ARISTOTE, Éthique à Eudeme

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  • 8/19/2019 ARISTOTE, Éthique à Eudeme

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    L’ÉTHIQUE A EUDÈME

    ARISTOTE

    Traduit du grec par M. Thurot, Editio! "ir#i Didot, $%&'

    Editio u#(ri)ue http*++docteuragei)ue.-ree.-r &%Le! /u0re! co#p1te! de !ait Tho#a! d2A)ui

     

    NOTE PRELIMINAIRE____________________________________________________1

    LIVRE I — [DU BONHEUR]______________________________________________1

    CHAPITRE I — [Le bonheur et ses causes]_________________________________1

    CHAPITRE II — [Les moyens de se procurer le bonheur]__________________

    CHAPITRE III — [Les th!or"es ant!r"eures]_________________________________#CHAPITRE I$ — [%!&n"t"on du bonheur]___________________________________'

    CHAPITRE $ — [Les m"s(res de la )"e huma"ne]___________________________'

    CHAPITRE $I — [La m!thode * su")re dans ces recherches]______________+

    CHAPITRE $II — [Le bonheur]_______________________________________________,

    CHAPITRE $III — [Le b"en supr-me]________________________________________.

    3OTE 4RELIMI3AIRE

    L'éthique à Eudème présente les mêmes idées que l'éthique à Nicomaque, mais d'une manière plus simple et plus directe. Les principes énoncés sont simples et encore d'actualité. Aristoterecherchait le Bien suprême; la lecture de cet ouvrae est un !ien pour l'"me, pour soi#même.L'éthique à Eudème permet de se $amiliariser avec la pensée aristotélicienne, pour la suitea!order ses autres %uvres sans trop de di$$icultés.

    LI5RE I 6 7DU 8O3HEUR9

    :HA4ITRE I 6 7Le ;oheur et !e! cau!e!9

    &u !onheur. &es causes du !onheur ; ces causes sont, ou la nature, ou l'éducation, ou la pratique et l'epérience ; elles peuvent être aussi, ou la $aveur spéciale des &ieu, ou lehasard. # Le !onheur se compose surtout de trois éléments, la raison, la vertu, et le plaisir. < $. ($&$'a) Le moraliste qui à &élos a mis sa pensée sous la protection du &ieu, a écrit lesdeu vers suivants sur le *rop+lée du Latoon, en considérant sans doute l'ensem!le de tous lesavantaes qu'un homme à lui seul ne peut amais réunir complètement, le !ien, le !eau etl'aréa!le - () « Le juste est le plus beau; la santé, le meilleur; Obtenir ce qu'on aime est le

     plus doux au cœur. »

     Nous ne partaeons pas tout à $ait l'idée eprimée dans cette inscription ; et suivant nous, le !onheur qui est la plus !elle et la meilleure de toutes les choses, en est aussi tout à la $ois la plus aréa!le et la plus douce.

    http://docteurangelique.free.fr/http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/Aristote/eudeme1gr.htm#Ihttp://remacle.org/bloodwolf/philosophes/Aristote/eudeme1gr.htm#Ihttp://docteurangelique.free.fr/

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    < &. *armi les considérations nom!reuses que chaque espèce de choses et (/0) chaque natured'o!ets peuvent soulever, et qui demandent un sérieu eamen, les unes ne tendent qu'àconna1tre la chose dont on s'occupe ; d'autres tendent en outre à la posséder, et à en tirer toutesles applications qu'elle comporte.< =. 2uant au questions qui ne sont, dans ces études philosophiques, que de pure théorie,

    nous les traiterons, selon que l'occasion s'en présentera, au point de vue qui les rend spécialesà cet ouvrae.< '.  &'a!ord, (/) nous rechercherons en quoi consiste !onheur, et par quels mo+ens on peutl'acquérir. Nous nous demanderons si tous ceu qui re3oivent ce surnom d'heureu, le sont par le simple e$$et de la nature, comme ils sont rands ou petits, et comme ils di$$èrent par levisae et le teint ; ou !ien, s'ils sont heureu r"ce à l'enseinement d'une certaine science quiserait celle du !onheur ; ou !ien encore, si c'est par une sorte de pratique et d'eercice ; car ilest une $oule de qualités diverses que les hommes possèdent non pas par (40) nature ni même

     par étude, mais qu'ils acquièrent par la simple ha!itude, mauvaises quand ils ont contracté demauvaises ha!itudes, et !onnes quand ils en ont contracté de !onnes.< >. En$in nous rechercherons si, toutes ces eplications du !onheur étant $ausses, le !onheur 

    n'est l'e$$et que de l'une de ces deu causes - ou il vient de la $aveur des &ieu qui nousl'accordent, comme ils inspirent les hommes saisis d'une $ureur divine et em!rasésd'enthousiasme sous le sou$$le de quelque énie ; ou !ien, il vient du hasard ; (4) car il + a

