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Accès à des médicaments et une santé de qualité · financières pour renforcer les organes de contrôle qualité des médicaments. C’est également l’échelon le plus pertinent

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Accès à des médicaments et une santé de qualité

Mobilisation contre les faux médicaments

Présentation des actions de la fondation Chirac

Préambule P. 2 Plan d’action 2011 P. 3 Calendrier P. 6 Partenaires P. 8 Les faux médicaments, une catastrophe sanitaire P. 9 Les actions préconisées P. 13 Annexes P. 15 Appel de Cotonou – octobre 2009 Allocution de Ban Ki-Moon Secrétaire général des Nations Unies – octobre 2009 Discours du Président Jacques Chirac au Conseil de l’Organisation mondiale des douanes – juin 2010 Revue de presse

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Préambule Campagne de mobilisation contre les faux médicaments

« L'économie criminelle des faux médicaments me révolte. Parce qu'elle s'attaque aux

pays les plus pauvres, et, en leur sein, à des familles sans protection sociale et sans

moyens ; parce qu'elle concerne les médicaments les plus indispensables à la santé

individuelle et collective : ceux qui soignent le paludisme, la tuberculose, le SIDA ; parce

qu'elle s'insinue partout, sur les marchés des rues, comme sur Internet, et qu'elle grossit au

point que ses revenus dépassent ceux du trafic de la drogue ; parce que les faux

médicaments ne se contentent pas de tromper l'espérance des patients et qu'ils sont

souvent des poisons qui tuent ou handicapent. » Jacques Chirac, Appel de Cotonou, 12 octobre 2009

Le 12 octobre 2009, le Président Jacques Chirac, le Docteur Thomas Boni Yayi, Président de la République du Bénin, Monsieur Blaise Compaoré, Président de la République du Burkina Faso, ont lancé de Cotonou un Appel à la Communauté internationale sur l’urgence à lutter contre la fabrication et le commerce des faux médicaments. Huit chefs d’Etat en activité (Bénin, Togo, Sénégal, Burkina Faso, République du Congo, Niger, République centrafricaine, Mali), d’anciens chefs d’Etat ainsi que les représentants de plusieurs Etats et institutions internationales (Laos, Chili, France, Côte d’Ivoire, Nigeria, Union Africaine, Parlement européen, Organisation des Nations Unies) ont signé l’Appel de Cotonou.

Rejoints par de nombreux responsables politiques souhaitant remédier à ce fléau de santé publique, les signataires s’engagent à adopter des mesures de gouvernance et d’amélioration du circuit de distribution des médicaments, ainsi qu’à promouvoir un texte législatif contraignant de portée internationale. Ayant réussi à créer le consensus autour de son initiative, la fondation Chirac poursuivra en 2011 la campagne de mobilisation lancée depuis l’Appel de Cotonou, et développera des actions sur le terrain pour encourager les gouvernements à adopter des bonnes pratiques et politiques sanitaires contre les faux médicaments.

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Plan d’action pour 2011

1/ L’Appel de Cotonou, pour politiser l’enjeu de médicaments falsifiés La problématique des médicaments falsifiés est complexe. Les organisations internationales qui s’en sont saisie pour tenter de la résoudre connaissent des difficultés à cause du sujet de la contrefaçon, qui se rapporte souvent aux droits de propriété intellectuelle des brevets déposés par les laboratoires pharmaceutiques. Parmi les enjeux de développement du Sud, celui de l’accès aux médicaments à des prix raisonnables amène certains pays à contester ces droits de propriété intellectuelle. Leur détermination provoque un blocage des négociations, cristallisant une méfiance réciproque entre pays du Sud et pays du Nord. Cela permet aux producteurs de faux médicaments contenant des principes actifs sous dosés ou inexistants de prospérer, de tuer des centaines de milliers de patients dans les pays en développement, et de croître grâce aux nouveaux moyens de communication comme internet. Utilisant les mêmes réseaux criminels que les autres trafics, celui des faux médicaments connaît une croissance inquiétante : il s’élève en 2009 à plus de 50 milliards d’euros. Certains médicaments font l’objet d’une falsification plus importante : on évalue à 50% les antipaludiques et antibiotiques au principe actif mal dosé ou faux, vendus en Afrique sub-saharienne. Face à cela, la fondation Chirac a tenu à initier un Appel international politique, afin de résoudre ce drame sanitaire qui affecte considérablement les plus faibles. Suite à cette première démarche, elle a mis en place un plan d’action cohérent.

