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Aproposdel’auteur

Après avoir travaillé comme professeur de fitness et développeur informatique, Gayle Callen atrouvé savoiedans l’écriturede romances.Figurant régulièrementdans lesmeilleuresventesdeUSAToday,elleaécritplusdevingtromanspourHarperCollins,quiluiontvaludesrécompensestellesqueunHoltMedallion,unLaurelWreathAward,unBooksellers’BestAward,etquiontététraduitsdansplusdeonzelangues.Mèrede troisenfants,habiledesesmains,chanteusedudimanche,amatricedugrandair, Gayle vit àNewYork avec son chienUma et sonmari et héros, Jim. Elle écrit également de laromancecontemporainesouslenomd’EmmaCane.

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J’aimeraisdédicacercelivreauxanimauxdecompagnie,quienrichissentnosviesetnousapportenttantdejoie.Atoimonadorablechien,Apollo,pourtonregardtristeetimplorant

chaquefoisquejepenseêtretropfatiguéepourmarcher,pourcollertestrente-cinqkiloscontremoipendantlesfroidessoiréesd’hiver,etpourcesformidablespromenadesdanslesboisoùjete

regardecouriravecundélicieuxabandon.Tevoirdormirlesquatrepattesenl’airmefaittoujoursrire.

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Chapitre1

Grande-Bretagne,1727

RionaDuffs’éveillaensursaut,complètementdésorientée.Pendantquelquessecondes,ellenesutplusoùelleétait.Unebougieposéesursatabledenuitéclairaitd’unelueurvacillantesonlitàbaldaquinetunepartiedelaporte.

Maiscen’étaitpassachambre.Oùdoncétait-elle?Lessouvenirsremontèrenttrèsvite:ellen’étaitplusàLondres,lavilleoùelleavaitpassélaplus

grandepartiedesavie.SesparentsétaientpartisenvoyagedanslesuddelaFranceavecsajeunesœurdesantéfragile,lalaissantrejoindrelafamilledesononcledansleNord,àYork.

Soudain,elleentenditungonddeportegrincer.Ellesefigea.Laporteàcôtéd’elleétaitsolidementfermée,cequisignifiait…

Lamainpuissanted’unhommes’abattitbrusquementsursabouche.Elle écarquilla les yeux et cria, mais son cri fut étouffé. Des odeurs de chevaux et de sueur se

mêlaient à celle de sa propre peur. Elle avait beau essayer de se débattre pour se dégager, elle étaitentravéeparlesdrapsetlescouverturesainsiqueparlebrasdel’hommequilaclouaitaumatelas.Soncœuraffolésemblaitvouloirbondirhorsdesapoitrinetantlaterreurl’étourdissait.

—Jenevousferaiaucunmal,grommelal’hommed’unevoixbourrue.Il s’était exprimé avec un accent écossais, lemême qui perçait encore dans la voix de son père

malgrétoutescesannéespasséesenAngleterre.—J’ôteraimamaindevotrebouchesivousmepromettezdenepascrier,continua-t-il.Elle balaya la pièced’unœil affolé.Même si elle distinguait le contour de sa tête, la bougie se

trouvaitderrière lui,plongeantsonvisagedansl’ombre.Il lasurplombaitdetoutesahauteur, telleunemontagne.Ils’étaitintroduitdanssachambredepuislebalcon:sesintentionspouvaientêtre…multiples.

Illasecoualégèrement,etellepoussaunpetitcridefrayeur.—Ai-jevotreparole,jeunefille?N’ayantpaslechoix,elleacquiesça.L’hommeécartaalorssamainmaispassonbras,quientravait

toujourssoncorps,lourdetmenaçant,luifaisantprendreconsciencedesaproprefragilité.—Quevoulez-vous?demanda-t-elled’unevoixétrangléeet tremblante. Jen’ai riendevaleurà

vousdonner.Ilsvouscapturerontsi…—Silence!Sontimbre,bienquebas,étaitprofondetinquiétant.—Vousallezveniravecmoi.Ill’obligeaàseredresser.Danssamainpuissante,sonavant-brasluifaisaitl’effetd’unebrindille.

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—Où…oùm’emmenez-vous?demanda-t-elle,horrifiée.L’attirantplusprès,illasecouadenouveau.—Jerépondraiàvosquestionsplustard.Enattendant,plusunmottantquenousneseronspasloin.Il tira sur ses bras pour la mettre sur pied, comme si elle était une poupée de chiffon. Riona

s’aperçut alors àquelpoint il ladominaitde sa taille imposante.Son largecorpsétaitd’unenoirceurimpénétrable.Elletremblaittellementqu’elleenvacilla.Ellenepouvaitqu’espérerquequelqu’unvienneà son secours, mais son agresseur avait fait très peu de bruit, et elle savait que personne ne semanifesterait.Saprésencechezsononclen’étaittoléréequeparobligationfamiliale,riendeplus.Cat,sacousine,seseraitinquiétéepourelle,maiselleétaitpartieàlacampagnechezdesamis.

—Jevousaiapportédesvêtements,dit-ilenpressantunballuchoncontresonventre.Mettez-les.Horrifiée,elleouvritlabouchepuispinçaleslèvres,essayantdeparaîtrepluscourageusequ’elle

nel’était.—Jenevaispasmedévêtirdevantvous!protesta-t-elle.—Oh!maisjenevousledemandepas.Contentez-vousd’enfilercetterobesurvotrechemisede

nuit.Jevousaimêmeapportéunjupon.Jesaisquelesladiesenportent.—Mespropresvêtements…—…sont tropbeauxet tropdélicats. Ilsrisquentd’attirer l’attentionsurnous.Dépêchez-vous,à

moinsquevousnevouliezquejevousaide.Rionaretintsonsoufflel’espaced’uninstant,puissoupiradesoulagementquandillalâcha.Prenant

sèchementleballuchon,ellesetournaetleposasurlelit.Ellenetrouvapasdecorset,cequirisquaitdelui donner l’allure d’une femme demauvaise vie,mais elle ne voyait pas comment elle pouvait s’enplaindre.Elleenfilalejuponentissurugueuxetl’attachaautourdesataille.Contrairementàsespropresjupons,celui-cinepossédaitpasdecerceaux.Ellesesentitrougirensachantquecethomme,cetétranger,setenaitderrièreelle,témoindecetactesiintime.Saservanteluiauraitdélicatementpassélesvêtementsau-dessusdelatête.Ellen’avaitpasl’habitudedes’habillerseule.

Maisilfallaitqu’ellesedépêche,souspeinedelevoirmettresamenacedel’aideràexécution.Larobeenlaineavaitundécolletécarré.Ellen’étaitpasboutonnéesurl’avantetétaitdépourvuede

plastron.L’hommeavaitavant toutchoisiune tenuepratique.Tandisqu’ellepositionnait la robesur lejupon,elleeutlasurprisedesentirlesmainsdel’hommeserrerleslacetsdanssondos.Elleneputrienfairepourl’enempêcher.

Ilposaensuitelesmainssursesépaulesetlapoussaverslaporte-fenêtrequimenaitaubalcon.Ellefit deux pas, l’esprit envahi d’images effrayantes. Elle serait agressée, tuée. Et jamais personne neretrouveraitsoncorpstorturéetmeurtri.Oualorsondemanderaitunerançonàsononcle,quisesouciaittroppeud’ellepourlapayer,ouàsesparents,troploinpourrépondre.L’hommeavait-ilunearme?Ilnel’avaitmenacéed’aucune,etcedétaill’incitasoudainàfairepreuved’audace.

Sanscriergare,ellefitunbondsurlecôté,etl’hommelalâcha.Ellesepritmalheureusementlespiedsdansl’ourletdelajupeenessayantdeseredresserpourgagnerlaporteencourant,maisillasaisitparlatailleetlasoulevadusolavantdelaplaquercontresontorse.Elleluidécochadescoupsdepiedfurieuxetn’ygagnadenouveauquesamainenbâillon.

—Çasuffit,dit-ild’unevoixsévèrecontresonoreille.Ill’entraînasansménagementverslaporte-fenêtre.Elleneputalorsquefouetterl’airdecoupsde

piedauxquelssonravisseurparaissaitaussiinsensiblequ’untroncd’arbreauxcoupsdebecd’unoiseau.Elle lui attrapa les cheveux et tira de toutes ses forces. Il se contenta de jurer sans interrompre sonavancée inexorable vers le balcon, balayé par l’air frais de l’été. Riona était habituée aux bruits deLondres,aupassagedesvoituresàtouteslesheuresdelanuit,auxcrisdesmarchandsambulantsetdeleursclientsavantleleverdel’aube.Maislamaisondesononclesetrouvaitàl’écartducentre-ville,et

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York était aussi silencieuseque la lande, comme s’ils étaient lesderniershabitants aumonde.Elle sesentitsoudainenvahieparunsentimentdedésespoiretdesolitude.

Lorsquesonravisseuratteignitleborddubalconetsepenchaau-dessus,elleretintsonsouffle.Lademi-luneéclairaitlejardinplongédanslapénombre.

Ellefutprisedevertige.Non, ilnepouvait toutdemêmepasl’avoirobligéeàs’habillerpour lapousserdanslevide!

Elle aperçut alors la lueur d’une lanterne qui s’éteignit rapidement, puis les contours sombres etanguleux d’une voiture. Deux chevaux noirs s’écartèrent de la bâtisse et s’avancèrent à l’aplomb dubalconavantdes’immobiliserdocilement.

—Jevaisvous faireglisser jusqu’aucocher, luimurmura l’hommedans lecreuxde l’oreille.Sivousvousdébattez,vousrisquezdetomber,etnousvoulonsévitercelatouslesdeux,n’est-cepas?

Elleacquiesçamais,quandilôtalamaindedevantdesabouche,elleréponditd’unevoixrauqueetsèche:

—Pourquoifaites-vouscela?Jen’aiaucunevaleurpourvous.Unerançon…—Jeneveuxpasderançon.Taisez-vous!Les premières larmes roulèrent sur ses joues, lorsqu’elle le vit tirer sur une corde fixée à la

balustrade.Etait-ilmontéparlà?Ellenepouvaitpasfairedemême!—Ilyauneboucleauboutdelacorde,expliqua-t-il.Vousallezmettrevospiedsàl’intérieur,etje

vousferaidescendre.Maintenant,montezsurlabalustrade.Rionapoussaunpetitcrienlesentantposerlesmainsautourdesatailleetlasouleverdusolpour

l’obligeràs’asseoirsurl’étroiterampeenpierre.Maisc’étaitcelaourisquerdetomberetdesebriserle cou. Elle ferma les yeux en grognant, se sentit vaciller et accueillit avec reconnaissance la poignefermedel’hommesurseshanches.

—Non,soupira-t-il.Çanemarcherapas,jelevoisbien.—Danscecas,laissez-moietpartez.Jenediraiàpersonnecequis’estpassé!Elle ouvrit les yeux et fut prise une nouvelle fois de vertige devant l’enceinte du jardin qui

s’étendaitdanslapénombreetleventquiselevait.Elleétaitcommeétourdieparlechocetl’incrédulité.—Certainementpas!Vousêtesmapromise,jeunefille.Sapromise?Ellen’eutpasletempsd’imaginercequ’ilentendaitparlà.Aumêmemoment,ilsauta

surlabalustradeàcôtéd’elleavecl’agilitéd’unchat,choseétonnantepourunhommedesataille.—Jevaisdevoirvousporter.Maintenant,nebougezpasouvousnoustuereztouslesdeux.—Meporter…,balbutia-t-elle,horrifiée.Sansunmot, il lachargeasursonépaulecommeunsacdegrain.Elleatterritdurement la têteen

bas,contresondos,avecunpetitcridesurprise.Lelendemain,elleauraitcertainementdesbleus!Lemondesemitàtournoyerautourd’elle.Lalainerêchedumanteaudel’hommefrottaitcontresabouchetandisquesonbraslaretenaitparlescuisses.Ilsepenchapoursaisirlacorde.

—Attention,mademoiselle,oubiencelarisquedefinirmalpournous!Pour la première fois, son ton lui parut vraiment menaçant, comme s’il refusait que ses bêtises

l’envoientavecelleau-devantd’unemortaffreuse.Ellesentitlesmusclesdesontorseetdesondosseraidiravecforce.Ilcommençaàselaisserglissersurlecôtédubalcon,puisenroulalespiedsetlesbrasautourdelacordeavantdedescendredoucementverslesol.

Rionafermalesyeuxets’agrippadesdeuxmainsàsonmanteau,tropterrifiéepourfaireautrechosequeprier.Etsoudain,toutfutterminé.Elleputalorsremercierlecield’avoiratteintlaterreferme,mêmesiellenepouvaitpasvraimentlasentir,caraussitôtl’hommelapoussasansménagementàl’intérieurdelavoitureoùelleatterritdurementsurlabanquetteencuir.Tandisqu’elleseredressaitpéniblement,illaregardadepuislaportière.Seslargesépaulesempêchaientlespâlesrayonsdelunedepasser.

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—Soyezunegentillefilleetrestezcalme,sivousnevoulezpasdecompagniecesoir,laprévint-ild’unevoixdure.

Puisilclaqualaportière.L’intérieurdel’habitaclen’étaitpaséclairé,et lesdeuxfenêtresétaientoccultéespardelourdsrideauxencuir.Rionasetrouvaitdansuneobscuritétotale.Atâtons,elletrouvalapoignée,maiscelle-ciétaitbloquéedel’extérieur.Frustrée,ellelasecouadésespérémentavantdesereplier sur la banquette, les bras enroulés autour des épaules. Bientôt, la voiture s’ébranla avant des’élancersurlachausséepavéejustedevantlademeuredesononcle.

Elleétaittrophébétéepourpleurer.Elleétaitprisonnièrededeuxhommesetelleignoraitcequ’ilsallaient lui faire.Amoinsquequelqu’unaitassistéà la scène—maisellen’entendaitaucunsignedepoursuite—,elleétait seuleavecces étrangers.Ellepouvait rester assise etmortifiéeouchercherunmoyendes’évader.

Elleessayadenouveaud’ouvrir laportière,maismême le rideauencuirsemblaityêtreattaché.Toujoursàtâtons,elletrouvadescouvertures,descoussinsetdesbougiesdanslecompartimentsouslesbancs des vêtements, mais pas d’armes ou d’allumettes. Ces hommes ne voulaient certainement pasqu’ellemettelefeuàlavoiture,songea-t-elletristement.

Elledécouvritaussiunebouteilledecidrebouché,dufromageetquelquechosequiressemblaitàdupainqu’ellemordilladuboutdesdents.Celaavaitungoût…d’avoine.Ellesesouvintalorsquesonpèreluiavaitparlédecesgalettesd’avoinequiconstituaientlabasedel’alimentationdesEcossais.

Pourquoi avait-elle été enlevée par un Ecossais ? Sa première réaction fut de vouloir jeter lanourriture dans un geste de colère,mais elle allait avoir besoin de toutes ses forces. Animée par unsentiment de fureur et d’impuissance, elle essaya de percer les ténèbres tout autour d’elle, ses yeuxs’habituantpeuàpeuàl’obscurité.Dansundernieréland’espoir,ellesejetadetoutsonpoidscontrelaportière,commeelleavaitvuunjourundomestiquelefairepourouvriruneportecoincée,maiselleneréussit qu’à se faire mal à l’épaule. Sans compter qu’elle aurait pu partir la tête la première sur lachaussée…

Pendant un long moment, elle se tint aux aguets, prête à bondir dès que la portière s’ouvrirait.Lorsqu’elle sentit sespaupièresdevenir lourdes,elle tapadespieds, se frotta lesbras, secoua la tête.Maislavoitureavançaitinexorablementsuruneroutedeplusenplusaccidentée.Finalement,bercéeparle roulisduvéhicule, elle sentit sa tête s’affaisser et dodeliner.Elleneputbientôtplus tenir lesyeuxouverts.

Elleseréveillaensursautlorsquelavoitures’arrêtaentanguant.Aussitôt,elleseplaçaàcôtédelaportière,prêteàbondiretàpartirencourant.Lafaiblelumièredel’aubeformaitunelignegrisâtreautourdes rideaux.Lesvallées fertilesduYorkshire regorgeaientcertainementde fermes.Ellen’aurait aucunmalàenatteindreune.Ellefermabrièvementlesyeuxetessayadeseconcentrersurl’instantprésentetnonsurlapeurquifaisaitbattresoncœuràtoutrompre.

Laportières’ouvritenfin.Prenantsonélan,Rionas’élançaalorsàl’extérieuretpercutadurementlelargetorsed’unhomme.Illuipritlesbrasavantqu’elles’écrouleparterre.

—Oh ! s’écria-t-il, l’air plus compatissant que furieux. Vous êtes un vrai petit diable ! J’aimebeaucoupcetraitdecaractèrechezmafuturefemme.

—Jenesuispasvotrefuturefemme!protesta-t-elleenessayantdeselibérer.Ausecours!Sa voix se perdit dans la campagne désolée. Le soleil venait tout juste de poindre à l’horizon,

illuminantdelargespansdecollinesstriéspardesmursenpierreàmoitiéeffondrésquiformaientunemosaïquecoloréeàpertedevue.Unegrangeisoléesedressaitaubeaumilieud’unchamp,maislesseulsêtres vivants visibles alentour se limitaient auxmoutons et auxvachesdans les enclos.Leblévert sebalançaitsouslabrisedumatin,mûrissantlentementenattendantlamoissondel’automne.

Prisededésespoir,Rionas’effondradanslesbrasdesonravisseurquilasecouadenouveaud’unemanière qui commençait à l’agacer. Elle se débattit, mais il ne la lâcha pas, et elle sentit ses doigts

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s’enfoncerdanssachair.—Jenevouslâcheraiquesivousmepromettezdevoustenirtranquille,dit-il.Maissijamaisje

doisvouscouriraprèsavantlepetitdéjeuner…Illaissasaphraseensuspens.Sansunmot,elle leva lesyeuxvers luietcontemplapour lapremière fois levisagede l’homme

dont elle était la prisonnière. Ses cheveux épais et ondulés étaient aussi noirs que l’intérieur de lavoiture. Ils auraient atteint ses épaules s’ils n’avaient pas été retenus par un catogan.Sonvisage étaitsurprenant. Il n’était pas beau à lamanière des hommes de Londres, avec leur peau poudrée et leursartifices.Sabeautéétaitbeaucoupplussauvage,plusvirile, rehausséedesourcilsépaisetd’yeuxgrisqui, par un jeu de lumière, paraissaient briller comme de l’acier. Ses pommettes semblaient tailléescommeunepierredelalandefouettéeparlevent.Quantàsabouche,elleformaituntraitminceetdur,àsedemanders’ilavaitjamaissouri.

Elleclignadesyeux,seraidit.Pourquois’interrogeait-ellesurlacapacitédecethommeàsourire?Elle se concentra alors sur la cicatrice qui lui fendait le menton et lui conférait des airs de bandit.Impressionconfirméepar lepistolet attachéà saceintureet l’épéepasséeen traversde sonépauleetcolléecontresapoitrine.

Ill’observaittoutaussiattentivement.Derrièrelui,unautrehommedemandad’unevoixpolie:—Pourquoiinsistez-vouspourqu’ellevousfassedespromessesqu’ellen’apasenviedetenir?Rionareculad’unpasets’adossaàlaportièredelavoitured’oùellepouvaitlesvoirtouslesdeux.

Sonsecondravisseur,quisemblaitêtrelecocher,ladévisageaitd’unœilouvertementsombreetcurieux.Sous son chapeau, ses boucles poil de carotte, péniblement domptées par une queue-de-cheval, lerendaientreconnaissableentretous.

—Siellenemefaitpascettepromesse,jeseraicontraintdel’attacher.—Jenesupporteraipasd’êtretraitéedelasorte!dit-elled’unevoixquisonnaitfaux.J’exigede

savoirpourquoivousm’avezenlevéeetquelsplansabominablesvousnourrissezcontremoi!L’hommehaussalessourcils,maissonexpressiondemeuraimpassible.—LadyCatriona,jesuislechefduclanMcCallum.Nospèresontarrangénotremariageilyade

nombreusesannées.Jesuisvenuvouschercherpourquevousdeveniezmafemme.

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Chapitre2

Hughcontemplasafiancéedanslalumièredel’aube,etsabeauté…l’éblouit.Sescheveuxs’étaientdétachésdesatresse,etdelonguesmèchesblondesauxmultiplesrefletsluibalayaientlesépaules.Sesyeuxvertsétincelaientdefureur,commesielleavaiteulepouvoirdel’embraserd’unsimpleregard.Sonvisage tout entier reflétait ses émotions, de ses lèvres pleines qui tremblaient jusqu’à ses grands yeuxhébétés, enpassantpar leschaudescouleursquiavaientenvahi lapeau laiteusede ses joues.La robequ’ilavaitchoisiepourelleencroyantluidonnerl’apparenced’unesimplefermièrenefaisaitquemettreenvaleurl’élégancedesasilhouettefineetdesescourbesdoucementféminines.Quelquesheuresplustôt, dans la chambre, à la lueur de la bougie, il avait déjà été frappé par ces courbes faiblementdissimuléessouslemincetissudesachemisedenuit.

Cettefemmeétaittrèsbelleet,bientôt,elleseraitàlui.Ilétaitréellementsurprisquel’arrangementconcluparsonpèreavecleurennemi,lechefdesDuff,

enlapersonnedel’élégantcomted’Aberfoyle,alorsqueCatrionaétaitencoreunbébé,luiaitaccordéuneépouseaussiéblouissante.

—Que…qu’avez-v-vousdit?balbutia-t-elle.—Noussommesfiancés.Nelesaviez-vouspas?Samuel se racla la gorge,mais Hugh se contenta de lui décocher un regard d’avertissement. Ce

dernierlevaalorslesdeuxmainsetpartits’occuperdeschevaux.—Vousmentez!répondit-elleenfind’unevoixquiavaitregagnédel’assurance.Aumoins,ellen’étaitpassurlepointdes’évanouiràsespieds,songea-t-il.Ilaimaitlaforcequi

l’habitait,mêmelorsqu’ellesebattaitcontrelui.Ilcroisalesbrassurlapoitrinecommepours’armerdepatienceetdit:

—Cen’estpasunmensonge.—Monpèrem’enauraitparlé,sedéfendit-elle,lespoingssurleshanches.Cegesteattirasonregardsurcettepartiedesonanatomie,et ildutseressaisirpourreprendrele

coursdeleurconversation.—VousêtesCatrionaDuff.Jesuisvenuchezvous,hieraprès-midi,pourparleràvotrepère,etil

s’estcomportédemanièredéshonorante.Soudain,elles’empourpra.—Vousvousêtestrompédefiancée!Il n’en attendait pasmoins de sa part. Elle niait la vérité, et il était évident que ses parents lui

avaientcachéqu’ilsétaientpromisl’unàl’autre.Iln’auraitpasdûêtresurprisqu’ilscherchentàrompreleuraccordetrefusentdepayerladotdeleurfille,aprèsavoirpartagépendantvingt-deuxansdesdroitssurlesmeilleuresterresdesMcCallum.

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—Vouspouvezniertoutcequevousvoudrez,celanefonctionnerapasavecmoi.Elleécartalesbrasensigned’impuissance.—Jevousdislavérité.—VousêtesbienCatrionaDuff?—Oui,maisnoussommesdeuxàportercenom,macousine etmoi, car aucundenospèresn’a

voulucéder.Danslafamille,onappellemacousineCat,etmoi,Riona.Ilignorasaremarque:ilconnaissaitladuplicitédontsafamilleétaitcapable.Ilavaitdessièclesde

preuvesderrièrelui,ycomprisdesvolsdebétailpendantlespériodesdepaix.—Rionavousvatrèsbien.C’esttrèsféminin.Ilfitunpasverselle,ressentantlebesoindelatoucher,maiselles’écartabrusquementdelui,etil

compritqu’ilfallaitqu’ilsemontrepatient.Lesenjeuxétaienttropimportantspoursonclan.L’argentdesa dot le rendrait plus prospère. Et il avait besoin d’une épouse docile et bien disposée à son égardlorsqu’ilreviendraitchezluiaprèsunesilongueabsence,surtouts’ilvoulaits’assurerlerespectdeseshommeseteffacerdeleursmémoireslesfoliesdesajeunesse.

Sachantqu’ilseraitcapabledelarattraperlecaséchéant,ilattenditdevoircequ’elleallaitfaire.Elle hésita, et ses épaules tendues s’affaissèrent progressivement, tandis qu’elle contemplait d’un airgrave les vastes étendues de la vallée, avec ses monts qui s’élevaient au nord-ouest et la lande quis’étendaitaunord-est.Leurlongvoyagelesamèneraitaucœurdecettevallée.

Elleparaissaitaussiprudentequ’unpapillon,attendantdevoiroùleventallaitlapousser.Ellefinitparsetournerdenouveauverslui.

—LairdMcCallum…Elleessayaitàprésentdesemontrerraisonnable,maissavoixcontinuaitdetrembler.Ilhaussales

sourcilsetattenditdevoircequ’elleallaitajouter.— … Ramenez-moi chez moi. Nous ne pouvons pas être très loin de York. Mon oncle vous

expliqueratout.Catétaitàlacampagne,hier,maiselledoitrentreraujourd’hui.Ellefermabrièvementlesyeux.—Bontédivine,Catn’estpasaucourantpourcesfiançailles!Lorsqu’elleval’apprendre…Ilappréciaitsadétermination.Ilneluienvoulaitpasd’essayersifarouchementdesesoustraireà

leur futurmariage.Manifestement, il l’avait prise au dépourvu.Même si son propre père avait été unhommemédiocre,plussouventsoûlquesobre, il l’avaitaumoins informédecetengagementdèsqu’ilavaitétéenâgedelecomprendre.Iln’enavaitpasacceptésondestindegaietédecœurpourautant…

Son père avait sombré avec plus d’ardeur encore dans le whisky, jusqu’à ce que sa mère lesemmène,sasœuretlui,vivredanssafamille.

—Jenepeuxpasvousépouser!s’écria-t-elleenfin.Ilhaussalesépaules.—Sivotrepèren’apasétéassezhonnêtepourvousdirelavérité,toutcequevousavezpufairene

contrecarreenrienl’accordpasséentrenosdeuxfamilles.Lavôtreaacceptécecontratàvotrenaissanceet,dèscetinstant,elleapartagéavecnouslarichessedenosmeilleuresterres.Ilesttempsmaintenantquemaproprefamilleenreçoivelebénéficegrâceàvotredot.

Elleclignadesyeux.—Madot?Ainsi,c’estl’argentquivousintéresse,lâcha-t-elled’unairdédaigneux.—L’argentquiaccompagnechaquemariagenefait-ilpaspartiedesesprivilèges?Mais iln’est

pas seulement questiond’argent.Mon clan s’est comporté honnêtement avecvotre père en lui donnantaccèsànossourceslespluspures,ànotremeilleuretourbeetànotremeilleureorge,quenousutilisonspour fabriquer notrewhisky.Ce produit fait vivremon peuple.Cet engagement a représenté un grandsacrifice quemon père a accepté pour assurer la paix entre nos clans. Il n’a reçu en échange que lapromessequ’ilserahonorédevotrecôté.Etnousavonsbienl’intentiondelefairerespecter!

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Ellelefixaquelquesinstants,puiséclatad’unrirequin’avaitriendejoyeux.—La vie et la liberté deCat ne se résument donc qu’à des ressources destinées à fabriquer du

whisky?—Neprononcez jamaisdevantmonpeupledesproposaussidédaigneuxà l’égarddecequi fait

vivrenotreclanetnouspermetdegagnerdel’argent!dit-ilenfronçantlessourcils.CetargentsiraredanslesHighlands,etcegrâceauxSassenachs.

Ilcrachalittéralementcederniermot.—Aquoi?— Aux Anglais, aux étrangers. Votre famille a-t-elle si peu de fierté qu’elle a omis de vous

apprendrelegaélique?Rionaseredressa.—Mamèreestanglaise.Illuitournaledosetlançapar-dessussonépaule:—C’estfaux!Vosmensongesnechangerontrien, ladyCatriona.Commetoutes lesfemmes,vous

savezquevousdevezvousmarieretquelechoixdevotreépouxnereposepasentrevosmains.—Ilestvraiquejenevousauraispaschoisi!PasplusquemacousineCat,d’ailleurs.Sivousne

meramenezpas,vousn’aurezaucunechancedel’épouser.Notrefamilleconsidéreravotreactecommeunetrahisonetuneinsulte,raisonsuffisantepourromprelecontrat.

Soudain,ils’approchad’elleetlatoisad’unairmenaçant,lacoinçantcontrelavoiture.—Nemeparlezpasdetrahisonaprèslafaçondontvotrepèreafroidementessayédebafouernotre

contrathier,prétendantqu’ilnepouvait, en sonâmeet conscience,permettreque sa fille soit« livréecommeunpaquet auxMcCallum». J’aibienvuqu’il cherchaitunmoyende revenir surnotreaccord.Mon père est mort, et je suis désormais responsable du clan McCallum. Le comte respectera sonengagement lorsqu’ilverraqu’iln’apas lechoix.C’estpourcetteraisonquejevousaienlevée,alorsquevousauriezdûm’êtreprésentéeavechonneur.J’étaisvenuavecdescadeauxdanslebutdecélébrerl’union de nos deux clans. Notre rencontre aurait dû être célébrée comme la promesse d’un avenirmeilleur.

—Je…je…Leprenantparsurprise,elleposalamainsursontorseetlerepoussa.Ilnebougeapas,maiscette

démonstrationdecouragedissipasamauvaisehumeur.Cen’étaitpassafaute,aprèstout,sielleavaitétémalélevée.Ilsaisitsesmainsdélicatesetlesgardacontresontorse.

—Vouscherchezàévaluerlamarchandise,madame?Ellesursauta,cherchantàôtersesmainsetillalâcha.Ilfaillitesquisserunsourire,maisiln’était

pasprêtàlalaisservoirenluiunamiouunhommequ’ellepourraitconvaincredechangerd’avis.Iln’enétait rien. Ilétaitsonfuturmari,son laird. Il fallaitqu’ellecomprennequeseulecomptaitàprésentsaparole,etnoncelledesonpère,cetraître.

—Allezchercherlanourriturequej’ailaisséedanslavoiture,dit-il.Saufsivousvoulezmourirdefaim.

Elleplissarageusementlesyeux,etilsesurpritàespérerqueleuraltercationsepoursuivrait.Maisellelevafièrementlementonetsetournapourmonterdanslavoiture.

IlcroisaalorsleregarddeSamuelethochalatêted’unairsatisfait.Lesouriredecedernierétaitempreint d’inquiétude. Mais les craintes de son cocher étaient infondées. Ils étaient allés à York etavaientfaitleurdevoir.Enrevanche,ilavaitplusdesouciàsefaireducôtédelafemmeàlaquelleilétait lié. Jusqu’à présent, elle s’était comportée commeunemégère,mais il espérait bien l’aider à secalmer.

Bientôt,elleseprésentaàl’entréedelavoiture,tenantunsacentissu.Iltenditlamainpourl’aider,maiselleluifourralesacentrelesbrasetdescenditseulelesmarches.

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—J’aibesoind’unpeud’intimité,déclara-t-ellesansleregarder.Ilcroisalesbrassurlapoitrineetluiréponditd’unevoixferme:—Sivousessayezdevousenfuir,jeseraicontraintdevousattacher.Personnenepeutvousaider,

ici.—Jenesuispasaveugle,maisnousnetraverseronspastoujoursdesendroitsaussidésolés.—Vousn’êtesjamaisalléedanslesHighlands,n’est-cepas?—Nousnesommespasencorearrivés,répliqua-t-elleavecvéhémence.Jesupposequevousêtes

touslesdeuxdesgentlemen.Jevousdemandederestericipendantquej’iraiderrièrelavoiture.—Mapatiencen’estpasinfinie.Sivousn’êtespasderetourdansunlapsdetempsacceptable…—Dans ce cas, je vous préviendrai, dit-elle d’un air exaspéré, et je vous dirai ce qu’il en est

minuteparminute.Celavousconvient-il?Elle n’attendit pas sa réponse et contourna les grandes roues de la voiture en soufflant, avant de

disparaître.

***

Lorsqu’elleeut terminé,Rionas’attardaquelques instantsprèsd’unmurenpierredélabrédont laprésenceparaissaitpresquefortuite.Ilétaitenvahidemousseetdemauvaisesherbes,commes’ilavaittraversédessiècles.D’unœildésespéré,ellebalayalalandeetpriapouryvoirunbergerqu’elleauraitpuappeleràsonsecours.

Maisqu’auraitpufaireunpauvrebergercontredeuxHighlanders,dontl’unprétendaitêtrelechefdesMcCallum?Commentpourrait-elleentraînerdesinnocentsdanssonaventure,aurisquedelesfairetuer?Elleignoraitmêmesisesravisseursluiavaientdit lavérité.Saufque…elleconnaissaitbienlenom de leur clan, ennemi légendaire des Duff, le clan de son propre père. Depuis toujours, ils sedisputaientlesfrontièresentreleursterres.Maiscelanesignifiaitpasquecethommeluiaitditlavérité.Ilauraitpu lakidnapperpoursadot,commeauMoyenAge. Ilpouvait luiavoirmentisur tout,etellefiniraitdansuntaudis,forcéed’obéiràsesordres.

Mêmes’ilétaitbienceluiqu’ilaffirmaitêtre,songea-t-elleenfrémissant,ellepouvaitconnaîtreunsort similaire. Son père, qui avait quitté l’Ecosse dans sa jeunesse, lui avait parlé des Highlands.Combiendefoisluiavait-ilrépétéqu’ilavaiteudelachanced’êtrelefilsd’uncomteetd’avoireulapossibilité de fuir son pays natal ? Il n’avait jamais compris les hommes qui vénéraient son père, etmaintenantsononcle,commedesdieux.D’aprèslui,lesHighlandersétaientdessauvages.Illuiavaitfaitle récit de ces raids insensés contre le bétail du clan rival, attaques si sanglantes qu’elles pouvaientdécimerdesclansentiers.

Jamaisellenes’étaitsentieaussiimpuissante.Elleavaitdéjàcomprisqu’ellenecontrôlaitpassavie. Ses parents lui demandaient de rester cloîtrée avec sa sœur le plus clair de son temps. Et plusrécemmentilsl’avaientlaisséeenAngleterre,lorsquelerestedelafamilleétaitpartienvoyagesurlecontinent.Maisàprésent,ellenepouvaitmêmeplusavoirunmomentd’intimitésans lapermissiondesonravisseur!

Ellesefrictionnalesbrasetlesépaulespourseréchauffer,malgrélesoleilquiinondaitlavallée.Ilne brillerait pas très longtemps.Dans lesHighlands, le temps était le plus souvent froid et pluvieux.Maussadeethostile,commedisaitsonpère.Pleindesauvagesquidevaientsecacherentrelesrocherspoursurvivre.

Elleprituneprofondeinspiration.Ellen’étaitpasencoreenEcosse.Ellepouvaittrouverunmoyende faire changer d’avis son ravisseur ou de s’enfuir. Ils allaient bien devoir traverser l’un ou l’autrevillage,neserait-cequepourseravitailler.

—LadyCatriona!

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LavoixduredeMcCallumretentit, la faisant sursauter.Elle jetaunderniercoupd’œil auxdouxpâturages,puisrevintàpas lentsde l’autrecôtéde lavoiture.Lesdeuxhommesquis’entretenaientengaéliquenedaignèrentmêmepas la regarder. Ilsmâchaient leursgalettesd’avoineavecdu fromageetbuvaientlecontenudouteuxd’unebouteillequ’ilsavaientdûentreposerdanslecompartimentréservéaucocher.

Ildésignalavoitureensilence.—Jen’yvoisrien,danscetteprison,protesta-t-elle.—Lorsquevousm’aurezprouvéque jepeuxvous faire confiance, je vousdonnerai accès àune

fenêtre.Enattendant…Desesdoigtspuissants,ilarrachadeuxclousquiretenaientlerideauencuiretdégageaunefentede

quelquescentimètres.—Jevousremerciebeaucoup,dit-elled’unevoixteintéedesarcasme.Ellesehissaàl’intérieurmais,aulieudereplierlesmarchesetdefermerlaportière,McCallumla

suivitets’assitsurlabanquetteàcôtéd’elle.Elle se glissa dans un coin puis, après réflexion, jugea préférable de s’asseoir sur la banquette

opposée.—Quefaites-vous?demanda-t-elleenessayantdedissimulerlapeurquitendaitsavoix.—Jevaisessayerdedormirunpeu.—Mais…mais…Consternée, elle le vit alors étirer au maximum les jambes devant lui. Son large torse semblait

occuperlamoitiédel’habitacle.Elleétaitseuleaveccethomme,sonravisseur,totalementàsamerci!Elledéglutit,maissagorgerestanouée.Elleserecroquevillaalorsdanslecoindelabanquettecommepourpareràuneattaque.

—Samueletmoiallonsnousrelayer,expliqua-t-il.Vousn’espérezpasquenousallonseffectuerunvoyaged’aumoinsdixjourssansdormir.

—Dixjours!—Etencore,nousvenonsdusuddesHighlands…Celaauraitpuêtrepire.Illaregardad’unœilfroid.—Avez-vousdessouvenirsd’untelvoyage?demanda-t-il.Votrepèrea-t-ilsipeud’estimepour

sonhéritagequ’ilvousaitdéniévosdroitsimprescriptibles?—Monenfancenevousregardepas!Ilavaitpourtantraison,songea-t-elle,piquéeauvif,maisellerefusaitdeleluiconcéder.—Toutcequivousconcernemeregarde.Vousallezdevenirmafemme.— Je ne vous épouserai pas, et vous ne pouvez pas me forcer. Cat, la femme à laquelle vous

prétendezêtrefiancé,nevousépouserapasnonplus.Soudain,ellesesentitpiégéeparsonregardglacial.—Croyez-moi,ladyRiona,vousallezm’épouser.Entendresonprénomdanssaboucheluifitfroiddansledos.Ilcroisalesbrassursontorseetferma

lesyeux,commepourmettrefinàlaconversation.Cequifutlecas,carquepouvait-ellefaired’autreques’insurgeretlemettresuffisammentencolèrepourque…Pourquequoi?Ellefrémit.S’ilcroyaitqu’elleétaitsafiancée,s’ilcroyaitquecelaluidonnaitledroitdefairetoutcequ’ilvoulait…Ellefixal’épéeetlepistoletqu’iln’avaitpasprislapeinederetirer.

— Je sens d’ici que vous tremblez. Prenez une couverture si vous avez froid, mais laissez-moidormir.

Ellen’avaitpasfroid.L’intérieurdelavoiture,réchaufféparlachaleurdeleurscorps,étaitchaudetmoite.Elleétaitsurtoutterrifiéeetluttaitpournepaspleurer,sedemandantquandlessecoursallaientarriver. Au cours de la nuit, elle avait eu une pensée horrible qu’elle n’avait pas eu la force

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d’approfondirtantelledépassaitsonimagination.Maisaujourd’hui…aujourd’hui,àlalumièredujourqui filtraitpar la fentede rideauqu’il luiavaitconcédée, sesmauvaisespensées refirent surface.Elletentadelesrefoulerensedisantque,dèsquesononcleapprendraitsadisparition,ilpartiraitavecseshommesàsarecherche.

Maisuneautrepartied’elle-mêmeluimurmuraitlecontraire.Sononcleetellen’avaientjamaisétéproches.Lecomteétaitunhommefroid,obnubiléparsesrichessesetsonpouvoir.Lorsquesesparentsavaient emmené sa sœur sur le continent, la laissant derrière eux, il avait accepté de l’accueillir àcontrecœur, et sur l’insistance de Cat qui avait argué qu’elle ne pouvait pas rester seule avec lesdomestiques.

Etmaintenant,siMcCallumdisaitvrai, ils’étaitentretenuaveclecomtehier, justeavantqueCatapprennequesesparentsl’envoyaientàlacampagnechezdesamis.Sacousineenavaitététrèssurprise,mais pas mécontente, et à bien y songer Riona trouvait étrange la vitesse avec laquelle les bagagesavaientétéfaits.Catavaitdemandéàcequ’ellel’accompagne,maissesparentsavaientprétenduqu’iln’yavaitpasdeplacepourelledanslamaisondecampagnedecesamis.

Tout cela n’était-il pas voulu, finalement ? PourquoiCat était-elle partie juste après la visite deMcCallum?Sononcleregrettait-illecontratqu’ilavaitpassé,aupointd’éloignersafille?

Etleplusdur,lemomentqu’elleneparvenaitpasàoublier,étaitceluidudîner…Satanteluiavaitsemblépâleeteffacée.Rionasesouvenait trèsbienqu’elleavaitbaissélesyeuxlorsquesononcleluiavait ordonné de dormir dans la chambre de Cat, sous prétexte que la sienne devait être nettoyée etrepeinte. Elle en avait été très surprise : pourquoi ne pas attendre qu’elle retourne àLondres pour lefaire?

Aprésent,toutdevenaitplusclair,etelleavaitl’horriblesentimentd’avoirététrahie.Sonestomacsecontractadouloureusement sous l’effetduchagrin.Sononcle l’avait-il installéedans lachambredeCat parcequ’il avait anticipé le geste de ce sauvaged’Ecossais ?Cherchait-il une raison légitimederompre ces fiançailles ? Il aurait pumettre des gardes et prendreMcCallum sur le fait. Tout cela luiparaissaitincroyable,etpourtant…Elledéglutitpéniblementetessayadenepaspenseraupire.Sielleselaissaitenvahirparlapeur,ellenetrouveraitjamaislemoyend’échapperàcethommequisetenaitdevantelle, lesyeuxfermés, lementonsur lapoitrine,ses longues jambesoccupant tout l’espaceet laforçantàserecroquevillerdansuncoinpournepasletoucher.

Ilpassadeuxheuresàsereposersansbougeroupresque,commes’ilétaithabituédepuislongtempsàdormirdèsquel’occasionseprésentait.Desoncôté,elleétaitincapabledefermerl’œil,depeurqu’ilneseréveilleetqu’iln’aitàsonégarddesgestesdéplacés.Lorsqu’ils’éveillaenfin,illacontemplad’unœilimpassibleet,sansunmot,toquaautoitdelavoiturequis’arrêta.Ilsortit,etlecochervintprendresaplace.

Lorsquelevéhicules’ébranla,celui-ciregardaautourdeluipuisparlepetitboutdefenêtre,commes’ilessayaitdes’installersanscroisersonregard.

Rionabonditsurl’occasion.—Nousn’avonspasétécorrectementprésentés,monsieur,dit-elle.Ilavaitunepeaublanche,couvertedetachesderousseursoussacrinièredefeu.Ilrougitpresque

autantquesachevelure.—Jem’appelleSamuelMcCallum,madame.—Vousêtesparents,évidemment…,commenta-t-elle,encoreplusabattue.Pourtant,ellen’étaitpasprêteàbaisserlesbras.— Nous sommes des cousins éloignés, dit-il avec un petit sourire de connivence. Vous allez

rencontrerbeaucoupdeMcCallum,làoùnousallons.—Vousdevezêtreconscientquecequ’ilfaitn’estpascorrect.Sonexpressiondemeuraamicaleetmêmecompréhensive,maisilsecoualatête.

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—Non,madame,jenepensepasçadutout.Vousêtessafiancée.—C’estfaux!—VousêtesbienCatrionaDuff,n’est-cepas?—Oui,toutcommemacousine!—Jesuisdésolé,maisjenepeuxpasvousaider.Uncontrataétésignéentrenosfamilles,etnous

leprenonstrèsausérieux.—Jenesaisriend’untelcontrat,grommela-t-elleencroisantlesbrassurlapoitrineetenplissant

lesyeux.—C’est la fautedevotrepère.JesuisauservicedeHughdepuisde longuesannées,et ilestau

courantdevosfiançaillesdepuisqu’ilestpetit.Croyez-moi,cecontratainterférédanssavieplusd’unefois!

Ils’interrompitetdétournaleregard.—Interférécomment?demanda-t-elle.—Celanevousregardepas,madame.Laissez-moidormir,maintenant.Ilfermalesyeuxetlaissatombersonmentonsursontorse,commesonchefl’avaitfaitavantlui.— L’argent vous ferait-il changer d’avis ? insista-t-elle. Je n’en ai pas beaucoup, mais si vous

acceptiezdem’aider…Ilrépondit,sansmêmeouvrirlesyeux:—Votreargentnepeutpasacheterlaloyautégagnéepardesgénérations,madame.Demêmequ’il

nepeutfaireoublierlatrahisondesDuffpendanttoutcetemps.Maintenant,taisez-vous.Rionablêmit.La trahisondesesancêtres?Unmariageentre leursclansétaitcenséy remédier?

Elleavaitl’impressionquen’importequelleDuffmariéeàunMcCallumneconnaîtraitjamaislapaix,sipersonnen’étaitcapabled’oubliercesgriefs.Lorsquesononcleetsonpèreavaientunpeubu,ellelesentendait souvent évoquer ces querelles avec colère et fierté.Elle comprenaitmaintenant pourquoi ilss’étaienttenusloindel’Ecosse,laissantàleursrégisseursetleursmétayerslesoindegérerleursterres.

Pourtant,cesquerellesavaientprisunetournureimmensémentpersonnelle,etellen’étaitpasprêteàacceptercequiluiarrivait.ElleétaitencoreenAngleterre,oùilexistaitdespersonnescapablesdesedresser contre les Ecossais. Lorsqu’ils s’arrêteraient pour déjeuner, elle essaierait de s’enfuir à lapremièreoccasion.Etsisonplannefonctionnaitpas,elletrouveraitautrechose.

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Chapitre3

HughsavaitqueladyRionanerenonceraitpasàs’échapper.Ilvoyaitsonhumeurpassertouràtourdelacolèreàlafrustration,mêmesisafureursemblaits’estomperpeuàpeu.Maisiln’étaitpascertainquecelasoitbonsigne.

Ilss’étaientarrêtéspourdéjeunerdansuneclairièreprèsd’unruisseauetavaientcachélavoituredesortequ’ellenesoitpasvisibledepuislaroute.Leschevauxpouvaientboireetpaîtreàloisirsurlesberges couvertes d’herbes grasses, et ils étaient entourés par des arbres. Ils n’auraient pu rêver d’unendroitmieuxabrité.

LadyRionaluiavaitdemandéquelquesinstantsd’intimité,qu’illuiavaitaccordés.Allongésurlecôté,prèsdufeu,ilregardaitcuirelesgalettesd’avoinesuruneplaqueenfer.

—Nousdevronsbientôtnousravitailler,ditSamuel.—Lefaisanquej’aichassénetesuffitpas?—Nousallonsmanquerd’avoine,etjeressenslebesoindemangerunœufoudeux.Ilregardaendirectiondel’ouestetajouta:—L’orage approche ; nous n’allons pas tarder à sentir les premières gouttes. Il va nous falloir

trouveruneaubergepourlanuit.—Non,noussommesencoretropausudduYorkshire.Noustrouveronsuneclairièreaccueillante

commecelle-cietnousdormironstousàl’intérieurdelavoituresinécessaire.—Ceserabienassezconfortablepournotredemoiselle,fitremarquersèchementSamuel.Hughsoufflapourmanifestersondésintérêtdelaquestion.—Ellem’abienévidemmentdemandéquejeluivienneenaide,continuaSamuel.—Elleaducran,cettefille.Nedevrait-ellepasêtredéjàderetour?demanda-t-ilenrelevantla

tête.LadyRiona?Pourtouteréponse,ilnereçutquelecridesoiseauxquivolaientau-dessusdeleurstêtes.—Jerevienstoutdesuite,dit-il,résigné,enlaissantsesarmesàcôtédeSamuel.—Vas-ydoucementavecelle,Hugh.Asaplace,nousessaierionsnousaussidenouséchapper.—Jenechercheraispasàfuirmesobligationsàl’égarddemafamille.—Regardezquiparle!letaquinaSamuel.Hughl’ignoraetpartitencourantverslavoiture.Iln’eutaucunmalàsuivrelapistelaisséeparla

fuyarde.Ses larges jupes avaient arrachédesherbes et cassédesbranches.Elle avait eu leméritedesuivreensensinverselecheminqu’ilsavaientparcouru,mêmesilevillageleplusprochesetrouvaitàplusieursheuresdemarchederrièreeux.

Il l’entendit avant de la voir, tandis qu’elle se frayait un chemin dans les sous-bois pour restercachée,toutensuivantlarouteprincipale.

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Il aurait pu l’appeler et la raisonner pour l’obliger à comprendre que de telles tentatives étaientvaines,mais…dansunpremiertemps,ilfallaitqu’ellelecraigne.Laleçondevaitdoncêtremémorable.

Ils’approchapar-derrière,cequiluifutfacile,carellesecroyaitmanifestementàl’abri.Elleavaitmêmecommencéàfaireunpeutropdebruit,sepermettantdemarmonnerdetempsentemps,cequilefitsourire. Elle avançait avec détermination, mais ses pas étaient entravés par les hautes herbes quienvahissaientlesous-boisets’accrochaientàsesjupes.

Endeuxenjambées,ilsortitdesacachetteetenroulaunbrasautourdesatailleavantdelasouleverdusol.

***

L’assautfutsisoudainqueRionacria.Aussitôt,l’hommeplaqualamainsursabouchepourétouffersescris.Elleeutl’impressionhorrifiantedevivrelamêmescènequecelledelaveille.Jamaisellenepourrait échapper à son étreinte, mais le désespoir et la frustration l’amenèrent à se débattre avecfrénésie,mêmesisescoupsnepouvaientriencontresaforce.

—J’auraispuêtreunbandit,ditalorsMcCallumd’unevoixcourroucée.Vousvousêtesmiseendanger.

Elleluidécochadescoupsdepied,tandisqu’ilfaisaitdemi-tourpourl’éloignerdelacivilisationetdetoussecours.Leursjambess’emmêlèrent,sonpiedsepritdanssajupe,etilstombèrentàlarenverse.Asagrandesurprise,ellelesentitpivoterpouratterrirlepremier.Ilétouffauncridedouleurlorsquesoncoude s’enfonça douloureusement dans son ventre. Elle en eut une satisfaction secrète, mais toute samorgues’évanouitlorsqu’ilroulasurlecôtépourlaplaquerausol.Lespierress’enfoncèrentdurementdanssondos.Elleessayadesedébattrepourl’obligeràs’écarter,maisilpesasurelledetoutsonpoidspourl’immobiliser.

Lorsqu’elle essaya de le gifler, il lui saisit le poignet et l’aplatit au-dessus de sa tête. Le corpsarqué, elle continua de se contorsionner furieusement, tâchant de reprendre son souffle. Soudain, elleréalisaqueSamueln’étaitpaslàpourcalmerlesardeursdominatricesdeMcCallum.Lapeurpouvaitlaparalyser,ellelesavait,maiselleneputluttercontre.

—Arrêtez,ladyRiona!Aforcedecontorsions,ellen’avaitréussiqu’àlefaireglisserentresesjambes,quisetrouvèrent

coincéesparsajupe.Ellerespiraitdifficilement,uncorpsd’hommecontrelesienpourlapremièrefois.Elle s’immobilisa. Sous l’effet de ce contact si intime, unmystérieux fluide sembla passer entre eux,tandis qu’elle prenait la mesure de son impuissance, sous l’étreinte de ce Highlander. Il n’y avaitpersonneautourd’ellepourl’aider,pasmêmelecocher.Elleétaitàsamerci.

—S’ilvousplaît…,murmura-t-elle,détestantentendresavoixfaibleettremblante,maisincapabledelamaîtriser.Laissez-moimelever.

—Pourquevouspuissiezdenouveaupartirencourant?Sa voix était pleine de colère,mais son regard… son regard s’était posé sur sa bouche, et elle

découvritdanslesprofondeursdesespupillesunechaleurquiluirappelacelledel’argentenfusion.—Cessez…cessezdemeregarderainsi,souffla-t-ellesanspouvoirdétournerlesyeux.Jenesuis

pas…laproied’unvautour.—Unvautour?répéta-t-ild’unevoixrauque.Jenemangepaslescréatures innocentes!Mais je

suisunhomme,etmetrouverainsicouchésurvousmefaitpenserànotrenuitdenoces.Horrifiée,elleréponditsansréfléchir:—Vous…vousvoulezdirequevousallezdevoirm’immobiliser?L’espaced’un instant, elle jura avoir vu le coinde sabouche esquisserun sourire.Maisnon, ce

n’était pas possible. Un homme enclin à la vengeance et à la fausse justice, qui n’avait pas hésité à

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enleverunefemmecontresongré,étaitincapabledesourire.Ilfinitparluilâcherlesmains.Elletentadelerepousser,maisilneselevapas.Seshanchesétaientcaléescontrelessiennes,etellen’avaitjamaisressentiunetellepression.Lasensationétaitinconfortable,embarrassanteet…plutôtétrange.

Ellelepoussadenouveau.—Jenepeuxpasrespirer,geignit-elle.Ils’assitalorssurlestalons,maissesgenouxappuyaienttoujourssurseshanches.Ilcroisalesbras

sursontorseetlatoisa.—Jenetoléreraiplusjamaiscela,dit-il.Clouéeausol,ellenepouvaitpaslerepoussersansluitoucherlescuisses.—Suivriez-vousdocilementvosravisseurs,sivousvoustrouviezàmaplace?—Jenesuispasàvotreplace,répondit-ilenpenchantlatêtesurlecôté.—Maissivousl’étiez?—J’honoreraisl’engagementdenosdeuxfamilles,indépendammentdemavolonté.—Donc,mêmesivousn’avezjamaisrencontréCat,vousêtesprêtàl’épouser,ycomprissivousne

latrouvezpas…séduisante?Ilfallaitqu’elleparvienneàleconvaincrequ’elledisaitlavérité,etpourcefaire,elleallaitmettre

ledoigtsursamépriseàchacunedeleursconversations.Ilnecillapas.—LamystérieuseCatdontvousmeparlezn’existepas,Riona. Iln’yaquevousetmoi.Etnous

allonsnousmarier.Essayerdefuirestunactepuérildevotrepart.—Puéril?s’écria-t-elle,furieuse.Ilnel’avaitpasappeléeladyRiona,etelleleregretta.Bienqu’ellenesoitpastrèsattachéeàson

titre,ilpermettaitaumoinsentreeuxunecertaine…distance.— Je vous demande dem’appelerMlleDuff, et il n’est pas du tout puéril d’essayer de s’enfuir

lorsqu’unhommevousagresseetvousenlèveàvotrefamillepourvous…molester!—Jenevousaipasmolestée,sedéfendit-il.Ellepointaundoigtrageurverslui.—Etcommentappelez-vouscela?Est-ceunefaçonélégantedetraiterunedame?Ilsepenchaenavantetposalesmainsdechaquecôtédesatête.—Jeveuxjustevousmontrerquialepouvoirici,Riona.Il insista sur son prénom, et elle commença à avoir du mal à respirer en le voyant planer

dangereusementau-dessusd’elle.Sonvisageétaittropprèsdusien,etsonregardbraquésursabouchedevintdenouveaubrûlant.

—Sijamaisvousm’embrassez,jevousmords!Ilhaussalessourcils,maisnebougeapas.—Vousn’êtespasmonmari,pasencore.Ilseredressalentement.—Vousavezraison.Etjenem’imposeraipasàvousavantlemariage.Ilselevacomplètementetsepenchapourluiproposersamain.—Mais,sijamaisvousessayezdenouveaudevousenfuir,vousensubirezlesconséquences!—Vousferiezdumalàunefemmequevouspersistezàvouloirprendrepourépouse?s’étonna-t-

elle,lâchantsamainchaudeetfermedèsqu’ellefutsursespieds.Ilpouvaitluibroyerlesdoigtsd’unesimplepression,maisiln’enfitrien.— Je vais m’efforcer de ne pas le faire. Quant à ceux à qui vous demanderez de l’aide, je ne

garantispascequipourraitleurarriver.Ilétaitsérieux,etellelesavait.Ellesentitsesépauless’affaisseret, lorsqu’il lapritparlebras,

ellenebronchapas.Pourtant,intérieurement,larancuneetlacolèresemêlaienttoujoursàlapeur.Elle

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trouveraitlemoyendes’échappersanscauserdetortàpersonne,sejura-t-elle.En attendant… elle se comporterait de manière exécrable. Peut-être le ferait-elle ainsi changer

d’avissurleurmariage.Comme il était étrange de sentir que quelqu’un avait besoin d’elle ! Elle avait rarement eu ce

sentiment, sauf avec Cat. Ses parents avaient certes besoin d’elle et l’avaient utilisée, à la fois poursurveillerettenircompagnieàBronwyn,sasœur.Biensûr,cettedernièreavaitbesoind’elle,maiscettedépendanceconstanteluiavaitbeaucouppesé,etsafamilleneluiavaitjamaislaisséderépit.Elleavaittoujoursétésollicitéepourdonnerd’elle-même,encoreetencore,maisraresétaientlesfoisoùquelqu’uns’étaitsuffisammentsouciéd’ellepourluirendreservice.

MêmeMcCallumneladésiraitpasvraimentauprèsdelui.Ilavaitbesoind’unefemmepourremplircecontratdemariagesiimportantpoursonclan.Elleétait…unsimplesubstitutet,àunmomentouàunautre,ilseraitconfrontéàlaréalitédesesméfaits.Qu’adviendrait-ild’elle,alors?

EllesentitunfrissoncourirdanssondosetselaissaguiderdistraitementparMcCallumàtraverslesbuissonsquis’accrochaientàsarobe.Saréputationseraitruinée.C’étaitunechosedesepromenerenpublic avec un homme et une autre de voyager avec lui, non ?Même si tout s’était passé contre savolonté,celan’auraitaucuneimportanceauxyeuxdesautres.Ellenetrouveraitjamaisdemarietseraitcontraintedecontinueràservirsasœuretsesparents.

Toutcelaparcequece…cethommeavaitenlevéparerreurlamauvaisefemme,pesta-t-elleensonfor intérieur avant de se rembrunir en se souvenant que son oncle l’avait probablement exposéesciemmentaudanger.

—Vousavancerezmieuxsivouslevezlespieds,ditMcCallumenl’aidantàtraverserunautresous-boisenvahiparlavégétation.

Elleobéitensilence.

***

Ilvoulaitfaireunesiesteaussilonguequepossible.L’orageapprochaitetilignoraitcequelanuitapporterait.Ilpénétraprudemmentdanslavoiture,carilnesavaitpasdansquellehumeuriltrouveraitRiona.Elleétait restéeétrangementsilencieuse,aprèsqu’il l’eut ramenéeà leurpetitcampement,et ilespérait qu’elle s’était enfin résignée à accepter sondestin, cequi leur simplifierait le voyage à tous.Maispourquoileferait-elle?songea-t-iltristementenouvrantlaportière.

Il s’installa sur l’inconfortable banquette, et la voiture s’ébranla.Riona se tenait tournée vers lafenêtre.Elleregardaitparlepetitintersticeleschampsetlespâturagesquis’étendaientàpertedevue.Bientôt, ils allaient traverser un village, etHugh se demanda si elle n’allait pas de nouveau tenter des’enfuir. Il savait qu’elle ne s’était pas encore avouée vaincue. Elle prévoyait certainement de ledéranger,maisilavaitl’habitudededormiràladure,surdesflancsdemontagnepartempsd’orage.Ilfermalesyeuxenpoussantunsoupirsatisfait.

—McCallum,jenepeuxpascontinuerdeporterlamêmerobesaletouslesjours.Iln’ouvritpaslesyeux.—Sivousn’aviezpasessayédevousenfuir,elleneseraitpassale.—Maisellel’est,etj’aibesoindelaver…certaineschoses.Ouvrant unœil pour la regarder, il se souvint d’elledans sa fine chemisedenuit, de la douceur

soyeusedutissusursesbraspendantqu’ill’immobilisait.Lorsqu’ilétaitentrédanssachambre,lalueurdelabougiesereflétaitsursapeauveloutéeet,pendantquelquesinstants,ils’étaitsentisoulagédesabonnefortuneetcurieuxd’envoirplus.Illuiavaitchoisidesvêtementsordinaires,pensantrendreainsison apparence plus banale, mais rien ne pouvait dissimuler son port de tête altier et sa couronne decheveuxblondstombantencascadesursesépaules.L’épouseparfaitepourunchefdeclan.

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Elleportaitencorecettechemisedenuit,songea-t-il.—McCallum?Elleprononçadenouveausonnomcommes’ilétaitstupide.—Vous pourriez me répondre au lieu de me regarder fixement comme si je parlais une langue

étrangère!dit-elled’unairexaspéré.—La langueanglaiseestassezdifficilecomparéeaugaélique,maisde lààsuggérerque jen’en

comprendspaslessubtilités…Non.Ilfermadenouveaulesyeux.Mieuxvalaitnepluspenseràsachemisedenuit.—J’aibesoindevêtements,insista-t-elle.Etd’eauchaudepourmelaver.Jemesenssale.—Dèsquenousseronsensécurité,j’yveillerai.—Ensécurité?VousnepouvezpasattendrequenoussoyonsenEcosse!N’avez-vouspasditqu’il

nousfaudraitplusieursjoursdevoyage?—Votreattitudepourraitinfluencermadécision,évidemment.—Vousvoulezdirequevousattendezdemoiquejememontredocile,réservéeetsoumise?—C’estvousquiledites,pasmoi.Jepensaisplutôtaumot«respectueuse».Ellefaillits’étranglerd’indignationetilseretintdesourire.—Vous…vousn’êtesqu’unsauvage!Même s’il savait qu’elle ne faisait que répéter des propos entendus dans la bouche d’autres

personnes,cetteinsulteleblessa.ALondres,ilavaitétémépriséàcausedesesorigines,etsesproposavaientsouventétéignorés.Toutlemondeleprenaitpourunpetitfermiersanséducation.Iln’éprouvaitquefrustrationetregretspourlessommesfaramineusesqu’ildevaitdépenserpourvivreenéchangedesipeu.

— Si je suis un sauvage,ma dame, alors vous l’êtes aussi, car nous sommes tous les deux desHighlanders.

Ilcroisalesbrasetgardalesyeuxfermés,maisneputdécrisperlesmâchoires.— Vous vous comportez plus encore en sauvage si vous gardez une dame prisonnière sans lui

proposeraucunedistraction.J’aibesoind’unlivreoud’unouvrage,dequelquechose.Ilyaurabienuneépicerieouunelibrairiedansleprochainvillage…

—Jepeuximaginerdesfaçonsdevousdistraire,dit-ilàvoixbasse.Puisilrouvritlesyeuxetlaregardafixement.Elledéglutitetrelevalementond’unairdedéfi,maislafaçondontelleserraitlesmainspourles

empêcherdetremblerneluiéchappapas.—Vousavezditquevousnevousimposeriezpasàmoi.Elleavaitprisuntonsiguindéqu’ileutdumalàseretenirderire.—Jen’auraipasbesoindefaireusagedelaforce.Unecaresse,unbaiser,etvoustomberezsous

moncharme.Asagrandesurprise,ellenedétournapasleregard.—Jeleconsidéreraicommeunrecoursàlaforce.Cen’estpascequej’attendsdevous.Jevous

répètequejenesuispasvotrepromise.—Etjevousrépètequementirnesoulagerapasvotredétresse.Ilsseregardèrentensilenceunlongmoment,etilsesurpritàappréciercetaffrontementmuet.Lapluiecommençaàtomberdoucementsurletoitdelavoiture.—Vous n’aurez pas la chance de goûter àmes baisers aujourd’hui, soupira-t-il. J’ai demandé à

Samueldetrouverunabripourleschevauxetdevenirnousrejoindredansl’habitacles’ilsemettaitàpleuvoir.

Ellecroisaàsontourlesbrassurlapoitrineetdétournaenfinleregard.Ilrefermaalorslesyeux,désireuxd’avoirlapaix.

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—Personnenenoussuit,n’est-cepas?demanda-t-elled’unevoixempreintedetristesse.Ilauraitdûêtrefâchéqu’ellepersisteàledérangermais,d’unecertainemanière,ilavaitpitiédela

façondontsafamillel’avaittraitée.—Des cavaliers nous auraient rattrapés à l’heure qu’il est, convint-il. Votre père a dû avoir la

sagessed’honorersoncontrat.— Vous voulez dire que mon oncle m’a joyeusement sacrifiée à la place de ma cousine ! Il a

pleinementl’intentiondebafouervotreprécieuxcontrat,voussavez.Ilsoupirabruyamment.—Jevousbâillonneraisinécessaire.Ellegardalesilencequelquesminutes,puisinterrompitlesommeilquicommençaitàlegagner.—Commentavez-voussudansquellechambrevenirmechercher?Ilexpiralonguement.—J’aisoudoyéungarçondecuisine.—Ilsm’ontinstalléedanslachambredeCat,soi-disantpourrepeindrelamienne.Enfait,c’était

dansl’uniquebutderuinerlecontrat.—Votrefamillen’apasjugéutiledevousparlerdecemariage,dit-ild’unevoixcalme.Vousneles

regretterezpas.Aprèstout,quelhommefaut-ilêtrepourabandonnersonclan?—Nimononcle nimonpère n’ont abandonné le clanDuff ! Ils emploient des régisseurs et des

métayers pour veiller sur leurs terres. Ils préfèrent simplement vivre en Angleterre, dans un mondecivilisé.

—Etcesontceshommessicivilisésquivousonttraitéedelasorte?Ellesemorditleslèvresetgardaàsontourlesilence.—Jenevousplaindraipas.J’aivumesgensessayerdesurvivreencultivantdesterres,lorsd’un

hiver difficile. J’ai vu le bétailmourir suite à demauvais hivers.Mon père a fait ce qu’il fallait enacceptantdeconclurececontratdemariageaveclafilled’unpuissantcomte.

—Essayez-vousdevousconvaincrevous-mêmequ’ilaeuraison?Leshommesdevraientpouvoirsemarierparamour.

Ilreniflabruyamment.—Maintenant,jesaisquevousvousmentezàvous-même.Aucunefemmedevotrerangn’espèrese

marierparamour,pasmêmeenAngleterre.Ils sentirent la voiture tanguer sur la route accidentée, puis s’arrêter. La pluie avait redoublé de

violenceetmartelaitincessammentletoitdelavoiture.—Samuelatrouvéunabriàl’écartdelaroute.Jevaisl’aideravecleschevaux…etverrouillerla

porte,carcetteconversationnem’inspireaucuneconfiance!— Je n’ai nullement besoin que vousme fassiez confiance, rétorqua-t-elle. J’ai juste besoin que

voussachiezquejenevaispasvousépouser.MêmeenEcosse,jedoutequel’onpuissecontraindreunefemmeàsemariercontresavolonté.

—Vouscomprendrezbientôtlasagessedecemariage,madame.—Allez-y,dites-le!Vouspensezquejevaisêtreobligéedevousépouserparcequeaucunhomme

nevoudraplusdemoiaprèscetenlèvement.— Non, je pense que vous m’épouserez pour honorer la parole de votre famille. Malgré votre

comportement,vousmeparaissezbienplushonnêteetinnocentequelerestedesDuff.Ilsepliaendeuxpourdescendredelavoitureetverrouillasolidementlaportederrièrelui.Après s’être occupés des chevaux, Samuel et lui revinrent à l’intérieur. Leurs vêtements étaient

trempés ; la pluie dégoulinait de leurs chapeaux et s’engouffrait dans le col de leursmanteaux.Rionaaffichait de nouveau unmasque pâle et impassible. Elle blêmit plus encore lorsqu’ils rangèrent leurspistoletsdanslecompartimentsouslabanquette.

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Puiselleselaissaglisseraumilieudusiège.—Vous pouvezvous asseoir de chaque côté.Ungentleman ne permettrait pas que les vêtements

d’unedamesoientmouillés.—Sijecomprendsbien,maintenant,noussommesdesgentlemenetnonplusdessauvages,répliqua

Hughd’unairsarcastiqueenposantsonchapeauàl’extrémitédelabanquette.Rionaeutlasatisfactiondeconstaterqu’ilssetenaientloind’elle.Elledéchantalorsqu’ellecomprit

queleursjambesoccupaientbeaucoupdeplace.Elleessayaalorsdecoincersesjupesautourdessiennespouréviterd’êtremouillée.

Ilscroisèrenttousdeuxlesbras,etSamuelfermalesyeux.—Nous allons attendreque l’oragepasse ?demanda-t-elle.Nousne feronspas escaledansune

auberge?— Vous ne m’avez pas encore démontré que vous étiez capable de faire preuve de retenue,

mademoiselle.—Jen’aijamaispasséunenuitcomplètedansunevoiture,protesta-t-elle.—Vousl’avezfaithieretvousallezencorelefairecettenuit.Vousêtesausecetàl’abri.Estimez-

vousheureuse.Jevaisessayerderesterdemoncôtédelabanquettesanssuccomberaudésirquevousm’inspirez.

—Prévenez-moiafinquejegardelesyeuxfermés,ditSamuel.Hughtentadegardersonsérieux,mêmesilatâcheétaitdifficile.Ilétaitmouillé,ilavaitfroidetil

était fatigué.Rionaavait fait toutsonpossiblepour l’exaspérerdurant l’après-midietelleétaitencorecapabledeleforceràresteréveillé.

—Ilyadescouverturessousmabanquette,dit-elled’untonpincé.J’aifroid.—Alorsprenez-les,répondit-il,exaspéré.Terribleerreurdejugement!Rionafutcontraintepourcefairedeselever,deleurtournerledoset

de se pencher en avant. Sans cerceaux, ses jupes épousaient de manière troublante la courbe de seshanches.Ildéglutit,lançauncoupd’œilàSamuel,quieutladécencededétournerleregard.

LeshanchesdeRionasebalançaientàhauteurdesesyeux. Ilauraitpuposersesmainssurelleset…

Elle se redressa, laissa retomber la banquette et se rassit.Enroulant plusieurs couvertures autourd’elle,elleleurlançaunregardméfiant,commes’ilsallaientlesluiprendre.

MaisHughétait tropoccupéàessayerd’oublierque,dansquelquessemaines,elledeviendraitsafemme. Il était censé se montrer patient. A la place, il la regarda se contorsionner pour trouver unepositionconfortable,enproieaudésirleplusviolentetàlaplusirritantedesfrustrations.

—Jen’aimepasabandonnermonposte,ditfinalementSamuel.Noussommestropvulnérables.— L’endroit que tu as choisi pour nous cacher est bien isolé. Nous pouvons nous permettre de

dormirjusqu’àcequelapluies’arrête.Aucunbanditneprendraitlerisquequelapoudredesonpistoletsemouille.Nousallumeronsalorsunfeupournousréchauffer.

Samuelneparutpasconvaincu,maisHughs’efforçadegarderlesyeuxfermés,biendéterminéànepluspenseràRiona.Ilvenaittoutjustedelarencontrer,etelleavaitdéjàbeaucouptropd’emprisesurlui. Elle était vive et arrogante, exaspérante et sympathique, et beaucoup trop séduisante pour satranquillitéd’esprit.Maissabeauténetenaitpasuniquementàsonapparence.Ilétaitévidentqu’ellesesous-estimait.Ilétaitrarequ’unebellefemmeignoresonpouvoirsurleshommesetnecherchepasàs’enservir.Pourtant,celasemblaitêtresoncas.

Commeiln’étaitpaspromptàjugerlesgens,ils’imposadegarderdureculetderesterobjectif.Illadétailladenouveauavidementàtraverssescils.Illavoulaitpourluiseuletilvoulaitqu’elle

le désire en retour, sauf qu’il ne savait pas comment s’y prendre. Et le fait d’avoir été contraint del’enleverétaitunélémentquirisquaitdeluicompliquerconsidérablementlatâche…

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Chapitre4

Rionaseréveilladésorientée,nesachantplusoùelleétait.Couchéesurquelquechosed’exiguetdedur,ellenepouvaitpasallongerlesjambes.Enveloppéedansunecouvertureenlainerêche,latêteposéesuruneautrefaisantofficed’oreiller,ellen’avaitpasfroid.

