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1. La matinée était particulièrement froide lorsque Alexandra Hill arriva chez elle. Après les vacances au ski qu’elle venait de passer avec ses amis dans les montagnes de Nouvelle-Zélande, elle ne s’attendait pas à affronter une température aussi rigoureuse en rentrant à Brisbane. C’était certainement la journée la plus froide  jamais enregistrée pour un mois de mai ! Finalement, elle était ravie d’avoir gardé son anorak et son écharpe ! En descendant du taxi qui la ramenait de l’aéroport, elle eut la surprise de découvrir, devant la porte de sa maison de Springhill, son patron qui l’attendait. — Alexandra ! Dieu soit loué ! s’exclama Simon Wellford en la prenant dans ses bras. Ta voisine ne savait pas si tu rentrais aujourd’hui ou demain. J’ai besoin de toi. J’ai absolument besoin de toi ! Le sachant marié et heureux en ménage, elle commença par se dégager de cette étreinte intempestive. — Ecoute, Simon. Je suis toujours en vacances… — Je sais, l’interrompit-il. Mais je te revaudrai cela, je te le promets ! Alexandra soupira. Elle travaillait dans l’agence de traduction de Simon comme interprète et elle était habituée à son impulsivité. — Quelle est l ’urgence cette fois ? s’enquit-elle. — Urgence n’est pas le mot, objecta-t-il. Il s’agit de la Goodwin Minerals Company, c’est donc plutôt une magnifique opportunité ! — Je ne connais pas cette société, je ne comprends pas ce que tu veux dire. Simon eut un claquement de langue impatient. — C’est une énorme entreprise, au premier rang de l’exploitation des gisements d’opale. Ils tentent de s’implanter en Chine et ont entamé des négociations, ici, à Brisbane, avec un consortium chinois. Leur interprète de mandarin est malade et ils cherchent un remplaçant. Alexandra ouvrit sa porte et déposa sa valise à roulettes dans le vestibule.

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1.

La matinée était particulièrement froide lorsque Alexandra Hill arriva chez elle.Après les vacances au ski qu’elle venait de passer avec ses amis dans les montagnesde Nouvelle-Zélande, elle ne s’attendait pas à affronter une température aussirigoureuse en rentrant à Brisbane. C’était certainement la journée la plus froide jamais enregistrée pour un mois de mai ! Finalement, elle était ravie d’avoir gardéson anorak et son écharpe !

En descendant du taxi qui la ramenait de l’aéroport, elle eut la surprise dedécouvrir, devant la porte de sa maison de Springhill, son patron qui l’attendait.

— Alexandra ! Dieu soit loué ! s’exclama Simon Wellford en la prenant dans ses bras.Ta voisine ne savait pas si tu rentrais aujourd’hui ou demain. J’ai besoin de toi. J’ai

absolument besoin de toi !

Le sachant marié et heureux en ménage, elle commença par se dégager de cetteétreinte intempestive.

— Ecoute, Simon. Je suis toujours en vacances…

— Je sais, l’interrompit-il. Mais je te revaudrai cela, je te le promets !

Alexandra soupira. Elle travaillait dans l’agence de traduction de Simon commeinterprète et elle était habituée à son impulsivité.

— Quelle est l’urgence cette fois ? s’enquit-elle.

— Urgence n’est pas le mot, objecta-t-il. Il s’agit de la Goodwin Minerals Company,c’est donc plutôt une magnifique opportunité !

— Je ne connais pas cette société, je ne comprends pas ce que tu veux dire.

Simon eut un claquement de langue impatient.

— C’est une énorme entreprise, au premier rang de l’exploitation des gisementsd’opale. Ils tentent de s’implanter en Chine et ont entamé des négociations, ici, àBrisbane, avec un consortium chinois. Leur interprète de mandarin est malade et ilscherchent un remplaçant.

Alexandra ouvrit sa porte et déposa sa valise à roulettes dans le vestibule.

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— Un interprète sur site ?

— Ecoute, Alexandra… Je sais que, jusqu’ici, tu n’as travaillé pour moi que partéléphone, mais tu es très douée.

— Il s’agit d’industrie minière, fit-elle remarquer. Donc de termes techniques.

— Non. C’est en fait une mission très relationnelle, qui se déroule en général aucours de réceptions. Ils souhaitent s’assurer que tu es à l’aise dans ce genred’occasions…

— Tu leur as dit que je ne mangeais pas les petits pois avec un couteau ? terminaAlexandra, avant d’éclater de rire devant l’expression blessée de son patron.

— Je leur ai précisé que tu étais issue d’une famille de diplomates. Cela les a

apparemment rassurés, répondit-il prudemment.

Par contre, Simon Wellford aurait émis quelques réserves quant à la capacitéd’Alexandra à tenir ce rôle. Ses manières ou sa pratique du mandarin n’étaient pasen cause, bien sûr, c’était la façon dont elle s’habillait qui l’inquiétait quelque peu.

Il ne l’avait jamais vue porter autre chose que des jeans et des sweaters,agrémentés d’écharpes colorées dont elle aimait s’affubler. Sous une chevelureapparemment indomptable, les lunettes qu’elle arborait n’ajoutaient rien à soncharme.

Un vrai bas-bleu ! Jusque-là, sa tenue vestimentaire n’avait pas posé de problème :elle n’était pas au contact du public. En revanche, avec un client aussi important queGoodwin Minerals, elle serait amenée à s’intégrer dans un milieu élégant.

Il décida de remettre à plus tard ce problème, l’important était de décrocher cettemission et le temps pressait.

— Saute dans ma voiture, Alexandra, commanda-t-il. Nous avons un entretien chezGoodwin dans vingt minutes.

Alexandra le regarda avec stupéfaction.

— Simon… Tu plaisantes ! Je viens à peine d’arriver ! Laisse-moi au moins le temps deprendre une douche et de me changer. De plus, je ne suis même pas sûre de vouloiraccepter cette mission !

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— Alexandra. Je t’en supplie !

Simon marcha jusqu’à sa voiture garée le long du trottoir et ouvrit la portière côtépassager.

— Non, attends ! s’écria la jeune femme. Ne me dis pas que tu t’es engagé auprès deGoodwin Minerals, sans même savoir si je rentrais aujourd’hui et si j’accepterais ?

— Je sais, dit-il en haussant les épaules. Cela semble un peu…

— Cela te ressemble tout à fait, veux-tu dire, corrigea-t-elle d’un air las.

— Les grands hommes savent saisir les opportunités. Gagner la clientèle de Goodwinnous amènerait beaucoup de travail et apporterait une jolie renommée à l’agenceWellford. Et…

Il marqua une pause avant d’ajouter :

— Rosanna est enceinte.

Alexandra ouvrit de grands yeux à cette nouvelle. L’épouse de Simon attendait doncleur premier enfant ! L’avenir et le succès de l’agence s’avéraient donc d’autant plusimportants.

Le regard adouci, elle esquissa un sourire radieux.

— Pourquoi n’as-tu pas commencé par là ? Oh ! Simon. C’est une merveilleuse nouvelle!

Une fois à l’intérieur de la voiture, Alexandra releva cependant certains problèmesconcernant leur rendez-vous professionnel.

— Comment vais-je expliquer la façon dont je suis habillée ?

Simon coula un regard dans sa direction.— Dis-leur la vérité : tu rentres des sports d’hiver. Nous aurons affaire à unecertaine Margaret Winston, la secrétaire de Max Goodwin.

— Max Goodwin ?

— Le P.-D.G. de Goodwin Minerals. Ne me dis pas que tu n’as jamais entendu parler

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de lui ?

— Mais non, je t’assure, avoua Alexandra, agrippée à l’accoudoir, alors que sonpatron se forçait un chemin dans la circulation. Es-tu vraiment obligé de conduire sivite ?

— Je ne veux pas être en retard. Goodwin est un homme très puissant et…

— Attention!

L’avertissement d’Alexandra arriva trop tard. Un camion de livraison venait des’arrêter brusquement devant eux et, malgré un freinage désespéré, Simon ne putéviter la collision.

Il se mit à jurer et se tourna vers sa passagère.

— Alexandra, tu vas bien ?

— Ça va. Un peu secouée, c’est tout. Et toi ?

— Pareil… Mais je crains que notre rendez-vous ne soit fichu maintenant.

Il laissa échapper un soupir découragé en voyant le chauffeur du camion se dirigervers eux.

— Nous sommes encore loin ? demanda Alexandra.

— A un pâté de maisons, mais…

— Je peux me rendre seule au rendez-vous, décida-t-elle rapidement. Quel nomm’as-tu donné ?

— Margaret Winston. Le rendez-vous est prévu dans l’immeuble Goodwin, auprochain carrefour, sur la gauche, quinzième étage. Alexandra, si nous obtenons cecontrat, je te revaudrai cela, termina Simon avec reconnaissance.

— Je ferai de mon mieux, patron ! lança-t-elle en descendant de voiture.

Alexandra était à bout de souffle lorsqu’elle parvint devant l’immeuble de laGoodwin Company. Elle y fut accueillie, comme prévu, par Margaret Winston. Lacinquantaine élégante dans son tailleur vert olive, ses cheveux bruns joliment

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coiffés, celle-ci l’introduisit dans le bureau de son patron.

D’immenses baies vitrées donnaient sur la Brisbane River et le célèbre StoreyBridge. Une moquette bleu roi couvrait le sol et de magnifiques esquisses duBrisbane d’autrefois ornaient les murs. Derrière un large bureau qui trônait aucentre de la pièce, se tenait Max Goodwin, aussi imposant que le décor.

En écoutant Simon, elle s’était imaginé, sans raison particulière, devoir rencontrerun magnat d’un âge certain, au visage glabre et sévère.

Max Goodwin ne ressemblait en rien à cette image. Agé d’environ trente-cinq ans, il jouissait d’un physique plutôt avantageux : les yeux d’un bleu remarquable, lescheveux bruns, les traits sculptés mettaient en valeur une bouche mince et ciselée.

Dans son costume bleu marine d’une coupe impeccable, il était bien loin de l’image del’homme vieillissant qu’elle s’était représentée, mais donnait une impressiond’autorité peu commune, pensa Alexandra. Ses yeux d’un bleu profond étaientpénétrants. Cet homme savait ce qu’il voulait… et devait l’obtenir.

Ce sentiment qu’il ne ressemblait en rien à celui qu’elle avait pensé rencontrer seconfirma quand, après les présentations, il lança d’une voix irritée :

— Oh, pour l’amour du ciel ! Margaret…

— M. Goodwin, coupa la secrétaire, devançant ses reproches, il s’agit d’une urgenceet je n’ai pu joindre personne d’autre. M. Wellford m’a assuré que Mlle Hill étaitextrêmement compétente.

— C’est bien possible, maugréa Max Goodwin, mais on lui donne dix-huit ans et elle al’air échappée d’un couvent!

Alexandra s’éclaircit la gorge.

— J’ai vingt et un ans, monsieur, et, si je peux me permettre cette question, vous jugez toujours les gens sur leur aspect ?

A cet instant, entra un Chinois qui se présenta sous le nom de M. Li, de l’équipe desinterprètes. Il s’adressa immédiatement à Alexandra et entama une conversation enmandarin, puis la salua en inclinant le buste et se tourna vers Max Goodwin.

— Elle parle le mandarin couramment, monsieur Goodwin : la langue est trèscorrecte et relevée.

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Dans le silence vibrant de tension qui suivit ce commentaire, Max Goodwin toisa denouveau la jeune femme.

Peut-être un peu plus de dix-huit ans, concéda-t-il, mais sans maquillage, malcoiffée, des cheveux châtains qui s’échappaient en tous sens de l’élastique qui lesretenait… Affublée de lunettes à monture d’acier, chaussée de bottes fourrées,empaquetée dans des vêtements informes, elle n’avait même pas l’air soigné, ce quiétait le minimum qu’il exigeait.

A moins que… Il l’observa plus attentivement. Cela n’était peut-être pas totalementimpossible… Elle était plutôt grande, avait des mains fines et élégantes, un teintclair. Et ses yeux…

— Voulez-vous ôter vos lunettes un instant ? lui demanda-t-il.

Alexandra lui jeta un regard surpris et s’exécuta.

Max Goodwin approuva de la tête. Elle avait des yeux noisette, mordorés,fascinants…

— Merci, Margaret. Je vais conduire personnellement cet entretien, et merci àvous, monsieur Li. Veuillez vous asseoir, mademoiselle Hill, dit-il en lui indiquant lecoin salon.

Alexandra prit place dans un fauteuil capitonné et Max Goodwin vint s’asseoir face àelle sur un canapé.

— J’aimerais connaître votre parcours et savoir comment vous en êtes arrivée àparler le mandarin.

— Mon père appartenait au corps diplomatique, expliqua Alexandra. J’ai vécu ce quel’on peut appeler une enfance nomade et j’ai appris le chinois à Pékin, où noussommes restés cinq ans.

— Je vois, répondit-il pensivement. Et vous désirez faire une carrière d’interprète ?

— Pas vraiment, mais c’est un bon moyen d’entretenir mes compétences. En fait, jesonge, moi aussi, à embrasser une carrière diplomatique, je viens de terminer mesétudes de langues.

Il se passa une main dans les cheveux, avant d’annoncer :

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— Cela vous ennuierait si je vous demandais de changer de look ?

Alexandra le dévisagea, médusée. Dans le silence qui se prolongeait, elle remarqua lacravate grise à pois marine qu’il portait et la petite cicatrice à la pointe de sonsourcil gauche. Mais ce n’était guère le moment de faire ce genre de constatationssaugrenues !

— Pensez-vous que je n’ai pas le physique de l’emploi?

— Croyez-vous vraiment incarner la fonction ? la coupa-t-il.

Il se mit à énumérer le programme des réceptions : cocktails, déjeuners, journée augolf, croisière sur le fleuve, dîner dansant…

— Ecoutez, monsieur Goodwin, l’interrompit-elle, je pense que nous perdons notre

temps. Je ne possède ni la garde-robe appropriée pour ce genre d’événements, ni laclasse nécessaire pour les porter. Etre interprète est une chose, ce que vous medemandez en est une autre.

— Je fournirai les tenues. Vous pourriez les garder ensuite.

— C’est gentil à vous, mais non, merci.

— Cela n’a rien à voir avec la gentillesse, s’impatienta-t-il. Cette dépenseprofessionnelle passerait dans les frais généraux. Ce n’est pas comme si je vous

demandais des services… spécifiques en retour, n’est-ce pas ?

— Certainement pas ! dit Alexandra sèchement.

Il sourit brusquement, une lueur d’ironie au fond des yeux.

— Alors, pourquoi ne pas les garder ?

Alexandra se tortilla nerveusement les mains.

— Cela me mettrait mal à l’aise. Je me sentirais achetée.

Max Goodwin leva les yeux au plafond.

— Vous n’aurez qu’à me rendre ces tenues, dans ce cas. Je suis sûr que je trouveraiquelqu’un qui les appréciera.

— Je préfère nettement cette solution, commenta Alexandra. Mais si je comprends

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bien, vous ne me jugez pas suffisamment représentative pour cette mission.

— Il ne s’agit pas de cela, mais, pour être honnête, j’ai besoin que vous ayez d’autresatouts que votre compétence en langues pour prendre au sérieux votre candidature.Une certaine dose de sophistication serait sans doute un plus.

Alexandra se mordit la lèvre. Elle mourait d’envie de refuser cette mission. Trop dechoses la choquaient chez Max Goodwin et, en premier lieu, son incroyablearrogance. Pourtant, cela serait une véritable jouissance de pouvoir se mesurer à luiet de lui prouver que, contrairement à ce qu’il semblait croire, elle ne serait paspour lui une source d’embarras.

A contrecœur, elle baissa les yeux pour observer sa tenue. Elle n’avait jusqu’ici paseu l’occasion d’expliquer son allure échevelée ni son accoutrement et, par fierté, elle

refusait maintenant de se justifier.

Donner à Max Goodwin une leçon, quelle tentation ! De plus, Simon et son agenceattendaient beaucoup de ce contrat, sans parler du bébé…

— Je pense que je vais accepter, déclara Alexandra. Même si j’ai quitté le couventdepuis peu et que…

Une lueur d’étonnement passa dans le regard de son interlocuteur.

— Vous étiez religieuse ?

— Non, simple pensionnaire. Mes parents sont morts, lorsque j’avais dix-sept ans. Jesuis restée au couvent, car la mère Supérieure était une parente de mon père et laseule famille qui me restait. Elle est décédée l’an dernier.

— Ah, je comprends. J’allais dire : ceci explique cela.

— Cela explique probablement que je sois une fille ordinaire, habituée à une viesimple et au travail. Ce qui ne veut pas dire qu’on ait le droit de m’imposer n’importequoi.

Il prit le temps d’apprécier cette réponse.

— Vous vous demandez si je pourrais être tenté de profiter de vous, mademoiselleHill ?

— Aucun danger ! déclara Alexandra d’un ton serein. J’imagine que je ne suis pas du

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tout le genre de femmes que vous fréquentez. De plus, pour ce que j’en sais, vouspourriez aussi bien être marié et avoir une douzaine d’enfants…

Elle marqua une pause en constatant que, pour une raison inconnue, Max Goodwinavait tressailli à cette remarque.

— Je ne suis pas marié, déclara-t-il. Par simple curiosité, comment imaginez-vousmon genre de femme ?

Alexandra ébaucha un geste évasif.

— Oh… Très belles, très mondaines et très sophistiquées.

Il esquissa une moue, sans toutefois réfuter ce jugement.

— Si vous ne craignez pas d’être harcelée, de quoi avez-vous peur ?— J’ai l’impression que vous parvenez toujours à vos fins, déclara Alexandra d’unevoix à la fois suave et résolue.

Elle ôta ses lunettes et les essuya avec un coin de son écharpe.

Max songea qu’il n’avait jamais vu d’yeux aussi fascinants. Etait-ce son imaginationqui lui jouait des tours ou… était-il vraiment sous le charme de ce regard ?

C’était absurde, se reprit-il. C’était sa maîtrise de la langue chinoise qui

l’impressionnait. Pourtant…

— Avez-vous jamais essayé de porter des verres de contact ? s’entendit-ildemander.

Alexandra écarquilla les yeux à ce brusque changement de sujet. Elle avait soudainl’impression que l’entretien prenait un tour trop personnel. Sans doute une de sesidées ridicules.

— Je possède des lentilles de contact, mais je préfère porter des lunettes,

répondit-elle, légèrement intriguée.

— Vous devriez essayer de vous y habituer, lui conseilla-t-il avant de se lever. Trèsbien, nous allons organiser cela.

Il alla jusqu’à son bureau et pressa un bouton d’appel.

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Margaret Winston arriva peu après. Elle ne vit manifestement aucun inconvénient àprendre Alexandra en main et lui conseilla un magasin de luxe qui assistait lesclients dans le choix d’une garde-robe, de cosmétiques coordonnés ; ils avaientmême un salon de coiffure. Elle se proposa de leur téléphoner aussitôt pour obtenir

un rendez-vous.— Merci, Margaret. Je voudrais briefer Mlle Hill. Trouvez-moi un momentaujourd’hui, voulez-vous ?

— Je crains que ce ne soit possible qu’après la fermeture, monsieur Goodwin,répondit Margaret, visiblement prise de court. Le seul moment de liberté dont vousdisposez se situe entre 18 et 19 heures.

— Cela vous convient-il, mademoiselle ? dit-il en se tournant vers Alexandra.

— Où dois-je me présenter ?

— J’ai un appartement au dernier étage de cet immeuble. Utilisez la sonnette privéeet annoncez-vous. Margaret préviendra mon personnel de votre venue.

Il lui tendit la main, lui signifiant ainsi que l’entretien était terminé.

Au lieu de répondre à son geste, Alexandra demanda :

— Me briefer ?

Max Goodwin abaissa son bras.

— Oui, je dois vous donner toutes les instructions concernant ces négociations,précisa-t-il. Vous n’aurez pas seulement à traduire des propos mondains : la plupartdes conversations professionnelles importantes se déroulent hors de la salle deconférences. J’aimerais donc que vous soyez au courant de l’enjeu de cestransactions.

Il leva un sourcil moqueur.

— Est-ce clair maintenant ?

Alexandra haussa les épaules.

— Je ne faisais que poser la question.

— Vous ne vous êtes donc pas demandé si j’avais quelque chose d’autre en tête ?

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Alexandra sourit.

— Si vous aviez connu la mère Supérieure de mon couvent, vous sauriez que «appartement privé » et « après l’heure de fermeture » sont des choses que des jeunes filles raisonnables doivent éviter à tout prix. Une suspicion qui m’a marquée,mais que j’ai surmontée. Donc, je serai là.

Elle lui tendit la main, sans apercevoir le discret sourire approbateur de MargaretWinston.

Quand il lui serra la main, Alexandra fut frappée par la fascination que cet hommeétait capable d’exercer. Même arrogant et incroyablement autoritaire, il restaitséduisant, ses larges épaules et sa silhouette élancée mises en valeur par soncostume superbement taillé. Etait-ce son magnétisme qui la perturbait ? En dépit de

ses yeux bleus et de sa mise soignée, elle le croyait tout à fait capable de jeter unefemme en travers de la selle de son cheval et de partir au galop…

Assez de sottises ! se reprit-elle aussitôt.

Pourtant, elle était incapable de repousser sa fantastique énergie. Malgré sondiscours policé, elle gardait l’étrange impression que leurs propos avaient dépassé labarrière professionnelle. Peut-être était-ce la raison de sa légère réticence à l’idéede ce rendez-vous dans son appartement ?

En retirant sa main, elle constata avec un léger trouble qu’ils étaient de taillepresque égale et qu’elle lui arrivait juste un peu au-dessus de l’épaule.

2.

A l’heure dite, Alexandra arrivait dans le hall de l’immeuble Goodwin, chargée d’unequantité de sacs. Elle déclina son identité au portier qui la conduisit vers l’ascenseuradéquat.

— Au trente-cinquième étage, madame.

Alexandra pressa le bouton et se raidit dans l’attente de l’inévitable nausée : elle nesupportait pas les ascenseurs ! La traversée se déroula cependant fort bien et, dèsson arrivée à l’étage, elle déboucha directement dans l’appartement en terrasse deMax Goodwin.

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Un homme d’une quarantaine d’années l’accueillit.

— Mlle Hill, je crois ? s’enquit-il aimablement. Je suis Jake Frost, l’intendant deMax. Je crains qu’il ne soit en retard de quelques minutes. Si vous voulez bienattendre dans le salon, puis-je vous offrir un verre ? Débarrassez-vous donc de vossacs.

— Merci, dit Alexandra, qui lui remit également sa veste et son écharpe. Jeprendrai volontiers un jus de fruits, je suis épuisée par cette course dans lesmagasins.

— Vous semblez avoir dévalisé leurs stocks, fit remarquer gentiment Jake Frost.

— Oui, mais ce n’est pas pour moi. Enfin, je veux dire… ces articles me sontdestinés, mais ne m’appartiennent pas vraiment et je les rendrai. Ne croyez pas que je sois horriblement dépensière, mais comme une présentation impeccable estexigée…

Intrigué, Jake Frost se mit à observer la nouvelle interprète d’un regard moinsprofessionnel. Elle était charmante et n’avait rien de commun avec les femmes queMax Goodwin avait l’habitude de…

Allons, pas de confusion… Alexandra Hill était là pour affaires. Avec un souriresincère, il déclara :

— Ce serait dommage de ne pas profiter un peu de ces articles.

Quelques minutes plus tard, un grand verre de jus de fruits glacé à la main,Alexandra admirait le panorama spectaculaire qu’offrait le logement de MaxGoodwin : sur le fleuve et la ville, le jour tombait et les lumières commençaient às’allumer çà et là.

Le salon dans lequel elle se trouvait était spacieux, d’un style contemporain, avec samoquette vert émeraude, ses canapés en velours pêche et les tables basses en émail

noir. Un magnifique meuble chinois occupait tout un pan de mur ; accrochée à lameilleure place, une immense toile abstraite attirait l’œil.

— Bonsoir, Alexandra, lança une voix derrière elle.

Alexandra se détourna. Max Goodwin entrait dans la pièce. Il venait apparemmentde prendre une douche et avait troqué son costume contre un jean et un pull. Il se

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dirigea vers le bar et se servit une bière.

— Asseyez-vous, l’invita-t-il.

Jake entra à cet instant.

— J’ai téléphoné pour prévenir que vous auriez un peu de retard, Max. Le vin vousattend dans un sac isotherme et les fleurs sont arrivées. Si vous n’avez plus besoinde mes services, je vais rentrer.

— D’accord, Jake, au revoir, lança Max avant de se tourner vers la jeune femme.Comment s’est passé votre après-midi?

— Très bien. Mais si vous êtes en retard, peut-être pourrions-nous reporter cebriefing ?

— Non, ce n’est pas si grave, je préfère prendre le temps d’apprécier ce verre.

— Je ne voudrais pas vous retenir pour votre… rendez-vous.

Il prit un air amusé.

— Inutile de prendre cet air réprobateur, mon rendez-vous consiste en une visite àma grand-mère, actuellement dans une maison de repos. Le vin et les fleurs luiremonteront peut-être le moral.

— Oh !

Alexandra ôta ses lunettes et entreprit de les essuyer pour se donner unecontenance. N’avait-elle pas jugé Max Goodwin sur les apparences en le prenant pourun don Juan invétéré ?

— Je suis désolée si je vous ai parue réprobatrice, s’excusa-t-elle en souriant. Je…En fait, je vous prenais pour un séducteur. Je n’en ai absolument aucune preuve, biensûr, et je retire ce que j’ai dit.

Max resta muet un long moment.

Finalement, Alexandra consulta sa montre.

— Pouvons-nous commencer le briefing ? suggéra-t-elle.

Il y avait une ombre de gravité dans son regard, maintenant qu’elle avait remis ses

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lunettes, nota-t-il.

— Merci d’avoir révisé votre opinion à mon sujet, déclara-t-il en se ressaisissant.Personnellement, je ne me considère pas comme un play-boy, bien que les définitionsde ce terme puissent varier. Mais ce n’est peut-être pas une bonne idée d’entamerce genre de discussion.

Un éclair railleur traversa son regard.

— Pour être franc, peu de personnes osent me désapprouver en face. Je considèredonc votre intervention comme une expérience salutaire. Cela dit, passons auxchoses sérieuses.

Quand il eut fini de parler, Alexandra avait une idée assez précise des négociationsqu’il allait entreprendre et de leur importance pour la Goodwin Minerals Company. Ceserait une formidable avancée si celle-ci réussissait son incursion sur le marchéchinois.

Max termina son verre.

— Je vais devoir partir. Merci de m’avoir accordé votre temps.

Il se leva et prit le sac isotherme qui attendait sur le bar, ainsi qu’un superbebouquet de gerberas, de marguerites et d’asparagus.

Une fois dans l’entrée, tandis qu’Alexandra récupérait ses sacs et sa veste, ildéclara avec humour :

— J’espère que vous n’êtes pas garée trop loin, Alexandra.

— Je n’ai pas de voiture, répondit-elle en pénétrant dans l’ascenseur. En fait, je neconduis pas.

Il la contempla d’un air si surpris qu’Alexandra eut envie de rire.

— Mais comment vous déplacez-vous ?— Je prends le bus. J’ai aussi une bicyclette et, très occasionnellement, je prendsun taxi.

— Où habitez-vous ?

Alexandra le renseigna.

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— C’est sur mon chemin, dit-il avant de presser le bouton du sous-sol. Je vousraccompagne.

— Vraiment, ce n’est pas nécessaire, monsieur Goodwin, protesta-t-elle. J’ail’habitude…

— Alexandra, laissez-moi vous donner un conseil : ne discutez jamais avec moi,surtout quand je suis de bonne humeur, parce que cela risque alors de ne pas durer.

— De plus, ajouta-t-il en remarquant ses sacs, vous avez apparemment fait unerazzia dans les magasins. Vous pourriez être dévalisée, on ne sait jamais.

— Vous vous moquez de ce qui pourrait m’arriver, du moment qu’on ne touche pas auxachats, c’est cela ?

— Exactement, ironisa-t-il. Mais assez bavardé, allons-y !

Alexandra n’eut d’autre choix que de le suivre, tandis qu’il traversait le parkingsouterrain en direction d’une rutilante Bentley marine.

Oubliant sa colère, la jeune femme s’exclama, admirative :

— Je ne connais pas grand-chose aux voitures, mais elle est vraiment magnifique !

— Oui, c’est une beauté, n’est-ce pas ? Belle, mondaine et très sophistiquée. Si

c’était une femme, je serais tenté de l’épouser.Alexandra ne put s’empêcher de rire. Il déverrouilla le coffre pour y déposer leurssacs, puis lui ouvrit la portière. Alexandra s’installa dans l’élégant habitacle, tout encuir crème et bois de noyer.

