Antilles francophones

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Synthèse d'articles tirés de mon blog @Geographedumond

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Antilles francophones

25 novembre 2006. Drogues et alizs. Derrire lappellation gnrique et usuelle dAntilles, il y a une ralit gographique souvent mconnue des Franais de mtropole. Distingues par les adjectifs grandes et petites, elles stendent sur 3.000 kilomtres, de la pointe occidentale de Cuba (Grandes Antilles) lle orientale de la Barbade (Petites Antilles). Les deux dpartements franais de Guadeloupe et de Martinique baignent dans un ocan commun, mais dans deux aires maritimes spares, puisquune le aujourdhui indpendante la Dominique les spare. De quelle terre ferme sont-elles les plus proches ? Le Venezuela se trouve environ 500 kilomtres au sud, la Guyane et la Colombie deux fois plus loin ; quant la mtropole, c'est un autre monde...Lalignement en arc de cercle de toutes ces les conduit lobservateur press imaginer une origine gologique unique, lie la tectonique. Bien sr, les volcans ne manquent pas, et lruption de la montagne Pele provoquant la destruction de la ville de Saint-Pierre il y a un peu plus dun sicle reste prsente dans les esprits. Mais les formations calcaires ne manquent pas, comme par exemple Cuba. A la Guadeloupe, simbriquent les deux types de roches calcaires (Grande Terre et Marie Galante) et volcanique (Basse Terre) avec des reliefs et des paysages trs diffrencis. Les Antilles prsentent en outre un double visage : humide et luxuriant pour les faades au vent (de temps en temps violemment fouettes par des cyclones), sec et semi-aride pour les faades sous le vent.Les touristes viennent par milliers chaque anne dans les Antilles, en hiver surtout, auxquels sajoutent dans le cas des DOM les voyageurs habituels, les Guadeloupens et Martiniquais travaillant en mtropole, ou les mtropolitains faisant l'inverse. Les aroports de Pointe--Pitre et Fort-de-France se classent logiquement parmi les plus frquents de France. Beaucoup de touristes viennent aux Antilles pour faire du bateau. Il ny a gure de difficults trouver une embarcation lorsquon se trouve dans la rgion : sur un moteur de recherches bien connu, les trois mots "location bateau Antilles" donnent plus de 400 000 entres (dont bon nombre dannonces commerciales).Les Petites Antilles prsentent un avantage extraordinaire pour la majorit des navigateurs plaisanciers peine expriments. Les alizs (Est Ouest ou Ouest Est) sont des vents constants qui gonflent les voiles de la meilleure faon ; ni de face, ni par larrire. Regardons maintenant la carte : les vents de ct rendent aise le dplacement des voiliers du Sud vers le Nord, ou du Nord vers le Sud. Sans avoir affronter limmensit ocanique, et par sauts de puce dune cinquantaine de kilomtres chaque fois, les quillards passent de la Guadeloupe la Dominique, de la Dominique la Martinique, de la Martinique Sainte-Lucie, de Sainte-Lucie Saint-Vincent et de Saint-Vincent Grenade. Grce une dernire traverse, lAmrique du Sud se situe porte de cabotage. Presque lenfance de lart.Mettons que lon a parfois affaire des touristes qui noublient pas que les Anglais dnommrent les alizs, Trade winds (vents du commerce). A moins que des trafiquants se camouflent en caboteurs innocents. Que peut-on acheter bon prix dans un port vnzulien ou colombien, surtout si lon a quelques tuyaux pralables ? De la cocane, par exemple. [U]ne tonne de feuille de coca peut tre annuellement rcolte sur 2,5 acres de culture de coca. Cette tonne donne environ 10 kilos de pte de coca qui produisent environ 2,5 kilos de base de cocane, qui rapporte finalement plus ou moins 2,2 kilos de cocane pure. En Colombie, le prix de 4,5 kilos de pte de coca, donnant environ un kilo de cocane, tourne autour de 4.500 dollars. [source] Dans les grandes villes dEurope, au bout de la chane qui commence par la cale du quillard et utilise les aroports dcrits plus hauts, le consommateur final de cocane paiera 50 fois le prix initial. La voile dans les Antilles permet donc dincroyables bnfices (voir aussi cette enqute de la prfecture de police de Paris).Il arrive parfois en dbut du mois (voir ici) que les trafiquants troquent leur quillard contre un cargo effectuant des traverses de lAtlantique : comptition dloyale, pourrait-on dire. Mais les trafiquants ont perdu leur pari, en mettant tous leurs ufs dans un seul panier. La marine franaise a arraisonn le cargo. Mais derrire ce succs, quel est lampleur du trafic inter antillais ? Combien de quillards cabotent sans encombres dans larchipel ? En face, de combien de navires de surface dispose la Royale pour assurer ces missions de contrle des eaux territoriales ?