Soudain,lessouvenirsrefirentsurface,etelleselevaensursaut.Elleserappelasonenlèvement,satentatived’évasionquis’étaitsoldéeparunéchec,lesdeuxgrandsHighlandersquironflaientàquelquescentimètresd’elleetquil’avaientempêchéededormirunepartiedelanuit.

Aprésent,elleétaitseuledansl’habitacle,mêmesilavoiturenebougeaitpas.Unfiletdelumièrefiltrait par une fenêtre. Elle essaya d’actionner la poignée de la porte, sans beaucoup d’espoir. A sagrandesurprise,celle-cis’ouvritfacilement,etellediscernadesvoixétoufféesàl’extérieur.Lorsqu’ellepassalatêteparl’entrebâillementdelaportière,lesdeuxhommeslavirentaussitôt.Ilsétaientassissurdestroncsd’arbredevantunfeudebois,vêtusdeleurschemisesetdeleursculottes.Leurschaussettesetleursmanteauxétaiententraindeséchersurunautretronc.

— Lady Riona…, la saluaMcCallum en se levant. Samuel a préparé du porridge pour le petitdéjeuner.

—Çasent…lejambon,dit-elled’unevoixhésitante.—Jesuisalléchezunfermiervoisinpouracheterdesprovisions.Nousavonségalementdesœufs.—Desœufs,répétaSamueld’unairsatisfaitencontemplantlagrilleoùplusieurscuisaientdéjà.—Venezvousjoindreànous,àconditionbiensûrdemepromettredenepaspartirencourant.— Je vous promets de ne pas courir pendant le petit déjeuner, rectifia-t-elle, descendant de la

voiture.Il lorgna vers elle et, de nouveau, elle crut le voir esquisser un sourire en coin, mais peut-être

n’était-ceque le fruitde son imagination.HughMcCallumnesouriaitpas. Il croyaitque lemonde,oul’avenirdesonclanaumoins,reposaitsursesépaules.Ilpouvaitfairetoutcequ’ilvoulaitaunomdececlan.Aconditionquetoutessesassertionsaientunfonddevérité.Peut-êtren’était-cequ’unplansavantquinevisaitqu’àrécupérersadot?Maiselleétaittropaffaméepouryréfléchirlongtemps.

Ilspoursuivirentbientôtleurcheminverslenordet,cettefois,McCallumpritlesrêneslepremier.Samuelvint s’asseoiren faced’elledans lavoiture.Le soleilperçaitde tempsen tempsà travers lesnuages,maislarouteétaitencoremoinspraticableaprèslapluieet,parfois,uneroues’enlisaitdanslaboue. McCallum était contraint de conduire sur les côtés accidentés de la chaussée pour éviter lesornières, etRiona devait s’agripper de toutes ses forces à la banquette pour ne pas être jetée au sol.Heureusementqu’elleavaitl’estomacsolidementaccroché,sansquoielleauraitrendusonpetitdéjeuner.Ils continuèrent à avancer lentement mais sûrement, tandis que la voiture gravissait péniblement lescollines.

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Alafindelamatinée,ellecrutqu’elleallaitmourird’ennui.Elleréfléchissaitàunmoyend’irriterMcCallumavecsesrequêteslorsquelavoitureralentit.

—Iladitqu’ilconduiraitjusqu’àmidi,déclaraSamueld’unevoixinquièteenseredressant.—Labourseoulavie!lançauninconnu.—Desbandits!s’écriaRiona.Elles’adossaàsonsiègetandisqueSamuelsortaitsonpistoletetl’armait.L’hommequiluiavait

parutimideetréservécomparéàMcCallumavaitàprésentlaprestanced’unsoldatredoutable,avecsonregardduretsonairsévère.

—Quoiqu’ilarrive,restezici,ordonna-t-ilàvoixbasseenregardantàtraverslaminceouverturedurideau.

—Sivoussortez,cebanditvavousabattre!Iln’estprobablementpasseul.—Ilyadegrandeschances,eneffet.Maisilnepeutpastireràlafoissurmonsieuretsurmoi,dit-

ild’unairindifférent.Riona se demanda si cet assaut n’était pas l’occasion pour elle de se sauver. Les bandits ne

voulaient que de l’argent et des bijoux. Elle valait certainement plus d’argent qu’ils ne pouvaientl’imaginer s’ilsdemandaientune rançonà sa famille.Cette idéeétait aussi follequedangereuse,maisn’était-ilpaspréférabledeprendrecerisquequededevenirl’époused’unHighlanderpourlerestedesesjours?

—N’avez-vouspasunebourseàleurdonner?demanda-t-ellepourdistraireSamuel.Monpèreenatoujoursdeux,lasienneetunepluspetitepourlesbandits.

—Taisez-vous!luiintima-t-ilentendantl’oreilleverslafenêtrepourécouter.Rionafitdemême.—Restezoùvousêtes,lançalebanditàMcCallumavantd’ajouter,s’adressantmanifestementàune

autrepersonne:—Gardezunœilsurlui.—Iladescomplices,murmuraRiona.Samuell’ignora,latêtepenchéesurlecôté,l’oreilletendue.Ilsentendirentdesbruitsdebottesquicrissaientsurlegravierets’approchaient.—Vous,là,danslavoiture…Nospistoletssontbraquéssurvotrecocher,etnousn’hésiteronspasà

nousenservirsinécessaire.Rionalaissaéchapperuncri,etSamuellaregarda,bouchebée.—J’aiétéenlevée!hurla-t-elle.Libérez-moietvousrecevrezunegrosserançon!Samuelbonditversellepourlamuseler,etelleneputluttercontrelui.Lavoituretangua,commesi

McCallumavaitbondiausol.Soudain,uncoupdefeuretentit.—Bonsang!marmonnaSamuel.Ils’élançaverslaportièreetl’ouvritàlavoléeavantdejaillirdelavoiture.Riona se tint dans l’embrasure.Au-dehors, c’étaient toujours lesmêmes champsbordésdepetits

murs enpierrequi s’étendaient en longuesvagues lissesd’uncôté,des collines couvertesd’arbresdel’autre. Aucune grange, aucun cottage n’était en vue. L’endroit parfait pour deux Highlanders fugitifs.L’endroitparfaitpourdesbanditsdegrandschemins.Ellesedoutaitqu’ilsn’étaientpashabituésàcequeleursvictimesleurrésistent,etMcCallumallaitmanifestementleurdonnerdufilàretordre.

L’undesbrigandsessayaitdéjàdemontersursoncheval,etsajambecouvertedesangl’empêchaitde semouvoir facilement.Le coup qu’elle avait entendu provenait-il du pistolet deMcCallum ? Il sebattaitàprésentavecl’autrehomme,etSamuels’étaitélancéversuntroisièmelarron,épéeetpistoletàlamain,tandisquelebanditreculaitverssoncheval.RionasefigeaenentendantSamuelpousseruncriàglacerlesang.

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Lederniermalandrins’aperçutalorsqueseshommesavaientbattuenretraite.Ilbonditsurlecôtéetcourutverssamonture.McCallumnesedonnapaslapeinedelepoursuivreetrestadebout,triomphant,l’épéepointéeverslesol,àpeineessoufflé.

—Bandedelâches!cria-t-ilaprèsleschevauxquis’éloignaientaugalop.Son plan avait échoué, et Riona se demanda quelle serait sa punition. Mais pour l’heure, ses

ravisseurssemblaientavoiroubliésoncrietsesouriaientcommedesenfantsquivenaientderemporterune course. Elle n’avait encore jamais vu McCallum sourire franchement et elle fut surprise par lamanièredontsonsourireéclairaitlestraitssévèresdesonvisage,luiconférantunebeauté…animaleetvirile.

Unsourirequis’évanouitlorsqu’iltournaversellesonregardgrisetacéré.Sescheveuxs’étaientdétachéspendantlecombat,etsesbouclessombresretombaientsursesépaules.Ilavaitl’airdecequ’ilétait,unfaroucheHighlander,etellevenaitdesedressercontrelui.Ellesefigea,sachantqu’ilétaittroptardpourfuir.

—Quepensez-vousdemonplan?lançaalorsSamuelenrengainantsonépéedanssonfourreau.Jeparledel’appelausecoursdeladyRiona,biensûr.

Elles’efforçadecachersasurprise.—Etait-cevraimentunplan?demandaMcCallum,l’airsuspicieux.—J’étaiscertainqu’ilsnerechigneraientpasàrançonneruneladydehautrang,continuaSamuel.

Leurhésitationvousapermisdepasserà l’attaque.Vousenavezmisdeuxendérouted’unseulcoup.Impressionnant!

Respirantdifficilement,Rionaessayadeprendreunairdétaché,mêmesi,ensonforintérieur,elleétaitsidéréequeSamuelaitprissadéfense.Elleignoraitlaraisond’untelacte,etellesesentaitàlafoisredevableenversluietinquiètedesesmotivations.

— Je vous dois mes remerciements, en ce cas, car votre plan a fonctionné, dit McCallum ens’adressantàelle.Votrecriperçantlesadistraitsplusquetouteautrechose.

Illafixa,puisajoutaàcontrecœur:—Bienjoué.Ellehochalatête,surprisederessentirunepointedeculpabilité.Pourquoidonc?N’était-ellepas

leurprisonnière?—Jenepensepasquevousserezmieuxpréparés,laprochainefois.Ilhaussaunsourcilsombre,maisparaissaitd’assezbonnehumeurpournepasluirépondreavecle

mêmesarcasme.—Nousn’avonspasànousinquiéterqu’unetellechoseseproduiseenEcosse.Lesgainssonttrop

dérisoirespourlesbandits.Samuelsemitàrire,maisellenevoyaitpascequ’ilyavaitdedrôledanscetteréponse.—Jeconduirai jusqu’àmidi, repritHugh.Essayonsdedistancerautantquepossiblecesbandits,

avantqu’ilsretrouventleurcourage.RionaremontaensilencedanslavoitureetlasentittanguerlorsqueSamuellasuivit.Ils’assiten

faced’elle,etellesecontentadeleregarderd’unairconfus.Lavoitures’ébranla,etSamuelfermalesyeux.

—Pourquoiavez-vousmenti?demanda-t-ellealorsd’unevoixhésitante.Ilrouvritlesyeuxetlaregardaavecunesympathiequ’ellenecompritpas.—Vous avezpeur, vous êtesdésespérée, et je vous comprends, dit-il.C’est pourquoi je vous ai

aidéecettefois.MaisMcCallumestmonchefetmonami.Aussijeneleferaiplus.Evitezdecommettredeserreursstupidesàl’avenir.

Rionadéglutitpéniblement.

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—Est-ce si stupide de vouloir rentrer chezmoi ? fit-elle d’une voix qui sonna déchirée par lesregrets,mêmeàsespropresoreilles.

—Ileststupidedevouloirchangercequinepeutpasl’être.Votremariageaétédécidédepuistrèslongtemps,madame.

—Maispaspourmoi!sedéfendit-elleavecvéhémence.Encoreunefois,vousvousêtestrompésdefemme!

Il secoua la têteet fermadenouveau lesyeux.Rionas’essuyad’ungeste rageur lespaupières. Ilétaitinutiledepleurer.Celanelamèneraitnullepartavecceshommes.

***

Deux jours plus tard, ils traversèrent la rivière Sark et arrivèrent en Ecosse. Riona avaitl’impressionqu’unepetitepartied’ellevenaitdemourirenmêmetempsquesonespoird’êtresecourue.Ellenepouvaitcompterquesurelle-mêmeàprésent.

Ils s’arrêtèrent pour se rafraîchir et faire boire les chevaux dans la rivière. C’était comme siMcCallumet son cocher pensaient que l’eau avait unmeilleur goût de ce côté de la frontière, tant ilssemblaientheureuxd’êtrederetour.Ilyavaitducourant,etleniveaudelarivièreétaitélevéenraisonde la pluiequi s’était abattue sur eux la veille.Lesberges étaient boueuses et envahiesdemauvaisesherbes.

En essayant de se laver le visage, Riona glissa du talus et finit avec de l’eau glacée jusqu’auxcuisses.Aussitôt,McCallumseprécipitapourluitendrelamainetl’aidaàremontersurlaterreferme.Maiselletrébuchaets’affalaenarrièredansunenchevêtrementdejupeetdejupons.L’enviedepleurerla prit. Elle se sentait crasseuse et puante, et maintenant sa robe était maculée de boue. Ses épauless’affaissèrent,etellesecouvritlevisageàdeuxmainsavantdeprendreuneprofondeinspiration.

—Nousdevrionsnous arrêterdansune auberge, ce soir, suggéraSamuel.Nous avonsbesoindevêtementspropres.

Riona garda la tête baissée, sachant que si elle manifestait un peu trop sa joieMcCallum étaitcapablederejetercetteproposition.

—D’accord,nousferonshalteàGretnaGreen,dit-il,dansunebonneaubergeécossaise.Oùpersonnene viendra enaideàuneAnglaise, songeaRiona, consternée.Bien sûr, une partie

d’elleétaitécossaise,maiselleneferaitpaslepoidscontreunchefdeclan.Pourtant,l’idéedeselaverlui apparut commeungrand luxeaprèscinq joursdevoyage.Elledécidadoncdeneplus seplaindrejusqu’aulendemain.

McCallum ne lui avait pas paru si contrarié, lorsqu’elle s’était mise en tête de l’agacer en luidemandantderenonceràsonprojetdel’épouser.Ils’étaitcontentéderejoindreSamuelsurlebancduconducteur,lalaissantseuledanslavoiture.Samuelluiavaitdonnéunpaquetdecartes,laveille,etellepassaitletempsentirantdescartesauhasard,carelleneconnaissaitpasdejeuquisejouaitseul.Maisaumoins,ellepouvaits’occuperlesmains.Parfois,elleregardaitpendantdesheureslepaysageparlamince ouverture du rideau, guettant des changements indiquant qu’ils étaient en Ecosse, mais elle neremarquariendebiendifférent.

Ils ne tardèrent pas à atteindre le petit bourgdeGretnaGreen, oùplusieurs routes convergeaientautourd’uneplaceherbeuseet triangulaire.Levillageétait composédequelquescottagesaux toitsdechaumeetauxmurspeintsàlachaux,d’uneforge,d’uneéglise,etriend’autre.Sicelieupossédaitune«bonneaubergeécossaise»,Rionaignoraitoùellesetrouvait.Maishonnêtement,peuluiimportaitdesavoiroùilsallaients’arrêter,àconditionqu’ellepuissequittercettevoiturepourlanuit.

L’aubergeserésumaitàdeuxchambresau-dessusd’unetaverne,dontl’uneseulementétaitprivée.Riona fut heureuse que McCallum la fasse monter par l’escalier de derrière, auquel ils accédèrent

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directementdepuislacourdesécuries,aulieudeluifairetraverserlehallàlavuedetous.Ellesavaitqu’ilvoulaitsurtoutéviterlesregardscurieux,maiscelaluiétaitégal.

Lachambreétaitpetiteetnecontenaitqu’unlit,unetableavecdeuxchaises,unetabledetoiletteetdes patères au mur pour suspendre les vêtements. En Angleterre, les auberges étaient luxueusescomparéesàcelle-ci.Oudumoins,cellesquesesparentsfréquentaient.

—S’ilvousplaît,dites-moiqu’ilestpossiblededemanderunbainchaud!—L’aubergisten’étaitpasraviàcetteidée,maisilleferapournous.—Pournous?s’étonna-t-elle,sentantnaîtreunepointedemalaise.—IlyaunlitpourSamueldansledortoir,maisilestnormalqu’unhommepartagesacoucheavec

safemme.Ellelefusilladuregard.—Vous…vousleuravezditquenousétionsmariés?—Jenepeuxvousfaireconfiance,ladyRiona,vousm’enavezdonnésuffisammentdepreuves,pas

plus que je ne peux vous laisser seule toute une nuit. Et pas question de vous présenter comme mamaîtresse,n’est-cepas?

Elleouvritlabouche,maisaucunsonn’ensortit.—Sicelapeutvousconsoler,lafemmedel’aubergistes’estmontréetrèscompatissantelorsqueje

luiairacontévotreaccidentprèsdelarivière.Ellem’apromisdevousapporterdesvêtementspropresetdelaverlesvôtres.

Des vêtements propres… Cette idée ressemblait au paradis ! Quelques jours plus tôt, elleconsidéraitlesbainsetlesvêtementscommeacquis.Etn’avait-ellepasdéjàdormidanslavoitureavecMcCallum?Enquoiétait-cedifférentdepartagersachambre?

Pourtant,ilyavaitunedifférence,etellelesavait.—Nousnedormironspasensembledanscelit,leprévint-elled’unevoixqu’elleneputempêcher

detrembler.McCallumprenaittouteslesdécisionssanselle.Ilfallaitbienqu’ellesedéfende.—Nous dormirons ensemble, répondit-il comme si sa parole faisait loi. Et je respecterai notre

engagement.Jenevousprendraipasavantnotremariage.Rionasentitsesjouess’empourprer,mêmesiellefrissonnaitdefroidsoussesvêtementsmouillés.—Jenevoudraispasquevousattrapiezlafièvre,ajouta-t-il.Oùenestcebain?Ilsortitdanslecouloirpourappeleruneservante,etRionas’efforçadenepascéderàlapanique.

Commentallait-elleselaver?Sielleavaitassezdecourage,elleessaieraitdes’échapper,mais…quiluiviendraitenaidedanscepetitvillagecontrelepuissantchefdesMcCallum,etoùirait-elle?

Elle était tout aussi prise aupiègequedans lavoiture.Lentement, son espoir et sapersévérances’évanouirent. Rien de ce qu’elle avait pu dire n’avait convaincu cet homme qu’il se trompait. Ellepouvaitessayerencore,biensûr,etrefuserdel’épouser.Elleignoraitcequipouvaitendécouler,maisellenevoyaitpasd’autressolutions.

McCallum déverrouilla la porte et la tint ouverte pour laisser entrer deux domestiques quitransportaientunebaignoire,bientôtsuiviesparunelenteprocessiondeseauxd’eauchaude.Trèsvite,unnuagede vapeur s’échappade la baignoire.Les serviettes étaient rêchesmais propres, et le savonnesentaitpasmauvais.

—Commentvotremaria-t-ilfaitpourperdrevotremalle?selamental’opulenteaubergiste.Riona préféra ne pas broncher face à cemensonge de peur queMcCallum ne l’enferme dans la

voiture froideethumidepour lanuit. Il luidécochauncoupd’œilconfiant,commes’il lisaitdanssespensées.

La femme déplia une chemise, des jupons et une robe ouverte lacée sur le devant, ainsi qu’unechemisedenuit,uneculotteetunechemised’homme,etdesbaspourtouslesdeux.

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— Il m’a grassement payée pour tout ceci, dit-elle d’un air satisfait. Je reviens chercher vosvêtements,ajouta-t-elleenlesdévisageantd’unairàlafoisdégoûtéetcompatissant.Commentavez-vousfaitpourtomberdanslaSark?

—Les berges étaient boueuses, et j’ai glissé, expliqua Riona d’un air absent en contemplant labaignoireavecenvie.

—Oh!maisjedisdesbêtises!Dois-jeviderlabaignoireetlafaireremplirpourvousquandvotreépouseaurafini,lairdMcCallum?

Elleparaissaitinquiètedesaréponsemaisrésignéeàlesatisfaire.Ilsetournaverselle,aussigrandqu’unemontagnedanslapiècemaigrementmeublée.Ilparaissait

mêmeabsorbertoutelachaleurdelacheminée,songeaRionaavechumeur.—Non, jeme laverai lorsquemafemmeaura terminé,dit-il. Inutiledevousdonnerplusdemal,

madame.Elleluiadressaunsourirereconnaissant.—Danscecas,jevaismeretireretvouslaisserenprofiterjusqu’àcequel’eausoittiède.Ellesortitaussitôt,etlapiècefutsoudainplongéedansunsilencedigned’unenterrement.Seulle

crépitementdelatourbedanslacheminéeletroublait.Unefuméeâcremaispasdésagréableplanaitdansl’airlourd.

McCallumverrouillaostensiblementlaporte.—Jevousdemandederesterdanslecouloir, insistaRiona,soulagéedeconstaterquesavoixne

tremblaitplus.Ilroulalesyeuxaucielavantdesedirigerverslacheminée.Puisilôtasonmanteau,qu’ilsuspendit

au dossier d’un fauteuil face à l’âtre, avant de se défaire de songilet.Enfin, il tira sur sa chemise etdéboutonnasaculotte.

—Quefaites-vous?demanda-t-elled’untonbrusque.—Jefaisséchermesvêtements.Cettechemiseestassezlonguepournepasheurtervotrepudeur,

n’ayezcrainte.Ilretiraégalementsesbas,saculotteetsoncaleçon.Sachemiseluiarrivaitàmi-cuisse,etRiona

détournaprestementleregard,tandisqu’ils’asseyaitdevantlefeudecheminéeenpoussantunprofondsoupirde satisfaction.Hormis sachemise, il étaitnu.Rionaeutalors l’impressionque l’imagede seslonguesjambesnuesetmuscléesresteraitgravéeàtoutjamaisdanssamémoire.

Commentpouvait-elleespérerprendresonbainàlamercidesonregardappréciatif?— Je détournerai la tête, annonça-t-il.Mais faites vite, ma dame. J’aimerais quemon bain soit

encoretiède.Rionaétaittropsidéréepourparler.—J’aibesoinde faireappelàunebonne,dit-elleenfinensedirigeantvers laporte,carellene

pouvaitpasdélacerseulesarobe.Pourunhommedesastature,ilsedéplaçaàunevitessesurprenante.Ilatteignitlaporteavantelle.—Vousn’enferezrien.—Mais…Illafitpivotercommesielleétaitunepoupéedechiffonetcommençaàdélacersarobe.L’exercice

dutluiparaîtretroplong,carilmarmonna:—Mauditslacetsmouillés!Riona se mordit les lèvres et garda le silence. Chaque fois qu’il tirait sur les liens, elle avait

l’impressionqu’illuicaressaitlapeau.Jamaisellen’avaiteuuneconscienceaussiaiguëd’unepersonnesiprèsd’elle.Aucunhommenes’étaitàcepointapprochéd’elle.Ellesavaitqu’ellen’étaitpaslaide,mais Cat était une jeune fille pleine de vivacité et faisait de l’ombre à toutes les autres femmes qui

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l’entouraient. Et puis, elle-même veillait sans cesse sur sa sœur, Bronwyn,même durant la saison, àLondres,pendantquesacousineparticipaitàdessoirées.

Mais aujourd’hui… cetHighlander était persuadé qu’il allait l’épouser. Il se croyait en droit deposerlesmainssurelleetdeladéshabiller.Toutenellevoulaitserebeller,maisc’étaitinutile,songea-t-elleensentantdeslarmesluibrûlerlespaupières.Dèsl’instantoùleslienssedéfirent,elletraversalapièceentenantsurellesoncorsage.

McCallumlacontemplaavecdesyeuxaussibrûlantsquedesbraises.Seslongscheveuxdétachéslui tombaientsur lesépaules.Ilavaitdespiedspuissantsetdesmainscalleusesdeguerrier.Ilpouvaitfaired’elletoutcequ’ilvoulait.Etait-cebienprudentdesedéshabillerdevantlui?

Ellesoutintsonregardunlongmomentetsentitquelquechosevibreraucreuxdesonventre.Elleavaitdumalàrespirer,nepouvaitpluscilleretneparvintàreprendresonsoufflequelorsqu’ildétournaleregard.

Ilsedirigeaverslacheminéeets’affaladansunfauteuil.—Jepensequenotremariageseraréussi,madame,dit-ilsanstournerlatête.Jepeuxdéjàsentirle

courantquipasseentrenous.—Entrenous,répéta-t-elleavecdédain.Vousvoustrompez.Jeneressensquedel’aversionetdela

colèreàvotreégard,riendeplus.Cettefoisilsetournaverselle,etelleaperçutsonprofil,sessourcilsépais,sonnezpuissantetsa

boucheferme.—Votrecolèrefaitbrillervosyeuxd’unfeuquejetrouvetrèsséduisant.Sachezquejesuiscapable

demaîtrisercetteflamme,madame.Puisilsedétournadenouveau.Rionaavaitenviedecrier,deniertoutenbloc,maisc’étaitlaréactionqu’ilrecherchait,etellene

voulaitpasluidonnercettesatisfaction.Surveillantsesmoindresgestes,elleôtasarobeetfitunbondpours’extrairedelamassedetissu,

avantderetirersesjuponspuissachemise.Elletremblaitàprésentmalgrélachaleurquirégnaitdanslapièce. Trébuchant dans sa hâte, elle enjamba le bord de la baignoire et s’assit dans l’eau. Mais,lorsqu’elles’aperçutqueleniveauluicouvraitàpeinelesseinsmêmeens’yenfonçantaumaximum,ellepestaentresesdents.

Dire qu’elle était nue, dans lamêmepièce qu’un hommequi voulait la forcer à l’épouser !Ellesaisitungantdetoilette,ydéposaunepetitequantitédesavonàl’odeurétrangeetcommençaàselaver.Lasensationd’avoirchaudetd’êtrepropreétaitmerveilleuse.Siseulementelleavaitpus’endélecter.Saufqu’elleavaitl’impressiond’êtreunlapintentantdepasseràpasfeutrésdevantunloupetrêvantdepouvoirdisparaîtreavantdesefairerepérer.

Peu lui importait que l’eau soit souillée. Elle renversa la tête en arrière pour se mouiller lescheveux,puiscommençaàleslaveravecdusavon.Sielleavaiteulechoix,ellelesauraitlavésencoreetencore,maisellen’avaitpasletemps.Heureusement,lesdomestiquesleuravaientlaisséunseaud’eaupropre,etelles’enservitpourlesrincer.Lorsquel’eauéclaboussalesol,McCallumtournalatêtesanscependantregarderdanssadirection.

—Negaspillezpasl’eau,mademoiselle!J’aibienl’intentiondel’utiliser.Rionasecontentadegrimacer,heureusequ’illuiaitpermisdeselaverlapremière.Finalement,ellesesentitaussiproprequepossible.Chezelle,unebonneseseraittenueàsescôtés,

prêteàl’envelopperdansd’épaissesservietteschaudes.Ilneluiseraitjamaisvenuàl’espritd’allerleschercher elle-même.Cette fois, elles étaient posées sur la table, et elle allait devoir sortir du bain etmouillerleplancherpourlesatteindre.Acetteidée,elleseblottitdanslabaignoire,sesentantstupideetindécise.

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McCallumtournadenouveaulatêtelorsquelesclapotementsdel’eaucessèrent,etellelevitfixerlatableetlesserviettes.

—Pourquoinem’avez-vouspasditquevousaviezbesoind’aide?grommela-t-ilenselevant.Lesavonavaitlaisséquelquesbullesàlasurface,maispassuffisammentpourcachersoncorpsnu.

Rionaremontalesgenouxsurlapoitrine,s’offrantainsiunebienmaigreprotectionetespérantqu’illuiapporteraitlesserviettesendétournantlesyeux,commeungentleman.

MaisMcCallumn’étaitpasungentleman.Ilvintseplaceràcôtéd’elle,lesserviettesàlamainetlesyeuxbraquéssurelle.Sesprunellesgrises,d’ordinairesifroidesetimpassibles,semblaientscintilleràlalueurdesflammes.

—Celafaitlongtempsquejeconnaisvotreexistence,jeunefille,dit-ild’unevoixgraveetrauque.J’aifaitdeschosesstupidesenvoulantmerebellercontrenotredestincommun.Jemesuismêmedressécontremonpèreetjeluienaivoulud’avoirscellémonavenirsansmonconsentement.Jen’aijamaisétélibred’offrirautrechosequemoi-mêmeàunefemme.Mais,maintenantquejevousconnais,jesuistrèssatisfaitdumarchéquenosdeuxfamillesontconclu.Plusquesatisfait.Vousêtesénergiqueetintelligente,ladyRiona,qualitésque jevalorisegrandement chezuneépouse. Ilme tardequenous soyonsmariés,ajouta-t-ild’unevoixplusgraveetrocailleuse,maisilmetardeplusencorequenousvivionsnotrenuitdenoces.

Rionaramenadavantagelesgenouxcontreelle,envahied’unepaletted’émotionsétranges,allantdelafrustrationetdel’inquiétudeàunsentimentnouveau:ellesesentaitflattée.Maiscommentpouvait-elleêtre sensible aux éloges et aux attentionsd’unhommequi l’avait kidnappée et emmenéedans leNordcontresongré?

Asadécharge,ilcroyaitqu’elleétaitsapromiseetilenétaitheureux.Desoncôté,ellesesentaitstupideetsavaitque son troubleétaitdûà saméconnaissancedeshommes.Quelquesmots flatteurs etvoilàqu’ellesesentaitfondre!

—Jenevous épouserai pas,McCallum, répondit-elle en essayant d’oublier qu’elle était nue. Jevous le répète, vous vous êtes trompé de personne et, un jour ou l’autre, vous serez bien obligéd’accepterlavérité.

Ilcontinuadelafixerpendantunlongmomentd’unairindéchiffrable,puislescoinsdesaboucheserelevèrent.

—J’auraisdûajouterquevousétieztêtue.Ilposalesserviettessuruntabouretàcôtéd’elleetluitournaledos.Elleenenroulauneautourde

sescheveuxentremblant.Puiselleseleva,seséchaàlahâte,enjambaleborddelabaignoireetenfilasivitesachemisedenuitqueletissurestacolléauxpartiesdesoncorpsqu’elleavaitomisdesécher.

Mais aumoins, elle avait quelque chosepour couvrir sanudité.Si seulement elle avait pu avoiraussiunpeignoir!

—J’aiterminé,dit-elleens’approchantdufeu.Ilseleva,etellesesentitunefoisdeplusminusculeetsansdéfenseàcôtédelui.Elleauraitaimé

s’enfuircommeunesourisapeurée,maisellenelefitpas.Illuiavaitpromisdenepaslaforceravantleurmariage,etelleétaitprêteàfairedesonmieuxpourquecelan’arrivepas.

Ilpassadevantelleenlafrôlant,etelleallaprendresaplacedevantlacheminéeoùelleentrepritdesepeignerlescheveuxàl’aidedesesdoigts.Ellenetournapasla têteenentendant leclapotementdel’eau suivi d’un grognement de satisfaction.Ce bruit la fit frémir,mais ce n’était pas de peur.C’étaitcomme si son corps réagissait à la présence de McCallum d’une manière incontrôlable, etincompréhensible.

Il garda le silence un longmoment, et elle s’endormit presque en sentant la chaleur du feu et lebonheurdeporterdesvêtementspropresopérerleurmagie.

Soudain,sonestomacgargouillabruyamment,lafaisantgrimacer.

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—Lesoupernevapastarderàarriver,ditMcCallum.Ellehochalatête.—Ilsembleraitquej’aieoubliéàmontourdeprendreuneserviette,ajouta-t-il.Elleauraitjuréavoirentenduunepointed’amusementdanssavoixmais,lorsqu’ellesetournavers

lui, l’expressiondesonvisageétaitaussi impassiblequ’àsonhabitude.Ellefut tentéede lui lancer laserviette,maisil luiavaitfait tropdefaveurscesoir-làpourqu’elleprennelerisquedeprovoquersacolère.Ellesaisitladernièreserviettesurlatableetlaluiapportaendétournantautantquepossibleleregard. Mais, à moins de passer par-dessus la baignoire et de tomber sur lui, elle fut contrainted’apercevoirunepartiedesongrandcorpsengoncédanslaminusculebaignoire.Ilavaitletorseetlesbrasd’unhommevigoureux.Outrelacicatricequiluibarraitlementon,elleenremarquad’autres.Ilnereleva pas les genoux comme elle l’avait fait, mais heureusement les bulles de savon dissimulaientefficacement lesparties immergéesde soncorps.Elle étaitpeut-être ignorante,maisquelquechoseenellesemblaitrépondreagréablementàsesformes,etellen’aimaitpaslefaitdenepouvoircontrôlerlespartieslesplusintimesdesonêtre.

—Merci,jeunefille,dit-ilenprenantlaserviette.Jevaisavoirbesoindevouspourmesécherledos.

RionanepritpaslapeinedeluirépondreetretournaverslacheminéepourcontinuerdesesécherlescheveuxàcôtédesvêtementshumidesdeMcCallum.Lorsqu’elleentenditfrapperàlaporte,ellefitlagrimaceenlevoyantallerouvrir,vêtuuniquementd’unelonguechemisepropre.Ilrenvoyalaservanteetapporta un plateau de nourriture sur la table. Elle contempla les côtelettes de mouton fumantes avecenvie.

Elle retourna sa chaise et s’assit en face de lui. Ils avaient l’air de deux personnes ordinairess’apprêtantàprendreleurrepas.Etait-ellecenséeleservir,commebeaucoupd’hommesdesonentourageattendraientd’unefemmequ’ellelefasse?Maisilluitendituneassiettepleinedenavets,decarottesetdeviandeetattenditpolimentqu’ellecommenceàmanger,cequil’étonna.

Voyantqu’ilcontinuaitdel’observerdeprès,ellefronçalessourcils.—Quelquechosenevapas?demanda-t-elle.—Laviandeestbonne.Vousl’aimez?—Elleestacceptable.En toute honnêteté, elle était délicieuse, surtout après cinq journées passées à prendre des repas

froidsoudesalimentsroussisparlefeu.—VousverrezladifférencequandvousgoûterezauxplatsdeMmeWallace.Autrefois,elleétaitla

cuisinièredeLarig,maisaujourd’huijepensequ’elledoitêtrelagouvernanteduchâteau.Riona ne répondit rien. Elle n’avait pas l’intention de rester très longtemps à Larig.McCallum

finiraitparaccepterlavérité.Pendantplusieursminutes,ilsmangèrentensilence,etellesecontentadesavourerlachaleurdufeu

danslacheminéeetlebonheurd’êtrepropre.Puisellesongeaqu’ilétaitseulavecelle,etqu’elletenaitpeut-êtrelàl’occasiondedécouvrirdesinformationsdontellepourraitseservirpourl’amadouer.Elleavaittoutefoisdumalàsemontrerpolieetconcilianteaprèstoutcequ’illuiavaitfaitsubir.

— Vous avez dit, commença-t-elle d’une voix prudente, que vous êtes au courant depuis trèslongtempsdececontratdemariage.Vousnevousêtespasrebellé?

Ilavalaunebouchéedenourritureavantdeplongersonregarddanslesien.—Jen’avaispastreizeansquandmonpèrem’aexpliquéquelétaitmonavenir.Jenel’aipasbien

pris.—Qu’avez-vousfait?—Toutcequiétaitenmonpouvoirpourpeinermafamille.

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Ildétournalesyeuxetcontemplalonguementlefeu.Sesorbitesparaissaientcaverneusessoussesépaissourcilsetlesombresprojetéesparlesflammes.

—Jemesuisexprimé,j’aiadoptéuneattitudeprovocante.J’aifait l’inversedecequemonpèreattendaitdemoi.Et,commelamoitiédutempsilétaitsoûlcommeunegrive,mesactesnel’affectèrentpasautantquelaréputationdemamèreetdemasœur.

—Vousavezunesœur?—Maggie.Ilnesouritpas,maissavoixs’adoucit.—Elleabeaucoupplussouffertquemoi,maisc’estàelledevousenparler.—Votremèren’apassouffertd’êtremariéeàunivrogne?Ilbraquadenouveausesprunellesfroidessurelle.—Jen’aipasditcela.Ellenem’ajamaisparlédecequisepassaitdansl’intimitédeleurchambre.

Maiselleatoujoursétélâchepourcequiestdemonpère,etmasœuretmoienavonssouffert.Rionaseraidit.— Je ne connais pas votre famillemais, d’après ce que vousm’avez dit, un chef de clan est un

hommepuissant.Iladroitdevieoudemortsurseshommes.Danscesconditions,quepouvaitfairevotremèrecontrelui?

—Nevousméprenezpassurmespropos.Elleafiniparagir.Lorsquej’aieuquinzeans,ellenousaemmenés,Maggieetmoi,loindeLarig.NoussommesallésvivreprèsdesafamilleàEdimbourg.Celam’aempêchédefaireplusdesottises.

—J’aiplutôtl’impressionqu’ellevousaprotégésd’unpèrealcoolique.—Elleauraitpusauverbienplusquemajeunesse,maiscelan’aplusd’importance.—Pourtant,jesensenvousunecertainerancœur.Ilneréponditpasetsecontentadecontinueràmanger,commeindifférentàsespropos.Maiselle

décelaitenluiunecertainefragilité,àprésent,etvoyaitunhommeaffectéparsesémotionsàl’égarddesa famille, un homme qui se sentait coupable des actes qu’il avait commis pendant sa jeunesse.Malheureusement,elleignoraitcomplètementcommentutilisercelacontrelui.

—Combiendetempsavez-vousvécudanslafamilledevotremère?—Troisans,jusqu’àcequelesoulèvementfassedemoiunhomme.—Vousavezparticipéàlarébelliondesjacobites?demanda-t-elle,consternée.—Larébellion?s’étrangla-t-il.VousparlezvraimentcommeuneAnglaise!Rionasesentitrougirviolemment,maisn’ajoutarien.—VousavezvécuenAngleterre,et jenepeuxpasvousenvouloirpour leschoixdevotrepère.

L’Angleterredoitaccepterquenousn’oubliionspasquiestnotrevéritableroi.LeRoiau-delàdelamerméritenotresoutien.

—IlneserajamaisroideGrande-Bretagne,McCallum.C’estdumoinscequeditmonpère.—Votrepère,cethommesipromptàtenirsesengagements?fit-ild’unairméprisant.—Vousparlezdemononcle,commejenecessedevouslerépéter.Ilgrognadoucement.—Monpèreestsonplusjeunefrère.Mais,quoiqu’ilensoit,ilsparlentsouventdel’inutilitédese

dressercontrelaCouronne.JamesStuartneseraitjamaisroi:ilestcatholique.Ilneseraplusaccepté,maintenantquesoncousinGeorgeestmontésurletrône.

—Celaneveutriendire.Depuisl’Acted’union,ilestévidentquel’Angleterreveutnousasservir.Malgréleurspromesses,lesAnglaisontrefusédefaireuneplaceauxnoblesécossaisàlaChambredeslords.Nosimpôtsontaugmenté,notreConseilaétéaboli.Nousavonsététrahis.

—Maisvousnepouvezpasleverunearméeassezimportante.Nel’avez-vouspascomprisdepuislabatailledeSheriffmuiretvotrevainetentativedemarchersurlenorddel’Angleterre?

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—LecomtedeMarn’étaitpasunbonchef.NousétionsdouzemilleàPerth,prêtsàmarcherverslesud, et il nous a demandé d’attendre et d’attendre encore. Les hommes ont déserté par manque dediscipline. Nous étions supérieurs en nombre lorsque nous avons rencontré le duc d’Argyll et sespartisans.Etnousavonsétévictorieux.

—Argylln’a-t-ilpas,luiaussi,clamésavictoire?J’aientendudirequ’ilyaeubeaucoupdemortsdanslesdeuxcamps,etquerienn’aétédécidé.

LabouchedeMcCallumétaitdéforméeparlacolère,maisellecontinua:—Vousétiezsijeune.Avez-vousétéblessé?Ilignorasaquestion.— J’étais peut-être jeune,mais je sais que notre victoire aurait pu être concluante siMar avait

engagétoutesonarmée.Maisilnel’apasfait,etsavictoireaétévaine,puisquerienn’enestsorti.Jen’ai pas pume joindre à ceux qui ont marché sur l’Angleterre et qui se sont battus à Preston. Cettebatailles’estsoldéeparunedéfaite.Mêmelorsquenotrevrairoiadébarquésurnoscôtes,ilétaittroptard.

—J’aientendudirequ’ilétaitmaladeetqu’ilestrepartiauboutd’unmois.McCallumneditrien,rompantunboutdepaincommes’ildépeçaitunennemi.—Sivousn’avezpasmarchésurl’Angleterre,c’estquevousétiezblessé?Sic’est lecas,vous

avezeudelachance.Vousauriezpuêtrecapturé.— Je n’ai pas eu tellement de chance. J’ai dû rester à Larig tout le printemps pour ma

convalescence.J’aicrupouvoiraméliorermesrelationsavecmonpère,maisellesn’ontfaitqu’empirer.Ilregardafixementlesflammes.Lesombresquidansaientsursonvisageluidonnaientunairsévère

etmenaçant,commesilessouvenirsdecetété-làétaientterribles.MaisRionan’étaitpasprêteàtenterlediable,pascesoir.

—Vousn’êtesdoncrestéavecvotrepèrequelapremièremoitiédel’année,après larébellion?Qu’avez-vousfaitensuite?

Sesprunellesacéréesseposèrentdenouveausurelle.—Pourunepersonnequiveutmefairecroirequemesprojetsconcernant leclanne l’intéressent

pas,vousposezbeaucoupdequestions.L’estomacdeRionasenoua,etelles’adossacontresachaise,l’appétitcoupé.—Jemanifesteunesimplecuriositéetj’essaiedefairepasserletemps.Préférez-vousquejereste

assiseensilence?— Au moins, je n’aurais pas de doutes sur vos intentions, dit-il en repoussant son assiette.

Finissons-en.Nousdevonsnouslevertôtdemainmatin.Allonsnouscoucher.Rionasavaitquecemomentfiniraitpararriver,etsestentativesdésespéréesdemieuxleconnaître

n’étaientpeut-êtrequ’unefaçonderepousserl’inévitable.Ellelorgnaverslelitenessayantdecachersapeur,peurquinefaisaitquerévélersavulnérabilité.

—Jevousaipromisdene jamaisvous forcerà fairequelquechosequevousn’êtespasprêteàfaire,luirappela-t-ilsèchement.Jenereviensjamaissurmespromesses.

Elle ne sut quoi répondre. Ses promesses l’avaient conduit à faire d’elle sa prisonnière, et elleignoraitquelleenétaitlafiabilité.Maisellesegardabiendeleluidire.

—Jedormiraidevantlacheminée,déclara-t-elle.—Vousn’enferezrien.Vousaveztoutautantbesoinquemoid’unebonnenuitdesommeil.Montez

danscelit!Elle se leva alors, les dents serrées. Elle avait envie de refuser, de s’opposer à lui,mais il lui

suffiraitdelapoussersurlelit,delamaintenir,peut-êtremême…Non,ilnefallaitpasqu’unetellechoseseproduise.

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Ellepréféradonctournerlestalonsetgagnerlelitavantdesefaufilersouslesdrapsetderemonterle couvre-lit sous son menton. Elle aurait aimé pouvoir protester, affirmer qu’il n’y avait passuffisammentdeplacepourluietqu’ellerisquaitdetomberdulit.

Ilsedirigeaverslacheminée,posauneautrebriquedetourbeentraversetdisposadenouveausesvêtementspourlesfairesécher.Aprèsavoirsoufflélabougiesurlatable,ilvintlarejoindre.Alalueurdes flammes, son corps projetait une ombre immense dans la pièce. Le cœur de Riona battait à toutrompre, si fort qu’il devait l’entendre. Peut-être aurait-elle dû insister pour que Samuel partage leurchambre. Elle avait besoin de la protection d’une tierce personne. Si jamais elle criait, Samuell’entendrait,mais…sedresserait-ilcontresonchef?

McCallum s’assit au bord du lit, et le matelas s’enfonça sous son poids. Elle se recroquevillaaussitôt.Ilsecouchasurlecôté,luitournantledos.Elleattenditencontemplantseslargesépaulesetlecouvre-litqu’ilavaitpassésoussonbras.

—Allez-vousenfinvousallonger,demanda-t-ild’untonexaspéré,ouallez-vousresterassisetoutelanuit?

Trèslentement,elleposalatêtesurl’oreiller,lecorpstendu,commeprêteàbondiràtoutmoment.Mais rien ne se passa, à l’exception de la respiration deMcCallum qui s’était approfondie. Allait-ilvraimentlalaisserdormir?

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Chapitre5

Hughmit longtemps à trouver le sommeil, contrairement à Riona qu’il avait finalement réussi àconvaincredesonhonnêteté.Soussoncorpsmenu,lematelass’enfonçaitàpeine,maisilavaitsentilemomentoùelleavaitcessédelutterets’étaitendormie.Acemoment-là,sapropretensions’étaitunpeuapaisée.Enécoutantsonsoufflerégulier,ilavaitessayéd’imaginersonavenir,unefoisquelepiredececonflitseraitderrièreeux.Sesentirait-ilenpaix, lorsqu’ilviendraitsecoucherentoutelégitimitéprèsd’elle?Trouverait-ilunmoyendelaconvaincrequ’ilpouvaitfaireunmaritrèshonorable?Oubiensonpasséviendrait-ils’interposerentreeux?

Ilavaiteuunsentimentétrangeenparlantdecequ’ilavaitfaitpendantsajeunesseavecuneautrepersonne,surtoutaveccellequiallaitdevenirsafemme.Ilavaitgardébeaucoupdechosespourlui,cequipouvaits’avéreruneerreur:ellepourraitlesentendredelabouchedeshommesdesonclan.Maisilnevoulaitpasl’effrayerplusqu’ellenel’étaitdéjà.

Ilparvintàdormir,etprofondément,cequiétaitrarechezlui.Ilfutréveilléparledouxcontactd’unbraschaudsursonflancetlapeaunueetsoyeusedesjambesdeRionaemmêléesauxsiennes.Ilouvritlesyeuxetdécouvritque,pendantlanuit,elles’étaitblottiecontreluietavaitnichélatêteaucreuxdesonépaule.Sescheveuxformaientcommeunecouverturesursontorseetsonbras,etelleavaitdûelleaussiavoirchaud,cardansleursommeililsavaienttousdeuxrejetélesdrapsjusqu’àlataille.

Iln’avaitpasencoreeuleloisird’observersachemisedenuit,carRionan’avaiteudecessedelefusiller du regard. Il avait donc passé la soirée à éviter de poser les yeux plus bas que son cou.Heureusement,lespectacledesonvisagecaptivantl’avaitaidé.

Maismaintenant, il pouvait la contempler à loisir, dumoins ses seins et, comme il n’était qu’unhomme,cefutcequ’il fit. Ilsentait leurrondeurcontreson torse, ladoucepressiondesapoitrinequimontait et descendait. Sa chemise de nuit était coincée sous elle et tendait le tissu à tel point qu’ildistinguaitvaguementsonmamelon.Ilseretintdelecaresser,deluidonnerleplaisirqui,illesavait,luiferaitcomprendrequeleurmariageseraitréussi.

Sauf qu’elle ne comprendrait pas son intention. Il serra donc le poing sous le couvre-lit pourcontrôler ses ardeurs. Il resta immobile, attentif aux pépiements des oiseaux qui s’éveillaient avantl’aube,puisils’assoupit,plusheureuxetdétenduqu’ilnel’avaitétédepuistrès,trèslongtemps.

Il la sentit s’étirer avantde l’entendre.Elle s’arc-bouta lentement contre lui, et il ferma lesyeuxpour ne pas la coucher sous lui et s’installer entre ses jambes, comme il le désirait tant. Ses cuissesbougèrentcontrelessiennes,sapeaunuepresséecontrelasienne.Sondouxgémissementensommeilléluifitregrettertouslesmoisquis’étaientécoulésdepuisqu’ilavaitpartagépourladernièrefoislacouched’unefemme.

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Puisellerepritsesespritsetsefigea.Ilfitalorssemblantdedormir,mêmes’ilavaitdumalàresterimmobile,alorsquelarespirationdeRionas’étaitaccéléréeetquesesseinss’agitaientcontreluicommeunecaresse.

Elleseredressalentementsuruncoude,etsacheveluresedéployaautourd’ellecommel’éventaild’unecourtisane.Ilregrettaaussitôtdeneplussentircecontact,maisellenes’écartapascomplètementdelui.Quefaisait-elle?

Ilfinitparsouleverlespaupièresetvitqu’ellel’étudiaitd’unairméfiant.Puiselleouvritpeuàpeudegrandsyeux.

—Vousnevouslassezpasdemeregarder,jeunefille?Ilsavaitquecen’étaitpaslachoseàdire,maiscefutplusfortquelui.Elleessayadelerepousserengrognant.—Commentosez-vous!Lâchez-moioujecrie!Ils’emparadesesbrasquibattaientl’air.—Çasuffit.Jen’airienfait.Ilmesembleavoirdormidemoncôté.C’estcertainementvotrecorps

quivousatrahie.Elle gémit, et il la lâcha puis pivota pour se lever. Il s’étira voluptueusement avec l’impression

d’êtrebienreposépourlapremièrefoisdepuisdesjours.Iljetaalorsunregardpar-dessussonépaule:Rionaavaitdenouveautirélecouvre-litsoussonmentonetleregardaitd’unairmauvais.

—J’aibesoind’unpeud’intimité,insista-t-elle.—DèsqueSamuelseralà,jevousendonnerai.Enattendant,jevousdemanded’êtrepatiente.Il ouvrit la porte et découvrit une pile de vêtements propres. Il les apporta dans la chambre et

s’habilla.Ilavaitàpeinefiniquequelqu’unfrappa.—Entrez!lança-t-il.—McCallum!s’écriaRionad’unairoutréenramenantlecouvre-litsoussonnez.Ill’ignora.Samuelentraalorsdanslapièceetécarquillalesyeuxfaceaujolispectaclequ’offraitRionadans

lelit.—Heu…bonjour.Lepetitdéjeunerserabientôtservi.—Parfait, ditHugh. Pouvez-vous rester de l’autre côté de la porte pendant que j’organise notre

départetqueRionas’habille?—Biensûr.Samuelsemblaitimpatientdequitterlachambre,etHughsecoualatête.Lorsqu’ilsortitàsontour

danslecouloir,ilentenditquelquechoseheurterviolemmentlaportederrièrelui.—Avez-vouscouchéavecelle?demandaSamuel.—Non,maisjen’avaispasenviededormirparterre.J’aitrèsbiendormietelleaussi,jepense,ce

quiexpliqueenpartiesacolère.—J’aivulabaignoire…—J’aitournéledospendantqu’elleselavait,commeungentleman.Et,lorsquecefutmontour,ce

futrafraîchissant.—Jesupposequecebainétaitlebienvenu.—Oui,et…trèsédifiant.

***

RetournerdanslavoiturefutpourRionaaussiterriblequecequ’elleavaitimaginé.Lesbleusquesonpéniblevoyage avait provoqués semblaient s’être étendus et nepouvaient qu’empirer, tout commel’état des routes dans lesLowlands.La femmede l’aubergiste lui avait gentiment donné un cerceau à

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broder,dutissuetdufilpourqu’ellepuisses’occuper,maislachausséeétait tropaccidentéepourunetelleactivité.McCallumavaitdégagéunpeupluslafenêtre,sibienqu’ellepouvaitaumoinsregarderlepaysage.

Ilssuivirentpendantplusieursjoursunevalléeoùcoulaitunfleuve.Departetd’autres’étendaientdes collines,dont certaines étaient brunes et dépourvues d’arbres à leur sommet.La nuit, les hommesdormaientdansdescouverturesprèsdufeutandisqu’ellerestaitàl’intérieur,allongéesurlabanquetteinconfortablemaisausec.

Lesvoituressefaisaient raresàprésent,et ilsdevaientsouventserangersur lecôtépour laisserpasserdescaravanesdebêtesdesommequiallaientverslesud,endirectiondesmarchésenAngleterre.Unefois,ilscroisèrentuntroupeaudevachesécossaiseshirsutesquiflânaientsurlarouteetrechignèrentàsepousser.

Lorsque McCallum montait avec elle dans la voiture, il essayait d’éveiller son intérêt pour lacampagne qu’ils traversaient. Il lui parla des bienfaits des eaux thermales de Moffat ou des ruinesromainesd’Abington.Même si unepartie d’elle-mêmeavait envied’en savoir plus sur sonpays, elles’efforçaitdefeindrel’indifférence.Maisenréalité,elleétaitsurtoutscandaliséeparlafaçondontelles’était abandonnée dans son sommeil et dont elle s’était blottie contre lui, oubliant qu’il était sonravisseur.Soncorpsl’avaittrahie,etelleavaittellementpeurquecelasereproduisequ’ellen’osapasluidemanderdetrouveruneautreauberge,malgrélapluiequinecessaitdetomber.Samueletluiprirentdes tours de garde en semouillant jusqu’aux os, tandis qu’ils l’emmenaient toujours plus loin vers lenord.

Rionas’ennuyait tellementqu’ellesesurprità ressasser lessouvenirsdecettenuitd’intimité, lesjambesnuesdeMcCallumcontrelessiennes,lesentimentdesécuritéqu’elleavaitressentidanssesbraslorsqu’elle s’était réveillée et que les images de son enlèvement ne lui étaient pas encore revenues àl’esprit.Ensécurité?Ildevaitbienyavoirquelqu’uncensélaprotégerdeshommescommelui,maiselleavait perdu tout espoir que quiconque soit à sa recherche et vienne la secourir. Elle ne pouvait pluscompterquesurelle-mêmeetsursonpouvoirdepersuasion.Ilfallaitqu’elletrouvelemoyendeluifaireaccepterlavérité.

IlsarrivèrentàGlasgow,unportdepêche,dotéd’uneuniversitéquiremontaitauXVesiècle,commele lui rappela fièrement McCallum. Le bourg était devenu une plaque tournante entre les coloniesaméricaines et le reste de l’Europe. Il regorgeait d’étrangers et d’Anglais,maisMcCallumn’était pasassezstupidepourypasserlanuit.

—Vousauriezcertainementessayédejouerdevoscharmesauprèsdecespauvreshommes,luidit-ilenlavoyantregardertristementparlafenêtreverslesbâtimentsquidisparaissaientderrièreeux.

Aumoins, ils s’étaient arrêtés pour acheter desprovisions,maisMcCallumne leur laissapas letempsde faire laver leursvêtements.Plus ilsavançaientvers lenord,verschez lui, etplus sonespritsemblaitenéveil.

Cette régionaurait aussidûêtre sonpays.Les terresde leurs clansétaient limitrophes.Mais sesparentsl’enavaientdélibérémenttenueéloignée,etellenepouvaitpassedépartirdusentimentd’êtreuneintruse,uneétrangère,uneAnglaise.

Ilsempruntèrentbientôtunsentieràbestiauxaunord-estdeGlasgowendirectiondeStirling,oùlepaysageétaitaussinuquefascinant.Ilstraversèrentdeskilomètresdeterrescultivéesetvallonnéesquilaissèrentplaceàunsolaridedelandesetdetourbièresd’uneétrangebeauté.Rionanecessaitd’enêtreintriguée.C’étaitlaterredesonpeuple.Onluiavaittoujoursditàquelpointelleétaitsauvageetcruelle.Sauvage,ellel’étaitcertainement,maismagnifiqueaussi,àsamanière.McCallumluiparladenouveaude l’histoire de l’Ecosse et du second mur construit tout près par les Romains, mur qui ressemblaitbeaucoupàceluiquimarquaitlafrontièreavecl’Angleterre,saufquecelui-ciavaitétéérigépournepaslaisserentrerleshommesdesHighlands.

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A plusieurs reprises, elle aperçut les ruines d’un château sur une colline. Les pauvres chevauxpeinaientà tirer lavoiturepourgravir lescols,et ilsmontèrent lentement jusqu’àunsommetdebassealtitude, avec la vallée étalée devant eux en direction de Stirling. Elle fut alors contrainte d’écouterMcCallumluiparleravecfiertédelaville.

—Lesarméesd’antandevaienttenirStirlingpourenvahirlesHighlands.L’undesancienschâteauxdesroisd’Ecossesetrouveici.Etc’esticiaussiquesetrouvemonécurieprivée.

Cettenouvellelasurprittellementqu’ellesedétournadelafenêtrepourleregarderd’unairatterré.—Comment?—Nousnepourronspasallerplusloinenvoiture.Sademeureétaitdoncsi isoléequ’unevoiturenepouvait l’atteindre?Ellegrognaenfermant les

yeux,aveclesentimentdepartirauboutdumonde.— Un ami m’a écrit d’Inverness, continua McCallum. La première diligence est arrivée là-bas

l’annéedernièreseulement.Toutelavilleestsortiepourlavoir!Rionasecontentadeleregarder,horrifiée.Dansquelpaysallait-elle?Bientôt, le château de Stirling se dressa devant eux, surplombant la vallée sur son promontoire

rocheux. Riona vitMcCallum se rembrunir. Elle connaissait suffisamment l’histoire de l’Ecosse poursavoirquelesjacobitesavaientessayéavecsuccèsdeprendrelechâteaupendantlarébellion.Yétait-il?Avait-ildéfendulechâteaudesonroicontrelesAnglais?Peuluiimportait,aufond…Sonseulsouciétaitcequi l’attendaitau-delàdeStirlingetdel’intimidantebarrièredemontagnesaunord-ouest,verslaquelleilssedirigeaient.

Malgré son souhait, ils ne passèrent pas la nuit dans une auberge. McCallum disposait d’unechambreau-dessusdesonécurie,sommairementmeubléedelits,decoffresetd’unetable.Samuel,trèsembarrassé,dormitdanslamêmepiècequ’eux.Rionasefichaitpresquedecedétail.Elleétaitépuisée,tant physiquement que moralement. Pas étonnant que ses parents ne l’aient jamais emmenée dans lesHighlands!

Asagrandesurprise,McCallumrestaàStirlingunesecondenuitafind’acheterdesprovisionspourleur voyage. Samuel ne la quitta pas d’une semelle, et elle passa une grande partie de la journée àsomnoler dans son lit.McCallumenmanifesta de l’inquiétude,mais elle lui assuraqu’elle n’était pasmaladeet appréciait seulementdepouvoirdormir sansêtrebringuebaléede tous les côtés, à telpointqu’illuiétaitarrivéplusieursfoisdetombersurleplancherdelavoiture.

A l’aube, elle chevauchait une jument à travers la vallée, en direction de la ligne sombre desmontagnesquis’élevaientauloin,menaçantes.Larouteserésumaitàunsimplesentieràbestiaux,envahiparlabruyèreetlesajoncs.Parfois,quelqueshêtresoupinspoussaientdemanièreéparseaupieddescollines.Elleavançait,encadréeparlesdeuxhommes.Unebêtedesommefermaitlamarche.RionanepouvaitquesuivreSamuelsurl’étroitchemindeterrequiserpentaitets’enfonçaittoujoursplusloindanslesHighlands.Pourquoiavait-ellel’impressionqu’ellen’enpartiraitjamais?

AprèsunejournéedelentvoyageoùilssuivirentdetempsentempslarivièreTeithà travers lescollines,ilscampèrentàl’extérieurduvillagedeCallanderparunefraîchenuitd’été.Lelendemain,leurvoyagelesamenalelongdulochLubnaig,oùlesforêtsdepinsarrivaientpresquejusqu’auxbergesdulac.LesommetnudesmontagnesévoquaitàRionaledosd’animauxàbosses.Ellecrutqu’ilsallaientmonterjusqu’auxsommetsenneigésdeBenLedimais,àsongrandsoulagement,lesentierbifurquapoursuivrelelacpuisuneautrerivière,avantdes’orienter,àl’ouest,versunevalléequidébouchaitsurlelochVoil,unautrelacmagnifique,nichéaucreuxdesmontagnes.

L’après-miditouchaitàsafinquandRionademandaàfaireunepause,maisMcCalluminsistapourqu’ilscontinuentleurcheminlelongdulac.Ilsfranchirentunnouveaucol.Ellen’avaitpasvraimenthâtede découvrir l’endroit où elle allait vivre temporairement.Les rares villages qu’ils avaient traversés,composés de baraques aux toits de chaume et auxmurs en pierre, ne lui avaient pas laissé beaucoup

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d’espoirs. Elle souhaitait juste queMcCallum ne lui fasse pas partager son cottage avec une vache,commecertainshabitantsdesHighlandslefaisaient.

Elle était sur le point de lui demander de nouveau de s’arrêter lorsqu’ils prirent un virage.Unepremière tourcarrées’élevasoudaind’entre lesarbres,soussesyeuxébahis.Toutenhaut,desgardesétaient postés sur les remparts. Ils atteignirent le sommet d’une colline où s’élevait un grand châteausurplombantlavallée.Laforteresseétaitlongueetlarge,sesmursenpierrefarouchementdresséscontreles envahisseurs.A l’entrée, la guérite était solidement gardée.D’autres tours carrées s’élevaient hautversleciel.

McCalluml’observaitd’unaircondescendantetamusé,commes’ilavaitludanssespenséesetvului-mêmelesinistrecottagequ’elles’attendaitàdécouvrir.

Ellelevalementonsansfairedecommentaires,maiselleétaitimpressionnée.Tout autour d’eux, sur les flancs des collines, des vaches noires et laineuses paissaient. En

contrebas, elle distingua au loin des champs agglutinés autour d’un village.Mais le château dominaitl’horizonetrivalisait,dansleurmajesté,aveclesmontagnes.

Comme ils approchaient de la guérite, les gardes, vêtus d’un kilt noir et rouge, jambes nues, sedressèrentpourleurbarrerlechemin.Surprise,RionasetournaversMcCallum,dontl’expressionétaitrestée neutre, tandis qu’il s’exprimait en gaélique. Elle crut l’entendre décliner son nom, ce qui lachoqua.Devait-ilseprésenteràsonproprepeuple?Oubienluiavait-ilmentisursonidentitépendanttoutcetemps?

Samuel se contentait d’attendre patiemment, comme s’il n’avait aucune inquiétude. Bientôt,l’expressiondesgardeschangea.Ilsôtèrentleurschapeaux,l’airdécontenancé.L’und’euxlesfitentrer,et Riona observa attentivement la herse aux pointes aiguisées destinées à barrer l’entrée desenvahisseurs.AcôtédeMcCallum,elleavaitl’impressiond’êtreelle-mêmeunenvahisseur,alorsqu’enréalitéelleétaituneprisonnièredeguerre,guerrequisévissaitentrelesMcCallumetlesDuffdepuisdessiècles.

Danslacour,desdizainesdepersonnesallaientetvenaiententrelagrandetourdequatreétagesetlesautressallesetbaraquementscreusésdans lesépaismursduchâteau.Poulesetcanardscirculaientlibrement,poursuivispardesenfantsquilevèrentàpeinelesyeuxverseux.Rionaaperçutunearchequiconduisaitversuneautrecour.

Lesgardesavaientdûsepasserlemotquantàl’identitédeleurhôte,carilss’étaientrassemblésaumilieudelacouretlesattendaient.Deshommesarrivèrentaussiencourant,équipésdeclaymoresetdeboucliers,commes’ilsavaientinterrompuleurentraînement.

Elleessayad’interrogerSamuel,maisil luidemandadesetaire.Puisunegrandedoubleporteenboiss’ouvritaurez-de-chausséedelatourprincipale,etunhommeensortit,accueillipardesmurmuresétouffés.

— C’est Dermot McCallum, le tanist, expliqua Samuel à voix basse. Il a été désigné commesuccesseur de Hugh lorsque ce dernier a été choisi pour être le chef de notre clan. C’est lui qui luisuccédera,sijamaisilmeurtsanshéritiers.C’estsoncousin.IlaprislatêteduclandepuislamortdupèredeHugh,ilyaquelquesmois.

L’hommedescenditlesmarches.Ilétaitgrandetmince,maisRionacompritqu’ilnefallaitpassefieràl’apparencetrompeusedesacarrure.ElleavaitdéjàvudeshommesporterlaperruqueenEcosse,maisluiavançaitnu-tête,lescheveuxtirésenarrière.Sonplaidétaitméticuleusementnouéautourdesataille et drapé par-dessus son épaule où scintillait une broche. Il s’approcha deMcCallum, toujoursmontésursoncheval,commes’ilcommandaitleshommesrassemblésdevantlui.Cequiétaitlecas.

DermottapotanonchalammentlecouduchevalenregardantMcCallum,quis’adressad’abordàluiengaélique,puisluidésignaRiona.

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—Jesuisrevenuavecmapromisepourdemeurerparmivous,poursuivit-ilenanglais,etprendrelaplacequimerevientdedroitauseinduclan.Tuasfaitdubontravail,Dermot,etj’apprécielafaçondonttuasprissoindemonpeuple.

—Denotrepeuple,corrigeaDermotd’unevoixfroide.NoussommestousdesMcCallum,n’est-cepas?

Quelqu’un poussa une acclamation qui ne reçut aucun écho. Riona regagna un peu d’espoir.McCallumn’étaitpaslechefinvinciblequ’ilaffirmaitêtre.Manifestement,Dermotn’approuvaitpasunlairdpartidepuissi longtemps.Maisellenefitpas l’erreurdecrierqu’elleavaitétékidnappée,cettefois.Ilexistaitdelongueshistoiresdeguerresdeclansquis’étaientrésoluesavecl’aided’unefiancéeréticente.SiellevoulaitgagnerlesoutiendesMcCallum,ellenepouvaitques’efforcerderassemblerleclanautourdesonchef.

Avecunpeudepatienceetdepersuasion,elletrouveraitpeut-êtreunmoyendegagnersaliberté,songea-t-elleensetournantversDermot.

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Chapitre6

HughaccompagnaDermotdanslagrandesalle,rongeantsonfrein.Sapatiencevenaitd’êtremiseàrudeépreuve.Aprèslamortdesonpère,ilavaitétééluchef,mêmes’iln’étaitpasphysiquementprésentàLarigCastle.IlavaitcorresponduavecDermotetsupposaitquetoutsepasseraitbien,maislafroideurdesonaccueill’irritait.Soncousinavait-ilcruqu’ilpourraitdirigerentoutelibertéleclanpendantdesmoisoudesannées?

Lagrandesalleétaitcommedanssessouvenirs.Ensetournant,ilaperçutRiona,lesyeuxrondsdesurprise, qui contemplait les hauts plafonds à poutres apparentes, les armures et les armes du clanaccrochées au mur, ainsi que les tapisseries anciennes qui relataient l’histoire des McCallum. Lespréparatifspourledînerétaientencours,etdesservantesdressaientlestablessurdestréteaux.

Sonpère entrait autrefoisdans cettepièce à lamanièred’un roi. Il prenait place sur l’estrade etattendait que ses gentilshommes viennent solliciter ses faveurs ou lui fassent leur rapport.MaisHughn’avaitpasl’intentiondesecomportercommesonpère.Ilgagneraitsonautoriténonparlapeur,maisensefaisantrespecterdeseshommesetdeshabitantsdesademeure.

Aussitôt, on se rassembla autour de lui et, si l’air affable deDermot sonnait faux, beaucoup dejeuneshommesarboraientdessouriresdebienvenue.ToutenétudiantRiona,deboutàsescôtés,ilsluiposèrentunemultitudedequestionsenanglaisetluidemandèrentcommentleschosess’étaientpasséespour lui à Londres et à Edimbourg pendant toutes ces années. Riona tendait l’oreille. Tout ce qui sepassaitdepuisleurarrivéeéveillaitmanifestementsacuriosité.

Illevalesmainspourréclamerlesilence.—Assez,assez,nousaurons tout le tempsdeparlerpendant ledîner.Ma fiancéeabesoindese

rafraîchir,toutcommeSamueletmoi.— Vos chambres sont prêtes depuis des jours, laird McCallum, annonça Mme Wallace en se

précipitantversluiavecungrandsourire.Sesyeuxbrillaientsoussacoiffeendentelle.—Jesuisheureusedevoussavoirderetourpourdebon,ajouta-t-elle.Hughavaitconsciencedeshommesquimurmuraientdanslasalleunpeuplusloin.Lesplusvieuxse

souvenaient des comportements puérils de sa jeunesse et avaient certainement des doutes sur sescapacités à être leur chef. Quant aux événements qui avaient dû transpirer pendant sa convalescence,alorsqu’ilseremettaitdesblessuresreçuesàlabatailledeSheriffmuir…Ilsn’avaientpasdûlesoubliernonplus,mêmesilajeunefemmeétaitmortedepuispresquedixans.

MmeWallacese tournaversRiona, levisageouvertet souriant.Sielleavaitdes inquiétudessurl’installationd’uneDuffàLarigCastle,ellen’enmontrarien.

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—MadameWallace,dit-il d’un ton solennel, jevousprésente ladyCatrionaDuff, quideviendrabientôtmafemme.

Lagouvernante fitunecourte révérence.Riona lasaluad’unsignede têtehésitant,maisHugh futsoulagédenepas l’entendreprotester. Ils’étaitdemandésiRionaneclameraitpas lanouvelledesonenlèvementdèsleurarrivéeauchâteau,maisjusqu’àprésentelleétaitrestéediscrète.Peut-êtreavait-ellefini par accepter l’inéluctabilité de leur mariage ? Ce changement s’était peut-être produit lorsqu’ilss’étaient réveillés à l’auberge dans lemême lit, après s’être si naturellement tournés l’un vers l’autredansleursommeil.

Maisimpossibledesavoircequ’ellepensait:sonbeauvisagerestaithermétique.—LairdMcCallum,ladyCatriona,suivez-moi,lesinvitaMmeWallaceenleurmontrantlechemin.

Ceseralapremièrefoisquevouslogerezdanslesappartementsduchef,ajouta-t-elleavecuncoupd’œilpar-dessussonépaule.

Ilsempruntèrentl’escalierencolimaçonquipartaitdelatourcarréeaufonddelagrandesalle.Audeuxièmeétage,uncouloircentraldesservaitunesériedechambres.Ladernièreoccupaituneextrémitéde la tour et était composée de plusieurs pièces qui donnaient sur la cour et les jardins, englobantégalement toute la vallée de Balquhidder où était niché le loch Voil. Hugh alla se poster près de lafenêtre.Lorsquelesoleilbrillait,lelacscintillaitdemillefeuxcommeunjoyauaufonddelavallée.

MmeWallace désigna d’un large geste le lambris sombre qui couvrait lesmurs, comme dans laplupart des chambres du château.Elle parla àRiona des tableaux représentant des paysages écossais,maisHughn’yprêtaqu’uneoreilledistraite.Legrandlitàbaldaquin,avecsesrideauxauxcouleursdutartan desMcCallum, occupait une place prépondérante contre l’un desmurs.Une imposante armoirecôtoyaituncoffreàtiroirs, tandisqueplusieurscoffreséquipésdecouvercless’alignaientlelongd’unmur.Ilavaitvusonpèrerédigersacorrespondancesur lesecrétaire installéàcôtéde la fenêtre,et laperruque du vieil homme trônait encore sur la commode. Il fit la grimace. Il ne supportait pas lesperruques,étouffantesetinconfortables,malgrélamodequisévissait.

MmeWallaceconduisitensuiteRionadanslesalonoùsesparentsrecevaientautrefois leursamisproches,puisdanslachambredelamaîtresseduchâteau.Illasuivitmaisrestasurleseuil,absorbéparlevisageexpressifdeRionaquivenaitdedécouvrirlesmurslambrisséslégèrementcolorésetledélicatmobilierdestylefrançais.Aulieud’unlitàbaldaquin,lapiècecontenaitunlitclosencastrédanslemurdu fond et des tentures en tartan.Elle contenait également un élégant secrétaire ainsi qu’une coiffeusesurmontéed’unmiroirpivotant.Samèrenevoulaitriend’autrequecequ’ilyavaitdemieux,sesouvint-ilensentantmonterlaboufféed’amertumequil’envahissaitchaquefoisqu’ilpensaitàelle.Aumoins,cettepièceneseraitpluslasienne,désormais.

Riona posa la main sur la baignoire qui l’attendait déjà devant la cheminée. Elle paraissait…soulagée.

—JevouslaisseàvotrebainetauxbonssoinsdeMmeWallace,dit-il.Elleleregardalonguement,maissecontentadehocherlatête.—Sivousavezbesoindequoiquecesoit,voussavezoùmetrouver.

***

Riona regarda la porte se fermer sans un mot, se demandant si McCallum allait vraiment luiaccordercetteintimitéqu’ellen’avaitpasconnuependantdeuxsemaines.MmeWallacel’observaaveccuriositéquelquesinstants,puissedirigeaversl’armoireetl’ouvrit.

