Aucommencement,lesymptôme

Desmêmesauteurs

OuvragesdePierreLembeye

Noussommestousdépendants,OdileJacob,2001.

L’Hommedescenddusonge,BuchetChastel,2005.

LecabinetdecuriositésduDocteurFreud,Scali,2006.

Lecoachetlamouche,N.R.F,Gallimard,2006.

Lamaindanslechapeau,BuchetChastel,2007.

IlétaitunefoisOneiros,leRêve,Accedit,2007.

Unprésidentchezlepsy,Scali,2008.

Ilétaitunefois,Belza,Fayard,2009.

EchafaudspourBelza,Accedit,2010.

Lafureurdeguérir,Stock,2011.

Ouvragesd’AnneChristineFournier

Regardssurnotremonde.EntretiensavecRémiBrague,Jean-LucMarion,EdgarMorin,EricdeRosnyetBertrandVergely,Mame,2012.

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Del’uniformisation

L’effondrementdelaprésenceLe deuxième danger, c’est la démission pédagogique sous lemasque du renouvellement de la pédagogie, de la pédonomie.Traditionnellement,lefonddel’éducationreposaitsurlecouplepaido-erastès. En grec, pais, paidos, l’enfant, et erastès,l’adulte qui aime enseigner et apprendre des jeux qui élèventl’enfant.Ilyadel’érosdanserastès.Cequirestefondamentaldans le procès éducatif traditionnel, c’est la présence d’unadulte aimant un enfant alors qu’aujourd’hui, tout se déplacevers un univers où l’autre s’absente, devient télé, lointain,remplacé par les mémoires électroniques qui ont acquis uneexpansionmétastatique.Déjà,Socrateavaitaperçulamenaceaumoment de l’invention de l’écriture.C’est le célèbremythe del’IbisRoiquiapportel’écritureaupharaon.Aprèsréflexion,lemonarque lui dit que si l’on oublie notre mémoire intime,personnelle, on y perdra en présence. Et, effectivement, on yperd de plus en plus en présence. Cette perte immense deprésence interne, muséale, est une menace, un danger majeuraujourd’hui, d’où la nécessité de réapproprier notre propremémoire. Pour cela, il faut apprendre par cœur ce que nousaimons, les textes que nous aimons, et ne pas laisser auxmémoires électroniques externes cette appropriation qui nousdépropriedenous-mêmes.Laforclusiondel’erastèsduprocèspédagogiquemenacepossiblementl’enfantdeschizophrénie.

Biensûr,ceseraitunmensongecaractériséd’annoncerqueSteveJobsestresponsabledecettevaguepuissantequiviseàuneffondrementdelaprésencehumainechezleshumains.Ilalui-

mêmeincarnéleparadigmedecetabsentement,deparsaproprenaissance qui l’a privé d’êtres humains aimants, concernés parsavenue.Dépropriéd’amourmaterneletpaternel,ilacontribuéà déshumaniser les êtres humains en hypertrophiant leurmémoire externe et en asséchant leur mémoire interne, lamémoiremuséale,cellequinousappartientenpropre,cellequinousdestine.

Decepointdevue,SteveJobsmefaitpenserauflûtistedeHemeln,magicien,démonetmusicien.SonhistoireestarrivéeàlafinduXIVesiècleàHemeln,prèsdeHanovre,surlaWeser.Enl’an 1354, Hemeln fut infestée par une effarantemultitude deratsquiravagèrentlaville.Onessayaenvaindeleschasser.Encetemps-là,advintdanslavilleuninconnudegrandetaillequiproposa aux édiles de délivrer la ville du fléau, moyennantrécompense. Marché conclu, l’inconnu tira de sa manche uneflûte au son de laquelle tous les rats le suivirent. Il les menajusqu’à la rivière où ils se noyèrent. Il retourna alors pourrecevoirlarécompensepromise.Onlaluirefusa.Lelendemaindimanche,pendantquelesbourgeoisétaientàl’église,ilsemità jouer avec une autre flûte et tous les enfants de la villes’assemblèrentautourdelui.Illesmenaausondel’instrumentjusqu’à la montagne voisine de Kopfelberg, la montagne desdécapités, là où l’on exécutait les criminels. Les enfantsdisparurentetonnelesaplusjamaisrevus…DansuneballadeautitredePreneurdeRats,Goetheajouteque lemusicienestaussi preneur de filles. Si simples que soient les fillettes, siprudesquesoientlesfemmes,lemald’amourlestraverse,induitparlessonsmagiques…

Think different, l’appel d’Apple, séduit, crée en fait desutilisateurs binarisés qui s’avèrent uniformisés, semblables.Differentdoitdoncselireàl’envers,identique,pareil.QuantàInternet, ce n’est pas un filet interne mais un exercice de

surstimulation de la mémoire externe. C’est en réalité unExternet qui hypertrophie notre mémoire réactionnelle etatrophie, irréversiblementpourcertains,notremémoire interne,endogène, provoquant des addictions parfois graves. Internetn’est pas In maisEx. Il est le contraire de ce qu’il annonce,euphémique par excellence. Si le XXe siècle a inauguré unsyndrome de concentration diabolique, le XXIe siècle installeaujourd’hui un syndrome de déconcentration majeure, formeplanétaire renouvelée du totalitarisme. Internet et les e-mails,téléphones portables, smartphones, tablettes tactiles, tweets,télévisionsnousontrendussurstimulésparl’extérieur.Letempsest réduit à l’instant. Le Diable est décidément très créatif.L’intimité est bannie au profit d’une extimité métastatique,érigéeendogme,envertucardinale.Dans lemondedu travail,lesopenspaces sontdesbureaux largementouvertsbannissanttoute intimité, tout retour sur soi et sontdésormaisdevenus lequotidiendesemployésdesixsociétéssurdixenOccident.Leformidable déploiement de la technique a créé un mutismegénéralisé,uneffondrementde laprésence,unedisparitiondesespacesintérieurs.

