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Avant Propos – Audit Social & Culture (s) Jean-Marie Peretti – Aline Scouarnec 12 ème Université de Printemps IAS Liban http://www.auditsocial.org/ 1 AVANT PROPOS Audit social & Culture(s) Cette 12 ème Université de printemps de l’Audit Social est à nouveau une occasion exceptionnelle d’échanger sur l'apport de l'audit social au développement des entreprises et des organisations en prenant en compte la dimension culturelle. Le thème 2010, « Audit social et culture (s) » apparaît particulièrement approprié au contexte actuel d’internationalisation, de mondialisation et de (re) découverte de l’importance des spécificités des cultures L’IAS, créé en 1982, a organisé depuis cette date 38 universités de l’Audit social avec les 27 universités d’été qui se sont déroulées à Aix en Provence, Paris, Toulouse, Bordeaux, Lille, Luxembourg, Marseille, Poitiers et Saint Étienne et les 11 universités de printemps. Plus de 1200 communications ont été présentées et publiées. Plus de 1500 interventions ont enrichi les débats qui ont réuni plus de 5 000 auditeurs dans 8 pays et 18 villes. Cette université printanière est donc la 39 ème université consacrée à l’Audit Social. Après les Universités de Printemps d’Alger (2009), Tanger (2008), Moscou (2007), Dakar (2006), Marrakech (2005), Tunis (2004), Corte (2003), Beyrouth (2002), Alger (2001), Marrakech (2000) et Hammamet (1999), l’université de printemps de l'audit social se déroule, pour la seconde fois, au Liban. Cette édition 2010 est organisée par la Faculté de Gestion USEK (Université du Saint Esprit de Kaslik) avec le concours de l’Association Arabe des Facultés de Gestion, des Associations Européennes, africaines et du Moyen Orient en RH, de l’AGRH (association francophone de gestion des ressources humaines), des Instituts Nationaux d’Audit Social (Russie, France, Algérie, Tunisie, Maroc, Luxembourg, Sénégal, Belgique, Québec, Portugal) du CLERH (IAS Liban) et bénéficie d’un partenariat fort avec l’ESSEC business School, Paris Singapour et le CEA (cercle d’Ethique des affaires). Dans un environnement économique caractérisé par la mondialisation des échanges, les pratiques de management des ressources humaines doivent de plus en plus prendre en compte la dimension culturelle. Qu’il s’agisse des cultures nationales, sectorielles ou organisationnelles, de sous-cultures de métier ou professionnelles, forgées autour de certains projets, elles impactent de plus en plus la vie des organisations en général, des entreprises en particulier. Le contexte d’internationalisation du monde des affaires peut conduire à une certaine forme d’homogénéisation des pratiques (universalisme) mais aussi à la valorisation des spécificités locales (contingence) voire à un mix des deux propositions précédentes et à une certaine hybridation. L’auditeur social, en quête de référentiels, de normes nationales ou internationales ne peut envisager son travail sans prendre en compte la dimension « culture ». Pour cette raison, la 12° université de printemps de l’IAS permettra de faire réfléchir enseignants et chercheurs, dirigeants, praticiens de GRH et auditeurs sociaux sur les différentes formes de prise en compte de la culture dans les pratiques d’audit social dans une région caractérisée par la cohabitation des cultures. Dans un contexte de mondialisation, les entreprises et les organisations doivent relever de nombreux défis. L’audit social représente un axe de plus en plus stratégique permettant d’aider l’ensemble des parties prenantes à développer de « bonnes pratiques » de gestion des ressources humaines et de responsabilité sociale. Pourquoi le Liban? Pourquoi l’audit social et la et les cultures ? Le choix du thème de la 12 ème université de printemps s’est imposé compte tenu du contexte d’internationalisation d’une part et de redécouverte du poids des facteurs culturels dans la performance des organisations et la mise en œuvre des politiques et pratiques RH pertinentes. Une attente à l’égard de l’audit social et de l’audit de la RSE

AVANT PROPOS Audit social & Culture(s)auditsocial.net/wp-content/uploads/2011/06/2010ActesLiban.pdf · métier ou professionnelles, ... (contingence) voire à un mix des ... dirigeants,

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  • Avant Propos Audit Social & Culture (s) Jean-Marie Peretti Aline Scouarnec

    12me Universit de Printemps IAS Liban http://www.auditsocial.org/ 1

    AVANT PROPOS Audit social & Culture(s)

    Cette 12me Universit de printemps de lAudit Social est nouveau une occasion exceptionnelle dchanger sur l'apport de l'audit social au dveloppement des entreprises et des organisations en prenant en compte la dimension culturelle. Le thme 2010, Audit social et culture (s) apparat particulirement appropri au contexte actuel dinternationalisation, de mondialisation et de (re) dcouverte de limportance des spcificits des cultures

    LIAS, cr en 1982, a organis depuis cette date 38 universits de lAudit social avec les 27 universits dt qui se sont droules Aix en Provence, Paris, Toulouse, Bordeaux, Lille, Luxembourg, Marseille, Poitiers et Saint tienne et les 11 universits de printemps. Plus de 1200 communications ont t prsentes et publies. Plus de 1500 interventions ont enrichi les dbats qui ont runi plus de 5 000 auditeurs dans 8 pays et 18 villes. Cette universit printanire est donc la 39me universit consacre lAudit Social. Aprs les Universits de Printemps dAlger (2009), Tanger (2008), Moscou (2007), Dakar (2006), Marrakech (2005), Tunis (2004), Corte (2003), Beyrouth (2002), Alger (2001), Marrakech (2000) et Hammamet (1999), luniversit de printemps de l'audit social se droule, pour la seconde fois, au Liban. Cette dition 2010 est organise par la Facult de Gestion USEK (Universit du Saint Esprit de Kaslik) avec le concours de lAssociation Arabe des Facults de Gestion, des Associations Europennes, africaines et du Moyen Orient en RH, de lAGRH (association francophone de gestion des ressources humaines), des Instituts Nationaux dAudit Social (Russie, France, Algrie, Tunisie, Maroc, Luxembourg, Sngal, Belgique, Qubec, Portugal) du CLERH (IAS Liban) et bnficie dun partenariat fort avec lESSEC business School, Paris Singapour et le CEA (cercle dEthique des affaires). Dans un environnement conomique caractris par la mondialisation des changes, les pratiques de management des ressources humaines doivent de plus en plus prendre en compte la dimension culturelle. Quil sagisse des cultures nationales, sectorielles ou organisationnelles, de sous-cultures de mtier ou professionnelles, forges autour de certains projets, elles impactent de plus en plus la vie des organisations en gnral, des entreprises en particulier. Le contexte dinternationalisation du monde des affaires peut conduire une certaine forme dhomognisation des pratiques (universalisme) mais aussi la valorisation des spcificits locales (contingence) voire un mix des deux propositions prcdentes et une certaine hybridation. Lauditeur social, en qute de rfrentiels, de normes nationales ou internationales ne peut envisager son travail sans prendre en compte la dimension culture . Pour cette raison, la 12 universit de printemps de lIAS permettra de faire rflchir enseignants et chercheurs, dirigeants, praticiens de GRH et auditeurs sociaux sur les diffrentes formes de prise en compte de la culture dans les pratiques daudit social dans une rgion caractrise par la cohabitation des cultures.

    Dans un contexte de mondialisation, les entreprises et les organisations doivent relever de nombreux dfis. Laudit social reprsente un axe de plus en plus stratgique permettant daider lensemble des parties prenantes dvelopper de bonnes pratiques de gestion des ressources humaines et de responsabilit sociale. Pourquoi le Liban? Pourquoi laudit social et la et les cultures ? Le choix du thme de la 12me universit de printemps sest impos compte tenu du contexte dinternationalisation dune part et de redcouverte du poids des facteurs culturels dans la performance des organisations et la mise en uvre des politiques et pratiques RH pertinentes. Une attente lgard de laudit social et de laudit de la RSE