—Vous trouverezun large choixdevêtements ici, ladyCatriona, dit-elle. Il faudra en reprendrecertains,maislesautres,grâceàleurslacets,épouserontàmerveillevotrebellesilhouette.

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—Vousavez remarquéque j’étaisarrivéesansmapropregarde-robe,commentaRionaavecunepointed’amertume.

— Je sais que le voyage est long depuis l’Angleterre, ma dame, reprit MmeWallace d’un airaimable.Vousaviezoubliéàquelpointnousétionsisolésici,danslesHighlands?

—Jenemesouviensplusdutoutdel’Ecosse,avouaRiona.Mesparentsensontpartisquandj’étaistrèsjeune.

—EtilsvousontélevéecommeuneAnglaise,àentendrevotreaccent,conclutMmeWallaceavecunclappementdelanguedésapprobateur.

Maissonsourirerevinttrèsvite.—Cen’estpasvotrefaute,madame.Vousêtesderetouràprésentet,bientôt,vousvousrendrez

comptequevousêtesl’unedesnôtres.—Je…jenesuispasl’unedesvôtres,murmuraRiona.Maisavantqu’ellepuisseendireplusquelqu’unfrappaàlaporte,etundéfilédeservantesarriva

avecdesseauxd’eaufumante.MmeWallace luiproposade resterpour l’aideràse laver,maisRionan’avait pas été seule depuis si longtemps qu’elle s’excusa auprès de la gouvernante, qui semblacomprendresarequête.

Dansunmerveilleuxsilence,ellepoussaunlongsoupiretsedirigeaverslafenêtre.Encontrebassetrouvait la cour qui grouillait de monde. Au-delà des remparts, le loch Voil brillait dans toute sasplendeur et apportait sérénité et paix aupaysage.End’autres circonstances, elle aurait admiré un telpanorama, mais aujourd’hui ? Elle était prisonnière, et cette jolie scène aurait aussi bien pu être untableau,carellenepourraitpasenprofiter.Certes,ellen’étaitpasenferméedanssachambre,cependantc’était tout comme.Elle serait accompagnéeà chacunde sesdéplacements etn’avaitpersonne surquicompter.McCallumfaisaitlaloisurcetteterre,oùilreprésentaitàlafoisl’ordreetlajustice.Sedressercontreluirevenaitàprendred’énormesrisques.

MmeWallace s’était montrée si aimable avec elle qu’elle avait failli commettre l’erreur de luiparlerdesonenlèvement.Maisaurait-ceétébiensage?LagouvernantehabitaitdanscechâteaudepuisqueMcCallumétaittoutpetit.ElleettouslesautresserangeraientsansaucundoutedesoncôtécontreuneDuff.Bontédivine,ilétaitmêmeprobablequecettefemmesoitapparentéeauxMcCallum!

Elle-mêmeétaituneétrangère,pratiquementuneAnglaiseauxyeuxduclan.Elledevaitfairepreuvedefinesseetattendresonheure.DermotMcCallumneparaissaitpastrèsheureuxderevoirsoncousin.Peut-êtrequ’ellepourraitleconvaincredel’erreurcommisesursapersonne.Ilfallaitqu’elleensacheplussurluietqu’elledécouvres’ilétaitlegenred’hommecapabled’entendreobjectivementsonhistoireetd’affronterMcCallumavecelle.

Satisfaite de ceplan,même fragile, elle commença à dénouer son corsage, ôta le plastronqui lecouvraitetlaissasarobeglisserausol.Celle-ciétaittellementtachéeparleurvoyagequ’ellenevoulaitpassouillerlesfauteuilsoulelitenlaposantdessus.Elleretiraensuitesesjuponspuissachemise.Elles’enfonçaalorsdanslabaignoireavecungrognementdeplaisir.Personnen’avaitbesoindepasseraprèselle.Personnen’étaitlàpourlapresser,laregarder,l’énerveretlafairerougir.

Elle se lava enprenant tout son temps, les yeuxmi-clos.Lentement, elle laissa l’eau et le savonnettoyersapeau.

—J’ignoraisquejeseraisdenouveauunhommechanceux.Elle lâchasongantde toiletteenpoussantuncri.L’eau luiéclaboussa levisage,etellecrachota

pour s’endébarrasser.McCallum se tenait debout sur le seuil de la chambre, les yeuxplissés et l’airsatisfait.

—Vous…vous…ceciestmachambre!protesta-t-elle.SijamaisMmeWallacevoustrouveici…—Quefera-t-elledonc,àvotreavis,sijamaisellemetrouvedansmesappartements?Quepouvait-ellefairecontrecela,hormissesentirfurieuse,exaspéréeetimpuissante?

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Ils’avançaverselle,etelleplongeaplusprofondémentdanslebain,sachantqu’ellenepouvaitpasvraimentsecacherdelui.Unefoisencore,elleramenalesgenouxcontrelapoitrine.McCallumrestaunlongmomentàlaregarder.Ellesavaitqu’ilpouvaitfairetoutcequ’ilvoulaitd’elle,etquepersonneneviendraitl’enempêcher.Maisilsedétournaetallas’asseoirdansunfauteuilprèsdelacheminée,d’oùilnepouvaitpluslavoir.

Elle en ressentit un petit pincement de déception et fut horrifiée de le constater. Pour cacher saconfusion,elleinsista:

—Jedevraisavoirmaproprechambre,séparéedelavôtre.—Et pourquoi cela ? Nous sommes promis l’un à l’autre depuis notre naissance. Bientôt, nous

serons mariés. En Ecosse, il suffit de formuler ses vœux devant un témoin pour que le mariage soitprononcé.

—Jenemesuisengagéeàrien,etilnepeutpasyavoirdemariagecontremavolonté!Ilnerelevapasetcontinuadelaregarderavecunairdeprofondesatisfaction.—Vousallezattraperfroidsivousnesortezpasdevotrebain,dit-ilenfinàvoixbasse.Cesvieux

mursnousempêchentdeprofiterdelachaleurdel’été.—Danscecas,jevousinviteàvousenaller.Sesproposluifirentpenseràceuxd’unevieillefilleguindée.McCallumcroisalesjambes,manifestementprêtàattendrequ’elleselève.Mais…ilneluiavait

jamaisimposédeforcelamoindreintimitéetl’avaitlaisséepartiralorsqu’ilétaitseulavecelledansunlit.Mêmesisesparolesfaisaientloidanscechâteau,il luiapparaissaitcommeunhommedotédesonproprecodede l’honneur,mêmesiellene l’approuvaitpas.Elleétaitvouéeàdevenirsa femme,et ilétaitprêtàattendrepatiemmentqu’elleformuledélibérémentsesvœux.

S’ilvoulaitjoueràcepetitjeuavecelle,laprovoqueretlamettremalàl’aise,ellepouvaitenfairedemême.Ilméritaitderessentirquelquesfrustrations,toutcommeelle!Lesachanttroploinpourqu’ilpuisse voir sa nudité, elle renversa la tête pour semouiller les cheveux, puis saisit le savonpour leslaver.

Il continua de l’observer d’un œil plus impassible que satisfait. Riona était heureuse d’être enmesure de le troubler,même s’il s’efforçaitmanifestement de cacher ses émotions. Elle ressentit unenouvellesatisfactionlorsqu’ildétournaleregard.

—Jevoulaisvousdemanderpourquoivousn’avezpasditdevantleclanquejevousavaisforcéeàmesuivre,dit-il.

Ellepassalentementlesmainsdanssescheveuxsavonneux,commesielleavaitbesoinderéfléchirlonguement à la question. Elle le regarda à la dérobée, sans trop savoir ce qu’elle recherchait. Il neparaissaitpastroptroubléparlamanièreaudacieusedontelleselavait.

—Jenesuispasenpositionde force, répondit-elleenfin. Jeneconnaispersonne ici.Quiauraitenviedemecroireoudem’aider?Pourtant…j’ail’impressionquevous-mêmevousnevoussentezpastellementàl’aiseici,bienqu’ils’agissedevotrefoyer.Alors,sivousnevoulezpasquejedisequevousêtesunkidnappeur, j’aimeraisquevousmeparliezunpeudevoserreursde jeunesse,avantquevotremèrevousemmèneloind’ici.J’aimeraissavoircommentleschosesontpudégénérerentrevotrepèreetvous,aupointd’entraînervotredépart,etcommentvousavezfiniàLondres.J’aientenduvoshommesledire.

—Jevoustrouvebiencurieusepourunefemmeseuleetdansunesituationaussidélicate!—Croyez-moi, je sais ceque c’est qued’êtredansune situationdélicate.C’est ainsi que jevis

depuisdeuxsemaines,n’est-cepas?Vousm’avezterroriséeetobligéeàtraverseravecvouslepayspourme mêler à un conflit auquel je suis totalement étrangère. Mais j’ai également quelques pouvoirs etj’exigedesréponses!

—Unefemmequimepromettraitdedevenirmonépousemériteraitdetellesréponses.

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—Pourquoiunefemmeaccepterait-ellededevenirvotreépousesansconnaîtrepréalablementcesréponses?

—Vousvoilàdansuneimpasse.Ilselevaetvintseplacerjusteàcôtédelabaignoire.Lesbullesdesavondissimulaientsoncorps,

maisneformaientpasuneréelleprotection.Pourtant,elleenavaitassezdemontrersapeur.EllepréféracarrerlesépaulesetleverlesyeuxverslesprunellesfroidesdeMcCallum.

Ilsoulevaleseaud’eaupropreetletintau-dessusdesatête.—McCallum…—Penchez la tête en arrière.Vous n’avez certainement pas envie de recevoir du savondans les

yeux.—McCallum…!Mais il ne retint pas son geste. Elle poussa un petit cri et pencha la tête en arrière. Son regard

furieuxcroisasesyeuxamuséstandisquel’eaucoulaitsursescheveux.Ellelevitalors ladétailleretcompritquel’eaunerinçaitpasseulementlesavondesescheveux,maisdécouvraitégalementsoncorps.

Ellecachasesseins.—Finissons-en!s’écria-t-elle.Ilobtempéra.Elleinclinaalorslatêteetfermalesyeuxmais,sachantqu’ilpouvaitdenouveause

repaîtredesanudité,ellelesrouvritbrusquement.McCallumsetenaitàgenouxàcôtédelabaignoire.Elleclignadespaupièrespourchasserl’eauquiluidégoulinaitsurlevisage.

—Vousavezpeut-être le sentimentd’avoirquelquespouvoirs ici, dit-il d’unevoix rauque,maisvousêtessousmacoupe.Vouspouvezfairedeschosesdéplaisantessiçavouschante,jesurvivrai,carjesuis lemaître de ces lieux. Je connais les termes du contrat qui nous lie et je sais à quel point notremariage est important. Nombreux sont ceux quim’applaudiraient pour avoir pris les choses enmain,lorsquevotrepèreaessayédemetrahir.

Ellenecherchaplusàluirépéterqu’ils’agissaitdesononcle:ilnel’écouteraitpas.Ellesesentaitincapabledeparler,happéeparl’intensitédesonregardetsaproximité,ainsiqueparsapassionpoursonclan.Jamaispersonnen’avaitétécapabledelafairepasserenunesecondedelacolèreaudésespoir,avantd’éveillersacuriosité.Ellen’aimaitpascesentimentdeneplussecontrôleretdeselancertêtebaisséedansunequerelle.McCallumavaitraison.Ilspouvaientsemarierlesoirmêmeet,franchement,pouvait-elleserefuseràluisitelleétaitsadécision?Ilsecontenteraitprobablementdeprendrecequ’ilvoulait!

Elle frémit,mais pas à cause de l’eau qui refroidissait. Elle venait de comprendre avec horreurqu’ilexistaitquelquechosedepuissantentreeux,quelquechosequil’émoustillait,rendaitexcitantslesrisques qu’il avait pris pour l’enlever. Elle venait de découvrir en elle un lieu dont elle ignoraitl’existence.Unefolie,maisaussiunefaiblesse.

—Vousêtesétrangementsilencieuse,jeunefille,murmura-t-il.Sonregardglissanonchalammentdesonvisageàsesseins,dontladoucecourbedépassaitdel’eau

savonneuse.Rionasentitaussitôtsapeausehérisser,devenirextrêmementsensibleetmêmebrûlante.—Jen’aipasfinidem’opposeràvous,dit-elleenfin.Ellegrimaçaenentendantsavoixhachéeetrauque.UnsourirenarquoisétiraleslèvresdeMcCallum.Ilpritsonvisageencoupeetlelevaverslesien.

Elleseraiditensentantavecdésarroisespaumeschaudesseposersidoucementsursapeau,maisellene recula pas, comme si, par cette absence de réaction, elle s’avouait vaincue et redoutait ce qu’ilpourraitluifaire…etcequ’ellepourraitressentir.

Ilsepenchaau-dessusdelabaignoireetl’embrassa,seservantdesesmainspourlaguiderversseslèvres.Ellevoulaitluimontrerquesonbaisernel’affectaitenrien,quecegestenesignifiaitrienpourelle. Mais ses lèvres étaient douces et chaudes sur les siennes, légèrement entrouvertes, comme s’il

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voulaitlagoûter.Aucunhommenel’avaitjamaisembrassée…Ellesesentitprisedevertige;unedoucesensationenvahitsoncorps,sepropageaàsesseins,aucreuxdesonventre,entresescuisses,commes’ilétaitentraindecaressersespartieslesplusintimes.

Lorsqu’il suivit le contour de ses lèvres dubout de la langue, elle sursauta et se jeta en arrière,surprise.Ilneritpas,secontentantdel’observerdesesyeuxgrisdevenusconsidérablementpluschauds.Ilgardalamainsursonvisageetcaressalonguementsajoueduboutdupouce.

—Notrepremierbaiseresttrèsprometteurpourl’avenir,dit-il.Sonregardglissadenouveausursapoitrine,etelleseraidit.Avecunlégersourire,illalâchaetse

leva.—Séchez-vous,maintenant!Nousdevonsnousentretenirdecertaineschoses.Ilnedevaitpass’agirdusujetdontelleauraitaiméparler,maisellepréféranepasdiscuter.Illui

tournaledosetsedirigeaverslafenêtre,tandisqu’elleseséchaitàlahâteetenfilaitlasortiedebainqueMmeWallace avait disposée pour elle. Elle essaya d’oublier la sensation de ses lèvres sur lessiennesetlamanièredontelles’étaitsentie…excitée,alorsqu’elleauraitdûenéprouverdelapeuroududégoût.Catluiavaitditqu’unefemmepouvaitêtresubmergéeparsesémotionslorsqu’ellepartageaitdes moments d’intimité avec un homme, mais elle n’avait pas compris de quoi sa cousine parlait.Aujourd’hui, elle le comprenait et en ressentait une nouvelle forme de peur : celle de ses propresréactionsetdesesréponsesfaceàl’immenseforcedepersuasiondeMcCallum.

—Venezprèsdufeupourséchervoscheveux,dit-il.Elleserralesdentsmaisobéit.Cettefois,elledisposaitd’unpeignequ’ellepassalentementdans

sesmèchesemmêlées,laissantlachaleurlasécheretl’apaiser.—Ainsi,vousnem’avezpasaccuséd’êtreunkidnappeurparcequevoussavezquevousêtesune

Duffperdueaumilieud’unemaréedeMcCallum.Ellepoussauncrid’indignationmaisneditrien.—Jepréfèrequemonclannesachepasquelecomteavoulunoustrahirenrompantlecontrat.Je

n’enparleraidoncpas.—Dois-jevousremercierdenepasfairepassermononclepouruntraître?—S’ilssavaientquevotrepèreaessayéderevenirsursaparole,ilseraitbienplusqu’untraîtreà

leursyeux.Certains réclameraientà juste titredes représailles, et jen’aipasenviequenosanciennesquerellesreprennent.Jeveuxquemonmariagemarqueledébutd’unenouvelleère,uneèredepaix.

Sansréfléchir,ellefaillitdire«notremariage»uniquementpourlecontrarier,maisellecompritcequ’ilvoulaitdire.

—Maintenantquenoussommesd’accordpourgarderlesilencesurlesvéritablescirconstancesdenotrerencontre…,continua-t-il.

Elleéclatad’unriresansjoie.—Rencontre?Commesinousnousétionsvuspourlapremièrefoisdansunesalledebal?Ilignorasonintervention.—… Je suggère que nous disions que nous nous sommes rencontrés lorsque je suis venu vous

chercherpourvousamenerenEcosse.Exactementcommej’enavaisl’intentionavantquevotrepère…—Jesais,jesais…Trèsbien,nousnousentiendronsàvotreversion.Nousavonsétéprésentés,et

toutemafamilleaétéd’accordpoursedébarrasserdemoienmelaissantpartiravecunparfaitétranger.Elle leregardaà traverssesmèchesdecheveuxqu’ellecoiffaitavecsoin.Ilneparaissaitpasen

colère,cequilasurprit.Ilfouilladanslapochedesonmanteauetensortitquelquechose,délicatementenveloppédansuntissuauxcouleursdutartandesonclan.

—Jevousaiapportéunprésent.LeprésentquiétaitdestinéàCat…Elleposadoucementlepeignesursesgenouxencontemplantle

paquet.

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Illeluitendit,etellehésitaunpeuavantdeleprendre.Letartans’ouvritsurunepetiteboîteenboisfinement décorée et qui paraissait ancienne. A l’intérieur se trouvait un collier qui scintilla sous lesrayonsdusoleilcouchant.

—Cebijouappartientàmafamilledepuisdenombreusesgénérations.Ilaétéfabriquéici,avecdesperlesprovenantdesrivièresécossaisesetdesaméthystesdenossols,ainsiquedel’orissudenoscoursd’eau.

Ilsemblaittrèsfierdesonhéritage,héritagequesafamilleàelleavaitmépriséetrenié.Toutcelaétaittrès…troublant,etétrange.Lecollierétaitvraimentbeau,cependant,ellehésitaitàporterquelquechosequireprésentaitleclanMcCallum.

—Jecroyaisquelesdotsserésumaientàdubétail,dit-ellesuruntonvolontairementméprisant.Ilréponditcommes’iln’avaitpascomprisl’insulte.—Nospèresontpréférés’entendresurdesterres.—N’oubliezpasl’argentquemononcleauraitmisdanscemariage!Ilselevapuisordonna,ensedirigeantverslaportedusalon:—Vousporterezcecolliercesoir.Ilneregardapasderrièrelui,commes’iln’admettaitpasderefus,puisfermalaporte.Ellerestaquelquesinstantsimmobile,àcontemplerlecollierétalésursesgenoux,avecsesperles

nacrées et ses améthystes aussi claires que du cristal. Il n’était pas ostentatoiremais témoignait de larichesseduclanparlepassé.LesMcCallumneparaissaientpaspauvresàcepointmais,s’ilsavaientattenduavecempressement sa fabuleusedot—ouplutôtcelledeCat—,c’étaitqu’ilsétaientdans lebesoin.Pourtant,ilsnepouvaientplusespérerrecevoircettedot.Lecontratseraitrompu.Ilsperdraientégalement leurs terres, notamment celles qui leur permettaient de produire leur précieux whisky.McCallum ne voulait pas accepter la vérité et il allait finir par en pâtir. Mais elle ne le plaindraitsûrementpas!Leshommescivilisésnerésolvaientpasleursproblèmesenkidnappantdesfemmes.

Elles’adossaàsonfauteuiletessayad’imaginerCat,enlevéeaubeaumilieudelanuitetemmenéedeforceà travers lepays.Sicettedernièreavaitétéaucourantdececontratdemariage,elle l’auraitpeut-êtreaccepté,toutenressentantladouleurdesonimpuissance.Catsesentaitplusécossaisequ’elle-même, car elle était la fille d’un comte écossais.Elle avait visité plusieurs fois leurs terres avec sonfrère,Owen,l’héritierdutitre,etelleparlaittoujoursdelabeautésauvagedel’Ecosse.Maistoutesdeuxcroyaientqu’ellesépouseraientunAnglais…

Sespenséeslugubresfurentinterrompuespardespetitscoupsfrappésàlaportequidonnaitsurlecouloir.Elleserrasasortiedebainautourd’elle,sedirigeaverslebattantetl’ouvritpourlaisserentrerMmeWallace,accompagnéed’unejeunefemmequ’ellepoussadevantelle.

—LadyCatriona, je sais que les dames bien nées ont leur propre bonne, c’est pourquoi je suisvenueavecMary,manièce,quidésiretravaillerauchâteau.Ilyasurtoutdeshommesici,maisjepensequ’envousservantellepourraitserendreutileetapprendreunechoseoudeux.

—Merci,madameWallace,réponditRiona,surprise.Bonjour,Mary.Lajeunefillenelevapaslesyeux,secontentantdehocherlatêteenmurmurant:—Bonjour,madame.Elleportaitunerobetrèssimpleavecuntablieretunepetitecharlotteposéesursesbouclesbrunes

qu’elle avait nouées tant bien que mal au bas de sa nuque. Elle était fine, mais ses mains rouges etrugueusestémoignaientdeladuretédeseslabeursetdelaforcenécessairepourlesaccomplir.

MmeWallacetapadanssesmains,etsaniècefitunbond.—Bien,affaireconclue!dit-elle.Jevousaideraipendantunjouroudeux,etnouspourronsainsi

apprendreànotreMarytoutcequ’elleabesoindesavoirpourvousservir.Elleouvritlesportesdel’armoireetsortitlapremièrerobe.—Maryestbonnecouturière,précisa-t-elle,cequivousrendracertainementbiendesservices.

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Elles passèrent quelque temps à choisir sa tenue pour son premier dîner avec le clan. La robe,marron foncé,mettait bien en valeur le vert de ses yeux, déclaraMmeWallace. Son plastron crème,rehaussé par les lacets, et ses jolies fleurs brodées rappelaient le beau jupon apparent sous sa jupeouverte.Aprèsdeux semaines sansporterde corset,Rionaéprouvaunecertainegêneà sentir sa cagethoraciquesiétroitementserrée.Lasensationétaitdérangeantemaisfamilière,commesielleredevenaitelle-mêmepourabandonnersonstatutdeprisonnière.

Envoyantlecollier,MmeWallacepoussadescrisd’admirationetl’accrochafièrementautourducoudeRiona.Maislepoidsdubijounefitqueluirappelertouslesespoirsauxquelselleallaitdevoirrenoncer.

Assise devant la coiffeuse, elle se regarda dans lemiroir, tandis queMmeWallace coiffait sescheveuxenchignon,laissantquelquesmècheséparsesluicaresserlanuque.Savied’antann’existaitdéjàplus.Qu’ellesemarieounon,ellenepourraitjamaisplusêtreconsidéréecommeunefiancéepotentielle,innocenteetvierge.Aucunhommenevoudraitplusd’elleàprésent…Acettepensée,ellesentitsagorgeseserrer.

— Allez-vous revenir à nos anciennes coutumes pour le début de votre mariage ? demandaMmeWallaceenlacoiffant.

—Jevousdemandepardon?fitRionaenfronçantlessourcils.—Vousêtes ici,dans lesappartementsduchef. Jesuisaucourantpour lecontrat,biensûr,mais

vousnevousconnaissezpas.Vousallezpeut-êtrevousfianceretvivreensemblependantunanavantdeprendre une décision et vous assurer que vous pouvez avoir des enfants ensemble. Tout le mondecomprendra.

Rionadutfairedegroseffortspourempêchersamâchoiredetomber.Mêmesicettefemmesemblaitaniméedebonnesintentionsàsonégard,ellenepouvaitluidévoilersessentiments.PersonneneseraitjamaisvéritablementsonamiàLarigCastle.

McCalluml’avaitinstalléedanssesappartementscommesielleétaitdéjàsafemme.Avait-ilprévucetteformedefiançaillesdepuislongtemps?Avait-ill’intentiondevenircettenuitdanssachambrepourlafairesienne?Danscecas,leurbaiserétaitsansaucundouteunpréludeàcequil’attendait.

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Chapitre7

Tandisqu’ilmettaitsonplaid,Hughsongeaqu’ilavaitfaitlebonchoix.IlfallaitqueRionacesseses enfantillages et qu’elle accepte ses devoirs de femme.Elle ne pouvait pas changer l’accord entreleursdeuxfamilles,commelui-mêmen’avaitpulefaireàdix-neufans,alorsqu’ildésiraitdésespérémentprendreuneautreépouse.

Ilétaitprêtàbienlatraiteretàluifairecomprendrequeleurmariagepouvaitêtreréussi.L’amourn’étaitpaslesentimentrecherchélorsdesmariagesarrangés.Enrevanche,ilpouvaityavoirdurespectetdelacompréhensionentreeux.

Ilatteindraitcetobjectif.EmbrasserRionacontresavolontéétait-illemeilleurmoyend’arriveràsesfins?Ill’ignorait,mais

ilavait testéles limitesdesacapacitéàsecontrôlerenrestantprèsd’ellependantqu’elleprenaitsonbain—encoreunefois.Ilauraitdûs’attendreàcequ’ilallaittrouver,sachantqu’ellesepréparaitpourle repasdusoiraprèsun longvoyage.Mais ilétait tellementoccupéà réfléchirauxquestionsqueseshommes lui poseraient qu’il avait négligé tout le reste. Il s’était précipité dans sa chambre et l’avaitdécouvertedenouveaunue,mouillée,etterriblementséduisante.Ilavaitessuyésacolèreetsesinsulteset l’avaitadmiréepourcela,d’autantqu’elleétait seuleàLarigCastle, sanspersonnepourveiller surelle.

Maiscebaiser…Manifestement,elleétaitinnocente.Pourtant,elleluiavaitréponduavecunetellepromptitude!Ses

lèvres étaient douces et humides, et leur goût lui avait paru extrêmement exotique. Il avait presquetrembléenessayantdesecontenir,alorsqu’ildésiraitsifortapprofondirsonbaiser,explorersabouche,découvriretattisersondésir.

Peut-êtrevalait-ilmieuxqu’il se trempedenouveaudans labaignoire,maintenantque l’eauétaitfroide.

Il ferma la broche qui retenait son plaid sur son épaule et se dirigea vers le salon pour allerchercherRiona:tousdeuxaffronteraientalorssonpeuple,qu’ilavaitàpeinevudepuisdixans.

***

RionafaisaitlescentpasdanssachambreenattendantMcCallum.Cen’étaitpasàelled’allerverslui,maisàluidevenirlachercher.Ilavaitprévudel’utiliserpourrenforcerlesliensavecsonclan,maisellesavaitquecelan’arriveraitjamais.D’unefaçonoud’uneautre,elleluiferaitcomprendreque…

Elleentendit soudainunpetit coup frappéà laportedecommunicationavec le salon.Unepartied’ellevoulaitmettreunoreillersursa têtepournepas l’entendreet laisserHughdescendresanselle,

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l’humiliercommeelles’étaitsentiehumiliéequandMmeWallaceluiavaitparlédeleursfiançaillesàlamodeécossaise.Maiscelanel’auraitpasincitéàenvisagerlasuitedifféremment.Ellel’invitadoncàentrer.

Ils’arrêtasurleseuiletlaregarda,commeelle-mêmelefit.Ilportaitleplaiddesonclan,plisséetnouéautourdelataille.Unlongpanétaitdéployéenbiaissursontorseetépingléàsavesteauniveaudel’épaule.Ilportaitdeschaussettesécossaisesquimontaientjusqu’auxgenouxetdeschaussuresencuir.CertainsAnglaispensaientquelecostumedesHighlandsétaitridicule,maispaselle.McCallumavaitdebelles jambes, bien faites, et semblait fier d’arborer les couleurs de son clan. Il ne portait pas deperruqueetavaittirésescheveuxsombresenunequeue-de-chevalbasse.Ellenefutpassurprisequ’ilprennelecontre-pieddelamode.Cethommefaisaitcequ’ilvoulait,etelleétaitlamieuxplacéepourlesavoir.

Ill’étudialonguement,etsonregardmanifestanonseulementsafiertéetsasatisfactionmaisaussidu désir, oui, du désir pour elle. Gênée et confuse, elle détourna les yeux. Il lui avait volé sa vie.Comment osait-il se comporter comme si elle pouvait l’accepter facilement, comme s’il avait dessentimentspourellealorsqu’iln’avaitfaitquel’utiliser?

Maisquellevieavait-elleauparavant?murmurainsidieusementunepetitevoixdanssatête.Làn’étaitpaslaquestion.Ellevoulaitfairesespropreschoix.Ellen’avaitjamaisvraimentprisde

décisions,endehorsdulivrequ’elleallaitlireàBronwynetdel’airqu’elleallaitjouersursonépinette.Sesparentsluiavaienttoujoursditqu’ellepourraitdonnersonavisquantauchoixdesonmari…unjour.Et chaque année, « un jour » devenait l’année suivante, puis l’année d’après. Elle avait l’impressiond’avoirpassélesplusbellesannéesdesavieauchevetd’unemalade,oscillantentrelapitiéetl’amourqu’elleressentaitpoursasœur,etlatristesseetlafrustrationdemeneruneviedeconfinement.Certes,elleavaitétéautoriséeàaccompagnerCatàcertainsdînersouconcerts,maisn’avaitjamaiseulalibertéd’ypassertoutelasoirée,carsesparentsprétendaientqueBronwynavaitbesoind’ellepours’endormir.

Pourtant,Bronwynétaitsuffisammentenbonnesantépourvoyagersur lecontinent,etRionaavaitbonespoirqu’à leur retourceseraità son tourdeparticiperpleinementà la saisonqui sedéroulaitàLondres.Samèreleluiavaitpromisetluiavaitditsouslesceaudelaconfidenceavantsondépartqu’ilétaittempsqu’ellepuissesedétendreaprèstoutescesannéespasséesauchevetdesasœur.Rionacroyaitplutôt, assez cyniquement, qu’elle était jalouse de la proximité qui les unissait et qu’elle avaitdélibérémentfaitlechoixdenepasl’emmeneraveceuxenEurope.

Maiscetteviequ’elleimaginaitmenerplustardn’avaitplusd’importanceàprésent.Aunmomentouàunautre,McCallumfiniraitparcomprendresonerreuretparaccepterlefaitqu’ils’étaittrompédefiancée.Etcejour-là,toussesplansseraientruinés.

—Ainsi,vousportezunplaid,dit-elle.—LesfemmesdesHighlandsaimentserepaîtredesjambesnuesdeleurshommes…Ellelevalesyeuxauciel.—Vousêtesunebellefemme,Riona.Ilavait fait lechoixd’abandonner le titrehonorifiquede« lady»quand ilsétaientseuls,etcette

intimitél’irritaitauplushautpoint.Elleneserésoudraitjamaisàl’appeler«Hugh»,celaneferaitquejouerensafaveur.

Elle posa la main sur son bras en silence et se laissa conduire dans le couloir. Il s’engagea lepremierdans l’escalierencolimaçon,ainsique levoulait l’usagechez lesgentlemen. Il secomportaitcommetel,celanefaisaitaucundoute.

Tandis qu’ils descendaient, le bruit en provenance de la grande salle ne fit qu’augmenter. Desconversations,desrires,dessonsdecornemuses,letoutformantunejoyeusecacophonie.

—Voustremblez,dit-illorsqu’ilsarrivèrentsouslavoûteenpierre,àl’entréedelasalle.

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Il posa la main sur la sienne mais, au lieu de l’apaiser, ce geste eut pour effet d’accroître sonsentimentd’impuissancefaceàsaforce.Ellevoulutsedégager,puisseravisa.

—Çavaaller,affirma-t-elle.Illaregardaattentivementethochalatête.Lorsqu’ilsseprésentèrentsousl’archepourfairefaceà

l’assemblée,Rionaprit une courte inspiration. Il y avait aumoinsune centained’invitésdans la sallequ’éclairaientdestorchesaccrochéesauxmurs.Leurlumièresereflétaitdanslesplatsenargentdisposéssur plusieurs buffets. Un murmure invitant au silence se répandit parmi les convives, et même lacornemusesemblaémettreunenoteaiguëdesurprise.

Touslesregardsétaientbraquéssureux,desregardsàlafoiscurieux,inquiets,sceptiquesetpleinsd’espoir.Lechefétaitunpersonnageprépondérantdontdépendaitl’avenirduclan.Cesgensnesavaientpass’ilspouvaientsefieràMcCallum,absentdepuis troplongtemps.Ilsn’oubliaientpasquesamèreavaittournéledosàsonpère.Leclancraignit-ilqu’ilsoitluiaussiunivrogne?Ouunfaible,élevéparunsoiffardpendantlespremièresannéesdesavie?

Dermot,assisàlatabledresséesurl’estrade,semitdeboutetlevasonverredevin.—AMcCallum!Aussitôt, un rugissement de bienvenue fit sursauter Riona. Ce ne fut qu’en sentant le bras de

McCallum se relâcher qu’elle comprit à quel point il était tendu. Il ne sourit pas, car il n’était pas legenre d’homme prompt à se dérider, comme elle l’avait déjà constaté. Mais, en la conduisant versl’estrade, il arborait un air de fierté et de satisfaction. Se tenant à sa droite, elle observa la foule decurieux.

McCallum leva lesdeuxmains et semit àparler,maisRionan’encomprit pasunmot.Lesgenshochaient la tête, souriaientouprenaientunair solennel seloncequ’il leurdisait.Les regardsque luidécochèrent quelques personnes lui indiquèrent qu’on se rendait compte qu’elle ne comprenait pas.CertainsdevaientlavoircommeuneDuff,siétrangèreàsaterrenatalequ’ellen’avaitpasprislapeined’enapprendrelalangue.Sonpèreetsononclenes’étaientjamaisexprimésengaéliquedevantelle,etsamèreétaitanglaise.Laquestionn’avaitjamaisétésoulevée.Maisn’avait-ellepasapprislefrançaisetlelatin?Aujourd’hui,elleenéprouvaitunsentimentdeculpabilité,commesiellepouvaitsereprocherdenepasavoirtrouvédeprécepteurpourluiapprendrelegaéliquequandelleavaithuitans.

Aumilieu de la conversation, elle entendit prononcer son nom.Hugh lui prit lamain et la leva,commepourlaprésenter.PersonnenelahuapourêtreuneDuff,maislesapplaudissementsétaientrareset forcés. Elle lança un œil inquisiteur à Dermot et, lorsqu’elle croisa son regard, il se détournaostensiblement.Hughluilâchalamainetcontinuadeparler.

—Bonsoir,madame,murmuraunhommeàsadroite.Rionasetournabrusquementetsoupiradesoulagement.—Oh!Samuel,vousm’avezfaitpeur!Ilhochalatête,etelleréfléchitàsapropreréaction.Ilavaitétélecomplicedesonchefdansson

enlèvement et, pourtant, elle le voyait presque comme un allié, ce qui était ridicule. Jamais elle nepourraitlesupplierdel’aider.Elleavaitdéjàessayé.Ill’avaitvueterrifiéeetapeurée,etn’avaitrienfaitpourelle,hormislorsquelesbanditslesavaientattaqués.Maispourl’heure,illuiétaitsympathique,etleseulàluiparlerenanglais.

Il eut unpetit geste amical, comme s’il comprenait sa confusion, et ils attendirentqueMcCallumfinisse de parler. Lorsque ce dernier s’assit enfin, les voix s’élevèrent de nouveau, les musiciens seremirent à jouer et des domestiques apparurent d’un lointain couloir, portant des plateaux en bois surleurs têtes. Un homme à la carrure imposante vint se placer derrière Hugh, armé jusqu’aux dents, etregardal’assembléed’unairmenaçant:leurchefallaitêtrebienprotégé.

—Vousavezbonnemine,ladyCatriona,ditSamuel.—Merci.C’estbondesesentirpropredenouveau.

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—Oui,approuva-t-ilensouriant,jeconnaisbiencesentiment.—Quevientdedirevotrechef?—Cequ’ilfallaitdire,jepense,réponditSamuelencontemplantlafoulequiparaissaitdétendue.A

quelpointilétaitheureuxd’êtrederetour,etàquelpointil luitardaitdefairesespreuvesentantquechef.

—Fairesespreuves?—Oui,iln’apasencoreétéintronisé,expliquaSamuelavecunpetitsourire.Maisjenem’inquiète

paspourcesformalités.ElleobservaalorsMcCallumavecintérêt,maisilneregardaitpasdanssadirection.Lesplatsfurentd’abordprésentésauxconvivessurl’estrade.Ilspurentainsifaireleurchoixparmi

lesmeilleursmorceauxd’agneau,depouletetde truite.Riona futsurprisededécouvrirdevantelleuntranchoirenbois,finementsculptéetornéd’unliseréenargent.McCallumsaisitunecoupe,etSamuelluiexpliquaqu’ils’agissaitd’uncuach,unrécipientmunidepoignéesrecouvertesd’argent.McCallumbutunelonguegorgée,hochalatêted’unairappréciatifetlepassaàDermot.

—Ils’agitdenotrecélèbrewhisky,expliquaencoreSamuel.Votrefamilleconvoitelessecretsdesafabricationdepuisdesgénérations.

—Et c’est lui qui a conduit à ces infâmes fiançailles, ajouta-t-elle en s’efforçant de garder uneexpressionneutre.Cesgenssont-ilsencolèred’avoirpartagéleursprécieusesterresaveclesDuffcesvingtdernièresannées?

—Impatients,surtout,devoirarriverlejouroùlecomteleurverseraenéchangedeleurgénérositéladotqu’ilvousaaccordée.

Ellenesutquerépondreàcela.Cecontratétaitlaraisonmêmedesonenlèvementetdelaruinedesaréputationauxyeuxdelasociété.McCallumvenaitdefairetoutcequ’ilfallaitpourquesonpeuplenereçoivejamaisladotqu’ilsespéraient.

Lagorgeserrée,elleregardatristementsonassietteetseforçaàmanger.Bientôt,quelqu’unsemitàparler comme s’il déclamait une litanie, et elle reconnut les accentsd’unpoèteoud’unbarde, cequeSamuelluiconfirma.

—Ilchantelesexploitsdenotrepeuple,ajoutaMcCallumàsagauche.Rionasetournapourluifaireface.—Beaucoupde ces chantsportent sur lesbataillesquivousontopposés àmonpeuple, n’est-ce

pas?Ilesquissaunsourirevéritablementamusé,etsesyeuxgrisargentbrillèrentdoucement.—Certains, oui,mais on trouve toujours et surtout unCampbell contre qui se dresser à chaque

génération.Samueletluis’adressèrentunregardentendu,etellerésistaàpeineàl’enviedeleverlesyeuxau

ciel.Ah, leshommes, avec leursquerelles et leursbatailles !Si les femmesdirigeaient lemonde, leschosesseraientbiendifférentes.Biensûr,lareineAnneavaitdirigélaGrande-Bretagnetreizeansplustôt,etrienn’avaitvraimentchangé.LaplupartdesEcossaisavaientmêmeappréciésafaçondegouverneret,pendantsonrègne,lesEcossaiss’étaientunisauxAnglais,àleurdétriment.

—Touscesgensvivent-ilsauchâteau?demanda-t-elleenchangeantdesujet.—Certainsdeceshommessontdeschefsdeclan. Ilspossèdent leurspropres terres. Ilsont juré

fidélitéauxMcCallum.IlssontvenusàLarigenapprenantqueHughétaitenchemin,luiréponditSamuel.Riona ignorait que McCallum avait annoncé leur arrivée, mais elle se rappelait qu’il s’était

beaucoupabsentélorsqu’ilsétaientàStirling.— La plupart des jeunes hommes vivent ici. Ils sont les gentilshommes de ces chefs et ont été

choisisparmilafinefleurdesfamilleslesplusnobles.Ilssonttousentraînésàsebattre,maisilssontaussidestenanciersquiadministrentlesterresetlespaysans.

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RionaregardaMcCallum,quiécoutaitlesexplicationsdeSamuel.—Dermotadoncchoisitousceshommes?—Commel’afaitmonpère,réponditMcCallum.Etjesuiscertainqueseschoixsontbons.Ilme

tardedefairedenouveauleurconnaissance.Ils’attendaitdetouteévidenceàseheurteràdesproblèmesdeloyauté,etcelanepouvaitqueservir

saproprecause,songeaRiona.S’ilétaitsuffisammentdistrait,ilneremarqueraitpassonrapprochementavecDermot.

Ilavaladenouveauunelonguegorgéeduwhiskyquicirculaitdanslecuach. Il luiavaitparlédel’addictiondesonpèrepourlesboissonsfortes,etellesedemandasicelalepoussaitàsemontrerlui-mêmeprudentàl’égarddel’alcool.

Alafindurepas,ildescenditdel’estradeetallaparleràbeaucoupdegens.Rionasecontentadeleregarder,heureusequ’ilneluiaitpasdemandédesejoindreàlui.Ellesesentaitcomplètementétrangèreà leursdiscussions.Al’exceptiondeSamuel,personnene luiadressa laparoleet, lorsqu’il futappeléailleurs,ellerestaseuledeboutàcôtédesachaise,sesentantperdueetexclue.

ElleaperçutalorsDermot,momentanémentseul,quis’apprêtaitàboireuneautrerasadedewhisky.Prenant une profonde inspiration pour se donner du courage, elle s’approcha de lui et s’efforça desourire.

S’ilfutsurpris,iln’enmontrarien.—LadyCatriona, je suis heureux de faire enfin votre connaissance, dit-il en s’inclinant vers sa

main.—Heureuxousoulagé,monsieur?demanda-t-elle.Il sourit et sembla le faire avec plus de facilité que son cousin. Elle leur trouvait une certaine

ressemblance,notammentdansleurfrontlargeetpuissant.—Un chef ne peut qu’être heureux d’avoir une bonne épouse à ses côtés,ma dame.Avec vous,

Hughestunhommechanceux.—Quedelouanges,monsieur,maisilvousresteencoreàmeconnaître.—Nousavonstousàapprendrelesunsdesautres.—Danscecas,parlez-moidevous.Vousêtes lecousindeMcCallum.Avez-vousgrandidansce

château?—Non,jesuislefilsd’unchefdontlesterressetrouventàl’estdulochVoil.—Commentdevient-ontanist?—J’aiétéchoisilorsdugrandrassemblementquiasuivilamortdeMcCallum,toutcommeHugh.

Ilauraitpuassumercettecharge,biensûr,maisiladécidéqu’ilétaitplusimportantd’allercherchersonépouse.

Sontondésapprobateurétaitflagrant,etellefutsurprisequ’ilnes’encachepas.Elleavaiteuraisondechercheràserapprocherdeluipourmieuxleconnaître.

—LairdMcCallumadoncétéchoisicommetanistparsonpère?s’étonna-t-elle.—Oui,dèsqu’ilaatteintsamajorité,l’étéquiasuivilabatailledeSheriffmuir.Ilaététrèsadmiré

poursoncouragependantlarébellion.Elledéceladanssavoixuncertainénervement.—Vousétiezprésent,vousaussi?— Je suis revenu avec lui après la bataille, répondit-il sans quitter des yeux son cousin, qui

s’entretenaitavecplusieursgentilshommes.Jepeuxtémoignerdesoncourageauprèsdetousleshommesdenotreclan.

—Vousycompris,murmura-t-elle.Illacontemplad’unœilscrutateur,malgrésonlégersourire.—Jenesuispashabilitéàparlerdecela,madame.

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Ellepouffadoucement,lavoixlégèrementenrouée,carcelafaisaitlongtempsqu’ellen’avaitpasri.Maisàprésent,ellejouaitunrôleetellecontrôlaitmieuxsapeur.

—Avez-vousuneépousepourlaquelleprouvervotrecourage,Dermot?Ilsecoualatêteetréponditsèchement:—Pasencore.J’aiététrèsoccupécesderniersmoisaveclesterresdesMcCallumetj’aidûaider

monpère.Jen’aipaseubeaucoupdetempspourcourtiserunejeunefemme.Sielledécidaitdesollicitersonaide,aumoinssavait-ellemaintenantqu’iln’existaitaucunefemme

pourledistraire.—Connaissez-vouslairdMcCallumdepuisl’enfance?—Biensûr,ladyRiona.Nousavonssouventcourudanslescollinesensemble.—Sij’aibiencompris,ilétaitassezturbulentdanssajeunesse.Dermothaussaunsourcilinterrogateur.—Turbulent?Lesenfantsnelesont-ilspastous?—Ilétaitdonccommelesautresgarçons?Ilserembrunitsoudain.Touslessouvenirsnesemblaientpasbonsàévoquerpourlui.—Oui,dit-il.Hughjouaitdetempsentempsdestoursauxfermiersetleurramenaitlebétailégaré

commesinousavionsétéattaqués.Maisiln’ajamaisfaitdemalàpersonne.Pourtant, elle sentait dans sa voix une désapprobation qu’il avait dû ressentir y compris dans sa

jeunesse.Elleavaitl’impressionquelesdeuxhommesnes’étaientjamaisvraimentbienentendusetellepouvaitentirerprofit.Dermotseraitpeut-êtreenclinàl’aideràconvaincreMcCallumqu’ilavaitfaituneerreurenlakidnappant.

—Souvent, ildisparaissaitdanslescollinesunjouroudeux,cequiinquiétaitbeaucoupsamère,maispasson…

Ils’interrompit.—Maispassonpère?finit-elle.Soudain,McCallumapparutàcôtéd’elle,lessourcilsfroncés.—Monpèresesouciaitpeudecequejefaisais,ladyRiona.Dermotnevousl’a-t-ilpasdit?Iltoisafroidementsoncousin.— Je lui demandais simplement comment vous étiez, enfant, se défendit-elle, comprenant qu’elle

avaitfaituneerreurenmanifestantsacuriositéalorsqu’ilétaitàportéedevoix.Dermotcroisalesbrassursapoitrinesansunmot.IlportaitunebrocheidentiqueàcelledeMcCallum,etelleneputs’empêcherdesedemandersila

fidélitéàleurclanétaittoutcequ’ilspartageaient.Ilsparaissaienttousdeuxdeshommesmûrsetsérieux,maisellesentaitqu’ilsavaienteuunejeunesseextrêmementdifférente.

— Puisque nous en sommes à parler de nos erreurs de jeunesse, continuaMcCallum sur un tondétachémaisfroid,as-tuparléàladyRionadenotrerencontreaveclesAnglais?

LesyeuxdeDermotétaientdevenusfroidscommedelaglace.—Non,jenel’aipasfait.McCallumavaitprisuneexpressiongaie,commes’ils’apprêtaitàrelaterdesfaitsamusants,sauf

quelatensionentreeuxn’avaitriendedrôle.—Nousétionstoustroisintrépidesàcetteépoque,n’est-cepas,Dermot?Voyantquecederniernedisaitrien,Rionademanda:—Quiétaitletroisième?—Alasdair, mon frère d’adoption. Pendant un an environ, nous avons grandi dans nos familles

respectives, ce qui était la traditiondansnotre peuple.Lorsquenous avionsdouzeou treize ans, nousavonsespionnéungrouped’Anglaisdanslescollineset,pourfairelesidiots,nouslesavonssuivis.

Illançaunregardfurtifàsoncousin.

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—Dermotyétaitopposé,biensûr.Ilétaitnotreaînéd’unanetavaitdécidéqu’ilétaitdesondevoirdeveillersurnous.

—Ilfallaitquequelqu’unlefasse,commentaDermot,l’airimpassible.Etaujourd’hui,ilveillaitsurleclanàlaplacedeMcCallum,songeaRiona,cequilesrenvoyaità

unmomentdeleursviesoùilss’étaientmanifestementopposés.—Ques’est-ilpasséensuite?demanda-t-elle,plusintriguéequ’elleauraitaimél’admettre.— Nous les avons suivis pendant un jour, continua McCallum, et lorsqu’ils ont établi leur

campementnousavonsattiréleurgardeàl’écart,nousnoussommesintroduitsàl’intérieuretnousavonsvoléleursmousquetons.

—Vousn’avezpasétésurpris?demanda-t-elle,étonnée.Dermotluiréponditd’unevoixsansémotion.—Non,nousn’avonspas été surpris. J’aimonté lagarde,mais jeneme suispas introduitmoi-

mêmedanslecamp.—Cequiluiarendufinalementservice.Etrelefilsduchefm’aaidé,moiaussi,ajoutaMcCallum

d’unevoixempreinted’amertume.—Jenecomprendspas…—Lorsquemonpèreadécouvertcequenousavionsfait…Dermotl’interrompit.—Tun’asput’empêcherdetevanterdevantlesautresgarçons!—C’estvrai,jeneréfléchissaispasbeaucoup,àcetteépoque.Monpèreaeuventdecettehistoire,

naturellement.Beaucoupdenoshommessesontenorgueillisquedespolissonscommenousaientréussiàdéjouerlasurveillancedessoldatsanglais,etcertainsontmêmefélicitémonpèrepournotrecourage.Ilarépondu,àjustetitre,quenousaurionspuattirerlesAnglaisàLarigCastleetdéclencherungrosconflitentrenotreclanetFortWilliam,situéunpeuplusaunord. Ilaordonnéquenoussoyonsfouettéspournousdonneruneleçon.

Rionafitlagrimace.—C’estunepunitiontrèssévère,dit-elle.—PaspourDermotnipourmoi.Luin’avaitpasvolédefusils;ilaétéexcusé.Quantàmoi,j’étais

l’héritier.—Danscecas,quiareçucettepunition?demanda-t-elle.VotreamiAlasdair?—Ilaétéfouettépournoustrois,conclutMcCallum.Mêmesisavoixétaitrestéeneutre,commesilesfaitsappartenaientàunlointainpassé,ellecomprit

qu’ilavaittrèsmalvécuquesonfrèreadoptifsoitpuniàsaplace.Ilsecoualatête.— Il n’avait que treize ans,mais il s’estmontré incroyablement courageux. Et il nem’a jamais

reprochélacruautédemonpère.—Cequiveutdirequ’ilsontcontinuéàchercherlesennuis,ditDermotd’unevoixtranchante.Rionapercevaitlatensionquimontaitentreeux,commes’ilssesouvenaientd’autresfaitsdupassé.—Vousaimeriezmeraconterd’autreshistoires?—Non, jepenseque j’aisuffisammentcompromis l’opinionquevousaviezdemoipourcesoir,

ladyRiona,ditMcCallum.—Tuneluiasdoncpasparléd’Agnès?demandaDermotd’unevoixmielleuse.McCallumplissalesyeux,etsesprunellesgrisesprirentuneteinteorageuse.—C’estindignedetoi,cousin!Lapauvrefilleestmortedepuislongtemps.Illapritalorsparlebrasetserraunpeutropfort.—Venez,ladyCatriona,permettez-moidevousprésenterauxfemmesdenoschefs.

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Tout en s’éloignant, Riona ne put s’empêcher de lancer un regard furtif à Dermot, mais sonexpressionétaitindéchiffrable.

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Chapitre8

Uneheureplustard,invoquantsonextrêmefatigue,Rionafutautoriséeàseretirerdanssachambre.McCallumavaitluiaussidescernes,maisellesavaitqu’ilresteraitavecsonclanaussilongtempsqu’illejugeraitnécessaire.

Mary,lapetitebonne,s’étaitendormiedansunfauteuilàcôtédufeu.DèsqueRionaentradanslapièce,ellebondit,l’aircoupabled’avoirdélaissésesfonctions.

— Je ne voulais pas vous déranger, dit Riona en lui adressant un sourire rassurant. J’aurais dûfermerlaporteavecplusdedélicatesse.

—Non,madame.Jen’auraisjamaisdûm’endormir.—Biensûrquesi.Lasoiréeaétélongue.Nevousinquiétezpas.Le visage fin de la jeune fille, devenu blanc comme un linge, reprit quelques couleurs. Elle ne

retrouvapaslesourire,maisparutplusdétendue.—Merci,madame. J’aimisvotrechemisedenuitprèsde lacheminéepour la réchauffer.Nous

avonsbeauêtreenété,ilfaitaussifroidqu’enhiver,danscevieuxchâteau.C’était le plus long discours qu’elle ait entendu dans sa bouche, et la jeune bonne s’empourpra,

commepours’excuserdesesbavardages.Rionalalaissal’aideràsedéshabiller,puispoussaunprofondsoupir en sentant les liens de son corset se desserrer. Enfin, elle pouvait de nouveau respirer.Mme Wallace semblait croire que, si sa tenue était douloureuse et inconfortable, c’était qu’elleremplissaitsamission.

Lachemisedenuitétaitdélicieusementchaude.Aprèsavoirpasséunpeignoir,RionaenvoyaMarysecoucher.Enfin,ellebénéficiaitd’unmomentdepaix!EllesavaitqueMcCallumviendraitlaretrouver.Ill’avaitinstalléedanssesappartementspourunebonneraisonet,maintenantqu’elleétaitaucourantdesdispositionsconcernantcettepériodede«mariaged’essai»,elledevaits’attendreàsavisite.Nerveuse,ellesemitàfairelescentpas.

Elle essaya de penser à n’importe quoi, sauf à ce qui pouvait se passer cette nuit. Elle imaginal’austèreMcCallumenpetitgarçoninsouciantetpromptàenfreindrelesrègles,mêmesi,surceplan,ilsemblaitnepasavoirchangé.Aprèstout,iln’avaiteuaucunedifficultéàl’enleverpourl’emmeneraveclui.MaislaconversationentreDermotetluiavaitététrèsrévélatrice.QuipouvaitbienêtreAgnès,pourqueDermotparaissesiheureuxd’yfaireallusionetqueMcCallumconsidèrepresquecommeunpéchédel’évoquer?

Rionaregrettaitd’avoiràutiliseruntelsouvenirpourmonterlesdeuxhommesl’uncontrel’autre,maiselleétaitprêteàtoutpouréviterd’êtremariéedeforceàuninconnu.

En revanche, si jamais McCallum choisissait de venir la trouver ce soir, elle n’aurait pasd’échappatoire. Pourrait-elle crier pour qu’on lui vienne en aide ? Difficilement. Et à quoi cela

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l’avancerait-il?Elleétaitàsamerci,cartoutlemondecroyaitqu’elleétaitlavéritablefiancée.Deplus,nes’était-ellepasmontréeextrêmementdocileetconsentante,aucoursdecettejournée?

Elleespéraitleconvaincredelalaissertranquille,maislafaçondontill’avaitregardée,lorsqu’ill’avaitvuedanssarobe,luilaissaitcroirequ’ilseraitinsensibleàsesprotestations.Ilneluirestaitplusqu’àseraccrocherdetoutessesforcesàsapromessedenepaslaforceràcoucheravecluiavantleurmariage.

Elleavaitbeau retourner leproblèmedans tous les sens,elle ignoraitencorecequ’elle ferait, sijamaisilchangeaitd’avis.Ellecontinuaàfairelescentpaspendantunlapsdetempsquiluiparutuneéternité.MaisMcCallumnevintpas.Finalement,elleserecroquevilladanssonlitettiraétroitementlesrideaux,commes’ilspouvaientlaprotéger.Ellegardasonpeignoirsursachemisedenuit,qu’elleserrajusqu’aucou,écoutantleventquisoufflaitsurlesrempartsduchâteau.Aucunbruitdepasneluiparvint.Ellefinitparsombrerdansunsommeilagité.

***

L’aubeselevaitquandundomestiquevintserviràHughlepetitdéjeunersurunplateau.Aprèsavoirremercié l’homme, il l’emportadans la chambredeRionaet fermadoucement laportederrière lui. Ilposaleplateausurunetableets’approchadulit.Lesrideauxétaienttirésetnefirentaucunbruitlorsqu’illesécarta.

Elleétaitcouchéesurlecôté,lesmainssouslementon,vêtuedesonpeignoiretdesachemisedenuit.Sescilsprojetaientdesombresdenteléessursesjoues.Desmèchesblondess’échappaientdesestresses, qui brillèrent comme de l’or lorsque les rayons du soleil filtrant par la fenêtre vinrent leseffleurer.

Ilauraitaimélaréveillerparunbaiser,maisilsavaitqu’elleneferaitquepaniqueretlemordre.Leur journée ne commencerait pas très bien. Il préféra s’appuyer sur le cadre du lit en se rappelantcommentelleluiétaitapparuelaveille,avecsescheveuxblondssedétachantdemanièresiéclatantesursarobesombre.Ilavaitéprouvédelafiertéàlaprésenteràsonclanet,mêmesiellenecomprenaitpassalangue,ellen’avaitmanifesténiennuinicontrariété.Elleparaissaitpeut-êtreunpeudéconcertée,etilsavaitaussiquesaméconnaissancedugaéliqueluivaudraitplusieursregardsdemépris.

IlétaittrèscontrariéqueDermotaitdécidédefaireresurgirlepassé.Certes,Rionafiniraitparêtreaucourantdesastupidité,etilauraitsansdoutedûluienfairepartpendantleurvoyage.Maisgarderunefemmeprisonnièreet luiparlerde ses souvenirsde jeunessecommeside rienn’étaitne lui avaitpassemblél’attitudelaplusappropriée.

Ilyavaitbiendeschosesqu’ilauraitpuluidire,maiscelapouvaitattendre.Enoutre,DermotétaitleseulàêtreassezstupidepourévoquerAgnèsdevantsonchef.

Donc…devait-il la réveiller ? Il réfléchissait à la question lorsqu’elle s’étira commeun chat etrouladoucementsurledos,lesbrasau-dessusdelatêteetlapoitrineenavant.Lesdrapsavaientglissé,etileutdenouveauunaperçudesesseinssoussesvêtements.Justeàcetinstant,elleouvritlesyeuxetétouffauncrienlevoyant.

Ildésignalatable.—Bonjour.Lepetitdéjeunerestservi.Rionaremontalecouvre-litsoussonmenton,etHughréprimaunsourirefaceàcequ’ellecroyait

pouvoirluiservird’armure.Maisiln’étaitpascertainqu’elleappréciesonsensdel’humour.Ilpréféras’écarter et s’asseoir à la table, heureux du porridge, des petits pains chauds, des œufs durs et desharengsfritsquilesattendaient.

—Voulez-vousvousjoindreàmoi,jeunefille?demanda-t-il.

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Elle repoussa les couvertures et glissa ses pieds délicats dans des mules avant de s’approcherpresqueprudemmentdelatableetdes’asseoirenfacedelui.

Ilcommençaàmangeravecappétit,maisellesecontentaitdeleregarder.—Qu’est-cequivouschagrine,Riona?s’enquit-ilalors.—J’aicru…jecraignais…Elleprituneprofondeinspirationetleregardad’unairsolennel.—Hiersoir,j’aicruquevousviendriezmerejoindrepourexiger…un«mariaged’essai».Surpris,ilposasoncouteau.—Jevousprometsquejen’aijamaisforcéunefemme.Jeneferaipasd’exceptionavecmafiancée.Ellepoussaunlongsoupirets’enfonçadanssonsiège.—Jetâcheraidenepasmesentiroffensé,dit-ilsèchement.—Jemefichequevousvoussentiezoffensé!répliqua-t-elle.Jesuisvotreprisonnièreetjenesais

jamaiscequevousavezprévupourmoi.—Voussavezcequesignifiece«mariaged’essai»,n’est-cepas?Elleneréponditpas,secontentantdejoueraveclereversdesonpeignoir.—Mesgenssontlibresdecroirecequ’ilsveulent,biensûr,continua-t-il.—Ehbien,jepréféreraisqu’ilsnecroientpascela!Ilrompitunmorceaudepainetleposadansl’assiettedeRiona.—Mangezquelquechose.Vousêtespâlecommeunlinge.Ellebeurrasonpainetenpritunebouchée,puisgrimaçalorsqu’illuitenditdelabière.—D’habitude,jeboisduchocolatchaudaupetitdéjeuner.—Nousn’avonspasdechocolatici,maisnouspouvonsvoustrouverduthé.Etdulait,biensûr.Ilbutalorsunelonguegorgéedebièrequ’ilponctuad’unclaquementdelèvres.Ilsmangèrentensilencequelquesminutes,jusqu’àcequ’ellelèvelesyeuxversluipourl’observer.—Qu’avez-vousdoncprévupourmoi?demanda-t-elle.Quesuis-jecenséefairedemajournée?—Toutd’abord,vousdevezmepromettredenepasessayerdevousenfuir.—Vousnepouvezpasmedemandercela,protesta-t-elleenseraidissant.Jesuisuneprisonnière!

Jesuiscertainequevousessaieriezdevousenfuir,sivousétiezretenuquelquepartcontrevotregré.Ilpoussaunlongsoupir.—Jevousaidéjàditquej’avaisdepuislongtempsacceptémesobligationsàl’égarddemonclan.

Vousdevrezvousaussiaccepter lesvôtres.Enattendant, sivousnepouvezpasmepromettredevoustenirtranquille,vousserezconfinéedanslechâteauavecungarde.

—Ungarde?répéta-t-elled’unevoixblanche.—Jetâcheraiquecelasefassediscrètement,afindenepasvousembarrasser.—Ditesplutôtquevousnevoulezpasêtreembarrasséenmontrantàvotreclanquevotrefiancée

estlàcontresongré!—Encoreunefois,vousoubliezquetoutlemondesaitquevousêtesuneDuff.Ilsdoiventsedouter

quevousn’êtespasicidegaietédecœur.Vousêteslibred’alleretvenirdanslechâteaumaispasau-delà.Passansmoi.

Commed’habitude,ilputvoirlesémotionssesuccédersursonvisageexpressif:laconsternation,lafrustrationetl’entêtement.Ellesemblaretrouverenfinsoncalme,etHughseditqu’ilauraitbienassezdetempspours’inquiéter.

Rionaavalaunboutd’œufetleregardaaveccuriosité.—MaconversationavecDermotaétéfortintéressante,dit-elle.Illaregardaàsontouravecarrogance.—IlnefautpastoujourssefierauxsouvenirsdeDermot.

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—Vousprétendezdoncquesesfacultésmentalesnesontpasfiables?Etonnant,quandonsaitquevotreclanl’achoisipourêtrevotretanist.

—Oh!c’estunhommeavisé,commevousavezpulevoir.—Maisvousneluifaitespasconfiance.Rionasemontraitunpeutropimpatientedepartagersessecrets.—C’estmoncousin.Unliendecegenreoutrepasseceluidelaconfiance.Ilferacequiestbonpour

leclan.—Maiscelasera-t-ilcequevouspensezêtrebonpourleclan?Ilsepenchaverselle.—L’importantestcequejecroisêtrebon,jeunefille.Rionapritunairrenfrogné,etilseretintderire.Ellenedevaitpassavoiràquelpointillatrouvait

drôle.Ellepourraitalorssedirequ’elleétaitbienpluspourluiquelasimplepartenaired’unmariagearrangé.

—QuiestAgnès?demanda-t-elle.Asagrandesurprise,ildutcombattrel’affluxdesouvenirsavantdeluirépondre.—Unejeunevillageoisequiestmortedepuistrèslongtemps,répondit-ilenlaregardantdroitdans

lesyeux.—C’estcequevousm’avezdithiersoir.Maisquiétait-elle?—Elleappartientaupassé,etpluspersonnenepourraluifairedemal.Rionaclignaplusieursfoislesyeux,puisouvritlabouchecommepourajouterquelquechose,mais

ill’interrompit.—Jevaisêtredehorstoutelajournée.Jevousverraicesoir,audîner.—Teln’estpeut-êtrepasmonsouhait,dit-elled’unairbuté.— Comment comptez-vous vous y prendre pour connaître votre fiancé ? Nous ne pourrons pas

réussirnotremariage,sinon,etjesuisbiendéterminéàcequ’illesoit.Illaquittabalbutianteetfurieuse.Ilavaitbesoind’unmariagesolideetd’héritiers.Ilfallaitdonc

qu’ilmettesurpiedunmeilleurplanpourlaséduire.

***

Aprèss’êtrehabillée,Rionafulminaitencore.ElleenvoyaMarychercherMmeWallace.Maisellenepouvaitfairegrand-chosecontreMcCallumetsonhorripilantearrogance.Mieuxvalaitseconcentrersur sonplan et réfléchir à lamanière d’éviter cemariage.Peut-être ne réussirait-elle pas à quitter cechâteau,maisilétaitimportantqu’elleleconnaissedanssesmoindresrecoins.Onnesavaitjamais.

MmeWallace se chargea de lui faire visiterLarigCastle avec enthousiasme et fierté. Partout oùellesallaient, lespersonnesinterrompaient leursconversationsengaéliqueets’inclinaientverselleouluifaisaientlarévérence.Ellen’avaitpasl’habitudederecevoirautantd’attentionsetd’êtreaussibienaccueillie.Parfois, elle croisait dans leurs regardsde la curiosité, parfoisunecertaineméfiance, sansdouteparcequ’elleétaituneDuff.

Quant au château lui-même, à l’exception des pièces communes, il donnait l’impression d’êtrenégligé.Lesmeublesétaientraresetlesfenêtreséquipéesdevoletsetnondebattantsquel’onpouvaitouvrirpourlaisserentrerl’airfrais.Contrairementauxpaysagesquiornaientlesappartementsduchef,aucune toile n’habillait les épaismurs en pierre.Même les pièces lambrissées ne possédaient que leportraitsévèred’unancêtre.

—Lespeintresn’ontpasbeaucoupd’avenirenEcosse,ditMmeWallaced’unevoixlégère.Lorsqu’elles pénétrèrent dans un salon réservé à la famille, Riona fut surprise de découvrir une

épinetteplacéesouslafenêtre.

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MmeWallacegloussaenvoyantsonairsurpris.—LamèredeHughl’avaitfaitvenirexpressément.Elleavaitbesoindes’occuperquand…mais

trêvedebavardages.—McCallumm’aditquesonpèren’avaitpasunboncaractère.—Non,eneffet.HughetMaggie,lespauvrespetits,enontbeaucoupsouffert.—Quanda-t-ilperdusamère?—Maisellen’estpasmorte,rectifiaMmeWallaceenécarquillantlesyeuxdestupéfaction.Ellevit

àEdimbourg,prèsdesafamille.Monsieurnevousl’apasdit?—Nousvenonstoutjuste…denousrencontrer,bafouillaRionaenrougissant.Nousn’avonspaseu

letempsdebeaucoupparler.— Pas étonnant qu’il veuille dîner avec vous tous les soirs, alors. Vous avez toute la vie pour

apprendreàvousconnaître.Pastoutelavie…Passiellepouvaitl’empêcher.—Avez-vousunebibliothèque?demandaRionapourchangerdesujet.MmeWallaceluilançaunregardperplexe.—TousleslivressetrouventdanslesolariumdeMcCallum.Quid’autresvoudraientleslire?—Lesautrespersonnesduchâteau?hasardaRiona.Lesdames?—Malheureusement,vousnetrouverezpasbeaucoupdefemmesquis’intéressentàlalectureici,

saufàcelledudimanche.—Oh!Rionaavaitl’habitudedelireautantqu’ellelevoulaitetdeparlerdesesdernièreslecturesaucours

desdîners.LesMcCallumn’étaient-ilspaséduqués?Elles quittèrent bientôt la tour principale pour explorer les autres bâtiments construits dans les

muraillesetdestinésauxdomestiques,commelataverne,lalaiterieetlamaisonoùlesfemmesduvillagevenaientfilerettisserlesétoffes.Lescuisinessetrouvaientsouslagrandesalle,attenantesàunjardinpotager.MmeWallace l’informa que d’autres jardins s’étendaient au-delà des enceintes. Partout, deshommespatrouillaientsurlesremparts,commesilesAnglaiss’apprêtaientàattaqueràtoutmoment.

OulesDuff,songeaRiona.OulesCampbell,outoutautreclan,carlesEcossaisétaientunpeuplebelliqueux,comme le luiavait toujoursdit sonpèreavecdédain.Unpeuplusdedixansplus tôt, ilyavaiteuunesériedebataillesaveclesAnglais.EttouslesMcCallumétaientbienpréparés.

Ellessetenaientàprésentsousl’entréevoûtéequimenaitàlacourinférieure,veillantàs’écarterdes hommes qui allaient et venaient. Des baraquements en bois entouraient la cour où les hommess’entraînaient pour la guerre. De grands tas de fumier s’y élevaient, et des animaux y circulaientlibrement,despoulets,deschiensetmêmedescochons.Rionaaperçutdesécuriesetdeséchoppesoùtravaillaientdesartisanscommeleforgeronoulecharpentier.

Puisellereportasonattentionsurleshommesquisebattaiententreeux,armésd’épées,unbouclieràlamainpourseprotégerdescoupsdeleuradversaire.

Elle eut alors la surprise de découvrir McCallum parmi eux. Ils avaient beau s’entraîner, leurcombatparaissaitréeletluiarrachadetempsentempsunegrimacedefrayeur.Laplupartdeshommesavaientabandonnéleurmanteau,certainsmêmeleurchemise.CommeMcCallum.Sonplaidétaittoujoursnouéautourdesataille,maissespanssouplespendaientpar-dessussaceinture,n’étantplusretenusàsesvêtementsparunebroche.Beaucoupd’hommess’étaientrassembléspourlesregarder,etellecomprenaitpourquoi.McCallumavaitétéchoisipourêtreleurchefparcequ’ilétaitl’héritierdesonpèreetunhérosdelabatailledeSheriffmuir.Deplus,ilsnel’avaientplusvudepuisplusdedixans.

Soncorpsbrillaitdesueur,etelledistinguaplusieurscicatricessursesmusclesfermes.Devantlespectacle de sa virilité, Riona se sentit gagnée par une chaleur diffuse et un certain malaise. Il luiapparaissaitàcetinstantavanttoutunhommeetnonplussimplementsonravisseur.Lesouvenirdeson

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baiserl’assaillitbrusquement,etellesentitsesjouess’enflammer.Ellenevoulaitpasêtreattiréeparluiet s’efforçade combattre cette trahisonde son corps.Pourtant, sa résistancene semblapasporter sesfruits.

—Vousavezvusescicatrices?commentaMmeWallacesanscachersonamusement.—Oui.EllesontétéfaitesàSheriffmuir?—Oui,etaussiquandilétaitenfant.Ilsecassaitrégulièrementunmembre.Jesuissurprisequ’il

soit toujours entier.C’est ungentil garçon.Certains se sont fait du souci pour lui,mais ce n’était pasvraimentutile.

—Jesaisqu’ilestrestédixanssansrevenirici.Qu’a-t-ilfait,duranttoutcetemps?—C’estencoreunequestionquevouspourrez luiposer lorsquevousnesaurezpasquoi luidire

pendantledîner.Commentallait-ellemenersonenquêtesipersonnen’acceptaitdeluiparler?—Quiestl’hommeaveclequelils’entraîne?—Ils’agitd’AlasdairLennox.—J’aidéjàentenducenom,commentaRiona,soulagéedepouvoirdétournersonattentionducorps

superbementmusclédesonfiancé.McCallumetluiétaientamisquandilsétaientenfants.MmeWallaceacquiesça,puisfixalesdeuxhommesenplissantlesyeux.—Oui,ilsétaientfrèresadoptifs.Ilsontétéélevésàtourderôledanschacunedeleursmaisons.

Parfois,ilsétaientamis,d’autresfois,adversaires,etàcequejevoisleschosesn’ontpaschangé.—Ils’estpassébeaucoupdetempsdepuisqu’Alasdairaacceptéderecevoirlefouetàlaplacede

McCallum.Lagouvernanteluilançaunregardsurpris.—Vousêtesdéjàaucourantdecettehistoire?—DermotetMcCallumm’enontparlé.—Jen’auraispasaiméassisteràcetteconversation!ditMmeWallace.—Moi-même,jen’étaispasvraimentàl’aise,reconnutRiona.MmeWallacelaregardafurtivementavantdesetournerversMcCallumensecouantlatête.—Jedoisvouslaisser.Ledéjeunerestservià13heuresprécises,àl’heuredel’horlogesituéesur

lemanteaudelacheminéedanslagrandesalle.Atoutàl’heure!Elles’éloignaàgrandspas,laissantRionaseule.Vraimentseule,carellecroisaplusieurspersonnes

quinesetrouvaientpaslaveilledanslagrandesalle.Ignorantquielleétait,cesdernièresluiadressèrentdes regardsétranges.Elleaccueillit leurs signesde têteou leur révérence,mais tousparaissaient tropintimidéspouroserluiparler.Ellequiavaitplutôtl’habitudedepasserinaperçueetavaitsouventpriépourquequelqu’un,n’importequi,laremarquependantqu’elles’occupaitdesasœurmalade!

