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Aménagement durable au bassin d'Arcachon

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Dossier d'étude Arcachon

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Sommaire

Introduction.........................................................................................3

I/ La diversité économique sur le bassin d’Arcachon ou la mise en valeur d’un milieu hors du commun.................................................6

II. Fragilité du milieu et conflits d’usage : une double problématique pour la durabilité du tourisme sur le Bassin d’Arcachon.........................................................................................22

III. Spectre multiscalaire des politiques et moyens mis en œuvre pour parvenir à un développement touristique équilibré du Bassin d’Arcachon : quelles échelles d’intervention pour quel type d’action ?............................................................................................44

Conclusion..........................................................................................62

Bibliographie.....................................................................................64

Table des illustrations.......................................................................67

Table des matières.............................................................................69

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Introduction

Le Bassin d’Arcachon se situe sur la côte Atlantique, dans le Sud Ouest français, à environ cinquante kilomètres de l’agglomération bordelaise, à laquelle elle est reliée par l’autoroute A63. Le site du Bassin d’Arcachon est encadré par l’Atlantique à l’Ouest, le Médoc au Nord, l’agglomération bordelaise au Nord est et les Landes au Sud.

Figure 1 - « La croissance urbaine. Le Bassin d’Arcachon », Direction Départementale de l’Equipement, Décembre 2006

Construit autour d’un milieu naturel de type lagunaire, le territoire arcachonnais est caractérisé par une grande fragilité environnementale. Ses écosystèmes complexes s’appuient sur des dynamiques hydrauliques générées par la géomorphologie propre au Bassin, et par des formes de végétation originales développées sur les vasières où viennent se nourrir des espèces animales spécifiques. Or si ce sont les écosystèmes et le paysage qui font la particularité du site, leur fragilité d’origine est ici aux prises des nuisances et pollutions anthropiques produites par différentes activités. Et si les effets du changement climatique modifient la structure de la demande et de l’offre touristique, les activités touristiques elles-mêmes font également partie des causes de ce changement climatique (consommation et diffusion des énergies).

Selon les organismes gouvernementaux en charge du tourisme, est considérée comme touriste « toute personne en déplacement hors de sa résidence habituelle pour une durée d’au moins une nuit et de quatre mois au plus, pour l’un des motifs suivant : agrément (vacances, week-end), santé (thermalisme, thalassothérapie, etc.), missions ou réunions de toutes sortes (congrès, séminaires, manifestations sportives, pèlerinage, etc.), déplacements professionnels, voyages d’affaire et voyages scolaires. »1 Or le Bassin d’Arcachon est un lieu de tourisme très fréquenté, notamment pour son offre en tourisme d’agrément, caractérisée par des sites 1 SOURCE, Centre national de ressource du tourisme et du patrimoine rural, www.source.asso.fr

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emblématiques tels que la Dune du Pilat, le Cap Ferret ou encore l’Ile aux oiseaux. Le Bassin se caractérise également par des activités phares qui fondent son attractivité et participent à son capital paysager: pêche, ostréiculture et plaisance.

Illustrant parfaitement la dialectique tourisme/milieu fragile, le cas d’étude du Bassin d’Arcachon nous a semblé faire « école » en matière de solutions à proposer en termes d’aménagement. Territoire dont l’évolution est suivie par de nombreux scientifiques, le Bassin d’Arcachon est à l’origine d’une quantité de recherches et de publications importantes, dont nous nous attacherons à faire l’écho tout au long de cette étude. Le lieu a ainsi été choisi pour constituer un premier laboratoire de suivi de l’évolution des milieux littoraux fragiles en Europe par l’outil de la photographie aérienne. De plus, le Bassin d’Arcachon attire l’intérêt des scientifiques de par les caractéristiques de ses systèmes dunaires. C’est pourquoi il nous a paru tout à fait intéressant de travailler sur les problématiques liées à l’environnement, au tourisme et à la diversité des activités économiques sur le Bassin d’Arcachon.

Etant donné la variété des problématiques et enjeux abordés, et la volonté d’analyser au mieux, à la fois leur complexité et leur imbrication, il nous a semblé cohérent de varier les échelles d’observation. C’est pourquoi notre périmètre d’étude sera redéfini en fonction des types d’approche, selon que l’on s’attache à la géomorphologique du bassin, à l’échelle géographique (les communes riveraines du bassin), ou bien à l’échelle administrative comprenant des paramètres plus larges. Malgré la diversité de ces approches, notre point focal demeurera le Bassin d’Arcachon, en tant que bassin d’eau et les communes qui lui sont riveraines. Or il se trouve que ce périmètre correspond à celui choisi par le Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon (SIBA) et nous le verrons plus tard, cette échelle apparaît comme la plus pertinente face aux problématiques en jeu sur le Bassin.

La diversification des activités économiques a participé au développement historique du Bassin d’Arcachon. De cet état de fait découlent deux problématiques majeures pour la compréhension globale de ce territoire : dans quelle mesure le maintien de ces activités représente-il aujourd’hui une alternative à la saisonnalité inhérente au tourisme ? Et en quoi la diversification des activités économiques est-elle à la fois un moteur économique et un frein potentiel au développement touristique durable ?

Nous nous attacherons dans un premier temps à identifier les clés du succès arcachonnais, qui fondent aujourd’hui les atouts du territoire. Milieu naturel aux caractéristiques exceptionnelles très anciennement approprié pour des pratiques « touristiques » en lien avec le bassin, le lieu a construit son succès d’une part sur la valorisation des capitaux environnementaux et paysagers, et d’autre part sur une fixation de certains touristes permettant le développement d’activités économiques résidentielles pérennes (services, commerces, équipements). Aujourd’hui, le Bassin d’Arcachon cherche à allier développement touristique, multi saisonnalité, et préservation du milieu.

Le deuxième temps de la réflexion permettra d’appréhender l’objet des conflits d’usage existants ainsi que les dynamiques larges dans lesquels ils s’inscrivent. La pression démographique, à l’origine d’un accroissement des activités touristiques et économiques différentes, pose aujourd’hui avec force la question des conflits d’usage. Si le tourisme constitue un agent actif (à priori négatif) sur les écosystèmes, d’autres acteurs (industrie, pêche, agriculture) tiennent un rôle important dans la production des nuisances et des pollutions. Cette diversité des rôles est prégnante dans la perspective de la résolution des conflits, et de l’identification du rôle tenu par chacun dépend l’intelligibilité et le partage du diagnostic environnemental des « consommateurs du territoire », sous-tendant la mise en œuvre des politiques pour un tourisme « durable ».

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Dans un dernier temps, nous analyserons les objectifs des politiques mises en œuvre aux différentes échelles d’actions. Alors que le triptyque Europe-Région-Intercommunalité constitue un modèle généralement présenté comme d’avenir, la réalité relativise l’importance de la Région, et continue de donner un poids notable à l’Etat-arbitre et l’Etat coordinateur. D’autre part, l’échelle locale, voire de l’entreprise et de l’individu, apparaît comme le vecteur principal de mise en œuvre de la gestion environnementale.

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I/ La diversité économique sur le bassin d’Arcachon ou la mise en valeur d’un milieu hors du commun

Cette première partie a pour objet de décrire les fondements de la réussite touristique d'un milieu fragile, le Bassin d'Arcachon. La rencontre d'un environnement, d'un écosystème producteur de paysages, et des premières sociétés touristiques à partir du XIXème siècle a peu à peu construit un « territoire », marqué par une organisation de l'espace particulière. En outre, l'économie arcachonnaise se décline par d'autres activités plus ou moins liées au tourisme. Cette diversité des activités démarque ainsi le littoral arcachonnais, c’est la raison pour laquelle il convient de la décrire avant de traiter des enjeux liés aux conflits d'usage dans une seconde partie.

A/ Le milieu naturel du Bassin d’Arcachon

L'ensemble naturel du bassin d'Arcachon se situe en façade du Golfe de Gascogne, et appartient aux côtes de type « lagune ». A marée haute, 155 km² du bassin est recouvert d'eau, à marée basse cette surface ne dépasse pas 40 km². A chaque changement de marée, 230 millions de mètres cubes d'eau rentrent et sortent à la mer, par le chenal de 3 kilomètres entouré du Cap Ferret au nord et la dune du Pilat au sud.

Les spécificités du territoire posent un certain nombre d'enjeux environnementaux propres au bassin, entre espace paysager de qualité et milieu naturel aux dynamiques géomorphologiques actives.

1. Le bassin d'Arcachon dans sa région naturelle, un espace littoral au cœur de dynamiques géomorphologiques actives

La région naturelle du bassin d'Arcachon, en façade du Golfe de Gascogne, présente des caractéristiques spécifiques marquées par des dynamiques géomorphologiques actives. Cette région est touchée par des vents forts, du fait de sa situation au contact du Golfe de Gascogne, causant une érosion éolienne active. Jusqu'au 18ème siècle, les dynamiques géomorphologiques et les phénomènes d'érosions ont ainsi eu pour conséquence de faire pénétrer les dunes de sables à l'intérieur des côtes, avec un déplacement des dunes pouvant aller jusqu'à 20 mètres par jour. La disparition de plusieurs villages pousse les ingénieurs à chercher des méthodes bloquant ce processus de désertification. Les recherches successives aboutissent à la fixation des dunes, par un processus incorporant notamment la plantation de pins. Ainsi, la façade littorale d’Aquitaine se caractérise aujourd'hui par une bande de dunes de 200 mètres au plus large. Au delà, à l'intérieur des terres sur un triangle délimité à l'ouest par l'océan atlantique, au nord-est par la Garonne, et au sud-est par le fleuve Midouze, la plaine des Landes se caractérise par la prédominance de pins maritimes, appelée forêt landaise.

Sur un sol majoritairement composé de sable limitant le développement de l'agriculture, le pin maritime de nature anthropique est omniprésent, et il constitue un élément structurant du paysage de la région arcachonnaise. Cette espèce végétale robuste présente la caractéristique de bien se maintenir en milieu littoral fortement salin. Le phénomène

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d'anémomorphose, consistant en un rééquilibrage de la masse de l'arbre face au vent, et à une « cicatrisation » rapide des blessures causées par les embruns chargés de sable et de sel, explique le maintien de cette espèce végétale.

En outre, l'ingénieur Brémontier à l'origine de la fixation des dunes de la région, a mêlé à la plantation de pins maritime une espèce végétale du nom de genêts et d'ajoncs. Ces légumineuses possédant la caractéristique de capter l'azote de l'air pour en faire des réserves de nitrates au niveau de leurs racines, elles entraînent un enrichissement de la fertilité des sols landais. Il apparaît ainsi entre la plage sableuse et la forêt landaise un ensemble intermédiaire donnant lieu à des usages agricoles.

2. Les grands ensembles paysagers de la région naturelle du bassin d'Arcachon

Figure 2 - Les grands ensembles paysagers du territoire arcachonnais - Source: CRDP de Champagne-Ardenne, http://www.crdp-reims.fr/arcachon/default.htm

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3. Le bassin d'Arcachon, une baie de type « poulier »

Les mécanismes de la formation du bassin d'Arcachon permettent de mieux dessiner les dynamiques géomorphologiques dans lesquelles s'inscrit l'évolution actuelle du milieu naturel. Plusieurs forces participent à modeler la forme atypique du bassin. Les courants marins d'abord, qui frappent de face le littoral arcachonnais. Ceci explique les dépôts de sédiments entre le bassin et l'océan atlantique. La multitude de rivières se jetant dans le bassin, avec des débits inégaux, creusent dans les sols marins des canaux, devenus des chenaux avec la montée des eaux datant de la dernière transgression flandrienne. La plus puissante des rivières, la Leyre, du fait de la superficie importante de son bassin versant, parvient à franchir les dunes et à se jeter dans la mer. Enfin, la dernière grande force à l'œuvre permettant de décrire la morphologie actuelle du bassin d'Arcachon est la dérive littorale nord Atlantique circulant dans le sens nord-sud. Transportant vers le sud jusqu'à 750 000 tonnes de sables par an, elle se heurte à la force du delta, à l'origine de la formation d'un cordon dunaire du nom de presqu'île de Lège-Cap Ferret. Le schéma suivant explique ce mécanisme. Après –4000 et la transgression transflandrienne, les nouvelles dynamiques hydrauliques entraînent l'accumulation de bancs de sables à la sortie du delta de la Leyre. La complexification progressive du réseau hydraulique du nouveau bassin, en lien avec les dynamiques hydrauliques, tend à former un cordon dunaire du nord. Celui-ci progresse dans la direction nord-sud, alors que l'érosion littorale et éolienne tend à diminuer la surface de sol au bénéfice de la mer au sud, jusqu'à aujourd'hui encore.

Figure 3 - Evolution de la géomorphologie du bassin d'Arcachon - Source: Schéma de mise en valeur du bassin d'Arcachon, 2004

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4. Un milieu favorable à des « écosystèmes » originaux

Le terme « d'écosystème » désigne l'ensemble formé par une communauté d'êtres vivants (biocénose) et son environnement (biotope). Appliqué au bassin d'Arcachon, l'approche en terme « d'écosystème » permet d'identifier ses spécificités, et ce qui peut être la cible d’une politique « durable », comme on le verra dans une deuxième partie.On l'a vu précédemment, l'aménagement des côtes sableuses des Landes a produit un écosystème complexe donnant lieu à une végétation atypique, pas seulement composée de pins landais, mais aussi de variétés végétales dites « légumineuses », participant à une désalinisation des sols côtiers. Il ne s'agit pas du seul grand écosystème dans la région, puisque le biotope atypique du bassin accueille d'autres écosystèmes, à différentes échelles.

− Les pré salés

Les prés salés sont une végétation herbacée et épaisse formée au bord des estuaires et des lagunes le long du littoral. Ils prolifèrent dans les milieux où le sable est plus important que la vase. Adaptée aux milieux salés, cette variété de végétation développe des techniques de survie lui permettant de supporter les brûlures du sel. Emblématique de ce type de végétation, la salicorne est ici très répandue.

− Les vasières:

La « vasière » est un ensemble hétérogène constitué de sédiments très fins de l'échelle du micromètre (comme le sable et l'argile), composé de rejets et déchets divers accrochés au sable. La vasière est souvent le lieu d'une activité intense de micro-organismes. De fait, elle recèle une « biomasse » (quantité totale de matière de toutes les espèces vivantes présentes dans un milieu donné) importante.Le niveau de la mer, particulièrement bas dans le bassin d'Arcachon, se prête à la formation de vasières. La biomasse qu'elles recèlent fait des lieux un chaînon particulier dans la chaîne alimentaire, en attirant plusieurs espèces d'oiseaux à long bec, capables de venir chercher les espèces animales dans la vase. L'espèce d'oiseau prédominante est le limicole, échassier adapté à l'environnement marécageux. En outre, le bassin accueille des mouettes rieuses et des goélands leucophées.

− Les herbiers:

Le bassin d'Arcachon est en Europe l'espace accueillant la plus grande variété d'herbes marines (zostères). D'une grande importance pour la biodiversité, elles favorisent la prolifération de canards, oies et cygnes. A une échelle plus petite, cette spécificité environnementale attire à la saison de l'hiver sibérien une espèce d'oie migratrice appelée « bernaches cravants », attirée par la réserve de nourriture.

− Les fonds sous-marins et la « laisse de mer »:

Les caractéristiques des fonds d'un milieu aquatique conditionnent non seulement la faune et la flore du bassin dans son ensemble, mais aussi les caractéristiques biogéographiques des espaces périphériques, dont la colonisation végétale et animale sur ses rives.Dans le cas du bassin d'Arcachon, l'activité végétale et micro-organique sous-marine produit

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des dépôts de « déchets » sur la plage, laissés par l'eau à chaque marée, la « laisse de mer ». Notamment à l'origine de la formation des herbiers évoqués précédemment, ces dépôts constituent une des conditions du maintien des écosystèmes du bassin d'Arcachon. La laisse de mer est notamment à l'origine du développement de la « puce de mer », espèce de petit crustacé elle-même incluse dans le maillon de la chaîne alimentaire avec pour prédateurs les oiseaux.

Or si le milieu du Bassin d’Arcachon est favorable à la formation d’écosystèmes remarquables, ces écosystèmes sont eux-mêmes favorables à la création d’entités paysagères qui fondent ainsi l’attractivité du Bassin et participent donc au développement touristique du site.

B/ Le développement urbain et touristique du Bassin d’Arcachon à travers l'histoire

Comme beaucoup d’autres sites géographiques, le développement du site du Bassin d’Arcachon a été influencé par la « tentation de l’eau »2 progressant au début de la Troisième République. En effet, les bains ont constitué une des premières formes de ce que l’on appelle communément aujourd’hui le tourisme.

1. Le concept de tourisme, origines

Dans les géographies départementales d’Adolphe Joanne, recueil datant des années 1870, le mot tourisme n’est pas mentionné une seule fois. Les termes « baigneurs », « ville d’hiver », « ville de bains », ou « fréquentation », y sont préférés, et les « établissements thermaux » sont classés au chapitre « Industrie », en tant qu’exploitation des sources minérales. Le premier terme référant véritablement au tourisme est le terme de « station », qualifié « d’eaux thermales » ou « de bain de mer ». Et ce nouveau terme correspond au développement en cours, à savoir la nouvelle importance de la fréquentation de ces lieux. En outre, l’origine des visiteurs -ou touristes- renseignent sur l’importance et l’échelle de cette fréquentation : échelle locale, régionale, nationale, internationale. Cette folie pour l’eau se transcrit aussi dans l’afflux des populations vers les sources aux vertus curatives, dites de pèlerinages, ou encore vers les paysages comme les lacs ou les bassins. C’est un nouveau rapport à l’eau qui s’installe en France dans les années 1870, accompagné d’une grande importance de l’hygiénisme (égouts, lavoirs publics). L'eau de mer se voit même rapidement attribuer par les médecins des qualités insoupçonnées, et elle est ainsi préconisée dans le traitement du rachitisme, de l'épilepsie ou encore de l'hystérie.

2 BRUSTON Mireille, « Des bains au tourisme : la tentation de l’eau au début de la Troisième République », Mappemonde 58.

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Figure 4 - Les lieux touristiques d’après A.Joanne (1874-1884)

2. Histoire du développement urbain du Bassin d’Arcachon au XIXème siècle : le poids originel du tourisme sanitaire

Or ce lien originel entre les pratiques de bain et le tourisme caractérise particulièrement le développement touristique du Bassin d’Arcachon, avec en premier lieu le développement urbanistique de la ville d’Arcachon elle-même (raison pour laquelle l’entité géographique du Bassin d’Arcachon porte son nom). Cependant, Arcachon est à l’époque différente des autres stations thermales : comme la ville de Biarritz, elle allie bains de mer (eau froide) et bain thermaux (eau chaude). Elle cumule donc les aménités, ne se limitant pas à une fréquentation estivale. Arcachon n’était pas même un village de pêcheur lorsque François Legallais décida d'y installer son hôtel avec établissement de bains en 1823. L’eau de mer était à l’époque, comme nous l’avons précédemment décrit, louée pour ses vertus multiples, et le climat d’Arcachon, avec ses effluves de pins et l’air iodé, était recommandé dans le traitement de nombreuses maladies (maladies pulmonaires, tendances lymphatiques, tuberculose) : l’entreprise de Legallais fut donc un succès, et donna suite au développement d’autres entreprises, hôtels, et villas, constituant avec le temps le front de mer, et annonçant le développement de la Ville d’été. Mais l'essor considérable que connut la ville au milieu du XIXème siècle fut surtout le résultat d'une vaste opération financière entreprise par les frères Pereire. Ils s’intéressaient à la valeur « marchande » des malades, souvent fortunés, qui affluaient vers Arcachon. C’est donc afin d’en tirer parti qu’ils créèrent dès 1852 la Compagnie des chemins de fer du Midi, et reprirent l'exploitation de la ligne Bordeaux-la Teste. En 1857, ils la prolongèrent jusqu'à

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Arcachon. Alphonse Terpereau, photographe à Bordeaux, fut chargé par la Compagnie du Midi des frères Pereire d'un véritable reportage sur la ville en train de se construire. La Compagnie avait besoin de matière et de "visuel" à donner aux graveurs pour faire la publicité de la station en train de naître.