     !eaucoup de ens qui con$ondent le !onheur et la $ortune.< ?. 5n doit voir sans peine que le !onheur ne se trouve dans la vie humaine que r"ce à tousces éléments réunis, ou à quelques#uns d'entre eu, ou tout au moins à un seul. La énérationde toutes les choses vient, ou peu s'en $aut, de ces divers principes ; et c'est ainsi qu'on peutassimiler tous les actes qui dérivent de la ré$leion au actes même (60) qui relèvent de lascience.< @. Le !onheur, ou en d'autres termes une heureuse et !elle eistence, consiste surtout danstrois choses, qui sem!lent être les plus désira!les de toutes ; car le plus rand de tous les

     !iens, selon les uns, c'est la prudence ; selon les autres, c'est la vertu ; selon d'autres en$in,c'est le plaisir.< %. Aussi, l'on discute sur la part de chacun de ces éléments dans le !onheur, ($&$';) suivantque l'on croit que l'un d'eu + contri!ue plus que l'autre. Les uns prétendent que la prudenceest un !ien plus rand que la vertu ; les autres trouvent au contraire la vertu supérieure à la

     prudence ; et les autres trouvent le plaisir $ort au#dessus de toutes deu. *ar suite, les unscroient que le !onheur se compose de la réunion de toutes ces conditions ; les autres croientqu'il su$$it de deu d'entre elles ; d'autres même le trouvent dans une seule.

    :HA4ITRE II 6 7Le! #oe! de !e procurer e ;oheur9

    &es mo+ens de se procurer le !onheur. 7l $aut se proposer un !ut spécial dans la vie, etordonner toutes ses actions sur ce plan.# 7l ne $aut pas con$ondre le !onheur avec sesconditions indispensa!les. < $. 8'est en s'arrêtant à l'un de ces points de vue que tout homme qui peut vivre selon sa li!revolonté, doit se proposer, pour !ien conduire sa vie, un !ut spécial, l'honneur, la loire, larichesse ou la science ; et les reards $iés sans cesse sur le !ut qu'il a choisi, il + doitrapporter toutes les actions qu'il $ait ; car (/0) c'est la marque d'une rande déraison que den'avoir point ordonné son eistence sur un plan réulier et constant.< &. Aussi, un point capital, c'est de !ien se rendre compte à soi#même, sans précipitation ninélience, dans lequel de ces !iens humains on $ait consister le !onheur, et quelles sont les

    conditions qui nous paraissent a!solument indispensa!les pour que le !onheur soit possi!le. 7l

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    importe de ne pas con$ondre, par eemple, et la santé et les choses (/) sans lesquelles lasanté ne pourrait être.< =. &e même ici, comme dans une $oule d'autres cas, il ne $aut pas con$ondre le !onheur avecles choses sans lesquelles on ne saurait être heureu.< '. 7l + a de ces conditions qui ne sont point spéciales à la santé non plus qu'à la vie heureuse,

    mais qui sont en quelque sorte communes à toutes les manières d'être, à tous les actes sanseception. 7l est par trop clair que sans les $onctions oraniques (40) de respirer, de veiller, denous mouvoir, nous ne saurions sentir ni !ien ni mal. A c9té de ces conditions énérales, il +en a qui sont spéciales à chaque nature d'o!ets et qu'il importe de ne pas méconna1tre. Et pour revenir à la santé, les $onctions que e viens de citer sont !ien autrement essentielles que lacondition de maner de la viande ou de se promener après d1ner.< >. 8'est tout cela qui $ait qu'on (4) aite tant de questions sur le !onheur, et qu'on sedemande ce qu'il est, et comment on peut se l'assurer ; car il + a des ens qui prennent pour ces parties constitutives du !onheur les choses sans lesquelles le !onheur serait impossi!le