2/ Une campagne de mobilisation internationale La fondation Chirac mène une campagne de mobilisation internationale envers les responsables politiques et les organisations compétentes, afin de se doter des moyens juridiques et organisationnels de combattre les trafics de faux médicaments.

a. Une action de plaidoyer auprès des chefs d’Etat et les responsables d’organisations internationales Depuis octobre 2009, une quarantaine de responsables internationaux ont rejoint l’Appel De Cotonou. Les chefs d’Etat et de gouvernement, organisations internationales et intergouvernementales signataires s’engagent à agir ensemble pour sécuriser le circuit de distribution des médicaments, favoriser les médicaments essentiels génériques, et travailler à une meilleure formation des personnels et information des patients. La fondation Chirac veut promouvoir cet Appel et ses implications auprès de tous les acteurs intéressés. L’objectif de la Fondation est d’aboutir à la rédaction d’une Convention de portée internationale permettant aux pays de disposer d’un outil juridique permettant de criminaliser la production et le commerce de ces produits de santé falsifiés et dangereux.

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b. Un travail de plaidoyer qui a porté ses fruits en 2010. En effet, l’Appel de Cotonou est désormais signé par une quarantaine de responsables internationaux, parmi lesquels les présidents d’Algérie, de Tunisie, du Mali, du Gabon, du Tchad, du Liban, de Bulgarie, de Chypre, de Grèce, de Slovaquie et de Slovénie, ainsi que le Secrétaire général de la Francophonie, le Président de la Commission européenne, le Secrétaire général d’Interpol et le Secrétaire général de l’Organisation mondiale des douanes. Le plaidoyer de la fondation Chirac a conduit les Etats membres de la Francophonie à adopter une résolution sur les faux médicaments et produits médicaux falsifiés, à l’occasion du Sommet de la Francophonie qui s’est tenu à Montreux du 22 au 24 octobre 2010. Le Conseil des ministres du groupe des Etats ACP (Afrique – Caraïbes – Pacifique), constitué pour développer les relations des pays en développement avec l’Union européenne, a également adopté une résolution, le 12 novembre 2010, pour faire de la lutte contre les faux médicaments une priorité des politiques de développement et de santé. La Fondation a réussi enfin, à porter le thème de la lutte contre les faux médicaments et de la sécurisation des systèmes de santé à l’agenda des Journées européennes du Développement, qui se sont tenues à Bruxelles les 6 et 7 décembre 2010. Cela a permis pendant une journée entière, de rassembler experts et responsables politiques des pays en développement et de l’Union européenne, autour des sujets de la gouvernance des médicaments, du renforcement des circuits de distribution des médicaments, et de l’élaboration de mesures juridiques pour criminaliser ce trafic.

c. En 2011, le développement d’un outil juridique de portée internationale Le Conseil de l’Europe a préparé une Convention « sur la contrefaçon des produits médicaux et les infractions similaires menaçant la santé publique ». Adoptée le 8 décembre 2010, cette convention sera ouverte à signature en mars 2011, et devra pour être mise en œuvre, recueillir un minimum de 5 signatures d’Etats membres du Conseil de l’Europe. La Fondation a décidé d’apporter son soutien à ce qu’elle considère comme une efficace première étape. La Convention du Conseil de l’Europe ayant pour particularité d’être ouverte, des pays-tiers pourront la signer. L’objectif de la Fondation en 2011 est donc de peser pour la ratification de cette convention, et lui conférer un aspect le plus international possible. Ce travail est un préalable nécessaire à une démarche plus spécifique auprès de l’Assemblée générale de l’ONU, qui est en mesure de mandater son Conseil Economique et Social pour la rédaction d’une Convention internationale contraignante, clairement élaborée en vue d’améliorer les politiques de santé publique et d’accès aux médicaments de qualité.

De nombreux rendez-vous internationaux en 2011 permettront à la Fondation d’attirer l’attention sur l’importance de soutenir l’idée d’un cadre législatif international.