Figure 5 - Le Grand Hôtel en construction, 1862 Alphonse Terpereau

La thalassothérapie, la climatothérapie et même plus tard le thermalisme, avec la découverte en 1923 de la source Sainte-Anne des Abatilles, firent d'Arcachon une ville de santé. Et en quelques années seulement, Arcachon devint une ville dont les visiteurs venaient du monde entier, les malades laissant la place aux véritables touristes. La remarque d’Alphonse Lamarque de Plaisance, premier maire de la commune, au soir de la naissance officielle d'Arcachon le 2 mai 1857, anticipait le développement futur d’Arcachon : "Heri solitudo, hodie vicus, cras civitas" – « hier un désert, aujourd'hui un bourg, demain une ville »3.

3. Explosion urbaine et touristique du Bassin d’Arcachon au XXème siècle

Ainsi, bien que lié aux avantages du site, le tourisme ne commença réellement à se développer sur le Bassin d’Arcachon que lorsque les moyens de transport eurent progressé et que le développement du réseau ferré au XIXe siècle ait abouti à l’accessibilité aux bords de mer par les citadins. Le tourisme étant par ailleurs une forme de mobilité, il est logique que le développement des transports ait une influence sur celui du tourisme, et « l’arrivée du chemin de fer constitu[a] un basculement par la massification qu’il provoqu[a] »i. Le tourisme se concentra d’abord autour d’Arcachon, puis s’étendit à l’ensemble du bassin. Les deux guerres mondiales atténuèrent ce mouvement de masse, mais la période des Trente Glorieuse vit son explosion. D’autant plus que le temps libre de la population active n’a cessé d’augmenter depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Le développement touristique et l’urbanisation du Bassin d’Arcachon sont donc étroitement liés depuis l’origine.

3 « Transport et mise en tourisme du monde », Jean-Christophe GAY, Collection EDYTEM, Cahiers de Géographie, n°4, 2006

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Evolution de l’urbanisation sur le littoral entre 1950 et 2004 - Source : Etude des enjeux écologiques et paysagers du littoral du Bassin d’Arcachon

En outre, certaines tendances urbaines se dessinent depuis les années 1980, et leurs caractéristiques découlent de l’accessibilité, de l’histoire, de l’héritage culturel, et de la géographie du territoire du Bassin d’Arcachon. Effectivement, avec de très fortes dynamiques démographiques, le Bassin d’Arcachon participe largement au dynamisme de la Gironde. Et bien que la pression urbaine (développement résidentiel notamment) semble se stabiliser depuis 1990, le Sud du bassin concentre la majorité des constructions neuves et se caractérise par une surconsommation d’espace4.

Il est d’ailleurs aujourd’hui possible de classer les territoires selon leur niveau d’urbanité. L’urbanité découpe le territoire en quatre zones différentes :

- Un pôle urbain atour des communes d’Arcachon, la Teste de Buch, le Teich et Gujan-Mestras

- Une couronne périurbaine composée des communes du Val de l’Eyre, de Mios et de Marcheprime

- Une zone de communes multi polarisées autour des communes d’Andernos les Bains, Lanton, Audenge et Biganos

- Un pôle d’emploi de l’espace rural entre les communes d’Arès et du Cap Ferret5

Ainsi, le Pays du Bassin d’Arcachon et du Val de l’Eyre se caractérise par une agglomération de prés de 60 000 habitants au Sud, plusieurs petites villes d’une dizaine de milliers d’habitants s’étalant du delta de l’Eyre à la pointe du Ferret, et un territoire rural de 10000 habitants en forte croissance dans le val de l’Eyre. La difficulté de l’analyse d’un tel espace se trouve dans la disparité des enjeux de chacun de ces micro-territoires qui forment l’ensemble du bassin d’Arcachon.

4 « La croissance urbaine. Le Bassin d’Arcachon », Direction Départementale de l’Equipement, Décembre 20065 Charte du Pays, 2003

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4. Développement d’une image de marque, et marketing touristique actuel

Tout d’abord grâce au travail du photographe Alphonse Terpereau dans les années 1860, à la naissance du site, et puis par d’autres procédés, le Bassin d’Arcachon a historiquement toujours été promu pour la beauté et la particularité de son site. Or cette promotion a accompagné l’évolution touristique du Bassin d’Arcachon. Le travail d’Alphonse Terpereau a donc été le premier type de promotion du bassin d’Arcachon, et les frères Pereire l’avaient engagé dans le but précis d’avoir des images à donner aux graveurs pour faire de la publicité. C’est donc parallèlement au développement de l’activité touristique en général que s’est développée ce que nous appelons communément aujourd’hui « la publicité ». Cette nouvelle tendance s’est d’ailleurs révélée à l’échelle nationale française puisqu’entre 1890 et 1910, un ensemble de zones balnéaires ont reçu des appellations similaires qui, sur le modèle de la « Côte d’Azur », visaient à renforcer leur attractivité touristique. C’est en premier lieu le roman de Stephen Liégeard « Côte d’Azur » qui, en 1887, popularisa cette formulation, elle-même créée sur le modèle de la « Côte d’Or » dont l’auteur était originaire. Puis, en 1894, une partie du littoral breton Nord (entre Saint-Malo et Dinard) fut baptisée « Côte d’Émeraude », en référence à la couleur de la mer le long de cette côte. Les environs de Boulogne-sur-Mer prirent le nom de « Côte d’Opale » en 1911, tandis que les plages landaises furent dénommées « Côte d’Argent » en 1905. « Ces nom furent choisis comme des noms de marque, en empruntant les méthodes de ce qu’on appelait alors « la réclame »6.Aujourd’hui, ce travail sur l’image de marque est le cœur de la promotion du tourisme du Bassin d’Arcachon. Les catalogues publicitaires se multiplient, vantant les mérites de ce site, comme le fait la brochure sur le Lège-Cap Ferret : « entre l’océan atlantique et le Bassin d’Arcachon, la presqu’île de Lège-Cap Ferret décline les multiples atouts d’un monde à part »7.

C/ La prégnance de l’économie touristique sur le territoire du Bassin d’Arcachon : richesse de l’offre et diversité des formes du tourisme

L'état présent de l'économie du bassin renseigne sur la nature plus profonde de la réussite de ce territoire. Manifestement le tourisme apparaît comme l'activité majeure du territoire. Il s'appuie plus spécifiquement sur un certain nombre d'atouts: activités possibles variées, les « incontournables » lieux de visites, à l'image de la dune du Pyla, mais aussi une structure d'hébergement diversifiée.

L'analyse de la structure économique montre toutefois que le cas arcachonnais se caractérise par une diversité des activités, à l'opposé des structures littorales monofonctionnelles caractérisant d'autres espaces côtiers français spécialisés dans le tourisme estival. Si ces autres activités peuvent être liées au tourisme (ostréiculture), elle sont parfois très différentes par leur nature (maïsiculture).

6 BERTHO-LAVENIR C. et LATRY G., Côte d’Argent, Côte d’Émeraude : les zones balnéaires entre nom de marque et identité littéraire, Le Temps des Médias 2007/1, N° 8, p. 105-117.7 “La presqu’île de Lège-Cap Ferret, Intimes espaces”, brochure de l’office du tourisme de Lège-Cap Ferret

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1. Etat des lieux de l’économie touristique : statistiques Données de cadrage

L’économie touristique sur le Bassin d’Arcachon représente 310.7 millions d’euros de recettes pour l’ensemble de l’économie locale. D’ailleurs, l’emploi lié au tourisme représente 12,6 % de l’emploi total du Bassin, soit 3,5 fois plus qu’en Gironde. En somme, le Bassin enregistre un tiers de la fréquentation touristique départementale (près de 6,6 millions de nuitées de mai à septembre). 8 Le Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon a mené une étude sur la fréquentation touristique du Bassin avec un accent portée sur les aspects à la fois quantitatifs et qualitatifs du tourisme. L’analyse s’appuie entièrement sur des données statistiques relevées à partir d’enquêtes menées auprès des clientèles. Cette étude permet de visualiser les attentes des visiteurs quand ils se rendent sur le site du Bassin d’Arcachon, les activités qui les attirent ainsi que la demande induite en termes d’équipements. En somme, cette étude passe au scanner les formes de tourisme pratiquées sur le Bassin, et fournit ainsi des informations concernant la pluriactivité touristique réelle.

Les raisons du choix d’une telle destination

Le Bassin est une destination plutôt familiale en cœur de saison. Un répondant sur deux connaît le Bassin d’Arcachon par le biais de la famille ou d’amis, un répondant sur quatre dit se faire héberger par de la famille ou des amis lorsqu’il est séjourne sur le Bassin. Enfin, encore une personne sur quatre justifie le choix d’une telle destination par des raisons sentimentales (attaches particulières au Bassin).

Le profil des visiteurs

Parmi les visiteurs, 45 % sont des hommes et 50 % des femmes, avec un âge moyen de 45 ans. Le plus souvent, les vacanciers viennent en couple avec des enfants de moins de 18 ans (groupes de 4,1 personnes en moyenne). Ils viennent principalement d’Aquitaine (22%), d’Ile de France (14%) des régions limitrophes de l’Aquitaine (11%) ou de l’étranger (16%).

Le poids des différents modes d’hébergement

Les résidences secondaires et les logements occasionnels sont le plus utilisés (78,3%). D’ailleurs, les résidences secondaires représentent 35,4% des logements pour 8,5% en Gironde.9 Ensuite viennent les campings (20%). En revanche, la part des résidents en hôtels s’élève seulement à 2%. Il est à noter que depuis 1999, la capacité d’hébergement est relativement stable, toutefois, on observe une tendance à la baisse du nombre de lits disponibles en campings.

L’emploi salarié touristique

On compte une moyenne de 1698 emplois liés au tourisme en janvier contre 5028 et 5201 en juillet/août. L’emploi touristique est par conséquent plutôt saisonnier avec néanmoins un

8 « Quantifier et qualifier la fréquentation touristique du Bassin d’Arcachon » par le SIBA, Avril 20089 Projet de Charte du Pays du Bassin d’Arcachon et du Val de l’Eyre 2010, 25 Septembre 2004.

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certain étalement dans l’année (moyenne de 3783 emplois de mai à septembre). Ainsi 20 % des salariés du Bassin travaillent dans le secteur touristique. La moyenne annuelle de l’emploi touristique est de 12,64 % contre 3,55% sur la région, c’est-à-dire qu’elle est multipliée par quatre sur le Bassin. Les types de séjours

Parmi les visiteurs, on distingue les excursionnistes (33%) des vacanciers (67%). En effet, 28 % des visiteurs restent sur le Bassin seulement pour la journée et 5% sont de passage au cours de vacances itinérantes. Les deux tiers des visites du Bassin d’Arcachon sont l’occasion d’un séjour d’au moins une nuit.

Activités pratiquées

Tout d’abord, il est à noter que près de 9 séjours sur 10 se font pour des motifs de loisirs ou de vacances. Quant aux autres, ils ont pour but de rendre visite à des proches. Or, cela influence largement le mode d’hébergement choisi (la part d’hébergement non payant est considérable sur le Bassin) ainsi que les activités pratiquées sur le Bassin. Le tableau ci-dessous présente le pourcentage des activités pratiquées sur le Bassin observé à partir des enquêtes menées auprès des vacanciers. Les répondants ayant le droit de donner trois réponses, le total des pourcentages ne correspond pas à la valeur 100. Cela est autant valable pour ce tableau ci est pour les deux autres qui suivent.

ACTIVITES POURCENTAGEVisites de sites et lieux touristiques 36 %Baignade et plages 30%Balades à vélo ou en VTT 28%Dégustations coquillages, huîtres chez les producteurs

25%

Tour du bassin en bateau 23%Balade dans les villages ou ports ostréicoles 21%Se reposer, ne rien faire 14%Visite de la famille, amis 12%Gastronomie, restauration 12%Soleil, climat 12%Pratique d’une activité sportive 6%Parcs de loisirs 4%Découverte des vignobles et du vin 4%Manifestations culturelles, festivals 4%

Comme il est montré dans ce tableau, la plaisance est une composante importante de l’attractivité touristique du Bassin. D’ailleurs, selon le rapport de l’INSEE effectué en 2005 on comptait 32 744 navires immatriculés dans le Port d’Arcachon en 2003. Cela représente en fait plus de la moitié des navires recensés sur le littoral Aquitain (62 500). 10

Sites ou lieux touristiques visités

10 Littoral Aquitain, diagnostic de territoire, INSEE 2005.

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Dune du Pyla 65%Phare du Cap Ferret 60%Ile aux oiseaux et cabanes Tchanquées 30%Les villages ostréicoles 22%La ville d’hiver 21%Parc ornithologique du Teich, Maison de la Nature

20%

Domaine de Certes 12%Parc de loisirs : Aqualand, Kid Park, Esacalad’ Parc

10%

Le banc d’Arguin 9%Réserve des Prés salés 6%Autres 5%

Lieux de séjour

Les séjours durent en moyenne 11 jours et se font pour près d’un quart des touristes dans la commune d’Arcachon.

Arcachon 23%La Teste de Buch 15%Andernos 14%Lège-Cap Ferret 11%Arès 10%Lanton 8%Gujan-Mestras 6%Teich 6%Biganos 4%Audenge 3%

2. Les autres activités économiques autour du Bassin d'Arcachon: la condition de la diversité économique

Si le tourisme apparaît comme le moteur économique majeur du Bassin d'Arcachon, le territoire est aussi structuré par d'autres activités. Ces activités sont parfois pour partie liées à l'activité touristique, à l'image de l'ostréiculture ou de la pêche. D'autres secteurs apparaissent toutefois bien différents, voire contradictoires avec l'activité touristique, nous le verrons plus tard, avec les exemples de l'industrie ou de la culture de maïs, dont nous nous attacherons ici à décrire le poids économiques. Or c’est bien la diversité des activités qui permet le maintien de l’économie arcachonnaise, même en période de basse saison touristique, diminuant de fait l’effet de « saisonnalité » caractérisant la majorité des stations balnéaires.

La pêche

L'activité de la pêche détient un poids économique et social majeur dans le territoire arcachonnais. Le port d'Arcachon est en activité toute l’année, fait notable par rapport à la

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majeure partie des autres ports de plaisance du littoral atlantique. En 1995, 365 emplois étaient liés à la pêche (dont 261 en pêche océane et 104 en pêche intra-bassin). La pêche participe donc bien, comme nous venons de l’évoquer, à diminuer l’effet de saisonnalité sur le Bassin d’Arcachon. D’autre part, il existe une vraie territorialité de la pêche en dehors de la seule « sortie en mer », puisque la filière pêche s'inscrit à travers d'autres lieux et pratiques. Il en est ainsi de la construction et de l'entretien des navires, de l'avitaillement (35 emplois permanents dans le secteur coopératif), de la criée qui mobilise une dizaine d'emplois permanents ainsi que des intérimaires, et du mareyage qui représente une cinquantaine d'emplois.

Entre la sole, le merlu et le bar, la criée du seul bassin d'Arcachon (intra-bassin) a vendu 2400 tonnes de poisson, pour un coût total de 9,6 millions d'euros. En France, le port d'Arcachon est le 21ème en valeurs vendues (Fonds d'intervention et d'organisation des marchés, 1995). La 5ème place qu’il occupe en France pour le prix moyen vendu par poisson montre la qualité « supérieure » des produits vendus, un fait pas nécessairement positif pour le territoire car ce monopole est fragilisé lors d'importations massives d'espèces similaires de Grèce, d'Espagne ou de Portugal, beaucoup moins coûteuses.

L'ostréiculture

On date les premières consommations d'huîtres arcachonnaises à l'époque gallo-romaine, mais il faut attendre 1849 pour voir apparaître les premières exploitations massives, avec la création des premiers parcs ostréicoles impériaux. Avec une production de 10 000 tonnes par an, le territoire d'Arcachon représentait 8,6 % de la production française d'huîtres en 2002, soit 23 millions d'euros (Comité National de la Conchyliculture, 2002). En termes bruts, cette production représente sur cet espace 400 entreprises, qui emploient plus de 1 000 personnes. Les 550 concessions représentent une surface totale de 824 hectares de parcs en mer. La récolte d'huîtres occupe 5,3 % de la surface totale du bassin (à marée haute). De plus, le bassin d'Arcachon est le premier producteur français de « naissain », matière organique composée des larves de différents mollusques, utilisée pour l'élevage d'huîtres. Il va donc sans dire que l’ostréiculture se pratique à l’année, concourant ainsi à nuancer l’effet de saisonnalité. Or, outre ces apports économiques, l’ostréiculture contribue à façonner le paysage arcachonnais, comme en témoigne l’omniprésence des parcs à huîtres sur les cartes postales touristiques. De plus, ce paysage participe au renforcement de l’identité territoriale de par l’image forte qu’il confère au territoire.

L'agriculture

Les activités agraires arcachonnaises ne sont pas directement attenantes au bassin, mais elles s'y intègrent du fait de leur appartenance au même bassin-versant. Deux activités agricoles prédominent, avec la sylviculture et la maïsiculture. La production sylvicole est le huitième secteur économique du littoral aquitain en 2005, d'après l'INSEE. A elle seule, la sylviculture représente 5,2 % de l'emploi salarié sur les communes du bassin d'Arcachon. A une échelle plus large, l'exploitation sylvicole se concentre essentiellement au nord de la région des Landes, jusqu'au contact du bassin d'Arcachon. Étendue sur 12 200 hectares, la production issue de la forêt landaise représente près du bassin d'Arcachon entre 60 000 et 70 000 mètres cubes par an de bois. A cela s'ajoutent les exploitations privées. La production de maïs, ou maïsiculture, est très importante à l'échelle de toute la région landaise, favorisée par la platitude des espaces propices à la mécanisation, au point de pouvoir parler de « monoculture ». Elle représente 95 % des surfaces cultivées. Cette culture intensive fait appel

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à de grandes quantités d'intrants, dont des pesticides et des herbicides. En outre, elle est gourmande en eau.

