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“SOMOS 2074 Y MUCHAS MAS”: UTILISATION DES RÉSEAUX SOCIAUX PAR UN MOUVEMENT FÉMINISTE EN RÉACTION AUX STÉRILISATIONS FORCÉES DES ANNÉES 1990 AU PÉROU. Wetenschappelijke verhandeling Aantal woorden: 21.639 Géraldine Desmecht Stamnummer: 01606787 Promotor: Prof. dr. Hanne Cottyn Masterproef voorgelegd voor het behalen van de graad master in de richting Conflict en Development Academiejaar: 2017-2018

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“SOMOS 2074 Y MUCHAS MAS”: UTILISATION DES RÉSEAUX SOCIAUX PAR UN MOUVEMENT FÉMINISTE EN RÉACTION AUX STÉRILISATIONS FORCÉES DES ANNÉES 1990 AU PÉROU. Wetenschappelijke verhandeling Aantal woorden: 21.639

Géraldine Desmecht Stamnummer: 01606787 Promotor: Prof. dr. Hanne Cottyn Masterproef voorgelegd voor het behalen van de graad master in de richting Conflict en Development Academiejaar: 2017-2018

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Remerciements

Tout d’abord, je tiens à remercier sincèrement Mme Hanne Cottyn, pour ses précieux

conseils, ainsi que sa disponibilité tout au long de l’écriture de ce mémoire.

Je tiens également à remercier toutes les personnes qui m’ont consacré du temps et accepté de

témoigner et partager leur avis.

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Résumé Cette étude porte sur des cas de stérilisations forcées, orchestrées par le président Alberto

Fujimori sur de nombreuses femmes au Pérou dans les années 1990. A ce jour, aucune

décision juridique n’a été prise et les victimes réclament leurs droits. Celles-ci souhaitent une

véritable reconnaissance juridique en tant que victime, et se mobilisent pour que le

gouvernement prenne ses responsabilités et reconnaisse ces actes. Depuis 2015, le

mouvement « Somos 2074 y muchas mas » s’attèle à dénoncer ces faits et à obtenir le droit

juridique. Ces femmes cherchent une visibilité par les réseaux sociaux, ainsi que par des

manifestations très visuelles. Sur base de la théorie de la mobilisation des ressources,

l’analyse porte sur l’impact que peut avoir aujourd’hui un mouvement social féministe grâce

aux réseaux sociaux. Il s’agit donc d’analyser les stratégies de communication du mouvement

« Somos 2074 y muchas mas », ainsi que quelques interviews de personnes sur place. Les

conclusions amèneront à penser qu’il existe un certain impact, qui n’est cependant pas

significatif. En effet, bien que le collectif soit très actif et revendicateur, il semble que le

mouvement ne parvienne à toucher qu’un certain public populaire, mais pas le public

politique et juridique souhaité. Dans un pays marqué par des opinions racistes et machistes, le

combat semble long.

Deze studie concentreert zich op gevallen van gedwongen sterilisatie, georganiseerd door

president Alberto Fujimori, in de jaren 1990 waarvan veel vrouwen hieronder geleden hebben

in Peru. Tot op vandaag werd er geen juridische beslissing genomen en eisen de slachtoffers

hun rechten op. Ze willen wettelijke erkenning als slachtoffer en mobiliseren zich opdat de

overheid haar verantwoordelijkheden neemt en deze daden eindelijk erkent. Sinds 2015

probeert de beweging "Somos 2074 y muchas mas" deze feiten aan de kaak te stellen en het

wettelijke recht te verkrijgen. Deze vrouwen zoeken zichtbaarheid via sociale netwerken,

maar ook via opvallende manifestaties. Gebaseerd op de theorie van mobilisatie van

hulpmiddelen, richt de analyse zich op de impact die een feministische sociale beweging

vandaag kan hebben via sociale netwerken. Het gaat er dus om, om een analyse van de

communicatiestrategieën van de beweging "Somos 2074 y muchas mas" te

analyseren, evenals enkele interviews met mensen ter plaatse. De conclusies leiden tot de

overtuiging dat er enige impact is, die evenwel niet kenmerkend is. Hoewel het collectief zeer

actief en veeleisend is, lijkt het erop dat de beweging er slechts in slaagt een bepaald publiek

te bereiken, maar niet het gewenste politieke en juridische publiek. De strijd lijkt nog lang in

een land met racistische en macho-opvattingen.

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Table des matières Remerciements 1 Résumé 2 Introduction 5

Problématique 5 Question de recherche 5 Méthodologie 6

1. Cadre historique et actuel 7 1.1 Contexte 7

1.1.1 Origine du machisme : La période coloniale 7 1.1.2 Planification familiale : Contexte 8 1.1.3 Quatrième Conférence sur la femme 9

1.2 Campagnes de stérilisation 10 1.2.1 Victimes 10 1.2.2 Déroulement des opérations 11

1.3 Condamnation et responsabilités 12 1.3.1 De la rumeur à l’enquête 12 1.3.2 Condamnation d’Alberto Fujimori ? 13

1.4 Point de vue légal 14 1.4.1 Procès en cours 14 1.4.2 Alberto Fujimori amnistié ? 15 1.4.3 Le Registre des Victimes de Stérilisations Forcées 15

1.5 « Somos 2074 y muchas mas » 16 2 Cadre théorique 18

2.1 Les droits reproductifs 18 2.1.1 Qu’est-ce que les droits reproductifs et sexuels? 18 2.1.2 Des droits spécifiques aux femmes ? 18 2.1.3 Quand l’état contrôle la sexualité 19

2.2 Justice transitionnelle 20 2.2.1 Qu’est-ce que la justice transitionnelle ? 20 2.2.2 L’amnistie 21 2.2.3 Justice transitionnelle et mouvements sociaux 21

2.3 Théorie des mouvements sociaux 22 2.3.1 Genre et mouvement social 23 2.3.2 Théorie de la mobilisation des ressources 24 2.3.3 Impact de la croissance des mouvements conservateurs 26

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2.4 Mouvements sociaux et communication 28 2.4.1 Communication des mouvements sociaux 28 2.4.2 Communication sur les réseaux sociaux 29

3 Méthodologie 31 3.1 Choix des analyses 31 3.2 Démarche 33

4 Analyse 34 4.1 Stratégie des médias : « Somos 2074 y muchas mas » 34

4.1.1 Mobilisation d’engagement 35 4.1.2 Opportunités politiques 38 4.1.3 Gestion des ressources 39

4.2 Impact du mouvement social via les réseaux sociaux 44 4.2.1 Mentions « j’aime » 45 4.2.2 Contenu des commentaires 45

4.3 Comparaison avec d’autres mouvements 48 4.3.1 #Niunamenos 48 4.3.2 #Alfombra Roja 50 4.3.3 Comparaison avec « Somos 2074 y muchas mas » 52

4.4 Impact et mobilisation des ressources 53 4.4.1 Mobilisation des ressources 53 4.4.2 « Somos 2074 y muchas mas » : Impact 53

Conclusion 55 Bibliographie 57

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Introduction

Problématique

Le Pérou a connu dans les années 1990 une crise économique qui a touché tout le pays. Afin

d’y remédier, le président en fonction, Alberto Fujimori, prend une décision importante pour

le pays. En effet, il décide d’autoriser et de populariser la stérilisation pour toute personne qui

le désire. Cette décision aura tout d’abord, un énorme succès auprès d’une grande majorité de

la population mais la réalité dépassera cette idéologie, car très vite, une politique de

stérilisation forcée sera dénoncée. Il s’agirait donc d’une politique massive, forcée,

discriminatoire, et surtout irréversible, qui engendrera de nombreuses séquelles physiques et

psychologiques à plus de 300.000 personnes à l’époque, mais également aujourd’hui. Suite

aux nombreux témoignages, de nombreux mouvements sociaux se sont créés afin de lutter

pour le droit des femmes, et il en existe encore beaucoup aujourd’hui. Cette étude se

concentre particulièrement sur un mouvement social, appelé « Somos 2074 y muchas mas1 »,

qui lutte aujourd’hui pour la reconnaissance des victimes, via les réseaux sociaux et les

manifestations qu’elles organisent. C’est donc à travers l’analyse des réseaux sociaux, et plus

particulièrement de la théorie de mobilisation des ressources, ainsi que de quelques

interviews, que l’on étudiera l’importance et l’impact d’un tel mouvement aujourd’hui.

Question de recherche

La question principale de ce mémoire est « Quel impact un mouvement social féministe peut-

il avoir aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux? ». Au travers d’interviews, d’articles de

journaux, et de la manière dont ces femmes communiquent sur les réseaux sociaux, nous

allons essayer d’analyser l’impact d’un groupe social féminin actif au Pérou. Par l’exemple

du mouvement « Somos 2074 y muchas mas », nous tenterons de d’établir si ces femmes ont

réellement le pouvoir de faire changer les choses et de quelle manière. Ensuite, nous allons

découvrir si et à quel point le mouvement de référence est exceptionnel, ou s’il est

représentatif des mouvements féministes péruviens. Dans un pays présenté comme machiste,

la femme a-t-elle le pouvoir du nombre ? Peuvent-elles se faire entendre ? D’autant plus

lorsqu’il s’agit d’un sujet typiquement féminin, et qui « ne concerne pas vraiment » les

hommes.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!1 Comprenez « Nous sommes 2074 et beaucoup plus que cela »

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Méthodologie

Cette recherche a pour but d’établir l’impact d’un mouvement social féminin au Pérou

aujourd’hui, à travers l’analyse des réseaux sociaux. Pour ce faire, la première partie a été

composée d’une recherche historique et littéraire sur le sujet, suivie d’une analyse pratique.

La première partie retrace l’historique et aide à comprendre ce qu’il s’est passé, mais elle fait

également état de la situation actuelle et souligne le sentiment d’injustice que ressentent les

victimes et leurs familles aujourd’hui. La partie théorique nous permet d’avoir une idée des

débats académiques liés à ce sujet. Lors de cette recherche, la théorie de la mobilisation des

ressources est apparue comme étant une méthode d’analyse intéressante pour notre étude,

c’est pourquoi la partie analytique se base essentiellement sur cette théorie, afin d’arriver à

nos conclusions. Cette étude des réseaux sociaux est également complétée par une analyse de

quelques interviews plus approfondies sur le sujet.

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1. Cadre historique et actuel

1.1 Contexte

Le Pérou compte une population de plus de 31.000.000 d’habitants et reconnaît trois langues

officielles : l’Espagnol, le Quechua et l’Aymara. Ce pays extrêmement diversifié est composé

de trois régions à la nature différente : la côte, les hautes terres et la forêt. C’est aussi un pays

très varié de par sa culture, ses différentes langues, mais également au niveau social,

religieux,… il est « fragmenté et inégal, constamment traversé par des variables socio-

économiques, ethniques, culturelles et de genre » (Alvites Sosa, 2010). Toutes ces différences

se reflètent notamment dans des structures d’inégalité, comme la discrimination structurelle et

historique des groupes indigènes (PopulationData, 2017 ; Alvites Sosa, 2010).

1.1.1 Origine du machisme : La période coloniale

La période coloniale instaurée après la période inca, est très importante si l’on veut

comprendre la place actuelle de la femme, et surtout le machisme2 qui règne au Pérou. En

effet, les colonisateurs espagnols ont importé des idées européennes, dont celle de « société

patriarcale fortement influencée par des croyances chrétiennes conservatrices qui

établissaient une hiérarchie rigide en termes de genre, race et classe » (Krumm, 2014). Anna

Luise Krumm (2014) explique qu’à l’époque, les hommes étaient considérés comme des êtres

dominants devant nourrir leur famille tandis que les femmes étaient confinées à la maison.

Mais elle soutient que pire encore que d’être une femme à l’époque était les situations de

femmes qui étaient indigènes car la différenciation raciale était très importante à l’époque. En

plus de ces idées, il y avait, selon Norma Fuller (2012) des « codes moraux » qui poussaient

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!2 Le machisme peut être défini comme une « obsession masculine pour la prédominance et la virilité, s’exprimant en possessivité envers la femme et en actes de vantardise et d’agression vis-à-vis d’autres hommes » (Viveros Vigoya, 2004)

Carte du Pérou, récupéré le 5 novembre 2017 sur https://immersionameriquelatinepaysanne.wordpress.com/2012/11/04/agriculture-traditionnelle-et-cosmovision-andine-de-l%C2%B4agroecologie/

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les colonisateurs à se marier avec des femmes blanches ayant un statut élevé, qui les

autorisaient également à des relations hors mariage, avec des femmes indigènes, métisses,

ainsi que des esclaves noires. Cette idée élitaire a persisté après l’indépendance du Pérou en

1821, lors de la république (Fuller, 2012). Les idées coloniales se sont renforcées et le mépris

ainsi que la violence faite aux femmes sont devenus la norme (Krumm, 2014 ; Fuller, 2012).

Le problème aujourd’hui est que les sociétés coloniales en Amérique Latine n’ont pas réussi à

se créer une identité commune (Viveros Goya, 2004). On le voit aujourd’hui dans de

nombreux exemples, que ce soit à travers les inégalités ou les discriminations faites aux

femmes et aux autochtones. Cependant, ces femmes ont très vite commencé à faire entendre

leurs voix, afin que leurs droits soient respectés.

1.1.2 Planification familiale : Contexte

Alberto Fujimori est élu président de la République du Pérou en 1990 et le restera pendant dix

ans. Cette période démocratique se transformera vite en régime autoritaire et ultra-libéraliste,

et elle caractérisera le reste de ses années au pouvoir (Triplett, 2014). Sa gouvernance se

traduira par « un climat de violence déchaînée par les groupes armées et par une politique

d’état qui violait systématiquement les droits de l’homme, politiques, accompagnée de

différentes discriminations » (Alvites Sosa, 2010). Maria Cecilia Villegas (2017) raconte que

c’est lui qui instaura la planification familiale, suite au contexte particulier de la deuxième

guerre mondiale, où la natalité est encouragée par les gouvernements latino-américains, ce qui

entraine une croissance de la natalité. Mais cette croissance s’accompagne d’une hausse du

taux de mortalité maternelle, qui pousse de nombreux gouvernements à instaurer des

programmes de planification familiale dans le but d’améliorer les conditions des femmes

(Villegas, 2017).

Au Pérou, différents facteurs expliquent cette décision. Tout d’abord, le gouvernement est

poussé par l’extrême pauvreté du pays dû à différents facteurs tels que « le manque d'accès

aux services de santé de base, l'éducation, l'eau et l'assainissement, avec des limitations

générées par la situation géographique éloignée des populations les plus pauvres et même

par des schémas culturels qui entravent l'introduction d'interventions publiques » (Villegas,

2017). Aussi, il est important de souligner les faiblesses institutionnelles, tant les politiques

publiques que la capacité de formation de manière générale, mais surtout celle concernant les

femmes et leur pouvoir de décision quant à la santé reproductive (Villegas, 2017). Il s’agit en

réalité d’une forme de marginalisation des femmes n’ayant très peu d’accès aux méthodes de

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contraception (Triplett, 2014). Ajoutons à cela les violences que subissent ces femmes,

qu’elles soient physiques ou symboliques, dans un pays machiste et sexiste (Alvites Sosa,

2010).

Certaines personnes affirment que le président aurait travaillé en collaboration avec la Banque

Mondiale et le FMI3. En effet, ces derniers auraient exigé que le Pérou contrôle et diminue la

croissance démographique en échange d’une aide financière appréciable et d’une discussion

sur la dette péruvienne (Aberkane, 2016 ; Barthélémy, 2004). Il est vrai que cette planification

coûtait moins cher qu’un programme visant l’éducation des masses (Gasco, 2013). Ces

opérations de stérilisation offertes gratuitement par le gouvernement, étaient donc payées en

partie par le Trésor Public Péruvien, mais aussi soutenues par la Banque Mondiale, l’USAID4

principalement, ainsi que l’UNFPA5, sous forme de dons et de nourriture (Aberkane, 2016 ;

Barthélémy, 2004).