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    Dans un contexte de mutation o les exigences de toutes les parties prenantes en matire de politiques et pratiques RH sont croissantes, o la professionnalisation de la fonction RH simpose, les attentes lgard de laudit social sont fortes. Lorsque les risques auxquelles les organisations sont confrontes saccroissent et se diversifie, la contribution de laudit social pour identifier et rduire ces risques est essentielle. Lorsque la ncessit damliorer le fonctionnement et la performance dune organisation est reconnue, laudit social, par la rigueur de sa dmarche, la pertinence de ses rfrentiels et la validit de ses constats permet de proposer des recommandations appropries et damliorer la performance globale de lorganisation. Laudit social accompagne le renouvellement des politiques et pratiques RH et en garantit le succs Un souhait de partage dexpriences entre praticiens et chercheurs Dans le contexte 2010, quelles sont les pratiques daudit social pertinentes ? Quelles sont les interrogations des chercheurs et praticiens quant aux outils, mthodes utiles une GRH intgrant la dimension culturelle? Quelles sont les perspectives dvolution de la GRH de demain et ses principaux facteurs de contingence? Et surtout, comment lAudit Social peut-il contribuer ancrer une GRH approprie dans les pratiques des entreprises et participer ainsi au renouveau de la GRH en lintgrant dans son contexte culturel? Volont d'analyser le rel en faisant le lien entre la thorie et la pratique, souci de comprendre et d'interprter, propositions d'axes, voire de mesures concrtes de renouvellement, voil les ambitions de cette 12me Universit de Printemps de l'IAS au Liban. Une russite fruit de limplication de partenaires privilgis Cette 12me universit de Printemps de lIAS nous promet des dbats riches et constructifs, articulant concepts, thories et pratiques de laudit social prenant en compte la diversit culturelle. Les communications rassembles dans ces actes sont nombreuses, diverses et de qualit. Elles refltent la diversit des travaux actuels sur lapproche culturelle dans divers contextes et sur lapport de laudit social. Ces actes nauraient pu tre raliss sans lappui des associations acadmiques partenaires et en particulier de lAGRH et de son prsident, le professeur Marc BONNET, du Cercle Ethique des Affaires et de son prsident Herv LAISNE, de lADERSE et de sa prsidente Nicole BARTHE, du RIODD, de lISEOR et la forte implication des membres du comit scientifique qui ont accept de lire et valuer les communications reues et permis de slectionner et, aprs corrections ventuelles, de publier ces 40 textes. Merci tous les membres du comit scientifique, Nehm AZOURY, Alain AKANNI, Olivier BACHELARD, Nicole BARTHE, Elie BASBOUS, Emmanuel BECK, Chafik BENTALEB, Adnane BELOUT, Luis BENTO, Charles Henri BESSEYRE DES HORTS, Andr BOYER, Luc BOYER, Xavier BOUZIAT, Martine BRASSEUR, Franoise de BRY, Marc BONNET, Frank BOURNOIS, Alain BRIOLE, Stphanie CARPENTIER, Jean-Luc CERDIN, Alain CHAMAK, ,Jean-Franois CHANLAT, Rodolphe COLLE, Annie CORNET, Fernando CUEVAS, Eric DAVOINE, Christian DEFELIX, Simon DOLAN, ESADE, Jean-Yves DUYCK, Mohamed ENNACEUR, Yacine FOUDAD, Corinne FORASACCO, Louis FORGET, Anne-Marie FRAY, Soufyane FRIMOUSSE, Bernard FUSTIER, Roger-Pierre HERMONT, Jacques IGALENS, Abdelilah JENNANE, Michel JORAS, Christian GOUX, Charbel KARAM, Hubert LANDIER, Abderrahmane LELLOU, Erick LEROUX, Thierry LEVY, Pierre LOUART, Zeineb MAMLOUK, Franois MANCY, Mohamed MATMATI, Ramdane MOSTEFAOUI, Alain MEIGNANT, Samuel MERCIER, Patrick MICHELETTI, Joan MUNDET HIERN, Hadj NEKKA, Agns PARADAS, Michel PARLIER, Youri POPOV, Jean Michel PLANE, Philippe ROBERT DEMONTROND, Josse ROUSSEL, Charbel SALLOUM, Henri SAVALL, Aline SCOUARNEC, Franois SILVA, Jean-Paul TCHANKAM, Anne-Marie de VAIVRE, Marc VALAX, Eric VATTEVILLE, Antoine

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    VENIARD, Delphine VAN HOOREBEKE, Jean-Franois VERNE, Catherine VOYNET-FOURBOUL, Zahir YANAT, Vronique ZARDET.

    Linvitation et la mobilisation de nos partenaires libanais. Que la Facult de Gestion de lUSEK (Universit du Saint Esprit de Kaslik) avec le concours de lAssociation Arabe des Facults de Gestion, soit ici remercie pour son implication dans la russite de cette manifestation. Le bureau de lIAS, sest galement impliqu dans la prparation de cette manifestation. Que tous ses membres soient ici remercis et tout particulirement Louis FORGET, son secrtaire Gnral, Jean Yves DUYCK, prsident France du comit dorganisation, et Roger Pierre HERMONT, son trsorier. Merci aussi Catherine TARDIF, trsorier adjoint et Genevive BURKE (ESSEC Executive Education) pour leur participation active. Lappui de lESSEC Business School et lefficacit souriante de Christiane DESHAIS ont eu un rle dterminant dans la publication de ces actes et nous lui exprimons ici toute notre gratitude.

    Jean Marie PERETTI Professeur lESSEC Business School et lUniversit de Corse

    Prsident dhonneur de lAGRH, Prsident de lIAS

    Aline SCOUARNEC Professeur lUniversit de Caen et lESSEC Executive Education

    Vice-prsidente de lIAS

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  • Sommaire

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    SOMMAIRE

    AVANT PROPOS................................................................................................................................... 1

    SOMMAIRE ........................................................................................................................................... 5

    LES CENTRES DE RELATION CLIENT PRESTATAIRES : UN NOUVEAU DEVELOPPEMENT DU CAPITALISME. ENTRE INNOVATION ORGANISATIONNELLE ET DYSFONCTIONNEMENT STRUCTUREL ....................................................................................... 11

    Zrouale AOUACHRIA

    RELATIONS EURO-MEDITERRANEENNES : ........25AUDIT SOCIAL ET MISE A NIVEAU DES ENTREPRISES ET DES INSTITUTIONS LIBANAISES .................................................................. 25

    Nehme AZOURY

    PERMANENCE ET MUTATIONS DES VALEURS : UNE APPROCHE DYNAMIQUE DE LA CULTURE DU SERVICE PUBLIC..................................................................................................... 43

    Olivier BACHELARD

    Anne Marie FRAY

    Guilaine RICHEFORT

    CADRE INSTITUTIONNEL ET PRATIQUES CONCRETES DANS LES RELATIONS SOCIALES EN ENTREPRISES : POUR LA CONSTITUTION DUNE GRILLE DOBSERVATION DAUDIT SOCIAL DE LINFORMEL ........................................................ 57

    Dominique BESSON

    UNIFORMISATION ET SPCIFICITS DES RAPPORTS DE DVELOPPEMENT DURABLE : UNE TUDE COMPARATIVE........................................................................................................... 79

    Olivier BOIRAL

    REPRISE DE PME : QUAND LEQUIPE EN PLACE FAIT DE LA RESISTANCE ................... 91

    Sonia BOUSSAGUET

    LINTEGRATION, INDICATEUR DE REUSSITE DUNE SUCCESSION : COMPARAISON ENTRE DEUX SITUATIONS DE REMPLACEMENT DUN CADRE EXPATRIE PAR UN CADRE LOCAL DANS UNE FILIALE TUNISIENNE DUNE MULTINATIONALE EUROPEENNE................................................................................................................................... 101

    Belkis BOUSSETTA KECHIDA

    NOUVELLE GENERATION, NOUVELLE GRH ?.......................................................................... 113

    Franck BRILLET

    Patricia COUTELLE

    Annabelle HULIN

  • Sommaire

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    AUDIT DE LA CULTURE MANAGERIALE DANS LA GRANDE DISTRIBUTION : LE CAS DES MANAGERS DE PROXIMITE FACE AU MANAGEMENT DE LA SANTE ET SECURITE AU TRAVAIL..................................................................................................................................... 123

    Stphanie CARPENTIER

    LA PRISE EN COMPTE DE LA COMPETENCE DANS LES RESEAUX DINNOVATION. PREMIERES REFLEXIONS.............................................................................................................. 133

    Denis CHABAULT

    Annabelle HULIN

    CULTURE NATIONALE ET CHANGEMENT DANS LES SYSTEMES DE BONUS : UNE ETUDE COMPARATIVE .................................................................................................................. 145

    Tarek CHANEGRIH

    LES ENJEUX MULTICULTURELS ET MULTI-CONTEXTUELS DU TRANSFERT DES CODES DE CONDUITE DANS LA FIRME MULTINATIONALE: LE CAS DU LIBAN........................... 153

    Eric DAVOINE

    Samer Franois NAKHLE

    LA DIMENSION CULTURELLE DANS LA GESTION DES PME : AUDIT SOCIAL DES PRATIQUES DE G RH : CAS DUNE PME SENEGALAISE......................................................... 165

    Alioune GUEYE

    Ndye Mariama Angle KANDE

    LE VIRAGE DE LA RESPONSABILITE SOCIALE AU MAROC. LE CAS DU SECTEUR AGROALIMENTAIRE. ..................................................................................................................... 173

    Manal EL ABBOUBI

    Fatima EL KANDOUSSI

    LES RESSOURCES HUMAINES : COMPOSANTE IGNOREE DE LA CULTURE ENTREPRENEURIALE FRANCO-TUNISIENNE........................................................................... 179

    Jean-Marie ESTEVE

    Feriel LAALAI

    AUDIT DE LA CULTURE CLIENT DANS LES PME .............................................................. 189

    Thierry FABIANI

    AUDIT SOCIAL ET DIVERSITE CULTURELLE........................................................................... 195

    Sana GUERFEL-HENDA

    George-Axelle BROUSSILLON

  • Sommaire

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    AUDITER LA POLITIQUE DIVERSITE DANS UNE PETITE ET MOYENNE ENTREPRISE : LE CAS DUN CENTRE DAPPEL SPECIALISE ................................................................................. 203

    Sana GUERFEL-HENDA

    Christine NASCHBERGER

    AUDIT DU PROCESSUS DE RECRUTEMENT DES PATS : UNE DIMENSION FORTEMENT CULTURELLE ................................................................................................................................... 217

    Alioune GUEYE

    Ndye Mariama Angle KANDE

    Demba KANE

    Safiatou KEBE

    Ndye Sira MBODJI

    ETHIQUE ET COOPERATION DANS LE MONDE DES AFFAIRES : ACTUALITES DU PRINCIPE DE RATIONALITE AXIOLOGIQUE, IMPLICATIONS POUR LAUDIT SOCIAL .. 225

    Alexandre GUILLARD

    Josse ROUSSEL

    LA POSTURE DE L'AUDITEUR SOCIAL FACE AUX PERSONNES AUDITEES : SUGGESTIONS A PARTIR DE LA PRATIQUE DU CONSULTANT EN BILAN DE COMPETENCES ................................................................................................................................ 233

    Jocelyne IENTILE-YALENIOS

    EMERGENCE DUNE CULTURE SECTORIELLE DU RECRUTEMENT ET DE LA FORMATION DANS UN CONTEXTE DEMERGENCE DE NOUVEAUX METIERS DANS LE SECTEUR BANCAIRE SENEGALAIS ............................................................................................ 239

    Demba KANE

    AUDIT SOCIAL ET CULTURE DE PREVENTION : LE CAS DES ENTREPRISES ALGERIENNES ................................................................................................................................. 247