Et voilà qu’aujourd’hui elle était le centre de toutes les attentions et bénéficiait d’une certainenotoriété.Aprèstout,elleétaituneDuff,fiancéeàMcCallumpourmettrefinàleursconflits.

Elles’attardaunmomentetassistaàl’entraînementdeshommes,observantsurtoutMcCallum.Elleavaitdéjàéprouvésa force lorsqu’il l’avaitprisesursonépaulepourdescendredubalcon.Elleavaitsenti la douceur, la chaleur et la fermeté de sesmuscles lorsqu’elle s’était serrée contre lui dans sonsommeil.Maislevoiràmoitiénudevantautantdemondeluiparaissaitpresque…impie.

Elles’adossacontrelemurenpierreetessayadelecomprendre.Ils’adressaitàseshommesavecconviction, comme s’il était né pour gouverner. Il était énergique et agressif dans ses gestes, mais ilexpliquaitavecpatiencesatechnique,mêmelorsquecertainsmanifestaientdesdifficultésàapprendre.

Quevoyaientsesgensenlui?Etoùétait-il,cesdixdernièresannées?Sonadversairefinitparlui tapersurl’épauleet ladésignerdudoigt.McCallumbraquaalorsson

regardverselle,etelleseraidit.Ilsétaientséparésparlacour,maisellesentaitlepouvoird’attraction

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qu’il exerçait sur elle et savait, au fond, ce qu’il voulait d’elle et comment il souhaitait qu’elle sesoumetteàlui.Elleavaitl’impressionqu’auvuetausudetousilétaitentraindel’embrasser.

Les hommes se mirent à rire. McCallum, lui, leva la main pour la saluer, sans pour autantabandonnersonentraînement.Ellesedétournaeteutlaforcederevenirverslechâteau,danslasécuritédesachambre…quiétaitaussicelledesonravisseur.Toutcequ’elleavait,toutcequ’ellefaisait,elleleluidevait.Elleétaitsoussonemprisecommeelleavaitétésouscelledesesparents.Commesielleavaitéchangéuneprisoncontreuneautre,ensomme.Saufqu’àcetteépoqueelleignoraitqu’ils’agissaitd’uneprison.Elle était simplement la fillede sesparents, incapablede fonder sonpropre foyer sans lebonvouloirdesonpère.

Etaujourd’hui?McCallumvoulaitfaired’ellesafemme,luioffrirsonfoyer,etmêmesonchâteau!Mais il l’avait fait contre sa volonté à elle, à l’encontremêmedu contrat qu’il croyait honorer !Uneterrible confusion… Lorsque tous ces gens qui la regardaient avec scepticisme ou méfiancedécouvriraient la vérité et perdraient peut-être la précieuse terre sur laquelle ils comptaient tant pourfabriquerlewhiskyqu’ilsvendaient,elleneliraitplussurleursvisagesquedégoût.

Frémissantàcetteidée,ellesedépêchaderetournerdanslatour.

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Chapitre9

HughsuivitunlongmomentRionaduregardtandisqu’ellequittaitlacour.—Tafiancéenesemblepaspresséed’êtreavectoi,plaisantaAlasdair.Hugh lui lança un regard noir. Ils ne s’étaient pas vus durant des années, après la bataille de

Sheriffmuiret ledésastreuxétéquiavait suivi saconvalescence.PuisAlasdair s’était renduun jouràEdimbourgpouruneaffairedefamilleetl’avaitcontacté.Ilss’étaientretrouvésdansuncafé.LoindesHighlands et de l’influence de leurs pères respectifs, ils avaient eu l’impressiond’être redevenus desenfants.

Maismaintenantqu’ilétaitderetouràLarigCastleetqu’ilavaitéténomméchef?Alasdairavaitchangé,luiaussi,etéprouvaitpresquelebesoindeluiprouverqu’ilétaitsonégal,chosequelui-mêmen’avaitjamaisremiseencause.

Il s’efforça de rester patient. Après tout, ce n’était que le premier jour qu’il testait le degré depréparationdesesgentilshommes.

Pourtant,lesdeuxpersonneslesplusprochesdelui,àsavoirDermotetAlasdair,neluiavaientpasréservél’accueilqu’ilespérait.Qu’enétait-ildesautres?

Illesobserva,tandisqu’ilschangeaientd’adversairesavantdesebattreàl’épée.Encestempsdepaixprécaire, ils étaientassezbienpréparéspour labataille. Ilnepouvaitpas seplaindre.Depuis lamortdesonpèreetsalonguemaladie,leclanMcCallumavaitvécusansvéritablechefdeguerre.C’étaitlapremièrechoseàlaquelleildevaitremédier.Alasdairétait-ilprêtàaccepteruntelposte?Ils’étaitbattuàSheriffmuiravecleclanets’étaitélancésurcescollinespourchasserlesDuff,lesCampbelletlesMaclarendepuispluslongtempsquelui.Maisilignoraitsisonamiétaitdigned’unetellecharge.Ilfallaitqu’ilenparleàDermot,etcetteidéeluidéplaisait.

***

Rionaavaitdécidédeserendredirectementdanssachambreetd’yrester,maiselles’arrêtadevantla salle des femmes pour admirer avec quelle dextérité elles filaient et tissaient. Certaines parlaientanglaisetparaissaient impressionnéesetexcitéesderencontrerquelqu’unquiavaitpassésavieparmilesAnglais.Rionarépondità leursquestionsetfinitparprendredestravauxdecouturepourpasserletemps.Elle leurpromitde revenir lesvoir.Pourtant,ellenese sentaitpasà saplace.Ellen’étaitpascensée être là. Elle n’était pas la fiancée de McCallum, et ces femmes la regarderaient avec ragelorsqu’ellesdécouvriraientlavérité.

Ellefinitparprendrecongé.Impatientederegagnersachambre,ellelongeaitlecouloirtêtebaisséeetfaillittombernezànezaveclefrèreadoptifdeMcCallum.Ilsetenaitdeboutsurlepasd’uneporte,

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commes’ilregardaitàl’intérieurdelapièce.Ellenevoulaitpasledéranger,encoremoinsseretrouverfaceàlui.Elleserepliaàl’endroitoùlecouloirformaituncoude,enessayantdesesouvenird’unautrecheminpourreveniràsachambre.

— Tu n’as pas l’intention de t’entraîner avec Hugh ? demandait Alasdair d’une voix lourde desarcasme.

Surprise,ellelevalatête.Ellesavaitqu’ellenedevaitpasécouterlesgensàleurinsu,maislefaitd’avoirétékidnappéeluiavaitfaitoublierbiendesrèglesdepolitesse.Alasdairpénétradanslapièce,etRionasedemandasielleallaitentendred’autresfragmentsdelaconversation.Commeellereculaitdanslecouloir,ellerenversaunecorbeillerempliedebobinesdefilsetsemitàgenouxpourlesramasser.ElleentenditAlasdairpoufferetcompritqu’elleavaitratélaréponsedel’autrepersonne.

—Tunepourraspastesoustraireéternellementàl’entraînement,insistaAlasdair.—Cen’estpasdansmesintentions.RionareconnutlavoixdeDermotetretintsonsouffle.—Jen’avaissimplementpasprévuàquelpointceseraitdifficileàsonretour.—Maisilaétééluparleclan,repritAlasdaird’unevoixlégèrementcompatissante.Tusavaisque

cejour-làarriverait.Nousl’avonstoujourssu.—Oui,maisjecroyaisquejeseraisplussûrdemonrôleàsescôtés.Alaplace,jemeposedes

questionssurcequ’ilafaitdurantsasilongueabsence.—Dermot…—Je saisqu’il nousa représentés àEdimbourg, etbienplus,ditDermot avec fureur,maisnous

étionsici,aveclevieuxchef.Luinon.Etlefaitqu’ilaitétéchoisipourdevenirnotrelairdnemeprouvepasqu’ilmériteuntelposteetqu’ilsachel’assumer.

—Dermot,ilnefautpasquelesautrest’entendentparlercontrelui.—Jenesuispascontrelui.Jeveuxjustelapreuvequ’ilmérited’êtrenotrechef,qu’ilestdevenu

unhommedignedeconfiance,qu’iln’estpluslejeunehommeimpétueuxqui…Ils’interrompit.—Cen’estpasnotre rôlede lecontrôler, intervintalorsAlasdair.A l’époque, tun’aspaspu le

faire.Inutiled’essayeraujourd’hui.Rionacrutentendredesbruitsaufondducouloir.Ellesedépêchaderamasserledernierécheveau

defilsavantdepartirprécipitamment.Ellenerespiracalmementqu’unefoisadosséeà laportedesachambre.Elleréfléchitalorsàce

qu’elleavaitentenduetàcequecelapouvaitsignifierpourelle.Ellenes’inquiétaitpaspourMcCallum.Après tout, il était à l’origine de tous ses problèmes et il devait en accepter les conséquences.A cetinstant, toutcequi l’intéressait,c’étaitde retrouversa liberté. Jamaisplusellene reviendraitàsavied’avant. Depuis son enlèvement, sa réputation était irrémédiablement ruinée. Mais cette vie-là nel’intéressaitpas.Elleaspiraitàbiend’autreschoses,etcen’étaitpasàtraversunmariageforcéàLarigCastlequ’ellelestrouverait.

Dermotétait-il lacléqui luiouvrirait lesportesdesaprison?Commentpouvait-elleutilisersesdoutesetsonmécontentementpourarriveràsesfins?

Tandisquelesoleilsecouchait,ellesetenaitdeboutdanssachambre,leregardtournéverslacour.Elle entendit la porte s’ouvrir derrière elle et découvrit Mme Wallace et Mary qui apportaient desplateauxpourledîner.

—C’estsiromantiquedelapartdulairddevouloirdînerseulavecsafiancée,ditMmeWallaceàMary,quirougitenremarquantlaprésencedeRiona.

Rionaserralesdents,maiss’efforçadesourire.Juste à cet instant, McCallum entra, les cheveux retenus en une queue-de-cheval lâche et les

vêtementssalisparunejournéepasséedanslacouràs’entraîner.

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—Excusez-moidenepasm’êtrelavéavantdevenirvousretrouver.J’aiperdulanotiondutemps.Nouspouvonsdînerpendantquel’onpréparemonbain.

Elleauraitdûsesentirdégoûtéeparsasaletésaufqu’elleluirappelaitavecquellevigueuretquellevirilitéilavaitutilisésoncorpssouslesoleilpoursebattre,etcommentsesmuscless’étaienttendusàchaquecoupd’épée,àchaquesautpouréviteruncoupdelame.

Mieux valait qu’elle cesse d’y penser. Sinon, elle risquait de ne plus pouvoir croiser le regardbienveillantdeMmeWallace.

Lorsqu’ils furentenfin seuls,McCallumattaquasonplatcommes’iln’avait rienmangédepuis laveille.MaisRionasavaitpourl’avoirvuqu’ilavaitdéjeunéavecseshommes.

—Quepensez-vousdeLarigCastle?demanda-t-ilenfinenprenantunegorgéedewhisky.Elleregardafixementleverred’alcool.—EnAngleterre,nousbuvonsduvinaudîner.Leshommesseretirentloindesdamespourboire

desboissonsfortes.—Sansdouteavez-vousremarquéquenousnesommespasenAngleterre,répondit-il,narquois.Elleacquiesçaensoupirantavantderépondreàsaquestioninitiale.—Lechâteauest impressionnant,biensûr…Onm’afaitcomprendreque lesseuls livresquis’y

trouventsontenfermésdansvotresolariumprivé.—Jeveillerai àcequevousyayezaccès,bienentendu.Mais j’ignore simonpèrepossédait le

genredelivressusceptiblesdevousintéresser.—Commentpourriez-voussavoircequim’intéresse?demanda-t-elled’unevoixdoucereuse.Vous

nemeconnaissezpas.—C’estvrai,dit-ilavecunsourireforcé.Maisnouspouvonsyremédier.Ellepréféra ignorer sa remarque, sedemandantpourquoi il retenait autant sonattention. Iln’était

mêmepasvraimentbeau.Pourtant,elleavaitdécouvertqu’unhommen’avaitpasbesoind’avoirunprofilclassiquepourêtreviriletattirant.

Ellenevoulaitpasluidonnerleplaisird’uneconversationconviviale,maiselleavaitaussibesoind’informationssurlui.

—Leshommesaveclesquelsvousvousêtesentraînéaujourd’hui…celanesemblepasleurposerdeproblèmequevousvoussoyezabsentépendanttoutcetemps.

Ilhaussalesépaules.—Sicelaleurenposeun,celanem’intéressepas.Jen’aipasbesoind’êtreaimémaisrespecté.—J’ail’impressionquevousvousmentez.Ilcoupaitunmorceaudemoutonetsuspenditsongeste.—Surlefaitquejesoisrespecté?—Non,quevousnevoussouciezpasd’êtreaimé.Vousavezramenéunefiancéechezvous—etje

vousrappelleencoreunefoisquevousvousêtestrompédepersonne.Vousêtescenséhonorercecontratélaborépouraidervotreclan.Vousattendezd’euxqu’ilsvousaimentpourcela.

Ils’adossaàsonsiègeets’essuyalaboucheavecuneserviette.—Ilestdemaresponsabilitéetdemondevoirdefaireceschoses-là,Riona.Nousavonstousdes

obligationsdansnosvies.N’enaviez-vouspaschezvous?—Vousparlezdesobligationsauxquellesvousm’avezsoustraite?rétorqua-t-elle.—Desobligationsquetouteslesjeunesfemmeslaissentderrièreelleslorsqu’ellessemarient.Ellesoupira,sachantqu’ildisaitvrai.—Cesdixdernièresannées,jemesuisoccupéedemajeunesœurmalade.Ilhaussalessourcils.—Dixannées?Vousn’étiezqu’uneenfant,àl’époque.—Aumêmeâge,vousvoliezdesfusilsauxAnglais,mesemble-t-il.

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Unsourireétiralecoindeseslèvres.—C’estvrai.Dequoisouffredoncvotresœur?—Detuberculose.—Jesuisnavré,dit-il,l’airsincère.RionasentitsoncœurseserrerensongeantqueBronwynallaitmourir.—Elleestplusjeunequemoiet,lorsqu’elleétaitenfant,j’étaislaseulecapabledel’aideràrester

couchéeenluiracontantdeshistoires.—Ah, vous devez avoir une bonne partie de sang écossais, alors !Vous savez à quel point nos

histoiressontimportantespournous.Lebardeleschanteassezsouventpournousrappeler—àmoi,toutparticulièrement—quenousdevonsnousmontrerdignesdelabravouredenosancêtres.

— La performance du barde d’hier n’était donc pas juste un divertissement ? demanda-t-elle,surprise.

— Non, en effet. Elle m’était particulièrement destinée, pour que je l’entende et que je mesouvienne.

—Ilsattendentbeaucoupdevous.—Toutcommevosparentsavaientdesattentesàvotreégard,alorsquevousauriezdûavoirunevie

d’enfant.Aumoins,j’aipuenbénéficier.—Qu’avez-vous fait, après avoir récupéré de vos blessures suite à la bataille de Sheriffmuir ?

N’attendaient-ilspasbeaucoupdevousàcemoment-là?Oùavez-vousvécu?Sonvisage,ouvertetagréable,sefermabrusquementpourrevêtirunmasqued’impassibilité.—J’aijouémonrôleendéfendantlesintérêtsduclanetjelesaibienservisdepuisEdimbourg.C’étaitcequ’elleavaitentendudanslabouchedeDermot.—EtàLondres?Vousenavezparlé.Commentyavez-vousservilesintérêtsdevotreclan?—J’aiétéélumembreduParlementpournotrecomté.—VousavezsiégéàlaChambredescommunes?—Oùdoncaurais-jepusiéger,alorsquelaCouronneestrevenuesursapromessedepermettreàla

noblesseécossaisedesiégerdirectementàlaChambredeslords?Maisilestvraiquejenesuispasunnoble,contrairementàvotrepère.

Rionaclignaplusieursfoislesyeux.—Ilm’afalluuneminutepourcomprendrequevousneparliezpasdemonpère.Illaregardad’unœilvide,etelleesquivalesujetd’ungeste.—J’essaiedevousimaginerenmembreduParlement,dit-elle.—Cen’estpasuneplacefacilepourunEcossais.Vousavezvuàquoiressemblelevoyage…La

plupartdesmembresduParlementn’ontpasdevoiture.NousdevonsnousrendreenGrande-Bretagneàcheval,cequireprésenteunvoyagedeplusieurssemainespourêtretraitésaufinalcommedespaysansidiotsquinecomprennentrienàlagestiondeleursterres.

—C’estdonccequevousavezfaitdepuisdixans,dejanvieràaoût…Soudain,ellelevoyaitsousunjournouveau.Iln’étaitpluslebanditsanséducationqu’elles’était

imaginé.—Septans,rectifia-t-il.Ilrestaitencoretroisannéespendantlesquelleselle ignoraitcequ’ilavaitfait,maiselleaurait le

tempsd’yréfléchirplustard.—Commentsefait-ilquejenevousaiejamaisrencontré?—Avez-vousrencontrébeaucoupd’Ecossaissanstitrependantvosbellessoiréesetvosconcertsà

Londres?ironisa-t-il.—Non,certainementpas.Saufsivousyincluezdeshommescommemonpère,quisontdesfilsde

nobles.

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—Nous,lesfilsdechefs,n’étionspassouventinvités.Certainsd’entrenousn’auraientmêmepaspusepermettrelagarde-robenécessairepourcesévénements.VivreàLondresreprésentaitunedépensequebeaucoupd’entrenousn’avaientpasanticipée,etraresétaientceuxquipouvaients’ysoumettrebienlongtemps.

—Contrairementàvous.Ilhochalentementlatête,pritunebouchéed’oieetlamâchaavantdepoursuivre:—Oui, jenevoulaispas tourner les talonset rentrerdans lesHighlandsà lapremièredifficulté.

J’aimêmesiégédansunecommissionparlementaireassezlongtempspourêtrenomméprésident.—Quellecommission?demanda-t-elle,curieuse.—Cellerelativeauxquestionscarcérales.Peudemembresavaientenviedetraiteroudemettreen

œuvredesréformesdanscedomaine.Lefaitd’avoirenfreintlaloivis-à-visdessoldatsanglaisauraitpum’envoyerenprison.Inconsciemment,celam’aguidé.

Ellen’arrivaittoujourspasàcroirequ’ilaitvécuàLondrespendanttoutescesannées,etqueleurscheminsnesesoientjamaiscroisés.

—Portiez-vousvotreplaid?—Non,celanousauraitdéfinitivementexclus.LesLondonienspouvaientpresquecroirequenous

étions originaires du nord de l’Angleterre en parlant avec nous. Mais de là à porter nos tartans decouleur?Non,jepréféraismefondredansledécoravecmesculottesetmonmanteau.

Commelorsqu’ellel’avaitvupourlapremièrefois.—Vousn’avezpasessayéderencontrerCat?Sonvisagesedurcit.—J’ai rencontrévotrepèreune fois, et ilm’adonné l’ordre formelde rester loindevous, sous

prétextequevousaviezdumalàacceptervotredevoiràl’égarddevotrefamille.Jel’aicrualorsque,pendantcetemps,vousignoriezsimplementtoutdelasituation.

Elleseraiditlorsqu’iltenditlamainetluieffleuralesdoigts.—Sijevousavaiscroiséedanslarue,dit-ild’unevoixrauque,jevousauraissuivien’importeoù.Sesyeuxgrisnebrillaientplusd’unéclataussidur lorsqu’il les levaverselle.Etrangement,elle

éprouvaunsentimentdeproximitéqu’ellen’avaitpasl’habitudederessentiravecleshommes.Troublée,elledégageasamain.

Il ne protesta pas et continua à manger. Elle l’imita et, pendant de longues minutes, le silences’installa, amenant avec lui une tension qu’elle n’avait ressentie qu’avec cet homme. Il l’observaitbeaucoup trop attentivement, voyait tropde choses en elle, des choses intimesqu’elle n’imaginait paspouvoiréprouver.Saufqu’ellenevoulaitpasdecessentiments.Ellepréférait ledétesterpour l’avoiréloignéedeforcedesafamille.

Pourtant…soncorpsnetenaitpascomptedecesarguments.ElleentenditlesouffledeMcCallums’accéléreret,àsontour,elleeutdumalàrespirer.Lepoidsdesonregardétaitcommeunecaresse,etunlongfrissondescenditlelongdesondos.Ellefrémit.

—Vousavezfroid?demanda-t-ild’unevoixdouce.Elle secoua la tête, incapable de croiser son regard. Elle avait l’impression que ses lèvres se

souvenaientdecellesdeMcCallumetelleneparvenaitpasàsedébarrasserdel’imagedesontorsenu.Elles’efforçadeserappelerlasituationdésespéréedanslaquelleellesetrouvait.—J’aipenséàunmoyendevousprouvermonidentité,dit-elle.Ilgrognaetbutunerasadedewhisky.—Ilvoussuffitd’envoyerunhommeauchâteaudemononcle.VousdécouvrirezainsiqueCatse

trouveenAngleterreetqu’elleestmacousine.—Qu’est-cequecelaprouvera?JesavaisdéjàquevousétiezenAngleterre.Jenevaispasrisquer

lavied’undemeshommesenl’envoyantenquêtersurlesterresdesDuff.

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— Mais vous avez dit que ce mariage était un pont entre nos clans. Il sera certainement ensécurité…

—Non,jen’enferairien,Riona.Cessezdevouloirchangerl’inéluctable.Elleselevad’unbond.—Je…jesouhaiteraismeretirer,lâcha-t-elle,furieuse.—Jevaismelaverpendantquevousvouspréparezàvouscoucher.Avantqu’ellepuisseluirépondre,ils’inclinaetpartitdanssachambre.«Pendantquevousvouspréparezàvouscoucher.»Qu’avait-ilvouludire?L’espaced’uninstant,elleenvisageadelesurprendredanssonbainpourluirendrelapareille,mais

iln’attendaitsansdoutequecela.Mieuxvalaitqu’ellesetienneloindesachambre.A l’instantoùelle s’apprêtait à semettreconfortablementdans son lit,MmeWallace frappa à la

porteetentra,l’air…malàl’aise.Rionafronçalessourcils.—MadameWallace?Quelquechosenevapas?—Non,madame,dumoins…jenepensepas.Monsieurm’ademandédel’attendreici.Voyantqu’ellegardaitlesyeuxbaissés,Rionasentit l’inquiétudelagagner.Ellesn’attendirentpas

longtemps.McCallumpénétradanslesalon,vêtud’unechemiseetd’uneculotte,unboutdecordeàlamain.

LamâchoiredeRionaentomba.—Qu’est-cequevousallezfaireavecça?demanda-t-elle.— Puisque vous avez entendu parler du « mariage d’essai », je vais vous présenter une autre

coutumeécossaise.—Mais…mais…—Peut-êtreenavez-vousdéjàentenduparler?Elleestégalementenvigueurdanscertainesparties

de l’Angleterre. Pendant que les fiancés se font la cour, on permet aux deux amoureux de partager lemêmelit,saufquel’onattachelesjambesdeladame.

—J’aientenduparlerdecettepratique!Maisjamaisjen’auraiscruqu’elles’appliqueraitàmoi.Elleestsi…rustique.

—Toutcommemoi,vousavezenviedemieuxmeconnaître.Jemesuisditquevousvoussentiriezplusàl’aiseainsi.

Savoixdevintplusgravelorsqu’ils’approchad’elle.—Montezdanscelit,jeunefille,quejepuissevousattacher.Rionaétaitsurlepointdes’enfuirencriantdanslecouloir,maisquepouvait-ellefaire?Follede

rage,elles’assitauborddulitetleregardas’agenouillerdevantellepourluiôtersesmules.MmeWallaceprituneprofondeinspirationetluidit,commepourladistraire:—C’est une façon très convenable de vous courtiser,ma dame.Monsieur n’a pas pu vous faire

correctementlacouràcausedececontratstupide,maissesintentionssonttrèshonorables.Rionaserralesdentsetneréponditrien.Ellen’étaitpastoutàfaitcertainequelesmotivationsde

McCallumsoientaussipuresquelagouvernantel’affirmait,encoremoinscesoir.Aprèscequ’ilvenaitde faire,MmeWallace ne pouvait plus le voir comme son petit garçon sagement rentré chez lui pourremplirsondevoir.

CespenséesneparvinrentcependantpasàdistrairesonespritdesmainsdeMcCallumposéessurseschevillesnues.Sapaumeétaitrugueuseetcalleuse,chosequ’ellesavaitdéjàet…quinesemblaitpasladéranger.Ilavaitdesmainsd’homme,écorchéesetcoupéessuiteàsonentraînementdelajournée.Iln’avaitaucunproblèmepourlatoucher,carilcroyaitêtredanssonbondroit.

Ilfinitparsereleveretsetournaverslagouvernante.

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—Jevousremercied’avoirétémontémoin,madameWallace.Onnesaitjamais.Unjour,quelqu’unpourraitm’interpellersurlesujet.

—Biensûr,lairdMcCallum.Jevoussouhaiteunebonnenuit.EllequittalapiècesanscroiserleregarddeRionaetfermalaportederrièreelle.McCallum fit le tour de la chambre et souffla une à une les bougies, jusqu’à ce que les faibles

rougeoiementsdelatourbeplongentlescoinsdelachambredansl’ombre.Ils’approchaalorsdulitetsepenchapourtirerlescouvertures.

Ilsétaientseulspourlanuit.Rionarestaassise,laminerenfrognée,lesbrascroiséssurlapoitrine,manifestantdélibérémentsafureur.

Pourtant, elle se sentait fondrede l’intérieur. Ils avaient été seulsunnombre incalculablede foispendantleurvoyage.Pourquoileschosesluiparaissaient-ellessidifférentesmaintenant?Pourquoisesmembrestremblaient-ils,pourquoisaboucheétait-ellesècheetpourquoisoncœurtambourinait-ildanssapoitrine?

Soudain,McCallumsepenchaau-dessusd’elle,etelletombasurlescoudesenétouffantuncri.Ilposalamainsurlecadredulit,lessourcilsfroncés.—Vousaveztoujourspeurdemoi?Commentpouvait-elleluiexpliquerquecen’étaitpasdelui,maisd’elle,qu’elleavaitpeur?Peur

desuccomberàcedésirétrangequ’elleéprouvaitpour lui, l’hommequi l’avaitenlevée. Iln’étaitpasnormalqu’elleaitdetelssentiments,maisellenepouvaitpasleluidire.

—Oui,j’aipeur,murmura-t-elle.Jesaisquevousavezpromisde…nepasmeprendresansmonconsentement,maisj’aientendudirequeparfoisunhommen’avaitpastoujourstoutesatêtelorsqu’ilselaissaitemporterparlapassion.

—Est-cedonccequedisentlesjeunesviergeslorsquenousnesommespaslà?Elleneréponditrienetlâchaunnouveaucrilorsqu’illaserracontresontorsepourlapousserplus

prèsdumur.Ils’allongeaàcôtéd’elle,latêteposéesurunemain.Ellesesentaitpiégéeentresoncorpsimposant et le mur. Son ample torse était tout ce qu’elle pouvait voir. Sa chemise était un peudéboutonnée, et elle aperçut un duvet sombre dépasser de l’encolure. L’odeur fraîche du savon luichatouillalesnarines.

Ellefermalesyeuxets’efforçadesecalmer.— Vous croyez qu’il va être aussi simple d’oublier ma présence ? dit-il d’une voix rauque et

amusée.— C’est ce que j’ai fait à l’auberge, jusqu’à ce que vous m’attiriez brutalement contre vous,

répondit-elleenmaintenantlespaupièresfermées.Ellesentitsonsouffleluicaresserdoucementlevisagelorsqu’ils’exprima.—Jemesouviensplutôtquenousavonsdormidanslesbrasl’undel’autre.—Vousavezl’habitudedecroirecequevousvoulez.J’essaiedem’imaginerCat,votrevéritable

fiancée,tolérantvosétrangesavances.Ellenel’auraitjamaissupporté.Elletentaderemuerlesjambes,maisillesluiavaitattachéesd’unemainexperteetdefaçonàne

paslablesser.Ilposalamainsursongenou.—Chut,inutiledenousdisputer.Mêmesousletissudesachemisedenuitetdesonpeignoir,ellesentaitsachaleur.Elletournala

têteverslemurengrognant.—Ilsembleraitquenousayonstouslesdeuxunesœur…Pendantunelongueminute,elleneréponditrien,puisfinitpardireentresesdentsserrées:—Otezvotremain,etnousparlerons.Ils’exécuta.

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—Voilàquiestmieux.—Nevoulez-vouspassavoirquiestmasœur?demanda-t-il.—Trèsbien,allez-y,parlez-moid’elle.—Maggieestplusjeunequemoidequatreans.Elleattirebeaucoupl’attention,etpasseulement

poursabeauté.Sesyeuxsontdecouleursdifférentes.L’unestbleuetl’autreestvert.Cetteréponseluifittournerlatête.Elleleregardad’unairsceptique.—Jelejure,dit-ilenlevantlamain.D’autreschoseslacaractérisentmais,commevousallezfinir

parlarencontrer,jeluilaisserailesoindevousenparler.—JesaisquelesEcossaissontdesgenssuperstitieux…—Ondiraitquevousn’appartenezpasànotrepeuple,lataquina-t-il.Ellepréféral’ignorer.—Leclanlatraite-t-ildifféremment?Sonsourires’évanouit.—Certains,oui,admit-il.Ellen’estpasencoremariée,etjepensequ’ellecraintqu’unhommene

puissepas…comprendresesdifférences.—Vousnelaforcezpasàsemarier,sijecomprendsbien?demanda-t-ellesèchement.—Pour lui faireceque l’onnousa fait? répondit-ild’unevoixsolennelle.J’aurais trèsbienpu

avoirenvied’épouseruneautrepersonne,nel’oubliezpas,jeunefille.Elleleregardaavecsurprise,puisavançaprudemment:—Agnès?Ill’étudiaunlongmomentavantdedétournerlesyeux.—Celan’apasd’importance.Etvous,aviez-vousdesvuessuruneautrepersonne?Elleauraitaimé luimentirdans lebutde leblessercomme il l’avait faitavecelle.Maiselle se

sentaittropvulnérable,tropfaiblepourêtreconvaincante.—Non.—Peut-êtrequevotrefamillevousatenueéloignéedeshommesconvenablesàcauseducontrat.— Sans m’en parler ? Je veux dire, sans en parler à Cat ? C’est insensé ! Non, j’étais plus

importantepoureuxàcausedemasœur.Ileffleuralatressequiétaittombéesursonépauleetl’enroulaautourdesondoigt.—Quelâgea-t-elle?—Vingtans.Elleesttrèsinnocente,complètementignorantedesécueilsdelavie.—Alorsquevous,vousêtesbeaucoupplusmûre?Soussonapparencecalme,ellesentitqu’ilsemoquaitd’elle,maisilneriaitpasetelleapprécia

sonattitudemalgréelle.— Je n’ai pas dit cela.Mais, si vous lui aviez fait ce que vousm’avez fait subir, elle se serait

évanouieenpermanence.—Aulieudesedébattreetd’essayerdes’enfuir?J’auraispeut-êtrepréférécetteoption.Maisilyavaitdel’admirationdanssavoix,etRionasesentitmalàl’aise.Ellel’étaitconstamment,

cequil’obligeaitàrestersursesgardesetàseméfier.Elleavaitmêmeoubliécequec’étaitquedesesentirheureuseetsatisfaite.

Peut-êtremêmen’avait-ellejamaisconnuvéritablementcetétat.—Vousparaisseztriste,murmura-t-il.Ilpenchalatêteetdéposauntendrebaisersursatempe.Cesimplegestesuffitàlaplongerdansun

océandepassion,dedésiretdedésespoir.Sonvisageétaitjusteau-dessusdusien,etilmurmuradansunsouffle:—Jeveuxquevoussoyezheureuse.

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Ildéposad’autresbaisers,sursonfront,sajoue,sonmenton.Sesmainsauraienttoutaussibienpuêtreattachées,carellenepouvaitpluslesbouger.Et,siellelefaisait,ceneseraitquepourplongerlesdoigts dans ses cheveux noirs, défaire le lien en cuir qui les retenait et laisser ses boucles encadrerlibrementsonvisage.

Ils’arrêtalorsqueseslèvressetrouvèrentjusteau-dessusdessiennesetqueleurssoufflescourtssemêlèrent.Lessecondess’allongèrent,etelleaccentuaplusencorecetteexquise tortureensoulevant latête et en l’embrassant.Avecungrognement, il inclina sabouche sur la sienne, la forçant àouvrir leslèvres,etsa languese lançadansuneexplorationsidélicieuseque leplaisirdépassason imagination.Unepartiedesongrandcorpslapressaitcontrelesoreillers.Ilpritsonvisageencoupeetl’embrassaplusprofondément,avecplusdefougue,luiarrachantungémissementdeplaisirquifitéchoausien.Sonhaleine sentait légèrement lewhisky, comme s’il avait dû se donner du courage avant de la rejoindre.Sansdouten’était-cepasvrai,maiscetteidéeprovoquaenelleunfrémissementdeplaisir,toutcommelafermepressionqu’ellesentaitàprésentcontresahanche.Elleétaitpeut-êtreinnocente,maisCatluiavaitconfiéàvoixbassecommentlespersonnesfaisaientl’amour,informationsglanéesauprèsdesesamies.

Elleposa lesmainssursesépaulespuissantes,puis lesglissadanssescheveux.Elles’arc-boutacontresontorse,savourantleplaisirdelesentirsefrottercontresesseinstendus.Elleéprouvabientôtledésirqu’illestouche…

Soudain,elleserappelaquecegestepouvaitluifaireperdretouteretenue.Certes,illuiavaitnouélesjambes,maisilétaitégalementcapabledeluiôtersesliens.Quilesaurait?

Elletournalatêtesurlecôtéetditd’unevoixrauque:—Nousdevonsnousarrêter.Il ne répondit pas et se contenta d’enfouir son visage dans le creux de son cou sans cesser d’y

déposer des baisers humides, tandis qu’il se frayait un chemin vers le bord de sa chemise de nuit.Lorsquesamainremontalelongdesonbuste,elleluisaisitfermementlepoignet.

—S’ilvousplaît,Hugh,arrêtez.Lefaitd’entendresonprénomsemblaluifaireretrouverlesensdesréalités.Illevalentementlatête

etbraquasurelleunregardalangui.Saboucheétaitencorehumidedeleursbaisers,etelleéprouvaledésirirrationneldeluilécherleslèvres.Soneffortpoursecontenirlafittrembler,maisellecontinuadeserrersamainjusqu’àcequ’illaretire.

Il roula sur le dos à côté d’elle, puis posa son avant-bras sur ses yeux. Sa poitrine montait etdescendaitcomme lesouffletd’unforgeron.Pendantde longuesminutes, ils restèrentsilencieux.Le litn’étaitpasassezgrandpourqu’ilss’écartentl’undel’autre,etsonbrasreposaitencorecontreelle.Pours’éloigner,ilfallaitqu’elleserecroquevillecontrelemur.Maisellesavaitqu’elleneleferaitpas.

Elle réfléchit à cequ’elleallait luidire. Il fallaitqu’elle lui expliquequecelanedevaitplus sereproduire,luifassecomprendrequ’iln’avaitpastoujoursraison.

Soudain,ellel’entenditronfler.Elleposaàsontourunbrassursesyeuxengrognant,maislesommeilnevintpas.Sespenséeslui

torturaient tropl’esprit. Il fallaitqu’ellesortedecettesituationavantqueleschosesaillentplus loin!Sononcles’était-ilseulementdonnélapeined’informersesparentsqu’ellen’étaitpluslà?Qu’avait-ilditàCatpourluiexpliquersonabsence?Hormissasœur,sacousineétaitlaseulepersonneàl’aimervraiment, laseulequin’attendait riend’elle.Elledevaitêtrepaniquée, terrifiée…Lecomteavaitsansdouteinventéunmensongeélaborépourluidirequ’elleétaitpartiedesonpleingré…

Ilfallaitqu’ellemetteàtoutprixuntermeàsesruminations.ElleavaitunplanetmaintenantellesavaitqueDermotétaitlapersonneàapprocherpourluiconfiersessecrets.Maiscomment?Ilnefaisaitpas confiance à Hugh, il serait encore plus méfiant vis-à-vis d’une Duff. Si elle allait le trouverd’emblée, il ne se sentirait pas obligéde l’aider.Elle commencerait doncpar essayer dedevenir sonamie, afinqu’il sedétendeen saprésence.Ainsi, lorsqu’elle luiparlerait enfind’elle,de lanécessité

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pour elle de s’enfuir, il la croirait. Et s’ils allaient trouver Hugh ensemble, peut-être se laisserait-ilconvaincrequ’elledisaitlavérité.

Hughroulasurlecôtéetpassaunbrasautourdesataille,levisageenfouidanssescheveux.Ellenepouvaitpasbouger,encoremoinsaveclesjambesattachées.Etellenevoulaitpasprendrelerisquedeleréveilleretd’endurerunenouvelletentativedeséduction…

Séductionàlaquelleelledevenaitdeplusenplussensible.

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Chapitre10

Rionas’étaitblottiecontrelui,unemainenrouléesoussanuque,etHughauraitpuresterainsidanssesbras toute savie.L’aubene s’étaitpasencore levée,mais soncorps, lui, étaitbien réveillé, etdediversesmanières.

Il se sentaitheureuxetconfianten l’avenir.Rionan’étaitpas insensibleà sonégard. Il lui fallaitjusteunpeudetempspourcomprendrequeleurmariagepouvaitêtreheureux.Ilsnesefaisaientpeut-êtrepasconfiance,maiscelan’avaitpasd’importance.Laconfiancepouvait tuer.Pour lui, l’attiranceétaitplusimportantequel’amour,cesentimentmystiquequipouvaitlablesser.

Ellepoussaunpetit soupir, et il sentit sous sonbras sapoitrinemonteretdescendre.C’étaitunebonnefaçondelaréveiller.

Elleseraiditsoudainetpritunairoffensé.Puiselleouvritsesgrandsyeuxvertsqu’elleplongeadanslessiens.

—Jenepeuxpasmelever,s’excusa-t-ild’unevoixamusée.Quelqu’unmeretient.Elleroulasurledosensoupirant.—Jenepeuxpasmecontrôlerquandjedors.S’ilvousplaît,levez-vousetlibérezmonbrastoutde

suite.—Vousêtesentraindemedirequevousnemaîtrisezplusvosdésirsquandvousdormez?—Détachez-moi,s’ilvousplaît.Il se redressa en pouffant, puis s’agenouilla pour lui ôter ses liens. Il la détacha un peu plus

lentementquenécessaire,effleurantsapeaudouceàplusieursreprises.Ellepoussaquelquessoupirsexagérés.—Vousaimezm’avoiràvospieds,pasvrai?—Seulementsijepeuxvousfrapper,grommela-t-elle.Ildéfitcomplètementlacorde.—Vousvoyez,vousn’avezaucunemarque.Elleremontasesjambessurlelitpourmieuxexaminersapeau.Iln’yavaitquequelquesmarques

légères.—Puis-jelesembrasserpourqu’ellesdisparaissentplusvite?demanda-t-ild’unevoixdouceense

penchantverselle.Rapidecommel’éclair,elleramenalesjambessouselle.—Non,merci.Vouspouvezpartir,àprésent,etvaqueràvosoccupations.Ilseleva.—J’espèrequecettejournéepasseratrèsvite,afinquenoussoyonsdenouveauréunis.Elleparuthorrifiéeàcetteidéeetluidésignalaported’undoigttremblant.

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—S’ilvousplaît,partez!Sivouscroyezquem’attacherserviravotrecause,vousvoustrompez.Jemesensplusoffenséequejamaisparlagrossièretédevosmanières.

Enappuicontrel’encadrementdulit,ilcontemplasesvêtementsdenuitfroissésavecintérêt.—Jepensequevousvousmentez,Riona.Vousavezaiméautantquemoique jevous embrasse.

Vousaimerezaussicequisuivra.Bienplusencore…Elleseredressasurlesgenouxetcria:—Sortez!Iléclataderireets’enalla,unsouriretriomphantauxlèvres.

***

Rionaprit sonpetit déjeunerdans lagrande salle.Elle avait songéque ce serait préférable àunrepasentêteàtêteavecHughdanssesappartements.Elles’étaittrompée…Elleétaitattabléeaveclesgensduchâteau,pourl’essentieldeshommesquis’efforçaientdenepaslaregarder,toutenl’observantàla dérobée. Jamais elle ne s’était sentie aussi exposée et détaillée avec autant de curiosité etd’interrogations. Beaucoup devaient voir en elle une ennemie. Mais certains la percevaient commel’élémentsalvateurpourleurclan.Cettesituationétaitaussiétrangequeterrifiante.Elleavaitpasséunegrandepartiedesonenfanceetdesonadolescenceàprierpourquequelqu’unlaremarque…Ehbien,elleavaitobtenucequ’ellevoulait.Quelleironie!

Samuelpritletempsdeluidemanderdesesnouvelles,etelleluienfutreconnaissante,maiscefutl’exception. Les conversations se poursuivirent autour d’elle en gaélique, et elle se sentit très seule,étrangère etmal à l’aise. Pour se redonner de l’entrain, elle se rappela qu’un jour elle partirait. Il lefallait,songea-t-elleavecfermeté,seremémoranttoutcequis’étaitpasséentreHughetellelaveille.

Ellepassaunegrandepartiedelamatinéeàexplorer lechâteau,àouvrirdesportesauhasard,àparlerauxdomestiques.ElleseprésentaàcontrecœurauxgentilshommesquiaidaientHughàgérerlesaffairesduclan.MaisellenecroisapasDermot.Toutlemondesemontraitpolimaisdistantavecelle,parfoismêmeméfiant.Elleavaitvraimentl’impressiond’êtreuneennemie,uneDuffperdueaumilieudesMcCallum.Enrevanche,sil’occasiondes’enfuirseprésentait,elledeviendraituneDuffquiconnaissaitlaconfigurationdeLarigCastle,mêmesisesespoirsétaientminces.

Amesure que la journée avançait, les souvenirs de sa nuit attachée au lit avecHugh affluèrent.L’excitationdevintdeplusenplusforte.Elleavaitbeauserépéterqu’ils’agissaitd’uneoccasionrêvéed’ensavoirplussurlui,sursesfaiblesses,aufondd’elle,elleseplaisaitàimaginercommentilpouvaitlatoucher,queleffetcelaluiprocureraitetcequipourraitsepasserensuite.

Pourquoi nourrissait-elle ce genredepensées à proposdu fiancéde sa cousine ?Cat avait beaul’ignorer,leursfamillesavaientarrangécemariagedepuislongtemps.Elle-mêmedevaitlerespecter.Or,elledécouvraitenelledesélanshonteuxdontellen’avaitjamaissoupçonnél’existence.

Poursechangerlesidées,ellepartitendirectiondescuisinesetregardacuisiniersetdomestiquespréparerlestartesqu’ilsserviraientavecleplatprincipalaudîner.MmeWallaceétaitlà,elleaussi.Ellevint bavarder gaiement, comme si elle n’avait pasvuMcCallum l’attacher.Elle neput s’empêcherderougiràcetteévocationmais,pourceuxquil’entouraient,sesjouesrougesétaientcertainementduesàlachaleurquirégnaitdanslacuisine.

Un homme vêtu de haillons entra dans la pièce, et MmeWallace expliqua qu’il s’agissait d’unnécessiteuxquiavaitl’autorisationdevenirmendier.Apparemment,l’hommes’entretenaitrégulièrementaveclesdomestiques,auxquelsilfournissaitdesinformationsenéchanged’unrepas.MmeWallaceluidemandaalorsd’unairhésitantsi laprésencedecethommeétait toujours labienvenue.Rionafut trèsembarrasséepourrépondre,carellenevoulaitpasseplacerenfuturemaîtresseduchâteaudevanttouscesgens.

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Pourtant…ilétaitrarequ’onluidemandesonavis,etellefutreconnaissanteàMmeWallacedeluiavoirdonnécetteoccasion.Etrefuserd’avoirpourunefoissonmotàdireluilaissaungoûtamer.

Après le déjeuner, elle enfila un manteau avec un capuchon et des bottes pour sortir par cettejournéenuageuse,humideetboueuse.Elleavaitl’habitudedesepromenerseuledetempsentempsdanslesparcspublicsdeLondresoud’allerfairedesachatsdansRegentStreet.Elletrouvadoncétrangedene voir personne la suivre. Elle ignorait qui était son mystérieux garde, mais la cour était tellementenvahiedemondequ’illuiétaitfacilederestercachée.Elledeviendraitfollesiellen’avaitrienàfaire!L’espaced’uninstant,elleenvisageademarcherverslaguéritepourpasserdanslemondequiluiétaitinterdit,maisdansquelbut?Seule,ellenepouvaitallernullepartetnesavaitmêmepasoùsetrouvaitlevillageleplusproche.Cen’étaitpascommesilescheminsétaientéquipésdepanneauxdesignalisation.Les pistes qui s’entrecroisaient sur lesmontagnes avaient certainement été tracées par le bétail et nemenaientsansdoutenullepart.Ellenevoulaitpasmettrebêtementsavieenpéril.Ellepassaquelquetempsàobserverlesgardesquisurveillaientlesgensentrantdansl’enceinteetremarquaqu’ilsétaientbeaucoupmoinsvigilantsavecceuxquisortaient.

Elledéambuladanslesdiversbâtimentsduchâteauetrenditcertainementlesdomestiquesnerveuxàforcede lesregarderbrasser labièreet faire tremper le linge.Dans lacour inférieure,ellecontemplaavecfascinationleforgeronfrapperlemétalincandescentpourenfaireunferàcheval.

Mais tout cela n’était au fond qu’une excuse pour observer Hugh avec ses hommes. Elle avaitl’impressiond’avoiraffaireàdespersonnesdifférentes:leravisseurimpitoyable,lechefdeclanavided’autoritéetderespect,lefiancéquil’embrassaitavecunefougueàpeinecontenue.Saufqu’iln’étaitpassonfiancéetnedeviendraitjamaissonmari.

Elle n’aurait jamais imaginé qu’un tel homme puisse s’enticher d’un petit terrier poilu qui erraitdanslacour.Sonpelagefauveétaitsouillédebouecommes’ilvenaitdecouriràtraversunetourbière.Ausommetdesatête,unetouffedepoilsluidonnaitl’airdeporterunchapeau.Salanguependaitavecjoiecommes’ilvenaitdetrouverlemaîtreparfait,etilnequittaitpasHughdesyeux.Rionas’adossaàunmuretleregardajoueravecl’animaljusqu’àcequelaséanced’entraînementprennefin.QuandHughrevintdanslacourprincipale,lechienlesuivit.Ils’arrêtachezleforgeron,désignaleterrier,maisnereçutenretourqu’unhaussementd’épauleindifférent.

Il revintalorssursespas,et lechien lesuivitdocilement, trottinantàcôtéde lui sur sescourtespattes.Rionarestadissimuléedansl’ombredumurprèsdelaforge,heureusedepouvoirsecachersousson capuchon. Elle n’était pas encore prête à sentir les prunelles grises de Hugh se poser sur elle,parcourirsoncorpsetluirévélersesenvieslesplus…inavouables.

Unjeunepalefrenier,quinedevaitpasavoirplusdedixans,reconduisaitunchevalauxécuries.Ils’arrêtabrusquementenapercevantHugh,commeimpressionnéparsaprésence.

Hughdésigna le chien et s’adressa à lui engaélique.Legarçondisparut avec le cheval et revintaussitôtavecunboutdecordequ’ilpassaautourducoudel’animal.TousdeuxregardèrentalorsHughs’éloignerensilence.Si lesyeuxdu terrierétaient remplisd’amour,ceuxdu jeunegarçonparaissaientbeaucouppluscirconspects.

Rional’observaalorsdeplusprèsetenressentitunsentimentétrange.Ilavaitdescheveuxnoirsetunfrontproéminent.Ilparaissaitavoiruncorpsvigoureux,particulièrementgrandparrapportauxautresenfants de son âge, comme s’il allait devenir un jour un grand gaillard.De quelle couleur étaient sesyeux?songea-t-elleenfrémissant.

Elles’assurad’uncoupd’œilqueHughavaitatteintlacourprincipaleavantdesedirigerverslesécuries.Elledécouvritlegarçonoccupéàparlerauchienengaélique.Leterrierlevaittoujoursversluiunregardpleind’espoir.

—Bonjour,dit-elle.

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Il levavers elle l’éclat de ses prunelles grises, et elle en eut un choc. Il ressemblait tellement àHugh!

Ellerestatoutd’abordsansvoix,comprenantl’implicationdesadécouverte,puiselleseditquelesMcCallumétaienttousplusaumoinsapparentés,riend’étonnantdoncàcequ’ilsseressemblent.Etpuis,Hughn’étaitpasdestinéàdevenirsonmari.Cen’étaitdoncpassonproblème.

Legarçons’inclinadevantelle.—Madame.Asongrandsoulagement,ilparlaitanglais.—Commentvousappelez-vous,jeunehomme?—Brendan.Etvous?demanda-t-ilavecaudace.Elle réprima son envie de sourire en pinçant les lèvres. Dire qu’elle croyait que tout lemonde

savaitquielleétait!—Jem’appelleCatriona.Ilécarquilladesyeuxstupéfaits.—LadyCatriona?LafemmedeMcCallum?—Jenesuispasencoresafemme,corrigea-t-elleensouriant.C’estunjolichien.—Monsieurm’ademandédeprendresoindelui,répondit-ild’unairàlafoisfieretméfiant.Saméfianceétaitdirigéeverselle,c’étaitévident.Elleneputs’empêcherdeseposerdesquestions

surcetenfantetsursafamille.Avaient-ilsremarquésaressemblanceavecleurchef?Elleregardaautourd’elle.—J’aivud’autreschiensalleretvenirdanslacour.Celui-cia-t-ilquelquechosedespécial?Ilhaussasesmaigresépaules.Pourungarçond’écurie,ilparaissaitremarquablementpropre.—McCallumaditquecelui-ciétaitjeuneetqu’ilnevoulaitpasqu’ilresteseul.Iladitqu’ilferait

un bon chien d’écurie. Les terriers chassent les blaireaux, et je pourrais peut-être aussi l’entraîner àchasserlesrats.

—Vousvivezdanslechâteau?Illaregardacommesielleétaitfolle.—Non,jevisauvillagechezmagrand-mère.Mamèreestmorte.Ilneparlapasde sonpère, et elledécidadenepas l’interroger sur le sujet.A laplace, elle se

penchaverslechienetcaressasapetitetêtepoilue.—Vousluiaveztrouvéunnom?—Jevaisyréfléchir.Amoinsquevousnesouhaitiezlefaire,ajouta-t-ilàlahâte.—Non,biensûrquenon.Cechienestàvous.Ilsemblasedétendre.—J’aiencoredutravail,dit-il.Jevouspriedem’excuser,madame.Puisilconduisitlechiendanslesécuries.Rionaleregardapartirenessayantdemodérersacuriosité.

***

Cesoir-là,audîner,Hughsepromenaentrelestables,s’arrêtantpourparleràsesgentilshommesetpourrencontrer leursépouses.Sonentraînementdumatinavaitétéplusrudequeceluide laveille.Lasurprisedesonarrivées’étaitatténuée,etsesdixannéesd’absencesefaisaientsentir.Tousavaientcraintsonpèreetsesaccèsderageexacerbésparl’alcool,maisavecluiilsnesavaientpasàquois’attendre.

Normalement,unchefn’avaitpasbesoind’entraînerseshommes,maisilluifallaitnommerunchefdeguerreet ilnesavaitpass’ilpouvait le faireavant lacérémonie. Ilavaitétésurprisque leclan lechoisissepourchef,étantdonnésonenfancerebelleetlescandaleprovoquéparsonhistoireavecAgnès.

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Mais son travail pour le compte des Ecossais au Parlement avait joué en sa faveur, et il était ledescendantdirectd’unelignéedechefs.Etpuis,ilyavaitaussiladotdeRiona…

IldécouvritBrendanoccupéàmangeràl’arrièredelagrandesalleavecd’autresenfants.Ilavaitinterrogésonrégisseursurlegarçon,aprèsl’avoirvudanslesécuries,etluiavaitdemandépourquoiiln’était pas chez lui à aider sa grand-mère.Mais le régisseur n’avait pas de réponse à lui donner. Legarçonvivaitdansunebellemaisonauvillage,qu’il était allévoir, etdisposaitd’assezd’argentpourvivreconfortablement.

Pourtant,Brendan se trouvait àLarigCastle et travaillait dans les écuries, ce qui n’avait pas desens.Ilfaudraitqu’ilailleparleràlagrand-mère,songea-t-il.

Leterrierconstituaitleprétexteparfaitpourentrerencontactaveclui.Ils’étaitefforcéderendrelaconversationentreunchefetungarçond’écuriemalàl’aiseaussiinformellequepossible.SiBrendanavaittrouvéétrangequ’illuiconfiecechien,iln’enavaitrienmontré.Illuiavaitsuffideluidirequelepetitchiotrisquaitd’êtredominéparlerestedelameutepourqueBrendanrépondeàl’appel.

Celaluiavaitdonnél’occasiondel’observer,etcequ’ilavaitvuluiavaitplu.Maislatristessedesessouvenirsavaitdumalàs’estomper…

***

RionadistinguaitparlafenêtrelelochVoilquibrillaitsouslesoleilcouchant.Aprèscettejournéepluvieuse, le spectacle était magnifique. Pourtant, elle était en proie à une certaine mélancolie. Ellevenaittoutjustedequitterledînerdanslagrandesalle,fermementdéterminéeàresterseuleavecHughaussipeude tempsquepossible.Maiselleavaitsenti lepoidsdesonregardpendant tout le tempsdurepas.Commes’ilavaitcomprispourquoiellerecherchaitlacompagniedesesgentilshommes,ils’étaitcontentédeluisourireetdedemanderauharpistedejouerpourelled’ungeste.

Peuàpeu,lesconvivess’étaientretiréspourlanuit,etellen’avaitpuqueserésoudreàlesimiter.Hugh étaitmontépeude temps après elle,mais cela faisait déjàplus d’uneheure, et il ne l’avait pasencorerejointedanssachambre.

Soudain, il pénétra dans la pièce sans frapper, les cheveux encore mouillés de son bain, vêtusimplementd’unechemiseetd’uneculotte.

Commesielleavaitreçuunsignal,MmeWallacefrappaetentraparlaporteducouloir.—Ehbien,j’espèrequevousavezeuunelongueetbonneconversationensemble,hiersoir,dit-elle

ensouriantàRiona.—Eneffet,réponditHughd’unairinnocent.MmeWallacelacontemplaalors,etRionasecontentadehocherlatête.Hughsefrottalesmains.—Pouvons-nouscommencer?demanda-t-il.Oùestlacorde?Rionafuttentéedeluirépondrequ’ellel’avaitperdue,maisellesavaitqu’ilenprendraituneautre.

Ellesedirigeaverslecoffre.—Jel’aicachéeafinquelabonnenelavoiepasetpouréviterlescommérages,expliqua-t-elle.—Trèsfutédevotrepart.Ilattenditprèsdulit.Rionaavaitl’impressiondejouerunrôledansunepiècedontMmeWallace

était la seulespectatrice.LesprunellesdeMcCallumbrillaientà la lueurdesbougies. Ilpritdanssesgrandesmainslacordequ’elleluitendait,etellesesurpritàfrémir,maispasdepeur.L’idéed’êtreàsamercinelaterrifiaitplus.Lefaitd’êtreattachéeladéchargeaitmêmedetoutefaute.Ellepouvaitainsiacceptercequiallaitsepasser—l’accepter,ets’enréjouirensecret.

Mortifiée par ces pensées, elle détourna le regard, puis ferma les paupières lorsqu’il passadoucementlacordesursajoue.

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Ellerejeta la têteenarrièreet lançaunregardfurtifàMmeWallace,quisedépêchademettre lamainauxcléssuspenduesàsataille.

—Asseyez-vous,ditMcCallumd’unevoixgrave.Riona s’exécuta et s’efforça de détourner la tête au moment où il s’agenouillait devant elle. Le

regarderdroitdanslesyeuxétaitbeaucouptroprévélateur.Elleylisaitdelapassion,dudésir,etl’idéed’êtredésiréeparquelqu’un—surtoutlui—étaitterriblementattrayante.

—Jen’aijamaisattachéunefemmeauparavant,luiconfia-t-ilàl’oreille.Etjetrouvel’expériencetrès…stimulante.

Elleauraitaiméluidécocheruncoupdepied,maislacordeluientravaitdéjàleschevilles.Ellesecontentadepousserun longsoupirquiarrachaàMcCallumunpetit rire.Lorsqu’ileut terminé,elleseservitdesesmainspourseglisseraufonddulitavantqu’ilpuisselatoucher.

— LairdMcCallum, lady Riona, je vous souhaite une bonne nuit, lança alorsMmeWallace enfermantlaportederrièreelle.

«Unebonnenuit»…Rionalevalesyeuxauciel.Etait-cedel’humour?EllecontemplaleplafonddulitàbaldaquintandisqueMcCallumsoufflaitlesbougiespuisvenaitlarejoindre.Ellerestaallongée,le corps raide, bien décidée à ne pas se prêter à cette farce et à décourager toute tentative deconversation.Mais lesilenceseprolongea,vibrantdetension.LegrandcorpsdeMcCallums’enfonçadans lematelas, l’encourageantsubtilementàse rapprocherde lui,etelledut lutterpour resterdesoncôté.Ildégageaituneagréablechaleur,trèsattirantecomparéeauxmursenpierrefroide.Etilsentaitbonle savon… Finalement, elle éprouva le besoin de distraire son attention ou, pour être honnête, de sedistraire,elle.

—Quandallez-vousêtreofficiellementproclaméchef?demanda-t-elleenrisquantunregarddesoncôté.

Lorsqu’ilcroisalesbrassoussanuqueetlevalesyeuxversleplafond,commeelleprécédemment,ellepoussaunpetitsoupirdesoulagement.

—Aucoursd’unecérémoniequiauralieudansunesemaineoudeux.C’estunesimpleformalité,saufsivousvousdemandezencoresivouspouvezépouserunautrechef.Aprèstout,votredotpourraitêtretrèsconvoitée,etleclanpourraitvouloirsel’approprier.

Rionafitlagrimaceensongeantqueleclann’étaitpasprèsdemettrelamainsurladotdeCat.—Non, je ne pensais pas à cela. Jem’interrogeais juste sur les devoirs d’un chef.Commemon

onclenevitpasenEcosse,iln’apasentraînéleshommesduclanDuffcommevousl’avezfaitaveclesvôtres.

— D’habitude, nous désignons un chef de guerre pour cela mais, comme vous avez dû lecomprendre,j’aibesoinquetousmeshommesapprennentàmeconnaîtredenouveau.

—Maisvousavezunchefdeguerre?—Jevaisennommerun,certainementAlasdair.—Cethommequisembleprendretellementdeplaisiràsebattreavecvous?—Lui-même.Ilestunpeujeuneencorepourcetitre,maissonpèreaétéchefdeguerrependantde

nombreusesannées,etAlasdairconnaîtcesmontagnesmieuxquequiconque.—Etaussil’artdelaguerre?—Ils’estbattuàSheriffmuiravecDermotetmoi.Noussavonstouscequ’ilencoûtedefaireles

mauvaischoix.Jen’oublieraijamaisnotreretraitedePerth,lorsquecertainssoldats,souslesordresdecetempotédecomtedeMar,ontincendiétroisdenosvillagespourralentirl’avancéeduducd’Argyll.Touscesfoyers,toutescesmaisonsdétruitesparcequeMarétaitincompétentetmanquaitd’initiative!

Entendantlatristessedanssavoix,elletournalesyeuxverslui.Sessourcilsétaientfroncésetlesmusclesdesamâchoireserrés.

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— Alasdair a sans doute l’ascendance requise, dit-elle d’une voix hésitante, mais a-t-il letempéramentnécessaire?Ilsemblaitprendreplaisiràvousprovoquerdevantvoshommes.

Ilsetournaverselle,etlesnuagesquihantaientsonregarddisparurent.—Seriez-vousinquiètepourmoi,commeunevéritableépouse?—Biensûrquenon!sedéfendit-elleprécipitamment.Vousêtescapabledeprendresoindevous-

même.Préférantreveniràunsujetplussûr,elleajouta:—N’ya-t-ilpaseud’autrebataillejacobineaprèslarébellion?—Nousn’avonspasenvoyéd’autreshommesparcequel’Espagneseservaitdel’Ecosseetdeses

problèmespourharcelerlegouvernementbritannique.L’Espagneavaitpromisqu’uneflottedébarqueraitau sud de l’Angleterre et qu’une petite viendrait rejoindre les jacobins enEcosse.Mais, comme celaarrivapour ladernièrearmadaespagnoleauXVIe siècle, lesbateauxessuyèrentde fortes tempêtes. Ilsdurentfairedemi-tour.SeulsdeuxnaviresespagnolsatteignirentlesHébridesextérieures.Leursforces,associéesaupetitcontingentdejacobins,nefirentpaslepoidsfaceauxAnglaisetauxbâtimentsroyauxquipassèrentpar le lochAlsh. Il y eutuncourt affrontement àGlenShiel avant la retraite finale.LesEcossaisnedéplorèrentaucuneperte.Toutcetaffrontementnefutqu’unegigantesquefarce.

Rionaacquiesça.Celafaisaitaussipartiedel’histoiredesonpeuple,mêmesisamèreappartenaitau camp opposé. A qui devait-elle semontrer fidèle ? Devait-elle au contraire se tenir à l’écart, enespérantnejamaisêtreconcernéeparlesconflits?Soudain,ellesesentitlâcheetpréféraéloignercespensées.

—QuantàAlasdair,repritHugh,ilatoujoursétémonami,mêmequandceux-ciétaientrares.—Vousétiezlefilsduchef.Commentétait-ilpossiblequevousn’ayezpasd’amis?—Souvenez-vousdequiétaitmonpère.Univrogneimprévisible,aveclepouvoirdevieetdemort

surleclan.Toutlemondelecraignaitetavaitpeurdeleprovoquer.Ilétaitplussimplepourtousdetenirlesenfantsàl’écartdemasœuretmoi—d’autantqueMaggienefaisaitrienpourleurdonnerenviedes’approcherd’elle.

CetteMaggiel’intriguaitdeplusenplus,maisRionaneposapasdequestionssurelle.—Lepèred’Alasdairaalorsdemandéque je soisplacédans sa famille, commen’importequel

autregarçon.Mêmemonproprepèreaétéchoquéparcettesuggestion,maisilm’avolontierséloignéduchâteau.Cela a été la plus belle année dema vie.Alasdair s’estmontré un véritable frère pourmoi.Lorsque,àtreizeans,j’aiétéinforméducontratentrenosdeuxfamilles,j’aifaittoutcequej’aipupourmerebeller.Alasdairaétéceluiquiestvenutempérermesardeurs.Sanslui,j’auraisfaitbienplusquevolerdesfusilsauxAnglais.

—Etilaétéfouettéàvotreplace,serappela-t-elle,compatissante.Elleobservadenouveausonprofiletdécouvritsonexpressionpluspensivequerageuse.—Aprèscela,nousn’avonsplusjamaisétélesmêmes,reconnut-il.Puismamèrenousaemmenés.

Jesaisqu’elleavoulunousprotéger,maissongestenousaexclus.Lorsquejesuisallémebattreavecleshommesdemonclan,nousavonsnouédesliens,maisensuite…

Agnès…Ellenevoulaitpassavoircommentlajeunefemmeétaitmorte,nisiBrendanétaitlefilsqu’elleavaiteuavecHugh.Mais,sicelaétaitvrai,quelhommepouvaitlaissersonfilsdevenirgarçond’écuriepoursurvivre?

Elle mit un terme à ces pensées en se disant que Brendan pouvait également être un cousin.McCallumsemblaitenavoirdescentaines.

Puisunepenséeterribleluitraversal’esprit.Agnèsétait-ellelafemmequeHughn’avaitpuépouseràcauseducontrat?

Elleressentitunpincementdeculpabilitéqu’ellen’auraitpasdûavoir.Ellen’étaitpaslafiancéetantconvoitée,cecin’étaitpassavie,etelleétaitbiendécidéeàlaquitter.ElleavaitprévenuHughqu’il

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avaitcommisuneerreur.Ilavaitchoisidenepaslacroirepourlasoumettreàsavolonté.Ilenassumeraitdonclesconséquences.

Demêmequesonclan.Ets’ilnepouvaitarrangerleschosespoureux…Ellesongeaàcetteterrecachéedanslesmontagnes,oùdemystérieusesféesfaisaientjaillirlameilleureeau,lameilleuretourbeetlameilleureorge,pourleurwhisky,cetalismanpourleclan.Hughs’étaitdiscréditéàleursyeuxavecson immaturité, seserreursde jeunesseetcequi s’étaitpasséavecAgnès,maison le luiavaitdepuispardonné.Ilsepouvaitd’ailleursquetoutlemondesoitaucourantpourlepetitgarçon.

Mais,sileclanperdaitsesterres,ilneleluipardonneraitjamais.

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Chapitre11

CouchéàcôtédeRiona,l’espritenéveil,HughsesurpritàpenseràAlasdairetàlamanièredontles liens qui les avaient unis s’étaient usés et affaiblis. La seule façon d’arranger les choses était demontreràsonfrèreadoptifquesaplaceétaitici,etqueleclansignifiaittoutpourlui.

Iln’aimaitpasvraimentenparler,maisilsavaitquelesfemmesappréciaientcegenredechoses.S’ilvoulaitqueRionaaccepteunjoursavieetqu’elleluifasseconfiance,ilfallaitqu’elleapprenneàleconnaître.Etilnedésiraitqu’uneseulechose:allerdel’avantetfairesespreuves.

Celalaconcernaitaussi.Elleneressemblaitpasauxautresfemmes,prêtesàaccepterlesrèglesqueleshommes leur imposaient.Sonbesoinde luttercontresondestin l’avait toutd’abordexaspéré,maispeu à peu sa détermination l’avait rendue à ses yeux plus intéressante et attirante. Il finirait bien partrouverunmoyendeluifairecomprendrequ’ilpouvaitêtreagréabledesesoumettre,etqu’êtresafemmepouvaitlarendreheureuse.

Ilroulasurlecôté,posalatêtesursamainetlacontempla.Elleétaittendueet,soussesvêtementsdenuit,sesjambescherchaientenvainàsedégagerdesesliens.

Lorsqu’ilposaunemainsursacuisse,ellesursauta.—Détendez-vous, jeunefille.Essayerdevousdégagerdevos liensnepeutqu’irritervotrepeau

délicate.Jeseraisalorsobligédevoussoigneretdepasserunbaumesurvotrepeau…Elles’étaitimmobiliséed’uncoup,etcetteattitudeluiarrachaunpetitrire.Ilsepenchaverselleet

luimurmuraàl’oreille:—Voilàquiestmieux.Ilattenditqu’elleluidemanded’ôtersamain,maisellen’enfitrien.Elletremblait,maisilsavait

que cen’était pasdepeur, pas après le baiser incroyablequ’ils avaient partagé l’autrenuit.Peut-êtreétait-ceunesortedepeur,maisd’elle-mêmeetdecequipourraitsepassersielleselaissaitaller.

Ilôta lamaindesacuisse,puis tirasur le lienquiretenaitsa tresseavantde ladéfaireavecsesdoigts.Ilétalaensuiteseslongscheveuxblondssurl’oreillercommeunhalodelumière.Ellen’étaitpasunange,etiln’attendaitpasd’ellequ’ellesoitparfaite,nobleetpure.

— Magnifique, murmura-t-il en se penchant vers elle pour humer le parfum de fleurs qui sedégageaitdesachevelure.

Il saisit alors une boucle et s’en servit pour caresser la joue deRiona.Elle tiqua, semordit leslèvresetgardalesyeuxfermementbraquésversleplafond.Iltraçaensuiteuncheminverssonnezetseslèvres,avantdes’attardersursonmenton.

—Hugh!dit-elled’unevoixexaspérée.—Chut…

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Ilpoursuivit,effleurantsoncou,jusqu’àlalisièredesachemisedenuit.Labouclelacaressaitàsaplaceetsefrayaituncheminentresesseins,tandisqu’ilessayaitd’imaginercesmêmescaressessursoncorpsnu.

LesouffledeRionaétaitrapideetirrégulier.Ilsebloqualorsqu’ildessinalentementdescerclessurses seins. Il feignit d’effleurer leurs pointes dressées mais, juste au dernier moment, se ravisa. Ils’attendit à l’entendregémirdedéceptionetdedésir,mais elle semblait se retenir auprixd’uneffortherculéen. Ses paupières étroitement fermées et ses lèvres sèches étaient un baume pour sa fiertéd’homme,etilluitardaitdeluienmontrerplus.

Finalement, ilneputrésisterpluslongtempsetpassal’extrémitédelamèchesurlapointedesonsein.Elleétouffauncrietfrémitavantdeluiôtersaboucledesmains.

—Hugh,arrêtez!Vousnedevriezpas…ilnefautpas…—Ressentir du plaisir ?Nos corps sont faits pour cela, jeune fille.Dans peu de temps, chaque

partie de votre peau se languira demes caresses. Et je n’ai pas seulement envie de toucher, dit-il ens’approchanttoutprèsdesonoreille,maisaussidegoûter.

Elle fit entendre unpetit bruit étranglé et détourna le visage, les joues empourprées. Il sentait ledésir palpiter dans ses veines, mais son esprit s’efforça de le modérer car il n’y aurait pas desoulagementpourluicesoir,etsansdoutepasavantlongtemps.

Ilavaitentreprisuneséductionquipouvaitdurertouteunevie.Ilavaitpasséunegrandepartiedesonexistence à apprendre lapatience et,maintenant, il allait lamettre à l’épreuve.Riona envalait lapeine.

—Dormez,jeunefille,maisjeresteraiprèsdevous.Ilroulasurledospouréviterd’êtretentédelatoucherdenouveau.Entendantl’oreille,ilentendit

sonsouffles’apaiserpeuàpeuetsentitqu’ellenetremblaitplus.Iltournalatêteverselle.Elleavaitlesyeuxclos,etl’expressiondesonvisages’étaitadoucietandisqu’elles’endormait.

Pendant combiende temps allait-elle lui résister ?Sa résistance serait-elle à la hauteur dudésirqu’ilressentaitpourelle?

***

RionaseréveillalorsqueHughquittalelit,àl’aube,maisellegardalesyeuxfermés.Ellelesentitrabattrelescouverturessurelle.Lorsqu’ilsefutéloignédulit,elleentrouvritlespaupières,etàtraverslalumièregrisequifiltraitparlafenêtreellelevitmettreunenouvellebriquedetourbesurlesbraisesdanslacheminée.

Ilveillaitàsonconfort.Ilavaitàcœurqu’elleledésireetqu’elleaitenviederester,songea-t-elleavecrésignation.

Elle était peut-être innocente,mais elle connaissait assez lemonde pour savoir qu’il pouvait laforcer purement et simplement à l’accepter face à son peuple. Pourtant, il ne l’avait pas fait. Acontrecœur, elle se surprit à l’admirer pour cela,même si elle le prenait pour un homme stupide, quis’obstinaitànepaslacroirealorsqu’elledisaitlavérité.

Ellecomprenaitaussique,s’ilacceptaitdedonnerducréditàcequ’elleaffirmait,leurmariageseréduiraitàunefarce,etiln’étaitpasprêtàreconnaîtresadéfaite.