1.1.3 Quatrième Conférence sur la femme

Le droit des femmes, d’un point de vue juridique international est quelque chose de

relativement récent. Les Nations Unies commencent à parler d’égalité homme-femme dans

leur Charte de 1946, sans toutefois approfondir le sujet (Gautier, 2000). Dans le but de

défendre les droits relatifs aux femmes, les Nations Unies organisent sur vingt ans, quatre

conférences sur la femme afin de discuter de stratégies et d’actions en faveur des femmes.

C’est lors de la dernière conférence, organisée à Beijing en 1995, qu’Alberto Fujimori

instaura la planification familiale pour une durée de cinq ans (ONU, 2000 ; Villegas, 2017).

Celle-ci permettait aux femmes de prendre leur avenir en mains, mais surtout permettait aux

plus pauvres d’utiliser les méthodes de planning familial de la même manière que les

personnes plus aisées financièrement (Villegas, 2017). Le président péruvien s’y est rendu

afin de présenter son programme sur la Contraception Chirurgicale Volontaire6 (Gasco,

2013). Selon Ewig (cité par Triplett, 2014), sa présence est la preuve qu’il faisait attention à

son image. Il y aurait déclaré que « les femmes péruviennes doivent être maîtresses de leur

destin » (Gasco, 2013), acceptant également que la femme ait autant de pouvoir de décision

que son mari (Barthélémy, 2004).

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!3 Fonds Monétaires International 4 USAID = Agence des Etats-Unis pour le Développement International 5 UNFPA = Fond des Nations Unies pour la Population 6 AQV tient pour « Anticoncepcion Quirurgica Volontaria »

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1.2 Campagnes de stérilisation

Les campagnes de stérilisation ont démarré en 1995 à travers tout le pays (Barthélémy, 2004 ;

Aberkane, 2016). Mais G. Malaga (2013) dénonce les motivations du président qui ne seraient

pas de favoriser le développement de la femme, mais qui seraient en réalité une politique de

« lutte contre la pauvreté » et de discrimination, allant même parfois jusqu’à parler de

racisme. En effet, il s’agit d’une opération chirurgicale dite volontaire, mise à disposition de

toutes les femmes, puisque elles peuvent désormais en faire la demande dans les services de

santé publique, et plus uniquement dans des établissements privés (Alvites Sosa, 2010). Tout

d’abord perçue de manière très positive comme étant une formidable avancée pour la femme,

elle va en réalité devenir un véritable calvaire pour nombreuses d’entre elles. En effet, il s’agit

d’un véritable « contrôle » de la part du gouvernement, qui sera utilisé pour réaliser les

nombreux crimes à l’encontre de la population péruvienne (Alvites Sosa, 2010).

1.2.1 Victimes

La plupart des femmes informées trouvent l’idée excellente, car elle leur permet de gérer les

naissances, mais également de s’opposer de manière légale à l’Eglise catholique, totalement

opposée à ces nouvelles idées (Barthélémy, 2004). G. Malaga (2013) explique

qu’officiellement, ce programme s’adressait au peuple entier, c’est à dire à chaque femme et

homme péruvien(ne) souhaitant être stérilisé de manière totalement gratuite, mais qu’en

réalité, le gouvernement visait un public bien précis. Le Bureau du Défenseur du peuple et le

Mouvement global des femmes affirment que la plupart (65%) des femmes ayant subi une

stérilisation à l’époque étaient illettrées ou très peu instruites (Malaga, 2013). De nombreux

auteurs (Malaga, 2013 ; Barthélémy, 2004 ; Gasco, 2013) dénoncent un racisme et un soutien

aux classes supérieures, ainsi qu’une concentration d’actions envers les femmes venant des

régions les plus pauvres, et plus particulièrement les Quechuas, afin de « réduire la pauvreté

en éliminant les pauvres » (Alvites Sosa, 2010). Giulia Tamayo, avocate et sociologue

féministe explique qu’il s’agirait d’une réponse à la logique économique de l’époque :

C’était moins cher de stériliser les femmes que d’investir dans la contraception et

l’éducation. C’était la façon la plus rapide de réduire le taux de mortalité maternelle et

le taux de natalité qui étaient mal vus par la Banque mondiale et ne correspondaient

pas aux critères de la modernité. Le taux de fécondité devait être réduit drastiquement.

(Cité par Gasco, 2013)

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Il s’agirait donc d’une politique visant à réduire la pauvreté et le taux de mortalité natal, sans

engendrer des dépenses trop élevées, afin d’améliorer les conditions de vie des populations les

plus pauvres et marginales du pays (Villegas, 2017 ; Alvites Sosa, 2010).

1.2.2 Déroulement des opérations

La plupart des auteurs et témoignages affirment que les femmes n’avaient en réalité aucun

pouvoir de décision, que leur consentement ne leur était pas demandé, et que « jusqu'à 90%

des patients ont subi des décisions sous pression » (Malaga, 2013). En effet, de nombreux

auteurs (Alvites Sosa, 2010 ; Malaga, 2013 ; Gasco, 2013 ; Barthélémy, 2004) décrivent des

formes de manipulation, de pression psychologique, de chantage, ou encore d’intimidation

envers ces femmes, et certains auteurs rapportent même que des femmes recevaient des

primes et des cadeaux comme de la nourriture, des soins dentaires,... en fonction des besoins

de chacune. On parle ici de chantage, mais certains vont plus loin et expliquent que des

femmes étaient « littéralement trainées hors de chez elles, en les menaçant de les étiqueter,

elles et leurs maris, comme terroristes7 » (Gasco, 2013). Ces auteurs (Barthélémy, 2004 ;

Alvites Sosa, 2010 ; Malaga, 2013 ; Gasco, 2013) affirment que parfois les opérations se

faisaient sans autorisation, mais qu’elles étaient réalisées secrètement par les médecins après

un accouchement et que la plupart de ces opérations avaient lieu de manière rapide, dans des

infrastructures non adaptées avec des conditions d’hygiène désastreuses, et dans de nombreux

cas, sans attention médicale que ce soit avant ou après l’opération, ce qui entrainait la mort de

certaines d’entre elles.

Ces actes étaient d’une violence physique sans nom, mais aussi et surtout psychologique. Les

femmes Quechua ont une vision de la vie centrée sur la nature et l’importance de la

« complémentarité et de l’unité et non de l’extraction et de l’exploitation » (Alvites Sosa,

2010). Il est vrai que ces femmes ont une autre manière d’appréhender la natalité et le

contrôle de celle-ci, fait dont les autorités du pays n’ont pas tenu compte, malgré leur volonté

de se concentrer sur cette population-là (Alvites Sosa, 2010). La journaliste Emma Gasco

(2013) explique comment « les femmes stérilisées ont eu à porter non seulement leur douleur

personnelle, mais aussi celle de leur communauté qui les répudiait du fait qu’elles étaient

stériles, et allaient ainsi rendre la terre stérile. »

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!7 Suite au conflit armé « Sendero Luminoso » qui a touché tout le pays

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Des auteurs tels que German Malaga (2014), Françoise Barthélémy (2004) ou encore Lucia

Alvites Sosa (2010) affirment également que les médecins et le personnel de santé avaient en

réalité des quotas à respecter, sous peine de licenciement. Ils expliquent que c’est par

chantage et pression que le personnel de santé tentait d’accomplir les trois patients minimum

par personne et par mois. Le gouvernement aurait ordonné ces quotas via des documents

officiels, qu’ils renient complètement, mais qui sont pour certains auteurs une preuve

irréfutable (Alvites Sosa, 2010 ; Malaga, 2013 ; Barthélémy, 2004).

En ce qui concerne le nombre, ceux-ci varient bien sûr d’un auteur à l’autre, mais la tendance

générale porte le nombre de victimes à plus de 300.000. En effet, pour n’en citer que

quelques-uns, German Malaga (2013) est assez précis et dénombre 314.605 stérilisations

chirurgicales, tandis que Maria Cecilia Vegas (2017) relate un nombre de 254.455 lors des

quatre années du programme, mais elle ajoute que 16.000 hommes auraient également subi

une vasectomie. Lucia Alvites Sosa (2010) rapporte les informations de l’Institut National des

Statistiques et Informatiques (INEI), qui estime que la première année du programme, 81.726

femmes ont été ligaturées tandis que 6.313 hommes ont subi une vasectomie. La deuxième

année, toujours selon l’INEI, les chiffres s’élèveraient à 114.542 pour les femmes et à 11.434

pour les hommes.

Cette idée de contraception à offrir en masse au peuple a bien sûr été accueillie de manière

très contrasté et a créé de fortes oppositions et de débats au sein de la population : L’église

catholique ainsi que les classes conservatrices ont jugé cette idée inacceptable (Alvites Sosa,

2010 ; Villegas, 2017). Mais le débat se créa également au sein du mouvement féministe.

Face aux femmes qui s’y opposent, il y a celles qui perçoivent l’opportunité qui leur est

offerte, même si elles sont rapidement qualifiées de clientélistes (Alvites Sosa, 2010).

1.3 Condamnation et responsabilités

1.3.1 De la rumeur à l’enquête

Ces opérations ont vite fait l’objet de rumeurs dans tout le pays ; on racontait que des

individus rendaient visite à des femmes, si bien que de nombreuses familles refusaient

d’ouvrir la porte et d’écouter ce que ces infirmières avaient à raconter (Alvites Sosa, 2010).

Comme toute rumeur, elle faisait peur à la population, elle était répétée, déformée, et

amplifiée avec le temps, mais en plus des rumeurs, la presse resta silencieuse tout au long de

la campagne Alvites Sosa, 2010). Cependant la population s’est petit à petit rendue compte du

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caractère obligatoire du programme (Barthélémy, 2004 ; Alvites Sosa, 2010 ; Gasco, 2013).

Des journalistes et activistes commencèrent à interroger les femmes dans différentes régions à

la recherche de preuves et de témoignages, en même temps que des mouvements de femmes

s’organisèrent pour tenter de diminuer le nombre d’opérations forcées, de dénoncer ces

pratiques et se faire entendre le plus possible dans le pays (Gasco, 2013). En 1998, la

« Commission para la Denfensoria del Pueblo8 » est créée afin de traiter toutes les questions

et les débordements relatifs à ce programme (Gasco, 2013). C’est cette même année que le

scandale éclate, suite à ces mouvements mais surtout grâce à des reportages télévisés

nationaux, ainsi qu’à un nombre croissant d’ONG s’intéressant à la question (Barthélémy,

2004).

Cependant, ces organisations de soutien locales n’arrivent pas à se faire entendre comme ils le

souhaitent, malgré les efforts des différents acteurs. Un premier problème est la peur de parler

qu’avaient certaines associations, par inquiétude que cela n’affecte les autres causes

défendues par les femmes, mais également par peur de porter plainte tout simplement, ou

parce qu’elles n’avaient pas accès à la justice (Charrier, 2014). Julia Maria Urrunaga,

journaliste sur place à l’époque relate dans une interview à Françoise Barthélémy (2004),

journaliste au Monde Diplomatique, que malgré les dénonciations, très peu de péruviens se

s’intéressent au problème. Et selon elle, l’intérêt ne risque pas d’augmenter, parce que le

Pérou connaît aujourd’hui une crise et qu’il y a beaucoup d’autres problèmes sociaux. « C’est

le chacun pour soi, doublé d’un désenchantement profond à l’égard des dirigeants »

(Urrunaga, cité par Barthélémy, 2004). Ce n’est qu’après la fin du programme et surtout la fin

du mandat d’Alberto Fujimori qu’une commission d’enquête a été créée (Malaga, 2013).

1.3.2 Condamnation d’Alberto Fujimori ?

Suite à son mandat, le président a bel et bien été condamné à 25 années de prison pour

« violation des droits de l’homme pendant sa présidence de 1996 à 2000 » (Le Monde, 2009).

Accusé de corruption durant son mandat, il quitte le pays en 2000 afin de se réfugier au

Japon9, il est donc destitué par le Parlement Péruvien (Gasco, 2013 ; Oualalou, 2010). Un an

plus tard, une commission spéciale 10 est créée pour enquêter sur le programme de

planification familiale (et donc sur les allégations concernant les stérilisations forcées). Le

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!8 Comprenez « Commission pour la Défense du Peuple » 9 Il possède la double nationalité : Péruvienne et Japonaise. 10 Appelée « Commission de vérité et de réconciliation »

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rapport final de cette commission confirme les suspicions de l’époque mais Alberto Fujimori

continue de nier les faits depuis son exil (Barthélémy, 2004). Le Pérou a essayé durant de

nombreuses années d’obtenir son retour forcé au pays afin d’être jugé pour les crimes qu’il a

commis, et ce n’est qu’en 2005, lorsqu’il quitte le Japon pour le Chili, que ce dernier accepte

de l’extrader (Oualalou, 2010). L’ancien président rentre au Pérou le 22 septembre 2007 afin

d’y être jugé pour corruption et violation des droits de l’homme (Castaneda Palomino, 2017).

Il se trouve donc actuellement, et ce depuis 2009, en prison, mais pas pour les faits de

stérilisations forcées (Alvites Sosa, 2010). Depuis, certaines victimes ont reçu des

compensations économiques et sanitaires, cependant il n’y aurait eu aucune réelle

reconnaissance jusqu’en 2012, date où les procès ont été ré-ouverts (Gasco, 2013).

Maria Cecilia Villegas (2017), journaliste péruvienne, dénonce une faiblesse institutionnelle

propre au pays qui prive les victimes d’un accès à un procès équitable et à d’éventuels

dédommagements. Emma Gasco (2013), également journaliste au Pérou, rajoute d’après le

témoignage de l’avocate G. Tamayo, que le problème vient également des structures de l’état

qui n’ont pas changé et continuent de favoriser certaines personnalités politiques, alors que

tout ce que les victimes demandent, c’est que « les faits soient dénoncés devant la justice, que

la justice punisse aussi bien Fujimori que ses ministres » (Hilaria Supa cité par Gasco, 2013).

1.4 Point de vue légal

1.4.1 Procès en cours

Les faits se sont déroulés il y a plus de vingt ans et pourtant, de nombreuses personnes,

principalement des femmes continuent de réclamer leurs droits auprès de la justice

péruvienne, même si l’ancien président continue de nier sa part de responsabilité (Amnesty

International, 2014). Un rapport d’Amnesty International (2014) mentionne toutefois une

enquête ouverte en 2004 par le parquet suite aux plaintes de plus de 200011 femmes, pour la

plupart pauvres et issues de zones reculées, sur les stérilisations forcées qu’elles ont subies.

Cependant, à la fin du procès, une seule parmi ces femmes a été reconnue victime. Il s’agit de

Maria Mamérita Mestanza Chavez, décédée suite à l’opération de stérilisation (El Comercio,

2015). Amnesty International (2014) explique que le CIDH n’a pas jugé le gouvernement

coupable de sa mort, annonçant que les responsables ne seraient autres que les quelques

médecins qui l’ont stérilisée, tandis que les autres plaintes ont été considérées comme non-

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!11 Voir la campagne “Somos 2074 y muchas mas”

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recevables, car il a été jugé qu’on ne peut parler d’un génocide orchestré par le gouvernement.

Cette décision a engendré une grande déception, mais surtout une grande colère des autres

victimes, non reconnues comme tel (Amnesty International, 2014).