*26 mars 2007. Expdition de Saint-Domingue. Depuis le coup dEtat du 18 Brumaire (dans la nuit du 9 au 10 novembre 1799), Bonaparte gouverne la France en matre incontest. Saint-Domingue reprsente la colonie franaise la plus riche, mais la rbellion couve. Bonaparte prtend dfendre les intrts de la mtropole, mais il noublie pas ceux de sa femme Josphine de Beauharnais (ex Tascher de la Pagerie, ne aux Ilets en Martinique). On persifle, mais personne ne cherche dissuader le futur Empereur de cette expdition. Plusieurs semaines ont pass depuis larrive de mauvaises nouvelles des Antilles Paris ; mais que sait-on exactement du contexte, sur place ?Rappelons que pour pouvoir profiter des alizs, les bateaux voile longent lpoque les ctes de lEspagne, filent jusquaux Aores avant de poursuivre en direction des Antilles. Cela reprsente environ 7 8.000 kilomtres de navigation et un trajet de six semaines. Les escadres appareillent de Brest, Lorient et Rochefort la mi-dcembre 1801 (22 vaisseaux, 10 frgates et 6 fltes) et atteignent le Cap Samana, lest de Saint-Domingue ; il reste ensuite 300 kilomtres parcourir pour rallier le lieu de dbarquement, le 29 janvier 1802.La colonie franaise devenue ensuite indpendante sous le nom dHati stend sur 28.000 km (lquivalent de sept dpartements mtropolitains) et prsente une forme en C invers : voir carte. Les littoraux stirent donc sur deux presqules : celle du sud se terminant par le massif de la Hotte mesure 200 kilomtres dest en ouest, et celle du nord moins tendue et plus large pointe dans la direction de Cuba ( moins de 100 kilomtres), la colonie principale des Espagnols dans les Antilles. On peut ajouter dans le cas de Saint-Domingue deux les secondaires importantes : face aux Bahamas, celle de la Tortue compltement au nord (qui sert de repre des boucaniers), et celle plus importante (50 x 20 kilomtres) de la Gonve lintrieur du C, sparant les deux canaux daccs Port-au-Prince.Au total, Saint-Domingue (Hati) compte au bas mot 1.000 kilomtres de ctes. Quelle marine pouvait surveiller une telle tendue ?!!! Quoi quil en soit, la force navale disponible stablit comme suit : 7 vaisseaux (contre 22 au dpart) et 14 frgates ou grandes corvettes (contre 10). Quest-ce en comparaison des 20 000 hommes prsents sur place ?A mon sens, cette expdition sur lautre bord de lAtlantique nchoue pas du fait des circonstances jen dis quelques mots aprs mais parce quelle est ds le dpart insense. Personne ne sait lpoque grer ce que lon nappelle pas encore un corps expditionnaire. Lenvoi de plus de 30.000 soldats franais en Egypte en 1798 prcde il est vrai celle-ci Mais laventure sest solde par un chec quasi complet. La marine franaise est en particulier dfaite Aboukir, prouvant la folie des concepteurs de lexpdition gyptienne (parmi lesquels se range Bonaparte). Ils pensent pouvoir sappuyer sur une flotte devant la fois assurer le transit des troupes et sa propre dfense dans une Mditerrane hors de contrle. La plus puissante marine europenne la fin du rgne de Louis XVI a en outre perdu une partie de ses cadres au cours de la dcennie 1790 : de nombreux officiers inquits par les listes de suspects manquent lappelA Saint-Domingue, lexpdition commence mal, car les chefs (Leclerc et Villaret Joyeuse, le marin) ne sentendant pas. Le dbarquement au Cap (aujourdhui Cap-Hatien, port du littoral septentrional) manque dchouer et la ville brle dans un grand incendie. La msentente dbouche sur la rvocation de Villaret Joyeuse, remplac par un contre-amiral plus accommodant (Latouche-Trville). Leclerc impose la subordination des marins, dmontrant quil na pas saisi les enjeux. Sans la marine, larme de terre aurait bien de la peine exister et se maintenir dans les circonstances o nous nous trouvons. [MONAQUE] crit Latouche au dbut de lanne 1803, qui se plaint plusieurs reprises de sa tutelle.Bien sr, le commandement franais affirme mater la rbellion ; le 1er mai, Toussaint Louverture annonce son ralliement. Mais lissue sloigne ensuite cause des ravages de la fivre jaune ( partir de mai ; Leclerc en meurt le 2 novembre, remplac son poste par Rochambeau) et de lannonce dsastreuse du rtablissement de lesclavage. A lautomne, la rbellion se ractive, suivant lexemple de la Guadeloupe (aot). En fvrier 1803, la capitale du Cap est sauve dextrme justesse. Les brigands semparent le 19 dun hpital, du fort Belair et de la barrire Bouteille avant dtre repousss dans les mornes. Trois cents marins participent ce jour-l la dfense victorieuse de la ville. [Id.] Latouche obtient donc le respect pour ses troupes, mais peut-il dans le mme temps mener une guerre navale, surtout aprs la rupture de la paix dAmiens, qui laisse libre cours aux marines ennemies de la France ? Le 30 novembre 1803, alors que la flotte a quasiment vacu lle, Rochambeau se rend aux Anglais au Cap. Tout pourtant dans les oprations dpendait des moyens navals disponibles. Loccupation du pays, lexception des quelques raids accomplis dans lintrieur de lle au cours des premiers mois, se borna aux localits ctires et, dans le meilleur des cas, quelques plaines littorales. La conqute, la dfense, le ravitaillement ou lvacuation dune quelconque de nos positions dpendaient entirement des navires que lon pouvait affecter ces tches. Lapprovisionnement des rebelles en armes et en munitions se faisait entirement par voie de mer et ne pouvait tre contr que par une surveillance maritime attentive de lensemble des ctes de la grande le. Enfin, la vie conomique de la colonie, comme lenvoi des renforts indispensables pour soutenir une guerre dvoreuse dhommes et de matriels, reposaient sur un trafic maritime intense avec la mtropole et les autres Antilles. [Id. / Par moi soulign en gras].Source bibliographique : MONAQUE (Rmi) Marine et Arme dans lexpdition de Saint-Domingue (1802 1803) / Revue Historique des Armes / n214 / 1999 / p.23.