la concentration de gouttes atteint sa valeur maximale et S = Smax.

À partir de ce niveau, le rapport de saturation diminue, le taux de consommation est supérieur au taux de production.

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Toutes les gouttelettes dont le rayon est inférieur au rayon critique s'évaporent, celles dont le rayon est supérieur grossissent. Le taux de «consommation» tend à diminuer et s'approche de la valeur du taux de production. À un moment donné il s'établit un équilibre entre la production d'excès de vapeur et la condensation sur les gouttes activées dont la taille devient de plus en plus uniforme.

7 Formation de la précipitation dans les nuages chaudsUn nuage chaud c'est celui où les conditions thermodynamiques sont très peu propices à la formation de la phase solide. Le mécanisme responsable de la formation de gouttes précipitantes (pluie) est la collision suivie de coalescence entre les gouttelettes de nuage. Les collisions se produisent entre gouttes se déplaçant à des vitesses différentes. La différence de vitesse entre les gouttes est essentiellement due aux différences de masse. Les plus grandes gouttes tombent plus vite que les petites gouttes, et, dans sa trajectoire, entrent en collision avec un certain pourcentage de plus petites gouttes rencontrées dans son espace de balayage. Supposant qu'une goutte de rayon R, dont la vitesse terminale est U tombe à travers une population de gouttelettes de rayon r et de vitesse terminale u, le volume balayé, par unité de temps au sein de ce nuage est . Le rapport entre le nombre de collisions et le nombre de gouttes rencontré dans le volume géométrique balayé par la goutte collectrice est l'efficacité de collision entre les gouttes de rayon R et les gouttelettes de rayon r. Cette efficacité de collision dépend surtout des rayons de la goutte collectrice et des gouttes collectées.

7.1 Vitesse de chute des gouttes

La vitesse de chute des gouttes dépend des forces exercées sur celles-ci. Les forces agissant sur une goutte sont la force de frottement, , et la force de gravité, . En assimilant une goutte à une sphère se déplaçant dans un fluide visqueux nous pouvons écrire l'équation de mouvement de la goutte:

,

La grandeur de la force de frottement exercée dans une sphère de rayon r, se déplaçant dans un fluide de densité , avec une vitesse u, relativement au fluide est donnée par:

où CD est le coefficient de traînée qui caractérise la circulation. En termes de nombre de Reynolds où est la viscosité dynamique du fluide, prend la forme:

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D'autre part la grandeur de la force gravitationnelle exercée sur la goutte est

où est la densité de la sphère. Dans le cas de l'eau et l'expression de la force gravitationnelle peut être représentée avec une bonne approximation par

Dans la situation d'équilibre, puisque ces deux forces ont des directions opposées, , la goutte tombera à sa vitesse terminale. Dans ce cas

Dans le cas de très petites sphères (petit nombre de Reynolds) . La vitesse de chute des gouttes sera alors

où . Cette dépendance quadratique entre la vitesse et le rayon est appelée «loi de Stokes» et est valide pour les gouttes de rayon inférieur à 40 m.

Expérimentalement on arrive à la conclusion que pour des nombres de Reynolds assez élevés, CD devient indépendant du nombre de Reynolds, et sa valeur est de 4,5. La vitesse d'équilibre des gouttes de grande taille ( r > 0.6 mm) sera alors :

où , où est la densité de l'air et une densité de

référence de valeur 1,2 kg/m3 (densité de l'air à la pression de 1013 mb et à la température de 20 C). Ce régime est applicable aux gouttes de taille supérieure à 0.6 mm.

Dans l'intervalle de tailles on obtient une formule approximative

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où .

Le tableau 7.1 nous donne un résumé des calculs présentés ci-dessus:

Tableau 7.1 : vitesse des gouttes d'eau en fonction de leur taille

taille vitesse (cm/s), r (cm)

u = 1.19x106(cm-1s-1) r2

u = 8x103(s-1) r

u = 2.01x103(cm1/2s-1) r1/2

Pour des gouttes de pluie on utilise les valeurs expérimentales de Gunn et Kinzer (1949), représentées graphiquement dans la figure 7.1.

Figure 7-1 Vitesse terminale des gouttes de nuage et de pluie. (Gunn and Kinzer, 1949)

7.2 Collision

La figure 7.1 et le tableau 7.1 montrent que les gouttes tombent à des vitesses variables dépendant de leurs tailles. Les plus grosses gouttes tombent plus rapidement que les

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petites et peuvent entrer en collision avec les gouttes, plus petites et plus lentes, qui se trouvent dans leur trajectoire. La collision n'est cependant pas assurée, à cause des forces d'inertie et aérodynamiques.