    :HA4ITRE III 6 7Le! th(orie! at(rieure!9

    &es théories antérieures. 7l ne $aut pas tenir compte des opinions du vulaire ; il ne $autétudier que celles des saes. : 7l est plus con$orme à la raison et plus dine de &ieu de croireque le !onheur dépend des e$$orts de l'homme, plut9t que de croire qu'il est le résultat duhasard ou de la nature. < $. 7l serait $ort inutile d'eaminer une à une toutes les opinions émises à ce suet. Les idéesqui passent par la tête (60) des en$ants, des malades ou des hommes pervers, ne méritent pasl'attention d'un esprit sérieu. 7l n'est que $aire de raisonner avec eu. ais les uns n'ont

     !esoin que de quelques années de plus qui les chanent et les m. =i l'on ne $ait du !onheur que le résultat du hasard ou de la nature, il $aut que la plusrande partie des hommes + renoncent ; car alors l'acquisition du !onheur ne dépend plus dessoins de l'homme; il ne relève plus de lui ;(/) l'homme n'a plus à s'en occuper lui#même. =iau contraire on admet que les qualités et les actes de l'individu peuvent décider de son

     !onheur, dès lors, il devient un !ien plus commun parmi les hommes ; et même un !ien plusdivin ; plus commun, parce qu'un plus rand nom!re pourront l'o!tenir ; plus divin, parce qu'ilsera la récompense des e$$orts que les individus auront $aits pour acquérir certaines qualités,

    et le pri des actions qu'ils auront accomplies dans ce !ut.

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    :HA4ITRE I5 6 7D(-iitio du ;oheur9&é$inition du !onheur. &es divers enres de vie o> la question du !onheur n'est pointimpliquée. : il + a trois enres de vie que l'on em!rasse quand on est ma1tre de choisir à sonré - la vie politique, la vie philosophique et la vie de plaisir, de ouissances. ## ?éponse etopinion d'Anaaore sur le !onheur.

     < $. (40) La plupart des doutes et des questions qu'on soulève ici, seront clairement résolus, sil'on dé$init d'a!ord avec précision ce qu'il $aut entendre par le !onheur. 8onsiste#t#iluniquement dans une certaine disposition de l'"me, ainsi que l'ont cru quelque saes etquelques anciens philosophes @ 5u !ien, ne su$$it#il pas que l'individu lui#même soitmoralement d'une certaine $a3on @ et ne $aut#il pas !ien plut9t (4) encore qu'il $asse desactions d'une certaine espèce @< &. *armi les divers enres d'eistence, il + en a qui n'ont rien à voir dans cette question de la$élicité et qui n'+ prétendent même pas. 5n ne les cultive que parce qu'ils répondent à des

     !esoins a!solument nécessaires ; et e veu dire, par eemple, (60) toutes ces eistencesconsacrées au arts de lue, au arts qui ne s'occupent que d'amasser de l'arent et les arts

    industriels. 'appelle arts de lue et inutiles les arts qui ne servent qu'à la vanité. 'appelleindustriels les métiers des ouvriers qui sont sédentaires et vivent des salaires qu'ils anent.En$in, les arts de lucre et de ain sont ceu qui s'appliquent au ventes et au achats des

     !outiques et des marchés. &e même donc que nous avons indiqué trois éléments du !onheur,et sinalé plus haut ces trois !iens comme les plus rands de tous pour l'homme - la vertu, la

     prudence et (6) le plaisir, de même aussi nous vo+ons qu'il + a trois enres de vie que chacunem!rasse de pré$érence, dès qu'il en a le li!re choi - la vie politique, la vie philosophique, etla vie de plaisir et de ouissance.< =.  ($&$>c) La vie philosophique ne s'applique qu'à la saesse et à la contemplation de lavérité; la vie politique s'applique au !elles et lorieuses actions, et 'entends par là celles quiviennent de la vertu ; en$in la vie de ouissance se passe tout entière dans les () plaisirs ducorps. 8eci doit $aire comprendre pourquoi il + a tant de di$$érences, comme e l'ai déà dit,dans les idées qu'on se $ait du !onheur.< '.  5n demandait à Anaaore de 8laomènes quel était suivant lui l'homme le plusheureu -C 8e n'est aucun de ceu que vous suppose, répondit#il ; et le plus heureu deshommes selon moi vous sem!lerait pro!a!lement un homme !ien étrane. D Le saerépondait ainsi, parce qu'il vo+ait !ien que son interlocuteur ne pouvait pas s'imainer qu'ond il est très di$$icile de !ien uer. ais c'est surtout dansune question o> il sem!le qu'il est très aisé, et du domaine de tout le monde, d'avoir uneopinion; et cette question c'est de savoir quel est le !ien qu'on doit choisir dans la vie, et dontla possession com!lerait tous nos v%u. 7l + a mille accidents qui peuvent compromettre la

    vie de l'homme, (40) les maladies, les douleurs, et les intempéries des saisons ; et par 

