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Ammien Marcellin et la Péninsule Ibérique

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Page 1: Ammien Marcellin et la Péninsule Ibérique

Societe d’Etudes Latines de Bruxelles

Ammien Marcellin et la Péninsule IbériqueAuthor(s): J. M. Alonso-NúñezSource: Latomus, T. 38, Fasc. 1 (JANVIER-MARS 1979), pp. 188-192Published by: Societe d’Etudes Latines de BruxellesStable URL: http://www.jstor.org/stable/41531137 .

Accessed: 10/06/2014 01:05

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Contrairement aux autres historiens comme, par exemple, Trogue Pompée- Justin dans son livre XLIV, Ammien Marcellin ne consacre pas une attention spéciale à la Péninsule Ibérique dans ses Res Gestae i1). Seulement à travers quelques notices dans son œuvre nous pouvons obtenir quelque information sur cette région. D'abord, il faut dire qď Ammien n'a jamais été dans la Péninsule Ibérique et que son information à ce sujet ne procède pas ďune expérience vécue. Il est possible que dans XXXI, 16, 9, où l'historien dit qu'il a écrit son œuvre ut miles quondam et Graecus , nous pouvons trouver une raison pour le peu ďattention d'un Grec d'Antioche pour ces contrées, qui étaient assez éloignées de son cercle d'intérêts.

Nous allons mettre de l'ordre dans ses références à la Péninsule Ibérique, les commenter et les évaluer. Pour la disposition des passages on adopte le critère suivant : le géographique, le mythologique et l'historique selon le caractère de la notice correspondante (2).

En commençant par les notices géographiques nous trouvons qu 'Ammien Marcellin donne une étymologie pour les noms Hiberia et Baetica ; selon lui, ils seraient dérivés des noms des fleuves Hiberus et Baetis. VHiberus est le fleuve Ebro et le Baetis le fleuve Guadalquivir. XXIII, 6, 21 itidemque Hibernia ex H ibero (nunc Hispania) et a Baeti amne insigni, prouincia Baetica. Ammien n'a pas une idée exacte de la géographie de la Péininsule Ibérique ainsi qu'il apparaît de XV, 10, 2, ... : ubi occidentali subiecta est Sideri, oceano et altitudine Pyrenaea arcetur. Ammien pense que les Pyrénées étaient dans la côte occidentale de la Gaule. Cette notion géographique vient de Ptolémée. Dans XXII, 8, 10, nous apprenons qu'Ammien avait consulté l'œuvre de Ptolémée (3). Cependant Ammien situe correctement l'Aquitaine par rapport aux Pyrénées et au golfe de Biscaye. XV, 11, 13, in Aquitania quae Pyrenaeos montes et earn partem spectat oceani, quae pertinet ad Hispanos , ... Ces notices n'ont pas d'importance spéciale.

(1) On suit ledition suivante : Ammiani Marcellini Rerum gestarum libri qui super- sunt. Recensuit rhytmiceque distinxit Carolus U. Clark adiuvantibus Ludovico Traube et Guilelmo Heraeo. Editio altera ex editione anni MCMX-MCMXV lucis ope expressa. Berolini apud Weidmannos MCMLXIII. 2 vols.

(2) R. Grosse, dans Fontes Hispaniae Antiquae , VIII, Las fuentes desde César hasta el siglo V d. de J. С., Edición y comentario por R. Grosse, Barcelona, 1959, p. 70-74 et 366- 369.

(3) A. Schulten, Iberische Landeskunde, Geographie des antiken Spanien , Strasbourg/ Kehl, 1955-1957, 2 vols., vol. 1, p. 94-98.

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Les chevaux espagnols, qui étaient si fameux dans l'Antiquité, sont également mentionnés par Ammien Marcellin, XX, 8, 13, equos praebebo cur rules Hispa- nos , ... Ils sont mentionnés dans une lettre envoyée par Julien à Constance. Cette notice n'a pas d'intérêt et doit être considérée seulement comme un topique provenant de la formation rhétorique de lauteur.