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d. L’application au niveau national de l’Appel de Cotonou La signature d’une convention internationale, outil juridique offrant un cadre d’action, doit être appuyée par la démonstration qu’au niveau national les conditions sont réunies pour agir efficacement. Production criminelle faisant l’objet de trafics, prospérant sur les marchés et par des démarches de vente directes, la lutte contre la production et le trafic de faux médicaments concernent de nombreuses administrations. La Fondation encourage la décision politique et la mise en place d’une gouvernance spécifique aux faux médicaments dans les pays signataires de l’Appel de Cotonou afin de rassembler ces administrations ainsi que les acteurs de la société civile. Trois volets de cette gouvernance sont indispensables :

• Recommandations juridiques et organisationnelles mettant en phase les douanes, la police, les administrations, ainsi que les médecins et les pharmaciens.

Des comités nationaux de lutte contre les faux médicaments ont été organisés dans trois pays : Sénégal, République du Congo et Bénin.

La fondation Chirac a pu se rendre en 2010 au Sénégal, au Bénin, au Congo, au Cameroun, en République démocratique du Congo, ainsi qu’au Burkina Faso.

Des déplacements sont prévus en 2011 en République centrafricaine, au Burkina Faso, au Gabon, au Bénin, au Cambodge et au Vietnam.

• Campagnes de communication auprès du grand public sur l’enjeu sanitaire des faux

médicaments et la bonne consommation de médicaments. Ce volet d’action de terrain est fondamental si l’on considère qu’aucun patient ne consommerait en connaissance de cause des faux médicaments mettant sa santé en danger.

Il doit être adapté aux différents pays et zones (rurale/urbaine), pour des populations où l’analphabétisme varie de 50 à 80% et où le budget consacré à la santé est le deuxième poste de dépense d’un foyer.

• Une logique d’action régionale, pour lutter contre un trafic transfrontalier La fondation Chirac souhaite porter une partie de son plaidoyer auprès des communautés économiques régionales africaines, outils de l’Union Africaine pour une meilleure intégration régionale et structuration des marchés intérieurs.

Une action commune des Etats menacés par les faux médicaments, au niveau des communautés économiques régionales, permettrait de mettre en commun les ressources financières pour renforcer les organes de contrôle qualité des médicaments. C’est également l’échelon le plus pertinent pour une meilleure coopération douanière et pour l’harmonisation des normes d’autorisation de mise sur le marché des médicaments, permettant un accès plus aisé aux médicaments essentiels listés par l’OMS.

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Calendrier 2011 de la lutte contre les faux médicaments Les événements internationaux prévus en 2011 représentent autant d’opportunités pour l’action de plaidoyer de la Fondation. Le calendrier est en cours de définition. Mars 2011 : Ouverture à signature de la convention MEDICRIME du Consei l de l’Europe.

• La convention sera ouverte à signature durant la présidence russe du Conseil des ministres du Conseil de l’Europe.

16 et 17 mars 2011 : Intervention de Catherine Joubert et du Professeur Marc Genti l in i à la Commission européenne et au Parlement européen. Avri l 2011 : Table ronde sur les faux médicaments en Afr ique de l’Ouest, Ouagadougou, Burkina Faso. 26 avri l 2011 : Première Conférence jointe de APEC harmonization center, DIA et IFPMA pour les affaires réglementaires en Asie, à Séoul, Corée.

• Cette réunion rassemblera les responsables des pharmacies et des agences du médicament de tous les pays d’Asie.

16 au 24 mai 2011 : Assemblée Mondiale de la Santé, Genève. Mai 2011 : Réunion plénière de l’Assemblée parlementaire ACP/UE à Budapest

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Organisation de la campagne contre le trafic de faux médicaments Sous l’autorité du Professeur Marc Gentilini, plusieurs équipes participent à la conception et à l’organisation de la mobilisation contre les faux médicaments.

Délégué général pour l’accès aux médicaments de qualité Le Professeur Marc Gentilini, Président honoraire et membre de l’Académie de médecine, Président honoraire de la Croix Rouge Française

