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Asthme et reflux gastro-œsophagien Asthma and gastro-esophageal reflux A. Didier *, L. Têtu, M. Miguérès Service de pneumologie–allergologie, CHR de Rangueil, 1, avenue du professeur-Jean-Poulhes, TSA 50032-31059, 31403 Toulouse cedex 04, France Reçu le 1 octobre 2003 ; accepté le 9 octobre 2003 Résumé Le reflux gastro-œsophagien (RGO) et l’asthme sont deux situations pathologiques fréquentes qui souvent coexistent chez un même patient. Le RGO est habituellement considéré comme un facteur d’aggravation et d’instabilité de l’asthme. Cette hypothèse repose davantage sur des considérations physiopathologiques que sur de véritables données cliniques. En effet, de nombreuses études expérimentales chez l’homme démontrent que la perfusion de solution acide du bas œsophage majore l’hyperréactivité bronchique et différents mécanismes ont été incriminés à l’origine de cette observation. Par ailleurs, des travaux récents ont mis en évidence, chez l’asthmatique, une majoration du RGO au cours de la bronchoconstriction induite par test de provocation non spécifique qui pourrait être secondaire aux modifications de la cinétique diaphragmatique liées à l’obstruction bronchique et à la distension thoracique. D’un autre côté, l’analyse des études consacrées aux conséquences de la prise en charge médicale ou chirurgicale du RGO sur les symptômes respiratoires des patients asthmatiques met en évidence des résultats inconstants d’une étude à l’autre. D’une manière générale, il semble qu’un petit groupe de patients asthmatiques puisse tirer un bénéfice clinique et peut-être fonctionnel du traitement du RGO. Néanmoins les critères de sélection des patients et surtout les modalités de prise en charge (en particulier dose et durée des traitements) ne pourront être définis que par de futures études. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Asthma and gastroesophageal reflux (GER) frequently coexist in patients. GER is usually considered to be potential trigger for asthma symptoms. This hypothesis is based more on pathophysiological considerations than on clinical data. Indeed, experimental data show that acid perfusion of the lower esophagus in humans induces increased bronchial hyperreactivity, and various mechanisms have been proposed to explain this observation. Recent studies also demonstrate that, in patients with asthma, obstruction induced by non-specific bronchial challenge increases the number of reflux episodes. This suggests that asthma by itself might be responsible for GER. Despite these facts, a review of published reports claiming to demonstrate the clinical effectiveness of medical or surgical treatment of GER on asthma symptoms yields inconsistent results. Nevertheless, it appears that a few asthmatic patients do benefit clinically and/or have improved lung function when treated for GER. However, the criteria for patient selection and, especially, the anti-reflux treatment modalities (choice and dose of medication and the duration of treatment) need to be more clearly defined through additional studies. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Asthme ; Reflux gastro-œsophagien ; Traitement antireflux ; Hyperréactivité bronchique Keywords: Asthma; Gastroesophageal reflux; Bronchial hyperreactivity; Anti-reflux therapy Le reflux gastro-œsophagien (RGO) et l’asthme sont deux situations pathologiques fréquentes qui souvent coexistent chez un même patient. Sur la base de différents mécanismes physiopathologiques [1], le RGO est habituellement consi- déré comme un facteur d’aggravation et d’instabilité de l’asthme. Les relations entre les deux affections sont cepen- dant manifestement plus complexes, comme en témoignent les résultats contradictoires des études ayant analysé l’effica- cité des traitements anti-reflux médicaux ou chirurgicaux sur * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Didier). Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 44 (2004) 79–82 www.elsevier.com/locate/revcli © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.allerg.2003.10.004

Asthme et reflux gastro-œsophagienAsthma and gastro-esophageal reflux

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Asthme et reflux gastro-œsophagien

Asthma and gastro-esophageal reflux

A. Didier *, L. Têtu, M. Miguérès

Service de pneumologie–allergologie, CHR de Rangueil, 1, avenue du professeur-Jean-Poulhes, TSA 50032-31059, 31403 Toulouse cedex 04, France