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    conséquent, si dès le principe on avait le choi, on s'éviterait sans nul doute de passer par toutes ces épreuves.< &. Aoute à cela la vie que l'homme mène tout le temps qu'il est en$ant ; et demande#vouss'il est un être raisonna!le qui voul. 8ertainement le seul plaisir de maner, ou même les ouissances de l'amour, à l'eclusionde tous ces plaisirs que la connaissance des choses, les perceptions de la vue ou des autressens peuvent procurer à l'homme, ne su$$iraient pas pour $aire pré$érer la vie à qui que ce soit,(6) à moins qu'on ne $

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    titre ; ou !ien, s'il n'+ a point encore d'autres plaisirs qu'on puisse rearder avec raison commeun élément du !onheur, en donnant des ouissances positives à sa vie, et non pas seulement enécartant la douleur loin de soi.< $'. 8e sont là des questions que nous réserverons pour plus tard. ais nous étudieronsd'a!ord la vertu et la prudence ; nous dirons quelle est la nature de l'une et de l'autre. Nous

    eaminerons si elles sont les éléments essentiels de la vie honnête et !onne, ou par elles#mêmes directement, ou par les actes qu'elles $ont $aire ; ($&$?;) car on les $ait entrer touoursdans la composition du !onheur ; et si ce n'est pas là l'opinion de tous les hommes sanseception, c'est du moins l'opinion de tous ceu qui sont dines de quelqu'estime.< $>. Le vieu =ocrate pensait que le !ut suprême de l'homme c'était de conna1tre la vertu ; etil consacrait ses e$$orts à chercher ce que c'est que la ustice, () le courae et chacune des

     parties qui composent l'ensem!le de la vertu. A son point de vue, il avait raison, puisqu'il pensait que toutes les vertus sont des sciences, et qu'on devait du même coup conna1tre la ustice et être uste, comme c'est aussi du même coup que nous apprenons l'architecture ou laéométrie, et que nous sommes architectes ou éomètres. 77 étudiait donc (/0) la nature de lavertu, sans s'inquiéter comment elle s'acquiert ni de quels éléments réels elle se $orme.

    < $?.  8eci se présente en e$$et dans toutes les sciences purement théoriques. Ainsil'astronomie, la science de la nature, la éométrie n'ont point a!solument d'autre !ut que deconna1tre et d'o!server la nature des o!ets spéciau (/) de ces sciences ; ce qui n'empêche

     pas qu'indirectement ces sciences ne puissent nous être utiles pour une $oule de !esoins.< $@.  ais dans les sciences productives et d'application, le !ut qu'elles poursuivent estdi$$érent de la science et de la simple connaissance qu'elles donnent. *ar eemple, la santé, lauérison est le !ut de la médecine ; l'ordre, aranti par les lois ou quelqu'autre chosed'analoue, est le !ut de la politique.< $%. =ans, doute, la pure connaissance (40) des !elles choses est déà une chose $ort !elle par elle seule ; mais pour la vertu, le point essentiel et le plus précieu, ce n'est pas d'en conna1trela nature ; c'est de savoir d'o> elle se $orme et comment on la pratique. Nous ne tenons passeulement à savoir ce que c'est que le courae ; nous tenons surtout à être couraeu ; ni ceque c'est que la ustice, mais à être uste ; de même que nous tenons à la santé, plus qu'à savoir ce que c'est que la santé ; et à posséder (4) un !on tempérament, plut9t qu'à savoir ce quec'est qu'un tempérament !on et ro!uste.

    :HA4ITRE 5I 6 7La #(thode C !ui0re da! ce! recherche!9&e la méthode à suivre dans ces recherches. Gtilité de la théorie et du raisonnement; mais il$aut les appu+er par des $aits et par des eemples. 8ette méthode est utile même en politique.

     : &aner des diressions et des énéralités ; il $aut tout ensem!le critiquer la méthode et lesrésultats qu'elle donne. ### 8itation des Anal+tiques.