En passant à la mythologie nous voyons que le mythe de Géryon et Hercule, selon lequel Hercule, dans un de ses Douze Travaux, alla à l'Ouest pour tuer le fabuleux Géryon, apparaît localisé dans la Péninsule Ibérique (4). XV, 9, 6, regionům autem incolae id magis omnibus adseuerant, quod etiam nos legimus in monumentis eorum incisum, Amfltryonis fllium Herculem, ad Geryonis et Taurisci saeuium tyrannorum perniciem festinasse, quorum alter Hispanias, alter Gallias infestabat : ... La source de ce passage est Timagenes (5) comme Ammien même le dit clairement en XV, 9, 2. Ce passage n'a pas de valeur ; il est seulement un témoignage de la formation rhétorique d'Ammien (6).

Nous trouvons aussi chez Ammien Marcellin des notices d'un caractère historique: XV, 10, 10, superioris Afričani pater Publius Cornelius Scipio , Saguntinis memorabilius aerumnis et fide, pertinaci destinatione Afrorum obsessis, iturus auxilio, in Hispaniam traduxit onustam manu ualida ciassem, sed ciuitate potiote Marte deleta, Hannibalem sequi nequiens, triduo ante transito Rhodano, ad partes Italiae contendentem, ... L'historien dit que P. Cornelius Scipio se mit en mouvement pour la Péninsule Ibérique quand Hannibal assiégeait encore Sagonte, ce qui est un anachronisme, parce que P. Cornelius Scipio était parti plus tard. La source de ce récit serait le livre XXI de Tite-Live. On trouve aussi chez Ammien l'usuelle allusion au malheur et à la fides de Sagonte. Ce topique apparaît aussi chez Salluste, Historiarum reliqiuae , II, 64 ; Pomponius Mela, De chorographia , II, 92 et Pline, Naturalis Historia , III, 3 (4) 20 (7). Dans XV, 10, 11, consulens tamen rei communi, Cn. Scipionem fratrem ire monuit in Hispanias, ut Hasdrubalem exinde similiter erupturum arceret , on trouve une autre inexacti- tude d'Ammien quand il dit que Cnaeus Scipio fut envoyé dans la Péninsule Ibérique pour contenir Hasdrubal. Ammien, n'étant pas préoccupé directement par la conquête romaine de la Péninsule Ibérique, aurait simplifié le récit qu'il a emprunté à Tite-Live. Cela expliquerait ses erreurs de détail. Dans XXXI, 13, 17, pari clade recuperatis Hispaniis, Scipionum alterum cremata turri in quam confugerat, absumptum incendio hostili, conperimus. illud tamen certum est, пес Scipioni пес Valenti, sepulturam (qui supremitatis honor est) contigisse , Ammien compare la mort de 1'empereur Valens après la bataille d'Andrinopole en 378 avec

(4) A. Sculten, Tartessos. Ein Beitrag zur ältesten Geschichte des Westens , Hamburg, 1922, p. 19-21 et 45.

(5) Jacoby, Fr. Gr . Hist II С 88, Timagenes von Alexandreia. (6) P. De Jonge, Philological and Historical Commentary on Ammianus Marcellinus XV,

6-13 , Groningen, 1953, p. 47-51, ad loc. (7) P. De Jonge, op. cit., p. 57 ad loc.