L'efficacité de collision entre une goutte de rayon R et une goutte de rayon r, , est donnée par la probabilité qu'un goutte de rayon R ait une collision avec

une gouttelette de rayon r qui se trouve dans sa trajectoire.

figure 7.1 : la probabilité de collision entre une goutte de rayon r1 et une goutte de rayon r2

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Figure 7-3 : efficacité de collision entre paires de gouttes de tailles R et r. Les courbes sont étiquetées avec la taille de la goutte collectrice. (Klett and Davis, 1973)

7.3 Coalescence

Une collision ne garantit pas la coalescence. Quand une paire de gouttes entre en collision plusieurs interactions sont possibles;

1. elles peuvent rebondir et maintenir leur identité (rebondissement)

2. elles peuvent s'unir pour former une goutte (coalescence)

3. elles peuvent s'unir temporairement et se séparer en maintenant leur identité (au moins apparemment) (coalescence temporaire e séparation)

4. l'union peut se faire temporairement et être suivie de l'éclaboussement de la goutte en plusieurs petites gouttes de tailles complètement différentes aux tailles initiales (coalescence temporaire et éclatement)

Le type d'interaction dépend de la taille des gouttes et de leur trajectoire. D'autres facteurs, comme la présence de charges électriques, ont aussi un rôle dans ce processus.

Le rapport entre le nombre de collisions et le nombre de collisions suivies de coalescence défini l'efficacité de coalescence entre les gouttes collectrices et les gouttes collectées. L'efficacité de collection est le produit de l'efficacité de collision par l'efficacité de coalescence.

,

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Pour des gouttes de taille inférieure à 100 m les interactions prédominantes sont les interactions 1 et 2. Des études en laboratoire ont montré que les collisions entre les petites gouttelettes de nuage était suivies de coalescence, amenant à la conclusion que l'efficacité de coalescence entre les gouttelettes de nuage est pratiquement 1. Le taux de croissance de gouttelettes par coalescence, gouverné par l'efficacité de collection, se réduit donc à déterminer le taux de collision entre une population de gouttelettes.

7.4 Croissance par collision continue

Le volume balayé par unité de temps par une gouttelette de rayon R, gouttelette collectrice, est donné par:

Le nombre de gouttelettes d'un rayon compris entre r-dr/2 et r+dr/2, collectées et capturées par unité de temps, est donné par :

Le taux d'augmentation du volume de la gouttelette de rayon R est alors:

Puisque , en termes d'augmentation de taille nous avons :

si

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où wl est le contenu en eau liquide du nuage (kg d'eau / kg d'air sec), a la densité de l'air sec et rl le rapport de mélange d'eau liquide. De plus

où w est la vitesse verticale de l'air,

Si w est petit

Comme l'efficacité de collection et la vitesse terminale augmentent avec la taille, le taux de croissance par collection augmente rapidement avec la taille des gouttes collectrices. La figure 7.4, compare la croissance par diffusion et la croissance par collection, en fonction du rayon des gouttelettes.

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Figure 7.4 : taux de croissance des gouttelettes par condensation et collection en fonction de leur rayon. La ligne en tiret représente la croissance par diffusion seulement et la ligne de points représente la croissance par collection uniquement. La ligne solide représente la croissance due aux deux mécanismes de croissance. La croissance par diffusion diminue avec l'augmentation du rayon, tandis que la croissance par collection augmente avec le rayon.

Le taux de croissance par condensation (diffusion) diminue avec le rayon, pendant que le taux par collection augmente avec celui-ci. Pour des rayons supérieurs à 25 m, le taux de croissance est essentiellement dû à la collection de gouttelettes. La figure 7.4 montre l'existence d'un intervalle de taille de gouttes, entre 10 et 25 m, où le taux de croissance est très lent. Selon les équations de diffusion, un embryon de goutte prend 1 à 2 heures à atteindre la taille de 20 m. Or, dans la nature, la précipitation se forme bien plus rapidement. En 15 minutes un nuage peut se former et précipiter. Les gouttes doivent atteindre plus rapidement la taille de 25 m que ce qui est prédit par les mécanismes étudiés.

L'équation de croissance par diffusion ne prend pas en considération la turbulence et l'entraînement que provoquent des variations spatiales du taux de sursaturation. Ces deux phénomènes contribuent à élargir le spectre des tailles de gouttes.