Comité scientifique présidé par le Professeur Marc Gentilini Miloud Belkaïd / Conseiller de la Fondation Mérieux Philippe Bernagou / Directeur général de la Fondation Pierre Fabre Thierry Cornillet / Ancien député européen (1999-2009) Claude Debrulle / Directeur général honoraire du Ministère belge de la Justice, Président honoraire du Comité directeur pour les problèmes criminels du Conseil de l’Europe Docteur Hélène Degui / Directrice générale de la Centrale humanitaire médico-pharmaceutique Maryse Dugué / chef de projet Santé et protection sociale, Agence française de Développement Jacques Franquet / Préfet honoraire, Directeur de l'Institut International contre la contrefaçon de médicaments à Massy Yves Juillet / Conseiller du LEEM (Les Entreprises du Médicament) Edgard Kpatindé / Conseiller spécial du Président de la République du Bénin Stéphane Mantion / Directeur de projet en charge de l'outremer, des affaires européennes et des relations internationales, Ministère de la Santé et des Sports Aline Plançon / Chef du projet INTERPOL/IMPACT Docteur Pierre Saliou / Professeur agrégé de l’Hôpital du Val-de-Grâce, Membre de l’Académie des Sciences d’Outre-mer Docteur Tuan Tran-Minh / Médecin, Expert auprès d’organisations médicales de solidarité internationale Bernard Vatier / Avocat, Bâtonnier de l’Ordre des Avocats au Barreau de Paris de 1996 à 1997, Membre fondateur de la fondation Chirac Christophe Zimmermann / Coordinateur de la lutte contre la contrefaçon et la piraterie à l’Organisation Mondiale des Douanes

Membre du Comité d’honneur de la fondation Chirac : Mohammed Vall / Président de la République islamique de Mauritanie de 2005 à 2007

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Ce programme est conduit en partenariat avec : et avec le soutien de : Ainsi que de nombreuses personnes privées, que la Fondation remercie chaleureusement. Fondation Chirac Catherine Joubert / Directeur général de la fondation Chirac Pierre Catalan / Chargé de projet stratégie Juliette Karpa / Chargée des relations presse de la fondation Chirac Capucine Samuel-Lajeunesse / Chargée de communication de la fondation Chirac Conseiller média : Seth Goldschlager / Conseiller médias étrangers

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Les faux médicaments, une catastrophe sanitaire Dans de nombreux pays d’Afrique et dans une partie de l’Asie et de l’Amérique latine, la proportion des faux médicaments peut dépasser les 30 %1. Leur trafic, en progression constante, tue davantage que la drogue dans les pays du Sud. Mais ce fléau s’étend dans le monde entier, principalement en Afrique et en Asie. L’Europe et les Etats-Unis, eux-mêmes, ne sont cependant pas épargnés.

1/ Qu’est-ce qu’un faux médicament ? Le terme de « faux médicaments» désigne des médicaments comme des vaccins, falsifiés ou mal conçus, ne contenant pas de principe actif, des principes actifs corrects mais avec un mauvais dosage et ceux ayant un faux conditionnement (délibérément ou frauduleusement mal étiquetés). Ils sont le plus souvent vendus dans la rue et sur les marchés, les consommateurs les achètent de bonne foi. Leurs ingrédients sont parfois toxiques et leur consommation a des conséquences dévastatrices : complications rénales ou osseuses, pharmaco résistance… et peuvent provoquer la mort des patients : En 2006, l’OMS évalue à 200 000 le nombre des victimes d’antipaludéens faux ou mal prescrits. Ce sont des produits qui trompent les patients les plus démunis, en ne leur rendant pas le service attendu.

2/ Un trafic en expansion Le caractère illégal du trafic de faux médicaments et le faible engagement des États pour l’endiguer rendent difficile la collecte de données. Cependant les experts du domaine de la santé et les acteurs de terrain s’accordent pour décrire une situation alarmante.

L’achat des médicaments dans les pays où il n’y a pas de sécurité sociale, représente le deuxième poste dans le budget des familles. La qualité des médicaments constitue dès lors un enjeu économique considérable pour les populations. Les bénéfices de ce commerce sont en voie de supplanter ceux du trafic dont il a emprunté les méthodes, le trafic de la drogue. Alors qu’un usager de drogue sait qu’il absorbe un produit prohibé, un malade, lui, ne sait pas que le médicament qu’il prend est dangereux. Aujourd’hui, mis à part quelques rares pays du monde où la riposte commence à s’organiser, les autorités n’ont pas pris les mesures qui s’imposent pour prévenir et contrôler ce grave préjudice pour la santé publique. La fabrication, le trafic, la vente de médicaments et de vaccins falsifiés sont d’autant plus prisés par les réseaux criminels internationaux que la communauté internationale, les institutions internationales n’ont pas réagi avec la même vigueur que contre le trafic de drogue. Les malfaiteurs ont vu dans le développement de l’usage du vaccin et du médicament un moyen facile et jusqu’ici, sans risque, de gagner beaucoup d’argent. Des groupes de trafiquants transnationaux se sont emparés de ce commerce lucratif et les sommes recueillies sont reconverties dans d’autres activités délinquantes (blanchies, elles ne sont jamais réinjectées dans les économies nationales et sont, le plus souvent, placées dans des paradis fiscaux).