     < $. Nous devons essa+er de trouver par la théorie et par le raisonnement la vérité sur toutesces questions ; et nous l'appuierons, pour la démontrer, par le témoinae des $aits et par deseemples incontesta!les. Le mieu serait sans contredit de donner des solutions que tout lemonde adopt"t d'un avis unanime. ais si nous ne pouvons o!tenir cet assentiment, il $audraitdu moins présenter une opinion (60) à laquelle tous les hommes, avec quelques prorès,viendraient peu à peu se raner ; car chacun porte, en soi un penchant naturel et spécial vers lavérité ; et c'est en partant de ces principes qu'il $aut nécessairement démontrer au hommes cequ'on veut leur apprendre. 7l su$$it que les choses soient vraies, !ien que d'a!ord elles nesoient pas claires, pour que la clarté se produise plus tard à mesure qu'on avance, en tiranttouours les idées les plus connues de celles qui d'a!ord avaient été eposées (6)

    con$usément.

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    < &. ais en toute matière, les théories ont plus ou moins d'importance, selon qu'elles sont philosophiques ou ne le sont pas. 8'est pour cela que, même en politique, on ne doit pasrearder comme une étude inutile de rechercher non pas seulement le $ait, mais la cause ; car cette recherche de la cause est essentiellement philosophique, en quelque matière que ce soit.($&$@a) < =. 7l $aut du reste en ceci !eaucoup de réserve ; il + a des ens qui, sous prétete

    qu'il appartient au philosophe de ne amais parler à la léère, mais touours avec ré$leion, nes'aper3oivent pas qu'ils sont !ien souvent en dehors de leur suet, et qu'ils se livrent à desdiressions par$aitement vaines.< '. *ar$ois, c'est simple inorance ; d'autre $ois, c'est présomption ; et il arrive même () qu'àces pièes des ens ha!iles et $ort capa!les d'air eu#mêmes, sont pris par des inorants, quin'ont et ne peuvent avoir sur le suet discuté la moindre idée $ondamentale ni pratique.< >. La $aute qu'ils commettent tient à ce qu'ils ne sont pas asse instruits ; car c'est manquer d'instruction sur un suet quelconque que de ne pas savoir distinuer les raisonnements qui s'+rapportent réellement, et ceu (/0) qui + sont étraners.< ?. &'ailleurs, on $ait !ien de uer séparément et le raisonnement qui essaie de démontrer lacause et la chose elle#même qu'on démontre. Gn premier moti$, c'est celui que nous venons de

    dire, à savoir qu'il ne $aut pas s'en $ier à la théorie et au raisonnement tout seul ; et quesouvent il $aut !ien davantae s'en rapporter au $aits. ais ici c'est parce qu'on ne peut passoi#même donner la solution cherchée, qu'on est !ien $orcé de s'en tenir à ce que l'on vous dit.En second lieu, il arrive plus d'une $ois (/) que ce qui parait démontré par le simpleraisonnement est vrai, mais ne l'est pas cependant par la cause sur laquelle ce raisonnements'appuie ; car on peut démontrer le vrai par le $au, ainsi qu'on peut le voir dans lesAnal+tiques.

    :HA4ITRE 5II 6 7Le ;oheur9&u !onheur. ### 5n convient que c'est le plus rand des !iens accessi!les à l'homme. L'hommeseul, en dehors de &ieu, peut être heureu. Les ares in$érieurs à l'homme ne peuvent amaisêtre appelés heureu. < $. Fous ces préliminaires posés, commen3ons, comme on dit, par le commencement; c'est#à#dire, en partant d'a!ord de données (40) qui n'ont pas toute la clarté désira!le, arrivons àsavoir aussi clairement que possi!le ce que c'est que le !onheur.< &. 5n convient énéralement que le !onheur est le plus rand et le plus précieu de tous les

     !iens qui peuvent appartenir à l'homme. 2uand e dis à l'homme, 'entends que le !onheur  pourrait être aussi le partae d'un être supérieur à l'humanité, c'est#à#dire de &ieu.< =. ais quant au autres animau, qui sont tous in$érieurs (4) à l'homme, ils ne peuvent

     amais en rien participer à cette désination ni recevoir ce nom. 5n ne dit pas que le cheval,

    l'oiseau, le poisson sont heureu ; pas plus qu'aucun de ces êtres qui n'ont point dans leur nature, comme leur nom seul l'indique, quelque chose de divin, mais qui vivent d'ailleurs plusou moins !ien, en a+ant leur part en quelqu'autre manière des !iens répandus dans le monde.< '. (60) Nous prouverons plus tard qu'il en est ainsi. ais nous nous !ornons maintenant àdire que pour l'homme il + a certains !iens qu'il peut acquérir, et qu'il en est d'autres qui luisont interdits. Nous entendons par là que, de même que certaines choses ne sont point suettesau mouvement, de même il + a des !iens qui ne peuvent pas non plus + être soumis ; et ce sont