*22 janvier 2008. Guyane. Les Franais devraient avoir perdu leurs illusions avec la Guyane [carte]. Ce qui a t prvu Paris, a avort. Ce qui s'est pass sur place rsulte de l'imprvu. Kourou constitue probablement la seule exception, mais elle ressemble une plate-forme off-shore dans le dpartement. Combien de Guyanais travaillent comme ingnieurs ou cadres au Centre Spatial ? En Guyane, toutes les tentatives de peuplement direct ont chou, depuis Vincent Pinson et Daniel de la Rivardire jusqu' Papillon. A chaque fois, la totalit des blancs expatris ont pri dans les combats contre les populations autochtones, les guerres intestines, ou plus encore cause des maladies. En saison des pluies quasi permanente, cette portion quatoriale du nord de l'Amrique du Sud a systmatiquement contrecarr les projets de dveloppement dmographique imagins en mtropole, depuis Richelieu jusqu'aux initiateurs du bagne. A l'inverse en Guyane, on peut presque utiliser l'expression de gnration spontane, tant l'closion de cette rgion je n'ose le mot sulfureux de pays rsulte d'vnements contemporains imprvisibles.En 1763, la fin du rgne de Louis XV, la propagande royale pousse des milliers de colons venus de l'Est de la France s'y installer. Une quarantaine de rescaps seulement trouvent finalement leur salut dans les les ponymes l'issue de cette piteuse exprience de peuplement. A la mme poque, les lites europennes soucieuses d'humanitarisme remettent en cause les peines de prisons, parce que taxes de cruelles. Le premier bagne franais est nanmoins imagin l'poque de la premire Rpublique. Il ne devient dfinitif qu'aprs 1848, en remplacement de celui d'Algrie, puis en concurrence avec ceux de Nouvelle-Caldonie. Abrog en 1938, il ferme peu aprs la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les Anglais dcident quant eux ds le XVIIIme sicle de transporter leurs condamns de l'autre ct de l'Atlantique, en Virginie et au Maryland [source]. Mais en Guyane, la sant des bagnards se dtraque plus vite qu'ailleurs. Environ 30.000 sur 70.000 sont morts avant la fin de leur sjour [source]. La surmortalit dues aux rigueurs gographiques autant qu'aux mauvais traitements empchent la colonie franaise de rivaliser avec l'Australie. Dans cette colonie britannique, une partie des 160.000 convicts [source] les bagnards condamns des peines lgres et les plus endurants ont entam une nouvelle vie et fond leurs propres familles, tels Matthew Everingham condamn sept ans de bagne pour avoir drob deux livres un homme de loi. Londres interdit la dportation des condamns en 1868. Mais quatre-vingts ans aprs le dbarquement de la Botany Bay et la fondation de Sydney, la population australienne crot rapidement. La plus ancienne ville d'Australie bnficie il est vrai d'atouts climatiques incontestables (NOTE).A Saint-Laurent du Maroni, dans la ville cr en 1858, peu aprs l'ouverture du bagne, et Cayenne construite au pied du fort Cprou rig par Poncet de Brtigny en 1643 sur un promotoire rocheux situ deux jours de marche de l'ocan, on ne peut oublier l'hostilit relative du milieu naturel [source]. Le littoral guyanais se distingue nettement de celui choisi par les Anglais en Nouvelle-Galles du Sud. On n'y trouve pas l'alternance saisonnire de Sydney, cette opposition entre un hiver doux et un t chaud caractristique d'un climat ocanique. Les tempratures varient peu, toujours comprises entre 25 et 27 C. Il pleut toute l'anne, mme si les prcipitations flchissent lgrement en fvrier, puis entre aot et novembre. Au cours des quatre mois de scheresse modre, les maxima se calent entre 50 et 100 mm. La chaleur permanente qui entretient le cycle de pluies (phnomne de convection) et maintient une forte humidit ambiante prouve les colons au mme titre que les bagnards et les esclaves. Elle explique la lente et tardive progression dmographique de la colonie. Fort heureusement pour la Guyane, des imprvus interfrent avec les projets parisiens. A la suite de l'ruption de la Montagne Pele en 1902, des centaines de Martiniquais s'exilent en effet : certains s'engagent dans les chantiers du creusement du canal de Panama, d'autres s'installent en Guyane Montjoly, commune aujourd'hui englobe dans l'agglomration de Cayenne. En 1975, des rfugis indochinois font souche, en majorit de l'ethnie montagnarde Hmong : ils fuient l'instauration d'un rgime communiste au Laos et l'unification des deux Vietnam. Aujourd'hui 1.600, ils ont russi leur implantation grce leur ingniosit (le riz dcevant cde vite la place d'autres productions) et leur tenacit : l'accueil sur place est frais. Sur trois communes, dont celle de Cacao, leur terre ingrate produit dsormais de quoi approvisionner le march de Cayenne en fruits et lgumes. Au mme moment, le plan Vert choue, lanc par le gouvernement Barre en 1977, et qui visait encourager le dveloppement socio-conomique de la Guyane [source]. L'or illustre bien plus encore l'importance du hasard, tellement plus efficace que les dcrets ministriels pour pauler un crot naturel longtemps proche de zro. Un Amrindien dcouvre des paillettes du mtal prcieux en 1855 dans un fleuve du sud-est (l'Approuague), mais c'est un fonctionnaire colonial qui obtient un premier permis d'exploration, Flix Couy assassin en dcembre 1871. Jusqu'au milieu de l'entre-deux-guerres, cette partie orientale de la Guyane voit passer plusieurs gnrations d'orpailleurs. La qute de l'or attire les candidats mais les broie le plus souvent. Certains restent quand mme en Guyane, gnralement aussi pauvres que leur patrie