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Éco-Conseil 30 SAMEDI-DIMANCHE 27-28 JUIN 2015 Il faut rester ouvert à son environne- ment et être à l’écoute de ce qui se passe autour de son entreprise. Mostafa Hafsi. Un manager autocentré a du mal à évaluer la fiabilité de ses collaborateurs et leur aptitude à trouver des solutions opérationnelles. Attention, un manager ne maîtrise pas tout ! Éco-Conseil : Comment se manifeste l’auto-centration managériale ? Mostafa Hafsi : L’auto-centration ma- nagériale correspond à la conviction des managers de l’impossibilité d’im- pliquer les collaborateurs opération- nels en première ligne, aussi bien dans l’identification et l’analyse des situa- tions auxquelles fait face l’entreprise, que dans la prise de décision et la par- ticipation aux arbitrages qui en décou- lent. Cette conviction des dirigeants est souvent contreproductive, ces derniers ont du mal à évaluer et considérer la fiabilité de leurs collaborateurs, leurs aptitudes à trouver des solutions opé- rationnelles, leurs implications et in- vestissements et leur capacité d’analyse et de synthèse. Les échecs de certaines entreprises sont dus à cette absence d’ouverture à l’environnement externe et interne (BlackBerry, Nokia…), à cette incapacité d’adaptation et de chan- gement de Cap, face à des indicateurs et signaux d’alarme qui peuvent être reconnus. Quelles répercussions sur l’entreprise ? Dans un monde qui est en perpétuelle évolution, un monde ou les entreprises et les managers doivent, pour réus- sir, collecter, identifier et décrypter les alertes et signaux externes ou internes aussi faibles soient-il, l’auto-centra- tion est très dangereuse et néfaste pour l’entreprise. Si les managers souhaitent vraiment être à la pointe de la techno- logie et s’adapter en permanence dans leur vision et application stratégique et Auto-centration managériale Un manager centré sur son seul point de vue, qui n’implique pas ses collaborateurs opérationnels en front line dans la prise de décision et qui reste hermétique à l’environnement interne et externe, mène l’entreprise à sa perte. Éclairages sur l’auto-centration managériale avec Mostafa Hafsi, par- tenaire SMC Consulting. opérationnelle, ils doivent se débarras- ser de ce mirage qui consiste à croire que seuls leurs arbitrages, leurs points de vue sont à prendre en considération. Il est très risqué de se fermer en perma- nence au monde extérieur, et spéciale- ment dans des contextes économiques où la concurrence la plus dangereuse surgit à tout instant. Il est très impor- tant de rester ouvert à son environne- ment et d’être à l’écoute de ce qui se passe autour de son entreprise dans un contexte interne et externe, grâce à une stratégie de veille stratégique efficace. Comment développer la décentration managériale ? À vrai dire, il n’y a pas de solution ma- gique, la décentration consiste donc à être à l’écoute et ouvert aux collabora- teurs opérationnels en front line, en les sollicitant avant et après la prise de dé- cision. Il faut demander l’avis et le point de vue de ses collaborateurs opération- nels avant, mais surtout tirer les leçons des conséquences de ses décisions à partir des feed-back d’expériences de ces mêmes collaborateurs. En résumé il s’agit donc d’un comporte- ment managérial qui change du modèle classique, en partant du principe qu’en tant que manager «je ne maîtrise pas tout», je dois impliquer mes collabora- teurs et solliciter leurs avis, car «ils ne pensent pas comme moi», je dois trou- ver le compromis dans la contradiction des idées de mes collaborateurs, je dois expérimenter et évaluer mes idées et décisions auprès de ces mêmes colla- borateurs opérationnels. Les managers savent et décident in fine pour l’entreprise et possèdent une vi- sion stratégique globale. Les collaborateurs opérationnels doi- vent comprendre et appliquer les di- rectives, mais il ne faut pas oublier que ces derniers sont, au quotidien, face à la réalité au concret, il ne faut pas les écarter du processus de décision. Au contraire, il faut trouver le moyen de rassembler leurs expériences, compé- tences, savoir-faire et de leur laisser le moyen de s’exprimer. n Propos recueillis par Mounia Senhaji

Auto-centration managériale Attention, un manager ne ...€¦ · gique, la décentration consiste donc à être à l’écoute et ouvert aux collabora-teurs opérationnels en front

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Page 1: Auto-centration managériale Attention, un manager ne ...€¦ · gique, la décentration consiste donc à être à l’écoute et ouvert aux collabora-teurs opérationnels en front

Éco-Conseil30 SAMEDI-DIMANCHE 27-28 JUIN 2015

Il faut rester ouvert à son environne-

ment et être à l’écoute de ce

qui se passe autour de son

entreprise.

