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SHAYLABLACK

SYLVIADAY

SHILOHWALKER

Avec ou sansescorte…

Traduit de l’anglais (États-Unis)par Cécile Beck

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Shayla Black – Sylvia Day – Shiloh Walker

Avec ou sans escorte…

Nouvelles

Maison d’édition : J’ai lu

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Cécile BeckDépôt légal : avril 2016

ISBN numérique : 9782290094907ISBN du pdf web : 9782290094938

Le livre a été imprimé sous les références :ISBN : 9782290099766

Composition numérique réalisée par Facompo

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Présentation de l’éditeur :

Lucia Di Stefano enquête sur le meurtre de son père au côté de l’agent Jon Bocelli, qui semble prêt à tout pour la faire succomber. Layla Creed est, quantà elle, placée sous protection après avoir assisté à un meurtre. Devant se rendre à San Diego pour témoigner, elle est escortée par le Shadow Stalker BrianSimmons. Du côté des forces de police, Mica Greer et Colby Mathis s’allient afin d’arrêter un redoutable tueur en série ; des retrouvailles qui réveillent unepassion qu’ils croyaient à jamais éteinte.

Biographie de l’auteur :

Shayla BLACK, Sylvia DAY, Shiloh WALKER. Trois nouvelles délicieusement sensuelles au côté d’agents du FBI, écrites par les plus grandes auteuresde la romance.

Couverture : Marine Gérard d’après © Tooga / Getty

© Arresting Desire, Shelley Bradley LLC., 2012© Taking the Heat, Sylvia Day, 2011© The Unwilling, Shiloh Walker, Inc., 2012

Pour la traduction française :© Éditions J’ai lu, 2016

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Du même auteuraux Éditions J’ai lu

Shayla BLACK

Voluptés1 – Initiée, N° 11304

Sylvia DAY

Semi-poche

LA SÉRIE CROSSFIRE1 – Dévoile-moi2 – Regarde-moi3 – Enlace-moi4 – Fascine-moi

LA SÉRIE GEORGIAN1 – Si vous le demandez2 – Si vous aimez jouer

3 – Si vous m’embrassez4 – Si vous me provoquez

Mariée à un inconnu

Amours scandaleuses

Poche et numérique

Sept ans de désir, N° 11145

LA SÉRIE GEORGIAN1 – Si vous le demandez, N° 10629

LES ANGES RENÉGATS

0.5 – Sombre baiser, Numérique1 – Une note de pourpre, N° 10888

2 – Désir sauvage, N° 10930

LA MARQUE DES TÉNÈBRES1 – L’ange ou le démon, N° 11308

2 – De la trêve au combat, N° 11480

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LES SHADOW STALKERS1 – Absolument toi, Numérique

2 – Pas sans toi, Numérique3 – Toi ou rien, Numérique

4 – Juste pour toi, Numérique

Rejoins-moi à Vegas, Numérique

Anthologies

Incitations au plaisir, N° 11156Avec ou sans uniforme…, N° 11186

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SHAYLA BLACK

Tandem charnel1

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Remerciements

Merci à mes parents.Vous n’êtes pas de grands lecteurs, et vous avez l’esprit plutôt pragmatique, aussi le processus

de création vous laisse-t-il un peu dubitatifs. Merci de ne pas avoir pris peur quand j’ai décidé dequitter mon CDI pour entreprendre un métier moins rassurant. Et merci d’avoir pris conscience quel’écriture me rend vraiment heureuse. Même si je ne fais pas l’usage attendu de mon diplômeuniversitaire, qui vous a coûté un bras, je sais que ces années d’études ont contribué à ma réussiteactuelle ainsi qu’à mon bonheur. Votre amour et votre soutien me sont précieux.

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Calé dans un fauteuil à l’arrière du club enfumé, il observait d’un mauvais œil un coin de lapièce, où quatre hommes quasi nus se mouvaient autour d’une jeune femme assise sur un siège – unejolie rouquine qu’il avait en tête depuis deux ans. En fond, les enceintes crachaient une chanson d’ungoût douteux dans laquelle il était question du décolleté d’une fille.

— Tiens, tiens. Blade Bocelli ! s’exclama une voix familière.Il se retourna. Nicki Sullivan se tenait derrière lui. Elle portait un corset rouge en dentelle, une

minijupe moulante en cuir et des talons aiguilles. À son annulaire, une alliance sertie d’une pierreétincelante. Elle s’appuya contre le mur, un sourire mutin aux lèvres.

— Mon nom c’est Jon et tu le sais, rugit-il. Alors, fais-moi plaisir et cesse de m’appeler Blade,c’est ringard. D’accord ? Fini la période où je me faisais passer pour le bras droit de ton onclePietro pour infiltrer la Mafia. Je ne travaille plus sous couverture.

Nicki l’examina de pied en cap d’un air amusé.— Armani, hein ? Tu gagnes bien ta vie, dis-moi. Apparemment, le F.B.I. préfère que ses agents

portent le costume. Le cuir t’allait bien, pourtant.Jon se fichait de son opinion comme de l’an quarante.— Tu en as fait part à ton mari ?— Je te dis que ça t’allait bien, pas non plus que j’ai envie de toi. Mark est le seul qui compte à

mes yeux et il le sait, dit-elle en croisant les bras. Dis-moi, qu’est-ce qui t’amène à Vegas ? Le NewJersey, ce n’est pas la porte à côté.

— Comme je te l’ai dit au téléphone, il faut que je te parle. Je préférerais le faire en face à facepour éviter tout risque inutile.

Il jeta un nouveau coup d’œil vers la rouquine et, voyant l’un des danseurs agiter son sexe auvisage de la jeune fille, il jura dans sa barbe. Cette dernière se mit à glousser, visiblement gênée, et ilcrispa le poing.

— Quelque chose ne va pas ? demanda Nicki, feignant l’innocence.— Tu ne m’avais pas dit que ta sœur serait là.Elle haussa les épaules.— Tu ne m’as pas demandé.Non, il s’était retenu de le faire. Lucia DiStefano incarnait à la fois tous les interdits et tous ses

fantasmes. Elle n’était ni grande ni mince. Ce n’était pas une mangeuse d’hommes qui connaissait leKamasutra sur le bout des doigts. C’était une femme d’une extrême intelligence, davantage à lire leNational Geographic que Vogue. Il l’avait rencontrée deux ans plus tôt, alors qu’il travaillait ici

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même, sous une fausse identité. À la seconde où il avait posé les yeux sur Lucia, cette inconnue polieet élégante, Jon avait désiré réveiller la femme sensuelle qui sommeillait en elle.

— Elle fait ce qu’elle veut. Ce ne sont pas mes oignons, dit-il finalement.— Mais ça ne te dérangerait pas que ça le devienne, rétorqua la brune voluptueuse.Merde, il était si facile de le cerner ?!— Je suis venu te parler de ton père. De son testament.— Qu’est-ce que tu cherches ?Bonne question. Si Jon ne trouvait pas la réponse rapidement, son frère finirait ses jours dans une

prison hautement sécurisée pour le meurtre d’un juge fédéral, qu’il n’avait pas commis.— Je ne sais pas. Peut-être une sorte de support qu’il aurait utilisé pour stocker des vidéos de

caméra de surveillance. Un DVD, une clé USB, une carte mémoire…Nicki poussa un petit cri narquois.— Les fédéraux ont placé son bureau sur écoute pendant des années. Tu étais l’un d’eux. Tu ne

peux pas passer en revue tes propres fichiers ?Excellente idée, sauf que…— J’ai déjà envisagé cette piste. Ça n’a rien donné. Absolument rien. Les preuves qu’on avait

rassemblées ont toutes disparu. Et, peu de temps après mes premières recherches, mon supérieur m’aordonné de cesser de fourrer mon nez dans cette affaire.

— Ils savent que ton frère a été condamné pour le meurtre du juge Casale.— Stefan est innocent.— Tu veux me faire croire que c’est un enfant de chœur ?— Je ne me fais aucune illusion. Il était le tueur à gages favori de ton père, et à partir du moment

où on est dans la Mafia, on n’est pas un enfant de chœur. Mais Stefan n’a pas assassiné ce juge.— C’est lui qui t’a dit ça ?— Mon frère n’a pas ouvert la bouche.Mais Jon connaissait Stefan par cœur. S’il avait tiré deux balles dans la tête du juge, Stefan aurait

tout fait pour retourner auprès de sa « famille ». Au contraire, il semblait content de croupir enprison, comme si, pour une raison ou pour une autre, son frère tâchait de se faire oublier.

Mais pas question que Jon le laisse bousiller sa vie. Si Nicholas DiStefano, le père de Lucia,avait commandité un autre homme pour éliminer le juge Casale, il en avait probablement gardé unetrace, une preuve qui disculperait Stef. Étant donné que Nicholas et sa femme étaient séparés depuisun bon moment, à qui d’autre que ses filles cet homme aurait-il légué ses biens ?

— Mon père est décédé depuis quelques années déjà. Lucia et moi, nous avons trié ses effetspersonnels. Je ne me rappelle pas avoir trouvé le moindre enregistrement qui corresponde à ce que tume décris.

— Tous ses biens ont été pris en compte ?Nicki poussa un soupir. De toute évidence, elle n’appréciait pas ce petit interrogatoire.— Comment le saurais-je ? J’aimais mon père, mais il n’était pas du genre à se confier, même à

sa famille.Pas faux.— Nous n’avons jamais retrouvé les bijoux de ma grand-mère, poursuivit-elle. Ce qui a surtout

bouleversé ma sœur. Mama Antonella avait toujours promis à Lucia qu’elle lui donnerait sa bague defiançailles et le médaillon de sa propre mère. Mais ils ne figuraient pas parmi les affaires de monpère. Ils n’avaient pas de réelle valeur marchande. C’était surtout sentimental.

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Nicholas DiStefano avait su que ses jours étaient comptés. Il avait senti qu’un membre du gangGalimini, probablement son propre frère, cherchait à prendre sa place de chef. Peut-être Nicholasavait-il planqué les bijoux et les vidéos de sécurité au même endroit ? Jon reporta les yeux sur lascène, où un danseur vêtu d’un cache-sexe se penchait au-dessus de Lucia pour lui planter un baisersur la joue. L’envie irrépressible de casser la gueule à ce salopard le saisit.

Il tâcha de se concentrer sur sa mission.— Tu sais ce que sont devenus les bijoux, Nicki ?— Ce n’est pas comme si mon père avait eu besoin d’argent. C’est peu probable qu’il les ait

vendus ou mis au clou. J’en viens à me demander si oncle Pietro ne les a pas chipés pour les offrir àsa saleté de fille. Mais ce n’est qu’une hypothèse parmi d’autres.

Jon était sûr d’une chose : Pietro DiStefano remuait ciel et terre pour mettre la main sur unechose ayant appartenu à son frère aîné. Peut-être de l’argent. Ou bien une maîtresse accommodante. Àmoins qu’il ne s’agisse d’une chose plus compromettante… Et Jon avait une semaine de congé devantlui pour trouver une preuve capable de disculper son frère et lui éviter ainsi la condamnation àperpétuité – voire la peine de mort.

— Écoute…Nicki jeta un coup d’œil sur la scène. Elle arqua un sourcil en voyant un danseur embrasser Lucia

dans le cou.Jon se força à détourner les yeux de la rouquine.— Quoi ?— Si tu as fait tout ce trajet dans l’unique but de retrouver une vidéo, tu perds ton temps. En

revanche, si tu es venu pour ma sœur… tu tombes à pic, dit-elle en affichant un grand sourire.— Elle m’a l’air assez prise, fit-il remarquer d’un air jaloux.Et zut ! Il venait de se trahir.— Pas encore. Tu sais qu’elle fête ses vingt-cinq ans demain ?Jon déglutit avec peine. Non, il n’était pas au courant. Mais ça ne faisait que le conforter dans la

décision qu’il avait prise de ne pas la toucher, deux ans plus tôt. Même s’il n’avait que dix ans deplus que Lucia, elle lui semblait bien trop jeune. D’autant plus qu’ils n’avaient pas la mêmeexpérience. Dix ans, c’était l’équivalent d’un siècle.

— Alors les crétins qui se trémoussent à poil devant elle, c’est un cadeau d’anniversaire ?commenta-t-il en indiquant le groupe du menton.

— Non. Mes employés l’aiment bien, c’est tout.— Tant mieux, comme ça elle ne risque pas de passer son anniversaire en solitaire.Et franchement, ça l’agaçait. Nicki n’avait-elle pas conscience de la situation ? Deux ans plus tôt,

Jon s’était forcé à partir pour s’éloigner de Lucia. À l’époque, elle avait vingt-trois ans. C’étaitbeaucoup trop jeune pour ce qu’il avait eu envie de lui faire. Il lui avait suffi d’un regard pour savoirqu’elle était encore vierge. Et à présent qu’il la voyait rire d’un air embarrassé face aux danseursentreprenants, Jon se demandait si sa situation avait changé.

— Ta sœur est belle, adorable. Elle mérite un mec bien ; un type qui rentre à la maison tous lessoirs, borde les enfants et se blottisse contre elle sur le canapé. Autrement dit, je ne suis pas l’hommede la situation.

— Je ne t’ai pas dit de l’épouser et de la mettre en cloque. En revanche, tu pourrais peut-êtrel’inviter à boire un verre, un truc comme ça, histoire de bavarder un peu.

— Et tu penses que ça nous mènerait où, Nicki ?Elle haussa les épaules.

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— Vous passerez une bonne soirée. Et peut-être que ça se finira au lit, qui sait ?Il lui décocha un regard méfiant.— Tu m’encourages à coucher avec ta petite sœur ?Nicki dansa d’un pied sur l’autre, gênée.— Disons qu’elle n’a toujours pas vu le loup… mais que ça ne devrait plus tarder. Je… Eh bien

je me fais du souci pour elle.Pour sa part, Jon redoutait ce qui se passerait si jamais il se retrouvait en tête à tête avec Lucia

DiStefano, rien qu’un bref instant. Elle le rendait complètement dingue. Et à son boulot, il avaitsouvent dû y mêler le sexe ; et il avait donc eu son lot d’aventures. Du coup, il se méfiait. Il apprenaitmaintenant qu’elle était toujours vierge… À ses yeux, elle incarnait tout ce qu’il y avait de plus pur etinnocent. Des choses dont il avait grand besoin dans sa vie.

Super. Sauf qu’il risquerait de la souiller. Et il ne voulait pas être celui qui lui ferait perdre sesillusions.

— Tu veux savoir en quoi consistait ma dernière mission ? (Il se doutait que non mais il allaitquand même le lui dire.) J’ai dû contraindre une de mes analystes à se faire passer pour une clientesoumise dans une station balnéaire réservée aux pratiques BDSM. Je l’ai regardée se déshabiller. Jel’ai observée se faire fesser par un homme… et jouir dans les bras d’un autre – en même temps. Jel’ai regardée se faire flageller et caresser en public, puis j’ai dû l’envoyer dans un lieu où l’ons’adonne librement aux orgies et aux coups de fouet. J’imagine que pour ta sœur, une séance delecture de L’amant de Lady Chatterley lors d’un colloque universitaire est déjà trop osée. Je ne vaispas te mentir, j’aimerais être celui qui la déflorera. Mais elle mérite quelqu’un de plus chaste. Crois-moi, je lui rends service en la laissant tranquille.

— Allons, arrête ton char, répliqua Nicki en levant les yeux au ciel. D’accord, on l’a couvée. Etalors ? Elle est peut-être un peu candide mais ça ne veut pas dire qu’elle est en sucre. Si je te dis ça,c’est parce que je sais que tu as des sentiments pour elle. Et je pense qu’il vaut mieux qu’elle fasseça avec toi la première fois plutôt qu’avec un tocard ivre mort qu’elle aura rencontré dans ce stupideclub pour célibataires où elle va passer une semaine. Mais tu sais quoi ? Si tu es résolu à jouer lepreux chevalier qui se sacrifie, alors laisse-la partir aux Bahamas où elle se fera sauter par lepremier inconnu venu. Je glisserai une boîte de préservatifs dans sa valise et lui dirai de s’éclater àfond. (Nicki s’écarta du mur.) Si tu veux rester pour prendre une part de gâteau, tu es le bienvenu.Autrement, tu connais la sortie.

— Dites-moi, docteur DiStefano, murmura Ashley à l’oreille de Lucia, vous avez l’intention dele dévorer tout cru ou bien vous allez vous contenter de le reluquer avec envie comme un dessertinterdit ?

Aspirant une gorgée de son daïquiri, Lucia détacha son regard avec réticence de l’homme quidiscutait avec sa sœur.

— Je me demande juste ce que Jon Bocelli fabrique ici. Ça fait deux ans que je ne l’ai pas vu.Ashley écarquilla ses yeux bleus.— C’est lui, le fameux Jon ? Maintenant je comprends mieux pourquoi tu n’as pas lâché l’affaire.

Il est canon ! On s’en fiche de la raison de sa venue. Vas-y, fonce ! Tu as vingt-cinq ans et tu n’asjamais…

— Inutile de me le rappeler, murmura-t-elle d’un ton las. À l’heure qu’il est mon vagin est sansdoute couvert de toiles d’araignée.

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Elle observa longuement Jon, encore surprise de le voir ici. De toute évidence, il venait pour lesaffaires. Autrement, il n’aurait pas commencé par s’entretenir avec Nicki. Il était peu probable qu’ilsoit venu pour elle. Cela faisait deux ans qu’ils ne s’étaient pas croisés, et elle n’avait pas dû luilaisser un souvenir impérissable.

Il fallait qu’elle passe à autre chose. Ça ne serait pas de la tarte. Jon était le seul homme à l’avoirjamais intéressée, même s’ils avaient eu des rapports houleux. Deux ans plus tôt, il avait passé un étéà Las Vegas. Avec son corps musclé et son style italien, son cuir noir et son autorité naturelle, ill’avait rendue folle. À l’époque, il paradait dans le club de Nicki, sexy en diable. Il lui rappelait leshéros des romances qu’elle dévorait. Et puis un beau jour, sa mission avait pris fin et il avait disparusans un mot. À l’exception de sa tenue, rien n’avait changé. Il avait toujours autant de charisme.Pourquoi était-il de retour ?

— Jon Bocelli est hors de ma portée. Il appartient à un autre monde.Il pouvait conquérir n’importe quelle femme – et c’était sans doute ce qu’il avait fait –, des

femmes séduisantes et expérimentées, pleines d’assurance. Il n’avait qu’à claquer des doigts.— Il faut que j’arrête de fantasmer sur lui, reprit-elle. C’est mauvais pour moi. J’ai besoin d’un

bon programme de sevrage en douze étapes.— Tu te trompes peut-être, murmura Ashley. Chaque fois que tu tournes la tête, il t’observe. On a

l’impression qu’il va te bouffer sur place.— Pff, tu as trop bu. S’il me regarde, c’est parce qu’il se demande comment Nicki et moi

pouvons partager les mêmes gènes. Il me trouve sans doute nunuche.Ashley lui assena une tape affectueuse sur le bras.— Arrête un peu. Tu n’as rien d’une nunuche. Il faut que tu perdes cette fâcheuse tendance, tu

sais ?— À quoi ?Lucia contempla le fond de son cocktail avant d’en avaler la dernière gorgée.— Une fâcheuse tendance à te déprécier. Je t’ai vu faire une centaine de fois. Tu parles, tu ris, tu

pétilles en présence d’un mec. Et puis, à la seconde où il commence à te draguer, tu te fermes commeune huître, et tu perds toute confiance.

Lucia leva les yeux au plafond. Pourquoi fallait-il qu’Ashley aborde ce sujet ce soir ?— Les hommes sont polis, c’est tout. Je ne les attire pas. Ils aiment bien me parler. Je suis bon

public. Je ris à leurs blagues. Mais ils finissent toujours par sortir avec des filles minces et joliesavec un Q.I. dans la moyenne. Crois-moi, avec mes quinze kilos en trop et mes sujets de conversationd’intello, je les fais fuir. Qui a envie de débattre sur Napoléon ou Alexandre le Grand ? Si parmiracle ils restent malgré mes jambonneaux ou le fait que j’aie obtenu mon doctorat à vingt et unans… mon nom de famille finit de les achever.

Ashley poussa un soupir.— C’est toi qui mets systématiquement un frein dès que ça dépasse le champ de l’amitié. Crois-

moi, ça m’étonnerait que tes cuisses posent problème à ce cher Jon. Au contraire, à mon avis, ilaimerait bien s’insinuer entre elles.

— C’est sûrement toi qu’il regarde, répliqua Lucia.Et ce serait justifié. Ashley était grande et élancée ; sa longue chevelure blonde et bouclée

tombait en cascade sur son dos. Elle incarnait le fantasme masculin par excellence.— Non. Bocelli aime bien les courbes, ça se sent. Or tu as la chance d’avoir une forte poitrine.— Comment peux-tu affirmer ça ? Tu ne le connais même pas.

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— Parce que chaque fois que tu te tournes vers lui, il pose les yeux sur tes seins. (Sans lui laisserle temps de protester, Ashley poursuivit :) Et si on faisait un pari d’amis ?

— D’accord, répondit Lucia en tournant le dos à Jon et en prenant un air méfiant. Je t’écoute.— Quand il te parlera, encourage-le à bavarder, flirte avec lui, donne-lui l’impression qu’il a le

feu vert. Si ça ne marche pas et qu’il fait machine arrière, je m’engage à corriger ton dernier articlede recherche. Tu acceptes ?

Une offre plutôt alléchante. Ashley était une pro de la relecture. Et l’article que Lucia venaitd’achever était crucial pour sa carrière.

— Marché conclu. Mais sache une chose : s’il me lorgne, c’est parce qu’il se demande commentj’ai pu rentrer mon cul d’éléphant dans cette mini-robe noire. D’ailleurs, c’est la dernière fois quej’écoute tes conseils en matière de mode.

Ashley afficha un grand sourire.— Ma chérie, envisage un instant la possibilité qu’il t’apprécie. Je pense plutôt que tu le fais

bander comme un cerf et qu’il est en train de se demander comment il va s’y prendre pour t’ôter tapetite culotte.

— Bien sûr, rétorqua Lucia en levant les yeux au ciel. Tous les beaux gosses de Vegas cherchent àcoucher avec moi, c’est bien connu.

— Ça ne me surprendrait pas le moins du monde, doc, murmura une voix rocailleuse teintée d’unaccent du Jersey.

Son ventre se noua.Jon Bocelli.Mon Dieu ! songea-t-elle avec effroi. Pourvu qu’il n’ait pas entendu toute la conversation.Lucia se tourna lentement ; Jon la contemplait du haut de son mètre quatre-vingt, vêtu d’une

chemise bleu nuit, d’un pantalon noir et d’une veste assortie.Les battements du cœur de Lucia se précipitèrent, martelant ses côtes. Elle déglutit avec peine.

Une douleur sourde se déploya dans son ventre et se diffusa entre ses cuisses. Son regard s’égara. Ilremonta le long de son torse sculpté, de sa gorge dorée ; il glissa sur sa barbe naissante qui luidonnait un petit côté menaçant, puis s’attarda sur sa bouche sensuelle tout droit sortie de lacouverture d’un magazine. Leurs regards se rencontrèrent, le sien à lui était impénétrable, et ses yeuxnoirs comme la nuit. Lucia retint son souffle. Il avait l’air tellement sûr de lui… Elle faillit fondre surplace.

— Parle-lui, marmonna Ashley dans son oreille.Lui parler ? Elle était incapable d’articuler le moindre mot.— Bon, tout le monde ! s’écria Nicki dans un micro, brisant la magie du moment. L’heure est

venue pour la demoiselle d’ouvrir son cadeau d’anniversaire.Jon jeta un œil à sa sœur un bref instant, rompant le charme à son tour. Lucia, qui était en apnée

depuis plusieurs secondes, poussa un long soupir.— Bon, je n’ai pas le choix. Quand il faut y aller… murmura-t-elle. Ça m’a fait plaisir de te

revoir.Il la dévisagea.— Je reste encore un peu. Il faut que je te parle.Hum… de quoi au juste ?— OK… Pas de problème.— Lucia ! s’impatienta Nicki sur scène.

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Son mastodonte de mari, Mark, se tenait debout derrière elle, la main posée sur sa taille dans ungeste protecteur.

— Par ici, miss ! C’est ton anniversaire.Perchée sur ses talons de dix centimètres, Lucia s’avança de manière mal assurée. Elle avait

l’impression d’être engoncée dans sa robe noire un brin indécente. Elle alla s’installer dans lefauteuil prévu à cet effet, au centre de l’estrade. Nicki lui plaça un daïquiri frais dans la main.Nerveuse, Lucia en but aussitôt la moitié.

— Déballe tes cadeaux ! ordonna Nicki, en l’arrachant brutalement à ses pensées.Lucia posa son verre quasi vide et contempla la montagne de paquets placée devant elle. Elle se

mit à les déballer un à un.Les strip-teaseurs du club lui avaient offert un bon pour une journée de soins dans un spa luxueux

des environs. Nicki et Mark, une magnifique paire de boucles d’oreilles et un collier assorti. Uneboîte, sur le côté, retint son attention. Ni emballée ni assortie d’une carte de vœux.

Son père – paix à son âme – n’avait jamais empaqueté un seul de ses cadeaux, pas plus qu’iln’avait versé un centime à Hallmark.

Lucia fronça les sourcils en ramassant le coffret rectangulaire.Très étrange. Il tenait à peine sur ses genoux. Le carton était un peu terne et abîmé, comme s’il

était daté.Lucia se rembrunit.— Tu sais d’où vient celui-là ?— Oh, désolée, répondit Nicki. C’est Dalton Cahill qui l’a envoyé. C’est arrivé ce matin par la

Poste.— Le notaire de papa ?Nicki acquiesça en haussant les épaules.— J’ai trouvé ça bizarre aussi. Mais j’ai signé le récépissé.Dalton Cahill ne se manifestait que pour gérer le patrimoine légué par leur père. Jamais il ne les

avait contactées pour des raisons personnelles. Encore moins pour leur souhaiter un joyeuxanniversaire. Cahill était aussi chaleureux qu’une porte de prison.

Soucieuse, Lucia ôta le Scotch épais qui entourait le carton et en souleva le couvercle. Elleécarta le papier de soie et sentit les contours d’un élément dur et carré aux angles arrondis. Elleplongea les mains dans le carton et enroula les doigts autour de l’objet métallique. Elle le sortit de laboîte et découvrit un portrait photo dans un cadre argenté.

C’était un cliché de son père, peu avant son meurtre. Il posait avec son frère, l’oncle Pietro. Lesdeux hommes s’enlaçaient en souriant devant un restaurant italien, Chez Celeste. Lucia n’avait jamaisentendu parler de cet endroit. Elle eut un haut-le-cœur. Voir son père si souriant enlacer l’homme quiavait sans doute orchestré son assassinat… Ses yeux s’embuèrent.

Nicki s’approcha, se pencha en avant et la prit dans ses bras.— Oh, mon Dieu…À l’instant où sa sœur la serra contre elle, Lucia s’effondra et les larmes jaillirent. D’une main,

elle serra la photo contre sa poitrine. De l’autre, elle se couvrit la bouche. Mais cela ne suffit pas àretenir ses sanglots.

— Pourquoi Cahill t’a-t-il envoyé cette photo ? s’interrogea Nicki. Et pourquoi une photo depapa avec Pietro ?

— Est-ce que ça va ? s’enquit Mark en s’approchant.Lucia sécha ses larmes.

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— Ce n’est rien. Ça va aller. C’est seulement que… c’est la première fois depuis la mort de monpère que je reçois un objet lui ayant appartenu. Je ne m’y attendais pas du tout.

— Et puis c’est très étrange, murmura Nicki.Exactement. Pourquoi le notaire de son père lui avait-il envoyé pareille chose, surtout après tout

ce temps ?— Est-ce que tu as été en contact avec Dalton Cahill récemment ? demanda Nicki comme si elle

avait lu dans les pensées de sa sœur.Cette dernière réfléchit un instant.— Il m’a laissé un message il y a quelques semaines. Il voulait savoir si j’avais l’intention

d’aller à Atlantic City durant l’été. Il voulait qu’on déjeune ensemble. Je ne l’ai pas eu directementmais je l’ai informé de mon intention de venir ici.

Lucia releva la tête, sentant qu’on la regardait. Jon se tenait debout au fond de la salle. Plus d’unmètre quatre-vingt de testostérone. Il avait l’air à la fois inquiet et curieux. Visiblement, il avait desquestions à lui poser, et il comptait bien obtenir des réponses.

Parmi les montagnes de papier déchiré éparpillé sur la scène, il y avait le carton ayant contenu lecadre. Elle vit qu’un papier était scotché dessous. Elle ouvrit l’enveloppe. C’était un mot de DaltonCahill, écrit à la main.

Nicki se pencha par-dessus son épaule.— Qu’est-ce que ça dit ? demanda-t-elle, impatiente.

Chère mademoiselle DiStefano,Peu avant sa mort, votre père m’a prié de vous remettre ce paquet et son contenu à l’occasion de votre vingt-

cinquième anniversaire. Je vous fais donc parvenir cette boîte, conformément à son désir.

Cordialement,

D. Cahill

Son père avait chargé son notaire de cette mission avant son meurtre ? Remettre un paquet à l’unede ses filles des années après sa mort ? Un frisson la parcourut. Cela n’avait ni queue ni tête… Enmême temps, ce n’était pas la première fois que son père faisait quelque chose d’insensé à ses yeux.Il avait toujours agi dans le secret. Elle savait qu’il avait voulu la protéger du mieux possible dumonde corrompu dans lequel il évoluait. Un lien fort s’était établi entre eux. Elle l’avait aimé. Et luiaussi, à sa manière.

De nouvelles larmes lui montèrent aux yeux. Elle les essuya. Aujourd’hui, elle fêtait sonanniversaire. Elle célébrait la vie. Ashley n’avait pas fait le trajet en avion jusqu’à Las Vegas pourassister à un drame familial et la voir larmoyer. Le lendemain, elles devaient s’envoler toutes lesdeux direction les tropiques dans un club pour célibataires, Les Érotiques anonymes. Elles avaientprévu de se faire dorer la pilule sous les cocotiers et de faire des rencontres. Ce n’était pas lemoment de pleurnicher. Elle avait dû faire le deuil de son père, réapprendre à vivre sans lui. Mais detemps à autre, la douleur se ravivait et le chagrin la submergeait.

Peut-être avait-elle mal interprété le présent de son père. Il lui avait offert un souvenir. Pourqu’elle se rappelle les bons moments passés ensemble, et pas pour qu’elle pleure sa disparition.

Oui, mais… pourquoi cette photo en particulier ? Son père et elle avaient partagé une passionpour les énigmes. Ce cliché avait-il un sens caché ? Son père lui transmettait-il un message d’outre-tombe ?