Aujourd’hui, six salariés sur dix passent plus de deuxheuresparjoursurleurboîtemailetquatresurdixécriventplusde centmails par jour. Il faut plus de soixante secondes pourreprendrelefildesapenséeaprèsinterruptionparunmessage.Unemémoireséléniennesecrée,bombardéedetrous,chacundeplus d’une minute. Une telle fragmentation aboutit àl’impossibilité de lire ou d’écrire des textes longs. Lesinternautes surfers américains ouvrent en permanence huitfenêtressurleursécransetpassentdel’uneàl’autretouteslesvingt secondes… Généralisation de l’absence, métastase dubavardage.

Évidemment, Steve Jobs n’est pas le seul responsable de

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qu’on jette dans lamer et qui ramène toutes sortes de choses.Quand il estplein, lespêcheurs le tirent sur le rivage,puis ilss’asseyentetrecueillentdansdespanierscequ’ilyadebonetrejettentcequinevautrien.Ainsi,énonceMathieu,ensera-t-ilà la findumonde ; lesangesseprésenterontet séparerontdesjusteslesméchantsqu’ilsjetterontdanslafournaise:làserontlespleursetlesgrincementsdedents!

IsolerleMal,l’indexercommetel,lenommerpourpouvoirséparer,exclureouemprisonnerlesporteursduditMal,évoqueràproposdecedernierunepandémie,unepeste,estunexerciceauquels’estlivréeetselivreavecunedétermi-nationsansfaillelacultureoccidentale,etplusprécisémentnord-américainequiadécidé, depuis les années 1970, que la drogue était le grandSatanqu’il fallait traquer sans faiblir et éradiquer.L’Amériques’est construite dans la nécessité d’un bouc émissaire,successivement, l’Anglais, l’Indien qui n’est bon que mort, leNègre qui est inéducable, l’alcool et le désastre de laProhibition,ladroguesoustoutessesformes:héroïne,cocaïne,haschisch oumétamphétamine, la liste reste ouverte…Depuisquelquesannées,l’Amériques’esttrouvéunenouvelleépidémie,l’obésité, et par elle une nouvelle croisade. L’exercice visetoujoursà isoler lemalalorsque le texten’est jamais isolédeson contexte. Plus d’un tiers des Américains sont obèses, unchiffrequiculmineà35%dans leMississipi,undesétats lespluspauvresdesÉtats-Unis.Letauxd’obésitéatteintprèsde50% la communauté noire qui est la plus pauvre. Dans leMississipi, 40 % des enfants sont obèses, une situation quiobère lourdement lapopulationdu faitdudiabète infantile,del’hypertensionetdesmaladiescardiaques.

Ainsi,commeilestdetradition,unproblèmequidevraitêtreabordé en étroite relation avec son contexte, est séparé de cedernier,cequipermetdedonnerdesréponsesoùlesproblèmes

essentiels,l’exclusion,l’indigence,lapauvretéd’unepopulationsontévacuéescommeparmagie.Onvaouoniramême,surunepiste indécente,chercher legènede l’obésitésur lapopulationnoire.

Revenantàlamiseàl’indexdeladrogue,lerésultatdecettepolitique, autant républicaine que démocrate, a été demarginaliserlespopulationslespluspauvresdupays,lesAfro-AméricainsetlesMexicains.Pourl’exempledecequej’avance,lesAfro-Américains sont13%de lapopulationgénérale et laproportion des Noirs et des Mexicains dans les prisons, tousétats confondus est de 60%, dont 10%d’Hispaniques.C’estdonc une façon tout à fait légale, au titre de la drogue, demaintenir une sévère ségrégation raciale. L’Europe et plusparticulièrement la France, en grand manque d’imagination, asuivi les décrets de l’Oncle Sam et incarcérémassivement, autitredeladrogue,lesAfricainsetlesArabes.Desindexationsetdes exclusions à caractère racial sont à l’œuvre. De nouveauxtotalitarismes privent certaines populations de leurs droitsélémentaires. Ils se mettent efficacement en place etapparaissent,aujourd’hui,devantnous,ànosportes.Ilssontlessignes avant-coureurs d’un enchaînement antidémocratique àl’échelledelasociététoutentière.

Unelangue,c’estunpointdevuedumondePierre Lembeye, qu’en est-il, à votre avis, du quatrièmedanger?

Le quatrième danger est la généralisation de ce que l’onappelle la lingua franca actuelle, c’est-à-dire la langueaméricaine,généralisationquiprenddesproportionsimmenses.