1 Counterfeit drugs kill ! – OMS, groupe IMPACT, 2008

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« Nos pays sont la cible privilégiée du commerce informel de médicaments : les frontières sont poreuses, les Etats ne sont pas préparés à la mondialisation, l'assurance maladie est quasi-inexistante et deux personnes sur trois vivent sous le seuil de pauvreté. Le terreau est là pour la prolifération du commerce de la honte ! ». Idrissou Abdoulaye, Directeur du centre national hospitalier universitaire de Cotonou. Par ailleurs, la vente de produits pharmaceutiques sur internet multiplie également les risques d’achat de médicaments non conformes et la difficulté à contrôler la qualité des produits de santé achetés par les patients. Par exemple, le commerce de médicaments sur internet peut fonctionner avec des fabricants en Ukraine, des conditionneurs en Allemagne, des hébergeurs aux Canaries, du stockage à Vanuatu, des comptes off shore à Chypre… Une opacité qui favorise la falsification. Selon les experts, dans plus de 50% des cas, les médicaments achetés sur des sites internet dissimulant leur adresse physique sont faux2.

3/ Les facteurs favorisant l’essor de ce commerce illégal De nombreux facteurs3 sont responsables, ou permettent, le trafic de faux médicaments et son augmentation : • La corruption. Une mauvaise gouvernance, des institutions faibles favorisent la corruption et les conflits d’intérêts qui peuvent nuire à l’efficacité des autorités de réglementation pharmaceutique et des personnes chargées de faire respecter les lois. Ce facteur permet aux trafiquants d’échapper aux arrestations, aux poursuites ou aux condamnations.

• La réticence des gouvernements à reconnaître l’existence ou la gravité du problème. Les pays ont besoin d’une législation adaptée pour pouvoir combattre ce trafic.

• L’insuffisance du cadre juridique, des sanctions et des mesures administratives. Lorsque le contrôle de la fabrication et de la distribution des médicaments n’est pas suffisamment couvert ni mis en application par la législation, le commerce illégal peut échapper aux poursuites.

• La faiblesse, l’absence ou la clémence des sanctions pénales non adaptées aux risques pour la santé publique, punissant les violations de la législation pharmaceutique incitent le trafic de faux médicaments.

• L’inefficacité du contrôle de la fabrication à la distribution des produits (dans les pays où les autorités règlementaires sont faibles le taux de faux médicaments est supérieur à 10%). L’insuffisance, la faiblesse ou l’inefficacité des contrôles réglementaires favorisent l’importation, la fabrication et la distribution de médicaments sans surveillance, ce qui provoque la prolifération des médicaments non conformes et stimule l’apparition de marchés illicites.

• Le manque de collaboration des acteurs impliqués dans la réglementation, le contrôle, les enquêtes et les poursuites. Ce constat s’applique aux niveaux national et international.

• L’importation parallèle non réglementée. Ceci est le cas lorsqu’un distributeur non rattaché au réseau de distribution du groupe pharmaceutique, achète des médicaments dans un Etat où leur prix est bas, pour les revendre ensuite dans un autre où leur prix est élevé.

2 OMS, janvier 2010 3 D’après le guide pour l’élaboration de mesures visant à éliminer les médicaments contrefaits – OMS 2000

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• Le perfectionnement de la fabrication clandestine. L’apparition de matériel perfectionné pour fabriquer et conditionner rend plus difficile la détection des médicaments falsifiés du fait que les trafiquants peuvent imiter les produits authentiques à la perfection.

• Les prix élevés ou différentiels de certains médicaments et la méconnaissance des prix des génériques de qualité, disponibles à un coût dix fois inférieur, favorisent la fourniture de faux médicaments meilleur marché.

• L’accès insuffisant des populations aux services de santé et à des voies d’approvisionnement pharmaceutique fiables.