— Est-ce une décision volontaire de ne pas conduire ? s’enquit Max tandis que lavoiture remontait la rampe. Une conviction écologique ?

Alexandra ébaucha une moue.

— J’aimerais vous répondre que oui. Mais c’est avant tout une décision pratique. Jen’ai pas de garage.

— Quelle est votre situation financière ?

— Mes parents m’ont laissé un petit pécule, l’informa Alexandra en regardant lesrues défiler. Après l’accident qui leur a coûté la vie, la mère Supérieure du couvent

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a été désignée en tant que tutrice. Mes études ont ainsi été payées et il m’est restésuffisamment d’argent pour acheter un petit pavillon. Donc, je suis assez riche,même si je n’ai pas de voiture, acheva-t-elle avec un sourire joyeux.

Max Goodwin remarqua l’éclat un peu trop vif de ses prunelles. Elle essayait tantbien que mal de dissimuler sa tristesse.

— Bravo pour votre débrouillardise, dit-il seulement. C’est ici ?

Il gara la Bentley dans une rue bordée de maisons mitoyennes.

— Merci beaucoup. Je vous reverrai donc au cocktail demain après-midi ? demandaAlexandra.

— Oui. Avez-vous quelque chose de prévu demain matin ? Peut-être désirez-vous

voir la salle de conférences et rencontrer les autres interprètes ?

— Cela me plairait effectivement, mais il se trouve que j’ai toutes sortes de rendez-vous dans la matinée : coiffeur, manucure, esthéticienne.

Max se tourna vers elle. Il avait ouvert sa portière et le plafonnier était allumé.

— N’en faites pas… plus qu’il n’en faut, lui conseilla-t-il.

Son regard bleu s’attarda sur le visage de celle qu’il venait d’engager. Elle était

rafraîchissante, pensa-t-il.Alexandra réprima un sourire.

— Je n’ai pas l’intention de ressembler à Cendrillon, rassurez-vous. En fait, j’aifreiné les dépenses.

Max se rendit compte qu’elle retournait la situation et que loin d’être accablée parsa demande de changer de physionomie, elle allait jusqu’à se moquer de lui.

— Expliquez-vous, s’enquit-il d’un ton brusque.

— Je n’ai cessé de rappeler à Mme Winston et aux vendeurs que je ne devais paséclipser vos invités. Je tiens à préciser que vous ne payez que les vêtements.

Il se rembrunit.

— Pourquoi faites-vous cela ?

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Elle haussa les épaules.

— C’est important pour moi : une question d’orgueil. Les soins esthétiques sontquelque chose de très personnel et je vous prie de ne pas en discuter, monsieurGoodwin.

Max laissa échapper un rire involontaire en voyant Alexandra dresser le menton.

— Très bien. Si nous sortions vos affaires ?

Il les porta lui-même dans la courte allée qui menait à la porte d’entrée du pavillon.

— Donnez-moi votre clé que j’ouvre votre porte.

— Je… Elle se trouve probablement sous ce pot de fleurs, dit-elle en lui indiquant un

pot de lavande.— Je n’arrive pas à le croire, répondit-il en posant les sacs pour soulever le pot.C’est le premier endroit où un cambrioleur irait regarder. Quoique cela ne luiservirait pas à grand-chose ce soir : elle n’y est pas.

Il se redressa et contempla la douzaine de plantes en pot groupées près de la porte.

— Où dois-je chercher votre clé maintenant ? Sous le basilic, la menthe, le persil ?…

— Je la change de place chaque fois, coupa-t-elle nerveusement. J’ai pris cette

habitude parce que je perds tout le temps mes clés. Oh ! Attendez.

Alexandra se frappa le front.

— Je rentrais de voyage. Donc, elles doivent encore être dans mon sac.

Elle se mit à fouiller dans son sac à main, gagnée par l’exaspération et, finalement,en renversa le contenu sur le banc.

— Combien de fois par jour devez-vous faire cela ? s’enquit Max.

— Pas si souvent. Tout cela est votre faute aussi. Ah ! Les voilà.

Max haussa les sourcils de surprise.

— Ma faute ? Je ne vois pas…

Alexandra l’interrompit pour lui raconter la folle journée qu’elle avait passée,

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uniquement parce qu’il avait eu besoin immédiatement d’un interprète de mandarin.

— Est-ce si étonnant que je me sente un peu désorganisée ? termina-t-elle, avant dese rendre compte qu’il riait silencieusement. Ce n’est pas drôle, vous savez.

— Oh ! Si, dit-il en ouvrant la porte d’entrée pour elle. Où est l’interrupteur ?

— Juste à droite, mais vous n’avez pas besoin de…

— Je n’ai pas l’intention d’entrer chez vous, Alexandra, dit-il, non sans ironie. Ceci aucas où votre mère Supérieure vous observerait de là-haut et… Je suis désolé,s’interrompit-il brusquement en voyant qu’elle changeait d’expression. Oubliez ceque je viens de dire. Bon, je vous reverrai demain après-midi. Merci d’avoirsupporté… toutes les difficultés de cette journée !

Juste avant de s’éloigner, il la contempla d’un œil aigu, puis lui toucha la joue d’ungeste familier et retourna vers sa voiture.

En démarrant, Max se surprit à penser que, s’il avait été libre, il aurait aiméemmener sa nouvelle interprète dîner en ville. Quelque chose lui disait qu’elleapprécierait son endroit favori : une auberge sans prétention, confortable, où l’onservait les meilleurs plateaux de fruits de mer de Brisbane. Il songea qu’il n’avaitd’ailleurs pas emmené une femme là-bas depuis longtemps, même s’il ne manquait pasde candidates pour l’escorter. Il participait à de nombreuses réceptions avec,

chaque fois, une femme très élégante et parfumée à son bras. Mais il avait soudainla curieuse impression que tout cela était… superficiel.

Cela l’amena à se demander si la façon dont Alexandra Hill semblait l’attirer neprouvait pas qu’il était fatigué des mondanités ou des femmes sophistiquées, pourreprendre les propos de cette dernière ?

Il fronça les sourcils, ces pensées le ramenaient directement à une femme enparticulier, belle, mondaine et sophistiquée justement… Et au souci qu’elle luicausait.

Alexandra était encore stupéfaite en refermant sa porte sur la nuit pluvieuse. Aumoment où il l’avait si scrupuleusement observée, une sensation bizarre l’avaittraversée, comme si un frisson chargé d’électricité passait entre eux.

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Du bout des doigts, elle tâta la joue qu’il avait touchée et respira profondément enévoquant la présence magnétique de son nouvel employeur. Sa haute taille, le bleuprofond de ses yeux, les petits plis qui soulignaient son regard chaque fois qu’il riait,ses larges épaules…

Brusquement, elle secoua la tête. Inutile de rêver ! se rabroua-t-elle.

Elle avait décoré sa maison avec des objets et des gravures du monde entierrassemblés au cours des voyages de sa jeunesse. A l’époque, son père était consul etelle avait mené une vie merveilleuse, se remémora-t-elle.

Tout s’était effondré lorsque ses parents avaient trouvé la mort dans un accidentde train, très loin de chez eux. Elle-même se serait sans doute trouvée à bord dutrain fatal s’ils n’avaient décidé de l’envoyer en Australie pour terminer sa scolarité.

Cette décision lui avait sauvé la vie, et ce choix, difficile à accepter à l’époque,s’était révélé sage. Alexandra s’était fait des amis durables, ce qui n’avait pas étépossible au cours de son enfance nomade.

Elle avait eu aussi la présence rassurante de la cousine de son père, la mèreSupérieure du couvent où elle avait été élève.

Mais pour une enfant unique, la disparition de ses parents avait été une terribleépreuve et Alexandra en souffrait encore dans ses moments de solitude. Cettetragédie l’avait insidieusement amenée à avoir peur de s’attacher à quelqu’un. Lacrainte que l’objet de son amour lui soit arraché ne cessait de la hanter.

C’était la raison pour laquelle à vingt et un ans elle était célibataire. Elle se demandas’il en serait toujours ainsi.

Elle avait tout de même eu la chance d’hériter d’une belle somme qui lui avait permisde payer ses études et, plus tard, d’acheter cette maison. Elle avait pu ainsi tirer untrait sur l’époque du couvent, même si cette période n’avait pas été pénible.

Pendant ses études universitaires, elle avait été acceptée comme membre laïc de lacommunauté et, en échange, avait aidé les jeunes pensionnaires. Elle savait s’yprendre avec les enfants, surtout ceux qui supportaient mal d’être loin de leurfamille.

Quel changement lorsqu’elle s’était retrouvée seule dans sa maison ! Heureusement,elle avait la chance d’avoir une voisine très sympathique, Patti, une veuve dynamique

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qui était en retraite, et dont Alexandra appréciait beaucoup la compagnie. Chacunes’occupait du jardin et du courrier de l’autre en cas d’absence.

Alexandra posa les clés sur la table du salon, ses sacs sur le canapé et entrepritd’allumer quelques lampes.

Dans la lumière tamisée, la pièce apparut, reposante et douillette avec son tapis etses coussins exotiques. Elle ôta ses bottes et se dirigea vers la salle de bains. Elleprit une douche, puis pieds nus se rendit dans la cuisine. Elle se prépara du thé et unsandwich et emporta le tout dans sa chambre, puis entreprit de vider sur le lit lecontenu des sacs.

En contemplant la pile de vêtements, elle pensa avec une pointe d’ironie que même sielle avait freiné Margaret Winston dans les dépenses, les tenues étaient superbes.

La jeune femme avait sous les yeux des tenues taillées dans les plus jolies matières :soie, crêpe, laine et lin, ainsi que deux paires d’escarpins.

Elle se rembrunit soudain. Ces vêtements somptueux étaient si différents de sonstyle habituel. Saurait-elle les porter avec élégance ?

Une autre pensée, plus étrange celle-là, la frappa. Comment Max Goodwin laconsidérerait-il dans ces tenues raffinées ?

A son grand étonnement, elle sentit son pouls s’accélérer à cette question et dutinspirer profondément pour se calmer. Elle devait se montrer strictementprofessionnelle dans ses relations avec lui, se rappela-t-elle.

Le lendemain, Alexandra avait un programme chargé. Elle devait se rendre àl’appartement de Max Goodwin à 17 h 30 pour le cocktail et avait toute une série derendez-vous auparavant. De plus, sur son répondeur, un message de Simon Wellfordlui demandait de passer le voir.

Juste avant de sortir de chez elle, elle reçut la brève visite de sa voisine, Patti.

— Bonjour, Alexandra. Ecoute, je ne vais pas le nier, commença celle-ci d’un tonquelque peu théâtral, je suis dévorée de curiosité ! Qui est l’homme séduisant qui t’areconduite hier soir, en Bentley, s’il vous plaît ?

Alexandra se mit à rire avant d’expliquer :

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— Le patron pour qui je remplis une mission temporaire. Inutile de te mettre desidées en tête.

Patti laissa échapper un soupir de regret avant de sourire malicieusement.

— Eh ! On ne sait jamais…

A midi, Alexandra se regarda dans le miroir du salon de coiffure, légèrementincrédule.

Ses cheveux avaient été rafraîchis et harmonieusement coiffés, ses cils teints, sesongles manucurés.

Sa nouvelle coiffure surtout la surprenait. Plus de cheveux ternes ou envahissants ;quelques mèches blondes rehaussaient leur couleur et leur tendance à bouclernaturellement avait été accentuée.

— Cela vous plaît ? s’enquit M. Roger, le coiffeur.

Alexandra bougea la tête et sa chevelure flotta autour d’elle avec élégance.

— Je n’arrive pas à y croire ! Mais je ne saurai pas leur garder ce style.

— Oh ! Mais si, répondit le coiffeur, piqué. Tout est dans la coupe et vous pourrez

les porter comme vous voulez. Mary ?

Par-dessus son épaule, il appela l’esthéticienne.

— A vous pour le maquillage. Surtout, soignez les yeux. Ils sont magnifiques !

Simon laissa tomber son stylo en la voyant.

— Oh ! Seigneur. Je veux dire…

— C’est bon, coupa Alexandra en souriant, j’ai eu moi-même un choc. Quand je penseque je me bats avec mes cheveux depuis des années alors que tout ce dont j’avaisbesoin était un nouveau style et quelques mèches colorées. Remarque, cela a coûtéune petite fortune.

— Ce n’est pas seulement tes cheveux, dit-il en la dévisageant. Mais ton maquillage…

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Et le fait que tu ne portes plus de lunettes. C’est extraordinaire. Mais tu astoujours le même style vestimentaire.

— Ah, ce sera différent cet après-midi. Pourquoi désirais-tu me voir ?

Simon ouvrit un dossier.

— Goodwin Minerals a faxé le contrat. Il y a une clause de confidentialité. J’aidemandé à notre avocat de vérifier le document et il ne voit aucun problème. Biensûr, tout ce que tu entendras pendant ces négociations devra rester confidentiel.

Il lui tendit un stylo et Alexandra signa le document.

— Ils ont aussi faxé le programme des événements auxquels tu seras tenued’assister, poursuivit-il.

— Un cocktail, ce soir, un déjeuner à Sovereign Islands demain, puis trois jours derelâche avant une journée de golf à Sanctuary Cove, une excursion sur le fleuve, une journée aux courses et, pour finir, un dîner dansant à… Sovereign Islands denouveau, énuméra Alexandra. Oui, je suis au courant. Je crois que je vais appréciercette pause de trois jours après le déjeuner de demain. En fait, pourquoi àSovereign Islands ?

— C’est au large de la Gold Coast. Goodwin possède une villa là-bas, imagine plutôt unpalais, expliqua Simon avec ironie.

Il ouvrit un tiroir et en sortit un badge doré qu’il lui tendit. Le nom d’Alexandra et lelogo de la société y étaien artistement inscrits.

Alexandra le rangea dans son sac.

— Bon… Eh bien, bonne chance, déclara-t-il d’un air grave. Tu sais que cette missiond’interprétariat est importante et qu’elle peut nous apporter beaucoup de travail?

— Simon, c’est au moins la dixième fois que tu me poses la question. Oui, j’en ai

conscience et je me débrouillerai parfaitement. Maintenant, il est temps que j’yaille…

— Comment est-il, ce Max Goodwin ?

Alexandra réfléchit un instant.

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— Je dirais… très intelligent, habitué à agir comme il l’entend et très riche.

— Je n’en ai jamais douté, commenta Simon. Il vient d’une famille très fortunée : sagrand-mère est la fille d’un comte italien, et sa sœur est mariée à un aristocrateanglais. La rumeur circule en ville qu’il a un fils dont il ne soupçonnait même pasl’existence.

Alexandra, qui avait atteint la porte, se tourna vers son employeur d’un airstupéfait. Simon Wellford avait une sœur, Cilla, qui avait épousé un homme issu de lahaute société. Aussi était-il au courant de tous les potins sur les célébrités.

— Il ne connaissait pas son existence ? répéta-t-elle, médusée. Comment est-cepossible ?

Simon haussa les épaules.

— Il y a eu quelques femmes dans la vie de Max Goodwin. En tout cas, le bruit courtque cette nouvelle ne l’a guère ravi, et le mot est faible.

Alexandra se rassit, stupéfaite.

— Comment peut-on ne pas se réjouir d’avoir un enfant?

— Je n’ai pas de réponse, Alexandra. Cilla ne connaît pas d’autres détails. Et si j’étais toi, je ne poserais pas la question à l’intéressé, dit-il en ébauchant une moue.

— C’est évident, voyons.

— Je te dis cela, parce que j’ai le sentiment que tu es… une bonne âme. Un peu troppeut-être.

— Pas du tout. Enfin, si, se corrigea Alexandra. Mais je ne suis pas du genre à memêler de ce qui ne me regarde pas. Cette histoire ne me concerne en rien, même si je ne peux pas comprendre une telle attitude.

— Désolé de t’en avoir parlé, mais que cela n’affecte pas tes rapports avec Goodwin,commanda-t-il. C’est tout ce que je te demande.

— Cela n’arrivera pas, promit Alexandra. Je resterai très professionnelle.

17 h 30. Alexandra déboucha de l’ascenseur privé de l’immeuble Goodwin et

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écarquilla les yeux devant le spectacle qui s’offrait à elle.

La veille, les rideaux fermés cachaient le toit-terrasse. Cette fois, ils étaient tiréset elle découvrit la piscine illuminée : un véritable décor de comédies musicaless’offrait à son regard émerveillé ! Une pirogue flottait sur l’eau, une petite plagesablonneuse avait été aménagée, entourée de véritables palmiers et de buissonsd’hibiscus. Les serveurs portaient sarongs et pagnes hawaïens et une musique douceen sourdine renforçait l’ambiance tropicale. Les buffets et les boissons étaientposés sur des tables couvertes de chaume et ornées de fleurs de frangipanier. Onse serait vraiment cru sur une île du Pacifique !

Alexandra se détourna et vit Margaret Winston juste derrière elle.

— C’est magnifique ! s’extasia-t-elle.

Margaret sourit modestement.

— Nous faisons de notre mieux. Mais laissez-moi vous regarder.

Alexandra portait un chemisier orné de sequins, sur un bustier et une jupe noirs.Ses longues jambes étaient gainées de soie et elle avait enfilé des escarpins endaim.

Avant que Margaret ait eu le temps de donner son opinion, Max Goodwin arriva àleur hauteur.

Il enveloppa Alexandra d’un regard rapide, étouffa une exclamation et, se tournantvers sa secrétaire, lança d’un ton réprobateur :

— Oh ! Pour l’amour du ciel, Margaret ! Qu’avez-vous fait?

3.

Alexandra se figea, soudain glacée.

La voyant incapable de proférer un mot, Margaret Winston vint à son secours.— Mais, monsieur Goodwin, elle est très jolie comme cela!

— Jolie ? maugréa son patron. Elle est…

Il n’eut pas l’occasion d’achever, sortant de son hébétude, Alexandra tourna lestalons et se mit à courir vers le hall.

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Max Goodwin la rattrapa devant l’ascenseur.

— Si vous me laissiez finir ! assena-t-il en la saisissant par le bras. J’allais dire quevous étiez absolument magnifique!

La tête haute, Alexandra le jaugea avec méfiance.

— Vous essayez de me rassurer ! Laissez-moi partir.

— Non, venez avec moi.

Raffermissant la pression sur son bras, il entraîna la jeune femme vers une pièce àl’écart, un petit salon tendu de vert, confortable et accueillant.

— Je le pensais sérieusement, affirma-t-il après avoir refermé la porte derrière

eux.— Alors, pourquoi aviez-vous l’air furieux ? se défendit Alexandra. Cela n’a aucunsens !

Il la relâcha et fourra les mains au fond de ses poches.

— Parce que la dernière chose dont j’ai besoin en ce moment, c’est d’une interprètequi vole la vedette ! Qui plus est, je n’ai aucune envie qu’on nous croit intimes.

Le visage d’Alexandra s’empourpra, mais elle parvint à répliquer :

— Aucun risque de ce côté-là !

— Ma chère…

Max recula et laissa errer sur elle son regard bleu sombre.

— Croyez-moi, cette pensée me viendrait à l’esprit si je vous voyais avec un autrehomme. Vous êtes si fine et si élégante. Le noir vous sied parfaitement et faitressortir votre teint délicat. Vos yeux sont étonnants, presque verts aujourd’hui. Et

vos jambes… J’en ai rarement vu d’aussi jolies. Comment diable se fait-il que vousayez eu cette… apparence hier matin ?

— Je vous rappelle que je rentrais des sports d’hiver ! répondit Alexandra, butée. Iln’empêche que je ne sais pas si je dois vous croire.

— Je n’ai pas l’habitude de mentir.

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Alexandra secoua la tête, désorientée.

— Mais c’est vous qui avez insisté pour que j’aie le physique de l’emploi. Vous aviezpeur d’être embarrassé par mon apparence.

— C’est vrai, je l’avoue. Et j’étais convaincu que mes critiques ne feraient pasbeaucoup de différence, que vous vous moquiez éperdument de ce que je pensais.

Alexandra sentit de nouveau le feu lui monter aux joues. Mon Dieu ! Que répondre àcela ?

— Je croyais m’être totalement trompée, tenta-t-elle d’expliquer. Que ce nouveaulook ne m’allait pas du tout.

— Non. C’est exactement le contraire.

Alexandra demeura muette et se contenta de l’observer. Même si elle n’yconnaissait pas grand-chose en matière de vêtements masculins, son costumeanthracite était à n’en pas douter du sur-mesure. Il portait une chemise blanche àfines rayures et une cravate à motifs émeraude. Des boutons de manchettes en orbrillaient à ses poignets. Ajouté à cela, son air de beau ténébreux…

C’était plutôt lui qui raflerait tous les suffrages, ce soir. Pourquoi donc n’était-il pasencore marié ? Il devait avoir dans les trente-cinq ans déjà. Et pourquoi le fait dedécouvrir qu’il avait un enfant ne le ravissait-il pas, pour reprendre l’expression deSimon ?

— Mademoiselle Hill ?

Emergeant de sa rêverie, Alexandra tressaillit.

— Désolée. Vous disiez ?

— Rien, mais vous me regardiez comme si j’étais… A vrai dire, je ne sais pas trop.Peu recommandable ? Ou appartenant à une espèce qui vous est totalement inconnue

?

Alexandra laissa échapper un petit rire involontaire.

— Cela se pourrait. Ecoutez, voulez-vous que je file chez moi pour me changer ?

Il la regarda d’un œil légèrement désapprobateur, comme s’il avait envie d’en

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découdre avec elle sur ce « Cela se pourrait ». Il consulta sa montre et secoua latête.

— Pas le temps. Il faudra faire avec. Je vous demande seulement d’ignorer lesmarques d’admiration excessive que l’on vous témoignera.

— Monsieur Goodwin, coupa Alexandra, je ne suis ni sotte ni impressionnable !

— Non, mais vous n’êtes sans doute jamais apparue en public comme si vous vousprépariez à faire la couverture de Vogue! Les invités se demanderont si je coucheavec vous en plus de vous employer, c’est dans la nature humaine ! l’avertit-il, irrité.Et vous disiez que vous aviez freiné Margaret ?

Alexandra acquiesça.

— Il y avait une jupe beaucoup plus courte pour aller avec ce top…

— Et elle voulait vous la faire acheter ?

Alexandra sentit la situation devenir périlleuse.

— Je ne m’en souviens pas. En fait, j’ai essayé un nombre incalculable de vêtements.Est-ce si important ?

— Non, répondit brièvement Max Goodwin tout en se demandant à quel jeu sa

secrétaire jouait.Cherchait-elle à lui coller cette femme dans les bras ? Alexandra Hill n’était passeulement d’une beauté étonnante, admit-il soudain, elle était différente,étonnamment rafraîchissante et naturelle. En d’autres circonstances, il aurait étécurieux de faire sa connaissance un jour où ses jolies jambes, ses yeux splendides etson corps mince et séduisant auraient eu plus d’importance que sa maîtrise dumandarin…

Max interrompit brutalement le cours de ses pensées, Alexandra s’exclamait :

— Oh ! J’allais oublier…

Ouvrant sa pochette de soirée, elle en sortit le badge de Simon.

— Ceci devrait me rendre service, dit-elle en l’accrochant à son chemisier.Maintenant, j’ai plus l’allure d’une employée, non ?

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Max ne répondit pas.

***

Alexandra se rendit compte avec soulagement que le cocktail était moins formel que

le reste du programme annoncé. Il rassemblait une foule animée où se mêlaient deshommes d’affaires chinois et les directeurs de Goodwin Minerals, accompagnés leplus souvent de leurs élégantes épouses. Le décor paradisiaque enchantait lesinvités et l’ambiance était décontractée. Elle n’eut aucun discours de bienvenue àtraduire, et encore moins de conversations commerciales. Il s’agissait surtout defaire les présentations.

Elle avait reçu la consigne de ne pas quitter Max Goodwin qui tenait à accueillirpersonnellement chaque convive.

Elle dut convenir qu’il avait raison sur un point : elle attirait l’attention. Les hommesnotamment semblaient impatients de faire sa connaissance et étaient visiblementétonnés d’apprendre qu’elle travaillait.

Alexandra réussit à parer à ces imprévus aussi poliment et brièvement que possible,et s’en tint strictement à son rôle d’interprète.

Un léger incident faillit cependant la désarçonner, quand un jeune homme du nom dePaul O’Hara se présenta à elle. Il était étudiant en gestion, actuellement stagiaire

dans le bureau de Max Goodwin, lui apprit-il.

— Et accessoirement, mon cousin ! précisa Max en souriant.

Paul avait environ vingt-cinq ans. Blond, des yeux gris rieurs, il était joli garçon etadressa à Alexandra un regard où l’admiration n’était que trop visible.

Max venait de se détourner quand le regard de Paul navigua de son cousin àAlexandra. Une lueur intriguée y brillait, comme une interrogation.

Alexandra s’empourpra et entrouvrit les lèvres, légèrement suffoquée. Non, ellen’était pas la propriété de Max Goodwin ! Mais comment réfuter pareil soupçon aubeau milieu d’un cocktail, alors qu’elle travaillait ? Mon Dieu ! C’était exactement lasituation que Max avait prévue.

Redressant fièrement le menton, elle tourna carrément le dos au jeune homme.Après quoi, il lui fallut un effort de volonté pour se concentrer de nouveau.

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Au bout de deux heures, les invités prirent congé et Alexandra laissa échapper unsoupir.

— Vous avez été excellente, mademoiselle Hill. Je vous félicite, déclara Max ensouriant. Mais vous devez être fatiguée.

— J’ai l’impression d’avoir été passée à la moulinette, avoua-t-elle.

— Dans ce cas, allez dans le salon vert. Je vous apporte un remontant.

Alexandra hésita cependant.

— Je ferais mieux de rentrer chez moi.

— Dans un moment.

Arrêtant une serveuse chargée d’un plateau, il prit deux coupes de champagne.

— Après vous, commanda-t-il à Alexandra.

Elle n’eut d’autre choix que de faire ce qu’il demandait. Une fois dans le petit salon,elle prit place sur un canapé et ôta ses escarpins avec un soulagement non dissimulé.

— Désolée…, dit-elle en acceptant la coupe qu’il lui tendait. Les chaussures neuves !C’était une très belle fête. J’imagine que la remise en ordre prendra du temps.

— Margaret et Jake s’en chargent, répondit-il en s’installant dans un fauteuil enface d’elle. Ils dirigent les opérations comme des généraux sur un champ debataille ! Tout est prévu. Ils passeront la nuit à l’étage au-dessous.

Alexandra porta le verre à ses lèvres et savoura une gorgée glacée.

— Cela fait du bien, merci.

— J’espère bien. C’est un champagne exceptionnel. Dans votre couvent, on ne vous apas prévenue contre l’alcool et les situations dangereuses qu’il peut engendrer ?

demanda-t-il avec ironie.— Si, bien sûr, et j’y goûte très rarement. Mais je dois tenir cette hérédité de monpère qui était amateur de bons crus.

Max Goodwin l’observa avec acuité.

— Vous avez… Comment dire ? Un calme inné, Alexandra. J’imagine que cela vient

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aussi de votre habitude de vivre au contact du corps diplomatique.

— C’est possible. Dois-je comprendre que j’ai réussi le test de ce soir ?

— Certainement.

Il se leva, ôta sa veste et s’étira.

— Demain, nous avons un déjeuner d’affaires au bord de la Gold Coast, j’y ai unemaison. Vous aurez ensuite trois jours de battement, durant lesquels lesnégociations prendront un tour sérieux. Ce sera le rôle des autres interprètes. Je…Qu’y a-t-il ? demanda-t-il soudain.

Alexandra se raidit, s’intimant l’ordre d’arrêter de rougir comme une adolescenteeffarouchée. La vue de Max Goodwin étirant ses muscles la troublait au plus haut

point. Son torse puissant se profilant sous la fine étoffe de sa chemise, son ventreplat, son parfum viril et enivrant assaillaient ses sens. Une représentation mentalede Max Goodwin, nu et hâlé, traversa son esprit…

— Rien, je…, balbutia-t-elle.

La bouche sèche, elle reprit :

— Je… Je n’avais pas encore pensé au moyen de me rendre sur la Gold Coast,improvisa-t-elle.

Elle se leva, impatiente de s’en aller tout à coup.

— Je vous emmènerai là-bas et vous reconduirai chez vous après le repas, proposaMax. Etes-vous sûre que tout va bien ?

— Oui, absolument.

