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© Casemate 2014. Tous droits de reproduction interdits. Supplément gratuit • Casemate 73, août-septembre 2014. André JUILLARD

André JUILLARD - CasemateAndré Juillard & Étienne Schréder, Yves Sente, d’après Edgar P. Jacobs, Éditions Blake et Mortimer, 15,95 €, 5 décembre. Archives Le Retour des

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Page 1: André JUILLARD - CasemateAndré Juillard & Étienne Schréder, Yves Sente, d’après Edgar P. Jacobs, Éditions Blake et Mortimer, 15,95 €, 5 décembre. Archives Le Retour des

© Casemate 2014. Tous droits de reproduction interdits.

Supplément gratuit • Casemate 73, août-septembre 2014.

André JUILLARD

Page 2: André JUILLARD - CasemateAndré Juillard & Étienne Schréder, Yves Sente, d’après Edgar P. Jacobs, Éditions Blake et Mortimer, 15,95 €, 5 décembre. Archives Le Retour des

L’intégrale du Secret del’Espadon comporteplusieurs images pleinepage. Avez-vous été

tenté d’en réaliser pour Le Bâtonde Plutarque ?André Juillard : Au départ, Yves Senteaurait bien vu cette histoire courir surdeux tomes. Deux ans de travail pourmoi. J’ai dit non. Il m’a alors proposéd’intégrer des dessins pleine page danscette version longue, arguant que jegagnerais du temps. Ce qui d’ailleursest faux. J’ai encore dit non. Je suis unminiaturiste. Mon dessin est destiné àêtre réduit, pas agrandi.

La couverture du Casemate 61 mon-tre pourtant une case d’Arianeagrandie, et c’est très réussi !Peut-être, mais mon dessin n’est pasparfaitement linéaire, des petiteschoses accrochent. Pour un dessin decette taille, j’aurais travaillé en fonctionde l’agrandissement. Dans Le Bâton de Plutarque, vous

montrez les radars anglais dans desimples cabanes en bois…C’est conforme à la réalité, comme lemontrent des photos d’époque. Cesbicoques étaient camouflées en vertet marron comme les Spitfire. Il avaitfallu les installer si rapidement que, ducoup, certaines stations étaient sousde simples tentes. Tout le littoral étaitainsi décoré d’une myriade d’antennesqui guettaient toute approche de for-mation allemande. Connaissez-vous Gibraltar où sedéroule une partie de l’histoire ?Je n’y suis plus retourné depuis la findes années soixante. J’avais une dou-

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Interview

Comment André Juillard croque-t-il ses nouveaux personnages ? Quel estson meilleur souvenir du Bâton de Plutarque ? Pourquoi la vente de sesplanches lui laisse-t-elle un sentiment mitigé ? Suite et fin de l’interviewparue dans le dossier spécial de Casemate 73, du dessinateur du 23e tome de la saga Blake et Mortimer*, à paraître le 5 décembre.

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en.

Au crayon, les indications d’André Juillard pour la coloriste Madeleine DeMille.

« Toute la côte anglaise était parsemée d’une myriade d’antennes guettant les Allemands »

André JUILLARD

André Juillard

« Benson vient d’une sculpture

de DAUMIER »

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zaine d’années et nous visitions lerocher lors de vacances en Andalou-sie. J’en garde le souvenir d’un petitmorceau d’Angleterre, tout d’archi-tecture british. Je me souviens du soleilandalou, de plages immenses etdésertes. Et de villages de pêcheursoù on dégustait des sardines grillées.De chemins de terre, de peu de voi-tures, de femmes portant encore descharges sur la tête…Votre scène préférée dans cetalbum ?Le voyage en voiture de Londres versles bases secrètes de Scaw-Fell etBletchley. J’ai pu alors dessinerquelques paysages anglais. Un momentd’évasion.Construisez-vous des maquettesd’avions ?Je n’en ai pas la patience, mais j’enachète et les photographie, car on neretrouve pas, sur Internet, les engins quim’intéressent sous tous leurs angles.Ainsi les voitures sont-elles presquetoujours de face ou 3/4 face, éven-tuellement de profil, mais presquejamais de l’arrière. La collection desmaquettes des principaux engins ima-ginés par Jacobs, dont l’Espadon, évi-demment, m’a bien aidé.Dans Casemate 73, vous évoquezvotre collaboration au dessin avecÉtienne Schréder comme une pre-mière. Vous aviez pourtant déjà tra-vaillé en doublette avec DidierConvard !Ce n’était pas du tout la même histoire.Chacun crayonnait des pages que l’au-tre encrait. Et on se partageait les cou-leurs. D’où des albums Isabelle Fan-

touri très homogènes. Péchés de jeu-nesse…Ne deviez-vous pas collaborer éga-lement avec Convard sur votre pre-mier Blake et Mortimer ?Oui, mais ça n’a pas marché. J’avais dumal à encrer le dessin de Didier, passuffisamment super précis pour cettereprise. Vous avez vieilli Blake et Mortimerdans Le Dernier Chapitre, scénario