• La pauvreté et l’analphabétisme. Aujourd’hui, d’après l’UNESCO4, environ 774 millions de personnes ne savent ni lire ni écrire. Cela représente environ un adulte sur cinq dans le monde et les principales zones géographiques touchées sont l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et de l’Ouest et les pays du Pacifique.

• La multiplication des intermédiaires. Le processus complexe, allant de la fabrication du produit à sa commercialisation, la distribution et la vente au détail, implique un nombre très important d’acteurs et facilite le commerce des trafiquants de faux médicaments.

Depuis leur conception jusqu’à leur consommation, nous pouvons schématiser le circuit du médicament ainsi :

4 International Literacy Statistics : A Review of Concepts, Methodology and Current Data – UNESCO Institute for Statistics,

Montreal, 2008

La chaine du médicament, de la conception à la distribution

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4/ Les dangers sanitaires causés par le trafic de faux médicaments Les premières victimes de ce trafic en développement constant sont les ressortissants des pays les plus pauvres.

Au moment où le droit à la santé apparaît comme un droit fondamental de la personne, le vaccin et le médicament doivent pouvoir être accessibles à tous mais encore faut-il qu’ils soient de qualité et contiennent bien les principes actifs qui préviennent ou soignent une affection. Ils constituent un des éléments les plus importants dans la prévention des maladies et les soins à prodiguer. Aucun pays n’est à l’abri. Il n’est pas rare de découvrir d’importantes quantités de produits non conformes en Europe ou en Amérique du Nord, mais ce sont les pays en développement qui sont les plus touchés.

Tous les types de produits sont concernés. Les médicaments chers ou peu coûteux, les produits de spécialité comme les génériques. Ils se retrouvent dans les pharmacies communautaires et les hôpitaux. Dans les pays en développement, la vente de médicaments dans la rue est très fréquente, ce qui rend la régulation et le contrôle d’autant plus difficile.

Des maladies associées à des zones géographiques sont perçues comme de véritables opportunités pour les trafiquants. 108 pays sont confrontés au paludisme5. En 2008, l’OMS enregistrait 247 millions de cas, qui ont causés près d’un million de décès, principalement chez des enfants vivant en Afrique. Ce fléau a engendré une forte demande des médicaments antipaludiques, en Afrique de l’Ouest. La plupart des faux médicaments antipaludiques sont de ce fait, vendus dans les pays membres de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). « En Haïti, alors même que rien n'est reconstruit et que les structures administratives sont totalement désorganisées et incapables de protéger la population, les trafiquants sont là ». Hélène Degui, Directrice de la Centrale Humanitaire Médico-Pharmaceutique. a. L’échec thérapeutique

L’amélioration de l’état de santé d’une personne ou d’une population est fortement remise en cause lorsque les soins sont obtenus auprès d’un marché illicite, l’origine et la qualité de ces produits pharmaceutiques étant fortement douteuses. L’échec thérapeutique est alors probable et peut se traduire par une aggravation de l’état de santé de la personne. Les conséquences en terme de santé publique peuvent être donc dramatiques. b. Le phénomène de résistance

Ce sont souvent les mêmes pays qui ont la charge de maladie la plus élevée, les populations les plus pauvres et le plus grand besoin de médicaments fiables. Les médicaments non conformes sont de véritables poisons. Ils ne traitent pas les patients, mettent leurs vies en danger et contribuent à l’augmentation de la résistance à certaines maladies (pharmacorésistances) parfois mortelles. Lors d’une utilisation inadéquate des antimicrobiens, la probabilité que les micro-organismes s’adaptent et se multiplient au lieu de disparaître est très forte. Ce phénomène de résistance a lieu lorsque les doses d’antibiotiques ou d’antiparasitaires sont insuffisantes ou administrées sur une trop courte durée. Les faux médicaments étant très présents sur les étalages, ce commerce illégal représente ainsi l’une des principales barrières à la lutte contre des maladies très graves comme le paludisme ou la tuberculose.

Dans son rapport sur l’efficacité des médicaments antipaludéens et la résistance aux traitements, l’OMS affirme que les faux médicaments et les sous-standards sont, en Asie du Sud-Est, une cause majeure du développement d’un nouveau genre de résistance à l’artémisinine, présente dans les médicaments antipaludiques6.