C’estpourquoiellenepouvaitrestersansrienfaireenattendantqu’ilsedécideàentendreraison.Ellelesuivitduregardlorsqu’ilsedirigeaverslesalon.Sesépaulesétaientincroyablementlarges,toutenmuscles,forgéesparlemaniementdel’épée.Elleneputs’empêcherdelesregarderavecfascination.Il avait des hanches étroites, comme faites pour se caler entre ses cuisses. Ces pensées interditesprovoquèrentenelleunedouleursourdecauséepar ledésir,etellepritpeur.Durant lanuit, il l’avaiteffleurée avec ses propres cheveux, et elle avait été choquée de constater à quel point elle désirait

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désespérémentqu’illuicaresselesseins,àquelpointelleavaitétédéçuequ’ilsecontented’entaquinerlespointespendantdelonguesminutes.Ensuite,lorsquesongesteétaitdevenuplusprécis,lechocs’étaitpropagé dans tout son corps, surtout au creux de son ventre, juste entre ses cuisses. Elle avait déjàconstatéàcommeilétaitagréabledesetoucherelle-même,maisquandc’était luiquilefaisait…Elleignoraitqu’unhommepouvait susciterenellede tellesémotions,même lorsqu’ellenevoulaitpasêtreséduite—mêmes’ils’agissaitdufiancédesacousine.

Ellesecouvritlevisageavecunoreilleretgémit.Ilfallaitqu’ellemetteuntermeàcettefarceavantqu’ilsoittroptard!

Enarrivantdans lagrandesallepourprendre lepetitdéjeuner,elles’aperçutqueHughétaitdéjàparti inspecter des forages. Il avait étudié de nouvelles techniques agricoles qu’il voulait mettre enœuvre,luiavaitexpliquéSamuel.Dermotétaitpartiaveclui.EllesesentitsoulagéequeHughneluiaitpasdemandédel’accompagner.

Elleretournadanssachambreprendresonmanteau.Lajournéeétaitdenouveaugriseetpluvieuse:un temps parfait pour l’idée qu’elle venait d’avoir. Elle voulait tester les défenses du château etdécouvrirsiungardesurveillaitbienchacundesesfaitsetgestes,commeHughleluiavaitannoncé.

Ellequittalechâteauetcommençaàinspecterdiscrètementlacour.Lesgenss’étaienthabituésàsaprésence.Certainslasaluaientmêmedelatête,sansluiprêtercependantplusd’attention.Peut-êtren’yavait-ilaucungarde,etHughluiavait-ilmentipouréviterqu’elletentedes’enfuir?

Elledécidadesortirparlaporteprincipale,oùallaientetvenaientlesgens,dansl’espoirdenepasse faire remarquer. Des chevaux de somme lourdement chargés de paquets et des voyageurs à piedarrivaientchaquejour.Lesgardesarrêtaienttousceuxquientraient,maisceuxquiquittaientl’enceinteduchâteau semblaient libres de le faire à leur guise. Au cas où les gardes auraient reçu l’ordre de lasurveiller, elle attendit le départ d’un convoi de chevaux pour leur emboîter le pas etmarcher à côtéd’eux.Elleavaitrelevésoncapuchonetavançaittêtebaissée,lecœurbattantàtoutrompre.Lesgardess’entretenaient en gaélique avec de nouveaux venus, aumilieu des hennissements des chevaux et desgloussementsdespoules.

Ellecontinuad’avancer,puiss’éloignaduconvoipouremprunterlesentierquisinuaitverslebasdelacolline,endirectiondulochVoil.Achaquepas,ellegagnaitunpeuplusespoir.Personnen’étaitattachéàsespas!Commentpouvait-ellemettreàprofitcettedécouverte?

—LadyRiona,laissez-moivousaccompagnerpourvotrepromenade.Elles’arrêtanetetfitlagrimace.EllepivotaetdécouvritSamuelquisepressaitverselle,souriant,

commes’ilétaitheureuxdepartagersacompagnie.— Ainsi, vous aimez vous promener près de notre lac, dit-il en la rejoignant. La journée est

pluvieuse,maislabeautédenosmontagnesencadrantl’eauestindéniable!Acceptant cette défaite en silence, ellemarchad’unpas lourd à côtéde lui.Elle tourna alors un

regardmélancoliqueversl’estensedemandantsiellequitteraitunjourcetendroit.—Samuel,êtes-vouslemystérieuxgardeducorpsdontHughm’aparlé?demanda-t-elle,lorsqu’ils

atteignirentlesbergesdulac.Untroncétaitcouchéentraversduchemin,idéalementplacépourqu’ons’yasseyeetadmirelavue.

Samuelfitunvaguegestede lamain.Elleypritplace,puissaisitunepierreet la lançadans leseauxpaisibles.Leclapotisqu’ellefitentombant,ainsiqueleslargescerclesn’apaisèrentpassestensions.

—Lesgardesavaient l’ordredemeprévenir si jamaisvous sortiez, expliqua-t-il, sans répondreexactementà saquestion.Hugh leura laissécroirequ’il s’inquiétaitpourvotre sécurité surnos terresrudesetdangereuses,etleuraditquevousaviezbesoind’uneescortepourvousrendreauvillage.Saufquevousn’alliezpasauvillage.

—Biensûrquesi!Ilsecoualatêteavecunlégersourire.

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—Non,ladyRiona,celanefonctionnerapasavecmoi.Qu’espériez-vouspouvoirfaire?— Je savais que je ne gagnerais pas ma liberté, murmura-t-elle, baissant la tête vers ses bras

croisésetretenantdésespérémentseslarmes.Samuelsetutpendantdelonguesminutes,attendantqu’elleretrouvelamaîtrised’elle-même.Elle

entenditchanterlesoiseauxetledouxclapotementdequelquechosequitombaitdansl’eau.Maisellesemoquaitdecequecelapouvaitêtre.

—Est-cesiterribled’êtrelafemmedeMcCallum?— Je ne suis pas sa femme ! se défendit-elle avec rage, le fusillant du regard. Je suis sa

prisonnière!Etjenesuispasassezstupidepourprendrelerisquedepartirseuledanscepayssauvage.Jevoulaissimplementsavoirsij’étaisvraimentsousconstantesurveillance.

LevisagedeSamuelrestadouxetcompréhensif.—Jesaisqueparmilanoblesselesmariagesarrangéssontchosescourantes.—Jenesuispaslafilled’unnoble.Monpèreestlefilsd’uncomte,maisn’apashéritédutitre.Ce

n’est pas une fable que j’ai inventée,mais la vérité. Pourquoi n’envoyez-vous pas unmessager à sonchâteau?Ilvousconfirmeraqu’ilexistebiendeuxcousinesseprénommantCatriona.

—Commesinousavionsl’habitudedecommuniquer!fit-ild’unairnarquois.— Ne pourriez-vous pas avoir un échange courtois, alors que vous avez organisé un mariage

justementpoureffacervosquerelles?—Leschosesnesontpasaussisimples,madame.Pourlapremièrefois,sonsourires’étaitévanoui.—Celafaitdessièclesquenousnousfaisonslaguerre.LesDuffsontvenusnousvolernotrebétail,

mettantnotresurvieenpérilpendantleslongsetterriblesmoisd’hiver.—EtlesMcCallumsontrestésbiensagementsurleursterres,sansessayerderiposteroudelancer

àleurtourdesraids?Ilyatoujoursdeuxcampsdansunequerelle.—Leshommesdemonclann’ontpasoubliéqu’ilyacenttrente-deuxansunchefMcCallum,invité

chezunDuff,aétéretrouvémortdanssonlitavecsafemme.Assassinésparleurhôte.Rionasoupira.—Cettehistoireestterribleetj’ensuisdésolée,maiscelafaitcenttrente-deuxans,Samuel.N’ya-

t-ilpasprescription?—C’estbienpourpanserlesplaiesdupasséqu’unmariageentreunMcCallumetuneDuffaété

planifié,prévoyantlepartagedenosanciennesterres.—Enéchangedel’argentdesDuff,rétorqua-t-elleavecscepticisme.Ilhaussalesépaules.—Ilestnormaldefixerunedotlorsd’unmariage,ladyRiona.Cecontratprévoitdevousdonneren

échangedevastesterresetdel’argent,sijamaisvousrestezveuveunjour.Ellehaussaàsontourlesépaules.—Quem’importe?Jen’épouseraijamaisHugh.—Ilabienl’intentiondevousfairechangerd’avis,madame.Est-cesidifficiled’imaginerqu’il

puisselefaire?Riona se sentit rougir et sedemandasiHugh lui avaitparléde leur intimité.Combiend’hommes

savaientqu’ill’attachaitpourpartagersonlit?Ellenepouvaitpasluiposerlaquestion.—Jesuisprêteàrepartir,dit-elleenselevant.Samuell’imitaetl’invitad’ungesteàrejoindrel’étroitsentierenfaced’eux.—Sicelapeutvousconsoler,madame,HughadéjàenvoyéuneescorteàEdimbourgpourannoncer

àsamèreetàsasœurquevousétiezarrivée.Ellesserontbientôtlà,etvousnevoussentirezplusaussiseule.

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Rionaserralesdentsmaisneditrien.Cettenouvellenel’aidapasàsesentirmieux.Bientôt,ilyauraitauchâteaudeuxautresfemmes,desfemmesquinecomprendraientpaspourquoiellenevoulaitpasépouserleurprécieuxHugh.

***

Hugh revint à Larig Castle avec son petit groupe le lendemain avant le dîner. Il était d’humeurmassacrante. Dermot l’avait mis en colère, les métayers s’étaient montrés têtus, et Riona lui avaitmanqué,cequil’ennuyaitterriblement.

Lorsqu’ils’étaitallongédanssonplaidsurleflancdelacolline,aprèsavoirattachéleschevaux,ill’avait imaginéeétendueconfortablementdans son lit, seule, etheureusequ’il soit absent.Chaque foisqu’ilallaits’endormir, l’imagedesachemisedenuitquela lueurdesflammesrendait transparente luiavaithantél’esprit.Ilavaitfrissonnédefroiddansl’obscuritéhumide,alorsqu’elleétaitbienauchaudsouslescouvertures,àdormirpaisiblement.

Acetteidée,ilavaitsentisonsexesedurcir,cequiavaitfinideluigâcherlanuit.Auchâteau,Dermotpritcongédeluisansunmotd’adieuouderéconciliation.LorsqueHugharriva

dans la grande salle, Riona croisa son regard. Elle ne dit rien, se contentant de faire signe à unedomestiquequivintluitirersachaise.Onluiapportaunecuvetteremplied’eaupourqu’ilpuisseselaveret,dèsqu’ilfutpropre,ilplongeasafourchettedansleragoûtdegibieravecunappétitféroce.

IlauraitaiméqueRionaluidemandecomments’étaitpassésonvoyage,commeuneépousedouceetaimante.Maisellenevoulaitpasêtrecetteépouse,nevoulaitpasdesescaresses,semoquaitqu’illuiprocuredesplaisirssigrandsqueplusjamaisellenevoudraitquittersonlit.

Enréalité,elleparaissaitétonnammentnerveuseetsage,et il ignoraitpourquoi.Ilpritunelonguegorgéedewhiskyquiluibrûlalagorgeetluiréchauffalesentrailles.Maisl’effetfutdecourtedurée,etilseresservit.

—Dermotestunidiot,dit-ilenfind’unevoixsibassequeseuleRionapouvaitl’entendre.Elle le regarda furtivement, tout en rompant délicatement un morceau de pain qu’elle tartina de

beurre.Elleneluidemandapaspourquoi,etilpoursuivit:—J’aipassédesannéesàapprendredenouvellesméthodesagricolesquionteuderéelssuccèsen

Angleterre,commelarotationdescultures,l’assèchementdesmarais,etlesenclospourlebétail,pouréviterqu’ilsdégradentlesplantations.

—Vousn’avezpasdehaiesoudemurs?—Surnoscollines?Non,lebétailcirculelibrement,maiscelanefaitqu’abîmerlesrécoltesetla

terrequin’estpasfaitepourlepâturage.MaisDermotoulesmétayersont-ilsenviedel’entendre?Non!Ilsnepensentqu’àcontinuercommeils l’ont toujoursfait,commelesfermiersavantnousl’ontfait.Siseulementilspouvaientvoiràquelpointl’agricultureestprospèreenAngleterre!Maisilsnecroientpasauchangement.

—Danscecas,étantleurchef,vousleuravezordonnédefairecequevousdemandiez,j’imagine,dit-elled’unevoixdouce.

Il la vit regarder avec insistance le deuxièmewhisky qu’il tenait à lamain, ce qui ne fit que lecontrarierdavantage.

—Etvouscroyezêtrelapreuvevivantequ’essayerdeforcerunepersonneàfairequelquechosecontresavolontéestunestratégieefficace?

Elleécarquillalesyeuxet,l’espaced’uneseconde,ilcrutlavoirsourire,maisellesecontrôla.—Maisvousêteschargédeveillersurlesterresduclan,n’est-cepas?Vouspouvezfaireceque

bonvoussemble.Ilgrommelaetcoupaunmorceaudeviandeavecsoncouteau.

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—Ilyapeut-êtreuneautreraisonàl’obstinationdeDermot,avança-t-elled’unairsongeur.Iln’estpeut-êtrepascontrelesaméliorationsquevouspourriezapporteràl’agriculture,maiscontrevous.

Ilaccueillitalorssonsouriresirare,sisatisfait,sidifférentdeceluiqu’ilespérait.Illevalesyeuxau ciel et continua son repas.Riona sedétourna et engagea la conversation avecSamuel, assis à côtéd’elle.CederniertraduisaitsouventpourellecequisedisaitetHughespéraitqu’ellevoyaitenluiunami.Ilétaitcertainqu’elleavaitenelleassezdedouceuretdegénérositépourenavoirbiend’autres…

Il observa Samuel quelques instants. Lorsqu’il était arrivé au château et que celui-ci était venul’accueillir,ilauraitjuréqu’ilavaitquelquechoseàluidire,qu’ilavaithésité,puisqu’ilavaitchangéd’avis.Bah,ilviendraitluiparlerlemomentvenu,songea-t-ilenhaussantlesépaules.

Alasdairpritunsiègevideàsagauche,celuiquiétaitréservéàDermot,sicederniernes’étaitpassèchementexcusé.

—Alasdair…,dit-ild’unairméfiant.—Hugh,réponditAlasdairavecuncourtsalutdelatête.IlobservaRionaetSamuelquis’entretenaientensemble,puisditàvoixbasse:—Ilyaquelquechosequevousdevezsavoir.

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Chapitre12

Hugh s’était rembruni, il lui lançait des regards noirs, buvait trop, etRiona comprit qu’il s’étaitpassé quelque chose entre Alasdair et lui. Le barde chantait comme s’il voulait le distrairepersonnellement,maissoncharmen’opéraitpas.Etl’idéequ’ellepuissesetrouverpiégée—ouplutôtattachée!—àcôtéd’unHighlanderivreetdetrèsmauvaisehumeur,danslanuit,lamitterriblementmalàl’aise.Dequoiserait-ilcapable?

Bientôt,ilsseretirèrentchacundansleurchambre,etelleseretrouvaàarpenterlapièce.Elleavaitdemandéquel’onprépareàHughunbainetelleespéraitquelachaleurdel’eauépongeraitl’alcoolquicouraitdanssesveines.

Ellefitunepauseettenditl’oreille,encroyantentendreunbruitdanslachambredeHugh.Rongéeparlacuriositéetvoulantseprépareràcequiallaitsuivre,elleouvritdoucementlaporte,puissefaufiladans le salon éclairé par une simple bougie. Ils n’avaient pas beaucoup utilisé cette pièce, car ilsn’avaientpasdefamilleoud’amisàrecevoir.Ellen’avaitpasnonplusdedamesavecquicoudre.Ellese souvint alorsavecennuique lamèreet la sœurdeHughétaient enchemin.Aumoins, jusqu’à leurarrivée,sesjournéesluiappartenaient-ellesencore!

Unefoisdevantlaporte,ellesepenchaetcollasonoreilleaubattant.Dansl’obscurité,elleévaluamalladistanceetsecognalégèrementlatête.Elles’écartaaussitôtengrimaçant.

—Vousécoutezauxportes,Riona?lançaHugh.Sonélocutionparaissaitnormale.C’étaitplutôtbonsigne.Elleneréponditrien,cependant,espérant

luifairecroirequ’ils’agissaitd’unchat.—Ouvrezcettemauditeporteetentrez!cria-t-il.Elles’exécutaentremblant.Siellebattaitenretraite,ilnemanqueraitpasdelapoursuivre,etcela

neferaitqu’aggraversoncas.En le voyant encore dans son bain, devant la cheminée, elle se figea. Ses cheveux mouillés et

ondulésdescendaient jusqu’à ses largesépaules faiblement éclairéespar les flammes.Unecoupeétaitposéesuruntabouretàcôtédelui,etiltenditlamainpourenboireunegorgéeavantdesetournerverselle.

—Fermezlaporte,ilyauncourantd’air!dit-ild’unevoixglaciale.Elleobéitets’adossaaubattant.—Ainsi,vousétiezcurieusedemevoirdansmonbain?Approchez.Elle voulut décliner l’invitation, mais avança machinalement de quelques pas. Elle n’était pas

curieuse,elleavaitpeur.Ilrégnaitdanscechâteaucommeundieu,etelleétaitsaprisonnière.Heureusement,lapièceétaitfaiblementéclairée,l’eaudubaintroubleetsavonneuse,pourtant,elle

éprouvaunecertaineculpabilitéàleregarder.

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Ellepréféraseconcentrersursonvisageetdemandad’untondétaché:—Pourquoiêtes-vousdesimauvaisehumeur?Ildoityavoirautrechosequevosproblèmesavec

vosmétayersetDermot.Oubiendois-jecomprendrequelemoindredésagrémentvouscontrarie?Il pencha la tête en arrière et la regarda à travers la fente de ses paupières. Elle aurait dû se

concentrersursesyeux,etnonsurleduvethumidequienvahissaitsontorseetpointaitvers…—Alasdairm’arapportécertainfait,maisvousn’avezpasentendu.—Non,eneffet.Etait-ceunemauvaisenouvelle?—D’aucunsaffirmentvousavoirvueseuleprèsdu lacencompagniedeSamuel,commesivous

vousétiezdonnésecrètementrendez-vous.Elle se raidit, ouvrit la bouche pour répondre, puis se ravisa. Cette version n’était-elle pas

préférable à cequi s’était réellementpassé ?Manifestement,Samuelne lui avait pasdit qu’elle avaitvouluvérifierl’existenced’ungardeattachéàsasurveillance.

MaisHughlaregardaitd’unœilmauvais,etellecompritqu’ilsoupçonnaitsonamidelapervertir,oulecontraire.Ellen’auraitpasdûs’inquiéterd’unerivalitéentreeux,mais…Samuelavaitessayédel’aideràrevenirsurledroitchemin,etellenevoulaitpaslevoirsouffrir.

—Samueln’apasessayédemevoirensecretet,croyez-moi, jen’avaispasenvied’avoirdelacompagnie!sedéfendit-elleencroisantlesbrassurlapoitrine.

Hughbutuneautregorgéedecequidevaitêtreduwhiskyetreposaviolemmentlegobeletdontlecontenuserenversasurletabouretetsedéversaausol.

—Danscecas,expliquez-moi,cartoutcelan’aaucunsens!Monfrèreadoptifaprisunairàlafoismauvais et satisfaitpourme ledire. Jen’arrivaispas à savoir s’il cherchait àmeprovoquerouàmeblesser.

Surcesmots,ildétournaleregard.Rionan’en revenait pasde l’entendreparler aussi librementde ses sentiments.Manifestement, il

étaitsousl’emprisedelaboisson.— Rien de ce que je fais ne peut vous blesser, insista-t-elle en tâchant d’ignorer l’élan de

compassionquivenaitdepoindredansunrecoindesonesprit.—Dites-moicequis’estpassé,femme!Ilposalesdeuxmainssurleborddelabaignoire,commepourensortir,maisladernièrechosedont

Rionaavaitbesoinétaitdelevoirs’avancerverselle,nucommeunver.Aulieudepartirencourant,ellepourrait bien se jeter dans ses bras. Que penserait-il alors d’elle ? Et elle, quelle image aurait-elled’elle-même?

—D’accord,d’accord!s’écria-t-elleenlevantlesdeuxmains.Nousnoussommesretrouvésseulscarj’étaispartiemepromener,saufquej’ignoraisquejen’avaispasledroitd’explorerlesenvironsduchâteau. Il y a des jardins là-bas, ajouta-t-elle rapidement, croisant ses prunelles grises aussi froidesqu’unmiroir.J’aivudesfemmesytravailler.

—Vousavezessayédevousenfuir,dit-ilendétachantchaquemot.Vousavezattenduque jesoispartietvousavezessayédevousenfuir.

—Jenesuispasstupideàcepoint,sedéfendit-elled’unairlas.Jevoulaissavoirsi,réellement,vousaviezdésignéunepersonnepourm’espionner.Etmanifestement,vousl’avezfait.

—LesgardesontprévenuSamuelquevousétiezpartie?Ellehésitaavantdehocheraffirmativementlatête.Ilselaissaallerenarrièredanslabaignoireetluidécochaunregardperplexe.—Oùpensiez-vousaller,alorsquevousn’êtesqu’unefemmeetquevousêtesseule?—Jevousaiditquejenevoulaispasm’enfuir.Mais,sitelavaitétélecas,oùcroyez-vousqueje

seraisallée?riposta-t-elleavecsarcasme.—Auchâteaudevotrepère.

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—Auchâteaudemononcle!—N’êtes-vouspaslassedementir,jeunefille?Elleavaitenviedehurler,maisréponditd’unevoixcalme:—Jenemenspas.—Jesaisquevouscraignezdevousmarier…Elles’avançaversluietpointaundoigtsoussonnez.—Jen’aipaspeurdevous,pasplusquedumariquej’auraischoisi.Maisjenevousaipaschoisi!—Votrepèrel’afaitpourvous,etjepensequevousêtesunefilletrèsobéissante.Voulait-illaprovoquer,àprésent?Sonregardparlaitpourlui.Avecungrognementdefrustration,elles’emparadupotdesavonsurletabouretetlejetadansla

baignoire.Ilheurtal’eauetéclaboussaaupassagelevisagedeHugh.Ellesetournapours’élancerversla porte,mais il réussit à saisir le bas de sa robe de chambre et la tira vers lui. Elle tomba dans labaignoire,directementsursesgenoux.L’eaudébordaetinondaletapistoutautourd’eux.

—Hugh!s’écria-t-elleens’agitantpouressayerdesortirdelabaignoireetdes’écarterdesapeauchaudeetglissante.

Envain.Sesjambespendaientsurlebord,etelleavaitdel’eaujusqu’àlapoitrine.Passantunbrasautourd’elle,ill’immobilisa.—Cessezdegigoter,dit-ild’unevoixrauque,oujenerépondsplusderien.Elle se raidit en comprenant que juste sous ses fesses se trouvait le sexe dur deHugh. Elle fut

incapabledeleregarder,conscienteduplaisiretdudésirquivenaientdes’emparerd’elle,ainsiquedel’envieirrésistiblede…s’agiter.Unlongmomentdetensions’écoula,uniquementtroubléparlebruitdel’eauquicoulaitetceluideleurrespirationprécipitée.

Elle l’observa sous ses cils. Samâchoire était serrée et ses yeux durs. Suivant son regard, elles’aperçutquel’encoluredesarobedechambres’étaitécartée lorsqu’il l’avait tiréeà lui.Ellen’avaitquesachemisedenuittrempéequiluicollaitàlapeaupourcachersanudité.Façondeparler,carsesmamelonssedressaientdemanièreéhontéeàtraversletissu.

Avant qu’elle puisse se rajuster,Hugh la souleva et couvrit un sein avec sa bouche, l’aspirant àtraversletissu.Ellepoussauncri,maiscen’étaitpasdepeuroudeprotestation.Unevaguedeplaisirdéferlasurelleetluiembrasalesjoues,ettoutlecorps.Hughléchatouràtourchacundesesseins,puislesmordillaenlatenantétroitementcontrelui,jusqu’àcequ’elletremblededésir.

Soudain,ellepassalesbrasautourdesoncoupourleserrercontreelle,nerendantquetropévidentcequ’ellevoulait.Hughlevaalorslatête,etellesepenchapourl’embrassersansaucuneretenue.Ellelui offrit audacieusement ses lèvres, comme il le lui avait appris. Pendant de longues minutes, ilss’abreuvèrent littéralement l’un à l’autre, s’explorant avec passion.Elle aspira sa langue et goûta sonhaleineparfuméedewhisky.Ellen’enavaitcure,accueillantavecjoietoutcequifaisaitpartiedesonêtre.Quandilpritunseinentresesmains,ellegémitcontrelui.Ilenroulalapointeentresesdoigtsetlatiradoucementavantdelacaresserdélicatement,lalaissanttremblanteetpantelante.Puisils’écartapourl’embrasserdanslecouettrouvadenouveaulechemindesapoitrine.Rionarenversalatêteenarrière,cequifitsaillirplusencoresonbuste.

Ilposaalorsunemainsursacuisseetlaglissasoussesvêtements.—Venezavecmoidansmonlit,jeunefille.Cesmotslaramenèrentbrusquementàlaréalité,soulignantsoudaincequ’ellefaisaitetcequ’elle

encourageait.Elleseredressasivitequel’eaudébordadenouveaudelabaignoire.—Non,dit-elled’unevoixrauque.Puiselleseraclalagorgeavantd’ajouterplusdistinctement:—Laissez-moipartir,Hugh.Nousnesommespasmariésetnousneleseronsjamais.Nousfaisons

fausseroute.

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Ilgardatroplongtempslesbrasautourd’elle,etellecommençaàsedébattrepoursedégager,maisfinalementillalâcha.Ilposaunemaindanssondosetl’aidaàselever.Ellesetintdeboutsurletapis,abattueetperdue, l’eaudégoulinant sur soncorpset sesvêtements trempés.Elle tremblaitde tous sesmembres,tropchoquéepourpleurer.

—Allezvousréchauffer,dit-ilentresesdentsserrées.Jeneviendraipasvousrejoindrecesoir.Ellecourutpresqueverslaporte,puiss’immobilisaetlançapar-dessussonépaule:—J’espère…j’espèrequevousn’êtespasjalouxdeSamuel.Jamaisjenemeserviraideluicontre

vous.—Vousmecroyezcapabledepunirunhommeinnocent?—Jel’ignore.Jeveuxjustequevoussachiezlavérité.Samuelvousprotège.—Ilyaquelquesinstants,vousnevouliezpasmedirelavérité.Ellefrémit.—Jenepeuxpaspermettrequel’onfassedumalàunhommeloyal.J’aimentipourmeprotéger,

ajouta-t-ellesansréfléchir.—Etvoussaveztrèsbienlefaire,n’est-cepas?Pourquoi s’attristait-elle autant qu’il la prenne pour unementeuse ? Elle ouvrit la porte, puis la

claquaderrièreelle.Unefoisdanssachambre,ellesedébarrassadesesvêtementsetseséchaavecsoin.Lesimagesdecequivenaitdesepasserentreeuxl’assaillaient.Ellemitdutempsàtrouverlesommeilet,mêmesil’étéétaitbienavancé,elleeutfroiddanssonlit,sansHughàsescôtés.

***

Rionan’enpouvaitplus.MmeWallacenecessaitdeluidemandersonavissurl’organisationdelamaison, comme pour l’amadouer, voyant en elle la nouvelle maîtresse du château. Sauf qu’ellen’assumerait jamais cette chargeetnevoulaitpas induire enerreur cette femmebien intentionnée.Luilaisserpenserquesonavisavaitdel’importanceetqu’ellepouvaitprendretelleoutelledécisionétaitunleurrequ’ellenepouvaitpassupporter.

Lapluieavaitcessé,etelledécidad’allerdeboutiqueenboutiquedans lacour.Elleregardalesartisanstravailleretreçutdetempsàautreleursregardsconfusetpleinsd’appréhension.Leclanignoraitce qu’elle faisait, tout comme elle. Elle avait bien dans l’idée de demander à Dermot de l’aider àconvaincreHugh,maissonplann’avançaitpastrèsvite.Ellenetrouvaitjamaisl’occasiond’êtreseuleavec lui pour tisser des liens.Elle se laissa doncporter tout au longde la journée, comme si elle nefaisait qu’attendre les prochains événements, qu’il s’agisse de l’arrivée de la famille de Hugh, denouvellesdesononclecapablesdescellerledestindeHughetdesonclan,oudeHughperdantpatienceetdécidantdelaprendrepourfemmecontresongré.Elledétestaitcetteattenteetcetteincapacitéàfairesespropreschoix!

LavoixdeHughs’élevasoudain,etelleeutl’impressiond’êtredenouveaudanssachambre,dansson bain, sa bouche lui offrant un plaisir si intime et délectable.La réaction de son corps fut si fortequ’elleeutl’impressionqu’illacaressait.

Saufqu’ilnelatouchaitpas.Enréalité,savoixétaitpleinedecolère,àtelpointqu’ellefrissonna.Plusieurs personnes se retournèrent, comme si elles craignaient d’être les prochaines sur la liste. Soninstinct lui intima de s’enfuir, mais cette idée la remplit de rage. Elle suivit donc le son de sa voixjusqu’auxécuriesetsetintàl’extérieurdesdeuxgrandesportes.EllevitalorsqueBrendansetrouvaitjustedevantelle.Ellereculad’unpasavantqu’ils’aperçoivedesaprésence.

—Ces écuries ont besoin d’être nettoyées régulièrement ! Je ne veuxplus vous voir donner auxbêtesdel’avoinesouillée.J’ignorecequetufaisaisdutempsdemonpère,maisj’exigequelesbêtesquinousserventsoientmieuxtraitées!

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IlcontinuasonsermonbeaucouptroplongtempsaugoûtdeRiona.Ellelejugeadéraisonnable.Puisellel’entenditsortiràgrandspasetdécidaderestercachée.

—Bonjour,lairdMcCallum,ditalorsBrendand’unetoutepetitevoix.Hughavaitdûlesurprendreentraind’écouter,etelleadmiralepetitgarçondenepass’êtremisà

l’abridetoutcedéversementdecolère.—Bonnejournéeàtoi,Brendan.Lechangementdetonlasurprit.Lacolèreavaitcédélaplaceàuneneutralitébienmaîtrisée.Elle lesobservaà ladérobée,maisellenedistinguaitqueleprofil impassibledeHugh.Brendan

tenaitunrâteauàdeuxmains,commes’ilavaitreçul’ordredenettoyerlesécuries.Elleretintsonsouffle,s’attendantqueHughseremetteàhurler.Amoinsquelegarçonnebénéficied’untraitementdefaveur?Qu’est-cequiétaitpirepourBrendan?

Hughjetauncoupd’œilsurlerâteau.—Jeviensdedonnerdenouveauxordrespoursoignernoschevaux,dit-il.Brendanacquiesça,têtebaissée.Soudain,unpetitaboiementaiguretentit,etRionaaperçutlepetit

terrier,attachéàcôtédeBrendan.Hughsetournaversl’animalenfronçantlessourcils.—Cechienest-ilsage?—Oui,monsieur.—Commentl’as-tuappelé?LafaçondontHughessayaitdeselieravecluiàtraversl’animalfaisaitpresquepeineàvoir.—Hamish,monsieur.Asagrandesurprise,ellevitqueHugh,trahiparunhaussementdesourcils,s’efforçaitdecacher

sonamusement.—C’estunbiengrandnompourunsipetitchien.—Ilcroitqu’ilestgrand,monsieur.Riona s’aperçut alors qu’elle n’était pas la seule à observer la scène. Près de la porte, le

charpentier contemplait Hugh et l’enfant d’un air sévère. Plusieurs gentlemen, debout dans la courd’entraînement,murmuraiententreeuxenlesregardant.

Depuistoujours,leshommesengendraientdesbâtards,songeaRiona.Ellen’étaitpasvraimentsûrequelegarçonensoitunetpourtant…devantlaréactiondeshommesduclan,ellesesentitinquiètepourHugh.

Hamishaboyadenouveauet,cettefois,illefaisaitdanssadirection.HughetBrendantournèrentlatêtedeconcert,demanièrepresqueidentique.

Elleleurfitunpetitsalutdelamain.—Jenevoulaispasvousinterrompre,s’excusa-t-elle.Pardonnez-moi.—LadyRiona…,ditHughavecunepointedecuriositédanslavoix.Hamishcontinuad’aboyerfurieusementaprèselle.Elleduthausserleton.—J’essayaisdem’instruireenregardantcequevotrepeuplefaitchaquejour.MêmeHamishsembladouterdesaréponseetnes’arrêtapasd’aboyer.—Chut,ordonnaBrendanens’agenouillantdevantluietenpassantunbrassursonencolure.LesaboiementsdeHamishsemuèrentengrognements.Hughnecherchaplusàcachersonamusement.—JepensequeHamishvousperçoitcommelemembreleplusfaibledecettemeuteetcommeune

menacepourlui.Retourneàtesoccupations,dit-ilàBrendan.Puisilsetournaverselle.—LadyRiona,jevouspriedemerejoindredanslagrandesalledansuneheure.

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Iln’attenditpassaréponse,etelleleregardapartiraveccuriosité.Lesplisdesonplaidretenuparune ceinture se balançaient à chaque pas, et les muscles de ses mollets se contractaient sous seschaussettes.Lesdamesécossaisesavaientpeut-êtreraisond’apprécierlavuedesjambesnuesdeleurshommes.

Ellen’avait jamais eupeurdeschiensde savie, encoremoinsdesanimauxdepetite taille.Elles’avançadoncversHamishetsepenchapour luioffrir samain. Il la reniflaàplusieurs reprises,puisgrognadoucement,maisd’unairmoinsmenaçant.

—Jefiniraipargagnertaconfiance,petitHamish,dit-elleensouriant.Brendanserelevaetsaisitsonrâteau.—Jedoisretournertravailler,madame.—Danscecas,jetelaissepartir.Elleleregardadisparaîtredansl’obscuritédesécuries,suivideHamish,quis’allongeaaumilieu

delatravéeavantdeposersonmuseausursespattes.Lorsqu’ellelevalesyeux,elleaperçutDermotquitterl’undesateliers.Ilmarchaitàgrandspasvers

lacoursupérieure.Ellesedépêchadelerattraper.

***

Hughrésistaàl’enviedeseretournerpourregarderRiona.Ilenavaitvubeaucouplaveilleausoiretdevaitfairedeseffortspournepaslaissersessouvenirsentraversontravail,maislatâcheétaitrude!Leurdisputeavaitétéstimulantedebiendesfaçons,àtelpointqu’ilserappelaitàpeinesonorigine.LesimagesdeRionadanssonbain,avecsesvêtementstransparentsetsesseinsdurs,abolissaienttouteautrepensée.Saufqu’ilnelefallaitpas.Ildevaitdonnerl’imaged’unfuturépouxcapabled’oublierdanslajournée lesnuits avec sa femme.Dans ce cheminvers lemariage, il apprenait chaque fois àmieux laconnaître,sesentaitunpeuplusproched’elle,unpeuplusémuparsapersonne.Bientôt,elle-mêmenepourraitplusluirésister.

IltrouvaSamueldansl’armurerie,occupéàinspecterleurréserved’armes.Dèsqu’ilrecevraitladotdeRiona,ilprévoyaitdelarenforcer.Ilattendaitdesnouvellesducomtemais,àcejour,iln’avaitreçuaucunedemandedenégociation.Pourtant, ilétaitpersuadéqu’ilnetarderaitpasàenrecevoir.LepèredeRionanevoudraitcertainementpasquel’onsachequ’ilétait revenusuruncontratdemariagesignédesamain.

Samuelfinitdes’entreteniravecl’armurier,puissortitdelabâtisse.—Tuasbesoindemoi,Hugh?—Viensfaireuntour,proposa-t-il.Unefoisàl’abridesoreillesindiscrètes,ildemandafroidement:—Pourquoinem’as-tupasditqueRionaavaitquittélechâteau,hier?Samuel continua d’avancer, lesmains derrière le dos, affichant un air terriblement inquiet.Hugh

hésitaitentres’enoffusquerous’enamuser.—Ellet’adonctoutdit?demandaSamuel.—Non,pasaudébut.Maistut’esmisdansunesituationdélicate,Samuel.Tuesrestéàmescôtés

pendanttoutescesannées,etlesgensd’icineteconnaissentpas.Lorsqu’ilst’ontvuavecmadameprèsdulac,desrumeursontcirculé,quisontarrivéesauxoreillesd’Alasdair.

—TuasdoncdemandédesexplicationsàladyRiona?—Evidemment!Etelleapréféréreconnaîtrelesfaitsplutôtquedetevoirsubirlesconséquences

de ses erreurs. J’ignore comment tu as fait pour te lier d’amitié avec elle, alors que tu m’as aidé àl’enlever.

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—Ilestaisépourelledemedisculper,réponditSamuelavecunhaussementd’épaule.Jenesuisquel’undeteshommesetjesuistesordres.Elleetmoin’avonsrienfaitdemalprèsdulac.J’aidiscutéavecellequelquesminutes,puisjel’airaccompagnéeauchâteau.Biensûr,lesgensparlentd’elle.Ellen’est pas encore ta femme, même s’il semble que tu veuilles passer par unmariage d’essai, dans lamesureoùelleestinstalléedanstesappartements.

—Tepermets-tude fairedescommentaires surmavieprivée,Samuel?demandaHughd’unairmauvais.

—Biensûrquenon.Tuasmaloyauté,tulesais.Maisj’aicommencéàêtremêléàtavieprivéedèsl’instantoùj’aiconduitcettevoituresouslebalcondecettedameetoùjet’aiaidéàl’enlever.Tuavaistesraisons,etjeneveuxpasendébattreavectoi.Maisjecompatisavecelleetjecomprendssapeuretsafrustration.J’aicrubondegardersecretqu’elleavaitcommisuneerreur.Maintenant,ellesaitqu’elleestconstammentsurveillée.Ilfallaitqu’elleenfassel’expérience.Nel’aurais-tupasfait,àsaplace?

—Cequej’auraisfaitn’aaucuneimportance.Tudoismedonnertaparolequ’àpartirdecejourtumedirastoutdesesfaitsetgestes.J’essaiedelaprotégeraussi,tucomprends?

—Oui,réponditSamuelàvoixbasse.Maintenant,jecomprends.Hughlevalesyeuxauciel.—Tuvasm’accompagnerauvillage.Nouspartironsdansuneheure.Préparetroischevauxetdes

provisionspourl’après-midi.—Oui,monsieur,réponditSamuelavantdes’éloigner.Mauditsoitlesourirequ’ils’étaitàpeineefforcédecacher!Lorsqu’ilarrivadanslacour,ildécouvritavecsurpriseRionaquis’entretenaitseuleavecDermot,

maisilnelesinterrompitpas.Elleétaitsuffisammentencolèredesavoirquedesgardeslasurveillaient—ellen’avaitpasbesoindecroireenplusqu’illasuivait.

Pourtant, sa curiosité était aiguisée. Peut-être avait-elle enfin décidé de connaître les gens et des’intégreràlavieduchâteau.

Unquartd’heureplustard,quandellepénétradanslagrandesalle,il l’invitaàvenirlerejoindreprèsdelacheminée.

—J’aienvoyéMarycherchervotremanteauetvosbottes,luiannonça-t-il.—Ilnepleutpas,répondit-elle,l’airconfus.—Maisilsepeutqu’ilpleuve.Nouspartonspourlajournée.Cetteinformationéveillasonintérêt.—Oùallons-nous?—Auvillage,sivousmepromettezd’êtresage.—Oh!jepeuxêtresage.Etjesuistrèsheureuseàl’idéedequittercetendroitpourlajournée.—Sansessayerdevousenfuir?Elleneréponditrien,secontentantdereleverlementond’unairdedéfi.—Sulaestlevillageleplusprocheappartenantauclan,continua-t-il.—Pourrais-jeendécouvrird’autres?—Unjour,peut-être.Sivousêtessage.—Nemetraitezpascommeuneenfant,McCallum!—N’essayezpasdefuirvosresponsabilités,alors.Il la vit se braquer, puis se contenir et garder le silence. Il savait à quel point elle se faisait

violence, toutcommeilsavaitàquelpointellevoulaitdésespérémentquitter lechâteau,mêmesiceladevaitêtreaveclui.

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Chapitre13

RionachevauchaentreHughetSamuelsansvraimentleuradresserlaparole.Elleétaitcontrariéeparlessentimentscontradictoiresqu’elleéprouvaitàl’égarddeSamuelqui,certes,avaitparticipéàsonenlèvement, mais la traitait avec gentillesse. Elle n’avait pas envie de l’apprécier, et pourtant il luiapparaissaitcommeunhommebonetfidèleàsonchef.

QuantàHugh,elleavait toujoursdumalàcroisersonregard.Elleauraitpréféréqu’ilgardesonmasqueimpassible,maisplusilspartageaientdemomentsd’intimitéetpluscelasevoyaitdanssesyeux.Elle,elleétaitentraindesuccomberàl’attraitdudésirqu’iléprouvaitàsonégard.Elleétaitdéjàunefemmeperdue, enlevéeparunhommeet ayantpasséplusieurs semaines en sa compagnie.Maintenant,elle partageait aussi ses nuits dans ses appartements. Qu’elle ait été forcée à le suivre n’avait plusd’importance.Mais il fallait qu’elle reste honnête envers elle-même, afin de pouvoir tirer lemeilleurprofitdesavie.EllenepouvaitpasépouserHughetnedeviendraitpassamaîtresse.Toutcequ’il luirestait, c’était la promesse qu’elle s’était faite de quitter un jour cet endroit. Connaître la campagneenvironnanteluiseraittrèsutile,quandellesedéciderait.CarlorsqueHughetleclandécouvriraientlavérité…

Elleignoraitencorequandcelaarriverait.SaconversationavecDermotl’avaitdéçue,mêmesielleétaitincapablededireàquoielles’étaitattendue.Ilétaitletanistdesonchef.Desoncôté,elleétaitlafemmeque ce chef avait décidé d’épouser. Ils n’avaient pas parlé très longtemps, etDermot lui avaitclairementfaitcomprendrequeleurconversationnefaisaitqueledétournerdesontravail.Cettetentativede rapprochementavait renforcésonsentimentd’êtreunepotichedanscechâteau.Les femmesavaientcertainementungrand rôle à jouerpour tenirunedemeureaussi immenseet complexequecechâteau,maisapparemmentDermotne levoyaitpasainsi.RionasesentaitoffenséepourMmeWallaceetpourCat,quideviendraitunjourlamaîtresselégitimedeLarig.

Maisellen’avaitpasencorerenoncéàl’utiliserpouratteindreHugh.Latâcheseraitseulementpluscompliquéequeprévu.

EnatteignantlecheminquilongeaitlelochVoil,ilsbifurquèrentversl’estetsuivirentlesbordsdulac.Dans lavalléequisedessinaità l’horizon,Rionaaperçutalors lepetitvillage,avecsaminusculeégliseetsoncimetièreentouréparunmuret.Plusieursdizainesdecottagessedressaienttoutautour,avecleurs toits de chaume et leurs petits jardins.Derrière s’étendaient des champs d’avoine.Au centre duvillage,desvachespaissaientlibrementsuruneplacetriangulaireparseméed’herbeverte.

Plusieurshommessetenaientdevantlesmaisons.Ilsaiguisaientleursarmestoutenbavardantentreeux. Les femmes travaillaient dans leurs jardins ou lavaient du linge dans de grands chaudrons d’eaubouillante,pendantquelesenfantscouraientetcriaientjoyeusementautourd’eux.

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Enlesvoyantarriver, tous interrompirent leur tâche,arborantunairà lafoisméfiantetsceptiquelorsqueHughs’approchad’eux,avantdereprendreleurairimpassibleetdelesalueraimablementd’unsigne de la tête. Sans doute cet accueil mitigé était-il dû au fait que ce village était également celuid’Agnès, cette fille morte depuis longtemps et dont le nom semblait entaché de scandale. Mais lesvillageoisnesemblaientpasl’avoiroublié.

—Jenevoispasde commercespourunvillagede cette taille, commentaRionaenatteignant laplace.

—Vousvousattendiezàtrouveruneboutiquedemodiste?demandaHughavecdésinvolture.MêmeàEdimbourg,iln’yenaqu’une.

Rionasouffladoucement.—Vraiment?HughetSamueléchangèrentdesregardsamusés.—Vraiment.Lestailleursetlescordonnierssedéplacentdevillageenvillageoùilsrestentenviron

unesemaine,letempsdefaireleurtravail,puisilss’envont.—Maisnousavonsunebrasseriepourlesvoyageursdepassage,précisaSamueld’unairsatisfait.—Etici,leshommessonttravailleurs,conclutHugh.Ilselaissaglisserdesonchevalpourvenirverselle.Asagrandesurprise,illasaisitparlataille

pourl’aideràdescendredeselle.Rionaneputs’empêcherdepenserqu’ilsedonnaitenspectacle.Manifestement,labrasserieavaitétéautrefoisuncottagecomposédedeuxpièces.Aujourd’hui,la

pièceprincipaleétaitéquipéed’unbar,detablesavecdesbancs,ainsiqued’unebanquetteplacéefaceàlacheminéepour lesconversationsplusprivées.Derrière lebarse trouvaituneautrepiècequidevaitservirderéserve.Hughparaissaitimmensedanscettebrasserie.Satêtetouchaitpresquelespoutres,etildutlabaisserplusieursfoispouréviterdeheurterdesfromagessuspendus.

Unhommevêtud’unechemise,d’ungiletetd’uneculottesurgitdelaréserve,untabliernouéautourdelataille.Ilétaitminceetnedevaitpasavoirplusdetrenteans.Sabarbeetsamoustacheétaientbientaillées.

—Enquoipuis-jevousaider,mesbravesgens?demanda-t-il.Puisils’arrêtaenvoyantHugh.—HughMcCallum,murmura-t-il,visiblementsouslechoc.J’avaisentendudirequevousétiezde

retour,biensûr…Vousavezl’airenpleineforme.—DonaldRoss,réponditHughenluidécochantunsourire,cequiétaitrare.Ilss’étreignirentlonguementensetapotantledos.Rionaassistaàlascène,médusée.Ellen’avait

encorevupersonneréserveràHughuntelaccueil.D’autreshommesattablésunpeuplusloinassistaienteuxaussiàcesretrouvailles.Peut-êtrediraient-ilsautourd’euxqu’ilnefallaitpascraindreleurchefniseméfierdelui?

— Asseyez-vous, asseyez-vous, dit l’aubergiste en désignant une table propre sur laquelle étaitposéeunelanterne.Laissez-moivousapporterdelabière.Etpourladame?

—Ils’agitdeladyRionaDuff,mafiancée,expliquaHugh.Elleprendraunverredevotremeilleurvin.

Enentendantlafiertéquipointaitdanssavoix,Rionasentitsoncœurseserrer.Sansdouteétait-ilfier de son apparence—et nonde cequ’elle était profondément—,mais aussi et surtout de l’argentqu’elleétaitcenséeapporterauclan.L’argentdeCat.Sadotàelleétaitbeaucoupmoinsimportanteetendécevraitplusd’un.

L’hommepritsamainàlamanièred’ungentilhommeetlabaisa.—LadyCatriona,dit-il,jesuisenchantédevousrencontrer.Jeconnaisvotrefiancé,carnousavons

préparéensembleunemaîtrised’artsàl’universitéd’Edimbourg.

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Riona ne put cacher sa stupéfaction. Hugh avait étudié à l’université ? Plus rien de ce qu’elleapprenait sur lui n’aurait dû l’étonner, et pourtant il la surprenait chaque fois un peu plus. Etl’aubergiste?Pourunhommecultivé,ilparaissaitréduitàdesconditionsdeviebiendifficilesdanscevillageisolédetout.

—Nousysommesrestésplusieursannéesaprèslarébellion,précisaHughensouriantàsonami.—Ah,lesbonsmomentsquenousavonspassésensemble!ajoutaDonaldRossensecouantlatête.

Etlesfemmes…Ils’interrompit,rougedehonte,etsetournaverselleavecunaird’excuse.—Pardonnez-moi,madame.Cesannéesétaientcertestrèsexcitantes,maisensuitevotrepromisa

décidéqu’ilserviraitmieuxsonpaysauParlement.Demoncôté,j’aicherchéàaméliorermonsort,maisj’aifinipartoutperdre.

LesouriredeHughs’évanouit.—Donald…—Non,c’estinutile.J’aifaitdesinvestissementsrisqués.Votrefamillem’adonnéuneautrechance

ici,Hugh,etjenel’oublieraijamais.Ilfrappadanssesmainsetlesregardatouràtour.—Mafemmeapréparéunedélicieusesoupe,continua-t-il.Jevaisvousenapporter.Ilpartit servird’autres tables avantde retournerderrière le comptoir.Rionacontinuad’observer

Hugh.DonaldRossrevintbientôtavecdeschopesdebièrepourHughetSamueletposadevantelleunverre étonnamment fin et élégant, rempli d’un vin rouge foncé. Puis il s’inclina de nouveau avant dedisparaîtredansl’arrière-salle.

—Vousparaissez surprise, jeune fille, ditHughàvoixbasse, lesbras croisés sur la table.Vousavezdesquestions?

—Beaucoupmais… cela doit être difficile pour votre ami d’avoir été riche au point d’aller àl’universitéetmaintenant…

Ellecontemplalesmursenpierrerustiquesetletoitdechaume.—Ici,enEcosse,personnenemépriseceuxquiontsubiunreversdefortune,réponditHughd’une

manièretrèsdétachée.Cequin’estpaslecasenAngleterre.—Vousavezraison.Demême,lesAnglaispensentquelesEcossaisnesontpasdesgenscivilisés.HughdonnaunpetitcoupdecoudecompliceàSamuel.—Tuasentendu?Nousavonsdéjàréussiàlarallierànotrecause.Ignorantleursmoqueries,ellebutunepetitegorgéedevin.—Ilesttrèsbon.HughfittintersachopeenétaincontrecelledeSamuel.— Je suis heureux que Donald ait pu refaire sa vie ici. Beaucoup d’hommes ont traversé des

momentsdifficilesaprèslarébellion.Ilssontpartisetnesontjamaisrevenus.Lescoloniesaméricainessontpeupléesdebeaucouptropdebravesgarçonsissusdenosclans.

Ilposasurelledesyeuxrieurs.—Jevaispouvoirenaiderbeaucoupgrâceàvotredot!Necroyezpasquejevaislagarderpour

moi.Soudain,levinpritdanssaboucheungoûtamer,tandisqu’ellemesuraitàquelpointcespauvres

gensattendaientavecimpatienceunedotqu’ilsn’auraientjamais.Ellepréférasedistraireenrépondantpardesproposacerbes.

—Vosgensnesemblentpasvraimentvousfaireconfiance.S’attendent-ilsàcequevousdépensiezaussisagementcettesomme?

— Ils m’ont élu pour être leur chef, rétorqua-t-il avec aplomb, ce qui veut dire qu’ils me fontconfiance.

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—Ouqu’ilsveulentl’argentquivousestattaché,dit-elled’unevoixunpeutropmielleuse,àvousetàpersonned’autre.

Le sourire de Hugh ne faiblit pas sous ses attaques. Donald revint bientôt vers eux. Une jeunefemme, chargée de bols de soupe et de pain frais, l’accompagnait. Il la leur présenta comme étant safemme,Rachel.Ellerepartittimidementendirectiondelacuisinesansdireunmot.

—Vosparentssont-ilstoujoursauvillage?demandaHughlorsqueDonaldpritplacesurlebancàcôtédeSamuel.

Lesouriredel’aubergistes’évanouit.—Monpèreestmortilyaquelquesannéesdecela,etmamèren’estpasenbonnesanté.Elleala

tuberculose.Rionalevalesyeuxverslui,avecaucœurunélandecompassionpourcettefamille.—Jesuisdésolédel’apprendre,ditHugh.—Masœuraaussilatuberculose,déclara-t-elle.Jelasoignedepuisdesannées.—VousêtesuneDuff,n’est-cepas?demandaDonaldaveccuriosité,sansaversionaucune.— En effet, mais j’ai grandi en Angleterre, à Londres, surtout. Ma sœur y a vu beaucoup de

médecins.Ilsepenchaverselle.—Vouspourriezpeut-êtrerendrevisiteàmamèreetmedirecequevousenpensez?—Jenesuispasvraimentapteàlaguérir,objecta-t-elle,gênéesansvraimentsavoirpourquoi.—Mais vous en savez plus sur les traitementsmodernes que nous.A Stirling, tout ce qu’ils lui

proposaient,c’étaientdessaignées,etcelanefaisaitqu’empirersonétat.—Oui,c’étaitlamêmechosepourmasœur.J’iraivoirvotremère,vouspouvezcomptersurmoi.UnelueurdefiertééclairaleregarddeHugh,etRionadétournalesyeux.Ellenepouvaitpasguérir

cettefemme,iln’yavaitpasderemède.Maiscertainespersonnesvivaientpluslongtempsqued’autres,etavecdessoinsadaptésilétaitpossibled’allongerleurexistence.

Sonempressementàaidercettefemmel’étonna.Elleavaitpasséunegrandepartiedesajeunessecloîtréedans la chambred’unemalade, avecpour seulecompensation lagratitudedeBronwyn, tandisquesesparentssemblaientcroirequen’importequiauraitvolontiersrenoncéàsesloisirspourofficiercomme infirmière, alors qu’ils ne l’avaient jamais fait eux-mêmes. Elle se rappela également laculpabilité que ressentait sa sœur à l’idée qu’elle passe autant de temps avec elle.Mais aujourd’hui,personnenelaforçait.Ellen’étaitpeut-êtrepascapabled’échapperauxprojetsdeHughmais,aulieudes’apitoyer sur son sort, elle pouvait peut-être faire quelque chose pour une femme en souffrance.Elleéprouvaunegrandejoieàl’idéedeprendreseulecettedécision,pourunefois.Jusqu’àprésent,elleenavaitsirarementeul’occasion!

Pendant l’heure qui suivit, ils mangèrent leur soupe et leurs pains d’avoine. Donald lui racontaquelquesanecdotessurHughetletempsoùilsétaientàl’université.Ellelesresituamentalementdansletemps.C’était aprèsqueHugheut voulu épouserAgnès.Donald semblait avoir eubeaucoupdemal àl’inciteràfaireautrechosequ’étudier,maisaprèsquelquetempsHughs’étaitmêléàleursfêtesetàleursbeuveries,commetouslesjeuneshommesdesonâge.

Aprèsavoirmangé,RionaaccompagnaRacheldansunpetitcottagesituéderrièrelataverne.Elledécouvritunevieillefemmeoccupéeàsurveillerunpetitgarçonetunefillequijouaientensembleavecuneballe.Lafemmetenaitunmouchoirdanssamainpourlecasoùelleseraitprised’unequintedetoux.Ellesedemandasielleytrouveraitdusang.Lapièce,bienquepropreetmunied’unplancherenbois,sentait le renfermé. Les volets étaient clos pour la protéger du soleil, et la chaleur était presqueinsoutenable.Ellecommençadoncparouvrirlesvoletsetparladesvertusdel’airfrais.Elleconseillaégalementàlafemmedesortirprendreunpeud’exerciceetdes’alimentersainementpourrenforcersesdéfenses.Enfin,elleluirecommandadeboiredesinfusionsdecamomillepourmieuxdigérer.

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LavieilleMmeRosslacontemplacommesielleétaitunangetombéduciel,cequi lamitmalàl’aise,audébut.Maisbientôt,ellecompritàquelpointlamaladiepouvaitvousrendredépendantdelabonnevolontédesautres.Ellebavardaavecellependantuneheureet luidonnadesnouvellesduSud.MmeRossluiparladesavieauvillage.Rionapritenfincongéenluipromettantdevenirtrèsbientôtluirendrevisite.

Elle restaun longmoment seuleà l’extérieurducottage.Plus loin,dansunemaisonvoisine,elleentenditdesproposengaéliquequisemêlaientaumeuglementdesvachessurlacolline.Lesmontagness’élevaient de part et d’autre de la vallée, avec leurs sommets dénudés.Vers l’ouest, juste aumilieu,brillaient les eaux miroitantes du loch Voil. L’idée de s’enfuir en courant ne lui traversa même pasl’esprit,tantcettetentativeparaissaitvaine.

Poussantunsoupir,elleretournaàlataverne.LagratitudeetlesremerciementsdeDonaldluifirentchaudaucœur,demêmequelafaçondontSamuelluisouriait.QuantàHugh,sonregardtémoignaitduplaisiretdelafiertéqu’ilressentaitàsonégard.

Cesoir-là,danssachambre,elleattenditsonarrivée,toutenespérantqu’ilseraittropfatiguéparleurlonguejournéepourvenirl’ennuyer.Evidemment,ilétaitdenaturerobuste,etc’étaitplutôtellequiétaitépuisée,paslui.

Quandilarriva,ilallas’asseoiraussitôtdevantlacheminéeetl’attirasursesgenoux.Elleseraidit,méfiante,maisilsecontentadeprendresamaindanssapaumerugueuseetdejouerdistraitementavecsesdoigts,toutenluiparlantdeDonaldetdesafamille,ainsiqued’autrespersonnescommelui,touscesgensqu’ildésirait aiderquand il siégeait auParlementàLondres.Le sonde savoixétait apaisant, etbientôtelleposalatêtesursonépaule.Elleduts’endormir,carelleseréveillaaubeaumilieudelanuit,seuledanssonlitfroid.Etonnamment,unepartied’elles’entrouvacomme…déçue.

***

Hughmontasechangeraprèsunematinéed’entraînement. Ilavait rendez-vousavecsonrégisseurpourparlerdesbauxquiarrivaientàterme.Lesujetétaitaridemaisnécessaire.Ilavaitàportéedemaintousleslivresd’agriculturequ’ilavaitfaitenvoyeràLarigaufildesannéesetquepersonnen’avaitlus.Ilavaitl’intentiondelesluimontrer,ainsiqu’àDermot.Cesterresredevenueslibresétaientl’occasionrêvéed’expérimenterdenouvelles techniquesagricoles censéesaméliorer le rendementendépitde larudesseduclimat.

Ileutlasurprised’entendredesvoixenprovenancedusalon.IlallavoiretdécouvritMmeWallaceetRionadeboutdevantlatable.Ellessetenaientdevantdelongscouponsdebatiste.

Elleslevèrenttoutesdeuxlesyeuxverslui,maisseuleMmeWallaceluisourit.Rionasecontentadele saluer d’un signe de tête avant de se pencher sur son ouvrage. Il essaya de l’imaginer lui sourireaimablement à son entrée dans une pièce, mais cela allait être difficile. Il comprenait qu’après unenlèvementilluifaudraitunelonguecourpourlaséduire.Pourtant,ils’étonnaitencorequecelaprenneautantdetemps.

—Vousavezbesoindenouvelleschemises,lairdMcCallum,ditMmeWallace.Votrefutureépousea demandé à pouvoir vous en confectionner et à les broder pour vous. Saviez-vous que vous alliezépouserunefemmeaussitalentueuse?

—Oui,jelesavais,répondit-il.Rionas’empourpra,maisserefusaittoujoursàcroisersonregard.— Elle aurait pu demander à préparer son trousseau pour la noce, mais elle affirme que les

chemisesduchefsontplusimportantes.—Vraiment?

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Il se demanda siRiona ne s’obstinait pas encore à prétendre qu’elle n’avait pas besoin d’habitspourlemariage.

Il croyait qu’après leur visite au village, la veille, et son intérêt à aider lesRoss, elle se seraitassagie,maismanifestement il n’en était rien. Elle ne voulait pas se confectionner des robes pour unavenirqu’elle refusait d’envisager. Il aurait aimé resterpatient,mais cela faisait trois semainesqu’ilsvivaientensemble,etellenesemblaittoujourspasprêteàaccepterlasituation.Elleétaitdécidémenttrèstêtue.

Il s’attardasur le seuil,décrochant sonplaiddesonépauleet laissant lespans retomber.Acettemême heure, la veille, assis près du feu, il avait senti les défenses deRiona faiblir, au point qu’elles’étaitendormiedanssesbras.Elle l’avait laissé laprendresursesgenoux,etmêmetouchersamain.Lorsqu’elles’étaitendormie,iln’avaitpaséprouvélebesoinpressantd’éveillersessens.Elleparaissaitsi…innocente,avecsescernessouslesyeux,témoinsd’unelonguejournée.Ill’avaitregardéedormirunlongmomentavantdelaporterdoucementdanssonlit.Illadésiraittoujoursmais…ilavaitdutemps.

Voyantqu’illesregardaittravailler,ellesluijetèrentunbrefcoupd’œil,puisseremirentàmesurerletissuetàcoudre.

—MadameWallace,ditsoudainHugh, j’aioubliédevousdemandersivousaviezbesoind’aidepourpréparerleconseildesgentlemendedemain.Sivousvoulezquej’appellequelqu’un…

Ils’interrompitenvoyantl’étonnementsepeindresurlevisagedeRiona,justeavantqu’ellepenchedenouveaulatêtesursonouvrage.Etonnementquin’échappapasàsagouvernante.

— Vous n’avez pas dit à votre fiancée qu’il allait y avoir un festin dans la grande salle ? luidemanda-t-elleavecunepointedereproche,s’exprimantaussilibrementquesielleétaitsamère.

—Jemesuisadresséàvous,madameWallace,répondit-ilavecmorgue.J’aipenséqu’iln’étaitpasjustededérangermafiancée,alorsqu’ellen’estpasencorelamaîtressedecettedemeure.

Ilsemblaitavoirlonguementréfléchiàlaquestion.Rionaluidécochaunregardamusé,indiquantclairementqu’ellen’encroyaitpasunmot.— Très bien, maugréa Mme Wallace, je vais m’en occuper, laird McCallum. Mais tous ces

préparatifs…—Jesaisquevousaveztoutenmain,madameWallace,ditRionad’unairlégèrementsuffisant.Maisilsavaitquecetonluiétaitdestinépersonnellement.—Mesdames,dit-ilenhochantlatête.Puisilseretira.Unefoisdanssonbureau,aprèsavoircroiséleregardsceptiquedesonrégisseuretlevisagedurde

Dermotquandilleurparladelamanièredontl’agricultureétaitentraindechanger,ilsesurpritàdésirerrevenirauplusviteprèsdesdeuxfemmes.

Ceshommes faisaientpeut-êtrede la résistance,mais au final saparole faisait loi. Il était tempsd’expérimenterdenouvellestechniquessurlesterresdesMcCallum!

***

Après avoir passé la matinée avec Mme Wallace, Riona commença à croire que Hugh l’avaitvraimentépargnée,ennel’informantpaspréalablementduconseil.Lagouvernantes’étaitmisentêtedeluimontrercomments’organisaientlespréparatifspourautantd’invités,etlescuisinessemblaientsurlepointd’explosersouslenombredeservantesvenuesenrenfort.Desdizainesetdesdizainesdevolailless’amoncelaient à côté d’une énorme quantité de pâtisseries. Dès qu’elle en eut l’occasion, Riona enprofitapours’éclipser.

Elleneralentitlepasqu’encroisantplusieursregardscurieux.Sicettemaisonavaitétélasienne,elle aurait volontiers proposé son aide.Mais cela lui paraissait… cruel que le personnel, et surtout

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MmeWallace,s’habitueàelle,avantdedécouvrirlavérité.Ilsladétesteraientsuffisammenttôt,ellequiincarnaitpourl’instantleursalut.

Pourtant,elleavaiteu lesentimentd’êtreutileetacceptée,etellen’avaitpurésisterà l’enviededonnersonavis.Elleavaittellementpeul’occasiondecontrôlersaviequ’elleressentaitunréelplaisiràprendredesdécisions,aussipetitessoient-elles.

Lorsqu’elle aperçut le petitHamish attachéprès des écuries, la languependant sous sa touffe depoils,ellesesentitunpeurassérénée.Ilaboyaenlavoyantapprocher,maisellesecontentades’asseoirsurunseauretournéàcôtédeluienleregardantd’unairsévère.

—Cen’estpastoiquicommandes,petitHamish!Jenetelaisseraipasmechasser.L’animalcessad’aboyeretpenchalatêtesurlecôté,commes’ilécoutaitcequ’elledisait.—Maintenant, si tuveuxquenous soyonsamis, tudois apprendreàneplusaboyerquand tume

vois.Elletenditlamainverslui,etillareniflaavecméfiance.Puisildétournaleregard,commes’ilne

s’intéressaitplusàelle,etelleenprofitapourluicaresserlesommetdelatête.Elle songea alors au propriétaire du chien et à ce que MmeWallace lui avait raconté sur lui.

Heureusement,Hugh n’avait pas entendu cette partie de leur conversation ! La gouvernante ne s’était,hélas,pasmontréetrès loquace.Elleneluiavaitpasapprisgrand-chose,hormisquelagrand-mèredeBrendan était une amie proche, et qu’ils avaient un très joli cottage dans le village.Cette informationréconfortaRiona car,même siHughn’avait pas reconnu l’enfant, aumoinsBrendannemanquait-il derien.Pourtant…était-ceainsiqueleschosesdevaientsepasser,alorsquetousleshabitantsduchâteauregardaientd’unairdésapprobateurtoutrapprochemententreBrendanetHugh?

Soudain,l’intéressépassaunetêteinquièteparlesgrandesportesdel’écurie.Enl’apercevant,soninquiétudes’évanouit.

—Bonaprès-midi,madame.—Bonjour,Brendan,répondit-elleensouriant.JepensequeHamishcommenceàm’apprécier.Ellefuttentéedecaresserdenouveaulechien,maiscederniersedétourna.—Ilvafalloirquejesoispatiente,ajouta-t-elletristement.Brendanfitunpetitsouriredetraversetsepassalebrassursonfrontcouvertdesueur.—Tutravaillesdur?Ilacquiesçaetditàvoixbasse:—Leresponsabledesécuriesapristrèsausérieuxcequemonsieuradit.Lesécuriesn’ontjamais

étéaussipropres.Ilregardaautourdeluicommepours’assurerquepersonnenepouvaitlesentendre.—Jesuisjeune,maismêmemoijesavaisqueleschosesn’étaientpasbienfaites.Seulement,jene

pouvaisriendire…—Jecomprends,fit-elled’unairsolennelenessayantdenepassourire.Ilsemblaitprendresontravailtellementausérieux!—Ilyaunautregarçond’écuriequiapprendlemétieravecmoi,poursuivit-ilenrougissant.Ilest

plusjeunequemoi,sibienquelorsqu’iln’apasfaitleschosescommeonnouslesademandéeslemaîtres’estfâchétrèsfortaprèsluiàl’idéequemonsieurpuisses’enrendrecompte.Biensûr,jenepouvaispaslelaisserfaire.J’aidoncditquec’étaitmafaute,enimaginantquemonsieursemontreraitplusclémentavecmoi.

Riona écarquilla les yeux en entendant sa réponse. Il était bien jeune, mais se pouvait-il qu’ilconnaisselavérité?

Ilsouritdoucement.—Jem’étaistrompé.J’aiétépunidelamêmefaçon,maiscelameconvient.

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Peut-êtrequelefaitd’êtretraitécommetouslesautresécartaitlessoupçonsquantàsafiliation?ToutencaressantHamish,qui semblait l’accepter avec réticence, elle comprit qu’ellenepouvait plusvivre sans en avoir le cœur net. Elle devait savoir ce qu’il en était. Elle avait aussi conscience desconséquencesimprévisiblesdecettedécision.

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Chapitre14

Ce soir-là,Riona croyait savoir comment elle allait affronterHugh,mais lorsqu’il entra dans sachambre,avecsonimmensestature,vêtudesonseulplaidnoiretrougenouélâchementàlataille,toussesplanss’évanouirent.Ilvenaitmanifestementdeprendreunbain,etlalueurd’unebriquedetourbe,quivenaittoutjustedes’enflammerdanslacheminée,sereflétaitsursapeauencorehumide.Aucunhommedesaconnaissancen’étaitaussiobsédéparlapropretéquelui,songea-t-elleenrougissant,tandisqu’ellese souvenait de l’agréable odeur de son corps lorsqu’elle s’était blottie sur ses genoux. Ses cheveuxnoirs,habituellementattachésenunequeue-de-cheval,tombaientenbouclessombressursesépaules.

Pourquois’était-elledétendueaussiaisémentdanssesbraslaveille,bercéeparsavoixaupointdenepluspenserqu’ellen’appartenaitpasàcetendroitetqu’il l’avaitenlevéecontresavolonté?Peuàpeu, elle commençait à oublier son ancienne vie, qui se résumait à des visites chez des ladies encompagniedeCat,àdesheurespasséesauchevetdeBronwynouàêtrelacousinelamoinsconvoitéependantlessoiréesetlesdînersauxquelselleétaitinvitée.EllenefaisaitpaslepoidsfaceàladotdeCat.Direque,pendanttoutcetemps,cettedotétaitdéjàpromiseauxMcCallum…Commentsononcleavait-ilréussiàgarderlesilenceaussilongtemps?

EnapercevantHugh,deboutdevantelle,lacordeàlamain,ellefutcontraintedeseconcentrerdenouveausurl’instantprésent.Ilnedisaitrien,secontentantdelafixeravecsesyeuxgrisquireflétaientparfois la colèreglacialede l’hiver, quibrillaientd’autres foisde l’éclat argentéde lapassion.Acemoment,sesprunellesluirappelaientlacouleurdel’argentenfusion.

Ilfallaitviteledistraire.Elleaussid’ailleurs.Ilyavaiturgencecar,àcetinstantprécis,elleavaitl’impressiond’êtreaspiréeparunevaguededésiretcraignaitdenepluspouvoiryrésister.

—J’ai…parléavecBrendanaujourd’hui,commença-t-elled’unevoixhésitante.Ilhaussalessourcilstandisquesonregardglissaitlentementsursoncorps.—J’aidesquestionsàvousposersurlui,ajouta-t-ellesuruntontoutsauffermeetdéterminé.—Vousn’avezcessédemerépéterquevousnevouliezpasêtremêlée,deprèsoudeloin,àcette

maisonouàmonpeuple.Tantquevousn’aurezpaschangéd’avisàcesujet,celanevousregardepas.Sesyeuxardentss’attardèrentsursabouche,sesseins,sescuisses,jusqu’àcequ’elleressenteleur

brûlure.Sapeausehérissa.Soncœurbattaitàtoutrompre.Soncorpsseconsumaitets’enflammait.Non,elle ne pouvait pas capituler aussi facilement. Elle secoua la tête en essayant de s’arracher à cettetorpeur.

— Vous… vous avez tellement de cicatrices, dit-elle en posant les yeux sur l’une d’elles,particulièrementmarquée,quiluibarraitlescôtes.Dites-moicommentcelaestarrivé.

L’ébauched’unsourire luiétira les lèvres—ellen’auraitmêmepasdûleregarderàcetendroit.Puisilluipritlamainetlaposasurlacicatrice.Elles’étonnadelasensationtroublantequis’empara

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d’elle.—Sheriffmuir,murmura-t-il.Ilpassadélicatementsondoigtd’avantenarrièrelelongdelaboursouflure,etellefrissonna.—UnAnglaisaessayédemetransperceravecsabaïonnette.Ilafallupresqueunmoispourquela

fièvreretombeetquejepuissemelever.Ellehumectaseslèvressèches.—Votreconvalescenceacertainementprisdesmois.Quevousontditlesmédecins?Ilignorasaquestion.Sanslâchersamain,ilfitglissersesdoigtssursontorse,jusqu’àlacicatrice

quiluibarraitlementon.—Uncoupdepoignardenm’entraînantavecmeshommes.Puisilpassaàsonbras.—La balle d’unmousquetonm’a effleuré lorsque j’avais quatorze ans. Nous étions en train de

récupérerdubétailquinousappartenaitet,bienquel’onm’aitdéfendudeparticiperàceraid,j’ysuisallé.

Ilfallaitqu’elletrouvequelquechoseàdire,mêmesisonregardétaitattirécommeunaimantparsesmusclespuissants.

—Sijecomprendsbien…vousavezvolévotrebétail?Ignorantunefoisencorelaquestion, ilfitglissersondoigt le longdesoncorps,etelleretintson

soufflelorsqu’ill’amenasouslesplisdesonplaid,letirantverslebasjusqu’àdécouvrirsahanche.Elletremblait à présent et elle savait qu’il le sentait, tout comme il savait que cen’était pasdepeur, plusaprèslamanièredontelleavaitréponduàsesbaisersetsescaresses,cesdernièresnuits.