L'industrie

En comparaison aux autres espaces littoraux de l'Aquitaine, l'industrie est sous-représentée sur le bassin d'Arcachon. L'économie industrielle se partage entre la construction navale et la fabrication de papier. Ce dernier secteur est le monopole de l'entreprise « Smurfit », qui fournit un emploi industriel sur cinq, et dont l'usine est localisée dans la commune de Biganos, qui fait partie du Val de l’Eyre (une des trois intercommunalités qui constituent le pays du Bassin d’Arcachon). Or le Val de l’Eyre constitue également le lieu d’implantation du projet considérable du Laser Mégajoule, ce qui en fait le principal site potentiel pour le développement industriel du pays. L'industrie de construction navale fournit également un emploi industriel sur cinq. Il faut ajouter à ces secteurs l'industrie agro-alimentaire, liée aux activités agricoles décrites précédemment. Hors du champ touristique et de la saisonnalité qui l’accompagne, l’industrie est largement soutenue par la politique locale, et cela parce qu’elle représente un vecteur efficace pour l’essor économique du territoire.

L'économie résidentielle

L'économie résidentielle correspond aux commerces et activités liés à des usages résidentiels. Elle rassemble le commerce de détail, le bâtiment, le transport de passagers, les services aux particuliers, l'éducation, la santé, l'action sociale, et l'administration. Elle représente ici une part importante de l'activité du territoire, représentant 70 % des emplois des communes du bassin. Cette part a tendance à s'accroître récemment avec l'augmentation des résidences principales et secondaires : or cette augmentation n’est pas négligeable puisque l’on parle aujourd’hui du Bassin d’Arcachon comme l’une des banlieues de l’agglomération bordelaise. Ainsi, le Bassin tend à devenir un véritable bassin de vie et pas seulement une station balnéaire.

Figure 6 - La structure économique arcachonnaise comparée aux autres espaces littoraux - Source: INSEE, 1999

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A l'issue de cette analyse du territoire du bassin d'Arcachon, de son environnement « naturel » et de ses activités, on a pu comprendre quelles étaient les clés du succès de cette région. La diversification des activités a, depuis le XIXème siècle, pérennisé une implantation auparavant seulement touristique, tandis que des activités telles que l'ostréiculture, la maïsiculture, ou encore l'émergence d'une économie résidentielle, ont permis d'éviter les risques engendrés par la trop grande dépendance à la saisonnalité touristique. Cette cohabitation des activités, engendrant des pratiques et des usages différents de l'espace, pose aujourd’hui les jalons d'une nouvelle problématique sur la question des conflits d'usage. Comment concilier par exemple l'objectif de durabilité de l'écosystème arcachonnais, au regard des aménagements liés au tourisme et des effets néfastes que ceux-ci peuvent avoir sur l'érosion et les dynamiques hydrauliques du bassin ? Ou encore comment maintenir les activités agricoles telles que la maïsiculture, alors que celles-ci émettent une quantité importante de nitrates qui viennent couler en aval du bassin versant, dans le bassin ?

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II. Fragilité du milieu et conflits d’usage : une double problématique pour la durabilité du tourisme sur le

Bassin d’Arcachon

La cohabitation de différents types d'activités génère des conflits d'usages autour du milieu fragile qu'est le bassin d’Arcachon. La question des phénomènes d'érosion concentre une partie importante de ces problèmes, à travers les sites tels que la dune du Pilat, la pointe du Cap Ferret, ainsi que l'intérieur du bassin, où l'exhaussement du fond du bassin pose particulièrement problème. D'autre part, les activités économiques en général sont à l'origine de nuisances et de pollutions du bassin, liées à la gestion de l'eau, aux activités agricoles et industrielles, à la pêche et à la plaisance.

Après avoir dressé dans un premier temps le diagnostic des atouts du territoire arcachonnais, nous allons désormais procéder à l'analyse des effets de la cohabitation des activités sur le milieu. L'issue de ce propos permettra d'identifier les risques encourus pour le milieu et pour ces différentes activités, et ce, à différentes échelles.

A/ Un milieu fragile, ou les mouvements « naturels » du bassin d’Arcachon et leurs conséquences sur l’activité touristique

Les dynamiques liées à l'érosion et aux dynamiques hydrauliques du Bassin d'Arcachon peuvent engendrer trois types de risques pour le territoire. Il convient donc de traiter successivement le cas de l'érosion de la Dune du Pilat, de l'érosion de la pointe du Cap Ferret, et de l'exhaussement du niveau du fond du bassin en certaines de ces parties.

1. La Dune du Pilat : un enjeu environnemental et touristique pour l’ensemble du Bassin d’Arcachon

Géographie et formation de la Dune du Pilat

L'Ouest de la région Aquitaine est couvert de dunes continentales et de dunes côtières. Cette région abrite également la plus grande forêt de pins maritimes d'Europe, et elle peut être subdivisée en deux domaines morphologiques : une grande plaine sableuse appelée "Les Landes de Gascogne", et des dunes côtières. Ces dunes côtières peuvent être classées en quatre types majeurs, a savoir les dunes paraboliques, les dunes en croissant ou barkhanes, les caoudeyres (petites paraboliques) et le cordon littoral. Le schéma ci-dessous, qui permet également de situer la Dune du Pilat sur l’entité géographique du Bassin d’Arcachon, rend compte de la répartition de ces dunes autour du Bassin d’Arcachon :

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Figure 7 - Jean-Marie FROIDEFOND, Chercheur CNRS, « Les dunes du littoral et le site géographique de la Grande Dune du Pyla », 21/08/2005 http://www.dune-pyla.com/information/welcome/index.php

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L’inclinaison des axes de ces dunes permet de connaître la direction et l'orientation des vents les ayant façonnés avant leur fixation par la forêt. Ces vents sont des vents d'Ouest (Legigan, 1976).

L’historique de la formation de la Dune du Pilat s’explique grâce à la superpositions d’anciens sols, ou paléosols, qui démontrent le fait que la dune est un empilement de séquences dunaires dont le mouvement général se fait vers l’intérieur des terres, comme l’illustre le schéma ci-dessous :

Figure 8 - Jean-Marie FROIDEFOND, Chercheur CNRS, « La formation de la Grande Dune du Pyla, son histoire », 21/08/2005 http://www.dune-pyla.com/information/welcome/index.php

Entre 1826 et 1922, la côte de la dune du Pilat a reculé de plus de 500m ; et elle atteint 115m vers 1910, lorsqu’elle prend par ailleurs officiellement le nom de « Dune du Pilat », plutôt que celui de « Dune de la Grave ».

La Dune du Pilat, aujourd’hui plus précisément dénommée la Grande Dune du Pilat, est une dune de cordon littoral. Elle mesure environ 2500 m de long et 500 m de large, et elle atteint 105 m d'altitude. Le versant Est, sous le vent, a une pente comprise entre 30° et 40°, et le versant Ouest, lui au vent, a une pente plus faible, comprise entre 5°et 20°. Le cordon

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littoral que compose la Dune du Pilat a donc une morphologie variable en fonction du vent et du couvert végétale. Il s’agit d’une dune "vive".

Déplacement et ensablement de la Dune du Pilat

Jean-Marie Froidefond, chercheur au CNRS, explique que d’après les cartes de l'Institut Géographique National (IGN), la Grande Dune du Pilat s'est déplacée vers l'intérieur des terres (c’est-à-dire vers l'est) de 70m à 100m entre 1966 à 1989. Cela représente un déplacement moyen de 3 à 4 mètres par an. Ainsi, la Dune du Pilat progresse sur la forêt, et elle en recouvre chaque année 8000m2. En outre, ce que l’on peut donc appeler « ensablement vers l’est », coïncide avec une érosion importante du littoral au pied du versant ouest. En effet, de 1863 à 1989, le littoral s'est déplacé de plus de un kilomètre vers l'Est (7,5 à 8 m/an), cette érosion se développant de manière plus forte au Sud qu'au Nord (I. Mercier, 1991). C’est la raison pour laquelle Jean-Marie Froidefond anticipe que si la Dune du Pilat se déplace au même rythme durant les quarante années à venir, elle atteindra la route de Biscarrosse, et les campings situés au pied de la Dune seront ensevelis. Outre cette prévision catastrophique, ce recul de la dune aurait inévitablement des effets néfastes et sur les structures d’accueil touristiques et sur le capital paysager, portant de ce fait atteinte à la qualité de l’offre touristique.

La photographie ci-dessous explicite la dimension de cette dune par rapport à la forêt

qui l’entoure et par rapport à la ligne côtière. Cette photographie illustre également le tracé des vents d’Ouest sur la dune, et donc la dynamique de la dune vers l’intérieur des terres, vers la forêt :

Figure 9 - http://www.echo-fle.org/Portals/1/Gallery/4/747148e0-e1b8-4cbb-bb94-5933492fd14f.jpg

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La Dune du Pilat : un site touristique majeur en danger

La Dune du Pilat est un site touristique majeur à l’échelle national, et nécessaire à l’échelle locale. En effet, la Dune du Pilat a été classé en 1943 et l’ensemble du site de la Dune du Pilat a été déclaré « Grand Site National » en 1978. La Dune du Pilat génère aujourd’hui une fréquentation de 1,5 millions de touristes par an11. Ce site est donc touristique à l’échelle nationale (mais aussi internationale), et il a surtout un impact très fort à l’échelle locale du point de vue de l’économie touristique (c’est le site le plus visité sur l’ensemble du Bassin d’Arcachon, comme nous l’avons évoqué en première partie). Et l’on peut noter que la Dune du Pilat fut même le prétexte d’une promotion purement immobilière : alors que le nom "Pilat" était présent sur les cartes de Cassini en 1786 (le terme "Pilat" provenant du gascon « pilhar » signifiant "tas", "monticule"), Daniel Meller, promoteur immobilier, a modernisé l'orthographe du "Pilat" en inventant celle de "Pyla" en 191712. Aujourd’hui, les deux termes dont utilisés. La photographie ci-dessous illustre non seulement le fait que la Dune du Pilat est le lieu à très forte fréquentation touristique, mais elle suggère également que cette fréquentation peut avoir des impacts négatifs sur la qualité et la durabilité de ce site (traces de piétinement).

Figure 10 - Photo prise par Judith Commenges, juillet 2008

Or l’intérêt de ce site est exceptionnel du fait de la dynamique des différents facteurs naturels en jeu que nous avons évoqué précédemment : l’eau, le sable, le vent, la forêt. Cependant, cette dynamique se traduit par le déplacement de la dune vers l’est et par le recul du trait de côte, ce qui à terme, modifiera totalement les caractéristiques du site, et la sécurité des zones alentours. En somme, ce site est en perpétuel changement, et c’est cette dynamique qui en fait sa richesse paysagère. C’est la raison pour laquelle les mesures de protection de la Dune du Pilat sont particulièrement complexes et paradoxales : il s’agit de la protéger des

11 Syndicat mixte de la grande dune du Pilat : adhésion et adoption des statuts. Conseil Régional d’Aquitaine, séance plénière du 25 juin 200712 Claire König, Futura-Sciences, 21 juillet 2008

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impacts d’une fréquentation trop forte tout en préservant son caractère de « dune vive »13 et en la maintenant ouverte au public. Sa protection relève notamment d’un travail d’observation de son évolution et de celle des autres dunes situées à proximité. Les mesures légères en terme de modification sont donc privilégiées, telles que la présence d’oyats, des plantes à longues racines qui peuvent s'enfoncer jusqu'à trois mètres de profondeur et former ainsi une barrière naturelle au vent, empêchant dès lors le vent d'entraîner le sable ailleurs, et diminuant de cette manière le recul de la Dune du Pilat :

Figure 11 - Photo prise par Judith Commenges, décembre 2006

Après avoir donc été déclaré « grand site national » en 1978, le site de la dune du Pilat et de la forêt usagère de La Teste de Buch a ensuite été le lieu d’une Opération Grand Site (1978-1986), avec pour buts d’organiser la fréquentation touristique, de préserver et de mettre en valeur la qualité du site. C’est alors qu’on a procédé à l’aménagement d’une aire d’accueil avec parking et village commercial, et d’un accès à la dune. Mais la pression touristique n’a depuis pas cessé de croître et pose de nouveaux problèmes, comme celui des campings de la dune dont l’évolution en habitat en dur (résidences mobiles) perturbe la qualité du site. En outre, la gestion de la forêt usagère représente une autre problématique qui lui reste étroitement liée, avec pour visée de maintenir une forêt vivante et avec toutes ses qualités paysagères et biologiques14.

C’est pourquoi la Dune du Pilat fut également un des premiers parmi les Sites Naturels Français les plus beaux retenus par le Ministère de l'Environnement pour être à la fois tout particulièrement protégée, et toujours ouverte au public. En 1994 elle fut classée sur le même périmètre qu’en 1943. En outre, le Conservatoire du littoral, membre de l'Union Mondiale pour la Nature (UICN), a acquis 31 hectares de Dune entre 1998 et 200215. Et il participe aujourd’hui à la protection de ce site touristique.

13 Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d’Arcachon, Annexes, Préfecture de Gironde, Service Maritime et de Navigation de la Gironde, Août 200414 Site internet Ecologie sur d’Aquitaine. Fiche information « Dune du Pilat et forêt usagère » http://www2.aquitaine.ecologie.gouv.fr/sites1930/11_ficheinfo/ficheinfo.php?MS_SITE=SCL0000575, 199415 Site internet du Conservatoire du Littoral http://www.conservatoire-du-littoral.fr/front/process/Content.asp? rub=8&rubec=177&site=1818&entite=177

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Figure 12 - Site internet du Conservatoire du Littoral

Finalement, la Dune du Pilat est un site touristique majeur dont l’économie locale a besoin, et dont la France (et les touristes étrangers) se réjouissent. Toutefois, cette même fréquentation touristique contribue à porter atteinte à un site dors et déjà fragile. C’est la raison pour laquelle il est primordial de conserver le caractère exceptionnel de la Dune du Pilat, et de trouver tous les moyens de protection possibles qui ne portent pas atteinte à son dynamisme général.

2. La question de l’exhaussement des fonds marins: des risques pour l’ostréiculture et le tourisme

Le risque d’ensablement

L'ensablement est un autre signe de la fragilité du Bassin d’Arcachon. En effet, ce phénomène pose une série de problématiques : les conséquences qu'il entraîne sont pour beaucoup liées à la sédimentation. Phénomène naturel (en théorie, car il peut aussi être influé par des causes anthropiques) lié aux dynamiques géomorphologiques du bassin d'Arcachon, « l'exhaussement des fonds marins », c'est à dire l'élévation du niveau des fonds due à la sédimentation naturelle, touche plus spécifiquement la partie nord du bassin d'Arcachon. On peut découper l'intérieur du bassin en deux grands ensembles : d’abord les espaces subissant l'exhaussement, au nord-est ; et les rivages subissant l’érosion au sud-ouest. Les activités présentes sur la partie nord-est du bassin sont ainsi mises en péril par cette dynamique d'ensablement. Ces activités déjà décrites sont le tourisme, l’élevage d'huîtres et la navigation sur les chenaux.

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Les herbiers jouent un rôle important dans le processus de sédimentation du bassin. La disparition récente de ceux-ci contribue par conséquent à accélérer le processus d'érosion sur certaines parties du rivage du bassin. Il s'en suit un cercle vicieux avec la prolifération des algues vertes, dont le développement est facilité par l'absence des herbiers, ces mêmes algues vertes ralentissant l'ensablement.

Le tourisme et l'élevage d'huîtres appelés à disparaître dans le fond du bassin ?

La façade nord, et plus particulièrement la façade nord-est, subit les effets du déplacement du trait de côte provoqué par l'exhaussement. Les recherches ont estimé à 200 mètres le recul du trait de côte sur le fond du bassin en l'espace de 25 ans. Les activités touristiques développées dans les communes d'Arès et Lanton sont les plus touchées. Or les implantations destinées aux usages touristiques contribuent également dans une certaine mesure à favoriser ces processus de pénétration de la terre sur la mer. Il en est ainsi du projet d'aménagement d'un parc à vélos à Andernos, qui a du entraîner pour sa construction le déplacement d'une plage vers l'intérieur du bassin. L'impact réel de cet équipement mérite toutefois d’être atténué, car la pénétration sur le bassin de la terre ne fait que prolonger les dynamiques naturelles évoquées précédemment. Un problème plus profond se pose néanmoins à travers cette opération dans la mesure où celle-ci provoque la destruction des herbiers qui ne sont pas renouvelés. Plus encore que les atteintes portées à la biodiversité, le problème soulevé par les associations environnementales touche aux lacunes en matière d'approche systémique du milieu naturel du bassin d'Arcachon, et notamment aux effets sur l'hydraulique générale du bassin.

L'activité ostréicole subit également l'exhaussement du fond du bassin. La Teste fait partie des communes les plus touchés par l'ensablement. Observé sur le terrain par les éleveurs, l'exhaussement a pour conséquence d'obliger les éleveurs à déplacer les tables ostréicoles toujours plus bas vers l'eau. Plusieurs exploitations ont déjà disparus du fond du bassin, pour se relocaliser vers l'entrée du bassin d'Arcachon.

3. L’érosion de la flèche du Cap Ferret

Origine et Formation

C’est par la formation d’une langue de sable que le Bassin d’Arcachon est né. Avant l’apparition de la flèche du Cap Ferret, le fleuve de la Leyre venait se jeter dans l’océan Atlantique, en passant par un estuaire. C’est la combinaison du vent et de la houle qui sont à l’origine de cette langue de sable qui vient fermer seulement au tiers cet estuaire, que l’on nomme depuis le Bassin d’Arcachon. 16

16 Libération, samedi 9 juillet 2005.

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Figure 13 - Photographie aérien du Bassin - Google Earth, consulté en janvier 2009

Configuration du territoire de la pointe

L’extrémité sud de la flèche est d’une longueur de 4500 mètres et d’une largeur moyenne de 1200 mètres. Sa géographie est très dissymétrique. La côte ouest donne sur l’océan, avec une plage délimitée par un cordon dunaire. La régression de la bande sableuse, de plus en plus rongée par l’érosion marine est rendue visible par l’ensevelissement des blockhaus par les eaux marines. En effet les plages reculent de un à deux mètres par an. A l’est, l’urbanisation résidentielle marque fortement le paysage, mais avec aussi une avancée marine, mettant ainsi en péril les habitations en bord de l’eau.

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Mécanismes naturels à l’œuvre au niveau de la Flèche : facteurs d’érosion littorale

Cent soixante à trois cent soixante dix millions de mètres cubes d’eau circulent toutes les six heures entre le bassin et l’océan, en passant par le goulet d’entrée situé entre la pointe du Cap-Ferret à l’ouest et la dune du Pilat à l’est. 17 Les eaux circulent selon un réseau de chenaux dont les principaux sont le Piquey et le Teychan (les chenaux sont par ailleurs assez visibles sur l’image satellite). Or ces deux chenaux viennent se rencontrer dans le chenal du Ferret. Les courants y deviennent nettement plus fort dus à l’étroitesse du chenal, ainsi qu’à l’engouffrement des eaux en masse. Ces courants sont alors redirigés vers la côte Est qui subit par conséquent une érosion marine.