Aujourd’hui, 80 % des publications des institutionseuropéennes se font en anglais ; 95 % des publicationsmédicaleseuropéennessefontenlangueaméricaine.Ilyaeuuneffondrement de la langue française en quelques décennies etcelameparaîtunvéritabledanger.Lefrançaisapparaîtàcertainscomme une langue qui, avant de disparaître, se mortifieprogressivement. Les parlants qu’étaient les Françaisdeviendront possiblement des alogoï, des inintelligibles, despresquesansraison.Pourquoicontinueràapprendreunelangueen voie de disparition? Pourquoi apprendre une languedisparue?Par exemple, lesFrançais font l’expérienceactuelledes difficultés à enseigner ou à être enseignés en grec anciendansleslycéesetlesuniversités.Etcependant,quelplaisirpourmoiàmepenchersurlalanguefrançaisedanssaproximitéavecleslanguesvoisines!Parexemple,«trêve»,danssaproximitéavec Treue germanique, avec true et trust anglais et trega enespagnol ; l’exemple de « geôle » qui vient du vieux françaisjaiole,entraversantlaManche,adonnéjail.Jaioles’originedecaveola,diminutiflatindecavea,lacage.Geôleetenjôlersontévidemmentdemêmeracine.

Êtes-vous d’accord avecGeorge Steiner qui écrivait dansAprès Babel que la multiplication des langues était unemanièredemultiplierlavisionduréeletdeletraduireplutôtque d’avoir une perspective de ce réel monolingueuniquement?

Je pense que l’ouverture vient de l’apprentissage deplusieurs langues et pas de la fermeture sur une seule. Unelangue,c’estinitialement,avanttout,unchantquis’estdéployéen un temps-lieu approprié. C’est un point de vue dumonde,uneperceptiondumonde,letémoignagedelaspécificitéd’une

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LeBienetleMalsontUnQue pensez-vous de cette course au bonheur, du droit aubonheur?

Jecroisquecelafaitpartiedelabarbariemoderne.Ilyaeudegrandesbarbaries…LeXXe siècle, je l’aidit,a inauguré lesgrands abattages humains avec la guerre de 1914.Maintenant,noussommesentrésdansunebarbarieauvisagecrypté,caché;une barbarie où les gens n’ont plus accès à leur propreexpérienceintérieure,oùlatransmissions’effaceauprofitd’unehypercommunication,uneépoquequi,pourreprendrelaphrased’Héraclite, a oublié que Bien et Mal sont Un, aucommencement. Je donne l’exemple d’un homme de soixante-cinqans,alcooliquedepuisdenombreusesannées,quivavoir,souslapressionfamiliale,unmédecinradicalquiveutluifairearrêtersonaddiction.Lepatientarrêteetauboutdedeuxmois,il se suicide.Cepsychiatre, assuréde ladivisionentrebienetmal, a dû être très content puisque son patient estmort guéri.Donc le problème n’est pas de diviser le mal et le bien, lemalheur et le bonheur. Lorsque l’on veut faire du bien àquelqu’un,onpeutluifaireaussibeaucoupdemal.

Ce n’est pas si simple. Dans une époque où l’on estmanichéen, où il y a par exempleuneAmériquequi s’affirmecomme l’axeduBien vis-à-vis de l’axeduMal, affirmez-vousqueBienetMalsontlamêmechose?

Je dis qu’à un certain moment donné, le bien peut setransformer en mal. Pour le type éjaculateur précoce qui sesoigneavecdelavodka,auboutdedeuxans,ilestalcoolique.Àvouloirsonbien,ilafaitsonmal!

Que peut apporter le philosophe dans cette quête dubonheur?Cettequêted’unbonheurquinesoitpasmatérialistemaisspirituel?

Le bonheur, pour moi, c’est d’emblée à la bonne heure.Quandçatombebien,onremercie.Maisonsaitaussiquecelapeuttombermal.Onpeutavoirunemauvaisenouvelle,onpeutm’annoncerlamortd’unproche,cequivamedéprimerpendantquelquessemainesouplusieursmois.Jenesuispasàl’abridumalheur, par exemple, si on m’annonce que j’ai une maladiedéfinitive.Cen’estpasquelemalestpourl’autreetquejedoism’enprotégerdansunebulledebonheur.

Comme les stoïciens,nepensez-vouspasqu’onpeutavoiruneactionsurlebonheur,c’est-à-direuncontrôledudésir,uneformed’ascétisme?quemoinsonsouffrira,plusonaccéderaàuneformedemesure,desagesse?

Nietzsche écrivait que les recettes stoïciennes etépicuriennessonttoujourslàànotredisposition.

LesOccidentauxsontdansladénégationdelamortÀl’époqueoùl’espérancedevien’ajamaisétéaussiélevée,oùl’esthétique et lamédecine n’ont jamais été aussi avancées etleurs progrès aussi développés, comment expliquez-vous cerefusdelavieillesse,delamaladieetdelamortdanslemondeoccidental?