d'adoption [source].Une quarantaine d'annes passent, l'Etat investit, les ingnieurs construisent des routes en dur, amnagent un barrage sans quivalent en mtropole. On circule plus facilement, et le niveau de vie s'avre bien suprieur que dans le reste de l'Amrique du sud quatoriale : la Guyane, nouvel Eldorado. L'orpaillage repart alors, et attire une nouvelle gnration de migrants. Les fleuves frontaliers voient passer un nombre grandissant de clandestins : Brsiliens de plus en plus nombreux vivre dans les provinces amazoniennes, ou encore Surinamiens fuyant un pays pauvre et instable. L'Etat qui a involontairement lanc le mouvement comme l'offre suscite la demande peine faire face aujourd'hui aux migrations qu'il a lui-mme suscites, aux effets d'un fort crot naturel, aux consquences ngatives de l'explosion de l'orpaillage clandestin : pollution au mercure, trafics illicites, multiplication des assassinats et violences diverses, inscurit endmique (RFI).Un ancien ministre de l'Intrieur lance des promesses. Le ministre de l'Outre-Mer annonce des mesures. Trente annes au moins d'orpaillage n'ont pas pour autant apport le dcollage conomique tant attendu de la Guyane, tombeau des vanits.Pour aller un peu plus loin : fiche thmatique de l'universit de Laval (Qubec) et ce blog consacr l'orpaillage en Guyane.NOTE / Tempratures mensuelles moyennes de Sydney (C) : 22 / 22 / 21 / 18 / 15 / 12 / 12 / 13 / 15 / 17 / 19 / 21. Prcipitations mensuelles moyennes (en mm) : 102 / 114 / 136 / 124 / 122 / 132 / 101 / 77 / 69 / 78 / 81 / 78.*9 fvrier 2009. Crise sociale en Martinique. Il y a d'abord un potentiel agricole. Dans les Antilles, les conditions physiques sont favorables, mme s'il convient immdiatement de les relativiser. Les sols volcaniques (Basse-Terre) se combinent rarement avec des surfaces planes. Le climat tropical antillais ne connat aucune saison sche cause des alizs humides soufflant d'Est en Ouest. A Fort-de-France, les prcipitations diminuent partir de dcembre pour en arriver un plancher lev (65 mm) au dbut du printemps. Le maximum de 255 mm correspond au mois de septembre, lorsque s'ouvre la saison des cyclones [source].En 2009, l'agriculture guadeloupenne illustre l'importance des plantations. La banane domine encore aujourd'hui, mme si l'on peroit une dsaffection dans les deux dernires dcennies. Sur 51.000 hectares de SAU, elle occupe environ un quart des surfaces, contre plus d'un tiers vingt ans plus tt. La canne arrive aprs, avec 11 % de la surface agricole. On dnombre 5.700 exploitants (pour 9000 emplois directs) : en moyenne moins de 5 hectares.Vingt-et-une zones agricoles structurent l'le de la Guadeloupe, avec un microfundio trs rpandu (cartes). Basse-Terre (surtout sa faade au vent, mridionale) garde davantage sa vocation de polyculture complte par la banane : 5.000 hectares (10 % de la SAU) / 120.000 tonnes en moyenne. Le bananier servait au dpart protger du soleil les plants de cacao et de caf. Le grand cyclone de 1928 et l'inauguration d'une messagerie maritime assurant les liaisons entre l'le et la mtropole ont lanc ce fruit en Guadeloupe. En 1962, Paris met en place un systme de protection bientt accept par Bruxelles. La banane, premier fruit consomm dans le monde, en particulier dans les pays du Nord, a supplant par la suite les autres productions. L'activit souffre aujourd'hui des cyclones, de la concurrence de la banane - dollar, des cots de main d'oeuvre, de la remise en cause des pesticides. Dans les deux dernires dcennies, la filire a entam une phase de dclin relatif.Ailleurs en Guadeloupe, sur Grande-Terre et Marie-Galante, domine la canne. L'apoge date des annes 1945 - 1965. Depuis, surfaces et productions rgressent. 50 60.000 tonnes de sucre roux partent l'exportation chaque anne. Seules deux usines tournent encore, dont celle de Gardel qui totalisent 80 % de la production. Neuf distilleries transforment la canne pour le rhum, dont trois Marie Galante. Le jus de canne soumis fermentation donne du vin de canne faiblement alcoolis (4 5 C). Ce dernier est distill et chauff. Le produit 70 est coup avec de l'eau de source ou de l'eau distille. Les meilleurs distillats vieillissent ensuite dans des vieux fts de chne, pralablement utiliss pour le whisky ou le cognac. Pour un rhum agricole on n'utilise pas la mlasse, rsidu de la canne sucre broye. Au total, la filire fait vivre 30.000 personnes directement ou non. Les planteurs ne jouissent cependant plus des prrogatives longtemps considres comme naturelles. [Chambre des mtiers et de l'artisanat]En Martinique, la canne sucre perd du terrain, au point que les distilleries se ravitaillent en mlasse guadeloupenne pour la fabrication de rhum industriel. Mais l'le produit deux trois fois plus de rhum agricole. Elle subit cependant durement la stagnation de la consommation d'alcools forts dans les pays du Nord et la concurrence de rhums bas de gamme. La banane martiniquaise continue en revanche de progresser, du point de vue des surfaces plantes depuis 1981 (de 7.200 8.250 hectares). Les exploitations sont en moyenne plus tendues qu'en Guadeloupe : 4,1 hectares contre 2,2. Mais cette situation provient des 181 gros planteurs possdant les deux tiers des bananeraies (sur des surfaces moyennes suprieures 30 hectares). Ananas et melon se dveloppent galement, ainsi que l'levage... [source] Le prsident du