Reçu le 1 octobre 2003 ; accepté le 9 octobre 2003

Résumé

Le reflux gastro-œsophagien (RGO) et l’asthme sont deux situations pathologiques fréquentes qui souvent coexistent chez un mêmepatient. Le RGO est habituellement considéré comme un facteur d’aggravation et d’instabilité de l’asthme. Cette hypothèse repose davantagesur des considérations physiopathologiques que sur de véritables données cliniques. En effet, de nombreuses études expérimentales chezl’homme démontrent que la perfusion de solution acide du bas œsophage majore l’hyperréactivité bronchique et différents mécanismes ont étéincriminés à l’origine de cette observation. Par ailleurs, des travaux récents ont mis en évidence, chez l’asthmatique, une majoration du RGOau cours de la bronchoconstriction induite par test de provocation non spécifique qui pourrait être secondaire aux modifications de la cinétiquediaphragmatique liées à l’obstruction bronchique et à la distension thoracique. D’un autre côté, l’analyse des études consacrées auxconséquences de la prise en charge médicale ou chirurgicale du RGO sur les symptômes respiratoires des patients asthmatiques met enévidence des résultats inconstants d’une étude à l’autre. D’une manière générale, il semble qu’un petit groupe de patients asthmatiques puissetirer un bénéfice clinique et peut-être fonctionnel du traitement du RGO. Néanmoins les critères de sélection des patients et surtout lesmodalités de prise en charge (en particulier dose et durée des traitements) ne pourront être définis que par de futures études.

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Asthma and gastroesophageal reflux (GER) frequently coexist in patients. GER is usually considered to be potential trigger for asthmasymptoms. This hypothesis is based more on pathophysiological considerations than on clinical data. Indeed, experimental data show that acidperfusion of the lower esophagus in humans induces increased bronchial hyperreactivity, and various mechanisms have been proposed toexplain this observation. Recent studies also demonstrate that, in patients with asthma, obstruction induced by non-specific bronchialchallenge increases the number of reflux episodes. This suggests that asthma by itself might be responsible for GER. Despite these facts, areview of published reports claiming to demonstrate the clinical effectiveness of medical or surgical treatment of GER on asthma symptomsyields inconsistent results. Nevertheless, it appears that a few asthmatic patients do benefit clinically and/or have improved lung function whentreated for GER. However, the criteria for patient selection and, especially, the anti-reflux treatment modalities (choice and dose of medicationand the duration of treatment) need to be more clearly defined through additional studies.

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Asthme ; Reflux gastro-œsophagien ; Traitement antireflux ; Hyperréactivité bronchique

Keywords: Asthma; Gastroesophageal reflux; Bronchial hyperreactivity; Anti-reflux therapy

Le reflux gastro-œsophagien (RGO) et l’asthme sont deuxsituations pathologiques fréquentes qui souvent coexistentchez un même patient. Sur la base de différents mécanismes

physiopathologiques [1], le RGO est habituellement consi-déré comme un facteur d’aggravation et d’instabilité del’asthme. Les relations entre les deux affections sont cepen-dant manifestement plus complexes, comme en témoignentles résultats contradictoires des études ayant analysé l’effica-cité des traitements anti-reflux médicaux ou chirurgicaux sur

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. Didier).

Revue française d’allergologie et d’immunologie clinique 44 (2004) 79–82

www.elsevier.com/locate/revcli

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.allerg.2003.10.004

la symptomatologie ou les paramètres d’EFR des patientsasthmatiques.

Cependant des données récentes concernant les mécanis-mes physiopathologiques en cause et les résultats des traite-ments dans certains sous-groupes de patients méritent d’êtreanalysés avant de proposer une conduite à tenir vis-à-vis decette situation clinique fréquente.

1. Fréquence du RGO chez l’asthmatique

La fréquence de l’association RGO–asthme est connue delongue date, mais elle mérite d’être réévaluée à la lumièred’études publiées ces trois dernières années. Ainsi dans letravail de Ben-Noun et al. [2], l’existence d’une hernie hia-tale associée ou non à un RGO clinique est par ordre defréquence la troisième co-morbidité chez l’asthmatique der-rière l’hypertension et le diabète. Cette fréquence est beau-coup plus élevée que chez les non asthmatiques puisque lesauteurs signalent que le risque de hernie hiatale chez l’asth-matique est multiplié par 5,83 par rapport aux sujets porteursd’une autre pathologie.

