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A A A A A A V V V A A A N N N N T T T T - - - P P P P P R R R OPOS REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUILLET/AOÛT 2014 - N°464 // 29 © 2014 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés. Patrice Bourée a, * Les zoonoses: un échange permanent entre l’Homme et l’animal Au début du XX e siècle, une bactérie a été isolée chez des écureuils, dans le comté de Tulare (Californie) et les manifestations cliniques ont été décrites par E. Francis…. ce qui explique le nom de ce germe, Francisella tularensis, agent de la tularémie. Les ani- maux réservoirs sont nombreux (rongeurs, lièvres). L’Homme se contamine le plus souvent en mani- pulant ces animaux. La possibilité d’utiliser cette bactérie comme agent de bioterrorisme néces- site une surveillance par le CNR des Francisella (Grenoble), dirigé par Max Maurin qui a rédigé une mise au point très didactique sur cette affection. Les listérioses sont des zoonoses cosmopolites, dues essentiellement à Listeria monocytogenes, bactérie largement répandue dans la nature où elle persiste longtemps, en particulier sur le sol et les végétaux. De nombreux animaux peuvent être infestés. Chez l’Homme, les formes invasives sont rares mais graves. Les listérioses humaines sont à déclaration obligatoire au CNR (Institut Pasteur) et à l’InVS, ce qui entraîne une enquête alimentaire. Mathieu Tourdjman (InVS) a rédigé une bonne mise au point sur ce sujet. Les bartonelloses sont des zoonoses bactériennes infestant de nombreux mammifères, les carnivores domestiques (le chat) et sauvages. La maladie des D epuis la préhistoire, l’Homme a toujours été en contact avec des animaux, pour la chasse, l’utilitaire (bœufs, chevaux), l’élevage, les animaux de compagnie classiques (chiens, chat) et les nouveaux animaux de compa- gnie (singes, furets, serpents, rongeurs…). Cette proximité permanente a entraîné des échanges d’agents pathogènes. Les zoonoses, (du grec zoon = animal et nosos = maladie) ou maladies com- munes aux hommes et aux animaux, concernant de très nombreuses maladies bactériennes (tularémie, listérioses, bartonelloses), virales (fièvre Q), para- sitaires (toxocarose, trichinellose, échinococcose alvéolaire ou anisakiose) passant de l’animal vers l’Homme ou vice versa, sont parfois graves pour l’Homme ou l’animal. a Service de parasitologie et de mycologie Groupe hospitalier universitaire Cochin – Saint-Vincent-de-Paul 27, rue du Faubourg Saint-Jacques 75679 Paris cedex 14 * Correspondance [email protected] ZOONOSES

Avant-Propos: Les zoonoses : Un échange permanent entre l’Homme et l’animal

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Page 1: Avant-Propos: Les zoonoses : Un échange permanent entre l’Homme et l’animal

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REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - JUILLET/AOÛT 2014 - N°464 // 29

© 2014 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés.

Patrice Bouréea,*

Les zoonoses : un échange permanent entre l’Homme et l’animal

Au début du XXe siècle, une bactérie a été isolée chez des écureuils, dans le comté de Tulare (Californie) et les manifestations cliniques ont été décrites par E. Francis…. ce qui explique le nom de ce germe, Francisella tularensis, agent de la tularémie. Les ani-maux réservoirs sont nombreux (rongeurs, lièvres). L’Homme se contamine le plus souvent en mani-pulant ces animaux. La possibilité d’utiliser cette bactérie comme agent de bioterrorisme néces-site une surveillance par le CNR des Francisella (Grenoble), dirigé par Max Maurin qui a rédigé une mise au point très didactique sur cette affection.Les listérioses sont des zoonoses cosmopolites, dues essentiellement à Listeria monocytogenes, bactérie largement répandue dans la nature où elle persiste longtemps, en particulier sur le sol et les végétaux. De nombreux animaux peuvent être infestés. Chez l’Homme, les formes invasives sont rares mais graves. Les listérioses humaines sont à déclaration obligatoire au CNR (Institut Pasteur) et à l’InVS, ce qui entraîne une enquête alimentaire. Mathieu Tourdjman (InVS) a rédigé une bonne mise au point sur ce sujet.Les bartonelloses sont des zoonoses bactériennes infestant de nombreux mammifères, les carnivores domestiques (le chat) et sauvages. La maladie des

Depuis la préhistoire, l’Homme a toujours été en contact avec des animaux, pour la chasse, l’utilitaire (bœufs, chevaux),

l’élevage, les animaux de compagnie classiques (chiens, chat) et les nouveaux animaux de compa-gnie (singes, furets, serpents, rongeurs…). Cette proximité permanente a entraîné des échanges d’agents pathogènes. Les zoonoses, (du grec zoon = animal et nosos = maladie) ou maladies com-munes aux hommes et aux animaux, concernant de très nombreuses maladies bactériennes (tularémie, listérioses, bartonelloses), virales (fièvre Q), para-sitaires (toxocarose, trichinellose, échinococcose alvéolaire ou anisakiose) passant de l’animal vers l’Homme ou vice versa, sont parfois graves pour l’Homme ou l’animal.