Dans la collection continue ont a fait aussi des hypothèses simplificatrices. On a supposé que la goutte collectrice entre en collision de façon continue avec des gouttes plus petites distribuées uniformément dans l'espace et dans le temps. En réalité, les collisions sont des événements individuels statistiquement distribués dans l'espace et dans le temps. Le modèle de croissance par collection stochastique tient compte de cette réalité.

7.5 Croissance stochastique

Le modèle de croissance stochastique prend en compte les aspects statistiques de la collection et de la coalescence. Dans ce modèle, on suppose que certaines gouttes, favorisées statistiquement, ont des taux de croissances supérieurs à d'autres gouttes

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initialement de même taille. On peut parler de «gouttes chanceuses». La figure 7.5, illustre de façon schématique, cette théorie.

Figure 7.5 : Dans une population de 100 gouttes égales et dans l'intervalle de temps de 1s, 10% des gouttes ont une probabilité 1 de collectionner d'autres gouttes et les 90% restantes, une probabilité 0. Après 1 seconde, 10 gouttes ont augmenté leur taille, pendant que 90 maintiennent leur taille initiale. Après 2 s, il y aura 3 tailles de gouttes différentes: 1 de taille plus élevée, 81 de taille initiale et 9 de taille intermédiaire.

Le processus stochastique est particulièrement important au début (les première 20 collisions). Une fois que le spectre est élargi et que les plus grosses gouttes atteignent des taille supérieures à 25 m, la collection devient essentiellement continue.

8 Croissance des particules de glace

8.1 Croissance par diffusion

Dans un nuage mixte dominé par les gouttelettes surfondues, l'air est proche de la saturation par rapport à l'eau liquide et se trouve donc sursaturé par rapport à la glace. Par exemple:

T (C) Sw (%) SI (%)

-10 100 110

-20 100 120

Ces valeurs sont plus fortes que les sursaturations de l'air nuageux par rapport à l'eau liquide qui ne dépasse que très rarement 1 %. Par conséquent, dans les nuages mixtes, les

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particules de glace peuvent grandir par déposition de vapeur beaucoup plus rapidement que le peuvent les gouttelettes.

Les facteurs qui contrôlent le taux de croissance d'un cristal de glace par déposition de vapeur sont identiques à ceux qui contrôlent la croissance d'une gouttelette par condensation. Cependant, le problème est plus compliqué parce que les cristaux ne sont pas sphériques et, par conséquent, les points d'égale densité de vapeur d'eau ne décrivent pas des sphères centrées sur le cristal comme cela se passe dans le cas d'une gouttelette.

Pour le cas particulier d'une particule de glace sphérique de rayon r nous pouvons écrire par analogie:

où est la densité de vapeur au voisinage de la surface du cristal et les autres symboles sont définis comme auparavant. Nous pouvons trouver une expression plus générale de cette équation pour un cristal de forme arbitraire en utilisant l'analogie entre le champ de vapeur autour du cristal et un champ de potentiel électrostatique autour d'un conducteur chargé de même taille et de même forme. La fuite de charges à partir du conducteur (l'analogue du flux de vapeur se rapprochant ou s'éloignant du cristal) est proportionnelle à la capacité électrostatique C du conducteur, exprimée en farads, qui est entièrement déterminée par la taille et la forme du conducteur. Pour une sphère (en unités SI):

où est la permittivité du vide (8.85x10-12C2N-1m-2). En utilisant cette relation nous pouvons écrire l'expression du taux de croissance d'un cristal sphérique:

Cette expression est générale et peut être appliquée à un cristal de taille quelconque et de capacité C.

Capacités électrostatiques (a est la demi-longueur de l'axe majeur et b la demi-longueur de l'axe mineur)

Sphère

Disque plate

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Prolate sphéroïdale

Oblate sphéroïdale

Si la tension de vapeur dans l'environnement n'est pas trop différente de la tension de vapeur saturante au-dessus d'une surface plane de glace et si le cristal de glace n'est pas trop petit, nous pouvons écrire:

où et .

Figure 8-2 Variations de GISI avec la température.