Une des études les plus intéressantes est celle de Gislasonet al. [3]. Il s’agit d’une enquête épidémiologique effectuéedans trois pays européens (Islande, Belgique et Suède). Deuxmille six cent soixante et un sujets ont été recrutés dont459 étaient asthmatiques. Cinq pour cent de l’ensemble dessujets présentaient une symptomatologie évocatrice de RGOnocturne. Les sujets présentant une symptomatologie deRGO avaient, dans cette étude, une probabilité de présenterun asthme très supérieur aux autres (odds ratio à 2,2). Danscette étude, le RGO était également associé de façon signifi-cative à la présence d’un syndrome d’apnée du sommeil.L’association RGO et asthme est également mise en évidencedans des études pédiatriques. El-Serag et al. [4], ont réaliséune étude cas-témoins sur un large effectif d’enfants âgés dedeux à 18 ans. Mille neuf cent quatre vingt enfants porteursd’un RGO ont été comparés à 7920 sujets témoins. La préva-lence de l’asthme était significativement plus élevée chez lessujets porteurs de RGO (13 vs 7 % chez les témoins). Enanalyse multi-variée, le RGO était significativement associéà l’asthme avec un odds ratio de 1,9.

Si la fréquence de l’asthme est donc indiscutablement plusélevée chez les sujets porteurs de RGO, les relations entresévérité de l’asthme et présence de RGO sont moins claires.Dans une étude ayant porté sur un nombre considérable depatients asthmatiques (plus de 6500), Diette et al. [5] signa-lent que la présence de signes cliniques de RGO est signifi-cativement associée à un taux d’hospitalisations pour asthmeplus élevé que dans le groupe des asthmatiques qui ne pré-sentent pas ces symptômes digestifs. Á l’inverse, dans ungroupe de 56 asthmatiques présentant un asthme, Tomonagaet al. [6] n’ont pas mis en évidence de différence significativedans la fréquence des symptômes d’asthme en fonction del’importance du RGO évaluée par deux sondes œsophagien-nes distales et proximales. Avidan et al. [7] ont, en revanche,retrouvé une corrélation nette entre les épisodes de reflux

acide et les événements respiratoires de toux et de siffle-ments. Des constatations identiques ont été faites par Cin-quetti et al. [8] dans un groupe de 77 enfants asthmatiques(âgés de 39 à 170 mois).

Le RGO est fréquent chez l’asthmatique, mais il peut êtresouvent complètement asymptomatique. Harding et al. [9]dans un groupe de 26 sujets asthmatiques ont mis en évi-dence par pHmétrie une fréquence de 62 % de RGO asymp-tomatiques. Aucune donnée morphologique ne permettait deprédire l’existence d’un RGO asymptomatique chez ce pa-tient.

Ces données récentes confirment donc la fréquence del’association RGO–asthme. La symptomatologie digestivede RGO est souvent absente ou méconnue chez l’asthmati-que. Il semble exister une assez bonne corrélation entre lesépisodes de reflux et la symptomatologie respiratoire de typeasthmatique, en revanche, il n’est pas possible d’affirmer, surces données, que le RGO est associé systématiquement à unprofil plus sévère de l’asthme.

2. Mécanismes physiopathologiques de l’associationRGO–asthme

2.1. RGO et aggravation de l’hyperréactivité bronchique

Des données expérimentales obtenues chez l’homme, gé-néralement par perfusion œsophagienne de solution acide ontconfirmé que le RGO était associé à une aggravation del’HRB non spécifique [1,10,11]. Trois types de mécanismessont habituellement évoqués à l’origine de ces observations :

• micro-inhalations de liquide gastrique directement res-ponsable d’une inflammation bronchique ou d’une bron-choconstriction par stimulation des récepteurs vagauxbronchiques ;

• bronchoconstriction réflexe d’origine vagale à partir desrécepteurs à l’acidité du bas œsophage ;

• inflammation neurogénique bronchique mise en jeu parréflexe d’axone à partir des terminaisons nerveuses dubas œsophage et aboutissant au relargage endobronchi-que de tachykinines, en particulier de substance P et deneurokinine A.