Mostafa Hafsi.

Un manager autocentré a du mal à évaluer la fiabilité de ses collaborateurs et leur aptitude à trouver des solutions opérationnelles.

Attention, un manager ne maîtrise pas tout !

Éco-Conseil : Comment se manifeste l’auto-centration managériale ?Mostafa Hafsi : L’auto-centration ma-nagériale correspond à la conviction des managers de l’impossibilité d’im-pliquer les collaborateurs opération-nels en première ligne, aussi bien dans l’identification et l’analyse des situa-tions auxquelles fait face l’entreprise, que dans la prise de décision et la par-ticipation aux arbitrages qui en décou-lent. Cette conviction des dirigeants est souvent contreproductive, ces derniers ont du mal à évaluer et considérer la fiabilité de leurs collaborateurs, leurs aptitudes à trouver des solutions opé-rationnelles, leurs implications et in-vestissements et leur capacité d’analyse et de synthèse. Les échecs de certaines entreprises sont dus à cette absence d’ouverture à l’environnement externe et interne (BlackBerry, Nokia…), à cette incapacité d’adaptation et de chan-gement de Cap, face à des indicateurs et signaux d’alarme qui peuvent être reconnus.

Quelles répercussions sur l’entreprise ?Dans un monde qui est en perpétuelle évolution, un monde ou les entreprises et les managers doivent, pour réus-sir, collecter, identifier et décrypter les alertes et signaux externes ou internes aussi faibles soient-il, l’auto-centra-tion est très dangereuse et néfaste pour l’entreprise. Si les managers souhaitent vraiment être à la pointe de la techno-logie et s’adapter en permanence dans leur vision et application stratégique et

Auto-centration managériale

Un manager centré sur son seul point de vue, qui n’implique pas ses collaborateurs opérationnels en front line dans la prise de décision et qui reste hermétique à l’environnement interne et externe, mène l’entreprise à sa perte. Éclairages sur l’auto-centration managériale avec Mostafa Hafsi, par-tenaire SMC Consulting.

opérationnelle, ils doivent se débarras-ser de ce mirage qui consiste à croire que seuls leurs arbitrages, leurs points de vue sont à prendre en considération. Il est très risqué de se fermer en perma-nence au monde extérieur, et spéciale-ment dans des contextes économiques où la concurrence la plus dangereuse surgit à tout instant. Il est très impor-tant de rester ouvert à son environne-ment et d’être à l’écoute de ce qui se passe autour de son entreprise dans un contexte interne et externe, grâce à une stratégie de veille stratégique efficace.

Comment développer la décentration managériale ?À vrai dire, il n’y a pas de solution ma-

gique, la décentration consiste donc à être à l’écoute et ouvert aux collabora-teurs opérationnels en front line, en les sollicitant avant et après la prise de dé-cision. Il faut demander l’avis et le point de vue de ses collaborateurs opération-nels avant, mais surtout tirer les leçons des conséquences de ses décisions à partir des feed-back d’expériences de ces mêmes collaborateurs. En résumé il s’agit donc d’un comporte-ment managérial qui change du modèle classique, en partant du principe qu’en tant que manager «je ne maîtrise pas tout», je dois impliquer mes collabora-teurs et solliciter leurs avis, car «ils ne pensent pas comme moi», je dois trou-ver le compromis dans la contradiction

des idées de mes collaborateurs, je dois expérimenter et évaluer mes idées et décisions auprès de ces mêmes colla-borateurs opérationnels.Les managers savent et décident in fine pour l’entreprise et possèdent une vi-sion stratégique globale. Les collaborateurs opérationnels doi-vent comprendre et appliquer les di-rectives, mais il ne faut pas oublier que ces derniers sont, au quotidien, face à la réalité au concret, il ne faut pas les écarter du processus de décision. Au contraire, il faut trouver le moyen de rassembler leurs expériences, compé-tences, savoir-faire et de leur laisser le moyen de s’exprimer. n

Propos recueillis par Mounia Senhaji