Conseil Rgional de Martinique rsume bien le paradoxe de l'agriculture antillaise qu'il dnonce parce qu'elle pollue, en mme temps qu'il la subventionne au nom du soutien la filire banane. Le Conseil Rgional achte des terres par l'intermdiaire d'une SAFER pour contrer les effets ngatifs de la pression immobilire, mais la constitution d'une telle rserve foncire fait monter les prix et n'agit pas sur l'octroi des permis de construire. Le personnel politique crole au secours des bks ? [source]Chantal Maignan - universitaire rentre rcemment en politique [via Montray Kryol] - assume ces contradictions. Elle met en doute la pertinence d'une production bio qui leurre une partie des professionnels, car rien n'empchera terme les exploitants africains ou amricains de rpondre au mme cahier des charges et de dominer ensuite les marchs du Nord. De toutes faons, le chlordcone - principal pesticide utilis dans les bananeraies - ne se diluera pas dans les nappes phratiques avant de longues annes, mme si on le substitue par un autre produit moins polluant. Mais la femme politique ne remet pas en cause les aides publiques en elles-mmes. Elle dsire au contraire les rserver aux producteurs raisonns et - lorsqu'elle existera (?) - ceux qui rpondront aux critres de qualit d'une future Appellation d'Origine Contrle. Elle rclame donc la protection des propritaires martiniquais (pompeusement appele droit du sol), et le renforcement des barrires douanires camoufles : par l'instauration de normes sanitaires sur les produits imports ou d'une TVA sociale au profit de l'conomie sociale agricole martiniquaise. [source] Pour des les sans frontires terrestres, quelle prouesse...Les Guadeloupens et les Martiniquais subissent les consquences des politiques prcdentes. La vie chre l'origine de la grve gnrale qui paralyse la Guadeloupe depuis la mi-janvier 2009 rsulte en partie de la prsence saisonnire ou l'anne d'Europens fort pouvoir d'achat, des fonctionnaires bnficiaires de primes spciales, ou encore des taxes sur les produits ptroliers. Toutes ces causes apparaissent dans la presse, si l'on lit par exemple Batrice Gurrey dans le Monde. Il convient d'ajouter la politique migratoire (les habitants de la Dominique ne peuvent facilement travailler en Guadeloupe ou en Martinique) ainsi que l'impact de l'conomie souterraine. Dans , il y a deux ans et demi, geographedumonde relevait l'impact de la navigation de plaisance sur les dplacements de personnes dans les Carabes, et les liens manifestes entre transit de drogue et cabotage dans les Petites Antilles (carte). Mais la vie chre signifie surtout l'chec de l'interventionnisme en matire agricole. La pollution des eaux courantes l'illustre au plan environnemental. Du point de vue conomique, la banane - et secondairement la canne - en bnficiant d'aides et de subventions ont en partie dstabilis les autres activits agricoles, en monopolisant les terres arables et en gonflant artificiellement les cots de la main d'oeuvre agricole. Les produits courants extra-antillais cotent cher dans les DOM, au contraire des deux dcennies prcdentes (1980 - 2000). Le problme est toutefois moins dans ces importations que dans la faiblesse du secteur productif et dans la dpendance vis--vis des transferts financiers de la mtropole. *16 fvrier 2009. Martinique en crise (suite) Dans un papier prcdent traitant des dsordres en cours dans les Antilles franaises, j'ai limit dessein mon approche aux thmatiques agricole et foncire. Mais la presse couvre les nouveaux dveloppements de la crise, non sans s'garer encore. Une sorte de piti mielleuse s'insinue de surcrot. Le quotidien La Croix du 16 fvrier 2009 commet cette double faute qui s'explique sans doute par un travers bien connu : raconter une histoire. Antoine Fouchet et Jean-Marc Pulvar - sans probablement s'en rendre compte - semblent s'adresser d'un ct des aveugles, et de l'autre des sourds ; au sens figur du terme. Les premiers lisent leur journal confortablement installs dans leur canap en mtropole, les seconds de plus en plus inquiets de la tournure des vnements, jamais trs loin de la mer Carabe... Reprenons.Faut-il rappeler d'abord que la Guadeloupe et la Martinique sont des morceaux de France ? Les commentateurs se heurtent cette ralit, semblant la connatre. L'omettant, ils finissent par la gommer. L'article de La Croix en forme de questions - rponses l'illustre plusieurs reprises, commencer par le problme de la proprit foncire, qui lie le prsent papier au prcdent. L'esprit colonial est-il toujours prsent ? [Cette question contourne fait penser une assemble d'occultistes cherchant autour d'une table espigle rameuter les mnes de Victor Hugo ou de Napolon. Passons.] Il a pris des formes plus subtiles qu'autrefois. Les bks (descendants de colons), qui reprsentent 1 % de la population, matrisent ainsi en Martinique 40 % de l'conomie et 52 % des terres agricoles. Les chiffres choquent, si on les isole de la situation foncire dans son ensemble. La France compte en effet 407.000 exploitations agricoles, soit plus de deux fois moins qu'en 1988 (source). 