Alexandra prit une gorgée de champagne pour se réconforter, en espérant qu’ellen’allait pas se mettre à suffoquer. Elle releva la tête, leurs regards s’accrochèrent

et elle se sentit piégée, incapable de s’arracher à la fascination des yeux de cethomme, d’un bleu profond comme l’océan. Son pouls s’affola.

« Vous mentez, Miss Hill », se dit Max en observant la petite veine qui battaitrapidement à la base de sa gorge claire.

Il abaissa le regard sur la délicieuse silhouette longiligne qui l’avait tant étonné et, à

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sa grande surprise, se sentit émoustillé…

A sa grande surprise ? Non, admit-il. Cette fille était belle à damner un saint, elleressemblait à un papillon qui venait d’émerger de sa chrysalide. Quel homme n’auraiteu envie d’enfouir ses doigts dans ses cheveux, de respirer le parfum de sa peau ?Pourtant, elle était différente des femmes séduisantes et stéréotypées quil’attiraient habituellement. Sa personnalité était un étonnant mélange de talent,d’intelligence et d’humour. Il s’agissait d’une femme indépendante qui ne craignaitpas de lui faire remarquer les erreurs qu’il commettait.

Elle l’intriguait, suscitait en lui un désir impérieux : la prendre dans ses bras parsurprise, faire taire ses protestations en l’embrassant et… attendre sa réaction.

Il était incapable de prédire ce qui suivrait. Cette femme est une énigme, songea-t-

il, fourrant ses mains dans ses poches pour s’empêcher de passer à l’action. Il nepouvait pas se permettre de la toucher à ce stade…

Bon sang ! A quoi pensait-il ? Etait-il devenu fou ? Aussi, pourquoi le regardait-elleainsi, les lèvres entrouvertes, avec une lueur étonnée au fond de ses beaux yeuxnoisette? Une émotion teintait son regard, comme si elle partageait cette attiranceinattendue, et que l’air s’électrisait entre eux…

Un coup frappé à la porte rompit le charme. Margaret passa la tête dansl’entrebâillement

— Monsieur Goodwin, il y a un problème. C’est assez urgent.

Alexandra réagit enfin et dit vivement :

— Je m’en vais.

— Pas question, commanda Max. Terminez votre verre. Pendant ce temps, je vaisprendre des dispositions pour que l’on vous ramène chez vous. Allons-y, Margaret.

Il sortit et referma la porte derrière eux.

Restée seule, Alexandra laissa échapper un profond soupir et se laissa tomber sur lesofa. Elle porta ses mains à ses joues brûlantes.

Mon Dieu ! Qu’est-ce qui lui avait pris ? Jamais elle n’avait déshabillé un homme enimagination ! S’emparant de sa coupe de champagne, elle en avala les deux tiers d’unelongue gorgée.

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Max Goodwin la décontenançait : il ébranlait ses sens, déstabilisait ses pensées. Ellene pouvait laisser les choses aller plus loin, décréta-t-elle. A quoi avait-il songé enl’étudiant si scrupuleusement ? Etait-il attiré par elle ? Non, certainement pas.

Pourtant, pendant quelques instants, ils avaient été comme enfermés dans une bullesensuelle qui avait oblitéré le monde autour d’eux. Etait-ce encore son imaginationqui lui jouait des tours ?

Alexandra fixa les profondeurs du salon, songeant aux hommes qu’elle avait eul’occasion de rencontrer. Elle en avait admiré certains, sans jamais tomberamoureuse.

Ce soir, Paul O’Hara lui avait paru charmant. Pourquoi s’était-il aussitôt imaginéqu’elle et Max Goodwin avaient une aventure sentimentale ?

Fermant les yeux, elle se demanda si on allait ou non la ramener rapidement chezelle.

Etait-ce le champagne qu’elle avait bu trop vite ou la fatigue qui l’accablait après cesdeux heures de concentration intense ? Elle s’assoupit…

Elle se réveilla, l’esprit confus. Seule, une lampe éclairait le salon. Un coup d’œil à samontre lui apprit qu’elle avait dormi… deux heures! Plus étrange encore, elle étaitétendue sur le canapé, la tête sur un oreiller, et un plaid la couvrait.

Alexandra se dressa, horrifiée. Mon Dieu ! Qui avait décidé de la laisser dormir ici,au lieu de la renvoyer chez elle ?

Elle chercha à tâtons son sac, l’ouvrit et s’empara de son téléphone portable. Elleallait appeler un taxi et s’éclipser sans bruit.

Elle se leva et, ses chaussures à la main, gagna doucement le hall faiblement éclairé.Il n’y avait aucun bruit dans l’appartement.

Elle appuya sur le bouton d’appel de l’ascenseur, puis commença à composer lenuméro de la compagnie de taxis. Elle s’aperçut alors qu’aucun signal lumineuxn’apparaissait au-dessus des portes de l’ascenseur.

Annulant son appel téléphonique, elle pressa de nouveau le bouton. Toujours rien.

Oh ! Mon Dieu ! L’ascenseur était verrouillé. Il fallait sans doute une cartemagnétique pour le faire fonctionner. Que faire maintenant ? Si Max Goodwin était

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allé se coucher, elle n’oserait certainement pas aller le réveiller ! Pouvait-elleprévenir Jake ? Mais Max avait dit que son intendant et Margaret Winstonpasseraient la nuit « à l’étage du dessous ». L’appartement était-il un duplex, avecdes chambres à l’étage inférieur ? Dans ce cas, il devait y avoir un escalier

intérieur…Mais aucune autre porte ne s’ouvrait dans le hall.

Sur la pointe des pieds, elle se rendit dans le salon principal, cherchantdésespérément une issue. En vain. Dépitée, elle revint sur ses pas, songeant qu’il nelui restait plus qu’à passer la nuit dans le salon vert !

Quelques minutes plus tard, Alexandra était de nouveau étendue sur le canapé, leplaid remonté sur elle, mais incapable de se rendormir.

Se relevant, elle alla éteindre la lampe, espérant que l’obscurité l’aiderait à trouverle sommeil. Mais cela semblait impossible !

Elle songeait au ridicule de sa situation et au moyen de sortir de l’appartement deMax Goodwin quand elle entendit du bruit : d’abord l’ouverture des portes del’ascenseur, puis des voix.

Elle se figea. Elle avait laissé la porte du salon entrouverte et les paroles de MaxGoodwin lui parvinrent nettement.

— Ecoute, Cathy, disait-il d’une voix dure, il y a un mois tu as décidé de m’informerque j’avais un fils de six ans dont j’ignorais l’existence…

— Max, attends une minute, coupa une voix de femme. J’ai aussi tenté de t’expliquercomment j’en étais arrivée là.

— Oh ! Bien sûr, répondit-il, caustique. Tu n’étais même pas sûre de savoir qui étaitle père, et quand tu as fini par te convaincre que c’était mon enfant, tu as décidéarbitrairement, que, puisque nous n’étions pas faits l’un pour l’autre, tu l’élèverais

seule, sans même m’en parler !

La femme qu’il appelait Cathy haussa le ton.

— Tu sais aussi bien que moi que s’il y a une chose que nous savons faire, à part nousaimer, c’est nous détester !

— Cela ne m’enlevait pas le droit de savoir ! répondit-il, farouche. Et maintenant, tu

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veux me le laisser, alors que je suis un parfait inconnu pour lui ! Te rends-tu compteà quel point il va être affecté ? Tu peux sûrement compter sur quelqu’un d’autre, non?

— Ma mère a toujours été là et a été merveilleuse, mais elle entre à l’hôpital et j’aibesoin d’être auprès d’elle. Et la nourrice m’a donné sa démission. Mais, Max…

La voix de Cathy changea de nouveau, devenant rauque et tendue.

— D’une façon ou d’une autre, nous devions rompre la glace, et tôt ou tard il fallaitque tu le rencontres. Nicky est un enfant qui s’adapte très facilement et je lui aitoujours dit que son père était un homme merveilleux. Et il a Nemo pour lui tenircompagnie.

Alexandra se mordit la lèvre tout en assimilant cette conversation, dont ellecommençait à entrevoir le sens. Elle entendit alors Max Goodwin jurer de façon trèsexplicite.

N’y tenant plus, elle se leva d’un bond et, sans prendre la peine d’enfiler seschaussures, sortit en courant de la pièce pour manifester sa présence.

Saisi par son irruption, le couple recula, effrayé.

— Je… Je suis désolée, bégaya-t-elle.

Mais Max Goodwin ne l’entendait pas de cette oreille.

— Qu’est-ce que vous fichez ici, vous ? tonna-t-il.

Quant à la jeune femme nommée Cathy, l’une des plus belles femmes qu’Alexandraeût jamais vues, elle murmura :

— Sans ses chaussures ? Je me le demande. Mais tu as toujours eu très bon goût ence qui concerne les femmes, Max.

Comme Alexandra la fixait avec incrédulité, Margaret déboucha de l’ascenseur, lamine exténuée.

— Tout va bien, il dort, annonça-t-elle aussitôt. Mais je viens de me souvenir de MlleHill. Elle avait l’air si fatiguée que je l’ai laissée dormir. Je n’ai pas eu l’occasion devous en avertir, monsieur Goodwin. Et quand vous et Mlle Spencer, dit-elle endésignant Cathy, avez décidé de monter ici, j’ai pensé que je devais intervenir…

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Le lendemain à 11 heures, Alexandra attendait, rongée de nervosité, devant la portedu bureau de Max Goodwin.

La veille, c’était Margaret qui lui avait appelé un taxi. Une Margaret très perturbéequi avait même perdu de sa légendaire discrétion pour fulminer à voix basse :

— Comment a-t-elle osé venir avec le petit ? Je n’arrivais pas à le croire ! Et il neveut pas se séparer de Nemo.

En prononçant ces derniers mots, la brave secrétaire avait une expression emplie dedésarroi et d’appréhension.

Bien sûr, Alexandra s’était abstenue de demander des explications. Les événements

de la veille avaient été suffisamment dramatiques. Mais le fait que le petit garçonne veuille pas être séparé de son poisson rouge était-il si grave ? Pour le reste, oudu moins ce qu’elle en avait saisi, Alexandra partageait le sentiment de Margaret.Comment une mère pouvait-elle agir ainsi ?

Elle n’avait aucune idée de ce qui s’était passé après son départ, mais s’était plus oumoins attendue à recevoir un coup de téléphone ce matin, mettant fin à son contrat.Elle ne se sentait pas fautive d’avoir surpris une conversation personnelle, mais celales mettait, Max Goodwin et elle, dans une situation délicate.

Comment savoir s’il ne la blâmait pas ? Il n’avait pas dit grand-chose avant qu’elle nequitte l’appartement, mais son expression était menaçante.

Alexandra inspecta sa tenue. Elle portait un ensemble pantalon en lin marron, unchemisier de soie fauve et des chaussures à hauts talons assorties. Son badge étaitépinglé sur le revers de sa veste. Ses cheveux étaient soigneusement coiffés, carelle avait profité de l’offre de M. Roger de se faire recoiffer avant chaqueréception et, comme Mary, l’esthéticienne, était disponible, Alexandra s’était aussifait maquiller.

La séance avait été relaxante, et elle avait vraiment bien besoin de se détendre,pensa-t-elle. Elle avait eu du mal à s’endormir et il lui avait été difficile de chasserde son esprit le souvenir du ravissant visage de Cathy Spencer…

La jeune femme devait avoir à peine trente ans. Ses longs cheveux noirs encadraientun visage en forme de cœur, ses yeux bleus étaient plus clairs que ceux de Max

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Goodwin, avec de longs cils recourbés, et sa bouche pulpeuse et provocante. Jamaison n’aurait pensé qu’elle était mère, tant sa taille était fine.

Ce qui frappait le plus chez elle, ce qu’aucune description n’aurait su rendre, c’étaitla passion, la force vive qui animait cette femme.

Décidément, cette journée avait été riche en émotions. Pas étonnant qu’elle n’eûtpas trouvé le sommeil, pensa Alexandra.

Le charme et la sensualité dévastatrice de Max Goodwin l’avaient frappée de pleinfouet dans le salon vert. Elle avait été à deux doigts de penser qu’il était fasciné parelle…

Comment pourrait-elle y croire maintenant ? Aucune femme ne pouvait concurrencerCathy Spencer, même si la relation qu’elle entretenait avec Max mêlait amour ethaine. De plus, elle était la mère de son fils.

Alexandra revint brusquement à la réalité, au moment où la porte du sanctuaires’ouvrait. Max Goodwin apparut, accompagné d’un petit garçon.

Alexandra resta médusée : on ne pouvait douter de l’identité du père. Le gamin avaitles mêmes cheveux très noirs, les yeux d’un bleu profond. Déjà grand pour son âge, ilportait un pantalon et un pull bleu. Il tenait une laisse attachée au cou d’une boulede poils grise, tachetée de noir : un chiot bouvier australien qui ne devait pas avoir

plus de trois ou quatre mois.

L’animal dressa les oreilles, s’avança vers Alexandra et se mit à aboyer.

— Nemo, appela l’enfant. Arrête ! C’est très impoli.

Ainsi, c’était Nemo, pensa la jeune femme avec un petit rire intérieur. Une créatureremuante et pleine de malice, à n’en pas douter, pas étonnant que Margaret eût l’airsi anxieuse.

— Ravie de te connaître, Nemo, dit-elle en se penchant vers le chien. Je dois direque tu ne ressembles pas du tout au poisson-clown dont j’ai entendu parler.

Elle caressa l’animal et fut récompensée par plusieurs coups de langue frénétiques.Alexandra félicita le jeune maître. Son chien était adorable, lui dit-elle.

— Il n’a jamais ressemblé à un poisson-clown, expliqua le garçon. Je voulaisseulement qu’il ait un nom original. Enchanté, je m’appelle Nicholas. Vous êtes ma

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nouvelle nourrice?

Alexandra leva les yeux vers Max Goodwin qui n’avait pas encore dit un mot, absorbépar la scène entre le petit garçon, le chien et Alexandra. Cette fois, cependant, ilintervint :

— Non, Nicky. C’est mon interprète. Je t’ai parlé de la réception d’aujourd’hui ?

Le petit garçon acquiesça et Max expliqua :

— Elle va venir avec nous. Je te présente Alexandra.

A cet instant, Margaret sortit de son bureau, chargée d’un panier.

— Tenez, monsieur Goodwin. Pour transporter Nemo en voiture. C’est imperméable,

au cas où…Max Goodwin la remercia.

— Alors, où est ma nouvelle nourrice ? demanda Nicky.

— Pour le moment, Mme Mills, l’employée de maison de la villa, sera très contente des’occuper de toi. Jake sera là aussi. Tu le connais déjà ?

— Oui, répondit l’enfant d’une petite voix sans timbre. Est-ce que ma maman a ditquand elle reviendrait ?

— Dès que possible, Nicky, dit Max. Je…

Mais le petit garçon ne le laissa pas terminer.

— Tu ne pourrais pas être ma nourrice, s’il te plaît, Alexandra ? Tu aimes déjà monchien et lui aussi il t’aime bien.

Une larme roula sur la joue de Nicky.

Dans le silence qui suivit, Alexandra se surprit à entretenir des pensées peucharitables pour les mères qui imposaient de telles épreuves à leurs enfants !

— Nicky, dit-elle très doucement en glissant sa main dans celle du petit garçon.J’aimerais bien, mais j’ai un travail à faire, tu comprends ? Et donc…

— Nous pourrions… combiner les deux, intervint Max. Vous avez trois jours de libresà partir de demain. Avez-vous prévu quelque chose d’important que vous ne pouvez

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annuler ?

— C'est-à-dire... Non, mais…

— Vous serait-il impossible de passer ces trois jours à Sovereign Islands avec Nicky

? Le séjour là-bas est très agréable.

Alexandra s’apprêtait à répondre, quand Max consulta sa montre.

— Nous avons juste le temps de passer chez vous pour que vous puissiez préparer unsac de voyage.

Il se tourna vers Nicky :

— Elle ne pourra pas être avec toi tout le temps, mais un peu quand même. Cela te

convient ?— Génial ! s’exclama joyeusement Nicky.

Nemo se mit à aboyer comme pour se mêler à la joie de son petit maître.

Alexandra demeura immobile, fixant Max Goodwin avec incrédulité.

— Vous n’allez pas les décevoir maintenant, mademoiselle Hill ? lui dit-il en souriant.

Alexandra fulminait intérieurement. Les mots « chantage » et « manipulation » lui

vinrent aux lèvres, mais elle se reprit à temps.— Non, convint-elle avec effort.

4.

Au large de la Gold Coast, dans le célèbre lagon du Broadwater, les SovereignIslands étaient sans doute l’une des adresses les plus prestigieuses au monde. Defabuleuses villas se dressaient le long des canaux, au sein d’un paradis de plagesblanches et de mangroves aux arbres majestueux. On se sentait bien loin desgratte-ciel et des luxueuses boutiques de Gold Coast City…, pensa Alexandra.

Le trajet durait un peu moins d’une heure. A cause de la présence de Nicky, laconversation entre elle et Max était limitée et porta essentiellement sur ledéjeuner d’affaires qui les attendait. Nemo, fort heureusement, dormit pendant la

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majeure partie du voyage.

Nicky les informa que le chiot rongeait encore les chaussures et s’oubliaitoccasionnellement, mais qu’il faisait des progrès.

Max Goodwin assimila cette information sans faire de commentaire, mais le regardqu’il lui coula donna à Alexandra une forte envie de rire, malgré son irritation.

Voilà pourquoi le petit garçon l’avait choisie comme baby-sitter, se dit Alexandra enlevant les yeux au ciel. Nemo serait une vraie calamité pour toute autre nourrice,alors qu’elle aimait les chiens.

Située au nord de l’île, la luxueuse villa Goodwin ressemblait beaucoup à une maisontoscane avec ses deux étages, son toit de tuiles rouges et ses murs ocre. Une foisfranchie la porte d’entrée flanquée de colonnes, la Bentley stoppa dans l’allée semi-circulaire et un voiturier en veste rouge vint à leur rencontre.

— Voici Stan, annonça Max.

Ils sortirent de la voiture et Max salua son employé, avant de lui remettre les clésde la Bentley.

— J’en prendrai le plus grand soin, Patron, assura celui-ci.

Il n’avait pas l’air surpris de la présence du petit garçon et Alexandra devina que le

personnel avait été mis au courant. Elle gravit les marches du perron à la suite deMax et de son fils.

Le hall d’entrée frais et sombre traversait la vaste demeure jusqu’à une belleterrasse ensoleillée. Il n’y avait encore aucun convive, et une femme donnait desinstructions à quelques serveurs. Jake Frost l’assistait autour de deux longuestables dressées si somptueusement qu’Alexandra écarquilla les yeux. Outre lemagnifique service en porcelaine, la verrerie en cristal et les couteaux à manched’ébène rehaussé d’or, des compositions de pensées et de violettes marquaient

chaque place. Une véritable œuvre d’art…

Le décor, lui aussi, était magique : la terrasse était entourée d’orangers et decitronniers en pots entre lesquels on découvrait le fabuleux panorama du lagon auxeaux étincelantes.

Un seul mot de Nicky résuma l’impression générale.

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— Woaw ! s’écria-t-il.

— Jeune homme, dit Jake, nous t’avons préparé une surprise : des hamburgers pourle déjeuner et ton DVD favori. Bonjour, mademoiselle Hill.

Au moment où Jake s’éloignait, suivi de Nicky et du chiot, le petit garçon sedétourna et agita le bras en direction d’Alexandra.

— N’oublie pas, Alexandra, tu es ma nourrice.

Jake se retourna et regarda son employeur d’un air perplexe.

— Petit changement de programme, expliqua Max. Je n’ai pas eu le temps de vousmettre au courant. Alexandra va nous aider pour Nicky. Elle restera donc quelques jours ici. Ses bagages sont dans le coffre.

Dès qu’ils eurent disparu à l’intérieur de la villa, la jeune femme se tourna vers sonemployeur mais Max la devança et prit la parole.

— J’apprécie profondément que vous ayez accepté cette nouvelle tâche pargentillesse, Alexandra.

— Vous ne m’avez pas vraiment laissé le choix, répondit-elle sèchement. Ecoutez, jecomprends votre… dilemme…

— Vous pouvez dire « ma situation familiale désastreuse ». Le terme me semble plusapproprié.

— Si vous le souhaitez, mais cela ne me regarde pas et je n’apprécie pas d’êtremanipulée… Qu’y a-t-il ? demanda-t-elle soudain en le voyant regarder quelque chosederrière elle.

— Les invités arrivent.

Max Goodwin siégeait à l’une des tables, Alexandra auprès de lui. Son vice-présidentavec M. Li pour interprète avait pris place à la seconde. Paul O’Hara était placé enface d’Alexandra et ne pouvait cacher son admiration chaque fois que son regardaccrochait celui de la jeune femme.

Le déjeuner était à la hauteur du décor. On servit du saumon aux câpres avec du

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champagne, puis du gigot. Un plateau de fromages, puis de fondantes Pavlovas auxfruits de la passion terminaient le repas.

Les discours furent brefs et, ceux-ci terminés, Alexandra traduisit lesconversations. Elle trébucha légèrement au début, déstabilisée par les événementsde ces derniers jours.

Quand les invités prirent congé, elle se rangea juste derrière Max, qui saluaitchacun d’eux. Le dernier convive étranger parti, il ne restait plus que Paul O’Hara etAlexandra se détourna avec le sentiment d’avoir accompli sa mission. Un peu tropvivement sans doute, car elle perdit l’équilibre sur ses hauts talons et se tordit lacheville. Elle poussa un cri.

Max la rattrapa immédiatement et la souleva dans ses bras.

— Nous parlerons plus tard, Paul, lança-t-il par-dessus son épaule.

— Vraiment, ce n’est pas nécessaire…, protesta Alexandra.

— Laissez-moi faire, lui conseilla-t-il, l’emmenant dans un salon confortable enchintz rose, dont les persiennes étaient baissées.

Il y régnait une fraîcheur bienfaisante et un parfum de roses embaumait l’air. Maxla déposa dans un fauteuil. Ôtant sa veste, il prit place sur un tabouret et, soulevantdoucement la cheville de la jeune femme, retira l’escarpin avec d’infiniesprécautions.

— C’est douloureux ?

— Cela ira, répondit Alexandra en serrant les dents.

— Alexandra, je vous dois des explications. J’avoue que depuis hier je suiscomplètement perturbé… Pouvez-vous ôter votre bas ? demanda-t-il sans transition.A moins que vous ne portiez un collant ?

— Non, je peux le retirer.

Il haussa un sourcil surpris.

— Vous ne me semblez pas du genre à porter un porte-jarretelles.

— Et vous avez entièrement raison, répondit Alexandra d’un ton de défi. Je porte

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des mi-bas qui s’arrêtent au-dessus du genou !

— Ah ! C’est sûrement très pratique, mais…

— Pas terriblement séduisant ? termina-t-elle en relevant la jambe de son pantalon

pour faire glisser son bas. Aïe!

— Laissez-moi faire.

Adroitement, Max libéra sa cheville meurtrie. Alexandra soupira, ses doigts virilsétaient frais sur sa peau. Ils entamaient un délicat massage et leur mouvement avaitquelque chose de fascinant, songea-t-elle, sentant la douleur s’atténuer.

Peu à peu, elle se trouva aux prises avec un sentiment d’irréalité totale. Elle étaitirritée par cet homme dont elle supportait mal l’extrême arrogance, mais les soins

qu’il lui prodiguait induisaient une sorte de charme, il n’était pas difficile d’imaginerses longs doigts explorant son corps, y insufflant une sensualité torride. A cettepensée, un long frisson se propagea dans son corps.

Refusant de s’attarder sur cette réaction perturbante, elle demanda :

— Pourquoi perturbé ? Vous étiez au courant pour Nicky depuis un mois… Je suisdésolée, mais je n’ai pas pu m’empêcher d’entendre votre conversation et…

Elle se tut brusquement. Elle ne pouvait quand même pas ajouter que tout le monde

ou presque était au courant !

Max prit un air grave et Alexandra pensa qu’il ne répondrait pas.

— Je ne voulais pas le croire au début, admit-t-il enfin. Je n’avais pas revu Cathydepuis plus de six ans. Elle était partie vivre à l’autre bout du pays, à Perth.

Il cessa de masser la cheville d’Alexandra et planta son regard bleu dans celui de la jeune femme.

— Pourtant, les résultats du test étaient incontestables. J’étais fou de colèrecontre Cathy, mais fou de joie à cette idée : un fils!… Je voulais prendre l’avionimmédiatement mais Cathy m’en a dissuadé en m’assurant que Nicky devaits’habituer à l’idée d’avoir un père. Bref, elle réclamait plus de temps alors que j’étaissur des charbons ardents !

Tout en assimilant ces informations, Alexandra songea que Cathy n’était peut-être

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pas une si mauvaise mère…

— Et… maintenant ? demanda-t-elle doucement.

— Comme je vous l’ai dit, j’ai l’impression d’avoir reçu un coup de poing en pleine

poitrine. Les premiers mots que Nicky m’a dits hier soir, c’est : « Tu es vraimentmon père ? Je ne croyais pas que j’en avais un. » Maintenant, répéta Max, les traitscrispés, je n’aurai de repos que lorsqu’il saura que j’existe réellement dans sa vie etqu’il peut compter sur moi.

Il avait prononcé ces paroles très doucement, mais Alexandra perçut sa résolutioninébranlable et en fut émue.

— Voilà pourquoi, dit Max en recommençant à masser la cheville de la jeune femme, je suis prêt à tout tenter pour que cette relation fonctionne. Et vous, Alexandra…

Il la regarda pensivement.

— Vous semblez avoir un don pour vous occuper des enfants. D’où tenez-vous cela ?

— Il y avait des jeunes pensionnaires au couvent. Ils venaient de loin et avaient lemal du pays. J’aimais les distraire, répondit-elle simplement.

— Cela vous semble si difficile de m’aider à m’occuper de Nicky ? Vous sentez-vousrabaissée par rapport à votre rôle d’interprète ?

Alexandra secoua vigoureusement la tête.

— Oh ! Non, bien sûr que non. C’est seulement votre façon de me manipuler qui m’adéplu.

— Il fallait que je réfléchisse très vite, que je prenne une décision dans l’instant,murmura-t-il. Je vous présente mes excuses.

— Je les accepte. Il y a cependant une chose qui me gêne, insista-t-elle. Il risque de

s’attacher à moi, ce ne serait pas bon pour lui.— J’en suis conscient. Mais lorsque sa grand-mère sera sortie de l’hôpital, sa mèresera de nouveau disponible et Nicky et moi aurons eu le temps de mieux nousconnaître.

Alexandra ne pouvait qu’en convenir. Doucement, elle écarta son pied.

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— Merci. Ma cheville va mieux, je pense qu’avec un sac de glace tout ira bien… Non, je ne vois aucun inconvénient à vous aider pour Nicky, du moment que vouscomprenez que je ne peux vous rendre service plus de quelques jours.

Max Goodwin la dévisagea avec attention.

— Je vous en remercie. Mais vous dites cela avec une telle conviction que je me posequelques questions.

Alexandra ébaucha un geste évasif.

— C’est seulement que la situation a pris des proportions… qui n’étaient pas prévues.

Il se leva et alla jusqu’à la fenêtre, les mains dans les poches.

— Je suppose que vous vous demandez comment cette histoire déplorable a puarriver ?

— Non, je vous assure.

Elle n’avait pas l’intention de connaître les détails de sa relation apparemmentdouloureuse avec la mère de Nicky. Malgré tout, elle risqua :

— N’y a-t-il aucune chance pour que vous et Cathy mettiez vos griefs de côté… pourle bien de Nicky ?

Il fit volte-face. Ses traits s’étaient durcis.

— Cathy a raison. Entre elle et moi, c’était le paradis ou l’enfer. Il n’y avait pas deplace pour les compromis. Il s’en est fallu de peu que je ne connaisse pas mon fils.Croyez-vous qu’il me soit facile de lui pardonner cela ?

Alexandra se leva à son tour et pesa sur son pied avec précaution. Ce n’était pas sipénible après tout.

— Si je peux me le permettre, monsieur Goodwin, là n’est pas la question. Ce qui

importe à présent est de savoir ce qui est le mieux pour votre fils. Maintenant, sivous voulez bien m’excuser, je vais aller m’occuper de lui.

Comme elle atteignait la porte, Max reprit la parole.

— Que fuyez-vous, Alexandra ?

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La question était si étrange qu’elle se détourna. Il avait mystérieusement deviné sesémotions, et elle se sentait désarçonnée.

— Qu’entendez-vous par là ?

— J’ai l’impression que vous avez hâte de sortir de cette pièce, dit-il pensivement.

— Non… Pas du tout. Tout va bien. Enfin, j’aimerais me changer et peut-être boireune tasse de thé.