2.2. Asthme et aggravation du RGO

La possibilité d’aggravation du RGO par la maladie asth-matique a été évoquée plus récemment. Deux types de méca-nismes pourraient être en cause :

• d’une part, les médicaments anti-asthmatiques commela théophylline, les bêta2-mimétiques et même les corti-coïdes semblent associés à une majoration des épisodesde RGO, peut-être en raison de leur action sur la relaxa-tion du sphincter du bas œsophage [12,13] ;

• d’autre part, il a été suggéré que les modifications de lamécanique respiratoire induites par les symptômesd’asthme (distension, air piégé) pourraient être respon-sables d’anomalies du fonctionnement diaphragmatique

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favorisant ainsi le RGO. Zerbib et al. [14] ont effectuéune étude comparant l’effet sur le RGO et sur le tonus dusphincter du bas œsophage, de la bronchoconstrictioninduite par provocation à la métacholine, respective-ment chez des sujets témoins et chez des asthmatiques.Ces auteurs ont mis en évidence, chez les asthmatiques,une majoration des épisodes de reflux, avec de façonconcomitante, une augmentation du taux de relaxationtransitoire du bas œsophage lors de la bronchoconstric-tion induite par la métacholine. Ces résultats sont doncen faveur d’une aggravation du RGO consécutive auxconséquences mécaniques de l’obstruction bronchiquesur la dynamique diaphragmatique.

3. Effets du traitement du RGO sur l’asthme

En 1998, une revue critique de la littérature reprenait lesessais ayant évalué l’efficacité du traitement médical duRGO sur l’asthme [15]. Douze études correspondant à untotal de 326 patients ont été colligées dans ce travail. Lesauteurs de l’article concluaient que le traitement médical duRGO améliorait les symptômes d’asthme, diminuait le re-cours aux médicaments anti-asthmatiques, mais n’avait pasd’effet sur les paramètres fonctionnels respiratoires. Lesauteurs soulignaient toutefois dans la discussion, la nécessitéd’études complémentaires en raison de la fréquence de biaisméthodologiques dans les études sélectionnées. Ainsi troisdes 12 études étaient des études effectuées en ouvert. L’unedes 12 études ne comportait pas de bras placebo. Seulesquatre études sur 12 avaient un effectif, en fin de protocole,de plus de 20 patients. Toutes les études ne comportaient pasune mise en évidence objective du RGO et quatre études sur12 ne mentionnaient pas l’efficacité ou l’absence d’efficacitédu traitement médical sur les symptômes digestifs de RGO.

La même équipe a publié un an plus tard, une revuegénérale sur l’efficacité du traitement chirurgical du RGOchez l’asthmatique [16]. Vingt-quatre études cliniques cor-respondant à 417 patients asthmatiques ont été analysées.Les résultats sont globalement identiques à ceux observésavec la prise en charge médicale, à savoir, amélioration dessymptômes d’asthme, de la consommation médicamenteuseet à un moindre degré de la fonction pulmonaire. Là aussi lesauteurs soulignaient la pauvreté méthodologique de la plu-part des travaux. Parmi les 24 publications recensées, deuxseulement étaient des études contrôlées. Dix études sur24 avaient inclus 10 patients ou moins.

En 2003, une revue critique des essais cliniques sur l’effi-cacité du traitement du RGO sur l’asthme à partir de la basede données Cochrane [17] recensait 12 essais cliniques deméthodologie considérée comme satisfaisante. Onze étudessur 12 concernent une prise en charge médicale du RGO(médicaments et/ou mesure hygiéno-diététiques). Les résul-tats de cette analyse sont beaucoup plus nuancés que dans lesdeux revues précédentes. Les auteurs rapportent, en effet,que bien que la plupart des études mettent en évidence unecertaine efficacité sur au moins l’un des critères analysés