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2

— C’est un cadeau très personnel, Lucia ! s’écria Nicki avec un peu trop d’enthousiasme, tâchantvisiblement de détendre l’atmosphère. Je sais que tu vas le conserver précieusement. Mais ce soir, ons’amuse. On fait la fête. Allez, dansons !

Le DJ lança une chanson de Katy Perry. Jon observa Lucia qui pressait la photo contre son cœurtout en refoulant ses larmes. Nicholas DiStefano avait beau avoir été une ordure de la pire espèceainsi que le patron de Stefan pendant des années, c’était le père de cette adorable jeune femme. Il nepouvait pas rester insensible à son chagrin.

À peine cinq minutes plus tôt, il croyait avoir fait tout ce chemin pour rien. Il se préparait déjà àdire adieu à Lucia.

Mais à présent… il se fiait à son intuition. Or il ne pouvait pas ignorer le cadeau posthume deNicholas DiStefano à sa fille. Il fallait qu’il creuse. Ça n’avait pas de sens. Pourquoi ne pasmentionner cette photo dans son testament ? Ou la laisser parmi ses effets personnels ? Ses fillesl’auraient récupérée à sa mort. Au lieu de quoi, comme s’il avait su que son meurtre était imminent,Nicholas DiStefano s’était arrangé avec son notaire pour que celui-ci remette la photo à Lucia desannées plus tard.

D’après les informations que Stefan lui avait fournies au sujet de son ex-patron, Jon enavait déduit que DiStefano était un homme intelligent et calculateur. Il avait certainement préparé cecadeau dans un but précis, c’était évident. Mais pour quelle raison ? Et pourquoi l’offrir à sabenjamine ? Rien n’indiquait à Jon que Lucia avait été plus proche de son père que Nicki. Ellesavaient beau être très différentes l’une et l’autre, elles étaient toutes deux chaleureuses etattentionnées. À supposer que Nicholas ait eu la même affection pour ses deux filles, pourquoi laisserun souvenir à Lucia et pas à Nicki ? Pourquoi oublier la fêtarde et…

Bingo ! S’il avait choisi Lucia, c’est parce qu’elle était brillante. Le pouls de Jon s’accéléra. Il yavait quelque chose à interpréter. Il le sentait. D’accord, il y avait peu de chances pour que le secret,quel qu’il soit, contenu dans cette photo puisse aider Stefan, mais c’était déjà mieux que rien. Et puis,il n’avait pas d’autre piste pour l’instant.

Pas question de quitter Las Vegas avant d’avoir approfondi celle-ci. Et puis il y avait Lucia.La jeune femme était bouleversée. Une autre larme coula le long de sa joue. Jon se précipita sur

la scène et s’agenouilla face à elle.— Lucia ?De près, il lut sur son visage à livre ouvert, devinant son trouble et sa peine. Quand elle porta le

regard vers lui, son cœur se serra davantage. Il chassa la larme qui coulait sur sa joue et cala une deses mèches rebelles derrière son oreille pour lui dégager les yeux. Elle baissa ses cils épais, passa

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sa main sur sa joue rose, puis rouvrit les paupières. Son iris doré lui fit l’effet d’une déchargeélectrique et un frisson se diffusa à travers ses veines comme une drogue.

Il avait à la fois envie de la protéger et de la caresser. Jon contracta les mâchoires. Il fallait qu’ilse concentre sur le cadeau. La vie de son frère était en jeu. En prison, ses jours étaient comptés.Pietro DiStefano n’était pas stupide. Il savait que Stefan avait une tonne d’informationscompromettantes sur lui et que si on lui proposait une remise de peine, il parlerait. Stefan était unhomme rusé ; il s’en était sorti jusque-là, mais ça n’allait pas durer éternellement. Pietro n’hésiteraitpas à le faire liquider, Jon en avait l’intime conviction.

— Ça va, bredouilla Lucia en se composant un sourire.— Tu en es sûre ? insista-t-il avec douceur.Elle hocha la tête et posa le cadre sur ses genoux.— Désolée de pleurnicher comme une gamine. C’est l’une des rares photos que j’ai de mon père.

Je ne… je ne m’attendais vraiment pas à la recevoir. Ça m’a fait un choc.Jon refréna son envie de prendre la jeune femme dans ses bras. À la place, il examina l’image.— Je comprends. Est-ce que tu es déjà allée dans le restaurant devant lequel la photo a été

prise ?Lucia secoua la tête.— Non. Je ne sais même pas où il se trouve.— Newark. (Jon était de plus en plus convaincu que ce cadeau n’était pas à prendre à la légère.)

On y mange bien.— Je l’ignorais. Je ne savais même pas qu’il se rendait dans cette banlieue du New Jersey,

ajouta-t-elle d’un air songeur.Il devina ses pensées. Elle se demandait sans doute pourquoi son père lui avait remis une photo

de lui posant devant un restaurant dont elle n’avait jamais entendu parler. Au côté de son assassinpotentiel, qui plus est.

Jon se posait les mêmes questions.— Je pense qu’il y a beaucoup de choses que tu ignorais sur ton père.— C’est un euphémisme, répliqua-t-elle en étudiant de nouveau la photo. Quand j’étais petite, on

me disait qu’il possédait une chaîne de pressings et de boîtes de nuit à Manhattan. Mais à la récré,dans mon école privée, j’entendais les enfants murmurer entre eux que mon père était un grand pontede la Mafia. Ça me faisait rire – jusqu’à ce que tu te mettes à enquêter sur ma famille.

— Je n’ai pas fait ça pour te blesser.Mais cela l’avait quand même heurtée, comme l’indiquaient les traces de douleur sur son visage.

Il aurait voulu la prendre sur ses genoux pour la réconforter… Mais il était venu pour son frère etdevait tâcher de garder cela à l’esprit.

Lucia poussa un long soupir.— Tu faisais ton travail. J’aurais seulement aimé que tu arrêtes l’assassin de mon père.— À ce propos… Est-ce qu’on pourrait parler en tête à tête ? demanda-t-il en lui tendant la main.Elle hésita puis la lui prit. Elle avait la peau douce comme celle d’un bébé et sentait

délicieusement bon. Jon se ressaisit. Il fallait à tout prix qu’il mette son sexe en sourdine et seconcentre sur sa mission.

Mais la petite bouche sensuelle de Lucia était si proche… Il pouvait presque goûter sur seslèvres le cocktail fruité qu’elle avait bu peu avant. Le souffle de la jeune femme était saccadé. L’idéede se retrouver seule avec lui la rendait apparemment quelque peu nerveuse. À cette pensée, le sangde Jon battit dans ses veines.

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Leurs regards se verrouillèrent. Le silence s’étendit entre eux. La musique de la salle s’estompaet les gens autour cessèrent d’exister. Il mourait d’envie de s’emparer de sa bouche et de couvrir soncorps de caresses. Il luttait pour garder son sang-froid, mais le courant qui passait entre eux était tropfort ; il l’échauffait, avivant dangereusement son désir. Lucia écarquilla les yeux comme si elle avaitconscience de toutes les choses coquines et interdites qu’il avait envie de lui faire…

Il fallait qu’il la convainque de le laisser examiner la photo. Cependant, quand il lui caressa ledos de la main et hasarda son regard dans le décolleté pigeonnant de sa petite robe noire sexy,l’enquête fut remisée dans un coin de son esprit. Ses yeux s’aventurèrent plus bas, sur ses hanchesrondes et ses cuisses galbées, et il se sentit faiblir. Elle avait cinq secondes pour rompre le charmeavant qu’il ne perde totalement le contrôle de lui-même.

— Le bar se trouve à l’arrière, bafouilla-t-elle.Les enceintes crachaient une musique puissante qui se diffusait dans l’ensemble du club.Il secoua la tête.— Un endroit plus calme.Elle fut surprise par sa requête. Jon afficha un air plus doux. Peut-être que c’était une femme,

mais en termes d’expérience avec les hommes c’était encore une gamine et il fallait qu’il veille à nepas lui faire peur.

— Le bureau de ma sœur…— … se trouve juste au-dessus de la cabine du DJ. Ça résonne comme dans une caisse là-haut.Sans oublier que le club entier pouvait voir ce qui se passait à l’intérieur de la pièce. Jon tenait à

examiner la photo à l’abri des regards. Comme il avait travaillé dans cet établissement à l’époque oùil avait infiltré le gang, il savait que le bâtiment abritait des appartements vacants à l’étage.

Elle hocha la tête ; Jon se mit debout, puis l’aida à se lever.— Suis-moi, dit-il.D’un bond, il quitta la scène, évitant ainsi les couples de danseurs qui bloquaient les marches de

l’escalier à l’extrémité. Puis il se tourna vers Lucia et leva les bras dans sa direction.Elle hésita.— Je suis trop lourde.— N’importe quoi. Saute, dit-il fermement.— Je ne suis pas sûre de pouvoir avec mes talons.— Je te rattrape, promit-il. Fais-moi confiance. Allez, passe-moi le cadre et saute dans mes bras.Lucia réfléchit un instant avant de se lancer. Elle atterrit contre lui ; sa poitrine s’écrasa contre

son torse. D’instinct, il l’enlaça à la taille, effleurant la rondeur de ses fesses magnifiques.C’était la première fois qu’il était si proche d’elle et ce contact l’émoustilla. Deux ans plus tôt,

Lucia avait bien failli le faire craquer. Aujourd’hui, elle lui faisait carrément perdre ses moyens. Il laserra plus fort contre lui et enfouit son visage dans sa chevelure. Elle exhalait un parfum musqué mêléd’une note de fruits rouges. La fraise, songea-t-il. Son odeur l’enivra. Il eut envie de la plaquer contrele mur le plus proche et de faire d’elle ce qu’il voudrait.

Il inhala encore son parfum et le musc lui parut plus fort qu’avant. Alors il comprit ce que çavoulait dire : Lucia était excitée.

La bête en lui mourait d’envie de la déshabiller et de se placer entre ses cuisses.« Laisse-la s’envoler pour les Bahamas où elle se fera sauter par un inconnu. Je glisserai une

boîte de préservatifs dans sa valise… » Les paroles cinglantes de Nicki résonnèrent dans sa tête. Sonestomac se noua. Lucia devrait sans doute trouver un homme de son âge et explorer sa propresexualité. Mais l’idée qu’un autre la touche, la déshabille et lui prenne sa virginité le rendait fou.

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Décidément, il était vraiment à cran. Il fallait qu’il lâche un peu de lest.Jon s’écarta et, d’un geste, invita Lucia à se diriger vers l’arrière du club, un sourire affable aux

lèvres. Elle hésita une seconde avant d’obtempérer. Elle marcha devant lui. Enfin, elle se dandinaitplus qu’elle ne marchait en vérité car sa petite robe soulignait les mouvements de son bassin et laforçait à onduler des hanches. Le tissu ajusté lui moulait les fesses ; les yeux rivés à son postérieur, ilfaillit l’entraîner dans la cage d’escalier, la clouer contre un mur et l’embrasser avidement. Au lieude quoi il la guida gentiment vers les marches situées derrière le bar. La porte se referma derrièreeux et il alluma la lumière pour s’orienter dans le noir.

Mais ce fut un supplice pour lui de gravir l’escalier derrière elle. Au bout de trois étages, sonsexe se mit à enfler contre sa braguette. Désir, colère, manque… autant d’émotions qui sedéchaînaient en lui. Il fit son possible pour les étouffer. Parvenu au dernier étage, il la conduisitjusqu’à l’appartement en partie meublé où il avait vécu deux étés plus tôt.

Ignorant le lit dans la pièce voisine, Jon alluma les lampes et invita Lucia à s’asseoir sur le sofa.Il prit place à l’autre extrémité. Il la sonda.

— Ça fait un bail, doc, bredouilla-t-il.Il jura dans sa barbe. Il avait beau avoir affronté les pires criminels sans jamais se démonter,

cette femme le décontenançait. Il en perdait ses mots.— Effectivement. Raconte-moi un peu ce que tu es devenu depuis tout ce temps.— J’ai été très occupé. Un paquet d’affaires pas très réjouissantes.Il voulut apaiser la tension qui régnait, se remettre au travail. La faire sourire. Oui, il aurait bien

aimé la détendre. Malheureusement, il ne trouva rien. Aussi, sans transition, il saisit le cadre etdemanda :

— Tu ne saurais pas, par hasard, pourquoi ton père t’a laissé ça ?— Aucune idée. Je n’arrive pas non plus à comprendre pourquoi il a demandé à son avocat de

me le remettre aujourd’hui.Jon marqua un temps d’hésitation. Le fait qu’elle parte en vacances le lendemain – dans un club

où elle avait l’intention de laisser des inconnus lui payer des verres et lui voler son innocence –n’augurait rien de bon pour ses projets. Comment allait-il la convaincre de l’aider à résoudre cettehistoire ? Il fallait quand même qu’il essaie, la vie de son frère était en jeu. Et puis, il était quasimentcertain que cela pourrait lui être bénéfique à elle aussi.

— Songe aux raisons qui l’auraient poussé à te l’envoyer à toi et pas à ta sœur.— J’ai le sentiment qu’il me soumet une sorte d’énigme. Mon père n’était pas un homme

chaleureux mais, quand j’étais petite, je me faufilais sur ses genoux et nous faisions des jeuxensemble. Toutes sortes de jeux – mots croisés, anagrammes, recherches de mots, puzzles,modèles 3D. À mon adolescence, il me mettait au défi de résoudre des énigmes, de décrypter descodes. (Elle sourit.) Il était très fier. Il disait que si j’avais vécu pendant la Seconde Guerre mondialeet que j’avais été espionne, j’aurais été capable de désencoder les codes japonais et allemands. (Sonsourire s’évanouit.) Puis je suis partie en pension, et on ne s’est plus trop vus.

— Tu avais quel âge ?— Neuf ans. (Ses lèvres se retroussèrent légèrement.) Avant cela, je n’avais pas conscience

d’être différente. Je ne voyais pas qu’il était rare qu’une collégienne choisisse de faire une fiche delecture sur Guerre et paix.

— Neuf ans, ce n’est pas un peu jeune pour le collège ?— J’ai commencé à sauter des classes très tôt. Mais même là, les profs ne savaient pas trop quoi

faire de moi. S’ils me posaient trop de questions, mes camarades se moquaient de moi. Pff ! De toute

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façon, j’étais la tête de Turc de ma classe.— Du coup, tes parents t’ont envoyée à Westover ?Lucia inclina la tête et lui décocha un regard perçant.— Comment es-tu au courant de ça ?Jon baissa les yeux. Ses joues le brûlaient. Était-il vraiment en train de rougir ? Gêné, il se massa

la nuque.— Euh, disons que j’ai effectué des recherches sur toute ta famille. Pour ma mission, il y a

quelques années de ça.Elle afficha un air sceptique mais elle ne lui posa pas davantage de questions. Elle reprit :— Je passais les vacances d’été avec papa et durant ces moments-là, nous avions l’habitude de

faire des casse-tête. Puis j’ai commencé ma thèse, et mon emploi du temps était trop chargé. Monpère s’est éloigné. Mais avant, il m’a donné un dernier code à déchiffrer. Quand je l’ai résolu, lemessage disait : « Je t’aime, ma petite fille. » Un mois plus tard, il est mort.

Lucia ferma les yeux pour faire barrage à son chagrin. Jon compatissait. Il avait lui-même perduson père de très bonne heure ainsi que de nombreux amis et collègues. Il comprenait sa peine.

Il se rapprocha d’elle, lui saisit la main et lui caressa l’épaule avec tendresse.— Je sais que c’est dur de repenser à tout ça. Désolé de le faire le jour de ton anniversaire. Je ne

voulais pas remuer le couteau dans la plaie.Elle s’efforça de sourire.— C’est triste, Jon, mais je ne vais pas m’effondrer. Je ne suis pas si fragile.Nicki avait affirmé la même chose de sa sœur plus tôt. Tant mieux. Si le cadeau de son père était

une énigme à résoudre, Lucia allait avoir besoin de force et de cran. Cette histoire risquait de prendreune tournure à la fois dangereuse et pesante, sur le plan émotionnel.

— Le problème, c’est qu’on ignore quel message ton père a voulu te transmettre. Est-ce que ça tedérange si j’examine le cliché de plus près ?

— J’avais l’intention de le faire après la soirée.Jon lut entre les lignes : elle voulait le faire seule. Disculper son frère était l’une de ses priorités,

mais il n’allait pas le faire au détriment de Lucia. Il tenait à épargner ses sentiments du mieuxpossible.

Il lui rendit le cadre.— Si tu préfères, je peux sortir une minute…— C’est bon… Vas-y, dit-elle en le lui rendant.Visiblement, elle lui faisait confiance ; elle acceptait de partager cette épreuve avec lui.Il retourna l’objet et s’aperçut qu’il avait été scellé avec de la cire. Inhabituel. Nicholas

DiStefano voulait-il s’assurer que son notaire n’y touche pas ? Peut-être. Cet homme s’était toujoursmontré très prudent, pas très étonnant pour un mafieux.

Jon sortit un canif de sa poche et brisa le sceau avec précaution. Le dos du cadre, tapissé develours bleu, se détacha. Il le retira facilement et inspecta l’envers de la photo. Il arrivait parfois quel’ancienne génération y inscrive des noms, des dates – des détails importants. Mais le verso dudocument était d’un blanc immaculé comme si la photo avait été imprimée depuis un ordinateur.

Au bas du cadre, en revanche, se trouvaient deux petits éléments qui le firent frissonner. Il étaitsur la bonne piste.

Il recueillit le premier, un minuscule morceau de papier sur lequel était écrite une série dechiffres au stylo, et le tendit à Lucia.

— Ça te dit quelque chose ?

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Elle le prit et l’examina d’un air incrédule.— C’est un code secret que je dois élucider. Encore faut-il mettre la main sur ce à quoi il se

rapporte. Et je n’ai aucune idée de la méthode de chiffrement qu’il a utilisée. Il changeaitrégulièrement. (Elle sourit d’un air songeur.) Il aimait bien me tenir en haleine.

Puis Jon sortit une petite clé en argent du cadre, qu’il brandit face à elle.— On dirait la clé d’un cadenas.Lucia la scruta.— En effet. Mais je ne sais pas du tout ce qu’elle ouvre. Il n’y a jamais fait allusion.Le chagrin se peignit à nouveau sur ses traits ; Jon lui prit la main et la pressa gentiment.— À mon avis, la réponse à cette question ainsi que le cadenas se trouvent près de Chez Celeste.— Oui, dit-elle en observant la photo. Ça ne m’étonnerait pas de lui.— C’est peut-être risqué, Lucia.Mieux valait la prévenir.Elle lui décocha un regard noir.— Je suis sans doute naïve, mais pas idiote.— Tu sais si Pietro a joué un rôle dans la mort de ton père ?Lucia le dévisagea en silence. Un voile de tristesse passa sur son visage.— Je le soupçonne d’en être responsable. Pour l’instant, je n’ai aucune preuve. Mais un jour, j’en

aurai. Il t’a avoué y être pour quelque chose lorsque tu travaillais pour lui. Quand tu étais souscouverture ?

— Non. Il faisait seulement des allusions. Un coup de coude, un ricanement, mais rien de clair.Une chose est sûre, il n’a pas versé une seule larme à la mort de Nicholas. Je n’ai rien qui tienne laroute devant un juge pour le moment. (Jon pesa ses mots.) Écoute, je pense que ton père t’a envoyécette photo dans un but précis. Comme s’il avait voulu te mettre sur la piste de son meurtrier.

— Évidemment. Papa n’était pas un grand sentimental. S’il avait voulu m’offrir un cadeau, ilm’aurait fait parvenir un truc bling bling, dit-elle en riant. Je doute qu’il ait jamais rien compris auxfemmes. Il partait du principe que nous étions toutes dingues de diamants.

Jon savait que Lucia n’était pas de ce genre.— Tu as donc toute une collection de bijoux que tu n’as jamais portés ?Elle battit des cils en esquissant un sourire.— Ils sont jolis mais…— Nicki est plus sensible à ces choses-là que toi, devina-t-il.Elle acquiesça d’un hochement de tête.— Ma mère avait pour habitude de m’envoyer des livres. Ses cadeaux me faisaient beaucoup

plus plaisir que ceux de mon père. Mais il me semble que je vois où tu veux en venir. Cette photo estplus qu’étrange. Primo, Pietro y figure au côté de papa alors qu’ils n’étaient pas en bons termes.Secundo, je trouve curieux qu’il m’ait donné ce document à moi, ainsi, avec un code secret et uneclé… Du coup, oui, je suis certaine qu’il cherche à me transmettre un message important.

— D’après mon frère, ton père craignait que Pietro ne veuille l’éliminer. Pour protéger sesintérêts et t’empêcher de découvrir la vérité, il serait capable de te liquider aussi. La question est lasuivante : est-ce que tu te sens apte à élucider ce mystère ? Je suis prêt à t’aider.

Elle parut soudain nerveuse.— Écoute, dès mon retour de vacances. Je… je t’appellerai et on pourra se voir. Enfin, se

retrouver et…

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— Ça ne va pas être possible, Lucia. Ça fait presque quatre ans que ton père a été assassiné. Tuveux vraiment attendre davantage avant de résoudre cette histoire ? Si ton père s’est arrangé pour tefaire parvenir cet indice maintenant, c’est peut-être parce qu’il y a urgence. Je ne pourrai pas t’aideraprès. Je n’ai que cette semaine devant moi.

Elle fronça les sourcils.— Ton supérieur t’a donné une échéance ?Lucia n’allait sans doute pas apprécier, mais il devait jouer cartes sur table.— Je suis en congé. Je suis ici pour des raisons personnelles.— Ton frère ?Il hocha la tête.— Stefan risque la prison à perpétuité. D’accord, il n’est pas blanc comme neige et il faut qu’il

paie pour ses erreurs. Mais il ne mérite pas de se faire poignarder comme un animal dans la courd’une prison. C’est la seule famille qu’il me reste.

Lucia parut navrée.— Je ne peux pas laisser tomber Ashley à la dernière minute. Elle a posé des congés exprès et

avancé beaucoup d’argent… (Elle fit la moue, implorant sa compréhension.) Si tu veux, tu n’as qu’àcommencer à enquêter pendant mon absence. Je prendrai la suite à mon retour. Je suis douée pour larecherche…

— Non.Dans un sens, il songea que cela ne serait pas plus mal. Jon aimait bien travailler seul et Lucia

n’avait pas l’habitude des situations périlleuses. Mais il avait besoin de son aide pour déchiffrer lecode secret. Nicholas n’avait pas envoyé ces indices à la police ou au FBI. Il les avait transmis à safille. Ce n’était pas par hasard. Or il serait dangereux qu’elle se lance dans la résolution de cetteénigme seule. Il allait devoir assurer sa protection.

— Il faut que tu viennes avec moi sans attendre.— Jon, je viens de t’expliquer… ce n’est pas possible. Dès mon retour, d’accord. En fait, j’aurai

tout le reste de l’été pour m’y consacrer.— Eh bien, moi, non. Mon frère non plus, d’ailleurs. Et franchement, tu penses que ton père aurait

apprécié ça ? Que tu mettes de côté cette affaire pour aller passer du bon temps dans un clublibertin ? Un club où tu te feras dépuceler par le premier tocard venu ?!

Certes, ce n’était pas très classe. Mais le temps pressait et la politesse était le cadet de sessoucis.

Et puis, ce n’était pas la seule raison. Il n’allait pas rester les bras croisés pendant qu’un autre enprofiterait. Jon l’admettait enfin. S’il l’avait quittée deux ans plus tôt, il avait toujours entretenul’espoir qu’un jour leurs chemins se croiseraient de nouveau. Elle serait alors plus âgée et prête àvivre quelque chose avec lui… Aussi l’idée qu’elle puisse lui échapper une seconde fois le mettait-elle hors de lui.

— C’est mesquin et grossier ! s’indigna-t-elle.— C’est la vérité. À moins que tu ne veuilles me faire avaler le contraire ?Elle serra les dents.— Non mais je rêve, ma sœur t’a dit où j’allais et ce que j’avais prévu d’y faire ?! Enfin, ça ne te

regarde pas. Tu as eu ta chance. Il y a deux ans, je me suis jetée à tes pieds et tu n’as rien vu. C’étaittellement gênant…

En un éclair, Jon se rua sur elle et s’empara de sa bouche, la réduisant au silence. Il alla droit aubut, forçant Lucia à entrouvrir les lèvres pour accueillir sa langue et mettant dans ce baiser tout le

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désir qu’il avait accumulé en l’espace de deux ans.Le souffle court, Lucia s’agrippa à l’encolure de sa veste et l’attira contre elle. Ciel, elle avait le

goût du rhum et des fruits tropicaux. Une bouffée de désir le balaya et, sans réfléchir, il s’allongea surson corps. Il enroula ses bras autour de sa taille et s’empara de ses fesses voluptueuses à pleinesmains, plaquant son ventre contre le sien, fichant son sexe au creux de son ventre.

Il entremêla sa langue à la sienne, lui arrachant un gémissement. Elle ne manifesta pas la moindreréticence, et Jon avait l’impression qu’il allait exploser si jamais il ne la touchait pas vite. Il sentitses seins se tendre ; ses tétons pointèrent contre son torse. Elle caressa sa langue avec la sienne. Iln’en pouvait plus. Son baiser devint fougueux et elle noua ses mains autour de son cou.

Son sexe déjà érigé devint dur comme du granit. Sa braguette s’imprimait douloureusement danssa peau. Ses veines s’embrasèrent. Il ignorait s’il trouverait la force de s’arrêter.

Mince, il perdait totalement le contrôle de la situation. Il la désirait de tout son être mais il nevoulait pas que ça se fasse comme ça, sur un canapé après s’être éclipsé d’une fête comme desadolescents coupables. Il ne voulait pas la prendre en toute hâte sans aucune délicatesse, à demidévêtue. Non, il préférait la posséder nue dans un lit, et faire de sa première fois une expériencedouce et inoubliable. Ensuite seulement il passerait aux choses sérieuses. Il l’attacherait à sa tête delit et repousserait ses limites, les unes après les autres.

Jon détacha ses lèvres des siennes.— Crois-moi, doc, je m’en étais aperçu.Lucia le dévisagea en clignant les yeux. Elle resta sans voix pendant un long moment, le souffle

légèrement saccadé.— Tu ne m’as jamais donné aucun signe…— J’étais sous couverture. Ton oncle m’avait chargé d’assurer la protection de Nicki. Et la

tienne, à la seconde où tu as posé le pied à Vegas. Si j’avais eu ne serait-ce qu’un regard déplacé, ilm’aurait tué. Et ma mission serait tombée à l’eau. Crois-moi, j’avais remarqué que tu m’aimais bien.Et tu me plaisais beaucoup.

Lucia baissa les yeux. Ses joues rosirent de manière adorable. Puis son visage changead’expression. Ses yeux s’étrécirent et elle le foudroya soudain du regard.

— Je ne suis pas dupe, Jon. C’est de la manipulation. Tu me flattes uniquement parce que tu asbesoin de mon aide pour disculper ton frère.

Elle saisit le cadre et son contenu, replaça la photo et le referma d’une main tremblante. Puis ellese leva.

— Qu’est-ce que je peux être stupide par moments ! s’emporta-t-elle en se dirigeant vers laporte.

Déconcerté, Jon lui emboîta le pas.— Qu’est-ce que tu racontes ? Mon désir pour toi n’a rien à voir avec cette affaire.— Bien sûr, répliqua-t-elle d’un ton sarcastique en ouvrant brutalement la porte. Tu sais quoi ? Il

y a une salle pleine de personnes qui m’aiment sincèrement et ne souhaitent que mon bonheur en bas,et je les ai quittés pour toi, pour que tu essaies de m’embobiner. J’en ai assez. Je ne te raccompagnepas, tu connais la sortie.

Elle croyait qu’il avait tenté de la séduire pour obtenir sa coopération ? Dès que l’occasion seprésenterait, il lui prouverait à quel point elle avait tort. Elle ne perdait rien pour attendre.

— Arrête-toi.Lucia se figea un instant sur le seuil de la pièce et tourna la tête vers lui. Son joli minois était

déformé par la colère. Pourtant, elle lui avait obéi. Ce qu’il ne put s’empêcher de remarquer. Et cela

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l’excita.— J’ai besoin de ton aide, oui. Mais ça n’a rien à voir avec mon désir pour toi.— Tu as sacrifié deux ans de ta vie pour une mission dans le plus total anonymat À côté de ça,

faire mine de me désirer pour tirer profit de moi et faire avancer ton affaire, ce doit être du gâteau. Jene te laisserai pas me faire du mal encore une fois. Adieu, Jon.

Elle sortit dans le couloir et claqua la porte derrière elle.Furieux, Jon s’élança à sa suite. Il passa devant elle et lui bloqua le passage.— Je suis prêt à tout pour disculper mon frère. Mais je vais également te prouver la sincérité de

mes sentiments pour toi. Nous allons suivre la piste que ton père nous a laissée – cette semaine. Pasquestion que tu t’envoles pour les Bahamas. Pas question que tu te fasses dépuceler là-bas par lepremier imbécile venu.

Il lui saisit le poignet.Lucia était hors d’elle.— Pousse-toi de mon chemin.— Non, tu viens avec moi, fin de la discussion.— Va au diable !— Tu ne me laisses pas le choix, Lucia…Rapide comme l’éclair, il la souleva et la jeta sur son épaule.— Mais tu es fou ? Qu’est-ce que tu fais ? s’écria-t-elle.— Je te l’ai dit. Tu m’accompagnes, un point c’est tout.Il s’appuya sur la rambarde d’une main. Il plaça l’autre sur sa cuisse pour la maintenir en

équilibre.Bon sang, il était impatient de l’étendre sur le dos et de la dévêtir ! Il n’était sûrement pas le

mieux placé pour répondre à ses attentes de vierge effarouchée, mais il la traiterait avec plusd’égards que les salopards qui sillonnaient les clubs de vacances pour célibataires et avec qui elleaurait une aventure sans lendemain. Ensemble, ils allaient remonter la piste que Nicholas avaitlaissée. Pourvu qu’elle lui permette aussi de prouver que Stefan n’avait pas tué le juge… De toutefaçon, il était hors de question qu’il laisse Lucia mener sa petite enquête toute seule. C’était troprisqué.

Lorsqu’ils parvinrent au pied de l’escalier et regagnèrent le club, la jeune femme se mit à hurler àtue-tête. La musique cessa et tous les yeux se braquèrent sur eux.