    Ouznadji LAYADI

    LE MANAGEMENT HUMAIN FACE A LA CULTURE QUALITE.............................................. 257

    Grgory LECLERCQ

    LAUDIT CULTUREL : METHODOLOGIE ET PRATIQUE ......................................................... 269

    Erick LEROUX

    Jean-Marie PERETTI

    AUDITS CULTURELS ET MANAGERIAUX PREALABLES A LA CREATION DUNE CO-ENTREPRISE FRANCO-TUNISIENNE........................................................................................... 275

  • Sommaire

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    Henri MAHE DE BOISLANDELLE

    Jean-Marie ESTEVE

    AMELIORATION DE LA QUALITE DU PILOTAGE SOCIAL EN UTILISANT LAUDIT SOCIAL COMME OUTIL : CAS DE QUATRE BANQUES LIBANAISES ................................... 285

    Slim MEKDESSI

    LE FACTEUR CULTUREL ET SES EFFETS SUR L'AUDIT SOCIAL DANS LES ENTREPRISES............................................................................................................................................................. 297

    Mohamed MERI

    LAUDIT SOCIAL : UNE STRATEGIE DANALYSE DU PROCESSUS DEMERGENCE DE LEADERS FEMININS ET DE SES DETERMINANTS CULTURELS DANS LES GPF SENEGALAIS. ................................................................................................................................... 303

    Mbodji NDEYE SIRA

    PROPOSITION DUNE MESURE DE LIMPLICATION DES ENTREPRISES AU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE LINFLUENCE DES DIMENSIONS CULTURELLES : CAS DES ENTREPRISES DU BASSIN MEDITERRANEEN......................................................... 313

    Pierre PIRE-LECHALARD

    Delphine van HOOREBEKE

    QUELQUES REFLEXIONS SUR LAUDIT DES DISPOSITIFS PUBLICS DE FORMATION PROFESSIONNELLE EN DIRECTION DES JEUNES SANS QUALIFICATION : LE POINT DE VUE DES ACTEURS DE LA FORMATION.................................................................................... 331

    Khaled SABOUNE

    Jean-Yves DUYCK

    IMPACT DES CULTURES METIERS SUR LES PRATIQUES DAUDIT SOCIAL : ETUDE COMPARATIVE ENTRE LE CAS DUNE ORGANISATION DU TRANSPORT MARITIME ET CELUI DUN ORGANISME DE LUTTE CONTRE LE CANCER ............................................... 345

    Aline SCOUARNEC

    Mohamed TISSIOUI

    Sami OUADRANI

    POUR UNE RELECTURE DE LA SEQUESTRATION DES ENTREPRENEURS PAR LAUDIT SOCIAL RATIONALITE LIMITEE ET PARTAGE DU POUVOIR EN FRANCE ET EN COLOMBIE ........................................................................................................................................ 359

    Marc VALAX

    Ana Mara PUYO ARLUCIAGA

  • Sommaire

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    CULTURE ORGANISATIONNELLE ET SECTORIELLE : IMPACT DE LA PME DE LECONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE SUR LA CARRIERE A TEMPS PARTAGE. LE CAS DUNE COOPERATIVE DEMPLOIS ET DACTIVITES.............................................................. 371

    Marc-Andr VILETTE

    IMPACT DE LA CULTURE NATIONALE SUR LA SPIRITUALITE DES DIRIGEANTS.......... 383

    Catherine VOYNNET FOURBOUL

    VERS LA CONSTRUCTION DUN OUTIL DAUDIT SOCIAL DU HARCELEMENT MORAL397

    Rim ZID

    Martine BRASSEUR

    LISTE DES AUTEURS ...................................................................................................................... 405

    COMITE SCIENTIFIQUE.................................................................................................................. 413

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  • Les centres de relation client prestataires : un nouveau dveloppement du capitalisme. Entre innovation organisationnelle et dysfonctionnement structurel

    Zrouale Aouachria

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    LES CENTRES DE RELATION CLIENT PRESTATAIRES : UN NOUVEAU DEVELOPPEMENT DU CAPITALISME. ENTRE

    INNOVATION ORGANISATIONNELLE ET DYSFONCTIONNEMENT STRUCTUREL

    Zrouale AOUACHRIA Doctorant IAE de Corse [email protected]

    Introduction

    Jamais une volution naura t aussi rapide que celle du passage de la simple liaison tlphonique via un bon vieux standard la puissante plate-forme de tl services que lon connait aujourdhui. Cest que les NTIC1 sont dsormais prsentes dans toutes les sphres de lactivit conomique (Dufau, Stuchlik, 2002). Dans le cas du centre de relation client (CRC)2 prestataire expos dans cette communication, lintroduction dune innovation organisationnelle qui consiste formaliser les comportements des tloprateurs grce un logiciel informatique impacte autant lorganisation de travail que le contenu et les conditions de travail. Elle avait pour objectif d'amliorer le niveau des services la fois en termes quantitatifs et qualitatifs. vrai dire, au lieu de travailler directement sur les normes statistiques de performance en vue d'amliorer la fluidit des services, les dirigeants de ce CRC proposaient par l'introduction de cette innovation organisationnelle une meilleure gestion des comportements des tloprateurs en ligne pour amliorer leur performance sur le plan quantitatif. Ainsi, l'orientation gnrale de ces nouvelles modalits consistait ne plus travailler directement sur les rsultats statistiques de la performance. Il ny peut tre pas en thorie dorganisation de sujet qui ait provoqu de dbats plus anim que les consquences dune formalisation excessive du comportement dans les organisations. Bien avant les tudes de Hawthorne des annes 1930, la psychologie industrielle se proccupait essentiellement de la fatigue psychologique cause par la monotonie du travail (Mintzberg, 1982). L tait, en fait, lobjectif initial des expriences dHawthorne. Mais il apparut rapidement que la fatigue ntait que la partie merg de liceberg, et quune organisation du travail trs rptitive, formalis, spcialis est galement source de problme psychologique pour de nombreux ouvriers. Quelques uns des grandes noms du management : (Argyris, 1966), Benni (1963) et Lickert (1974), ont par la suite btit leur rputation en faisant lanalyse des dysfonctionnements psychologiques des structure trs formalise. Ces auteurs sont attir lattention sur la tendance naturelle quont les individus rsister la formalisation et de la personnalisation, et ils ont dcrit les pathologies organisationnelles qui rsultent des excs commis dans cette direction. Chacun parmi eux dcrit sa faon un cercle vicieux dans lequel lapplication des rgles suscite une rsistance des oprateurs, ce qui provoque lapparition des consquences dysfonctionnelles (allant par exemple de labsentisme, le turn-over, les grve, la rigidit des comportements, le rejet des ides nouvelles, une mauvaise qualit de des services clientle jusqu la subversion du systme lui-mme). Il nous semble donc ncessaire de revenir sur les mthodes managriales des CRC, moins pour mesurer que rexaminer les faits pour comprendre lappui des donnes quantitatives, ainsi que des entretiens auprs des tloprateurs, des superviseurs, et des chefs de plateaux, le type de lgitimit que le centre de relation client ltude tente de construire lorsquil introduit une innovation organisationnelle qui consiste formaliser les comportements des tloprateurs pour assurer une meilleurs performance de ses services. Nous avons structur cette communication en trois temps. Dans un premiers temps, nous exposons quelques lments de la littrature portant sur les CRC et le dysfonctionnement des organisations. Dans un deuximes temps, nous explicitons la mthodologie de notre recherche. Enfin, dans un troisime temps, nous commenons prsenter les rsultats de notre analyse et les discuter. 1 Nouvelles Technologie de lInformation et de la Communication. 2 Ce vocable (que nous utiliserons sous le sigle CRC) regroupe toutes les entits composes de groupe doprateurs pour permettre de grer des relations distance avec les outils tlphone et internet.

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    1. Les centres de relation client : du taylorisme au dysfonctionnement structurel

    Une tendance considrer le travail sur un modle machinique Les centres de relation client que lon nomme aussi centre dappels ou centres de contact se multiplient (Le Chat et Delaunay, 2002). Il faut diffrencier les CRC intgrs des CRC non intgrs. Pour les premiers, ce sont des extensions de lentreprise laquelle le CRC appartient. Les seconds sont les CRC prestataire. Les entreprise y recourent de plus en plus, mettant en cause les organisations productives traditionnelles, la place et le contenu du travail qui est effectu (Di Ruzza, 2002).Ces CRC, sloignent progressivement du portrait uniforme (Clergeau, 2004). Dans une tude portant essentiellement sur les systmes de rmunration, Fernie et Metcalf (1998) dpeignent les CRC comme les nouveaux ateliers dexploitation ( La nouvelle usine ) o les salaris sont compltement domins et exploits par le contrle managrial hirarchique fortement support par l'introduction des NTIC. Ces structures dans ces conditions, se caractrisent selon ces auteurs par l'ide d'une surveillance fortement pntrante, d'o leur analogie avec le Panoptique3 de Jeremy Bentham. Il s'agit l d'un transfert d'application de la modalit de surveillance applique au systme carcral tel que propos par Bentham o le prisonnier est constamment sous la surveillance d'un gardien plac dans une tour centrale qui lui permet de surveiller les moindres gestes du prisonnier sans que ce dernier puisse le voir. Dans le CRC, le gardien est remplac par le manager et le prisonnier par l'agent de service (Fernie et Metcalf, 1998). Cette analogie entre le systme carcral et le contexte de travail des tloprateurs demeure plutt exagre car, comme le soulignent Taylor et Bain (1999), elle tend mettre en lumire un modle de relation d'emploi qui vacue deux principes fondamentaux l'existence mme d'un tel type de relation, soit l'aspect relativement volontaire du travail et la ncessit du management d'aller chercher l'implication des salaris. Taylor et Bain (1999), tout en rejetant la perspective autoritaire du Panoptique , insistent sur le caractre de taylorisation retrouv dans ce type de travail. Les avances des NTIC daprs Taylor et Bain produisent une taylorisation du travail des tloprateurs. Mais cette pression exerce sur le procs de travail dcoule du systme capitaliste plus large dans lequel les CRC sont insrs, de cette comptition constante qui commande une maximisation des profits et une diminution des cots de production (Le Chat et Delaunay, 2002). En ce sens, le management en CRC est toujours plac sous tension : prioriser l'orientation-client ou l'aspect quantitatif. Une tude plus rcente ce sujet de Bain et al. (2002) fait tat d'une rationalisation standardisatrice de l'aspect plus subjectif de la gestion d'un CRC, soit celui li la qualit des appels. Le problme soulev par Bain et al. Se rfre au fait qu'on cherche de plus en plus objectiver ou quantifier le contrle de la qualit des appels, ce qui engendre une sorte d'imbrication des dimensions qualitatives et quantitatives du travail des tloprateurs. Par exemple, Bain et al. (2002) font tat d'un cas, dont ils ont eux-mmes t tmoins dans leur tude, o les managers avaient mis sur pied (temporairement) une quipe-qualit dont le mandat tait d'valuer la qualit des appels des tloprateurs partir de critres objectifs. Le but tant damliorer la qualit du service auprs des consommateurs mais surtout de procder cette valuation avec des gens moins familiers avec les tloprateurs, comme pouvaient l'tre les superviseurs lorsqu'ils effectuaient eux-mmes cette valuation de la qualit. Dans ces circonstances, non seulement qualit et quantit sont des dimensions normatives complmentaires dans l'valuation du travail des tloprateurs, mais elles font aussi partie d'une mme dynamique que l'on peut considrer comme objective. Selon Bain et al (2002)., cette nouvelle faon d'objectiver les standards de qualit tend exercer une pression supplmentaire sur la faon de travailler des tloprateurs, puisqu'elle balise encore plus leur espace de crativit sollicite dans l'interaction avec le client. Ainsi, l'accent sur la qualit des appels ne signifie nullement l'octroi d'une quelconque zone d'autonomie aux tloprateurs. Elle vise plutt