François Roustang, dans un article intitulé Les Surmois

facétieux, remarquait que nous autres modernes, thérapeutescompris, avons des difficultés de vivre la proximité de notrepropremortetproposait l’opportunitédepensercomme le fouduroi.Ilajoutaitquesilespsychanalystessontsipeumoqueursà l’égard de leur pratique et de leur théorie, c’est qu’en bonsmodernes, ils ont oublié la proximité de leur propre mort. Àl’inverse,l’expériencedelamortprocherappelleà l’hommesafinitudeetouvresursonhumilité.Çalefaitdégringolerdesonhubris.LesOccidentauxsontinstallésdansladénégationdelavieillesse, de lamaladie et de lamort. Celame fait penser aubilande laguerreen Irak. Ilyaeuplusdequatremillemortsaméricains en Irak. Il n’y a pas eu une photo de cesmorts, lecommandement ayant implicitement ou explicitement interditquel’onphotographielesmorts.Lesjournalistesquiontpassédesimagessesontfaitinterdire,sesontfaitrapatrier,virer,etc.IlyaeuplusdequatremillemortsenIrak,maisonneparlepasdesblessés.Le ratiomorts-blesséspendant laPremièreGuerremondiale était de un à trois, trois blessés pour un mort.Maintenant, grâce aux progrès médicaux, le ratio est de un àhuit,huitblesséspourunmort,maisilfautvoirdansquelétatse trouvent les blessés. Des gens pratiquement irrécupérables,deux jambes en moins, amputés d’une jambe et d’un bras,d’autresquisontdéfigurés.Desgensquinereviendrontjamaiss’insérerdans lavieactive,desgensque l’onabandon-neraoudesgensquieux-mêmess’abandonnerontauxdrogues,desgensquisesuicideront.En2012,enAfghanistan, lepourcentagedesuicidesparmilestroupescombattantesaméricainesaaugmentédeprèsde20%parrapportàjuin2011.Lesmortsparsuicideont dépassé les morts au combat. Les troubles psychiatriquessont en expansion alarmante malgré les sommes colossales –plusde2,5milliardsdedollars–allouésàlasantémentaleen2012.

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quimanifesteunpenchantpourl’enfant.C’estcetterelationquipermet aux enfants longtemps hospitalisés de ne pas sombrerdans l’hospitalisme. La communication de l’enfant n’est pascommedansl’évangiledeJean:«Aucommencement,leVerbeétaitetleVerbeétaitavecDieuetleVerbeétaitDieu.»Non,çane commence pas par la parole articulée mais, bien avantl’articulation,parleson.Dansleseauxmaternelles,commeunnageur sous-marin, le fœtus apprend par les vibrations sur sapeau, qui a la même embryologie que son tissu nerveux, àdifférencier la voix de la mère des autres sonorités. C’est lasurfacecutanéequiestdonclapremièreoreille.

Autre absurdité doctement proférée, répétéead libitum parla Faculté : l’écart intersubjectif qu’il faut pour assurer ledéveloppement de l’enfant. Bien au contraire, c’est l’être-ensemble du commencement qui commande. On ne peutcomprendrel’accèsaulangage,acquisitiontardivedel’humain,quesionlesituedansunensemble«déictique»beaucouppluslarge,beaucouppluscomplexe.Ladeixisnommelamonstration.L’hommeestunmonstre,écrivaitHölderlin,ausensoùl’hommemontre.Sonêtreréside,demeureenceciqu’ilestunmontrant,disait Heidegger dans Qu’appelle-t-on penser ?. L’hommemontre d’abord, d’emblée, par sa surface cutanée. Puis, par leregard.L’enfant sevoitpupille,petit,poupéedans lespupillesmaternelles. Et si la pupille nomme aussi l’enfant en latin, lakorè faitdemêmeengrec.Puis, toutengardantsaprimeur, leregardpasselerelaisàl’indexation, lagestuation.L’enfantquis’estassisetselatéralise,montreavecledoigtdirecteur,l’indexdroit pour les droitiers. L’indexation passe alors le relais à lanomination,contemporainedel’accèsàlabipédie.

Lelangage,ultimemodedelamonstration,procèdededeuxmodesdont l’unprimesur l’autre.Toutd’abord, le langageestun chant avec son souffle, son timbre, son intensité, ses

scansions. L’enfant s’entraîne alors à jouer, à moduler sacolonne expiratoire. Il n’y a de chant, de parole, de langage,qu’enexpiration.Pouraccéderefficacementau langage, il fautquel’enfantreçoivel’aided’unautreoud’autresconcernés.Desêtres qui se penchent favorablement sur ses premièresproductions sonores. C’est l’être-ensemble qui gouverne etcertainementpaslecreusementdel’écartintersubjectif.

Autre nécessaire contestation devant le politiquementcorrect,laremiseencausedelarègledunonquiprécéderaitleoui chez l’enfant et l’écriture qui viendrait toujours avant lalecture. Interrogation aussi devant l’assurance qui raconte que,pour que l’enfant dise oui, il faut qu’il possède une sécuritéinternesuffisante.Enfait, lenonet leouinesortentpasde labouche de l’enfant commeAthéna est sortie toute armée de latête fendue de son père. Le non et le oui apparais-sent dès lecommencement de la monstration, dans le regard et dansl’indexation. Un enfant qui refuse le regard de l’autre, quidétournesonregardousatête,ditnon.Cenonn’appartientpasqu’àl’enfantmaisilestvraisemblablementinduitparl’autre.Lameilleure preuve en est l’hospitalisme chez l’enfant. Il est trèsdifficilededirenonàunemèregavantequisoignesonangoisseen remplissant son enfant comme un sac et l’installedurablement dans une carrière d’obèse. Le oui ou le non nes’acquiert pas par l’enfant seul mais par l’être-ensemble d’unadulte concerné, un adulte qui est à l’écoute de sa proprecyclicitéetdelacyclicitédel’enfant,desafaimetdesasatiété,desonéveil,desafatigueetdesonsommeil,etc.

Lemondeestnésansl’hommeetfinirasansl’homme

Faut-ilcroire?