— Qu’est-ce que tu fais, Jon ? s’étonna Nicki en s’approchant d’eux.— J’embarque ta sœur. Nous avons des choses à régler.— Voyons, Nicki, dis quelque chose ! Ne le laisse pas faire ! C’est ridicule ! Je ne veux pas y

aller. Je pars en vacances demain avec Ashley. Nous avons déjà payé notre séjour…Jon la fit taire d’une claque sur les fesses. Il en avait assez de son discours.— Va au diable ! rugit-elle, furieuse.Nicki afficha un sourire amusé.— Passez me voir à votre retour. Amusez-vous bien.— Tu ne cautionnes quand même pas ça, Nicki ! protesta Lucia. C’est du kidnapping.— J’ai l’impression que si, doc, répliqua Jon avec un sourire.— Ashley ! hurla Lucia.Son amie vint se placer près d’eux et pencha la tête à la hauteur de son visage, un grand sourire

aux lèvres.— Toi aussi, tu approuves ? l’interrogea Lucia d’un ton incrédule.

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— Bien sûr. Ne t’en fais pas. Je n’ai pas besoin que tu me tiennes la main aux Érotiquesanonymes. Je suis une grande fille, répondit Ashley en remuant les sourcils. On se verra à mon retour.

Jon parcourut la salle du regard pour savoir si quelqu’un dans l’assistance contestait sa décision.Visiblement, Mark, le mari de Nicki, était le seul à y voir une objection.

— Vous avez quelque chose à dire ?Il grommela.— Prenez soin d’elle. C’est une fille bien.Jon hocha la tête.— Évidemment.Lucia gigotait sur son épaule, se débattant à coups de poing et de pied pour tenter de se libérer. Il

lui fessa encore le derrière et quitta le club pour retrouver la chaleur de la nuit. Il se dirigea droitvers sa voiture de location.

— Tu n’as pas le droit de m’emmener de force comme ça… Et puis, comment as-tu l’intention det’y prendre pour me ramener dans le New Jersey ? À l’instant où on mettra le pied à l’aéroport, jedonnerai l’alerte en hurlant à tous les agents de sécurité qui se trouveront dans un rayon de centmètres.

— Merci de me prévenir, doc. J’ai un super plan de secours. Pendant ce temps-là, essaie dedécrypter le message codé de ton père… et songe à toutes les caresses que je vais te prodiguer dèsqu’on aura trouvé un lit.

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3

Dans le cockpit du petit avion, Lucia observait Jon à la dérobée. Aux commandes, il actionnaittout un tas de boutons sur le tableau de bord afin de couper le moteur. La terreur qui l’avait tenailléedurant toute la durée du vol se désagrégea peu à peu.

— Tu peux lâcher les accoudoirs. On est arrivés.Elle posa les yeux sur ses mains et s’aperçut qu’elles étaient blanches et à moitié engourdies.

Elle les secoua.— J’ai eu la trouille de ma vie.— Je suis un pilote aguerri, Lucia. Je t’ai amenée jusqu’ici en un seul morceau.— Je n’aime pas trop l’avion. Encore moins quand l’appareil est petit.— Je ne voulais pas te faire peur. Tu n’as rien à craindre de moi, je ne te ferai jamais le moindre

mal. Tu le sais, hein ? dit-il en l’interrogeant du regard, les yeux brillants. À mon avis, tu es surtoutfurax que j’aie coupé court à ta petite fête d’anniversaire.

— Ce n’est pas comme si j’avais eu mon mot à dire.Jon avait du cran et du culot. Il en fallait pour infiltrer la Mafia sous couverture pendant plus de

deux ans. Mais enlever une femme sous les yeux de sa famille et de ses amis en lui annonçant qu’ilavait l’intention de la dépuceler ? Il fallait qu’il soit fou.

— Désolé. J’ai l’habitude de me confronter à des criminels. Mes bonnes manières doivent êtrerouillées.

Elle croisa les bras sur sa poitrine.— Je veux retourner à Las Vegas. Mon vol pour les Bahamas est prévu dans la matinée.— Tu restes avec moi, point barre. Nous allons élucider cette énigme. Je veillerai

personnellement à ce que tu ne le regrettes pas. Tu as faim ?— Non.Elle prit conscience qu’elle n’était pas très agréable et fit la grimace. Sa présence et son ton

autoritaire la titillaient et réveillaient sa féminité entre ses cuisses, et elle n’aimait pas ça. Sesmanières despotiques auraient dû la révolter. En plus, il avait beau tenter de la rassurer, elle craignaitque son prétendu désir pour elle ne soit rien de plus qu’une tactique pour obtenir sa coopération.Qu’elle tâche de s’en souvenir la prochaine fois qu’il la toucherait.

— Bien sûr que si, tu as faim, rétorqua-t-il en se tournant vers elle, les mâchoires crispées.Écoute, on a du boulot mais j’ai quand même l’intention de t’accorder un peu de temps. Je tiens à ceque ta première fois soit tendre et agréable…

— Tu pars du principe que je vais dire oui…Il haussa ses larges épaules.

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— Soit. Lorsque tu te retrouveras en dessous de moi et que je serai en train de couvrir ton corpsde baisers… eh bien, si ça ne t’intéresse pas, n’hésite pas à me dire non. Mais si tu continues à mementir je vais te fesser jusqu’à ce que tu apprennes à être franche.

— C’est comme ça que tu t’y prends ?Son cœur se mit à battre la chamade à l’idée qu’il puisse réaliser certains de ses fantasmes

inavoués.Jon haussa un sourcil.— Si ta question est : « Suis-je dominant ? » la réponse est oui. Pas tout le temps. Pas chaque

fois que je fais l’amour. Mais en général, oui. En plus, à mon avis, tu es soumise. Alors je pense quenous allons très bien nous entendre.

Soumise ? Oui. Elle s’en était rendu compte il y avait déjà un petit bout de temps. Ces cinqdernières années, même si elle appréciait tout type de littérature, elle avait lu une grande majorité deromances érotiques, la plupart se déroulant dans l’univers BDSM. Elle savait déjà qu’elle n’était pasinsensible à l’idée d’un mâle dominant. Mais se faire fesser ? Un frisson la parcourut. Son tonmenaçant l’émoustillait. Est-ce que la réalité l’exciterait tout autant ? Peut-être. Enfin, elle n’allaitpas tout accepter. Elle était peut-être soumise, mais elle n’était pas un paillasson pour autant.

— Va te faire voir, dit-elle entre ses dents serrées.Elle tenterait l’expérience un jour, de préférence avec un homme qui ne se servirait pas d’elle

pour parvenir à ses fins.Jon éclata de rire.— Maintenant tu fais la capricieuse pour que je te punisse. Il me tarde de le faire. Ça fait des

années que je te considère comme étant hors de ma portée. Du coup, ça m’enchante de savoir que,bientôt, je vais te faire connaître tous les plaisirs qui hantent mon esprit obscène.

Le moteur finit par ralentir et Lucia détacha sa ceinture et quitta précipitamment le cockpit pourrejoindre la cabine du petit avion de ligne. Elle se campa devant la porte.

— Laisse-moi sortir. Je vais prendre un taxi jusqu’à Newark et j’attraperai le prochain vol pourles Bahamas.

— Tu ne comprends pas que, chaque fois que tu dis ça, c’est comme si tu agitais une cape rougesous les yeux d’un taureau enragé ?

Il la suivit jusqu’à la portière et l’ouvrit. Puis il appuya sur un bouton et l’escalier hydrauliques’abaissa.

— Nous avons déjà eu cette discussion. Tu connais mon avis sur la question. Et ne me mens pas,je sais que tu as l’estomac dans les talons. Il est presque minuit ici, le restaurant Chez Celeste seradéjà fermé. Nous y serons pour l’ouverture, à l’heure du déjeuner demain. D’ici là, je vais trouver dequoi te remplir l’estomac. Puis je passerai les heures suivantes à te combler d’une autre manière.

Des heures ? Il pensait qu’ils allaient coucher ensemble ce soir ? Elle en avait envie. Son sexefrémissait à l’idée que Jon soit le premier homme à s’insinuer en elle et à lui donner du plaisir. Ellel’avait toujours désiré. Mais s’il couchait avec elle juste pour servir ses intérêts, elle seraitpathétique de le laisser faire, non ?

Elle pivota face à lui.— Arrête de faire semblant. Inutile de me caresser dans le sens du poil. Si c’est si important que

ça pour toi, je vais rester et voir dans quelle mesure le message de mon père peut servir la cause deton frère. Mais pas la peine de me faire croire que…

— Chut.

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Jon lui saisit le poignet et l’attira vers lui d’un geste brusque. Il lui fit poser la paume sur sonmembre en érection.

Épais. Long. Dur. Une bouffée de chaleur monta en elle. Son souffle s’accéléra. Sa bouches’entrouvrit.

— Tu crois que je serais dans cet état si je n’avais pas envie de toi, doc ?S’armant de courage, elle retira sèchement la main de sa braguette.— Les mecs bandent pour un oui ou pour un non. Ça ne me flatte pas le moins du monde.Jon éclata de rire. Le grondement profond de sa voix se répercuta à travers son corps. Elle

s’aperçut avec horreur que la pointe de ses seins s’était tendue.— Pas moi, doc. Il n’y a que les profs sexy et fières qui m’excitent. Qui est-ce qui t’a mis cette

idée dans la tête ?— Personne. (Fébrile, elle descendit les marches en serrant la photo de son père contre son

cœur.) Je suis consciente de mes défauts. Pas la peine de faire comme si j’étais parfaite.Jon garda le silence pendant une longue minute, l’air songeur. Les paroles de Lucia parurent

laisser un goût amer dans sa bouche.— Je ne fais pas semblant. Tu as une fausse image de toi. Les hommes te désirent, contrairement

à ce que tu penses. Tu es peut-être tombée sur des poules mouillées qui se sont senties menacées parton intelligence, je ne sais pas. Moi je te trouve séduisante, et je ne veux plus t’entendrete dévaloriser. Compris ?

Elle porta le regard vers lui et cligna les yeux. Apparemment, il était sérieux.Comme pour clore le sujet, il tira son portable de sa poche et passa un coup de fil. Il s’exprima à

voix basse. À cause du vent, elle put à peine distinguer ses paroles, mais elle eut l’impression qu’ilparlait une sorte de langage codé.

Ils traversèrent un terminal désert. Lucia se rendit compte qu’ils se trouvaient dans un aéroportréservé aux jets privés. Jon lui prit la main et l’entraîna à travers le bâtiment. Elle le pria del’attendre un instant, le temps qu’elle aille se rafraîchir dans les toilettes, où elle tâcha de calmer sonesprit en ébullition. Dès qu’elle en sortit, il la conduisit vers la sortie, où les attendait comme parmagie une élégante Lincoln noire.

— C’est du rapide.— Ça peut servir d’avoir des amis.Sans rien ajouter, Jon ouvrit la portière et elle se glissa sur la banquette arrière. Il s’installa à

côté d’elle et posa la main sur sa cuisse.— Bocelli, le salua le chauffeur dont les yeux bleus pétillaient dans le rétroviseur central.— Wade, répondit Jon avec un hochement de tête. Vous connaissez un bon hôtel dans le centre-

ville ? Je pense que nous allons passer quelques jours ici.— J’ai exactement ce qu’il vous faut. Attachez vos ceintures. Vous y serez dans une vingtaine de

minutes.Le véhicule fendit la nuit noire, quittant l’aéroport pour s’engager sur une route relativement peu

fréquentée.— Avec room service ? demanda Jon. Elle n’a pas encore mangé.— Oui. La cuisine sera peut-être fermée, mais je soufflerai un mot en votre faveur.Jon se pencha en avant et assena une tape affectueuse sur l’épaule de Wade.— Vous assurez, mon vieux.— Ça ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd, répliqua le chauffeur sur un ton amusé.

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Dans un ricanement, Jon se renversa en arrière sur la banquette et passa son bras autour de Lucia.Il la plaça dos à lui, entre ses jambes et fit glisser ses doigts le long de son décolleté.

— Elle est jolie, non ?Lucia retint son souffle. Si seulement sa peau ne picotait pas sous son toucher… Elle tenta

d’échapper à ses caresses mais il agrippa sa cuisse de sa main libre et resserra son étreinte autour deses épaules, lui ordonnant en silence de ne pas bouger. Ses doigts coururent le long de son corsage, etils s’engouffrèrent juste au-dessous de la dentelle de son soutien-gorge. Les yeux écarquillés, elle sefigea et jeta un coup d’œil à Wade, qui les observait dans le rétroviseur. Qu’est-ce que Jon fabriquait,nom de Dieu ?

— Magnifique, répondit Wade d’une voix de velours. Une poitrine de cette taille et naturelle,c’est totalement excitant ! Quant à ses hanches… elles sont faites pour être agrippées durant uneséance de sexe bien intense.

La main de Jon remonta le long de sa cuisse, retroussant l’ourlet de sa robe. Surprise, elle ouvritla bouche. Le contact de ses doigts sur sa jambe lui embrasait la peau, laissant dans leur sillage unetraînée de feu. Quelle mouche l’avait piqué ?

— Exactement. Est-ce qu’il y a quelque chose chez elle que vous n’aimez pas ?Elle aurait volontiers filé un coup de coude à Jon, mais il était assis trop près d’elle pour qu’elle

lui fasse mal.— Rien. Si vous n’aviez pas vos pattes sur elle comme pour revendiquer votre droit sur sa

personne, je ne me gênerais pas pour proposer à cette jolie créature de passer un peu de bon temps enma compagnie.

— Allez vous faire foutre, rétorqua Jon avec un sourire.— Message reçu cinq sur cinq.Wade éclata de rire.— Est-ce que vous pourriez éviter de parler de moi comme si je n’étais pas là ? leur demanda

Lucia.Mais dans le fond, elle était flattée. C’était sa manière à lui de lui dire et de lui montrer qu’elle

était désirable. Cette pensée la fit rayonner.— On sait que tu es là, doc.Avec sa main, il écarta ses cuisses. Ses doigts s’aventurèrent plus haut, si près de son intimité

qu’elle sentit la chaleur de sa peau à travers sa culotte déjà humide.Lucia se demanda ce que Wade apercevait dans son rétroviseur. Et pourquoi le fait qu’il les

observe l’excitait. Elle déglutit avec peine.Jon lui souffla dans le cou et un frisson lui parcourut la colonne vertébrale ; des picotements lui

balayèrent la peau. Elle sentit sa volonté faiblir. Sans en avoir conscience, elle inclina la tête de côtépour lui présenter sa gorge.

— C’est bien, doc, chuchota-t-il. Bon sang, qu’est-ce que tu sens bon. Je suis impatient d’êtreseul avec toi. Je vais passer la moitié de la nuit à te faire jouir avec ma bouche. L’autre moitié, jevais la passer en toi.

Ses mots lui arrachèrent un gémissement. Son sexe palpitait douloureusement et se liquéfiait.Chacune de ses paroles la dévorait, faisant tomber ses défenses une à une. Il aventura sa main plushaut, toujours plus haut. Ses doigts effleuraient presque la naissance de ses cuisses. Allait-il oseraller jusqu’au bout et la toucher là ? Sentirait-il à quel point elle était humide ? Elle retint sonsouffle.

— Lucia, regarde-moi, ordonna-t-il dans un murmure en se penchant vers elle.

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Elle souleva ses paupières alanguies et se tourna lentement pour découvrir sur son visagel’expression de la passion à l’état pur. Une bouffée de chaleur la saisit et elle s’ouvrit à lui.

Il avait raison, elle voulait se donner à lui. Jusqu’à ce qu’elle pose les yeux sur lui, elle ne savaitpas ce que désirer un homme voulait dire. Jon avait beau avoir disparu de sa vie du jour aulendemain, le désir était resté. Sa réapparition ravivait sa soif.

Elle avait hâte de le caresser, de sentir ses mains sur elle. Lucia se cambra, pressantvolontairement cette partie intacte, secrète, de son anatomie contre ses doigts. Une déchargeélectrique la parcourut de part en part, lui arrachant un petit cri.

Jon prit son sexe en coupe d’un geste possessif, appuyant dessus en dessinant des cercles lents.— Tu es mouillée, doc.Ciel, il le sentait donc au travers du tissu de sa culotte ! Lucia ferma les yeux.— Oui.— Et tellement chaude… Est-ce que cette chatte m’appartient ?Le corps frémissant, elle lâcha un petit cri, s’efforçant de trouver les mots. Elle n’avait aucune

expérience dans le domaine du désir, elle n’avait jamais connu de sentiment aussi fort. Une vague devolupté submergea son esprit. Pour la première fois, Lucia se focalisa entièrement sur son corps etsur son plaisir, et ce fut une révélation. Contrairement à son habitude, elle ne chercha pas à analyser,elle laissa les choses suivre leur cours. Aucun doute, Jon Bocelli serait son premier amant – et aucunautre ne lui arriverait jamais à la cheville.

— Lucia ? Regarde-moi.Elle rouvrit les yeux dans un clignement, sans se rappeler les avoir fermés. Wade les contemplait

dans le rétroviseur. Ce fut cependant le regard sombre et autoritaire de Jon qui capta toute sonattention.

— Tu es belle. Allons, doc. Fais-moi plaisir. Dis-moi que ta chatte m’appartient.— Oui, souffla-t-elle.— C’est bien. Mais ça n’est pas assez. J’en veux encore plus, susurra-t-il au creux de son cou, la

faisant frissonner. Penche-toi en avant.Lucia s’exécuta. C’était comme si toutes ses inhibitions s’étaient envolées. Jon lui avait montré

qu’elle était désirable. Il avait envie d’elle, lui avait fait part de ses désirs. Inutile qu’elle se posemille questions.

Quand elle se pencha en avant, il ôta sa main de son sexe et elle lâcha un petit cri de protestation.— Patience.Un sourire étira ses lèvres tandis qu’il baissait la fermeture Éclair de sa petite robe noire dans

son dos. Le tissu s’écarta. Jon le fit glisser sur ses épaules, exhibant le soutien-gorge en dentellenoire de Lucia. Un courant froid bienvenu passa sur sa peau brûlante. La pointe de ses seins se durcitencore plus.

— C’est beau, doc. Tu sais combien de fantasmes j’ai nourris en songeant à toi ? chuchota-t-il àson oreille.

Stupéfaite, elle secoua la tête. Il avait pensé à elle ?— Je te parie que même toi, tu ne sais pas compter jusque-là. Tu veux que je remette ma main sur

ta chatte ?— Oui, dit-elle, le souffle court.— Moi aussi. Fais-moi plaisir, retire ton soutif et je recommencerai à te toucher.Allait-il lui caresser les seins ? Les lécher ? Lui aspirer les tétons ? À moins qu’il ne se contente

de les observer de son regard impénétrable ? Qu’importe, elle était partante pour tout, mais…

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Elle reporta son attention sur le rétroviseur et murmura :— Et lui ?— Tu veux qu’il regarde ?Au début, elle avait trouvé cela excitant. Maintenant… Elle se mordit la lèvre.— Non. Je veux être seule avec toi.— Bonne réponse.Jon appuya sur un bouton et une vitre teintée s’érigea entre eux et le conducteur.Ce dernier leur jeta un dernier regard dans le miroir avant que le vitrage se referme

complètement, la laissant en tête à tête avec Jon. Elle frémit. À présent, elle était complètement à samerci, sous son charme – et elle n’aurait voulu être nulle part ailleurs.

Lentement elle se pencha en avant, étira les bras derrière elle et dégrafa son sous-vêtement,libérant sa poitrine généreuse. Jon fourra le morceau de dentelle dans la poche de son manteau avecun sourire canaille. Captivé, il porta son regard sur un de ses seins. Il plaça sa main sur la rondeur et,du pouce, effleura un téton.

Lucia se figea, gagnée par le plaisir. Elle poussa un gémissement et s’arc-bouta, implorant ensilence d’autres caresses.

— Des tétons sensibles. Hum…Il titilla de nouveau le bouton de chair d’avant en arrière, dans un geste volontairement lent.— Oui, dit-elle d’une voix tremblante.— Tu ne récupéreras ton soutif que quand je l’aurai décidé. (Il lui baisa l’épaule et lui mordilla

le lobe.) J’ai toute la nuit avec toi, et je ne pense pas m’avancer en disant que tu ne le reverras pasavant demain.

« Toute la nuit ? » Elle déglutit. Cette pensée aurait dû l’alarmer. Elle avait une poitrineopulente ; il était très rare qu’elle ne porte pas de soutien-gorge. Même la nuit. Mais l’idée de resternue et accessible à son plaisir accrut son excitation. Elle hocha la tête.

— Bien. Maintenant, donne-moi ta culotte. Tu n’en auras pas besoin non plus.Ôter le seul obstacle qui se dressait entre lui et son sexe humide ? Lui donner l’accès sans

restriction… Lucia cessa de réfléchir. Elle remua les hanches et souleva le bas de sa robe pourattraper sa petite culotte noire et la baisser.

À la seconde où le morceau de tissu apparut sous l’ourlet de sa robe, Jon prit le relais, tirantdessus pour le faire glisser le long de ses cuisses et ses genoux. Il la serra dans son poing avec unsourire triomphant.

— Le tissu est trempé, doc. Tu mouilles pour moi.— Oui.— Je compte en profiter.Il posa un long baiser sur ses lèvres, enfouissant sa langue dans sa bouche pour la goûter ; elle

fondit encore.— Je t’en prie, geignit-elle.Peut-être que plus tard, elle serait horrifiée. Son orgueil reprendrait le dessus et elle serait

révoltée par son comportement et la succession de monosyllabes qu’elle avait prononcée, mais, pourl’heure, elle était trop perdue dans l’instant présent pour s’en soucier.

— Patience, dit-il d’un ton prometteur.Lucia ne tenait plus en place.Il fourra la culotte trempée dans sa veste avec le soutien-gorge et tapota sur sa poche.— C’est mon butin. Bientôt, tu seras toi aussi à moi. Tout entière.

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Il la déshabilla du regard. Elle avait les lèvres gonflées, les seins tendus, avides de caresses. Sarobe avait glissé jusqu’à sa taille ; la jupe couvrait à peine son sexe. Sous ses fesses, le cuir de labanquette serait sans doute humide quand elle se lèverait tant elle était excitée.

Soudain, la voiture s’arrêta. Wade gratta à la vitre. Elle jeta un coup d’œil par le carreau et vit unpetit hôtel désuet sur sa gauche.

Jon jura dans sa barbe.— Remets ta robe.Surprise, elle enfila les manches en toute hâte, se demandant combien de temps il faudrait à Jon

pour la lui retirer à nouveau. Il remonta la fermeture Éclair avant de tapoter sur la vitre de séparation.Elle s’abaissa lentement et elle croisa le regard bleu de Wade dans le rétroviseur.

— J’ai passé un coup de fil pour prévenir de votre arrivée, dit-il. Vous n’avez plus qu’à vousprésenter au bureau d’accueil, montrer une carte d’identité, récupérer la clé et… faire ce que vousavez à faire ensuite. Amusez-vous bien.

— Merci, mon vieux. Je vous suis redevable.— Je tâcherai de ne pas l’oublier.Jon partit d’un éclat de rire.— Je me doute que vous vous en souviendrez.Il descendit du véhicule et lui tendit la main.C’était le point de non-retour. Si Lucia le suivait, il la déshabillerait entièrement, l’étendrait sur

un lit et explorerait chaque parcelle de son corps. Il la posséderait probablement plus d’une fois.Coucher avec Jon ne serait pas comme coucher avec un étranger dans une station balnéaire. Il la

dominerait. Il serait exigeant. Il lui donnerait des ordres. Il l’exciterait, la ferait transpirer. Et elle nesaurait rien lui refuser. Ce qui l’excitait et l’effrayait à la fois.

C’était sans doute bien pour elle de s’arracher à une vie d’ordinaire si rangée, où tout était souscontrôle.

Elle glissa sa main dans la sienne, porta le regard vers lui et cligna les yeux, implorant ensilence… quoi au juste ? Elle ne savait pas trop. Sa pitié, pas vraiment. Pas plus que son amour. Ellesavait que cela ne servait à rien.

Il lut dans ses pensées.— Je m’occupe de toi, doc. Tu n’as rien à craindre.Lucia le croyait sur parole. Il était fort, intelligent, courageux, déterminé… parfait. Certes tout

cela prendrait fin, mais elle n’aurait pas pu souhaiter meilleur homme pour sa première fois. Ellequitta la voiture et se posta près de lui sur le trottoir avec un sourire aux lèvres.

Il claqua la portière et tapa deux fois sur le toit du véhicule avec sa paume. Wade klaxonna avantde s’éloigner.

Le manteau noir de la nuit les enveloppa aussitôt. Jon fouilla les environs du regard, inspectant larue d’un bout à l’autre. Puis il l’entraîna vers le bâtiment.

— Allons-y.Dans l’obscurité, elle ne distinguait pas bien la façade de l’hôtel. Mais une fois à l’intérieur,

la chaleur de l’endroit la mit immédiatement à l’aise. Décoré selon le thème de la Toscane, agrémentéd’un mobilier de bois sombre dans les tons de la terre, l’endroit lui parut accueillant.

Mais alors qu’elle se dirigeait vers l’accueil, Lucia sentit la pointe de ses seins qui frottait contrele tissu de sa robe. Son trouble augmenta au fil de ses pas. Jon se tourna vers elle, un sourire espièglesur les lèvres, comme s’il avait conscience de son agitation. Tandis qu’il commandait le room serviceet prenait la clé, Lucia sentit le fruit de son excitation couler entre ses cuisses. Comme ils se

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dirigeaient vers l’ascenseur, le nectar s’étendit, lubrifiant sa peau à l’endroit où ses cuisses sefrottaient l’une contre l’autre. Ciel, le temps qu’ils parviennent à la chambre, elle serait dans tous sesétats !

Quand les portes de l’ascenseur se refermèrent sur eux, leur procurant une bulle d’intimité, Jonl’attira dos contre lui et pressa son sexe érigé sur ses reins avec un grognement. Elle se trémoussacontre lui et il resserra son étreinte.

— Doc… dans ton intérêt, il vaut mieux pas que je perde le contrôle. (Elle n’attendait que ça. Ill’avait littéralement fait fondre de désir. Elle remua de nouveau son bassin.) Dernier avertissement,gronda-t-il à son oreille.

Le son de sa voix la fit frémir. Elle plaqua son dos contre lui, bascula la tête sur son épaule et seremit à exercer une pression sur son érection.

— Jon, je t’en prie.Il lâcha un sifflement et posa la main sur sa cuisse. Puis sur sa hanche. Lucia retint son souffle

tandis qu’il glissait les doigts sous l’ourlet de sa robe et dans les replis moites de son intimité. Iltrouva son clitoris et effleura le bouton sensible. Les sensations montèrent en elle. Elle s’abandonnacontre lui en poussant un gémissement. Jon lui mordilla le cou. De son autre main, il prit son sein encoupe à travers sa robe et fit rouler son téton entre son pouce et son index. Toutes les sensationsallèrent se ficher entre les cuisses de la jeune femme, embrasant son intimité. Les battements de soncœur accélérèrent. S’étant masturbée de temps à autre, Lucia savait qu’elle approchait de l’orgasme.

Le tintement de l’ascenseur les interrompit si brutalement qu’elle sursauta. Quand les portes serouvrirent, Jon la lâcha et s’écarta d’elle. Son sang-froid agaçait Lucia – jusqu’à ce qu’elle se rendecompte qu’un couple de vieillards se tenait devant l’ascenseur, un sourire poli aux lèvres.

— Pardonnez-nous, dit Jon en lui prenant la main et en l’entraînant dans le couloir faiblementéclairé. Parvenu à l’extrémité, il poussa une porte et l’attira dans la pièce.

— Ne bouge pas.Alors il tira une arme de sa ceinture.

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4

Lucia écarquilla les yeux. Il portait un revolver sur lui ?Jon disparut dans la salle de bains pour vérifier la baignoire et une éventuelle cachette derrière

la porte ; elle se rembrunit alors. Évidemment. C’était un agent du F.B.I. À ce titre, il avait pourhabitude de se parer au moindre danger. Il s’attendait probablement à rencontrer des problèmes.Logique. Si Pietro était coupable, il ne voudrait pas que son secret soit découvert. S’il avaiteffectivement tué son frère pour prendre du grade, il n’hésiterait pas à éliminer sa propre nièce.

Un instant plus tard, Jon revint dans la chambre, alluma la lumière dans la minuscule entrée, ettourna les trois verrous de la porte. Puis il s’approcha lentement d’elle tel un prédateur de sa proie.À mesure qu’il avançait, elle reculait. Jusqu’à ce que son dos heurte la porte. Il plaça les mains depart et d’autre de sa tête et se pencha en avant, arrêtant son visage à quelques centimètres du sien.

— Tu préfères qu’on en reste là ?Il lui offrait l’opportunité de se rétracter si jamais elle ne se sentait pas prête. Il l’avait prévenue

de ce qui arriverait si elle restait, mais il n’allait pas insister si elle ne voulait pas faire l’amour.— Non.Un voile de triomphe passa sur le visage de Jon ; il fit un pas en arrière.— Tourne-toi, doc.Pas de raison, pas d’explication… un ordre, tout simplement. Lucia aurait pu analyser la situation

sous tous les angles, mais à quelle fin ? Elle avait confiance en Jon. Il ferait son possible pour fairede sa première fois une expérience inoubliable.

Elle hocha la tête et lui tourna le dos. Avec un grognement, Jon plaça ses paumes puissantes etchaudes sur ses épaules et planta une traînée de baisers le long de son dos et de son cou. Elle eutenvie de se frotter contre lui et de l’implorer.

Il plaça les mains sur ses hanches.— Sois sage et je te récompenserai.Elle devina que ses gages seraient plus que plaisants.— Bien, maître.Il hésita.— Maître ? Tu as lu des bouquins ?— En effet.— Excellent. Je ferai très bientôt bon usage de tes connaissances.Sans un mot de plus, il baissa la fermeture Éclair de sa robe. Le zip résonna à travers la pièce

venant s’ajouter au son saccadé de sa respiration. L’air frais l’enveloppa aussitôt mais il la couvrit

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de ses paumes chaudes, faisant lentement glisser sa robe le long de ses épaules, de ses bras, de sonbassin… Jusqu’à ce que le tissu tombe à ses pieds.

Soudain nue, Lucia se sentit mal à l’aise. Jon Bocelli pouvait voir son dos, son cul imposant, sescuisses larges… Elle ferma les yeux, le cœur battant à tout rompre.

Une question lui brûlait les lèvres. Elle ne put s’empêcher de la poser :— Déçu ?Il se cramponna à ses hanches, son corps contre le sien.— Si ce n’était pas ta première fois et que je n’avais pas décidé d’être délicat avec toi, je te

mettrais une bonne fessée pour m’avoir posé cette question.Jon fit courir ses mains sur la courbe de son postérieur tout en le palpant. La lampe éclairait son

corps nu. Elle ne pouvait plus se cacher. Apparemment, le spectacle plaisait à Jon qui s’agenouilla enpoussant un grondement approbateur. Il déposa un baiser sur chacune de ses fesses.