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celle, semblable, de Cnaeus Cornelius Scipio en Hispanie en 211 av. J.-C. La source de ce passage serait Tite-Live, XXV, 36. Il y a une intention rhétorique évidente dans Ammien. Dans XXV, 9, 10, unde Publio Scipioni ob recuperata s Hispanias, Fuluio Capua post diuturna certamina superata, et Opimio post diuersos exitus proeliorum, Fregellanis tunc interneciuis hostibus, ad deditionem conpulsis, triumphi sunt denegati Ammien mentionne qu'aucun triomphe n aurait été octroyé à Cornelius Scipio Africanus après ses campagnes dans la Péninsule Ibérique de 21 1 à 206. Cela se trouve dans Tite-Live, XXVIII, 38 (8). L'historien fait aussi allusion au fait que Mancinus en 1 36 av. J.-C. fut abandonné par les Romains devant la ville assiégée de Numance. XIV, 11,32, eadem Mancinum post impérium dedidit Numantinis , ... Il signale ce fait pour montrer la mutabilité et l'inconstance de la fortuna. L'épisode de Mancinus se trouve aussi dans Florus, I, 34, 7 (9). Ammien Marcellin tombe dans le lieu commun de l'historiographie ancienne qui assignait une valeur négative à Viriathe. XIV, 11, 33, quam multi splendido loco natura, eadem rerum domina coniuente, Viriathi genua sunt amplexi uel Spartaci ?... Ce passage appartient à la manière typique ď Ammien d'interpréter la fortuna, qu'il considère généralement comme rerum domina . Tite- Live, Periochae , LH et Florus, I, 33, 15, se réfèrent aussi à Viriathe (10). L'empereur Julien fait allusion, dans une harangue adressée à ses soldats durant la campagne de Perse, au siège et à la destruction de Numance. XXIII, 5, 20, euertit funditus Numantiam Scipio, post multíplices casus obsidionis emensos. L'intention rhétorique est évidente (n). De toutes ces références à la conquête de la Péninsule Ibérique nous pouvons déduire qu'il aurait comme base fondamentale Polybe. Celui-ci aurait été lu par Ammien comme nous l'apprenons de XXIV, 2, 16. Il aurait lu aussi Tite-Live, qui se base sur Polybe, et Florus, qui suit la tradition livienne avec laquelle il y a des parallélismes. Les notices d'Ammien Marcellin en rapport avec la conquête romaine de la Péninsule Ibérique n'ont pas de valeur historique comme source, mais elles nous renseignent sur les lectures historiques d'Ammien. Il faut insister sur le fait que les noms de Sagonte, Viriathe et Numance sont inoubliables même pour un historien de l'Antiquité tardive comme Ammien Marcellin. Qu'il se souvienne de ces exemples doit être considéré comme une conséquence de sa formation rhétorique, qui employait de tels événements en guise d'exemples.

Dans les Res Gestae d'Ammien Marcellin on trouve quelques références à des faits qui se sont passés en Hispanie, de son temps. Nous avons les références

(8) J. Fontaine dans Ammien Marcellin, Tome IV (Livres XXIII -XXV), Commentaire , Paris, 1977, note 693, p. 273-274 ad loc. songe à Valerius Maximus, 2, 8, 5.

(9) P. De Jonge, Sprachlicher und historischer Kommentar zu Ammianus Marcellinus XIV, 7-11, Groningen, 1939, p. 142 ad loc.

(10) P. De Jonge, op. cit., p. 144 ad loc. (11) J. Fontaine, op. cit., note 125, p. 55 ad loc. pense plutôt à un aide-mémoire

scolaire ou dans la mémoire ď Ammien qu'à Florus I. 6, 11.

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suivantes : XIV, 5, 6. Inter quos Paulus eminebat notarius, ortus in Hispania coluber quidam sub uultu latens, odorandi uias periculorum occultas perquam sagax. Ce passage montre la participation des Hispani dans l'administration romaine comme le notarius Paulus, qui provient de la Péninsule Ibérique et qui fut l'instrument de Constance pour écraser les partisans de Magnence. Ammien décrit avec les couleurs les plus sombres ce personnage et sa façon d'agir (12). Dans XV, 3, 4 Paulus apparaît comme natif de la Dacie, mais il est possible que nous nous trouvions devant une faute dans le texte et qu'il s'agit de Baetica ou de Gallaecia. Grâce à la documentation prosopographique nous savons qu'il a été notarius de 353 à 361 (13). Plus loin, XVI, 8,9. Maligniate simili quidam agens in rebus in Hispania ad cenam itidem inuitatus, cum inferentes uespertina lumina pueros exclamasse audisset ex usu «uincamus», uerbum sollemne interpretatum atrociter deleuit nobilem domum. Nous voyons qu'une famille hispanique devient la victime de l'intrigue d'un agens in rebus de l'empereur Constance. Cet agens in rebus change le sens des mots (14). Cela témoigne du fait que les fonctionnaires impériaux avaient un grand pouvoir dans la Péninsule Ibérique et qu'en conséquence, ils agissaient librement et arbitrairement. En plus, on remarque une atmosphère d'intrigue. XXI, 4, 6, exhibitus tamen idem rex ad principis castra , iamque spe ueniae omni praeclusa, cum interceptum notarium et quae scripserat ad Constantium, conperisset iam publicata, ne conuicio quidem tenus conpellatus, missus est ad Hispanias. Vadomarius, roi des Alamanni , fut expulsé par Julien de la Gaule en Hispanie en 361 (15). De cela on peut déduire que dans la Péninsule Ibérique régnait le calme. XXIII, 1,4,..., Venusto uicariam conmisit H ispaniae, ... Venustus fut nommé par l'empereur Julien en 363 ou peut-être en 362 vicarius H ispaniae (16). L'absence de commentaire de la part d'Ammien prouve que la Péninsule Ibérique était tranquille. XXVIII, 1, 26. Circa hos dies, Lollianus, primae lanuginis adulescens, Lampadi fllius ex praefecto, exploratius causam Maximino spectante, conuictus codicem noxiarum artium nondum per aetatem firmato Consilio, descripsisse, exulque mittendus, (ut sperabatur), patris inpulsu, prouocauit ad principem, et iussus ad eius comitatum adduci, de fumo (ut aiunt,) in flammam, traditus Falangio (Baeticae consulari,) cecidit funesti carniflcis manu . Sphalangius, qui fut consularis Baetica de 368 à 371 selon la documentation prosopographique, est représenté comme un juge cruel dans le procès contre Lolianus, qui était impliqué dans affaires de magie (17). Cela eut lieu vers 37 1 , au