1.4.2 Alberto Fujimori amnistié ?

Suite à cette décision et à la justice qui n’avance pas, de nombreux mouvements se sont

organisées pour défendre la vérité. Au travers de nombreuses conférences, manifestations,

ateliers,… ces femmes tentent de se faire entendre afin d’être reconnues par la justice,

d’obtenir réparation et de reconnaître la culpabilité du gouvernement. Et aujourd’hui, alors

que le président est actuellement emprisonné, son procès se trouve au centre des

préoccupations. En effet, Alberto Fujimori âgé aujourd’hui de 79 ans et souffrant d’un cancer

de la langue depuis 5 ans a officiellement demandé pardon au peuple péruvien, ainsi que la

« grâce présidentielle » (Trial International, 2016). Le Rapport de Trial International (2016)

explique que l’amnistie aurait pour effet d’annuler sa condamnation et son emprisonnement,

mais pour bénéficier de cette amnistie, il existe des conditions qui exigent d’être extrêmement

malade. Après examen et avis de la Commission des Grâces Présidentielles, le président de

l’époque, Ollanta Humala, a refusé l’amnistie à Fujimori (Fowks, 2017). En 2017, une

nouvelle demande de sa part a été faite, suite à des problèmes d’hypertension artérielle, et son

cancer qui ne s’améliore pas, ce qui, une fois de plus, a provoqué la colère de la population

(Human Right Watch, 2017). Le directeur d’Amnesty International a d’ailleurs déclaré que

« n'importe quel pardon ou autre sortie politiquement motivée de Fujimori seraient une gifle

aux victimes d'atrocités au Pérou et un échec majeur pour l'État de droit dans le pays »

(Human Rights Watch, 2017). Face à cette demande, l’actuel dirigeant Péruvien, Pedro Pablo

Kuczynski, a déclaré qu’il voulait évaluer un éventuel « pardon humanitaire » si sa santé est

réellement en danger, avant d’ajouter : « Au Pérou, il y a des affaires politiques tous les jours.

Pour l’instant, c’est un problème médical, rien de plus. Ce n'est pas une question juridique ou

judiciaire » (Cornetero, 2017).

1.4.3 Le Registre des Victimes de Stérilisations Forcées12

Il existe aujourd’hui un « registre des victimes de stérilisations forcées », qui tente de

dénombrer le nombre de victimes (Defensa Publica, 2016). Ce registre qui a été créé en 2015, !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!12 Reviesfo = “Registro de Victimas de Esterilizacion Forzadas”

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sous l’autorité du président de l’époque, Ollanta Humala, est sous la responsabilité du

Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, qui ouvrent de plus en plus de bureaux dans

différentes régions du pays pour que le maximum de personnes puisse y avoir accès (Vasquez

Rios, 2015). Pour y être recensé, il faut que l’opération date de l’époque de la campagne de

planification familiale (c’est-à-dire de 1996-2000) et il faut apporter une preuve de cette

stérilisation, que ce soit un document de l’époque ou un examen médical réalisé aujourd’hui

qui prouverait que l’acte a bien été commis (Defensa Publica, 2016). Une fois inscrites, les

victimes peuvent bénéficier gratuitement d’une aide juridique de la part de la Défense

Publique, d’une aide médicale du Ministère de la Santé ainsi que d’un soutien psychologique

(La Republica, 2016). Depuis 2013, 5097 femmes, aidées par diverses associations se seraient

inscrites dans ce registre selon les archives de l’investigatrice Alejandra Ballon (2017).

Cependant, bien qu’il existe de plus en plus de centres de recensement dans le pays, Marina

Navarro (2016) note deux obstacles importants à l’enregistrement : le déplacement de ces

femmes vers les grandes villes et la langue maternelle et souvent unique, parlée par ces

femmes : le quechua.

Il n’y a donc, en réalité aucun procès qui puisse donner espoir à ces femmes. Cependant, le

sujet est de plus en plus présent dans le débat public depuis quelques années, il a notamment

été largement utilisé afin de décrédibiliser la candidature de Keiko Fujimori, fille d’Alberto

Fujimori, lors des dernières élections au Pérou en 2016 (qu’elle n’a finalement pas remporté)

(Boutron, 2016).

1.5 « Somos 2074 y muchas mas »

Force est de constater qu’il n’existe pas beaucoup d’ouvrages ou d’articles relatant les faits et

l’impact des actions menées à ce jour. C’est en effet un sujet très peu connu ou discuté dans

les médias, que ce soit au Pérou mais également et surtout dans le monde. Au Pérou,

différents groupes sociaux et associations se sont créés ces dernières années et s’activent à

organiser des manifestations. C’est un pays où les mouvements sociaux et les associations

luttant pour les droits des femmes sont énormément répandus ; Demus, Quipu Project, Centro

de la Mujer Peruana Flora Tristan, No Tengo Miedo,… Deux des plus connues sont sans

doute Ni Una Menos13 et Con mis hijos ne to metas14. En effet, en aout 2016, la manifestation

« Ni Una Menos », organisée par différentes associations, a rassemblé plusieurs dizaines de !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!13 Comprenez: « Pas une de moins » 14 Comprenez: « Ne plaisante pas avec mes enfants »

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milliers de personnes dans le but de dénoncer les violences faites aux femmes (Vrignaud,

2016). Une autre manifestation qui a fait parler d’elle est « Con mis hijos ne to metas », qui a

dénoncé l’idéologie du genre, présente au Pérou dans l’éducation mais également dans le

gouvernement (Gonzalez, 2016).

En ce qui concerne les stérilisations forcées, « Somos 2074 y muchas mas » est sans doute le

plus grand mouvement se concentrant sur les stérilisations forcées aujourd’hui. Ce

mouvement a été créé par le GREF, qui est un collectif de différentes associations et

institutions luttant pour le droit des victimes des stérilisations forcées. (Aberkane, 2016).

L’idée de départ était une campagne de sensibilisation, mais aujourd’hui, ils se définissent

comme étant « une plate-forme composée de diverses organisations et groupes de la société

civile, ainsi que des individus qui réclament justice et réparations complètes pour les victimes

de la stérilisation forcée entre 1996 et 2000, dans le cadre du Programme national de Santé

Reproductive et Planification Familiale du gouvernement d'Alberto Fujimori » (Somos 2074

y muchas mas, 2015). Via leur page, ils expliquent que le nom renvoie aux 2074 personnes

ayant porté plainte en 2004, parce qu’elles ont été stérilisées sans consentement. La campagne

se réalise principalement sur les réseaux sociaux, mais ils organisent également de

nombreuses manifestations très symboliques et visuelles, et se déplacent lors d’événements

importants sur le sujet. Leur but est de créer un mouvement citoyen et de faire entendre leur

voix au plus grand public possible, afin d’obtenir réparation. Il y a ici une réelle démarche de

mémoire collective, malgré le déni qu’on lui accorde. Ce que ces femmes demandent, c’est

une justice réparatrice et intégrale pour toutes les victimes de l’époque. Elles voudraient que

le CIDH oblige le gouvernement à prendre ses responsabilités (Somos 2074 y muchas mas ;

Notimérica, 2015).

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2 Cadre théorique

2.1 Les droits reproductifs

2.1.1 Qu’est-ce que les droits reproductifs et sexuels?

La question spécifique des droits reproductifs est au cœur des débats depuis la Conférence

Internationale sur la Population et le Développement en 1994, et ratifiée par 179 pays

(Gautier, 2000). L’ONU y définit alors les droits reproductifs comme des droits « possédés

par toutes les personnes, leur permettant l’accès à tous les services de santé reproductive. Ils

incluent aussi le droit de prendre les décisions reproductives en étant libre de toute

discrimination, violence et coercition » (Cité par Gautier, 2000), même si aujourd’hui, chaque

institution ou organisation possède sa définition propre. Cependant, comme le souligne José

Alfredo (2005), il est primordial d’avoir une définition précise, afin que les « revendications

politiques soient d’avantage entendues, et que les pratiques contenues dans la définition

soient protégées ». Le rapport de la Conférence définit un programme de développement pour

une durée de vingt ans, qui a pour but l’émancipation de la femme, en définissant leurs droits

à la santé et l’éducation (UNFPA, 1994). Arlette Gautier (2000) explique que le droit au

planning familial était déjà reconnu comme un droit fondamental, et que les parents pouvaient

choisir le nombre d’enfants, mais la Conférence a développé ce droit en insistant sur le fait

qu’une femme a le droit de choisir librement, sans y être contraint. Important de noter

cependant que c’est à chaque état de décider la manière dont il applique ces droits (Pereira,

2007). Enfin, l’importance de ces droits peut être exprimée via ces chiffres : selon un rapport

de la Coopération Belge au Développement datant de 2012, 290.000 femmes et 2.7 millions

d’enfants dans le monde seraient décédées à cause de l’accouchement, lors de cette même

année. Selon les statistiques de Minsa15 relatés par le journal « El Comercio », de janvier à

novembre 2016, 293 péruviennes sont décédées soit lors de la grossesse, de l’accouchement

ou juste après, ce qui représente tout de même une diminution de 20% par rapport à l’année

précédente, avec cependant un taux plus élevé dans les zones rurales (Zapata, 2016).

2.1.2 Des droits spécifiques aux femmes ?

Bien que les droits ont toujours été neutres, ils ont très souvent été interprétés d’un point de

vue masculin, et bien que les revendications pour des droits spécifiques aux femmes se soient

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!15 Ministère de la Santé du Pérou

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multipliées, la création de droits spécifiques aux femmes tels que l’éducation sexuelle, ou

encore l’identité sexuelle, etc. s’avère encore difficile (Ryckmans & Maquestiau, 2008).

Philippe Antoine et Sow Oumar (2000) notent que depuis la naissance de nouveaux modes de

contraception, les femmes ont de plus en plus de contrôle et donc de pouvoir. Lorsque l’on

évoque les droits reproductifs, on pense directement aux droits des femmes car elles sont les

principales concernées, et même s’il est clair que ce sont des mouvements de femmes et leurs

revendications qui ont permis la création et le développement de ces droits, il est primordial,

pour Boris Bonnet et Agnès Guillaume (2004) de reconnaître qu’ils impliquent, et les femmes

et les hommes, de tout âge, car pour les auteurs, il en va de la responsabilité de l’homme

présent tout au long du processus de reproduction, mais également des maladies sexuellement

transmissibles, du choix du nombre d’enfant, de la contraception, etc. Ils ajoutent que refuser

de les impliquer ne ferait que ruiner les avancées en matière de droits reproductifs, et qu’il est

primordial de faire une distinction entre les différents pays. En effet, il apparaît qu’au Nord,

les femmes ont plus de pouvoir de décision que dans de nombreux pays du Sud (Bonnet &

Guillaume, 2004). Mais l’importance de le revendiquer en tant que droit des femmes tient du

fait, selon un rapport du Parlement Européen (2013), que les inégalités hommes-femmes sont

encore très présentes aujourd’hui, que ce soit au niveau de l’emploi, de l’éducation, de la vie

politique, etc. En tout cas, la santé sexuelle et reproductive est primordiale pour le

développement d’un pays, et chaque état doit investir la question, tout en gardant en tête que

le planning familial n’est intéressant que lorsqu’il laisse le libre choix aux femmes, et qu’il

n’est pas utilisé afin de contrôler le taux de naissance (Ryckmans & Maquestiau, 2008).

2.1.3 Quand l’état contrôle la sexualité

Les termes utilisés pour parler d’un état qui contrôle les naissances et la sexualité de sa

population varient d’un auteur à l’autre. On parle de violation des droits de l’homme, de

crimes contre l’humanité, de génocide ou encore de politique eugéniste.

Le génocide est un terme inventé par Raphaël Lemkin en 1943, il est un « complot visant à

annihiler des groupes d’ordre national, religieux ou racial. La manifestation de ce crime peut

s’extérioriser par des attaques contre la vie, la liberté ou la propriété de membres de pareils

groupes, et ce, en leur qualité de membres de ce groupe » (1946). D’après la Cour

Interaméricaine des droits de l’homme, il pourrait effectivement s’agir d’un génocide (Gasco,

2013).

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Le terme d’eugénisme utilisé pour la première fois par Francis Galton en 1883 désigne « un

programme de sélection artificielle pour produire une race humaine supérieure par un

contrôle des mariages » (Aubert-Marson, 2009). L’auteur explique qu’au départ, son idée est

scientifique, elle est supposée pousser les individus à choisir au mieux leur partenaire afin

d’obtenir une descendance parfaite. Cependant, toutes ces politiques ont nui, les exemples

historiques de violences à ces fins ne manquent pas (Aubert-Marson, 2009 ; Kivilcim-

Forsman, 2003) et que ce soit par stérilisation et avortement obligatoire, mais également par

la mise à mort, de nombreuses personnes ont été persécutées. Certains auteurs, dont la

journaliste au Monde Diplomatique Françoise Barthélémy (2004), considèrent que cette

planification familiale est une politique eugéniste.

2.2 Justice transitionnelle

2.2.1 Qu’est-ce que la justice transitionnelle ?

Dans un rapport des Nations Unies, la justice transitionnelle est définie comme étant une

justice qui « fournit des réparations aux victimes et crée ou renforce les opportunités de

transformation des systèmes politiques, des conflits et d'autres conditions qui ont pu être à

l'origine des abus » (2008). Aujourd’hui, lorsqu’on parle de justice transitionnelle, on évoque

les actes violents et massifs commis dans le passé : il y a donc une notion historique, ce qui

rend souvent la justice plus difficile mais également plus conséquente (Conseil de sécurité des

Nations Unies, 2004). Selon Christian Lazzeri (2016), il s’agit d’une justice juridique, mais

également politique, permettant une harmonie sociale. Cependant, cette forme de justice est

fortement discutée aujourd’hui. Certains auteurs comme Fabrice Hourquebie (2014) se

demandent s’il ne s’agit pas d’une ruse, utilisée par les pouvoirs et les organisations

internationales afin de légitimer certaines de leurs actions sur le terrain, souvent dans le but

d’établir une démocratie.

Sandrine Lefranc (2008) souligne le fait que cette justice qu’on oppose souvent à la justice

traditionnelle, a vu le jour justement parce que certaines personnes n’ont plus confiance en

cette justice dite traditionnelle, ce qui fragilise le concept selon l’auteur. Pierre Hazan (2008)

quant à lui souligne le débat existant entre deux courants de pensée actuels : il y a ceux qui

sont pour la justice reconstructive, pour qui la dignité des victimes ainsi que la réconciliation

sociale est primordiale et il y a en face, ceux qui défendent la justice pénale, résumé par R.

Brody (cité par Hanzan, 2008) selon qui, la justice transitionnelle est « l’option douce pour

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des gouvernements qui violent les droits de l’homme et veulent éviter la justice ». Enfin,

Fabrice Hourquebie (2014) ajoute que cette justice transitionnelle doit, en réalité, être un

complément à ce qui existe déjà puisqu’elle est perçue comme plus profonde et plus large que

juste punitive.

2.2.2 L’amnistie

Le concept de justice transitionnelle nous amène à nous poser la question de l’amnistie, qui

désigne l’oubli face à des actes posés. En effet, selon le dictionnaire Larousse (s.d.), il s’agit

d’un « acte du législateur qui efface rétroactivement le caractère punissable des faits

auxquels il s’applique. Selon le cas, l’amnistie empêche ou éteint l’action publique, annule la

condamnation déjà prononcée ou met un terme à l’exécution de la peine. » Freeman Dyson,

cité par (Hazan, 2008), explique la nécessité absolue de cette pratique, afin d’arriver à une

réconciliation, car : « sans la réconciliation, il ne peut y avoir de véritable paix. La

réconciliation signifie l’amnistie. (…) Afin de construire une véritable paix, nous devons

apprendre à vivre avec nos ennemis et oublier leurs crimes. […] L’amnistie n’est ni facile, ni

juste, mais l’alternative est un cycle sans fin de haine et de revanche ». L’auteur s’aligne sur

les fervents défenseurs de l’amnistie qui stipulent qu’il s’agit d’une recherche de vérité, en

passant obligatoirement par les faits historiques. Cependant, même si elle est présentée

comme humaniste, positive, réconciliatrice durant ses débuts, elle est aujourd’hui également

vivement critiquée. Comme le note Sophie Wahnich (2007), l’amnistie serait aujourd’hui une

manière de cacher la vérité historique, qui concrètement n’aiderait pas à diminuer la rancœur

des victimes qui veulent être reconnues comme tel. L’auteur va plus loin en expliquant que

l’amnistie est en fait un moment « où la justice vient légitimer une interprétation de l’histoire

des violences politiques qui ont été à l’œuvre dans la séquence où la question de l’amnistie

est posée » (Wahnich, 2007).