— Arrête de douter de toi. Je sais exactement ce qui m’attend, et il n’y a pas une femme que jedésire plus que toi, Lucia.

Il se redressa et la fit pivoter face à lui ; à son regard, elle vit qu’il était sincère et elle mit sescraintes de côté. Les hommes n’étaient pas tous attirés par de grandes asperges. Tous ne trouvaientpas son intelligence intimidante. Tous n’étaient pas étonnés par son manque d’expérience. Nicki le luiavait rabâché pendant des années, quoiqu’elle ne l’ait jamais vraiment écoutée. À présent, elle serendait compte que la seule opinion qui comptait à ses yeux était celle de Jon. Et il avait justementl’air de l’apprécier telle qu’elle était.

Elle prit soudain conscience de la situation. Son regard grave lui indiquait que cette nuit étaitégalement importante pour lui. Et elle eut l’absolue certitude qu’elle était tombée amoureuse de JonBocelli. Il allait sans doute l’abandonner une fois encore ; ils vivaient sur deux planètes différentes.En revanche, cette nuit-là leur appartenait et elle la garderait précieusement en mémoire quand il luifaudrait tourner la page et aller de l’avant sans lui.

— J’ai envie de toi aussi.Elle leva la tête et plongea son regard dans ses yeux noirs.Jon lui prit la main et l’entraîna dans la pièce. Ils passèrent devant un canapé rembourré de

couleur taupe et un couple de fauteuils club en cuir. Il la conduisit jusqu’au lit à baldaquin king size.L’acajou massif jurait presque avec le dessus-de-lit crème et or ainsi qu’avec les oreillers endentelle.

Jon alluma les lampes et rejeta les couvertures en arrière. D’instinct, Lucia se dirigea vers lui,nerveuse et impatiente de lui appartenir, du moins pour la nuit. Mais en le devançant, elle fronça lessourcils.

— Tu es… un peu trop vêtu.Jon arqua un sourcil et la défia du regard.— Tu penses pouvoir faire quelque chose pour y remédier ?Absolument. Lucia esquissa un sourire.Elle s’arrêta face à lui, tendit les bras et écarta les pans de sa veste. Un sourire canaille au coin

des lèvres, il l’aida, haussant les épaules pour faire glisser le vêtement. Puis il la plia et la posa surle dossier d’un fauteuil tout près. Lucia s’attaqua ensuite à sa chemise d’un blanc immaculé, détachantles boutons l’un après l’autre, révélant peu à peu son torse musclé parsemé d’une toison noire. Lespoils formaient une ligne de son nombril à son bas-ventre. Il était si viril que c’en était à couper lesouffle.

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Elle sortit sa chemise de la ceinture de son pantalon et l’observa tandis qu’il ôtait son haut et leposait sur le dossier du fauteuil, par-dessus la veste. Il retira ses chaussures et ses chaussettes et lesmit de côté.

— Ne t’arrête pas, Lucia, dit-il d’une voix douce mais impérieuse.— Oui, monsieur, murmura-t-elle, à présent totalement à l’aise.Elle défit sa braguette et fit descendre son pantalon sur ses cuisses musculeuses Il était large et

imposant ; un concentré de testostérone. Mais elle savait qu’il ne lui ferait jamais le moindre mal.Il ôta complètement son pantalon et, de la poche arrière, il sortit un petit paquet et le posa sur la

table de chevet. Un préservatif. Mince, pourquoi n’y avait-elle pas pensé ? Heureusement que Jonétait là pour veiller à ce genre de choses.

— Merci. Je… je ne prends pas la pilule.— Je m’occupe de toi. Tu es entre de bonnes mains.Lucia ferma les yeux tandis qu’une nouvelle vague de désir la submergeait. Un jour, Jon se

marierait. Sa femme serait comblée. Elle mourait d’envie d’être l’heureuse élue mais il était inutilede tirer des plans sur la comète. Il avait toujours mis sa carrière au premier plan et, aujourd’hui, ildevait se concentrer sur son frère. Quant à elle, elle avait un travail de recherche à rendre. « Publierou périr », tel était la devise de tout universitaire qui se respecte. Jeune titulaire, elle devait tâcher defaire aussi bien que ses pairs plus chevronnés.

— Tu veux que je prenne la relève, doc ?Non. Elle voulait le faire elle-même. Il l’avait dévêtue. Elle se retrouvait nue comme un ver face

à lui, et il la dévorait des yeux. Elle avait envie de lui rendre la pareille.Sous son boxer en coton noir, elle devinait le contour de son érection. Elle n’avait jamais vu un

pénis en pleine action, mais ça n’avait pas d’importance. Il ne s’attendait pas à trouver en elle uneexperte, juste une femme consentante, acceptant de se laisser caresser, une novice prête à apprendre.

Elle prit son courage à deux mains, glissa les doigts sous l’élastique de son boxer et le fitdescendre sur ses hanches, marquant une pause pour libérer son… aucun mot ne lui parut suffisantpour décrire l’imposant membre dressé.

— Tu observes ma queue.— C’est nouveau pour moi. Je n’ai jamais… (Elle secoua la tête. Sa « queue ». OK, c’est ainsi

qu’elle allait nommer son sexe.) J’ai envie de te toucher.— Le contraire m’aurait déçu.Jon était la perfection incarnée, et elle ne regrettait pas de ne pas avoir vécu sa première

expérience sur la banquette arrière d’une voiture avec un adolescent inexpérimenté. Comme sa sœuret certaines de ses amies. La sienne allait être incroyable.

Elle approcha une main tremblante de lui ; pourtant elle n’était pas nerveuse. Une excitationpoignante s’était emparée d’elle, déclenchant en elle de délicieux frissons. Quand elle enroula lesdoigts autour de son sexe, elle poussa un petit cri, surprise par la douceur et la chaleur de sa peau.

Lorsqu’elle enroula les doigts autour et exerça une légère pression, Jon eut un mouvementbrusque et lâcha un grognement. Elle explora sa verge d’une caresse, effleurant du pouce son glandqui dépassait de son poing ; puis elle glissa sa paume jusqu’à ses lourds testicules. Jon ferma lesyeux ; son corps tout entier se contracta. Lucia esquissa un sourire. Il la dominait d’une trentaine decentimètres et pesait environ trente-cinq kilos de plus qu’elle. Il était costaud et fort. S’il le voulait, ilpouvait la retourner sur le dos et la dompter en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Toutefois,il demeurait immobile face à elle et lui déléguait tout le contrôle afin de lui laisser le temps deprendre ses marques. Elle lui en fut très reconnaissante.

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Elle le caressa. Étonnamment, son sexe grossit encore dans sa main et durcit davantage, devenantplus long, plus épais. Bientôt, il serait en elle, ferait partie d’elle. Elle frémit de nouveau ; sonexcitation allait crescendo.

— Lucia, rugit-il. Putain, doc, tu ne sais pas combien de fois j’ai imaginé cette scène.— Moi aussi.Il rouvrit brusquement les yeux, l’air agréablement surpris.— Ah bon ? Et tu t’es imaginé quoi d’autre ?Allait-elle oser le lui dire ? Peut-être que c’était la seule nuit qu’elle passerait avec lui. Hors de

question qu’elle s’en aille le cœur lourd de regrets. Plutôt risquer le tout pour le tout et réaliser sesfantasmes.

Lentement, elle s’agenouilla. Le regard de Jon s’embrasa tandis qu’il engouffrait les doigts danssa chevelure et saisissait ses boucles auburn, maintenant le visage de Lucia à quelques millimètres àpeine de son membre impatient.

— Tu es sûre que c’est ce que tu veux ?— Je t’en prie, gémit-elle.Il enroula sa main libre autour de son sexe et guida les lèvres de la jeune femme vers lui.— Ouvre la bouche. Sers-toi de ta langue pour me sucer… Oui, comme ça. Oh, doc, c’est parfait.Lucia sourit en son for intérieur et redoubla d’efforts. Pour avoir étudié l’anatomie humaine –

elle avait toujours aimé les matières scientifiques – elle savait précisément quelle zone était la plusérogène chez un homme, et elle se concentra sur le bout de sa verge parcouru de nerfs, le prenant àpleine bouche. Lorsque le gland buta contre le fond de sa gorge, elle déglutit à la fois pour lui donnerdu plaisir et pour réprimer un réflexe nauséeux. Puis elle creusa les joues et l’aspira aussi fort quepossible, faisant courir la pointe de sa langue le long du frein puis titillant la zone située juste sous lacouronne. Et pour avoir souvent entendu ses amies parler de fellation, elle savait que Jonapprécierait qu’elle pose sa main sous ses testicules.

Il s’agrippa à sa chevelure et tira légèrement dessus. La brûlure n’était pas désagréable. Elle quiavait toujours été cérébrale se découvrait pour la première fois à travers l’expérience physique. Sursa langue, un goût salé, masculin. Le plaisir qu’elle lui procurait lui donna un sentiment de féminitéextrême, voire de puissance. Devait-elle poursuivre sur cette lancée et le faire jouir ainsi ? Cet acteétait si intime, elle avait du mal à imaginer qu’elle puisse se sentir à nouveau aussi proche de luiaprès ça.

Mais il avait prévu autre chose.Il l’aida à se relever, lui arrachant un gémissement de protestation.— Jon…— Arrête, doc. Tu t’y prends sacrément bien, dit-il le souffle saccadé.Lucia afficha un sourire timide.— La chance du débutant ?— On a déjà établi le fait que tu étais une grande lectrice.— Et que je prêtais attention à ce que mes amies racontent sur leurs petits copains…Jon poussa un grognement.— Je ne veux pas que tu écoutes ces récits. Des exploits sexuels d’autres mecs…Sa remarque possessive l’émoustilla.— Crois-moi, je ne pense qu’à toi en ce moment.— Bien. (Il lui caressa la joue puis jeta un coup d’œil en direction du lit.) Allonge-toi sur le dos.

Écarte les jambes.

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Le ton menaçant de sa voix l’excita. Disparu l’amant complaisant qu’elle avait tenu entre sesmains quelques instants plus tôt. Il avait repris le contrôle de la situation ; son regard était perçant.

Il lui caressa la hanche.— Je suis presque à bout. Tu peux toutefois me faire confiance, je ne te ferai jamais de mal mais

je vais veiller à ce que tu prennes ton pied.D’un hochement de tête, elle s’étendit sur le lit, un peu gênée par son large bassin, le renflement

de son ventre, loin d’être plat. Mais Jon l’appréciait telle quelle. Il fallait qu’elle parvienne àdépasser ses complexes, aussi se força-t-elle à écarter les jambes.

Il y avait toutefois un problème qu’elle ne pouvait ignorer.— Ça va faire mal.Elle se mordit la lèvre.Il s’assit sur le bord du lit et lui prit la main.— Un bref instant. C’est inévitable.— Tu parles par expérience ?Étrangement, elle espérait que oui.— Navré, doc. J’ai grandi dans un quartier défavorisé. Mon père nous avait quittés. Maman était

obligée de jongler avec deux boulots pour nous nourrir, Stef et moi. J’ai commencé les petits jobs àl’âge de dix ans, et quand j’ai enfin eu un peu de temps libre pour penser au sexe, la plupart des fillesde mon entourage avaient déjà vu le loup, et plus d’une fois. (Il haussa les épaules.) Je n’auraisjamais imaginé qu’à mon âge, je serais la première fois d’une fille.

— À ton âge ? s’exclama-t-elle en lui assenant une petite tape. Tu n’es pas encore tout à fait mûrpour la maison de retraite, le taquina-t-elle.

Son visage s’assombrit.— J’ai trente-cinq ans. En réalité, vu ce que j’ai traversé, je suis bien trop vieux. Je ne mérite

pas de te toucher.Elle se redressa, chassant de son esprit l’image peu flatteuse qu’elle avait de son corps – ses

seins qui tombaient probablement et ses bourrelets. Elle l’enlaça et déposa un baiser sur ses lèvres.— Je viens d’une famille que tu as tous les droits de haïr. Mon Q.I. faisait de moi une bête de

foire gamine, j’étais à l’écart. Du coup en société, j’avais du mal à m’intégrer. En général, jeréussissais toujours à sortir une chose inadaptée lors des conversations. Ça m’arrive encore de tempsà autre. Les garçons me considéraient comme une chieuse grassouillette. Quand tous mes camaradesde classe avaient seize ans… j’en avais onze. Lorsque j’ai eu mon bac, trois filles étaient enceintes.Cette même semaine, j’ai eu mes règles pour la première fois. Et je ne te parle même pas del’université. Quand ma silhouette s’est transformée et que j’ai commencé à ressembler à une femme,tous les garçons m’évitaient. Il craignait qu’on ne les accuse de « détournement de mineure » s’ilssortaient avec moi. (Elle haussa les épaules.) J’ai vingt-cinq ans. Pourtant, je parie que tu me voistoujours comme un bébé. Si tu préfères qu’on en reste là…

En un éclair, Jon s’empara de sa bouche et la renversa sur le matelas, où il se mit à califourchonsur elle. Il plongea sa langue dans sa bouche. Lucia s’agrippa à son corps et enroula les bras autourde son buste. Il cala son bassin entre ses cuisses et elle sentit son sexe dur exercer une pressioncontre les replis moites de son intimité. Il imprima des mouvements de bas en haut en massant sonclitoris. Elle lâcha un petit cri et se cambra.

— Tu n’as rien d’un bébé. Quand je te regarde, je vois une femme sexy que je meurs d’envie decaresser.

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Ces paroles chassèrent les doutes et la peine qui habitaient Lucia. Il réussit à la détendre et elles’ouvrit peu à peu à lui – son corps comme son cœur.

— Alors fais-le.Il se releva et l’observa de pied en cap ; son regard s’embrasa.— Je ne veux pas me précipiter.Jon s’allongea de nouveau sur elle. Il plaça son visage juste au niveau de ses seins.— Ils sont incroyablement bandants.Il en prit un en coupe et se mit à l’embrasser, caressant de son souffle son téton. Elle frémit,

attentive à chacune des sensations qui la remuaient. C’était comme si son corps était complètementaccordé au sien.

— C’est ça, doc, murmura-t-il juste avant d’aspirer la pointe de son sein.Elle lâcha un gémissement et engouffra sa main dans sa tignasse brune, s’y cramponnant tandis

qu’il la désintégrait à grand renfort de coups de langue. Un délicieux frisson courut sur sa poitrine, etil la dévora de plus belle. Jamais elle n’avait autant porté d’attention à cette partie de son anatomie.Chacune de ses caresses déclenchait une décharge entre ses cuisses. Son sexe palpitait, avide del’accueillir.

— Jon, dit-elle d’une voix désemparée.S’il s’arrêtait maintenant, s’il ne lui donnait pas ce que son corps réclamait… Ciel, elle était à

deux doigts d’atteindre l’orgasme.— Patience, susurra-t-il.Il pressa ses lèvres sous son sein et remonta jusqu’au bouton de chair qu’il aspira, son regard

noir vrillé à son visage. Ils étaient tellement connectés qu’elle sentait son souffle, les battements deson cœur et le sang qui fusait à travers ses veines.

Puis, avec sa bouche, il se fraya un chemin le long de son corps, écartant davantage ses cuissessans jamais détacher ses yeux des siens. Déposant des baisers sur son ventre, il l’empoigna par lebassin et fit passer une de ses jambes par-dessus son épaule. Dans son regard, elle lut la promessed’un plaisir intense. Le cœur de la jeune femme s’arrêta un instant pour bondir de plus belle. Ellesavait précisément ce qui l’attendait, une certitude qui provoqua en elle un frisson de volupté. Elleétait toute trempée, elle le sentait. Pas de doute, il le verrait dès qu’il poserait les yeux sur…

— Tu es tellement mouillée, gronda-t-il en contemplant ses replis humides.Du pouce, il effleura le sommet de son intimité, juste au-dessus de son clitoris, et elle s’arc-bouta

pour lui indiquer où la toucher.— Pas encore.Il la maintint immobile et se pencha entre ses cuisses, la respiration rauque.Lucia se débattit. Elle adorait qu’il la contrôle, mais son corps en voulait plus. Elle ne put

s’empêcher de remuer et de gémir tandis que son souffle chaud caressait ses parties les plusinexplorées. Après vingt-cinq ans d’abstinence, elle mourait d’envie de jouer les débauchées.

— Jon ! l’implora-t-elle en lui tirant les cheveux. J’ai envie de toi. Touche-moi. Fais quelquechose.

Il prit ses fesses dans ses paumes et la souleva légèrement pour se nicher au creux de ses cuisses.Elle posa les yeux sur lui et il lui décocha un sourire malicieux.

— Une grande partie du plaisir se trouve dans l’attente et la montée du désir.— J’ai attendu toute ma vie. J’ai l’impression que je suis sur le point d’exploser. Si ça continue,

je vais devenir dingue. Je t’en prie…

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Il passa son pouce sur sa chair tendre et humide, s’attardant sur son clitoris, où il dessina descercles.

— Je vais te dorloter, doc. À mon rythme. Ferme les yeux, murmura-t-il d’un ton impérieux.Elle obéit. Il n’eut pas besoin d’élever la voix pour obtenir toute son attention.Alors elle sentit la douceur humide de sa langue glissant dans ses replis, savourant son nectar, se

frayant un chemin jusqu’à sa pointe de chair, qu’il se mit à flatter, à mordiller et à titiller, avant de lasucer.

Le sang battit à ses tempes, rugit dans sa tête. Son cœur se mit à cogner dans sa poitrine,résonnant à travers son corps. Le plaisir l’ensevelit tout entière. Lucia avait passé sa vie à employerdes métaphores et des expressions compliquées, à nuancer ses propos, à démêler les événementsmarquants de l’Histoire, à la recherche de leur sens, éprouvant une certaine satisfaction lorsqu’ellearrivait à donner aux faits qui ont façonné l’Humanité un sens personnel. En cet instant, elle n’auraitpas pu aligner deux mots qui ne soient pas en rapport avec le plaisir.

Elle aurait voulu l’implorer de lui accorder la délivrance, mais aucun son ne sortait de sabouche. Les palpitations entre ses cuisses ne cessaient de croître. Elle se frotta contre lui en geignant.Jon, à l’inverse, était totalement maître de son corps et jouait avec ses nerfs, la poussant au-delà deses limites, dans une zone qu’elle n’avait jamais explorée, ralentissant par moments ses caresses oubien marquant des pauses jusqu’à ce que, n’y tenant plus, Lucia se remette à s’agiter sous sescaresses. Alors, seulement, il reprenait ses flatteries, la ramenant peu à peu jusqu’aux frontières de lajouissance avant de reculer encore, apaisant ses élans d’un geste tendre. Une fois qu’il l’eut écartéedu précipice, et qu’elle eut retrouvé un souffle régulier, il recommença à lui faire perdre l’esprit.

Lucia n’avait jamais rien connu de pareil – prisonnière de son propre corps tout en étantétonnamment consciente de celui de son partenaire. L’attente… Ciel, il la tenait à sa merci etl’observait avec un sourire canaille, prenant plaisir à la voir souffrir.

— Jon, je t’en prie. Je t’en prie ! haleta-t-elle, fébrile.Entre ses cuisses se dissimulait un plaisir tel qu’elle n’en avait jamais expérimenté.— Je veux te faire jouir. Or je ne sais pas à quel point tu vas apprécier la pénétration pour ta

première fois.Il effleura son clitoris, relâcha la pression, puis palpa le bouton de chair de part et d’autre,

éveillant des nerfs jusque-là endormis. D’arrière en avant, d’arrière en avant. Lucia cessa sessupplications, qui cédèrent la place aux larmes. Il l’aspira une dernière fois.

— Tu peux jouir maintenant, chérie.Comme si son ordre déverrouillait toutes les barrières de son corps, elle s’ouvrit brutalement et

lâcha un cri aigu tandis qu’une vague de plaisir montait en elle, anéantissant tout sur son passage ; unfrisson vertigineux la saisit. Des taches noires apparurent dans son champ de vision. Pendant un longmoment, elle n’entendit plus rien, à croire que son corps avait besoin de concentrer toute son énergiesur cet orgasme incroyable.

Jon l’accompagna du début à la fin, œuvrant pour lui donner du plaisir avec ses doigts et sabouche, jusqu’à ce que l’orgasme s’achève et qu’elle retombe brutalement sur terre, le soufflesaccadé, le cœur battant à tout rompre… et les membres parcourus d’une délicieuse sensationd’engourdissement. Son cerveau ? Déconnecté.

— Oh. Mon. Dieu.Elle s’effondra sur le matelas et essuya son front moite.Jon se mit debout et brandit un préservatif.— Dernière chance. Je m’arrête là si tu veux.

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Elle lui décocha un regard ahuri. Avait-il perdu la tête ? En arriver là et ne pas le sentir en elle,ne pas réaliser l’un de ses désirs les plus sombres ? Elle voulait lui rendre au moins un dixième duplaisir qu’il lui avait prodigué.

— Je ne veux qu’une seule chose. (Elle écarta les cuisses en guise d’invitation.) Une seulepersonne. Maintenant, Jon.

Il n’hésita plus une seconde. Debout face à elle, il déroula le préservatif sur son sexeimpressionnant et se cala entre ses jambes.

— Reste avec moi. Dis-moi ce que tu ressens. Je ne veux pas te faire mal, bon sang.— Ça va passer vite, n’est-ce pas ?Elle noua les bras autour de son cou.— Promis. La douleur sera de courte durée. Je vais veiller à ce que le plaisir te la fasse vite

oublier.Jon vrilla son regard au sien et l’empoigna par les hanches. Elle enroula les jambes autour de lui

tandis qu’il se positionnait face à son entrée. Rien que le fait de le sentir si proche, son désir s’accrutd’un seul coup. Son pouls s’emballa comme si le dernier marathon de plaisir n’avait été qu’unéchauffement.

Alors il s’insinua lentement en elle, s’enfonçant dans des chairs jusque-là intactes. La barrière desa virginité l’arrêta et il poussa un soupir.

— Regarde-moi.Il entremêla ses doigts aux siens.Lucia hocha la tête et Jon recula, s’agrippant fermement à elle avant de la pénétrer d’un seul

coup, déchirant son hymen. Une douleur aiguë la transperça. Elle lâcha un cri, le corps tendu. Labrûlure se répercuta à travers ses membres. Il continua de s’enfoncer en elle jusqu’à ce qu’il soitancré jusqu’à la garde. Puis il se figea et l’observa tout entière.

Une seconde s’écoula, une deuxième, puis une troisième… La douleur entre ses cuisses s’atténuapeu à peu bientôt remplacée par une légère sensibilité. Plus tard, elle aurait mal, mais à présent qu’ilétait en elle, la nouveauté de la sensation la submergeait. Il repoussa les mèches de son front en lacaressant avec respect. La tension se désintégra totalement.

— Ça va ? s’enquit-il d’une voix rauque.Visiblement, il se retenait, et l’effort lui en coûtait. Elle en fut touchée. Comme si elle avait

besoin de ça pour l’aimer !— Oui. Je t’assure.À l’exception de l’inflammation qui s’était installée entre ses cuisses. Elle fronça les sourcils,

remua, orienta les hanches vers lui.Jon siffla à travers ses dents et ferma les yeux.— J’essaie de ne pas bouger pour t’épargner. Attends un peu. Il faut que ton corps s’habitue à

moi. Juste quelques instants.Si elle patientait davantage, elle risquait de devenir folle.— Maintenant, Jon ! (Elle planta les pieds dans le lit et suréleva le bassin.) Ça fait vingt-cinq ans

que j’attends ça. Je t’ai dit que je n’étais pas en sucre. Tu as été très patient. Tu n’en as pas marre ?Prends-moi, je suis à toi.

Il esquissa un sourire et effleura tendrement ses lèvres des siennes.— Bien, madame. Tu es très autoritaire. Ça va, je laisse passer pour cette fois. Mais ne t’y

habitue pas.

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Est-ce que cela voulait dire qu’il avait l’intention de coucher encore avec elle ? Cette pensée luidonna le tournis. Peut-être que leur histoire ne durerait pas toujours, mais au moins il n’était paspressé d’en finir avec elle. Et elle s’en contenterait – du moins pour le moment. Si elle avait son motà dire, toutefois, il lui ferait l’amour, se rendrait compte qu’il était vraiment attaché à elle, et nevoudrait plus jamais la quitter.

Elle croyait sans doute au Père Noël, mais c’était un doux espoir et elle était prête à s’yraccrocher le plus longtemps possible.

Jon inspira à fond et se concentra. Il fallait qu’il garde le contrôle, sans quoi il besognerait Luciaencore et encore sans pouvoir se retenir. Il ne pouvait pas faire ça. Pour sa première fois, elleméritait de la délicatesse. Bon sang, d’ordinaire, il n’était pas le plus tendre des amants, mais il étaitprêt à ce que cette expérience soit à la hauteur de ses espérances.

Peut-être qu’elle ne partirait pas en courant une fois que ce serait fini. Peut-être qu’ils auraientl’occasion d’approfondir leur relation naissante.

Il lui agrippa soudain les cuisses et les souleva. Elle enroula les jambes autour de sa taille ; il seretira un peu et Lucia se raccrocha à lui. Bon sang, le plaisir était vertigineux ! Quand il la pénétra denouveau, son fourreau de chair moite lui facilita le passage avant de se contracter de plus belle.C’était un supplice. Il ignorait combien de temps il allait pouvoir tenir. Mais il voulait faire sonpossible pour qu’elle jouisse au moins une fois.

Il roula sur le côté, toujours enfoui en elle, et elle se retrouva à califourchon sur lui, les cuissesencadrant ses hanches. N’était-ce pas un spectacle magnifique ? Lucia était d’une extrême féminitéavec sa peau lisse, ses joues enflammées, sa poitrine voluptueuse, sa taille fine, son ventre bombé etses hanches qui le fascinaient tant. L’instinct se saisit d’elle et elle s’installa confortablement sur sonsexe puis elle se mit à monter et descendre, les mains appuyées sur son torse, lui offrant une vuesublime sur ses seins. Mais c’était son visage qui le transcendait, ces pommettes en feu,l’émerveillement dans ses yeux écarquillés. On y lisait à livre ouvert. Toutes ses sensations ydéfilaient – même la pointe de douleur qu’elle éprouvait tandis qu’il s’enfonçait en elle.

Il la prit lentement, l’orientation et la cadence de ses poussées destinées à toucher le pointsensible en elle. Il imprima un rythme lent et profond. Au bout de quelques secondes, elle planta lesongles dans ses épaules et se mit à remuer en épousant ses mouvements, lâchant peu à peu prise.

— Tu es si sexy, doc. Être en toi, c’est le meilleur des fantasmes devenu réalité. Oui, bouge avecmoi. (Il la saisit par les hanches et accéléra la cadence.) Putain. Je te sens te contracter, ma chérie.

— Jon !— Je suis là. Prends. Profite. Laisse-toi aller.— Je ne… (Elle l’observa d’un air émerveillé.) C’est différent. Oh, mon Dieu… Oh !Le souffle court, elle ferma les yeux.Voir le plaisir grandir en elle excita Jon. Il continua de la pénétrer avec force. Le sexe de la jeune

femme palpita puis se contracta d’un seul coup.— Jouis pour moi, Lucia !Elle émit un cri et, sous elle, il augmenta la cadence, martelant sans relâche son point le plus

sensible. Seigneur, il sentait ses chairs enfler, ses ongles s’enfoncer dans sa peau. Mais ce qui lebouleversa le plus, ce fut le plaisir désemparé qui brûlait dans son regard. Elle était encore mieuxque dans ses rêves. Innocente mais pas trop timide. Instruite quoique novice. Et désinhibée.

Bordel, il fallait qu’il la possède.

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Il fit basculer Lucia sur le dos, planta les genoux dans le matelas et lui écarta grandes les cuisses.Il s’agenouilla devant elle, lui inclina le bassin et se mit à aller et venir en elle, stimulantimpitoyablement son point G, sans doute encore sensibilisé par son dernier orgasme. Il posa une mainsur son ventre et se mit à lui masser le clitoris avec son pouce en accompagnant ses caresses derapides coups de boutoir.

Elle lâcha une plainte et secoua la tête en s’agitant sous lui.— Oui ! Oh, mon Dieu, Oui. Ne t’arrête surtout pas. Je t’en prie. Je vais…Oui, elle allait jouir. Et elle jouit… dans un long gémissement, arrachant les draps et tendant le

bassin vers lui. Un liquide chaud se répandit autour de son pénis, l’enrobant, lui permettant des’enfouir davantage encore en elle.

Voir Lucia se débattre sous lui et crier son nom fut sans doute l’expérience la plus érotique de savie. Ni fessée ni bandeau n’étaient nécessaires, rien qu’une belle femme qui avait su l’amadouer, luiaccordant une confiance aveugle et s’abandonnant à lui avec une passion sans égale.

Son cœur devint soudain la propriété de Lucia DiStefano. Il comprit qu’il était fou amoureuxd’elle, et le fait qu’elle soit allongée sous son corps, qu’elle jouisse pour lui… ce fut trop.

Une vague de volupté l’envahit, se diffusant à travers lui tandis qu’il la pénétrait sans relâche.Alors il explosa et fondit sous l’effet du plaisir qui submergea soudain son être ; puis à mesure qu’ilse répandait en elle, il se recomposa dans un grondement mêlé d’un frisson.

Bien qu’il ne l’ait pas ménagée, Lucia se donna à lui jusqu’à la fin. Plus encore, elle l’enlaçaquand il s’effondra, à bout de souffle, contre sa peau délicatement parfumée. Puis elle déposa detendres baisers sur son cou et ses épaules.

— Merci, murmura-t-elle. C’était parfait.— C’est toi qui es parfaite.Le sourire alangui de Lucia alla se ficher droit dans son cœur. Elle ferma les yeux et, blottie

contre lui, elle s’assoupit. Jon la serra fort. Il était fichu. Pas question de laisser cette femme luiéchapper de nouveau. Une fois qu’ils auraient résolu l’énigme du meurtre de Nicholas, il luiavouerait ses sentiments en priant pour qu’elle les partage.

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5

Le lendemain, en fin de matinée, Lucia regagna le hall d’entrée de l’hôtel vêtue de la même petiterobe noire. Jon l’accompagnait. Dans sa poche, la clé et le code que Nicholas DiStefano avaitlaissés. Il n’avait plus rien de l’amant tendre de la veille. Ni de la matinée, quand elle était sortie dela douche. Il était sur le qui-vive, paré à toute éventualité. Lucia était fourbue ; les courbaturesl’élançaient à chacun de ses pas, lui rappelant combien Jon avait exigé d’elle. Mais elle ne regrettaitrien.