Il l’étudia avec acuité. Ses cheveux clairs et bouclés encadraient avec légèreté sonvisage, son tailleur pantalon élégant et sobre lui allait à ravir. Elle tenait seschaussures à la main, une expression de crainte inscrite sur ses traits…

Eprouvait-elle du dégoût pour sa situation ? Ce ne serait pas surprenant de la part

d’une jeune fille élevée chez des religieuses. Pourtant elle était très mature, bienqu’il l’eût prise pour une adolescente au premier regard, cette maturité était sansdoute moins évidente dans le domaine de sa vie amoureuse. Avait-elle connu l’extasedans les bras d’un homme ? Ses beaux yeux avaient-ils jamais chaviré de plaisir ?

Seigneur ! Pourquoi se posait-il de telles questions ? Etait-ce la réaction instinctived’un homme normalement constitué ou ressentait-il vraiment le désir de savoir cequi faisait fonctionner cette femme ?

— Très bien, dit-il d’un ton abrupt. Je vais demander à Mme Mills de vous montrervotre chambre. Je vais emmener Nicky — et le chien ! — à la plage. Profitez-en pourvous reposer et garder votre pied allongé.

L’employée de maison mena la jeune femme dans sa chambre et lui apporta du thé etun sac de glace pour sa cheville.

La chambre d’amis était délicieuse, découvrit Alexandra. Les murs d’un jaune douxétaient percés de trois hautes fenêtres, le mobilier était de bois blond. De part etd’autre du grand lit, orné de coussins de soie pastel, s’étalait un tapis de laine et,sur la commode, trônait un vase de tulipes rose pâle. Une belle salle de bains enmarbre communiquait avec la chambre.

Une autre porte de communication menait à une chambre, où Alexandra constata quel’on avait déposé les affaires de Nicky.

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Elle prit une douche rapide, puis enfila un jean et un pull. Délaissant ses verres decontact, elle mit ses lunettes et, avec un soupir de soulagement, s’installa dans unebergère devant le panorama de la lagune. Un yacht voguait sur l’eau transparente etlisse du chenal, naviguant vers le nord. Il n’y avait pas un souffle de vent.

Elle se servit une tasse de thé et se mit à réfléchir. Comment Max Goodwin avait-ilpu deviner ainsi ses pensées ?

Car c’était la vérité : elle fuyait : la puissante attirance qu’elle ressentait pour luimenaçait de la submerger… Elle le connaissait pourtant à peine… Une partie d’elle-même semblait se moquer de ces questions et aspirait à connaître l’essence mêmede cet homme.

Ce n’était pas seulement son physique qui l’attirait, elle devait admettre qu’elle se

plaisait en sa compagnie. Le simple fait d’avoir été assise auprès de lui à table avaitété suffisant pour lui faire oublier son irritation d’avoir été manipulée. Mêmelorsqu’elle avait été occupée à traduire, elle avait savouré cette expérience et avaitadmiré sa vivacité d’esprit et son charisme indéniable. Elle n’avait d’ailleurs pas étéla seule.

Bien sûr, elle n’était pas non plus insensible à son physique : elle aimait ses longuesmains, sa façon de pencher la tête de côté en soutenant sa mâchoire quand ilréfléchissait. Pourquoi ce geste l’affectait-il au point qu’elle sentait chaque fois un

frisson lui parcourir l’échine ?Au cours de leur dernier tête-à-tête, la caresse de ses doigts virils sur sa chevilleavait suscité en elle un bouquet de sensations, une floraison de sentiments, commeautant de promesses d’un désir inouï.

Cela ne lui était jamais arrivé, se dit Alexandra. Elle n’avait jamais eu de relationvraiment sérieuse avec un homme et en était venue à douter d’elle-même, de sacapacité à éprouver des sentiments.

Elle pensa soudain à Paul O’Hara. Difficile de ne pas se sentir flattée par sonadmiration muette, d’autant qu’il s’était montré charmant et spirituel pendant ledéjeuner. Il semblait y avoir une réelle complicité entre Max et lui. Sans aller jusque-là, Alexandra se contentait de l’apprécier.

Mais il y avait eu aussi de l’inquiétude dans le regard qu’il avait posé sur elle.

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Alexandra s’immobilisa en songeant que Paul devait connaître mieux que quiconqueles liens qui avaient uni Max et Cathy.

Le couple avait cependant été séparé pendant plus de six ans et Max avait dit qu’il yavait longtemps qu’il n’avait pas pensé à elle. D’un autre côté, il ne s’était pas mariédurant ces six années. Y avait-il une femme importante dans sa vie ? Si oui, elleaurait dû être présente à ces fêtes organisées en l’honneur de la délégationchinoise…

Elle secoua la tête en soupirant. Max Goodwin n’était pas pour elle…

En dehors de ces instants fugitifs où elle avait cru percevoir quelque chose entreeux, il n’avait rien laissé paraître qui pût ressembler à cette fièvre étrange, cettesoif inextinguible qui s’emparaient d’elle en sa présence…

Alexandra ne put s’empêcher de sourire devant les métaphores qui lui venaient àl’esprit.

Elle reposa sa tasse en entendant des pas dans le couloir. Nicky et Nemo rentraientde la plage. Elle allait devoir se montrer prudente avec l’enfant maintenant, ne passe laisser prendre par les sentiments… comme avec le père !

Alexandra ne revit Max qu’au dîner.

Elle n’avait pas prévu ce tête-à-tête, mais quand elle avait averti Mme Mills qu’elleprendrait son repas avec le reste du personnel, celle-ci avait répondu que M.Goodwin avait commandé le dîner à 19 h 30 en compagnie de Mlle Hill.

Tous deux se trouvaient donc attablés sur la terrasse, dont l’auvent était baissépour les protéger de la fraîcheur du soir. Des photophores éclairaient les marchesqui descendaient vers la jetée et les lumières se reflétaient dans l’eau d’un bleuprofond. Ils savouraient un dîner raffiné. Du reste, se dit Alexandra, on ne devait

servir que des mets fins dans cette maison.

— Comment vous êtes-vous débrouillée avec Nicky ? demanda Max.

— Très bien. Nous avons dessiné et colorié. Il est doué pour les activitésartistiques. Nous avons aussi joué à quelques jeux de société et cela a duré jusqu’àl’heure de son dîner.

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Alexandra sourit soudain en expliquant :

— Il réclamait du poisson pané, au grand dam de votre employée de maison, maisfinalement, il a apprécié le poisson frais et les frites maison qu’elle lui a servis. Sonancienne nourrice, à moins que ce ne soit sa grand-mère ou sa mère, lui a inculquéune bonne hygiène de vie. A 19 heures, après avoir fait une promenade avec Nemo,Nicky s’est mis au lit sans faire d’histoire.

Après une courte pause, Alexandra ajouta :

— Il vous appelle Max.

Max Goodwin opina pensivement. Disparus les vêtements élégants. Elle avaitretrouvé son style décontracté. Plus de maquillage non plus, mais elle n’avait pasrepris son ancienne coiffure indomptable et terne. En revanche, elle s’était hâtée deremettre ses lunettes. Pourtant, sans l’épaisseur des vêtements qu’elle avait portéslors de leur premier entretien, sa taille fine était évidente et attirait le regard. Ilse surprit même à penser que c’était dommage de cacher de si belles jambes sous un jean.

— Oui, répondit-il enfin. C’est moi qui le lui ai suggéré, car c’est un peu difficile pourlui de dire Papa.

— Vous vous entendez bien, on dirait ?

— C’est fou ce qu’il me ressemble sur certains points.

— Cela n’a rien de surprenant, dit-elle en lui jetant un regard malicieux. Surlesquels?

Max regarda au loin vers le ponton qu’éclairaient les puissants photophores auxflammes orangées.

— Il ne fait pas facilement confiance, répondit-il enfin.

— Pensez-vous qu’elle… que sa mère… ?

Alexandra s’interrompit soudain et baissa les yeux.

— Qu’y a-t-il ? demanda-t-il, reportant son attention sur elle. Continuez.

— Non, rien, murmura-t-elle avant de repousser son assiette. C’était délicieux, mais

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 je me passerai de dessert, si vous le permettez.

— Pour l’amour du ciel, Alexandra ! lança-t-il en reposant son verre vide d’un gestesec.

— Ecoutez, cela ne me regarde absolument pas…

— Vous me l’avez déjà dit. Seulement, vous la remplacez pratiquement en ce momentet nous venons de passer plusieurs heures, vous et moi, côte à côte.

Alexandra leva les yeux et nota qu’il l’observait avec une étincelle d’ironie au fond deson regard bleu.

Elle prit une légère inspiration avant de risquer :

— Oh ! Très bien. Je me demandais seulement comment elle expliquait votreabsence à Nicky tout en lui disant que vous étiez un homme formidable.

— Je n’en ai pas la moindre idée.

Il soupira et ferma brièvement les yeux.

— Cathy était — elle est encore probablement — une femme chimérique. UneShéhérazade artiste-peintre capable de changer votre existence en une vie deplaisir ou de souffrance. Elle va et vient entre vous et son art, suivant sa fantaisie.

Elle est impossible à retenir, mais peut être irrésistible. Elle a dû inventer unehistoire pour Nicky. Ce qu’elle n’a peut-être pas pris en compte, c’est…

Il se tut et haussa les épaules.

— Que Nicky n’est pas aussi crédule, n’est-ce pas ? acheva Alexandra.

Un silence suivit sa déclaration, seulement troublé par le clapotis de l’eau du chenalet un bruit confus de vaisselle venant de la cuisine. Bientôt, l’arôme du café flottadans l’air.

— Vous êtes très perspicace pour une fille de vingt et un ans qui sort d’unpensionnat religieux.

Alexandra le regarda avec une lueur de dédain.

— Je ne ramènerai pas tout au fait que j’ai fréquenté un couvent, dit-elle. J’ai aussibeaucoup lu et mes parents m’ont donné une éducation saine, assez pour que je

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sache que les relations humaines sont aussi complexes qu’infinies. Si vous mepermettez de vous donner mon opinion, monsieur Goodwin, il n’est pas besoin de vouscôtoyer longtemps pour se rendre compte que votre seuil de tolérance est plutôtlimité quand vous n’obtenez pas ce que vous voulez !

— Je vous remercie, dit-il courtoisement. Vous mourriez d’envie de vous libérer,n’est-ce pas ? Bel exemple de solidarité féminine ! Vous me collez dans le rôle duméchant en dépit de votre sacro-sainte éducation !

L’employée de maison choisit ce moment pour débarrasser les plats et apporter unsaladier de fruits et le café. En attendant, Alexandra réfléchit aux paroles de Max.Non, elle ne lui donnait pas le mauvais rôle, simplement elle était persuadée qu’il yavait toujours deux versions d’une même histoire. Quant à la solidarité féminine,elle ne s’y adonnait pas systématiquement.

Refusant de s’expliquer, elle se contenta de hausser les épaules et choisit unegrappe de raisin dans le saladier.

Max se passa une main dans les cheveux d’un geste vif et impatient.

Alexandra sentit un sourire incongru trembler sur ses lèvres.

— Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle, fit Max d’une voix coupante.

— Non. C’est juste que… Vous pensez que je mourais d’envie de vous dire vos quatrevérités. Eh bien, moi, je ressens en vous un besoin urgent de crier : « Ah ! Lesfemmes. »

Il la regarda d’un air sombre, puis un semblant de sourire étira légèrement seslèvres.

— Vous avez raison.

Mais cette trace d’humour disparut aussitôt.

Posant sa serviette, Alexandra se demandait comment quitter la table sans paraîtregrossière quand Max prit la parole le premier.

— Avez-vous déjà été amoureuse ? s’enquit-il soudain en plongeant son regard dansle sien.

Alexandra écarquilla les yeux.

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— Non, répondit-elle en détournant aussitôt le regard.

Pourquoi avait-elle dit cela d’une voix si triste ? se reprocha-t-elle aussitôt.

— Ou connu un état approchant ? insista-t-il.

A contrecœur, elle releva la tête vers lui.

— Pas vraiment. Mais pourquoi tenez-vous à le savoir?

Il l’observa avec attention pendant un long moment avant de déclarer :

— Alors, vous devriez peut-être penser que même une bonne éducation ne vousprépare pas aux hauts et aux bas, et encore moins aux mystères d’une relationamoureuse.

Alexandra ne trouva rien à répondre. Finalement, ce fut Max qui se leva.

— J’ai du travail qui m’attend, mais surtout faites comme chez vous. Il y a latélévision et des livres dans la bibliothèque, si le cœur vous en dit. Bonsoir.

Là-dessus, il disparut à l’intérieur de la villa.

Restée seule, Alexandra se sentit profondément déprimée. Il s’était exprimé d’unton neutre, songea-t-elle, mais ses traits et son regard assombri avaient révélé unetension intérieure, un douloureux tumulte qu’elle imputait à… Cathy Spencer.

Le cœur serré, elle quitta à son tour la terrasse.

Réfugié dans son bureau, Max se servit un cognac, puis s’assit à sa table de travailet se mit à réfléchir à sa conversation avec Alexandra. Il repensa aux hauts et auxbas qu’il avait connus avec Cathy et aux blessures que cette relation lui avaitlaissées. Pendant les six années qui avaient suivi leur séparation, il ne s’étaitautorisé aucune liaison sérieuse, même s’il s’était dit et répété qu’il était guéri de

leur histoire.

Bizarre que la preuve lui en soit finalement fournie par une jeune fille qui nesemblait cependant pas être son genre de femme. Pourtant, en l’espace de quelques jours, elle avait réussi à percer son armure et à prendre place dans sa vie. Et dansson cœur ?

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Cela expliquerait le bonheur qu’il éprouvait à l’idée qu’elle vivait sous le même toitque lui, ainsi que le fait qu’il appréciait autant l’affection qui la liait à Nicky, ce filsqui l’avait si vite conquis. Il était bien forcé de reconnaître son impatience de dîneren tête à tête avec Alexandra, de tout apprendre sur elle. Il ne pouvait nier non plus

qu’elle le troublait physiquement.Il but une gorgée de cognac et s’adossa dans son fauteuil, les mains croisées sur lanuque. Il avait été agacé qu’elle prenne le parti de Cathy. C’était la démonstrationqu’Alexandra Hill n’était pas une femme pour lui, ou plutôt, qu’il n’était pas un hommepour elle. Cette jeune fille sortait à peine d’une jeunesse très protégée et jugeaitqu’il avait un passé plutôt sombre. Elle n’était encore jamais tombée amoureuse.Plutôt qu’un homme aussi désabusé que lui, ne méritait-elle pas un jeune homme deson âge, auprès de qui elle s’épanouirait et croquerait la vie à belles dents?

Il se rembrunit soudain.

Oh ! Pourquoi Alexandra arrivait-elle précisément maintenant, alors qu’il semblaitque la seule façon de résoudre le problème que posait Nicky soit d’épouser sa mère?

5.

Les trois jours suivants furent relativement paisibles. Max s’était rendu à Brisbane

avec Jake Frost, Alexandra et Nicky en profitèrent pour explorer les îles, sebaigner, aller jusqu’à la plage de Paradise Point et pêcher depuis le ponton. Nickyaimait aussi jouer avec Nemo dans le magnifique jardin clos qui entourait la piscine àla villa.

C’était un petit garçon comme les autres, pensa Alexandra, parfois aussi obstiné queson père.

Mme Mills avait un petit-fils du même âge que Nicky et les deux garçonss’entendaient à merveille.

Max rentrait l’après-midi vers 16 heures, mais dès que Nicky était couché, ilrepartait pour Brisbane.

Le troisième jour cependant, il arriva plus tôt et annonça à son fils qu’il passerait lanuit à la villa, et qu’Alexandra travaillerait auprès de la délégation chinoise lelendemain. Il atténua cette mauvaise nouvelle en les invitant tous deux à une

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promenade en mer.

Stan, le voiturier, amena le hors-bord le long de la jetée. Alexandra était tentée delaisser Max et Nicky partir seuls pour cette expédition, mais le petit garçon nevoulait se séparer ni de Nemo ni d’elle et elle fut obligée de les accompagner.

— C’est exactement ce que je redoutais, murmura-t-elle à Max au moment où ilsembarquaient. Qu’il s’attache à moi.

— Il est peut-être un peu nerveux, la rassura Max. Nicky, es-tu déjà monté dans unbateau ?

— Non, répondit craintivement le petit garçon. Est-ce qu’il va chavirer si je m’appuiesur le côté ?

— Non, regarde.

Max fit une démonstration et Nicky parut soulagé.

— De toute façon, nous porterons les gilets de sauvetage, déclara Max.

— Et Nemo ?

— Désolé, je n’ai pas de gilet pour chiens, dit Max en souriant. Nous attacherons salaisse à la rambarde.

Quelques minutes plus tard, l’embarcation s’éloignait à petite vitesse de la jetée. Aubout d’une demi-heure, Nicky avait lâché la main d’Alexandra qu’il serrait très fortet alla se poster à la barre auprès de Max. Celui-ci le laissa piloter et le gaminsemblait s’amuser follement.

Alexandra caressait Nemo, calme pour une fois, et contemplait le père et le fils. Elleadmirait et approuvait la méthode d’éducation que Max appliquait à Nicky. Il n’étaitni directif ni autoritaire, il préférait éveiller son intérêt. La veille, sur la plage, elleavait remarqué avec quelle admiration Nicky regardait son père, occupé à lui

apprendre à manier un cerf-volant. Nicky n’avait d’ailleurs pas été le seul à l’admirer,pensa-t-elle, mais ses raisons étaient bien différentes. La vue de ce corpsathlétique lui avait causé un délicieux frisson…

En rentrant de leur excursion en mer, Nicky tout souriant découvrit qu’une autresurprise l’attendait à la villa : un dîner-barbecue.

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Stan avait allumé le barbecue sur la pelouse et Mme Mills avait apporté lesvictuailles.

— Steak, saucisses ou fruits de mer ? dit Max au petit garçon.

— Une saucisse, sur du pain avec de la sauce tomate.

— Tu n’es pas difficile à contenter, commenta son père en souriant. Et vous,Alexandra ?

Alexandra choisit un steak et du poisson. Ils se mirent à bavarder de tout et derien, installés dans des fauteuils de jardin. Peu à peu, la nuit les enveloppait. Le ventétait tombé.

Nicky manifesta des signes de fatigue assez tôt ce soir-là, et ne protesta pas

lorsque Mme Mills proposa de l’emmener se coucher.

— Merci, c’était super, dit-il à Max.

— Le plaisir était pour moi, Nicky. Bonne nuit.

— Bonne nuit…

Le petit garçon hésita et Alexandra retint son souffle, sentant qu’il cherchait unnom à donner à Max. Finalement, il répéta :

— Bonne nuit.

Dès qu’il fut rentré à l’intérieur avec Mme Mills, Alexandra s’adressa à Max :

— Je crois qu’il n’est pas loin de vous appeler Papa.

— Il n’aura pas mis beaucoup de temps, s’étonna-t-il.

« Non, pensa Alexandra. Mais il ne m’en aura pas fallu beaucoup à moi non plus pour…»

Interrompant vivement le fil de ses pensées, elle répondit :

— C’est parce que vous lui faites une forte impression. Comment se passent vosnégociations ?

Il ébaucha un sourire teinté d’amertume.

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— Nous en sommes au stade ardu des ruses et des chausse-trappes, menés avec unepolitesse implacable, bien entendu. Demain, cette journée au golf de Sanctuary Covedevrait être une détente bienvenue.

Alexandra se demanda pourquoi il paraissait si sceptique, mais ne dit rien.

— Vous jouez au golf ? s’enquit-il.

— Oui, mon père était un excellent golfeur et m’a initiée, mais je n’ai pas pratiquédepuis des siècles.

Puis, le regardant d’un air soupçonneux :

— Je ne suis pas censée participer demain, j’espère?

— Non. Vous pourrez conduire le buggy. Seuls les hommes joueront et je vaisdétester cela.

— Dans ce cas, pourquoi… ? commença Alexandra, intriguée.

— Comme votre père, je suis un passionné. Ce que j’aime avant tout, c’est meconcentrer exclusivement sur mon jeu. Ce tournoi de golf est au programme parcequ’il a été demandé par les industriels chinois et je ne vais pas m’y soustraire.

Alexandra l’observa. Il portait une tenue décontractée et, avec ses cheveux

ébouriffés, était loin de l’image du puissant homme d’affaires. Elle pouvait aisémentl’imaginer sur un green, exécutant un swing dans un style impeccable et un puttparfait.

— Comment vous détendez-vous ? demanda Alexandra par curiosité.

— Du vin, des femmes et des chansons !

Comme Alexandra détournait les yeux, il se mit à rire.

— Mais vous êtes parfaitement en sécurité avec moi, Alexandra.

— Vous dites cela avec une telle conviction, répondit-elle, irritée.

— Je pensais que cela vous rassurerait, se défendit-il.

— Je n’ai rien contre le fait d’être rassurée, mais par pitié ne me traitez pas commesi j’étais la dernière femme désirable au monde !

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— Ce n’était pas du tout mon intention. Je vous ai même fait remarquer que laplupart des hommes vous trouvaient très attirante…

— Vous l’avez fait de façon très équivoque, si je me souviens bien, coupa-t-elle.

Max se redressa soudain.

— Ecoutez, je ne cesse de m’excuser. Qu’est-ce qu’il vous faut d’autre ?

Alexandra prit conscience qu’elle venait de se ridiculiser, voire de se trahir. Ellesentit la colère la déserter tout à coup.

— Je suis désolée, balbutia-t-elle. Mes paroles étaient peut-être ambiguës, il n’yavait rien de personnel derrière.

— Rien ?— Rien que ma vanité, concéda Alexandra.

Il sourit. Elle paraissait si jeune, si troublée et si innocente ! Elle était sans doute laseule femme dépourvue de vanité qu’il connaisse.

Quant à sa boutade « vin-femmes-chansons », elle n’aurait pu être plus éloignée dela vérité. Il s’accordait un verre le soir, de temps à autre, en écoutant un morceaude musique, et n’avait que rarement une femme dans ses bras pour lui faire oublier

le stress insensé du monde des affaires.Imaginait-il Alexandra dans ce rôle ?

Oui, elle surtout. Comme il serait émouvant de l’initier aux gestes de l’amour, de voirle désir éclore dans ses beaux yeux et d’éveiller lentement toutes les zones de soncorps au plaisir !…

Les mâchoires contractées, il se força à se concentrer sur sa dernière remarque.

— Je comprends parfaitement. Désolé, je ne savais pas que vous le prendriez ainsi.

Pour revenir à votre question, j’aime me détendre en allant à la pêche. J’ai même unendroit favori, où je me rends de temps en temps. Cela s’appelle Seisia, peu de gensle connaissent.

Alexandra, qui venait d’écouter ses excuses avec soulagement, se redressavivement.

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— Le port de Bamaga, au cap d’York ?

Max acquiesça, surpris.

— Vous connaissez cet endroit ?

— Oui, j’y ai passé des vacances avec mes parents. En plus d’être un golfeurchevronné, mon père aimait beaucoup la pêche. J’ai adoré ce séjour. Nous avonscampé, puis sommes redescendus vers Cairns en cargo. Mais…

Elle le dévisagea avec perplexité, elle avait du mal à imaginer Max Goodwin à Seisia.Qu’y avait-il dans ce lieu si rude pour attirer un homme comme lui ?

— Oh ! Je comprends, reprit-elle. Vous louez probablement un de ces bateaux depêche qui coûtent horriblement cher. A moins que vous n’en possédiez un ?

— Pas du tout. Mais vous avez raison, j’en loue un. Comment avez-vous pêché ?

— Depuis la jetée ou au bord de la plage et nous avons remonté la Jardine River.C’était si beau, si loin de tout, dit Alexandra en fermant les yeux. Je n’oublierai jamais les couleurs du crépuscule.

— Une palette de bleus, n’est-ce pas ?

Elle rouvrit les paupières.

— Oui, violet, lilas et bleu ardoise. Absolument magique!

Une toux discrète se fit entendre derrière eux. Ils se retournèrent et aperçurentPaul O’Hara.

— Salut, Max ! Mme Mills m’a dit que je te trouverais ici. Bonsoir, mademoiselle Hill.

— Paul, viens te joindre à nous, l’invita Max. Que fais-tu par ici ?

Le jeune homme prit place.

— J’ai réservé une chambre à l’hôtel Hyatt à Sanctuary Cove plutôt que de faire laroute depuis Brisbane demain matin. J’ai pensé que je pourrais passer te voir et temettre au courant des derniers développements des négociations. Je ne m’attendaispas à…

Il hésita.

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— A trouver Alexandra ici ? répliqua Max. Elle remplit une autre mission pour moi.Alors, comment cela se passe-t-il ?

Alexandra choisit ce moment pour s’éclipser.

— Si vous voulez bien m’excuser, je vais vous laisser parler affaires.

— Surtout, ne partez pas à cause de moi, mademoiselle Hill, dit Paul avec une ardeurqui lui valut un regard suspicieux de la part de son cousin.

— C’est gentil à vous, Paul, dit Alexandra qui le trouvait charmant et aurait aimébavarder avec lui en d’autres circonstances, mais j’ai un bon livre qui m’attend.Bonne soirée !

Nicky était profondément endormi, Nemo blotti contre lui. Elle laissa la veilleuseallumée sur la table de nuit.

Au passage, elle contempla une petite peinture aux couleurs vibrantes quireprésentait un rivage, avec deux oiseaux au premier plan. Le tableau était signé C.Spencer. Quand elle l’avait remarqué pour la première fois, elle avait interrogé MmeMills.

— Je l’ai récupéré dans un placard, avait expliqué la gouvernante. Je me souviens

qu’elle l’avait donné à M. Goodwin en lui disant de ne pas s’en séparer, parce qu’un jour il aurait beaucoup de valeur. Il l’avait promis en riant.

Mme Mills avait soupiré.

— Ils étaient si bien ensemble à cette époque. Peut-être ne voyais-je que le boncôté des choses. Pourtant, je ne peux m’empêcher d’espérer qu’ils reviendront l’unvers l’autre, surtout maintenant qu’il y a Nicky. C’est ce qu’ils devraient faire, à monavis.

Revenant au présent, Alexandra contempla de nouveau le petit garçon endormi. Bienqu’il ressemblât beaucoup à Max, elle retrouvait en lui certains traits de sa mère etelle eut soudain le cœur serré en l’imaginant tiraillé entre son père et sa mère.

Réfugiée dans sa chambre, elle prit une douche et se mit au lit avec son roman.Finalement, elle le trouva moins captivant qu’elle ne l’avait pensé et bientôt, sesentit gagnée par le sommeil. Pourtant, une fois sa lampe de chevet éteinte, elle fut

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incapable de fermer l’œil. Des souvenirs tristes l’assaillaient. Ceux de Seisia…

« Non, ne va pas là-bas. Reste dans le présent »…

Mais dans la villa silencieuse, rien ne vint la distraire de ses réminiscences

douloureuses. Elle se mit à respirer difficilement et bondit immédiatement hors dulit. Ses pensées devenaient chaotiques. Vite ! S’occuper, bouger, surtout ne pas selaisser piéger…

Avec des gestes saccadés, elle récupéra ses lunettes, sortit de la chambre etdescendit dans la cuisine.

Oh, mon Dieu ! Où était cet interrupteur ?

Il lui fallait absolument un sac en papier dans lequel elle pourrait souffler, mais

n’avait aucune idée de l’endroit où ils se trouvaient. De plus en plus oppressée, ellebattit l’air de ses bras, dans un effort désespéré pour recouvrer son souffle.

La lumière jaillit soudain, révélant la cuisine étincelante, et Max entra.

— Alexandra ? dit-il avec incrédulité. Qu’est-ce qui ne va pas ?

— Impossible… de respirer, haleta-t-elle. Un sac… Donnez-moi un sac en papier…

— Une crise d’asthme ? demanda-t-il vivement.

— Non. Panique…

— Une attaque de panique ? Comment… ? Peu importe.

Il la prit dans ses bras.

— Calmez-vous, Alexandra. Personne ne viendra vous faire de mal. Détendez-vous,conseilla-t-il tandis qu’elle cherchait à se libérer.

— Un sac… ! bégaya-t-elle.

— J’ignore où ils sont, si jamais il y en a, répondit-il en lui massant doucement le dos.

Alexandra tentait désespérément de remplir ses poumons d’air, sa poitrine sesoulevait et s’affaissait de façon anarchique. Le massage de Max fit cependant soneffet, tandis qu’elle prenait conscience de la chaleur et de la protection de ses brasautour d’elle. Au bout de quelques minutes, elle ferma les yeux, rassurée enfin, et

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quand elle les rouvrit, Max l’observait avec un mélange de soulagement et desurprise.