2.2.3 Justice transitionnelle et mouvements sociaux

Dans la justice transitionnelle, il apparaît souvent que les victimes ont besoin de

reconnaissance. Mais Christian Lazzeri (2016) définit cette théorie de la reconnaissance

comme « l’estime de l’agent pour lui-même en relation avec une interaction sociale réussie ».

L’auteur se réfère à Jon Elster, pour qui il existe différents acteurs qui entrent en jeu dans la

justice transitionnelle : les institutions supranationales, l’Etat-Nation, les agents individuels et

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les groupes sociaux (Cité par Lazzeri, 2016). Ce sont ces derniers qui nous intéressent ici. En

effet, Lazzeri (2016) explique que la justice transitionnelle implique une « tâche commune »,

c’est-à-dire que pour se préparer à l’avenir, que ce soit par la réconciliation, un procès, ou

autre, il faut tenir compte du passé, car « la transition est le lieu par excellence des luttes pour

la reconnaissance ». En effet, en Amérique Latine, il existe de nombreux mouvements

sociaux qui luttent pour une justice transitionnelle16. Axel Honneth (2004), philosophe et

sociologue allemand, explique qu’un conflit social nait souvent d’une injustice. En effet, pour

lui, reconnaissance et socialisation sont liées, et par conséquent les institutions nationales

acquièrent de la légitimité à partir du moment où elles garantissent une reconnaissance à

l’individu.

2.3 Théorie des mouvements sociaux

Il existe différents types de mouvements sociaux : les mouvements étudiants, écologistes,

pacifistes, réactionnaires, féministes, etc. On les définit souvent comme étant des

mouvements de foules ; différentes études17 sur le sujet existent, et ce depuis déjà de

nombreuses années (Touraine, 1984). Depuis les années 1960, on parle, selon Didier le Saout

(1999) de « nouveaux mouvements sociaux », comme étant des mouvements protestataires.

L’auteur explique que pendant la période industrielle, les mouvements sociaux servaient à

contrôler les ressources productives, mais à présent ils s’appliquent aussi à contrôler les

relations sociales, les services et la consommation de la société. Il existe différentes théories à

ce sujet, mais il n’est pas facile d’en trouver une définition. D’ailleurs, G. Mauger, cité par

(Mathieu, 2007) estime qu’il est très difficile de définir un mouvement social, car « l’absence

de définition du “mouvement social” fait […] partie de sa définition ». Quant à Lilian

Mathieu (2007), il soutient que les mouvements sociaux actuels se concentrent sur des

thématiques bien spécifiques (tels que la place de la femme, les soins de santé, le

réchauffement climatique, etc.) et que ces mouvements sont tous unis entre eux, que ce soit

par affinité, ou au contraire parce qu’ils sont en compétition ou en conflit. C’est ce qui

explique que l’on a assisté à la création de nombreux mouvements allant dans le même sens

puisqu’ils se situaient dans le même espace, et qu’ils s’inspiraient l’un l’autre (Mathieu,

2007). Ryckmans et Maquestiau (2008) quant à eux expliquent que les mobilisations

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!16 On pense notamment aux mères de la place de mai, en Argentine, qui demandent que les coupables soient punis. 17 On pense notamment à la « psychologie des foules » de Gustave Le Bon en 1895, ou « le sujet comme porteur de l’action sociale » et l’importance des valeurs d’Alain Touraine dans les années 1980.

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solidaires ne « sont créatifs (que) lorsqu’ils partent des injustices, se préoccupent de la

défense du juste pour chacun(e) et sont validés par le collectif : le juste pour nous tous ».

Selon Camille Goirand (2010), les mouvements d’opposition en Amérique Latine seraient

plutôt des « mouvements populaires », car ils partent généralement des classes pauvres et

moyennes dans le but d’obtenir plus d’égalité, de droits sociaux, moins de discrimination et

plus d’indépendance par rapport au pouvoir. Dans les années 1990, une baisse importante des

mouvements prend place, tandis qu’en 2000, de plus en plus de partis de gauche arrivent au

pouvoir, ce qui permet à certains meneurs18 des mouvements de participer à l’agenda

politique en faveur de leurs revendications (Goirand, 2010). Aujourd’hui, les revendications

sont de plus en plus des questions sociales, d’identité culturelle, d’appropriation des terres,

etc.

2.3.1 Genre et mouvement social

Les femmes ont mené bien des combats depuis des décennies. Elles se sont battues pour le

droit de vote, l’égalité avec les hommes, le droit à l’éducation, à l’avortement, etc. Pour ce

faire, elles ont souvent dû se rassembler entre elles, créer un mouvement. Diane Lamoureux

définissait en 1981 déjà un mouvement de femmes sous trois courants différents :

émancipateur, institutionnel et radical. Elle insiste sur l’importance de l’autonomie d’un tel

groupe, où chaque individu doit ressentir l’oppression contre laquelle le mouvement se bat,

qu’elle appelle « l’auto-conscience » (Lamoureux, 1981). Ryckmans et Maquestiau (2008)

ajoutent qu’un mouvement féminin qui deviendrait plus professionnel ou institutionnalisé

serait étouffé d’un point de vue dynamique du mouvement. Dans son ouvrage sur Kristina

Schulz, Christine Michel (2004) développe son idée sur le féminisme, dont elle distingue

deux types : social et culturel. Ce dernier a pour but d’amener une réflexion et un changement

de pensée, quant au féminisme social, il vise l’émancipation de la femme, en se battant pour

l’égalité hommes-femmes. Mais définir un mouvement social féministe n’est pas évident, on

pourrait dire qu’il s’agit d’un groupement de femmes qui s’identifient de manière identique à

une cause féminine et qui se battent pour leurs droits. Que ce soit au travers de sit-in, de

festivals, de centres d’information, d’activités culturelles,… ces femmes « sont susceptibles

de s'identifier subjectivement au féminisme, mais sans pour autant se définir strictement

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!18 C’est par exemple le cas d’Evo Morales, devenu président de la Bolivie

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comme « membres » ou « militantes » d'une organisation féministe, si informelle soit-elle »

(Bereni & Revillard, 2012).

Ces dernières années, on assiste à un réveil de la part des mouvements sociaux de manière

générale, mais également des mouvements féministes. En effet, de par le monde, on entend

les voix des femmes s’élever pour revendiquer leurs droits, et les mouvements en faveur des

droits des femmes sont devenus fort présents actuellement en Amérique Latine. Suite à

l’échec du néolibéralisme, on perçoit une croissance et une expansion de la gauche depuis

plus d’une dizaine d’années, qui s’observent par des politiques progressistes mises en place

par le gouvernement, ainsi que par le nombre croissant de mouvements sociaux mis en place

(A. Borron, 2005).

Jules Falquet (2007) explique que les mouvements féministes latino-américains sont surtout

connus pour leurs revendications sociales et leurs mouvements féministes depuis les années

1960. C’est surtout en 1980 qu’on assiste à une expansion des mouvements féministes, de

plus en plus concentrés sur des sujets bien précis, tandis que 1990 serait synonyme de

tensions entre les féministes radicales et les autres féministes (Falquet, 2007). Grâce à un

financement extérieur, ces groupes de femmes se professionnalisent et se transforment

souvent en ONG institutionnalisées, ce qui amplifie souvent les tensions internes aux

mouvements (Falquet, 2007 ; Curiel, Masson, Falquet, 2005). Pour Falquet (2007), le

mouvement féministe doit aujourd’hui mettre « un terme à la période de recomposition qu’il

traverse depuis une dizaine d’années et se réorganiser autour des nouveaux (et des anciens)

rêves et besoins des femmes, qui affrontent aujourd’hui un durcissement conjugué des

rapports de sexe, de « race » et de classe ». Aujourd’hui, cette tension au sein des

mouvements féministes est toujours présente. En effet, ne dit-on pas très souvent qu’il

n’existe pas une seule forme de féminisme, mais des féminismes (qui combattent le racisme,

l’exploitation, défendent les droits homosexuels,…).

2.3.2 Théorie de la mobilisation des ressources

La théorie de la mobilisation des ressources est née avec l’essor des mouvements sociaux

dans les années 1960, défendue principalement par Oberschall, Tilly ou encore John Mc

Carthy et Mayer Zald, qui analysent « la dynamique et la tactique de la croissance, du déclin

et du changement des mouvements sociaux » (McCarty & Zald, 1977).

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Cette théorie analyse la manière dont un mouvement social se crée et parvient à mobiliser des

adhérents en se basant sur trois facteurs essentiels, résumés ici par Anne Revillard et Didier

Lapeyronnie. Tout d’abord, il faut une mobilisation d’engagement (Lapeyronnie, 1988). Anne

Revillard (2003) explique que cela signifie qu’il est nécessaire que chaque individu modifie

son propre cadrage19 pour correspondre à celui des autres personnes du groupe afin que celui-

ci devienne actif, et que chaque membre doit s’engager dans une action collective, parce qu’il

s’identifie à la cause défendue par le groupe. Il s’agit par exemple de se rassembler afin de

défendre un intérêt, un mécontentement ou une cause commune face à une situation injuste.

Didier Lapeyronnie (1988) ajoute qu’ils adoptent alors le cadre de l’injustice, et le cadre

permet de définir le problème et suggérer des solutions. Il faut alors analyser la manière dont

les organisateurs du groupe réussissent à créer cet engagement, et surtout la manière dont ils

l’utilisent.

Le deuxième facteur des mouvements sociaux ce sont les opportunités politiques (Revillard,

2003), qui impliquent que chaque mouvement social se trouve en interaction avec d’autres

groupes dont ils sont dépendants, de par leur soutien ou non. Chaque auteur a sa propre

théorie. Anne Revillard (2003) cite Tarrow, qui relève quatre opportunités20 qui poussent les

mouvements sociaux à se former, qui sont ceux principalement évoquées dans la théorie de la

mobilisation des ressources. Mais d’autres auteurs, comme Gamson et Meyer (cités par

Revillard, 2003), prennent cela dans un sens plus large, et y intègrent une dimension

institutionnelle, c’est-à-dire qu’ils considèrent que d’autres aspects peuvent également

influencer la création des groupes sociaux (la conscience des classes, un discours politique, la

légitimité,…), ainsi qu’une dimension culturelle (les clivages sociaux, politiques ou

culturelles de la population). Quant à M. Lipsky (cité par Blin, 2005), il explique qu’il faut

absolument créer des alliances « avec des tiers partis du fait que ceux-ci, porteurs de

ressources de négociations, permettent de proposer plus aisément au groupe visé par la

contestation ce qu’il désire ».

Enfin, le dernier facteur est ce qu’on appelle la gestion des ressources (matérielles ou non),

qui sous-entend que la formation d’un groupe social dépend de la manière donc le groupe

parvient à mobiliser et organiser des ressources, afin de pouvoir participer à la prise de

décision et de pouvoir entrer en action (McCarthy & Zald, 1977 ; Revillard, 2003). Il n’existe

cependant pas de liste spécifique des ressources, puisque chaque auteur a sa propre idée

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!19 Notion de « Framing » selon D. Snow et R. Benford 20 L’ouverture de l’accès au système politique, l’instabilité des alignements politiques, des alliés d’influence, la division des élites.

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(l’argent, une autorité, la confiance,…). Didier Lapeyronnie (1988) souligne que chaque

individu participe dans le but d’obtenir quelque chose, même non-matériel (sentiment de

bienveillance, statut particulier,…), et que « les éléments déterminants sont les éléments

centraux : la capacité de réunir et d'utiliser de manière optimum, rentable, les ressources

contrôlées par l'acteur politique ».

Selon Michel Offerlé, il existe trois sortes de ressources qui permettent aux mouvements

sociaux de se mobiliser : Il est important de mobiliser un grand nombre d’individus, de réussir

à convaincre des personnes ayant de l’expertise et un pouvoir de persuasion, et d’utiliser ou

créer des scandales afin de sensibiliser des membres potentiels (cité par Douay, 2014). Pour

l’auteur, les réseaux sociaux permettent d’accéder à ces trois ressources facilement. A côté de

ces auteurs, Thierry Blin (2005) retient quant à lui cinq différentes ressources, qui sont les

ressources matérielles, symboliques, d’autorité, sociales, et coercitives. Toutes ces ressources

peuvent être présentes en plus ou moins grand nombre dans chaque groupe, sans

nécessairement être toutes présentes à parts égales.

Si cette théorie est devenue obsolète pour certains, de nombreux auteurs l’utilisent,

notamment dans l’analyse des réseaux sociaux de la Révolution Arabe (Eltantawy & Wiest,

2011). Nahed Eltantawy et Julie Wiest encouragent d’ailleurs d’autres chercheurs à

concentrer de futures études sur cette théorie des mouvements sociaux afin d’avoir une

« théorie du mouvement social appropriée et utile pour comprendre les mouvements sociaux

dans notre monde de plus en plus saturé de médias » (2017).

2.3.3 Impact de la croissance des mouvements conservateurs

Point de vue politique

On parle souvent du retour de la gauche en Amérique Latine en réaction aux différentes

politiques dictatoriales. Cependant, comme le cite W. Robinson (2011), on assiste récemment

à un retour des partis conservateurs sur le continent. Il n’est cependant pas facile pour ces

partis de trouver leur place, surtout avec les programmes sociaux des politiques de gauche,

séduisants pour le peuple. Le journaliste cite en exemple l’élection péruvienne de Mr Ollanta

Humala en 2016 (partisan de gauche), qui aurait prononcé comme discours que « plus jamais

le gouvernement ne servira les intérêts de l’élite qui vend les richesses minières du Pérou à

des multinationales. Tout cela doit changer. » (Robinson, 2011), tout en affirmant également

qu’il ne changera rien au fonctionnement économique péruvien. Le journaliste P. Paranagua

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(2016) estime qu’il ne s’agit pas d’un retour aux partis conservateurs, mais plutôt d’un

« recentrage au profit du centre droit (…) voire du centre gauche ».

Au Pérou, c’est Pédro Pablo Kuczynski qui fut élu en juillet 2016. La période de campagne a

en réalité, opposé les deux plus grands représentants de partis, Mr Kuczynski pour la droite

libérale, contre Mme Keiko Fujimori21, fille d’Alberto Fujimori (Caballero, 2016). Pour

Gerardo Caballero, journaliste au quotidien « El Comercio », l’un comme l’autre sont

conservateurs. Pour lui, les débats lors de la campagne ne permettaient en aucun cas la remise

en question du système en place, ni un quelconque changement, et selon lui cet aveuglement

au changement perdure depuis déjà de nombreuses années. Le reporter déplore le manque de

questionnement sur les ressources naturelles du pays, l’investissement privé, l’homosexualité,

l’avortement, etc. Cela est également dû, toujours selon l’auteur, au fait que Mr Kuczynski

était, avant d’être opposé politiquement à Mme Fujimori, un adepte des idées d’Alberto

Fujimori (Caballero, 2016).

En effet, le Pérou a un système de gouvernement unicaméral (Chaparro, 2016). Ce qui

signifie que même si Keiko Fujimori a perdu les élections, elle reste tout de même une

fervente opposante au président actuel, grâce aux 73 sièges sur les 130 que son parti a

remporté en avril de l’année passée, lors des votes législatifs (Chaparro, 2016). Ceci confère

donc d’énormes pouvoirs à ce parti, qui a notamment censuré la ministre de l’éducation en

septembre 2017, car elle avait osé émettre des doutes sur l’éducation mise en place par le

gouvernement (Diaz, 2017). Le Congrès a donc refusé la confiance au président et au

gouvernement, ce qui les a obligés à démissionner et à élire de nouveaux ministres. Le

nouveau ministre de la justice, Mr Mendoza, n’est autre qu’un défenseur de l’amnistie

d’Alberto Fujimori (Paranuaga, 2017).

