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Asyl J'avais récemment été embauché pour un poste de gardien de prison, à Verrückt, en Allemagne. Le temps était glacial, la camionnette amochée avec laquelle je me rendais là-bas avait dû faire plusieurs arrêts à cause de la glace et du chemin étroit. Lorsque j'arrivais devant cet énorme bâtiment, les grandes portes métalliques s'ouvrirent et un gardien antipathique m’emmena dans la cellule où je passais la nuit, car il se faisait tard et je ne tenais presque plus sur mes jambes. La cellule était occupée par un autre gardien du nom de Richtofen, il ne parlait pas la même langue que moi, mais on s'était rapidement compris, il était fort sympathique, celui-là, grand et plutôt musclé. Je compris aussi que c'était un ancien soldat. Il était arrivé quelques heures auparavant. Le matin nous nous réveillâmes et un agent de sécurité nous montra l'endroit où l'on avait besoin de nous. C'était dans un grand bâtiment juste à côté de celui où je m'étais endormi, je ne l'avais pas vu en arrivant ici. Nous entrâmes et un spectacle horrible me laissa sans voix: c'était un long couloir où plusieurs cellules se faisaient face. J'entendais des cris, des personnes qui pleuraient, mais je ne comprenais rien. Je pouvais lire sur les murs : « MIR HELFEN » ou encore « ICH WERDE STERBEN ? » je ne pouvais pas comprendre

Asyl

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Asyl

J'avais récemment été embauché pour un poste de gardien de prison, à

Verrückt, en Allemagne. Le temps était glacial, la camionnette

amochée avec laquelle je me rendais là-bas avait dû faire plusieurs

arrêts à cause de la glace et du chemin étroit. Lorsque j'arrivais devant

cet énorme bâtiment, les grandes portes métalliques s'ouvrirent et un

gardien antipathique m’emmena dans la cellule où je passais la nuit,

car il se faisait tard et je ne tenais presque plus sur mes jambes.

La cellule était occupée par un autre gardien du nom de Richtofen, il

ne parlait pas la même langue que moi, mais on s'était rapidement

compris, il était fort sympathique, celui-là, grand et plutôt musclé. Je

compris aussi que c'était un ancien soldat. Il était arrivé quelques

heures auparavant. Le matin nous nous réveillâmes et un agent de

sécurité nous montra l'endroit où l'on avait besoin de nous. C'était

dans un grand bâtiment juste à côté de celui où je m'étais endormi, je

ne l'avais pas vu en arrivant ici. Nous entrâmes et un spectacle

horrible me laissa sans voix: c'était un long couloir où plusieurs

cellules se faisaient face.

J'entendais des cris, des personnes qui pleuraient, mais je ne

comprenais rien. Je pouvais lire sur les murs : « MIR HELFEN » ou

encore « ICH WERDE STERBEN ? » je ne pouvais pas comprendre

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le sens de ces mots. Je compris alors qu'il ne s'agissait pas d'une prison

mais d'un asile. Des personnes dont les habits étaient arrachés

secouaient les barreaux de leurs cellules et répétaient sans cesse des

mots incompréhensibles pour moi. Après ces quelques minutes le chef

des gardes nous convoqua, Richtofen et moi pour nous expliquer notre

tâche. La journée se passa à comprendre notre nouveau métier.

Cependant, l'asile était dans la montagne et l'obscurité tombait vite.

Nous retrouvâmes très tôt notre cellule pour la nuit .

Pour oublier mes affreuses pensées, je bus un peu de liqueur et

m'endormis d'un coup sec. Au milieu de la nuit un courant d'air me

réveilla je sortis de ma cellule et j'entendis un bruit. C'était une voix,

celle d'un homme. Ma tête tournait... d'autres cris, un chien qui

aboyait, et une petite fille qui pleurait... des mots revenaient dans ma

tête, c'était les mots que j'avais vus dans l'autre bâtiment, encore des

cris, des pleurs et puis plus rien. Je tombais sur le dos et m'endormis.

C'était le premier jour.

A mon réveil, je pris quelques bouts de pain rassis, et je retournais

dans l'autre bâtiment. Encore des rires, des pleurs, des cris. Je me

bouchais les oreilles, fermais les yeux quelque temps pour ne plus

penser à cette horreur. Quand j'ouvris les yeux, un fou était à l'autre

bout du couloir, il était debout la tête ravagée, les habits déchirés, les

yeux noir comme du charbon. Il me regardait mais ne disait rien. Dans

l'immense couloir un silence de mort flottait, plus un bruit. Le seul

être que je voyais à présent était ce fou, mais quand je clignais des

yeux il disparaissait.