— Tout va bien ?

Elle acquiesça en s’appuyant contre lui.

— Oui, merci, murmura-t-elle.

Il la souleva dans ses bras et elle n’eut pas la force de protester.

— Nous avons tous les deux besoin d’un cognac, dit-il en se dirigeant vers labibliothèque.

Quelques minutes plus tard, installée sur le sofa, Alexandra buvait en soupirant une

gorgée de liquide ambré.— Qu’est-ce qui a provoqué cette crise ? l’interrogea-t-il doucement.

— Les souvenirs de Seisia, répondit-elle d’une voix saccadée. Ce sont les dernièresvacances que j’ai passées avec mes parents. Ils ont trouvé la mort deux semainesplus tard.

Il acquiesça gravement.

— Et vous avez toujours des crises à cause de ce deuil?

— Il y a longtemps que je n’avais pas eu ces symptômes. Je n’avais encore jamaisrencontré quelqu’un qui connaissait Seisia, c’est ce qui a tout déclenché.

Il demeura pensif, puis s’assit auprès d’elle et lui prit la main.

— Avez-vous des amis proches, Alexandra ?

— Bien sûr. Je suis allée skier avec six d’entre eux et j’ai ma voisine, Patti. Nousnous entendons très bien toutes les deux, au point que nous avons même envisagé

d’avoir un chien en commun.— Un chien en commun ? répéta-t-il, perplexe.

Alexandra expliqua en souriant.

— Elle aime les chiens, moi aussi. Elle travaille la nuit et moi le jour. Donc, cela nousa semblé une bonne idée, mais nous ne nous sommes pas encore décidées…

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Se rendant compte qu’elle babillait, elle reprit plus sérieusement :

— Ecoutez, ne vous inquiétez pas pour moi.

— Comment pourrais-je ne pas m’inquiéter pour vous ? déclara-t-il avec une pointe

d’irritation. Avez-vous consulté un médecin ?

Alexandra acquiesça avant d’ajouter sans réfléchir :

— Il y a sans doute trop de stress dans ma vie en ce moment.

— L’interprétariat?

Alexandra se mordit la lèvre. L’interprétariat n’était rien en comparaison de cequ’elle traversait à cause de lui, mais il n’était pas censé le savoir.

— Ce n’est pas aussi facile qu’il y paraît, vous savez, improvisa-t-elle faute de mieux.

— Je n’ai jamais pensé que cela l’était. Rien d’autre?

Elle secoua la tête en guise de réponse. Max la dévisageait avec attention commepour sonder sa sincérité et elle nota de nouveau la petite cicatrice qu’il portait prèsde la tempe.

— Très bien, dit-il. Finissez votre cognac. Pensez-vous que vous allez pouvoirdormir? Voulez-vous rester encore un peu ?

— Non, merci. Cela ira très bien.

— Mais rien ne presse.

Il s’empara de la télécommande et alluma la télévision.

— Voyons ce qui passe à cette heure. Un vieux film. Audrey Hepburn et Cary Grant,cela vous intéresserait?

— C’est un classique que j’adore, approuva-t-elle.

— Alors, regardons-le ensemble. Il ne nous manque que du pop-corn,malheureusement je suis sûr qu’il n’y en a pas dans la maison.

Alexandra appréciait le film… et la compagnie de Max. Elle avait vu les deux tiers de« Charade » quand les émotions de la soirée eurent raison d’elle et, incapable derester éveillée, elle s’endormit sur le sofa.

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Elle ne sut pas qu’il était resté longtemps immobile, à la regarder, après avoir glisséun oreiller sous sa nuque et l’avoir recouverte d’un plaid.

Max réfléchissait. Alexandra n’aurait pu prédire les conséquences que cesréflexions entraîneraient. Pour comble, Nicky se réveilla avec une forte fièvre lelendemain matin.

— Je pense qu’il a la varicelle, annonça-t-elle à Max en arrivant dans la salle où l’onservait le petit déjeuner.

Elle s’était déjà habillée pour passer la journée sur le green, un pantalon kaki et unpull écossais, quand Nicky s’était éveillé.

Max aussi était déjà prêt. En pantalon bleu marine et polo bleu ciel, il se versait unetasse de café.

— Quoi ? Vous êtes sûre ?

— Mme Mills a appelé le médecin. Nicky a de la température et quelques boutons quile démangent. Cela expliquerait aussi le fait qu’il se soit soudain senti si fatigué endébut de soirée hier. Il refuse que je m’éloigne de lui. Je ne sais pas comment nousallons gérer cela.

Max hocha la tête, l’air soucieux.

— Je monte le voir, dit-il. Comment vous sentez-vous, Alexandra ?

— Très bien, merci. Je m’excuse de m’être endormie sur votre canapé… une fois deplus, répondit-elle en ébauchant une moue contrite.

Max nota ses cheveux attachés et les cernes bleutés sous ses yeux, mais s’abstintde tout commentaire.

— Montons le voir ensemble, décida-t-il d’un ton abrupt.— Attendez. Avez-vous eu la varicelle ?

La question l’arrêta net.

— Impossible de me souvenir.

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— Y a-t-il un moyen de vérifier ? Votre mère pourrait sûrement vous le dire. Sinon,vous risquez de l’attraper maintenant…

Max croisa les bras et la contempla avec irritation.

— Vous avez encore beaucoup de bonnes nouvelles comme celle-là à m’annoncer,mademoiselle Hill ?

— Je suis désolée, mais mieux vaut être prévenu.

L’instant d’après, elle constata avec soulagement que ces conseils n’avaient pas étévains. Max sortait son téléphone portable de sa poche.

— Ma sœur Olivia doit savoir cela, l’informa-t-il. Ma mère est décédée l’an dernier.

— Oh ! Je suis désolée…— Merci. Livy ? Max à l’appareil…

Il raccrocha une minute plus tard.

— Vous serez contente d’apprendre que j’ai eu cette fichue maladie. Ma chère sœurs’en souvient encore ! Il paraît que j’étais impossible, tandis qu’elle était une malademodèle. Toujours la même chanson ! grommela-t-il. Avez-vous eu la varicelle ?

— Oui, répondit Alexandra avec un sourire malicieux, et il se trouve que j’étais moi

aussi une malade modèle. C’est peut-être un truc de filles ?

— Ah ! La sacro-sainte solidarité féminine ! Après vous, mademoiselle Hill.

— Merci, monsieur Goodwin, dit Alexandra, amusée, en le précédant.

Une heure plus tard, Alexandra rejoignit Max dans son bureau, ainsi qu’il le lui avaitdemandé. Nicky dormait à présent et le médecin avait confirmé le diagnostic.

La petite pièce ovale était éclairée de hautes fenêtres ; en son centre trônait unbureau en chêne ciré.

— Asseyez-vous, Alexandra. J’ai prévenu mes collaborateurs que je ne participeraipas au tournoi de golf, annonça-t-il. J’ai aussi trouvé un interprète pour vousremplacer jusqu’à la fin des négociations.

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Alexandra écarquilla les yeux, alarmée.

— Vous voulez dire… Pour toutes les autres réceptions prévues ? Mais Simon va metuer !

Comme il semblait ne pas comprendre, elle précisa :

— Mon patron à l’agence de traduction. Il était fou de joie en décrochant cettemission. Il pensait que cela nous apporterait d’autres contrats.

— Il n’y a aucune raison pour que cela change, décréta Max. L’interprète que vousavez remplacé au pied levé est guéri et prêt à reprendre le travail plus tôt queprévu. Mais… J’ai une proposition à vous faire. Venez travailler pour moi, Alexandra.

6.

Alexandra le fixa, éberluée.

— Comme nurse ? demanda-t-elle enfin.

— Non, comme assistante, rectifia Max. Ce qui consisterait surtout à garder Nickydans l’immédiat, je l’avoue, mais les négociations actuelles s’avérant fructueuses…

— Je ne comprends pas. Vous parliez d’un marchandage ardu…

Max se pencha par-dessus son bureau.

— C’est toujours le cas, Alexandra. Mais je n’aurais pas entrepris ces tractations si je n’avais été sûr de gagner.

Ses traits s’étaient durcis. Un instant, l’image de l’homme d’affaires brillant etimplacable s’imposa à l’esprit de la jeune femme.

— Une fois les pourparlers terminés, poursuivit-il, je serai amené à me rendre

souvent en Chine, de sorte qu’un interprète permanent et compétent me sera trèsutile.

— Et vous avez pensé à… moi ? s’étonna Alexandra, décontenancée.

— Bien sûr, acquiesça-t-il, amusé. Qu’y a-t-il de si surprenant?

Alexandra prit une profonde inspiration pour se ressaisir.

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— C’est que… je ne m’attendais pas à une telle proposition.

— Vous feriez partie de mon personnel et vous résideriez ici, reprit-il, surveillant saréaction tandis qu’il énonçait ses conditions. Pas seulement à cause de Nicky, j’ail’intention de travailler davantage depuis la villa.

— Mais Nicky va rentrer chez sa mère. A moins… qu’il n’y ait un changement ?risqua-t-elle.

— Justement, sa mère a téléphoné hier soir, répondit Max, les traits insondables.L’opération de la grand-mère de Nicky s’est très bien déroulée, mais Cathy a besoinde passer encore deux jours auprès d’elle. J’ai fait suspendre les pourparlers avecles Chinois jusque-là. De toute façon, mon fils passera du temps avec moi désormais.

Alexandra demeura plongée dans ses pensées.

— Pour combien de temps voulez-vous m’employer ? demanda-t-elle au bout d’unsilence.

— Pour aussi longtemps que vous désirerez rester à mon service, dit-il avant dementionner un salaire qu’Alexandra jugea extrêmement généreux.

Cependant, elle s’efforça de se concentrer sur les autres aspects de cette offreinattendue.

— Est-ce à cause de ce qui est arrivé hier soir que vous me faites cetteproposition ? demanda-t-elle sans détour.

Max se frotta le menton pensivement. Que dirait-elle s’il lui répondait parl’affirmative ? S’il lui avouait qu’il était convaincu qu’une fois revenu à une relationstrictement professionnelle, l’attirance passagère qu’il avait pour elle s’estomperait?

Le plus sage serait de couper les ponts purement et simplement, mais il ne pouvaits’y résoudre, et pas seulement à cause de Nicky. Après ce qu’il avait vu la veille ausoir, il se sentait un devoir de protection envers cette jeune femme qui souffraitd’attaques de panique et était seule au monde.

— Alexandra, je n’aimerais pas vous voir de nouveau dans l’état où vous étiez hier,biaisa-t-il, mais c’est plutôt aux avantages de ce poste que je pense. Si vous rêvezd’embrasser une carrière diplomatique, une expérience dans l’industrie minière et lecommerce international, ainsi que les contacts que vous nouerez, pourraient se

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révéler extrêmement précieux.

Evidemment, elle ne pouvait lui donner tort sur ce point. Cette expérience serait unformidable atout et lui ouvrirait beaucoup plus de portes que les traductions qu’ellefaisait pour Simon.

— Mais si j’abandonne mon travail à l’agence…, commença-t-elle, soudain saisied’inquiétude.

— J’offrirai une compensation à Wellford, dit Max.

— Vous avez dit que je ferais partie de votre personnel de maison. Quel sera monemploi du temps ?

— A peu près le même que celui de ces trois derniers jours, quand Nicky sera ici.

Sinon, vous pourrez vous absenter quand je n’aurai pas besoin de vos servicesd’interprète. La villa sera votre résidence de fonction, si vous préférez.

Alexandra se détendit quelque peu.

— En somme, c’est un emploi un peu difficile à définir, non ?

— Je ne voudrais pas rédiger l’annonce pour recruter un candidat, convint Max ensouriant. Mais dès le moment où vous avez été adoptée par Nicky…

— Mon destin a été décidé ? termina Alexandra.Max hocha la tête.

Sans prendre la peine de réfléchir davantage par peur d’être tentée de refuser,Alexandra s’entendit dire très vite :

— Ma réponse est oui.

— Bravo, jeune fille, dit Max en souriant brièvement. Reste un point à régler : quand je recevrai Nicky pour des périodes longues et que vous devrez m’accompagner, il

faudra une personne de confiance pour vous remplacer. Avez-vous quelqu’un en tête?

Alexandra se mordilla pensivement la lèvre.

— La fille de Mme Mills ? Son mari est militaire et en mission à l’étranger. Son filsBradley joue souvent avec Nicky et c’est une femme agréable, qui a le sens desresponsabilités. Mme Mills aurait ainsi moins de travail…

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— C’est bon, vous m’avez convaincu, Alexandra. Souhaitez-vous rentrer chez vousprendre quelques affaires ? Stan peut vous conduire à Brisbane.

— Maintenant ? Et Nicky ?

— Mme Mills et moi allons l’occuper pendant quelques heures.

Alexandra avait du mal à croire à ce qui lui arrivait.

— Je pars tout de suite. Merci d’avoir pensé à moi pour ce poste, monsieur Goodwin,dit-elle, émue.

— Le plaisir est pour moi, Alexandra, murmura Max.

Il la regarda sortir puis, accoudé au bureau, le menton dans une main, tâcha

d’analyser la situation.Il avait plutôt bien mené cette affaire, se félicita-t-il. Néanmoins, quelque chose letourmentait, il n’aurait su dire quoi. En fait, il se sentait différent. Etait-ce parcequ’il avait à présent des responsabilités familiales ?

Son regard tomba sur le bloc-notes où était inscrit le nom de Cathy barré d’un traitnerveux. La veille, il avait pris son appel dans le bureau, après le départ de Paul. Ilfallait qu’ils parviennent à un arrangement à l’amiable pour que Nicky reçoive lameilleure part de chacun de ses parents. Oui, c’était primordial.

Il était étonné par la profondeur des sentiments qui l’attachaient à ce petitbonhomme qu’il connaissait à peine. Dès le moment où il avait posé les yeux surNicky, qui physiquement était son reflet, il avait été ébranlé dans tout son être.

« Cet enfant qui s’efforce d’être brave dans cette épreuve est ma chair et monsang… »

Etait-ce si surprenant qu’il se sente différent ? s’interrogea Max. Il entrevoyaitaussi une quantité de problèmes à venir. Si Cathy se mariait, par exemple, comment

réagirait-il à l’idée qu’un autre homme soit impliqué dans l’éducation de son fils ?

D’un geste brusque, il arracha la feuille du bloc et la jeta à la corbeille.

Bien sûr, il existait une solution pour éviter qu’une telle situation se présente. Quelui-même épouse Cathy…

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Alexandra avait pris place à l’arrière d’une Mercedes qui roulait en direction deBrisbane. Elle et Stan avaient bavardé quelque temps, mais celui-ci se concentrait àprésent sur sa conduite et elle s’abîma dans ses pensées.

Cette attaque de panique lui donnait à réfléchir. C’était arrivé parce qu’elle nemaîtrisait plus le cours de sa vie. Elle s’était plu à croire qu’elle était tombéeamoureuse de Max Goodwin et ses sentiments l’avaient rendue malheureuse.Certains souvenirs aussi…

D’habitude, elle savait comment contrer ses émotions : « Pense à l’avenir, ne regarde jamais en arrière. Donne-toi des buts », lui avait conseillé la mère Supérieure aucouvent. Son précepte s’était révélé utile.

Jusqu’ici, elle n’avait pas eu de véritables buts dans la vie. Travailler pour SimonWellford n’avait pas représenté un défi suffisant. Ce matin, elle venait de saisir sachance. C’était la réponse parfaite à sa résolution de mener sa vie différemment, derelever des défis… Si seulement elle ne devait pas cette chance à Max Goodwin.

Il lui serait impossible de se tenir physiquement à distance de lui maintenant. Ce quine voulait pas dire qu’elle ne pouvait pas se soustraire mentalement à sa présence,du moins, pourrait-elle essayer, se dit-elle avec ironie.

N’était-ce pas en soi un autre défi ? Cela ne servait à rien de désirer un homme quine pouvait lui appartenir, un homme qui devait faire sa vie avec la mère de son fils.Mieux valait oublier ce rêve, c’était juste une question de volonté…

Elle regarda par la vitre. La circulation était dense sur l’autoroute du Pacifique. Leciel s’était couvert.

En arrivant, elle se rendit directement chez Patti qui, heureusement, se trouvaitchez elle. Alexandra lui demanda d’arroser ses plantes et de relever son courrier enson absence puis, de retour chez elle, elle commença à faire ses bagages.Vêtements, livres, CD favoris…

Un instant, son regard se perdit dans le vague. L’assistante de Max Goodwin… C’étaità peine croyable ! Elle avait l’impression de vivre un rêve, mais…

« Pas de mais, Alexandra Hill ! s’intima-t-elle en se ressaisissant. Tâche det’accommoder de la situation ! »

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Sur le chemin du retour, elle demanda à Stan de s’arrêter devant un grand magasin,et fit quelques achats.

Quand elle rentra à Sovereign Islands, son employeur et Mme Mills la gratifièrentd’un sourire chaleureux. Mais ce n’était rien en comparaison de l’accueil que Nicky luiréserva : il se jeta dans ses bras et même Nemo lui fit fête.

— Oh, là là ! Assez, dit-elle en riant. Nicky, je t’ai apporté quelques surprises : unpuzzle, de la pâte à modeler et un livre sur les bateaux. Par quoi allons-nouscommencer ? Ah ! J’oubliais. Voici un os en caoutchouc pour Nemo.

— Nicky a été sage ? demanda-t-elle un peu plus tard, tandis qu’elle et Maxprenaient un déjeuner tardif.

Max soupira.

— Il était surtout perdu, et triste, répondit-il. Visiblement, je ne suis pas à lahauteur.

— Il est malade, avança Alexandra avec bon sens. Et Rome ne s’est pas faite en un jour.

— Une nouvelle leçon de sagesse ? dit-il sur le ton de la dérision, décidément, vousn’êtes jamais à court.

— Je sais, répondit joyeusement Alexandra.

— Plus sérieusement, reprit Max. Comment se fait-il que Nicky vous ait adoptéeaussi vite ?

— Je pense qu’il n’est pas habitué aux hommes s’il vit avec sa mère et sa grand-mère. Ne vous inquiétez pas, cela viendra, il faut juste un peu de patience.

Max l’observa sans répondre.

Elle avait l’air différente et il se demanda à quoi cela tenait. Elle avait troqué sonpull écossais pour un haut en coton et avait une trace de pâte à modeler sur lamanche. Ses cheveux étaient relevés et elle portait de nouveau ses lunettes. Elleétait jeune, pleine de vitalité, et il était difficile de retrouver en elle la jeunefemme qui avait suffoqué la nuit dernière.

— Ai-je dit quelque chose de maladroit ? s’enquit-elle à cet instant.

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— Non, pourquoi ? dit Max en mettant un terme à son examen.

— Vous me regardiez comme si… je ne sais pas, mais c’était un peu dérangeant.

— Vous m’en voyez désolé, s’excusa-t-il en prenant la cafetière. Tant que j’y pense,

Nicky et vous n’aurez pas l’occasion de me voir beaucoup ces prochains jours, enfait, probablement pas du tout. J’ai déjà pris plus de congés que je ne devais.

— Cela n’est pas grave, répondit Alexandra d’un ton serein.

Max Goodwin accusa le coup. Etait-elle obligée d’être contente de son absence ?

— Dans ce cas… Je pars maintenant, annonça-t-il assez sèchement.

— Je croyais que le tournoi de golf n’était pas terminé ? fit-elle remarquer, un peu

surprise.— J’arriverai juste à temps pour remettre le trophée, dit-il en se levant.

Son expression demeurait froide. Cette constatation poussa Alexandra àdemander :

— Je vous ai froissé ?

— Quelle raison aurais-je d’être froissé ? Nous maîtrisons parfaitement lasituation, non ?

— C’était juste une impression…

Elle s’interrompit en voyant Mme Mills entrer.

— Excusez-moi, monsieur Goodwin. Nicky est réveillé et réclame Alexandra.

— Je vais m’occuper de lui, dit Alexandra en se levant aussitôt.

Elle eut le temps de voir le visage de Max s’adoucir durant une fraction de seconde.

— Merci, murmura-t-il.

Alexandra monta l’escalier en proie à une certaine appréhension. Qu’est-ce quirendait Max Goodwin aussi soucieux ? Quelque chose qu’elle avait dit et qui avait étémal interprété ? Bah, les états d’âme de son employeur ne la concernaient nullement.

Elle ouvrit la porte de la chambre de Nicky.

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Quelques minutes plus tard, Max engagea la Bentley sur le pont qui reliait SovereignIslands au continent et prit la direction de Sanctuary Cove. Pourquoi diable était-ilirrité ? s’interrogea-t-il en conduisant. N’avait-il pas la situation complètement enmain ?

Non, sans doute, puisqu’il ne parvenait pas à chasser ce désenchantement quil’accablait.

Son personnel en fit bientôt les frais.

Les jours qui suivirent ne furent pas particulièrement faciles pour Alexandra.

Soigner Nicky et l’occuper requéraient une bonne dose de patience et d’ingéniosité,mais au moins, l’activité l’empêchait de trop penser.

Peta, la mère de Bradley, avait accepté avec joie de la remplacer auprès de Nickyquand ce serait nécessaire, de ce côté-là, au moins, tout s’arrangeait. Le retour deJake Frost à Sovereign Islands lui rappela que le dîner dansant qui devait clore lesnégociations se tiendrait à la villa.

La veille de l’événement, Jake la convoqua dans la cuisine avec Mme Mills et Stanpour une réunion d’information. A l’aide d’un panneau d’affichage, il passa en revueles moindres détails : entreprise de nettoyage, fleuriste, décorations, traiteur,orchestre…

Tous se mirent à sourire quand il annonça :

— Dernier point : enfant et chien.

Mme Mills prit alors la parole :

— Jake, nous interdirons l’accès à l’aile réservée aux invités. De toute façon, Nicky

est couché à 19 heures et les convives n’arrivent qu’une demi-heure plus tard.

— Et en cas de problème, je suis là, renchérit Alexandra.

— J’allais y venir, mademoiselle Hill, dit Jake. M. Goodwin a demandé à ce que vousassistiez au dîner dansant.

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— Je ne comprends pas. Il manque encore un interprète ? s’enquit-elle, surprise.

— Pas que je sache, répondit l’intendant.

— Alors, je ne veux pas…

— Mademoiselle Hill, Alexandra, si je puis me permettre, je ne crois pas que lemoment soit bien choisi pour s’opposer à M. Goodwin.

— Ce qui veut dire en clair qu’il est d’une humeur exécrable et qu’il vaut mieuxmarcher sur la pointe des pieds, intervint Stan.

Comme Jake lui jetait un regard noir, il leva les mains en signe d’apaisement.

— Attendez ! Je ne veux surtout pas créer de malentendu. M. Goodwin est un bon

employeur et je ne voudrais pas travailler pour quelqu’un d’autre. Admettezcependant qu’il lui arrive, même si c’est rare, de nous remettre en place par quelquesmots bien sentis, voire d’un seul regard.

Un silence suivit la description de Stan et Alexandra en conclut qu’elle était juste.Puis Jake s’adressa de nouveau à elle.

— Cette invitation est sûrement en rapport avec votre nouveau statut d’assistante.Du reste, c’est Margaret qui m’a prévenu. Donc, tout est déjà décidé.

— Oh ! Très bien, laissa tomber la jeune femme.— Une dernière chose, les avertit Jake. Lady Olivia McPherson sera présente, avecSir Michael naturellement.

Alexandra se souvint vaguement de ce nom et nota que Stan et Mme Mills s’étaientraidis.

— Sa sœur, n’est-ce pas ? risqua-t-elle.

— C’est exact, dit Jake. Maintenant, mettons-nous tous au travail pour que cette

soirée soit parfaite.

— Comment est-elle ? Sa sœur, je veux dire? demanda Alexandra à la gouvernanteune fois la réunion terminée.

— Eh bien… Je dirais qu’elle est exigeante, répondit prudemment Mme Mills. Oh !Une femme, très belle et pleine de tempérament, mais… Pas la personne la plus

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facile à vivre.

— On dirait qu’elle ressemble beaucoup à son frère, commenta la jeune femme ensouriant. Oh ! Comme j’aimerais ne pas assister à cette soirée ! dit-elle plussérieusement. Il y a une différence entre travailler comme interprète dans cemilieu guindé et y être invitée.

— Vous vous en sortirez très bien, Alexandra, dit la gouvernante d’un tonencourageant. En fait, vous êtes une vraie bouffée d’air frais comparée à…

La brave femme se tut et haussa les épaules.

— Comparée à quoi ? Je vous en prie, continuez.

— A certaines femmes superficielles et gâtées que nous avons pu voir ici. Bon, je

dois dresser des listes, sinon je risque d’oublier quelque chose.

Sur une impulsion, Alexandra la serra brièvement dans ses bras.

— Madame Mills, vous êtes une perle. Que ferions-nous sans vous ?

***

Le lendemain soir, à 18 heures, Alexandra monta se préparer dans sa chambre. Larobe qu’elle avait choisie était de soie noire, avec un bustier garni d’un rucher de

crêpe et une jupe longue et fendue. Un boléro ajusté complétait le tout.Elle enfila une paire d’escarpins noirs à petits talons et s’examina dans le miroir, serappelant l’enthousiasme de Margaret pour cette tenue.

Elle eut cependant l’impression qu’il lui manquait quelque chose.

Elle était satisfaite de son maquillage et de ses boucles blondes très sages, mais…Peut-être fallait-il un accessoire pour rehausser sa coiffure ? Oui, une fleur…

Mme Mills et Stan lui vinrent en aide, Stan en allant cueillir un magnifique gardénia

blanc et la gouvernante en le fixant à l’aide d’un petit peigne de nacre.

— Là, fit Mme Mills en se reculant. Vous êtes ravissante, Alexandra !

— Une vraie beauté ! renchérit Stan.

Alexandra les remercia en riant et alla voir Nicky.

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— Woaw ! s’écria le petit garçon. Comme tu es belle ! Tu es sûre que je ne peux pasaller à la fête avec toi ?

Nicky se sentait beaucoup mieux, même s’il avait toujours le visage et le corpsconstellés de taches rouges.

— Je suis désolée, Nicky, lui dit-elle affectueusement. Mais si tu as envie de voirles décorations…

Il accepta avec joie.

7.

La villa était littéralement transformée.Une fois de plus, la réception aurait lieu sur la vaste terrasse, où l’on avait installéde petites tables autour d’une piste de danse illuminée, surmontée d’un dais deguirlandes rouges. L’orchestre, formé de quatre musiciens en tenue de soirée,répétait doucement. Une cascade de lumières trouait la nuit jusqu’à la jetée.

Alexandra guidait Nicky par la main. Au bout d’un moment, ils rentrèrent dans le hallet s’assirent sur les marches de l’escalier, d’où l’on pouvait admirer le magnifiquedécor.

— On dirait un château comme dans les contes ! s’extasia Nicky. Est-ce que monpapa sera là ce soir ?

— Oui, mais je ne sais pas à quelle heure il va arriver.

Elle se détourna en entendant du bruit au-dessus de leurs têtes. Peta qui venaitd’arriver avec Brad les prévint en souriant qu’elle était prête à prendre le relais.

— Nicky, si tu as assez vu les installations, je crois que Peta a apporté un DVD pour

Brad et toi.— Génial ! lança le petit garçon en bondissant sur ses pieds. Bonne nuit, Alexandra !

Il l’embrassa et allait monter, quand il se retourna.

— Tu veux bien dire bonsoir à papa pour moi ?

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— Bien sûr, promit-elle, la gorge serrée.

Alexandra demeura un moment pensive après le départ de Nicky. Brusquement, ellesursauta en voyant Max Goodwin émerger de l’ombre et s’avancer jusqu’au piedl’escalier.

— Oh !… Je ne savais pas que vous étiez là, balbutia-t-elle.

— Je m’en doutais, dit Max en la saluant d’un signe de tête.

Alexandra retint son souffle, car elle ne l’avait encore jamais vu ainsi. Ce n’était passeulement son habit de soirée qui le rendait différent, ni même cette expressiond’impatience qu’elle lui connaissait déjà. Une dureté nouvelle avait envahi son regardet une aura menaçante émanait de lui.

Ce n’est pas le moment de s’opposer à M. Goodwin…, avait dit Jake Frost. Ausouvenir de cet avertissement, Alexandra tressaillit involontairement, et c’est avecune joie quelque peu forcée qu’elle s’exclama :

— Alors, vous avez entendu ? Il vous a appelé… Papa !

— J’ai entendu, confirma Max. C’est vous qui lui avez appris ce mot ?