    3Le panoptique est un type d'architecture carcrale imagine par le philosophe Jeremy Bentham en 1780. L'objectif de la structure panoptique est de permettre un individu d'observer tous les prisonniers sans que ceux-ci ne puissent savoir s'ils sont observs, crant ainsi un sentiment d'omniscience invisible chez les dtenus.

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    aligner leurs comportements en ligne aux prescriptions hirarchiques (Taylor et al, 2002). La standardisation de l'aspect plus subjectif et qualitatif de leur travail est d'ailleurs assimile par Amiech (2003) au principe du one best way associ au taylorisme dans la mesure o elle s'accompagne trs souvent de scripts que les tloprateurs doivent respecter dans leur interaction avec la clientle. De plus, dans le contexte actuel de mondialisation o plusieurs grandes entreprises, dcident de dlocaliser leurs CRC vers des pays en dveloppement, par cette standardisation de la subjectivit des tloprateurs prendrait des proportions jusque-l inexplores, dans la mesure o elle semble s'inscrire dans un contexte de rapports hirarchiques de type nocolonial entre des tloprateurs et des consommateurs occidentaux (Mirchandani, 2004; Mirchandani, 2006). Dans ces conditions une pression intense tend peser constamment sur eux, ce qui engendre certaines consquences comportementales chez ceux-ci. Le stress, gnr par le travail lui-mme, par la pression ou les contradictions des superviseurs ou encore par le client, peut mener la fatigue motionnelle (Deery et al, 2002), l'absentisme pour cause de maladie (Taylor et al, 2003), la dmission tout simplement (Callaghan et Thompson, 2001) ou des formes diverses de rsistance de la part des tloprateurs qui semblent se rapprocher davantage (Cousin, 2002). Knights et McCabe (1998) ainsi que Cousin (2002) rapportent que les tloprateurs peuvent trouver des voies d'vitement en faisant parfois semblant de rpondre aux appels. Lorsqu'ils voient que s'allume l'indicateur-tmoin de leur tlphone signalant l'entre d'un appel de client, ils mettent leur casque d'coute sans le brancher au tlphone et simulent alors une conversation avec le client. Parfois, ils vont dcrocher le tlphone mais vont raccrocher immdiatement en appuyant sur une autre touche de l'appareil. D'autres auteurs rapportent eux aussi des formes individuelles ou collectives de rsistance. Par exemple, Taylor et Bain (1999) ont dmontr que les tloprateurs vont souvent faire preuve de plus dattention dans la relation de service seulement lorsqu'ils savent que les appels sont enregistrs ou qu'ils vont chercher s'opposer ouvertement des pratiques managriales considres comme discriminatoires4. Au mieux, les agents de service vont simuler en surface l'adhsion au cadre normatif impos par la hirarchie (Mulholland, 2004) tout en dployant des mthodes souterraines de rsistance comme l'utilisation de l'humour (Taylor et Bain, 2003) pour contrer les effets contraignants des prescriptions managriales en CRC. Les tloprateurs disposent dune zone d'autonomie restreinte parce que ces travailleurs demeurent l'objet constant d'un contrle managrial de type vertical. De plus, la lumire d'autres tudes, il semble que les tloprateurs soient parfois soumis une forme de contrle horizontal vis--vis leurs pairs (Brannan, 2005), notamment lorsque la performance de l'quipe de travail dans laquelle voluent les tloprateurs dtermine l'octroi de leurs primes individuelles (Van Den Broek, Callaghan et Thompson, 2004). Ainsi, les mcanismes disciplinaires dploys par le management tendent resserrer de faon significative la marge de manuvre des tloprateurs. Ils semblent constamment en position d'adaptation, ayant s'ajuster aux normes prescrites par les managers, au rythme des outils technologiques utiliss dans leur travail ainsi qu' la masse d'informations qui leur est quotidiennement transmise au sujet des nouvelles politiques commerciales qu'ils ont honorer auprs de la clientle (Gury et al, 2004). En dfinitive, les tloprateurs doivent tre grandement flexibles face aux prescriptions hirarchiques et face aux comportements de la clientle. De plus, ils doivent continuellement tre nergiques et faire preuve d'enthousiasme dans l'excution de leurs tches malgr le caractre incertain de leur univers de travail. Ce qui explique sans doute toute l'importance accorde par les dirigeants des CRC aux comptences dtenues par les nouveaux candidats lors du processus de recrutement (Callaghan et Thompson, 2002).

    4 Ici, les auteurs font rfrence au soutien syndical que les tloprateurs d'un CRC ont obtenu suite l'instauration d'une pratique managriale qui leur imposait de porter un chapeau s'ils ne ralisaient pas de vente pendant une heure de travail. Cette pratique, camoufle sous des apparences de jeu, visait une sorte de stigmatisation des tloprateurs ne rencontrant pas les prescriptions managriales associes aux standards de ventes.

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    Le dysfonctionnement des structures formalises Lapplication des rgles dans les organisations pour contrler les oprateurs suscite une rsistance de ces derniers, ce qui provoque lapparition des consquences dysfonctionnelles Mintzberg (1982). Lorganisation dicte alors des rgles supplmentaires pour contrler la rsistance, ce qui restreint encore la marge de manouvre des oprateurs et suscite de leur part une rsistance accrue. La figure 1, dcrit la version que Merton (1957) donne dun tel cercle vicieux.

    ______ Rsultats attendus ----------Rsultats inattendus

    Figure 1. Les consquences de la formalisation excessive du Comportement : Le modle de Merton Simplifi (Source : March et Simon, 1958)

    Crozier (1963) dcrit de nombreux cercles vicieux qui caractrisent les structures trs formalises. Dans son tude de deux bureaucraties franaises du secteur public trs formalises et rglementes tous les niveaux, il montre que Des rgles impersonnelles dfinissent dans le plus petit dtail les diverses fonctions et prescrivent la conduite tenir par leurs occupants dans le plus grand nombre possible dventualits. Selon Crozier, quatre lments sont lorigine dune srie de cercles vicieux. Premirement de faon tout fait curieuse, sappuyer sur les rgles sert dtruite la relation de dpendance entre suprieur et subordonn. En effet les rgles dlimitent le pouvoir de chacun, y compris le pouvoir qua le suprieur de donner des ordres arbitraires ; dans cette mesure, le suprieur nest lui-mme quun excutant charg de lapplication de normes impersonnelles : Du fait de lexistence de ces rgles, chaque membre de lorganisation se trouve donc protg la fois contre la pression de ses suprieurs et contre celle de ses subordonnes ; mais cette protection est aussi un isolement et sa consquence est double ; dune part il est priv de toute initiative et soumis totalement des rgles qui lui sont imposes du dehors et dautre part il est compltement libre de tout lien de dpendance personnelle . Ces organisations sont des dmocraties perverses o chacun est trait peu prs de la mme faon rgles. Les ouvriers qui cherchent un certain type de scurit (la protection vis--vis de larbitraire du chef) acceptent ces rgles et sy attachent, mais le prix quils payent est un travail excessivement formalis. Deuximement, Crozier relve que pour prserver un climat impersonnel du centre oprationnel, les dcisions non couvertes par les rgles (et entre autres les dcisions de faire des rgles) sont gnralement prises ailleurs, au niveau de la direction gnrale. Ainsi, le caractre impersonnel est

    Demande de contrle

    Insistance sur la fiabilit

    Rigidit du comportement et

    Dfense du statut dans lorganisation

    Volume de difficults avec les clients

    Besoin peru de Justification des

    actions individuelles

    Justification des Action

    Individuelles

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    maintenu, mais au prix dune sparation entre le pouvoir de dcision et le savoir qui est ncessaire pour prendre la dcision. Troisimement, la pression du groupe des pairs lintrieurs de ce que Crozier appelle les strates , ou niveaux hirarchiques amne le dveloppement des rigidits dans les communication, et minimise les interactions entre strates. Enfin, la rgle et lautorit centrale ne peuvent pas tout prvoir, quelques zones dincertitude subsistent, et cest autour delles que se dveloppent les relations de pouvoir. Ceux qui contrlent ces zones dincertitude peuvent obtenir beaucoup dinfluence. Cest le cas des ouvriers dentretien dans les usines du Monopole Industrie : eux seuls peuvent rparer les pannes des machines qui sont la source dincertitude la plus importante dans une organisation par ailleurs trs rgule ; et ils sont par consquent un groupe trs privilgi. Crozier note que de faon paradoxale, plus lorganisation est troitement rgul, plus grande est lindpendance des exports . Dans ces conditions selon Crozier, les rgles peuvent finalement contribuer fragiliser le lien avec les salaris et isoler les plus fragiles.