A l’érosion par les courants s’ajoutent d’autres facteurs érosifs tels que le clapot, qui tend à réduire les estrans, en rongeant la partie sableuse du littoral ; mais aussi la houle, qui est réputée très forte dans le golfe de Gascogne : « L'étude des statistiques des amplitudes de houle effectuée au large du Cap-Ferret montre des amplitudes de l'ordre de 5 à 6 mètres 35 jours par an en moyenne. »18 Enfin l’érosion éolienne est très importante et agit par déflation des côtes sableuses, qui ont ainsi tendance à reculer.

Sans cesse en mouvement, (que ce soit régression ou progression), le Cap-Ferret est, par définition instable parce que mobile dès son origine. Formée par les vents et marées, la flèche continue de subir les mouvements naturels. Actuellement dans une phase de recul, la pointe du Cap-Ferret régresse de un à dix huit mètres par an, avec un net recul lors des marées d’équinoxe. Les glissements de terrain sont parfois très violents, comme a pu le montrer celui survenu dans la nuit du 27 décembre 2000, qui a emmené avec lui toute une plage, suite à l’effondrement du « quai des courlis », situé à la pointe du Cap Ferret.

Les facteurs d’érosion sont multiples, à commencer par des facteurs naturels décris plus haut. Mais ceux-ci se combinent à des facteurs anthropiques, avec la circulation piétonne le long des rivages qui accroît la déflation sableuse. En effet, les milliers de baigneurs qui se rendent sur la plage de la flèche du Cap-Ferret participent de la destruction de la côte sableuse. L’absence d’entretien a laissé libre cours à l’érosion du cordon dunaire jusqu’à ce que les résidents eux-mêmes décident, vers la fin de années 1950, de commencer la lutte effrénée contre l’érosion.

Ainsi les enjeux apparaissent ici très clairement : un milieu extrêmement fragile, rongé par les eaux et les vents, dont la spécificité naturelle et l’anthropisation importante justifient un combat acharné, et peut-être perdu d’avance, contre l’érosion dans toutes ses formes. La circulation des piétons est avant tout une circulation de vacanciers. C’est pourquoi il apparaît crucial de protéger l’environnement contre l’érosion anthropique, et ce afin de préserver le site de qualité qu’est le Cap-Ferret. De plus, il est à noter que si le Cap-Ferret venait à disparaître, c’est le Bassin d’Arcachon qui disparaîtrait avec. En somme, l’érosion naturelle d’origine marine et éolienne se double d’une érosion d’origine anthropique. Or si l’érosion se poursuivait au même rythme qu’il y a vingt ans, c’est tout le Bassin d’Arcachon qui serait voué à disparaître. Malheureusement, ce n’est pas dans sa forme d’estuaire que le site est le plus attrayant, mais plutôt dans sa forme lagunaire. Si le Cap-Ferret vit du tourisme, celui-ci vient doubler ses peines et pourrait, à terme, nuire à l’attractivité du site. Or l’on sait bien que si le site se laisse engloutir dans les limbes de l’Atlantique, le tourisme coulera avec. Ainsi le

17 Ballade-naturaliste-bassinarcachon.com 18 SMVM Bassin d’Arcachon p24 août 2004

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danger environnemental prend ici toute sa dimension, avec des conséquences économiques et sociales difficiles à la clé.

B/ Diversité des activités et conflits d’usage autour de l’eau

A la fragilité du milieu s’ajoutent les conflits d'usages liés à la diversité des activités, telles que l'agriculture, de l'industrie et l’économie « résidentielle ». En effet, du fait de la multiplicité des paysages et de la diversité des activités pratiquées sur le Bassin d’Arcachon, les conflits d’usage ne sont pas rares sur ce site. En effet, le Bassin d’Arcachon comprend une multitude d’espaces naturels, qui ont chacun plusieurs fonctions, d’où une diversité exceptionnelle des pratiques usitées. Trois principales fonctions peuvent se dégager : la fonction paysagère (importante de par son caractère exceptionnel), la fonction récréative (terrestre et maritime), et la fonction productive (conchylicole, pêche…). Ainsi, cette multifonctionnalité des espaces naturels donne lieu à de nombreux usages bien différents les uns des autres : l’ostréiculture, la navigation de plaisance, la chasse, la pêche, la baignade, la forte fréquentation des plages et de la Dune de Pyla, ainsi que de leurs parkings d’accès, la pêche à pied à marée basse19… Bien que créatrice de richesses culturelles et paysagères, cette multifonctionnalité favorise aussi les conflits entre les différentes activités.

1. La sylviculture, un des facteurs de pollution des eaux qui reste à surveiller

Il existe deux types de forêts autour du Bassin d’Arcachon : la forêt dite « exploitée » et la forêt dite « usagère ». Cette dernière appartient à la commune de la Teste et d’Arcachon. Les habitants entretiennent cette forêt, ils ont le droit d’y prélever du bois, mais à condition de faire en sorte que l’équilibre soit maintenu.

La forêt landaise équivaut à 900 000 hectares. Au départ, il était planté à peu près 1500 arbres par hectare. Puis, 35 ans plus tard, alors que le Pin était parvenu à maturité, environ 200 arbres par hectares étaient comptés. Afin de doper la croissance des Pins, le recours aux fertilisants est très commun. Avant le labour, 300 kg de phosphate sont déversés par hectare et 200 kg sont rajoutés après le labour. Ainsi les arbres poussent deux fois plus vite. A cela sont ajoutés potassium et azote. C’est le fameux trio NPK qui permet à la fois d’assurer la croissance des arbres et de maintenir le PH des sols à sept. Bien que les arbres absorbent la majeure partie des fertilisants, il y a tout de même des rejets avec les excédents. D’autre part, on estime qu’un hectare de Pins rejette en moyenne un kilo de nitrates par an, que l’on retrouve dans les sols lessivés par les pluies, puis dans les nappes phréatiques, et enfin dans le Bassin. Or c’est ce nitrate qui est à la base du développement de l’algue appelée aspartine. Celle-ci est d’ailleurs responsable du rehaussement du plancher du Bassin, ce qui constitue une gêne importante pour la circulation des chalutiers. Même si les rejets sont assez faibles, la sylviculture participe donc aux conflits d’usages autour des eaux du Bassin, par le biais de liens de cause à effets. D’ailleurs, chaque activité pratiquée autour du bassin entre, à un moment donné en confrontation avec une autre. L’importance des conflits d’usage entre plaisanciers et ostréiculteurs n’illustre que trop bien cet état de fait.

19 Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d’Arcachon, Annexes, Préfecture de Gironde, Service Maritime et de Navigation de la Gironde, Août 2004

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2. Conflits d’intérêts entre la plaisance et l’ostréiculture

D’après Philippe Duchêne, « la plaisance correspond aux activités liées à l’usage d’un bateau (de plaisance), en excluant les dimensions de la glisse et du tourisme léger ». La tension qui existe entre les activités de plaisance et la production ostréicole mérite tout particulièrement notre attention de par les enjeux qu’elle soulève.

Conflits d’usage entre la plaisance et l’ostréiculture, ou le problème de la qualité des eaux

Les conflits entre professions conchylicoles et activités plaisancières ou touristiques semblent plus latents que déclarés, dans la mesure où ils concernent la qualité des milieux. Effectivement, les pollutions liées à la présence de navires sur le plan d’eau sont principalement de trois ordres : bactériologiques, métaux lourds et T.B.T. Un des principaux conflits d’intérêt entre la plaisance et l’ostréiculture a été révélé dans les années 1970, lorsque l’on a découvert que la reproduction et la calcification des huîtres était fortement affectée par la présence de TBT dans les eaux du Bassin d’Arcachon. Or la TBT, ou tributylétain, est un biocide puissant toxique pour les végétaux et d’autre organismes : c’est pour cette raison qu’il a été utilisé dans les antifoulings (peinture dite « antisalissure », destinée à empêcher les organismes marins de se fixer sur la coque des navires), dès les 1960, avec l’explosion de la construction navale et de la plaisance.

Or le Bassin d’Arcachon appartient, comme nous l’avons précédemment analysé, aux côtes de type « lagune » : c’est-à-dire que c’est un espace marin semi-fermé, d’où l’importance des divers apports au milieu et de la capacité du système à disperser, évacuer, ou stocker ces apports. En d’autres termes, ce sont les échanges de masse d’eau avec l’océan qui permettent au Bassin d’Arcachon d’évacuer les produits polluants tels que la TBT, et c’est la raison pour laquelle le niveau de pollution chimique et bactériologique global du Bassin d’Arcachon est assez faible, comme l’atteste notamment le maintien des huîtres du Bassin (Crassostrea gigas), dont les larves sont extrêmement sensibles à toute contamination de l’environnement20. Cependant, même un faible taux de pollution a des impacts sur l’élevage des huîtres, notamment justement sur la calcification des huîtres. En outre, il y a toujours une certaine pollution bactérienne dans les ports (due à l’apport des ruisseaux la plupart du temps), et cette contamination a des effets néfastes sur les prises d'eau destinées à l'alimentation des bassins des établissements ostréicoles.

Or comme le précise Jean-Christophe Mauviot, Directeur de la Section Régionale Conchylicole "Arcachon-Aquitaine" dans une interview en 1999, « la survie de l'ostréiculture est indissociable de la préservation du milieu et de l'écosystème du Bassin d'Arcachon »21. Il précise que la particularité du site d’être un bassin réduit le renouvellement d’eau, et tout particulièrement vers le haut du Bassin, qui se trouve donc être relativement plus exposé aux polluants que ne le sont les espaces proches de l’embouchure du bassin. « La bonne gestion de cet écosystème est donc l'enjeu majeur du développement de l'ostréiculture sur le Bassin d'Arcachon » continu-t-il.

20 Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d’Arcachon, Préfecture de Gironde, Service Maritime et de Navigation de la Gironde, Août 200421 Jean-Christophe Mauviot, Directeur de la Section Régionale Conchylicole "Arcachon-Aquitaine", interviewé par l’équipe « Le Guide », en 1999.

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Conflits spatiaux entre la plaisance et l’ostréiculture, ou le manque d’espace sur le plan d’eau

Un deuxième type de conflit existe entre les activités de plaisance et les activités ostréicoles : un conflit pour l’espace. Cette tension est parfois le fruit d’un non respect des réglementations, mais elle est souvent le fait d’une concentration d’activités sur des espaces géographiquement restreints ou insuffisamment équipés. En effet, le fort développement de la plaisance a pour conséquence une demande en stationnement grandissante, et donc une occupation croissante de l’espace maritime. Au-delà des 4200 places dans les ports, les plaisanciers disposent également de 39 zones de mouillages de bateau sur corps-mort avec une capacité d’environ 4500 postes22. Cependant, en décembre 2003, le nombre bateaux de plaisance étaient immatriculés par les Affaires Maritimes d’Arcachon atteignait 32 744 bateaux : il y a donc presque quatre fois plus de bateaux immatriculés que de places de stationnement officielles (bien que certains bateaux soit rangés dans des jardins ou garages). Il y avait d’ailleurs 6322 demandes pour une place dans un port sur liste d’attente en 2005. C’est cette densité qui pose des problèmes liés aux limites de la capacité d’accueil de ces sites.

De son côté, la profession ostréicole également un besoin important d’espace sur le domaine maritime public. Près de 1.000 hectares d'estran sont concédés aux ostréiculteurs sur tout le Bassin. En outre, tous les ports et villages du pourtour du Bassin, à l'exception d'Arcachon et de La Vigne, sont occupés soit partiellement soit en totalité par des établissements de cultures marines : la compétition existe donc aussi sur le domaine public maritime artificiel23.

Finalement, ces conflits spatiaux plaisance-ostréiculture se stigmatisent sur des espaces bien précis et très convoités. Sur le plan d’eau, le Banc d’Arguin et l’île aux Oiseaux ont des usages et des valeurs symboliques multiples : réserves naturelles sensibles, exploité par les ostréiculteurs, mais également zones importantes de pratique plaisancière en période de pointe. Sur la bande côtière, le secteur Pyla–Moulleau mais aussi et surtout la presqu’île du Cap-Ferret, concentrent de vastes zones de mouillage, des zones de baignade, des concessions ostréicoles (pour la côte Noroît seulement) et des pratiques nautiques légères. A titre d’exemple, le Banc d’Arguin qui a été déclaré Réserve Naturelle par décret du 9 janvier 1986 s’était vu attribué une emprise des installations ostréicoles limitées à trois hectares, comme le montre la carte qui dessous qui était mise en annexe du décret :

22 Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d’Arcachon, Annexes, Préfecture de Gironde, Service Maritime et de Navigation de la Gironde, Août 200423 Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d’Arcachon, Préfecture de Gironde, Service Maritime et de Navigation de la Gironde, Août 2004

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Figure 14 - Annexes Décret du 9 janvier 1986, carte réalisée par SEPANSO (Fédération des Sociétés pour l'Etude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest)

Au lieu de trois hectares, les implantations ostréicoles recouvrent aujourd’hui plus de 100 hectare : la plupart occupent donc l’espace maritime de manière illégale.

La nécessité d’un compromis pour le maintien de ces activités : l’importance de l’ostréiculture et de la plaisance pour la pérennité du tourisme

L'ostréiculture représente une filière majeure dans l’économie du Bassin d’Arcachon : en effet, comme nous l’avons précédemment évoqué, avec une production de 10 000 tonnes par an, le territoire d'Arcachon représentait 8,6 % de la production française d'huitres en 2002, soit 23 millions d'euros (Comité National de la Conchyliculture, 2002). En terme bruts, cette production représente sur cet espace 400 entreprises, qui emploient plus de 1 000 personnes. Les 550 concessions représentent une surface totale de 824 hectares de parcs en mer. La récolte d'huitres occupe 5,3 % de la surface totale du bassin (à marée haute). Une des caractéristiques du Bassin d'Arcachon est également d'être le principal centre naisseur

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d'huîtres creuses en France : la quasi totalité des centres ostréicoles français achète des huîtres à Arcachon24.

En outre, l'image même du Bassin d'Arcachon est étroitement liée à l'ostréiculture. Les espaces qu’elle occupe, aussi bien maritimes que portuaires ont été partout aménagé pour répondre à ses besoins, et aujourd’hui, les pignots en bois qui protègent et balisent les parcs et les cabanes ostréicoles en bois caractérisent le plan d’eau et les ports du Bassin d’Arcachon, créant un paysage bien particulier, favorable au tourisme :

Figure 15 - http://www.grand-large-aquitaine.fr/images/parc-a-huitres-2.jpg

Jean-Christophe Mauviot, Directeur de la Section Régionale Conchylicole "Arcachon-Aquitaine", insiste d’ailleurs sur le fait que les principaux enjeux pour l’ostréiculture sont le maintien de la qualité de l’écosystème, mais aussi le développement de produits d’accompagnement à la production pure d’huîtres : ce qu’il appelle « l’ostréo-tourisme ». « A cet égard également, la démarche entreprise notamment par des femmes d'ostréiculteurs au sein de l'association "la route de l'huître" constitue une initiative remarquable ».

D’autre part, les activités de plaisance ont-elles aussi un grand rôle dans l’économie touristique du Bassin d’Arcachon, et les ports de plaisance tiennent un rôle déterminant dans l’activité des stations du littoral. Ils sont même des lieux d’animation et de consommation par excellence : commerces, cafés, restaurants. En outre, les éléments caractéristiques de la plaisance (bateaux et ports majoritairement) constituent également un élément fort du paysage et représentent un site urbain majeur, structurant parfois l’ensemble d’un quartier (aménagements, espaces publics).

24 Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d’Arcachon, Préfecture de Gironde, Service Maritime et de Navigation de la Gironde, Août 2004

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Figure 16 - Photographie prise par Judith Commenges, Août 2007

Enfin, la plaisance et l’ostréiculture sont toutes deux nécessaires pour réduire l’effet de saisonnalité sur le Bassin d’Arcachon. Elles participent toutes les deux partie au caractère paysager et identitaire du bassin, et concourent par la même à l’essor du tourisme. C’est la raison pour laquelle régler les tensions qui les opposent est un enjeu fondamental pour le maintien même de ces activités, mais aussi pour le tourisme qu’elles favorisent toutes deux.

3. L’usine Smurfit ou la question du rejet des eaux usées

L’usine de pâte à papier, située à Facture de Biganos produit essentiellement du papier kraft, à savoir un peu plus de 5000 tonnes par an. Eau et bois sont les deux éléments essentiels à la fabrique du papier. C’est à peu près la seule industrie lourde autour du Bassin d’Arcachon. En 1950, il fallait 250 tonnes d’eau pour produire une tonne de papier. Aujourd’hui, il n’en faut plus que 10. L’usine consomme donc de moins en moins d’eau pour la production de papier et de carton. Néanmoins, le problème du rejet des eaux usées reste une question majeure.

Figure 17 - Le réseau d'assainissement de l'usine Smurfit - Réalisation: Clémence Liberge

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L’eau utilisée par l’usine Smurfit provient d’un ruisseau et de nappes profondes. Les déchets de la papeterie (copeaux de bois, plastiques, feutres etc.) sont stockés dans une décharge interne déclarée « site à surveiller » en 1997 par le ministère de l’écologie.25 La fermeture progressive de la décharge a été ainsi programmée. D’autre part, cette classification de la décharge en « zone 2 » a été élargie à l’ensemble de la papeterie en 2000. Les lixiviations de la décharge sont orientées vers le bassin Saugnac d’où ils sont repris pour être traités par la station de traitement des eaux résiduaires de l’usine. Les analyses ont révélé une pollution modérée des nappes phréatiques ainsi qu’une pollution organique des sols. Une surveillance trimestrielle de la qualité des eaux du cours de la Leyre n’a, par contre, révélé aucun impact de l’usine Smurfit.

Les restrictions quant à la production d’huîtres sur le Bassin ayant été revues à la hausse l’été dernier, les ostréiculteurs ont manifesté devant l’usine Smurfit, déclarant la fabrique de papier responsable d’une grande partie de la pollution du Bassin. Leur requête était radicale : ils souhaitaient la fermeture de l’usine, par « principe de précaution ». En réponse à cela, le PDG de la papeterie a décliné toute responsabilité, arguant que la qualité des eaux du bassin était tout aussi dépendante des rejets urbains.26

Le conflit relaté ici révèle la difficulté d’entente entre les acteurs autour des eaux du Bassin. Les différents usages correspondent en fait à des intérêts divers, qui ne coïncident pas forcément. La concurrence entre les activités se cristallise autour de l’usage qui est fait des eaux du Bassin : si certains l’utilisent en tant qu’exutoire des eaux usées, d’autres fondent la qualité de leurs productions (ostréiculture, pêche) sur la qualité des eaux. En outre, la qualité des eaux du Bassin est un facteur crucial pour le développement du tourisme. En effet, les nombreuses activités nautiques qui sont pratiquées durant l’été nécessitent une eau peu polluée, afin de garantir la santé des vacanciers, ainsi que les plaisirs nautiques. Ainsi, le problème majeur n’est pas tant la production de papier, mais plutôt le traitement global des eaux usées. C’est celui-ci qui renforce et complexifie les conflits d’usage autour du Bassin. Or c’est au Wharf de la Salie qu’il faut se référer pour des questions d’un tel ordre.