—UnvoleuràEdimbourgaessayédedécoupermapocheavecunpeutropd’enthousiasme.Puisilfitglissersondoigtplusbas,sursacuisse.Ilsepenchapourl’aiderdanssonmouvement,

s’approchantsiprèsquesescheveuxluieffleurèrentlatête.Lorsqu’ellesentitlapeaunuedesajambeetqu’ilfitremontersamain,ellepoussaunpetitcri.—Hugh!Ilsourit.—Vousnevoulezpassavoiroùl’épéeadécoupémachair?Elle ne trouvait plus ses mots. Il serra très fort sa main pour la maintenir sur sa cuisse, puis

commençaàl’embrasserdanslecou.Ellefermalesyeuxenpoussantunsoupird’abandonetselaissaaller à savourer la douceur humide de ses lèvres. Il ouvrit ensuite son peignoir pour atteindre sondécolletéetlaissacourirsalangue.Ellerenversalatêteenarrièreets’agrippad’unemainàsesépaulesnuespournepass’effondrerà sespieds.Soudain,elle s’aperçutqu’ilne tenaitplus samainsoussonplaid,etpourtantellenel’avaitpasôtée.C’étaitellequis’yattardaitàprésent,savourantlachaleurdesapeau.Ellelaretirabrusquementetl’entenditrire.

—Asseyez-vous, jeune fille. Il faut que je vous attache avant d’essayer de vous convaincre ducontraire.

Elle se laissa tomber sur le lit, tout étourdie et presque déçue. Il n’aurait eu aucun mal à lapersuader de ne pas être attachée, mais elle préféra se mordre les lèvres plutôt que de l’avouer. Ilremontasonvêtementjusqu’auxgenouxpourdécouvrirseschevilles.Aprèsavoirnouélacorde,illevalentementlesyeuxauniveaudesesjambestremblantes.

—Sivousécartezjusteunpeulescuisses,jepourraivoirleparadis,dit-ild’unevoixdouce.Ellelesserrarapidement,etilfitdenouveauentendreunriredegorge.Ilneseredressapas.Ilrestaaccroupietcommençaàdéposerdesbaisersbrûlantssurseschevilles,

sesmollets,remontantprogressivementjusqu’àsescuisses.Ellefrémit,émuepartantdedélicatesse.Elleignoraitquesapeaupouvaits’embraseràchacunedesescaresses.Iln’essayapasdereleversachemisedenuit,maissecontentadefrottersajouecontresacuisse,avantdes’attardersursahanche.Enfin,ilse

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redressapourseplaceràcalifourchonsurelle.Auparavant,cegestel’auraiteffrayée,maisàprésentelleappréciait ce sentiment d’être une femme délicate et désirée. A travers ses vêtements, il déposa desbaisers sur sa hanche et son ventre, sur sa poitrine puis la pointe de son sein, où il s’attarda en latourmentantdesesbaiserslégers.Puisillamordilladoucement,luiarrachantuncri.

Ellesaisitsatêteentresesmains.—Hugh…s’ilvousplaît.Un désir aveugle s’était emparé d’elle, lui faisant oublier toutes les règles de bienséance. Elle

n’étaitplusmaîtressedesessens.S’ill’avaitdétachéepourplongerentresescuisses,ellel’auraitlaisséfaire,prêteàtoutpourapaisercettedouleursourdeaucreuxdesonventre.

Maisilneladétachapas.Ilglissasurlecôtéetcommençaàlacaresser.Ils’emparadesaboucheavecuneardeurquilatransporta,etelleluiréponditaveclamêmefougue.Salanguepartitàlarencontredelasiennepourl’exploreravecavidité.LesmainsdeHughsemblaientfairedesmiraclessursoncorps.Ses doigts glissaient sur ses seins, l’agaçaient, la caressaient jusqu’à ce qu’elle frémisse. Puis ilpoursuivitlentementsoncheminverslebasdesoncorps,etellel’imploraensilencedenepass’arrêter,mêmesiellenepouvaitpasledireavecdesmots.Ileffleuraalorsl’intérieurdesescuisses,etellelesécartaengémissant,autantquelacordeetsachemisedenuitleluipermettaient.Chacunedesescaressesdéclenchait en elle un plaisir aigu qui lui donnait envie d’en réclamer plus. Elle se contorsionna enhaletantet, lorsque labouchedeHughquitta lasiennepouraspirer leboutdesonsein,ellesentit soncorpsauborddugouffre.Ill’avaitéveilléeauplaisir,etjamaispluselleneseraitlamême.Ellefinitparbasculer,consuméeparunejouissanceinédite.

Interloquée, elle ouvrit les yeux.Hugh était assis à côté d’elle, un bras autour de sa taille. Il laregardait.Ellecrutqu’elleserait incapabledecroisersonregardsanssesentirgênée,mais iln’enfutrien.Ilss’étudièrentmutuellementcommesiquelquechoseavaitchangéentreeux.Enréalité,rienn’avaitchangé.Soudain,uneimmensetristesses’emparad’elle.Ellesecouvritlevisage,ravalantseslarmesdumieux qu’elle le put. Hugh ne disait rien, et elle ne pouvait lui donner aucune explication. Elle lelaisserait croire qu’elle n’était qu’une femme qui s’entêtait à vouloir choisir son mari, capable decontinueràluimentirpardépit.Ilnelaconnaissaitpas,mêmes’ilsavaitjouerdesoncorps.

Ilselaissaglisseràcôtéd’elleetlamanipulacommesielleétaitunepoupéedechiffonavantdesecalerderrièreelleetdelaserrercontrelui.Ellesentitsonérectiondanslebasdesondos,maisilnebougea pas. Il s’endormit avant elle, et elle regarda longuement le feumourir dans la cheminée en sedemandantcequ’ellepouvaitfairepournepastomberamoureusedel’hommequil’avaitenlevéeetquiétaitlefiancédesacousine.

***

Le lendemain, Hugh fut distrait toute la journée, alors qu’il aurait dû se concentrer sur lespréparatifsduconseildesgentlemen.Ilfallaitqu’illiselesrapportsdesonrégisseur,desontrésorieretdesonintendant,maischaquefoisqu’ilessayaitdes’ypenchersonespritleramenaitàRiona.

Riona,quiavaitdécouvertlesplaisirsd’êtreunefemmejusqu’àenpleurer.Ilsavaitquec’étaientdes larmesd’allégresse, commec’était sonvœu leplus cher.Mais elle se rebellait encore contre sonavenir,contre lui,et ilcommençaitàêtreàcourtd’idéespour lui faireaccepter l’inéluctable. Ilauraitaiméluidirequ’elleétaittêtueetaveugléeparsonbesoindedéciderdesadestinée,peut-êtrebienpourlapremièrefoisdesavie.

Maisellenepouvaitpaschangersonavenir.Nevoyait-ellepasque,malgrésonstatutdechef,cettemaisonseraitàelle?Quepouvaitdésirerdeplusunefemme?

Dès qu’elle aurait accepté son destin, il pourrait répondre à ses questions à propos deBrendan.Cette idée ramenasespensées sur le jeunegarçonquiavait acceptéaveccourage lamodestepunition

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destinéeàunautre.Sonattitudeavaitsuscitésonadmirationautantquesonexaspération.Sagrand-mèreavaitsul’éleveràmerveille.

Brendan connaissait-il la vérité sur leur lien de parenté ? Si non, comment était-il censé le luiapprendre?

Tout au long de la journée, les vendeurs ambulantsmontèrent leurs tentes dans la cour pour lesgentlemen et leurs épouses venus des contrées et des villages voisins. Vins, tissus délicats et soiesbrodéess’alignaientàcôtédesbijoux.L’atmosphèreétaitaussifestivequ’unefoiredeprintempsmais,aprèsledéjeuner,leshommess’installèrentdanslagrandesallepourtravaillersérieusement.

Hugh écouta les rapports de ses métayers sur ses propriétés, les taxes collectées ces dernièresannéesetlesprévisionssurlesrécoltesàvenir.Ensuite,illeurdonnadesexplicationsdétailléessurlestechniquesagricolesanglaisesqu’il souhaitaitadopter.Commedans les fermesvoisines,cetteannonceprovoquauntolléchezlespaysansquirechignaientàabandonnerleursvieilleshabitudes.

***

Rionarestadeboutàlesécouteraufonddelagrandesallelongtempsaprèsledépartdesfemmes,partiesrendrevisiteauxmarchandsambulantsouseretrouverpourcoudreetbavarder.Laplupartd’entreelless’exprimaientengaéliquemêmesiellesavaienteulagentillessedeparleranglaisensaprésence.Elles s’étaientmontrées très curieuses et lui avaient posé de nombreuses questions sur son éducationparmilesAnglais,oubliantquesamèreétaitanglaise.Quepouvait-elleleurdire?Lavérité?Non,celan’aurait fait que susciter leur méfiance. Elle était une Duff et, malgré l’amabilité de ces dames, elledécelaitchezellesuneréticenceetunscepticismeàsonégardchaquefoisqu’elleouvraitlabouche.

DonaldRosssetrouvaitégalementdanslasalle,carilsous-louaitunepetiteparcelledeterre.Elleveilla à prendre des nouvelles de sa mère et fut heureuse d’entendre que celle-ci avait retrouvé del’entrain.

Pendantleconseil,elleécoutaHughparler,maisnecompritquequelquesmotsépars.Elleéprouvaunecertainefrustrationàconnaîtrelelatinetlefrançais,maispasuntraîtremotdelalanguedesonpère.Pourquoines’enétait-ellepasaperçueplustôt?

LorsqueSamuelpassadevantelle,ellel’appelaetluidemanda:—Ya-t-ilquelquechosequejedevraissavoir?Sont-ilssiopposésauxidéesdeHughqu’ilsenont

l’air?SamuelenglobaduregardlasalleoùleshommesdiscutaientâprementdanslescoinsdèsqueHugh

faisaitunepause.—Toutsepassecommeprévu.Leschangementsnepeuventpasarriverenquinzejours,etillesait.

Ilsouhaitefairedesessaissurdesparcellesdeterrelaisséesàl’abandonsibienquel’annéeprochaine,àlamêmeépoque,lesgentlemenpourrontconstaterl’améliorationdesrendements.

—C’esttrèsastucieuxdesapart,convint-elleàcontrecœur.Samuelladévisageaavantdesecouerlatête.—Ai-jeentenduuneapprobationdansvotrebouche?Rionaseraidit.—Jepeuxapprouverquel’onaméliorelesrendementspouréviterquelesgensmeurentdefaim,

n’est-cepas?Celaneveutpasdirequej’approuveHugh.Hugh, l’homme qui avait pris le contrôle de son corps et parfois de son âme, l’homme qui était

capabledeluifaireperdrelatêted’unesimplecaresse.Siellen’avaitpaseulesjambesattachées,elleauraitmêmepucraindred’êtreenceinteàl’heurequ’ilétait.

Samuell’observaaveccuriosité,etelledétournalesyeux,incapabledesoutenirsonregard.

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—Ilafaituneautredéclaration,ajouta-t-il.Ilvapartirvisitertouteslesterresettouslesvillagessoussonautoritétrèsbientôt.Lesgentlemenluiouvrirontleursmaisonspourl’accueilliretpréparerontlesterrespourqu’illesinspecte.

Rionatentadecontenirsonexcitation.—Combiendetempssera-t-ilparti?—Etantdonnéqu’iladécidédevousemmener,cedétaila-t-ildel’importance?Ellesoupirabruyammentavantd’êtredistraitepardesapplaudissementsetdesacclamations.—Ilssontheureuxquenousnousinvitionschezeux?— C’est un grand honneur d’héberger le laird, même si, d’ici là, ils reviendront assister à la

cérémonieofficiellequiproclameraHughchefdesMcCallum.—Simpleformalité,dit-elleavecungestedédaigneuxdelamain.—Ils’agitd’unrituelimportantetsacréquiexisteauseindenotreclandepuiscinqcentsans.—Est-celaraisonpourlaquelleilsapplaudissent?—Non,soupira-t-il.Alasdairvientd’êtrenomméchefdeguerre.Rionasedressasurlapointedespieds,heureusequelaplupartdeshommessoienttoujoursassis

surlesbancsenfacedel’estrade.Desonposted’observation,ellevoyaitHughlamainsurl’épauledesonfrèreadoptif.Alasdairparaissaitfiermaissurpris.Acôtéd’eux,Dermotaffichaituneneutralitédepierre.

—J’espèrequ’iln’yapastropdegentlemendéçus,dit-elleàvoixbasse.Dermotsemblel’être…—Vousvousensouciez?demandaSamuel.—Jen’aimepaslesconflits.Ilspourraientéclaboussermonclan,n’est-cepas?—JesuisheureuxquelasécuritédesDuffvousintéresse,déclara-t-il,letonteintéd’ironie.Rionaeutenviedeluidécocheruncoupdecoude,maisseravisa.ElleaperçutalorsDermotquise

penchaitversunhommeàsadroiteet,ensemble,ilsobservèrentHughd’unairimpassible.—Dermotpourraitcauserbeaucoupd’ennuiss’illevoulait,murmura-t-elle.Samuelluidécochadenouveauunregardsurpris.Lefaitétaitque,bienmalgréelle,ellesefaisait

du souci. Il fallait à tout prix qu’elle mette ses sentiments de côté et qu’elle se rappelle que lemécontentementdeDermotreprésentaitpeut-êtrepourelleunechancedes’enfuir.DévoilerlavéritésursonenlèvementchangeraitcertainementlafaçondontHughcommandaitsonclan,maiselleessayadenepasypenser.Pourtant,elleavaitdeplusenplusl’impressiond’agirentraîtrevis-à-visdeHugh,cequiétaitridiculepuisquec’étaitellequiavaitétékidnappée!

Samuel lui traduisit la dernière déclaration de Hugh sur l’organisation d’une grande chasse aubénéficeduclan.Ilyeutdenouvellesacclamations.

Les convives burent ensuite du whisky jusque tard dans la nuit, tandis que les musiciensdivertissaientlafoule.Hughlapersuadadegoûterleurprécieuxwhisky,ettousleshommesrugirentenvoyantsonexpressionlorsqu’elleavalal’ignoblebreuvage.L’alcoolluiréchauffalesentrailles,etcefutlaseulechosepositivequ’elletrouvaàdire.

Elleseretirabienavantquelesgentlemenquittentlagrandesalleetelleentenditlongtempsleurschantsd’ivrognes.EllenedormitpastrèsbienetsedemandacommentelleréagiraitsiHughseprésentaitàelleivrepourl’attacher.Maisilnevintpaslaretrouverdanssachambrecesoir-là.

Beaucoupdesconvives restèrentdeuxnuitsdeplusetaccaparèrentHugh tard le soir.Etpuis,aumomentoùRionaenavaitassezdefairebonnefigure,decoudreaveclesdamesetdesesentirexclueàcausedelalangue,lesinvitéss’enallèrent.Ellecrutalorsqu’elleallaitpouvoirrespirer,maisd’autresvisiteursseprésentèrent.

Lamère et la sœur deHugh avaient été aperçues près du lochVoil et se dirigeaient vers LarigCastle.Ilsdînaienttouslesdeuxlorsqu’ilsreçurentlanouvelle.Ilséchangèrentunregard.CeluideHughétaitremplid’incertitude.Asagrandesurprise,ilnecherchaitpasàcachersoninquiétude.Soudain,elle

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euthâtederencontrerlafemmequil’avaitéloignédesonivrognedepère,toutenluiinspirantunetelleantipathie.

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Chapitre15

Deboutdans lacour,Hughattendait l’arrivéedesa familleencompagniedeRiona,quipeinait àcacher sa curiosité. Lui-mêmemasquait toujours ses émotions,maisRiona semblait pouvoir percer lemasquequ’ilaffichaitdepuisbienlongtemps.Comprenait-ellesoninquiétude,nonvis-à-visdeMaggie,biensûr,maisdesamère?

Unedemi-douzainedecavaliersàpeinepassaenfinparlaguérite,cequilecontrariaauplushautpoint.IlnecessaitderépéteràMaggiequelevoyagedepuisEdimbourg,quiduraitplusieursjours,étaitpleindedangersetd’hommesquirêvaientdekidnapperdesfemmesriches…

Mais…n’était-ilpas, luiaussi,unkidnappeurdefemmes?D’autantquel’argent tenaitégalementunegrandepartdanscetenlèvement.Saufqu’ilétaitdanssonbondroit,tenta-t-ildeseconvaincre.

Rionan’avaitrienditàpersonnedescirconstancesdesonarrivéeàLarigCastle,etilsedemandasicelaallaitchangeraveclapressiondesafamille.Ellenelesavaitsûrementpas,maissamèren’avaitplusaucunpouvoirsurlui.Maggie,c’étaitautrechose…Ilavaitunpetitfaiblepoursajeunesœur,qu’ilavait protégée des accès de colère de son père lorsque ce dernier était ivre. Au cours de ces septdernières années, il avait passé le plus clair de son temps à Londres et avait entretenu unecorrespondanceassidueavecelle.Elleétaitcellequiluimanquaitleplus.

— Depuis quand n’avez-vous pas revu votre famille ? demanda Riona en regardant les gardesdescendredechevalpouraiderlesdames.

—Depuisledébutdel’été,aprèslamortdemonpère.Rionaserembrunit.—Oui,biensûr.Excusez-moi.—Vousn’avezpasbesoindevousexcuser,répondit-ilenfronçantlessourcils.—Lorsquenoussommesarrivés,j’aipenséquec’étaitlapremièrefoisquevousreveniezàLarig

Castledepuisdesannées.—C’esteffectivementlecas.Jen’étaispasprésentpourl’enterrement,maisj’aivumasœuretma

mèreàEdimbourgplustard.Ilrestaitrarementtrèslongtempsdanslamêmepiècequesamère.Aumoins,ellen’avaitpasjoué

auxveuveséplorées,secontentantd’afficherunairsolennelparrespectpourlui,l’héritier.IlfinitparsourireenvoyantMaggiearriverencourantverslui.Illasoulevaetlaserrasifortdans

sesbrasqu’ellegrognadedouleur.—Tum’écraseslescôtes,monfrère!s’écria-t-elleengaélique.Lorsqu’illaposaàterre,ellesouritàRiona.—LadyCatriona,commejesuisheureusedevousrencontrerenfin!s’écria-t-elle.

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Devantl’airconfusdeRiona,ellerépétalamêmephraseenanglais,puislapritimpulsivementdanssesbras.Hughétaitravidevoirsasœurheureuse.IlyavaitquelquesannéesqueMaggien’étaitpluslajeunefilleinsouciantedesessouvenirs.Elleavaiteuàgérerdesproblèmesdifficilesàimaginer.

Elleavaitattachéseslongscheveuxnoirsetondulésaubasdesanuque,sousunchapeaudepaillecrânementnouésoussonmentonàl’aided’unruban.Elleportaitunchâlepourseprotégerdel’airfraisdesHighlandssurunerobed’équitationvertfoncé.

— Lady Catriona, permettez-moi de vous présenter ma sœur, Maggie McCallum. Maggie, mafiancée.

—S’ilvousplaît,appelez-moiRiona,réponditRionaavecunsourirepoli.Elles se prirent les mains, et Hugh se surprit à espérer que Riona trouverait en elle une amie,

quelqu’unquipuissel’aideràcomprendrequelaviedel’époused’unchefdesHighlandsn’étaitpassiterrible.

Enrevanche,ilpriaitpourqu’elleneconfiepastoutàsasœur…Samères’approchaenfind’euxàpaslents.Elleportaitunecoiffeendentellesursescheveuxgriset

unerobedecouleursombre,commesielleétaitencoreendeuildel’hommequiavaitdétruitleurfamille.Hughfitlesprésentations,etRionas’inclinaenuneéléganterévérence.—Mère,jevousprésenteladyCatrionaDuff.Riona,voicimamère,ladyMcCallum.—LadyRiona,ditsamèred’unevoixformelle,malgrésesyeuxqui ladévoraientcommesielle

étaitunebouéedesauvetageaccrochéeàlui.Maisriennepouvaitlesauver,pasaprèstouslessecretsettouslesmensongesdontilavaitétéla

victime.—Ainsi,tuasenfinrencontrétafiancée,ditMaggieendétaillantRionadelatêteauxpieds.Cela

faittrèslongtempsqu’ilvousattend,madame.Rionarougit,puisregardaHughavecuneinquiétudedansleregardqu’ilespéraitêtreleseulàvoir.—Comments’estpasséevotrepremièrerencontre?continuaMaggie.Elleadûêtretendue.Hughfuttentéd’interveniretderépondreàsaplace,habituéqu’ilétaitàtoutcontrôler,maisilse

contentadesourireàRiona.—C’étaiteneffettrèstendu,répondit-elleenfin.Je…j’ignoraistoutdececontratdemariage.LesouriredeMaggies’évanouit.—Oh!c’estterriblequevotrefamillenevousaitpaspréparéeàcela!Puisellesetournaverslui.—Maisvousêtesici,avecnous,àLarigCastle.J’espèrequevousavezcomprisàquelpointvous

avezdelachance.Rionasesentitblêmir.De lachancedesesentirdéchiréeenpermanence?Denemêmepasêtre

capabledehaïrsonravisseur?Elle tenait là l’occasion rêvée demettreHugh dans l’embarras devant sa famille,mais elle s’en

sentaitincapable.Quedevait-ellecomprendre?Quesignifiaientlessentimentscroissantsqu’elleressentaitpourlui?Elle préféra se dire qu’il n’était pas très sagede se faire des ennemies, car les deux femmesne

manqueraient pas de se ranger du côté de Hugh. Autant profiter de cette occasion pour découvrir lemystèrequientouraitBrendanetl’aidersipossible.LafamilledeHughdevaitconnaîtrelavérité.

Hughluifitsignedemonterlapremièrelesmarchesendirectiondelagrandesalle.Iloffritensuitelebrasàsamèreetàsasœuret luiemboîta lepas.Rionaregardapar-dessussonépauleet levitquiparlaitavecMaggie,tandisquesamèredemeuraitsilencieuseetpâle.

C’étaitdoncelle, lafemmequiavaitessayédelesauverdescomportementsviolentsdesonmarialcoolique?Cetacteneméritait-ilpasunecertaineproximitéou,dumoins,delaloyautédelapartde

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Hugh?D’aprèscequ’elleavaitpuconstater,cen’étaitmanifestementpaslecas.Jamaisellenel’avaitvusifroidàl’égardd’unepersonnedesonpropreclan.Etcettefemmeétaitsamère!

Danslagrandesalle,denouveauxplatschaudslesattendaient.Ilsprirentplacesurl’estradepourmangersousl’œilscrutateurdesgentlemenetdesservantes.MaggieétaitassiseàgauchedeHughetladyMcCallumàdroitedeRiona.Hughpassaunegrandepartiedurepasàbavarderavecsasœurdesamisqu’ilsavaientencommunàEdimbourg. Ils’exprimaitenanglais,essayantde lafaireparticiper,chosequeRionaapprécia,surtoutenprésencedesamèrequigardaitlesilenceetsetenaitàl’écart.Maisellenesesentaitpascapabledel’ignorer.

—LadyMcCallum,dit-elle,jesuisdésoléepourvotredeuil.LadyMcCallumbattitlespaupières.Elleavaitlesyeuxgris,elleaussi,grismaislas,alorsqueles

prunellesdesonfilsétaientsivives.—Mondeuil?Machère,sivousvoulezmonavis,McCallumn’estpasmortassezvite!Rionaeneutlesoufflecoupé.HughetMaggie,eux,contemplèrentleurmèred’unœilimpassible.

Elle remarqua alorsque lesyeuxdeMaggie étaient dedeux couleursdifférentes, commeHugh les luiavaitdécrits.L’unétaitbleuetl’autrevert.Lerésultatétait…déconcertantetintéressant.

HughetMaggiereprirentleurconversation.—Oh!repritRiona,malàl’aise.Hughm’aditqu’ilavaitrencontrédesdifficultésavecsonpèreet

quevouslesaviezemmenés,Maggieetlui,pourlesprotéger.C’étaittrèscourageuxdevotrepart.LadyMcCallumlaregardadroitdanslesyeuxcettefois.—Merci,murmura-t-elleavantdepencherlatêteverssonassietteetdeprendreunepetitebouchée

desonplat.Elleétaittrèsminceetsiellenemangeaitpasplusquecela…Maisneportait-ellepasledeuilde

son époux ?Ou bien était-ce le deuil d’autre chose ? se demandaRiona en observantHugh d’unœilinquisiteur.Ellenecroisaquesonregardimpavide.

Pendantquel’onpréparaitleschambresdesnouveauxvenus,Rionacompritquelasienneavaitétéautrefois cellede ladyMcCallum.Hughemmena samèreet sa sœurdans son salonprivé.Maintenantqu’ilsavaientquittélagrandesalle,ilparaissaitplusdétenduetmontraunefacetteenjouée,mêmetendredesapersonnalité,quitémoignaitàquelpointilaimaitsasœur.

Pendantcetemps,leurmèresetenaitàl’écartetregardaitparlafenêtre.Malgré elle, et cédant à la curiosité, Riona partit la rejoindre. Elle lui proposa un cerceau de

broderie,maiscettedernièredéclinasonoffre.—Cevoyagem’aépuisée,dit-elled’unevoixcalme.Maisjevousremercie.—JesuissûrequeMmeWallacepréparevotrechambreaussivitequepossible.RionaentrepritdebroderunechemisedeHughenpensantàsaproprefamilleetà l’imagequ’ils

pouvaient renvoyer. A l’instar deHugh et deMaggie, elle se sentait proche de sa sœur,mais de sesparents…c’étaituneautreaffaire.

—Comments’estpassévotrevoyagedansleNord,Riona?demandaMaggie.—Je l’ai trouvétrès long,mêmesivotrefrèreavaitprévuunevoiturepourunegrandepartiedu

trajet.ElleévitadélibérémentleregarddeHugh.—Une voiture, sur ces routes ? s’étonnaMaggie en haussant les épaules. Je préfère voyager à

cheval!—Tun’auraispasditlamêmechosesituavaisétésurprisepardesorages!luifitremarquerHugh.—C’estvrai,convintMaggie,puiselleajoutaensetournantdenouveauverselle:nousavonsdû

nousrencontrerquandnousétionsenfants,carjemesouvienstrèsbiendevotrefrère.Ilyavaitunecertainenervositédanssavoix,etRionaneputs’empêcherdepenserauxMcCallum

etàleurssecrets.LeregardétrangedeMaggiesemblaitvouloirlapercerjusqu’aufonddesonâmeetlui

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procuraunsentimentdemalaise.—JesuisrarementvenueenEcosse,dit-elle.Owen,quiestl’héritier,yestvenuplussouventque

moiaveclecomte.Mais il ne s’agissait ni de son frère ni de son père. Elle se sentit à son tour tendue, prenant

subitement conscience qu’elle aussi avait ses secrets. Elle aurait aimé pouvoir se confier, mais laprudencel’enempêcha.Elleétaitl’ennemie,ici.Lorsquetouss’apercevraientqueHughs’étaittrompédefemme…

—JesuiscurieusedesavoircommentvousvousêtesrencontrésavecOwen,étantdonnéquenosclansn’ontpastoujoursétédanslesmeilleurstermes.

MaggieetHughéchangèrentunregardénigmatique.—J’aiessayédemelierd’amitiéaveclacomtesse,expliqualadyMcCallum.Pourlebiendenos

clans.C’estd’ailleurspourcetteraisonquevotrecontratdemariageaétéscellé.ElledécochaunregardinquietàHugh,commesielles’attendaitàcequ’ilproteste.Aunmomentdesavie,ilavaitvouluchoisiruneautrefiancée,etcemalgrélecontratdemariage,

sesouvintRiona.Etait-celaraisonpourlaquelleilnes’entendaitpasavecsamère?—Quiaeul’idéedestipulerquelesterresservantàfabriquerlewhiskydevaientêtrepartagées?

demandaRiona.—Sanscetteclause, iln’yauraitpaseudecontrat, réponditHughsèchement.Votrepèren’aurait

jamaisproposésafilleetsadotàunMcCallumsansuneoffreimportanteenretour.Partagercesterrespendanttoutescesannéesaconsidérablementaltérénotrecapacitéàtirerprofitduwhisky.Maisvous,lesDuff,avezpuélaborervotreproprerecetteetavezréussibienau-delàdevosespérances.

—Cemariagen’estqu’unéchangedebiens,n’est-cepas?répliqua-t-elled’unevoixamère.MaggieetladyMcCallumlaregardèrentunpeutropattentivement.—Leschosesn’ontpasété facilespourRiona,expliquaHugh.ElleestuneDuff,maiselleaété

éduquéepourdésavouerlepaysdesesancêtres,dontelleneparlemêmepaslalangue.Imaginez-vousseule au sein d’un autre clan, ne connaissant personne, après avoir ignoré toute votre vie que votrefamille vous avait offerte enmariage pour régler une vieille querelle. Elle a été éloignée de tout cequ’elleconnaît,detoutcequ’elleimaginaitêtresonavenir.

Rionaclignarapidementdespaupièrespourretenirdeslarmesqu’ellerefusaitdeverser.MaiselleneputdétachersonregarddeceluideHugh.

— Eh bien, il semblerait que vous ayez commencé à tisser des liens, dit Maggie d’une voixhésitante.Aumoins,vousn’êtespasremplisdehainel’unpourl’autre.

Rionasouritfaiblement,puispenchalatêtesursabroderie.Non,ellenedétestaitpasHugh,mêmesicelaluiétaitarrivédelefaire.Elles’inquiétaitplutôtd’avoirtropdesentimentspourcethommedanscettesituationimpossible…

—Avez-vousfixéladatedumariage?demandaladyMcCallum.—Pasencore,répondittrèsviteHugh.—Mais ladyRiona loge dans tes appartements, ajouta samère, l’air confus. Est-ce unmariage

d’essai?—Non,ditRionafermement.—Oh!LadyMcCallumcontinuaderegarderdurementsonfils,quil’ignora.Une voixmalicieuse incita Riona à se demander quelle aurait été leur réaction, si elles avaient

apprisqueHughl’attachait…Bientôt, MmeWallace vint chercher leurs invitées pour les accompagner dans leur chambre, et

RionarestaseuleavecHugh.Ilsetenaitdeboutprèsdelafenêtre,lesmainsdansledos.Ellel’imaginaitleregardperdudanslevague.

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—J’apprécie lagentillessequevousavezmanifestéeà l’égarddemamère,maisquin’étaitpasvraimentnécessaire,dit-ilbrusquement.

Rionaleregardafixement.—Jenesuispasaveugle.J’airemarquéquevousaviezdesproblèmesavecelle,maiscenesont

paslesmiens.Onnem’apaséduquéeàmanquerderespectauxgenssansraison.Biensûr,sivousm’endonniez…

—Vousêtesentraindemedirequevousallezdevenirmonépouse?répliqua-t-il.Ilsseretrouvaientdenouveaudansleurimpasse.

***

Aprèsledîner,lebardeduclanchantaunelongueballadepourcélébrerlepassédesMcCallum.Samère s’étant retirée, Hugh eut tout le loisir de s’asseoir près de sa sœur et de se réjouir de sonenthousiasme,tandisqu’ilsécoutaientlavieillechanson.Detempsentemps,ilregardaitendirectiondeRiona,assiseàcôtédeDermot.Cedernierétaitmanifestementoccupéàluitraduirelesvers,maiscelanel’aidapasàsesentirplusserein.

MaggieobservaàsontourRionaetDermot,puissetournaverslui.—Quelquechosetedérange?demanda-t-elle.—Non,riendutout.—EtantdonnéqueDermotestunvieuxcamaradeetaujourd’huiletanist,jem’attendaisplutôtàte

voir sourire et non froncer les sourcils.Ou bien dois-je comprendre que ce regard noir est destiné àRiona?

—Quepenses-tud’elle?demanda-t-ilenignorantsaquestion.Maggierelevalatête.— Je n’ai parlé avec elle qu’une seule fois et je n’ai aucun souvenir d’elle enfant, alors que je

devraisenavoir,sicequemèrem’aditestbienvrai.—Maiselleprétendqu’ellen’estvenuequerarementenEcosse.—Prétend?Tunelacroisdoncpas?—Jemesuismalexprimé.Jesavaisavantd’allerlachercherenAngleterrequ’elleétaitrarement

venueenEcosse.Jevoulaissavoiràquoim’attendrefaceaucomted’Aberfoyle.—Ilétaiteneffetplussagedesepréparer,répondit-elled’unevoixsongeuse,toutencontinuantde

l’observerattentivement.HughregardadenouveauRionaavantdedemanderàsasœur:—Est-cequetu…voisquelquechosesurelle?L’airouvertetjoyeuxdeMaggies’évanouitsoudain,commeunelampequel’onéteint.—Jenefaispluscela,Hugh.Jetel’aidit.—Tul’asdit,eneffet,mais…qu’as-tufaitdetoninstinct,alors?—Moninstinct?répondit-ellesèchementavecunsourireforcé.Unhommeadel’instinct,maisune

femmea…del’intuition.—Donc,tuinsinuesquetuaslamêmeintuitionquen’importequellefemme?—Hugh,nefaispasça,dit-elleenbaissantleton.Tusaisquejerefusecedonétrangequim’aété

donné.—Avant,tudisaisqu’ils’agissaitd’undonduciel.—Maisilm’afaitdumalbientropsouvent.C’estdevenuunemalédiction.J’aitrouvéunmoyende

l’ignorer et d’éloigner demoi les rêves. Je ne suis plus ennuyéepar des impressions et des émotionstroublantesfinalementinutiles.

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—Pas toujours inutiles.Souviens-toi de cepetit garçon.Tout lemonde croyait qu’il était tombédanslelacetqu’ils’étaitnoyé.Toi, tusavaisqu’iln’enétaitrien.Tuaspris la têtedugroupequil’afinalementretrouvé,recroquevillésousunescarpementrocheux.

Sesjouess’empourprèrenttandisqu’ellesoupiraitdoucement.—Ilsauraientcontinué leurs recherchessansmoi.Sesparentsétaientdésespérésetn’étaientpas

prêtsàaccepterqu’ilsoitmort.—C’étaitl’hiver,ets’ilétaitrestédehorstoutelanuit…Illaissamourirsesparoles,maisMaggieneparaissaitpassoulagée.—C’étaituncasisolé,Hugh.Laplupartdutemps,mesrêvesm’effrayaient.Etpourquoi?Leplus

souvent, j’avais le sentiment de n’aider personne et, tout ce que je recevais en retour, c’étaient desregardsméfiantsetdesgensquim’évitaientcommesij’avaislemauvaisœil.

—Tunousassouventéloignésdenotrepèrebienavantquesescrisess’aggraventquandilavaitbu.Ellehaussalesépaules.—Cen’étaitpasdifficilededevineràquelmomentcelarisquaitd’arriver.Iln’étaitpasvraiment

subtil.—Jen’aimepastevoirdénigrertesdons.—Cen’estpascequejefais.J’essaiejusted’oublieruneépoqueoùjecroyaisquej’étaismieux

quelesautres,oùmonarroganceétaittellequejemepensaislaseuleàquiDieuavaitaccordéundon.—Tuaffirmesquenousavonstousundonettuaspeut-êtreraison,maisletien…—Çasuffit,Hugh.Jeneseraiplusunevoyanteetpluspersonnenemeregarderacommeunoiseau

demauvaisaugure.—Donc,tun’asriensentiquandtuasrencontréRiona?Ilobservaattentivementsasœuretleregardétrangequ’elleposasursafiancée.—Non,riendutout.Etjen’aijamais«senti»quoiquecesoit.J’aieudesvisions,enrêves.Ilpréféraneplusinsister,pourl’instant.—Tul’asinstalléedansl’anciennechambredemère?demanda-t-ellesanscachersacuriosité.—Rionaestmafiancéeetméritedelogerdanslameilleurechambreduchâteau.—Oùtupeuxl’avoirfacilementsouslamain…Cetteconclusionétaitévidenteetn’étaitcertainementpaslerésultatd’unevision.—Tuasdûfairebeaucoupd’effortspourlaconquérir?demandaMaggied’unairtaquin.Ellene

s’estpaspâméeenvoyanttonbeauvisage?Ilpritunelonguegorgéedewhiskyetfitlagrimace.—C’estunefemmetrèstêtue.Tusaiscommentj’airéagi,quandj’aiapprisquejenepouvaispas

choisirmafiancée.—Tuasfaillitefairetuer,àplusieursreprises.—Ilafalluqu’elledigèrelanouvelle.—Ellenes’estdoncpasfaitmalenessayantdes’enfuir?Illançaunregardétonnéàsasœurquigloussa.—Jenecroispasquetoutestparfait,Hugh,etjen’aipasbesoind’êtreunevoyantepourlesavoir.—J’aiélaboréunplanquisemblefonctionner.—Etquelest-il?Jepourraisenavoirbesoinàmespropresfins,unjour.—Non,jenecroispas.Ils’étaitexprimédesavoixdechef,oubliantl’espaced’uninstantàquiilparlait.—Tumedisnon,àmoi?Quepeux-tubienfairequejenepuissepasfaireàmontour?—Jedorsavecelleenl’attachant.Maggie s’étrangla en buvant son vin et toussa, attirant sur elle tous les regards des personnes

attablées.

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—Voulez-vous que je vous fasse porter autre chose à boire, mademoiselle Maggie ? demandaRiona.

—S’ilvousplaît,appelez-moiMaggie.Non,j’aisimplementavalédetravers.HughremarquaquesasœurétaitincapabledecroiserleregarddeRiona.—Tuestouterouge.Sijamaistutemetsàrire…,laprévintHugh.—Non,jen’enferairien.Mais…laisse-moiquelquesinstants.Ellebutuneautregorgéedevin,pluspetitecettefois,puiss’essuyalesyeux.—Oh!Hugh,tumefaistoujoursrire!—C’estuneaffairetrèssérieuse,Maggie.Rionaetmoinenousconnaissonspas,et jepassemes

journéesàapprendreàdevenirchef,danslamesureoùpères’estaccrochéaupouvoirjusqu’àlafin.—N’oubliepasquetun’étaispaslànonplus.Pasàcausedetoi,biensûr,maisdemère.Ilsserembrunirentuninstant,puisilcroisadenouveauleregardétrangedesasœur.—Rionaetmoin’avonspasdetempsàpasserensemble,etj’aipenséque…Attachersafiancéeest

unevieillecoutume…Pourquoinepourrais-jepasm’enservirsiriend’autrenesemblefonctionner?Maggiesepenchaversluietdemandaavecenthousiasme:—Etçaafonctionné?Hughseraclalagorge,malàl’aise.—Lacordevousaideàparlerplusqu’àvousembrasser?—Ehbien, en fait, nouspouvonsnous embrasser.Nousnepouvons simplementpas…C’est une

discussionbeaucouptropdélicatepourl’avoiravecsasœur!protesta-t-il.—Mais c’est quelque choseque je devrais permettre àmon fiancé si je décidais un jourdeme

marier?—Pasnécessairement…Ellehaussalessourcilsavecintérêt.—Vraiment?Tudisquecettepratiqueestbonnepourtoi,maispaspourmoi?—Nousnedevrionspasenparler.Ils’agitd’uneaffaireprivée.Maggieétouffasonrirederrièresamain,etRionalesregardaavecintérêt.Illagratifiad’unpetit

signedetêteetnes’inquiétapasdelavoirreprendresaconversationavecDermot.Ilespéraitquesasœurseserviraitdesondonpour luiconfirmerqu’ilavait fait lebonchoixen

courtisantRiona.Alaplace,ilnepouvaitsefierqu’àsonproprejugementets’ilétaitdanslevrai…Iln’arrêteraitpasd’attachersafiancée.Ilypensait toutelajournéeetimaginaitcequ’ilallait lui

faire,etcommentelleallaitluirépondre.Ilsesentaitcommeunadolescentrêvantdesonpremieramour.MaisRionan’étaitpaslapremièrefemmequ’ilavaitvouluépouser,etilrefusaitqueleurhistoire

setermineaussimalquelapremière.

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Chapitre16

LorsqueHugh vint la rejoindre dans sa chambre, Riona se dit qu’elle était prête. Elle avait unemultitudedequestionsàluiposer,mêmesiellesavaitquecen’étaitqu’unefaçondefairediversion.Elleavaitpassé lasoiréeà l’observeravecsasœurd’unœil fasciné.Jamaisellene l’avaitvusi loquace,joyeux et expressif. Il lui était toujours apparu comme un homme très réservé et habitué à cacher sesémotions.Etc’étaitsansdouteencorevrai,maissouslasurfaceilétaitquelqu’unquiavaitsurire,avaitétéunexcellentfrère,quisavaittraitersamèreavecrespect,mêmes’ilétaitclairqu’unévénementétaitvenumodifierleursrelations.

Réfléchiràtoutcelal’avaitaidéeàoublierladernièrefoisoùill’avaitattachée,maiscetoublineduraitjamaistrèslongtemps.Soncorpsselanguissaitdevivredenouveaucetteexpérience.Chaquenuitoù les gentlemen avaient accaparé Hugh, elle était restée éveillée, regrettant qu’il ne vienne pas larejoindre.Elleavait l’impressionhonteused’êtreunedévergondée,uneperverse, l’impressiond’avoirperdu labatailleavecsaconscience.Etcelanepouvaitque la rendremalheureuse,car jamaiselleneseraitl’épousedeHugh.

Lorsqu’ilseprésentaàelle,toutessesbonnesrésolutionss’évanouirent,etledésirluiembrasalesentraillesaupointdelafairetrembler.Illacontemplad’unœilaffamé,commeprêtàladévorer.Commedansunrêve,iltraversalapièceets’avançaverselleavantd’ôtersachemiseetdelalaissertomberausol.Lavuedesonlargetorseluicoupalesouffle.Ilavaitremplacésonkiltparuneculotte,cequiétaitplussûr.Maiselleaussidevaitfairepreuvedeprudence.

—Votresœurmeplaît,dit-elled’unevoixjoyeuseetunpeuhachée.Ils’arrêtaàquelquescentimètresdulit,etsonregarddebraises’éteignit.—Comment?Savoixparaissait aussi entrecoupéeque la sienne, cequi la rasséréna. Il fallaitqu’ellegarde le

contrôle d’elle-même, surtout en le voyant aussi troublé. Car il voulait qu’elle s’abandonne à lui etqu’ellerefuselacorde,pourfaired’ellesafemmeàtraversunmariaged’essai.

—EnvousvoyantavecMaggie,j’aieulesentimentquevousaveztoujoursététrèsproches.—C’estvrai.Vousavezunesœur,voussavezcequec’est.Jeferaisn’importequoipourlamienne.—Vousêtes-vousaidésàévitervotrepère,lorsqu’ilétaitivre?Hugh fronça les sourcils, et la confusion dans son regard fut bientôt remplacée par de la

consternation.—Evidemment!Ilétaitdemondevoirdelaprotéger.Pèren’ajamaisessayédelabattremais…—Vouscraigniezqu’illefasse,carilvousbattait.Ilneréponditpas.—Vousl’avezfaitpardevoir?

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Ilpritunairsoucieux.—Biensûrquenon.Jel’aimais.—Danscecas,voussavezàquelpointl’amourestimportantetàquelpointilestdifficiledese

mariersanséprouvercesentiment.Illevalesyeuxaucielenpassantlamaindansseslongscheveux.—Riona,nousn’avonspaseuassezdetempspourapprendreànousconnaître…—Etnousn’enavonstoujourspas,Hugh.Jenepeuxpasvousépouseretjenedeviendraipasvotre

maîtresse.Pourtant,c’estladirectionqueprendnotre…relation.Illaregardafixement,l’airimpénétrable,commes’ilvoulaitcontinueràluicachersessentiments.—Votresœuradesyeuxfascinants.Lesgenssuperstitieuxlaregardent-ilsavecméfiance?Ilouvrit labouchepuis laferma,avantde lui tourner ledosetdesortirde lachambreenfaisant

claquerlaportederrièrelui.Rionasejetasursonlitetsecouvritlevisagedesesmains.Uneimmensedéceptionl’envahit,et

ellefutsurlepointd’allerlerejoindre.Mais,siellelefaisait,elleseraitincapabledeluirésister.Ellepouvaittomberenceinteet,lorsquelavéritééclaterait,elleresteraitseule,commeAgnès.

Non,ellen’auraitpasdemari,pasd’enfants.Ledeuildecetteviequ’ellenepouvaitpasavoirétaitcequ’ilyavaitdemieuxpourelle.Pourquoidiableseslarmescontinuaient-ellesdecouler,danscecas?

***

Comme convenu,Hugh partit à la chasse en compagnie de ses hommes enmilieu dematinée, lelendemain,mêmes’ildéploraitmanifestementquittersasœurjusteaprèssonarrivée.RionasetenaitàcôtédeMaggieetregardaitlegroupedecavalierstraverserlacouràpaslents.DermotetSamuelétaientrestés au château avec les hommes plus vieux, mais aucun ne paraissait satisfait de la situation. Enrevanche,AlasdairaccompagnaitHugh,etRionaespéraitqu’ilsredeviendraientamiscommeautrefois.

Hughlessalua,maisneleursouritpas.Illuidécochaenrevancheunregardperçant,lamettantainsiengardedenepaschercheràs’enfuir.Ellesecontentadereleverlementonetdeluirenvoyerunregardfroid.

Lerestedelajournée,ellefutmonopoliséeparMaggie,quiparaissaitraviedesavoirquesonfrèreallaitenfinsemarier.Rionanetrouvapasl’occasiondeprendreDermotàpartpouressayerdegagnersonestime.EllecraignaitaussiqueMaggieinterprètemalsadémarche.Ellen’auraitpasdûs’ensoucier,pourtant,étantdonnéquelavéritéfiniraitparéclater,etqueMaggienepourraitquesesentirblessée…Malgrétout,elleavaitl’impressiond’êtreunelâche.

LadyMcCallum,quantàelle,passalajournéecomplètedanssachambre.Lelendemainmatin,aupetitdéjeuner,RionainterrogeaMaggie.—Votremèreéprouve-t-ellelebesoindesereposeraprèscelongvoyage?—Oui,jepense,réponditMaggie.Maisellen’estplustrèssociable.Elledonnel’impressiond’être

accabléeparledeuil,mêmesiellevivaitséparéedemonpèredepuisdesannées.—Peut-êtrefait-ellesondeuildesmeilleurssouvenirs?— Si elle en possède, je n’en ai pas connaissance. Lorsque nous étions très jeunes, mon père

arrivaitàsecontrôler.Mais,aussiloinqueremontentmessouvenirs,ilbuvaitdéjàsansretenueàtouslesrepasetparlaitfort.Alabataille, lessoldats lecraignaient.D’unecertainefaçon,Hughluiressemble,avecsacarrureimposanteetsaforce.

—Parfois, jepensequeHughboitunpeu trop, commesonpère,ditRionad’unevoixhésitante.Maisjenel’aijamaisvunepassecontrôler,etilnecriepas.

Maggielaregarda,commesouslechoc.

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— Je n’arrive pas à croire queHugh puisse se soûler souvent.Mais ici, tout lemonde boit duwhisky.

—C’estvrai.Jenevoulaispaslecritiquer.Ellesesentaitmalàl’aiseetsavaitquesesinquiétudesneprésentaientpasHughsoussonmeilleur

jourauxyeuxdesasœur.Maggieacquiesça,l’airtoujourssoucieux.—Jesaisquecesdixdernièresannéesontétédifficilespourlui.Ilaétécontraintdes’éloignerdu

clan pour étudier à l’université, puis il est devenu parlementaire. Le clan l’a-t-il bien accepté à sonretour?

—Oui,maisjesensunecertaineinquiétude.J’imaginequ’ilabesoindefairesespreuves,etcettechassevacertainementl’yaider.Ils’entraîneavecseshommesaucombat,cequinepeutquemontrersescompétences,maisunefoisdanslefeudel’actionleschosessontdifférentes.

—C’estvrai. Il n’a jamais cesséde s’entraîner.Sonhabileté àmanier l’épée était légendaire, àLondres.

—Ilneparlepasbeaucoupdecetteépoqueetprétendquelesparlementairesécossaisn’étaientpasbientraités.

Maggieacquiesça.— Il est scandaleux que l’Angleterre, qui devait traiter l’Ecosse comme son égale, permette à

certainsdesespoliticiensd’êtremépriséspard’autres.MaisHughafaitsondevoiretadonnédesontemps jusqu’à lamortdenotrepère.Maintenant, il est tempspour luide faire sespreuvesen tantquelaird.Avecvousàsescôtés,jenesaispascommentilpeutéchouer,ajouta-t-elleensouriant.

Rionaluirenditsonsourired’unairpincéetsecoupaunboutdepainpourfairediversion.Lorsquetout lemondeapprendrait queHugh s’était trompéde femme, compromettant ainsi le contrat, ladot etsurtoutl’usagedeleursterres,elleignoraitcequiallaitsepasser.

Mais,avantcetterévélation,ilfallaitqu’ellefassequelquechose,qu’elleprenneunedécisionquipouvaitavoirdesconséquencespourtous.

—Pensez-vousquevotremèreaimerait sortir sepromeneravecnous?demandaRiona.Cela luiferaitdubiendeprendrel’air.Ilyamêmeunpeudesoleilentrelesnuages.

—Merveilleuseidée!Jevaisluiproposer.Rionas’attendaitpresqueàcequeladyMcCallumdéclinesoninvitationmais,unedemi-heureplus

tard, celle-ci descendait l’escalier en compagnie deMaggie, sa coiffe en dentelle aussi terne que sonhumeur.

RionaveillaàmarcherlentementetencouragealadyMcCallumàparticiperàlaconversationenluiposant des questions. Elles croisèrent une servante qui saluaMaggie avec entrain et montra plus deréserve pour la veuve du chef. Riona les conduisit dans l’autre cour, au-delà de l’arche. Quelquesgentlemenétaientrestésauchâteau,maisaucunnes’entraînaitaucombat.Enrevanche,desgardesétaientpostéssurlesremparts,etdespalefreniersallaientetvenaiententrelesécuries.Laplupartdeschevauxétaientsortis,etelleavaitentenduHughdonnerdesinstructionsprécisesquantaunettoyagedesécuries.

Elle aperçut alors Hamish, le terrier, attaché à l’extérieur. Elle inspira profondément, à la foissoulagéeetpleined’espoir.

Maggiepoussaunpetitcriaiguetsemitàgenoux.—Quetuesmignon,petitchien!s’écria-t-elle.—Ils’appelleHamishetiln’estpastoujoursaussiaccueillant…MaislechiotposasespetitespattessurlescuissesdeMaggieetluiauraitbienléchélevisage,s’il

l’avaitpu.—Bien…J’enconclusquejesuislaseulequ’iln’aimepas,fitremarquerRionasèchement.Hamishluilançaunregardnoir,maisnegrognapas.

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—Pourquoiest-ilattaché?demandaladyMcCallumd’unevoixdéjàlassemalgrél’heurematinale.J’aivudeschiensalleretvenirlibrement.

—Seulslesplusvieux,quinesontpaspartispourlachasse,circulentenliberté,commentaMaggie.—Hughl’aconfiéàunjeunegarçond’écurie,expliquaRiona.Ils’appelle…Ellen’eutpasletempsdefinirsaphrase.Brendanvenaitdesortirdubâtimentetlesobservaitavec

intérêt.Soncorpsminceetsec,déjàporteurdesaforceàvenir,paraissaittropgrandpoursesvêtements.—Bonjour,ladyRiona,dit-ild’unevoixprudente.LadyMcCallumretintsonsouffleetpâlitbrusquement.Rionaseraidit,prêteàlaretenirsijamais

elles’évanouissait.Maiscettedernièresecontentadeposerlamainsurlebrasdesafilleetseressaisit.—Bonjour,Brendan,ditRionad’unevoixaimable.JeteprésenteladyMcCallum,lamèreduchef,

etsasœur,dameMaggie.Brendanlesregardatoutesdeuxavecaplomb.—Tu esBrendanMcCallum, le petit-fils deClaire ? demanda alors ladyMcCallumd’une voix

lenteetmesurée.Brendanacquiesça, tandisqueHamishbondissaitetposaitsespattesavantsur les jambesdeson

maître.—Oui,madame.Vousconnaissezmagrand-mère?—Oui,jelaconnaissaisdéjàavantquetunaisses.RionaétudialadyMcCallum.Etait-elle,elleaussi,lagrand-mèredel’enfant?MaggieobservaitBrendanavecgrandintérêt.—N’es-tupasunpeujeunepourtravaillerauchâteau,Brendan?Ilhaussalesépaulesetébouriffalespoilssurlatêteduchien.—J’aimemontravail.Grand-mèren’aplustellementbesoindemoi.Elleaembauchéunvaletde

fermepourl’aideraveclesrécoltesetlesvaches.Qui payait pour cela ? se demandaRiona.Mais elle croyait avoir deviné la réponse et se sentit

rassérénée.—Quellebonneidéed’avoiramenétonchien,ajoutaMaggie.—Lechefmel’adonné,expliquaBrendansanscesserdelesdévisager.LadyMcCallumfronçalessourcils,etMaggieluilançaunregardhésitant.Pour Riona, leur attitude était la plus grande preuve de la filiation de Brendan qu’elle ait pu

constaterjusqu’àprésent.Brendans’excusaetretournatravailler.Desoncôté,ladyMcCallumdécidaderentrerauchâteau.RionaetMaggielasuivirent.

—Etiez-vouslàpendantlaconvalescencedeHugh,aprèslabatailledeSheriffmuir?luidemandaalorsRionaenprenantuneprofondeinspiration.

LesouriredeMaggies’évanouit.—J’étaislà.Cefutuneépoqueterriblepourl’Ecosse.Ladéfaiteestunechoseamère,etbeaucoup

d’Anglaisontétécruelsdansleurvictoire.Elleluidécochaunregardfurtifetenchaîna:—Excusez-moi.Jesaisquevousavezdelafamilleanglaise…—Maisjenesuispasunsoldatanglais,répliquaRionaavecunsourireencoin.—Lesgensd’icivoustraitent-ilsdifféremmentenraisondevosoriginesanglaises?—J’aientenduuneremarqueicioulà,maisriendebienméchant.Lefaitd’êtreavecHughinspire

lerespect,biensûr.LesgenssontrespectueuxenversnouscarHughestleurnouveauchef,maisjepensequ’ilestplusdifficiledegagnerleurconfiance.

ToutcommeellenepouvaitpasfaireconfianceàMaggie,songea-t-elle.—Hughm’alaisséentendrequelaruptureavecsonpèreaeulieudurantsaconvalescence.Voulez-

vousm’enparler?

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—Ilnel’apasfait?demandaMaggie,l’airétonné.—Ilm’aditqu’ilavaitvouluépouserunefemme,maisqu’iln’avaitpaspuàcauseducontrat.Je

saisaussiqu’ilyaeuunefemmenomméeAgnès,quiestmorte.Est-celamêmepersonne?Aprèsunlongmoment,Maggieréponditsurletondel’excuse:—Jepensequevousdevriezenparleraveclui.—Biensûr,soupiraRiona.Pardonnezmacuriosité.— Je comprends. Vous vous apprêtez à épouser un homme que vous ne connaissiez pas il y a

quelquessemainesencore.Maisc’estàHughdevousparlerdecettehistoire.Maggie jeta un regard derrière elle, etRiona se demanda si elle cherchaitBrendan. Puis elle se

morigénaintérieurement.Elleauraitdûattendreavantd’abordercesujet.Maggienelaconnaissaitpasdutout.Etpuis,peut-êtrenevoulait-ellepasprésentersonfrèresousunjourquineluiétaitpasfavorable.

TandisqueladyMcCallummontaitl’escalierendirectiondelagrandesalle,Maggielapritparlebras.

—Attendezunmoment,voulez-vous?Allonsnousasseoirdanslejardinpotagerpourparler.Rionatâchadenepassefairetropd’illusions.Maggieavaitmisuntermeàleurdiscussionàpropos

dupassédeHugh.Cequinel’empêchapasdelacontempler,pleined’espoir,unefoisqu’ellessefurentassisescôteàcôtesurlepetitbancenpierrequidonnaitsurlesplantationsdecarottesetdenavets.

— Je sais quemaquestion va vous surprendre, commençadoucementMaggie,mais comment vaOwen?

Elle n’utilisa pas son titre de vicomte Duncraggan, ce qui supposait une familiarité qui surpritRiona.Maggiepensaitqu’Owenétaitsonfrère,évidemment,etnonsoncousin.

—Ladernièrefoisquejel’aivu,ilallaitbien,répondit-elle.IlfaisaitbonnefigureàLondres,toutenassistantàsescoursdesciencespréférés.

Maggieacquiesçasanssourire.—Celaparaîtévident,murmura-t-elle.—Vousleconnaissez?Jenepensaispasquenosfamilless’étaientbeaucoupfréquentéesdepuisla

signatureducontrat.Maggieluilançaunregardperçant,etRionasedemandasielleavaitcommisunimpair.—Ilexisteunepetitehistoire…LorsqueHughadécouvert,àtreizeans,quesapromiseavaitdéjà

étédésignée,ilaeu…dumalàl’accepter.—Jelesais.Ilm’aparlédesonattitudeinconscienteetdel’incidentaveclessoldatsanglais.Maggiesemblasedétendreunpeu.— Oh ! très bien. Notre mère a désespérément cherché à l’aider. C’est là qu’elle a décidé de

renouercontact avec ladyAberfoyle.Commevous le savez,votremère est restée enAngleterre,maisOwenetvotrepèresontvenusnousvoiroccasionnellement.Riendetrèsimportant.

Pas important? songeaRionadont lacuriositévenaitdemonteren flèche.Si c’était aussibanal,pourquoiMaggiedemandait-elledesnouvellesd’Owenaprèstoutescesannées?

—Je…medemandaiscommentilallait,poursuivitMaggieenseraclantlagorge.Iln’estdoncpasmarié?

LadernièrequestionfutposéeavectantdefaussedésinvolturequeRionaseretintdesourire.—Non,ilnes’esttoujourspasprononcé.Maggiehochalatêteetselevabrusquement.—J’espèrequ’iltrouverabientôtlebonheur.—Devotrecôté,vousn’avezjetévotredévolusurpersonne?Hughnem’apasditquevousétiez

fiancée.—Jesuisencoreunejeunefemmeindépendanted’Edimbourg,réponditMaggieavecdétermination.

Jepossèdeunedotetunpetithéritageparmamère.J’ailetempsdedéciderdemonavenir.

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—J’ensuisheureuse.Ensedirigeantverslechâteau,Rionacontinuaàsedemanders’ilfallaittirerd’autresconclusionsà

propos de Maggie et d’Owen. Manifestement, les Duff et les McCallum étaient liés de bien desmanières…

—Laissez-moivousapprendrequelquesmotsdegaélique,ditsoudainMaggie.Etonnée,Rionasetournaverselle.—J’aivuàquelpointlasituationétaitdifficilepourvous,hiersoir.VousaviezHughouSamuel

pourtraduire,maisvousseriezsansdouteheureusedecomprendreparvous-mêmelesconversations.—Certainement, réponditRiona d’une voix un peu hésitante.C’est une aimable proposition que

j’accepteavecjoie.Maggiebattitjoyeusementlesmains.—Parfait!J’ignorecombiendetempsnousallonsresterici,maisjevousaideraiautantquejele

pourrai.Ellepassafamilièrementsonbrassouslesien.—Ceseratrèsamusant.J’aitoujoursvouluavoirunesœur!Acesmots,lajoiedeRionas’évanouit.

***

Dans l’après-midi,un tailleurarrivadeStirlingpourconfectionnerplusieurs robesàRiona.ToutavaitétéorganiséparHugh,etladyMcCallumainsiqueMaggieseplaisaientàluirappeleràquelpointHughsemontraitprévenantetattentionnéàsonégard.Etc’étaiteffectivementtrèsaimabledesapart,ellelesavait.

Pendantlesdeuxjoursquisuivirent,elleselivraàplusieursessayagesetappritdesmotsdelaviequotidienneengaélique.Maggiedécouvritqu’ellesavaitjouerdel’épinetteetluidemandadejouerpoursamère,cequieutpoureffetd’arracherdeslarmesàcettedernière.Maggieluiconfiaenprivéquelamélancoliedesamèrenefaisaitqu’empirerd’annéeenannée,sansqu’elleenconnaissepersonnellementlesraisons.Rionaétaitconvaincuequ’ilyavaitplusquesonéloignementavecHugh,mêmesilesdeuxchosesétaientprobablementliées.

LetroisièmejouraprèsledépartdeHugh,elledécidad’allerauvillageàchevalencompagniedeMaggieetdeSamuelpourrendrevisiteauxRoss.Samuelacceptaaussitôt,etMaggiefuttoutexcitéeàl’idéederencontrerlesvillageoisqu’ellen’avaitpasvusdepuissilongtemps.

Enpassantdevantlataverne,RionafutheureusedevoirlavieilleMmeRossassisedehors,occupéeàregardersespetits-enfantsjouer.Celle-cisouritenlareconnaissantetselevasansaide.

—LadyRiona!s’écria-t-elleenluifaisantdessignesdelamain.Regardez-moi,dehorsavecmespetits-enfants!

Riona etMaggie descendirent de cheval et vinrent s’asseoir avec elle. Samuel disparut dans latavernesousprétextedechercherDonald.

Bientôt, ondemandaàRiona,dontMaggie avait vanté labellevoix,de chanterpour les enfants.Troischansonsplus tard,unpetitgroupedefemmes,d’enfantsetdepersonnesâgées,quin’étaientpaspartiespour lachasse, s’était forméautourd’elles.Lesgenss’étaientassis surdes rochersousurdestouffesd’herbe.MmeRosssouriaitcommesic’étaitellequiluiavaitapprisàchanter.

Rionaéprouvaitunsentimentétrangeetplutôtmerveilleuxdevoirautantdevisagesneufs tournésvers elle avec bonheur. Laméfiance des villageois à son égard du fait qu’elle était une Duff ou uneAnglaise semblait avoir disparu, même si cela ne devait durer que quelques instants. Ou peut-êtrecommençaient-ilsàl’acceptercommelafutureépousedeleurchef?Cetteidéeattisaenelleunedouleurqu’ellepréféramettredecôté.Cettevien’étaitpaslasiennemaiscelledeCatetplusletempspassait,

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pluscetteidéeluilaissaitungoûtamer.Pourtant,ellen’avaitjamaisétéportéeàvivrelatêtedanslesnuages.Elleessayadoncdeprofiterdumomentetdesavourerlefaitd’êtreadmiréepourunartqu’elleavaitperfectionnéàforcedetravail.

Soudain,elleentendituncris’éleverenhautdelacolline,au-dessusduvillage.Unjeunehommearrivabientôtencourantau-dessusdelacrête.Iltrébucha,tombaàgenouxetseremittrèsvitesurpied.Puisillançaquelquesmotsengaélique,etlafoules’écartacommesilafoudrevenaitdefrapper.

Rionaavaitbeauconnaîtreunpeudegaélique,Maggie l’informade lanouvelle :desvoleursdebétail avaient sévi.Elle lui traduisit ensuite le rapportdu jeunehommeessoufflé.Sixhommesavaientvoulus’emparerd’unedouzainedebêtes.Maggieetellebondirentaussitôtsur leurcheval,rapidementrejointesparSamuel.

—Savez-vousoùsetrouventHughetsesgentlemen?demanda-t-elle.—Oui,ilsnousontenvoyédesnouvellestoutelajournée,ainsiqueleproduitdeleurchasse.—Danscecas,prévenez-leàproposdeceraid.Ilestendroitd’êtreinformé.Samuelacquiesça,l’airgrave,puisenfourchasamontureetgravitlacolline,s’éloignantduvillage

etduchâteau.Riona le suivit du regard, puis repartit versLarigCastle en compagnie deMaggie pour attendre

Hugh.

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Chapitre17

Hugh revint au château enmilieu d’après-midi. Tout était déjà prêt pour qu’ils puissent partir àl’auberécupérerleurbétail.Rional’attendaitdanslagrandesalle,l’airinquiet.Puissonexpressionsemuaendéterminationlorsqu’ellevitleshommesquil’accompagnaientcouvertsdebandageshasardeux.

—MadameWallace!cria-t-elle.J’aibesoindevotreaide!Surpris, il l’observa s’occuper avec Maggie et la gouvernante des blessures légères de ses

hommes:uneentaillecauséeparunpoignard,uneentorseàlacheville,laballed’unmousquetquiavaittraversélebrasd’unhommemalencontreusementpositionnédanslalignedemired’unchasseur.

Elle travaillait avec efficacité et douceur. Il était tellement habitué à ses airs réticents et à saméfiance qu’il en avait oublié qu’elle pouvait être différente.Elle connaissait les personnes par leursnoms,etilauraitjurél’avoirentendueprononcerunmotoudeuxdansungaéliquehésitant.Elleagissaitenfaitcommesielleétaitlamaîtresseduchâteau—commesielleétaitsafemme.

Il lui fallut un certain temps pour s’apercevoir que sa mère ne se trouvait pas parmi les autresfemmes.Celafaisaitdixansqu’ellel’avaittrahi,dixansqu’ilsupportaitsonsilencedésapprobateur. Ilavaitapprisànepluspenseràelle,chosequ’ilfaisaitencoreavecfacilité.

Dermotvintalorslesinformer,Alasdairetlui,decequis’étaitpassé.LesBuchananavaientprofitédeleurpartiedechassepourlancerleurraid.Ilajoutad’unevoixplusfroide:

— J’aurais pu gérer la situation, bien sûr, car nous disposions d’assez d’hommes pour lespourchasser,maisladyRionavousafaitprévenirsansmeconsulter.

— Elle était simplement inquiète pour nos biens et nos gens, répondit doucement Hugh. Il estpréférablequenousleurmontrionsnotreforcemaintenantquejesuislenouveauchef.Jeconduiraimoi-mêmelegroupe.

—Entantquechefdeguerre…,intervintAlasdairenfronçantlessourcils.—Jesais,normalement,tupartiraisenmonnom.Mais,commejel’aidit,jesuislenouveaulairdet

j’aibesoindemontrermaforce.Tum’accompagneras,biensûr.—Toutcommemoi,enchaînaDermot.Hughsedemandas’ilnevalaitpasmieuxquesontanistresteauchâteau,maislesrisquesqu’ilse

fassetuern’étaientpastrèsgrandes.— Très bien. Et à notre retour, Alasdair, tu me donneras des informations détaillées sur notre

sécurité. Mais rassemblons nos hommes. Dans une heure, je veux qu’ils soient dans la courd’entraînement.

AlasdairetDermotsetournèrentcommeunseulhommeensilence, ledosdroit,etHughretintunsoupir.Rionalerejoignitàcetinstant,s’essuyantlesmainssuruntorchon,etaussitôtsaprésencedissipasamorosité.Dermotneluiavaitpascachésadésapprobationàsonégardenpartant.

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Rionajetauncoupd’œilpar-dessussonépaule,puis,setournantverslui,déclara:—Dermotestencolèrecontremoi…—Vousavezjouévotrerôled’épouseavecunpeutropdezèleàsongoût.Vousl’avezfroisséenme

faisantprévenirsansleconsulter.Ilperçutunelueurd’inquiétudedanssesyeuxémeraude.—Voussavezquejenel’aipasfaitdansl’intentiond’outrepassermesdroits.Maisellecontinuad’observerd’unœilinquietlaportederrièrelaquelleDermotavaitdisparu.Pourladistraire,illuidemanda:—Toutlemondesurvivra?Ellesouritdoucement.—Oui,mêmeceuxquej’aisoignésmoi-même.Puissonsourires’évanouitdenouveau.—J’aientenduvotreconversationavecDermotetAlasdair.Vousn’êtespastrèspopulaire,n’est-ce

pas?Ilreniflabruyamment.—Venezetmangezunpeu.Ellesecoupaàlahâtedumouton,luiservitduchouauxortiesetàl’ail,ettandisqu’elleluiversait

duvinelleremarquaqu’ilnelaquittaitpasdesyeux.—Quelquechosenevapas?demanda-t-elleenregardanttoutautourd’elle.—Non,rien.Vousêtessimplementsi…agréable.Ellerougit.— Agréable ? répéta Maggie, qui l’avait entendu. Tu aurais dû la voir au village, ce matin !

MmeRosssesentbeaucoupmieuxdepuisqu’ellesuitsesconseils…—Maggie!intervintRiona,l’airexaspéré.Ellessecomportaientdéjàenamies,songeaHughavecunétonnementpleind’espoir.—Et que dire, quand elle a commencé à chanter pour les enfants ! continuaMaggie. Je savais

qu’ellejouaitàmerveilledel’épinette,maissavoix…—Vousjouezdel’épinette?s’étonnaHugh.Rionahaussalesépaules.—Souvenez-vousquemesparentsvoulaientquejedistraiemasœur.Il ladévoradesyeuxcommeunhommeaffamé.Et,commecelafaisait troisnuitsqu’ilétaitparti,

c’étaiteffectivementlecas.Pendantlajournée,ilétaitsuffisammentoccupémaislanuit,souslesétoiles,ilnepensaitqu’àelle,àsonsourire,àsesbaisers,àl’espoirqu’enfinellel’épousedesonpleingréetqu’ilsaientdesenfantsensemble.

Soudain,Alasdairpassaencoupdeventlesgrandesportesrestéesouvertes.—Hugh!Noust’attendons.Tuasditquetuvoulaisêtredesnôtres.Ilselevaaussitôt.—J’arrive.—Mercipourvotreaide,dit-ilàRionaetàsasœur,etmerciaussid’avoirpenséàmeprévenir

pourleraid.Sonregards’attardasurRiona,etilajouta:—Acesoir.Ellerougitcommes’ilvenaitdeluidireouvertementqu’illaretrouveraitdanssonlit.

***

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Rionafaisaitlescentpasdanssachambre,sachantqueHughneresteraitpasdanslagrandesalletrès longtemps.Ses hommes et lui avaient prévude repartir à l’aubepour leur bétail.Elle n’était pashabituéeàcequeleshommesdesonentourageaffrontentcegenrededanger.IlyavaitbiendesrôdeursàLondres,oualorsilspouvaientêtrevictimesd’unaccidentdechasseàlacampagne,maisça…Nonqu’ils’agissed’unebatailleouverte,maiscelapouvait ledevenir. Iln’yavaitpassi longtemps,Hughavaitcombattulessoldatsanglaisetsurvécudejustesse.

Ellesongeaaussiàcequ’elleavaitentendu,aufaitqueDermotétaitfâchéqu’elleaitprévenuHughduraidsans leconsulter.Elleavaitpriscettedécisionsansvraimentréfléchir,guidéeparson instinct.Elledevenaitdeplusenplusconfiante,partantduprincipequesesdécisionsseraientacceptées.Ellenecontrôlaitpaslasituation,maisellecommençaitàapprécierlepouvoirqu’elleavait.Etlefaitquesesdécisionssoientadmisesetrespectéesétaitgrisant.

Enrevanche,encontrariantDermot,elleavaitpeut-êtreperdusachancequ’ilécoutesonhistoired’uneoreilleobjective.

Lorsquelaportes’ouvritetqueHughentra,nettoyéetrasédeprèsaprèsdesjourspassésdanslesmontagnesavecseshommes,lavuemêmedesacicatricesurlementonfitmonterenelleuneboufféedetendresse.Seigneur,elleavaitdeplusenplusdemalàgardersesdistances!

Hugh lui adressaun sourire encoin extrêmement touchant, et elle en ressentit à la foisunplaisirprofondetunedouleurquiluiserralecœur.Parler,vite!Ilfallaitqu’elleparle,souspeinedeseleveretdesejeterdanssesbras.Elleétaitmêmecapabled’oublierl’avenirettoussesrisques.Commentavait-elleputomberamoureusedel’hommequil’avaitenlevée?L’hommequinepourraitjamaisdevenirsonmari?