(symptômes cliniques, recours aux médicaments, utilisationdes médicaments, EFR), les résultats apparaissent incons-tants d’une étude à l’autre. Il est vraisemblable qu’un sous-groupe de sujets asthmatiques porteurs d’un RGO est suscep-tible de tirer un bénéfice du traitement anti-reflux, mais ilapparaît difficile de prédire, à l’avance, la réponse au traite-ment. Les auteurs concluent qu’il n’est pas, à l’heure ac-tuelle, possible de recommander systématiquement un traite-ment médical du RGO en tant que moyen de contrôlerl’asthme. Il est également possible que l’évolution des symp-tômes respiratoires liés au RGO nécessitent d’être évaluéeavec des posologies plus élevées et après des durées detraitement plus longues que celles utilisées pour apprécierl’efficacité des traitements sur les symptômes digestifs clas-siques (pyrosis et régurgitation post-prandiale) [18]. Ainsi,dans une revue générale récente Katz [18] suggère la pres-cription initiale d’une posologie double d’inhibiteurs de lapompe à protons avec une évaluation de l’efficacité entre huitet 16 semaines.

Deux études récentes [19,20] se sont attachées à évaluerl’efficacité du traitement chirurgical du RGO sur les symptô-mes digestifs et sur les symptômes extra-digestifs (asthme,douleurs thoraciques et maux de gorge). La première [19]met en évidence une amélioration des symptômes extra-digestifs du RGO chez 93 % des patients mais le sous-groupedes asthmatiques n’est pas individualisé. Dans ce travail, larésolution complète des symptômes extra-digestifs du RGOest beaucoup moins fréquente que celle des symptômes di-gestifs. Dans l’étude de Patti et al. [20], l’amélioration dessymptômes respiratoires est observée chez 64 à 74 % despatients. Les auteurs soulignent qu’elle est particulièrementfréquente chez les patients asthmatiques pour lesquels unecorrélation temporelle entre RGO et symptômes asthmati-ques a pu être mise en évidence en pré-opératoire. Ces deuxétudes n’ont pas été conçues pour étudier spécifiquementl’amélioration des symptômes d’asthme : il est donc difficiled’en tirer des conclusions précises sur l’intérêt d’un traite-ment chirurgical du RGO sur la symptomatologie asthmati-que et sur d’éventuels critères de sélection des patients.

4. Synthèse et conclusion

On peut, à partir des données précédentes, individualisertrois grandes situations cliniques :

• chez l’asthmatique présentant une symptomatologieclassique de RGO (pyrosis, régurgitations post-prandiales), la prise en charge doit suivre les recomman-dations de la conférence de consensus de la société degastroentérologie sur le diagnostic et le traitement duRGO de l’adulte [21]. La mise en place d’un traitementmédical du RGO est d’emblée indiquée. La réalisationd’examens complémentaires invasifs (gastroscopie) nese justifie que chez les sujets de plus de 50 ans ouprésentant des signes d’alarme comme une altérationimportante de l’état général ;

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• chez l’asthmatique bien stabilisé par un traitement mé-dical classique, rien ne justifie la recherche systématiqued’un RGO s’il n’existe pas de symptomatologie diges-tive ;

• chez l’asthmatique instable malgré un traitement anti-asthmatique classique ou chez les patients nécessitantun traitement à fortes doses de corticoïdes inhalés voireune corticothérapie par voie générale, la recherche designes négligés de RGO doit être systématique. La miseen évidence de signes ORL chroniques (pharyngite,irritation de la margelle pharyngée) est un élémentd’orientation intéressant facile à rechercher à l’examenclinique. En cas de doute, et tout particulièrement siaucune autre cause d’instabilité n’a pu être identifiée, laréalisation d’un test thérapeutique paraît logique comptetenu de la fréquence de l’association RGO–asthme. Ilsemble préférable d’utiliser des posologies élevées d’in-hibiteurs de la pompe à protons (doublement des doses)et de se donner un recul suffisant (plus de 8 semaines)avant d’apprécier l’efficacité éventuelle. Le traitementchirurgical du reflux ne peut être raisonnablement pro-posé qu’aux asthmatiques chez lesquels le traitementmédical, ayant fait la preuve de son efficacité, ne peutêtre suspendu sans entraîner une dégradation de lasymptomatologie respiratoire ou chez ceux, pour les-quels une corrélation entre les épisodes de RGO et lasymptomatologie respiratoire a été confirmée par desexamens complémentaires type pHmétrie.

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