a Service de parasitologie et de mycologieGroupe hospitalier universitaire Cochin – Saint-Vincent-de-Paul27, rue du Faubourg Saint-Jacques75679 Paris cedex 14

* [email protected]

ZOONOSES

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La coordination de ce dossier a été assurée par le Pr Patrice Bourée, Pr au Collège de médecine, Service de parasitologie et de mycologie, Groupe hospitalier universitaire Cochin – Saint-Vincent-de-Paul, Paris.

griffes du chat se manifeste par des lésions cutanées, des adénopathies locorégionales et une atteinte de l’état général. La culture est complexe comme le rappelle clairement Henri-Jean Boulouis.Une épidémie de fièvre, survenue en Australie, dans un abattoir du Queensland, a intrigué les auto-rités médicales locales, d’où le nom de fièvre Q (= query : question, concernant cette fièvre incon-nue). Puis, le germe responsable, Coxiella burnetii, a été isolé et son rôle bien démontré dans la sur-venue de valvulopathies, en raison de la sécrétion d’anticorps antiphospholipides comme l’expliquent Anne Darmon et l’équipe de Didier Raoult.En France, il y a environ 58 millions d’animaux de compagnie (plus de 53 % des familles ont au moins un animal), dont 27 millions de poissons, 10 millions de chiens, 8,5 millions de chats, 7 millions d’oiseaux et 1,5 million de rongeurs. Les chiens et les chats, étant souvent « inclus » dans la famille, sont porteurs de divers parasites comme des ascaris qui peuvent s’égarer chez l’Homme par ingestion accidentelle des œufs. Mais, n’étant pas adaptés à cet hôte, ces parasites y restent à l’état larvaire, en migrant dans différents organes. Le diagnostic est basé uniquement sur la sérologie, comme le rappelle Jean-François Magnaval, spécialiste reconnu de cette affection.Depuis l’Antiquité, on sait que le porc peut être por-teur de maladies transmissibles à l’Homme comme la cysticercose, la trichinellose, la balantidiose, etc. La gravité potentielle de ces affections n’est d’ailleurs pas étrangère à l’interdiction de certaines religions de consommer la viande de porc. Depuis 1976, le cheval s’est introduit dans la liste des animaux réservoirs de trichine. Or la viande de cheval, considérée comme particulièrement vivifiante, est souvent consommée peu cuite pour en récupérer toutes les qualités… et les parasites vivants qui y sont enkystés. Plusieurs épidémies sont survenues par suite de consomma-tion de viande de cheval, comme le montrent Patrice Bourée et Jean Dupouy-Camet, ce dernier ayant été président de l’International commission on trichi-nellosis et responsable du CNR de la trichinellose (Hôpital Cochin). La viande de cheval est maintenant soumise au contrôle vétérinaire, expliquant la régres-sion spectaculaire de ces épidémies.L’échinococcose alvéolaire, assez bien tolérée par le renard ou le chien qui hébergent le ver adulte, est très mal tolérée par l’Homme qui héberge la forme larvaire. Le pronostic en était très mauvais,

puisque considéré comme équivalent à un cancer du foie. Actuellement un traitement antiparasitaire au long cours peut éviter une greffe du foie comme le montrent bien Solange Bresson-Hadni et coll. qui travaillent sur cette pathologie.Les habitudes culinaires de certains pays asiatiques qui ont diffusé partout, consistant à consommer du poisson cru ou peu cuit, ont favorisé la transmission de parasites, comme l’anisakiose. En outre, les restrictions économiques ont fait que les poissons ne sont plus vidés immédiatement après la pêche mais stockés en chambre froide, permettant aux larves de quitter les viscères pour se réfugier dans la chair. Philippe Eldin de Pécoulas a bien fait res-sortir le risque important de réactions allergiques.Il faut remercier les différents auteurs, spécialistes de ces affections, d’avoir consacré du temps à la réalisation de ce numéro de la RFL concernant les zoonoses.

Sommairethématique

Francisella tularensis et la tularémie ....................................................... p. 31

Listériose humaine : une zoonose d’origine alimentaire ...................................... p. 37

Les bartonelloses zoonoses .................. p. 45

La fièvre Q en 2014 : défi diagnostique et thérapeutique ............ p. 51

Diagnostic biologique de la toxocarose humaine ....................... p. 61

Diagnostic de la trichinellose ................ p. 71

Diagnostic de l’échinococcose alvéolaire ................................................................... p. 77

Anisakiose et allergie : une association morbide négligée ? .......... p. 89

QCM .............................................................................. p. 96

Références Acha PN, Szyfres B. Zoonoses et maladies transmissibles

communes à l’homme et aux animaux. 3 vol. Ed. OIE;2005. Anofel. Parasitoses et mycoses des régions tempérées et

tropicales. 3e ed. Elsevier Masson;2013. Bourée P. Aide-mémoire de parasitologie et de pathologie

tropicale. 4e ed. Flammarion;2009.

Euzépy J. Les dermatoses parasitaires d’origine zoonosique. Ed EMI-Lavoisier ; 2003. Krauss H, Weber A, Appel M, et al. Zoonoses: infectious

diseases transmissible from animals to humans. Ed. ASM Washington;2003. Villeneuve A. Les zoonoses parasitaires. Ed. Presses de l’Uni-

versité de Montréal;2003.