Point de vue social

Face aux diverses politiques sans changement, de nombreux groupes sociaux tentent de se

faire entendre face à certaines décisions du gouvernement avec lesquelles ils ne sont pas

d’accord. Aujourd’hui, les mouvements populaires sont de plus en plus nombreux et influents,

allant même jusqu'à mettre parfois le gouvernement dans des positions délicates (Frères des

Hommes, 2015). Ramon Teves, membre du cetri22 note qu’il ne s’agit cependant pas de réels

mouvements sociaux puisque selon lui, il y a un clair manque organisationnel qu’il résume de !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!21 Pour beaucoup, c’est à cause du mauvais souvenir de son père, que Keiko Fujimori n’a pas gagné. 22 Centre Tricontinetal

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la sorte : « Ce à quoi l’on assiste aujourd’hui au Pérou, c’est à la politisation croissante de

l’insatisfaction générée par le modèle néolibéral, vendu comme un succès et se présentant lui-

même comme très performant, mais incapable de remédier aux problèmes endémiques que

sont la pauvreté et l’exclusion » (Teves, 2008).

Selon Amnesty International (2017), durant la première année de mandat du président (2016-

2017), plus de 200 mouvements de protestations sociales étaient enregistrées au Pérou. Mais

selon Camille Boutron (2016), chercheuse en sociologie, les mouvements sociaux du pays

sont « à l’image du pays : divisés selon les groupes d’intérêt, mis sous silence lorsqu’ils sont

portés par les classes populaires et paysannes, ou encore décrédibilisés, voir diabolisés (…)

». Elle explique que bien que marginalisés, les mouvements semblent faire du bruit, entre

autre grâce aux ONG qui se mobilisent de plus en plus, mais également grâce à l’écho

international de nombreuses causes qui touchent le pays, comme c’est le cas pour les

stérilisations forcées des femmes dans les années 1990.

Dans un rapport de l’USAID, on retrouve des chiffres de 2012, rassemblés par LAPOP23, qui

expose les facteurs déterminant la participation ou non à des manifestations en Amérique

Latine (Carrion & Zarate & Seligson, 2012). Les deux facteurs principaux semblent être une

expérience en tant que victime, ainsi que la corruption, tandis qu’un autre facteur important

est celui de la situation socio-économique, puisqu’il apparaît qu’une personne moins riche

soit plus active (Carrion & Zarate & Seligson, 2012).

2.4 Mouvements sociaux et communication

2.4.1 Communication des mouvements sociaux

Les stratégies de communication ont évolué au fil des années, surtout dernièrement grâce à

l’évolution des moyens de communication dont l’arrivée de la radio, la télévision, et

aujourd’hui les réseaux sociaux. Erik Neveu (1999) expose deux dimensions caractéristiques

des mouvements sociaux et de leurs protestations, à savoir qu’il faut d’abord un groupe qui ait

des revendications qui leur permettent de se mobiliser, ainsi qu’une « mise en scène

médiatique de la protestation », qui influent sur la visibilité, mais amènent également une

inégalité entre les différents mouvements sociaux. Les groupes dotés de plus d’expertise, de

ressources et faisant le plus de bruit ou ayant le plus d’images frappantes seront bien plus

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!23 LAPOP est une institution académique qui réalise des enquêtes en Amérique Latine sur l’opinion publique depuis plus de 30 ans. Ici il s’agit de chiffres de 2012 car ils ne mentionnent pas ces chiffres dans les rapports plus récents.

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relayés par les médias qui sont sans cesse en quête d’extraordinaire afin de vendre leurs

informations. Mais l’auteur explique que d’autres acteurs tout aussi importants entrent en jeu

lors de la médiatisation des groupes : les autorités publiques, les forces de l’ordre, et parfois

même les partis politiques. Via cette médiatisation, les mouvements sociaux permettent de

remodeler sans cesse l’opinion publique par les débats qu’ils créent sur les enjeux sociaux de

la société (Neveu, 1999). Quentin Hurel (2016) dénonce un traitement médiatique qui relate

beaucoup trop les côtés négatifs des mouvements sociaux. En effet, il explique que la

communication est des plus importantes pour les mouvements sociaux, mais que ceux-ci sont

également dépendants des systèmes de communication sans lesquels ils ne peuvent se faire

entendre. Cela est sans doute moins vrai depuis l’arrivée des réseaux sociaux, avec pour

conséquence que chacun peut se faire entendre, sans avoir besoin de passer par les médias

traditionnels, bien que ceux-ci gardent tout de même la mainmise sur l’information. Aussi,

selon l’auteur, la proximité des médias avec certains hommes politiques, ainsi que la manière

dont le journaliste approfondi le sujet, influencent fortement le traitement de l’information

(Hurel, 2016).

2.4.2 Communication sur les réseaux sociaux

Aujourd’hui, les réseaux sociaux sont essentiels pour la communication des mouvements

sociaux, et ils sont nombreux à les utiliser. Non seulement pour se faire connaître et entendre

mais surtout, parce ce que ceux-ci permettent le débat et une meilleure organisation.

Daniel Drache (2014) explique que certaines personnes estiment que le rôle des réseaux

sociaux est exagéré et car selon eux, ceux-ci n’aident pas à lancer une révolution ou amener

un changement social. Par contre, les défenseurs de ces réseaux avancent beaucoup

d’arguments dont l’aspect révolutionnaire et rassembleur, mais également une manière de

faciliter la lutte depuis le bas (Drache, 2014). L’auteur poursuit en expliquant que les

individus passent de l’état passif à des êtres actifs qui participent à la création du mouvement,

ce qui empêche quelques médias de monopoliser l’espace public. Il ajoute qu’aujourd’hui, le

débat public ne se passe plus uniquement entre les élites et les intellectuels, mais que chacun

peut défier le pouvoir. Un autre aspect positif est que les réseaux sociaux permettent une

communication rapide vers le public, ainsi qu’une meilleure organisation d’événements

(Drache, 2014). Zeneb Touati (2012) ajoute qu’aujourd’hui beaucoup de personnes possèdent

un téléphone avec un appareil photo, ce qui rend l’échange d’informations plus facile. Il

affirme que les réseaux sociaux ne sont pas facilement contrôlables par l’état, ce qui leur

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laisse une certaine liberté. Un rapport de l’UNDP24 (2012) nuance cela, en expliquant que ce

sont les citoyens qui ont ce contrôle aujourd’hui, grâce à la transparence qu’offre internet.

Cependant, le rassemblement et l’action collective sont primordiaux pour arriver à lutter

efficacement, car seul, on ne peut tenter d’imposer un changement (Drache, 2014). Raja

Fenniche (2014) ajoute que les réseaux sociaux permettent d’amplifier et intensifier les

mouvements sociaux, grâce à ce qu’elle appelle « l’espace public qui se situe à mi-chemin

entre le réel et le virtuel, puisqu’il trouve ses expressions aussi bien sur la toile que sur les

lieux publics ».

Un autre aspect important qui s’amplifie grâce aux réseaux sociaux, c’est l’utilisation du

corps, celui-ci devenant un puissant moyen d’expression pour interpeller dans l’espace public

(Fenniche, 2014). On entend régulièrement parler des Femen25, de militants qui s’immolent

par le feu, des personnes tatouées, des manifestations théâtrales,… Pour Raja Fenniche

(2014), la personne qui exprime ses revendications à travers son corps le fait souvent pour

communiquer sa souffrance, lorsque les mots ne suffisent plus. Elle explique qu’avec internet,

ces images censées choquer peuvent circuler en masse et rapidement. Elle rejoint ici Daniel

Drache en parlant d’individus qui deviennent actifs et acteurs. Lorsque l’utilisation du corps

se fait en masse, c’est comme s’ils symbolisent le « corps social ». Par le nombre, l’image en

est d’autant plus frappante (Fenniche, 2014). En effet, de nombreux mouvements sociaux

utilisent le corps comme moyen d’expression.

En Amérique Latine, de nombreux conflits sont transférés vers internet et les réseaux sociaux

(Perrier-Bruslé, 2012). On voit d’ailleurs grâce au rapport de l’UNDP de 2010 que

l’utilisation fréquente d’internet a une influence sur la participation aux manifestations

(UNDP, 2010).

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!24 UNDP: United Nations Development Programme 25 Mouvement féministe Ukrainien qui défend les droits des femmes par des actions provoquantes, souvent seins nus.

Graphique représentant le lien entre l’utilisation d’internet et la participation à des protestations. (UNDP, 2012)

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3 Méthodologie

Cette recherche, réalisée par différentes approches, a pour objectif la compréhension du

mouvement social actuel face aux stérilisations forcées des années 1990 au Pérou. La

première partie consiste en une étude historique et littéraire sur les débats académiques

actuels. Sans pouvoir se rendre sur place, c’est depuis la Belgique que la partie analytique a

été réalisée, via l’étude des réseaux sociaux, et quelques interviews.

Afin de percevoir le rôle des réseaux sociaux dans la lutte pour le droit des femmes, l’analyse

se concentrera principalement sur le mouvement « Somos 2074 y muchas mas », qui sera le

mouvement de référence. La tentative d’analyse de stratégie des média de ce mouvement via

les réseaux Facebook et Twitter, ainsi que son impact sera accompagnée d’une comparaison

avec deux autres mouvements. Cette analyse sera complétée par des interviews semi-

structurées26 avec différents acteurs du sujet. Ces personnes ont été choisies de manière

consciente afin de refléter et comprendre au mieux la situation. Il y a ici un parti-pris clair, car

il a été décidé de se concentrer sur les mouvements qui luttent pour le droit des femmes, sans

pouvoir analyser l’opposition. Ces interviews ont été menées avec trois personnes,

représentant chacune une organisation, et parlant donc « au nom » de cette organisme et non

de manière personnelle. Tout d’abord, Mr Alan Benavides, rédacteur du journal « La Plaza »,

rassemblant des journalistes indépendants, définit sa presse comme indépendante et libre,

même si beaucoup parmi eux se considèrent féministes. Ils publient régulièrement des articles

sur des sujets qui touchent les femmes comme la prostitution, l’avortement, etc. Ensuite,

l’organisme « Espacio Abierto » se définit comme un lieu de « communication populaire »,

dont le travail artistique vise à sensibiliser la population. Ils se considèrent également comme

féministes, mais insistent sur le fait qu’ils sont également beaucoup d’autres choses, tel que

anticapitalistes ou encore antipatriarcales. Enfin, il y a Zurarda Rivero, qui est une jeune

femme péruvienne qui offre beaucoup de son temps libre aux mouvements sociaux, et est très

active lors de manifestations, notamment celles de « Somos 2074 y muchas mas ».

3.1 Choix des analyses

Pour avoir un aperçu des débats qui animent le pays aujourd’hui autour des femmes et des

stérilisations forcées, les réseaux sociaux semblent être une belle porte d’entrée. Pour ce faire,

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!26 Ceci signifie que l’interviewer pose des questions ouvertes, auxquelles la personne questionnée peut répondre de manière libre, flexible, et passer d’un sujet à l’autre.

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l’utilisation de la « théorie de la mobilisation des ressources » semble être des plus adéquates.

En effet, elle permet d’avoir une vision d’ensemble sur la manière dont ce groupe utilise les

réseaux sociaux, et de voir la pertinence de ceux-ci. Il ne s’agit pas ici de réaliser une étude

qui se vanterait d’être scientifique, mais plutôt d’analyser une partie de la population active

sur les réseaux sociaux. De nombreux auteurs citent et confirment les effets libérateurs que

permettent ces réseaux. Le choix s’est donc porté sur les réseaux sociaux car ceux-ci sont un

moyen de communication fortement utilisés en Amérique Latine. De plus, le collectif

« Somos 2074 y muchas mas » ne possède pas de site internet et utilise donc uniquement les

réseaux sociaux comme stratégie de communication, mais également d’un point de vue

organisationnel. Les réseaux sociaux permettent donc d’avoir une vue d’ensemble sur ce

mouvement social, leurs actions, leur public, et les débats actuels. En ce qui concerne les

interviews, chaque personne a été choisie afin d’avoir un point de vue journalistique,

artistique et actif. Cependant, il est important de savoir que la principale analyse se fera sur

les réseaux sociaux que les interviews viennent compléter, et ne sont à considérer que comme

une partie inférieure de l’analyse.

Bien évidemment, nous sommes conscients que l’analyse se porte sur une certaine tranche de

la population. En effet, les réseaux sociaux, même s’ils sont utilisés par de nombreuses

personnes aujourd’hui, ne représentent pas la population péruvienne dans son entièreté. On y

retrouve une certaine tranche de la population, que l’on qualifiera d’active sur les réseaux

sociaux, représentée par une population d’un âge estimé entre les 25 et 60 ans, donc une

population assez diversifiée. Aussi, notons que sur ces réseaux, la population pourrait,

derrière son écran, partager plus facilement sa pensée en se sentant plus à l’aise qu’en public

,ce qui peut également être perçu de manière négative, puisque l’on pourrait facilement y dire

beaucoup de choses qu’on ne penserait jamais révéler. De plus, il ne s’agit ici que d’une

analyse partielle, et en aucun cas, d’une analyse complète et détaillée. Aussi, nous n’avons

aucune idée si les administrateurs exercent une quelconque censure, ni si certains

commentaires sont filtrés. N’ayant pas réussi à établir de contact direct avec les fondatrices du

mouvement « Somos 2074 y muchas mas », il est donc difficile de prétendre à certaines

vérités. Pour ce qui est des interviews, il est clair qu’il aurait été intéressant d’interviewer bien

plus de personnes, afin d’avoir une vision plus globale et complète. De plus, il serait

intéressant de voir le contre-courant, c’est-à-dire toutes les personnes qui s’opposent à ces

mouvements de lutte ou qui ne croient pas à la véracité des stérilisations forcées. Enfin, il est

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également important de constater la distance qui nous sépare du lieu d’action, et qui empêche

une certaine proximité avec les protagonistes, qui aurait permis une autre approche du sujet.

3.2 Démarche Le parti-pris de se concentrer sur le mouvement « Somos 2074 y muchas mas » s’explique par

le fait qu’il s’agit sans doute de l’organisation la plus importante qui travaille sur ce sujet.

L’analyse des réseaux sociaux s’est effectuée sur l’année écoulée, ce qui permet de rester

focalisé sur l’actualité, sans s’éparpiller. De plus, les analyses ne portent que sur les réseaux

Facebook et Twitter, bien que certains mouvements soient présents sur d’autres sites tels

qu’Instagram par exemple, sans pourtant y être réellement actifs. Aussi, pour une question de

facilité, nous utiliserons les mots anglais tels que « likent », « tweets » et « retweets », mots

utilisés au quotidien aujourd’hui dans la langue française et qui ont tout leur sens ; il est vrai

qu’ils n’ont pas de réelle traduction française.

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4 Analyse Le mouvement « Somos 2074 y muchas mas » s’inscrit dans le cas de justice transitionnelle,

car en effet le mouvement revendique une réparation pour des victimes d’actes violents du

passé, comme le soulignait le rapport des Nations Unies (2008). Le Conseil de Sécurité des

Nations Unis (2004) insistait sur la complexité juridique de faits historiques, et c’est

exactement cette notion historique qui rend la situation difficile mais d’autant plus importante

pour ces femmes, car le président continue de nier les faits. La réconciliation sociale semble

donc difficile, tant qu’il sera question d’éventuelle amnistie de l’ancien président. Le

mouvement, en luttant pour la reconnaissance de ces victimes historiques, lutte en réalité

également pour le droit des femmes aujourd’hui et de demain. Comme le résume une de leurs

activistes, « ces actions visent à sensibiliser, informer, dialoguer et débattre, afin d’arriver à

un changement des mentalités de la société sur la question des droits sexuels et reproductifs »

(Z. Rivero, communication personnelle, 2 décembre 2017).