Les variations de avec la température dans le cas d'un cristal de glace grossissant dans l'air saturé par rapport à l'eau sont montrées dans la figure 8.1. Ce produit atteint une valeur maximale vers 15 C ce qui est essentiellement dû au fait que la différence entre les tensions de vapeur saturante par rapport à l'eau et par rapport à la glace est maximale à cette température. En conséquence, des cristaux de glace grossissant par déposition de vapeur dans un nuage mixte auront une croissance maximale aux températures proches de -15 C. Les cristaux de glace grossissant par condensation solide peuvent avoir des formes variées (figure 8.2). Cependant, le mode de base est soit du type de plaque soit du type prisme. Les cristaux de type plaque les plus simples sont les plaquettes hexagonales

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simples et les cristaux de type prisme les plus simples sont les colonnes solides à section droite hexagonale.

Des études détaillées de la croissance des cristaux à partir de la phase vapeur en laboratoire et dans les nuages naturels ont montré que la structure d'un cristal de glace est déterminée par la température à laquelle il se forme. Pour des températures comprises entre 0 et -50 C le mode de croissance change trois fois. Ces changements ont lieu à -4, -10 et -22 C (figure 8.3). Quand l'air est sursaturé par rapport à l'eau, les modes de croissance sont modifiés. Les cristaux de glace sont exposés à des températures et à des sursaturations qui changent continuellement pendant leur chute à travers le nuage. Ainsi, même lorsque le seul mode de croissance est la déposition, la forme des cristaux peut être très complexe.

Figure 8.3 Diverses formes de particules de glace

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Figure 8-4 : Modes de croissance des cristaux de glace en fonction de la température et de la sursaturation par rapport à la glace.

8.2 Croissance par givrage: grêlons

Dans un nuage mixte, les particules de glace peuvent grossir par collection de gouttelettes surfondues qui se congèlent à leur contact. Ce mécanisme est appelé croissance par accrétion ou par givrage de gouttelette surfondues. Quand l'accrétion est suffisante il devient difficile de discerner la forme initiale du cristal de glace. La particule givrée est alors appelée particule de neige roulée ou de grésil suivant sa structure et sa densité. Les particules de neige roulée (opaques et de densité comprise dans l'intervalle de 0.1 à 0.7) sont formées par congélation rapide des gouttelettes surfondues rencontrées. Elles contiennent un grand nombre de bulles d'air qui diffusent la lumière et donnent à la glace une apparence opaque. Les particules de grésil (glace transparente, densité entre 0.7 et 0.9) sont formées par congélation lente de l'eau et contiennent peu de bulles d'air.

Par analogie à la croissance par collection uniforme des gouttelettes de nuage, l'équation de croissance d'une particule de glace par collection uniforme de gouttelettes surfondues s'écrit:

41

(fom KCY)

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où m est la masse de la particule de gaz, est une valeur moyenne du coefficient de collection, est le contenu en eau liquide du nuage, et R et u( R ) sont respectivement le rayon et la vitesse de chute de la particule de glace.

Le coefficient de collection est influencé d'une part par les problèmes aérodynamiques reliés à l'efficacité de collision, et d'autre par l'adhérence après collision des gouttelettes surfondues à la particule de glace. ces deux aspects du problème ne sont pas bien connus. Cependant puisque les cristaux de glace tombent plus lentement que les gouttelettes de même masse, il semble approprié prendre l'efficacité de collection plus grande que dans le cas d'un nuage chaud.

Les grêlons représentent un cas extrême de la croissance des particules de glace par accrétion. Ils se forment dans les nuages convectifs vigoureux qui ont un fort contenu en eau liquide. avec des conditions très rigoureuses des grêlons de plus de 15 cm de diamètres et de plus de 600 g ont été observés. Si un grêlon collecte des gouttelettes surfondues à un taux trop important, sa température de surface atteint 0 C par libération de chaleur latente de congélation et une partie de l'eau collectée reste liquide. La surface du grêlon se recouvre alors d'une couche d'eau liquide et le grêlon subit une croissance humide. dans ces conditions, une partie de l'eau liquide peut être perdue dans le sillage du grêlon mais une autre partie peut être incorporée dans la structure eau-glace pour former la grêle spongieuse.

Si on coupe une tranche mince dans un grêlon et qu'on la regarde par transparence, on aperçoit généralement une structure d'oignon constituée de couches sombres alternées de couches claires. les couches sombres sont constituées de glace opaque contenant un très grand nombre de petites bulles d'air et les couches claires dont la glace ne contient que très peu de bulles d'air. La glace claire se forme en générale lors d'une croissance humide.

Figure 8.4 : Certains grêlons sont constitués de lobes très prononcés. Le développement de ces lobes peuvent être des régions ayant une forte efficacité de collection des gouttelettes.