    2. Etude de terrain et mthodologie de la recherche

    Le cas du CRC PVS L'tude s'est droule dans un CRC franais nomm PVS5 sous-traitant une entreprise franaise, nomme STI6, uvrant dans le domaine des tlcommunications. STI fut cre la fin des annes 1994. Au milieu des annes 2003, lentreprise largit l'ventail de ses activits dans le champ de la tlphonie mobile. C'est d'ailleurs cette priode que STI a sign un contrat de sous-traitance avec le CRC PVS. Ce dernier occupe une surface denviron 300 m, et il compte 73 tloprateurs, 7 superviseurs et 3 chefs de plateaux. Le plan du CRC ltude est donn la figure 2.

    Figure 2 : Plan du CRC PVS Concernant lorganisation du travail chez PVS, les tloprateurs sont en majorit des tudiants, provenant dune trs grande diversit de filire. Ce sont des femmes en trs forte majorit. Dans ce cadre, les superviseurs font office de contremaitre, les oprations sont standardises et des outils informatiques sont mis en uvre pour rduire les couts et mesurer les charges du travail. Les salaris sont soumis un flux dappels ininterrompu. Un logiciel est conu pour anticiper et supprimer les appels inutiles, tels les faux numros. Le tloprateur se doit de savoir grer les alas, les failles et les paradoxes de lentreprise. Le travail de tloprateur est plac sous haute surveillance. Il est contrl quantitativement par le biais de statistiques (la dure moyenne de lappel comme indicateur de performance) et qualitativement par des coutes tlphoniques et des appels mystres. Les tloprateurs ont une faible rmunration proche du SMIC, les niveaux de rmunration sont dconnects des niveaux de qualification et de comptence des salaris. Les activits du CRC PVS sont diverses. La relation client consiste la dlivrance dune information dj construite (les types de contrats, les factures). Les services de vente et de rtention ncessitent la construction dune relation plus complexe, appuye sur des argumentations. 5 Il s'agit d'un nom fictif attribu au CRC visit pour des raisons videntes de confidentialit 6 Il s'agit d'un nom fictif attribu lentreprise pour des raisons videntes de confidentialit

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    La mthodologie de la recherche Dans les recherches en sciences de gestion, les mthodes empiriques (les diffrentes formes dobservation, les interviews, les enqutes ou la combinaison de diffrentes techniques ou multi mthodes) sont plus frquemment utilises pour explorer des nouveaux objets thoriques (Snow et Thomas, 1994). Notre tude est essentiellement exploratoire. Comme le souligne (Eisenhardt, 1989), le choix dune approche qualitative ne prjuge pas de la nature des matriaux empiriques constituant les sources de preuves. Evrard (2000) prcise bien quil ne faut pas confondre les donnes qualitatives et les donnes quantitatives avec les tudes portant le mme vocable. En effet, notre choix combine les deux matriaux qualitatif (entretiens semi-directifs) et quantitatif (questionnaire), en suivant une approche qualitative. Cette ouverture mthodologique (Wacheux, 1996), contextualise ltude, enrichit les rsultats et renforce leur validit. Si notre dmarche est exploratoire, elle ouvre nanmoins de relles pistes de recherche et propose des lments de rponse. Le tableau suivant prsente lchantillon de ltude.

    Tloprateurs Superviseurs Chefs de plateaux DRH

    29 tloprateurs 3 superviseurs 2 chefs de plateaux Le Directeur des ressources Humaines Tableau 1 : Lchantillon de ltude (entretiens semi-directifs)

    Les modes de collecte de donnes sont prcises dans ce tableau.

    Donnes Mode de collecte traitement

    Primaires

    34 entretiens semi-directifs (principale outil de collecte de donnes) Rcit des tloprateurs, superviseurs, chefs de plateaux et le DRH ; Questionnaire : 73 tloprateurs (sinscrit dans une logique de complmentarit des entretiens semi-directifs)

    Analyse de contenu smantique. Traitement avec le logiciel SPSS 16.0

    Secondaires externes

    Accs des supports de communication Rapport sur la dtermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail (Patrick LEGERON et Philippe NASSE (12 MARS 2008).

    Analyse documentaire

    Tableau 2 : Les modes de collecte et traitement des donnes de ltude Les entretiens semi-directifs : Nous avons men 34 entretiens-semi directifs individuels auprs des acteurs composant lchantillon cits au tableau 1. Lentretien individuel consiste en la pratique dun questionnement du sujet avec une attitude plus au moins marqu de non-directivit de linvestigateur vis--vis du sujet. (Baumard, Danda, Ibert et Xuereb, 2003). La grille de questions n'est pas standardise et stabilise, mais varie selon le rle de la personne interroge et volue au cours de l'entretien "la meilleure question n'est pas donne par la grille : elle est trouver partir de ce qui vient d'tre dit par l'informateur" (Kaufman, 1996). Le guide dentretien identifie les pratiques de mobilisation de la main duvre, lorganisation du travail et les conditions de travail perues par les acteurs du CRC PVS. Lanalyse de contenu est la technique qui semble approprie notre tude. Celle-ci est la mthode qui cherche rendre compte de ce quon dit les interviews de la faon la plus fiable possible (Berelson, 1952).Nous avons suivi les trois tapes qui composent cette mthode danalyse. Premirement, lenregistrement des discours fut effectu laide dun logiciel install dans notre ordinateur. Ensuite, le codage est conduit selon une procdure ouverte et inductive, car notre grille danalyse nest pas dfini au dpart, (Adreani, 2005). Enfin, le traitement est men dun point de

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    vue smantique, il sagit de faire des infrences partir des caractristiques du message qui sont apparues la suite du codage des donnes (Allrad-Poesi, 2003). Le questionnaire7 : Un courrier lectronique a t envoy via notre carnet dadresse lectronique lensemble des tloprateurs du CRC PVS. Ce courrier explicitait, contenait lobjet de lenqute et ladresse du questionnaire en format HTML8. Les acteurs de PVS saisissaient leurs rponses dans le formulaire. Ces rponses taient sauvegardes directement. Elles taient transfres via un programme dapplication sous fichier Excel puis transformes sous logiciel SPSS 16.0. le questionnaire mesure la perception des tloprateurs sur les aspects suivants : la rmunration, les horaires de travail, les opportunits de carrires, la fatigue au travail, limplication au travail, laspect routinier du travail et quelques information sociodmographiques (Figure 3).

    Figure 3 : Profil des tloprateurs du CRC PVS BC : Brevet des collges, DUNC : Diplme universitaire non complt, DUC : Diplme universitaire complt.

    3. Rsultats et discussion

    Les rsultats de notre tude laissent apparatre une place paradoxale du management. Les premiers rsultats de cette recherche mettent en vidence que les mthodes de management sont dstabilisantes bien avant lintroduction de linnovation organisationnelle qui consiste formaliser le comportement des tloprateurs. Ces mthodes vont lencontre du rle initial du management qui consiste faire vivre des groupes sociaux afin quils puissent produire du collectif au-del de la simple addition dexpertises individuelles. Ce rle conditionne le succs et le bon fonctionnement des organisations (Thithard, 2007). En effet, les dirigeants du CRC PVS ont nglig la sant psychologique de leurs salaris qui sont malgr tout les premires ressources, et les premiers lments pour la performance conomique et le bon fonctionnement de cette organisation.

    7 Le contenu de ce mode de collecte de donnes est labor la bases des questionnaires (chelle de 1 5) retrouv dans les tudes suivantes : Duxburry et Higgins (2001); Frenkel et al. (1999); Furnham et Gunter (1989); Gallie (1998); Leckie (2001); Lowe (2000); Lowe et Rastin (2000); Lowe et Schellenberg (2001); Mueller, Wallace et Prie (1992); Mowday et Steers (1979) 8 HyperText Mark-Up Langage.