Je trouve la question un peu curieuse. J’en maintiensl’émergence et l’ambiguïté qui lui co-appartient. Croire ne seprésente pas comme un impératif, une ordonnance, uneprescription.Pourrépondre,ilmevientunmotgrecamusantquis’appelle spondeion. C’est le vase de libation dans lequel onboitquandonarrêtelaguerre,quandonsigneletraité,quelesennemis se réconcilient. C’est aussi le vase que deux familless’échangentpourcélébrerunmariage.Cespondeion grec s’estdéplacé en latin pour donner respondere, répondre. Sponsa,c’estlafiancée,celleenquionsefie,celleenquil’onafoi,enqui l’oncroit,versqui l’ons’engage.Celaadonnéenfrançais«responsabilité»,«épouser»et«sponsor»,celuiquis’engagepourvous.Sij’aitrouvéunefiancéeetsicettefillemetrompe,me lâche, me trahit, je vais pendant quelque temps ne plus ycroire, ne plus aimer,me dépiter.On peut croiremais on peutaussinepascroire.Si,aumomentdelanaissance,onaétémalaccueilli, mal accepté, refusé, cela influencera durablement leclimatdelapersonnequiasubiuntelaccueil.

Croyez-vous en l’immortalité de l’être et de l’âme ?Croyezvous que certaines personnes peuvent croire àl’immortalitédel’êtreetdel’âme?

C’estunepossibilitépourcertainespersonnes.Au fond, jen’ai pas de réponse à cette question. Certaines religions,certaines cultures se sont affirmées, s’affirment dans cetexercice.Jenecroisnienl’immortalitédelaTerreniencelledel’homme.Lemondeestnésansl’hommeetfinirasansl’homme.Auxdernièresnouvelles scientifiques, lavie éternelle,unÉrossansThanatos,seraitportéeparunpolypiermédusantquivient

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par le symptôme. Je préfère résonner avec le symptôme plutôtqueraisonnersurlui;jepréfèreentrerenrésonanceplutôtqued’interpréter. Je donne la primeur à la pratique plutôt qu’à lathéorie.Monexerciceestd’offrir laprimeurà lapraxis plutôtqu’à lagnôsis, la theôria et sesconstructions linguistiques. Jesuisd’avisde laisser sedéployer l’expériencepour elle-même,de faire retour à elle, y compris dans samutité, comme l’écritClaudeRomanodansAucœurdelaraison,laphénoménologie.

Dans le retour praxique indexé et réalisé par laphénoménologie, il n’y a aucun retour à un commencementviergede tout langage.Lapratiqueprélinguistiquen’estpas lemondemuetdufœtusetdunourrisson.Enfait, lesmondesdufœtusetdunourrissonnesontpasmuets,l’antérioritérevisitéen’est pas seulement chronologique mais avant tout logique.Cette pratique privilégie l’holistique sur l’analytique,l’expérienceétantuneprimalstuff,uneétoffeprimitiveoùsujetetobjetnesontpasséparés.Cettepratiquequicaracté-risetoutsystèmeholistiquefaitressortirlaprioritéquiestuneantérioritédutoutsurlapartie.

Dans la rencontre thérapeutique d’inspirationphénoménologique,c’estl’être-ensembleforméparlethérapeuteet le patient qui tente de s’exercer vers un mieux-être quibénéficieautantau thérapeutequ’auxpatients.Lepatientn’estpas l’objet ni le sujet d’une interprétation. Curieusement, onretrouveunpointdevuequasiphénoménologiquechezlesPèresdel’Égliseoùlapratiquegouvernesurlathéorie.Legnôstiqueest comparé à un médecin car il a en charge de guérir lesmaladesdel’âmeetdelesfaireaccéderàl’apatheia,c’est-à-direl’impassibilité. Au IVe siècle de notre ère, chez Évagre lePontique, c’est la pratique qui est primordiale. C’est par ellequ’il faut passer pour accéder à l’état de thérapeute. Évagreinsistesurlefaitqueceluiquiguéritsesoigneenmêmetemps

qu’ilguéritlesautres.

Lesymptôme:uneparoleadresséeauxhommesparlesdieuxVous rapprochez mythologie, théologie, philosophie etpsychologieenquestionnantlapossibilitéthérapeutique.Qu’enrésulte-t-il?

La possibilité thérapeutique n’est pas séparée du mondequ’ellehabite.Auxtempsmythiquesoùleshommestutoientlesdieux, où ils copulent ensemble, le thérapeute estprimordialement le serviteur des dieux dans le temple.MalgréErnoultetMeillet,ilyapeut-êtredutheosdansthérapeutequiest le médiateur du divin, devin, chanteur, poète. Tels sontOrphée, Pythagore et Asklèpios, d’essence divine, magiciens,enchanteurs, pantocratiques, panurgiques. En ces temps-là,l’épilepsie était le mal sacré, symptôme, parole adressée auxhommesparlesdieux.