Un peu avant onze heures, tandis qu’ils descendaient la rue en direction de Chez Celeste, la bullede bien-être dans laquelle elle avait flotté se désintégra. Un nœud se forma dans son estomac et elleperdit un peu son sang-froid. Son père tentait de lui transmettre un message depuis sa tombe et elle nevoulait pas le décevoir. En outre, Jon lui avait bien fait comprendre que cette mission n’était pas sansdanger et pouvait vite mal tourner. Il lui avait fait promettre de suivre ses consignes à la lettre sansposer de questions.

Ils aperçurent bientôt le bâtiment de brique rouge arborant l’enseigne CHEZ CELESTE :ÉTABLISSEMENT FAMILIAL FONDÉ EN 1967. Une femme aux cheveux poivre et sel, aux yeux noirs rieurs etau visage rond et affable leur ouvrit la porte, les invitant à entrer.

En apercevant Jon, un sourire illumina ses traits.— Je me souviens de vous. Ça fait un bail que vous n’êtes pas venu me voir, hein ? Quel bel

homme !Elle lui tapota les joues.Jon rougit, embarrassé.— Merci, Celeste.— Ma fille est toujours célibataire, ajouta la femme d’un air espiègle. Ah ! s’exclama-t-elle en

prenant soudain conscience de la présence de Lucia. Mais je vois que j’arrive trop tard. Petiteveinarde. Et che bella donna1 !

Elle lui décocha un clin d’œil.C’était aimable à Celeste de lui dire qu’elle était jolie. Lucia lança un regard complice à Jon tout

en tendant la main à la dame.— Lucia DiStefano, enchantée. Il me semble que vous connaissiez mon père ?— Ah, DiStefano. Bien sûr !Celeste lui donna l’accolade comme si elle accueillait un proche qu’elle n’avait pas vu depuis

des lustres, puis elle fit un pas en arrière, les yeux embués, et se signa.— Paix à son âme. Il s’est toujours montré si gentil avec ma famille et moi. Il parlait de vous

avec une telle fierté…

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Cette remarque toucha Lucia. De son vivant, Nicholas DiStefano n’avait pas été un hommedémonstratif. Il ne lui avait jamais dit ouvertement qu’il était fier d’elle. Mais elle ne remettait pas enquestion les paroles de Celeste, et elle était soulagée d’apprendre que son père avait su apprécier saréussite.

— Merci. Il me manque beaucoup.Une boule s’était formée dans sa gorge. Elle déglutit avec peine, ravalant son chagrin. Jon lui prit

la main et lui caressa le poignet pour la réconforter. Elle se ressaisit et trouva le courage dequestionner la vieille dame :

— Il ne vous aurait rien laissé pour moi, par hasard ? Un morceau de papier par exemple ?Celeste réfléchit un instant. Soudain, elle se frappa le front.— Mamma mia ! Mais bien sûr. Suivez-moi…Excitée, Lucia lui emboîta le pas. Celeste leur fit traverser une modeste salle à manger ; en son

centre était disposée une table couverte d’une nappe à carreaux. Ils rejoignirent la cuisine où flottaitune délicieuse odeur d’ail, de basilic et d’origan. Une sauce tomate fraîche mijotait, et la senteur dupain frais titillait leurs narines. Son estomac se mit à gargouiller et elle songea avec ironie à lanourriture du room service qui avait refroidi tandis que Jon l’avait clouée au lit pour lui enseigner untas de nouvelles manières de faire frémir son corps.

Celeste les fit entrer dans une petite pièce à l’arrière du bâtiment ; elle s’assit derrière un bureauusé et fouilla dans un tiroir.

— Dieu bénisse votre père. Il est venu manger à ma table chaque semaine pendant près de trenteans. Il faisait partie de la famille.

Lucia s’assombrit. Curieux car il ne l’avait jamais amenée ici… Elle n’avait même jamaisentendu parler de ce restaurant. Certes, son père était un homme mystérieux, mais cela ne voulait pasdire qu’il l’aimait moins pour autant. Il fallait qu’elle arrive à se rentrer ça dans le crâne.

Celeste continua de fouiller dans le tiroir.— Il amenait toujours son associé. Ils trinquaient et riaient ensemble. Et ils me donnaient un

pourboire généreux. (Elle rit de bon cœur puis son sourire se volatilisa.) Votre père, il a aidé monfils à chasser les voyous qui voulaient nous prendre de l’argent en échange de leur protection. Il meremerciait chaque fois pour la nourriture. Et il est venu aux funérailles de mon époux il y a cinq ans.Après, il m’a serrée fort et m’a dit : « Si jamais vous ou vos enfants avez un jour besoin de quoi quece soit, appelez-moi. »

Vraiment ? Son père était toujours demeuré une énigme à ses yeux. Il la tenait à distance. Adulte,elle avait compris qu’il avait fait cela pour la protéger de son associé, un homme peurecommandable. D’un côté, elle jalousait cette femme et sa famille, qui semblaient avoir étésuffisamment proches de lui pour le qualifier d’ami. De l’autre, elle était soulagée de savoir qu’ilavait eu un cœur, comme elle l’en avait toujours soupçonné. Son père avait eu bien des torts, maisc’était resté son père. Elle l’avait aimé, comme Celeste, visiblement.

— Ah ça y est, je l’ai trouvé. Tenez.La vieille femme lui tendit une enveloppe.Lentement, Lucia prit le papier aux coins jaunis par le temps, le cœur battant.— Merci. Quand vous a-t-il remis ça ?— Peu de temps avant sa mort. Je l’ai entendu dire à un autre qu’il se méfiait de certaines

personnes de son entourage…Nicholas DiStefano avait eu du flair. Son instinct ne l’avait pas trompé. Si seulement il avait pu

empêcher son propre meurtre ! Bon sang, si seulement il lui avait fait part de ses craintes… Même si,

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en fin de compte, elle n’aurait rien pu faire pour le sauver.— Merci d’avoir conservé ce courrier et de me le donner.Celeste répondit par un hochement de tête et se dirigea vers la porte du bureau.— Je vous laisse lire ici, hein ? Je vais remuer ma sauce et vous servir une assiette. Vous avez

l’air affamés.Jon acquiesça, reconnaissant.— J’adore vos lasagnes.— Je vais vous en faire, répliqua Celeste avec un sourire. Lucia ?La jeune femme avait faim… mais cette lettre, écrite peu avant l’assassinat de son père, lui

coupait l’appétit. Cependant, elle ne voulait pas offenser la vieille dame.— Des lasagnes, ce sera parfait. Merci.À peine Celeste eut-elle refermé la porte derrière elle que le regard de Jon se posa sur Lucia.— Parle-moi. Tu as la voix qui tremble. Tu as peur ? Tu es inquiète ?Décidément, elle ne pouvait rien lui cacher.— Inquiète, oui. Je redoute cet instant. J’ai l’impression qu’après avoir lu ce message, je devrai

lui dire adieu une fois encore.Jon l’enlaça par la taille et la souleva comme une plume. Il s’installa sur le fauteuil de Celeste et

l’assit sur ses genoux, la serrant contre lui. Le siège grinça sous leur poids.— Je sais, doc. C’est un moment difficile. Et ce n’est pas juste. Mais s’il t’a laissé ce mot, c’est

qu’il avait ses raisons.Lucia acquiesça.— Et il faut que j’honore ses dernières volontés.Les doigts fébriles, elle ouvrit l’enveloppe et en sortit un papier à lettres blanc. Elle reconnut

aussitôt l’écriture penchée de son père. Une vague de mélancolie la balaya. Si seulement elle l’avaitmieux compris, si seulement ils avaient été plus proches… Elle avait toujours cru qu’ils auraient plusde temps ensemble.

Toutefois elle s’était trompée, et maintenant, elle devait ravaler ses regrets et aller de l’avant – pour lui.

Très chère Lucia,

Un millier de mots ne suffiraient pas à exprimer mon chagrin à l’idée de te quitter si tôt. Je te laisse cependant cetteénigme, ma bambina2, car toi seule, rusée que tu es, sauras déchiffrer mon message et l’utiliser. Songe à tout ce que je t’aiappris. Je compte sur toi ; tu es ma grande fierté.

Affectueusement,

Papa

Les larmes lui montèrent aux yeux. Elle cligna pour éclaircir sa vision mais en vain, son regardne cessait de s’embuer. Jon vint immédiatement à sa rescousse, recueillant ses larmes avec son pouceet lui séchant les joues.

— Ne pleure pas, doc. Il t’aimait.— Il me manque.— C’est normal. Il te manquera toujours. Il t’a en partie donné la vie et c’était ton père. Il te

protégeait et t’aimait à sa manière.Elle lâcha un soupir. Jon avait raison.— Cette lettre est cryptée. Il faut que j’exauce son dernier vœu.Jon hésita, puis il hocha la tête.

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— En tout cas, je suis là. Tu peux compter sur moi.Elle pouvait compter sur lui pour la protéger en cas de danger car ils jouaient un jeu périlleux et

risquaient de se brûler les ailes. C’était ce qu’il fallait lire entre les lignes. Elle ne l’en aima quedavantage.

— Comment est-ce que ça marche ? demanda-t-il. Comment élucider son code secret ?— À mon avis, il a employé une méthode de chiffrement assez simple. (Lucia brandit le code

laissé dans le cadre et en désigna la première ligne.) Tu vois ces trois nombres groupés ?— Quarante-quatre, cent soixante-seize, soixante-treize. (Il fronça les sourcils.). Ça ne

correspond pas aux lettres de l’alphabet…— En effet.Elle disposa les deux papiers à plats l’un à côté de l’autre et se mit à compter. Au bout de

quelques instants, elle comprit le schéma.— Il ne faut pas lire quarante-quatre. Ce qu’il veut indiquer, c’est la quatrième lettre du

quatrième mot. Il n’a jamais pris en compte les salutations ou la formule de politesse de fin, du coupnous allons nous focaliser sur le corps de la lettre. Donc la quatrième lettre du quatrième mot est…

— « S », dit Jon en prenant un bloc-notes et un stylo sur le bureau de Celeste. Ensuite ?— Cent soixante-seize, c’est un peu plus compliqué… Étant donné que le premier mot ne

comporte pas soixante-seize lettres, il nous indique la sixième lettre du dix-septième mot.— « E ».— Précisément. Le nombre suivant est soixante-treize.— « S », repéra Jon en fronçant les sourcils. « Sers » ? Il veut que tu te serves de quelque chose,

devina-t-il.— Tu vois, après cette série de trois nombres, il va à la ligne pour poursuivre le code ? C’est sa

manière d’indiquer un autre mot.— Continuons.Une demi-heure et deux assiettes de lasagnes plus tard, ils se rassirent pour contempler les

gribouillis de Jon sur le bloc-notes. Il les relut pour s’assurer qu’il n’avait pas commis d’erreur.— « Sers-toi de clé pour ouvrir box vingt-huit à Newark Storage Solutions. Donne au F.B.I. »Jon tira la clé de sa poche.— Voilà, nous avons notre réponse. Cette clé doit ouvrir la porte du box à l’entrepôt.Lucia acquiesça.— Je pense aussi. Mais qui d’autre connaît l’existence de ce box et patiente tranquillement dans

l’ombre jusqu’à ce que celui qui possède la clé vienne l’ouvrir ?Bonne question.— La personne qui a le plus à perdre, je dirai. L’assassin de ton père – Pietro. On ne peut pas le

prouver…— Pas encore. Mais avec un peu de chance, cette clé nous le permettra, intervint-elle en tendant

la paume de sa main, au creux de laquelle était l’objet. Je me demande surtout ce que contient lebox…

Lucia avait un peu de sauce tomate au coin des lèvres ; Jon la lui essuya tendrement avant del’embrasser.

— Nous allons le découvrir.

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Le trajet de Chez Celeste à l’entrepôt Newark Storage Solutions prit à peine trois minutes en taxi,ce qui donna le temps à Jon d’envoyer un message à son supérieur et à un collègue en poste dans lecoin pour qu’ils se tiennent prêts à intervenir – au cas où ils auraient besoin de renfort. Le soleildardait ses rayons dans le ciel sans nuages. C’était une journée idéale… et pourtant, Jon avait unmauvais pressentiment. Un frisson lui parcourut la nuque. Personne ne semblait les suivre. Ce qui nevoulait pas dire pour autant qu’on ne les attendait pas en embuscade.

— Je t’en prie, doc, remonte dans le taxi. Je vais gérer la situation tout seul à partir demaintenant.

Elle secoua la tête énergiquement.— Non. Mon père m’a chargée de remonter cette piste. Il y a peut-être une autre énigme à

résoudre. Ce serait bien son genre.Jon céda à contrecœur, ravalant un juron. Certes, il pourrait faire appel au F.B.I., mais il y aurait

alors des délais à respecter et de la paperasse à remplir, et il n’avait pas de temps à perdre avec ça.Lucia s’entretint avec le propriétaire de l’entrepôt, qui leur en autorisa l’accès. Jon passa un bras

protecteur autour de la taille de la jeune femme et, ensemble, ils remontèrent les allées étroites où sesuccédaient des portes en tôle ondulée orange arborant des numéros peints en noir. Il priait pour quela piste s’arrête là et lui procure la paix qu’elle recherchait. Si cela lui permettait en plus dedisculper Stef, ce serait la cerise sur le gâteau. Le temps était compté pour son frère et, si cette pistese révélait infructueuse, il allait devoir reprendre tout à zéro. Or il n’avait pas l’intention de jeterl’éponge.

Pas plus qu’il n’était prêt à renoncer à Lucia. Il ignorait si, pour elle, leur histoire n’était qu’uninterlude agréable, une manière de réaliser ses fantasmes. À la rentrée, allait-elle retourner dans sonécole privée pour gosses de riches et reprendre le cours de sa vie sans lui ? Ils avaient tous deuxévité d’évoquer l’avenir pour ne pas se détourner de leur mission. Mais à présent que la finapprochait, Jon ne pouvait s’empêcher de penser au futur. Il ne voulait pas l’envisager sans elle.Pourrait-elle accepter son mode de vie, le danger qu’il représentait, la séparation, l’adrénaline ?

— Nous y voilà, dit-elle d’une voix tremblante en parvenant devant le box.Elle prit une grande inspiration.— Je vais l’ouvrir, dit-il.— Non. Il voulait que ce soit moi qui le fasse et je ne le décevrai pas.Jon savait exactement pourquoi Lucia avait fait la fierté de son père. Intelligente, oui, elle l’était.

Cela sautait aux yeux. Cependant, c’était son cran et sa ténacité qui épataient Jon. Elle aurait puplanter sa tête dans le sable et décider de ne pas déterrer le secret que son père voulait dévoiler, quelqu’il fût. Mais non. Elle insistait pour faire tout elle-même, qui plus est. Ni larmes ni plaintes. Elleaffrontait le danger la tête haute. Et il l’admirait pour cela.

Lucia lâcha un long soupir et tâcha de faire cesser le tremblement de ses mains. Elle mit la clédans la serrure de la porte numéro vingt-huit. Le cadenas s’ouvrit et elle l’ôta. Jon se pencha pourremonter le rideau métallique. Le soleil s’insinua peu à peu dans le box, révélant progressivement cequ’il dissimulait.

Du béton. Du vide. Rien que l’écho de leurs pas tandis qu’ils pénétraient dans la pièce de dixmètres carrés qui ne contenait rien à l’exception d’une petite boîte dans un coin.

Lucia regarda l’objet, à la fois subjuguée et terrifiée, comme s’il s’était agi d’un serpentvenimeux. Cette boîte recelait sans doute un secret pour lequel son père était mort. Cet objet remuaitaussi le souvenir du défunt, obligeant Lucia à affronter sa mort une fois de plus et à lui dire adieu denouveau.

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Elle se dirigea vers la boîte et se baissa.— Il y a un code.Or ils n’avaient plus aucun indice à se mettre sous la dent. Mince.— Des idées ? Ton anniversaire peut-être ?Lucia secoua la tête.— C’était trop évident pour lui. Il n’aurait jamais choisi une telle date ou une adresse…— Puis-je ?Il tendit la main.Sans un mot, elle lui confia la boîte. Jon examina le couvercle ; il souffla dessus pour en chasser

l’épaisse couche de poussière, puis il l’observa sous toutes les coutures. Lorsqu’il glissa les doigtsen dessous, l’irrégularité de la surface le fit tiquer. Il la retourna pour en inspecter le dessous, unobjet remua à l’intérieur. Le flic en lui savait qu’il lui suffisait d’appeler une équipe pour forcer lesatané coffre-fort. Mais il était censé être en congé et c’était Lucia qui menait la danse jusqu’à nouvelordre. Il préférait attendre d’avoir des preuves concrètes avant d’ameuter son supérieur et toute uneéquipe. Peut-être que cette boîte ne contenait qu’un ramassis de souvenirs de famille, à moins qu’onne l’ait déjà pillée. C’était peu probable… mais tant qu’il n’en avait pas la certitude, il allait devoirronger son frein.

Trois lettres étaient gravées sur la surface métallique. Il les lut à voix haute :— LRD.— Ce sont mes initiales. Oh, il avait l’habitude de faire ça quand j’étais petite. C’est le code de

César. Aussi intitulé le chiffrement par décalage. On obtient le texte chiffré en décalant chaque lettred’un certain nombre de « caractères » dans l’alphabet. Comme il n’a rien précisé, je suppose qu’iln’y a qu’un cran de décalage. Ce qui signifie que A devient B, B devient C, etc.

Jon avait entendu parler de cette méthode cryptographique.— Donc L est remplacé par M, R par S, et D par E. Le problème, c’est que le cadenas est

numérique.— Les lettres représentent sans doute leur numéro de classement alphabétique. M correspond à la

treizième lettre.Jon réfléchit un instant.— Ce qui veut dire que la combinaison est treize, dix-neuf, cinq ?Elle n’avait pas l’air convaincue.— C’est l’explication la plus plausible. Connaissant mon père.Il lui rendit la boîte.— À toi l’honneur.— D’accord, dit-elle en acceptant le coffret d’un air un peu réticent.En quelques secondes, elle entra la combinaison. À la surprise de Jon, le cadenas céda du

premier coup.— Mon Dieu, souffla-t-elle. Ça a marché.Jon la ramena contre son torse.— Tu connaissais mieux ton père que tu ne le pensais. Il serait très fier de toi.Elle lui adressa un sourire timide, et c’était sans doute la vision la plus adorable qu’il ait eue de

sa vie. Dans ses yeux ocre brillait une flamme, et sa bouche était enflée par les baisers qu’il lui avaitprodigués durant la nuit.

— Ouvre-le, l’encouragea-t-il. Tu l’as mérité.

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Elle retira le cadenas et le lui tendit puis elle souleva le couvercle et poussa un petit cri. Jon jetaun coup d’œil à l’intérieur et découvrit une bague de fiançailles filigrane en platine. Très ancienne,elle était sertie d’un magnifique diamant ovale d’un carat et demi. À côté, un médaillon en or jauneincrusté de deux émeraudes surmontées d’un petit diamant. Il pendait à une chaîne ornée de cristaux etde perles en onyx.

— Je cherche la bague de fiançailles de ma grand-mère et le médaillon de mon arrière-grand-mère depuis la mort de papa !

Cependant, ce fut l’iPod qui reposait à l’intérieur, près des bijoux qu’elle sortit en premier.Elle l’inclina à la verticale et l’alluma. Rien. Jon ne fut pas franchement surpris. Il fourra la main

dans sa poche.— Il est resté plusieurs années dans ce coffre, doc. La batterie est morte.Elle hocha la tête, visiblement nerveuse.— Oui. J’aurais dû m’en douter. Je suis simplement…— Un peu remuée, c’est normal.Il lui tendit le chargeur portatif qu’il gardait sur lui pour son iPhone.À cette vue, les yeux de Lucia s’illuminèrent et un voile de soulagement passa sur son visage.

Elle relia la tablette au chargeur. Il était heureux de la voir sourire mais…— Nous ne devrions pas faire ça ici. Rapportons-le à l’hôtel.Il préférait être en lieu sûr afin d’examiner le contenu de l’appareil avant de le présenter à son

patron, qui serait certainement très intéressé par la tournure des événements.— Ça fait des années que je patiente. J’ai résolu l’énigme qu’il m’a laissée à moi. Il faut à tout

prix que je sache ce qu’il voulait me dire.Jon hésita. Sa requête n’était pas raisonnable ; Lucia se laissait déborder par ses émotions. Le

sentiment d’une menace imminente le saisit à nouveau. Ce qui se trouvait sur cet iPod avait coûté lavie à Nicholas. S’il l’avait caché avec autant de précautions, c’était pour une raison. Il lui avaitdonné pour consigne de remettre l’objet au F.B.I. En outre, dans cet entrepôt, ils étaient exposés àn’importe quel danger et extrêmement vulnérables. À l’exception de la grille destinée à stopper lesvéhicules, l’endroit était facilement accessible.

— Lucia, nous ne sommes pas en sécurité ici. Allons nous mettre à l’abri…— Rien que deux minutes. S’il te plaît. Si, d’ici là, nous n’avons rien trouvé d’intéressant,

j’éteindrai l’appareil. Ça va aller. On ne risque rien. Si Pietro avait suspecté cette cachette, il seraitdéjà venu récupérer le coffre. Et je ne pense pas qu’on nous ait suivis.

— On n’en sait rien, Lucia.— Tu es parano.Il arqua un sourcil.— Mieux vaut être parano que mort.Elle le contempla en silence, pesant ses mots. À son expression, il se doutait qu’elle allait

protester.Ce fut la goutte d’eau. Jon en eut assez. Il s’était mis en retrait et l’avait laissée résoudre

l’énigme à sa manière. À présent, elle empiétait sur son terrain. Même s’il mourait d’envie de luiaccorder son vœu, il ne pouvait pas se permettre de tout lui céder dès lors qu’il s’agissait de sasécurité.

— Je ne sais pas ce qui se passe dans ta jolie petite tête, doc, mais garde-le pour toi. Je t’ai déjàemmenée de force une première fois. Je n’hésiterai pas une seule seconde à le refaire, crois-moi.

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Lucia se cramponna à l’iPod. Jon ne plaisantait pas, elle le savait. Ce n’étaient pas des paroles

en l’air. Il y avait un danger potentiel et elle ne pouvait pas le nier. Mais il était tout aussi dangereuxd’attendre. Son père avait voulu lui transmettre un message et elle devait découvrir la vérité sans plustarder.

— Deux minutes, insista-t-elle en appuyant sur quelques boutons.Jon voulut protester mais il se ravisa en voyant le visage de Nicholas DiStefano apparaître sur le

petit écran.Lucia plaqua sa paume sur sa bouche pour contenir un sanglot. Il s’agissait d’une vidéo filmée

depuis une caméra de surveillance dans son bureau, à l’arrière d’un de ses pressings. D’après la dateindiquée, elle avait été prise environ un mois avant sa mort.

Accablée par le chagrin, elle retint son souffle et regarda l’écran, où défilait le film. Son pèreétait en train de feuilleter des papiers.

Soudain Pietro entra dans la pièce et referma la porte derrière lui.— Nick, il faut qu’on parle de Casale.Son père ne leva pas la tête ; il ne répondit rien.— Tu m’écoutes ? s’impatienta Pietro.— Je t’ai entendu.— Putain, fais quelque chose ! s’exclama l’oncle en abattant son poing sur la table. Cet enfoiré

devient ingérable, il en veut toujours plus. Il laisse passer les mandats et mises sur écoute alors qu’onle paie pour éviter ça.

— Il ne faudrait pas qu’il se fasse pincer, il reste discret. Il a fait son possible pour minimiser cemerdier. On en a déjà parlé. Inutile de remettre le sujet sur le tapis.

— Foutaises ! Tu t’es ramolli avec le temps. Cette putain d’organisation est en train de nousclaquer entre les doigts. Elle va s’écrouler et nous entraîner avec elle et toi tu me dis d’être patient !

Son père finit par lever la tête ; il foudroya du regard son frère cadet.— Elle ne va pas s’écrouler. Je sais très bien ce que je fais. Si jamais tu te débarrasses de

Casale, nous n’aurons plus personne de notre côté chez les fédéraux. Tous ces ripoux de flics que tut’es mis dans la poche un peu partout dans le New Jersey ne pourront rien pour nous. Cesse det’occuper de cette histoire. (Il se mit debout.) J’ai une réunion, alors débarrasse le plancher.

— Ah bon ? Avec qui ?— Ça ne te regarde pas, répliqua son père en passant sa main dans ses cheveux poivre et sel.

N’oublie pas de fermer la boutique à clé en sortant.Il quitta la pièce en claquant la porte. Pietro lâcha un juron puis se mit à faire les cent pas. Au

bout d’un moment, il sortit son téléphone portable de sa poche et composa un numéro.— Oui, c’est moi. Il faut qu’on agisse. On doit neutraliser Casale. (Silence.) Non, j’ai un plan. Le

premier de chaque mois, Stefan Bocelli rend visite à notre honorable juge pour lui verser ses pots-de-vin. La prochaine fois qu’il y va, tu l’y suivras en cachette. Attends qu’il parte et élimine le juge.On planquera ensuite l’arme dans les affaires du lèche-bottes de Nicholas. Tire-lui deux balles dansla tête, à la manière de Bocelli. Ses empreintes sont sûrement déjà partout dans la maison. Passe uncoup de fil anonyme ; fais comme si tu étais un voisin qui passe devant la propriété au moment descoups de feu. (Pietro éclata de rire.) Et hop ! Bingo. Ni vu ni connu. Personne ne sera triste de voirtomber Stefan.

Lucia eut un mouvement de recul et posa les yeux sur Jon. Elle avait lu des rapports détaillant lemeurtre du juge Casale ; ç’avait été une affaire vite résolue. Les preuves contre Stefan Bocelli

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avaient été accablantes. On l’avait écroué en un rien de temps.— Cette vidéo suffira sans doute à faire libérer ton frère.Il cligna les yeux en serrant l’iPod si fort que ses jointures devinrent blanches.— Peut-être. Je l’espère.— Quoi ? aboya Pietro dans le micro du téléphone. Oui, il est temps de se débarrasser de mon

grand frère aussi, et je sais exactement comment. Cette organisation a besoin de changementsradicaux. Je m’en chargerai personnellement. En attendant, ferme ta putain de gueule. À plus.

Pietro ferma le clapet du portable et l’écran de l’iPod devint noir pendant quelques secondesavant que le menu s’affiche de nouveau.

Lucia s’efforça d’intégrer toutes les informations, les passant et les repassant en boucle dans satête pendant un long moment. Un silence pesant s’était abattu sur eux. Elle finit par reprendre laparole :

— Je le soupçonnais d’être pour quelque chose dans la mort de mon père. La police n’a jamaisvraiment cherché à élucider son assassinat. À leurs yeux, mon père n’était qu’une crapule qui n’envalait pas la peine.

Jon enveloppa son bras autour d’elle et la ramena contre son torse chaud et ferme.— Ce n’est pas probant, mais ça suffira peut-être à rouvrir son affaire et celle de mon frère, dit-il

en levant le menton et en parcourant les lieux du regard. On passera des coups de fil dès qu’on serade retour à l’hôtel. Allons-y.

Jon s’empressa d’envoyer un SMS puis il récupéra l’iPod et le fourra dans sa poche. Il avaitraison – il fallait contacter sans attendre les personnes aptes à agir. Autrement dit, faire coffrer Pietroet libérer Stefan.

— Tu appelles des renforts ? s’enquit-elle.— Oui. Je les avais prévenus de notre arrivée à l’entrepôt pour qu’ils se tiennent prêts. Je viens

de leur donner le feu vert.Elle observa d’un air songeur les bijoux que son père lui avait laissés dans le coffre.— Et qu’est-ce qu’on fait d’eux ?Il les prit et les déposa au creux de sa main.— Ce n’est pas conforme au protocole, mais ça n’a aucune portée sur l’affaire. Prends-les. Ce

sera notre secret.Malgré les circonstances, Jon trouvait le moyen de la faire sourire. Après avoir enfilé les bijoux,

elle souleva le coffret.— Je le laisse ici ?Il réfléchit longuement avant d’acquiescer.— Inutile de s’encombrer. On ne sait jamais. Mieux vaut qu’on se tienne prêt à fuir.À vrai dire, Lucia voyait mal comment la menace pouvait les rattraper maintenant. Elle posa le

coffre par terre.— Tu ne m’as pas kidnappée au meilleur moment, dit-elle en indiquant ses escarpins. On ne peut

pas dire que mes chaussures soient très adaptées à la course.Il esquissa un sourire espiègle.— Mais elles sont sacrément sexy.— Merci, dit-elle, sensible à son compliment mais aussi à sa gentillesse et à sa générosité.— Pas la peine de me remercier, murmura-t-il en déposant un petit baiser sur ses lèvres.Peu après, ils quittèrent le box. Lucia se demanda ce qui les attendait à présent que cette histoire

était finie. Elle aimait Jon, mais il était peu probable qu’il soit prêt à l’entendre. Après tout, il avait

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disparu du jour au lendemain deux ans plus tôt. Qu’est-ce qui l’empêchait de recommenceraujourd’hui ?

Jon abaissa le rideau métallique et Lucia replaça le cadenas.Côte à côte, ils regagnèrent en silence l’entrée principale de l’entrepôt ; elle adressa un signe au

gardien, qui actionna l’ouverture de la barrière. Ils attendaient l’arrivée de leur taxi non loin de làquand un bruissement derrière eux retint leur attention.

Elle voulut pivoter sur elle-même mais Pietro fut plus rapide. Il la ramena brutalement contre sontorse et colla le canon d’un revolver contre sa tempe. Elle poussa un cri et posa sur Jon un regardterrorisé. Son cœur martelait ses côtes.

Jon avait dégainé son arme en un éclair et la pointait sur Pietro. Mais celui-ci n’était pas grandet, s’il tirait, il risquait de la blesser.

— Tu pensais que je ne savais pas, petite ? s’exclama Pietro en ricanant à son oreille. Tu esdouée dans ton domaine mais dès lors qu’il s’agit des hommes, tu n’es pas très futée.

— Les criminels, tu veux dire, rugit-elle.— Lucia, intervint Jon pour l’avertir de ne pas provoquer Pietro.— Non !Ce n’était pas un courage aveugle qui la stimulait mais une colère incontrôlable. Évidemment, il y

avait de fortes chances pour que Pietro la tue. Mais il était hors de question qu’elle se laisse fairesans se battre. Et si elle arrivait à le distraire le temps de se libérer de son emprise, tant mieux.

— Je sais que tu as assassiné mon père.Elle était tellement furieuse que sa voix tremblait.— Ah, tu as trouvé la vidéo de ce cher Nick. Si j’avais su qu’il filmait tout ce qui se passait

dans ce bureau… grogna Pietro. L’organisation ne s’est jamais aussi bien portée que depuis que jel’ai liquidé. La famille Gamalini avait besoin d’un nouveau souffle, un visage neuf. Nick s’étaitramolli et tout le monde le savait, depuis les associés jusqu’aux sous-fifres.