(12) P. D Jonge, Sprachlicher und historischer Kommentar zu Ammianus Marcellinus XIV, 1-7, Groningen, 1935, p. 127-128 ad loc.

(13) A. H. M. Jones, J. В. Martindale and J. Morris, The Prosopography of the Later Roman Empire , Volume I. A.D. 260-395, Cambridge, 1971, Paulus, 4, p. 683-684.

(14) P. De Jonge, Philological and Historical Commentary on Ammianus Marcellinus XVI , Groningen, 1972, p. 96-97 ad loc.

(15) Jones, Martindale and Morris, op. cit., Vadomarius, p. 928. (16) Jones, Martindale and Morris, op. cit., Volusius Venustus, p. 949. (17) Jones, Martindale and Morris, op. cit., Tanaucius Isfalangius, p. 464-465.

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temps de l'empereur Valentinien, et montre qu'il y avait des personnes dévouées à la magie dans la Péninsule Ibérique.

Évidemment ces cinq notices sur notre région ont plus d'importance que les antérieures. D'ailleurs, on aimerait trouver des renseignements de caractère économique et social dans les informations qu'il donne sur la Péninsule Ibérique, mais Ammien Marcellin n'était pas intéressé par cette question d'une façon directe. Dans ses Res Gestae il s'intéressait surtout à l'aspect militaire. De toutes façons, nous pouvons conclure de ces notices que sous la surface de tranquillité il y avait une désintégration intérieure manifestée surtout par le fait du com- portement arbitraire de Vagens in rebus et des pratiques magiques. Le peu de ren- seignements permet, néanmoins, de se faire une idée de la crise de la Péninsule Ibérique du ive siècle. Il faut se demander pourquoi il y a si peu de notices chez Ammien Marcellin sur la situation dans la Péninsule Ibérique dans les années 353 à 378, qui correspondent au laps de temps embrassé par la partie conservée des Res Gestae. La première réponse est qu' Ammien Marcellin était principalement intéressé par l'histoire militaire et que la situation de la Péninsule Ibérique était calme. Le silence des autres sources pour ces vingt-cinq années constitue une autre preuve de l'absence d'événements importants dans cette région. En réalité, la Péninsule Ibérique a connu la paix après le soulèvement de Magnence. Ainsi Ammien Marcellin devient intéressant non seulement à cause du peu de choses qu'il dit, mais à cause de ce qu'il ne dit pas. La valeur réduite de ces notices augmente quand on voit que les sources pour cette époque sont plutôt rares. Le fait qu'Ammien Marcellin ne dit plus rien a son importance, parce qu'il était très intéressé par l'histoire de son temps et si des événements d'importance avaient eu lieu dans la Péninsule Ibérique, il les aurait mentionnés.

J. M. Alonso-Núnez.

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