En effet, c’est par ce wharf que transitent les eaux usées de l’usine Smurfit, mais également des eaux usées domestiques. Situé à 800 mètres de l’embouchure du bassin d’Arcachon, à proximité du banc d’Arguin, le wharf de la Salie est une immense jetée en ferraille de 792 mètres. Elle rejette les eaux usées, après traitement, directement dans l’océan atlantique. La polémique porte sur la nuisance écologique étant donné que les eaux ne sont pas complètement renouvelées avant d’être rejetées.

25 Environnement.gouv.fr26 Le Figaro du 13 août 2008

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Figure 18 - Photographie: Judith Commenges, décembre 2006

Il est à noter un certain flou concernant l’impact réel de ce wharf sur la qualité des eaux du bassin. Car si cette station de rejet des eaux usées provoque depuis quelques années et surtout depuis quelques mois un tollé général, les comptes-rendus officiels eux, ne mentionnent pas de dégâts notables. En tous les cas, la thèse sur les impacts néfastes du wharf de la Salie sur la qualité des huîtres du bassin n’a pas été confirmée, voire a été réfutée : « Compte tenu des résultats dont nous disposons sur les secteurs proche et éloigné, l'impact du rejet apparaît limité du fait du très important effet de dilution dans les eaux océaniques. »27 Cependant, une surveillance accrue est mise en place autour du wharf. Ainsi, en l’absence de savoir précis sur les impacts, c’est le principe de précaution qui prédomine.

4. Usages résidentiels de l'eau contre usages touristiques, une contribution notable aux problèmes de l'eau du bassin d'Arcachon

L’usage qui est fait des eaux pose des problèmes environnementaux de divers ordres: assèchement des sources, tourbières, lagunes, braous et ripisylves; baisses prolongées des niveaux des cours d'eau; ce qui entraîne le recul de la biodiversité aquatique et semi-aquatique. Or ce recul est lui-même aggravé par la création de discontinuités dans les corridors écologiques marins. L'assèchement des puits et les forages pratiqués s’ajoutent à la salinisation de la nappe aquifère. En somme, les effets sont néfastes pour l'écosystème complexe du bassin d'Arcachon, mais aussi pour la durabilité des réserves en eau destinées à la consommation résidentielle (l’eau étant puisée dans certains cours d'eau lors des pics de consommation estivales, comme le Cazaux au sud du bassin).27 SMVM p 14

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La gestion des eaux ménagères pose un certain nombre de problématiques, notamment lorsque les pratiques touristiques rythmées par la saisonnalité induisent des consommations d'eau supérieures à la normale. Les statistiques délivrées par la communauté d'agglomération « Bassin d'Arcachon Sud » concernant la partie sud du territoire sont explicites: tandis que la consommation d'eau hors saison touristique est de 12 000 à 13 000 mètres cubes, elle atteint les 30 000 mètres cubes par jour l'été, lorsque la population s’approche des 250 000 personnes. Comme il a été dit précédemment, ces pics nécessitent de puiser de l'eau dans le cours d'eau Cazaux. Cette seule source, renouvelée « naturellement » tous les quatre ans en moyenne, est toutefois soumise au risque d'une pollution, qui pourrait entraîner un arrêt de l'approvisionnement en eau.

Les effets estimés sur l'environnement sont importants. En premier lieu, la diminution des réserves en eau se traduit par un épuisement des cours d'eau, puis des réserves des nappes phréatiques. A ce titre, l'influence de la consommation d'eau potable liée aux pratiques touristiques est mesurable. Ainsi, la courbe des ponctions en eau n’est pas parallèle à celle de la croissance des populations : la première s’élève bien davantage que la seconde, ce constat étant aggravé par la présence des piscines. La saisonnalité semble donc un problème plus complexe qu’il n’y parait. En effet, l’équilibre du Bassin repose non seulement sur une activité moins marquée par la saisonnalité (assurer la vie économique même en basse saison), mais aussi sur une gestion environnementale accrue pendant la haute saison.

Une consommation d'eau résidentielle différenciée nord/sud

On peut sérieusement poser l'hypothèse de deux types de consommation d'eau entre le nord du bassin gros consommateur, caractérisé par des maisons individuelles de villégiature, contre un sud à la consommation plus régulière et moins impactée par les activités touristiques. Ceci semble d'autant plus se justifier par le nombre important de piscines individuelles au nord. Cette hypothèse est évoquée par la recherche scientifique: « La présence de zones de villégiature dans ce département (bassin d’Arcachon, étang de Lacanau) permet de supposer qu’une plus grande part de l’eau potable est destinée à un usage externe (arrosage des pelouses et jardins, remplissage des piscines...). Ce phénomène semble confirmé par l’impact de la pluviométrie estivale dans les deux départements. En Gironde, le cumul des précipitations des mois de juin, juillet et août réduit significativement la consommation d’eau potable alors qu’il n’influence pas les usagers de Moselle. » (NAUGES, C., REYNAUD, A. 2001).

L'afflux démographique que connaît le sud résidentiel pourra ainsi poser à moyen terme la question de la durabilité de ces réserves en eau. A cela il convient de rajouter la consommation d'eau « sporadique » liées aux pratiques touristiques de la saison estivale, et qui contribuent à assécher les réserves actuelles. Le nord, caractérisé par un grand parcellaire à l'image de la commune de Lège Cap-Ferret, illustre notamment ces pratiques par l'image de la résidence secondaire grosse consommatrice d'eau pour la piscine ou l'arrosage du jardin. Le phénomène de périurbanisation de l'agglomération bordelaise, en direction du nord-est du bassin (communes d'Andernos et Arès), fait également écho à ces enjeux relatifs à la démographie et à la consommation d'eau.

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5. La maïsiculture ou la question de la pollution des nappes phréatiques

La maïsiculture apparaît au cœur des enjeux liés à l'eau. Plante très consommatrice d'eau, elle consomme 500 mètres cubes d'eau pour produire 1 kilogramme de maïs. Elle profite d’ailleurs ici de la proximité du bassin d'Arcachon, facilitant l'irrigation, ainsi que de la platitude des Landes qui se prolongent jusqu'au bassin. Cette culture nécessite toutefois de réaliser des forages pour puiser de l'eau. Sur 2 766 forages réalisés entre 1998 et 1999, 70% étaient agricoles. Ne supportant toutefois pas l'excès d'eau, le système maïsicole doit aussi s'appuyer sur un réseau de drainage des surplus d'eau. Si ces conditions constituent des aspects positifs à l'essor de cette culture, la nature des sols est toutefois caractérisée par une faible fertilité. L'utilisation d'intrants s'impose: pour une parcelle d'un hectare de maïs cultivée, on retrouve 19 kilogrammes de nitrates diverses utilisés, qui se déversent en aval du bassin versant, dans le bassin. Les études sur l'eau du bassin ont pu déterminer que les intrants

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Figure 19 - Formes par cellaire du nord-ouest du Bassin d'Arcachon - Adaptation cartographique: Alexandre Laignel

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de nitrate déversés dans le bassin étaient la cause principale du développement d'algues vertes dans le bassin. Comme évoqué précédemment, cette flore contribue à détruire l'écosystème actuel du bassin d'Arcachon. Sans entrer dans des considérations catastrophistes, il est nécessaire de rester vigilant concernant les effets de cette activité sur la qualité des eaux. C’est la raison pour laquelle il semble aujourd’hui indispensable de fournir des études précises permettant d’évaluer les liens de causes à effets, et le degré de gravité des pollutions.

C/ La recherche d'un équilibre des points de vue des acteurs, vers un objectif d'aménagement touristique « équilibré »

L'analyse du jeu d'acteur à l'œuvre sur le territoire arcachonnais renseigne sur les intérêts de chaque individu ou groupe d'individus. Si les scientifiques s'accordent sur un diagnostic prouvé mais encore incomplet sur le devenir des écosystèmes du Bassin, chaque acteur tend à reposer le diagnostic du Bassin selon son point de vue. Cité en exemple comme acteur individuel dans l'émission Thalassa28 à propos du problème de l'érosion localisée de la pointe du Cap Ferret, le propriétaire du terrain livre un diagnostic à contre-courant de l'opinion scientifique. Ainsi, son action investie dans le colmatage du rivage érodé par le courant menaçant sa maison a pour effet pervers d'accélérer, à plus petite échelle, l'érosion de l'ensemble du Cap Ferret.

Cette réappropriation des enjeux environnementaux par des particuliers, expliquant la multiplication des associations « de défense de l'environnement », s'exprime sous des formes différentes. Il en est ainsi de la levée de boucliers des ostréiculteurs contre le Syndicat Intercommunal du Bassin d'Arcachon chargé du réensablement des plages du fond de bassin. Le doute soulevé par ces agents économiques porte sur la modification que ce réensablement porterait sur les équilibres hydrauliques du bassin, à l'origine du transport du sable. Si le constat certain de l'origine naturelle de l'ensablement des parcs ostréicoles est admis par les professionnels, ce n'est qu'à demi-mot.

Les enjeux d'échelles des politiques apparaissent ici centraux. Tant dans l'analyse des problèmes par les acteurs du territoire arcachonnais, que dans la mise en œuvre des politiques publiques, il demeure une confusion importante relative aux échelles d'action. Communes, syndicats, intercommunalité, département, région, État, Europe... Autant d'échelles offrant des angles d'analyse et d'action différents pour traiter d'une problématique de « tourisme durable » inscrite avant tout à l'échelle du Bassin. L'objectif demeure bien celui de la durabilité économique, sociale, et écologique de l'équilibre actuel des diverses activités du territoire.

28Thalassa, Novembre 2008. « Sur les sentiers du littoral – d'Arcachon à l'estuaire de la Gironde ». France 3.

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III. Spectre multiscalaire des politiques et moyens mis en œuvre pour parvenir à un développement touristique

équilibré du Bassin d’Arcachon : quelles échelles d’intervention pour quel type d’action ?

Jusqu'aux années 1980-1990, l'Etat apparaît comme un acteur central dans la politique de protection du Bassin d'Arcachon, avec à son pouvoir des outils tels que le Conservatoire du Littoral à partir des années 1970, les lois sur la décentralisation et les différents dispositifs européens. Au coeur des politiques, le concept de « développement équilibré » apparaît, et se décline y compris à travers les politiques de l'acteur étatique. Le principe d'équilibre insiste ici sur la prise en compte de tous les acteurs et de toutes les activités pratiquées sur un espace, afin de parvenir à terme à l'objectif de durabilité sans en exclure les hommes. Dans le cas du Bassin d'Arcachon, espace littoral parmi les plus fragiles et aussi parmi les plus marqués par la diversification des activités en Europe, cette politique fait sens. Mais elle se heurte également à des freins puissants.

A. Europe/Etat/Région : une interaction à performer en vue d’un aménagement touristique équilibré

1. L'Europe: entre initiateur de la décentralisation et guichet pour la mise en oeuvre de politiques diversifiées

Dans la lignée de l'éveil des mouvements d'opinions aux enjeux environnementaux en Europe à partir des années 1970, la Convention d'Aarhus va poser deux principes importants dans les politiques européennes. D'une part elle engage les états signataires à développer dans toute forme d'aménagement la prise en compte des questions ayant trait au développement durable, et elle raccroche à cette notion de développement durable celles de démocratie locale et de démocratie participative. Les collectivités locales sont par conséquent des acteurs centraux de l'élaboration de ces projets d'aménagement, ce qui se traduit en France en 2003 par la réforme de la loi de décentralisation dans le sens où plus de responsabilités sont données aux collectivités locales, comme nous le verrons plus loin avec le cas des régions et des intercommunalités. L’Europe se pose donc comme un agent accélérateur de la décentralisation. La convention de Ramsar, ou Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d'eau., signée dans la ville iranienne de Ramsar le 2 février 1971, est un autre acte fondateur dans l'histoire de la protection des zones humides. Elle engage la volonté des Etats dans l'enrayement de la dégradation et de la perte des zones humides. Cette convention contribue aussi à impulser un ensemble de politiques et de programmes européens et nationaux.

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Natura 2000, une protection localisée des espaces sensibles

Institué en 1992, le réseau Natura 2000 s'attache à une vision équilibrée de la protection de l'environnement en harmonie avec les activités humaines. Fondé sur un recensement de la faune et la flore du territoire réalisé par l'Etat, la délimitation de la zone classée Natura 2000 est élaborée selon les principes de « réseau écologique » qui, dans le cas arcachonnais se compose des éléments faunistiques et floristiques du territoire constitutifs de sa spécificité. Les espaces aquatiques composent ainsi 75 % des espaces protégés et des espaces classés Natura 2000, auxquels s'ajoutent des espaces qui y sont directement liés: marais salants, espaces dunaires, rivières et estuaires soumis à la marée, et prairies semi naturelles humides. Ces espaces sont assimilés à des habitats naturels également recensés et accueillant diverses espèces végétales et animales telles que la Cistude d'Europe, le Grand Dauphin, la Loutre, le Vespertilion de Bechsteini, et le Vison d'Europe.

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Figure 20 - Les sites Natura 2000 – Source: http://natura2000.environnement.gouv.fr/sites/FR7200679.html

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Réalisé à partir du diagnostic écologique, le recensement reconnaît donc l'eau comme un élément structurant des écosystèmes arcachonnais. Il présente toutefois des limites en matière de gestion « intégrée », puisque la plus grande partie de la surface du bassin versant de la Leyre, principal cours d'eau se jetant dans le bassin, n'est pas incluse dans les périmètres Natura 2000. D'autres dispositifs tels que le Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne touchent à la gestion du bassin versant.

Le programme LEADER ou la recherche d'une nouvelle forme de tourisme

La politique environnementale de l'acteur européen sur le bassin d'Arcachon se traduit aussi par une démarche de projet avec le programme LEADER. Cette démarche se démarque des autres projets initiés jusqu'à maintenant en misant sur d'autres formes de tourisme. Inspiré du « tourisme vert », le programme LEADER s'appuie sur un triptyque à mi-chemin entre prise en compte de la pression démographique, protection et gestion du patrimoine environnemental, et développement de nouvelles filières touristiques respectueuses de l'environnement. Alors que les autres programmes continuent de proposer les mêmes offres touristiques en cherchant à maîtriser l'espace propre à chaque usage (protection environnementale, maintien d'une activité économique ou touristique), il s'agit ici de proposer une offre touristique inédite. On retrouve la volonté de s'inspirer de certaines des clés de la réussite du tourisme vert, comme avec la valorisation de la gastronomie locale, avec l'aide attribuée à une agriculture peu polluante, ou encore des journées à la ferme. A l'opposé de l'itinéraire classique pratiqué par le touriste, composé de la dune du Pilat, de la commune d'Arcachon, et de la dégustation d'huîtres, le touriste en demande de toujours plus d'authenticité et de confidentialité est appelé à sortir des sentiers balisés, afin de découvrir de la nouveauté, et une nouveauté pas nécessairement en lien avec le bassin et l'eau. Ce projet est ainsi au coeur des grands principes du programme: « Le programme LEADER vise [...] à renforcer et à harmoniser les actions de liaison entre le littoral et l'intérieur en soutenant les initiatives privées et publiques ».

Le programme « Terra », une approche concertée et intégrée de la protection du littorale

L'objectif du programme « Terra symphonie » pour le bassin d'Arcachon est d'apporter une réflexion globale sur le développement du territoire en tant qu'espace littoral fragile. Cette démarche se démarque par son projet d'expertise et surtout de concertation. Les 577 millions d'euros attribués conjointement par le département et l'Union Européenne ont ainsi permis de mettre en place un Système d'Informations Géographiques (S.I.G) destiné à suivre l'état de la pollution du bassin avec en ligne de mire les immersions des déblais de dragage du port d'Arcachon, et la pollution produite par une décharge. En complément d'autres outils de gestion communs du bassin, les outils de suivi constituent un objet autour duquel se rassemblent les différents acteurs en présence pour s'accorder autour du diagnostic et, peut être, se mettre d'accord sur les décisions à prendre. Pour le député européen Vert Gérard Onesta, la démarche de concertation apparaît contradictoire avec l'urgence qui, selon lui doit s'imposer dans certains cas. La fermeture de la décharge d'Audenge, prise en exemple du fait de la pollution qu'elle émet depuis son ouverture dans les années 1970, montrerait l'incompatibilité entre la temporalité lente de la démarche de concertation et la temporalité urgente qu'appellerait la résolution du problème de la pollution.

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Cette problématique de temporalités différentes reflète les décalages qui peuvent exister entre les interventions des différents acteurs et les besoins réels du site. En effet, le rôle de l’Europe est avant tout d’énoncer des principes fondateurs d’une politique de tourisme durable, mais également de mettre en place des réseaux relatifs à la protection des espaces jugés fragiles ou remarquables. Enfin, l’Europe a la compétence de débloquer des fonds afin de subventionner des actions mise en œuvre aux échelles inférieures. En somme, si les interventions de l’Europe semblent lointaines et abstraites du point de vue local, les impacts d’un tourisme effréné sur le milieu du Bassin d’Arcachon ont été largement limités grâce à cette politique forte de protection du foncier.

2. L'Etat, acteur foncier et autorité coordinatrice

Loin de disparaître avec l'avènement des acteurs européens, régionaux et locaux, l'Etat a vu ses compétences redéfinies avec la philosophie de ses politiques environnementales. La politique de gestion du foncier du Conservatoire du littoral s'ouvre à des principes nouveaux, et il n'est plus question d'interdire systématiquement les possibilités de pratiques anthropiques sur ses terrains.

Emblématique des prémisses de la protection environnementale des littoraux en France, la loi Littoral apparaît dans les années 1960 en réponse au tourisme de masse et à ses impacts sur les littoraux: urbanisation excessive, utilisation abusive de concessions d'endigage, destruction d'écosystèmes exceptionnels. Le littoral apparaît dès lors comme un capital à part entière sans lequel le développement touristique ne pourrait avoir lieu. L'article premier de la loi énonce que le littoral est "une entité géographique qui appelle une politique spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur ". De par cet article, la loi vise sans le nommer au principe de développement durable. Cette loi pose surtout un certain nombre de principe basés sur une protection très restrictive de l'environnement. L'urbanisation ne doit se faire que dans la continuité des espaces urbanisés existants; les routes sur le rivage sont interdites, et les routes de transit ne peuvent se faire qu'au delà d'une bande de 2 000 mètres à partir du rivage; enfin, une bande de 100 mètres à partir du littoral est déclarée « inconstructible », les espaces proches du rivage étant soumis à un principe d'urbanisation limitée.

La politique foncière environnementale menée par le Conservatoire du littoral sur trois sites autour du bassin d'Arcachon se démarque de politiques plus fermes telles que celles incarnées par les réserves intégrales ou les réserves biologiques domaniales qui interdisent quasi totalement l'accès aux touristes (MEUR-FEREC, C. 2007). A la logique de fermeture au public se substitue ici une volonté de maintenir les pratiques existantes sur les lieux. L'érosion de la pointe du Cap Ferret est ainsi prise en charge par l'acquisition du conservatoire depuis 1980 de 260 hectares de terrain, sur la façade occidentale la plus exposée à l'érosion,destinée à empêcher des constructions ou aménagements pouvant mettre à mal le système dunaire. Dans le même temps, le Conservatoire du littoral mène une politique de gestion de l'espace et des pratiques touristiques qui y sont associées. La page du site Internet du conservatoire du littoral consacrée à la pointe du Cap Ferret fournit ainsi les indications relatives aux itinéraires balisés praticables par les touristes, et propose même des visites

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guidées des sites protégés avec un accompagnateur spécialiste du lieu (voir capture d'écran du site Internet). On le voit, la politique de gestion du foncier se démarque de celles très restrictives incarnées par les réserves biologiques intégrales, en cherchant clairement à intégrer la composante humaine. La protection de l'environnement tend à se détacher de sa première acceptation restrictive, sans que cela ne nuise nécessairement à l'objectif de maintien des milieux naturels.