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    Un management qui sloigne Un premier constat peut tre opr la suite des entretiens raliss auprs des acteurs du CRC PVS. Linnovation organisationnelle implante prvoyait que les superviseurs se donnent pour mission de renouveler la nature du coaching offert aux tloprateurs afin dassurer des rsultats stable long terme (la qualit des appels). Le coaching est effectu aprs l'valuation ralise par les chefs de plateaux partir des appels mensuels enregistrs (logiciel informatique) auprs de chacun des tloprateurs. Lorsqu'ils sont en sance de coaching, les tloprateurs ont alors l'impression de se faire tout simplement pigs puisque l'valuation quantifie distance de la qualit de leurs appels a des impacts directs sur leur autonomie Pour le flicage, je peux vous citer des exemples, il y a dix systmes de flicage de salaris, ils y en a quatre qui se font de visu, par le chef cot, dautres qui se font distance, on espionne nos crans, qui se font de visu avec une hyper vigie, avec une cellule performance qui regarde pour les flues dappels, on a dj trois niveaux de surveillances tlphoniques, une par le superviseurs, une distance ce quon appel le coaching, une par des appels mystres, il y a des personnes qui se font passer pour des faux clients, et qui essayent de piger les salaris, et il y en a trois de surveillance lectronique : pour surveiller les chiffres de vente, pour surveiller les pauses, pour surveiller les flux des cadences, on les augmentes quand il y a beaucoup dappels, on est fliqu tout le temps L'interprtation du discours des tloprateurs l'gard de l'application de linnovation organisationnelle a des allures d'une grande irritation de leur part, et ce, de faon gnralise. Selon les entretiens raliss auprs d'eux, ce mcontentement se compose principalement de deux facteurs. Le premier prend la forme dun reproche gnralis concernant le temps consacr au coaching. Du point de vue des tloprateurs, l'objectif des superviseurs et les chefs de plateaux est loin d'tre atteint sur le plancher du CRC pour moi, le superviseur ne fait pas sont travail correctement, tout se fait l haut. Ils sont juste l pour nous surveiller . En fait, ce qui occasionne ce problme, c'est que la direction, tout en demandant aux superviseurs de consacrer trois tiers de leur temps de travail effectuer du coaching, ne les a pas ncessairement librs de l'ensemble des tches administratives dont ils sont responsables, comme le prcise un chef de plateaux : Les superviseurs. Pfff, On les forme pour quils soient polyvalents, a fait parti de leur travail, cela tait crit noir sur blanc dans leur contrats Alors, non seulement les superviseurs doivent effectuer ces fameuses tches administratives, mais il semble galement qu'ils soient constamment sollicits pour assister des runions, pour rpondre aux questions de leurs tloprateurs ou de ceux d'autres quipes dont le superviseur est absent. Le deuxime facteur du mcontentement des tloprateurs est li l'essence mme de la notion du coaching tire de la description idalise qu'en font la fois les agents de service et les superviseurs. En fait, dans cette perspective, le coaching s'articule autour de l'ide de gratuit dans le sens o le superviseur puisse venir s'asseoir aux cts du tloprateur lorsqu'il est en ligne, l'couter et laborer avec lui une sorte de plan stratgique pour l'aider devenir meilleur. Or, dans la ralit quotidienne du CRC PVS, les tloprateurs ne reoivent qu'une forme de support qui s'apparente trs peu au coaching idalement peru la fois par ces deux groupes d'acteurs cest un travail pnible, les superviseurs ne sont pas contents quand on les appels pour nous aider, on a limpression quils ne servent rien, on se fait envoyer balader, mais je pense que a va sarrter, ce nest pas rentable pour PVS . Deux composantes caractrisent ce type de support. La premire concerne l'ide que le support offert aux agents, compte tenu des contraintes de temps qui psent lourdement sur les superviseurs, ne correspond bien souvent qu' rpondre leurs questions dans le feu de l'action (Figure 1 : Justification des Action Individuelles par les superviseurs). La deuxime composante du coaching rellement expriment par les tloprateurs se rapporte une sorte de dnaturation de la notion dans la mesure o il y a substitution de l'ide de gratuit ou de rciprocit par celle de la sanction ou du reproche on a limpression que la haut, ils ne sont pas satisfaits, on nest pas rentable pour eux, cest pour a ils nous sanctionnent en permanence. Les raisons de ca, cest que notre quotidien cest quoi ? Cest des restructurations, des rorganisations . Dans la symbolique des agents de service, le coaching idal pourrait correspondre ltape d'entranement en vue de raliser une performance. C'est seulement aprs que cette performance soit accomplie qu'il peut y avoir une valuation quantifie, que le moment

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    de la sanction pourrait prendre place. Compte tenu que le coaching n'est ralis qu'aprs la performance et qu'il y a souvent un espace de temps relativement considrable entre ces deux moments, les tloprateurs se sentent en quelque sorte trahis par cette innovation organisationnelle, d'autant plus qu'une minime performance gnrent des impacts directs sur l'octroi ou non de leurs primes, et leurs conditions de travail Jexplique ltat desprit quil y a dans lentreprise : il y a quun seul mot qui marrive cest la rage, on a la rage . Selon les propos recueillis auprs des tloprateurs, le mcontentement exprim prcdemment de leur part ne semble pas tant prendre sa source dans le maintien des exigences quantitatives en tant que tel. En fait, les agents sont pleinement conscients que les exigences quantitatives de performance s'avrent ncessaires au bon fonctionnement du CRC PVS cest normal, le but tant dexpliquer au client, et de vendre . Toutefois, lorsqu'ils voquaient en entretien la pntration des nouvelles modalits de formalisation des comportements suite linnovation organisationnelle dans le processus de production du service, qui gnre des impacts sur l'octroi des primes, et le foss sparant le discours des superviseurs et des chefs de plateaux et la ralit au CRC, il tait alors possible d'identifier avec plus d'acuit la source de leur mcontentement. Ils entretenaient alors la perception que la direction s'tait en quelque sorte moque d'eux. videmment, il semble plutt improbable que la direction de PVS ait vis ce genre d'objectif, mais il demeure certain qu'elle avait pralablement mal valu les impacts de cet incident. C'est donc dans cette mesure que l'vnement des statistiques oublies (La direction de PVS promettait aux tloprateurs la non prise en compte des statistiques, et dorienter les objectifs vers la qualit des appels au lieu des statistiques du nombre dappels) a hautement frapp l'imaginaire collectif des tloprateurs. L'vnement fut tourn en drision sur le plancher du CRC PVS, ce qui traduit bien en quelque sorte que le discours managrial l'gard des promesses trouve difficilement un peu de crdibilit dans l'optique des tloprateurs ce qui amne comme le mentionne March et Simon (1958) dans la figure 1, un dysfonctionnement du CRC : Rigidit du comportement et Dfense du statut dans lorganisation .

    Des tloprateurs en qute de repres Compte tenu du degr lev de difficult associ l'excution du travail des tloprateurs, ne serait-ce qu'en raison de l'agressivit des clients qui entrent en ligne et des standards quantitatifs de performance, ceux-ci s'attendent recevoir une forme ou une autre de support dans la relation d'emploi. Comme le soulignait en entretien un tloprateur On est entre le marteau des objectifs de la direction, et lenclume des exigences des clients . Les tloprateurs peroivent dune part, bien souvent ce genre de travail comme plutt routinier, ce que tend dmontrer les rsultats prsents en figure 4. Les donnes qui y sont exprimes suggrent que les tloprateurs considrent leur travail comme tant de plus en plus routinier, une opinion qui atteint son sommet chez les tloprateurs ayant une anciennet entre 13 et 36 mois. Ces rsultats corroborent donc en quelque sorte les propos des tloprateurs formuls en entretien concernant leur impression de sennuyer relativement rapidement au CRC.

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    Figure 4 : Laspect routinier du travail peru par les tloprateurs du CRC PVS

    Dautre part, un motif associ la volont explicite des tloprateurs sortir de la prise d'appels se rapporte au fait que ce genre de travail, la longue, semble plutt puisant sur le plan mental (Figure 5). Au bout d'un certain temps, ils esprent donc faire autre chose. D'autant plus qu'au moment de leur embauche et lors de leur formation initiale, comme le soulignait le DRH La politique de formation contient trois aspects : la formation larriv, la formation au cours du temps. La formation larriv consiste donner la nouvelle recrue un complment de formation sur le mtier du CRC, et de lui donner une formation tlphonique et un apprentissage aux outils. La formation au cours du temps concerne les produits et les nouveaux outils, lors de chaque changement dopration. Ces formations permettront aux tloprateurs de faire carrire chez nous . La direction insiste sur les nombreuses possibilits de faire carrire chez PVS, un tloprateur souligne on nous vend la grosse salade . Il semble donc plausible de prtendre que les tloprateurs, en l'occurrence ceux temps plein, ressentent de la dception face aux opportunits de carrires (Figure 5), un sentiment qui s'amplifie au fur et mesure que le lien d'emploi se prolonge. En entretien, tant les superviseurs que les tloprateurs n'hsitaient pas confier que la perspective de cet horizon bloqu en amenait plusieurs se chercher un autre emploi dans une organisation diffrente. Ainsi, la dception associe aux opportunits de carrires semble affecter l'implication des tloprateurs envers l'organisation. Certains partent, d'autres restent tout en envisageant de quitter le CRC PVS. Mais en attendant, ceux qui restent ne sont plus autant enclins faire le maximum pour l'organisation puisque leur exprience de la rciprocit leur a appris que mme s'ils se dvouent envers elle, le retour de l'ascenseur ne sera pas ncessairement l'ordre du jour de la direction. La figure 5 propose ce sujet la perception des tloprateurs l'gard des opportunits de carrires. la lumire des rsultats qui y sont exposs, une plus faible propension croire quil y a des possibilits de faire carrire dans le CRC PVS. Par ailleurs, les rsultats de notre tude permettent aussi de dnoter que les tloprateurs cherchant un autre emploi prsentent davantage d'insatisfaction l'gard de leurs opportunits de carrires et considrent dans une moindre mesure que leur travail peut permettre le dveloppement de leurs comptences. Compte tenu de ces statistiques et des rsultats obtenus suite aux entretiens, il semble vraisemblable de considrer que l'insatisfaction l'gard des opportunits de carrires joue un rle important dans la dtermination de l'implication et, ventuellement, dans les manifestations associes la volont de se chercher ou non un autre emploi.

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    Figure 5 : Opinions de tloprateurs propos des opportunits de carrire (D2) et laspect fatigant du travail (E1) chez PVS

    Linterprtation de la situation des tloprateurs se manifeste sur le terrain de la confiance envers la direction. Daprs les entretiens, il ressort une diminution relativement marque de la confiance au fur et mesure qu'augmente l'anciennet des agents, bien que cette confiance semble reprendre de la vigueur compter de la quatrime anne de service. Cela nest pas du point de vue des chefs de plateaux on a affaire des jeunes issus de luniversit qui pensent que cest comme luniversit, on sche les cours, on sche mme les examens on sinscrit 25 trucs diffrents, on ne prsente quun ou deux examens, etc. ils ont beaucoup de difficult atterrir dans la ralit de lentreprise . Il est alors possible d'tablir un constat qui concerne l'ide que, dans la dure, les agents de service du CRC dsenchantent graduellement du lien d'emploi qui les unit direction de l'organisation, notamment en vertu des dceptions voques prcdemment.