950.000 actifs familiaux - l'exploitant, son conjoint et / ou ventuellement le(s) descendant(s) direct(s) - se rpartissent la Surface Agricole Utilise, soit en location de terre soit en pleine proprit (source). Nous remarquons au passage que la SAU s'est vivement rtracte, passant de 23,4 millions d'hectares en 1988 13,7 millions d'hectares en 2005. Ainsi, 1,5 % des Franais bnficient d'un droit inou, non ngociable. [En] France, il nexiste pas de march libre. On achte et on vend des maisons ou des socits, mais les proprits agricoles ne se ngocient pas librement. La mise en exploitation est soumise une autorisation prfectorale depuis un demi-sicle. [...]En contrepartie des lois de modernisation de lagriculture franaise, qui visaient doper les rendements et repousser le spectre de la pnurie alimentaire, les gouvernements successifs ont garanti aux exploitants labsence de concurrence, le bloquage des enchres pour lachat de nouvelles terres. Avec la loi dorientation agricole de 1962 et celles qui lont complte, le lgislateur instaure des surfaces minimales dinstallation, ou encore lobligation pour le futur acheteur de prsenter des diplmes reconnus par lEtat. Les Commissions Dpartementales d'Orientations de l'Agriculture constitues de reprsentants de la profession et de membres nomms par les prfets statuent sur chaque dossier dachat. Les SAFER jouent un rle dintermdiaire. (source). Le cot de ce contingentement savre lev. []O qu'ils soient, les agriculteurs jouissent donc d'un grand avantage. Gardons pourtant en tte Michel Blanc dans le film Je vous trouve trs beau, pour ne pas confondre privilge professionnel et bonheur personnel... Le personnage a tant besoin d'aide (de compagnie ?) qu'il a recours une agence spcialise dans l'installation de Roumaines en France :Mais au-del des questions agricoles, Antoine Fouchet et Jean-Marc Pulvar abordent le problme du prix du carburant dans les les. Les prix sont-ils historiquement aussi levs ? Oui. Cela est d la dpendance hrite de la colonisation, des produits de la mtropole, y compris lorsqu'il s'agit de produits l'origine antillais mais ncessitant une transformation (le sucre blanc). Le cot du transport est donc pour quelque chose dans la vie chre. De deux choses l'une : ou il y a galit, ou celle-ci n'existe pas. Pourquoi laisse-t-on entendre qu'il y a des esclaves en France ? Chacun jugera de l'ventuelle prennit en 2009 du commerce triangulaire ou du systme colonial. L'uniformit relative des productions agricoles s'explique par d'autres facteurs que ceux-l. En Martinique et en Guadeloupe, la banane et la canne sucre pour le rhum excluent tout autre activit sur grandes surfaces (voir avant) !Pour ce qui est du prix des carburants, toute la population mondiale a subi la flambe des cours dans les annes 2000. Ce prix ne doit en outre rien au hasard. Pour les trois quarts, il correspond en France des taxes : en Creuse, ou dans les Carabes. Dans le second cas, il est plus facile de filouter, les ports de la Dominique se situant une soixantaine de kilomtres, de l'autre ct du bras de mer. Un rcent rapport d'experts vient, par ailleurs, d'pingler la politique des prix des ptroliers (Total et sa filiale Sara) qui s'achalanderaient par ailleurs en mer du Nord alors qu'il y a du ptrole pas loin, au Venezuela Premirement, le brut extrait du sous-sol ncessite des phases d'puration et de traitement. Deuximement, s'il n'existe pas (plus) de raffineries dans les DOM, il faudrait dmontrer que quelqu'un a tram un complot contre les consommateurs antillais : selon toute probabilit, s'il n'y a pas de raffineries, c'est parce qu'elles ne seraient pas rentables. Et puis les Franais de l'Hexagone brlent bien plus de ptrole du Golfe Persique que de brent de mer du Nord, malgr la diffrence de distance parcourir. Ici ou l, les conditions d'extraction, et les qualits requises imposent telle ou telle rgion productrice, sans aucune extrapolation possible. La proximit du Venezuela ne signifie donc rien pour les habitants des Antilles.Sur le volet politique, les journalistes de La Croix tombent dans le mme pige d'une illusoire spcificit locale. Le Medef local est-il influent ? En Guadeloupe, le patronat est majoritairement compos de mtropolitains et de pieds-noirs, tandis qu'en Martinique il existe une sorte de bourgeoisie locale compose de bks, de multres, de Chinois, etc. Cest deux patronats sont rputs dfendre bec et ongles leurs intrts. Je n'en conteste pas les grandes lignes, mais m'interroge. On disposerait du nombre d'amateurs d'oursins, de maris volages ou d'inscrits l'UMP parmi les patrons antillais que cela n'avancerait pas grand chose. En revanche, le lobbying auprs des pouvoirs publics et les liens continus entre patrons et gouvernants sont des constantes de la Cinquime Rpublique. Il se dit qu' Paris, et pour ne prendre que cet exemple, la rcente suppression de la publicit sur les chanes de France Tlvisions ne mcontente pas les patrons des chanes prives concurrentes ! Qu'en dduire ? Dans le camp d'en face [1], on apprend que les meneurs du collectif guadeloupen s'autoproclament reprsentants. Ils n'ont pas t lus, pratiquent l'occasion le coup de main contre les non - grvistes rcalcitrants, et acceptent dans leurs rangs des activistes rvolutionnaires. Qui sert de cache-nez aux uns ou aux autres, nul ne le sait. A t-on oubli en revanche les grandes paralysies provoques par les routiers en mtropole ? Que voient les journalistes d'original dans la situation syndicale de la Guadeloupe et de la Martinique ?Au fond, je gage qu'ils succombent un biais contestable. Comme si les DOM taient indpendants. Ils s'interrogent toutefois sur cette