—Vousmeregardezd’unairétrange,dit-ilenpenchantlatêtesurlecôté.—Vraiment?répondit-elled’unevoixquisevoulaitlégèreenallantluiservirunverredevin.Maiscegestesupposaitqu’elles’approchedelui,cequ’ellefit,pleined’appréhensionetdedésir.

Lorsqu’ilpritlacoupeetlalevaverselleavantdeboire,elledemanda:—Jesaisquelachasseaétéunsuccès,maisl’a-t-elleétésurtouslesplans?—Surtouslesplans?—Entrevoshommesetvous,Alasdairetvous…—Vousvoulezsavoirsinousavonsétédegentilsgarçonsetsinousnenoussommespasdisputés?

demanda-t-ild’unevoixteintéedesarcasme.Ellesoupira.Pourquoiluiavoirposécettequestion?Unefaçondegagnerdutemps,peut-être?—Jesuisbête,jelesais.Maislesfemmespréfèrentsavoirquepersonnen’estenconflit.—Vousn’êtespasbête,répondit-ild’unevoixdouce.Ilposalamainsursajoue,etellefrissonna.Ellereculad’unpas,seforçaàsourireetseversaà

sontourduvin.Hughcontemplaunlongmomentlesflammesdanslacheminéeavantderépondreàsaquestion.—Alasdairetmoiredeviendronsunjouramis,commeautrefois.Pourlemoment,ilal’impression

quej’usurpesonrôle.Commesij’étaisincapabledeguidernoshommesdansunsoucidejustice.Maisilviticidepuisdesannéesetlesconnaîttous,commeilseplaîtàmelerappeler.Jesuisd’accordaveclui.J’aipromisdeleprendreunpeuplusenconsidération.

—C’estunbondébut.—Maintenant,dites-moicommentleschosessesontpasséesenmonabsence.Vousai-jevraiment

entendueparlergaélique?Il s’installa dans le fauteuil rembourré devant la cheminée, ce qui accrut son appréhension. Elle

s’assitenfacedelui.—Parlern’estpasvraimentlebonterme,répondit-elled’unairgêné.Maggiem’aapprisquelques

mots.

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—Danspeudetemps,vousvoussentirezcommeunevraieHighlander,plaisanta-t-il.Elleacquiesça,sachantàquelpointcelaseraitfacilepourelle.—Mesparentsontniéunepartiedemonhéritage,maisjemeplaisàmesentirécossaise.J’aimeles

histoiresquelespersonnesâgéesracontentlesoir,etlessuperstitionsdeMmeWallace.Audébut,j’étaisunpeudéçued’imaginerque lesboutiques étaient si loin,maismaintenant j’en ai prismonparti. J’ail’impressiond’avoirabandonnémonanciennevie.Maisvousavezététrèsprévenantenm’envoyantcetailleur.

Elleétalasesjupesautourd’elle.—Mesnouvellesrobessontmagnifiques!Elleavaitacceptédelesfairefabriquerensedisantqu’unjourquelqu’und’autrepourraitlesporter.LesprunellesdeHughbrillaient.—Vousêtessibelle!Cevertfoncévatrèsbienavecvosyeux.J’aiditautailleurdeveilleràcela.—Non,vousn’avezpasfaitcela?—Si.Jevouslepromets,dit-ilenposantlamainsursoncœur.—J’appréciequevousveilliezàmonconfort.Bientôt,vousallezmedirequevousêtesaussipoète.Seigneur, voilà qu’elle plaisantait avec lui, à présent ! C’était si facile. Cette pensée lui fut

douloureuseetluicausaunchagrinqu’ellen’avaitpasanticipé.Ellepouvaitvraimenttomberamoureusedecethommeetenavaitdéjàprislechemin.

—Jenesuispaspoète,répondit-ilensouriant.J’aimesimplementlesbeauxyeux.Elleauraitpuseperdredanslessiens.Pours’enempêcher,elledemanda:—Quesavez-vousdeMaggieetOwen?Ilfronçalessourcils.—Masœuretl’héritierd’Aberfoyle?Pourquoidiablelesassocierais-je?—Parcequ’ellem’ademandédesesnouvellesetvoulaitsavoirs’ilétaitmarié.Leplisecreusaunpeuplussursonfront.—Jenesaispasgrand-chose,sicen’estquemamèreetMaggieontessayédeselierd’amitiéavec

votrefamille.Lasituationétaitunpeugênanteet,finalement,ellesyontrenoncé.—Et lorsque vous étiez à l’université ?Maggie était en train de devenir une jeune femme. J’ai

l’impressionquequelquechoses’estpassé.—Ellenem’enariendit.Maiss’ilaessayédeluifairedumal…—Vousvoulezdire, si jamais ilavaitessayéde l’enleveretde laséduire? l’interrompitRiona,

ironique.Queferaitunfrèredanscettesituation?Ils’adossaàsonfauteuil,leverreàlamain,toutenl’étudiant.—Vousessayezencoredem’embarrasser à causede ceque j’ai fait,mais jene le suispas.Un

contratenbonneetdueformeaétépassé.—Jesaisquejenepourraipasvousfairechangerd’avisetjen’enaipasl’intention,surtoutsivous

partezdemain.—Vousnevoulezpasprovoquerunedisputepourquejeretournedansmachambre,n’est-cepas?

lataquina-t-il.—Nonmais…peut-êtrevousmettrez-vousencolère lorsque jevousauraiditcequis’estpassé

pendantquevousétiezabsent,dit-elleenleregardantfixement.—Continuez…,dit-ilenprenantunegorgéedevincommepours’armerdecourage.—JemepromenaisavecvotremèreetMaggie,lorsquenousavonsrencontréBrendan.Ellefitunepauseetl’étudiaattentivement.Mais,aulieudemanifesterdelacolère,sonvisageprit

uneexpressionàlafoisneutreetimpassible.—J’imaginequemamèren’apasététrèsimpressionnéederencontrerungarçond’écurie.—Jenesaispassielleaétéimpressionnée,maiselleabienfaillis’évanouir.

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Hughselevapourseservirunautreverreetluienproposaunensilence.Ellerefusad’unsignedetête.

—Vousn’avezrienàmedire,Hugh?demanda-t-elled’unevoixdouce.—Jevousaidéjàditquellesétaientmesconditionssivousvouliezquenousparlionslibrementet

ouvertement,jeunefille.Avez-vousacceptédedevenirmafemme?Ellesemorditleslèvresetdétournalesyeuxverslesflammes.—Etmoi,jevousaidéjàditquec’étaitimpossible.Ilselevaetvintseplacerdeboutdevantelle,grand,imposantmaispasmenaçant.Jamaispluselle

n’auraitpeurdelui,àprésent.Illapritparlebraspourl’obligeràselever.—Commentpouvez-vouscontinueràlenier?s’enquit-ilavantdel’attirerdurementcontreluietde

l’embrasser.Ellen’essayapasde le repousser,elleenétait incapable.Elle reconnaissaitmêmequ’il luiavait

manqué.Elleenroulalesbrasautourdesanuquepourleserrerdavantage,commesiens’accrochantàluiellepouvaitrepousserunaveniroùilnepouvaitquesouffrird’avoirchoisilamauvaisefemme.

Lecontactdesoncorpsétaitsiagréable,etseslèvresposéessurlessiennesétaientcellesdontelleavaitrêvéaucoursdecesnuitsoùill’avaitlaisséeseule.

Ilmurmura:—Vousm’avezmanqué,jeunefille.Dites-moique,moiaussi,jevousaimanqué.Ellenepouvaitpasdécemmentprononcercesparoles.Ellepressaleslèvressursajoue,sonmenton

et sagorge, sedélectantducontactde sesmains sur soncorps, tandisqu’ilpressait sonbassinet sonérectioncontreelle.Ellefrémitenlasentant.Desonautremain,ilsaisitsonseinqu’ilcaressaàtraversle tissu de ses vêtements de nuit.Leurs baisers devinrent plus durs, plus haletants àmesure que leursmains partaient désespérément en quête de leurs corps.Riona était fiévreuse, étourdie, et sentait toutepenséerationnellel’abandonner.

Ellerompitleurbaiserpourmurmurer:—Lacorde…Utilisez-la,sinon,jenerépondsplusdemoi.Ellevitune lueurde triompheéclairer son regardavantqu’il sedétourneetelle regrettaaussitôt

d’avoir prononcé ces mots. Elle était en train de lui donner exactement ce qu’il voulait : elles’abandonnait à lui, à son pouvoir de séduction. Leurs rôles s’étaient inversés, et c’était elle qui leguidait à présent et l’amenait à croire qu’elle était sur le point d’accepter de devenir sa femme.Elleaurait dû l’arrêter, arrêter ce désastre qui planait comme une ombre sur leur avenir. Et, plus ilss’approchaientduterme,plusilsouffriraitlorsqu’ildécouvriraitqu’elleluiavaitditlavérité.Unevéritéqui pouvait éclater à n’importe quel moment. Son oncle ne tarderait sûrement pas à se vanter de savictoiresurlesMcCallumetàmettreenavantlefaitqueHughn’avaitpasremplisapartducontrat.

Maiselleneditrien.Ellegardalesilencelorsqu’ils’agenouillaàsespiedspourattacherlacordeautourdeseschevilles.Elleétaitpiégéeparsonpropredésir.Qu’espérait-elletirerdetoutcela?Unefoisqu’elleseraitdéfinitivementtombéeamoureusedecethommeetqu’illarejetterait,ellenepourraitque finir seule et désespérée…Mais pour l’heure,Hugh ne la rejetait pas. Il la prit dans ses bras etl’amena jusqu’au lit où il la posa avec délicatesse. Puis il se coucha sur elle pour continuer del’embrasseravecfougue.Elles’agrippaàluietsedétestad’aimerautantsescaresses,sedétestadesesentirtrahieparsoncorps.Ledésiravaitprisledessus,aupointdeluifaireoubliertouteprudenceettoutbonsens.

Lorsqu’ilpassalamainsoussachemisedenuit,elleneprotestapasetsecontentadegémiretdesetordredeplaisir.Sapeauétaitdevenuesichaude,sisensible.Ellefrémitdedéceptionlorsqu’ilglissasurseshanchesetsursonventre,jusqu’àcequ’ellecomprennequ’ilnefaisaitqueremontersachemisede nuit de plus en plus haut. Bientôt, elle sentit un air frais caresser ses seins nus, juste avant qu’ils’inclineverseux.Lepremierbaisersurleurpointefutdélicatethumide,et luiarrachaunpetitcride

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bonheur.Hughenroulaensuitelalangueautour,avantdelesaspirertouràtour.Ellesecambra,désireused’enressentirplus,entendantsortirdesagorgedesbruitsquidépassaientsonimagination.

Ilfinitparluioffrircequ’elledésiraitetglissalesdoigtsentresescuissestremblantes.Ilsavaitoùetcommentlatoucher.Sabouchesursesseins,ilcontinuadelacaresser,etsonorgasmefutplusviolentque celui qu’il lui avait donné quelques jours plus tôt. Elle ignorait que ce plaisir pouvait gagner enintensitéetpourtant…Deplus,illeluiavaitdonnéplusieursfoissansjamaisrienluidemanderenretour,hormisdel’épouser.

Ilroulasurledos,lesoufflecourtetlespoingsserrés.—Hugh?—Non,toutvabien.Dormezmaintenant.Jevaisretournerdansmachambre.Elleauraitaiménepasletoucher,maiselleneputs’enempêcher.Elleposalamainsursonsexeet

lapressacontresaculotte.Ilpritunecourteinspiration.—Riona,necommencezpascequevousn’allezpasterminer.—Allez-vousdansvotrechambrepour…terminer?demanda-t-elled’unevoixtimide.Ilneréponditpas.—Laissez-moivousaider.Sansattendresaréponse,elleremontasachemiseetentrepritdedéfairelesboutonsdesaculotte.A sa grande surprise, elle crut le sentir trembler,mais il semaîtrisait. Elle baissa la ceinture et

s’aperçutqu’ilneportaitpasdecaleçon.Danslapénombre,ellenevoyaitpasgrand-choseàl’exceptionducontoursombredesonsexe.Elle le touchadélicatement, lesentit tressauteretentenditHughgémir.Sonsexeétaittrèsdur,chaudetdouxcommedelasoie.Ellelecaressa,l’explora,jusqu’àcequ’ildiseentresesdentsserrées:

—Commececi.Illuipritlamainetl’enroulaautourdelui,avantdeluimontrercommentlabouger.Sanscesserde

lecaresser,ellel’embrassa,etilnetardapasàjouiràsontour,prisdesoubresautscommeelleavantlui.Ellelelâchaenfinetcontemplalespectacledesajouissance.Maintenantqueledésirétaittombé,elleétait choquéededécouvrirqu’ellepouvait s’abandonner aupointd’oublierde lui résister.Ouétait-ceparcequ’ilpartaitaffronterunautreclanetqu’ilallaitêtreexposéaudanger?

Hébétée,elleserepliasurelle-mêmependantqu’ilselevaitpourallerselaver.Elleluitournaledos,incapabledeleregarderenface,incapabled’affronterlefaitqu’elleavaitfaitévoluerplusencoreleurrelation.Lorsqu’il revintsecoucher, ilse lovacontreelle,collaseshanchescontre lessiennesetenroula un bras autour de sa taille.Tandis qu’il s’endormait, il posa unemain sur son sein comme lachoselaplusnaturelleaumonde.

Ellesemorditleslèvresetessayadenepastroptremblerenlaissantseslarmescouler.

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Chapitre18

Hugh se leva avant l’aube. Il veilla à ne pas la réveiller, précaution bien inutile, car elle faisaitsemblantdedormir,cequiserévéladifficilelorsqu’illuicaressadoucementlatêteavantdepartir.

Nemourezpas,pria-t-elleensilence,nemourezpas!Dès qu’il fut hors de la chambre, elle se mit à réfléchir. Elle n’avait pas été capable de le

convaincrequesonrefusdel’épouserétaitbienplusqu’uncapricedefillettequiavaitpeurdesemarier.Devait-ellecomprendrequ’elleétaitentraind’accepterpassivementcequiluiarrivait,jusqu’àcequ’ilsoittroptard,jusqu’àcequ’ilsedéteste,qu’illadéteste,elleaussi,d’avoirrompulecontrat?

Elleselava,s’habillaetessayad’entamernormalementsajournée.Lechâteauétaitinhabituellementcalme,à l’exceptiondequelquesservantesquiallaientetvenaient.Tout lemondesemblait retenir sonsouffle. L’atmosphère était… oppressante et effrayante. Chaque fois qu’elle regardait ladyMcCallum,ellevoyaitlavieillefemmepenchéesursonrosaire.Auboutd’uncertaintemps,elleselaissagagneràson tour par la peur. Pour se changer les idées, elle partit se promener. Dans la cour, les paysansvaquaient à leurs occupations, mais leurs conversations manquaient d’entrain et n’étaient ponctuéesd’aucuncri.

Maggie, ladyMcCallum et elle-même étaient assises dans la grande salle presque déserte pourdéjeunerlorsqu’unhommearrivaentrombeparlesdoublesportes.

—LadyRiona,lesgardesontvudeshommesàchevalquiapprochaient!Samuelm’ademandédevousprévenir.

Rionapartitencourant,suivieparMaggie,etdévalad’unpasmaladroitl’escalierquiconduisaitàlacour.

Samuellesattendait,lesbrascroiséssurlapoitrine,sonexpressiond’ordinairejoyeuseremplacéeparunmasquedepierre.

Elles’arrêtaàcôtédelui,puiscontemplal’entréeduchâteau.—Avez-vous…baissélaherse,aucasoùceneseraientpaseux?—Cesonteux,répondit-ilpleind’assurance.J’aivuleurtartan.Elleleregardafixement,peuhabituéeàlevoirainsi.Iln’avaitpaspuveillersurHugh,alorsque

cela avait été son rôle ces dix dernières années. Il avait été laissé au château avec les femmes et,apparemment,iln’appréciaitpascettemission,mêmes’iln’enavaitrienmontrédevantHugh,sesouvint-elle.

Les cavaliers passèrent avec fracas sous la guérite avant d’entrer dans la cour. Leurs chevauxremuaientfurieusementlatêted’excitation.Elleaperçutdessourires,entenditdesriresexcitésetnevitaucunchevalsanscavalier.Elleessayadesecalmer,mêmesisoncœurbattaitsifortqu’ellesesentaitdéfaillir.

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Samuel contempla la main qu’elle avait posée sur son bras sans s’en apercevoir. Elle la retiraaussitôt.

—Excusez-moi,dit-elle,assezfortpourcouvrirlebruitdeshommesetdeleurschevaux.Samuelhocha la tête,maisne lui souritpascommeà sonhabitude, sûrementparcequeHugh les

avaitvus.Ils’avançaverseux,etRionaneputretenirunsouriredebienvenuetoutenledétaillantpourvoirs’iln’étaitpasblessé.Elleneremarquariend’anormal.Elleaperçutsesgenouxnussoussonkilttandisqu’il descendaitde cheval. Il portait un superbemanteaubleu.Avec son tartannoir et rouge, ilressemblaitàunroi.EllesemorditlalangueetlaissaSamuelprendrelaparole.

—Touts’estbienpassé?demanda-t-il.Hughacquiesça.—Nousavonsrécupéréchaquevache,etaucunen’estblessée.LesBuchananontdéguerpicomme

deslâchesennousvoyant.Une bouffée de soulagement envahitRiona, si violente qu’elle sentit ses jambes se dérober sous

elle.DermotetAlasdairarrivèrentderrièreHugh,etellefutétonnéedelesvoirsesourireetparlerentreeux.Riendemieuxqu’unpeudedangerpourégayerceshommes,songea-t-elle.

Dermotposalamainsurl’épauledeHugh.—Nousallonscélébrernosactesdebravourecesoirett’introniserchef.Leshommessontdéjàen

traindeseréunirpourfêtercettevictoire.Ceseralemomentidéal.RionaetMaggieéchangèrentdesregardsétonnés.—Vosactesdebravoure?ditMaggieenhaussantlavoixpourêtreentendue.AlasdairpassaunbrasautourducoudeHugh.—Nevousa-t-onpasditquevotrefrère,iciprésent,s’estintroduitseuldansleurcampementeta

défiéletanistBuchananencombatsingulier?Riona poussa un petit cri très féminin, espérant arracher à Samuel un sourire,mais il paraissait

encoreplussoucieuxqu’elle.—C’étaitàmoidevousdéfendre,ditSamueld’unevoixfroide.Sij’avaisétélà,vousn’auriezrien

faitd’aussiinconsidéré!—Jel’auraisfait,monvieilami,réponditHughenposantlamainsursonépaule.Ilfallaitquejele

fasse pour sauver des vies. Nous avons croisé le fer plusieurs fois avant que les autres Buchanancommencentàfuiret,sanssoutien,leurchefs’estrapidementrendu.

—Vousl’avezfaitprisonnier?demandaRionaenregardantderrièrelui.—Non,nousl’avonslaisséretournervaincuverssonpeuple,ditDermot.Pourquoigaspillernotre

grainpourlui?Pourlapremièrefoisdepuisqu’elleleconnaissait,Dermotparaissaitdétenduetconfiant,commesi

finalementilétaitfierdesonchef.Son projet de le rallier à sa cause s’évanouit. Le fait de connaître la vérité ne pouvait que le

retournercontreHugh,justeaumomentoùcedernieravaitbesoindusoutiendetousseshommes.Enfinde compte, il lui fallait accepter que Hugh soit devenu plus important pour elle que son besoin des’enfuir.

—Enparlantdevictoire…Hughlevalebrasenmêmetempsquelavoix.—CélébronsmaintenantleclanMcCallum!Leshommescrièrentdejoieetcommencèrentàmonterlesmarchesendirectiondelagrandesalle.Maggiesetournaalorsverselle.—Nedevriez-vouspasprévenirMmeWallace?Rionalevalesdeuxmains.—Cen’estpasàmoidelefaire.Vousêteslasœurduchef.Moi,jen’aiaucunrôleofficielici.

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—Vousêteslafiancéeduchef,intervintHughenlafixantàtraverssespaupièresplissées.Maggielesregardad’unairhésitant.—Jevaism’assurerquel’onnousservelemeilleurrepaspossible,dit-elleenfin.Jesuissifièrede

toi,Hugh!Ellesehissasurlapointedespiedsetl’embrassasurlajoue,maisRionasentaitleregarddeHugh

pesersurelle.MêmeDermotetAlasdairs’étaientéclipsés.—Ainsi,vousn’avezpasvotreplaceici?demanda-t-ild’unevoixdoucemaismenaçante.—Jevoulaissimplementdirequejen’étaispaslamaîtressedeceslieux.—Maisvousallezledevenir.Elle ne répondit pas.Son attitude, la veille, dans le secret de sa chambre, lui avait certainement

laissécroireàunavenir,alorsqu’ellen’avaitfaitqu’empirerleschoses.—Neparlonspasdecelaici,Hugh.L’heureestàlafête.Elle faillit conclure en disant qu’ils devaient célébrer lesMcCallum,mais elle se ravisa. Hugh

l’auraitinterprétécommeunepreuvedeplusqu’elledésiraitdevenirsafemme.—Jevaisrejoindrevotremère,enchaîna-t-elle.Elleétaittrèsinquiètepourvous.Jepensemême

qu’ellen’arienmangédelajournée.Hughfronçalessourcilsavantdesetournerenentendantunhommel’appeler.Rionapartitàlahâte,

d’abordverslacuisine,ausous-sol,pourvoirsil’onavaitbesoindesonaide,maisMmeWallaceétaitdanssonélémentetcoordonnaitàlaperfectionlespréparatifs.EllealladoncrendrevisiteàlamèredeHugh.Ellelatrouvadanssachambre,deboutprèsdelafenêtre,d’oùelleobservaitl’agitationquirégnaitdanslacour.

—LadyMcCallum, commevous levoyez,Hughest revenu sain et sauf, dit-elle en s’approchantd’elle.

LadyMcCallumacquiesça,leregardhumide,maisellenepleuraitpasouvertement.—Merci,Riona.Ont-ilsrécupérélebétail?Rionaluiexpliquacequis’étaitpassé,puislaissalesilences’installeruncourtmoment,avantde

demander:—Vousallezcertainementdescendre,cesoir,pourfêtersonintronisation?—Sijelefais,jeresteraihorsdesavue,précisaladyMcCallum.Même si ces propos lui parurent quelque peu excessifs,Riona n’eut pas l’impression que c’était

voulu.—Vousnepourrezpasgagnersesbonnesgrâces,sivousl’évitez.LesépaulesdeladyMcCallums’affaissèrent.—Quoiquejefasse,jenelesgagneraipas,soupira-t-elle.Ilnemepardonnerajamais.—Vouspardonnerdequoi?demandaRionagentiment.—D’avoirfaitcequejecroyaisêtrelemieux,ilyadixans.—CelaconcerneAgnès?LadyMcCallumseraidit,maisneréponditpas.Rionasavaitqu’elleauraitdumalàdécouvrirlavérité.—Quoi que vous ayez fait, il ne peut pas continuer de vous en vouloir dix ans plus tard.Vous

pouvezessayerd’arrangerleschoses.—Vousnesemblezpasbienconnaîtremonfils,dit-elled’unevoixamère.—Non,eneffet.Etpourtant,vousettouslesautrespensezqu’ilfautquejel’épouse.—Pensez?soulignaladyMcCallumenlevantfinalementlesyeuxverselle.Jenefaispasquele

penser.Ilestdevotredevoirdel’épouser!Vousdeveztousdeuxfairecequevospèresontprévupourvous.N’êtes-vouspasconscientedelachancequevousavez?

—Vousestimiez-vouschanceuselorsquevousavezépousésonpère?

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—Cen’estpasdutoutlamêmechose.—Vraiment?Pourtant,j’enaibienl’impression.VoyantqueladyMcCallumallaitcontinueràdéfendresonfils,Rionalevaunemain.—Jenesuispasvenuepourdiscuteravecvous.Jevoulaisvousinviteràlafêtedecesoir.—Ilneveutpasquejesoislà,sedéfendittristementladyMcCallum.—Peut-êtrepas,maisvousêteslaseuleàpouvoirchangerleschoses.—Quevousa-t-ildit?demanda-t-elle,posantsurellesesprunellesapeurées.—Aquelsujet?LadyMcCalluml’étudiasiattentivementqu’ellesesentitémue.—Peuimporte.J’ai…besoindemereposer.Rionaquittalapièce,encoreplusconfusequ’avant.Quelsquesoientlesévénementsquis’étaient

produitsentreladyMcCallumetsonfils,cen’étaitcertainementpasunesimpledispute.Elles’étonna,unefoisencore,desonbesoind’aiderHughàfairelapaixavecsonpassé.Maisellepouvaitlefaire,etvivreparmil’ennemiluiavaitapprisàjouirdesespetitesvictoiresdèsqu’ellelepouvait.

LadyMcCallumdescenditpourlacérémonie,cesoir-là,etRionasetintauprèsdelafamilledanslagrandesallecomble.Elleétaitsurpriseetémueparlasolennitéetlasplendeurdulieu.Hughétait touthabillédeblancetportaitlesceptreblancdupouvoiretl’épéeancestraledesonclan.Lechapelainduclan,quirésidaitprèsdeSula,donnasabénédiction.Puistouteslespersonnesdelagrandesallesortirentdans lacouréclairéepardes torches,oùHughavaitprisplacesurun trôneenboissculptéd’un loup,emblème desMcCallum. Riona écouta alors la longue harangue du barde vantant les exploits de sesancêtres.Ilrécitaleursnomsremontantàdelointainesgénérations.Maggieveillaàtoutluitraduire,etRionaparvintmêmeàcomprendreseulequelquesmots.

— Vous savez, en tant qu’épouse de Hugh, vous allez devoir apprendre le nom de tous lesMcCallum,déclaraMaggieensouriant.

Rionahaussaexagérémentlesépaules.—EnAnglais,j’espère!En fait, il incombait plutôt à Cat de les apprendre, et non à elle. Elle observa Hugh et essaya

d’imaginersacousinedeboutàcôtédelui,sanssuccès.Touslesinvitésrevinrentensuitedanslagrandesallepourunfestinquiduratoutelanuit.Onchanta

deschansonsen l’honneurdeHugh, etRionaentenditplusieurspersonnesparlerde lui comme«d’unrocherfortifiéetsûr»,commedeleur«bouclier»,deleur«noblefaucon».Pasétonnantquecertainslairdsseprennentpourdesdieux,songea-t-elle.

Maispas lui. Ilacceptait l’honneurqui luiétait renduavecgravitéet solennité. Ilavaitaccomplichaquepartiedurituelavecconcentration,écoutélaharangueavecunegrandeattention.Ellesesentaitimpressionnéedevoiràquelpointilprenaitàcœursonrôleauseinduclanetellesavaitdéjàjusqu’oùilétaitprêtàallerpourlebiendesonpeuple.

Pourtant,ilavaitcommisuneterribleerreurenl’enlevantet,bientôt,toutlemondelesaurait.Elleravalasonchagrinetsapeurensongeantàcequiseproduiraitalors.S’ilétaitpossibledeconvaincreCatdel’épouser,toutsetermineraitpourlemieux.Peut-êtreétait-celaseulepersonneàquiellepourraitfaireappel.Carsollicitersononcle,quiavaitsciemmentcompromislecontrat,étaitlapirechoseàfaire.

Elleréfléchissaitàcesconclusionslorsqu’ellepritconsciencedecequ’elleétaitentraindefaire:elleenvisageaitdeplaiderenfaveurdel’hommequil’avaitkidnappéeet terrorisée!Maisdepuis,sessentimentsavaienttellementchangé…

***

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IlfaisaitpresquejourlorsqueHughpénétradanssachambreentanguantetenchantonnant.C’étaitfait. Le clan l’avait intronisé ; il était devenu leur chef officiel jusqu’à sa mort. Dermot avait toutorganisé,etilsesentaitrassuréd’avoirgagnéfinalementl’adhésiondesonami.

Maisgagnerait-ilcelledeRiona?Ilsedirigeaverslesportesquiséparaientleurschambresetlatrouvaendormie.Lesrideauxdulit

étaientouverts,commesielleavaitattendusonarrivée. Il laissaéchapperunpetit rirede triompheens’imaginant de nouveau avec elle. Il alluma une bougie avec les braises de la cheminée et l’apportajusqu’au lit pour la contempler. Il dut se retenir aumontant du lit pour garder l’équilibre et continuad’admirerlesrefletsdelaflammescintillerdanssesmèchesblondes.

Il s’était senti tellement fier de l’avoir à ses côtés pendant l’intronisation ! Elle avait écouté laharangue aussi attentivement que si elle en avait compris chaquemot,même s’il avait vu sa sœur luitraduirelachanson.

MieuxvalaitquecesoitMaggieplutôtqueSamuelquilefasse,songea-t-il.Ilnevoulaitpasquesesgens pensent que son garde du corps convoitait sa fiancée.Mais Samuel ne le trahirait jamais. Il sedemandapourtantsiRionaseraitcapabledel’utiliserpourobtenircequ’ellevoulait.

Ilfronçalessourcilsenlaregardant:sesjouesroses,seslèvresentrouvertes,labeautédescourbesqu’il avait exploréesetdecelles auxquelles il rêvaitdegoûter enfin.Chaquemomentpasséavecelleétaituneleçonpourtouslesdeux.Ladernièrefoisqu’ilavaitpartagésonlit,ilavaitétéétonnédesonbesoinde luidonnerduplaisir,etdesagratitudequi l’avaitpousséeà le toucherd’unemanièreaussiintime.Mêmeunefiancéeordinairepouvaitavoirdescraintes,alorsellequiavaitétékidnappée…Elleauraitpuavoirpeurdeluipourtoujours.

Pourtant…àsonretourduraidcontre lesBuchanan,elleavaitcontinuéàaffirmerqu’ellen’avaitaucunrôleofficielauseindelamaison.Maiselleétaitlafutureépouseduchef,etellel’avaitembrasséetcaressé.Ilavaitréussiàlaconquérir,celanefaisaitaucundoute.

Ilétaittempsdeplanifierleurmariage.Ildéposasursonfrontunbaiserquisevoulaitdélicat,maisilfaillittombersurelle.Ellepoussaun

cridesurpriseetlerepoussaavantdelereconnaître.—C’estmoi,dit-ild’unevoixpâteuse.—Hugh,fit-elleavecsoulagement.—Quid’autrequemoipeutvenirdanslesappartementsduchef?Ils’assitlourdementprèsd’elle,etelleroulaversluisousl’effetdesonpoids.—Voussembleztrèsfierdevous,déclara-t-elleenposantlamainsursacuisse.Letaquinait-elleoubiensemoquait-elledelui?Aprèstoutlewhiskyqu’ilavaitavalé,ilavaitdu

malàinterpréterletondesavoix.Elleregardaparlafenêtrelecielquiviraitdoucementaugris.—Jevoisquelafêteadurétoutelanuit.Ilsepenchaverselleetenfouitsonnezdanssoncou.—Nouspouvonsfêterbienplusencore.Elletoussaensentantsonhaleine.—Maisnousn’avonspasletemps,dit-ilenluidonnantunepetitetapesurlesfesses.—Hugh!protesta-t-elle.—Levez-vous,nousdevonspartir.Meschefsnousontinvitésàvoyagersurnosterrespourcélébrer

monintronisation.Jeveuxquevousvoyiezcequivousattend.Ilaperçutalorslatristessequiplanaittoujoursdanssonregardlorsqu’ellecroyaitquepersonnene

lavoyait.Peut-êtreétait-ilivre,maisiln’étaitpasstupide.Ilpritsonvisageencoupe.—Riona,Riona,murmura-t-ilentredeuxbaisers.

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Ilfaillitluidemanderdel’aimercommeuneépousedevaitaimersonmari,maisseravisa.—Nouspartonsensembleenvoyage?demanda-t-elle,pleined’espoir.—Toutàfait.—Dans ce cas, beaucoup de préparatifs nous attendent. Je vous propose de prendre un peu de

repos.—Jen’aipasbesoindedormir.Maissonlitétaittrèsconfortable,etils’allongeaprèsd’elle.Ellefronçalessourcils.—Vousavezbesoindedormir,etjesuisréveilléeàprésent.Pourquoinemelaissez-vouspaspartir

et…Hughsecoualatêteensouriant.—Hugh,unvoyagenécessitebeaucoupdepréparation!Elleentrepritdel’enjambermais,dèsqu’elleeutpasséunecuissesurlui, il l’attiraàlui.Ellese

retrouvajustelàoùilvoulaitqu’ellesoit.—Vousexagérez,Hugh,gémit-elleenlevantlesyeuxauciel.Il l’ignora et s’arc-boutapourpresser son sexe contre la chaleur de son entrejambe. Il l’entendit

prendreunecourteinspirationetvitsonregardsetroubler.—Cettefois,iln’yapasdecordepourentravervosjambes,murmura-t-il.Illaissasesmainserrersursonbusteetpritsesseinsencoupeavantdetaquinerleurpointedubout

dupouce.Ilsedélectadelavoirtremblerdetoutsonêtre.Ilsaisitalorssanuquepourl’attirerverslui,etellefutcontraintedeposerlesmainssursesépaulessouspeinedetomberdroitsurseslèvres.

—Jeneporteriensousmonkilt,dit-ild’unairsatisfait.Etvousn’avezriensousvotrechemisedenuit.

Puisill’embrassaavecfougue.

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Chapitre19

L’odeurdewhiskypénétradanssoncerveaucommesic’étaitellequil’avaitbu.L’haleinedeHughenétaitimprégnée.Maissesmainslatenaientfermement,etellenepouvaitqu’acceptersonbaiser.Danstouslescas,ellenel’auraitpasrefusé.Laproximitédesoncorps,alorsmêmequ’ilétaitivre,suffisaitàéveillersessensauplaisirqu’ilspouvaientpartager.

Cette situation était dangereuse, elle le savait. Rien ne pouvait les empêcher d’aller plus loin,surtoutenl’absencedescordes.SiHughdécidaitdefinirletravailcommencédepuisdessemaines,ellenepourraitpasl’arrêter.Ilroulaseshanchescontrelessiennes,lentement,enrythme,déclenchantenelledesvaguesquinepouvaientqu’accentuersondésir.

Ellepritappuisursesépaulesetlevalatête.—Arrêtez,Hugh.Sinousdevonspartiraujourd’hui,ilnousfautdormir.Ilposalesmainssursataillepourlamaintenirsurluietchangeal’anglejusqu’àcequelapression

sursonsexeprovoqueunplaisirsiintensequ’ellerenversalatêteenarrièreetfermalesyeux.Seulelalaine de son kilt les séparait à présent et, soudain, cette barrière lui parut minuscule. Elle lut laconcentrationsurlestraitsdeHugh,vitlafaçondontillaregardaitetdontilladésirait.Lorsqu’ilposade nouveau les yeux sur ses seins, elle profita de cet instant pour glisser sur le côté et se jeterlittéralement au sol. Ses jambes étaient trop faibles pour la porter. Elle se releva très vite et partit àreculons,tandisqu’enappuisuruncoudeiltendaitlamainverselle.

—Revenez,Riona.—Non!Ellefitdegroseffortspournepasrireendécouvrantlatristesseexagéréequis’étaitpeintesurson

visage.—Dormez,Hugh.Ils’effondrasurlecôtéengrognant,etbientôtsesronflementsemplirentlapièce.Ellel’avaitéchappébelle,songea-t-elleensoupirantdesoulagement.Elleavaitbeauêtreheureuse

desadécision,soncorpsl’étaitbeaucoupmoins.Sonexcitationduratoutletempsoùelles’habilla.Elle passa plusieurs heures avecMmeWallace à apprendre ce qui l’attendait au cours de cette

étrangeprocessionsurlesterresduclan.Cerituelvoulaitquelechefsoitaccompagnédeseshommes.Rionadésiraitcomprendretoutcequ’ellepouvaitdesusetcoutumesenvigueurenEcosse,paysqu’elleavaitreniépendantlongtemps.Maggieetsamèreneseraientpasduvoyage.Ellespréféraientresterauchâteauetattendreleurretour.

RionasongeaalorsàBrendan.Etait-celuiquiavaitétéchoisipours’occuperdeleurschevaux?IlétaitimportantqueHughetluipassentplusdetempsensemble.Elleglissaunmotauchefdecérémonie,lui indiquant que Hugh préférerait certainement que Brendan vienne avec eux, mais au final Hugh

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s’éveillaversmidiets’entretintavecl’homme.Cedernierlaregardadepuisl’autreboutdelacour,puisHughplissa lesyeuxen se tournantverselle.Riona soupira.Brendanne serait pasduvoyage, et ellerisquait d’essuyer une remontrance pour s’êtremêlée de ce qui ne la regardait pas.Qu’espérait doncHugh,enluicachantlavérité?

Ils n’eurent ensuite plus aucun moment en tête à tête. Les hommes qui les accompagnaient lessuivaientpartout:ilyavaitSamuel,lebardequicomposaitetdéclamaitl’histoireduclan,lejoueurdecornemusequil’accompagnait,lecrieurquidéclamaitlesmessagesdeHugh,l’intendantquis’occupaitdeshébergements, legoûteurquiétaitcenséboiredans lacoupeavantHugh,etplusieursguerriersquiaidaientHughàtraverserlesrivièresàsecous’occupaientdesoncheval.Hughnesemblaitpasàsonaisefaceàcettedémonstrationdepuissance,maisSamuelexpliquaàRionaqueleclans’attendaitàcequ’ilsecomportecommeunprince.

Ilsvoyagèrentpendantdesheurescejour-là,jusqu’àlademeured’Alasdair.Labâtisses’élevaitsurdeuxétagesetétaitbeaucoupplusrécentequeLarigCastle.Ellesetrouvaitàl’autreboutdulochVoiletétait entourée de pâturages et de terres cultivées qui s’étendaient dans la vallée, encadrés par lesmontagnes.

Cesoir-là,ilsfestoyèrentets’amusèrent,etRionaeutlacertitudequeHughavaitoubliél’incidentdeBrendan.Mais,pendantleschansons,illapritàl’écartetl’emmenadanslejardin.

Ilsétaientseuls,éclairésparuneluned’été.Ellen’avaitpasprisdechâleoudemanteau,maisilnefaisaitpas très froid.Avec lademeuredanssondoset les jardinsclassiquesqui l’entouraient, elle seseraitpresquecruederetourenAngleterre.

Hughmarchaitàcôtéd’ellesurlesentiersinueux,lesmainsdansledosetl’airgrave.—C’estunebelledemeure,dit-ellepourbriserlesilencegênantquis’étaitinstalléentreeux.—Jen’aipasenviedeparlerdelamaison.Jeveuxquevouscompreniezclairementpourquoivous

ne pouvez pas agir comme vous l’avez fait ce matin, en disant au chef de cérémonie qui doit nousaccompagner.

—Vousn’auriezriendits’ilnes’étaitpasagideBrendan,souligna-t-elleens’arrêtantdevantluietenl’obligeantàluifaireface.

Destorcheséclairaientlesentier,etellevittrèsbienqu’ilétaitcontrarié.—Neveniez-vouspasdemedireque,puisquej’allaisdevenirvotreépouse,j’avaisuneplacedans

votredemeure?J’aicruquecelaimpliquaitquejepouvaisprendrecegenrededécisions.Ellevitlesmusclesdesamâchoireseserrer,maisilneréponditrien.—Hugh,vousdevezmedirelavérité!Est-illefilsquevousavezeuavecAgnès,lafemmeque

vousaimiez?—Non,cen’estpasmonfils,dit-ilentresesdents.Ellelevalesyeuxauciel.— Il faudrait être aveugle pour ne pas voir que c’est votre fils ! Les gens ne cessent de vous

regarder,lorsquevousêtesensemble.—Metraitez-vousdementeur?—Vousm’accusezsanscessedementir.Pourquoivouscroirais-je,alorsquejepeuxvoirdemes

propresyeuxque…—Qu’ilestdemafamille?lâcha-t-ilavecdédain.Evidemment,ilestdemafamille!C’estmon

demi-frère,etnonmonfils.Rionarestaquelquessecondessansvoix.—Commentça,votrefrère?—MonpèreavioléAgnès.Latristessequiteintaitsavoixlafitfrémird’horreur.—«Violé»?murmura-t-elle,abasourdie.

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Ilhochalatêteavecgravité.—Monpèrecroyaitêtreunroides tempsanciensetavoirdesdroitssur toutes lesfemmesqu’il

croisait.Unchefdeclandevraitêtreunpèrepoursonpeuple,etnonunagresseur!Mais,commeils’ensentaitledroit,ilchoisissaittoujoursdesfillesduvillagequinepouvaientriencontrelui.Agnèsn’étaitpaslapremièredontilavaitabusé,maiselleesttombéeenceinte.

Rionareconsidératoutcequ’ellesavaitdeluiquandilavaitdix-neufans.—Vousn’étiezdoncpasamoureuxd’elle?—Non,maisjemesentaisresponsable.J’étaisrevenudeSheriffmuir.J’avaisl’impressiond’être

devenuunhommeet,commej’étaisletanistdemonpère,ilétaitdemondevoirdeprotégerlesfaibles.Pourtant, je n’ai pas vu ce qui se passait, je n’ai pas compris ce qu’il lui faisait. Elle travaillait auxcuisines,etparfois je lavoyaisarracher lesmauvaisesherbesdans lepotager.Elleétaitaimableavecmoiets’inquiétaitpourmablessure.Nousétionsamis.

—Oh!Hugh…,dit-elleenposantlamainsursonbras.Maisillaretirad’ungestebrusque.—Jel’aitrouvéeentraindepleurer.Ellenevoulaitpasmedirecequis’étaitpassé,maisjel’yai

obligée.Acetinstant,elleavaitaussipeurdemoiquedemonpère,etj’aihaïcethommepourcequ’ilavaitfait.

Ilavaitprononcécesmotsavecforce.— Je lui ai proposé de m’épouser, dit-il finalement. J’ai demandé à mon père de renoncer au

contrat,arguantquecequejefaisaisétaitjuste.Rionasecouvritlaboucheavantdemurmurer:—Maisilnevousapaslaisséfaire.—Ils’estesclafféenmerappelantque j’étaispiégéaveccecontratetquenotreclanrisquaitde

perdrenonseulementvotredotmaisaussilaterrequifaisaitnotrefiertéetquiétaitunesourcederevenusraresdanslesHighlands.IlfallaitquejechoisisseentreAgnèsetleclan.

Elleauraitaiméleprendredanssesbras,leréconforter,maisilrestadebout,imposantcommeunemontagneaumilieudescollines.Unpincementdouloureux luiserra lecœur,etellecompritqu’ilétaittroptard,qu’elleétait tombéeamoureusedecethommenobleet têtu,quiavait toujoursfaitpassersoncland’abordetconsacrésavieàexpieruneerreurquin’étaitpaslasienne.Maisl’aimernevoulaitpasdirequ’ellepouvaitdevenirsafemme.

—Agnès nem’aurait pas épousé, continua-t-il d’une voix triste. Elle ne voulait pas que le clansouffreàcaused’elle.J’aiveilléàcequ’elleaitunenouvellemaisondanslevillage,jeluiaipromisunerenteannuellepourelleetl’enfant,maiselleestmorteencouchesenneconnaissantquelahonte,sansjamaisavoirprofitédelajoied’avoirunfils.

Rionasentitleslarmesluibrûlerlespaupières.—Lagrand-mèredeBrendans’estbienoccupéedelui,Hugh.C’estunbongarçon.—Danscecas,pourquoitravaille-t-ilcommegarçond’écurie?Pourquois’expose-t-ilàladouleur

etàlahonte?Iln’ajamaisriensuausujetdenotrepère…Iladitàsagrand-mèrequ’elleperdraittout,sijamaiselledisaitàBrendanlavérité.

—Maisilvousavu,Hugh.Iln’estpasidiot.Ilestconscientdevotreressemblanceetilsaitcequedisent lesgensdanssondos. Ilneparaîtpasamer, justecurieux.Malheureusement,dansnotremonde,beaucoupdebâtardssaventqu’ilsnepourrontjamaisapparteniràleurvraiefamille.

—Jesuisincapabledetenirmesdistances,etcelanepeutqu’êtrepire.Ilfautquejemedécideàluidirelavérité.

Rionaseretintdeluidonnerdesconseils.Ilétaitcapabled’agirensonâmeetconscience.—Votremèreest-elleaucourant?demanda-t-elled’unevoixhésitante.—Oui,répondit-ild’unaircourroucé.

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—C’esthorriblededécouvrirquevotremariestcapabledepareilleshorreurs!Pourquoi luienvoulez-vous?

—Ellenevivaitpasavecmonpèreetn’enauraitpassouffert,sielleavaitditlavérité.—Sielleavaitditquevousn’étiezpaslepèredecetenfant,quevousnel’aviezpasabandonnéde

votrepropregré?Ilhochabrusquementlatête.—Sinousnousétionsdressésensemblecontremonpère,nousaurionspu toutexpliquer.Sielle

s’était tenue à mes côtés au lieu de m’abandonner, d’abandonner Agnès, les choses auraient étédifférentes.

—Sicelapeutvousconsoler,ellesembleprofondémentregrettercequis’estpassé.Elle aurait aimé en dire plus,mais c’était inutile.Ce n’était pas ladyMcCallumqui avait abusé

d’Agnèsavantdel’abandonner,maisHughdirigeait toutesacolèresurelle,cariln’avait jamaispulefairecontresonpère.

—Saconscienceestpeut-êtreaccabléederemords,maisjenepeuxpasl’absoudrepourcequ’elleafait.Ilfaudraqu’elletrouvelapaixparsespropresmoyens.

Pourtant,s’ilcontinuaitàenvouloiràsamèrepoursafaiblesse,luinonplusnetrouveraitjamaislapaix,songeaRiona.

Pendant les jours qui suivirent, elle eut plus l’impression d’être son épouse que sa fiancée. Leschefsetlesgentlemenleshébergèrentdanslamêmechambre,commesicemariaged’essaiétaitunfaitavéré.Danslajournée,Hughtenaitcourouverte,réglaitlesconflitsetaidamêmeunjeuneveufàtrouveruneépouse. Il étaitdétenteurde la loi et faisaitofficede juge.Sesdécisionsétaient justeset,grâceàDieu,iln’eutriend’assezgraveàtraiterpourprononcerunepeinedemort,mêmesicelaétaitaussiensonpouvoir.

Toutlemondesemblaitintimidéparsapersonnemais,àplusieursreprises,elleenentenditcertainsmurmurerdanssondossurseserreursdejeunesseetsurle«bâtard»quitravaillaitàprésentdanssesécuries.

Elleeut rarement l’occasiond’être seuleavec lui.L’idéede s’enfuirne lui apparaissaitplusquecommeunactedelâchetévisantàsesauver,elle.Aprésent,ellecherchaitplutôtunmoyendemontrerauclanqu’ilsavaientétévictimesdesmachinationsdesononclepourdédouanerHughdetoutefaute.Ellen’avait pas renoncé à l’idée de s’enfuir, seulement elle ne pouvait pas supporter l’idée de le laissersouffrir.C’était une décision qu’elle avait prise librement, et elle avait appris à apprécier les chosesqu’ellepouvaitcontrôlerdansunefaiblemesure.

Ledernierjour,Hughl’emmenadanslavalléesacréedesonpeuple.Ilslaissèrentderrièreeuxleurescorte et suivirent un chemin qui semblait s’enfoncer tout droit dans la montagne. Puis le sentierbifurqua, traversaunbois,etsoudainunevastevalléequisemblaitcreuséedans larocheapparutsousleurs yeux. Tout au bout, des champs d’orge semblaient s’enrouler autour d’une autre montagne. Unetourbière humide débordait du sol, tandis que des touffes d’herbes s’élevaient au-dessus de la terremeuble.

Hugh l’entraîna derrière lui, et ils suivirent le sentier qui serpentait au pied de lamontagne. Ilsatteignirentenfinunsillonoùbouillonnaitetdébordaitunesource.

—Buvez,dit-il.C’estl’eaulapluspuredetoutel’Ecosse,etdumondeentier.Ellebutdanssesmainsenriant,etl’eaucristallinelarevigora.—Délicieux,lâcha-t-elle.Ilembrassaduregardsaterreavecfierté.—Lorsquelestaxessurlemaltontétéréintroduites,ilyaquelquesannées,dessoulèvementsont

eulieuenEcosse,carnousnepouvionsplusbrasserlabièreàbascoûts.Lewhiskyaprissaplaceet,pour éviter les taxes, nous le fabriquions en secret.Nous étions assez prudents pour en fabriquer une

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quantitélimitéechaqueannée.LesDuffontcontinuésurcettevoieafindeconserverl’eau,latourbeetl’orgenécessairespourledistiller.

—Etpourmaintenirlesprixélevés,ajoutaRiona.— Pour nous préserver des collecteurs d’impôts, rectifia-t-il en souriant. J’ai entendu dire que

certainscachaientlewhiskysouslesautelsdeséglisesetdanslesberceaux.Pournous,ilestimportantàcepoint!

Riona prit une longue et profonde inspiration. L’endroit était beau, inhospitalier et sombre,maisaussimagique.Auloin,elleentrevoyaitdespaysansoccupésàdécouperdesbriquesdetourbe,puisàlesposersur lesolpourqu’ellessèchent.Néanmoins…leclanétaitsur lepointde toutperdre,etellenepouvaitrienfairepouryremédier.

En revanche… elle pouvait aider Hugh à gagner le respect de son peuple avant que les chosestournentmal.

***

Surlecheminduretour,ilsessuyèrentunorage,ettoutlegroupearrivatrempé.Danslacour,deshommesallaientetvenaientencourant,etHughlesaidaàsecourirdesveauxpiégésparleseauxetquimenaçaientdesenoyer.

Rionan’en futpassurprise.Hughétaitprêtà toutpoursonpeuple.L’admirationet la tristessesedisputaient tour à tour une place dans son cœur, mais il fallait qu’elle aille de l’avant, qu’elle seconcentresurcequ’ellepouvaitcontrôler.

Enfindematinée,elletrouvaladyMcCallumetMaggieentraindecoudredanslesalonréservéàla famille. Dehors, les éclairs zébraient le ciel et le vent rugissait, mais elle essaya de calmer ladyMcCallumenluiparlantdeleurvoyage,despersonnesqu’ilsavaientrencontréesetdesmotsdegaéliquequeHughluiavaitappris.

Pendant tout ce temps, ellene cessadepenser auxaccusationsdeHughcontre samère. Il fallaitqu’elleensacheplus.Tournerautourdupotrisquaitdeluidemandertropdetemps,etHughpouvaitêtrederetourd’unmomentàl’autre.

—LadyMcCallum,j’aiparléàHughd’Agnès.Surprise,Maggielevalatêtedesonouvrage.LevisagedeladyMcCallum,d’ordinairepâle,blêmit

encore.Elleluidécochaunregarddésespéré,implorantsonsilence.Maislafamilles’étaittuedepuistroplongtemps.—Legarçond’écuriequevousavezrencontré,Brendan,c’estsonfils.Maggieluilançaunregardprudentetprécisa:—LegarçonquiressembleàHugh.—Cen’estpaslefilsdeHugh,repritRiona.Maggie,voussavezqueBrendanestvotrefrère,n’est-

cepas?Hughafiniparmeledire.Maggiefitlagrimaceetregardasamèreavecinquiétude.—Votremèreestdéjàaucourant.N’est-cepas,madame?L’ouvragedeladyMcCallumtombasursesgenoux,etelleposaunemaintremblantesurseslèvres.—Mère…,commençaMaggieavantdes’étrangler.Hughm’ademandédenejamaisenparler,pas

mêmeàvous.Jesuissidésoléequepèrevousaitblesséedelasorte!—Ilvousatousblessés,conclutRiona.IlalaissécroireàtousqueHughétaitlepèredugarçonet,

lorsqueHughavouluépouserAgnès,ils’yestopposéàcausedemoi…àcausedececontrat,corrigea-t-elle.

Parfois,l’idéed’êtrelafiancéedeHughluiparaissaitsiréelle!—Qu’auraitpufaireHugh?demandaMaggie.Ilnepouvaitpasromprelecontrat.

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—Non,biensûr.Etilsesentsuffisammentcoupable.Maisdoit-ilvraimentporterlesfautesdesonpèrequialaissétoutleclancroirequesonfilsavaitfaitunbâtardàunejeunefilleinnocente,aulieudereconnaîtrequec’étaitluiquil’avaitviolée?

LadyMcCallumpoussaunpetitcrienentendantl’horriblemot,etmêmeMaggiedevinttoutepâle.—Etcen’estpasfini,continuaRiona.CeterriblesecretpeutenvenimerlesrelationsdeHughavec

leclan.LadyMcCallum,votreépouxestmortmaintenantetnepeutplusporteratteinteàpersonne,pasmêmeàvous.Nepourriez-vouspasvousexprimerpourprendreladéfensedevotrefils?Agnès,etpeut-être d’autres femmes, ont souffert des agissements de votre époux, et nous n’y pouvons rien.Mais necroyez-vouspasqueHughaassezsouffert?

LadyMcCallumsecouvrit levisagede sesmainsetpleura.Maggie s’essuya lesyeux,mais ellen’allapasverssamère,secontentantdelaregarderetd’attendre.

—J’aientendud’autreschoses,quinem’étaientpasdestinées,repritMaggied’unevoixrauque.Jen’étais pas beaucoup là, et les gens neme connaissaient pas. Ils oubliaient jusqu’àmaprésence et sepermettaientdeparlersansretenue.J’aientendu…qu’unefilleduvillages’étaitpendueàcausedemonpère.

Riona retint son souffle et, l’espace d’un instant, seuls les sanglots de ladyMcCallum emplirentl’atmosphère.LesyeuxétrangesdeMaggiebrillaient à la lueurdes flammeset,dehors, levent faisaitclaquerunvolet.

—Jerefusaisdelecroire,ajoutaMaggie.Sonexpressions’étaitfigée.—Jesavaisqu’ilbuvait,qu’ilpouvaitparlerfortetsemettreencolère,maisj’ignoraisce…qu’un

hommepouvaitfaireàunefemme,aupointdeluidonnerenviedesetuer.Jemesuisefforcéedeneplusypenser.

RionaposalamainsurlesdoigtsserrésdeMaggie.—Vousn’auriezrienpufaire,luiassura-t-elle.—Maisaujourd’hui,jepourraisfairequelquechose.Jemesouviensqu’elleavaitunesœur.Ellenecroisapassonregardendisantcela,etRionacompritqu’ellesesentaitcoupable.—Jedoistrouvercettefille,déclaraalorsRiona,trèsdéterminée.Sielleacceptedeparler,nous

auronslapreuvedecedontvotrepèreétaitcapable.NouspourronsensuitedirelavéritésurAgnès,etleclannepourraquenouscroire.

SiellepouvaitapportercettecontributionpoursimplifierlaviedeHugh,elleéprouveraituneformedeconsolationàl’heuredepartir.

—Vousvoussouvenezdesonnom?demanda-t-elle.Maggiesecoualatête.—Jesaisquielleest,ditladyMcCallum,lesyeuxagrandisetravagésparlapeur.

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Chapitre20

Aprèsunejournéedevoyageetsoncombatpoursauversonbétailterroriséetlemettreensécurité,Hugh fut heureux de pouvoir prendre un bain chaud avant le dîner. Il aurait aimé que Riona viennel’assister,maisnenourrissaitguèred’espoir.Ilnesavaitmêmepasoùellesetrouvait.Enarrivantdanslagrandesalle,ilavaitcroiséMaggieetsamère,maispaselle.

Ilétait satisfaitdesprogrès réalisésavec leclan. Ilavait renoué lecontactavecunedouzainedechefs et de gentlemen qui ne connaissaient de lui que la réputation qu’il s’était faite au cours de sajeunesse.Ilavaitl’impressiond’avoirgagnéleurconfianceetsavaitqu’ilsavaientétéimpressionnésparRiona.Pourunefemmequirechignaitencoreàl’épouser,elleneleuravaitprésentéqu’unvisagedigneetaimable.

Auxautres,maispasàlui.Etc’étaitmieuxainsi:illapréféraitexplosiveetentêtée.Lorsqu’ildescenditl’escalierpuisentradanslagrandesalle,ilremarquaavecsurprisequ’elleétait

plusbondéequed’habitude.Samèreetsasœursetenaientsurl’estrade,avecDermotetAlasdair,maisRionaétaitabsente.Ils’apprêtaitàinterrogersasœur,lorsqu’ilvitleteintterreuxdesamère.

—Vousvoussentezbien,mère?demanda-t-il.Vousdevriezpeut-êtrevousretireretdemanderquel’onvousmonteunplateau.

Ellesecoualatêteetpinçaseslèvrespâles.—Jevaisbien.Il lança alors un regard furtif à Maggie, qui haussa légèrement les épaules. Il eut l’impression

qu’elleévitaitdecroisersonregard.—Jen’aipasvuRiona,cetaprès-midi,dit-ilenregardanttoutautourdelui.Jen’aipasvuSamuel

nonplus,maintenantquej’ypense.Ilneluivintmêmepasàl’espritqueRionapouvaits’êtreenfuie.Ilnecroyaitplusquecelafaisait

partiedesesplans.—Samuell’aaccompagnéeauvillage,ditMaggie.—ElleestalléevoirlesRoss?—Je…jen’ensaisrien.Unefoisdeplus,elleévitasonregard.—Quesepasse-t-il?Soudain,lesdoublesportes,àl’arrièredelagrandesalle,s’ouvrirent,etRionaetSamuelentrèrent

danslapièce.Ilsn’étaientpasseuls.Unejeunefemme,l’airapeuré,s’agrippaitaubrasdeRiona.Maisellelevasoudainlementonetavança.Hughavait l’impressiondelaconnaître,seulement, ilétaitpartidepuissilongtempsqu’iln’arrivaitpasàlaremettre.

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Samèreétouffauncrietseleva,commesiellevenaitdevoirunfantôme.Ellesetournaversluietluisaisitlebras.

—Ilfautquejeparle.Quejeparleàtoutlemonde!Commesi lespersonnes réunies s’étaientdoutéesdequelquechose, toutes les têtes se tournèrent

versl’estrade,etlesconversationscessèrent.—Mère…,commençaHugh.—Non,jedoisparler!Elleavaithaussé le ton,etunsilencedeplomb tombasur l’assemblée.Riona, la jeune femmeet

Samuels’immobilisèrentàl’autreboutdelasalle,sansriendire.RionaetMaggieéchangèrentalorsdesregardsconfus,cequil’amenaàcroirequemêmeellesignoraientcequetramaitsamère.

—Jeveuxquelespersonnesdemonclanentendentlavérité,ditladyMcCallumd’unevoixforte.Hugh se raidit, prêt à l’arrêter et à lui demander qu’elle lui confie en privé l’annonce qu’elle

s’apprêtaitàfaire.MaisMaggietirasursamanchepourl’enempêcher.—Monépoux, ledéfuntchefdesMcCallum,étaitunhommecruel.Vous lesavez tousetvousen

aveztoussouffert.Jenepouvaispasfairegrand-chose.Hugh serra les poings. Les gens commençaient à peine à oublier ce qui s’était passé et à faire

confianceàl’hommequ’ilétaitdevenu.Etvoilàquesamèrefaisaitresurgirlepassé!—Maisaujourd’hui,ilestmort,etjepeuxdiretoutelavéritésanscraindrequelesconséquences

retombentsurmesenfants.Jelesaiemmenésloind’icipourlesprotéger,maisjen’airienpufairepourlesvôtres.

Savoixsebrisa.Ellebaissalatête,etHughvitunelarmeroulersurlajouedeMaggie.Quelquessecondesplustard,ladyMcCallumreprit:—Monmariaimaitlestrèsjeunesfemmeset…leurfaisaitdesavances.C’étaitmaletindigned’un

chef.J’ignoraisqu’ils’étaitentichéd’AgnèsMcCallumet,quandjel’aiappris,c’étaittroptard.Elle…étaitenceinte.

Hughressentit lemêmechocqueceluiquisereflétaitsur lesvisagesdespersonnesrassemblées.Pourquoi samère, qui avait gardé ce secret pendant toutes ces années, s’était-elle soudain décidée àparler?IlobservadenouveaulajeunefemmequeRionaavaitamenéeavecelleetcompritpourquoiillaconnaissait:sasœurs’étaittuéequelquesannéesplustôt,unehorribletragédie.Lesimplefaitdelavoiravaitpoussésamèreàprendrepubliquementlaparolepourlapremièrefoisetàdirelavérité.Cettefillequis’étaitsuicidéeavait-elleété,elleaussi,victimedesonpère?Rional’avait-elledécouvertetavait-elledécidéd’amenersasœurauchâteaujustepourvoircequesamèreallaitfaire?

Il aperçut alors Brendan debout au fond de la salle, les yeux écarquillés et les lèvres pincées.Devait-ilinterrompresamèreetprotégerl’enfantdesrévélationsqu’elleétaitprêteàfaireoulelaisserentendrelavéritéjusqu’aubout?

—J’étaisàlamercidecethomme,poursuivit-elled’unevoixcalme.Toutlemondetenditl’oreille.—Jepouvaism’enfuiretemmenermesenfantsavecmoi,maispasassezloin.Jen’aijamaisparlé

par crainte de ce qu’il pourrait nous faire, aux enfants ou àmoi,mais aujourd’hui… il estmort.Mesparolesarriventtroptard,jelesais,maisilfallaitquejediselavérité.Monmariaengendréunbâtard,le jeuneBrendan, et j’espèrequevous saurezvousmontrer aimableavec lui, car iln’est coupablederien,pasplusquemonfils.HughademandéAgnèsenmariage,maismonmaris’yestopposé.

Elles’effondradanssonfauteuil,commesisesjambesnelatenaientplus.Ellesecouvritlevisagedesesmains,etMaggiesepenchaverselle.MaisHughn’avaitd’yeuxquepourBrendan,quiessayaitdesefrayeruncheminversRionaencourantàtraverslagrandesalle.Toutlemondeparlaitenmêmetemps.Alasdairessayadeluiposerunequestion,etDermotsepenchaverseuxpourl’entendre.

Hughlevalesdeuxmains.

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—Jenepeuxpasenparlermaintenant.Brendanatoutentendu.Il quitta l’estrade et se fraya à son tour un passage dans la foule. Les gens essayaient de

l’intercepter,maisillesécartapoliment.IlrejoignitbientôtRionaprèsdesdoublesportes.Dehors,lapénombres’étaitabattuesurlesmontagnescommeunrideaupourpre.—Avez-vousvuoùilestparti?demanda-t-il.—Ilvienttoutjusted’atteindrelacourinférieure,réponditRiona.Ilposabrièvementlamainsursajoue.—Vousn’êtespasétrangèreàtoutcela,n’est-cepas?Ellerougitenhochantlatête,puislevaversluidesyeuxinquiets.Illuiadressaundemi-sourireetquittalagrandesalle.

***

RionaenroulalesmainsautourdesesépaulesenregardantHughdescendredeuxàdeuxlesmarcheset traverser la cour au pas de charge. Elle espérait pouvoir convaincre ladyMcCallum de parler enfaveurdesonfils,maisn’imaginaitpasquecettedernièreauraitl’amabilitéd’épargneràFiona,lasœurdelafemmequis’étaitsuicidée,l’épreuvedefairerevivrepubliquementsadouleur.

EllesetournaversSamuel.—JevaisrejoindreHugh,aucasoùilauraitbesoindemoi.Voulez-vousaiderFionaàtrouverune

placepourqu’ellepuisseserestaurer?Samuellaregardaavecintérêtetacquiesça.Riona s’élança alors dans la nuit ; l’air froid de la montagne s’engouffra sous ses jupes. Elle

traversaàlahâtelacour.Plusieurshommeslaregardèrentd’unœilcurieux;ellelesignora.Lorsqu’ellearriva aux écuries, le souffle court, elle se tint devant la porte et passa prudemment la tête par -l’ouverture.HughétaitagenouilléàcôtédeHamish,leterrier,etcaressaitsatêtegarniedelongspoils.Brendanluitournaitledos,l’airtenduetlespoingsserrés.

—Tuascertainementdesquestionsàmeposer,monpetit,dit-ilenadoptantletondirectd’unchefs’adressantàunsoldatvaleureux.

Brendan finit par se tourner vers lui. Il ne pleurait pas, mais son visage portait les marquesdouloureuses de ce qu’il venait d’apprendre. Il faisait manifestement des efforts pour se montrercourageux,etRionasentitsoncœursebriser.

—Magrand-mèren’ajamaisvoulumeparlerdemonpère.Elledisaitqueleplusimportant,c’étaitquejesacheàquelpointmamèrem’aimait.Maismaintenant,enentendantqu’ellenedésiraitpasfairecequiluiaétéfait…

Savoixsebrisa.Illuifallutquelquesinstantspoursereprendre.— J’espérais que mon père était quelqu’un comme vous, poursuivit-il, et que, peut-être, vous

l’aviezaimée,maisquevousnepouviezpasépouserunesimplefilleduvillage.Hughcontinuadecaresserlechien.—Nousnepouvonspaschoisirnosparents,Brendan.Et,puisquenousavonslemêmepère,jeparle

enconnaissancedecause.Brendanhaussalesépaules.—C’esthorribleetméchant,cequ’illuiafait.—Eneffet.J’aiessayéd’arrangerleschosespourtamère.Nousn’étionspasamoureux,maisnous

étionsamis.—Jesupposequec’estgrâceàvousquenoushabitonsleplusbeaucottageduvillage.Hughneréponditpas.

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—Jesaisquemagrand-mèreappréciecequevousavezessayédefaire.Moiaussi.Jepenseque…c’estmieuxquevoussoyezmonfrère,etnonmonpère.

Hughlevalesyeuxversluiet luiadressaunsourirequifaillitfaireexploserd’amourlecœurdeRiona.Ohoui,commeellel’aimait,cethommequiavaitessayésifortderéparerlesfautesdesonpère,sansjamaisavoirl’impressiond’enfaireassez!

—Tuaimeraisvenirhabiterauchâteauavectagrand-mère?demandaHugh.Noussommesfrères,aprèstout.

Brendanhaussalesépaules.—Merci,maisj’aimel’endroitoùnoushabitons,etmesamissefichentdesavoirsijesuisounon

unbâtard.Maisjepeuxtoujoursveniricipourtravailleravecleschevaux,n’est-cepas?Hughseredressaetposalamainsursesépaules.—Biensûr.Ilmetardeaussidet’apprendreàtenirautrechosequ’unbâton,unjour.—Jemesuisdéjàentraîné,réponditBrendand’unevoixtimide.Hughsemitàrire.Rionaseretiradoucementpourleslaisserenpaix,rassuréedevoirqueHughavaitsuffisammentde

forceetdesensibilitépourconsolerunpetitgarçonbouleversé.

***

LorsqueHugh revintdans lagrande salle, il avait l’impressionquequelqu’un lui avait retirédesépaulesdespierresdelatailledesGrampianMountains.ToutlemondeconnaissaitlavéritésurBrendanàprésent,etilsavaitqu’illedevaitàRiona.Aprèstoutescesannées,samèreaurait-elleprisunetelledécision,siRionan’avaitpasétélà?Leshommesquiavaientjusque-làgardéleursdistancesavecluilesaluaientàprésentavecrespect.Personnen’essayadel’empêcherderetourners’asseoirpourdîner.

IlnevitpasRiona,maisMaggieétaittoujourssurl’estradeetmangeaitavecappétit.Ellesouritenlevoyant.—Jen’airienavalédelajournéetantj’attendaiscemoment,expliqua-t-elle.Ill’observaattentivement.—Tulesavais?—Jenele«savais»pas,précisa-t-elle.Maisj’étaisaucourant.Hughs’assitàcôtéd’elleetluiditàvoixbasse:—Rionaaussi.—C’étaitsonidée.— Elle a obtenu quemère s’exprime publiquement sur ce qu’elle considérait comme une honte

pesantsurnotrefamille?—Bizarrement,mèren’apassoulevébeaucoupd’objections.ElleajustedemandéàRionadelui

promettredetrouverlasœurdelafillequis’esttuéeàcausedepère.—Commentl’a-t-elletrouvée?—Grâceàunrêvequej’aieuilyadecelaplusieursannées,répondit-elled’unairpensif,maisje

ne le lui ai pas dit. J’ai prétendu avoir entendu des rumeurs selon lesquelles père était la raison dusuicidedecettefille,maisquesasœurensavaitpeut-êtreplus.

—Tusavaispourquoicettefilleétaitmorte?Tudevaisêtretrèsjeune.—J’avaisquatorzeans.Jel’aivuehabilléepoursamiseenterremais,commej’ignoraisquielle

était,j’aiessayédel’oublier.Hughposalamainsurlasienne.—Jesuisdésolé,Maggie.Ellehaussalesépauleset,malgrésonsourireencoin,ajoutad’unevoixtremblante:

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—Jemesuisefforcéedenepasprêterattentionàcequisepassaitdansmesrêves.Jenepouvaisrienyfaireetjenevoulaispasquelesgenssoientaucourantdemondon.Ilsonttrouvélafillependuelelendemainmatin.

Puiselleparuts’effondrer.—J’ignoraisquec’étaitàcausedepère!Hughlapritparlecouet,l’attirantàlui,luifitposerlatêtesursonépaule.Elles’agrippaàluien

tremblant,toutenessayantdesecontrôler.Plusieurspersonnesleurlancèrentunsouriredecompassion,etilvitMmeWallaceessuyerunelarmeavantdequitterprécipitammentlagrandesalle.

—Ilestmortàprésent,etsessecretssontconnusdetous.Ilnepeutplusnousfairedemal.Maggielevalatêteetleregardadroitdanslesyeux.—EtBrendan?—C’estunbongarçon.Ilesttristeetbouleversé,maisçavaaller.Jevaisluiapprendreàsebattre

àl’épée.LesouriredeMaggievacillaavantdes’élargir.— Parfait. C’est étrange d’imaginer que nous avons un petit frère. J’espère qu’il nous laissera

veillersurlui.Hughacquiesçaavantdebalayerlasalleduregard.—As-tuvuRiona?—Elleestpartieconsolernotremèreàmaplace.Elles’estditquemèreréagiraitmieuxfaceàune

étrangèrequefaceàsaproprefille.Elleapeut-êtreraison.Maggieluidécochaunmystérieuxsourire.—Jel’aimebeaucoup,Hugh.Commentas-tufaitpouravoirautantdechanceavecunefiancéeque

tun’avaisjamaisvue?—Ellen’estpasencoremafemme,répondit-ilensentantsajoiesemuereninquiétude.—Maisellet’aimesûrement,Hugh.Unefemmenefaitpastoutcelasansraison.Peut-êtrenesait-

ellepasquetul’aimes?Ilsursauta.—Comment?—J’aivucommenttularegardais,dit-elleenriant.Tudoispeut-êtretesfiançaillesàpère,maistu

enes satisfait.Pourquoinevas-tupas la retrouver ? Jevaisprendre saplace auprèsdemère et je tel’envoie.

—Tuesunesœurformidable!Ellehaussalesépaules.—J’aipasséplusdetempsavecmèrequetoi.Toutcequis’estpassécesderniersjoursexpliqueen

grandepartiesoncomportement.Elleabeaucoupsouffertavecpère.—Jelesais.Dis-luiquej’irailavoirdanslamatinée.Ilfautquej’ailletrouverRionad’abord.

***

Lorsque Riona revint dans sa chambre, quelques rares bougies éclairaient la pièce. Elle étaitheureused’êtreseule,soulagéed’avoirenfinpufairequelquechoseici,àLarigCastle,pouraiderHugh.Pluspersonneneleverraitcommeunhommecapabled’abandonnerunefemmeenceinte.Lacruautédeson père avait enfin été révélée au grand jour et elle espérait que, lorsque les hommes du clanconnaîtraientmieuxsapersonnalité,lesderniersmauvaissouvenirsseraientoubliés.