— Non ! Oh, non, je vous assure. En revanche, je crois que le petit-fils de Mme Mills y est pour quelque chose. Lui non plus n’a pas souvent l’occasion de voir son père,

mais il parle beaucoup de lui. Et, d’après Brad, il est difficile à égaler puisqu’ilconduit un char d’assaut et porte un vrai pistolet !

Alexandra se tut, consciente que ses efforts pour détendre l’atmosphère étaientvains.

L’expression de Max finit pourtant par se radoucir.

— Je monte lui dire bonsoir.

Exhalant un soupir de soulagement, elle se leva pour le laisser passer. Mais comme ilarrivait à sa hauteur, elle ne put s’empêcher de demander :

— Pourquoi m’accusez-vous de l’avoir entraîné ? Il me semble vous avoir ditclairement qu’il ne fallait pas précipiter ces choses-là.

Il s’arrêta sur la marche au-dessous d’elle et leurs regards s’accrochèrent.

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Alexandra remarqua ce qui lui avait échappé jusque-là : même s’il le cachait bien,Max Goodwin était exténué.

— Exact, chère mademoiselle Hill, c’est l’un des sages conseils que vous m’avezdonnés. Mais il se trouve que je suis d’humeur exécrable, et dans ces moments-là, j’ai tendance à être cynique, méfiant, voire carrément odieux!

— C’est ce qu’on m’a dit…, laissa-t-elle échapper avant de se mordre la lèvre.

— Mon personnel ? releva-t-il. Ils ont raison.

— Est-ce à cause des négociations ? Tout est tombé à l’eau ? demanda-t-elle avecinquiétude.

— Non, c’est conclu et signé, dit-il en la regardant de la tête aux pieds.

Il nota le gardénia dans ses cheveux, ses beaux yeux noisette qui valaient tous les joyaux, son cou gracile et nacré, son décolleté, sa taille de sylphide, la jupe fenduequi découvrait sa jambe…

— Alors, pourquoi… ? commença Alexandra. Oh, non ! Ne me dites pas que je ne suispas habillée comme il faut. C’est la tenue que j’aurais portée si je travaillais,expliqua-t-elle gauchement. Ne sachant pas à quel titre je devais assister à cetteréception…

— Mademoiselle Hill, vous êtes très bien habillée.

Max prononça ces mots avec une ironie manifeste afin de dissimuler son désir de luiôter ses vêtements, un à un, dans l’intimité d’une chambre, de libérer ce corps siféminin et de lui donner du plaisir…

Il s’éclaircit la gorge.

— Considérez-vous comme invitée, même si un interprète supplémentaire ne serapas superflu. Acceptez-vous de me rendre ce service ?

— Bien sûr. Aucun problème.

— Et en ce qui concerne mon humeur, mademoiselle Hill, même si j’étais sûr d’enconnaître la raison, vous seriez la dernière personne à qui j’en parlerais.

Sans autre forme de procès, il gravit l’escalier, la laissant hébétée et blessée.

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Elle ne pouvait se douter qu’il hésita quelques minutes avant d’entrer dans lachambre de son fils, ni qu’il avait fait le trajet depuis Brisbane en compagnie de soncousin, Paul O’Hara, qui lui avait donné l’impression d’être très épris de la jeunefemme.

Paul était un garçon charmant, probablement celui qui convenait à une jeune filleayant mené jusque-là une vie protégée, se dit Max. Ils étaient presque du même âgeet, à l’inverse de lui-même, son cousin ne traînait pas d’histoire pesante dans sonpassé amoureux.

Alors, pourquoi était-il aussi irrité ?

Au dîner, Alexandra se trouva placée auprès de Sir Michael McPherson et face àl’épouse de celui-ci, Lady Olivia.

Olivia Goodwin-McPherson était bien telle que l’avait décrite Mme Mills, belle etdotée d’un tempérament bien trempé.

Prenant sa coupe de champagne d’une main ornée d’un énorme saphir cerné dediamants, elle déclara à l’adresse d’Alexandra :

— Je ne crois pas vous avoir déjà rencontrée. Etes-vous une amie de Max ?

— Non, je travaille pour lui.

Une expression de surprise polie se peignit sur les traits de Lady Olivia.

— Dans quel domaine ?

— Je suis la nurse de Nicky et, comme je parle couramment le chinois, je suiségalement l’interprète personnelle et l’assistante de M. Goodwin.

— Seigneur ! s’exclama Sir Michael. Rien que cela ?

— C’est une plaisanterie, j’imagine ? renchérit son épouse.

— Je suis très sérieuse, au contraire, répondit Alexandra, tandis qu’on servait leshuîtres.

— Mais il ne m’en a rien dit !

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— Livy, enfin ! Depuis quand Max consulte-t-il qui que ce soit ? intervint Sir Michael.Il a toujours fait ce qu’il voulait, tu le sais !

Olivia soupira.

— Reconnais qu’il aurait quand même pu me demander mon avis au sujet de Nicky.Quand je pense que je n’ai pas encore été autorisée à le rencontrer !

— Max vient seulement de faire sa connaissance, fit remarquer son mari.

— La seule chose qu’il ait à faire dans ces circonstances, c’est d’épouser Cathy.Admets qu’ils étaient extrêmement proches et…

— Olivia !

Alexandra approuva en silence cet avertissement. La conversation devenait en effettrop personnelle, même si les convives chinois à leur table ne comprenaient pas unmot d’anglais.

En observant la sœur de Max, Alexandra constata que celle-ci était en proie à uneémotion sincère. Visiblement, elle s’inquiétait pour son frère et pour son neveu.

Pour détendre l’atmosphère orageuse, elle s’inclina vers l’invité chinois assis auprèsd’elle et, avec habileté, réussit à faire participer toute la tablée. Les McPhersonpurent évoquer un voyage qu’ils avaient fait en Chine et échanger des impressions

avec les autres convives.

Les musiciens jouaient des morceaux classiques en sourdine, et le dîner fin, arrosédes meilleurs crus australiens, contribua à l’ambiance festive.

Le repas terminé, on servit de nouveau du champagne et ce fut l’heure des discourset des félicitations.

Quelqu’un qui ne le connaissait pas aurait dit de Max Goodwin qu’il était tout à fait àl’aise et charmant, pensa Alexandra en regardant Max s’acquitter de sa tâche. Elle

nota cependant que sa sœur l’observait, le front soucieux.

Une fois ces formalités achevées, l’orchestre passa à une musique plus rythmée etles couples se dirigèrent vers la piste de danse.

Alexandra décida de profiter de ce moment pour s’éclipser. Elle sentait se profilerun mal de tête, et quelques minutes de solitude dans un coin tranquille lui parurent

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une bonne idée.

Elle déboucha sur la pelouse et prit l’allée qui menait au jardin clos, mais s’arrêta neten entendant des pas derrière elle. Prenant une profonde inspiration, elle sedétourna et vit… Paul O’Hara.

Il était séduisant dans son smoking, mais son regard gris était grave.

— Je vous en prie, ne partez pas, Alexandra… Vous permettez que je vous appelleAlexandra ? déclara-t-il.

— Oui. Qu’y a-t-il, Paul ? dit-elle, se sentant soudain mal à l’aise.

— Pardonnez-moi si je vous embarrasse, mais quand je vous ai rencontrée lapremière fois, j’ai été totalement abasourdi. Jusque-là, je ne croyais pas au coup de

foudre…

Il s’arrêta, confus. Il était sincère, pensa Alexandra. Et attendrissant.

— Ecoutez, Paul. Je…

Alexandra soupira.

— Vous ne partagez pas mes sentiments ? termina-t-il. Je sais. Quand je suis passél’autre soir et que je vous ai vue avec Max…

Il haussa les épaules d’un air fataliste.

Alexandra se figea, en se rappelant l’arrivée impromptue de Paul O’Hara et ce qu’ilavait surpris à ce moment-là. Elle était émue à cause des souvenirs de Seisia, maispouvait-elle dire sincèrement qu’il n’y avait eu que cela ?

— Alexandra, déclara Paul doucement, avez-vous songé que Nicky n’est pas unenfant ordinaire ? Il est l’unique héritier d’une immense fortune, ce qui peut créertoutes sortes de problèmes. Pour sa garde, sa sécurité, sans compter les

manipulations auxquelles il pourrait être soumis…— Je vois où vous voulez en venir. La meilleure chose pour lui serait que Max etCathy se marient. Je le sais depuis le début.

— Ils formaient un couple merveilleux, confirma Paul. Mais cela ne regarde qu’eux.Je voulais seulement vous dire…

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Ses yeux gris cherchèrent à capter l’attention de la jeune femme.

— Si vous avez besoin d’un ami dévoué, je suis là.

Touchée, Alexandra se haussa sur la pointe des pieds et déposa un rapide baiser sur

la joue de Paul.

— Merci… Merci beaucoup, murmura-t-elle.

Paul tenta de lui enlacer la taille, elle s’écarta et prit la fuite le long du sentier quimenait au jardin. Quand elle y pénétra, elle respira profondément l’air de la nuit,délicieusement parfumé des senteurs de jasmin et de chèvrefeuille, et crutpercevoir de nouveau un bruit derrière elle. Quelqu’un ouvrait le portillon d’accès.Elle pivota sur ses talons, craignant que Paul ne l’eût suivie. Mais ce fut Max quiapparut.

Aussitôt, elle sentit son cœur battre la chamade. Il était si grand, si beau ! Ildégageait toujours cette aura menaçante qui le rendait inaccessible.

— Vous n’auriez pas dû fuir Paul, Alexandra.

Elle le contempla, médusée.

— Vous… Vous avez entendu ?

Max secoua la tête.— Seulement la fin de votre conversation, quand il vous offrait son amitié. Mais ilfaudrait être aveugle pour ne pas deviner qu’il aimerait vous offrir beaucoup plusque cela. C’est un jeune homme bien sous tous rapports, qu’avez-vous contre lui ?

Alexandra sentit une sourde irritation l’envahir. Max Goodwin était bien la dernièrepersonne de qui elle souhaitait recevoir des conseils sur sa vie amoureuse, si tantest qu’elle en eût une ! Etait-ce sa faute si Paul O’Hara ne la faisait pas vibrer ?

Au moment où elle ouvrait la bouche, le tumulte intérieur qu’elle endurait depuis des jours, cette vérité qu’elle dissimulait furent soudain impossibles à endiguer.

— Ce que j’ai contre lui ? Il est différent de vous !

Atterrée par ce cri du cœur, les joues en feu, elle se lança dans un flot de parolespour tenter de se justifier.

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— Je ne vais pas vous empoisonner avec mes sentiments ! Je suis parfaitementconsciente que des années-lumière nous séparent vous et moi dans… dans cedomaine.

Le regard chargé d’incrédulité, Max ne répondit pas immédiatement.

— Des années-lumière ? dit-il enfin d’une voix grave. Non, Alexandra. Ceci vousaidera peut-être à comprendre quelle femme désirable vous êtes, une fois pourtoutes et certainement pas la dernière…

Il l’enlaça et Alexandra se figea dans l’anse de ses bras. Le regard brûlant de Maxglissait le long de sa gorge vers ses seins qui se soulevaient de plus en plus vite. Ellesentit leurs pointes se dresser spontanément et un frisson voluptueux la parcourut.Elle se mit à désirer le contact du corps ferme et puissant de Max, des visions

érotiques lui traversèrent l’esprit. Ils se dénudaient lentement, Max l’abreuvait decaresses, auxquelles elle répondait amoureusement, telle une amante docile…

Elle fixa la petite cicatrice près de son sourcil gauche, elle mourait d’envie de lacaresser et, par-dessus tout, elle attendait son baiser.

N’y tenant plus, Alexandra effleura du doigt la marque qui la troublait tant. Latension électrique entre eux parut monter d’un cran. Max dut le percevoir, car sesmains se resserrèrent autour de la taille de la jeune femme, juste avant qu’il ne sepenche vers ses lèvres…

Leur baiser fut plus intense que tout ce dont Alexandra avait pu rêver. La pressionde sa bouche virile et chaude l’embrasa. La joie qui l’emplissait à sentir sous sesdoigts la magnifique carrure de Max, à goûter la douceur de ses lèvres, l’enivraitautant que la certitude d’être, entre les bras de cet homme qu’elle aimait, à unendroit unique, incomparable.

Tous les obstacles entre eux s’évanouirent, comme s’ils n’avaient jamais existé. Enmême temps naissait en elle une confiance toute neuve. Oui, elle pouvait être à la

hauteur de cette bouillante sensualité qu’il exhalait.Il se redressa brusquement et elle pensa qu’il allait prononcer quelque mot tendre etintime qui scellerait le début de leur amour.

Au lieu de quoi, il la contempla avec une expression torturée, avant de fermerbrièvement les yeux, puis doucement, écarta la jeune femme.

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— Je suis désolé, dit-il. Je n’aurais jamais dû.

Alexandra eut la sensation d’être abandonnée sur une terre glacée. Ses yeux sevoilèrent d’incompréhension.

— Oh ! Non, ne dites pas cela, je vous en prie…

Max soupira.

— Alexandra, j’ai une vie compliquée, vous le savez sans doute mieux que quiconque.C’est ce qui nous sépare, ces années-lumière dont vous parliez. Aucun hommeresponsable n’accepterait en conscience de vous faire porter un tel fardeau. Vousavez toute la vie devant vous, chère Alexandra, et quand vous aurez trouvé quelqu’unà aimer, dont vous aurez des enfants, vous n’aurez plus jamais envie de vous isolerau fond d’un parc, comme ce soir.

Elle se préparait à protester et il secoua la tête.

— Non, Alexandra. Vous aurez toujours mon affection et je n’oublierai jamais ce quevous avez fait pour Nicky. Du reste, vous êtes si jolie ce soir que je ne suiscertainement pas le seul à avoir désiré vous embrasser.

Au choc de ce rejet brutal s’ajoutait l’impact de ces paroles terribles. Des larmessilencieuses roulèrent sur les joues d’Alexandra, sans qu’elle trouvât la force de lesretenir.

Max n’eut pas le temps de la rassurer davantage cependant, car Margaret Winstonfit irruption.

— Ah ! Monsieur Goodwin, vous voilà. Je vous cherche depuis un bon moment. Oncommence à remarquer votre absence et… Alexandra ? Mon Dieu ! Qu’avez-vous ?

— Margaret, pouvez-vous prendre soin d’elle ? déclara Max. Alexandra… a besoind’aide. J’y vais.

S’adressant à la jeune femme, il ajouta très bas :

— Surtout, ne prenez aucune décision. Je vais tout arranger. Bonne nuit, chèreAlexandra.

Là-dessus, il s’éloigna à grands pas.

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Au matin, la villa avait presque retrouvé son aspect normal. L’équipe de nettoyagecommandée par Jake était à pied d’œuvre depuis l’aube.

Alexandra prenait le thé dans le parc, en compagnie de Margaret. Nicky et Bradconstruisaient une cabane avec l’aide de Stan et ne semblaient pas avoir besoind’elle.

— Alexandra, comment vous sentez-vous ?

C’était la centième fois au moins que Margaret lui posait cette question. Réprimantun léger soupir, Alexandra répondit une fois de plus :

— Très bien, je vous assure. Je ne sais pas ce qui m’a pris hier soir, mais c’est passé.

Ne vous sentez pas coupable de rentrer à Brisbane. Je suis sûre que M. Goodwin aplus besoin de vous que moi.

— C'est-à-dire... Il y a encore des détails à régler, dit la secrétaire en hésitant. M.Goodwin tient à accompagner lui-même la délégation à l’aéroport cet après-midi etdeux conférences de presse sont prévues demain.

Elle se leva, mais hésita de nouveau.

— Vraiment, vous en êtes sûre ?

Alexandra se leva à son tour et l’embrassa sur les deux joues.

— Merci. Vous avez été si gentille.

Restée seule, Alexandra repensa à la nuit dernière. Margaret l’avait raccompagnée jusqu’à sa chambre et lui avait apporté une tasse de chocolat. Après s’être assuréequ’il ne s’agissait pas d’un problème de santé, la secrétaire n’avait pas cherché à ensavoir davantage.

Elle avait probablement deviné, se dit Alexandra. Aucune femme ne s’y tromperait :elle venait d’être embrassée et était en larmes !

Elle avait pourtant réussi ce matin à cacher à Margaret qu’elle était encore sous lechoc. Jamais elle ne pourrait oublier ce baiser. Rien qu’à cette évocation, son poulss’affolait et elle retrouvait les sensations physiques qu’elle avait éprouvées, ainsique cette joie inouïe, inédite…

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Avant le terrible plongeon au fond du gouffre.

Qu’allait-elle faire maintenant ? Il avait dit qu’il se chargeait de « tout arranger »,mais n’avait-elle pas intérêt à prendre elle-même les choses en main ?

Devait-elle rester et réprimer ses sentiments ? Ne garder que le plaisir d’êtreauprès de lui et lui permettre de recevoir Nicky ? Non, c’était s’exposer à lasouffrance. Max désirait-il toujours sa présence maintenant qu’il l’avait avertiequ’une relation entre eux était inconcevable ? Sans doute pas.

Mais comment partir ? Elle ne pouvait pas abandonner Nicky.

— Alexandra, appela Mme Mills en secouant la jeune femme très tôt le lendemain

matin. Mlle Spencer est ici et j’ai peur qu’elle ne veuille emmener Nicky. Stan essayede joindre M. Goodwin à Brisbane, mais personne n’a réussi à le trouver pour lemoment. Voulez-vous descendre lui parler ?

Alexandra se redressa en sursaut.

— Répétez-moi cela ! balbutia-t-elle, incrédule. Non, j’ai compris, mais… Que vais-jelui dire ? Si elle a décidé d’emmener son fils, de quel droit pourrions-nous l’enempêcher ?

— Vous ne croyez pas que, pour le bien de Nicky, il faut que Mlle Spencer et M.Goodwin en parlent d’abord ? Nicky devrait au moins pouvoir dire au revoir à sonpère… Le petit dort toujours. Vous êtes l’assistante de M. Goodwin, n’est-ce pas ? lapressa anxieusement la gouvernante.

— C’est juste.

— J’ai introduit Mlle Spencer dans le salon rose et je redescends lui offrir du café.Je vous en prie, Alexandra, c’est une situation si délicate pour moi.

Alexandra repoussa les couvertures.

— Le temps de prendre une douche et j’arrive.

Au moment où Alexandra pénétra dans le salon rose, Cathy Spencer se détourna de

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la fenêtre. Les yeux plissés, elle regarda le jean, le pull vert et les cheveux mouillésd’Alexandra.

— L’assistante, d’après Mme Mills ! commenta-t-elle d’un ton acide. J’aurais dû medouter que votre statut était… beaucoup plus personnel. Vous êtes Mlle… Hill, n’est-ce pas ?

Malgré ces paroles méprisantes, Alexandra remarqua que Cathy Spencer étaitdifférente de la jeune femme qu’elle avait rencontrée dans l’appartement de MaxGoodwin, à Brisbane. Il lui manquait la sophistication, ainsi que la passion qui l’avaitanimée alors. Elle paraissait fatiguée, tendue, et était habillée de vêtementssombres. Ses longs cheveux bruns étaient simplement noués sur sa nuque.

— Mademoiselle Spencer, ce n’est pas du tout une affaire personnelle comme vous

semblez le croire, répondit Alexandra. Il se trouve que Nicky s’est tout de suiteattaché à moi après que vous l’avez laissé à un père qu’il n’avait jamais vu. Tout estparti de là.

Au grand étonnement d’Alexandra, Cathy se cacha le visage dans ses mains,visiblement bouleversée.

— Oh !… Je ne voulais pas vous faire pleurer. Je suis désolée, s’empressa de direAlexandra, décontenancée.

Jetant un regard autour d’elle, elle remarqua le plateau que Mme Mills avait apporté.

— Venez prendre un café, l’invita-t-elle.

Cathy releva la tête et s’essuya les yeux.

— Excusez-moi, déclara-t-elle d’une voix tremblante. Mais la raison pour laquelle jesuis ici, c’est que… ma mère est morte hier.

— Oh, mon Dieu ! s’exclama Alexandra, horrifiée. J’avais cru comprendre quel’opération avait totalement réussi ! Asseyez-vous, je vous prie.

La jeune femme accepta et Alexandra lui servit une tasse de café.

— Oui, tout s’était bien déroulé d’abord. Mais elle a eu un infarctus que les médecinsn’avaient absolument pas prévu.

— Je sais ce que vous devez ressentir et je suis profondément désolée.

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— Merci. Nicky l’aimait tendrement lui aussi et elle s’occupait tellement bien de lui.Mieux que moi, en fait. Je regrette de ne pas lui avoir assez dit combien je l’aimais.En même temps, je n’arrête pas de me demander si elle n’a pas eu une sorte depressentiment. Elle a tant insisté pour que je contacte Max au sujet de Nicky… Elle

me le répétait sans cesse, mais je n’aime pas qu’on me dicte ma conduite. Il y a unmois environ, elle m’a menacée de le lui dire elle-même, si je ne me décidais pas.C’est ce qui me fait penser qu’elle sentait qu’il lui arriverait malheur. Finalement, j’aiaccepté de parler à Max, et personne, absolument personne, ne peut comprendre àquel point cela m’a coûté. Je me demandais comment Max et moi réagirions une foismis en présence, ce que Nicky éprouverait…

Sa voix se brisa et elle ferma brièvement les yeux.

— Comment Max et Nicky s’entendent-ils ? demanda-t-elle enfin.

— De mieux en mieux, lui assura Alexandra.

Cathy but son café à petites gorgées, puis reposa sa tasse d’un geste décidé.Alexandra retint son souffle, s’attendant à devoir la dissuader d’emmener son fils,mais Cathy la surprit.

— Savez-vous comment je me suis retrouvée dans cette situation ?… D’abord, quelest votre prénom ?

Alexandra le lui dit et Cathy continua :

— Alexandra, donc, j’ai absolument besoin de parler à quelqu’un, de fairecomprendre que je ne suis pas la femme sans cœur que l’on décrit. Honnêtement, jene savais pas que mon enfant était celui de Max !

Alexandra sentit qu’elle aurait à entendre toute l’histoire, qu’elle le voulût ou non, etne put s’empêcher de penser aux remarques de Max au sujet de son ex-maîtresse.Une femme chimérique, impossible à vivre…

— C’était vers la fin de notre relation, évoqua Cathy. Nous ne communiquions plusqu’en nous disputant. Max voulait que l’on se marie. Il désirait une épouseconformiste qui illuminerait son foyer, qui serait toujours disponible et ferait cequ’on attendait d’elle en toutes circonstances. Mais je ne suis pas ce genre defemme. Je suis un esprit libre et je n’avais aucune envie d’être happée par lamachine que représente l’empire Goodwin. Après une soirée orageuse, je suis partie

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et suis tombée dans les bras d’un ami. Nous avons vécu une aventure de deuxsemaines. Je ne savais plus trop où j’en étais… Puis je me suis rendu compte que j’étais enceinte. Mon… ami pouvait être le père de l’enfant, mais je n’ai pas pensé quece pouvait être Max ! J’avais arrêté de prendre la pilule alors que nous étions encore

ensemble, parce qu’elle me rendait malade, mais j’étais persuadée qu’il fallait laisserpasser un peu de temps avant de pouvoir concevoir. Je n’ai pas réalisé que mon cycleétait devenu irrégulier.

— Mais… votre ami ? commença Alexandra sans oser poursuivre.

— Il n’a jamais su que j’étais enceinte. Oh ! Il était charmant et m’a aidée à recollerles morceaux de ma vie, mais j’avais autant envie de me lier à lui que d’épouser cetempire ! dit-elle en embrassant d’un geste éloquent la villa. Je n’ai pas eu le cœurd’avorter, parce que je crois trop à la vie pour la supprimer, et parce que ce bébé

que j’attendais était une partie de moi. Le sort a voulu que Nicky devienne un Maxen miniature !

— Il vous ressemble aussi beaucoup sur un point. Il adore dessiner et peindre. Jen’ai jamais vu un enfant de six ans développer de tels dons.

Les beaux yeux bleus de Cathy Spencer se mirent à briller.

Alexandra reprit :

— Quand avez-vous su qui était son père ?

Le regard de son interlocutrice s’assombrit.

— A sa naissance, Nicky ressemblait à mon père, que je n’ai pas connu, car il estmort avant ma naissance. Puis, j’ai trouvé qu’il tenait de moi. Il avait les cheveuxbruns, les yeux bleus, ce qui ne désignait pas nécessairement Max comme songéniteur. Mais en grandissant, il ressemblait de plus en plus à Max.

— Pourquoi n’avez-vous pas averti M. Goodwin à ce moment-là ? risqua Alexandra.

Cathy se tordit nerveusement les mains.

— J’avais le sentiment que ce serait donner à Max un moyen de contrôler ma vie.Mais ce n’est pas la seule raison. J’aime mon fils et je pensais que le mieux pour luiétait que je l’élève seule plutôt que de lui imposer… un père et une mère qui…

Elle esquissa un geste éloquent.

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Un long silence s’ensuivit.

Que répondre à cela ? se demanda Alexandra. Ou plutôt, que répondrait-elle, si ellen’avait pas elle-même des rapports aussi compliqués avec Max Goodwin ?

La seule pensée qui lui vint à l’esprit fut qu’elle n’avait pas sa place dans cettehistoire. Si Max avait ressenti quelque chose pour elle, ce n’était qu’une émotiontrès brève. Comment l’étincelle s’était-elle produite, à supposer qu’elle ait jamaisexisté ? Alexandra s’était glissée dans sa vie en même temps que Nicky, il avaitmanifesté de l’inquiétude pour elle.

Comment pourrait-il y avoir plus que de la gratitude ou de l’affection de sa part ?Elle n’était qu’une figurante dans ce scénario dramatique et, si elle avait un peu debon sens, elle cesserait même de jouer ce rôle, se dit-elle.

Il n’y avait qu’une réponse possible à la question implicite de Cathy Spencer.

— Vous vous rendrez compte que M. Goodwin a aussi à cœur les intérêts de Nicky.Et… Pardonnez-moi d’être si directe, mais si deux personnes ne peuvent trouver unterrain d’entente pour que l’enfant qu’ils ont eu ensemble soit heureux, aimé et qu’ilait une vie stable, alors ces deux êtres sont de purs égoïstes !

8.

Cathy était encore médusée par ces paroles quand Mme Mills entra, un téléphone àla main.

— M. Goodwin souhaite vous parler, mademoiselle Spencer, dit-elle en lui tendantl’appareil.

— Nous allons vous laisser seule, dit Alexandra en se levant.

— Merci, répondit Cathy d’un air absent, avant de porter le téléphone à son oreille.

— Max ?

Alexandra n’entendit pas la suite.

— Où était-il ? demanda-t-elle à Mme Mills quand elles se retrouvèrent dans lacuisine.

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— Il faisait son jogging. Il n’avait prévenu personne et n’avait pas pris sontéléphone. Veut-elle emmener Nicky ? s’enquit la gouvernante avec anxiété.

— Je ne le pense pas, déclara prudemment la jeune femme. A mon avis, elle ne veutque son bien. Elle vient de perdre sa mère et elle est très fragile.

Mme Mills laissa échapper un soupir douloureux.

— Ils formaient un si beau couple… S’ils veulent vraiment ce qui est le mieux pourNicky, peut-être vont-ils régulariser la situation. C’est ce qu’ils devraient faire entout cas.

« Si j’entends cela encore une fois, je vais hurler ! » songea Alexandra. S’ils étaientsi bien ensemble, comment en étaient-ils arrivés à un tel gâchis ? Et quelles chancesun mariage avait-il d’y survivre ?

Immédiatement, elle se reprit. Bien sûr que c’était ce qu’ils devaient faire. Etait-cetrop leur demander de renouer pour le bien de Nicky ? Ils avaient changé l’un etl’autre en l’espace de six ans et…

— Alexandra ?

Elle se détourna et vit Cathy sur le seuil de la cuisine lui tendre le téléphone.

— Max veut vous parler.

Décidément, rien ne lui serait épargné, songea douloureusement Alexandra.

— Allô ? balbutia-t-elle, l’esprit en déroute.

— Alexandra ? Comment allez-vous ?

— Bien. Merci.

— Cathy va rester quelques jours à la villa, pour que nous puissions mettre cartessur table, elle et moi, annonça-t-il. Je serai là dans l’après-midi et…

— Monsieur Goodwin, coupa-t-elle, puis-je rentrer chez moi ? Vous n’avez pas besoinde mes services pour Nicky et j’aimerais vraiment… avoir un peu de temps libre.

Il parut hésiter.

— D’accord. Passez-moi Mme Mills pour que je puisse organiser cela. Je vous

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tiendrai au courant et… Alexandra ?

— Oui ?