perspective en la refermant aussitt. Il faut au contraire mon sens crever l'abcs, et affronter les faits, comme les subventions coteuses de la mtropole : condition de les aborder dans le sens chronologique. Ce sont les politiques publiques (soutien l'agriculture, barrires douanires, ect.) dans les dpartements d'outre-mer qui ont provoqu l'inflation, avec les effets d'une concurrence gomtrie variable. Le relvement des salaires des fonctionnaires en place a rsult de la situation prcdente, sans la remettre en cause. Il a bafou le principe d'galit et s'est avr inefficace conomiquement, puisqu'il a renforc l'inflation premire. C'est un fait. Depuis le dbut des annes 1980, les les antillaises enregistrent en outre les effets de la dcentralisation. Je veux croire que les Guadeloupens et Martiniquais ne rejettant pas la mtropole, n'oublient pas la part de responsabilit de leurs lus croles dans leur situation prsente...A quoi sert-il de broder, en lieu et place de l'Histoire, partir des horreurs de l'esclavage. Comme si l'on s'adressait des gens incapables d'entendre que le sang a t abondamment vers hier et non aujourd'hui. Quoi qu'il en soit, l'indpendance n'apporterait aucun DOM l'extra-territorialit. Le voisinage gographique - dj voqu - s'imposerait au contraire encore plus, en particulier sur les cots de main d'uvre. Et cette indpendance n'effacerait pas le crime originel. L'esclavage a depuis longtemps disparu du paysage go - conomique actuel du continent. Que l'on pense simplement l'cart entre deux anciennes zones longtemps similaires ! Hati perle des Antilles la veille de la Rvolution souffre aujourd'hui de tous les maux du sous-dveloppement, class parmi les pays les moins avancs de la plante. Les douze anciens Etats esclavagistes appartiennent de leur ct aux Etats-Unis d'Amrique, ceux du treizime amendement. Avec les trente-huit autres, ils forment la premire puissance conomique de la plante. Cependant, la guerre de Scession n'a ni effac l'histoire de l'esclavage, ni dissous le racisme.En Martinique ou en Guadeloupe, des semaines de discussions autour d'interminables tables rondes n'apporteront pas de solutions miracles pour que s'vanouisse la vie chre, moins de modifier les rgles du jeu sur le contrle des frontires, ou sur la proprit foncire. Mais de toutes faons, cela ne rendra pas intelligents les sots. Ceux qui se sentent mpriss ne seront pas davantage soulags sur commande. L'apaisement ne se dcrte pas [voir la lettre pastorale de l'vque de Fort-de-France]. Il faut pour l'obtenir que les aveugles voient et que les sourds entendent. Gare la piti dangereuse, pourrait-tre en conclusion la maxime de Pascal Legitimus.*21 janvier 2010. Hati sous le coup du sisme de Port-au-Prince (et l'Afghanistan). Le 18 janvier au matin, une srie d'explosions a secou Kaboul. Les habitants sont surpris mais non pas tonns. En avril 2008, des hommes arms assaillent le prsident Karza au beau milieu d'un dfil militaire. En fvrier 2009, ce sont plusieurs commandos qui attaquent deux ministres et la prison. La mort rode. Le tir saccad des fusils automatiques et les rotors d'hlicoptres suivent. Les Blackhawk survolent la capitale, dans une valse hsitante. La population vite de sortir dans les rues, en attendant des informations sur les vnements de la matine.Luc Matthieu raconte dans les colonnes du Monde Un premier kamikaze sest fait exploser devant les grilles du palais prsidentiel tandis que des hommes arms prenaient dassaut un centre commercial situ proximit de plusieurs ministres. A peu prs au mme moment, des insurgs pntraient dans un cinma. Un second kamikaze faisait, lui, exploser sa voiture pige devant un autre centre commercial. Dpasses par lampleur des attaques, la police et larme afghanes ont mis plus de trois heures pour reprendre le contrle du centre de Kaboul. Le journaliste poursuit en citant les commanditaires.Dans un communiqu, ceux-ci dcrivent un groupe de vingt hommes, ainsi qu'une opration visant le palais prsidentiel, l'htel Serena, les ministres des Mines et de la Justice. Aux dernires nouvelles, les deux tiers des participants ont perdu la vie. Leur affaire a tourn court. Sur le terrain, l'attaque de Kaboul n'est que la plus visible des oprations menes ces dernires semaines notamment dans le sud-est. Elles tmoignent de l'volution des techniques des talibans. 'Ils privilgient les attaques simultanes et les intrusions au coeur mmes des lieux protgs, explique-t-on au sige de l'OTAN, Kaboul. L'impact symbolique et la peur sont maximaux, mme si, militairement, cela reste mineur ". [Le Monde]L'erreur d'apprciation ne fait ici aucun doute. Comme d'autres Bombay ()- on trouve la comparaison dans le Monde - les agresseurs ont russi attirer l'attention des rdactions des grands mdias internationaux. Un vnement inattendu les a toutefois en partie court-circuit. Il se situe du ct d'Hati, du terrible tremblement de terre. Pour les habitants de Kaboul, les attaques ont en tout cas montr ce qui les attend le jour du dpart des forces occidentales. Mais du ct de l'opinion publique nord-amricaine et europenne, le sisme de Port-au-Prince, la capitale hatienne a laiss peu de place l'assaut du 18 janvier.A Kaboul, les parapluies s'ouvrent une fois l'orage pass. Frdric Bobin et Jacques Follorou recueillent le surlendemain les impressions de hauts responsables de l'Otan. Ceux-ci font contre