— Et tu as fait porter le chapeau à mon frère pour le meurtre du juge Casale, dit Jon.Pietro haussa les épaules.— Tiens, le traître prend la parole. Espèce d’enfoiré d’agent fédéral. Oui, il fallait d’abord que

je me débarrasse de Stefan. Si je ne l’avais pas fait, il m’aurait tué. Il était fidèle à Nick. Il aurait faitn’importe quoi pour protéger mon frère. Ça n’a pas été compliqué. Maintenant, dit-il à Jon, assezblablaté. Baisse ton arme, ordonna-t-il en enfonçant son revolver dans la tempe de Lucia. Baisse-lamaintenant !

Le cœur de la jeune femme s’emballa, son sang se glaça dans ses veines, et elle implora Jon ensilence de ne pas écouter Pietro. À la seconde où il obéirait, son oncle les abattrait tous les deux.Cependant, Jon ne pouvait pas riposter seul. Elle allait devoir l’aider. Dieu merci, Mark étaitpartisan de la self-défense. Il leur avait appris à Nicki et à elle à se défendre. Et il lui avait faitsuivre un petit entraînement quand il avait su qu’elle s’envolait pour un club de célibataires.

Elle avait toujours la clé du box dans sa main ; elle la fit glisser jusqu’à ce qu’elle tienne entreses doigts. Puis elle inspira un grand coup – les secondes étaient comptées. Son heure était peut-êtrevenue, mais elle n’allait pas mourir sans tenter de se défendre.

Tandis que Jon examinait Pietro à la recherche d’un angle de tir, Lucia se servit de son bras librepour assener un violent coup de coude dans le ventre de son oncle. Il lâcha un rugissement de douleuret l’arme pressée contre la tempe de Lucia faiblit. Elle en profita pour lui planter la clé dans lacuisse.

— Aïe ! Espèce de sale chienne ! grogna Pietro en agrippant sa jambe.

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Il saisit le poignet de la jeune femme de l’autre avant qu’elle ne puisse s’enfuir.Son étreinte s’était cependant relâchée. En un éclair, Lucia pivota sur elle-même et donna un coup

à la main qui tenait l’arme. Elle entendit un os se briser. Le revolver tomba par terre et Pietro se pritla main en poussant un cri.

— Putain, tu m’as cassé le doigt ! s’écria-t-il en se baissant pour récupérer son arme.Mais elle le devança et lui arracha le revolver des mains. D’un coup d’œil, elle s’assura que la

sécurité était ôtée et elle le mit en joue.Jon la rejoignit aussitôt, son arme également braquée sur Pietro. Elle lui lança un regard, auquel

il répondit d’un hochement de tête. Il esquissa un sourire et arqua un sourcil.— Impressionnant.— Merci, dit-elle sèchement.Elle n’osait pas quitter son oncle des yeux. Elle s’approcha de lui et s’écria :— Tu ne pensais pas que j’étais une battante, hein ? Tu me prenais pour une intello dénuée de bon

sens. Tu pensais pouvoir prendre le dessus sur moi facilement et forcer Jon à se rendre en luipromettant que tu me laisserais la vie sauve ? Espèce d’imbécile !

— Ton père se retournerait dans sa tombe s’il te voyait. Tu te comportes comme un homme. Tusais à quel point il tenait à ce que les femmes soient douces et féminines.

— Arrête ton cinéma. Tu penses vraiment que je vais tomber dans le panneau ? Tu as tué monpère, ton propre frère. À mon avis, c’est plutôt pour cette raison qu’il doit se retourner dans satombe.

Pietro lâcha un grognement, révélant une rangée de chicots pourris.— Je l’ai fait de mes propres mains. J’ai appuyé sur la gâchette. Rien ne m’aura fait plus plaisir

que d’abattre cet aîné qui m’avait toujours fait de l’ombre, et qui s’était toujours cru supérieur à moi.J’y ai pris du plaisir. Puis je suis allé à son enterrement et je vous ai prises dans mes bras, vous, sesfilles chéries, et j’ai ricané en silence à chacune des larmes que vous avez versées.

— Je te hais, rétorqua-t-elle en crispant son poing libre. (Jon lui saisit le coude pour la retenir.)Je te hais de tout mon être. Mais cesse de gaspiller ta salive. Ce n’est pas en me poussant à bout quetu vas récupérer ton arme. En revanche, je vais te donner un petit aperçu de mon désir de vengeance.

Elle serra les dents et lui assena un coup de genou dans l’entrejambe. Son oncle s’écroula à terre,la main sur les testicules.

— Ça, c’est pour mon père. Et ça… (elle le gifla violemment)… c’est pour moi.Jon l’attira en arrière.— Assez, Lucia. Il est cuit. Le F.B.I. a envoyé une brigade à notre rescousse. Ils viennent le

cueillir.— Tu ne peux rien prouver, Bocelli. Toutes tes preuves sont indirectes. Il n’y en a pas une qui

tienne la route. C’est ma parole contre la tienne. Ça fait des années que tu essaies de me faire porterle chapeau pour disculper ton frère, et tout le monde le sait.

Le sourire aux lèvres, Jon se pencha vers le visage de Pietro.— La différence maintenant, vois-tu… (Il tira son téléphone de sa poche. L’appareil était allumé,

en mode microphone ; il avait pris l’intégralité de l’échange.) C’est que pendant que ta nièce tefichait une raclée, j’ai pu enregistrer tes aveux.

Lucia passa le début de soirée à répondre aux questions du F.B.I., décrivant dans les moindresdétails la journée qu’elle avait passée à remonter la piste du meurtrier de son père. À l’issue de

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l’entretien, une charmante femme agent l’avait ramenée à son hôtel. On l’avait séparée de Jonquelques heures auparavant ; elle ignorait s’il allait revenir et, si oui, quand.

Une fois dans sa chambre, Lucia s’avachit sur le lit, affamée et exténuée. Pourtant, elle auraitvolontiers renoncé à un repas et une sieste pour être avec Jon. Sur ce lit, il lui avait pris sa virginité,ce qui avait renforcé son amour pour lui. Maintenant qu’il avait disculpé son frère, qu’allait-iladvenir de leur couple ? Deux ans plus tôt, il l’avait quittée sans un mot. Et si, à présent qu’il avaitatteint son but, il n’avait plus besoin d’elle ? Lucia ne supportait pas l’idée qu’il se soit servi d’elle.Elle n’aimait pas se déprécier, mais il était inutile qu’elle se voile la face. Même si c’était torrideentre eux, il fallait qu’elle soit naïve pour en attendre plus de lui.

Toujours est-il qu’elle n’avait pas l’intention de baisser les bras.Il fallait qu’elle rentre à Las Vegas, histoire de demander conseil à sa sœur. Ensuite elle

retrouverait Jon Bocelli et lui dirait le fond de sa pensée. Elle avait réussi à faire la paix avec sonpère ainsi qu’à réunir les preuves nécessaires à l’arrestation de Pietro. Ce n’était pas rien.

Mais Jon lui avait donné envie de beaucoup plus.Lucia secoua la tête pour chasser ces idées, puis elle passa quelques coups de fil dont un à la

compagnie aérienne et un autre à sa sœur. Elle fut presque soulagée de tomber sur sa messagerie. Ellepréférait lui raconter les événements en personne. Comme ça, elle pourrait la gronder et la câlineraux moments opportuns du récit.

Après avoir raccroché, elle prit une douche brûlante, ce qui apaisa quelque peu son esprit. Uneserviette nouée au niveau du buste et le corps parfumé de lait hydratant, Lucia ouvrit la porte dans unnuage de buée.

Et se retrouva nez à nez avec Jon.Il avait ôté sa veste et dénoué sa cravate, ses cheveux étaient ébouriffés. Il avait l’air éreinté,

mais il demeurait à ses yeux le plus bel homme d’entre tous. Son ventre se noua. Quel que soit le sortque leur réservait la vie, jamais elle n’oublierait ce qu’il avait fait pour elle.

Elle déglutit avec peine.— Salut. Alors… c’est terminé ? Merci pour tout, Jon, dit-elle en lui tendant la main.Il pencha la tête de côté et lui décocha un regard noir avant de poser un œil mécontent sur la main

qu’elle lui présentait. Lucia la laissa retomber, soudain mal à l’aise. Elle eut l’impression d’avoiragacé un animal féroce.

Jon saisit la poignée de la salle de bains derrière elle et ferma la porte ; puis il fit un pas en avantet plaqua Lucia contre la cloison.

— Tu vas quelque part, doc ?— J’ai un vol pour Las Vegas dans la matinée.Son expression devint menaçante.— Tu avais l’intention de me parler avant de partir ?— J’ignorais si tu étais toujours dans les parages. Et puis, je n’étais pas certaine que tu en aies

quelque chose à faire. Il y a deux ans, tu as disparu sans même te donner la peine de dire « je doispartir », « au revoir » ou encore « va te faire voir ». Je me suis dit que c’était plus ou moins la mêmechanson aujourd’hui, à un couplet près.

— Tu t’es dit ça, hein ? Sans même me consulter ? (Jon prit une grande inspiration et contemplale plafond, les mâchoires crispées.) On n’arrive pas vraiment à communiquer, là. J’avoue, je t’aiquittée sans un au revoir il y a quelques années. Je ne pensais pas que tu serais capable de gérer mesattentes. Il y a deux jours encore, j’en doutais.

Sa remarque la mit en rogne.

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— J’étais vierge, pas débile. Épargne-moi tes beaux discours ! s’exclama-t-elle, exaspérée,tâchant de s’extirper de ses bras. Je suis adulte, je peux prendre mes propres décisions. En tout cas,je ne suis pas en sucre. Quoi que tu aies à me dire, je suis capable de l’entendre.

Il lui bloqua le passage.— C’est ce que nous verrons, ma chérie – une fois que tu m’auras laissé finir.Lucia l’observa longuement d’un air méfiant, prise d’une vague inquiétude. Elle l’avait provoqué.— Je t’écoute…— J’ai longtemps cru que ton manque d’expérience était un problème. Depuis que je t’ai

emmenée de force, le soir de ton anniversaire, tu m’as prouvé que j’avais tort. Tu es courageuse etvolontaire, et tu as une bonne capacité d’adaptation. Aujourd’hui, lorsque Pietro nous a attaqués, jeme suis volontairement mis en retrait pour te permettre de régler tes comptes. S’il avait touché à unseul de tes cheveux, je lui aurais explosé la tête. J’étais prêt à bondir. L’appel de la gâchette medémangeait. Mais tu t’es occupée de lui comme une chef.

Il se rapprocha d’elle et glissa sa cuisse entre les siennes. Comment aurait-elle pu rester demarbre ?

— Tu t’es bien occupé de moi la nuit dernière, dit-elle dans un souffle.Le grondement de sa voix l’excita. Sans oublier le souvenir des moments qu’ils avaient partagés

dans cette même pièce.— Il y a deux ans, j’étais convaincu que tu n’étais qu’une jeune fille naïve qui ne saurait pas faire

face à mes besoins, qui ne supporterait pas la vie que je mène. Tu m’as prouvé le contraire, Lucia. Jesuis fier de toi. Je t’aime. La seule manière pour toi de te débarrasser de moi, c’est de me dire queces sentiments ne sont pas réciproques.

Lucia lâcha un petit cri ; elle cligna les yeux. Pincez-moi, je rêve ! Elle avait sans doute l’aird’une godiche, debout face à lui, la bouche ouverte.

— Tu m’aimes ?Jon inclina la tête. Un sourire se dessina au coin de ses lèvres.— Tu es une fille intelligente. Assemble les pièces du puzzle. À ton avis ?Les pensées se bousculèrent dans la tête de la jeune femme.— Tu ne vis pas très loin d’ici, n’est-ce pas ?Son sourire s’étira, lui indiquant qu’elle était sur la bonne voie.— Pas loin du tout.— Tu aurais pu rentrer chez toi au lieu de repasser par cet hôtel, devina-t-elle.Il plaça ses mains sur la porte de part et d’autre de son visage et se pencha en avant. Il lorgna sa

serviette comme si c’était le morceau de tissu le plus déplaisant qu’il eût jamais vu.— Bingo !— Si tes cohortes t’ont laissé partir en même temps que moi, tu as eu amplement le temps de

réfléchir à tout ça.— Tout à fait. Et de préparer un discours… et quelques autres surprises.Un discours qu’il avait entamé en lâchant la bombe « Je t’aime ». Que lui réservait-il d’autre ?— Je suppose que tu n’as pas pour habitude de dire aux femmes que tu les aimes.Jon arqua un sourcil.— Jamais.— Vraiment ?Il secoua la tête.

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— Je ne l’ai jamais dit. Doc, grâce à toi, je n’ai plus envie de poser sur le monde un regarddésabusé. Avec toi à mon côté, je vois les choses différemment, je reprends goût à la vie. Pour lapremière fois depuis des années, j’ai un regain d’espoir. Tu es une femme incroyable… Tu vas mebriser le cœur et me mettre à la porte ?

Ciel, ne lisait-il pas ses sentiments dans ses yeux ? Peut-être avait-il besoin d’être rassuré, luiaussi. Cette pensée l’émut.

— Non, je ne vais pas te mettre à la porte. Je t’aime, Jon. Et c’est la première fois que jeprononce ces mots aussi.

Le visage de Jon s’illumina et, malgré l’obscurité de la pièce, elle vit son regard s’éclairer. Ilprit son visage en coupe et déposa un baiser délicat sur sa bouche. Une onde de joie se répandit enelle comme la chaleur d’un rayon de soleil après un long hiver. C’était un peu trop mièvre et poétiquemais elle ne l’aurait pas décrit autrement. Elle frotta sa joue contre sa mâchoire et noua ses brasautour de sa nuque, inhalant son parfum musqué, une odeur à la fois grisante et réconfortante.

Il baisa son menton, son nez et ses lèvres une dernière fois.— Tu me combles de bonheur, chérie. J’ai hâte d’être de nouveau en toi et de te le montrer…

Dénoue ta serviette.Elle écarquilla les yeux.— Tu veux me voir nue ?Il haussa un sourcil noir.— À vos ordres, monsieur.Elle s’exécuta. La serviette tomba à ses pieds.Un sourire canaille au coin des lèvres, Jon la ramassa et la jeta derrière lui, sur un fauteuil. Elle

était nue comme au premier jour sous son regard implacable. Un léger courant d’air généré par l’airconditionné souffla sur sa peau, et la pointe de ses seins se tendit. Le regard ardent dont il la couvaitl’émoustilla. Au fil des secondes, son excitation s’accrut. Elle dansa d’un pied sur l’autre, tâchant deréprimer son désir.

— Cesse de bouger, ordonna-t-il.— J’ai tellement envie… protesta-t-elle en grimaçant.— Je veux t’exciter jusqu’à ce que tu n’en puisses plus, que tu m’implores de te pénétrer, que tu

hurles mon nom et me griffes le dos pendant que je te contenterai.La douleur entre les cuisses de Lucia s’intensifia et son intimité se mit à palpiter. Le souffle

court, elle ravala une plainte et resta figée tout en le dévorant des yeux.Il glissa son pouce sur sa bouche.— Je suis impatient de goûter au plaisir que me promet ce regard. Mais avant tout, j’ai trois

questions pour toi, doc.Elle prit son pouce dans sa bouche et l’aspira sensuellement.— Oui, monsieur.Il lui saisit le menton et la dévisagea d’un air grave.— Est-ce que tu es prête à enlever le médaillon de ton arrière-grand-mère si je te donne quelque

chose qui a autant de valeur sentimentale ?Son cœur se mit à bondir. S’il avait l’intention de lui offrir un bijou symbolisant le lien les

unissant, son aïeule approuverait, elle n’en doutait pas. D’une main fébrile, elle dégrafa le fermoir etôta le médaillon de son cou. Jon tendit la main et elle le déposa au creux de sa paume. Avecprécaution, il le mit dans la poche arrière de son pantalon. Puis il sortit de celle avant un petit écrinbleu Tiffany & Co.

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— Nous n’avons pas de témoin, mais ça n’en est pas moins un engagement. (Il plaça sa main sursa joue et plongea ses yeux dans les siens.) Lucia Rose, acceptes-tu de porter ce bijou en signe de tonamour et de ton obéissance ? En échange de quoi je m’engage à te chérir et à m’occuper de toi aussilongtemps que nous serons ensemble.

Il lui fallut quelques instants pour saisir la portée de sa requête.— Tu me… demandes de porter ton collier ?— Oui. Je te demande d’être à moi et rien qu’à moi. Exclusivement. C’est sacré dans le monde

BDSM.Elle était novice en la matière, cependant elle perçut la gravité de son ton.— Je n’ai jamais fait ça, reprit-il. Je n’en ai jamais eu envie. Mais tu as tout changé. Acceptes-tu

de porter ce symbole ?Lucia se mordit la lèvre. Tout ce qu’elle connaissait des rituels SM provenait de la fiction.

Jusque-là, Jon l’avait traitée avec douceur et déférence, mais il possédait un jardin secret qu’il ne luiavait pas encore révélé. Un côté obscur. Bien qu’il se soit contrôlé la nuit passée, elle le sentait. Sielle acceptait, un jour il se pouvait qu’il la fesse et la flagelle, la menotte à son lit et la soumette àtous ses fantasmes. N’importe lequel d’entre eux sans mesure aucune. En toute sincérité, celal’effrayait un peu. Mais au plus profond d’elle-même, elle mourait d’envie d’avoir un maître quisaurait prendre soin d’elle. Or Jon représentait tout ce qu’elle avait toujours espéré. Même s’il semontrait autoritaire, il veillerait à ce qu’elle prenne du plaisir en toute sécurité.

Et puis, elle ne voulait pas renoncer à lui. S’il fallait qu’elle accepte pour que leur relation aitune chance de s’épanouir, elle le ferait.

Le cœur battant la chamade, elle acquiesça.— J’accepte.— Agenouille-toi, ma chérie.Elle se mit lentement à genoux devant lui et ploya la tête.Il lui caressa doucement la chevelure, entremêlant ses doigts à ses boucles avant d’attacher un

objet lourd et froid autour de son cou.— Parfait. J’ai hâte de prendre soin de toi.Il l’aida à se relever, ouvrit la porte de la salle de bains et alluma la lumière pour qu’elle vît

dans le miroir la chaîne en platine ornée d’un pendentif en forme de cœur. Incrusté d’un diamant, il senichait au creux de sa gorge, un petit verrou en son centre.

Un sourire retroussa les lèvres de Lucia.— C’est beau.— C’est une marque de possession. Ce collier signifie que tu m’appartiens et tu devras le porter

vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Ne le retire pas sans ma permission.Elle n’aurait pas voulu qu’il en soit autrement.— Oui, monsieur. Je veux dire : oui, maître.Excité par ses paroles, il s’agrippa au lavabo et pressa son érection contre sa chute de reins.— Entendre ce mot dans ta jolie bouche me donne envie de te prendre sur-le-champ.Lucia partit d’un éclat de rire.— Vraiment ?Il déposa une pluie de baisers sur son cou et son épaule en susurrant à son oreille :— Absolument.Il fit courir ses mains sur ses hanches et son ventre, soupesa ses seins et lui pinça gentiment les

tétons. À son cou pendait le médaillon où se reflétait la lumière vive de la pièce. Elle s’abandonna

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contre lui, pleine d’un sentiment de bonheur indicible.Il jura dans sa barbe et s’écarta d’elle à contrecœur. Il fourra de nouveau la main dans sa poche

et en sortit un écrin de velours noir, cette fois. Il l’ouvrit, révélant une bague de fiançailles surmontéed’un magnifique solitaire. À cette vue, Lucia lâcha un petit cri.

— Tu me demandes de… de…— M’épouser, oui. La question est la même que la précédente, Lucia. Le collier, c’était juste

entre nous, quelque chose de privé. Cette bague, c’est pour le reste du monde. Mais je te veux detoutes les manières possibles et imaginables. Feras-tu de moi un homme comblé en acceptant dedevenir ma femme ?

— Tu es sûr que tu es prêt pour ça ?Il la fit pivoter vers lui et plaça sa main sur sa nuque.— Je ne t’ai jamais oubliée, Lucia. Quand je suis parti, j’ai cru que c’était mieux pour toi. Mais

ces deux derniers jours, tu m’as fait comprendre à côté de quoi je passais. S’il avait fallu renoncer àtoi une seconde fois, la blessure ne se serait jamais refermée. Je t’aurais poursuivie de mes assiduitésjusqu’à ce que tu m’aies dit oui. Est-ce que tu te sens prête à annoncer la nouvelle à tes proches oubien tu trouves qu’il est encore trop tôt ?

— Non. Quand on s’est rencontrés, il y a deux ans, je savais ce que je voulais. Mais je n’avaispas assez de cran pour te courir après. Aujourd’hui… (Elle lui décocha un sourire espiègle.) Tu sais,je retournais à Vegas pour parler à Nicki, prendre quelques affaires et élaborer un plan pour te mettrele grappin dessus. Je n’avais pas l’intention de te laisser t’échapper encore, Jon Bocelli. J’étais prêteà te supplier si nécessaire.

— Tu sais exactement comment retenir mon attention. (Il frotta son nez au creux de son cou etpressa son sexe contre elle.) Alors, tu veux bien m’épouser ?

— J’en serai honorée.Il glissa le magnifique solitaire à son annulaire, appuyant son front contre le sien un bref instant.

Puis il la conduisit jusqu’au lit, s’assit et lui prit les mains tandis qu’elle se tenait debout face à lui etl’observait.

Lucia fronça les sourcils.— Quelle est la troisième question ?— Est-ce que tu préfères que je te fesse avec ma main ou avec une raquette ? Je te laisse le choix

– pour cette fois. Mais ne t’y habitue pas.Une onde d’excitation la parcourut.— Une fessée ? Pourquoi ?— Pour te punir d’avoir voulu t’en aller sans me prévenir. Mais si tu avais vraiment l’intention

de faire l’aller-retour, il se peut que je me montre clément et te pardonne. Exceptionnellement.Un frisson la balayait de part en part. Une fessée de Jon Bocelli ? Cette image lui parut

délicieuse.— Tu n’es pas obligé de me pardonner. Et si nous essayions les deux, histoire de voir ce que je

préfère ?Il éclata de rire et lui assena une petite tape sur la cuisse.— J’aime ta façon de penser, ma chérie. Allonge-toi, nous allons tester les deux. Si tu es sage, tu

auras droit à une récompense supplémentaire.Elle prit son visage en coupe et effleura ses lèvres des siennes.— Je suis déjà comblée. Je t’aime, Jon.

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— Moi aussi, je t’aime, doc. Maintenant que tu m’appartiens enfin, je suis le plus heureux deshommes.

1. En italien dans le texte. La phrase signifie : « quelle belle femme ! » (N.d.T.)

2. Signifie « petite fille » en italien. (N.d.T.)

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1. Arresting Desire.

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SYLVIA DAY

Pas sans toi1

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À Cindy Hwang.J’aime écrire des novellas.

Merci de m’avoir aidée à rompre le syndrome de la pageblanche.

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Remerciements

Toute ma gratitude va à Cynthia D’Alba, qui a fait la critique de cette novella tandis qu’elle fêtaitelle-même sa première vente. J’ai rencontré une véritable amie !

Toute mon affection va à mes chères Maya Banks et Karin Tabke. C’est un honneur pour moi departager ce recueil avec vous. Mesdames, je suis fin prête pour notre prochaine retraite en groupe !

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1

Le 15 août à exactement 16 h 32, l’agent Brian Simmons reçut un double choc : le premier lui futcausé par l’apparition de Layla Creed, la femme qui hantait ses rêves ; le second par la détonationd’une grenade.

Brian perçut le sifflement de la bombe une seconde avant que le projectile ne frappe l’un destrois Chevrolet Suburban stationnés là, dans l’attente de transporter Layla de sa cachette à l’aéroportde Baltimore-Washington. Il plongea ventre à terre et plaqua la jeune femme au sol, lui servant debouclier.

Quelques secondes plus tard, le souffle de l’explosion les balaya tous les deux. Le chocde l’impact ébranla le corps mince de Layla, et Brian l’enveloppa dans ses bras pour la protéger. Lebourdonnement était assourdissant ; si puissant qu’il couvrit les hurlements de Layla. Brian sentittoutefois sa poitrine vibrer contre son torse.

Une pluie d’éclats d’obus les arrosa. Les flammes léchèrent leurs semelles. Il se mit debout dare-dare, l’aida à se relever, puis la reconduisit en toute hâte à l’intérieur du bâtiment qu’elle venait dequitter. C’était comme si on lui avait fourré du coton dans les oreilles, mais il resta focalisé sur sonobjectif : mettre Layla à l’abri.

Layla.Dégainant son arme de service, Brian l’agrippa par le coude et l’entraîna à sa suite. Ils

dépassèrent l’ascenseur et s’engouffrèrent dans la cage d’escalier. Il jeta un bref coup d’œil en l’air,envisageant de la ramener dans la chambre où elle avait passé la nuit. Mais il chassa vite cette idéeet ensemble ils dévalèrent les marches en direction du parking souterrain.

Quelqu’un avait révélé les coordonnées de la planque. Au moins deux agents venaient de perdrela vie, parmi lesquels un ami de longue date de Brian. Il se méfiait de tout le monde et, avec Layladans la ligne de mire, il ne pouvait prendre aucun risque. Poussé par son instinct protecteur, ilaccéléra. Elle le suivit en trottinant sans lui lâcher la main tandis qu’ils descendaient l’escalier à lavitesse de l’éclair.

Ils franchirent la porte coupe-feu et surgirent dans le parking. Sur leur gauche, une Honda vertbouteille quittait une place en marche arrière. Brian se campa derrière en brandissant son insigne.

Dans le rétroviseur central, il croisa le regard béat de la conductrice.— Veuillez sortir de votre véhicule, madame.Une brune s’extirpa de derrière le volant, l’air apeuré, fixant son Glock avec des yeux ronds. Elle

leva les mains en l’air, son sac à main pendouillant à son coude.Il rengaina son arme et lui tendit sa carte de visite.— Appelez à ce numéro. On vous dédommagera.

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Le visage grave, Layla se glissa sur le siège passager sans se faire prier.Brian sortait tout juste du parking quand le hurlement des sirènes retentit, annonçant l’arrivée des

autorités locales et des pompiers. Dans le rétroviseur, il distingua les volutes de fumée noire quis’élevaient dans le ciel. Il s’engagea sur la bretelle et rejoignit l’autoroute.

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2

Agrippée au siège passager, Layla coula un regard à celui qu’elle n’avait pas vu depuis cinq ans.Il n’était pas comme dans ses rêves. Plus sec. Plus mince, peut-être. Néanmoins il arborait un air toutaussi menaçant. Il fallait avoir des pulsions suicidaires pour se confronter à Brian Simmons.

Ce qui ne l’avait pas empêchée, elle, de lui offrir sa virginité…— Tu es blessée ? s’enquit-il en la transperçant de son regard vert limpide.— Non, répondit-elle, une boule dans la gorge. Et Sam ? Et les autres ?Elle avait la gorge sèche comme du papier de verre.Il secoua la tête.Doux Jésus. Son estomac se serra si fort qu’elle se crut sur le point de vomir. Sam Palmer était

devenu son ami au fil des trois années qu’elle avait passées sous la protection de l’U.S. MarshalsService, dans le cadre du programme de protection des témoins. Outre son titre, l’inspecteur avait étéson seul lien avec la réalité. Les appels qu’il lui passait tous les mois pour s’assurer qu’elle allaitbien lui avaient permis de se rappeler qui elle était vraiment, sous l’identité empruntée de LaylaCunningham. Layla Creed.

Et dire qu’elle avait autrefois mené une existence normale, dans sa ville natale, entourée de sesamis proches. Des gens à qui elle avait confié son désir pour l’homme assis à présent au volant. Etpuis, en l’espace d’un week-end, elle avait tout perdu. Un week-end funeste où elle était partie fairela fête à Tijuana pour se changer les idées et tenter de se prouver qu’elle n’était plus amoureuse deBrian Simmons.

Ce dernier tira son portable de sa poche et appuya sur un numéro préenregistré.— C’est la merde, annonça-t-il sans préambule à son interlocuteur. Ils ont visé le convoi avec un

putain de lance-grenades.Layla nageait en plein cauchemar. La voix familière de Brian, grave et légèrement enrouée, eut le

mérite de l’apaiser. Elle en rêvait souvent ainsi que de ses grognements de plaisir et des motspassionnés qu’il lui soufflait au creux de l’oreille quand ils faisaient l’amour. C’était un amant trèsexpressif et sa franchise la poussait à l’audace. Avec lui, elle n’avait ni inhibitions ni hésitations.

Et dire qu’il aurait pu mourir aujourd’hui, sous ses yeux. C’était son pire cauchemar.— Non, poursuivit-il. Je vais devoir l’exfiltrer tout seul d’une autre manière… Non, ça n’est pas

envisageable non plus. Quelqu’un nous a trahis. Je ne sais plus en qui croire… Je t’assure qu’ellen’est pas responsable de la fuite… C’est Layla, Jim. Oui, cette Layla. Écoute, j’ai besoin d’unservice. Récupère tes affaires dans la Bronco, place des gilets pare-balles et du matériel de campingdans le coffre, puis rends-toi à la station-service située au croisement de Main et Seventh Avenue.Dépose les clés dans le cendrier de la bagnole et va faire un tour… Merci, vieux. Je te revaudrai ça.

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Il raccrocha.Layla tâcha de retenir ses larmes. Elle ne posa aucune question. S’il était quelqu’un sur terre en

qui elle avait une confiance aveugle, c’était bien Brian. Elle lui confierait sa vie sans hésiter. S’ilsavaient rompu, c’était parce qu’il vivait trop dangereusement et n’accordait que peu de valeur à lasienne.

Ils s’engagèrent sur le parking d’un magasin. Il se gara sur une place située à une extrémité, prèsd’une pelouse. Il déposa les clés dans le cendrier, qu’il referma. Puis il ôta la batterie de sontéléphone portable et jeta les deux parties désolidarisées sur la banquette arrière. Au même instant,celui de Layla retentit. Elle l’extirpa de son sac à main et le tendit à Brian, qui le démonta également.

— Il y a un distributeur de billets à l’intérieur. On va devoir retirer le maximum d’argentpossible. Puis nous mettrons le cap sur la Californie. En chemin, on paiera tout en liquide – l’essence, la nourriture, le motel… On va acheter des vêtements et le nécessaire de toilette ici, et ilfaudra faire vite.

Elle hocha la tête, jeta un bref coup d’œil à ses lunettes cassées dans son sac avant de lesabandonner dans la boîte de rangement.