Letempsmythiqueprimordial,enchanteur,s’esteffacépourlaisserlaplaceaudésenchantementphilosophiquequisépareetréduit les pouvoirs des humains y compris leur pouvoirthérapeutique. Si la thérapie est pour Hésiode l’ensemble desactesquihonorentlesdieux,elleresteencore,pourPlaton,danslePhèdre,prochedudivin.Elleestaussilessoinsattentifsauxparents,àtousceuxdontonestresponsable,auxanimauxetauxplantes. C’est aussi l’ensemble des soins offerts auxmalades.Au siècle de Platon, l’épilepsie n’est plus la parole du dieuadressée aux hommes. Hippocrate de Kos, dans son traité surl’épilepsie, dénie toute étiologie divine à cette maladie. Il ladésacralise. Curieusement, l’épilepsie a retrouvé, avec notre

temps,soncaractèresacrédans lesensoù l’agiosgrecestà lafois le sacré et le maudit, le bien et le mal. L’épilepsie estl’exemplepratiquede la sentenced’Héraclite,kai agathon kaikakon estin en ; le bien et lemal sont un. L’épilepsie est unemaladiemaiselleestaussiunethérapieefficace; l’électrochocqui induit une crise d’épilepsie traite parfois la manie ou lamélancolie.

Lasagesse, leplusgrandbiendel’hommeselonSophocle,nesurgitpasavecl’apparitiondel’homme,elleesttardive.Ellecommencepardesbégaiements.Lespremièreslueursdel’aubeéclosentenGrèceàlafinduVIIesiècleavantnotreère.L’aubedelaphilosophiesonnelecrépusculedumytheetdesesrituels,de ses traditionsmagico-religieuses et chamaniques de l’ordrearchaïque.Laphilosophies’estextraitedelaparénèsemythique,del’anthropologiepréhistoriquedelaGrèceantique.Quellequesoitlacausedecetterévolution,naîtalorsuneréflexionlaïque,politique et sociale qui s’extrait du mytho-théologique. Cettecrisecorrespondàunetransformationenprofondeurdelavisiondu monde, une métamorphose de la personnalité tant au plansomatique que psychique et sociale. C’est une modificationradicaledelafaçondevoirlemondeetparlàdumodedevie.

Onpeutenvisagerl’accouchementphilosophiquehorsdesamatricemythiquesurlemodedelacoupureetconsidéreralorsque les exercices spirituels de la philosophie sont des procèspsychiquesrationnelsquin’ontplusrienàvoiraveclestransescataleptiques, les sacrifices, les exercices cathartiques et leschantsthérapeutiquesdumodemythique.Onpeut,enrevanche,accueillir ce crépuscule mythique et cette aube philosophiquecomme un pont conservant une certaine réversibilité, que l’ondécouvrira au fil des cultures à travers les siècles.CemomentnonséparatifestreprésentéauVIesiècleparPythagorequin’estpas encore séparé de l’ordre mythique. Comme Épiménide de

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financiers, les assureurs et les contrôleurs, les évaluateurs detoutpoil, l’ensembledecesexercicesayant constituéaucoursde ces dernières années unemétastase parasite qui a envahi etétoufféleprocèsproductif!

Pour le dire autrement, à la façon de Gilles Châtelet, letravail est divisé entre le travail-corvée de la sous-classe et letravail-performance de la sur-classe. Cette coupure néglige lefait que seul le travail-patience provoque une amplificationinouïedeliberté,àlafoisendéveloppantlapuissanced’agirdechacun, et en intensité, découvrant une plasticité spécifique àl’être humain. La crise contemporaine nous montre ladégradation du travail-patience, le seul véritable créateur derichesses, au bénéfice du travail-corvéede survie et du travail-performance de l’élite, esclave de l’impatience, avide de segoinfrer.

Tout système pratique et de théorisation basé sur la valeurd’œuvrer ratisse beaucoup plus large que toutes les théoriesmédiatisantes, perspectives politiques, sociales, économiques,théoriesdelamonnaie,etc.Jesuisdoncplusprèsdelavaleurd’œuvrer,malgrétouteslesspéculationssurelle,malgrétousleseffets de cette spéculation, que dans une théorie monétaire.Cette valeur d’œuvrer n’a pas d’équivalencemonétaire ou pasd’équivalence monétaire directe sinon peut-être à penser lamonnaiecommelapsus,glissementd’unusageplusprimordial,échecoumanqued’untrocinitial,ratageoudépassementd’unebartereconomy.L’histoiredecemotestamusantecar il s’agitdesepermettreunautrepointdevuequin’arienàvoiràfairede la monnaie un équivalent merdique, comme s’acharne àl’envisager une certaine psychanalyse. Cette perspectivealternativefait retourauxcommencementsde lamonnaie,celledeJunoMoneta, ladivinitéqui faitmémoire, cellequiavertit,celle qui garantissait la monnaie que l’on battait dans son

sanctuaire.LaMonetalatineestlavigilancequiavertit,cellequifaitoudonnesouvenir.C’estàJunoMonetaquel’onattribuelesalutdeRomelorsdel’invasiongauloiseen390avantJ.-C.Cesontlescacardagesdesoiesélevéesdanslesanctuairepourlessacrifices qui réveillèrent les Romains qui repoussèrent lesenvahisseurs.Quant à lamonnaie grecque,nomisma, son nomprovient d’une large famille s’originant de nemô, distribuer,partager,diriger,fairepaître.Nomosindexecequiestétabliparl’usage, la coutume, gouvernant la dikè, la justice, la loi.Nemesis, l’esprit de vengeance, a pris dans ce groupe uneimportanceparticulière.

Lacriseducrédit,c’estunecrisedefoiQue peut-on supputer de cette crise? Quelles ont été lesconditionsquil’ontprovoquée?Unedécision?Unjugement?Une issue ?Un dénouement ? Le résultat d’une guerre ? Laphase décisive d’une épidémie ? Un choix, une élection ?Revenons-nous à une forme de baratterie, cette économie dutroc?