Le Schéma de Mise en Valeur de la Mer s'impose comme document d'orientation d'aménagement au même titre qu'une Directive Territoriale d'Aménagement. Il peut être opposable aux plans locaux d'urbanisme des communes et aux schémas de cohérence territoriale des intercommunalités. Dans la continuité de la loi de décentralisation de 1982, ce dispositif vise à un arbitrage par l'Etat de l'objectif de cohabitation entre protection de la nature et activités anthropiques, comme édicté dans les objectifs généraux et le cadre juridique du document: « Le Schéma de Mise en Valeur de la Mer, instrument de planification créé par la loi de décentralisation du 7 janvier 1983 et dont les objectifs ont été précisés dans la "loi littoral" du 3 Janvier 1986, détermine la vocation des différents secteurs de l'espace maritime et littoral en définissant la compatibilité entre les différents usages et

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précise les mesures de protection ». Document particulièrement riche en informations sur le fonctionnement du bassin et sur la description des composantes de ses écosystèmes, le SMVM du bassin d'Arcachon vise à un aménagement que l'on pourrait qualifier d'équilibré. Le recensement met en valeur tant les dimensions environnementales du territoire que les dimensions économiques, s'attachant à quantifier les tendances sur les dernières années. Ce document conforte le rôle de l'Etat comme autorité d'arbitrage.

Ainsi l’Etat tient un rôle législatif très important, dans la mesure où il impulse et oriente les politiques locales par le biais d’organismes tels que le Conservatoire du littoral ou par le biais de document d’aménagement de référence tels que le Schéma de Mise en Valeur de la Mer. L’action de l’Etat vient donc en contrepoint de celle menée par l’Europe, notamment car elle applique les politiques de développement durable et de tourisme équilibré au territoire national : l’ancrage territorial constitue donc la principale différence entre ces deux échelles d’intervention, qui demeurent par ailleurs toutes deux d’ordre directif. Paradoxalement, l’échelle inférieure à celle de l’Etat, à savoir la région, entretient des liens beaucoup plus ténus avec l’Europe, dans la mesure où elle est le réceptacle de la majeure partie des fonds européens, et où elle constitue également un relais pour les politiques européennes appliquées aux territoires.

3. La région, une échelle d'action politique « guichet » encore peu affirmée

La région Aquitaine est directement impliquée dans certaines démarches européennes, à l'image du programme LEADER pour lequel elle joue le rôle de guichet pour l'attribution des aides. En outre, elle pilote les projets de Parcs Naturels Régionaux, et assure un rôle central dans le Contrat de Plan Etat-Région 2007-2013, qui touche le bassin d'Arcachon au travers de trois thèmes. L'analyse de ses compétences et de ses politiques pose toutefois la question du rôle réel tenu par cet acteur: simple « guichet relais » de mise en œuvre des politiques européennes, ou bien échelle territoriale réellement efficiente de mise en œuvre des politiques ?

Le Contrat de Plan Etat-Région 2007-2013 constitue aussi un apport financier aux projets impulsés à différentes échelles. Ces politiques sont appréhendées ensemble sous forme du triptyque développement, protection et observation, que l'on retrouve aux chapitres 7, 8 et 9 du contrat. La volonté est ici forte de maintenir la diversification des activités sur le territoire arcachonnais. La pêche et le tourisme sont les deux points importants du contrat pour ses volets environnementaux:

− développer les capacités de la pêche et la qualité des eaux du bassin− développer les activités nautiques en payant des formateurs− financements apportés à la modernisation des sites pour leur protection. Il s'agit des

sites des prés salés de La Teste, la dune du Pilat pour le bassin d'Arcachon.− La protection de l'eau est essentielle non seulement pour le capital paysager mais

aussi pour la pêche. A ce titre le CPER prévoit le financement d'actions pour lutter contre l'eutrophisation de l'eau provoquée par le développement de l'algue verte.

La spécificité propre à l'échelle régionale se décline ici à travers la création de l'observatoire de la zone aquitaine, inscrit au projet du CPER. Les outils exploités doivent permettre un suivi régulier de l'évolution des dynamiques hydrauliques du bassin par exemple. A cette fin, l'outil

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de la photographie aérienne est l'objet d'une expérimentation particulière, puisque le bassin d'Arcachon a été choisi en France comme un territoire test, du fait de ses particularités. Cet observatoire travaille également en réseau avec les milieux de la recherche universitaire, dans le cadre de thèses. Enfin, le S.I.G et la communication destinée au public, ainsi que diverses études techniques, confèrent une force de frappe concrète à cet outil régional.

Le CPER touche également à un domaine d'action original avec la gestion de l'eau, pour lequel elle détient des compétences en matière de planification.

− la planification quantitative et qualitative des ressources en eaux (préservation des milieux aquatiques; gestion équilibrée des ressources en eau – outils de gouvernance, schéma d'aménagement et de gestion de l'eau -; contrats de rivières et retenues collinaires de moyenne capacité; lutte contre les pollutions diffuses et lutte contre les pollutions industrielles).

La création en 1970 du Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne, à l'initiative du Conseil Régional de l'Aquitaine propose un autre type d’action que les Contrat-Plan Etat-Région : un PNR est un territoire rural habité, dont les limites ne sont pas fixées par rapport à des limites administratives. « L’esprit parc » d’aménagement est nourri par quatre idées fortes: l’intercommunalité, la valorisation du patrimoine naturel et culturel, un projet de paysage et le développement local. Un PNR a une valeur contractuelle, à la différence d’autres espaces protégés de valeur réglementaire. Le PNR des Landes de Gascogne recouvre 315 000 hectares et intègre l'ensemble du bassin versant de la Leyre. Celui-ci ne touche pas directement les rives du bassin. Il incarne une vision du développement durable plus axée sur une approche « patrimoniale » du développement durable, qui se décline en six principes dont nous retiendrons les deux plus significatifs :

- Préserver et valoriser les ressources et les milieux naturels du territoire : restauration de rivière (Leyre et affluents), des milieux naturels forestiers et des sites spécifiques tels les airiaux,- Promouvoir un développement durable des activités économiques et touristiques ; Promotion communication touristique, Journal du Parc, Promotion commercial…

L'impact direct du PNR sur le territoire arcachonnais est notable. La question de l'assainissement des eaux et des intrants agricoles utilisés pour la maïsiculture peut ainsi être traitée à travers le PNR. Aussi, la promotion d'un tourisme vert, fondé sur la restauration du patrimoine bâti et sur l'éducation aux pratiques agricoles « propres » ou aux pratiques culturelles, participent au projet déjà approché dans le programme LEADER d'attirer une nouvelle population de touristes en dehors du bassin pour pratiquer un tourisme « durable » dont les atteintes sur l'environnement sont limitées.

La variété des dispositifs et des périmètres de mise en oeuvre posent avec force la question du territoire de coordination pertinent des politiques. Si le triptyque Europe/Région/ Intercommunalité apparaît comme un modèle d'avenir (nous nous pencherons plus tard sur le cas de l'intercommunalité), le peu de pouvoirs aux mains des régions aujourd'hui, au regard des landers allemands ou des régions espagnoles, et la multiplicité des acteurs, contribuent à complexifier la résolution de certains conflits d'acteurs. L'affirmation du rôle de l'Etat comme arbitre, face à la multiplication des acteurs en présence, peut au contraire dessiner un nouveau rôle à cette échelle du pouvoir, ce que le Schéma de Mise en Valeur de la Mer du Bassin d'Arcachon s'essaye à faire. Le rôle de la Région reste à définir. Peut-être sa taille intermédiaire entre local et cohérence régionale peut-elle poser les balises d'un nouveau rôle

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politique dans le pilotage et l'accompagnement de la diversification des activités pour la région. D’ailleurs, la région n’est pas le seul acteur à devoir trouver son propre domaine de compétence. Effectivement, alors qu’il se serait nécessaire de clarifier la position de la région notamment par rapport à l’échelle européenne et aux liens qu’elle entretient avec elle, le département semble faire état de peu de responsabilités concernant la gestion et l’aménagement de son territoire.

B/ L’échelle locale, ou l’inégalité des interventions

Une des particularités de l’échelle locale est que l’accent est mis davantage sur un travail de gestion que sur un travail de planification et d’aménagement.

1. L’échelle départementale, ou les tares d’une circonscription administrative intermédiaire

Le département auquel appartient l’ensemble du Bassin d’Arcachon est celui de la Gironde. Il représente un acteur intermédiaire entre les niveaux régionaux, nationaux et internationaux d’une part, et le niveau local d’autre part. Il a développé un Schéma Départemental d’Aménagement et de Développement Touristique de la Gironde, pour la période 2008-2013. Ce schéma garantit l’appui du Conseil Général aux acteurs locaux qui s’engagent et s’investissent pour le développement touristique, et il insiste sur le fait que la Gironde ne doit pas « s’endormir sur ses lauriers »29, c’est-à-dire se contenter de se reposer sur la richesse de son potentiel touristique. Néanmoins, outre qu’il ne soit qu’un cadre opérationnel, ce schéma porte également sur une échelle trop large pour avoir une action concrète sur le cas du Bassin d’Arcachon. Donc bien que sa portée soit loin d’être inutile du point de vue touristique pour l’ensemble de la Gironde, elle ne renseigne pas beaucoup quand aux mesures à entreprendre face aux diverses problématiques en jeu sur le Bassin d’Arcachon. Or cela contraste nettement avec les interventions de l’échelle intercommunale dont les leviers d’action sont multiples, avec un retentissement notable sur le territoire.

2. L’intercommunalité : l’efficacité d’une action commune et partagée

Le Pays du Bassin d’Arcachon-Val de l’Eyre, ou pays de Buch, regroupe 17 communes, 4 cantons, et totalise 110 269 habitants et 46 000 ménages pour une superficie de 1494 km’. Il se découpe en trois entités administratives qui sont des communautés d’agglomération : le Nord, avec la COBAN (Communauté d’Agglomération du Bassin Arcachon Nord), le Sud avec la COBAS (Communauté d’Agglomération du Bassin Arcachon Sud), et le Val de l’Eyre qui se situe plus à l’Est, vers l’intérieur des terres. Ce découpage géographique est intéressant, dans la mesure où il partage les entités paysagères spécifiques contribuant à façonner l’image et l’identité des territoires. L’absence de commune riveraine avec le Bassin d’Arcachon au sein de la communauté d’agglomération du Val de l’Eyre justifie notre choix ne pas s’y attacher plus particulièrement. Notre analyse sur les structures

29 Schéma Départemental d’Aménagement et de Développement Touristique de la Gironde, 2008-2013, Conseil Général de la Gironde, ‘Introduction’, http://www.cg33.fr/cg33/jcms/c_16990/schema-departemental-d-amenagement-et-de-developpement-touristique-de-la-gironde

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intercommunales participant à un développement touristique équilibré se centrera donc sur la COBAN et la COBAS. En effet, le Bassin d’Arcachon est riche de son intercommunalité, définie en fonction des différents périmètres géographiques d’actions et compétences entre la COBAN, la COBAS, mais aussi et surtout le SIBA (Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon).

Figure 21 - Les territoires arcachonnais de l'intercommunalité - SIBA, 200930

Le Pays s'est engagé dans une démarche de développement durable à travers la mise en œuvre d'un Agenda 21 local, et il a également été retenu pour conduire le programme européen "Leader" destiné à renforcer les liens entre le littoral et l'intérieur dont nous avons parlé précédemment. En outre, une Charte de pays a été rédigée comme un cadre regroupant des orientations générales dans lesquelles devront s’inscrire des actions concrètes menées par le Pays. Trois priorités s’en dégagent : préserver l’environnement et le cadre de vie, mettre en cohérence les services publics et au public, l’emploi, le développement économique et la solidarité. Cependant, c’est en réduisant encore l’échelle géographique que le Bassin d’Arcachon trouve les structures qui ont une réelle action sur la complexité de ses enjeux environnementaux et sur son développement touristique.

Ainsi, la COBAN, Communauté d’Agglomération du Bassin Arcachon Nord, compte à cet égard 8 communes, dont 6 sont riveraines au bassin (Lège-Cap Ferret, Arès, Andernos-les-bains, Lanton, Audenge, Biganos, Marcheprime, Mios). Elle exerce plusieurs compétences, mais s’attache principalement au développement économique, à l’aménagement de l’espace et à la collecte des déchets ménagers. En outre, la signature du Contrat Opérationnel 2008 le jeudi 25 septembre 2008 (dans le cadre du Contrat de Développement Durable mis en place par le Département de la Gironde en 2004), entre Christian Gaubert, Vice-Président du Conseil Général de la Gironde, Maire de Lanton, et Bruno Lafon, Président de la COBAN, Maire de Biganos, illustre le relai d’actions et de compétences auquel les différentes structures se prêtent à différentes échelles géographiques.

30 http://www.coban-atlantique.fr/article/archive/12/

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La COBAS, Communauté d’Agglomération du Bassin Arcachon Sud créée en 2002, regroupe elle les communes d’Arcachon, de La Teste de Buch, de Gujan-Mestras et du Teich. Elle fait partie du SIBA et lui délègue sa compétence Assainissement. En tant que communauté d’agglomération, elle s’occupe du développement économique de son territoire, de l’équilibre social, de l’habitat, du transport et des déplacements, de la collecte et traitement des déchets. La COBAS est en outre propriétaire de tous les équipements nécessaires à la fourniture d'eau potable dans les communes du Bassin Sud : forages, réservoirs, dispositifs de traitement. Elle finance également tous les travaux neufs nécessaires pour l'exploitation et le développement du réseau de distribution. Et depuis juillet 2001, en raison de la défaillance de la société ESG, gestionnaire historique de l'eau pour les habitants de Cazaux, la COBAS est désormais en charge de la fourniture des 1350 abonnés de Cazaux, participant ainsi à limiter les problèmes liés à l’usage de l’eau autour du Bassin d’Arcachon.

Somme toute, le SIBA, Syndicat Intercommunal du Bassin d’Arcachon, semble être l’acteur de référence à l’échelle intercommunale en matière de développement touristique équilibré. Il exerce les activités liées à ses compétences statutaires sur le territoire des dix communes riveraines du Bassin d’Arcachon, c’est-à-dire les communes formant la COBAS, et les six communes riveraines au bassin composant la COBAN (les communes de Mios et de Marcheprime n’en font donc pas partie). En outre, le SIBA exerce ses compétences statutaires à l’intérieur du Domaine Public Maritime (constitué du plan d’eau du Bassin d’Arcachon, de ses rivages et de certains de ses ports. Il a donc à la fois des compétences sur les espaces terrestres et maritimes.

Or les missions du SIBA répondent à beaucoup de problèmes soulevés précédemment, tant au niveau des enjeux environnementaux que des conflits d’usage sur le Bassin d’Arcachon. En effet, une de ses missions du SIBA porte tout d’abord sur la protection environnementale du Bassin d’Arcachon. Effectivement, le SIBA produit des données sur la qualité de l’eau et du milieu, en coopération avec l’université de Bordeaux, l’Ifremer, l’Agence de l’eau, la DIREN et la direction de l’équipement. Plusieurs études sont d’ailleurs en cours au sujet du wharf de la Salie et de son impact (étude des effluents avant et après rejet avec recherche de micropolluants dans le milieu marin et sur les zones de production d’huîtres ; impact local au niveau des abords du Wharf de la Salie ; actualisation des simulations de diffusion du panache au Wharf ; et étude d’infiltration des effluents). D’autre part, l’assainissement des eaux usées constitue également une mission de grande envergure pour le SIBA. La compétence d’Assainissement de la COBAS lui est même déléguée comme nous l’avons précisé un peu plus haut. Cela a même été la principale vocation du SIBA lors de sa création en 1964 (sous le sigle SIACRIBA) : construire et exploiter un réseau d’eaux usées d’origine urbaine et industrielle afin d’assainir la région et de préserver la qualité du Bassin d’Arcachon. C’est la raison pour laquelle la papeterie SMURFIT KAPPA à Facture-Biganos et l’importance de ses rejets d’eau ont constitué un élément essentiel dans l’élaboration du réseau d’assainissement du Syndicat. En outre, le SIBA joue un grand rôle concernant les travaux maritimes et fluviaux. Ses compétences s’exercent sur l’ensemble du plan d’eau que constitue le Bassin d’Arcachon, ses chenaux et sur une partie de ses ports. A cet égard, le SIBA a lancé en janvier 2007 sa campagne de travaux de réensablement concernant les plages de Pyla-sur-Mer à la Teste de Buch et d’Arcachon, ainsi que les plages d’Andernos-les-Bains et de Lège-Cap Ferret : son budget a finalement été de 1 115 000 € pour ces différents réensablements qui répondent en partie au vaste problème d’érosion des plages (démarche d’autant plus importante pour la préparation de la saison touristique sur le bassin). Enfin, les

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travaux maritimes et fluviaux du SIBA participent à un développement équilibré du site du Bassin d’Arcachon dans la mesure où, dans le cadre du CPER (Contrat Plan Etat Région) 2001-2006, il a effectué des opérations de dragage portant sur plus de 3 millions de m3 de sédiments sableux dans les chenaux internes du bassin d’Arcachon, et ayant trois différents buts :

- favoriser les écoulements et le renouvellement des eaux à l’intérieur du Bassin : et ce, afin de diminuer la pollution des eaux (surtout au fond du bassin)

- lutter contre la sédimentation et l’érosion : et ce, afin de parer l’ensablement du fond du bassin et l’érosion des côtes

- améliorer les conditions de navigation, qui peut participer à un meilleur usage du plan d’eau par les plaisanciers et professionnels, et qui peut donc participer à un apaisement des conflits bateaux-ostréiculture.

Finalement, l’échelle intercommunale apparaît comme l’échelle d’intervention la plus pertinente au niveau local. En effet, les actions menées à l’échelle départementale de la Gironde ne sont pas assez précises pour avoir un impact concret sur l’environnement, le développement touristique, et les conflits d’usage ayant lieu sur le Bassin d’Arcachon : les mesures prise ne servent que de cadre opérationnel. D’autre part, l’échelle communale est elle trop petite pour avoir les moyens d’avoir une politique de développement équilibrée et prenant en compte la complexité du milieu. Ce sont les Plans Locaux d’Urbanisme des communes entourant le bassin qui ont un réel impact sur le développement du territoire, mais leurs portées ne sont justement pas assez larges pour intégrer la totalité des problématiques en jeu sur le Bassin. Les acteurs de l’échelle intercommunale s’imposent donc comme les acteurs clés au niveau local, et le SIBA se pose comme fédérateur de cette intercommunalité. D’ailleurs, l’intercommunalité représente également un niveau intermédiaire entre une échelle large dotée de compétences législatives qui orientent et préconisent, et une échelle micro-locale qui catalyse la voix des acteurs de la gouvernance (entreprises, associations, individus).