— On se cache des gentils aussi ?— Pour le moment, répliqua-t-il en jetant son téléphone sur la banquette arrière, qui alla

rejoindre le sien. Allons-y.Layla descendit de voiture. Son cœur battait à tout rompre. Ses paumes étaient moites et sa

respiration précipitée. Elle contourna la voiture, il lui saisit la main et l’entraîna d’un pas rapide versle magasin. À leur entrée, elle eut l’impression que tous les regards se braquaient sur eux. Sesoreilles sifflaient encore à cause de l’explosion. Elle s’agrippa à lui.

Brian exerça une pression dans sa main pour la rassurer tout en approchant son visage du sien.Elle lut sur ses lèvres :

— Tout va bien, ma puce. Je suis là.Il lui avait susurré les mêmes mots quand il lui avait donné son premier orgasme. Elle sentait

encore son souffle humide contre les replis de sa féminité. À ce souvenir, si vivace en dépit desannées écoulées, un frisson la parcourut. Il lui lâcha la main et passa le bras autour de ses épaulestout en faisant attention à ce que l’encolure déboutonnée de sa chemise ne révèle pas son holsterd’épaule.

— Tu es encore sous le choc, lui glissa-t-il à l’oreille d’une voix qui la fit frémir. Ne me lâchepas et tout ira bien.

Elle se blottit contre son corps svelte et musclé, et sa chaleur l’enveloppa. Elle s’en imprégna, unbras autour de sa taille. Il portait des Doc Martens, un jean large et une chemise ultra-douce. Elle lalui aurait sans doute chipée s’ils formaient encore un couple.

Brian prit un Caddie et la guida à travers le magasin, d’un pas rapide et efficace. Il pensa à tout – sous-vêtements, brosses à dents, portables prépayés et valises à roulettes. Ils se séparèrent un brefinstant, le temps qu’il prenne des rasoirs et qu’elle choisisse quelques vêtements de rechange. Moinsde vingt minutes plus tard, ils faisaient la queue à la caisse. Ensuite, ils retirèrent mille cinq centsdollars au distributeur automatique. Puis au lieu de regagner la pelouse située à l’arrière du magasin,ils sortirent par l’entrée principale. Brian s’arrêta près d’un banc, à quelques pas de la porte, pourfourrer tous les vêtements dans un premier sac et les autres articles dans un second.

— On va traverser la rue, dit-il.Il marqua une pause et l’observa en silence. Il tendit alors le bras vers elle, posa une main sur sa

nuque, l’autre sur sa hanche, puis l’attira contre lui. Leurs fronts se touchèrent.

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— Tu es très courageuse, ma puce, je suis fier de toi.Ses yeux la picotèrent.— Je ne suis plus une petite fille, Brian.— Crois-moi, Layla, je le sais.Il la lâcha, piocha deux casquettes de baseball dans un des sacs et en posa une sur sa tête,

engouffrant les doigts dans ses boucles noires, comme s’il ne pouvait pas s’en empêcher.— Une fois dans la voiture, change de haut et attache-toi les cheveux.— D’accord.Il ramassa les sacs et ils traversèrent la route, abandonnant la Honda sur le parking, derrière eux.

Brian avançait avec nonchalance, mais elle savait qu’il était à l’affût du moindre signe suspect. Detempérament vigilant, il l’était d’autant plus avec elle. Non seulement parce qu’elle était un témoinsous protection, mais aussi parce qu’elle était la petite sœur de son meilleur ami, et la femme qu’ilavait autrefois aimée.

Ils s’approchèrent d’une Bronco cabossée garée sur le côté d’une supérette. Brian jeta ce qu’ilportait sur la banquette arrière par la vitre abaissée.

— Grimpe.Une fois au volant, il lui remit un gilet pare-balles qu’il trouva dans le véhicule.Cinq minutes plus tard, ils roulaient de nouveau sur l’I-70.

Brian ôta sa casquette et la jeta par terre, à l’arrière. Layla se mit en devoir d’ôter son tee-shirt.Du coin de l’œil, il remarqua qu’elle portait un soutien-gorge bleu sarcelle en dentelle assorti à sesyeux ; il eut toutes les peines du monde à garder le regard fixé sur la route.

— Alors, cette voiture appartient à un Marshal ? Ou à un SEAL1 ? demanda-t-elle.— Pourquoi pas à un simple civil ?— Avec toi, non, c’est impossible. Tout est en rapport de près ou de loin avec ton travail. Que tu

sois en service ou pas.Raison pour laquelle elle l’avait quitté.— À un Marshal.Elle farfouilla dans les vêtements qu’il avait placés à ses pieds.— Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ?À présent qu’ils roulaient, Brian s’était un chouïa détendu, mais il ne serait complètement serein

qu’une fois que Layla aurait témoigné. Il aperçut la cicatrice d’une balle dans son dos, ainsi que lesbleus qui s’étaient rapidement épanouis sur ses coudes après qu’il l’eut plaquée au sol, au moment del’explosion. Ses mâchoires se contractèrent à nouveau.

— On va rejoindre San Diego. En roulant quatorze heures par jour, on y sera pile pour le procès.Désolé, ça ne te laissera pas beaucoup de temps pour revoir ton témoignage avec le substitut duprocureur.

Elle poussa un long soupir et se carra dans son siège.— Eh bien… c’est un moindre mal. Mieux vaut rater la phase préparatoire que mourir.C’était un sacré euphémisme… Layla tout craché. Il avait toujours admiré son sang-froid. Fille et

sœur de SEALs, elle avait de qui tenir. Le jour de ses dix-huit ans, à sa fête d’anniversaire, elle luiavait lancé sans détour : « Assez joué, Brian. Soit tu sors avec moi, soit tu dégages. J’ai l’embarrasdu choix, tu sais. »

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Jusque-là, il s’était résolu à prendre son mal en patience, préférant attendre qu’elle finisse sesétudes et vole de ses propres ailes. Il savait que, une fois qu’il l’aurait eue, leur avenir serait scellé àjamais. Ils seraient unis jusqu’à ce que la mort les sépare.

Mais l’idée qu’elle flirte, rie, s’amuse et couche avec d’autres garçons l’avait hérissé. Du coup,il avait cédé.

Ses mains se cramponnèrent au volant.— Raconte-moi ce qui s’est passé.Elle lui lança un bref coup d’œil avant de passer un tee-shirt neuf. Puis elle enfila par-dessus un

blouson avec des gestes impatients.— Tu veux parler de quoi ?— Dis-moi comment tu t’es retrouvée dans cette mouise.Elle s’enfonça dans son siège et boucla sa ceinture.— Steph et moi, nous avions mis le cap sur Rosarito et Tijuana pour les vacances de printemps.

C’est là qu’elle a rencontré un mec. À Papas and Beer, une boîte de Rosarito. Elle voulait à tout prixse le taper. Vu qu’elle était ivre, je me suis sentie obligée de la suivre. Je n’allais pas la laisser partirseule avec un inconnu. Du coup, il a rameuté un de ses copains et on est tous retournés à Tijuana envoiture.

— Qu’est-ce que tu avais dans la tête ! aboya-t-il.— Où est le problème, monsieur l’agent ? Il n’y a que vous qui puissiez vivre dangereusement ?— Je t’interdis de comparer mon travail à une virée d’adolescentes écervelées.Layla contempla le paysage par la vitre du passager, son corps menu exhalant la frustration. Elle

avait toujours désapprouvé le job de Brian. Ce qui avait fini par causer leur rupture.Ce dernier la savait fermement opposée à l’armée. Il faut dire qu’elle avait perdu son père et son

frère coup sur coup. Aussi, au terme de son service naval, il s’était arrangé pour rester aux États-Unisen incorporant l’U.S. Marshals Service. Si elle n’avait pas sauté de joie à cette nouvelle, elle avaittoléré son choix. Tout du moins jusqu’à ce qu’il intègre le groupe des Shadow Stalkers.

— Continue, dit-il d’une voix tendue.— Pour qu’ensuite tu me sermonnes ? Ça te plaît de me traiter comme une gamine ?Il passa sa main dans ses cheveux.— Layla. C’est plus fort que moi. Quand je te sais en danger, je perds les pédales.Elle lui adressa un regard glacial, un de ces regards qui lui retournaient l’estomac.— Maintenant, tu sais ce que ça fait de se ronger les sangs pour quelqu’un.Brian accusa le coup sans broncher. À l’époque, il s’était fourvoyé en imaginant qu’elle se

raviserait et finirait par accepter son choix. Bien au contraire. Elle avait rompu avec lui. Puis elles’était retrouvée mêlée à une histoire de règlement de comptes et avait reçu une balle. À la suite dequoi elle avait été prise en charge par WITSEC2. En intégrant ce programme, elle avait rejoint sonmonde. Seulement, au lieu de les rapprocher, cela les avait éloignés plus que jamais. La vie étaitd’une cruelle ironie.

— On est retournés à Tijuana, reprit-elle. On n’était plus très loin de la frontière quand la voiturea ralenti pour prendre un virage. C’est alors que deux hommes ont jailli de l’ombre et se sont mis ànous tirer dessus. On était cernés. Le mec qui nous avait rejoints à la dernière minute s’est faufilédehors par la portière du passager et je me suis précipitée à sa suite. C’est là que j’ai reçu une balle.Lui aussi. Il s’est mis devant moi mais je pense qu’ils le voulaient vivant, parce que les coups de feuont cessé. À mon avis, ce mec savait qu’ils ne lui tireraient pas dessus, et c’est pour ça qu’il s’estplacé devant moi. Pour me sauver la vie.

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Sa voix s’éteignit peu à peu, de sorte qu’il distingua à peine le dernier mot.— C’était l’agent sous couverture de la DEA3 ? Le dénommé Sandoval ?Layla hocha la tête en signe d’acquiescement.— Ricardo Sandoval. Je ne l’ai su que plus tard. Face à nous, le tireur pointait son semi-

automatique… Ce type, je l’ai regardé droit dans les yeux. Je me rappelle encore son expression dejoie malsaine.

— Angel Martinez.C’était à cause de son témoignage contre Martinez, l’un des commandants en chef du cartel, que

Layla était en danger de mort. C’était un gros poisson. Autrement, aujourd’hui, le groupe n’auraitjamais tenté une offensive de cette envergure sur le sol américain.

— Oui. Martinez. L’agent Sandoval lui a planté sa lame dans la cuisse. Le sang s’est mis à giclerpartout et Martinez s’est affalé de tout son poids par terre. Ses acolytes se sont remis à tirer dans tousles sens cette fois. C’était le chaos absolu. Martinez braillait. Sandoval m’a alors attirée à l’arrièredu véhicule et on s’est engouffrés dans une allée qui débouchait sur une rue animée. Des hommesqui parlaient anglais faisaient la fête non loin de là. J’ai crié à l’aide. Il s’est avéré que c’étaient desmarins de Pendleton. Ils nous ont raccompagnés à la frontière. L’agent Sandoval est mort plus tardcette nuit-là.

Le meurtre de Sandoval avait alors défrayé la chronique. La violence de l’attaque avait remué lepublic, déjà sensibilisé par la torture à mort d’Enrique Camarena par le même cartel. Dans lesrapports officiels, Layla avait été évoquée comme le « témoin non identifié ». Et même si Brianconnaissait déjà l’histoire, l’entendre de sa bouche l’ébranla. Bon sang, elle aurait dû être à ses côtésau lieu de se retrouver mêlée à une sombre histoire de drogues. Elle l’aurait été s’il n’avait pas été siborné !

— Tu fais toujours des cauchemars, ma puce ? demanda-t-il.Elle lui adressa un regard interrogateur et chassa les mèches rebelles de son front.— Comment es-tu au courant ?Il lui prit la main.— Je te connais. Tu ne montres pas grand-chose mais ça ne veut pas dire que tu ne souffres pas.Elle posa les yeux sur leurs mains entrelacées.— Toi non plus, tu ne montres pas grand-chose, dit-elle d’une voix à peine audible.Brian ne savait pas si elle faisait référence à la mort de Jacob, le frère de Layla et meilleur ami

de Brian, ou à leur rupture. Dans un cas comme dans l’autre, il avait refoulé ses émotions.— Si, parfois ça m’arrive.Elle retira sa main.— Je t’ai vu rire et péter les plombs, mais je ne t’ai jamais vu pleurer. Quand j’ai rompu avec

toi, tu n’as même pas cillé. J’aurais dû me douter que tu réagirais comme ça. J’étais sans doute tropjeune et trop naïve.

Il crispa le poing. Sa paume lui parut soudain vide, privée de la chaleur de la sienne. Son fichuorgueil lui avait causé du tort par le passé ; à présent, il lui nouait la gorge, l’empêchant de prononcerles mots qui le détruiraient si jamais elle les lui renvoyait en pleine figure.

Pourtant, il ne put se résoudre à se taire complètement.— Tu comptais beaucoup pour moi, et tu le savais, Layla.— Je savais que je ne te suffisais pas. À part Jacob et nos incroyables parties de jambes en l’air,

nous n’avions pas grand-chose en commun.Il consulta le rétroviseur pour la énième fois afin de s’assurer qu’on ne les filait pas.

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— Tu dis n’importe quoi. Si le sexe était si bon entre nous, c’est parce qu’on avait quelque chosede spécial, toi et moi.

— Dans ce cas, pourquoi tu ne m’as pas couru après quand je t’ai quitté ?Voilà. Putain d’erreur colossale numéro un.— J’ai cru que tu avais besoin d’un peu de temps.— Non, protesta-t-elle en posant le coude sur le rebord de la vitre et en appuyant sa tête dans sa

paume. Tu pensais que j’avais besoin de mûrir. À tes yeux je serai toujours la petite sœur de Jacob.Mes seins ont beau avoir poussé, tu ne me traiteras jamais comme une adulte.

— Tu commences à m’énerver.— J’ai touché une corde sensible ? le taquina-t-elle en affichant un sourire espiègle qui lui causa

une érection.— Non, ma chérie. Tu es trop à côté de la plaque pour cela.Elle minimisait les sentiments qu’il avait pour elle. Certes, le sexe entre eux avait toujours été

torride – c’était un aspect de leur relation qui ne leur avait jamais causé le moindre problème –, maisc’était plus profond que cela. Il l’aimait. D’un amour qui le consumait à petit feu. Au cours des cinqdernières années, il y avait eu des moments où il aurait donné n’importe quoi pour la voir, entendresa voix et la serrer dans ses bras.

Le silence s’abattit entre eux, un silence épais, empli de non-dits. À mesure que les kilomètresdéfilaient, ils se rapprochaient de l’endroit où il allait de nouveau la perdre. Une fois qu’elle auraittémoigné, elle serait une fois encore isolée par le programme de protection des témoins. On luiassignerait une nouvelle identité, un nouveau domicile, un nouveau travail, et un nouvel agent, quiserait chargé de son suivi. Brian avait trois jours pour clarifier les malentendus et arranger lasituation. Trois jours pour rappeler à Layla qu’ils étaient faits l’un pour l’autre. Elle n’avait pasd’autre alternative que de l’écouter. Ils étaient seuls. Autrement dit, personne ne pourrait venir mettreson grain de sel.

Or, il était parfaitement capable de tout saccager à lui seul.Le temps lui filait entre les doigts et pourtant, il demeurait silencieux, les mâchoires contractées

et le ventre noué. Terrifié à l’idée qu’elle ait tourné la page. Elle avait mûri depuis leur rupture. Poursa part, il n’avait pas changé. Il était toujours un peu brut de décoffrage et incapable d’exprimer cequ’il ressentait pour celle qui comptait le plus à ses yeux.

1. Acronyme de Sea, Air, Land, « Mer, Air, Terre ». Il s’agit de forces spéciales de la marine de guerre des États-Unis. (N.d.T.)

2. Programme fédéral de protection des témoins aux États-Unis. (N.d.T.)

3. La Drug Enforcement Administration est le service de police fédéral américain dépendant du département de la Justice des États-Unis, chargé de la mise enapplication de la loi sur les stupéfiants. (N.d.T.)

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3

— Je vais nous chercher quelque chose à manger.Layla posa les yeux sur l’homme ténébreux, incroyablement sexy, qui se tenait près de la porte.Ils n’avaient pris qu’une seule chambre pour deux. Avec un lit certes immense, mais unique.Le parking était quasiment désert, et le motel presque entièrement plongé dans le noir. De toute

évidence, il y avait encore des suites à lits jumeaux disponibles.Il soutint son regard, lisant en elle comme dans un livre ouvert.— Qu’est-ce que tu veux ?— On dirait que tu as déjà décidé à ma place, rétorqua-t-elle d’une voix sèche.— Je te demande ce que tu veux manger, s’agaça-t-il.Lui, pour commencer. Mais pas question de le laisser s’en tirer à si bon compte. Il aurait au

moins pu avoir la finesse de requérir deux lits séparés, même s’il était sûr de la mettre dans le sien.Ils savaient tous deux qu’ils seraient incapables de garder leurs distances, une fois seuls dans la

même pièce. Surtout qu’ils allaient se déshabiller pour se doucher, notamment à proximité d’un lit.Plus que jamais, ils avaient besoin l’un de l’autre. Car ils étaient en cavale, et des agents avaientsacrifié leur vie pour celle de Layla. Le temps filait à la vitesse de l’éclair. Elle n’avait que soixante-douze heures à passer avec l’homme qu’elle aimait depuis toujours.

Elle ôta ses tennis et, tandis qu’elle retirait son tee-shirt, l’entendit pousser un soupir. Elleesquissa un sourire.

— Un cheeseburger avec des frites, ce serait génial. Avec un Ice tea light. Je vais prendre unedouche en attendant. Et n’oublie pas de demander un lit d’appoint à l’accueil. Dommage qu’ilsn’aient plus de chambres doubles… Ces lits de camp branlants sont très inconfortables, surtout pourun homme de ton gabarit.

La porte se referma derrière lui en claquant.Un sourire au coin des lèvres, Layla ouvrit l’une des valises à la recherche d’un rasoir. Son

regard se posa sur une boîte de préservatifs et un tube de gel intime. Sa main se figea.Elle le connaissait par cœur.Brian Simmons était un monstre d’arrogance. Il savait, et à juste titre, qu’elle ne pouvait pas lui

résister. Pourtant ce n’était pas une simple histoire de sexe. Autrement, il lui aurait suffi de draguer lapremière venue au bar du coin. Il n’avait qu’à claquer des doigts. C’était un personnage envoûtant etmystérieux, entouré d’une aura qui ne laissait personne insensible. Mais ce qui faisait tomber lesfilles comme des mouches, c’était surtout son côté froid et détaché ainsi que son air ténébreux. Brianétait un véritable antihéros américain, un homme insaisissable. C’est ça qui les rendait toutes folles.Layla en avait fait les frais.

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À l’inverse, elle était facile à déchiffrer. Brian savait parfaitement comment la troubler. Commentla faire craquer. Le plaisir n’était pas un but en soi mais un moyen en vue d’une fin.

Il fallait qu’ils se retrouvent nus dans un lit pour que Brian tombe le masque et soit enfin lui-même. Lorsqu’il était en elle, il se donnait tout entier. C’était d’ailleurs le seul moment où il baissaittotalement sa garde. Si seulement il pouvait faire de même dans la vie de tous les jours.

Elle jeta la boîte de préservatifs sur le lit et rangea le tube de lubrifiant dans le tiroir de la tablede chevet. Puis elle gagna la salle de bains et ferma la porte derrière elle. Au cliquetis du verrou, sesépaules s’affaissèrent. Elle prit alors conscience de sa propre vulnérabilité, un sentiment qu’elleavait refoulé tout l’après-midi sans même s’en apercevoir, et sa poitrine se comprima. Le chagrin etles regrets la submergèrent comme une avalanche. Elle entra en titubant dans la cabine de douche etploya la tête sous le jet d’eau chaude. Les larmes coulèrent à flots sur ses joues. Son buste fut secouépar les sanglots. Elle se mordit la lèvre inférieure et réprima les gémissements qui auraient trahi safragilité.

Ce serait si facile pour elle de trouver du réconfort auprès de Brian. Mais il fallait qu’ils gardentla tête sur les épaules et soient forts tous les deux. Inutile de le distraire. Il assurait à lui seul sontransfert, alors qu’elle aurait dû se trouver sous la protection d’une demi-douzaine des meilleursagents du service. Les Shadow Stalkers. Des recrues spéciales issues pour la plupart des forcesspéciales militaires, à l’instar de Brian.

C’était le fait qu’il intègre cette équipe qui avait provoqué leur rupture. Le père et le frère deLayla, tous deux militaires, étaient morts sur le terrain. Elle avait refusé de perdre également Brian.Or il lui avait fait croire qu’en quittant la Navy, il s’engageait dans une nouvelle voie. Le problème,c’est qu’elle n’était pas moins dangereuse. Il avait demandé à faire partie de l’unité des ShadowStalkers. À l’époque, Layla l’avait vécu comme une tromperie. Elle n’avait pas pu laisser passer ça.

Quand elle sortit de la salle de bains, Brian était de retour. Dans la chambre flottait une odeur defriture alléchante. Debout face à la télévision, il foudroyait du regard l’écran noir, les mains sur leshanches. Il avait retiré ses chaussures et sa chemise ; il ne portait plus qu’un jean et un tee-shirtmoulant, son holster d’épaule fixé à son torse.

Layla, qui s’apprêtait à se sécher les cheveux avec une serviette, se figea.Elle se sentit en sécurité.Un sentiment qu’elle pensait avoir perdu à jamais en cette nuit fatidique au Mexique. Et pourtant,

le fait de le voir, si sûr de lui, si résolu, lui procura un profond soulagement. Elle eut l’impressiond’être à l’abri de tout. Brian à ses côtés, personne ne lui ferait de mal.

D’un geste, il désigna les préservatifs au milieu du lit, ses yeux verts aussi durs que du jade.— Ne tire pas de conclusions hâtives, dit-il. Je n’avais pas prévu de coucher avec toi ce soir.— De toute évidence.— Petite maligne, dit-il en se grattant la nuque. Je ne veux pas que tu dormes seule, c’est tout. Tu

as eu une rude journée. L’agent chargé de ta sécurité depuis des années est mort sous ton nez. Je teconnais, ma chérie. Même si tu ne le montres pas, tu es sous le choc.

Sa gorge se noua et elle secoua la tête pour lui indiquer de ne pas poursuivre sur un sujet qui latouchait de la sorte.

Il fit un autre pas vers elle.— J’ai envie de te prendre dans mes bras et te réchauffer, de faire en sorte que tu te sentes en

sécurité. Moi vivant, rien ne t’arrivera, Layla. Je te le promets.Elle déglutit avec peine.— Je sais. C’est la seule chose dont je suis sûre en ce moment.

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En un éclair, elle se retrouva dans ses bras. Blottie contre lui, elle enfouit son visage dans sachemise et inhala son odeur virile, chaude et propre. Brian n’était pas homme à mettre du parfum ;son odeur, un mélange de savon, de déodorant et de phéromones naturelles, ne manquait jamais del’envoûter. Elle provoquait chez elle une réaction quasi instinctive et animale, à croire qu’elle avaitété programmée pour cet homme-là et pas un autre.

Layla lâcha la serviette qu’elle tenait dans les mains. Elle l’agrippa par la taille et empoigna sachemise et la boucle de sa ceinture. Comme toujours, elle se cramponna à lui comme si sa vie endépendait, comme pour repousser le moment fatidique de leur séparation. Même quand ils avaientformé un couple, elle n’avait jamais eu l’impression qu’il lui appartenait complètement. Il étaitd’abord et surtout au service de son pays. Peu à peu, elle avait fini par comprendre que le forcer àdémissionner, c’était comme lui demander de renoncer à une partie de lui-même. Or elle n’avait paspu se résoudre à exiger de lui ce sacrifice. Cette décision dépendait de lui. Lui et lui seul.

Et il avait fait son choix.C’est son travail qui l’avait emporté.Hésitante, elle recula de quelques pas. Il la lâcha à contrecœur. Ce faisant, il dénoua d’un geste

la serviette qu’elle avait enroulée autour de son buste. Elle la rattrapa de justesse. Brian ravala unsoupir et détourna le regard, faisant preuve d’une maîtrise de soi qui la surprit.

— Il faut que tu manges, fit-il remarquer en farfouillant dans un grand sachet d’où il tira unebarquette en polystyrène.

Il jeta un coup d’œil à l’intérieur, attrapa une serviette en papier et des couverts en plastique,puis disposa le tout sur une petite table ronde, près de la fenêtre. Les rideaux noirs étaient tirés,empêchant les passants de voir dans la chambre. Elle saisit des vêtements de rechange et les enfila envitesse dans la salle de bains embuée avant de s’installer à table.

— Tu as pris quoi ? s’enquit-elle.— Un hamburger. Comme toi.Elle enfourna une frite et la mâcha d’un air pensif. Son regard se posa sur le lit, où demeurait la

boîte de préservatifs.— Ils étaient juste à côté des rasoirs dans le rayon. Je n’ai pas retourné le magasin à leur

recherche.Layla réprima un sourire. Son côté bougon l’avait toujours amusée. C’était le genre d’homme qui

ne se formalisait pas de grand-chose. La seule chose capable de lui faire perdre patience, c’étaitLayla.

— Dieu bénisse les commerces bien agencés.Dans un grognement, il mordit dans son hamburger. Brian n’était pas un grand fan du petit

déjeuner, en revanche il se rattrapait en avalant une quantité impressionnante de nourriture le reste dela journée.

— Tu ne t’assieds pas à table avec moi ? demanda-t-elle d’une voix douce.Il plissa les yeux avec méfiance, mais au bout de quelques instants, il prit sa barquette et la

rejoignit. Il s’installa sur la chaise face à elle non sans grâce. Elle avait toujours aimé observer sesdéplacements, la fluidité avec laquelle ses muscles se bandaient et s’étiraient.

— Tu es superbe, Brian, fit-elle remarquer d’une voix enflammée.Elle s’empressa d’avaler une gorgée de soda pour camoufler sa remarque. Elle aurait tort de lui

avouer qu’elle l’aimait toujours. Aujourd’hui, leur relation avait encore moins d’avenir qu’àl’époque.

Il finit sa bouchée avant de répondre :

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— Merci. Toi aussi.Elle lui adressa un sourire timide et se remit à manger.— Alors… bredouilla-t-il. Qu’est-ce que tu as fait ces dernières années ? Tu es restée dans le

Maryland tout du long ?— Quasiment.— Ça te plaît ?Elle haussa les épaules.— J’ai vu pire. Mais rien à voir avec le sud de la Californie.— C’est sûr, acquiesça-t-il. Et tu étudies toujours l’architecture d’intérieur ?Elle secoua la tête, hésita une seconde, puis répondit :— Je fais du droit pénal.Il plissa le front et l’examina par-dessus le rebord de son gobelet. Elle imaginait sans peine ce

qu’il était en train de se dire. Il trouvait sans doute que c’était un gros changement d’orientation. Il sedemandait peut-être si c’était en rapport avec le projet qu’il avait formé au côté de Jacob, celui demonter une agence de sécurité. Au départ, elle ne partageait leur rêve que dans l’espoir de les voirplus souvent à la maison, mais depuis qu’elle avait intégré le programme fédéral de protection destémoins, elle s’y intéressait de plus en plus, au point de le reprendre à son compte. Dans un sens, cedomaine d’études lui permettait de garder un lien avec Brian et son frère.

— Tu es heureuse, Layla ?— Je ne suis pas malheureuse.— Tu fréquentes quelqu’un ?Elle mit la paille dans sa bouche et aspira une grande gorgée de soda pour faire passer sa

bouchée.— Tu aurais dû me demander ça avant d’acheter les préservatifs, non ?Brian laissa tomber son hamburger à moitié entamé sur ses frites.— Bon sang, tu ne vas pas me lâcher avec ça ?— Si. J’arrête.— Merci.Il plongea une poignée de frites dans le ketchup et les enfourna dans sa bouche.— Par contre, en ce qui concerne le lubri… commença-t-elle avant qu’il ne l’interrompe, pris

d’une quinte de toux.Elle cligna les yeux d’un air innocent.— Tu dois bien avouer que c’est plutôt intime, reprit-elle. Et ambitieux. C’est une chose de

raviver la flamme au lit, mais le sexe anal, Brian ? Je suis sûre que tu connais des femmes qui teservent ça au menu de tous les jours, mais pour moi, c’est un plat de chef étoilé. Autrement dit :exceptionnel.

— Layla.Il écarta sa chaise de la table et se leva.— Tu devrais finir de manger, lui conseilla-t-elle. Tu dois garder des forces. Après tout, on est

en cavale, et tu as une séance de gymnastique de chambre au programme.— Arrête.Il s’approcha du lit, saisit la boîte de préservatifs et la lança dans la poubelle, à l’autre bout de la

pièce. Puis il fouilla dans la valise où se trouvait le nécessaire de toilette à la recherche du gellubrifiant.

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Elle l’observa tout en mangeant. Au fil des minutes, elle sentit son excitation augmenter. Il étaitfurieux, à la fois gêné et enflammé. Elle l’avait rarement vu dans cet état en dehors de leurs ébatssexuels.

— Où est-il ? aboya Brian.— Si je te promets d’être gentille et d’arrêter de te titiller, tu reviendras t’asseoir et manger ?— Ne me parle pas comme à un gosse !— Désolée.Il brandit la main en l’air pour la faire taire.— Vraiment, insista-t-elle. C’est plus fort que moi. Je voulais voir si je te faisais toujours de

l’effet.— À ton avis ! s’emporta-t-il en pointant un index accusateur dans sa direction. Bordel, ne fais

pas comme si ça te surprenait ! Ce n’est pas moi qui ai rompu.— Tu en es sûr ?— Évidemment ! Pour moi, c’était parti pour durer.Layla secoua la tête, gagnée à son tour par la colère.— Jusqu’à ce que la mort nous sépare, ça ne veut pas dire grand-chose quand tu risques ta vie à

tout instant.— Ne recommence pas.Il s’avança vers elle, donnant libre cours à des émotions qu’il avait pour habitude de refouler.— Tu m’as quitté il y a cinq ans. Je suis toujours vivant, comme tu peux le constater.— Seulement parce qu’on n’est plus ensemble. Au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, les

hommes qui m’entourent ont une espérance de vie très limitée.Brian s’arrêta à quelques pas d’elle.— Tu n’es pas sérieuse, j’espère.Elle haussa les épaules et rabattit le couvercle de sa barquette. Elle avait perdu l’appétit.— Tes frites vont refroidir, dit-elle sèchement.— Si ce que tu dis est vrai et que je risque réellement ma vie à tes côtés, il s’agit de mon dernier

repas. Et je préférerais encore manger autre chose.Elle se leva et se dirigea vers le lit.Il la rattrapa par le bras.— Je suis fatiguée, mentit-elle, consciente de sa proximité et de sa force.Son visage arrivait au niveau de l’épaule de Brian. Elle avait envie de se tourner vers lui et de le

serrer encore une fois. Mais quelque chose la retenait. La crainte de ne pas avoir le courage de lequitter à nouveau, le moment venu. Autrement dit, d’ici à quarante-huit heures.