La cacophonie reprit et j'eus une et folle et soudaine envie de partir.

Mais il avait neigé, les routes étaient dangereuses, même à pied. Il me

fallait ce travail qui était bien payé. La nuit arrivait et je devais aller

me coucher. Je repris un coup de liqueur et m'endormis. Je fus encore

réveillé par un courant d'air glacial, encore plus glacial que la dernière

fois, et j'entendis les bruits apocalyptiques des personnes de l'autre

bâtiment. Je me levais, sortit de ma cellule, regardais autour de moi.

Vers la droite : personne. Vers la gauche: le fou! Il était debout, et se

mit à courir vers moi à toute vitesse ! Il me heurta et me fit tomber.

C'était le deuxième jour.

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Le gardien antipathique me réveilla. Je me dirigeais vers la cafétéria

mais c'était un dédale, un vrai labyrinthe, j'étais perdu. C'était un

couloir blanc, où la lumière vous brûlait les yeux. J'étais arrivé par

hasard dans la salle où l'on menait des expériences sur les résidents de

l'autre bâtiment. Jusqu’à ce jour inconnu pour moi.

Des taches de sang coulaient sur les murs, des cris forts retentissaient,

avec une phrase que j'entendais se répéter : MIR HELFEN ! Une

personne à la mine patibulaire me ramena à la cafétéria. Je me rendis à

abominable construction, je bus quelques gorgés de café et franchi

l’énorme porte métallique. J'entrais, pas un bruit, toutes les cellules

étaient ouvertes, je poussais un terrible hurlement et tombais.

Quand je repris connaissance, j'étais dans ma cellule et Richtofen était

près de moi, il faisait bientôt nuit et je dus m'endormir en prenant un

peu d'alcool. Au milieu de la nuit, un cri retentissait et me réveilla, les

cris dans ma tête se firent de plus en plus fort, je décidais de sortir de

mon dortoir de fortune, Richtofen dormait. En regardant par la fenêtre

je m’aperçus que la porte métallique du bâtiment était ouverte. Je

courus vers Richtofen pour le réveiller mais il n'était plus là.

L'absence de mon vaillant coéquipier était incompréhensible.

Un rire démoniaque se fit entendre. Et avant de comprendre l'horrible

vérité, je reçu un coup énorme à l’arrière du crâne. C'était le troisième

jour.

Je me réveillais, une fois encore, dans ma cellule. Cela faisait quatre

jours que j’étais dans cet asile, et en l'espace d'un instant, je décidais

de m’échapper.

Quitter tout cela, partir, m'enfuir, ne plus jamais voir ces fous! Avant

que les gardes ne viennent vérifier notre travail dans le bâtiment

démoniaque, je me mis à courir en passant par la grande porte

métallique, de toutes mes forces, vers la forêt. La nuit tombait vite et

la forêt paraissait immense, interminable. J'y passais toute la nuit.

Pendant des heures les bruits de la folie résonnèrent dans ma tête. Je

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faisais tout pour les arrêter, mais c'était plus fort que moi. La fièvre

m'emporta dans un délire qui me fit tourner dans tous les sens. Je me

tapais la tête pour arrêter cette cacophonie, mais en vain. Ma tête

frappa contre quelque chose de dur, une branche, du moins je l'espère.

Je me réveillais en sursaut, et sautai hors dans mon lit. Il fallait me

dépêcher, j'avais récemment été embauché pour un poste de gardien

de prison, à Verrückt, en Allemagne. Le temps était glacial, la

camionnette amochée avec laquelle je me rendais là-bas avait dû faire

plusieurs arrêts à cause de la glace et du chemin étroit. J'avais déjà vu

cette route, mais je ne pus me rappeler et l'oubliai.

Lorsque j'arrivais devant cet énorme bâtiment, les grandes portes

métalliques s'ouvrirent et un gardien antipathique se présenta. Nous

entrâmes et un spectacle horrible me laissa sans voix: c'était un long

couloir où plusieurs cellules se faisaient face. J'entendais des cris, des

personnes qui pleuraient, mais je ne comprenais rien. Je pouvais lire

sur les murs : « MIR HELFEN » ou encore « ICH WERDE

STERBEN ? » je ne pouvais pas comprendre le sens de ces mots. Je

compris alors qu'il ne s'agissait pas d'une prison mais d'un asile.