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Figure 22 - L'exhaussement du niveau des eaux oblige les collectivités à recréer des plages plus vers l'intérieur du bassin... au risque de modifier les équilibres hydrauliques ? - Sources:http://www.bassindarcachon.com/crii_du_kayok.aspx?id=15

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C/ Réflexions et actions portées par les individus : une pierre de taille apportée à l’édifice

Comme nous venons de l’évoquer, il existe, à côté des réflexions et plans d’actions officiels, des propositions émanant de la société civile. Celles-ci, loin d’être de simples pamphlets écologistes, expriment un réel désir de contribuer au progrès en matière de préservation environnementale. D’ailleurs, comme nous le verrons à travers les différents exemples qui seront présentés, ces engagements ont d’une part un retentissement non négligeable sur les réflexions des collectivités locales, et d’autre part ils participent à l’aménagement du territoire de façon conséquente, avec notamment une inscription paysagère tout à fait visible. Les actions portées par les individus s’articulent autour de trois enjeux qui les touchent dans leurs activités quotidiennes : d’une part la maîtrise de l’érosion de la côte sableuse, ensuite la préservation de la qualité des eaux du bassin et enfin la recherche d’un terrain d’entente entre les différentes activités. Les individus justifient leur action soit par un besoin économique qui nécessite une préservation de leur activité soit en vue de préserver un lieu de vie pour lequel ils ressentent un attachement tout particulier ou tout simplement par conviction politique (mouvement écologiste). En somme, il est possible de classer les actions provenant d’individus en trois catégories : les entreprises, les associations et les individus Les premiers défendent une économie liée à la qualité environnementale, les seconds cherchent à faire valoir les attributs naturels d’un milieu tandis que les particuliers défendent leurs intérêts propres (qualité de vie).

1. Au cœur des conflits d’usage, l’interaction des entreprises fait sens

Les activités de l’usine de papier kraft Smurfit font débat, depuis de nombreuses années, au sein des associations protectrices de l’environnement et à l’intérieur des autres filières économiques. En effet, Smurfit Kappa Cellulose du Pin est la cible de multiples critiques concernant la pollution des sols suivie de celle des nappes phréatiques, et du rejet d’eaux usées dans l’océan atlantique via le wharf de la Salie. C’est pourquoi l’usine est d’abord surveillée de près par les autorités sanitaires, et c’est aussi pourquoi les efforts de l’entreprise pour réduire la pression sur l’environnement ont été démultipliés dans les dix dernières années. : « Ces 10 dernières années, Smurfit Kappa Cellulose du Pin a investi près de 32 millions d'Euros pour limiter l’impact de son activité sur l’environnement.31 Parce que la pression est forte sur Smurfit, des moyens importants sont mis en œuvre. Alors que certaines zones de déchets appartenant à l’usine sont aujourd’hui en sursis, Smurfit appuie ses efforts sur une diminution de l’impact de ses lixiviations sur la qualité des eaux dans lesquelles ils sont rejetés. La production de papier, grande consommatrice d’eau pose de plus en plus problème pour la pérennité de cette activité. Smurfit concentre ainsi beaucoup d’efforts financiers, mais aussi de recherche technologique afin de réduire drastiquement sa consommation en eau : « En trente ans, alors que la production de l’usine a été multipliée par 3, sa consommation d’eau a été réduite de 66 %, et la qualité de ses effluents n’a cessé de s’améliorer : »32

31 http://www.smurfitkappa-cellulosedupin.com/DropdownMenu/Environment/Our+actions/32 http://www.smurfitkappa-cellulosedupin.com/DropdownMenu/Environment/Our+actions/

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Figure 23 - Les rejets d'eau de Smurfit - Smurfit, 2007

« Pour les prochaines années, Smurfit Kappa Cellulose du Pin s’est fixée des objectifs précis en matière d’environnement. Elle place parmi ses priorités la diminution de sa consommation d’eau et la réduction des rejets de matières organiques dans les effluents liquides. » Cet exemple montre bien que le souci de préserver une activité peut pousser à mener des efforts considérables en matière d’environnement. La peur d’une dégradation de son image pousse l’usine SMURFIT à travailler sur la réduction de ses impacts sur l’environnement. Elle est d’ailleurs très à l’écoute des revendications faites par d’autres secteurs d’activités tels que l’ostréiculture, et s’en inspire pour diminuer sa pollution.

Les ostréiculteurs suivent de très près l’évolution de la qualité des eaux sur le Bassin et jouent un rôle important dans les réflexions concernant la gestion des eaux. En effet, suite à un entretien téléphonique avec une ostréicultrice, implantée depuis quelques années sur le Bassin d’Arcachon, il est apparu très clair que ce corps de métier contribuait de façon très importante à la prise de conscience générale concernant la préservation de la qualité des eaux du bassin. Ses propos sur la situation écologique du bassin sont très mesurés, d’une part parce qu’elle ne juge pas la situation comme catastrophique, et d’une autre part, parce que les preuves d’une réelle pollution du bassin restent à prouver. La nécessité d’être vigilant est largement mise en avant par les ostréiculteurs. Par contre, le catastrophisme tel qu’on peut le voir dans certains discours écologistes est écarté. La raison en est très simple : la communication qui est faite sur les eaux du bassin a un impact considérable sur la promotion des huîtres : « C’est très délicat de s’exprimer, on fait très attention à notre communication. Si jamais on met le doigt sur un problème important, tout de suite, les gens vont croire que les huîtres sont mauvaises. On ne peut pas s’exprimer librement. Il faut véhiculer une image très responsable par rapport aux consommateurs. Les associations elles, disent ce qu’elles veulent, dans tous les cas elles sont au chaud » Ainsi les ostréiculteurs sont tiraillés entre vigilance et communication. C’est pourquoi les ostréiculteurs se montrent vigilants, mais ils font cela de manière plus discrète. Un des problèmes qui est mis en avant par l’interlocutrice, est celui du partage de l’espace entre les différentes activités. Ce partage de l’espace est autant difficile sur terre que sur le bassin (voitures et bateaux), notamment en période estivale. Il y a selon elle deux bassins : celui d’hiver et celui d’été, l’été étant à la fois une période tout à fait

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intéressante pour l’ostréiculture mais également source de dégradation du paysage, qui perd de plus en plus son caractère sauvage.

En quelque sorte gardiens de la qualité des eaux du bassin, les ostréiculteurs sont donc très vigilants et n’hésitent pas à pousser les autorités à effectuer de nouvelles études afin d’obtenir des données précises sur l’état des eaux. C’est notamment grâce à leurs demandes répétées qu’une étude d’impact, comparative avec celle datant de 99 a été lancée. Néanmoins, le protocole de l’étude n’est pas encore connu. D’autres projets sont prévus, comme la mise en place de capteurs passifs à toutes les distances du wharf, pour voir si des molécules à moyenne faible ou concentration se retrouvent à l’entrée du bassin. « C’est parce qu’on pousse qu’il se passe des choses » dit l’ostréicultrice. L’usine Smurfit a également fait beaucoup d’efforts suite aux recommandations faites par les ostréiculteurs. Leur politique environnementale montre bien que de réels efforts sont faits. D’ailleurs, l’ostréicultrice a déjà observé des mesures prises par Smurfit, suite à une conversation qu’elle aurait eu avec eux. Elle reconnaît ainsi leur capacité d’écoute et leur sensibilité vis-à-vis de l’environnement. Son avis est nettement moins flatteur pour les plaisanciers, dont la conscience des dégâts potentiels de leur bateau, même au port, est quasi nulle. Si l’aspect macrographique du bassin montre une eau tout à fait apte à accueillir des activités de baignade, le principal problème selon elle, est la pollution microbiologique, dû à l’essence utilisée ou encore aux peintures des bateaux. Mais cette absence de conscience environnementale lui paraît être liée à un changement dans l’état d’esprit des vacanciers, avec un passage de l’ère des « touristes contemplateurs » à celle des « gloutons du plaisir ». Or cela se retrouve dans les comportements sur le bassin, voire même dans le type de bateau utilisé : « Avant on avait des ‘teuf teuf’ avec des gens qui passaient leur journée sur le bassin à s’arrêter partout. Aujourd’hui ils ont tous des formules 1 de la mer. » Concernant la politique du « tout voile » préconisée par la publication des dix associations, elle la juge trop tardive pour être encore possible : « On aurait du faire ça il y a vingt ans. Aujourd’hui on ne peut plus vraiment faire demi tour. » Autant amoureux du bassin que les écologistes, les ostréiculteurs sont plus nuancés dans leur discours parce qu’ils ont une clientèle à fidéliser. Cependant, la qualité des huîtres étant dépendante de celle des eaux du bassin la recherche de la vérité est la motivation première des pressions mises sur les autorités administratives (SIBA, Conseil Général).

Ainsi, que ce soit pour préserver leur image ou la qualité de leur production, les entreprises n’hésitent pas à s’insérer dans le débat, voire à impulser des projets. La pertinence des réflexions se retrouve également dans le cadre associatif qui, sur le Bassin d’Arcachon, a largement gagné en crédit auprès des collectivités territoriales.

2. Les associations, un vecteur de réflexion non négligeable

Pour le respect écologique du bassin d’Arcachon

Les associations pour la défense de l’environnement sont très nombreuses autour du bassin. Coordination Environnement du Bassin d’Arcachon (CEBA), Les Amis du littoral ou encore Bassin d’Arcachon Ecologie sont parmi les plus connues. Les chevaux de bataille de ces associations ne sont pas tellement différents puisque la protection des écosystèmes, la gestion des ressources naturelles et le développement du tourisme raisonné autour du bassin sont au cœur des thématiques. D’ailleurs, elles n’ont pas hésité à fusionner afin de rédiger ensemble une publication sur les mesures nécessaires à mettre en œuvre en matière

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environnementale. En effet, ce sont dix associations qui sont à l’origine de la publication intitulée « Pour le respect des enjeux écologiques du Bassin d’Arcachon », paru en avril 2007. Ce texte a eu un retentissement très important dans les collectivités locales ainsi qu’au Conseil Général de la Gironde. Toutes les associations nommées en préambule sont signataires et approuvent donc les principes érigés à travers le texte, qui est en fait une synthèse des préoccupations environnementales et écologiques des associations. Le texte a été adressé aux élus locaux et départementaux afin de les faire réagir sur les principaux sujets sensibles concernant l’environnement sur le Bassin d’Arcachon. L’objectif poursuivi est clair : il s’agit de mettre en garde contre les méfaits d’une surexploitation des ressources naturelles et foncières sur la qualité d’un milieu fragile dès l’origine tel que le territoire du bassin d’Arcachon. La réflexion portée par les associations repose sur un principe fondamental qui est exposé en première partie : « Aucun développement ne peut être conçu sans qu’une place centrale soit faite à la protection de l’intégrité des territoires naturels et à leur rôle pour la préservation du vivant. »

Parce qu’une des particularités du bassin est que les divers enjeux soient non seulement imbriqués les uns dans les autres, mais aussi tenus par des liens de cause à effet, les réflexions portent sur l’ensemble des activités pratiquées sur le bassin ainsi que sur l’ensemble des enjeux environnementaux. C’est pourquoi tous les thèmes sont abordés : agriculture, plaisance, infrastructures, urbanisation, gestion des eaux, qualité des eaux marines…. La critique majeure qui émane de ce document est le manque de rigueur dans l’utilisation des outils de programmation urbaine, de préservation des espaces fragiles ou à particularités faunistiques et floristiques. D’autre part, le Schéma de mise en valeur de la mer (SMVM) est jugé trop ancien pour correspondre à la réalité sur le terrain. Par conséquent, il nuit à la cohérence ainsi qu’à l’efficacité d’autres documents urbanistiques tels que le Schéma directeur ou encore le PLU : « Actualiser le Schéma de Mise en Valeur de la Mer et, conjointement, élaborer sans tarder le Schéma de Cohérence Territoriale; conformer à ces données les Plans d'Aménagement et de Développement Durable, puis les Plans Locaux d'Urbanisme, en préservant les ultimes coupures d'urbanisation et en protégeant les espaces naturels remarquables jusqu'ici oubliés. ». 33

. Des solutions sont également préconisées. En effet, concernant la « sur-urbanisation », il est proposé de définir des seuils de capacité, à la fois par commune et sur tout le territoire. Bien que l’un des objectifs du Plan Local d’Urbanisme (PLU) soit de gérer l’urbanisation, l’idée de fixer un seuil chiffré de constructibilité pourrait être un garde-fou efficace contre les phénomènes de mitage, très développés sur certaines communes littorales telles qu’Andernos ou Biscarosse. Aussi, sur le thème de la circulation douce, les dix associations mettent en garde contre la destruction des espaces forestiers fragiles avec une surabondance de passage (bicyclettes, piétons) et préconisent des choix de terrains plus stratégiques pour l’aménagement de pistes cyclables ou bien piétonnes. Enfin, sur la problématique sensible de la plaisance, le développement de la voile et de l’aviron plutôt que du moteur pour les activités nautiques ainsi que l’aménagement de parcs de stationnement à terre pour les bateaux semblent, selon les associations être plus en prise avec les objectifs de développement équilibré du bassin. En revanche, ces propositions ne conviendront sûrement pas aux besoins économiques des constructeurs de bateaux.

Il est assez intéressant de voir que les associations se sont saisies des outils traditionnels d’aménagement pour conduire une réflexion cohérente et argumentée. Ces outils sont non seulement connus mais aussi maîtrisés. Or cela confère un crédit non négligeable au

33 Pour le respect écologique du bassin d’Arcachon avril 2007

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document final produit. D’ailleurs, c’est en donnant une telle envergure à la rédaction que la publication de ce document a pu avoir un retentissement important, et cela tant auprès des collectivités locales qu’auprès d’institutions telles que le Conseil Général de la Gironde. En effet, les réponses apportées par les maires et par le Conseil général dénotent d’un intérêt certain apporté à la lecture du document, mais également d’une appréciation réelle des idées exposées. En effet, dans sa lettre adressée en tant que réponse au document publié par les dix associations, le maire du Teich (M. Deluga) affirme vouloir intégrer les associations au processus de décision : « Pour ma part, je souscris à la quasi-totalité des propositions formulées et j’en ai d’ailleurs déjà mises en œuvre au conseil régional et à la COBAS (…) Je souhaite que les propositions des dix associations servent de base au Pacte de l’Environnement. »34En ce qui concerne la réponse du Conseil Général de la Gironde, la position adoptée par rapport au document est à peu près similaire : « L’ensemble de ce document me paraît à la fois pertinent et pondéré (…) Je peux vous assurer que je ferai miens les enjeux et les objectifs de ce texte qui me paraît être une base commune d’appréciation et de travail que les institutionnels locaux comme girondins devraient prendre en compte. » Ainsi à défaut de se présenter comme des experts en matière d’urbanisme et d’environnement, les associations font état d’un savoir riche et pertinent qui leur permettent de voir clair dans les enjeux du Bassin, mais également de dépasser le stade de la provocation pure pour peser plus lourdement dans la balance des décisions publiques

Nautisme et environnement

La plaisance est sûrement l’un des enjeux les plus délicats du Bassin d’Arcachon. En effet, en fournissant une valeur ajoutée de taille pour les vacanciers, elle constitue un formidable vecteur de développement économique et touristique. En ce sens, la plaisance participe largement à l’attractivité du Bassin en tant que lieu de vacances et de villégiature. Le problème est qu’elle participe aussi cruellement à la destruction de certains écosystèmes, à la fois marins et terrestres (les oiseaux du banc d’Arguin qui s’affolent au bruit des « formules 1 » de la mer). En outre, c’est une activité qui est en collision permanente avec d’autres filières économiques telles que la pêche et l’ostréiculture. Or la situation allant de mal en pis, le nautisme a fait l’objet de nombreuses réflexions de la part des associations qui ont aboutit à des propositions de solutions.

Par exemple, l’association nommée « Bassin d’Arcachon Ecologie » a publié en janvier 2008 une liste de propositions pour « l’amélioration du nautisme et de la plaisance dans le sens du respect de l’environnement du bassin d’Arcachon ». Tous les défis relatifs à la qualité de l’environnement sur le Bassin sont embrassés dans cette longue liste, et cela sans passer par la critique mais plutôt par l’énonciation de solutions à envisager. La visée principale de cette liste est de faire perdurer le nautisme sur le Bassin mais de façon équilibrée et durable, de sorte qu’il ne vienne point nuire davantage aux activités liées aux eaux du Bassin. Les solutions sont multiples et touchent à tous les aspects du nautisme en termes d’impact environnemental.35 Dans cette liste se trouvent notamment des éléments de réponses essentiels à la pérennité de la cohabitation entre nautisme, pêche et ostréiculture. En effet, le développement d’énergies alternatives pour les bateaux à moteur (solaire, gaz, électricité) ainsi que la mise en place de règles strictes quant à la conduite sur le Bassin apparaissent comme des clés du développement durable du nautisme. Aussi, l’interdiction du nautisme sur le Bassin pour les Off Shore, ou encore la disparition graduelle des jets skis et scooters des

34 http://www.bassindarcachonecologie.org/association.html

35 http://www.bassindarcachonecologie.org/enjeuxecologiques.html

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mers permettraient de limiter de façon importante les pollutions à la fois en hydrocarbures et en bruit. Une surveillance constante mise en place grâce à la mise en navigation d’un bateau « propre » est évoquée dans la liste. Quant à l’usage du Bassin en tant qu’espace traversé (pour rallier d’un bord à l’autre du Bassin), il est suggéré de revoir les tarifs de la navette à la baisse, afin de dissuader les gens de prendre leur voiture au profit d’un transport en commun. Les ports à sec ainsi que le développement des bateaux à voile et avirons font également partie des propositions. Enfin les restrictions quant à l’usage de peintures anti-salissure devraient être mieux respectées, selon l’association « Bassin d’Arcachon Ecologie », afin de mener à la raréfaction à court terme, puis à la disparition complète des antifoulings. Encore une fois ce document produit par une association envisage des solutions tout à fait réalistes qui, à terme, pourraient aboutir à une véritable porte de sortie des troubles subis par le Bassin actuellement. Les mesures à prendre sont nombreuses et parfois contraignantes. Elles seront peut-être difficiles à faire respecter mais leur aboutissement laisse présager un avenir moins sombre, d’abord pour la diversité économique, mais aussi pour le tourisme sur le Bassin. Convaincues de l’urgence de la situation, les associations anticipent les réflexions, tandis que cette même urgence pousse les particuliers à agir de façon autonome.