     peut#être les plus précieu de tous par leur nature. 7l est en outre quelques#uns de ces !iensqui sont accessi!les sans doute, mais (6) qui ne le sont que pour des êtres meilleurs que nous.< >. 2uand e dis accessi!les, pratica!les, ce mot a deu sens - il sini$ie tout ensem!le, et leso!ets qui sont le !ut direct de nos e$$orts, et les choses secondaires qui sont comprises dans

    notre action en vue de ces o!ets. Ainsi, la santé, la richesse sont placées au nom!re deschoses accessi!les à l'homme, au nom!re des choses que l'homme peut $aire, de même qu'+

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    est placé aussi tout ce qu'on $ait pour atteindre ces deu !uts, à savoir les remèdes et lesspéculations lucratives de tout enre. &onc évidemment, (H0) le !onheur doit être reardécomme la chose la plus ecellente qu'il soit donné à l'homme de pouvoir o!tenir.

    :HA4ITRE 5III 6 7Le ;ie !upr#e9

    &u !ien suprême. Eamen de trois théories principales sur cette question. ## ?é$utation de lathéorie du !ien en soi, et de la théorie énérale des 7dées. Elles ne peuvent servir en rien à lavie pratique. : Le !ien se retrouve dans toutes les catéories ; il + a autant de sciences du

     !ien qu'il + a de sciences de l'être. : éthode ineacte pour démontrer le !ien en soi. : La politique ainsi que la morale étudient et poursuivent un !ien qui leur est propre. < $. ($&$@;) 7l $ait donc eaminer quel est le !ien suprême et voir en com!ien de sens on peutentendre ce mot. 7l + a ici trois opinions principales. 5n dit, par eemple, que le !ien suprême,le meilleur de tous les !iens, c'est le !ien lui#même, le !ien en soi; et au !ien en soi, onattri!ue ces deu conditions, d'être le !ien primordial, le premier de tous les !iens, et () d'êtrecause par sa présence que les autres choses deviennent aussi des !iens.

    < &. Felles sont les deu conditions que remplit l'7dée du !ien ; et qui sont, e le répète, d'êtrele premier des !iens, et par sa présence, d'être cause que les autres choses soient des !iens àdi$$érents derés. 8'est d'après l'7dée surtout que le !ien en soi, à ce qu'on prétend, doits'appeler réellement le !ien suprême et qu'il est le premier des !iens ; car si les autres !ienssont appelés des !iens, c'est uniquement (/0) parce qu'ils ressem!lent et participent à cette7dée du !ien en soi ; et une $ois qu'on a détruit l'7dée dont le reste participe, on a détruit dumême coup tout ce qui participe de cette 7dée et ne re3oit un nom que de cette participationmême.< =. 5n aoute que ce premier !ien est au autres !iens, qui le suivent, dans ce rapport quel'idée du !ien est le !ien lui#même, le !ien en soi ; et (/) que cette idée est séparée, commetoutes les autres 7dées, des o!ets qui en participent.< '.  ais l'eamen appro$ondi de cette opinion appartient à un autre traité qui seraitnécessairement !eaucoup plus théorique et plus rationnel que celui#ci ; car il n'+ a pointd'autre science qui $ournisse les aruments tout à la $ois destructi$s et communs pour ré$uter les théories.< >. ='il nous est permis d'eprimer ici (40) très !rièvement notre pensée, nous dirons quesoutenir qu'il + a une 7dée non seulement du !ien, mais de tout autre chose, c'est une théorie

     purement loique et par$aitement creuse. 5n l'a du reste su$$isamment ré$utée, et de !eaucoupde manières, soit dans les ouvraes Eotériques, soit dans les ouvraes de pure philosophie.< ?. 'aoute que les 7dées en énéral, et l'7dée du !ien en particulier, auraient !eau eister tantqu'on le voudrait, elles ne seraient certainement d'aucune (4) utilité ni pour le !onheur, ni

     pour des actions vertueuses.< @. Le !ien se prend en une $oule d'acceptions, et il en re3oit autant que l'être lui#même.L'être, d'après les divisions éta!lies ailleurs, eprime la su!stance, la qualité, la quantité, letemps ; et il se retrouve en outre dans le mouvement, qui est su!i et dans le mouvement quiest donné. Le (60) !ien se retrouve éalement dans chacune de ces catéories diverses; etainsi, dans la su!stance, le !ien est l'entendement, le !ien est &ieu ; dans la qualité, il est le

     uste ; dans la quantité, c'est le terme mo+en et la mesure ; dans le temps, c'est l'occasion ; etdans le mouvement, c'est, si l'on veut, ce qui instruit et ce qui est instruit.< %. &e même donc que l'être n'est pas un dans les classes qu'on vient d'énoncer, de même le