!4.1 Stratégie des médias : « Somos 2074 y muchas mas »

Afin d’analyser au mieux ces médias ainsi que la réceptivité et l’efficacité de leurs

publications, il est important de se fixer une certaine méthode. Pour ce faire, nous allons

utiliser la théorie de la mobilisation des ressources comme fil conducteur, afin de nous guider

au mieux dans cette analyse. Nous allons donc, tout d’abord tenter de percevoir la manière

dont les organisateurs créent l’engagement (mobilisation d’engagements). Ensuite, nous nous

concentrerons sur les opportunités politiques, c’est-à-dire les interactions avec l’extérieur, et

leurs apports au mouvement. Enfin, une troisième partie sera consacrée à l’étude de la gestion

des ressources. Ce point sera le plus important, puisqu’effectivement, les différents auteurs

ont recensé différentes ressources qui permettent de donner une idée de la manière dont le

mouvement utilise celles-ci, afin de lancer le débat et entrer en action.

Il est tout d’abord intéressant de noter que le groupe publie les articles de manière aléatoire en

ce qui concerne la fréquence. Il n’y a pas de tentative de publier quelque chose tous les jours,

comme certains pourraient tenter de faire, afin de maintenir un contact permanent avec le

public. Il peut parfois s’écouler une semaine avant qu’un nouveau post apparaissent, tandis

que certains jours plusieurs articles sont publiés. C’est par exemple le cas du 4 octobre 2017,

où quatre articles ont été postés en un jour, ce qui n’a pas empêché la page de récolter sur

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35!

trois des quatre articles 35, 21 et 113 likes. Ceci démontre que le jour et « l’abondance » de

publication n’a aucune influence sur le suivi par le public.

4.1.1 Mobilisation d’engagement

De nombreuses personnes les suivent sur les réseaux sociaux. On note cependant que malgré

les 21.000 personnes likant la page, une partie inférieure est réellement active. On peut donc

affirmer qu’ils ont réussi à rassembler beaucoup de monde autour de leur cause, mais il

semble qu’il n’y ait qu’une petite partie qui soit active et se sente concernée. Il existe

aujourd’hui des spécialistes des réseaux sociaux27 qui donnent des conseils pour créer de

l’engagement sur ceux-ci. En se basant sur les publications de deux d’entre elles : Clémence

Alonzo de Revel (2016) et Isabelle Mathieu (2012), nous pouvons faire émerger certaines

caractéristiques.

Contenu des publications

Tout d’abord, il est conseillé de publier régulièrement un contenu diversifié, mais il est

important également de segmenter celui-ci afin de s’adresser directement à certaines tranches

de la population (Alonzo de Revel, 2016). Cet avis est partagé également par le journal La

Plaza, qui considère que les réseaux sociaux ont l’avantage de pouvoir partager énormément

d’articles de rapports, de témoignages sur ce qui se passe (communication personnelle, 19

novembre 2017).

D’un strict point de vue de contenu, c’est une page assez diversifiée qui attire par ses

publications tantôt plus intellectuelles, tantôt plus visuelles, mais toujours avec l’idée de

dénonciation ou d’action. On y recense pas mal d’articles de journaux ou de documents

officiels sur les stérilisations et l’avancée juridique, mais également sur la politique ainsi que

sur Alberto Fujimori. Aussi, il y a pas mal de partage d’articles et de publications d’autres

organisations, invitant à des événements ou apportant des informations, que ce soit de

l’organisation Demus, des Nations Unies, etc. Aussi, ils publient pas mal de textes eux-

mêmes pour inviter aux manifestations, présenter les avancements, ou tout simplement pour

sensibiliser au sujet. Cependant, il ne semble pas y avoir de segmentation, les articles

s’adressent à tout le monde. Parmi ce contenu, il est recommandé plus particulièrement

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!27 Qu’on appelle « stratégistes marketing » ou « entrepreneurs »

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d’intégrer des photos et des vidéos afin d’attirer le regard et de rendre les informations plus

attractives (Mathieu I., 2012). Il est vrai que ce qui fonctionne le mieux sur cette page, ce sont

les publications plus visuelles, qui permettent à l’utilisateur de vite comprendre de quoi il

s’agit. Ces publications visuelles consistent en des reportages vidéo, des photos, des images

graphiques du nombre de victimes, etc. En effet, très peu de publications ne contiennent

aucune image.

Les publications du mouvement sont toujours accompagnées d’un message écrit par eux. Ces

messages sont très souvent un appel à la lutte, au combat et à la justice. Il arrive souvent que

pour interpeller, elles posent des questions tel « Jusque quand va-t-on devoir attendre pour la

justice ? », et usent de beaucoup de points d’exclamation. Mais pour interpeller, elles

n’hésitent pas à utiliser des mots forts, et ce, très régulièrement. Ceux qui reviennent le plus

souvent sont les mots « justice », « plus jamais », « victimes », « crimes » ou encore

« Fujimori ». Le groupe utilise également des slogans qu’ils répètent régulièrement sur les

publications, comme « Il n’y a qu’une seule vérité ». On perçoit ici une réelle utilisation des

réseaux à des fins de dénonciation et d’invitation à l’engagement via les mots qu’ils

choisissent, et la tournure des phrases.

Interaction

Un deuxième aspect qui est souvent suggéré est d’échanger avec le public (Alonzo de Revel,

2016 ; Mathieu I. 2006), par le biais de questions posées par les organisateurs, mais également

de leurs réponses et de leurs réactions aux commentaires, afin de créer de l’interaction.

Le nombre de like et de partage permet d’avoir une idée de la portée de l’article sur le public.

En effet, si l’utilisateur prend le temps de cliquer dessus ou de partager, cela donne une

indication de combien de personnes l’ont lu ou vu, et ont pris ce temps là en plus. Une

première observation est que ces derniers mois, le nombre de personnes touchées par les

publications a augmenté. Depuis janvier, le nombre de likes a enflé sur différents articles,

ainsi que le nombre de like autour de moments clés, comme par exemple lors de la campagne

#laverdadesunasola28 lancée par le mouvement cette année. Cette campagne de sensibilisation

demandait au public de partager leurs publications en nombre, et le 4 août, une publication

expliquant la campagne a récolté 357 likes, 170 partages, et 12 commentaires. Bien sûr,

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!28 Comprenez « Il n’y a qu’une seule vérité »

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certains articles sont plus populaires que d’autres. Ceux qui font le plus réagir sont les

publications de témoignages de victimes, les articles sur la probable amnistie d’Alberto

Fujimori, ainsi que les photos et les vidéos des manifestations.

En ce qui concerne les commentaires, et donc les échanges avec les administratrices du

groupe, mais également entre les utilisateurs, la page semble avoir moins de succès. Daniel

Drache (2014) expliquait que les réseaux sociaux permettaient de créer le débat, cependant on

remarque ici le faible nombre de débat. En effet, on peut aisément recenser cinq articles sans

commentaires, pour un article avec quelques commentaires, ceux-ci dépassant rarement les

dix, voir quinze réactions. On note aussi que les échanges avec les responsables sont très

rares. Tout d’abord parce qu’il n’y a pas énormément de commentaires, donc moins

d’opportunités de répondre, mais on note également que les quelques fois où ces femmes ont

commenté leurs articles, c’était en réponse à un autre commentaire qui soit posait une

question, soit postait un commentaire négatif par rapport à l’organisation, qui se devait d’y

répondre.

Evénements

La communication concernant les événements organisés est très importante (Mathieu I.,

2006), car l’objectif est d’y voir du monde. Sur la page Facebook de « Somos 2074 y muchas

mas », les publications relatant les événements passés et à venir rencontrent pas mal de

réactions sur la page Facebook. En effet, c’est via cette page qu’ils invitent le public à

participer aux manifestations, ainsi qu’à des ateliers organisés autour du sujet.

Dans les événements partagés sur Facebook, les organisateurs rappellent le but de la

manifestation, et appellent à la lutte et au rassemblement. En ce qui concerne les événements

en eux-mêmes, et le nombre de participants, il n’est pas possible de le vérifier via les réseaux

sociaux. Cependant, pour avoir une idée, la dernière manifestation avait lieu le 7 juillet 2017,

et se concentrait principalement sur la dénonciation de l’amnistie d’Alberto Fujimori.

L’événement annonçait 64 participants, et 150 personnes intéressées. Enfin, ces pages

événementielles permettent également de réaliser que la page Facebook est un moyen de

communication entre les manifestants. En effet, sur la page de la manifestation du 7 juillet,

une femme demande aux autres où elles se trouvent, pour les rejoindre (Somos 2074 y

muchas mas, 2017).

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Via les réseaux sociaux, le mouvement semble donc parvenir à créer un certain engagement,

sans réussir à toucher la majorité du public, qui reste très segmenté. Ils utilisent cet

engagement en invitant aux manifestations, afin d’avoir le plus de monde possible, mais ils

demandent également au public de partager le contenu de leur page, afin d’avoir une visibilité

élargie.

4.1.2 Opportunités politiques

Les opportunités politiques représentent l’interaction qu’a un mouvement social avec

d’autres, afin d’obtenir un éventuel soutien de leur part (Revillard, 2003). Ce soutien peut être

d’ordre politique, juridique, social,… et permet une plus large visibilité.

Sur les réseaux sociaux, il est important de partager des publications d’autres pages afin d’être

non seulement visibles par leurs publics, mais également afin d’espérer un retour et une

collaboration avec ceux-ci, pour qu’ils partagent également les publications et événements à

leur public. « Somos 2074 y muchas mas » possède un réseau lui permettant d’être visible sur

des plateformes et des pages autres que les leurs. Le périodique La Plaza et le collectif

Espacio Abierto font partie de cette communauté, et assurent que le droit à l’identité sexuelle

est aussi important que l’éducation du genre. Ils ne luttent pas uniquement pour le droit des

femmes. Le rédacteur du journal confie qu’ils écrivent des articles sur le sujet, car pour

eux « les stérilisations forcées sont une violation flagrante des droits de l’homme contre les

femmes pauvres autochtones » (La Plaza, communication personnelle, 19 novembre 2017).

Les artistes quant à eux, parlent des victimes de stérilisations et soutiennent la cause des

personnes stérilisées au travers de leurs actions. C’est important pour eux, car en même

temps, ils luttent contre l’état, qui est « un clair héritage de Fujimori : corrompu, néfaste, qui

a violé des droits humains », mais également contre l’église qui reste très conservatrice

(Espacio Abierto, communication personnelle, 28 novembre 2017).

« Somos 2074 y muchas mas » partagent des publications d’autres mouvements et

organisations, principalement féministes et essentiellement pour un partage d’informations ou

d’invitations à des événements semblables à ceux qu’ils organisent. Et les autres organisations

partagent elles aussi, les informations et événements du mouvement « Somos 2074 y muchas

mas ». Il s’agit en quelque sorte d’une communauté de mouvements, s’intéressant aux mêmes

sujets. Ceci permet de déterminer que le mouvement est reconnu et soutenu dans le pays, ce

qui l’aide à accroitre sa visibilité, et cela pourrait également expliquer l’augmentation du

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nombre de likes, partages et commentaires sur leur page ces derniers mois. Cependant, force

est de constater qu’ils n’ont pas beaucoup de soutien juridique et politique. S’il est vrai que le

mouvement publie des articles et des témoignages de personnalités acquises à leur cause, il

n’y a pas de lien direct et personnel avec ceux-ci. Cependant, ils utilisent cette autorité pour

appuyer leurs revendications et informations.

On peut donc affirmer que le réseau créé par « Somos 2074 y muchas mas » est une source

importante pour leur mouvement, tant au niveau de l’information que de la visibilité.

4.1.3 Gestion des ressources

On entend ici la manière dont un mouvement parvient à mobiliser et organiser ses ressources,

afin d’entrer en action (McCarty & Zald, 1977). Comme le soulignait Didier Lapeyronnie

(1988), le minimum étant la capacité à se réunir, ce que le mouvement fait bel est bien, ainsi

que l’utilisation les ressources de manière rentable, ce que nous allons analyser maintenant.

Le premier aspect souligné par Michel Offerlé (cité par Douay, 2014) était la capacité à se

rassembler en nombre. « Somos 2074 y muchas mas » rassemblent29 entre 10 et 30 personnes

à chaque rassemblement. Ceci peut sembler peu en comparaison avec le nombre de personnes

qui likent la page, mais comparativement à la manière dont le sujet est traité au Pérou, ce

chiffre est tout de même significatif. Cependant, le deuxième aspect ne semble pas réalisé. En

effet, bien qu’ils partagent des articles et des propos d’avocats, de spécialistes juridiques etc,

il apparaît que le mouvement ne dispose d’aucune expertise particulière. Enfin, le dernier

point souligné par l’auteur est l’utilisation de scandales en vue de sensibiliser le public. Ce

point-ci semble être atteint grâce notamment, aux manifestations très visuelles.

L’analyse qui suit tentera de percevoir l’efficacité du mouvement à mobiliser les cinq

ressources présentées par Thierry Blin (2005).

Ressources matérielles

Les ressources matérielles et financières sont non vérifiables en se basant uniquement sur les

réseaux sociaux, et il serait, à cet effet, intéressant de s’entretenir avec les membres du réseau.

Cependant, deux choses sont observables. Premièrement, on note que les organisatrices

programment des réunions, et que pour cela, elles ont besoin au minimum d’un lieu à leur

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!29 Après observation des images récoltées sur Facebook et Youtube.

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disposition. Ceci ne signifie pas que ces locaux leurs appartiennent, mais qu’elles parviennent

à se procurer un endroit pour quelques heures. De plus, sur la page événementielle d’une de

leurs manifestations, elles soulignent qu’elles amèneront de la peinture, des jupes, ainsi que

des fleurs et des bougies. Ceci prouve qu’elles possèdent certains fonds budgétaires pour leurs

manifestations.

Ressources symboliques

Différentes ressources sont rassemblées sous ce nom. Tout d’abord, il y a le nombre de

manifestants qui, comme déjà souligné, ne sont pas au rendez-vous en grand nombre. Ce

nombre (entre 10 et 30) peut s’expliquer par le fait que les manifestantes sont principalement

des femmes engagées, des filles de victimes, ou en tous les cas, des femmes marquées par ces

événements (Z.Rivero, communication personnelle, 2 décembre 2017). Mais les ressources

symboliques peuvent également être mesurées par rapport à la mise en évidence d’une

position de faiblesse, ce qui semble être clair dans ce cas-ci. En effet, les manifestantes

revendiquent clairement leur statut de victime. Une dernière ressource symbolique consiste en

l’analyse des images associées au mouvement.

Effectivement, ce mouvement utilise abondamment les images pour faire passer ses messages.

Lors des manifestations, les femmes sont habillées soit de robes noires, soit de jupes

traditionnelles indigènes, ainsi que de tresses et de chaussures traditionnelles (Z.Rivero,

communication personnelle, 2 décembre2017). On note ici la volonté de représenter les

victimes et de parler en leur nom. Mais en observant les images de manifestations, on perçoit

directement le côté provocateur du mouvement, par des images qui se veulent interpellantes.

En effet, en plus des habits traditionnels, les femmes se simulent du faux sang en se peignant

les jambes, et portent une image des organes reproducteurs féminins, avec un chiffre dessus,

représentant chaque victime par un numéro. Comme le soulignait Raja Fenniche (2014), elles

utilisent leur corps pour véritablement incarner la souffrances des femmes indigènes de

l’époque. C’est également ce que Erik Neveu (1999) appelait la « mise en scène

médiatique de la protestation ».

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Cette idée de dénonciation et provocation s’observe également sur le logo du mouvement, qui

se retrouve en « photo de profil30 » sur les réseaux sociaux. Le logo est primordial, puisqu’il

permet au public de comprendre le message, de manière implicite ou explicite. En fonction de

la police utilisée, de l’interaction du texte et du dessin, des couleurs,… le message sera perçu

différemment (Celhay, 2014).