3. Les individus : des ingénieurs/aménageurs en herbe pour lutter contre l’érosion marine

Loin du champ politique, les actions menées par les particuliers expriment une situation d’urgence, un besoin de réagir vite face aux mouvements du Bassin, quitte à réaliser soi-même des aménagements temporaires. Ce sont en effet les habitations en péril qui ont sonné le glas de l’urgence. Les superbes villas enfouies dans la pinède sont aujourd’hui sévèrement menacées par le recul de la péninsule sableuse. L’empilement de matériaux (ferrailles, pierres, poteaux métalliques etc.) forme des cordons d’enrochements chargés de chasser les courants marins et ainsi de protéger la péninsule de l’érosion. « Construits parfois au pied des falaises, plus souvent sur le haut des plages, ils visent à contenir l’attaque frontale de la houle et à arrêter l’avancée de la mer. Ils sont très utilisés car ils sont moins coûteux et plus faciles à mettre en place que d’autres ouvrages lourds comme les épis ou les brise-lames. »

Juillet 2008

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Mais si les premiers à avoir utilisé cette technique sont parvenus à maintenir leur demeure en état, cela s’est fait au détriment des autres rivages situés plus au nord de la péninsule. En repoussant les courants, ceux-ci se sont en fait simplement déplacés ailleurs, avec une force démultipliée. Car une des propriétés des cordons d’enrochement est de modifier l’équilibre entre la dune et l’estran en interférant dans leurs échanges sédimentaires. En outre, ils perturbent les processus hydrodynamiques littoraux en démultipliant les forces de la mer venant se briser sur eux et ainsi donc les courants marins. Repoussés, ils sont redirigés vers les plages adjacentes qui doivent, à leur tour mettre des défenses en place, face à un phénomène non seulement déplacé, mais également renforcé. Ainsi Roland Paskoff parle de « cercle infernal ». Or c’est exactement ce qui s’est passé sur la pointe du Cap-Ferret où les riverains situés plus au nord de la péninsule ont dû eux aussi apprendre à se battre contre les forces de la houle.

A cela sont venus s’ajouter des épis de bois, destinés à repousser les sables amenés par la houle et ainsi lutter contre l’ensevelissement des maisons situées à l’extrémité sud de la pointe du Cap-Ferret. « Ouvrages de défense transversaux par rapport au trait de côte, ils constituent des obstacles, généralement perpendiculaires au rivage, parfois obliques, qui ont pour but de retenir une partie de la charge sédimentaire véhiculée par la dérive littorale en freinant ce courant. Ils permettent d’élargir une plage ou de la stabiliser si elle est en état de recul. » Mais encore une fois, un épis en appelle toujours un autre. Autre système de défense : des fosses creusées à plus de 20 mètres de profondeur, comme c’est le cas par exemple au niveau de la pointe Hortense. Toutes les ruses sont bonnes si elles parviennent à casser le courant. Un ingénieur aquacole, Dominique Bordes-Süe suggère de recréer des récifs sur le fond du bassin. Sur le modèle des parcs à huîtres, il érige des tiges de bois qui, en étant colonisées par la végétation marine, forment un rempart contre les forces de la houle. S’il est pour l’instant difficile d’en mesurer tant les bénéfices que les vices à long terme, Roland Paskoff assure qu’en se battant contre un phénomène naturel, « On fait baisser la fièvre, mais on ne soigne pas la maladie ». La pointe du Cap-Ferret illustre bien le dilemme qui se pose entre le besoin de protéger dans l’urgence et une vision trop mécaniste de la nature.

Ainsi, à travers les multiples exemples d’engagement présentés ci avant, il apparaît évident que la sphère des individus a tout à fait sa place dans les réflexions relatives à la préservation environnementale du Bassin. D’ailleurs, pour être plus efficaces, les collectivités n’ont pas hésité à convier les usagers du Bassin (pêcheurs, ostréiculteurs, plaisanciers) à se réunir autour d’une table lors de l’élaboration d’une « charte de bonne conduite des navigateurs » en septembre 2007. Cela a été fructueux dans la mesure où les différents acteurs ont été mis dans un même groupe de travail : des compromis ont dû être trouvés malgré les divergences d’usages. L’interaction secteur professionnel/secteur associatif/particuliers représente donc la voie à suivre afin de promouvoir un développement plus équilibré et allégé de tensions inhérentes aux conflits d’usage.

Finalement, les types d’intervention varient en fonction des différentes échelles, et ce avec une certaine irrégularité. Chaque échelle détient ses propres compétences, et se soucie des enjeux environnementaux et des effets néfastes de la saisonnalité (en promouvant un tourisme équilibré). Cependant, ces problématiques sont traitées dans des temporalités différentes, et avec des leviers d’action différents. En outre, on remarque que la question des conflits d’usage n’est abordée qu’à partir d’une certaine échelle, à commencer avec l’échelle intercommunale. Enfin, alors que certaines échelles sont aujourd’hui en mal de cohérence

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(région, département), de nouveaux acteurs ont émergé (entreprises, associations, particuliers). C’est bien l’interaction entre toutes ces différentes échelles qui fondera l’efficacité d’une politique touristique durable.

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Conclusion

Finalement, le cas du Bassin d’Arcachon est des plus complexes. Tout d’abord, cet espace littoral est au cœur de dynamiques géomorphologiques toujours actives : loin d’être un espace figé, le Bassin d’Arcachon demande donc une adaptation permanente à ses propres mouvements naturels. Ces mêmes dynamiques ont formé des grands ensembles paysagers, qui font la spécificité du Bassin, et fondent l’attrait toujours plus marqué des touristes pour un lieu de prédilection pour des séjours d’agrément. Cette baie de type « poulier » contribue d’ailleurs largement à la forme originale du Bassin, et lui confère une valeur ajoutée des plus précieuses. Enfin, de par ses particularités physiques et géomorphologiques, ce site est un milieu tout à fait favorable à la formation d’écosystèmes originaux, écosystèmes qui concourent à sa richesse. C’est cette singularité du milieu qui a d’ailleurs suscité au XIXème siècle un engouement de la part des élites pour une nouvelle forme de récréation, étroitement liée aux bienfaits de l’eau et aux vertus sanitaires du climat arcachonnais. C’est à partir de cette époque et depuis la ville d’Arcachon que s’est développée une urbanisation de plus en plus diffuse autour du Bassin. Cette urbanisation s’est déroulée au même rythme que le développement touristique, et très tôt, l’image du site a été exploitée à des fins publicitaires et promotionnelles. Aujourd’hui, les activités touristiques qui se déroulent sur et autour du Bassin d’Arcachon sont extrêmement variées, tout comme les modes d’hébergement : l’offre touristique s’est multipliée et diversifiée en quelques décennies, allant du séjour de courte durée (week-end, journée) à la résidence secondaire privilégiée des bordelais. Les statistiques sur le tourisme arcachonnais font état d’une saisonnalité touristique plutôt marquée sur le Bassin, bien qu’elle soit plus progressive que dans les autres stations balnéaires. De plus, la diversification des activités économiques tend à nuancer encore davantage cette saisonnalité touristique, en fournissant des apports économiques toute l’année. Cependant, ces activités rencontrent des difficultés pour cohabiter, et ont même des conséquences néfastes sur le milieu.

En effet, le Bassin d’Arcachon, de par ses spécificités géomorphologiques, est un milieu extrêmement fragile, et l’essor continu de la fréquentation touristique pose la question de ses conditions d’évolution. Par exemple, la Dune du Pilat est à la fois mobile et de plus en plus convoitée par les promeneurs, ce qui exacerbe la tension entre tourisme et environnement. Son caractère de « dune vive » ne permet pas cependant d’adopter des mesures de protection drastiques. En effet, cette mobilité doit être conservée, au risque de bouleverser l’essence même de ce site : à trop vouloir empêcher le recul de la dune, on risquerait de lui retirer ses spécificités. Or cela se traduirait par une perte économique importante du point de vue touristique. Les mêmes risques se posent avec l’ensablement du fond du bassin. Ce phénomène naturel de sédimentation présente un problème pour le tourisme (difficultés de la navigation sur les chenaux), ainsi que pour les élevage d’huîtres, qui se délocalisent de plus en plus vers l’embouchure du Bassin. Enfin, l’érosion de la flèche du Cap Ferret pose une question cruciale pour l’avenir du tourisme sur le Bassin d’Arcachon, car c’est un site clé pour les résidents, mais aussi pour les touristes. La lutte effrénée qui s’est engagée pour combattre les mouvements de la pointe du Cap-Ferret nécessiterait une meilleure prise en compte des spécificités du site, et notamment de sa mobilité relative. Cette érosion a des origines multiples qui peuvent être à la fois naturelles et anthropiques. Et sans la pointe du Cap-Ferret, il n’y a pas de Bassin d’Arcachon.

Les problématiques environnementales du Bassin d’Arcachon sont donc d’une part le fait de phénomènes naturels, et d’autre part celui de tension entre les différents usagers du

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Bassin. Effectivement, la diversité des activités précédemment louée pour la variété de ses apports économiques n’est pas sans poser problème. Car la diversité entraîne de fait un chevauchement des espaces dont chaque secteur d’activité se voudrait le gardien, cela dans un contexte général de manque d’espace et de convoitises accrues. En outre, ces activités sont aussi le fait de pollutions qui viennent s’ajouter à la fragilité originelle du milieu, mais elles sont aussi le fait de nuisances qui placent les activités dans une situation de confrontation permanente. Pourtant, c’est bien l’ensemble de ces activités qui permet d’atténuer l’effet de saisonnalité et qui permet donc de faire vivre le Bassin d’Arcachon toute l’année. C’est pourquoi une entente entre les différents acteurs est indispensable. C’est aussi la raison pour laquelle il est aujourd’hui nécessaire d’obtenir des données précises sur la qualité des eaux du Bassin, afin de pouvoir mesurer la gravité des pollutions. Chaque secteur d’activité se doit également de reconnaître ses responsabilités, et d’agir en conséquence, afin de parvenir à une harmonisation des relations.

La gestion de ces multiples problématiques fait d'ailleurs l'objet, comme nous l'avons vu, de plusieurs politiques, et ce à différentes échelles. Or chaque échelle correspond à un type d'intervention. Les enjeux environnementaux prennent une place prépondérante dans les politiques de l'Europe, de l'Etat, et de la Région, tandis que la question des conflits d'usage est plus particulièrement traitée à l'échelle intercommunale, avec notamment les actions portées par le SIBA. Parallèlement aux institutions administratives, l'échelle micro-locale prend une part de plus en plus importante, tant dans les réflexions que la dans la mise en œuvre d'actions spécifiques. C'est l'interaction entre ces différents niveaux qui permettra à terme de répondre aux enjeux observés sur le Bassin d'Arcachon. La concertation et le principe de subsidiarité apparaissent notamment comme des vecteurs essentiels à la résolution des conflits d'usage.

Ainsi la diversification des activités économiques représente aujourd'hui une alternative certaine à la saisonnalité touristique. C'est pourquoi elle représente un moteur économique de taille pour le Bassin d'Arcachon, mais c'est aussi la raison pour laquelle il est nécessaire d'harmoniser les relations entre les différents secteurs d'activité, afin que cette diversité ne se transforme pas en un frein au développement touristique durable. Préserver les activités humaines ainsi que la qualité d’un site tel que le Bassin d’Arcachon apparaît comme un enjeu fondamental pour la pérennité du tourisme sur le Bassin. En effet, c’est la tension milieu/société qui représente le plus grand défi pour le Bassin d’Arcachon, tant pour son environnement que pour le maintien et la prospérité des activités humaines. Il y a un équilibre à trouver entre surexploitation du milieu et sa mise sous cloche : c’est la quête de cette équilibre qui déterminera la durabilité de l’environnement, de la vie humaine et de leurs interactions. Enfin, au-delà de la résolution des conflits d'usage, il s'agit de parvenir à tisser des liens entre les différents secteurs d'activité, mais également entre les hommes qui les constituent. On pourrait par exemple imaginer la promotion d'un tourisme itinérant privilégiant les interactions entre la pratique de la voile et l'ostréiculture: les usagers des bateaux à voile pourraient bénéficier de tarifs préférentiels pour la visite de parcs ostréicoles suivie de dégustations d'huîtres. C'est en fait en créant des chaînons de solidarité que les usagers du Bassin pourront construire ensemble un développement équilibré du tourisme sur le Bassin d'Arcachon.

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Table des illustrations

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Figure 1 - « La croissance urbaine. Le Bassin d’Arcachon », Direction Départementale de l’Equipement, Décembre 2006............................................................................................5Figure 2 - Les grands ensembles paysagers du territoire arcachonnais - Source: CRDP de Champagne-Ardenne, http://www.crdp-reims.fr/arcachon/default.htm.......................9Figure 3 - Evolution de la géomorphologie du bassin d'Arcachon - Source: Schéma de mise en valeur du bassin d'Arcachon, 2004.........................................................................10Figure 4 - Les lieux touristiques d’après A.Joanne (1874-1884)........................................13Figure 5 - Le Grand Hôtel en construction, 1862 Alphonse Terpereau............................14Figure 6 - La structure économique arcachonnaise comparée aux autres espaces littoraux - Source: INSEE, 1999............................................................................................21Figure 7 - Jean-Marie FROIDEFOND, Chercheur CNRS, « Les dunes du littoral et le site géographique de la Grande Dune du Pyla », 21/08/2005 http://www.dune-pyla.com/information/welcome/index.php............................................................................24Figure 8 - Jean-Marie FROIDEFOND, Chercheur CNRS, « La formation de la Grande Dune du Pyla, son histoire », 21/08/2005 http://www.dune-pyla.com/information/welcome/index.php............................................................................25Figure 9 - http://www.echo-fle.org/Portals/1/Gallery/4/747148e0-e1b8-4cbb-bb94-5933492fd14f.jpg.....................................................................................................................26Figure 10 - Photo prise par Judith Commenges, juillet 2008.............................................27Figure 11 - Photo prise par Judith Commenges, décembre 2006.......................................28Figure 12 - Site internet du Conservatoire du Littoral......................................................29Figure 13 - Photographie aérien du Bassin - Google Earth, consulté en janvier 2009.....31Figure 14 - Annexes Décret du 9 janvier 1986, carte réalisée par SEPANSO (Fédération des Sociétés pour l'Etude, la Protection et l'Aménagement de la Nature dans le Sud-Ouest).......................................................................................................................................36Figure 15 - http://www.grand-large-aquitaine.fr/images/parc-a-huitres-2.jpg.................37Figure 16 - Photographie prise par Judith Commenges, Août 2007..................................38Figure 17 - Le réseau d'assainissement de l'usine Smurfit - Réalisation: Clémence Liberge.....................................................................................................................................38Figure 18 - Photographie: Judith Commenges, décembre 2006.........................................40Figure 19 - Formes par cellaire du nord-ouest du Bassin d'Arcachon - Adaptation cartographique: Alexandre Laignel......................................................................................44Figure 20 - Les sites Natura 2000 – Source: http://natura2000.environnement.gouv.fr/sites/FR7200679.html......................................50Figure 21 - Les territoires arcachonnais de l'intercommunalité - SIBA, 2009..................57Figure 22 - L'exhaussement du niveau des eaux oblige les collectivités à recréer des plages plus vers l'intérieur du bassin... au risque de modifier les équilibres hydrauliques ? - Sources:http://www.bassindarcachon.com/crii_du_kayok.aspx?id=1560Figure 23 - Les rejets d'eau de Smurfit - Smurfit, 2007......................................................62

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Table des matières

Introduction ......................................................................................... 4 I/ La diversité économique sur le bassin d’Arcachon ou la mise en valeur d’un milieu hors du commun ................................................. 7

A/ Le milieu naturel du Bassin d’Arcachon ............................................................................ 8 1. Le bassin d'Arcachon dans sa région naturelle, un espace littoral au cœur de dynamiques géomorphologiques actives ............................................................................ 8 2. Les grands ensembles paysagers de la région naturelle du bassin d'Arcachon ............... 9 3. Le bassin d'Arcachon, une baie de type « poulier » ........................................................ 9 4. Un milieu favorable à des « écosystèmes » originaux .................................................. 10

B/ Le développement urbain et touristique du Bassin d’Arcachon à travers l'histoire ......... 12 1. Le concept de tourisme, origines .................................................................................. 12 2. Histoire du développement urbain du Bassin d’Arcachon au XIXème siècle : le poids originel du tourisme sanitaire ............................................................................................ 13 3. Explosion urbaine et touristique du Bassin d’Arcachon au XXème siècle ................... 14 4. Développement d’une image de marque, et marketing touristique actuel .................... 16

C/ La prégnance de l’économie touristique sur le territoire du Bassin d’Arcachon : richesse de l’offre et diversité des formes du tourisme ..................................................................... 16

1. Etat des lieux de l’économie touristique : statistiques .................................................. 17 2. Les autres activités économiques autour du Bassin d'Arcachon: la condition de la diversité économique ........................................................................................................ 19

II. Fragilité du milieu et conflits d’usage : une double problématique pour la durabilité du tourisme sur le Bassin d’Arcachon ......................................................................................... 23

A/ Un milieu fragile, ou les mouvements « naturels » du bassin d’Arcachon et leurs conséquences sur l’activité touristique ................................................................................. 23

1. La Dune du Pilat : un enjeu environnemental et touristique pour l’ensemble du Bassin d’Arcachon ........................................................................................................................ 23 2. La question de l’exhaussement des fonds marins: des risques pour l’ostréiculture et le tourisme ............................................................................................................................. 29 3. L’érosion de la flèche du Cap Ferret ............................................................................. 30

B/ Diversité des activités et conflits d’usage autour de l’eau ............................................... 33 1. La sylviculture, un des facteurs de pollution des eaux qui reste à surveiller ................ 33 2. Conflits d’intérêts entre la plaisance et l’ostréiculture .................................................. 34 3. L’usine Smurfit ou la question du rejet des eaux usées ................................................ 38 4. Usages résidentiels de l'eau contre usages touristiques, une contribution notable aux problèmes de l'eau du bassin d'Arcachon .......................................................................... 40 5. La maïsiculture ou la question de la pollution des nappes phréatiques ........................ 44

C/ La recherche d'un équilibre des points de vue des acteurs, vers un objectif d'aménagement touristique « équilibré » .............................................................................. 45

III. Spectre multiscalaire des politiques et moyens mis en œuvre pour parvenir à un développement touristique équilibré du Bassin d’Arcachon : quelles échelles d’intervention pour quel type d’action ? ............................................................................................ 48

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A. Europe/Etat/Région : une interaction à performer en vue d’un aménagement touristique équilibré ................................................................................................................................ 48

1. L'Europe: entre initiateur de la décentralisation et guichet pour la mise en oeuvre de politiques diversifiées ....................................................................................................... 48 2. L'Etat, acteur foncier et autorité coordinatrice .............................................................. 52 3. La région, une échelle d'action politique « guichet » encore peu affirmée ................... 54

B/ L’échelle locale, ou l’inégalité des interventions ............................................................. 56 1. L’échelle départementale, ou les tares d’une circonscription administrative intermédiaire ..................................................................................................................... 56

C/ Réflexions et actions portées par les individus : une pierre de taille apportée à l’édifice 60 1. Au cœur des conflits d’usage, l’interaction des entreprises fait sens ............................ 61 2. Les associations, un vecteur de réflexion non négligeable .......................................... 63 3. Les individus : des ingénieurs/aménageurs en herbe pour lutter contre l’érosion marine ........................................................................................................................................... 66

Conclusion .......................................................................................... 68 Bibliographie ..................................................................................... 70 Table des illustrations ....................................................................... 73 Table des matières ............................................................................. 75

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