    Un dsenchantement douloureusement vcu La surveillance lectronique suite lintroduction de linnovation organisationnelle gnre donc des impacts chez les tloprateurs, qu'ils en soient plus ou moins conscients On a des dizaines de salaris qui sont en dpression, on a des dizaines de gens pour tenir ils prennent des calmant, tous ils disent qui ils sont stress, quils ne sont pas bien. On est attach lordinateur avec un cordon ombilical et un serre tte . Ce rapprochement est trs lourd de sens dans la mesure o le serre-tte peut trs bien reprsenter un instrument contractant leurs facults de penser et o le cordon ombilical symbolise la relation infantilisante que les tloprateurs ont l'impression d'exprimenter au CRC PVS et qui fut voque prcdemment. Ce genre de travail n'est donc pas une sincure. Il s'apparente parfois celui effectu sur une chane de montage compte tenu qu'il semble de plus en plus rgi par des rgles restreignant l'espace d'autonomie des agents. De plus, lorsque ces contraintes managriales sont contextualises dans la relation de service, une double pression provenant du CRC PVS et du march pse sur les tloprateurs On est dans une socit capitaliste, quand les banques vont mal, les milliards tombe, quand les salaris vont mal, le gouvernement soutient les bourreaux . D'un ct, ils demeurent soumis aux attitudes et comportements souvent dsagrables de la clientle. D'un autre ct, ils doivent honorer des politiques commerciales ou respecter des procdures organisationnelles pour lesquelles ils n'ont t nullement consults tout en rencontrant imprativement des standards quantitatifs et qualitatifs de performance puisque la surveillance lectronique demeure toujours aux aguets de leurs moindres faux pas processuels. En termes de stress ressenti l'gard de ces aspects de leur travail, il semble bien que les tloprateurs prouvent une pression, en particulier sur le plan des exigences de rendement associes la qualit des appels. ce sujet, il fut constat que les tloprateurs disposaient d'une plus grande latitude dans l'laboration et l'application de rsolutions de problmes effectues dans le cadre de leur prestation de service. Par ailleurs, compte tenu de ce qui a t voqu prcdemment, il semble que d'autres formes de risques peuvent tre mises en lumire. Ils concernent cette fois les problmes de sant psychologique des travailleurs eux-mmes. Tel que vu prcdemment, l'absorption continuelle de commentaires ngatifs de la part des clients peut rattraper les tloprateurs eux-mmes ainsi que l'organisation dans la mesure o elle peut contribuer dvelopper certaine formes de maladies lies la sant psychologique des travailleurs. En ce sens, selon des donnes qui ont t fournies par le DRH du CRC PVS au moment du recueil des donnes, il y avait un grand nombre dabsences associs des problmes psychologiques9

    comparativement. Le

    fait de passer plusieurs heures par jours par semaine dans cette atmosphre peut devenir insupportable la longue, comme le souligne d'ailleurs ce tloprateur ayant demand un transfert temps partiel : 9 De ce nombre, 56% concernaient des problmes de dpression, 31% des troubles d'adaptation et 13% des problmes lis au stress.

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    Je crois qu'il y a un facteur de stress qui est trs grand. Donc maintenant je suis temps partiel parce que c'est insupportable temps plein, cinq jours par semaine. Il ny a pas de comprhension. Je ne crois pas non plus leur formule de pas amener le travail la maison, je pense quon nest pas dans un laboratoire o t'isoles les lments puis un nentre pas en contact avec l'autre. C'est tout fait farfelu de penser comme a. Veux, veux pas, si il se passe quelque chose dans ma vie, mettons que je casse, puis j'ai juste envie de pleurer, bien les autres ils s'en foutent. Ils assument que t'es toujours en parfaite forme physique et mentale. C'est irrel. Donc, le seul fait pour les tloprateurs d'voluer constamment dans un univers plutt ngatif peut les amener, plus ou moins long terme, dvelopper des problmes de sant de nature psychologique. Cette situation peut gnrer videmment des impacts sur l'organisation. En fait, seulement en termes de cots, une augmentation du nombre d'absences gnre des impacts la fois sur les budgets consacrs la rmunration ainsi que sur l'aspect fonctionnel du CRC PVS dans la mesure o il faut embaucher du personnel de remplacement et investir financirement dans leur formation. En considrant qu'un tloprateur nouvellement embauch ne devient productif et rentable pour la firme qu'aprs deux mois de service, le DRH prcise que le taux d'absence dun tiers du personnel cote trs cher l'organisation car aussitt qu'un tloprateur sur trois devient rentable, il tombe malade . Ainsi, le fait de porter peu d'attention la mission de rciprocit des tloprateurs comporte des risques indniables pour l'organisation. Comme il vient d'tre soulign, ces risques peuvent prendre la forme d'un retrait de la part des tloprateurs. Ce retrait peut apporter certains bnfices pour les tloprateurs dans la mesure o cette pratique redonne un certain sens leur travail en les protgeant relativement de la pression qui pse sur eux et en contribuant les affirmer. Toutefois, cette pratique peut gnrer des effets ngatifs sur la loyaut des clients envers l'entreprise puisque le retrait se traduit notamment par un non implication psychologique des tloprateurs envers les proccupations de l'entreprise et parfois envers celles de la clientle. De plus, ces risques peuvent se traduire par l'accroissement des problmes de sant psychologique chez les tloprateurs. Cette ralit peut videmment gnrer des cots substantiels au fonctionnement de l'entreprise et engendrer des impacts certains sur les objectifs de rentabilit et de profitabilit de celle-ci. Les superviseurs et les chefs de plateaux ont donc tout avantage se proccuper de l'exprience de rciprocit telle que perue par les tloprateurs. Sinon, comme il vient d'tre constat, des formes alternatives de rsistance comme le retrait pourraient gnrer des effets critiques sur l'ensemble des objectifs stratgiques que doit atteindre l'organisation pour assurer sa prennit et sa survie, ainsi que sur son fonctionnement.

    Conclusion

    Comme nous lannoncions prcdemment, cette recherche na pas seulement t conduite auprs des tloprateurs du CRC. Nous avons galement cherch connaitre lorganisation du travail, et les modes de management partir des discours des chefs de plateaux, des superviseurs, et du DRH du CRC PVS. Afin de montrer la faon dont les conditions de travail sont affectes aprs lintroduction dune innovation organisationnelle. Cette dernire est cense aider les superviseurs et les chefs de plateau stabiliser les rsultats, et amliorer la performance des tloprateurs. La mthodologie utilise exige cependant dexaminer avec prudence les rsultats mergeants. En effet, par lintermdiaire des entretiens raliss et les donnes quantitatives nous navons quun accs indirect aux comptences mobilises. Dans la mesure o nous avons travaill sur du dclaratif, il pourrait tre intressant davoir recours lobservation participante afin de confirmer ces premiers rsultats. Nous avons eu loccasion de signaler que la distinction des CRC entre intgrs et prestataires conduit une premire typologie importante dans les pratiques de management. En effet, les centres intgrs ne sont pas des centres de profit. Mme sils participent directement la production de valeur ajoute, ils sont considrs comme centres de cot. En effet, face la domination de donneur dordre, le CRC prestataire ltude nest pas sans dfense. Il rplique en jouant de ses spcificits, en intgrant une nouvelle mthode de management appuy sur les NTIC qui consiste formaliser les comportements des tloprateurs afin de stabiliser ses rsultats et sa performance. Cette stratgie a une influence sur ses pratiques de management. Mais en retour elles agissent sur les conditions de travail des

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    tloprateurs, en pesant sur leurs acquis. Historiquement, en 2004 lUnion Europenne a sign avec lensemble des partenaires sociaux un accord cadre pour intgrer la problmatique des conditions de travail, en loccurrence le problme de stress (Legeron et Nasse, 2008). Il a fallu plus de quatre annes afin que cet accord soit sign en France. Patrick LEGERON10 et Philippe NASSE11 taient chargs de la rdaction dun rapport qui a t remis Xavier BERTRAND12 en 2008, sur la dtermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail. Rien na encore t mit en place (Legeron, 2008). Daprs ce rapport, il est indispensable de mettre lhumain dans le centre de lentreprise. Cette dernire a t beaucoup oriente vers des stratgies, financires, conomiques, de dveloppement et lhumain tait nglig. Il faut savoir que des organisations du travail qui pressurisent les gens avec des mthodes de management hors du commun, et inculquent le sentiment dtre inutile, et qui donnent aux salaris le sentiment dtre utilis sans aucun respect de leur dignit. Une pdagogie active doit tre faite en direction des dirigeants dentreprise, des responsables de ressources humaines et des managers. A cet gard la formation initiale des managers devrait inclure cette dimension humaine de la gestion des entreprises en mettant laccent sur limpact psychologique et les effets sur la sant non seulement des organisations du travail mais aussi des mthodes de management des hommes. De mme, ces objectifs devraient faire lobjet de modules de formation continue, afin dassurer leur bon fonctionnement.

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    10 Mdecin psychiatre. 11 Magistrat honoraire. 12 Ministre du Travail, des Relations sociales et de la Solidarit, anne 2008.