— Merci pour tout.

— Oh !… De rien, répondit-elle avant de mettre le téléphone dans les mains de lagouvernante.

***

Ce fut un chauffeur de Goodwin Minerals qui la conduisit à Brisbane. Max avait-ilordonné à Stan de rester à la villa de crainte que Cathy ne prenne la fuite avecNicky ?

Quoi qu’il en soit, il avait envoyé un autre de ses employés. Après avoir échangéquelques politesses avec ce dernier, Alexandra retourna à ses pensées, tandis que lavoiture filait sur l’autoroute en direction du nord, sous un ciel couvert.

Son esprit était étrangement paralysé. Elle était capable de penser à Nicky et à samère qui avaient agité la main au moment où elle partait, à l’adieu ému de Mme Millsqui avait murmuré : Vous êtes si bonne, Alexandra…

En revanche, elle ne pouvait orienter ses pensées sur elle-même, ni sur ce qu’elleallait faire maintenant. Dans cet état d’esprit, elle ne s’aperçut pas immédiatement

qu’elle était arrivée.

— C’est bien l’adresse, madame ? demanda le chauffeur.

— Oui… Merci beaucoup.

Il lui ouvrit la portière.

— Voulez-vous que je rentre vos bagages à l’intérieur?

— Jusqu’à la porte d’entrée, merci.

Dix minutes plus tard, Alexandra était assise sur le banc devant sa maison, lecontenu de son sac éparpillé auprès d’elle. Impossible de retrouver sa clé ! Elle avaitsoulevé tous les pots de fleurs, sans résultat. Pour comble, Patti qui avait un doublede sa clé n’était pas chez elle !

Encore heureux qu’il ne pleuve pas ! pensa-t-elle, irritée. Mais le ciel était de plus en

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plus sombre.

La frustration et les émotions intenses qu’elle avait accumulées ces dernièresheures eurent raison d’elle et elle se laissa aller à pleurer.

Elle ne remarqua pas la Bentley bleu marine qui vint se garer le long du trottoir. Cene fut que quand Max Goodwin s’arrêta devant elle qu’Alexandra se rendit comptequ’elle n’était pas seule.

Levant les yeux, elle s’exclama :

— Monsieur Goodwin ? Que faites-vous ici ?

Se levant d’un bond, elle se mit à parler à toute vitesse.

— Vous n’allez pas me croire, mais finalement cela ne vous étonnera pas… Je netrouve pas ma clé et ma voisine est sortie.

Max mit la main dans la poche de sa veste et en retira son téléphone portable. Ilcomposa un numéro.

— Margaret, dit-il, j’ai besoin d’un serrurier immédiatement.

Il donna l’adresse de Spring Hill et, après avoir remercié sa secrétaire, coupa lacommunication.

— Merci…, bégaya Alexandra. Mais je ne comprends toujours pas ce que vous faitesici.

Il la couva du regard, notant le jean délavé, la veste de velours clair et la belleécharpe à motifs cachemire. Elle n’était pas maquillée, mais ses cheveux, libres etrebelles, avaient un charme fou. N’importe quel homme aurait eu envie d’y enfouirles doigts et de les caresser.

— Nous devons parler, Alexandra, répondit-il en s’arrachant à sa contemplation.

— Vraiment ? Je veux dire, je n’ai rien contre le fait de parler avec vous…

Elle s’interrompit en voyant une camionnette s’arrêter juste derrière la Bentley.Une inscription en grosses lettres rouges indiquait : Serrurier.

— Ça alors ! Je sais que vous n’avez qu’à claquer des doigts pour que l’on accoure.Mais à cette vitesse-là, c’est… à peine croyable !

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Max haussa les sourcils à la vue du van.

— C’est le savoir-faire de Margaret, et rien d’autre, rectifia-t-il. Quand même, jereconnais qu’elle est d’une efficacité surprenante.

Le serrurier leur expliqua qu’il venait de faire une intervention dans le quartierlorsqu’il avait reçu l’appel dans son véhicule. Il ne lui fallut pas longtemps pourdéverrouiller la porte d’Alexandra.

Une fois celui-ci parti, elle se tourna vers Max.

— Vous ne devriez pas déjà être en route pour la villa?

— Tout à l’heure. Après vous, Alexandra.

Il prit ses bagages. Alexandra rassembla le contenu de son sac à main et le précédaà l’intérieur. A cet instant, il se mit à pleuvoir.

Déposant les valises dans le vestibule, Max referma la porte.

— L’orage menaçait depuis ce matin.

Alexandra en convint et alluma quelques lampes dans le salon. La pièce devintaussitôt accueillante et intime, tandis que la pluie battante martelait les vitres.

D’un coup d’œil, Max embrassa les tentures, les coussins exotiques, les plantes

vertes. Du doigt, il caressa une statuette en malachite sur la bibliothèque.

— C’est tout à fait vous, ce décor, Alexandra, commenta-t-il.

— Merci, répondit-elle. Comme cela a l’air d’un compliment, je le prends comme tel.

— C’était effectivement un compliment… à une jeune femme infiniment précieuse.Mais…

Max se tut. Se raidissant, Alexandra termina pour lui :

— Mais si vous épousez Cathy, vous n’aurez plus besoin de mes services…

— Qui a dit que j’allais l’épouser ?

— Tous ceux à qui j’ai parlé ces derniers jours.

— C’est-à-dire ma sœur, mon cousin, mon employée de maison. Et je parie que ma

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secrétaire s’est mise de la partie ! railla-t-il avec une moue caractéristique.

— Là, vous vous trompez.

Voyant qu’il l’observait avec attention, elle demanda :

— C’est ce que vous allez faire ?

— Epouser Cathy ?

Il parut réfléchir et Alexandra songea qu’elle n’avait jamais vu de traits aussisculptés, de bouche aussi fermement dessinée ou d’émotions aussi bien maîtrisées.

— Je ne sais pas encore, mais vous pouvez être tranquille, j’ai la ferme intention detrouver un terrain d’entente pour que Nicky ait une vie stable, se sente aimé et

heureux. Je ne serai pas un pur égoïste.Alexandra s’empourpra en reconnaissant ses propres paroles.

— Elle vous a répété… ? Je n’aurais pas dû dire cela, murmura-t-elle, mortifiée.

— Il fallait que quelqu’un le fasse.

— Alors… Bonne chance. Je vous souhaite vraiment d’être heureux. Mais… Monemploi d’assistante n’est plus possible, n’est-ce pas ? s’enquit-elle en détournant les yeux.

— Alexandra, regardez-moi, dit-il doucement.

Oh ! Qu’il ne rende pas les choses plus douloureuses ! pria-t-elle, le cœur déchiré.

Pourtant, elle obéit bravement.

— Non, nous ne pouvons pas travailler ensemble, confirma-t-il. Mais il existe unealternative.

Elle haussa les sourcils, intriguée.

— Le consul chinois à Brisbane recherche un interprète de mandarin de nationalitéaustralienne, résidant en Australie. C’est M. Li qui m’en a parlé, car il a été trèsimpressionné par votre prestation. Le poste offre beaucoup de contacts avec lepublic et est donc plus intéressant que ce que vous faisiez chez Wellford. C’est toutindiqué pour quelqu’un qui rêve de faire carrière dans la diplomatie.

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Surprise, Alexandra ne sut que répondre.

— Comment diable avez-vous eu le temps d’arranger tout cela ? demanda-t-elleenfin, incapable de penser à quelque chose de plus sensé.

— J’ai longuement réfléchi hier matin et j’avais justement un rendez-vous avec M. Lidans la journée…

— Hier ? répéta Alexandra. C’est donc avant l’arrivée de Cathy que vous avez décidéde… ?

Elle laissa sa question en suspens, trop bouleversée pour achever.

— Oui, Alexandra. C’était avant, dit Max doucement. Encore une fois, nous deuxc’était impossible.

Paroles sans appel même si, au regard qu’il lui adressait, Alexandra sut qu’il sedétestait de les prononcer. Parce qu’il avait pitié d’elle ? Oh, non ! Pas cela…

— Alexandra ? Ce poste vous intéresse ?

Elle se détourna, le temps de respirer profondément et de refouler ses larmes, puisvint s’asseoir sur le sofa.

— Oui, tout à fait. Vous croyez que… que j’ai une chance de l’obtenir ?

— Avez-vous quelque chose d’autre en vue ?

— Je pourrai toujours retourner travailler chez Simon, répondit-elle, haussant lesépaules.

— Simon Wellford recevra beaucoup de contrats de la part de Goodwin Mineralsdésormais.

Alexandra comprit l’implication de ses paroles. Si elle retrouvait son emploi àl’agence, elle serait trop proche de lui et souffrirait encore.

— Je suis contente qu’il n’ait pas perdu au change, répondit-elle prudemment. Non, je n’ai rien d’autre en vue. Donc, merci beaucoup, je vais y réfléchir sérieusement.

Max sortit une enveloppe de la poche intérieure de sa veste et la plaça sur labibliothèque.

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— Tous les renseignements sont là. J’ai aussi quelque chose d’autre pour vous qui nedevrait pas tarder à arriver, dit-il en consultant sa montre.

— Oh ! J’aimerais que vous ne fassiez plus rien pour moi, répondit Alexandra d’unton presque suppliant.

— Attendez au moins de voir de quoi il s’agit.

— Non, je dois m’en sortir seule maintenant, répliqua-t-elle plus fermement. C’estaussi une question d’orgueil. Ne me demandez pas de m’expliquer là-dessus. C’estainsi.

Puis, comme frappée par une idée soudaine, elle s’exclama :

— Vous n’avez pas amené… Paul, n’est-ce pas ?

A ces mots, Max eut un geste impulsif et, pendant quelques secondes, Alexandrapensa qu’il allait la serrer dans ses bras. Mais il se calma immédiatement.

— Non, il ne s’agit pas de Paul. En fait, il a quitté Goodwin Minerals. Il était prévuqu’il aille étudier aux Etats-Unis pendant un an. Il n’a fait… qu’avancer son départ.Mais je vous ai tout de même amené un compagnon.

Elle s’apprêtait à protester de nouveau quand on frappa à la porte. Max alla ouvriraussitôt. Sur le seuil, Alexandra reconnut le chauffeur qui l’avait ramenée de

Sovereign Islands.

— Je suis désolé, monsieur, s’excusa celui-ci. La pluie a ralenti la circulation. Enfin,la voici.

Sur quoi, il déposa à terre une boule de fourrure blanche et bouclée.

— Lady McPherson m’a chargé de vous dire un grand merci pour Josie. Et voici toutce qu’il faut pour elle, dit-il en tendant un sac.

— Merci, c’est parfait.Le chauffeur salua et Max referma la porte.

Alexandra s’était levée et le regardait, médusée.

— Un chien ? dit-elle, incrédule.

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— A quoi vous attendiez-vous ? demanda-t-il.

— Je ne sais pas, mais certainement pas à cela.

Le petit chien regardait autour de lui. Après avoir toisé Max d’un œil prudent, il se

mit à trottiner vers la jeune femme.

— Josie est un bichon frisé. Les chiens favoris des monarques français, vous pouvezfaire confiance à Olivia pour savoir cela, l’informa-t-il avec un sourire ironique. Ilssont doux, d’un tempérament joyeux. Josie a neuf mois et est parfaitementéduquée.

Josie s’assit devant Alexandra. Les yeux mordorés et tendres qu’elle leva vers la jeune femme auraient fait fondre le cœur le plus dur.

— Mais, pourquoi ?… balbutia Alexandra.

— Livy et Michael partagent leur temps entre l’Australie et l’Angleterre, expliquaMax. Cette fois, ils doivent retourner à Londres pour deux ans au moins. Livy m’aconfié il y a environ une semaine qu’ils cherchaient un bon foyer pour Josie. J’aiconstaté combien vous aimiez les chiens et, si je me rappelle bien, vous et votrevoisine souhaitiez en adopter un. Alors, j’ai pensé à vous. On dirait qu’elle préfèreles femmes aux hommes d’ailleurs.

Si Alexandra avait eu du mal à contenir ses émotions jusque-là, ce n’était riencomparé à l’élan d’amour et de chagrin qui la submergea à cet instant. Max était unhomme attentionné, qui l’embrasait de désir… et il ne serait jamais pour elle.

Josie posa une patte sur son genou et Alexandra aurait juré qu’il y avait unesupplique dans ses beaux yeux bruns. Se penchant, elle caressa la fourrure boucléede la chienne qui ferma les yeux de ravissement.

— Oh ! Quel amour ! Comment pourrais-je dire non ? Merci, dit Alexandra d’une voixémue. Elle est magnifique. Oh, là là ! Si je ne fais pas attention, je vais devenir aussi

gâteuse que Nicky avec Nemo.

Max sourit sans répondre, et elle sut qu’il ne lui restait plus qu’une chose à faire.

— Monsieur Goodwin, à moins que vous ayez d’autres surprises en réserve, je pensequ’il est temps… de se dire au revoir.

Elle lui tendit la main. Au lieu de la serrer, Max étudia son visage, cet air de

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bravoure, ses beaux cheveux, cette silhouette de sirène qui l’avait si agréablementsurpris, les yeux fascinants derrière leurs lunettes, sa pâleur enfin qui trahissaitses efforts pour rester maîtresse d’elle-même.

— Alexandra, dit-il dans un soupir, vous vous remettrez de cette peine de cœur.Vous êtes si jeune, si belle, si fraîche… et trop raisonnable pour ne pas faire unecroix dessus et aller de l’avant.

— Vous croyez ? murmura-t-elle avant de se reprendre. Ecoutez, encore une foismerci pour tout et… Oui, j’y arriverai. Je regrette seulement…

Elle se mordit la lèvre.

— Vous regrettez quoi ? la pressa-t-il. Alexandra !

— J’aurais aimé vous donner quelque chose moi aussi. Je sais, c’est ridicule, dit-elleen soupirant.

Le regard de Max s’adoucit.

— Non, pas du tout. En fait, vous m’avez déjà donné beaucoup : la sagesse, aumoment où j’en attendais le moins. Prenez soin de vous, Alexandra.

— Vous aussi, monsieur Goodwin. Vous aussi.

Max hésita une seconde encore, puis tourna les talons et sortit.Alexandra demeura immobile. Dès que la porte se fut refermée, elle vacilla commeun jeune arbre au milieu d’une tempête et éclata en sanglots. Quand elle sentit Josiese frotter contre ses jambes, elle la prit dans ses bras et pleura en la serrantcontre elle.

— Désolée, ma mignonne. Jamais je n’aurais cru éprouver tant de chagrin pour unhomme. J’espère qu’il a raison et que cela passera.

Une terrible angoisse l’étreignit et elle renversa la tête en arrière.— Oh ! Pourvu qu’il ait raison…

9.

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Quatre mois plus tard…

Alexandra menait une vie bien remplie. Son travail au consulat en tant qu’assistante

de l’officier de liaison la comblait, il requérait des déplacements et la mettait aucontact du public.

Elle avait dû acquérir une nouvelle garde-robe et, même si celle-ci n’était pascomparable à celle que Max Goodwin lui avait fournie, et qu’elle avait laissée à lavilla, Alexandra ne ressemblait plus à la jeune fille mal fagotée d’avant.

Comme elle l’avait prévu, sa voisine Patti avait été enchantée en découvrant Josie.La petite chienne s’était vite adaptée à ce double mode de vie et, pour Alexandra,elle avait été une bouée de sauvetage. Le soir, elle ne rentrait plus dans une maisonvide, et le week-end, elle aimait faire un tour en vélo, avec Josie sur le porte-bagages.

Le vide que Max avait laissé dans sa vie avait été si grand qu’elle avait eul’impression de perdre une partie d’elle-même. Nicky, Mme Mills, Margaret, et mêmeStan et Jake lui manquaient aussi, car à eux tous ils avaient été pour elle uneseconde famille pendant ces quelques semaines.

Mais c’était Max qui hantait ses rêves, Max dont le souvenir continuait de la faire

chavirer. Un jour, elle avait cru l’apercevoir devant elle dans un escalator. Le cœurbattant à tout rompre, elle s’était frayé un chemin à travers la foule pour parvenir jusqu’à cet homme grand et brun, et tout à coup la souffrance l’avait submergéecomme au premier jour. Oh ! Le voir, lui dire bonjour…

Ce n’était pas lui.

Bravement, elle avait surmonté cette déception, comme la solitude et le désespoirdu début.

Les semaines passant, elle s’était préparée à lire dans la presse que Max Goodwinavait épousé Cathy Spencer. S’il l’avait fait, aucune publicité n’avait entourél’événement. Elle s’était dit que Simon devait être au courant par sa sœur, mais àquoi bon l’interroger ? Si Max n’avait pas épousé Cathy, il n’était pas revenu vers ellepour autant.

Au fil des mois, l’hiver céda la place au printemps puis à l’été et elle se sentit mieux.

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Au consulat, elle s’efforçait d’être enjouée et personne ne soupçonnait que cettebonne humeur n’était qu’une façade. Elle avait aussi commencé à prendre des leçonsde conduite pour pouvoir disposer d’une voiture de fonction.

C’est d’ailleurs ainsi, lors d’un cours de conduite, qu’elle emboutit la voiture de SimonWellford. Elle manœuvrait pour sortir d’une place de stationnement, quand sonmoniteur lui cria de freiner. Elle obtempéra. Trop tard ! Le véhicule de l’auto-écolepercuta la voiture qu’elle n’avait pas vue arriver.

Une demi-heure plus tard, à la demande de Simon, Alexandra buvait un cognac dansun bar tout proche pour se remettre de ses émotions.

— Ne t’en fais pas, la consola son ancien patron. Tout le monde est assuré, personnen’a été blessé et les voitures n’ont pas beaucoup souffert.

— Non, il n’y a que ma réputation, répondit Alexandra en soupirant. Quel moniteurvoudra me donner des leçons maintenant ?

— Tu te souviens que j’ai eu un petit accident moi aussi le jour où je t’emmenaispasser un entretien chez Goodwin ? Pourtant, j’avais mon permis depuis des années.

— Oui, je me rappelle ! Mon Dieu, quelle journée !

— As-tu revu Max Goodwin récemment ? s’enquit Simon.

Alexandra secoua la tête et avala une nouvelle gorgée de cognac.

— Il a été vraiment sympathique de me commander des travaux par la suite, évoquaSimon. Mais j’ai été vexé qu’il t’ait aiguillée vers le consulat plutôt que chez moi. Aufait, tu ne devais pas travailler pour lui ?

— Ce projet a été abandonné, murmura seulement Alexandra.

Simon la dévisagea avec curiosité. Elle portait une robe beige et une petite vesteajustée élégante et était ravissante avec sa coiffure sage et un maquillage discret.

Elle ne portait pas ses lunettes et ses yeux n’en paraissaient que plus beaux. Il latrouvait différente, plus mûre tout à coup. Elle avait aussi perdu son humour, sonfranc-parler. Pourquoi ?

— Et toi ? As-tu des contacts avec lui ? demanda-t-elle.

— Non, tout se passe par le biais de son personnel. D’après Cilla, il semble se tenir

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en retrait depuis quelque temps. Elle s’attendait à ce qu’on annonce son mariage avecCathy Spencer, l’artiste-peintre. Tu as probablement entendu parler d’elle, elle estaussi la mère de son fils, dont je t’avais parlé. Mais il ne l’a pas épousée.

Le cœur d’Alexandra manqua un battement.

— Et devine…, reprit Simon. Rosanna attend des jumeaux !

Alexandra, qui avait désespérément besoin qu’il changeât de sujet, se sentitexagérément heureuse de cette nouvelle et posa une foule de questions à Simon.

Il la déposa ensuite chez elle.

— Josie, murmura Alexandra en ramenant la chienne de chez Patti. Je risque de nepas être de bonne compagnie ce soir. J’ai toujours su qu’il n’était pas pour moi, mais

quand cesserai-je de souffrir à cause de lui ?

Trois semaines plus tard, par un samedi ensoleillé, Alexandra emmena Josie dans unparc le long de la Brisbane River. Elle avait emporté un pique-nique et s’installa surun banc à l’ombre. Elle avait revêtu un short en jean, des baskets et un petit hautrose, ses cheveux étaient relevés en queue-de-cheval.

Le ciel était d’un bleu pur, des enfants jouaient entre les parterres, des bateaux

passaient sur le fleuve… Alexandra ressentit un profond bien-être.

Elle sortit son pique-nique et la boisson fraîche de son sac, ainsi qu’un os pour Josie.Elle déballait les sandwichs quand des jambes d’homme vêtues d’un jean entrèrentdans son champ de vision.

Elle releva la tête.

— Vous?…, s’exclama-t-elle, le souffle coupé

— Oui, moi, acquiesça Max Goodwin en s’asseyant auprès d’elle.Aussitôt, Josie retroussa les babines, révélant ses crocs pointus.

— Je vois que rien n’a changé, dit Max en souriant. Elle en veut toujours auxhommes. Comment allez-vous, Alexandra ?

Sous le choc, la jeune femme fut d’abord incapable de proférer un mot.

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— Je… Je vais bien, merci, répondit-elle enfin. Quelle coïncidence de vousrencontrer ici ! Est-ce que Nicky… ?

Instinctivement, elle regarda autour d’elle.

— Non, il est avec sa mère. Vous serez contente d’apprendre qu’il partage son tempsentre elle et moi et qu’il en est parfaitement heureux.

— Vous n’avez pas…, commença-t-elle avant d’hésiter.

— Non, je n’ai pas épousé Cathy. Nous sommes parvenus à un accord. Notre prioritéà tous les deux, c’est Nicky. A partir de là, le reste s’est mis en place de lui-même.Chacun vit de son côté, mais sur ce point nous sommes unis.

— Je suis si contente. Sincèrement, dit Alexandra. Puis-je vous offrir un sandwich ?

— Avec plaisir, merci, répondit-il avant de faire son choix. J’aimerais savoircomment vous vous en sortez, Alexandra.

Max Goodwin avait changé en quatre mois et demi, constata-t-elle dans un étatsecond. Certes, il était toujours séduisant, mais semblait avoir perdu de sa vitalité.Son regard d’un bleu intense était… las. Une fois déjà, elle l’avait vu dans cet état.Bien sûr, cela n’ôtait rien à son charme. Etre près de lui, lui parler, respirer le mêmeair que lui, c’était comme arriver dans une oasis au milieu du désert ou sortir del’hiver. Oui, c’était exactement cela.

Qu’allait-il découler de cette rencontre impromptue ? Une nouvelle bataille à menercontre elle-même ? Pouvait-elle espérer autre chose ? Cinq mois s’étaient écoulés etpas une seule fois il n’avait essayé de la contacter. Il était plus que probable qu’ellese retrouverait seule après cette entrevue. Inutile donc de lui montrer à quel pointil l’affectait encore.

— Alexandra ?

Laissant là ses réflexions, elle ébaucha un sourire d’excuse.

— Désolée, j’étais perdue dans le passé. Mais vous aviez raison, je vais bien. Fairepour la première fois une expérience telle que celle-là m’avait rendue tropvulnérable, je pense.

— C’était juste un béguin ?

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Elle acquiesça.

— Et dont je suis tout à fait remise, assura-t-elle avec entrain.

Plus sérieusement, elle ajouta :

— Je dois vous remercier pour votre tact. Vous aviez vu juste en me donnant Josieet un nouvel emploi.

— Y a-t-il quelqu’un dans votre vie, Alexandra ?

— Je n’en suis pas encore là, admit-elle. A vingt et un ans, j’ai le temps et celaviendra. En attendant, je vais bientôt partir en vacances à Pékin et je peaufine monCV pour entrer dans le corps diplomatique. Comment vont Margaret et Mme Mills ?Elles me manquent, dit-elle avec chaleur.

— Tout le monde va bien.

— Et votre percée sur le marché chinois ?

— C’est bien parti.

Il la dévisagea avec attention.

— Pas d’autre crise de panique ?

— Aucune. Je suis en pleine forme, parvint-elle à répondre d’un ton dégagé.— Cela se voit, murmura-t-il en notant sa tenue légère. Vous avez toujours les plusbelles jambes de Brisbane.

Alexandra se mit à rire.

— Si je me souviens bien, vous étiez plutôt contrarié à cause de mes jambes. Celafait du bien d’en rire maintenant.

Max passa une main dans ses cheveux de jais.

— Oui, écoutez… Je ne peux vous offrir de vous ramener chez vous puisque vousêtes en vélo, dit-il en désignant la bicyclette appuyée contre un arbre. J’ai eubeaucoup de plaisir à vous revoir, Alexandra.

— Moi aussi ! dit-elle avec enthousiasme.

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Il se leva lentement.

— Merci pour le sandwich. Ah ! J’allais oublier… Nicky vous embrasse. Il m’ademandé de vous le dire si jamais je vous rencontrais.

— Oh ! Transmettez-lui toute mon affection, répondit-elle. Bien… Au revoir,monsieur Goodwin.

Max lui toucha les cheveux.

— Au revoir, Alexandra.

Elle le regarda s’éloigner et se sentit au bord de l’évanouissement. Elle avait joué lacomédie du courage, mais tout n’avait été que mensonges. Son cœur battait lachamade et l’émotion lui étreignait la gorge. Tandis qu’elle le suivait des yeux,

quelque chose l’intrigua. Max Goodwin n’était pas tout à fait le même, elle n’aurait sudire pourquoi…

Le pique-nique ne l’attirait plus, elle plia bagages, appela Josie et prit le chemin duretour.

Le soir, elle regardait la télévision, Josie sur les genoux, quand on frappa à la porte.

— C’est moi ! cria Patti en entrant. Il t’a trouvée finalement ?

Alexandra saisit la télécommande et éteignit le poste.— Qui cela ?

— Ton ex-patron. L’homme à la Bentley… Max Goodwin.

Alexandra la regarda, médusée.

— Oui… Mais… J’ignorais qu’il me cherchait…

— Si, je t’assure. Je lui ai dit que tu allais à New Farm Park.

— Moi qui pensais que c’était un hasard, dit Alexandra d’une voix désincarnée. Il nem’a rien dit.

Patti s’installa en face d’elle.

— Ecoute, tu en vois beaucoup d’hommes de sa classe qui se promènent au parc sansenfants, ni chien ?

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— Tu as raison. En fait, cela m’a intriguée au début, mais…

— Il a été malade ? demanda encore Patti.

Alexandra la regarda avec surprise.

— Je l’ai trouvé changé moi aussi. Qu’est-ce qui te fait penser cela ?

Sa voisine haussa les épaules.

— J’étais infirmière, alors, j’ai un sixième sens.

Une fois son amie partie, Alexandra se mit à réfléchir. Pourquoi Max Goodwin avait-il cherché à la voir ? S’il avait voulu se renseigner sur elle, il aurait pu interroger M.Li. Pourquoi venir la trouver après avoir tout fait pour rompre définitivement avec

elle ? Cela n’avait aucun sens. A moins que…Mais il n’aurait pas attendu près de cinq mois ! Quel était son problème ? Elle étaitsûre que quelque chose n’allait pas. Il n’y avait pas d’avenir pour eux, mais cela nel’empêchait pas de se faire du souci à son sujet.

Que faire ? Chasser cette inquiétude lui éviterait de souffrir évidemment, maisc’était aussi la solution la plus lâche.

La voix désincarnée de Jake qui lui parvint dans l’Interphone l’informa que MaxGoodwin n’était pas à son appartement et que toute demande de renseignementsétait à formuler auprès de son bureau.

Ce qui n’était malheureusement pas possible un dimanche matin ! pesta Alexandra.En revanche, elle pouvait prendre un train pour la Gold Coast et, à la gare deHelensvale, monter dans un bus ou un taxi pour Sovereign Islands.

Si Max Goodwin n’était pas là-bas non plus? Si Mme Mills et Stan avaient congé ce

dimanche ? Bien sûr, elle avait le numéro de téléphone de la villa, mais tous lesappels étaient filtrés.

« Cesse de te poser des questions, s’adjura-t-elle. Ou tu finiras par ne plus vouloirprendre de risques. »

Le trajet en train depuis la gare centrale de Brisbane prit plus d’une heure. Ensuite,

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il n’y avait pas de bus et Alexandra prit un taxi jusqu’à Paradise Point et décida depasser le pont à pied. Cette promenade, Nicky et elle l’avaient faite ensemble àplusieurs reprises. Comme il faisait beau, il y avait beaucoup d’embarcations sur l’eaudu lagon. On voyait des pêcheurs sur la plage, et des gens pique-niquaient.

Cependant, des nuages sombres s’accumulaient vers le sud, annonçant que cettebelle journée pourrait bien finir par un orage. Au nord, s’étendaient les mangroveset les casuarinas qu’elle voyait par la fenêtre de sa chambre à la villa…

Alexandra soupira. La sueur commençait à couler le long de son dos. Néanmoins, ellese remit en marche.