L’économiedu troc subsistedans leséconomies familiales,lesinternats,leshôpitauxpsychiatriquesetlesprisons,danslesmarchésnoirset lesorganisationsprécairesd’après révolution,deguerreetd’après-guerre.Danslesguerresciviles.Elleprévautaujourd’hui dans les groupes déstabilisés et sans emploi, dansles pays les plus pauvres de la planète. Elle peut apparaîtrecomme une issue à la crise. La généralisation de la criseimplique que le tiers-mondisme va s’exporter enOccident quiconservera des isolats de grande richesse, culturelle etéconomique. Un nouveau féodalisme est en marche et les

problèmes qui se poseront, qui se posent déjà seront desproblèmes de cohabitation d’épistémologies contradictoires…Des îlots de progrès où l’épistémologie de l’expansion resteravalide voisineront avec une partition majoritaire dépressive,paupériséeetuniformisée.

Àproposdebartereconomy, très intéressanteest l’histoiredes missions jésuites du Paraguay dans le territoire desGuaranis,unerégionaujourd’huipartagéeentre leParaguay, leBrésil, l’Argentine et la Bolivie. À l’aube du capitalismeeuropéen,lapremièremissionestcrééeen1609.Ilyenauraunetrentaineen1732quiregrouperontcentcinquantemilleIndiens.Les pères jésuites sont pour la plupart des Basques desprovincesdeBiscayeetdeGuipuzcoa,celled’IgnacedeLoyola.Chaquemission est placée sous l’autorité de deux pères, l’unresponsable du spirituel et l’autre du temporel. Le plus hautdignitaire indigènede la colonie, lecorregidor est nomméparles pères. La monnaie est abolie. Il n’y a pas de salaire. Larépartition des ressources s’effectue demanière égalitaire. Leséchangescommerciauxsontfondéssurletrocabsoluquiexcluttout enrichissement ou économies personnelles. La propriétéprivée est abolie. Les aléas de la politique internationale,l’expulsion des Jésuites de France et d’Espagnemettent fin àcette création innovante des missions. Les hommes en noirdoivent abandonner leur œuvre en 1768. Les Guaranisdeviendront à nouveau esclaves ou repartiront dans la forêt.CetteexpérienceétonnantequinerendaitpasàCésarcequiestà César fut une réussite incontestable pendant près de deuxsiècles. C’est la cupidité, l’avidité des Portugais qui ymit unterme.

Si la crise financière et bancaire a été génératrice d’unedépression, d’un manque permettant de poser la question enréserve de la valeur d’œuvrer, l’expansion restera toujours

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Lacriseaaumoinsuneconséquencesalubre:elleobligelesÉtats faussement libéraux à admettre que la nature de l’Étatmoderne est structurellement socialiste, dans le sens où estsocialiste une structure qui avoue sa préférence pour le bienpublic. L’État français est socialiste, préférant se sauver lui-même et ses banques en écrasant ses électeurs. Avec un tauxd’imposition confiscatoire, l’État, qui s’est octroyé la gérancesans partage de l’intérêt général, est, par définition, socialiste,sans aucun contre-pouvoir. Sommes-nous, interroge Sloterdijk,auseuild’unNewDealplanétaire?

Sloterdijkperçoit lacrisecommeunénormecoupd’arrêtàl’exacerbation consumériste, l’entrée dans une dispersionangoissante, une peur paralysante, une léthargie épidémique,unehésitationamplifiantlacrise,mimesisdurenoncement.Toutlemondeapeurdeperdre,personnenesaitoù investir.Alors,on hésite et chacun imite l’hésitation des autres. Cette vagued’hésitation mimétique amplifie la crise et la panique segénéralise. Le mimétisme de la dépense et de la frivolité seretourne en mimétisme de l’hésitation, du renoncement et del’angoisse.Lesystèmes’immobiliseparsespropresmoyens.Unclimatdedubitations’installepourlongtemps.

Le ralentissement de l’activité, l’effondrement du crédit, lacroissance du chômage, la chute des marchés découvrentl’envers actuel de la crise qui profite à certains.L’exigencedecroire se déplace duGrandMarché défaillant au religieux quifait retour en force. L’insécurité, la détresse sont une grandeopportunitéévangéliquepourlesÉglises.

La dépression actuelle provoque un désœuvrement massif,undébauchagegénéralquiredonnedel’attractivitéauxcarrièresmilitaires. Les départements ou ministères de la défense desÉtats-Unisetdel’Europeseréjouissentdevantl’affluxinespérédes vocations guerrières. La crise pourrait préparer la guerre,

comme le futcellede1929.Laguerrepourrait-ellenoussortirdel’effondrementdûàlacrise?

L’auteur du Palais de Cristal s’est autorisé, dans uneinterviewaujournalLePoint,uneprophétieoùilannoncequesi un changement radical de notre comportement économiquen’émergepasdelacrise,sinousnepassonsd’uneéconomiedel’avidité,greed,àuneéconomiedelafierté,pride,leXXIesièclesera le siège d’une guerre mondiale permanente… Fromgreedinesstobeproud,telestleprogrammepourSloterdijk.Yaurait-il autre chose que la religion ou la guerre pour nousredonnerconfiance,pournousrendreproud?