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    Nehme Azoury -

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    RELATIONS EURO-MEDITERRANEENNES : AUDIT SOCIAL ET MISE A NIVEAU DES ENTREPRISES ET DES

    INSTITUTIONS LIBANAISES Nehme AZOURY Dean Faculty of Business Adminsitration and Commercial Sciences Holy Spirit University of Kaslik, Jounieh Lebanon [email protected]

    Introduction

    Dans un contexte actuel de mondialisation, limprvisibilit et lincertitude interprtent les caractristiques actuelles dun environnement conomique turbulent. Encore, il importe de mentionner que la vulnrabilit des entreprises a cr proportionnellement la rapidit des mutations. Afin de sadapter lvolution des exigences et des besoins du march : lassurance dune formation, lvaluation du personnel et le recours des mthodes et des pratiques idoines lentreprise, constituent les vecteurs dune trajectoire professionnelle pour lamnagement des conditions demploi et la favorisation dune croissance conomique fonde sur la connaissance et lchange dinformation. La permabilit des frontires de la firme, les cooprations entre acteurs conomiques du bassin mditerranen et limportance des rles de laudit social et de la responsabilit sociale de lentreprise (dsormais RSE13) suscitent une rflexion cruciale au gr de lvolution de ces dimensions et de leur impact sur les russites des partenariats internationaux. Le recours laudit social dune entreprise se justifie travers louverture des frontires de lentreprise et simpose en tant quune mthode indispensable pour analyser les risques et opportunits lies ces nouvelles perspectives. Ainsi, lalliance euro-mditerranenne est alors comprise en tant quune dmarche inter-organisationnelle favorable aux apprentissages du fait des interfaces partenariales (Peretti et Frimousse, 2005). Pour ce faire, les entreprises conscientes de leur responsabilit sociale mettent en place des actions de formation pour leur permettre d apprendre apprendre , ou d actualiser leur potentiel intellectuel (Tessier et Roger, 2003). Dans cette veine, linvestissement dans le capital humain14 dune part, et la coopration dans le domaine conomique dautre part constituent les enjeux cruciaux selon lesquels les relations euro-mditerranennes doivent tre harmonises en vue damliorer le dveloppement des comptences entre les firmes partenaires. Concernant le domaine social, les changements spcifiques de la gestion sociale et notamment le passage de la gestion du personnel la GRH expliquent les particularits de laudit social (Combemale et Igalens, 2005, p.12). Dans le cadre dalliances inter-firmes, le recours laudit social peut participer llaboration de bonnes pratiques GRH pour tablir un rapprochement des bilans sociaux des entreprises concernes. De part sa volont construire une zone euro-mditerranenne de stabilit conomique et politique (Peretti et Frimousse, 2005), lUnion Europenne (dsormais UE) encourage le dveloppement social dans le cadre de la mondialisation. Dans la perspective dun projet de partenariat, lUE a dcid dtablir un nouveau cadre de ses relations avec les pays du bassin mditerranen lors de la confrence de Barcelone (le 27 et 28 novembre 1995). Cette dclaration euro-mditerranenne tablit un cadre multilatral associant troitement les aspects conomiques sociaux, humains et culturels. La concertation conomique euro-mditerranenne sappuie sur les dveloppements des capitaux afin dharmoniser la coopration interorganisationnelle ainsi que sur le financement des projets tablis.

    13 Traduction imparfaite de Corporate Social Responsability qui - en anglais - inclut lensemble des responsabilits supportes par une personne morale. (Frimousse et Peretti, 2005). 14 Ce concept a t faonn par les travaux dconomistes fondateurs linstar de Shultz (1961) et Becker (1975).

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    titre dexemple, la FEMIP15 a dpens, 250 millions (2002 2007)16 pour des projets destins renforcer le capital humain dont 70 millions deuros dans lducation et la formation afin dy promouvoir la culture entrepreneuriale. Dans ce contexte, et au gr de limportance du dveloppement de lentreprise, il semble ncessaire davoir une approche globale de la gestion des ressources humaines (dsormais GRH). Par ailleurs, le faible formalisme des pratiques en la matire dans le cas des PME17 suscite une rflexion sur les mthodes et les outils appliqus en vue de parvenir voluer en matire daudit social et de responsabilit sociale. noter que les primtres des champs de recherche sur le thme de laudit social se sont largis grce au phnomne de la RSE (Egg, 2004). Ce thme du management de la gestion des comptences a dj donn lieu un certain nombre de travaux (Bachelard et al., 2004). linstar des qualificatifs de laudit en matire financire et comptable18, ce terme se conjugue avec une diversification des missions daudit. Diffrentes pratiques19 et ralits concourent collgialement laborer une apprciation professionnelle et objective de la cration de valeur de lentreprise. Si lon veut que la gestion sociale participe aux proccupations stratgiques de la firme, il faut quelle sorte du relatif et du subjectif, mme si, dans ce domaine, la quantification est difficile et si le progrs relve surtout du qualitatif (Combemale et Igalens, 2005, p.13). De fait, la naissance de laudit social merge la suite de ltablissement dun diagnostic humain in vivo de lentreprise qui peut tre valu au regard des stratgies dfinies dans lentreprise. Toutefois, si laudit des ressources humaines fait porter lanalyse sur lensemble des pratiques qui visent mettre lhomme idoine la place appropri (Martory, 2003), en gnral, les P.M.E peinent reprer les outils et avantages de la GRH. La GRH se limite une fonction administrative et dassistance. Peretti et Frimousse (2005) indiquent que la GRH noccupe pas une place stratgique dans la gestion des entreprises tunisiennes et quelle demeure dans la grande majorit des entreprises au Maroc ltat embryonnaire ainsi que pour le cas des firmes libanaises (Bourcieu, in Morel, 2008). Il importe ce stade dvaluer le capital humain de lentreprise, objectif majeur de laudit social afin de prvoir toute source de difficult et de dysfonctionnements pour lentreprise (Guillard et Roussel, 2005). Ainsi laudit social et la mise niveau des entreprises, par la valorisation des comptences, reprsentent un des lments fondamentaux de la politique de dveloppement conomique du Liban, en relation avec lUnion Europenne et des principaux pays mditerranens. En effet, cest au regard dune double approche, savoir celle des ressources et des comptences et celle des transactions que la place particulire de laudit social doit tre accorde la rcurrence dun diagnostic social dans la firme. Dans cette perspective, louverture des frontires et lapparition de normes internationales sociales et thiques font de laudit social une discipline et une dmarche de plus en plus sollicites (Frimousse et Peretti, 2005). Cest aussi le cas des audits sociaux pralables des achats dentreprise ou une opration de fusion-acquisition, lorsque lacheteur ou lentreprise qui va fusionner dsire obtenir la rponse aux questions quil se pose concernant le volet social de lentreprise cible (Igalens et Peretti, 2008, p.31). cet gard, la problmatique de cette tude snonce travers la ncessit de dvelopper et dapprcier le capital humain de la firme. Alors la problmatique est formule de faon lucider : Sur quelles voies faut-il avancer dans le dveloppement social des entreprises libanaises ?

    15 La Facilit euro-mditerranenne dinvestissement et de partenariat. 16 Sur la priode 2007-2013, la FEMIP dispose de 10,7 milliards deuros pour soutenir des projets dans les neuf pays partenaires mditerranens (source : http://www.bei.org). 17 Les entreprises de la couronne nord africaine et les pays du Moyen Orient. 18Tel laudit financier, audit de conformit, audit social, audit oprationnel, audit juridique, audit defficacit, audit marketing, audit stratgique, audit de la production, audit informatique, audit par les risques, etc 19 Autant laudit financier est balis, encadr, professionnalis, autant laudit social est laiss dans le cadre de pratiques dont lhtrognit est la rgle (Martory, 2003).

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    Eu gard la problmatique, les objectifs poursuivis de cette tude porteront sur la mise en place de procdures, voire des stratgies bien dfinies, qui observent la valeur individuelle et collective de lquipe dirigeante travers la pertinence des mthodes et outils idoines chaque entreprise en matire de GRH. Au vu de la littrature, deux questions de recherche motivent ce travail de recherche : 1. Quelles sont les mthodes et les pratiques appliques qui suscitent les entreprises libanaises valuer et faire voluer leur capital humain ? 2. Dans quelle mesure le recours la mise en place dun audit social semble dune utilit cruciale afin de pouvoir sceller un partenariat avec les pays europens et de favoriser durablement lhomognisation des pratiques en GRH ? Lintrt majeur de laudit social se traduit par lapplication de pratiques en matire de GRH dans les entreprises libanaises et par le dveloppement dun diagnostic valuatif des risques et des opportunits dans lorganisation. Ainsi les entreprises sont amenes laborer des programmes, lis la GRH et destins valoriser les comptences stratgiques dans loptique de raliser des performances difficilement imitables sur le march du travail et dharmoniser les relations conomiques et dchange entre les firmes concernes. Les missions daudit de la gestion prvisionnelle des emplois et des comptences (GPEC) sont devenues assez frquentes (Combemale et Igalens, 2005, p.18). Comme lindiquent Guillard et Roussel (2005), la fonction ressource humaine va conditionner, dune part, la qualit du partenariat qui doit sinstaurer entre les deux parties, et dautre part, llment moteur pour raliser les gains de synergies. Le processus de rorganisation de lentreprise accorde une priorit au plan de carrire court terme pour sadapter en permanence aux contraintes gnres par lvaluation des besoins stratgiques en ressources humaines, lidentification des comptences requises afin de raliser les stratgies et la vision organisationnelle, la gestion du recrutement et de lintgration des employs et cadres, la formation, lvaluation des performances et les promotions, les successions et enfin la gestion des performances. Cest dans ce contexte que les entreprises libanaises doivent chercher se rquilibrer leurs ressources grce des modes de relations stratgiques tels que les partenariats en concevant ces derniers comme une accumulation des connaissances produites par la synergie entre les parties concernes et par lvolution du succs interorganisationnel. Notre hypothse de travail consiste sur la qualit de laudit social et du levier quil constitue pour lamlioration du dveloppement dun partenariat international fructueux. Cela tant dit quune entreprise qui ne serait pas socialement responsable avec ses salaris a peu de chances de ltre avec son environnement externe (Cappelletti, 2006). Dans la premire partie thorique, les multiples approches de la dimension de laudit social sont prsentes (1.). Ensuite, les intrts thoriques de la recherche sont abords notamment pour dfinir les axes de recherche qui reposent sur limbrication des courants thoriques et des questions de recherche (2.) Cett