Une demi-heure plus tard, elle retraversait le pont. Elle n’avait trouvé personne à lavilla et était en proie à un mélange d’amertume, de découragement et de frustration

qui lui donnait envie de pleurer. A cela se mêlait de la crainte : les nuages noirs etbouillonnants étaient maintenant traversés d’éclairs et leur masse se dirigeait droitsur elle.

Alexandra pressa le pas. Faute de mieux, le petit centre commercial de ParadisePoint lui offrirait un abri, se dit-elle. Si du moins elle l’atteignait à temps !

Préoccupée par cette question, elle ne prêta pas attention à la voiture qui la croisa,au moment où les premières gouttes de pluie se mettaient à tomber. Elle sedétourna seulement en entendant un crissement de pneus. Le véhicule, une Bentleybleu marine, faisait marche arrière. Parvenu à sa hauteur, Max Goodwin se penchapour ouvrir la portière côté passager.

Le cœur d’Alexandra fit un bond dans sa poitrine, elle avait passé des heures àréfléchir à cette rencontre mais se trouva prise au dépourvu. Elle demeuraparalysée sur le trottoir sous la pluie qui redoublait.

— Alexandra, montez ! commanda-t-il. Je crois que la grêle ne va pas tarder.

Ces dernières paroles la firent réagir et elle monta en hâte.

— Que faites-vous là par ce temps ? demanda Max en enclenchant la première.

— En fait, je… Oh !

Alexandra n’eut pas le temps d’élaborer une réponse. L’orage éclata avec une telleviolence qu’il était impossible de distinguer la route.

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Max étouffa un juron et actionna les essuie-glaces. Peu après, la Bentley remontaitl’allée qui menait à la villa. Il commanda l’ouverture des portes du garage et lavoiture s’y engouffra au moment précis où la grêle se mettait à tomber.

Ils rejoignirent la cuisine par un escalier intérieur et se campèrent côte à côtedevant la fenêtre. Le bruit était assourdissant ; des grêlons énormes criblaient leparc, la jetée et le bras de mer au-delà.

Au bout de cinq minutes, le vacarme cessa brusquement, bien que la pluie continuâtde tomber.

— Vous avez eu de la chance, dit Max.

— Oui, merci de vous être arrêté.

Il enveloppa d’un regard ses vêtements humides, ses cheveux emmêlés, ses piedschaussés de sandales.

— Et qu’aurais-je fait d’autre ? Alexandra, pourquoi êtes-vous ici ? demanda-t-ildoucement.

Un fol instant, peut-être parce qu’elle n’était pas persuadée qu’il était content de lavoir, elle fut tentée de répondre que c’était par hasard qu’elle se trouvait sur lepont. Mais elle n’aurait pu soutenir longtemps un tel mensonge.

Elle le dévisagea longuement et, de nouveau, retrouva en lui ce changementindéfinissable. Etait-ce dû à un problème de santé ou à sa relation difficile avecCathy Spencer, qu’il n’avait pas cessé d’aimer ?

— J’étais inquiète à votre sujet, avoua-t-elle timidement.

Max ne manifesta d’abord aucune réaction. Puis, s’appuyant contre le mur, les brascroisés, il demanda :

— C’est pour cela que vous avez fait tout ce chemin ? Pourquoi vous inquiéter pour

moi ?

Son visage semblait taillé dans la pierre et ses yeux ne trahissaient rien. Desémotions parfaitement maîtrisées, observa Alexandra en se rappelant qu’elle s’étaitfait cette réflexion. Seulement, il semblait plus insondable encore en cet instant.

— Parce que je sens que quelque chose ne va pas, répondit-elle.

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— Hier…, commença-t-il.

— Hier, il me paraissait important de vous prouver que tout allait bien et que je nesuis pas là pour revenir là-dessus, lui assura-t-elle. Je sais que nous n’avons pasd’avenir ensemble et je l’ai accepté. Seulement, je pensais que je pourrais peut-êtrevous aider à mon tour ?

— M’aider ? Si seulement vous saviez !

Alexandra se figea devant ce ton froid et dur qui la ramenait à cette nuit du dînerdansant quand, dans l’escalier, il lui avait dit qu’elle serait la dernière personne à quiil confierait ses soucis.

C’en fut trop. Sur une impulsion, elle courut vers la porte qu’elle ouvrit à la voléeavant de se précipiter dehors, sans se soucier de la pluie, consciente seulementqu’elle ne méritait pas d’être traitée de façon si blessante.

Max la rattrapa alors qu’elle atteignait l’extrémité de la villa.

— Alexandra, bon sang ! Qu’est-ce qui vous prend ?

Comme elle s’esquivait, il courut de nouveau vers elle et lui agrippa la taille à deuxmains. A sa grande surprise, Alexandra l’entendit gémir de douleur.

Elle s’immobilisa. Oh, mon Dieu ! Son visage était livide et ses mâchoires

contractées.

— Qu’y a-t-il ? demanda-t-elle. Qu’est-ce qui ne va pas?

— Mon dos… Et aussi toute ma vie…

— Quoi ? Votre dos ? Que s’est-il passé ? bégaya-t-elle.

— Si vous voulez bien rentrer, je vous expliquerai…

— Je croyais que vous étiez en colère pour me parler sur ce ton ! protesta-t-elle,

tandis que la pluie ruisselait sur ses joues.

— C’est faux. Alexandra, nous sommes trempés. Je vous en prie, rentrons.

— Mme Mills va nous tuer si nous faisons des flaques partout!

— Passons par la buanderie pour nous sécher. Nous monterons ensuite nous changer,

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commanda-t-il en la prenant par la main.

— Je n’ai pas de vêtements de rechange, fit-elle valoir quand ils furent devant laporte de la buanderie.

— Oh ! Si. Votre garde-robe est toujours là. Alexandra le regarda avec surprise.

— Je pensais que vous aviez donné ces vêtements.

Max secoua la tête.

— Aucun risque.

Elle tentait toujours de comprendre ce que cette réponse impliquait en prenant sadouche. De retour dans sa chambre, elle retrouva effectivement toutes ses tenues,

telles qu’elle les avait laissées cinq mois plus tôt et enfila l’ensemble le moins formel,pantalon marine, chemisier turquoise et espadrilles assorties.

Max se trouvait dans la cuisine quand elle redescendit. Il avait troqué son jean et sachemise pour une tenue de sport et ses cheveux étaient humides. Il remplissaitdeux verres de vin et avait posé sur la table un plateau de petits canapés que MmeMills avait dû préparer à son intention.

Il leva les yeux quand elle parut sur le seuil.

— Si nous allions dans la bibliothèque ? suggéra-t-il.— Ici, ce sera très bien, dit Alexandra en prenant une chaise.

Il prit place en face d’elle.

— Alexandra, j’ai eu un accident stupide il y a trois mois. Je suis tombé d’une échelleet je me suis brisé un disque intervertébral, entre autres.

— Oh, mon Dieu ! s’exclama-t-elle, horrifiée.

— Je jouais au cricket avec Nicky. J’ai grimpé pour récupérer une balle dans lagouttière. Nemo a débouché sur la terrasse comme un fou, a percuté l’échelle et jesuis tombé, raconta-t-il. J’ai dû subir plusieurs opérations. On craignait que je nepuisse remarcher…

Alexandra avait peine à contenir son émotion.

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— Je… Je ne savais pas, balbutia-t-elle, atterrée. Pourquoi n’en a-t-on pas parlédans les journaux ?

— J’ai tenu au secret pour la bonne marche de mes affaires, la moindre rumeurpouvait déstabiliser les marchés. Heureusement, j’étais encore capable de prendreles décisions.

Ainsi, la sœur de Simon avait eu raison, songea Alexandra. Il avait été forcé de setenir en retrait.

— Je suis profondément désolée, dit-elle. La douleur va-t-elle bientôt disparaître ?

— Les médecins m’affirment que ce n’est plus qu’une question de temps. Dans sixsemaines, je devrais être définitivement soulagé et bouger tout à fait normalement.

— Oh ! Tant mieux. Même si j’étais loin d’imaginer ce qui vous est arrivé, je medoutais que quelque chose n’allait pas. J’ai pensé que Cathy Spencer y était pourquelque chose.

Il la dévisagea avec attention.

— Comment cela ?

Alexandra but une gorgée de vin en regrettant de tout son cœur d’avoir fait cecommentaire. Elle le connaissait assez pour savoir qu’il ne la lâcherait pas tant qu’il

n’aurait pas obtenu de réponse.

Les yeux baissés, elle balbutia :

— Eh bien… Vous n’avez pas réussi à la convaincre de vous épouser et vous l’aimeztoujours, je suppose ?…

Un long silence suivit sa déclaration. Alexandra se rendit compte que la pluie avaitcessé.

— J’aurais pu épouser Cathy. C’est même elle qui le souhaitait.A ces mots, Alexandra faillit s’étrangler.

— Qu’est-ce que vous dites ?

Max laissa échapper un soupir.

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— Vous ne comprenez pas ? Je ne peux pas vous en blâmer, Alexandra. Moi-même, j’ai compris trop tard que je ne voulais épouser personne d’autre… que vous.

La jeune femme vacilla sous le choc. Elle se sentit devenir affreusement pâle.

— Ce n’est pas possible !… Vous avez tout fait pour m’éloigner… et m’ôter mesillusions. Vous…

— Alexandra, intervint Max. Je me suis persuadé que je n’étais pas l’homme qu’ilvous fallait, parce que j’ai une vie trop compliquée, que c’était trop facile d’oubliermes soucis en vous faisant l’amour.

Voyant qu’elle entrouvrait les lèvres de stupéfaction, il ajouta :

— Ne soyez pas si surprise. Je vous ai tout de même embrassée.

— Je ne l’ai pas oublié, dit-elle dans un souffle. Mais je pensais que c’était juste uneimpulsion… De la gratitude et peut-être de l’affection qui auraient un peu débordé.

Il ébaucha un sourire désabusé.

— Non. Et ce n’était pas non plus la première fois que je pensais à vous de cettefaçon. Gratitude, affection… Je me suis dit la même chose à l’époque, mais…

Il contourna la table et vint s’asseoir tout près d’elle.

— Alexandra, je vous ai embrassée, parce que je ne pouvais pas m’en empêcher.Ensuite j’ai pris conscience que je devais m’éloigner avant que vous ne soyez blessée.Je ne savais pas comment assumer ma paternité sans épouser la mère de Nicky, etfaire en sorte que ce mariage tienne vaille que vaille. Ce que j’ignorais, c’est ce que j’allais ressentir après votre départ.

Ses derniers mots étaient si peu audibles qu’elle dut tendre l’oreille. Il reprit :

— Je me suis réveillé un matin et j’ai pensé : si je ne la vois plus jamais me sourire si

spontanément, alors ma vie ne vaut pas la peine d’être vécue. Une foule de détailsm’est revenue à l’esprit. Je me rappelais chacune de vos paroles, votre contactdélicieux entre mes bras… Je m’inquiétais, parce que, au cas où vous auriez denouvelles crises de panique, je n’étais pas là pour vous aider. Je ne pouvais entrerdans le salon vert à Brisbane sans penser à vous. Ici, c’était la même chose. MmeMills m’a demandé ce qu’elle devait faire des vêtements que vous aviez laissés, je luiai dit de ne pas y toucher. Parfois, j’entrais dans votre chambre pour les regarder

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et je touchais la première robe, celle que vous portiez lors du cocktail, et je pensaisà vos jambes divines, à vos yeux... Vous vous souvenez de notre premier entretien ?

Trop émue pour parler, Alexandra acquiesça d’un signe de tête.

— Quand je vous ai demandé d’ôter vos lunettes ? C’est à ce moment-là que je vousai vue autrement, Alexandra. Vos yeux étaient si beaux qu’ils exerçaient sur moi unpouvoir étrange qui n’a cessé d’opérer depuis. J’ai décidé de me tenir à distance, et,oui, d’aller jusqu’à organiser votre vie pour vous aider à guérir de l’attirance quevous aviez pour moi. Mais je ne pouvais chasser votre image de mon esprit. Je suisdevenu irascible, exécrable, et personne n’en connaissait la raison.

Leurs regards se rivèrent et Alexandra sentit l’espoir frémir en elle. Mais tant dequestions accaparaient encore son esprit.

— Mais… Que faites-vous de Cathy ?

— Cathy était très déprimée quand elle a suggéré que nous nous mariions, à cause dela disparition de sa mère. Dans cet état d’esprit, elle s’est persuadée que nouspouvions surmonter nos incompatibilités et… s’est employée à faire revivre notreancienne passion.

Alexandra l’écoutait, le cœur atrocement douloureux.

— Seulement, c’était impossible, reprit Max. Et elle a vite compris pourquoi.

Elle le regarda d’un œil interrogateur :

— Oui, vous, Alexandra, poursuivit-il. Cathy n’est pas stupide, elle a réagi avecélégance. Elle m’a dit : heureusement, c’est quelqu’un que Nicky apprécie, et a faitdes concessions généreuses concernant l’éducation de Nicky. Elle s’estdéfinitivement fixée à Brisbane. Même si cela l’arrange aussi, cela signifie que jen’aurai pas à prendre l’avion pour les anniversaires, les réunions à l’école, etc.

— J’espère qu’elle rencontrera quelqu’un, dit Alexandra tout bas.

— Oui, je l’espère aussi. Quant à Nicky, il a l’air de me faire confiance et de m’aimerdéjà. Nous faisions beaucoup d’activités ensemble avant l’accident, et même après, ilm’apportait ses jeux à l’hôpital et nous avons commencé à construire des modèlesréduits.

— Si seulement j’avais su, regretta Alexandra. Je veux dire, au sujet de l’accident.

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— J’ai voulu vous contacter tant de fois, avoua Max. Mais chaque fois j’étais saisi dedoutes. Serais-je capable de remarcher ? De votre côté, n’était-ce pas qu’uneamourette passagère ? D’après M. Li, tout allait bien pour vous.

— Je m’interrogeais sur ce point, murmura-t-elle.

— Savoir si je prenais de vos nouvelles ? Oui, et je m’attendais à entendre que vousétiez déprimée. Mais ce n’était pas du tout ce qu’on me disait. Alexandra… N’était-ce vraiment qu’une simple amourette, vous et moi ? Ou était-ce… plus que cela ?

Alexandra tressaillit d’émotion. Une joie infiniment précieuse l’envahit.

— Beaucoup plus, dit-elle avec fougue. Après la mort des miens, mes parents, puis lamère Supérieure, je refusais toute relation sérieuse, de peur que cet amour me soitenlevé. J’ai donc été pétrifiée en découvrant l’ampleur des sentiments que j’avaispour vous. Hier encore, c’est cette peur qui m’a fait prononcer les paroles que jevous ai dites. Ensuite, j’ai pris conscience que je ne cherchais qu’à me protéger, que j’étais lâche.

Elle vit l’expression bouleversée de Max.

— Hier, dit-il d’une voix saccadée, mon pire cauchemar semblait se réaliser. Jen’étais plus rien pour vous.

— Hier, et tant d’autres jours avant, j’ai vécu un cauchemar sans vous.

Il plongea son regard dans le sien comme s’il ne pouvait croire ce qu’il entendait.

— Alexandra, vous êtes sûre ?

— Absolument, répondit-elle gravement. Bien qu’un point m’inquiète encore.

— Lequel ?

Elle esquissa un sourire aussi radieux qu’inattendu.

— Vous ne semblez guère pressé de me toucher.

Une étincelle de surprise brilla dans les yeux bleus, bientôt remplacée par la flammede l’amour.

— Oh, Alexandra !… Si vous saviez! dit-il en riant avant de l’enlacer avec fougue.

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— Bien installée ?

Alexandra acquiesça en souriant. Ils étaient blottis tendrement l’un contre l’autre

sur le sofa de la bibliothèque après s’être embrassés avec passion.

— Oui. Oh ! Oui, murmura-t-elle, la joue contre l’épaule de l’homme qu’elle aimait.Max, j’ai encore une question à te poser. Pourquoi es-tu venu hier?

— C’était mon anniversaire. Soudain il m’a paru urgent de découvrir si ma vie valaitencore la peine d’être vécue ou…

— Alors, joyeux anniversaire, l’interrompit-elle doucement. Et aujourd’hui ? Est-cele premier jour de notre vie… ensemble ?

Les lèvres de Max effleurèrent ses cheveux.

— Oui, mon ange. Quand veux-tu m’épouser ? Oh, flûte !

Elle se redressa.

— Pourquoi « flûte » ?

— Parce que je ne suis pas apte à me marier avant six semaines, bougonna-t-il,vivement contrarié.

— Ce n’est pas grave. D’ailleurs, peut-être vaut-il mieux prendre son temps.

Doucement, il caressa ses lèvres du bout du doigt.

— Alexandra, promets-moi de me dire si jamais je vais trop vite pour toi.

— Tu es inquiet, parce que j’ai été élevée dans un couvent?

— J’avoue que je me suis posé la question. Le sexe t’intimide peut-être.

La jeune femme se mit à rire brusquement.

— Me croiras-tu si je te dis que je t’ai déshabillé mentalement à notre troisièmerencontre seulement ? C’était dans le salon vert et ce fantasme m’a fait l’effet d’unchoc…

— Je regrette de ne pas l’avoir su, la taquina-t-il.

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— J’avais déjà bien du mal à maîtriser cette émotion sans cela ! Sexuellement je nesuis pas expérimentée, mais cela ne veut pas dire que je sois intimidée. Le jour où jeme suis tordu la cheville, j’étais folle de désir pour toi.

Il la serra contre lui avec passion.

— Comment ai-je pu douter de toi ? murmura-t-il, émerveillé.

— Ne t’en veux pas. Moi aussi, je m’étais convaincue que je ne t’intéressais pas, que je m’étais fait des illusions.

— C’était tout le contraire. J’ai même un fantasme, plusieurs en fait, à ton sujet.L’un d’eux est d’enfouir mes doigts dans tes cheveux, dit-il en joignant le geste à laparole.

— Et les autres ? demanda Alexandra d’un air malicieux.

Il la regarda pensivement.

— J’attendrai peut-être le bon moment pour t’en parler, dit-il avant de l’embrassertendrement. Maintenant, comment allons-nous endurer les six semaines à venir ?

— Avec plein de tendresse et de petits baisers ? suggéra-t-elle en se lovantdavantage contre lui. Pour ma part, je resterais comme cela pendant des heures.

— Alexandra, dit-il d’une voix rauque, je n’arrive pas à croire à ce qui nous arrive.Doucement, elle s’écarta de ses bras pour s’agenouiller devant lui.

— Max, dit-elle, les yeux pleins d’amour. Ces paroles-là, je n’ai jamais pensé les direà quelqu’un d’autre.

Un sourire naquit sur ses lèvres, un de ces sourires que Max aimait tant.

— J’ai finalement réussi à vous appeler Max, monsieur Goodwin, cela doit sûrementvouloir dire quelque chose.

Il prononça son nom dans un souffle, puis l’attira dans ses bras comme si jamais plusil ne voulait la laisser partir.

10.

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En apprenant la nouvelle, Margaret Winston serra Alexandra dans ses bras etl’embrassa sur les deux joues.

— Je savais que vous étiez celle qu’il fallait à M. Goodwin, Alexandra ! s’exclama-t-elle joyeusement. Je l’ai su tout de suite !

Tandis qu’Alexandra écarquillait les yeux de surprise, Max déclara :

— Je m’en doutais. J’ai eu la nette impression que, quand Alexandra est apparue sibelle au cocktail, vous y étiez pour quelque chose, Margaret !

— C’est juste. Dès que j’ai vu sa silhouette élancée, j’ai décidé d’en tirer le meilleurparti, même si Alexandra était récalcitrante. Ce qui m’a surtout impressionnée, c’estla façon dont elle vous tenait tête, monsieurGoodwin. C’est comme cela que j’aimerais vous traiter, Patron ! dit la secrétaire avec humour.

Ce soir-là, Max emmena Alexandra dîner à Sanctuary Cove. En regardant lesbateaux ancrés dans la marina, Alexandra se sentait heureuse et chérie, le diamantqui ornait son doigt brillait d’un feu bleuté sous la lueur des lampadaires.

— Je ne suis pas exactement ce que l’on dit de moi, déclara soudain Max.

— C’est-à-dire un patron intraitable? insinua malicieusement Alexandra. Je tedonnerai mon avis dans dix ans quand je serai soit usée soit épanouie !

Il emprisonna son visage dans ses mains et l’embrassa.

— Alexandra, tu es splendide en ce moment, ma chérie.

Elle lui sourit.

— Grâce à toi, Max…

Il fut assailli par un puissant désir de l’inonder de baisers brûlants. Par égard pourson dos qui le faisait souffrir malgré le corset et pour les honnêtes citoyens de

Sanctuary Cove, il préféra prendre le parti de l’humour.— Donc, je ne suis pas si mauvais que cela, claironna-t-il.

— Tu peux te montrer terrible, mais tu sais aussi être adorable, et Margaret sesacrifierait pour toi. Si tu es rassuré, pouvons-nous rentrer à la villa ?

Il haussa un sourcil ironique.

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— Voilà une suggestion qui en dit long. Aurais-tu une idée derrière la tête ?

— Oui, murmura Alexandra en s’empourprant. J’ai très envie que tu m’embrasses.Mais… en privé.

— J’allais justement vous le proposer, mademoiselle Hill, répondit-il en déposant unbaiser léger sur ses lèvres.

Les retrouvailles avec Nicky furent un moment de bonheur. Le petit garçon se jetadans les bras d’Alexandra et lui fit promettre sur-le-champ de ne plus jamais partir,parce qu’il n’avait pas du tout aimé cela, expliqua-t-il, et Nemo non plus.

— Mon Dieu ! Comme tu as grandi, Nemo ! s’exclama Alexandra en le caressant.

— Oui, répondit Nicky. Et il connaît plein de tours maintenant. Regarde !

Pointant un pistolet imaginaire vers l’animal, Nicky cria :

— Bang ! Bang !

Aussitôt, Nemo se coucha sur le dos et fit le mort.

— Oh ! Je suis très impressionnée, le félicita Alexandra en riant aux larmes.

— C’est Papa qui l’a entraîné à faire ce tour-là, annonça alors le petit garçon avecfierté.

Alexandra prévoyait que sa rencontre avec Cathy serait autrement plus ardue.Celle-ci pourtant ne fut pas si pénible.

— Je devrais avoir envie de vous arracher les yeux, déclara Cathy d’entrée de jeu.Mais il existe des personnes sincères qui n’inspirent pas la colère. Je me demande ce

qui a poussé Max à admettre enfin qu’il ne pouvait vivre sans vous.— C’était son anniversaire, biaisa Alexandra. Comment allez-vous, Cathy ? J’espèreque vous ne m’en voulez pas de vous avoir parlé comme je l’ai fait la dernière fois quenous nous sommes vues ?

— Non, la mort de ma mère, puis vos paroles m’ont amenée à reconsidérer mes

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priorités. Je dois dire que Max n’a jamais cherché à utiliser Nicky comme une armeentre nous et n’a pas essayé de l’éloigner de moi. Nicky est heureux avec chacun denous.

Alexandra remarqua qu’elle était inquiète.

— Cathy, je n’essaierai pas de prendre votre place auprès de Nicky. Jamais, je vousle promets.

Après un instant d’hésitation, Cathy posa une main sur celle d’Alexandra.

— Merci.

Alexandra avait démissionné de son travail au consulat, car l’idée d’être séparés leurétait intolérable à tous les deux. Mais vivre ensemble, à la villa ou à l’appartementde Brisbane, et ne pas partager le même lit, imposait aussi ses contraintes.

Un soir que, tendrement blottis l’un contre l’autre, ils écoutaient de la musique dansla bibliothèque, Alexandra discerna une certaine tension entre eux. Son impressionfut confirmée quand Max se leva brusquement et annonça qu’il sortait prendre l’air.

Si le désir de Max était aussi violent que celui qui l’animait, elle, il aurait été naturelde faire l’amour, se dit-elle. Ils étaient fiancés et leur mariage aurait lieu dans trois

semaines. Seulement, Max portait toujours un corset et les médecins lui avaientinterdit certaines activités, dont les rapports sexuels.

Oh ! Si seulement elle n’était pas si inexpérimentée…, pensa-t-elle. Il y avaitd’autres moyens de faire l’amour.

Résolument, elle se leva et alla rejoindre Max. Il se tenait au bout de la jetée,regardant l’eau sombre et les lumières intermittentes du chenal.

Arrivée à sa hauteur, Alexandra glissa doucement un bras autour de sa taille.

— Max…

Sa voix était un peu rauque et mal assurée, mais elle insista :

— Y a-t-il quelque chose que je puisse faire… pour te soulager ? Je sais comment tudois te sentir.

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Elle perçut qu’il se raidissait, comme pris au dépourvu par cette offre. Puis d’unbras, il lui entoura les épaules.

— Ma chérie, je te remercie. Mais non, nous vivrons ce moment ensemble et je veuxqu’il soit beau, unique pour toi. C’est pourquoi j’attendrai, dit-il en déposant unbaiser sur ses cheveux.

Le jour du mariage arriva enfin.

Max était libéré de son corset. Son état avait été jugé normal et il ne souffrait plusd’aucune douleur.

La villa avait été transformée pour l’occasion. Une jolie tonnelle recouverte de

mimosas avait été installée sur la terrasse.

La mariée portait un long fourreau blanc que recouvrait un paletot délicatementbrodé. Son voile en dentelle ancienne lui venait de la grand-mère de Max. La vieilledame était présente et avait déjà recommandé à Alexandra de ne pas tarder àfonder une famille.

Mme Mills était là aussi, ainsi que Jake et Stan, et Margaret qui souriait debonheur. Simon était venu avec sa femme, Rosanna, qui avait préféré laisser leurs jumeaux âgés de trois semaines à leurs grands-parents. M. Li figurait aussi aunombre des invités.

Patti avait amené Josie. Alexandra lui avait donné la petite chienne, la gorge un peuserrée.

Cathy assistait à la cérémonie et Nicky, tout fier, tenait le voile d’Alexandra quandelle entra dans l’église au bras de Sir Michael.

Jamais elle n’oublierait le moment où Max, déjà en place devant l’autel, s’étaitdétourné pour la voir remonter la nef vers lui. Il y avait eu une lueurd’émerveillement dans son regard. Quand elle était arrivée auprès de lui, il avaitrelevé son voile et, les yeux remplis d’amour, s’était penché pour l’embrasser.

Quand ils redescendirent l’allée centrale, mari et femme désormais, Olivia, MmeMills, Margaret et Patti ne purent retenir une larme.

La réception qui suivit se déroula comme dans un rêve pour Alexandra, et tout le

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monde s’accorda à dire que c’était une noce magnifique.

Le jeune couple passa la nuit de noces dans l’appartement de Brisbane, car il devaits’envoler pour une longue lune de miel le lendemain.

Couchée dans la chambre de Max, Alexandra s’agita et sourit.

— Qu’y a-t-il, mon amour ? demanda Max en faisant courir ses doigts le long ducorps rassasié de sa jeune épouse.

— Je suis en train de penser que nous avons dû laisser toute une file de vêtementsdepuis l’ascenseur !

— Oui, mais peu importe. Nous sommes seuls.

Puis s’appuyant sur un coude, il la regarda intensément.— Dis-moi comment c’était. As-tu été heureuse ? Alexandra repensa à leur nuitd’amour et tressaillit.

— Honnêtement?

— Oui, Alexandra, honnêtement, la pressa-t-il, quelque peu alarmé.

— C'était... torride, inouï et tendre à la fois, et merveilleusement beau… Tout ce que j’avais imaginé, en plus infiniment précieux, répondit-elle, les yeux brillant de larmes

sous l’effet de l’émotion.

Il se détendit et l’attira contre lui.

— C’était nous deux, ma délicieuse Alexandra. Tu es si belle ! Maintenant, je sais que je peux mourir heureux.

Alexandra se redressa.

— Je te le défends !

Il la renversa sur les oreillers en riant.

— Que veux-tu dire au juste ? s’enquit-elle, un peu calmée.

— C’était l’un de mes fantasmes : te faire crier d’un plaisir que tu n’avais jamaisconnu et voir tes beaux yeux fixés sur moi. C’est arrivé. Tu veux savoir quelquechose?

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Sans attendre sa réponse, Max enchaîna :

— De toute ma vie, je n’ai été aussi apaisé. Je n’ai jamais ressenti autant de plaisir,de fierté, de confiance en l’avenir et… autant d’amour.

Alexandra se lova contre lui.

— Pour moi aussi, c’est comme un miracle. Oh ! Je t’aime, Max.