5 Rapport 2009 sur le paludisme dans le monde - OMS 6 Global report on antimalarial efficacy and drug résistance, 2000 – 2010 - OMS

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Les actions préconisées

Le plaidoyer de la Fondation, et les recommandations de l’Appel de Cotonou, insistent sur le développement de projets concrets parallèlement à la modernisation des textes législatifs et au renforcement des capacités policières, juridiques et douanières.

Cette approche multidisciplinaire a pour but d’agir dans le même temps sur l’offre, et sur la demande en médicaments essentiels.

1/ Agir sur l’offre Une action véritablement efficace doit viser à :

• La sécurisation de la production et de la chaîne de distribution pour assurer la mise à disposition de médicaments conformes aux normes de qualité.

• La mise en application de législations et de réglementations répressives adaptées conduisant à l’arrêt de la production et de la distribution de produits pharmaceutiques non conformes, avec l’aide des organisations internationales compétentes (ONUDC, Interpol, OMD…)

• Un travail de coopération entre Etats pour le contrôle des marchandises à leur entrée sur le continent, ainsi qu’en transit.

• Un travail de coopération entre Etats pour le démantèlement et la poursuite des trafiquants internationaux.

Cependant, ces premières mesures ne peuvent être que de moyen terme et devront, pour une efficience durable, impulser l’engagement de flux financiers nationaux et internationaux concertés, à hauteur des enjeux sanitaires et économiques. 2/ Agir sur la demande La sensibilisation et l’information doivent aussi bien cibler les consommateurs et les pharmaciens d’officine que les acteurs déjà engagés sur le terrain, spectateurs de pratiques non légales. Promouvoir, auprès du grand public, l’usage du médicament de qualité et changer certains comportements d’achat (encourager, par exemple la consommation de médicaments génériques de qualité).

• Informer les pharmaciens d’officine sur l’origine des produits et les dangers que représentent les médicaments falsifiés.

• Inciter et aider les pharmaciens d’officine à développer des points d’offre officiels et garantis de médicaments dans les banlieues ou zones rurales éloignées des centres.

• Former les acteurs du contrôle (magistrats, autorités de santé, services de police, douanes) sur les circuits qu’emprunte cette économie parallèle afin de sécuriser la traçabilité des produits.

• Assurer le bon fonctionnement des laboratoires de contrôle en formant les techniciens sur le terrain.

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3/ Exemple de bonne pratique : l’extension du Laboratoire National de Contrôle de la Qualité des Médicaments de Cotonou

La fondation Chirac a tout d’abord concentré son action sur des projets permettant aux Pays les Moins Avancés de développer leur autonomie dans la gestion du médicament et le contrôle de sa qualité. Dans cette perspective, la fondation Chirac a financé l’extension du Laboratoire National de Contrôle de la Qualité des Médicaments du Bénin. Depuis la fin des années 90, la politique d’accès aux médicaments est la priorité de la politique de santé du Bénin qui a fait des efforts importants de restructuration de sa politique pharmaceutique. Conçue en partenariat avec le Ministère de la Santé du Bénin et la Fondation Pierre Fabre, cette transformation va permettre au laboratoire :

• de répondre aux critères nécessaires pour obtenir la certification de l’Organisation Mondiale de la Santé,

• de développer ses missions de contrôle et de formation à l’échelle nationale et régionale,

• d’acquérir une dimension régionale et de consolider la politique d’accès à des médicaments de qualité en Afrique de l’Ouest, enjeu global de santé publique et de sécurité.

Ce projet est considéré comme prioritaire par les autorités du Bénin qui ont fait du renforcement des capacités du laboratoire national de contrôle de qualité une des recommandations majeures des « États généraux de la santé » qui se sont tenus à Cotonou en novembre 2007. Le nouveau laboratoire a été inauguré le 20 décembre 2010. Celui-ci a triplé sa superficie et a désormais pour objectif d’atteindre le niveau de pré-qualification de l’OMS.

Laboratoire de Contrôle de la Qualité des Médicaments de Cotonou © Fondation Pierre Fabre

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Annexes

Appel de Cotonou – octobre 2009

Allocution de M. Ban Ki-Moon, Secrétaire général des Nations Unies – Appel de Cotonou, octobre 2009 Discours du Président Jacques Chirac au Conseil de l’Organisation mondiale des douanes – juin 2010 Revue de presse

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