Elle se versa un verre de vin qu’elle but debout, face à la cheminée. Elle se demanda s’il étaitrevenudanssachambreets’ilallaitvenir laretrouver.Soudain,elleentenditunbruitet fitvolte-face.

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Ellel’aperçutalorsallongésursonlit,vêtudesachemiseetd’uneculotteàlaplacedesonkilt.Autourdeseschevilles,ilavaitattachélacorde.

Elleéclataderireensecouvrantlabouche.—Jenepeuxpasmefaireconfiance lorsque jesuisavecvous, jeune fille,dit-ilenhaussant les

sourcils.Lorsqu’iltenditlamainverselle,elleseprécipitaettombadanssesbras.Illaserratrèsfortquelquesinstants,puismurmuracontresescheveux:—Maggiem’aditquec’estgrâceàvoussitoutcelaestarrivé.Merci.Elleenfouitsonvisagedanssachemiseensouriant,s’enivrantdesonodeur.—J’aiétésoutenueparMaggieetvotremère.CommentvaBrendan?— Il est heureuxde savoir la vérité. Je lui ai demandéde s’installer au château,mais il préfère

gardersonanciennevie.—Jecomprends.Elleposal’oreillesursontorseetécoutalesbattementsfortsetpuissantsdesoncœur.Levinlui

avaitdonnélecouragedenepenseràriend’autrequ’àcettenuit.—MaRiona,murmura-t-ild’unevoixpleinededésir.Illuisaisitlementonpourluifaireleverlatêteetplongeasonregarddanslesien.Leurssourires

s’évanouirent. Lorsqu’il l’embrassa, Riona sentit ses dernières résistances tomber. Ils s’embrassèrentavecunefouguequinefaisaitquecroîtreetqu’ellenecherchaitpasàtempérer.Sondésirpourluiétaitinsatiableetpuissant.Elles’agenouillaau-dessusdeluietcommençaàdéfairelesliensdesoncorsage.Bientôt,illuivintenaide.Jamaisellenes’étaitdéshabilléeaussivitedesavie.

Lorsqu’elleseredressa,vêtueuniquementdesachemise,ellepritl’ourletdanssesmainsetcroisasesyeuxtroublesdedésir.

—Riona…Ellefitpasserlevêtementau-dessusdesatêteetlevitretenirsonsoufflelorsqu’elleluidévoilasa

nuditéàlalueurdesbougies.Ilavaitdéjàvuettouchésapeaunue,maiselleéprouvaunsentimentdepuissanceenchoisissantdesetenirainsidevantlui,sansaucunecrainte.

Ilfinitparôteràsontoursachemise,puispressasapeauchaudecontrelasienne.Cettesensationétaitmerveilleuse.Elleluiagrippalesépaulesetsecambrapours’approcherplusprèsdelui.Lespoilsdesontorseexcitaientsesseins,etellesesentitdéfaillirlorsqu’ilfitglissersesmainssurseshanchesavantdelesposersursesfesses.Ill’obligeaàécarterlescuissesetàl’enjamber,toutensetenantassisau bord du lit, puis il la renversa en arrière pour prendre la pointe de son sein dans sa bouche.Ellepoussaunpetitcritoutenleserrantcontreelle,incapabledecontrôlerlesondulationsdeseshanches.

—Prenez-moi,murmura-t-elle.S’ilvousplaît,Hugh,nemefaitespasattendre.Elleglissaunemaintremblanteentreleurscorpspourdéfairelesboutonsdesaculotte.Ill’aidadu

mieuxqu’ilputet, lorsquesonsexejaillit,ellelepritentresesmainspourlecaressercommeil leluiavaitappris.Sescuissesétaientlargementécartéesdevantlui,etelles’avança,commesielleavaitvouluqu’illapénètre.

Soudain,elleseretrouvasurledos,lesmainsplaquéesdechaquecôtédelatête.Hughétaitau-dessusd’elle,àprésent,etlaregardaitdanslesyeux,lesoufflecourt.—Vousêtessûrequec’estcequevousvoulez?—Oui,répondit-ellesansl’ombred’unehésitation.J’ignorejustecomment…—Levezvosgenoux,dit-ilentresesdentsserrées.Lorsqu’elles’exécuta,ils’installaentresescuisses.—Lapremièrefois…,commença-t-il.—Celafaitmal,conclut-elle.Onmel’adéjàdit.Celam’estégal.Faitesvite,c’esttoutcequeje

vousdemande.

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Ellesentitlapeaudoucedesonsexedurglisserenelle.Ladouleurfutbrèveetdisparuttrèsvite,comparéeàl’incroyablesensationdeplénitude,dechaleuretdésirnaissant.

Aumêmemoment, il l’embrassa, et elle laissa sa langue envahir sabouche comme il l’avait faitavecsoncorps.Pendantunlongmoment,ilnebougeapas,secontentantdel’embrasseretdeluicaresserlesseinsjusqu’àcequelapassionembrasesapeau.Elleenvoulaitplusetellesemitàsetortillerentresesbraspourleluifairecomprendre.

Ilentenditsonappel.Ilseretiraetlapénétradenouveau.Ellepoussauncri.Il rit contre sa bouche et commença cette danse de l’amour vieille comme la nuit des temps.

Ensemble, ils sentirent monter le plaisir. Le désir enfla plus encore, la submergeant, l’enflammant.Bientôt,plusrienn’existaquelefrottementdeleurscorps,l’humiditédesabouchesurlasienneetsesmainscalleusessursesseins.

Elle atteignit l’acmé du plaisir qu’elle vécut comme une merveilleuse révélation, tandis quel’orgasmesemblaitsepropagerdanstoutsoncorps,duboutdesesdoigtsàsesorteils.Ilcontinuadelapénétrerdeplus enplusvite, et sonplaisir seprolongea jusqu’àdevenirpresque insupportable.Hughjouitàsontourengrognant,avantdes’effondrersurelle,etelleéprouvaunejoieinfinieàêtreàlui,àaccepterfinalementtoutdelui.

—Jevousaime,Riona,murmura-t-ilcontresajoue.Enentendantcesmots,ellefonditenlarmes.

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Chapitre21

Hughn’avaitencorejamaisditàunefemmequ’ill’aimait,maisilnes’attendaitpasàtelssanglots.—Riona?Il se redressa et essaya de croiser son regard,mais elle se couvrit le visage avec lesmains en

pleurantplusfort.—Vousnepouvezpasm’aimer!gémit-elle.—Expliquez-moicequivousarrive,Riona.Il se releva sans prendre garde à la corde qui lui entravait encore les chevilles, ni à sa culotte

défaite,etfaillittomberàlarenverse.Maisiln’avaitpasletempsdes’ensoucier.Ils’assitàcôtéd’elle,etelleseroulaenboule,trèsloindelui.

—Jenepeuxpasvousaidersivousnemeparlezpas!—M’aider?Elleeutunrirededérision.—Vous ne pouvez rien faire pourmoi,Hugh. Je ne peux pas vous aimer.Nous ne sommes pas

censésêtreensemble.Vousêteslefiancédemacousineet…jeviensdevousséduire!Surcesmots,ellefrémitetenroulalesbrasautourdesesépaules,lecorpssecouédesanglots.Hugh

sentitalorsuneappréhensionhorribleluioppresserlapoitrineavantdesefrayeruncheminjusqu’àsoncerveau.Pourquoipersistait-ellesurcettevoie?Elleétaitheureuse.Elleavaitaidésonpeupleetl’avaitaidé,lui.

Rionaseredressa,ramenalecouvre-litsursesépaulesd’unemaintremblante,puislevalevisageverslui.Seslarmesaccrochèrentlalueurdelabougie,etilaperçutsesyeuxgonflésremplisdetristesse.Sonappréhensionsemuaenpeur.

— Vous ne pouvez pas être à moi, murmura-t-elle, désespérée. J’aimerais rester avec vous etdevenirvotrefemme,maisdanspeudetempslaréaliténousrattrapera.Jevoisd’icimononclearriverenjubilantetsesaisirdesterresdesMcCallum,toutengardantpourluil’argentdeladot.

Satêtes’affaissa,etsessanglotsredoublèrentdeviolence.Hughsesentaitpresqueétourdi.Soudain, ileut lacertitudeque,depuis ledébut,elle luidisait la

vérité, cette vérité à laquelle il avait refusé de croire. Il avait envie de se lever,mais la corde l’enempêchait.Dire qu’il l’avait utilisée contre elle, pourmieux lui prouver qu’ils s’appartenaient l’un àl’autre!Ilignoraitquoifaire.Saufsedébarrasserdecettecorde,chosequ’ilentrepritaussitôt.

—Vousdevezmecroire,Hugh.Personne…nedoit savoir cequi s’est passé entrenous ce soir.Vouspouvezmelaisserpartir.JenedirairienàCat.Letempspassera,etj’arriveraiàlaconvaincredeveniràvous.Vousverrez,elleestmerveilleuse.

Puisellefrémitetseremitàpleurer.

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—J’aitrahimacousineencouchantavecsonfiancé,dit-elleentredeuxsanglots.Sonderniermurmurecontenait tantdedouleurqu’ilenfutdéchiré. Ilauraitaiméla toucher,mais

elleétaitnue,etilvenaitdelaséduire,commesonpèrel’avaitfaitavantluiavecd’autresfemmes.Ellenevoulaitpasdelui,etiln’avaitcessédeluifairedesavances,allantjusqu’àl’attacherdanssonlit…

Unénormesentimentdeculpabilitéetdehontes’emparadelui.Ilseredressad’unbondetboutonnasaculotteavantdeseservirungrandverredevinqu’ilavalad’untrait.

Direqu’ilcroyaitavoiréchappéàlamalédictionquiavaitmarquésajeunesse,àsoninconscienceetàsamanièreinconsidéréedegérerlessituationsdifficiles!Lorsquesesfiançaillesn’avaientpasprislatournurequ’ilvoulait,ilavaitagidemanièretoutaussiirréfléchie,sepersuadantqu’ilétaitdanssonbon droit. Il avait kidnappé une jeune femme innocente, l’avait humiliée et lui avait pris sa virginité,rendantainsiimpossibletoutmariageavecunautrehomme.Pire,ellepouvaitêtreenceinte.

Ilauraitaiméluiparler,maislesmotsrestaientcoincésaufonddesagorge,commes’ilétaitsurlepointdes’étouffer.Soudain,ilsemitàgenouxdevantelle.

—Riona,dit-ild’unevoixentrecoupée.Seigneur,quevousai-jefait?Ilposasonvisagesursesjambesnues.—Jenepeuxmêmepasimplorervotrepardon.Jeneleméritepas!Ilsentitsamaintremblanteseposersursatête,etelleluicaressadoucementlescheveux.Aprésent,

c’était elle qui le consolait ! Il éprouva un tel dégoût de lui-même qu’il eut envie de s’en aller, des’arracher à sa douceprésence.Mais elle aurait pu croire qu’il lui envoulait, et il ne pouvait pas lepermettre.

—Hugh,vousn’avezpasfaittoutcelaparsimpleégoïsme,dit-elleenfin.Vousavezagipourlebiendevotrepeupleenvoyantquemononclerefusaitderespecterlestermesd’uncontratquireposaitsurlaconfiance.

Ils’accroupitpourmieuxlacontempler.—Sij’avaisacceptédevouscroire,j’auraispuvousrameneraussitôt.Maisj’étaisconvaincuque

votrepère,ouplutôtvotreoncle,essayaitdemeduper…—Cequiaétéeffectivementlecas,dit-elled’unevoixamère.Ilaessayéderendrelecontratcaduc

envousfaisantporterlaresponsabilitédesarupture.Ilm’ainstalléedanslachambredemacousinepourquevousenleviezlamauvaisefemme.Je…j’ignorecequ’iladitàCatouàmafamilleàproposdemadisparition.Celafaitplusd’unmoisquejesuispartie.Mesparentsneserontderetourquefinoctobre.Jenepeuxdoncpasleurmanquer.QuantàCat…

Sesparolesmoururentsurseslèvres,etsesépauless’affaissèrent.Cat.IlyavaituneautreCatrionaDuffdanscemonde,cellequ’ilétaitcenséépouser.Nonseulement

il avait ruiné la réputation de Riona, mais il avait également déshonoré sa cousine. Il s’assit sur leparquet,ledoscontrelelit.

Elle se glissa près de lui, se servant du couvre-lit pour couvrir sa nudité. L’étoffe lui permitd’effacerlesimagesdeRionaluiretirantsesvêtements.Elleveillaitàprésentànepasletoucher,maisiln’avaitpasbesoindececontactpoursentirlachaleurdesoncorps,l’appeldelapassionqu’iléprouvaitpourelleetqu’ilressentaitencore,malgrélasituation.

—Pourquoim’avez-vouslaissé…?Ilneputterminersaphrase.—Pourquoi ai-je fait l’amour avec vous ? demanda-t-elle d’une voix triste. Parce que… j’étais

lassedem’opposeràvous.Ilnes’attendaitpasdutoutàcetteréponse.—Vousétiezpersuadéquej’allaisdevenirvotrefemme,continua-t-elle,puisvousavezcommencé

àmedésirerpourmoi-même. Jen’aipaspu résister.Unepartiedemoi repoussaitmesdoutes etmescraintes.J’avaisenviede…ressentiretmême…defairesemblant.Jenecessaisdemerépéterqu’avant

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departir je voulais quevous soyez serein vis-à-vis deBrendan et quevous commenciez à voir votremèrecommelafemmeimparfaitequ’elleétait,etnoncommelacoupabled’actesdusuniquementàvotrepère.Jemesuisditqu’ilfallaitquejelefasseenéchangedeceque…notrerelationallaitvouscoûter.Etjen’aifaitquedécouvriràquelpointvousétiezbon,àquelpointvousétiezdévouéàvotrepeuple.

—Unhommebon?Ils’enétranglapresque.—Aucunmotnepeutdécrirelamanièredontjevousaiblessée!Etcesoir,j’aiportélecoupfatal.

Jevousairavicequevousdeviezréserveràvotreépoux.Elles’appuyacontrelui.—Cesoir,j’avaisenvied’imaginerquevousétiezmonépoux.J’aifaitmonchoix,Hugh,j’aipris

madécision.Lefaitd’êtrevenueici,avecvous,parmivotrepeuple,m’aapprisàmedresserpourobtenircequejevoulais,mêmesijecommettaisuneerreur.Ilnefautpasvoussentircoupable.

Pendant de longues minutes, ils gardèrent le silence, assis côte à côte, se touchant à peine etregardantlefeus’éteindredanslacheminée.

—Qu’allons-nousfairemaintenant?demanda-t-elled’unevoixlasse.Ilsoupira.— Tout d’abord, je pense que je devrais aller trouver votre oncle pour le punir de vous avoir

placéedélibérémentsurlechemindesonennemi.Elleseraidit.—Uneautreguerre,Hugh?Parcequecelareviendraitàunconflit.Ilpréférait seconcentrersursavengeanceplutôtqued’imaginerqu’ilallaitperdreRiona,cequi

finiraitpararriver.Ilavaitpassédessemainesàfaireensortequ’elletombeamoureusedeluietqu’elleaccepteleurmariagearrangé.Or…c’étaitluiquiétaittombéamoureux.

— Mon père n’aurait pas hésité à se venger, dit-il enfin. J’ai déjà assez prouvé que je luiressemblais,cesoir.

—Hugh…—Non,votreamabilitéaprès toutceque jevousai fait subirne faitqu’aggraver leschoses.Et,

mêmesi je renonceàmevenger,celaneveutpasdirequenousneméritonspasque justicesoit faite.Votreonclevousalivréeàmoisanssesoucierdecequipouvaitvousarriver.J’auraispuressembleràmonpère.

—Toutcequejevousdemande,c’estdedifférervotredécision,insista-t-elle.Personneneseramisaucourant.Jenesuispasprêteàvouslaisserrenonceràcemariage.

Iltressaillit.—Vouspensezqu’ilfautquejem’imposeauprèsdevotrecousine?—Cen’estpascequej’aidit.Jenepeuxpasl’imaginer,surtoutaprèsl’avoirtrahiedelasorte.Ilsetournaverselleetlapritparlesépaules.—C’estmoiquisuisàl’originedecettetrahison,Riona,pasvous,murmura-t-ilavecrage.Lecouvre-litglissaetdévoilalehautdesesseins.Ilauraitpréférénepasposerlesyeuxsureux,ne

pas la désirer, mais il n’y pouvait rien. Il l’aimerait toujours. Son corps se moquait bien qu’il l’aitblessée.

—Vous avez cru faire ce qui était juste,Hugh. J’étais parfaitement consciente de la situation etpourtant…

Denouveau,ilsrestèrentsilencieux.—Riona,ilfautquej’yréfléchissesérieusement.Jeneveuxpasquevoussoyezblessée,sijamais

l’onapprendqu’uneerreuraétécommise.—Hugh,ilnes’agitpasdemoimaisduclan.

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—Non,pourmoi, vouspassez avant le clan.Promettez-moiquevousneparlerez àpersonnedecela.JevaisenvoyerSamuelauchâteaudesDuffpourvoirs’ilpeutobtenirdesnouvellesdevotreoncle.

Elleluiserralebras.—Cen’estpasdangereuxpourlui?— Samuel aime le danger, la rassura-t-il. Je ne déciderai rien tant que je ne connaîtrai pas les

intentionsdevotreoncle.D’aprèscequevousm’avezditdevotrecousine, ellene laisserapasvotredisparitionsanssuites.

Ilsrestèrentencoreassiscôteàcôteunlongmoment,jusqu’àcequeRionafrissonne.—Aulit,ditHughenselevantpourl’aideràsecoucher.—Restezavecmoi,s’ilvousplaît,murmura-t-elleenlevantversluidesyeuxhumides.Ilsavaitqu’ilnedevaitpaslefaire,maislepireétaitdéjàarrivé.Ilsecouchasurlecouvre-litet

attiraRionacontrelui.Ellemitdutempsàs’endormir,secouéepardepetitssanglotsdetristessequiledéchiraient.

***

Trois jours étaientpassés,depuis cette fameusenuitqui les avait laissés tousdeuxenproieàunépouvantablemalaise.EtRionanepouvaitpluslesupporter.Elledécidad’allerretrouverHughdanssonsolarium avant le dîner. C’était la première fois qu’ils se retrouvaient seuls. Il n’était plus venu larejoindredanssonlit,n’avaitpluspasséuneseulesoiréeàs’entretenirseulàseulavecelle.Sonabsencelafaisaitsouffrirunpeupluschaquejour.

Illaregardafixement,tandisqu’ellefermaitlaportederrièreelle.—Riona…—Jesais,jesais,jenedevraispasêtrelà.Mais,siMaggiemedemandeunenouvellefoiscequi

nevapas,jecroisbienquejevaishurler.—Elleesttrèstenace,dit-ilavecunpetitsourire.Ils’adossaàsonfauteuilencuirets’étira.CegesterappelaaussitôtàRionasoncorpsnusoussa

chemiseetsonkilt.Ellefrémitetessayademettredecôtéledésirnaissantquis’emparaitd’ellechaquefoisqu’ellelevoyait,qu’ellepensaitàlui.Or,ilnequittaitjamaistrèslongtempssonesprit.

—J’aicruvoirSamueldanslesécuries.—Effectivement.Nousvenonsdenousentretenir.Venezprèsdemoi.Elletiraunechaiseprèsdesonbureau,maisselaissafairelorsqu’illuipritlamainpourl’inviterà

s’asseoirsursesgenoux.Elles’yperchaavechésitation.—Laissez-moivousprendredansmesbras,jeunefille.Jerêvedevoustouteslesnuits.Ellefermalesyeuxetsoupira.—Oh!Hugh…Elle se blottit contre lui et le laissa caresser ses cheveux et son dos. Son contact était chaud,

rassurant,etilavaittoujoursungoûtd’interdit.—Parlez-moideSamuel.—Un événement inattendu s’est produit.Votre oncle estmort des suites d’une fièvre il y a trois

semaines,etlanouvellevienttoutjusted’arriverdanslesHighlands.Rionaseraidit,souslechoc.Soudain,lemondesemblaitavoirchangé.Sononclen’avaitmanifesté

quede l’impatienceetde l’irritationà l’égarddes femmesqui l’entouraient, saufvis-à-visdeCat.Satanteallaitpeut-êtres’épanouir,maintenantqu’ellen’étaitpluscontraintedevivredansl’ombredesonmari.EllecroisaleregardsombredeHugh.

—Qu’est-cequecelasignifiepournous?—Pasgrand-chose,jepense.Lecontratesttoujoursenvigueur.

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Ellehochalatêteetfronçalessourcils.—Matantedoitêtreaccabléededouleur,maiscen’estcertainementqu’unefaçade.—ElleestvenuedanslesHighlandsaccompagnerlecorpsdevotreoncle,aveclenouveaucomteet

sasœur.—CatetOwen?Ilhochalatête.—Jesaisquevotrecousinevousmanque.—C’estvrai,mais…elleignoresûrementquejesuisici.—Nousn’avonsaucuneidéedecequesaitOwen,mais…avez-voussongéquebientôtlanouvelle

quesasœurestaveclui,etnonici,avecmoi,vaserépandre?Peut-être…pensera-t-onqu’ils’agitdeBronwyn?J’aiditàplusieurspersonnesquevousaviezunesœur.

Rionasentitsagorgeseserrer.—Oh!Hugh,murmura-t-elle.Jesuisdésolée!Ilavaittravaillésidurpourêtreunchefdignedesonpeupleet,bientôt,toutlemondedécouvrirait

saterribleerreur.—Cessezdedirecela!Vousn’avezpasàêtredésolée.Nousallonstrouverunmoyenderéglerla

situationsansrévélercequenousnevoulonspasdire.—Maissivousexpliquiezauclanquevousavezététrompéparmononcle…—Au risquedevoushumilier enpublic ?Non, jepensequ’il fautd’abordque jem’entretienne

avecOwen.Soudain, quelqu’un frappa à la porte, et ils sursautèrent. Riona bondit, comme si le fait d’être

surprise sur les genouxdeHughétait le plusgravedespéchés.Pourtant, cen’était rien comparé à cequ’ilsavaientfait,songea-t-elleamèrement.

Hughcontournalebureauetsedirigeaverslaporte,maiscelle-cis’ouvritavantsonarrivée,etuncortègedepersonnesentradanslapièce:Dermot,Alasdair,MaggieetladyMcCallum.

Samuelfermalamarcheetrepoussalaportederrièrelui.Ilsetintdevantlebattant,lesbrascroisés.JamaisRionanel’avaitvuafficherunairaussiintimidant.

Dermotpritlaparolelepremier.—Nousavonsreçudesnouvelles.Lenouveaucomted’Aberfoylevabientôtarriver,encompagnie

desasœur…,ajouta-t-ilenlançantunregardnoiràRiona.J’aimenéuneenquêteapprofondiesurleclanDuff.Lenouveaucomten’aqu’uneseulesœur.

Rionacroisafortementlesdoigts,essayantderenvoyeruncalmequ’elleneressentaitpas.—Oui,Samuelm’ainforméqu’ilsarrivaientaveclecorpsdeleurpère,réponditHugh.—Jen’ai rienditàpersonne,annonçaSamuel.Maisd’autresvoyageurssontarrivésaujourd’hui

aveccesnouvelles.—Qu’as-tu fait, Hugh ? demandaAlasdair, l’air exaspéré. Tu as toujours préféré agir avant de

réfléchir.Hughserralesdents,etRionasentitqu’ilfaisaitdegroseffortspoursecontenir.—MononcleatrompéHugh,déclara-t-ellealorsd’unevoixquitremblaitunpeu.Hughfitungrandgestedelamain.—Cequiseditdanscettepiècenedoitpasquitterl’enceintedecesmurs,vousentendez?Dermot,

as-tuparléàquiconquedunombredesœursd’Owen?Dermothésita,puissecoualatête.—Apartirdemaintenant,lavéritableidentitédeRionadoitrestersecrète.Jedécideraibientôtde

cequej’annonceraiauclan.—Trèsbien,ditDermot.Savais-tuqu’ellen’étaitpastafiancée?Oubiencettesorcièreétait-elle

demècheavecsafamillepourtetromper?

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Endeuxenjambées,Hughlepritpar lecoldesonmanteau,et lapièces’emplitdevociférations.LadyMcCallumpoussauncri.Maggieavaitl’airdevouloirs’interposerentrelesdeuxhommes.Rionaétaitdésespérée.N’était-cepasàcaused’ellequelesrelationsdeHughavecsesamisétaientmenacées,alorsmêmequ’ilsvenaientdeseréconcilier?

—NeparleplusjamaisdeRionaencestermes,ordonnaHughd’unevoixglaciale.Toutestarrivéparmafauteetnonlasienne.Elleestinnocente.

Alasdairlaregardaitfixement,l’airfrustré.—Si vous êtes innocente, Riona, pourquoi nous avez-vous fait croire que vous étiez la fille du

comte?HughlâchaDermot,quinereculapas.—Ellem’adit lavérité,maiselleavait troppeurde ladévoileràquiconque.Jecroyaisqu’elle

mentait,quesononcleessayaitdeserétracteretdenousvolernosterres.Elleportelemêmenomquesacousine.Elleétaitlaseulejeunefemmeprésenteauchâteau,lorsquejel’aienlevéedanssachambre.

Maggieouvritlabouchedestupeur.Toutlemondes’étaitfigé.—Hugh,ditsamèred’unevoixtremblante,tul’askidnappée?Ellelecontemplacommesisespirescraintesvenaientd’êtreconfirmées.Rionaavaitlecœurgros

etauraitaimés’interposerentreHughettoutecettelaideur.Saufqu’ellesavaitqu’ilneverraitpasd’unbonœilsonintervention.

—Oui,répondit-ilenpassantunemainnerveusedanssescheveux.Saqueue-de-chevalsedéfit,etsachevelures’étalasursesépaules.—Lecomteavaitrompulecontratpendantnotreentretien,etj’aicruquej’avaisledroitdelefaire.

Maisj’aicommisuneterribleerreur,etRionaenasouffert,commeleclanrisqued’ensouffrir,luiaussi.Un silence pesant s’abattit sur la pièce.Tous les regards étaient tournés vers eux.Elle savait ce

qu’ils pensaient : qu’elle aurait dû le convaincre qu’elle lui disait la vérité. Elle aurait tant aimédisparaître pour céder à son chagrin,mais cela impliquait d’abandonnerHugh aumoment où il avaitbesoind’elle.

—Ramenez-la,suggéraDermot.Owenn’estpaslemêmehommequesonpère.—Aucundevousne leconnaîtvraiment,n’est-cepas?ditAlasdaird’unevoixamère.C’estun

Ecossaisquivoudraitêtreanglais.—C’estfaux!intervintMaggie.Alasdairl’ignora.—Etnousn’abandonneronspasRiona.Nousdevrionsnousbattrepourréparerl’erreurquel’ancien

comtet’aforcéàcommettre.Uncontratserésumeàunboutdepapier,maislaterrenousrevientdedroit.—Terrequenousrisquonsdeperdres’ilnereprendpasRiona,soulignaDermot.— Croyez-vous que les fiancées soient interchangeables ? demanda Hugh avec colère. J’ai

déshonoréRionaetsacousine.Ilfautquejerépareleschoses.J’iraitrouverOwen.— Mais cela pourrait être dangereux, dit Riona. Laissez-moi les inviter à venir ici. Cat aura

certainementenviedemevoir.EtellepourraitlaprésenteràHughets’éclipserdiscrètement.Cettesolutionétaitpréférablepour

toutlemonde,mêmesisoncœurrisquaitdesebriserenmillemorceaux.—Etfaireentrerlediablecheznous?demandaAlasdair.—Ils’agitdemescousins,pasdudiable,protestaRiona.—Çasuffit! lesinterrompitHugh.JevaisentrerencontactavecOwenetnégocieruneentrevue.

Nousparleronsdecelacalmementetnoncommedesguerriersprêtsà se lancerdansunebataillequi,outreblessernosclans,nepourraqu’attirerl’attentiondesAnglaisstationnésàFortWilliam.

DermotetAlasdairéchangèrentdesregardssceptiques,maispersonnenesedressacontreHugh,etSamuelleurouvritlaporte.

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—Tuétaisavec lui enAngleterre,ditDermoten s’adressantaveccolèreàSamuel.Pourquoinel’as-tupasarrêté?

—C’estnotredevoirdesoutenirnotrelaird,non?réponditcedernier.Dermotpassadevantlui,suivid’Alasdair.SamuelenprofitapourseretireretlaisserHughavecsa

famille.Maggielesdévisagead’unairinquiet.—Commentallez-vous,touslesdeux?demanda-t-elle.Rionaavaitréussiàfairebonnefigurecesderniersjoursmais,àsongranddésespoir,deslarmes

perlèrentauborddesespaupièresettombèrentsursesjoues.—Oh!Riona!s’écriaMaggieenseprécipitantversellepourl’étreindre.Rionafutreconnaissanted’avoirsonsoutien.—Çavaaller,dit-elleenseredressant,avantdereculerd’unpas.Hughaffichaitunairgraveoùsemêlaienttristesseetculpabilité,etelleenfutattristée.—Ilsuffitd’arrangeraumieuxleschosespourleclan,déclara-t-elle.—Etpourvousdeux?demandaladyMcCallum.Commentpouvons-nousvousaider?—Noussommeslesseulsàpouvoirréglercetteaffaire,mère,lâchaHughd’unairsombre.Jevais

d’abordécoutercequ’Owenaàmedire.—Jeveuxêtrelà,décrétaRiona.—Cen’estpasunetrèsbonneidée.Owenrisquedesesentiroffensépourvous,poursasœur,et

furieuxcontremoi.—MaisHugh…,commença-t-elle,frustrée.—Non,jegéreraicetteaffairecommebonmesemble.Surcesmots,ilquittalesolariumd’unpasdéterminé,maissamèreseprécipitaderrièrelui.MaggieetRionaseregardèrentunlongmoment.Rionasesentaitmalàl’aise.QuepensaitMaggie

desonétrangerelationavecsonfrère?—Jesuisnavréequevousayezdûtraverserseulecetteépreuve,ditMaggie.Rionaluiadressaunfaiblesourire.—J’aisurvécu.Jesuismêmetombéeamoureuse,grandbienmefasse.—Ilvousaimeaussi,affirmaMaggied’unevoixdouce.Lechagrinluiserralagorge.—Ilmel’adit,admit-elled’unevoixétranglée.J’auraispréféréqu’ilnelefassepas,carcelam’est

insupportabledesavoirquenousnepourronsjamaisêtreensemble.Maggielapritparlebras.—Neditespascela!JerefusedecroirequeHughnetrouverapasdesolution.— Je ne pourrais jamais satisfaire les besoins de votre clan,Maggie, insistaRiona.Ma dot est

tellementplusmaigrequecelledemacousine!Maislepireestdeperdrelaterrequenosdeuxclansontpartagée.

—J’insistesurlefaitquenousdevonsgarderespoir.Owenest-illemêmehommequ’autrefois?— Je n’ai aucune raison de croire le contraire, mais nous n’avons pas beaucoup eu l’occasion

d’échanger,cesdernièresannées.C’estunhommepragmatiquequin’aimepasbeaucouplesmondanités.Demoncôté,sansCat,jeseraisrestéecloîtréeavecBronwyn.

—JepensequeparleravecOwenestlabonnesolution.Jelesens.Rionaluilançaunregardméfiant.LesprunellesétrangesdeMaggiesemblaientfixerunpointdans

levide.

***

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PourHugh, l’urgence était d’échapper à tous ces regards accusateurs.Or, pour écrire àOwen, ilauraitdûchassertoutlemondeetresterdanslesolarium.Alaplace,ilserenditdanssachambreoùsetrouvaitunpetitbureau.Ilétaitsurlepointderefermerlaportederrièreluiquandilaperçutsamèrequiavançaitd’unpasrapideàsarencontre.

Ilsoupiramaisdécidadel’attendre.—Mère,jen’aipasbesoinquevousmefassiezdenouveaulamorale.—Jenesuispasvenuepourcela,dit-elled’unevoixdouce.Laisse-moientrer,s’ilteplaît.Il ouvrit la porte engrand, et elle pénétra dans la pièce. Il referma le battant et aperçut samère

deboutdans lachambre,qui regardait autourd’elle commesi elledécouvrait le lieupour lapremièrefois.

—Mère?Ellesecoualatêtepuisleregarda,l’airembarrassé.—Jenesuisplusvenueicidepuisdesannées,etlessouvenirsnesontpastrèsagréables.Jesuis

heureusequetut’enfassesdemeilleurs.Ilserralesdentsmaisneditrien,secontentantdepasserdevantelle.—Hugh,jesaisquel’heuren’estpasàlajoiepourtoi,mais…jecroisentoi.Tuvastrouverune

solution.Ils’assitàsonbureau,sortitunefeuilledepapieretouvritlabouteilled’encre.—Merci pour vos encouragements, mère, mais je ne sais pas comment vous pouvez être aussi

confiante.J’aipassémavieàessayerd’êtredifférentdemonpèreet,manifestement,c’estimpossible.Ilentenditl’amertumequiperçaitdanssespropossanschercheràlacacher.—Tuneluiressemblesenrien,ditladyMcCallumavecrage.Illevalesyeuxdelafeuille,surpris.—Nepense jamais celade toi-même, continua-t-elle.Tuas certes étéun jeunehomme impulsif,

furieux d’apprendre que ton avenir avait été décidé demanière aussi implacable pour toi,mais tu asessayé d’aiderAgnès, contrairement à ton père qui n’a fait que la brutaliser. Tu as essayé d’aider leclan…

—Enutilisantunefemmeinnocente!Cen’estpassidifférentdecequemonpèreafait.—Malgré tonerreur, tuas traitéRionaavec tantdegentillessequ’elleest tombéeamoureusede

toi!Iltressaillit.—Ellenem’aimepas,mère.J’aigâchétoutesseschancesdefaireunbonmariage.Ilneluireste

plusaucuneautresolutionquedevoirsijepeuxfairequelquechosepourlasauverdecedésastre.Parmesactes,jeneluilaissepluslechoix.Maisjesaisqu’elleapprécienotreclanetneveutpasquedespersonnesinnocentessoientblesséesàcausedemonerreur.

—Nesoispasaussistupide,monfils.Ellet’aimeetelleveutt’aideràsauvertonclan.Illaregardafixementetgardapourluisesidéeslesplusnoires,cariln’imaginaitpasl’avenirsans

Riona.—J’appréciel’amabilitédevosparoles,mère,maisjedoisécrireaunouveaucomted’Aberfoyle

sanstarder.Ellehochalatêteet,àsagrandesurprise,luieffleurabrièvementlebras.—J’aifoientoi,Hugh.Aieconfianceentoi.

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Chapitre22

Pendant les deux jours qui suivirent l’envoi de la lettre à Owen, Riona resta sur des charbonsardents. Elle passa le plus clair de son temps en compagnie de Maggie et de lady McCallum, quicherchaientàladistraireenbavardantjoyeusementdelapluieetdubeautemps.Maiselleavaitdumalàmanifesterde l’entrain.Hughévitaitdese trouverseulavecelle,etellenepouvaitpas luienvouloir.Chaque foisqu’il lavoyait, il se rappelaitque l’avenirdesonclanétaitenpéril. Jusqu’àprésent, sessuppositionss’étaientavérées.Laplupartdespersonnesnesemblaientpassavoirquelenouveaucomteétaitenrouteavecsasœurounes’ensouciaientpas.

La nuit, Hugh restait dans sa chambre et plusieurs fois, lorsqu’elle n’arrivait pas à trouver lesommeil,elles’étaitglisséesurlapointedespiedsjusqu’ausalonpourcollersonoreillecontrelaporteet l’écouterdormir. Il luiavaitditqu’il l’aimait,maisaujourd’huielleavait l’impressiond’avoir rêvécesparolesetdevivreuncauchemar.

Letroisièmejour,ellefutréveilléeparMaggie.—Riona!appela-t-elleenlasecouantdoucement.Rionapoussaunpetitcrietseredressaensursaut.—Quesepasse-t-il?—HughestpartiretrouverOwensansnous!Allez,habillez-vous,jevousaipréparéunerobe.—Mais…mais…Elleavaitdumalàparler,surtoutavecMaggiequivenaitdepasseruncorsetpar-dessussachemise

denuit.Tandisqu’elleserraitlesliens,Rionaluidemanda:—VousavezentenduHughparlerdesesprojets?—Non,maisunepersonnequinoussoutientm’aprévenue.Vousn’avezpasbesoindesavoirdequi

ils’agit.Maggieluipassaensuiteunjuponpar-dessuslatêteetlenouaàsataille,avantdeprocéderdela

mêmefaçonavecsajupe.—Maggie,maisqui…—Neposezpasdequestions.Frustrée,Rionaenfilalegiletdesonnouvelhabitd’équitation,qu’elleattachasurl’avant.Maggie

semblaitpresséedesuivreHugh,etellelacomprenait.EllegrognaquandMaggiedégageavivementsonplastrondesousleslacets.

—Désolée!Voicivotremanteauetvosbottes.PendantqueRionalesmettait,elletapadespiedsavecimpatience.—Allons-y!lança-t-elle.

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Elles n’eurent aucun problème à prendre des chevaux dans les écuries. Brendan semblait mêmeheureuxd’aidersanouvellesœur.Unefoisqu’ellesfurentsortiesdel’enceinteduchâteau,Rionasesentitenfinlibredeparler.

—Savez-vousparoùestpartiHugh?demanda-t-elle.Jenelevoispasmais,sic’étaitlecas,nouspourrionsêtredécouvertes.

Maggiescrutad’unœilperçantlaterredesMcCallum.UnbrouillardépaisstagnaitàlasurfacedulochVoiletsurlechemin.Lesoleiln’avaitpasencorefaitsonapparition,maislecielétaitparéd’oràl’estetformaitunhalolumineuxautourdesmontagnes.

—Laterrequiproduitlewhisky,réponditMaggieavecconviction.C’estlà-basqu’Owendoitleretrouver.

—Mais…etsinouslerattrapons?—Celan’arriverapas.Plusieurscheminsymènent,etjeveilleraiànepasemprunterlemêmeque

lui.Riona voulut ajouter quelque chosemais se ravisa. Elle avait déjà accepté le plan deMaggie :

inutiledediscuter.Plusieursheuresplus tard,Riona reconnut lepaysageet sutqu’ellesapprochaientde leurbut.Le

chemin se rétrécit aumoment où elles traversèrent un bosquet, avant de s’élargir et de déboucher surl’immensetourbièrequitraversaitlavallée.Cinquantemètresplusloin,HughetOwensefaisaientface,lecorpstendu.

MaggiesaisitlesrênesdeRionaetmurmura:—Restonscachéesderrièrelesarbresetécoutonscequisedit.Ellesdescendirentdechevalsanssefaireremarquer,carlesdeuxhommesnesequittaientpasdes

yeux. Owen était grand et mince. Ses cheveux blonds étaient tirés en une queue-de-cheval et nondissimuléssousuneperruque.Iln’étaitpashabillécommeunHighlander,maiscommeuncomteanglais.

RionalançaunregardfurtifversMaggie,quinelequittaitpasdesyeux.—Votrepèrem’aditqu’ilnemedonneraitpasCatrionapourépouse,ditHughavecvéhémence.Je

nepouvaispaslelaisserromprelecontratsignéavecmonclan!—C’estpourquoivousavezkidnappémacousine?répliquaOwend’unevoixposée.Ilnesemblaitpasindigné.—Votrepèrel’avaitinstalléedanslachambredeCat,etj’aiétéassezstupidepourtomberdansson

piège.Avez-vousinforméquiconquedeladisparitiondeRiona?Owenpinçaleslèvres,maisneréponditpas.—Ila faitensorteque je l’enlèvepourmieuxsoustrairevotresœurauxobligationsde l’accord

passé entre nos deux clans. Si vous croyez que je ne regrette pasmon geste, ajoutaHugh, vous voustrompezterriblement.Jeregretteinfinimentd’avoirplacél’innocenteRionaaucœurd’unconflitquececontratétaitcensérégler.Voulez-vousquececonflitperdure,Owen?

Owenseraidit.—Malgrélescirconstances,jenepeuxpasignorerl’injurefaiteàmacousine,niledéshonneurqui

rejaillitsurmasœur,censéedevenirvotreépouse.Lecontratstipuleque,sijamaislestermesnesontpasremplis,vousrenoncezàcetteterreetàladotdeCat.EtRionadevraretournerchezelle,biensûr.

—LaplacedeRionaestavecmoi,réponditHughd’unevoixglaciale.Ces paroles, prononcées au milieu d’une altercation entre deux hommes importants à ses yeux,

réjouirentnéanmoinsRiona.Hughvoulaitbiend’elleet faisaitcelapourelle,etpasseulementpour leclan.

—Vousl’avezdéshonorée,McCallum.Iln’yariend’autreàajouter.—Danscecas,faisonscequ’auraientfaitnosancêtresetlaissonsledestindenosclansreposersur

nos épaules. Je vous défie en duel. Le vainqueur pourra réécrire les termes du contrat et les fera

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respecter.Rionasentitunfrissondeterreurluiparcourirledos.Elleouvritlabouchepourprotester.—Non!criaMaggieenladevançant.Lesdeuxhommessetournèrentenmêmetemps,lamainsurleurépéeetleurpistolet.Maggiedévalalacolline,Rionasurlestalons.—Riona!criauneautrefemmeensortantd’unbosquet,àcôtéd’Owen.C’étaitCat!Rionapoussauncridejoieetcourutverselleavantdesejeterdanslesbrasdesacousinequ’elle

aimaitcommesasœur.Catsanglotait,levisagebarréparlesmèchesdecheveuxbrunsquis’échappaientdesonchignon.—J’ignoraiscequit’étaitarrivé!Pèreaessayédemefairecroirequetuétaispartiefonderton

foyer,maisj’airefusédelecroire,d’autantqu’ilnevoulaitpasmedireoùtuétaispartie.Oh!Riona,j’aieusipeur!

Elless’étreignirentdenouveautrèsfort,puissetournèrentverslesdeuxhommes.Owen regardait fixement Maggie, mais son expression était indéchiffrable. Les mains sur les

hanches,cettedernièrel’observaitd’unairdedéfi.Owennes’adressapasàelle,maisàsasœur.—Tum’as suivi,Cat ?Elles, aumoins, dit-il en désignantRiona etMaggie, elles n’étaient pas

seulespourfairecevoyage.—Jesuisvenueaccompagnéed’unvalet,lançaCat.Ilestrestéavecleschevaux.PuisellepritunairgraveetlançaunregardnoiràHugh.Cedernierétaitdrapédanssonplaid,ses

braspuissantscroiséssursontorse.Illesfusillaitduregard.—Owenm’aapprisquej’étaisfiancéedepuismaplustendreenfance,déclaraenfinCat,maismon

pèrenemel’ajamaisdit.Riona,est-celui,lebanditquit’akidnappée?—Vousparlezdemonfrère!s’écriaMaggieavecindignation.EllelançaunregardhésitantversOwen,quiladétaillasansvergognedelatêteauxpieds.—Oui,ilm’aenlevée,reconnutRiona.VoiciHughMcCallum,l’hommequetudevaisépouser,Cat.Elleconstata,horrifiée,quesavoixavaittrembléetquedeslarmesluibrûlaientlespaupières.Catposaunemainrassurantesursonbras.—Jesuisdésoléequecelasoitsidurpourtoi.Ilvautmieuxquececontratsoitrompu,surtoutaprès

sonhorriblecomportement.Hughnedisaittoujoursrienpoursedéfendre.—Jen’aieupeurqu’audébut,repritRiona,etHughnem’ajamaisfaitdemal.Ilnevoulaitpasme

laisser partir, car il croyait sincèrement que j’étais la femmequ’il devait épouser. Ilm’a traitée avecrespect.

Hughprit un air plus féroce, et elle comprit qu’il se souvenait des cordes.Elle espérait qu’il setairaitàcesujet.

—Maistun’espascettefemme,Riona,ditOwend’unevoixfroide.Etjerefusedelaissermasœurépouseruntelhomme.

CatregardafixementHughsanscacherlaterreurquis’étaitemparéed’elleàcetteseulepensée.—Cat,cecontratesttrèsimportant,intervintRiona.Ilfauttrouverunmoyen,unmoyennonviolent,

d’arriveràunarrangement.—Jenepeuxpasvousépouserdignement,ladyCatriona,ditHugh.J’aimevotrecousineetjel’ai

déjàprisepourépouseselonlesusetcoutumesdenotrepeuple.—Hugh!protestaRiona.Owendégainavivementsonépée.Lesoleil,quivenaitdeperceràtraverslesnuages,enfitbriller

lemétald’unelueurmenaçante.

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—Dans ce cas, il n’y a plus de discussion possible. J’accepte votre défi, McCallum, et je nem’arrêteraipasaupremiersangversé.Ceseraunduelàmort!

—Owen!criaCat.Jecroyaisquetuvoulaisdevenirunhommedesciences!Jenelepermettraipas.Personnenevamourir!SilairdMcCallumaimeRiona…

EllesetournavivementversRiona.—Riona,l’aimes-tu,toiaussi?Hughposasurelleunregardbrûlant,maisnelasuppliapasdeseprononcerensafaveur.Ellesecouvritlabouchedesdeuxmainsetsentitleslarmessemettrefinalementàcouler.—J’aitellementhonte!sanglota-t-elle.—Nepleurepas,Riona,ditCatenlacouvantd’unregardpleindetendresse.N’aiepashonte.Rien

detoutcelan’esttafaute.Etjenemesenspastrahie.Jeneconnaismêmepascethomme!Pendantunmoment,iln’yeutplusd’autrebruitqueceluiduvent.RionaetHughsecontentèrentde

se regarder et, dans ses yeux, elle lut enfin son amour, son angoisse et sa culpabilité, ainsi que deterriblesadieuxquiluidéchirèrentlecœur.Etait-ilvraimentprêtàsebattrejusqu’àlamortpourelle?

—Jenelesupporteraipas!criaMaggie.Ildoityavoiruneautresolution.Pendant un longmoment de tension, personnene brisa le silence.Hugh regardaitOwend’unœil

mauvais.Le comte lui répondit d’un air tout aussimenaçant, et finit par se tourner versMaggie. Il necachaitplussesémotions,s’aperçutRiona.Derrièresessourcilsfroncés,ilsemblaitréfléchirâprement.Soudain,sonfronts’éclaircit,ilécarquillalesyeuxcommes’ilvenaitd’avoirunerévélation,puisaffichaunairdeprofondesatisfaction.Toutescesémotionssesuccédèrenttrèsvite,aupointqueRionan’étaitplustrèssûredelesavoirvraimentvues.

Owenpritalorslaparole.—J’aiuneautrepropositionàvousfaire,McCallum.J’épouseraivotresœur,etnousscelleronsla

paixentrenosclansunebonnefoispourtoutes.Rionaétouffauncri,maisMaggierestaimmobileetneprotestapas.HughregardatouràtourMaggieetOwen,l’airsoucieux.—Masœur?Quelsliensya-t-ilentrevous?—Vous étiez enAngleterre lamoitié de votre temps et elle àEdimbourg, expliquaOwen.Nous

avonseul’occasiondepasserquelquesmomentsensemble,n’est-cepas,Maggie?Maggierelevalementonenrougissantdemanièrerévélatrice.Maislàencore,ellenes’opposapas

àl’idéed’unmariageentreeux.Hughdécochaàsasœurunregardperplexe.—Maggie,netienspascomptedecetteidéeridicule.Tun’aspasbesoindel’épouser.C’estmoi

quisuislacausedetoutcedésastre,c’estàmoidelerégler.—Unmariageentrenosclansestjustementcequ’ilfautpourarrangerleschoses,insistaOwen.Je

seraistrèsheureuxqueMaggiedeviennemonépouse.Aprésent,cefutautourdeCatderegardersonfrèred’unairconfus.—Maisquesepasse-t-il?Vousvousconnaissezàcepoint?Maggieneréponditpas.Un sourire satisfait incurva les lèvres d’Owen.Dans lemême temps, le visage deHughprit une

expressioninquiétante.—Maggie,ditesoui,imploraOwend’unevoixrauque.Vousêteslaseulepersonneàsavoircequi

s’estpasséentrenous.Ensemble,nouspouvonsconclureunnouveaucontratquipermettraànotrepeupledecontinueràpartagercetteterre.Votrefrèreetmacousinepeuventresterensembles’ilslesouhaitent.Parailleurs,masœurn’aurajamaisàs’inquiéterd’épouserunhommequ’ellen’ajamaisvu.Biensûr,sadotseraconservéepoursonfuturmari,ajouta-t-ilenguised’avertissement.

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—J’aimapropredot,enchaînaRiona,risquantunregardversHugh,mêmesiellen’estpasaussiimportantequecelledeCat.

Pourlapremièrefoisdepuisdesjours,elleentrevoyaitunelueurd’espoir.Elle devinait queHugh se sentait déchiré entre sa sœur, qu’il voulait protéger, et l’occasion de

sauverleuramour,ainsiquelecontrat.MaisellenepourraitjamaisêtreheureusesiellesentaitMaggieréticente.

CettedernièreobservaitOwencommes’ilétaituneespècedeplanteétrange,qu’ellenesavaitpastropcommentutiliser.Owenlalaissaleregarderàl’envi,l’airsûrdelui,enattendantsaréponse.

—J’acceptedevousépouser,Owen,dit-elleenfind’unevoixfroide,presquedétachée.Owen rengaina alors son épée d’un geste déterminé, presque triomphant. Riona se demanda s’il

avaitdéjàréfléchiàcetteparadeavantdeveniràcetterencontre.Soncousinétaitunhommeintelligent,maisilétaitégalementcomteetpouvaitespérerépouserunefemmeissued’unefamillenoble.

—Iln’yaurapasdemariagesijem’yoppose!lançaHughaveccolère.Ilsedirigeaàgrandspasverssasœuretlapritparlesépaules.—Maggie…Elleposaundoigtsursabouchepourlefairetaire,etRionacrutlevoirtrembler.—Hugh,c’estcequejeveux.Owenaraison:celarésoudraittouslesproblèmesentrenosclans.Je

ne leconnaispeut-êtrepas trèsbien,mais ilnem’estpas inconnu.Et jemesentirais tellement fièreàl’idéedepouvoirramenerunepaixquenousneconnaissonsplusdepuisdesgénérations!

Ellebaissaletonets’exprimaavecplusdesolennitéencore.—Jesensquec’estjuste.Samanièred’insistersurcequ’elle«sentait»semblaapaiserHugh.Ilposalamainsursajoue.—Tuenessûre?Ellefinitparsourirefaiblement.—J’ensuissûre.Laisse-moilefaire,Hugh.Jepensequ’Owenaraison.Ilfautqueleschosesen

soientainsi.Lesourired’Owens’effaçalégèrementtandisqu’ilcontemplaitMaggie,maisilneditrien.L’espoirdeRionamontaenflèche,maisellenelelaissapaséclore,pleinedecraintes.—Vousêtessûredevous,Maggie?demanda-t-elle.Maggietournaversellesesétrangesprunellesquibrillaientd’unfeunouveau.—J’ensuissûre.J’attendsdepuislongtempsquemondestinserévèleàmoi,etc’estchosefaite.Owenlevalesyeuxauciel.—Çasuffit,Maggie.Jeneveuxplusentendrecegenredebalivernes!—Oh!maisilvafalloirquenousparlionsdecertaineschoses,répondit-elle.Puisellesetournaverssonfrère.—Hugh,puis-jeavoirtonautorisationd’accepterlapropositionsidélicatementformuléed’Owen?Catnecherchapasàdissimulersonrire.—N’ai-jepasétésuffisammentdélicatàvotregoût?demandaOwenenretrouvantsonsourirede

triomphe.Ilfitunpasverselle,commes’ilvoulaitluiprouversesintentions.RionavitHughseraidir.Ellesavaitqu’ilfaisaitdeseffortspoursecontenir.Maggiedéposaunbaisersurlajouedesonfrère.—C’estcequejeveux,Hugh,répéta-t-elleàvoixbasse.S’ilteplaît,donne-moitonaccord.Hughacquiesçasansparaîtrevraimentsatisfait.—Tu asmon autorisation, dit-il calmement en la serrant brièvement dans ses bras.Mais, si les

négociationséchouent,luietmoiauronsd’autresdiscussions.

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—Ellesn’échouerontpas,luiassuraMaggieavecunpetitsourire.—Venez ici,Maggie. Je dois vous dire quelque chose, dit Owen en se tournant vers l’orée du

bosquet.Ellelesuivitd’unpasélégantetconfiant,indiquantqu’elleétaitprêteàaffronterl’avenirmaintenant

qu’elleavaitacceptésondestin.HughsetournaversCatets’inclinaverselle.—LadyCatriona, jem’excusepour le tort que je vous ai causé et le déshonneur que je vous ai

apporté.Catl’étudiaattentivement.— Je ne peux pasme sentir offensée pour une chose que j’ignorais jusqu’à ce jour et que je ne

désirais pas. Riona et moi nous sommes toujours dit que nous choisirions notremari. Si Riona vouschoisit,j’ensuisheureuse,cardemoncôtéj’épouseraiaussilapersonnedemonchoix.

Rionaavaitl’impressionquesoncœurallaitexploserd’amouretdegratitude.Elleserrasacousinetrèsfortdanssesbras.

—Tum’astellementmanqué!Jecroyaisavoirirrémédiablementgâchénotreamitié.—D’unecertainefaçon, je t’envie,ditCatenreculantd’unpas.Pour tarelation,biensûr,etnon

l’hommeenquestion.J’imaginequ’illuitardedetedemanderenmariage.Soudain,Rionaeutl’impressiond’étoufferdejoie.Etait-cevraimententraindeluiarriver?Allait-

elleenfinpouvoirvivresonproprebonheur?Tous trois attendirent en silence, pendant queMaggie etOwen s’entretenaient enprivé.Owen se

tenait siprèsd’ellequ’il la surplombait. Ilsne se touchaientpasetneparaissaient témoignerd’aucundésirl’unpourl’autre,maisilyavaitquelquechoseentreeux,quelquechosequidevaitêtrelatentdepuistrèslongtemps.

Hughsemblaitdistraitet inquietpoursasœur,chosequeRionacomprenait.Elle-mêmesesentaithébétée.MaisHughn’évoquanileurmariagenileuravenir.

Maggiefinitparsedétournerd’Owen,etHughditd’unairfroid:—IlesttempsderetourneràLarigCastle.Nouspourronsyparlertranquillementdevotremariage.Il n’avait pas parlé de leur mariage, nota Riona, mais elle savait qu’il l’aimait. Il fallait juste

qu’elles’armedepatience.— Attendez, dit Maggie. Hugh, que vas-tu dire au clan à propos du changement des termes du

contrat?Sanshésiter,ilrépondit:—Jevaisleurexpliquercequis’estpassé,biensûr.—Non,vousn’enferezrien,déclaraRionasèchement.Toutlemondesetournaverselle.—Vousêtespeut-être leurchef,Hugh,mais ilscommencent tout justeàvousconnaîtreetàvous

faire confiance.Vous avez commisdes erreursdansvotre jeunesse, et je suis la seule à savoir à quelpointvousavezchangé.

Tandisqu’elleprononçaitcesparoles,elleseditqueMaggieallaitprotester,maiscelle-cineditrien.

—Puisqueleclannevousconnaîtpasencoreautantquevotrefamilleoumoi-même,ilsn’ontpasbesoinde savoir cequi s’estpassé entrenous.La seule chosequi les concerne, c’estquenotreunionrésolvelesproblèmesentrelesMcCallumetlesDuff.

—Vousmeproposezdementir?— Pourquoi serait-ce un mensonge ? Ne voulons-nous pas nous marier et avoir un avenir

ensemble ? répliqua-t-elle sans sedépartir de son calme.Pourquoi devraient-ils savoir commentnousnoussommesréellementrencontrés?Cesinformationsnesont-ellespasprivées?

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—Jen’aijamaisvouluquemesactesjettentlahontesurvous,reconnutHughd’unevoixrauque.—Ilnes’agitpasdemoi,maisdevotrecapacitéàdirigervotreclan!—J’enaiassezd’entendreautantd’abnégationdansvosbouches,intervintOwenavecunemouede

dégoût.Dites-nous ce que vous souhaitez annoncer à votre peuple, et nous irons tous dans votre sens.Nousavonsfaitbeaucoupd’effortspourcorrigerlesactesdenospères.Finissons-en.

OwenregardaostensiblementMaggie,quicroisasonregardsansriendire.—Nouspourrionsdireunepartiedelavérité,suggéracalmementHugh.Quelapremièrefoisqueje

vousaivue,j’aiétéfrappéparvotrebeautéetvotrecourage.Rionasutimmédiatementqu’ilparlaitdumomentoùelleétaitsortiedelavoitureenpleinjouret

qu’ellel’avaitvu,elleaussi,pourlapremièrefois.Ilvenaitdebouleversersavie—enmieux—mais,cejour-là,ellenelesavaitpasencore.Elleéprouvaunsentimentétrange,etpourtantgratifiant,desavoirquecetinstantavaitaussichangésavieàlui.

— Il fallait que vous deveniezmienne, et je ne voulais pas laisser le contrat semettre surmonchemin,continua-t-ilavecferveur.

Maggiesouritàsonfrère,leslarmesauxyeux.—C’estlavérité,n’est-cepas?Etcelaaétébénéfiquepournoustous.RionaréponditàMaggieparunsourire.—Ditessimplementquevoussaviezquij’étaisdepuisledébut.Aprèstout,jevousaiditlavérité,

vousvoussouvenez?Hughfitlagrimace,etOwensecoualatête.—C’estdupassé,Riona.Jenemesouciepasdemoi,maisjenevoudraispasvoushumilierencore,

surtoutaprèstoutcequejevousaifaitendurer.—Maiscelaenvalaitlapeine,déclara-t-ellecalmement.Elle crut un instant qu’il allait en dire plus, mais il tourna les talons pour se diriger vers les

chevaux.Elledutravalersadéception.

***

Enmilieud’après-midi,alorsqu’ilsarrivaientenvuedeLarig,Rionaportaunregardnouveausurlesuperbechâteau.C’étaitsademeureàprésent,etelleleseraitpourtoujours.Ellesentitleslarmesluibrûlerlespaupièresetclignadesyeuxpourlesretenir.EllenevoulaitpasdistraireHugh,quiaffichaitunairextrêmementgraveetavaitgardé lesilencependant tout levoyagederetour.Ellenesesentaitpasnerveusepour autant, commeelle l’aurait été autrefois. Il lui avait dit qu’il l’aimait, et elle lui faisaitconfiance.

En revanche, elle ne lui avait jamais déclaré son amour. Souhaitait-il connaître ses sentiments,maintenantqu’il savaitqu’elleallait l’épouser?Pource faire,elleavaitbesoind’unpeud’intimitéetelleignoraitquandcelaseraitpossible.

Lesgardesnereconnurentpaslenouveaucomted’Aberfoyle,etHughl’annonçad’unevoixforte.— Vous devez traiter le comte avec bonté et respect, continua-t-il, et le considérer comme un

membredemafamille.Les gardes échangèrent des regards surpris, mais inclinèrent la tête et les laissèrent passer. La

nouvelle sembla se répandrecommeune traînéedepoudrederrièreeuxetdans la cour,oùpaysansetgentlemensortirentdesbaraquementspourlesregarderpasser.

Owenchevauchaitledostrèsdroit.Iln’avaitd’yeuxquepourMaggie.Rionaavaitremarquéqu’ilregardaitsouventlajeunefemme,maispendantlevoyageils’étaitcontentédeluiproposerdel’eauetdesgalettesd’avoinesansvraimentchercheràentamerledialogueavecelle.

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Maggie, d’ordinaire si joyeuse, paraissait absente, comme si l’engagement qu’elle avait prisaccaparait toutes ses pensées. Riona connaissait le sens de l’honneur des McCallum. Maggie nereviendraitpassursapromesse.Ellesavaitcequel’onressentaitàl’idéededevoirépouserunétrangeretellenepouvaitqu’espérerqueMaggieetOwenseconnaissaientplusqu’ellenel’imaginait.

Aprèsavoirremisleschevauxauxgarçonsd’écurie,dontBrendanàquiHughadressalepremiersouriredelajournée,ilsmontèrentl’escalierquiconduisaitàlagrandesalle,aurez-de-chausséedelatourprincipale.Lanouvelledeleurarrivéelesavaitprécédés,carMmeWallacelesattendaitdéjà.EllefixaOwenavecdegrandsyeux,commesilediablelui-mêmeétaitvenuleurrendrevisite.

RionaglissalebrassousceluideCat,quiparaissaitinquiète,etmurmura:—Toutlemondeesttrèsaimableetvoustraiteraavecrespect,ici.Catsecontentadehocherlatête.—C’estétrangedesavoirquetuauraisdûêtrelamaîtressedeceslieux,non?Catécarquillalesyeuxdesurprise.—Tum’astoujourssibiencomprise,dit-elle.Ellespouffèrentdoucement,etlatensions’atténua.—MadameWallace,veuillezpréparerunechambrepourlecomted’Aberfoyleetsasœur,s’ilvous

plaît.MmeWallaceretrouvaaussitôtsonsourirehabituel.—Biensûr.LadyRiona,voulez-vousnousaccompagner?CatlançaunregardétonnéàRionaenl’entendantappeléeparcetitre,puissemorditleslèvrespour

dissimulersonsourire.RionasetournaversHughd’unairhésitant.—Allezaveceux,Riona.MadameWallace,lorsquelesdamesserontinstallées,venezmetrouver.

J’aidesinstructionsàvousfournirpourlebanquetquej’aimeraisdonnercesoir.IlsetournaversRiona.—Reposez-vous,madame.Jem’occupedetout.Ellesentitdenouveausagorgeseserrerdebonheuràl’idéed’êtreaimée,àl’idéequequelqu’un

prenne soind’elle.Mais…elleavait aussi envied’allervers lui,qu’il luidiseque tout allaitbien sepasseretqu’ilfiniraitparaccepterlessacrificesqu’ilsavaientfaitspourmettreuntermeàcettequerelleentreleursclans.

Cesoir-là,ellechoisitdeportersanouvellerobepréférée.Unerobebleufoncédontlajupe,fenduesurunplastronbrodé,laissaitvoirladentelledesonjupon.Maryluilançaunregardémerveillé;mêmeCatetMaggieparaissaientimpressionnées.

—Jepensequetudoisêtreamoureuse,cartuesencoreplusbellequed’habitude,ditCat.Savoixétaitempreinted’unenostalgiequilasurprit.Sacousineavaittoujoursétésiindépendante!

Elle disait qu’elle voulait faire ce que bon lui semblait avant de fonder son foyer.Riona espérait luimontreràtraverssonexemplequelemariagen’étaitpasunechosesi terrible…siellemettaitdecôtésonenlèvement,évidemment.

Quelquesinstantsplustard,toutestroisdescendirentdanslagrandesalle,etRionaretintsonsouffle,abasourdiepar le spectaclequi l’attendait. Jamais elle n’avait vu lapiècedécorée avec tant de faste,avec ses tapisseriesdecouleuret sesbannières sur lemur.Toutes les torchesétaientallumées, etunebonne centaine de personnes étaient rassemblées. CommentHugh avait-il fait pour prévenir autant demondeensipeudetemps?Tousétaientvenuspourlui,leurchef.

Ilsetenaitdeboutsurl’estradeavecOwen,ettousdeuxnesemblaientpasàleuraise.MaisOwenparutsedétendreenapercevantMaggie.Illaguidajusqu’àunsiègeàcôtédelui,etelleluiréponditparun sourire poli.Riona se détourna en poussant un soupir.Elle était prête à aider sa future belle-sœurautantquepossible.

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Hugh la contemplait avec une telle gravité qu’elle en ressentit un pincement d’inquiétude.Maisbientôt,lesplissoucieuxdesonfrontdisparurent.

Ilsepenchasursamain.—Avez-vousconfianceenmoi?murmura-t-il.Il fixa sur elle ses prunelles grises qui lui rappelaient au début le froid glacial de l’hiver.Mais

aujourd’hui, l’heure du dégel avait sonné, comme si le printemps s’était installé entre eux, signe d’unnouveaudépart.

—Jevousfaisconfiancedetoutmoncœur,répondit-elleàvoixbasse.Il se redressa alors et, sans lâcher sa main, demanda l’attention de l’assemblée d’une voix

modérément forte mais autoritaire. Tous se turent, comme s’ils attendaient ce moment. Riona avaitl’impressionquemêmeleursouffleétaitcapabledebriserl’immobilitéquirégnaitdansl’air.

—J’aimeraisvousprésentermafemme,RionaDuff,déclara-t-il.L’assembléel’acclamaavantdesetaire,confuse.—Oui, vous savezqu’elle estma fiancée,mais je l’ai prise comme femmeà lamanière denos

ancêtres,saufqu’iln’yaurapasdemariaged’essai.Nousferonsbénirnotreuniondevantunprêtre.Il finitparadresseràRionaun sourirequ’elle lui retourna, radieuse.Quoiqu’ildisemaintenant,

ellesavaitqueceseraitpourlemieux.—Sijevousdiscela,c’estparcequejen’étaispaspromisàRionadepuismonenfance,maisàsa

cousine,ladyCatriona.IldésignaCat,quirougit jusqu’àlaracinedescheveux, toutenlevantfièrement lementon.Owen

avaitgardéunmasqueimpassible,maissesyeuxétincelèrentquandilsetournaversHugh.Ilrégnaitdenouveaudanslasalleunsilencedemort.Touséchangeaientdesregardsconfus.Riona

savaitqu’ilsserappelaientlestermesducontratetcequesignifiaitpoureuxsarupture.—Dès l’instantoù j’aivuRiona, j’ai suqu’elledevaitêtrema femme,déclaraHughd’unevoix

rauque.J’airessentipourelleunélanquejenepouvaispasnier.Rionam’étaitdestinée.Jen’avaispasoublié le contrat établi entre nos clans, mais je savais que je trouverais un accord avec Aberfoyle.Pendanttoutcetemps,jevousaitenuàl’écartdecesecretetjeleregrette.Necraignezrien,lecontratest toujours d’actualité entre nos familles. Et lady Catriona pourra choisir sonmari, décision qu’ellepréfèreprendreseule.

CatsouritpourlapremièrefoisàHugh,etRionasentitsesdernièresinquiétudesdisparaître.— Maggie, ma sœur, va devenir l’épouse du comte, et nos deux mariages mettront fin aux

désaccordsquiséparentlesMcCallumetlesDuffdepuisdessiècles.Les applaudissements qui suivirent cette déclaration furent assourdissants, et même Owen parut

surpris.IlfixaMaggie,quisoutintsilonguementsonregardqueRionaéprouvalebesoindesedétourner,commesiellevenaitdelessurprendreenpleinbaiser.Ellesavaitqu’ilsn’étaientpasencoreamoureux,mais…ilyavaitquelquechoseentreeuxdepalpable.

Hughlevatrèshautsacoupe.—Cewhisky,cetteeau-de-vie,nousaaussiaidésàguérirdupassé.Ilbutlonguement,puispassalacoupeàOwen,quin’hésitapasàytremperleslèvres.Lorsquelewhiskyarrivaentresesmains,Rionasaisitlacoupesousl’œilsurprisdeHugh.—Vousn’êtespasobligéedeboire,jeunefille,murmura-t-il.Jemesouviensdevotreréactionla

premièrefoisquevousyavezgoûté.—Jesuisvotrefemme,HughMcCallum,etjeferaicommebonmesemble.Elleentenditdesriresfuserautourd’elleetbutuneminusculegorgéedewhisky.Ellehochalatête,

retintsonsouffleetessayadenepastousserlorsquel’alcoolluibrûlalagorge.—C’esttrèsbon,dit-elled’unevoixenrouéeavantdepasserlacoupeàMaggie.Hughluidécochaungrandsourireetluipritlamain.

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—Venezavecmoi.Sesjoues,déjàrougesàcausedel’alcool,s’empourprèrentviolemment.—Nousnepouvonspasdéjàpartir,Hugh,murmura-t-elle.Ilritdoucement.—Alorsvenezdehorsavecmoi.Ill’aidaàsefaufilerdanslafoule.Asonpassage,lesinvitésluiserrèrentlamainoulafélicitèrent.

Ilsarrivèrentenfindehors,oùdestorcheséclairaientlechâteau.Maisl’escaliersemblaits’enfoncerdansl’obscurité.

Hughnedescenditpaslesmarches,secontentantdefouillersonregard,tandisqueleventsoufflaitdanssescheveuxnoirs.

Ilsemitalorsàgenouxetluipritlamain.—RionaDuff,jenevousaipasencorefaitcorrectementmademande.Voulez-vousmedonnervotre

main,devenirmafemme,etaccepterdeprendreuneplacedansmonchâteauetdansmoncœur?Rionacroyaitavoirdéjàversétoutesseslarmes,etpourtantellesluimontèrentauxyeux.Ilpressaleslèvressursamainetlevasesprunellesgrisesverselle.—Jevousaime,Riona, etpourtant jenevousméritepas. J’aidoutédevous, alorsquevousne

faisiezquedirelavérité.Jemesuisconcentrésurlesbesoinsdemonclansansmesoucierdutortquejevouscausais.J’aibienfaillivousperdre.

Savoixdevintrauque.—J’aurais ressentiune tristesse insoutenable.Vousêtesdevenue la lumièredemoncœur,Riona.

Jamaisjen’auraiscrupouvoiraimerainsi,sachantdequoimonpèrem’aprivé.Acceptezdedevenirmafemme.

Ilfitunepauseetcontinuad’unevoixéraillée:—Dites-moiquevousm’aimez,jeunefille.—Oh!Hugh…Jevousaimedepuislongtempssansvraimentl’avoirsu.J’avaissipeurdenepas

pouvoirvousépouserquejenemesuispasautoriséeàcroireennotreamour.Aujourd’huiencore,celameparaîtpresqueirréel.Maisjevousaime!

Ellepassalesbrasautourdesoncou,etillasoulevadanslesairsenlaserrantcontrelui.—Jevaisvousépouser,Hugh.Et,mêmesivousavezdéclaréàtousquej’étaisvotrefemme,sachez

quecelanevousdispensepasdem’aideràorganiserunmariageofficiel!Hughritdeboncœurenlareposantausol.—Commevouspouvezlevoiraveclebanquetdecesoir,jesauraimemontrertrèsefficace.—Vous ferez un excellent époux, et chaque jour je remercieraiDieu d’être celle que vous avez

kidnappée.Illuisourit,luipritlamainetl’entraînadanslagrandesalle,parmilesmembresdeleurclan.

***

Nemanquezpasleprochaintomedelasérie«Nocesécossaises»

deGayleCALLEN,àparaîtreenjanvier2017

dansvotrecollectionVictoria!

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TITREORIGINAL:THEWRONGBRIDE

Traductionfrançaise:EmmanuelleSander

©2015,GayleKloeckerCallen.

©2016,HarperCollinsFrancepourlatraductionfrançaise.

HarperCollinsPublishers,LLC,NewYork,U.S.A.

Levisueldecouvertureestreproduitavecl’autorisationde:

Objets:©TREVILLIONIMAGES/SANDRACUNNINGHAM

Réalisationgraphiquecouverture:L.SLAWIG(HarperCollinsFrance).

Tousdroitsréservés.

ISBN978-2-2803-6604-5

HARPERCOLLINSFRANCE

83-85,boulevardVincent-Auriol,75646PARISCEDEX13

ServiceLectrices—Tél.:0145824747

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Celivreestpubliéavecl’autorisationdeHarperCollinsPublishers,LLC,NewYork,U.S.A.

Tousdroitsréservés,ycomprisledroitdereproductiondetoutoupartiedel’ouvrage,sousquelqueformequecesoit.

Cetteœuvreestuneœuvredefiction.Lesnomspropres,lespersonnages,leslieux,lesintrigues,sontsoitlefruitdel’imaginationdel’auteur,soitutilisésdanslecadred’uneœuvredefiction.Touteressemblanceavecdespersonnesréelles,vivantesoudécédées,desentreprises,desévénementsoudeslieux,seraitunepurecoïncidence.

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