     !ien n'+ est pas un non plus ; et il n'+ a pas davantae une (6) science unique de l'être ni du !ien. 7l $aut aouter qu'il n'appartient pas même à une science unique d'étudier tous les !iens

    d'appellation identique, par eemple, l'occasion et la mesure ; et que c'est une sciencedi$$érente qui doit étudier une occasion di$$érente, une science di$$érente qui doit étudier une

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    mesure di$$érente. Ainsi en $ait d'alimentation, c'est ou la médecine ou la +mnastique quidésine l'occasion ou le moment, et la mesure ; pour les actions de uerre, (H0) c'est lastratéie ; et c'est de même une autre science qui rèle une autre action. 8e serait donc perdreson temps que de vouloir attri!uer à une seule science l'étude du !ien en soi.< B. ($&$%a) En outre, dans toutes les choses o> il + a un premier et un dernier terme, il n'+ a

     pas d'7dée commune en dehors de ces termes, et qui en soit tout à $ait séparée.< $. Autrement, il + aurait quelque chose d'antérieur au premier terme lui#même ; car cequelque chose de commun et de séparé serait antérieur, puisque, si () l'on détruisait lecommun, le premier terme serait aussi détruit. =upposons, par eemple, que le dou!le soit le

     premier des multiples ; e dis qu'il est impossi!le que le multiple, qui est attri!ué en communà cette $oule de termes, eiste séparément de ces termes ; car alors le multiple serait antérieur au dou!le, s'il est vrai que l'7dée soit l'attri!ution commune, a!solument comme si l'on donnaità ce terme commun une eistence à part ; car si la (/0) ustice est le !ien, le courae ne le sera

     pas moins qu'elle.< $$. 5n n'en soutient pas moins la réalité du !ien en soi. 7l est vrai qu'on aoute au mot de

     !ien le mot, C lui#même D, ouC en soi D ; et qu'on dit, le !ien en soi, le !ien lui#même. Et

    c'est une addition pour représenter la notion commune. ais que peut sini$ier cette addition,si elle ne veut pas dire que le !ien en soi est éternel et séparé @ ais ce qui est !lanc pendant

     plusieurs ours n'est pas plus !lanc que ce qui l'est durant un seul our; et l'on ne peut pasdavantae con$ondre le !ien qui est commun (/) à une multitude de termes, avec l'7dée du

     !ien; car l'attri!ut commun appartient à tous les termes sans eception.< $&. En admettant cette théorie, il $audrait du moins démontrer le !ien en soi tout autrementqu'on ne l'a démontré de notre temps. 8'est en partant de choses dont onI ne convient pas dutout qu'elles soient des !iens, qu'on démontre des !iens sur lesquels tout le monde est d'accord; et, par eemple, on démontre à l'aide des nom!res que la santé et la ustice sont des !iens.(40) 5n prend pour cette démonstrations des séries numériques et des nom!res, en supposantratuitement que le !ien est dans les nom!res et dans les unités, attendu que le !ien en soi estun et par tout le même.< $=. Au contraire, c'est en partant de choses que tout le monde s'accorde à rearder commedes !iens, la santé, la $orce, la saesse, qu'il $audrait démontrer que le !eau et le !ien setrouvent dans les choses immo!iles plut9t que partout ailleurs ; car tous ces !iens ne sontqu'ordre et repos ; et si ces premières choses, c'est#à#dire la santé et la saesse, sont des !iens,les autres le sont encore davantae, parce qu'elles ont !ien davantae d'ordre et de repos.< $'. ais ce n'est qu'une imae (4) au lieu d'une démonstration, quand on prétend que le