Le logo de « Somos 2074 y muchas mas » est composé de trois couleurs. Les couleurs noir et

rouge ressortent sur un fond blanc, donnant un effet chaleureux, énergique mais également

provoquant, tout en restant élégant. La police est quant à elle accessible, assez simple mais

sobre. L’utilisation des lettres majuscules souligne le côté revendicateur et contestateur du

mouvement. De plus, le mot « Somos » et le nombre « 2074 » se superposent quelque peu, et

leur police est fortement accentuée pour une meilleure visibilité sur l’affiche. Enfin, le logo

contient un ovaire traversé par une cicatrice, accompagné de tâches de sang pour amplifier le

côté provocateur, mais également faire le lien avec leurs habits lors des rassemblements. Le

choix du logo est pertinent, puisqu’on perçoit directement le côté revendicateur du

mouvement, sans se sentir agressé.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!30 Sorte de carte d’identité de l’association sur les réseaux sociaux.

Photo d’une manifestation, récupérée sur

Facebook le 20 novembre.

Photo d’une manifestation, récupérée sur

Facebook le 20 novembre.

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En ce qui concerne les photos de couvertures 31 , on retrouve surtout des photos de

manifestations, c’est-à-dire de femmes tenant des pancartes avec des slogans, l’image des

organes génitaux féminines sur elles, en train de crier leur slogan de toutes leurs forces, etc.

On retrouve également des images graphiques relatant le nombre de femmes décédées à cause

des stérilisations. Parfois ces photos et images sont accompagnées par un petit texte appelant

au rassemblement, mais toujours en préservant cette cohérence de couleurs et de police. En

voici quelques exemples :

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!31 Photo que l’on retrouve tout en haut sur les réseaux sociaux, donc une des premières choses que l’on voit lorsqu’on arrive sur la page.

Logo représentatif du mouvement, récupéré le 20 novembre sur le site Facebook.

Photo de couverture du 2 juin 2016,

récupérée sur Facebook le 20 novembre.

Photo de couverture du 13 novembre 2016,

récupérée sur Facebook le 20 novembre.

Photo de couverture du 4 octobre 2017,

récupérée sur Facebook le 20 novembre.

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Cette cohérence se retrouve également sur les différentes images qu’ils partagent, sans oublier

le logo, présent à chaque fois, tel que sur l’exemple suivant :

L’utilisation de la tenue traditionnelle prête à réflexion. En effet, on peut se poser la question

du but réel de ces femmes, car il s’agit d’une véritable mise en scène. On peut imaginer qu’il

s’agit d’une façon de représenter ces femmes, une manière de dépasser le fossé qui existe

dans la population péruvienne et de parler en leur nom. On peut dès lors se demander si cette

appropriation d’identité est une forme d’émancipation face aux idées coloniales, ou au

contraire, une continuité de la distinction et de la discrimination. De plus, on pourrait

percevoir ce mouvement comme très urbain, des femmes de la ville défendant la bonne cause

des pauvres citadines. Richie Dean (2016) explique que des vagues de migrations des zones

rurales vers les zones urbaines ont eu lieu au Pérou depuis plus de 50 ans, à cause de la

pauvreté et des problèmes politiques. En effet, Zurarda Rivero (2 décembre 2017) affirme que

les femmes actives du mouvement « Somos 2074 y muchas mas » sont quasiment toutes

originaires de la campagne, qu’elles se sont urbanisées et sont aujourd’hui « les portes paroles

des Quechua, on représente nos familles », même si elles assurent ne pas pouvoir parler au

nom de toutes les péruviennes.

Ressources d’autorité

Thierry Blin (2005) définit les ressources d’autorité comme étant les différentes compétences

(juridiques, politiques, institutionnelles) des membres du groupe, qui peuvent également se

mesurer par le statut que possède un groupe ou ses membres. Comme déjà relevé plus haut, ce

point-ci ne semble pas être fortement développé. En effet, il n’apparaît pas que ce groupe

possède des compétences spéciales en matière juridique ou politique, bien qu’elles aient un

Photo du 31 octobre 2017, récupérée sur

Facebook le 20 novembre.

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soutien indirect de la part de certaines personnalités. Aussi, grâce à leur réseau étendu, elles

collaborent régulièrement avec d’autres organisations, et partagent énormément d’articles

juridiques et politiques. Cependant, il est clair que ces femmes jouent de leur statut de victime

pour faire parler d’elles et revendiquer leurs droits.

Ressources sociales

Ce type de ressources représente le réseau que possède le mouvement social (Blind, 2005).

Comme nous l’avons déjà expliqué dans la partie « opportunités politiques », le mouvement

travaille régulièrement avec d’autres associations et groupes, ce qui leur permet une visibilité

étendue. Cependant, cela ne semble pas avoir d’influence sur leurs manifestations. En effet, il

s’agirait plutôt d’un échange d’informations, d’un partage de publications, ainsi que d’une

opportunité de publicité pour l’un ou l’autre événement. Cela se déroule le plus souvent avec

d’autres groupes féministes ou d’autres groupes qui défendent la cause féminine, l’objectif

étant de se soutenir.

Ressources coercitives

La « force publique » que possède un mouvement, mais également le statut de pouvoir que

possèderait l’un des membres du groupe, représente le contenu des ressources coercitives

(Blin, 2005). « Somos 2074 y muchas mas » ne semble pas avoir de réelle force publique.

L’association semble avoir un certain impact via ses manifestations et les réseaux sociaux,

mais on ne peut pas parler ici de force publique. Cependant, elle fait partie d’un ensemble de

mouvements qui luttent pour les droits de femmes de manière générale, qui quant à eux sont

assez bien reconnues au Pérou.

4.2 Impact du mouvement social via les réseaux sociaux

Sans se rendre sur place, il est difficile d’estimer le réel impact du mouvement « Somos 2074

y muchas mas », mais il est cependant clair que la théorie de la mobilisation des ressources

apporte des outils pour s’approcher de la réalité. A cette théorie, on peut ajouter l’analyse des

likes et des commentaires, qui donnent une idée du suivi par le public. Daniel Drache (2014)

soulignait que les réseaux sociaux permettaient entre autre, de se faire connaître à un public

plus large que celui que l’on toucherait sans ceux-ci.

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4.2.1 Mentions « j’aime »

Bien que de nombreuses personnes les suivent sur les réseaux sociaux, le nombre de like et de

commentaires n’est pas très élevé. En analysant dix publications Facebook, sélectionnées

selon les critères suivants : un article qui date de la dernière année en cours, qui a récolté entre

20 et 40 likes, ce qui représente la moyenne, tout en gardant un panel de publications assez

diversifiées, on constate une majorité d’intervenantes féminines, même si les hommes sont

présents. En effet, sur les dix publications, quatre étaient likées par 2/3 de femmes, trois

autres avaient 3/4 des likes, alors que les deux derniers s’élevaient à 4 femmes pour 5

hommes. La dernière publication, une vidéo témoignage de victime s’opposant à l’amnistie

d’Alberto Fujimori a reçu autant de like de la part des femmes que des hommes. On observe

également que quatre ou cinq personnes sont régulièrement actives. Enfin, à travers une

navigation sur les pages personnelles du public, l’âge semble varier entre 25 et 50 ans à peu

près, et on remarque sur certaines pages que ces personnes sont également actives sur leur

propre page (par des publications personnelles d’articles, d’événements, etc.).

4.2.2 Contenu des commentaires

En ce qui concerne les commentaires, ceux-ci sont le reflet d’échange et de débat avec les

utilisateurs, et permettent à la page d’avoir un retour du public. Le fait d’en avoir très peu

peut être un signe de peu d’intérêt pour le sujet ou de désaccord avec le public, tandis que le

fait d’en avoir énormément rend parfois le débat plus difficile puisque l’on peut vite s’y

perdre ou en perdre le contrôle. Suite à l’analyse des commentaires, certains parmi eux seront

également présentés à titre d’exemple.

Tout d’abord, on constate que le nombre de commentaires est assez bas. En effet, beaucoup

de publications sont likées ou partagées, mais très peu d’entre elles sont commentées, et il n’y

a que très peu de débat. On remarque déjà que les publications Twitter comptent beaucoup

moins de commentaires que sur Facebook, ce qui s’explique en partie parce que le

mouvement est beaucoup moins présent sur ce réseau-là. A côté des nombreuses

publications32 sans commentaire, certaines publications reçoivent bien plus de commentaires,

allant de 10 à parfois même 38 commentaires, s’inscrivant dans un échange ou, allant souvent

à l’encontre de la page. Les commentaires positifs, de félicitations ou d’encouragement sont,

sur ce réseau, beaucoup moins nombreux que les commentaires négatifs. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!32 On ne prend en compte ici que les articles créés par « Somos 2074 y muchas mas », et non créés par d’autres organisations et simplement partagés par la page.

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« Les stérilisations forcées sont des crimes contre l'humanité. Fujimori n'a pas encore été

condamné pour cela. » (Twitter, 10 juin 2017)

« Félicitations, admirable votre passion pour aider les moins favorisés, allez-y, que Dieu vous

bénisse. » (Twitter, 10 juillet 2017)

Les nombreux commentaires négatifs insultent les victimes de menteuses, accusent

l’organisation de travailler pour de l’argent,… Souvent ils ne nient pas que des stérilisations

aient eu lieu, mais ils avancent que celles-ci n’étaient pas forcées.

« Les stérilisations forcées sont une farce dans laquelle ils ont payé et acheté des

témoignages, une autre diffamation qui tombe. » (Twitter, aout 2017)

« Sujet brûlé, faux, parce que ceux qui ont accepté de stériliser ne l'ont pas fait pour

remplir le Pérou d'enfants sans pain. » (Twitter, aout 2017

« Qui diable a dit à ces gens ingrats de se faire stériliser? Ils vous ont mis un pistolet

sur la tête? Arrête de rire, bande de faux opportunistes. » (Twitter, aout 2017)

En ce qui concerne le réseau Facebook, il y a plus de commentaires, cependant ceux-ci sont

concentrés sur certains articles. En effet, il arrive qu’aucun article ne reçoive de commentaire

pendant plusieurs semaines, et parfois, un article obtient des dizaines de commentaires. Ceci

n’exclut bien évidemment pas que certaines publications ont aussi un ou deux commentaires.

Dans ce cas-ci, il s’agit en général de personnes qui commentent les articles ou photos sur les

manifestations, en encourageant les manifestants à continuer, ou bien des articles sur le

pardon possible à l’égard d’Alberto Fujimori, avec quelqu’un qui s’indigne. Cependant,

contrairement aux commentaires sur le réseau Twitter, on trouve ici moins de commentaires

désagréables, ou du moins ils se noient dans beaucoup d’autres commentaires positifs et

encourageants.

La politique péruvienne en matière de droit des femmes n’est pas le sujet le plus commenté

mais quand elle l’est, c’est souvent de manière négative. La plupart des commentaires et des

débats des internautes concernent la possible d’amnistie de l’ancien président. En effet,

l’amnistie fait polémique. Certains péruviens soutiennent encore l’ancien président, ainsi que

sa fille, mais il y a surtout ceux qui s’opposent totalement à ce pardon, et dénoncent les faits

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atroces qu’il a fait subir au peuple, allant parfois jusqu’aux insultes. Un deuxième sujet qui

fait parler de lui, est la véracité ou non du caractère forcé des stérilisations. S’il est vrai que

très peu de personnes nient le programme de planification familiale mis en place par l’ancien

gouvernement ou parlent de ce qu’il s’est passé dans l’histoire, beaucoup estiment qu’aucune

femme n’a été forcée, et que si elles l’ont fait, c’est de plein gré. Un autre sujet qui n’est pas

abordé sur les réseaux sociaux, est le fait de savoir de quelle manière il faut le qualifier. En

effet, les termes génocide ou eugénisme n’apparaissent pas sur la page, ou que très rarement.

Il semble que ce débat-là se déroule plutôt entre intellectuels. On retrouve également sur la

toile plusieurs fois l’argument mettant en cause les associations, les accusant de ne penser

qu’à l’argent. Enfin, certaines personnes s’interrogent sur la nécessité de se battre pour ces

anciennes luttes, se demandant s’il ne fallait pas plutôt se concentrer sur les problèmes dits

actuels du pays.

« Pourquoi ne marchez-vous pas pour la corruption du gouvernement actuel… Le thème des

stérilisations forcées doit être abandonné, (…). » (Facebook, 01 décembre 2016)

« Plutôt que de critiquer, nous devrions être reconnaissants de la politique de planification

familiale qui a évité à des milliers de femmes de tomber enceintes sans le vouloir (…). A

l’époque, le nombre de femmes enceintes décédées était très élevé (…) et seules les femmes

riches avaient accès à la planification familiale. » (Facebook, décembre 2016)

« Pourquoi mentez-vous ? Les stérilisations n’ont pas été forcées, puisqu’elles ont elles-

mêmes ou leurs maris signé les papiers. (…) Ces femmes ont été utilisées pour discréditer

Fujimori en gardant en tête qu’elles seront indemnisées. » (Facebook, octobre 2017)

Le collectif Espacio Abierto (communication personnelle, 28 novembre2017) considère que

sur leur page Facebook, c’est le féminisme qui amène le plus de débats. En effet, les actions

de ce collectif couvrent différents sujets qui touchent le peuple péruvien, mais les publications

et actions qui ont pour but d’interpeller par rapport aux droits des femmes font beaucoup

parler d’eux. Selon eux, ce qui en ressort principalement, c’est que le chemin est encore long,

et qu’il y a encore énormément de travail à réaliser.

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4.3 Comparaison avec d’autres mouvements

Dans le but de ne pas se fermer à un seul groupe social et de percevoir dans quelle mesure le

groupe « Somos 2074 y muchas mas » s’inscrit dans la continuité des groupes présents sur les

réseaux sociaux, nous allons tenter de le comparer avec d’autres. Pour ce faire, nous allons

prendre deux autres exemples, tous deux péruviens, qui luttent également pour le droit des

femmes. Ces deux autres mouvements ont soit un peu plus, soit un peu moins de public sur

les réseaux sociaux, mais les trois groupes ont plus ou moins les mêmes objectifs, ils

organisent également tous les trois des manifestations, et seul un des trois possède un site

internet, bien que très sommaire. Etant donné qu’ici il ne s’agit pas d’une analyse complète du

mouvement, nous nous concentrerons uniquement sur la page Facebook, qui est bien plus

utilisée que la Twitter.

4.3.1 #Niunamenos33

Ce mouvement féministe est présent dans différents pays en Amérique Latine, et lutte pour le

droit des femmes et surtout contre les violences qu’elles subissent. Il est né en Argentine en

2015, créé par un ensemble d’artistes, de journalistes, etc., mais il est très vite repris par la

société civile, et s’est répandu au Pérou, en Uruguay et au Mexique. A travers différentes

actions, ils tentent de sensibiliser au maximum la population. L’organisation péruvienne ne

possède pas de site internet, et communique donc essentiellement via les réseaux sociaux.

Cependant, ce groupe est plus connu et suivi, étant donné leur présence dans plusieurs pays,

mais également parce qu’ils travaillent sur une thématique mais bien plus large que les

stérilisations forcées. En effet, celui-ci lutte véritablement pour la condition de la femme, la

fin des actes machistes et de la violence faites aux femmes, et soutient l’aide juridique. (Ni

Una Menos, n.d.).

Le mouvement est suivi par près de 148.000 personnes sur Facebook, et partage de

l’information presque tous les jours. Ils ont donc une fréquence d’information qui permet de

maintenir un certain contact avec la communauté. Le contenu est ici très diversifié, mais deux

types de contenu sont présents en plus grande quantité. Tout d’abord, les organisatrices

parlent énormément des événements et des manifestations qu’elles organisent. La

manifestation étant leur carte de visite, elles partagent les informations concernant la date et le

lieu de celle-ci, mais pas seulement. En effet, elles insistent énormément en postant des

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!33 Comprenez « Pas une de moins »

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vidéos ou des images de sportifs et de personnes célèbres qui soutiennent la manifestation,

elles font des appels aux artistes, aux dessinateurs, publient le parcours de la manifestation,

etc. On voit que l’association porte une importance énorme à ces événements, et qu’elle tente

ainsi de s’adresser à chaque tranche de la population de manière segmentée, afin de toucher le

plus de personnes possible. Le deuxième type d’articles partagés, ce sont les histoires, les

témoignages, et les procès en cours. En effet, on retrouve beaucoup d’articles de journaux sur

des histoires de femmes violentées, violées ou tuées et sur l’avancé juridique des différents

cas. Ils partagent également beaucoup de témoignages de femmes ayant subies des violences,

ils dénoncent les violeurs et les agresseurs, et interpellent leur communauté à ce sujet. A côté

de ces publications, on retrouve bien sûr d’autres articles du même type que le mouvement

« Somos 2074 y muchas mas », toujours avec un appel à la solidarité et au rassemblement.