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Un aspect important de la croissance par givrage est la chaleur latente libérée lors de la congélation des gouttes surfondues collectées. Grâce à ce chauffage, la particule de glace peut devenir plusieurs degrés plus chaude que l'environnement.

8.3 Croissance par agrégation

Le troisième mécanisme de croissance de particules de glace dans les nuages se produit par collision et agrégation des particules entre elles. Les particules peuvent rentrer en collision si leurs vitesses de chute sont différentes.

Figure 8.5 Vitesses terminales des particules de glace mesurées par Nakaya et Terada. (Fletcher, 1962)

La vitesse de chute d'un cristal non givré de type prisme augmente avec la taille. Au contraire, les cristaux non givrés de type plaque ont des vitesses de chute relativement indépendantes du diamètre. En conséquence, deux cristaux non givrés de type plaque ont une très faible probabilité de rencontre sauf s'ils sont suffisamment proches l'un de l'autre pour être influencés par les effets de sillage.

La vitesse de chute des cristaux givrés et des particules de neige roulé dépend fortement de leur degré de givrage et de leurs dimensions. Le nombre de collisions entre particules de glace augmente en présence de givrage.

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Le deuxième facteur qui influence la croissance par agrégation est la possibilité d'adhérence des particules après collision. La probabilité d'adhérence est déterminée essentiellement par le type de particule et par la température. Les cristaux de forme complexe comme les dendrites, adhèrent facilement les uns aux autres parce qu'ils s'entrelacent lors de la collision, alors que deux plaquettes tendent plutôt à rebondir. La probabilité d'adhérence augmente avec la température et devient très importante pour des températures supérieure à -5 C.

8.4 Formation de la précipitation dans les nuages froids

Dans les nuages froids, les précipitations (pluie ou neige) peuvent être initiées par la formation des cristaux de glace. En appliquant l'équation de croissance par diffusion (condensation solide) au cas d'une plaquette hexagonale dans un nuage liquide, saturé par rapport à l'eau liquide et à la température de -5 C, on obtient une augmentation de masse d'environ 7 g en une demi-heure. Cette masse correspond à la masse d'un cristal de 1 mm de diamètre. Cependant la seule croissance des cristaux par diffusion au dépens des gouttelettes d'eau n'explique pas la formation de gouttes de pluie. La croissance des cristaux se poursuit par collection. Contrairement au taux de croissance par diffusion, le taux de croissance par collection augmente avec la taille de la particule. Un calcul simple montre qu'une plaquette hexagonale de 1 mm de diamètre tombant dans un nuage contenant 0,5 gm-3 d'eau liquide surfondue peut par accrétion donner naissance à une particule de neige roulée sphérique de 1 mm de diamètre au bout d'environ 10 minutes. Une telle particule, avec une densité de 0,1, a une vitesse de chute d'environ 1 m/s et donne, après fonte, une goutte de 460 m de diamètre.

Le diamètre d'un flocon de neige peut augmenter de 1 mm à 1 cm par agrégation dans sa chute dans un nuage de contenant 1 g m-3 de cristaux de glace, dans 30 minutes. Ce flocon, de masse de 3 mg et une vitesse de chute de 1 m/s, formera, après fonte, une goutte de 2 mm de diamètre.

Ainsi la croissance des cristaux de glace, dans les nuages mixtes, d'abord par diffusion de vapeur d'eau, puis par accrétion et agrégation peut produire des particules suffisamment grosses pour précipiter, en intervalles de temps comparables à ceux passés par les particules dans les nuages (environ 30 à 40 minutes).

Le rôle de la phase solide dans la production des précipitations dans les nuages froids est clairement montré par l'observation radar des bandes brillantes. Ces bandes, qui correspondent à des échos de forte intensité, sont observés dans les régions de fonte de glace. Les cristaux de glace en fondant se recouvrent d'une pellicule d'eau qui augmente leur réflectivité radar. Lorsque les particules sont complètement fondues, elles se transforment en gouttes d'eau de petite taille et leur vitesse de chute augmente, si bien que la concentration de particules est réduite. Ces transformations entraînent une forte diminution de l'écho radar sous la région de fonte.

9 RéférencesWanda Szyrmer : notes de cours SCA

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Page 21: 5 Croissance des gouttelettes dans les nuages chaudsweb.sca.uqam.ca/~eva/SCA3641/documents/doc_word/P…  · Web viewDans le cas de l'eau et l'expression de la force gravitationnelle

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