     !ien en soi est un, parce que les nom!res eu#mêmes le désirent. 5n serait $ort em!arrasséd'epliquer clairement comment des nom!res désirent quelque chose ; c'est là évidemmentune epression trop a!solue ; et, e le demande, comment pourrait#on supposer qu'il + ait désir 

    là o> il n'+ a pas même de vie @< $>. 8'est un suet d'ailleurs qui eie qu'on se donne de la peine ; et il ne $aut rien hasarder sans raisonnements à l'appui, dans des matières (60) o> il n'est pas $acile d'arriver à quelquecertitude, même à l'aide de la raison. 7l n'est pas non plus eact de dire que tous les êtres sanseception désirent un seul et même !ien. 8hacun des êtres ne désirent tout an plus que le !ienqui leur est propre, comme l' %il désire la vision, comme le corps désire la santé, et comme telautre être désire tel autre !ien.< $?. Joilà les o!ections qu'on pourrait élever pour $aire voir que le !ien en soi n'eiste pas,et qu'eist"t#il, il ne serait pas le moins du monde utile à la politique ; car la politique poursuitun !ien qui (6) lui est spécial, comme toutes les autres sciences poursuivent aussi le leur; et,

     par eemple, c'est la santé et la $orce corporelle que poursuit la +mnastique.

  • 8/19/2019 ARISTOTE, Éthique à Eudeme

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    < $@. Aoute encore ce qui est eprimé, ce qui est écrit dans la dé$inition même, à savoir quecette 7dée du !ien en soi, ou n'est utile à aucune science, ou !ien qu'elle doit l'être à touteséalement.< $%. Gne autre critique, c'est que l'idée du !ien en soi n'est point pratique et applica!le. *ar lamême raison, le !ien commun n'est pas le !ien en soi, ($&$%;) puisque alors le !ien en soi se

    trouverait dans le !ien le plus $utile. 7l n'est pas non plus applica!le et pratique ; ainsi, lamédecine ne s'occupe pas de donner à l'être qu'elle soine une disposition qu'ont tous les êtres; elle s'occupe uniquement de lui donner la santé ; et tous les autres arts aissent comme elle.< $B. ais ce mot de !ien a !eaucoup de sens ; et dans le !ien, il + a aussi le !eau () etl'honnête, qui est essentiellement pratique, tandis que le !ien eu soi ne l'est pas. Le !ien

     pratique est celui qui est la cause $inale pour laquelle on ait. ais on ne voit pas asseévidemment quel !ien il peut + avoir dans les choses immo!iles, puisque l'7dée du !ien n'est

     pas le !ien même qu'on cherche, non plus que le !ien commun. Le premier est immo!ile, etn'est pas pratique ; l'autre est mo!ile, mais il n'est pas plus pratique pour cela.< &. Le !ut en vue (/0) duquel on $ait tout le reste, est, en tant que $in, le !ien suprême ; il estla cause de tous les autres !iens classés au#dessous de lui, et il leur est antérieur à tous. *ar 

    conséquent, on pourrait dire que le !ien en soi est uniquement le !ut $inal que se proposenttoutes les actions de l'homme. 5r, ce !ut $inal dépend de la science souveraine, ma1tresse detoutes les autres, c'est#à#dire la politique, l'économique, et la saesse. 8'est précisément par cecaractère spécial que ces trois sciences (/) di$$èrent de toutes les autres. Elles ont aussi desdi$$érences entre elles ; et nous en parlerons plus tard.< &$. 7l su$$irait de la méthode seule qu'on est $orcé de prendre en enseinant les choses, pour montrer que le !ut $inal est la vraie cause de tous les termes classés au#dessous de lui. Ainsidans l'enseinement, on commence par dé$inir le !ut ; et l'on démontre ensuite $acilement quechacun des termes in$érieurs est un !ien, puisque c'est l'o!et qu'on a $inalement en vue qui estla cause de tout le reste. *ar eemple, si l'on a d'a!ord éta!li que la santé est précisément telleou telle chose, il $aut nécessairement que (40) ce qui contri!ue " la procurer soit aussi telle outelle chose précisément. La chose saine est !ien la cause de la santé, en tant que commen3antle mouvement qui nous la donne; et par conséquent, elle est cause que la santé a lieu ; mais cen'est pas elle qui est cause que la santé soit un !ien.< &&. Aussi, ne prouve#t#on amais par des démonstrations en rèle que la santé est un !ien, àmoins qu'on ne soit un sophiste et qu'on ne soit pas un médecin ; car les sophistes aiment àétaler leur vaine saesse dans des raisonnements étraners au suet, et l'on ne démontre pas

     plus ce principe qu'on n'en démontre aucun autre. (4) ais puisque nous admettons que la$in, le !ut est pour l'homme un !ien réel et même le !ien suprême, entre tous ceu quel'homme peut acquérir, il $aut voir quels sont les sens divers de ce mot, de !ien suprême ; et

     pour nous en rendre un compte eact, il convient de prendre un nouveau point de départ.