mauvaise fortune bon cur, sans admettre l'vidence. Le dispositif se renforce depuis que le prsident Obama a donn son blanc-seing pour un renforcement du corps expditionnaire amricain en Afghanistan. Or les deux journalistes franais dcrivent des forces hostiles non seulement aux Occidentaux, mais aussi au pouvoir afghan. La veille, la prsidence a dvoil un plan pour affaiblir la rbellion : aide la population civile et mnagement des chefs charismatiques, en particulier du mollah Omar. Sur ce dernier point, les autorits afghanes n'ont pas l'assentiment des Amricains. La prparation de l'attaque du 18 janvier prcde de toutes faons cette annonce. Depuis le dpart de Georges Bush, la politique de la Maison-Blanche a connu deux inflchissements : augmentation de l'aide financire destine l'Afghanistan, et rabibochage avec les Talibans raisonnables. Qu'en sera-t-il l'avenir ? Les plans prcdents, selon l'ONU Kaboul, n'ont permis de rallier, en 2009, que 170 combattants talibans alors que l'OTAN estime plus de 25 000 le nombre d'insurgs sur le territoire afghan. Les dirigeants de l'Otan ne projettent pas de changement de stratgie. Mais Washington a pour l'heure perdu la bataille des mots. Les unes des journaux parlent d'une offensive dans Kaboul, la ville jusque l prsente comme sous contrle. Evidemment, la partie n'est pas termine. Les gnraux Stanley McChrystal et David Rodriguez ont en tout cas initi la stratgie de contre-insurrection. Ils refusent d'en dmordre. La mise en place d'une arme afghane fidle au rgime soutenu par les Occidentaux suscite l'interrogation. En ce qui concerne la scurisation des valles les plus denses, chacun jugera l'aune des vnements. La guerre contre le terrorisme ressemble une chasse au moustique par un lanceur de marteau. En ralit, n'importe quel groupe dtermin peut s'immiscer dans une ville et toucher des points sensibles. On peut dans une certaine limite protger un btiment, une personnalit. C'est plus difficile de prserver des symboles : l'autorit de l'Etat, le commerce, etc.A Port-au-Prince (image satellite), dans une capitale distante de plusieurs milliers de kilomtres, un tremblement de terre a tout ravag le 12 janvier 16h53. D'une intensit suprieure 7 sur l'chelle de Richter, avec un foyer trs proche de la surface (entre 8 et 10 kilomtres), il a tu en une poigne de secondes 75.000 Hatiens [source]. Le dferlement mdiatique donne le tournis, entch d'ignorance et de prjugs. Ce tremblement de terre, par ses caractristiques principales aurait produit des dgts considrables dans des grandes villes de pays dvelopps : pour combien de vies humaines en moins ? Nul ne le saura jamais. Avant, le gouvernement hatien a manqu de moyens pour se prparer une telle ventualit. Aprs, il rvle son impritie. Des ministres sont morts. Le palais prsidentiel semble avoir t victime d'une farce, moiti affaiss sur sa base.L'envoy spcial de dcrit une frange aise de la population dsireuse de quitter les lieux. Ces privilgis comptent sur un passeport tranger. D'autres dboursent quatre-vingts euros pour se rendre en autobus de l'autre ct de la frontire, en Rpublique Dominicaine. Cette somme couvre le prix du voyage et le visa. Elle excde les moyens de la majorit. Ceux qui le peuvent partent la campagne. Le maire de Port-au-Prince encourage cet exode urbain [Fuir tout prix Port-au-Prince, la ville des morts]. L'aide internationale ne colle pas avec les attentes... La reconstruction satisfait sans doute les belles mes. Mais que reconstruira-t-on dans les bidonvilles de Port-au-Prince, par dfinition non construits ? La ville btie, la plus durement dtruite, a certes besoin de fonds pour renatre. Mais les plus pauvres n'y rsident pas. Si les gouvernements occidentaux s'intressent au sort des malheureux Hatiens, qu'ils facilitent leur exode. Les candidats ne manquent pas.On jugerait certes svrement des responsables politiques parlant la lgre d'accueillir des rfugis. Je n'en disconviens pas. C'est un dfi autrement plus drangeant qu'un discours convenu sur la responsabilit de la France et des Etats-Unis dans la situation d'Hati. Porto-Rico, la Martinique et la Guadeloupe constituent autant d'les antillaises o il fait bon vivre, pour l'essentiel de leurs habitants respectifs. Avant de discourir sur les malheurs bien rels de la colonisation, il s'agit de ne pas l'oublier. Le sisme de Port-au-Prince pose nanmoins le problme d'une intervention occidentale dclenche la va-vite.Une sorte de confusion s'esquisse, autour de Kaboul-au-Prince. L'arme amricaine a en effet agi comme en territoire conquis, et ceci avec les meilleures intentions du monde. Elle assure le fonctionnement de l'aroport de Port-au-Prince depuis que le prsident hatien lui en a donn dlgation. Un porte-avions croise au large. Il n'en faut pas plus pour que s'ouvre le bal des hypocrites. Les uns et les autres brodent sur le thme de l'imprialisme amricain, d'une invasion militaire d'Hati. Les complaisants sont nombreux. Il n'en demeure pas moins qu' Washington, personne n'a annonc un pont arien au dpart de l'le. A Paris, le gouvernement a rat pour l'instant l'occasion de manifester la prennit de la prsence franaise dans les Antilles. D'aprs La Croix, 40.000 Hatiens vivent actuellement en Guadeloupe et en Martinique [, ]. La crainte d'une vague migratoire se ressent ici aussi...Qui pourra prtendre contrler Port-au-Prince et Kaboul ?