« Ni Una Menos » crée pas mal de débats et d’interactions, notamment parce qu’ils abordent

des sujet plus larges, touchant une plus grande population (l’avortement, le droit des

personnes transsexuelles, le droit de vote des femmes,…). Ces thèmes, lancés sur la page

Facebook permettent d’entamer une discussion engendrant des commentaires, auxquels les

organisateurs du mouvement participent également.

Concernant les ressources, il est difficile ici de spécifier chaque sorte. En effet, pour ce qui est

des ressources matérielles, il est ici aussi difficile d’estimer l’impact réel. Les manifestants

sont habillés de manière plus sobre, ils portent cependant, des pancartes et des banderoles

bien plus grandes et développées, et sans doute plus chères. En revanche, en observant les

images des manifestations, celles-ci comptent bien plus de manifestants (ils se comptent par

milliers), avec également une majorité de femmes, même si les hommes semblent bien plus

nombreux ici. Enfin, ce mouvement porte également une grande importance aux images, et en

partagent régulièrement sur leur page. Les images des manifestations paraissent moins

impressionnantes en terme de mise en scène corporelle, puisque les femmes sont habillées de

manière plus sobre. Cependant, elles partagent régulièrement des images choquantes de

femmes blessées, de parties de corps féminin mutilées sur les réseaux sociaux.

Pour le logo, celui-ci est également très sobre, toujours avec cette couleur rose-rouge sur fond

blanc qui revient (également sur d’autres affiches de la page), mais ici, il est accompagné par

une bande verticale, signe de force et de mouvement, aux couleurs représentatives de la

communauté LGTB. Ce logo adresse un message clair d’unification, d’acception de l’autre, et

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de force. Pour ce qui est de la photo de couverture actuelle34 , il s’agit d’un collage, appelant

au rassemblement.

4.3.2 #Alfombra Roja35

Alfombra Roja est une organisation qui lutte pour le droit des femmes au Pérou, mais ce

mouvement existe également dans d’autres pays tels que au Chili ou en Italie. Leurs objectifs

sont principalement le droit des enfants, le droit à l’éducation sexuelle, les violences envers la

communauté LGTB et le droit des femmes stérilisées de force (Alfombra Roja, n.d.). Sur leur

page Facebook, ils comptent un peu plus de 10.600 utilisateurs, et possèdent également un

site internet (ce qui les distingue légèrement des autres), celui-ci est assez sommaire.

On retrouve une certaine constance dans la fréquence des publications : en général, tous les

trois ou quatre jours, et parfois plusieurs fois sur une journée. Pour le contenu même de

celles-ci, il n’y a pas de grande différence avec les deux autres groupes : articles de journaux

sur les violations faites aux femmes, des chiffres recensant les femmes violentées ou tuées au

Pérou, des invitations aux manifestations, etc. Cependant, force est de constater que cette

organisation paraît moins revendicatrice que les deux autres. En effet, le groupe semble

utiliser moins de lettres majuscules ou de points d’exclamation, ce qui atténue l’effet

d’agressivité.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!34 Le 3 décembre 2017 35 Comprenez « Le tapis rouge »

Photo de couverture du mouvement, récupéré le 29 novembre sur le site Facebook.

Logo représentatif du mouvement, récupéré le 29 novembre sur le site Facebook.

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En ce qui concerne le public, celui-ci est principalement féminin, même si quelques hommes

les soutiennent également. Pour ce qui est du suivi du public, le nombre de likes varient de

quelques-uns à une centaine. Etant donné le nombre moins élevé de personnes qui suivent la

page, on peut dire qu’il s’agit à peu près du même taux que les deux autres pages. Quant aux

commentaires du public, ceux-ci sont concentrés sur certains articles, et de manière générale

on constate qu’il n’y en a que très peu. Le contenu des commentaires, quant à eux, sont

souvent assez personnel, une réflexion sur l’article publié, un appel à un ami pour lui montrer

l’article, quelqu’un qui s’indigne,… Il n’y a ici donc pas vraiment de débat qui se crée, que ce

soit entre les membres du public ou avec les organisateurs du groupe.

Pour ce qui est de la communauté, il apparaît qu’il n’y a pas beaucoup d’interactions avec

d’autres organisations. En effet, le mouvement Alfombra Roja semble partager pas mal

d’informations d’autres organisations, principalement de « Ni Una Menos ». Cependant, il

s’avère que leurs propres publications ne sont pas énormément partagées par d’autres

associations. En revanche, on note ici un véritable échange entre les branches des différents

pays.

Les ressources sont assez semblables aux deux autres mouvements. A part l’image et

l’utilisation du corps comme symboles, les autres ressources ne semblent pas tellement

exploitées. Lors des manifestations, on compte une vingtaine de personnes présentes, toutes

habillées de rouge. Leurs manifestations sont également très visuelles. En effet, la couleur

rouge est présente, que ce soit sur leurs habits, ou pour le tapis que les manifestants amènent

parfois avec eux. Le nom du mouvement y fait d’ailleurs clairement référence : le tapis

rouge est un symbole de lutte permanente selon eux (Alfombra Roja, 2017). Le groupe joue

d’ailleurs sur les mots avec le mot espagnol désignant la couleur rouge ; « Roja », auquel ils

donnent un sens particulier: « Raza – Ovarios – Justicia – Avorta »36. Aussi, la photo de

profil, est un simple carré rouge, sans mot ni dessin, il se veut être un symbole fort de

protestation. L’image de couverture quant à elle est une photo de manifestation. D’ailleurs, la

plupart des images qu’ils partagent sont du même genre : images de protestation, de femmes

habillées de rouge, portant des pancartes blanches avec du texte écrit en noir, soit couchées

par terre soit en train de défiler dans les rues.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!36 Comprenez ici: Race – Ovaires – Justice - Avortement

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4.3.3 Comparaison avec « Somos 2074 y muchas mas »

Les deux mouvements paraissent assez semblables au mouvement « somos 2074 y muchas

mas », puisqu’effectivement il y a soit plus, soit moins de public. Après analyse de ces deux

mouvements, il est possible de conclure que le mouvement social « Somos 2074 y muchas

mas » s’inscrit tout à fait dans le « mouvement-type ». En effet, on retrouve dans beaucoup de

mouvements féministes, pas uniquement dans les deux autres exemples, un certain

vocabulaire et une certaine attitude de lutte, de combat. On ressent un véritable sentiment de

colère face aux différentes situations, sentiment qui engendre des publications relatant une

position arrêtée. Aussi, on ressent réellement que ces femmes sont concentrées sur un seul

objectif, ce qui les rend sans doute bien plus actives et efficaces. Il semble clair que le public

n’est pas politique, mais populaire et familier avec le sujet, afin de faire du bruit pour être

entendu à un plus haut niveau. Les différents mouvements dénoncent des actions et des

décisions politiques, cependant il semble que sur les réseaux sociaux, ils s’adressent plutôt au

citoyen lambda. Enfin, il semble que Facebook soit le réseau le mieux adapté au partage

d’informations, d’invitations, d’échange,… tandis que Twitter sert plutôt à dénoncer, et cela

s’observe également dans leur manière d’utiliser chaque média.

Photo de profil du mouvement, récupéré le 3 décembre sur le site Facebook.

Photo de couverture mouvement, récupéré le 3 décembre sur le site Facebook.

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4.4 Impact et mobilisation des ressources

4.4.1 Mobilisation des ressources

La théorie de la mobilisation des ressources existe depuis plus de quarante ans, et est devenu

désuète pour certains, comme l’expliquent Nahed Eltantawy et Julie Wiest (2011). Cependant,

ces deux auteurs estiment que cette théorie permet de comprendre le rôle qu’ont joué les

médias, surtout du point de vue de la visibilité et de la rapidité.

Dans le cas d’étude ici, la théorie de la mobilisation des ressources a tout d’abord été

perturbée par l’impossibilité de se rendre sur place. En effet, il n’est pas évident d’estimer à

quel point l’engagement, les opportunités politiques ou encore certaines ressources sont

mobilisés. Cependant, cette théorie permet d’analyser de manière concrète l’utilisation des

réseaux sociaux dans la mobilisation d’individus pour une lutte politique. En effet, les

différents points d’entrées permettent d’avoir une vue d’ensemble du fonctionnement des

mouvements sociaux, et d’en analyser chaque détail. Jean-Noël Ferrié (2005) écrit qu’avec la

théorie de la mobilisation des ressources, « les causes importent moins que le comment », et

c’est en effet ce qu’il en ressort ici. Cette théorie permet d’analyser la création et le

fonctionnement des mouvements, sans s’intéresser aux causes défendues par ceux-ci. Cette

théorie permet en outre, de réaliser l’importance de l’organisation d’un tel mouvement, ainsi

que l’impact que celui-ci peut avoir. En ce qui concerne l’analyse du rôle des réseaux sociaux

dans la lutte politique au Pérou, cette théorie permet de percevoir la manière dont le

mouvement utilise ces réseaux, mais également la manière dont il évolue dans le contexte

social et politique du pays. Cependant, une simple analyse de ces réseaux sociaux ne permet

pas de tirer des conclusions avec certitude et précision quant à l’impact des actions des

mouvements sociaux.

4.4.2 « Somos 2074 y muchas mas » : Impact

Le mouvement « Somos 2074 y muchas mas » semble être un groupe assez actif, que ce soit

sur les réseaux, mais également lors d’événements ponctuels. C’est d’ailleurs ce que défendait

Raja Fenniche, expliquant que les réseaux sociaux se trouvaient entre l’espace virtuel et la

réalité (2014). Le collectif Espacio Abierto (communication personnelle, 28 novembre2017)

insiste également sur ce côté virtuel d’internet. Pour eux, les réseaux sociaux permettent

certes d’être vu et partagé, mais il manque clairement une part de réel, c’est pourquoi eux-

mêmes accordent une grande importance aux actions dans la rue. C’est d’ailleurs, selon eux,

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ce qu’il manque aux mouvements qui luttent pour les victimes de stérilisations forcées : plus

d’actions dans la réalité afin d’avoir un impact plus important.

Comparativement au nombre de personnes qui les suivent sur leurs pages, « Somos 2074 y

muchas mas » ne semble pas avoir de gros impact sur l’opinion public. En effet, les

rassemblements se font entre victimes et proches de victimes, et les commentaires, likes, et

majorité des manifestants sont principalement féminins. S’il est vrai que c’est un sujet

essentiellement féminin et que les femmes sont plus sensibles à ce genre d’injustices, les

hommes n’en sont pas exclus. Cependant, le sujet des stérilisations forcées s’inscrit dans un

contexte bien plus large, le droit des femmes, ce qui leur donne une pertinence et aide ce

mouvement à s’inscrire dans l’agenda public. En effet, le mouvement se base régulièrement

sur des articles de journaux et d’actualité afin de rebondir sur leur préoccupation principale.

Aussi, force est de constater que le mouvement est connu du public péruvien, que ce soit

parce qu’il s’inscrit dans la lignée de lutte pour les femmes, mais également parce qu’ils sont

cités de temps en temps dans les grands journaux du pays, tels que La Republica ou El

Comercio.

Contrairement aux théories, le débat ne semble pas s’amorcer. Il est vrai que certaines

personnes expriment leur désaccord, mais nous constatons que les échanges se font

principalement entre des personnes du même avis, ce qui ne crée pas de débat. Les désaccords

portent essentiellement sur la véracité de l’aspect forcé des opérations, et outre ceux-là et

quelques articles dénonçant certains discours politiques pro-Fujimoristes, il n’existe pas

beaucoup d’opposition sur ce réseau social.

L’impact en terme de nombre n’est pas énorme, cependant, en ce qui concerne les images,

elles touchent bel et bien le public. Comme nous l’avons souligné, ce sont les publications

accompagnées d’images qui provoquent le plus de réactions. Le mouvement l’a compris,

puisqu’ils en jouent sur les réseaux sociaux, mais également (et surtout) lors de leurs

manifestations, ainsi que sur leur position de victime. En effet, le mot « victime » est

régulièrement utilisé lors des manifestations, et les participants avancent cet argument très

souvent. Un point important est qu’ils ne semblent pas beaucoup s’entourer des personnes

expertes, démarche à envisager car elle pourrait leur apporter un avantage considérable quant

à la quête et la reconnaissance de leurs revendications. Pour ce qui est du relais de la

communauté, le groupe semble cependant assez bien soutenu par d’autres associations,

principalement féminines.

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Conclusion

Grâce à l’analyse basée sur la théorie de mobilisation des ressources, la présente étude a

permis de voir que les mouvements sociaux féministes du Pérou sont focalisés sur l’idée de

lutte et de dénonciations. En effet, de par l’importance portée aux images provoquantes, ainsi

qu’au discours dénonciateur, le mouvement « Somos 2074 y muchas mas » tente de se faire

entendre, mais également de sensibiliser le public le plus large possible (Z.Rivero,

communication personnelle, 28 novembre2017).

L’analyse a permis de constater le côté très actif et engagé du mouvement social lui-même.

Cependant, force est de constater qu’en dehors du groupe restreint qui se déplace aux

manifestations, il n’y a pas de réel débat, ni de réel preuve d’engagement de la part du public.

Aussi, une véritable entraide au sein du réseau de mouvements féministes semble exister, que

ce soit pour les événements, les publications ou le soutien. En effet, le mouvement s’inscrit

dans la continuité des mouvements sociaux féministes péruviens, tant par ses revendications

que par ses messages. Le seul point que l’on peut souligner ici, est le fait que ce mouvement

se concentre sur un sujet bien précis, la stérilisation forcée…., tandis que les nombreux autres

mouvements luttent pour le droit des femmes de manière générale.

En ce qui concerne l’impact réel du mouvement, celui-ci semble plutôt restreint, ce qui

s’explique en partie parce que l’étude porte principalement sur les réseaux sociaux. Mais

surtout, parce que le mouvement définit ses actions comme étant un appel à la reconnaissance

et au changement politique. Cependant, le public touché par les publications semble être un

public plus populaire que politique. En effet, même si de nombreux politiciens sont présents

sur internet, on ne perçoit aucun soutien ou commentaire de leur part sur la page du

mouvement. Cependant, la page partage beaucoup d’informations sur la situation et

l’avancement juridique et politique, à travers différents types de sources (vidéo,

journalistique, etc.). Cette difficulté à atteindre leurs objectifs peut également s’expliquer par

la position du gouvernement et les idées coloniales persistantes.

Bien qu’elles veuillent toucher la population péruvienne ainsi que le secteur politique, le but

ultime des victimes est une reconnaissance juridique et politique en tant que victime, afin

d’obtenir une réparation. Cependant, la situation ne semble pas avoir beaucoup bougé depuis

leur création en 2015. En effet, bien qu’il existe aujourd’hui un registre de victimes, d’un

point de vue juridique, on semble parler plus de l’amnistie que d’une quelconque

reconnaissance pour l’instant. Le périodique La Plaza explique cela par la lenteur du

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Ministère publique, mais également et surtout à cause des « préjugés racistes et machistes qui

persistent dans la société péruvienne, envers les femmes andines et amazoniennes »

(communication personnelle, 19 novembre 2017). Bien que les femmes soient régulièrement

la cible de violences, il semble que le sujet fasse aujourd’hui parti du débat public, et qu’elles

parviennent à se faire entendre de plus en plus de part le monde, ce qui laisse entrevoir un

espoir possible pour celles-ci.

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