Autresprédictions…Autresaffirmationsfarfeluesdevantlacrise. Hier encore, le président d’IBM annonçait à son staffrestreintdix-septansdecrise!Après,présageaitcetteCassandreimprovisée, cela reprendra comme avant… Une perspectiveépistrophique ne s’autorisant que la répétition. Aucunemetanoïa. Après la chute de l’empire romain d’Occident,beaucoup ont cru pendant longtemps qu’il serait restauré adintegrum. Cette vision épistrophique, assurée d’une reprisecommeavant,d’unretouraumême,sepencheexclusivementsurles indices déclencheurs de la crise, l’immobilier américain, lemarché interbancaire et le commercemondial. Il n’est pas sûrque l’amélioration de ces index puisse être considérée commeune condition suffisante de sortie de crise. Il ne s’agit pas decroirequenousdisposonsdeboussolessimplesetfiablespourtraverserledésert,ilfautêtrecapabledeperdresesinstrumentspourdécouvrirlavoieàsuivre.C’estl’histoiredecechamelierdansledésertquisedétournedelaroutehabituelleparcequ’ilaperçu dans l’imperceptible frémissement de ses chameaux lerefusdesedirigerverslepuitscoutumier,usuel.Leschameliersetleurschameauxquinesesontpasdéroutéssontmortscarlepuitsétaitàsec.Lanouvelleboussoleviendrapeut-êtred’oùon

ne l’attendaitpas.Àquelchameause fier? Il faudra,pourcetexercice,nepasmanquerdeserendipity!

Lepireestàvenirproclamentcertainsexperts.Uneattaquenucléaire terroristeest toutà faitpossible sinonprobablepourcertains. Un retour au protectionnisme est envisageable pourd’autres. Une stagflation suivie par une inflation galopante enprovenance des États-Unis. Le pire est à venir, jaspinent à lalune des nouveaux Tirésias ou des émules de Calchas quifondent leur réussite sur l’annonce d’une catastrophe à venir.Une pandémie virale ou bactérienne est possible. Une guerrebactériologique et chimique est concevable, une guerre dereligion… Une guerre conventionnelle ou atomique. L’ordreéconomiquemondial navigue sur pilote automatique, droit surun énorme cyclone, un cumulo-nimbus financier et industriel,social et politique. Il n’y apasdepilotedans l’avion. Il n’y aquedesombres.

L’avenir s’annonce difficile, plombé pour beaucoup. Unchômage de masse dans les pays développés. Les jeunesgénérations auront énormément demal à trouver un travail.LaCrunch generation est née. Les jeunes Européens, face à lacrise, se battent ou s’épuisent à la recherche d’un travail. Unappauvrissementgénéral s’annonce.Lespayspauvres, les payspillés, laissés pour compte, seront dépouillés, détroussés.L’épuisement global des moyens, des finances, des industries,entraîneraunenouvelle féodalisationéconomiqueet culturelle.Desenclavesderichesseserontentouréesdehautesbarrièresdeprotection. Les architectes préparent de nouveaux Kraks desChevaliers sur laTerre.Lanouvelle féodalisationde la sociétémondiale va créer des sites florissants protégés par de hautesmuraillesaumilieudevastesespacesanomiquesoùrégnerontledésert, le dénuement, la détresse, la disette, le désespoir, lamisère et le banditisme. Des suicides, des révoltes, des

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Table

Avant-proposd’AnneChristineFournier

Del’identitéLavenued’unnouvelhommeLacivilisationcréedenouveauxsymptômesLes quatre périls majeurs : l’eugénisme, la démission,l’uniformisation,lalinguafranca

Del’uniformisationL’effondrementdelaprésenceNoussommesdessatellitesdelaPomme:lesHikikomorisDébranchez-vous:priez,chantez,méditezensilence.L’uniformisationsocialeparlespsychotropesLeDiseaseMongering:l’inventiondenouvellesmaladiesLatraquedusymptômeUnelangue,c’estunpointdevuedumondeLecourage:direcequel’onvoit,cequel’onentend

DelapeuretdelaviolenceLapeurnenousapasquittésL’humainmenacel’Hommeetlaterre:unpérilplanétairePourjuger,ilfautêtreauservicedusymptômeLeBienetleMalsontUnLesOccidentauxsontdansladénégationdelamort

DudivinetdelanaissanceLesymptômepréparel’advenueduMessieLerêvenedescendpasdeFreud

J’auraispunaîtrechezlesTarahumarasChaquenaissanceestunrecommencementLemondeestnésansl’hommeetfinirasansl’hommeJecroisausymptômeL’être-ensembleestdouéderésilience

DelaplanètepsyTouthommeestunetonalitéuniqueLesymptômepsyIln’yaurapasderetouràFreudUnthérapeuteauservicedusymptômeLe symptôme : une parole adressée aux hommes par lesdieuxL’actephilosophiqueestunethérapieLemythed’Icare:leversantcréatifdulapsusSerendipity

DelacriseLessymptômesdecrise:unecatastropheetuneopportunitéLacriseducrédit,c’estunecrisedefoiDeuxgestesdevantlacriseSauverlesymptômeÀquelleboussolesefier?

Del’avenirUnealternativeradicale:accueillirlesymptômeAccepterl’incertitude

Bibliographie

Achevéd’imprimersurlespressesdel’imprimerieenjanvier2014

N°d’imprimeur:XXXXX

Dépôtlégal:janvier2014ImpriméenFrance

CompositionetmiseenpagesréaliséesparCompo66–Perpignan

589/2013