de Convard, et les avez rajeunis dansLes Sarcophages du 6e continent.Quelle est l’opération la plus déli-cate ?Rajeunir, faire des visages tout lisses oùrien ne dépasse m’est difficile. Vieillirun homme est plus aisé, un trait de plus,et hop, c’est dix ans de pris. Pour lesfemmes, c’est bien plus délicat. J’aiessayé sur Ariane, mais, au premier traitajouté, elle affichait tout de suite 60ans. Du coup, elle a gardé son visagede jeune fille. Vous vous dites mauvais portraitiste.Pas très bon en tout cas. J’ai réaliséquelques portraits, mais pour la plu-part imaginaires. Ou alors je me fichedu modèle. Je pars de l’architecture

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Interview

Les Aventures de Blakeet Mortimer #23,Le Bâton de Plutarque,André Juillard & ÉtienneSchréder, Yves Sente,d’après Edgar P. Jacobs,Éditions Blake et Mortimer,15,95 €, 5 décembre.

ArchivesLe Retour des 7 Vies (supp. 32 pages), Casemate 61,Juillard dans ses jardins secrets, Casemate 33,Blake et Mortimer #18, Casemate 2, etc.

Recherches de personnages d’après des sculptures de Daumier.

« Vieillir un homme, c’est facile ; une femmebeaucoup moins. Un trait la fait sexagénaire »

André JUILLARD

Suite page suivante

Couverture de l’édition strips

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d’un visage et après j’improvise, sanschercher la vraisemblance. Où allez-vous chercher les visagesdes nouveaux venus dans Blake etMortimer ?Je m’inspire beaucoup de caricatures.L’art du caricaturiste est d’accentuer letrait de telle manière qu’on reconnaissele personnage immédiatement, malgréles exagérations. Je me réfère souventaux caricatures de Daumier. Bensonvient d’une sculpture de Daumier.Allez-vous dessiner beaucoup d’ex-libris du Bâton de Plutarque ?Fini ce temps-là, on ne nous endemande pratiquement plus. Ce mar-ché s’est cassé la figure.Alors que celui des planches prendde plus en plus d’importance ?Apparemment. Au départ, les ex-librisétaient destinés à aider les libraires àvendre nos albums. Un seul libraire faitencore appel à moi, Super Héros, àParis. Ils me demandent des petits for-

mats sans prétention, leur mise en placeest sympa. J’ai plaisir à les faire.Vendez-vous vos planches ?Régulièrement, après chaque album,mais pas toutes. Je garde les meilleures,enfin les meilleures à mon goût.Qui n’est pas celui des acheteurs ?Pour eux, le must est la planche où figu-rent Blake, Mortimer et Olrik. À côté,une planche que je vais estimer trèsréussie graphiquement ne vaut pas unpet de lapin si ne s’y trouve aucun despersonnages principaux. J’ai pris unpeu de recul par rapport à tout cela. Un regard ironique ?Non, j’estime respectable l’intérêt desamateurs pour les originaux. Cela prouveque notre travail est apprécié. Je suis

moi-même collectionneur, j’échangedes planches avec mes collègues. Cequi me gêne, et m’énerve un peu, c’estvrai, est le peu d’intérêt pour le côtéesthétique de notre travail.En achetez-vous ?Quelques-unes, dont une très belleplanche du Spirit de Will Eisner. Ellefigurait dans une partie de la collectiond’Yves Chaland mise en vente par safemme. Je l’ai payée 12 000 francs, àl’époque une belle somme. Par chance,je venais de vendre quelques plancheschez Maghen.Les échanges entre auteurs, c’estune planche contre une planche ?La plupart du temps. Parfois, certainesoffres ne m’emballent pas, maisj’échange par politesse.Et vous, proposez-vous souvent deséchanges ?Peu, je préfère qu’on me demande ! Ily a longtemps, avec Enki Bilal, nousavions évoqué un échange deplanches. Nous étions d’accord, et puisça a traîné et ne s’est pas fait.Aujourd’hui, je n’ose plus. Il faudraitque je donne à Enki un album entiercontre une seule de ses planches, oumême un seul dessin !

Propos recueillis par Jean-Pierre FUÉRI et Frédéric VIDAL

* Dans Casemate 73, une page à conserver :avalisée par le scénariste Yves Sente, la ten-tative de chronologie des vingt-trois Blakeet Mortimer, du Bâton de Plutarque (1944-1946) aux 3 Formules du Professeur Sato(1967).

III

Interview

« Une de mes planches où ne figure pas Blake, Mortimer ou Olrik ne vaut pas un pet de lapin »

André JUILLARD

La maquette du Golden Rocket phot ographiée par André Juillard.

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