Il déposa un baiser sur son front et la lâcha.Elle alla se brosser les dents puis se glissa sous la couverture. Brian rassembla son nécessaire de

toilette et gagna la salle de bains pour se doucher. Quand il se faufila à son tour sous les draps et seblottit contre elle, elle feignit le sommeil. Bercée par sa chaleur, elle finit par chasser de son espritles images horribles qui la hantaient et sombra dans un profond sommeil.

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4

Un petit cri étouffé éveilla Brian en sursaut. Quelques secondes plus tard, Layla se débattitviolemment dans ses bras.

— Ma chérie, murmura-t-il en la secouant délicatement. Debout. Tout va bien.Elle planta ses ongles dans l’avant-bras de Brian, qui l’enlaçait par la taille. Avec un halètement,

elle se retourna face à lui et enfouit son visage contre son torse.— Ce n’est rien, la rassura-t-il en lui caressant la colonne pour calmer ses tremblements. Je suis

là.Elle le poussa brusquement sur le dos et s’allongea sur lui en s’agrippant à son buste.— Tu veux en parler ? demanda-t-il sans la presser, glissant un coup d’œil au réveil posé sur la

table de chevet.Il était à peine deux heures du matin.— Non, marmonna-t-elle au creux de son cou. Serre-moi fort, c’est tout ce que je te demande.— Je ne te lâcherai pas.Il resserra son étreinte.Layla se mit à se tortiller sur lui pour trouver une position plus confortable. Leurs bas-ventres

entrèrent en contact, séparés par le boxer qu’elle avait revêtu en guise de pyjama et le caleçon deBrian. Son membre se durcit malgré lui. Dès lors qu’il s’agissait de Layla, il était incapable demaîtriser ses réactions, physiques ou émotionnelles.

À l’instant où elle sentit son érection, elle se raidit légèrement et son souffle se suspendit uneseconde avant de reprendre, à un rythme manifestement mesuré.

— Ne fais pas attention, dit-il.Au lieu de quoi elle ondula du bassin pour se frotter à lui. Les lèvres contre sa peau, elle

susurra :— Il est trop gros pour qu’on l’ignore.Elle glissa la langue sur sa gorge et il lâcha un juron, le corps tendu.— Layla… la mit-il en garde.Elle fit courir ses mains de son torse à sa taille.— Vous savez quoi, monsieur le dur à cuire ? Vous êtes sur le point de vous envoyer en l’air.Doux Jésus. Brian ferma les yeux et crispa les mâchoires. Il avait tellement envie d’elle qu’il en

avait mal aux dents. Seulement, il ne voulait pas qu’elle se rapproche de lui parce qu’elle venait defaire un cauchemar.

Mais quand Layla avait une idée en tête, elle allait jusqu’au bout. Et lorsqu’elle se coula le longde son corps et qu’elle lui mordilla le mamelon, Brian céda.

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Du bout de la langue, elle lui titilla le téton, lui arrachant un grognement de plaisir.— Attention, ma chérie, grommela-t-il. Tu sais ce qui arrive quand ça fait un moment que je ne

t’ai pas fait l’amour.Elle ne risquait pas de l’oublier. À l’époque où ils sortaient ensemble, Brian passait parfois des

mois en mission à l’étranger. Quand il rentrait, elle s’arrangeait pour libérer son emploi du temps etremplir le frigo, car elle savait qu’ils resteraient confinés chez lui pendant des jours.

— Comme tu es sexy, Brian, lui reprocha-t-elle. Rien que de te regarder, je suis tout excitée.Et apparemment, il allait en payer le prix. Elle insinua la main entre eux et enroula sa paume

autour de son membre érigé d’une manière qui n’avait rien de tendre ni d’hésitant. Elle se mit à lecaresser de haut en bas, d’un geste rapide et ferme.

— J’ai envie de toi, souffla-t-il d’une voix rauque.Subitement, elle se leva et se glissa hors du lit.— Mets-toi tout nu.Son ton impérieux lui fit bouillonner le sang. La première fois qu’il l’avait prise, elle était encore

vierge. Ce premier rapport avait donné le ton de leurs ébats amoureux : il guidait, elle suivait. C’étaitde cette manière qu’il aimait que ça se passe, et elle aussi d’ailleurs. Mais pour une fois, il était plusque partant pour la laisser mener la danse. Et elle se prenait volontiers au jeu.

— Vas-y, ma chérie.Alors qu’il levait le bassin pour retirer son caleçon, il l’entendit se déshabiller. Elle renversa la

lampe sur la table de chevet. Cependant, elle était trop concentrée pour y prêter la moindre attention.Focalisée sur lui. Résolue à lui faire l’amour.

Il ne l’avait jamais vue si déterminée. Avec Layla, un rien le séduisait. Un regard torride ou unsimple encouragement du type « Brian, chéri… » l’enflammait. Ce soir, c’était elle qui était auxcommandes. Or il avait la ferme intention de la laisser faire – pour commencer du moins – et deprofiter du spectacle.

Layla revint dans le lit. Elle était sienne. C’était la seule chose au monde qui lui appartenaitvraiment. Hors de question qu’il la laisse s’en aller. Certes, leur situation n’était pas forcémentpropice à ce moment d’intimité. Il fallait qu’il ait le cerveau en vrac pour s’abandonner à elle. À saplace, aucun homme sain d’esprit ne se mettrait dans une telle posture.

Il tenta de l’attraper et de l’embrasser, mais elle se faufila le long de son corps, frôlant son ventrede ses seins magnifiques. Faute de mieux, Brian empoigna son oreiller des deux mains ; il auraitvoulu que la lumière soit allumée pour la voir le prendre dans sa bouche et observer l’étincelle à lafois douce et vulnérable dans ses yeux. Une étincelle qui le touchait au vif. Dans ces moments-là, ilsétaient connectés d’une manière qu’il n’avait pas crue possible jusqu’à ce qu’elle la lui fassedécouvrir. Le délice qu’il éprouvait à la voir prendre du plaisir, la joie qu’ils partageaient, sonbesoin de la toucher et de la goûter… tout cela, il n’aurait su l’expliquer. Une chose était sûre : lejour où il l’avait perdue, il avait aussi perdu le goût de vivre.

Elle saisit son membre palpitant dans sa main. Ses doigts fins étaient à peine assez longs pour enfaire le tour. Cette pression partielle était un supplice qui lui arracha un gémissement. Il n’allait pastenir longtemps. Elle le masturba à quelques reprises en resserrant sa paume, et une perle humidebrilla au sommet de son gland. À l’instant où sa langue glissa sur le bout engorgé de son sexe, ilpoussa un juron.

— Ne me titille pas trop longtemps, lâcha-t-il tandis que le souffle chaud de Layla balayait sonmembre.

Elle lui massa les testicules.

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— Tu es le premier à dire qu’il ne faut pas précipiter les choses.— Qui a parlé de précipiter quoi que ce soit ?Il lui agrippa la chevelure, suréleva les hanches et frotta son sexe contre sa bouche.— Je vais te faire l’amour jusqu’au petit jour.Brian perçut le frisson qui la parcourut. D’ordinaire, une fois qu’ils étaient un peu calmés, ils

partaient pour un voyage long et langoureux. Elle savait ce qu’il lui réservait. Une nuit intense. D’unevolupté insoutenable. Il lui tardait de la posséder. Depuis leur rupture, il s’était laissé mourir à petitfeu.

Elle lui effleura l’arrière de la cuisse.— Écarte les jambes et plie le genou pour que je sois plus à l’aise.— Tu ne vas pas rester en bas assez longtemps pour te sentir mal à l’aise. Tu vas te contenter de

calmer un peu mes ardeurs pour que je n’abîme pas ta petite chatte lors de notre premier round.Il sentit ses lèvres s’étirer en un sourire. Puis sa bouche impertinente engloutit son sexe et il

enfonça la tête dans l’oreiller, le corps frissonnant de plaisir.— Oh oui !Layla l’enveloppait complètement ; sa bouche était si chaude et serrée qu’elle fit monter quelques

gouttes de nectar à l’extrémité de son sexe. Elle l’avala dans un gémissement, aspirant avec voracité.— C’est ça, ma chérie. Goûte-moi… Ah !Brian ferma les yeux et contracta les mâchoires, l’esprit embrumé par la sensualité de ses gestes.

La tête de Layla montait et descendait, ses lèvres coulant le long de son membre tandis qu’elle lui enmassait fébrilement la base.

Soudain, elle aspira son gland et son désir grimpa d’un cran. Elle aventura ses doigts sous sestesticules.

Surpris, il se raidit. Elle ôta sa main et ses lèvres se retroussèrent en un sourire mutin.— Coquine, siffla-t-il.Elle enroula la langue autour de sa verge. Il serra les dents. L’estomac noué, le dos raide, il n’osa

pas bouger de peur de jouir trop vite. C’était délicieux. Il aurait voulu tenir bon, rester à la frontièrede l’orgasme pour toujours. Rien n’égalait le plaisir qu’elle lui prodiguait ni l’amour qu’il éprouvaità chacune de ses caresses.

— C’est trop bon, marmonna-t-il. Tu me suces si bien…Layla titilla encore son érection ; il s’aperçut qu’elle s’était enduit les mains de lubrifiant car ses

doigts glissaient sur sa peau comme de l’eau. Elle accéléra la cadence, aspirant son sexe de bas enhaut à un rythme effréné pour le distraire tandis qu’elle hasardait sa main plus bas.

— Layla, qu’est-ce que tu fais ?Elle ôta les lèvres de son sexe dans un petit bruit de succion.— Tu as acheté du lubrifiant. Ne va pas me faire croire que tu ne songeais pas à un jeu plus osé ?En vérité, ce n’était pas tout à fait ce qu’il avait eu en tête. Il avait eu l’intention de s’occuper de

ses fesses à elle et non pas l’inverse. Elle le punissait d’avoir eu le culot d’acheter le gel. Tant pis, ilse plierait à sa volonté. Il lui avait toujours cédé.

Brian souleva les hanches et elle introduisit l’extrémité de son doigt en lui. Aussitôt, unepellicule de sueur se forma sur sa peau. Il s’efforça de se détendre tandis qu’elle explorait unenouvelle facette de leur sexualité.

Le souffle saccadé, il s’imprégna de cette sensation inédite et du sentiment de vulnérabilité qui endécoulait. Layla le prit à nouveau dans sa bouche, aspirant son gland avec délicatesse tout enplongeant son doigt en lui.

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— Ah, bon sang ! s’écria-t-il, le cou crispé, les cuisses tremblantes.Lorsqu’elle inséra un second doigt, il poussa un petit cri, surpris par la brûlure suscitée. Elle

s’agenouilla et sa chevelure tomba en éventail sur les hanches de Brian, sa bouche s’acharnantsur son sexe à une cadence infernale tandis que ses doigts allaient et venaient en lui.

— Layla, tu me tues.La surprise passée, ses dernières réticences s’envolèrent. Leur relation était si fusionnelle qu’il

lui céda cette part de son intimité sans se poser de questions. C’était une extension naturelle des liensqui les connectaient déjà. En outre, c’était étonnamment agréable. Par réflexe, ses genouxs’écartèrent, encourageant Layla à redoubler d’audace.

— Je vais faire la peau au salopard qui t’a appris ça, lâcha-t-il. Je vais l’attacher et leséquestrer. Ah… je vais jouir. Ralentis.

Les gémissements de Layla et ses bruits de succions mêlés à ses propres plaintes l’excitèrenténormément. Il avait le sexe très dur, les testicules tendus à l’extrême. Il était à sa merci, il luiappartenait complètement. La position de soumission qu’elle lui imposait le consumait comme unefièvre.

— Je vais jouir très fort, la prévint-il. Vas-y plus doucement. Maintenant. Ah… bon sang !Elle avait trouvé sa prostate. Frottant la glande vite et fort, elle l’envoya au septième ciel.Aveuglé par un plaisir sauvage et dévastateur, Brian poussa un cri sonore et atteignit un puissant

orgasme, les mains agrippées à sa chevelure, les hanches surélevées. Sa tête retomba dans l’oreiller,ses yeux se fermèrent et ses mâchoires se serrèrent. Il avait la colonne vertébrale si raide qu’ilcraignit qu’elle ne se brise.

Il se répandit dans la bouche de Layla sans pouvoir se contenir, les années de désir refouléjaillissant d’un coup de son membre avec puissance. Les plaintes de la jeune femme qui avalait sasemence lui firent tourner la tête. Elle continua de lui caresser le postérieur jusqu’à ce qu’ils’effondre sur le matelas.

Ruisselant de sueur, il se força à lui lâcher les cheveux. Elle l’aspira une dernière fois puis seredressa. L’esprit embrumé, il l’entendit se diriger dans la salle de bains et ouvrir le robinet dulavabo. La courte distance qui les séparait était déjà trop grande. Il avait besoin de la sentir près delui pour la serrer fort et ne jamais plus la laisser partir.

— N’éteins pas la lumière quand tu reviendras dans la chambre. Et laisse la porte entrouverte,dit-il d’une voix enrouée.

Quelques instants plus tard, Layla apparut devant lui, nue, les joues empourprées et si belle queson cœur chavira. Son membre remua, ce qui l’étonna, si vite après l’orgasme. Mais avec elle, toutétait possible. Il était fait pour lui donner du plaisir. Tant qu’elle aurait envie de lui, il se tiendraitprêt à la satisfaire.

— Viens ici, dit-il en tendant les bras vers elle. Embrasse-moi.Elle s’allongea sur lui. À l’instant où leurs lèvres s’effleurèrent, Brian la fit rouler sous lui et

s’empara de sa bouche. Leurs langues s’entremêlèrent et elle s’abandonna à lui, ployant sous sonpoids. Il glissa une jambe entre les siennes pour frotter son sexe contre sa féminité humide et gonflée.Elle avait toujours tiré son plaisir du sien. Parce qu’elle l’aimait. Oui, il savait à présent qu’ellel’aimait encore, autrement elle n’aurait pas pu le toucher de manière si intime.

Il se releva légèrement et prit son sein dans sa bouche. Un profond sentiment de soulagementl’envahit. Après avoir passé cinq ans à souffrir de son absence, il la tenait enfin dans ses bras.

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Layla se mordit la lèvre en lâchant un petit gémissement tandis que la langue de Brian aspiraitson mamelon. Lorsqu’il grogna, une onde de plaisir la parcourut. Elle s’arc-bouta, enfonçant lespoings dans le matelas. Il avait la peau chaude et moite, et son odeur grisante l’enveloppait.

Depuis l’âge de seize ans, cette odeur musquée l’attirait comme un aimant. Un jour, son frèrel’avait surprise à porter une chemise qu’elle avait chipée à Brian. C’est ainsi que Jacob avait devinéqu’elle en pinçait pour son ami. Il lui avait passé un sacré savon. Brian avait pris l’incident sur le tonde la plaisanterie, prétextant que ce n’était qu’une farce de gamine. Mais au même moment, il luiavait décoché un regard ardent. Alors, elle avait su qu’il ne la voyait plus comme une enfant maiscomme une femme.

Les deux années suivantes, celles précédant sa majorité, lui avaient paru une éternité. De mêmeque les cinq dernières.

— Brian, murmura-t-elle en caressant ses larges épaules musclées avec un ronronnement deplaisir.

Il mordilla tendrement la pointe de son sein avant de prodiguer la même attention à l’autre téton,pétrissant le renflement de chair de sa grande main calleuse. Elle avait beau avoir une petite poitrine,il la chérissait plus que tout.

— Tu es tellement belle, la complimenta-t-il en lui palpant la hanche avant de glisser sa mainplus bas. Je rêve de te prendre comme ça depuis si longtemps… Ça m’a rongé. Je ne peux pas mepasser de ton corps. J’en ai besoin comme j’ai besoin de manger et de boire, Layla.

Elle ferma les yeux, réprimant les larmes et les mots qu’elle ne pouvait pas se permettre deprononcer.

Lorsqu’il se plaça entre ses cuisses, elle s’ouvrit aussitôt à lui. Non seulement pour prendre duplaisir mais pour lui en donner.

Brian lui saisit la jambe et la plaça sur son épaule. Il déposa une traînée de baisers à l’intérieurde sa cuisse, jusqu’à sa chair tendre, qui n’attendait que lui. Elle s’était sentie vide pendant silongtemps. Et tellement seule.

Si elle l’avait quitté, c’est par instinct de survie. Elle n’aurait pas supporté de perdre un autreproche. Une voiture officielle qui se serait garée devant chez elle, des hommes venant frapper à saporte pour lui annoncer le décès de quelqu’un qu’elle aimait. Pas question. Du coup elle avait rompu.Mais elle en avait ensuite payé le prix fort. D’ailleurs, elle n’avait pas fini de le payer.

Il posa un baiser sur son clitoris avant de le masser avec la pointe de sa langue.— Plus tard, dit-elle en l’écartant.Brian leva la tête et croisa son regard. Son sourire canaille s’évanouit. Ce qu’il lut sur son visage

lui suffit à comprendre ce qu’elle voulait.Il se rallongea sur elle en exhibant ses biceps, ses abdominaux et son long sexe dressé. Elle

enroula une jambe autour de sa taille, impatiente de l’accueillir en elle. Un petit cri lui échappalorsqu’elle sentit l’extrémité de son membre s’insinuer entre les replis de sa féminité.

— Laisse-toi faire.Brian lui souleva le postérieur et lui inclina légèrement le bassin pour faciliter la pénétration.Une onde de chaleur la balaya.— Tu es si jolie, murmura-t-il en s’enfonçant peu à peu. J’adore te voir rougir quand je te prends.

Bon sang, j’adore être en toi. Tu es si chaude et si douce. Si humide. Ta petite chatte est toutemouillée pour me recevoir.

Elle souleva les hanches pour qu’il s’ancre plus profondément.— Dépêche-toi.

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Il posa les yeux sur son visage et sonda son expression avec tendresse.— On n’a pas dit qu’on allait prendre notre temps ?— Je te veux en moi. Tu pourras ralentir une fois que tu y seras.— Tu es sacrément étroite.Il s’enfouit un peu plus dans sa chair palpitante et son regard s’assombrit.— Comme la première fois que je t’ai fait l’amour, ajouta-t-il.Elle détourna la tête et écrasa sa joue en feu contre l’oreiller frais. Elle avait tenté de construire

d’autres relations, s’était efforcée de fréquenter des types bien, avait fait son possible pour tourner lapage. Mais au bout de deux ans de tentatives infructueuses, elle avait jeté l’éponge. Elle faisaitsouffrir des hommes qui ne le méritaient pas, ce qui la rendait malheureuse en retour.

Brian prit son visage en coupe.— Ouvre les yeux, Layla.Il se retira un peu pour s’engouffrer de plus belle et elle renversa la tête en arrière.— Regarde-moi, l’encouragea-t-il. Je veux que tu me regardes pendant que je te prends.Ses paupières se soulevèrent. Leurs yeux se vrillèrent. Elle vit son visage se crisper, le plaisir

déformer ses traits comme s’il était en proie à la plus douce des agonies. Il s’enfonça lentement enelle en la fixant intensément. Les jambes nouées à sa taille, elle se plaqua contre lui et éleva le bassinà mesure qu’il s’enfouissait en elle.

La pénétration lui fit l’effet d’un massage en profondeur.— Brian, je t’en supplie…De la langue, il parcourut l’ourlet de sa lèvre inférieure, le regard si lascif qu’elle en trembla de

désir.— Voilà, siffla-t-il, en roulant le bassin pour s’ancrer en elle.Il donna un bref coup de boutoir et redressa le torse.— Tu m’as tout entier.Si seulement c’était vrai, songea-t-elle.Brian baissa les yeux pour contempler leurs corps imbriqués.— J’ai rêvé de ça. J’ai rêvé de te pénétrer à nouveau. Tant de fois !Il se retira jusqu’à l’extrémité. Puis son membre enflé replongea en elle, écartant son fourreau de

chair de manière délicieuse. Il émit un grognement qui la fit jouir.— Oh, Brian !De violents tremblements la parcoururent au moment de l’orgasme.— Oui, éructa-t-il en lui empoignant les hanches et en allant et venant en elle avec des

mouvements brusques et profonds.Il plongea la tête sur sa poitrine et s’empara d’un téton. Il l’immobilisa à l’aide de ses mains

tandis que son sexe se mouvait dans sa féminité palpitante.Elle s’agrippa à ses poignets, le souffle haletant. Ses coups de reins répétés firent grincer le

sommier et agitèrent le corps de Layla.— À mon tour, dit-il dans un souffle. Ah…Il la plaqua contre lui, ses hanches ondulant contre son bas-ventre tandis qu’il vidait sa semence

en elle. Puis il prit son visage entre ses mains et frotta sa joue contre la sienne.— Layla.Ses yeux la picotèrent. Elle ferma les paupières et le serra aussi fort que possible contre son

cœur.

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5

Une fois douché et habillé, Brian se pencha au-dessus du lit et réveilla Layla en lui mordillantgentiment le lobe.

— Range ton engin, bel étalon, marmonna-t-elle en se cramponnant à son oreiller.Il éclata de rire.— Je t’ai fait couler un bain chaud. Je vais aller prendre un truc à emporter au snack, passer deux

ou trois coups de fil et faire le plein à la station-service. Je serai de retour dans une demi-heureenviron. Ensuite, on devra reprendre la route.

— Quelle heure est-il ?— Sept heures et demie.— Si tôt…Il lui assena une tape sur les fesses à travers le drap. Elle n’avait jamais été du matin.

D’ordinaire, lorsqu’ils faisaient une nuit blanche, elle ne se levait pas avant midi.— Tu pourras dormir dans la voiture.— Comment arrives-tu à être opérationnel à cette heure-ci ? maugréa-t-elle. Je suis crevée.— Nos exploits de cette nuit m’ont redonné la pêche. Je me sens revigoré.— Je vois ça.Malgré ses plaintes, lorsqu’il rabattit le drap et posa ses lèvres le long de son dos, elle émit un

petit gémissement de plaisir et se cambra. Les bleus sur ses coudes avaient noirci depuis la veille, cequi rappela à Brian à quel point elle était fragile.

— Sois sage et obéissante, murmura-t-il contre sa peau, et je te récompenserai plus tard.Elle ouvrit un œil.— Tu me revaudras ça.— Avec plaisir.Brian se redressa et observa son corps nu encore alangui. Il s’écarta du lit pour ne pas succomber

à la tentation. Il lui avait fait l’amour pendant des heures jusqu’au petit matin, quand les premiersrayons du soleil s’étaient insinués dans la chambre à travers les rideaux. Toutefois ils avaient encorebeaucoup de nuits à rattraper. Lorsqu’elle l’avait quitté, son appétit sexuel s’était endormi et c’étaitcomme s’il s’était réveillé d’un seul coup et explosait.

— N’oublie pas de mettre le lubrifiant dans la valise, dit-elle en brandissant le tube d’une main.Il esquissa un sourire qui se volatilisa à la seconde où il mit le pied dehors.Avant de s’éloigner, il s’assura que la porte de la chambre était verrouillée. C’était une matinée

fraîche et grise ; l’air était mordant. Une casquette de baseball enfoncée sur la tête, il avança d’unbon pas en inspectant les alentours. Il emprunta un sentier herbeux menant au centre commercial où

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était garée la Bronco. Devant une épicerie, il glissa une pièce dans un distributeur de journaux etrécupéra le quotidien. Puis il observa un instant le véhicule pour vérifier qu’on ne l’avait pas repéréni placé sous surveillance. Il tira le portable prépayé de sa poche et composa le numéro de Jim.

— Tout va bien ? s’enquit son collègue.— Jusque-là oui. Et toi, comment ça se passe ?— Ils ne m’ont pas encore questionné. Du coup, je ne suis pas dans leur ligne de mire, tu peux

continuer à utiliser la voiture. Mais tu te doutes bien que tu es recherché. Ta photo a été transmise àtoutes les autorités du pays. Tu es dans un sacré merdier, mon vieux.

— Ça va aller. J’en ai vu d’autres.À vrai dire, Brian s’y était attendu. Non seulement il avait survécu à l’attaque, mais il s’était

enfui avec le témoin. Évidemment qu’on le soupçonnait. Voire pire.— Merci Jim.— Fais gaffe à toi. Je ne dormirai pas sur mes deux oreilles tant que tu ne seras pas à San Diego.— Pareil.Brian raccrocha et démonta le téléphone. Puis il en sortit un autre et appela le substitut du

procureur de San Diego pour lui confirmer la présence de Layla Creed à la barre des témoins, commeprévu. Il s’en tint aux faits importants et abrégea l’appel quoique le substitut tentât de manière trèsmaladroite de lui tirer les vers du nez. Une fois l’appel terminé, il ôta la batterie du téléphone et jetales morceaux dans la remorque d’un pick-up devant lequel il passa. Puis il se rendit à une station-service avec la Bronco et regagna ensuite le motel. Avant de rejoindre Layla, il fit un crochet par lesnack d’en face où il commanda des burritos et du café.

Quand il retourna dans la chambre, la jeune femme avait fait les bagages, s’était douchée, vêtue ;elle somnolait à présent, avachie sur la petite table près de la fenêtre. Il mit les valises dans le coffreet revint la chercher.

— Tu es prête ?— Oui.Elle se dressa sur ses pieds, coiffa sa tête d’une casquette et lui prit la main. Elle avait relevé ses

cheveux en une queue-de-cheval, ce qui mettait en valeur son cou fin. Un cou qu’il adorait embrasser.Elle portait un jean et un tee-shirt, un gilet pare-balles par-dessus lequel elle avait enfilé la chemisede Brian de la veille. C’était sans doute macho de sa part, mais l’idée qu’elle porte son odeur luiplaisait.

Il s’était garé sur le parking du motel, juste devant leur chambre. Il l’escorta jusqu’à la portièrecôté passager, restée ouverte. Puis il contourna le véhicule et s’installa au volant. Il mit directementle cap sur l’autoroute.

— Merci, dit-elle en désignant le plancher de l’auto, où il avait déposé un sac de couchage.Elle ouvrit la fermeture Éclair, le tira jusqu’à son menton et se blottit dedans.— Abaisse le siège. Repose-toi. Si tu as un petit creux, il y a des œufs, du bacon et des burritos

dans le sachet. Ainsi que du café avec beaucoup trop de crème et de sucre, juste comme tu l’aimes,répondit-il en indiquant un gobelet en carton.

Mais au lieu de suivre son doigt, elle continua de le regarder.— Est-ce que ça va ? demanda-t-elle.Il aspira une gorgée de café chaud.— Après la nuit qu’on a passée ? Je suis sur un petit nuage. Ça fait des années que je ne me suis

pas senti aussi bien.

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— Menteur, répliqua-t-elle avec un soupir sonore. Est-ce que cet incident va nuire à ta carrière,Brian ?

— Je ne me fais pas de souci pour ça.Ce qui n’était pas totalement vrai. Il s’était beaucoup impliqué dans son travail. C’était à cause

de cela qu’il avait perdu Layla. Le problème, à l’époque, c’étaient les risques liés à son métier. Ellelui reprochait de vivre dangereusement. Aujourd’hui, c’était elle qui était menacée. Or, il était prêt àtous les sacrifices pour la garder à l’abri du danger, dût-il renoncer à sa carrière.

— Eh bien moi, je m’en fais.Il lui jeta un coup d’œil.— Inutile. Tout ce que je te demande, c’est de suivre mes instructions.Elle hocha la tête mais visiblement, quelque chose la turlupinait. Brian ne craignait pas qu’elle

lui complique la tâche. Depuis le temps qu’elle vivait dans le cadre du programme de protection destémoins, Layla connaissait la marche à suivre ; c’était une jeune femme intelligente. Elle avait beaului prendre la tête sur d’autres points, dès lors qu’il s’agirait de sa propre sécurité, elle ferait ce qu’ilfallait, il n’en doutait pas.

Un silence s’ensuivit. Il lui lança un autre regard et s’aperçut qu’elle ne l’avait pas quitté desyeux.

— Raconte-moi ton rêve de la nuit dernière.Elle secoua la tête.— C’est morbide.— Je m’en fiche. Ça peut te faire du bien d’en parler.— J’en doute, rétorqua-t-elle en fermant les yeux.Après une pause, elle jouta :— Je t’aurai prévenu. Ne t’en plains pas ensuite. C’est toi qui m’as demandé.Elle poussa un profond soupir et se jeta à l’eau.— Dans mon rêve, tu périssais durant l’attaque. Tout le monde mourait sauf moi. Et je me

penchais sur ton cadavre en hurlant. En te disant que je t’avais prévenu, que je savais que ça finiraitpar arriver, que je savais que tu m’abandonnerais. J’étais tellement en colère d’être la seulesurvivante !

— Mon Dieu.Son récit lui fit l’effet d’un coup de poing au ventre.— J’étais tellement heureuse de te voir hier. Je suis sûre que c’est à cause de ça que j’ai fait ce

cauchemar. Je revois encore les images. Je suis sortie de la planque et je t’ai vu…Elle ferma les paupières et soupira fort.— Tu t’es élancé dans ma direction, et j’ai cru pour commencer que c’était pour une autre raison.

Et puis, tout a explosé, et tu t’es effondré à mes pieds, le visage contre le sol. Et j’étais tellement encolère contre toi que je n’arrivais pas à pleurer.

Brian roula les épaules en arrière, se rappelant les plaintes qu’elle avait poussées dans sonsommeil.

— Comme tu le vois, j’ai des problèmes à régler, marmonna-t-elle en se pelotonnant dans son sacde couchage.

Sans doute Layla lui en avait-elle voulu dans son rêve, mais la manière qu’elle avait eued’extérioriser ses émotions n’avait rien eu d’agressif. Elle avait cherché son réconfort et s’étaitaccrochée à lui comme à une bouée de sauvetage.

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— C’est bon, ma puce. Tu as le droit d’être en colère contre moi. Je m’en veux énormémentaussi. Je n’aurais pas dû te laisser partir.

— C’était mieux comme ça. On a eu le courage d’arrêter quand il l’a fallu.— On était bornés et fiers, pas courageux. Vivre malheureux chacun de son côté ? C’était

complètement idiot.— Tu as été malheureux, Brian ?Il sentit son regard se poser de nouveau sur lui.— Tu voulais savoir si j’avais rencontré quelqu’un durant ces cinq années, poursuivit-elle, mais

moi je ne t’ai pas posé la question.Il lui coula un regard en disant :— Tu sais qu’il ne faut pas me demander ça.— Pourquoi ? Parce que ça risque de me rendre jalouse ? Je m’en remettrai.Elle afficha un visage impassible. Ce qui le prit au dépourvu. Elle avait autrefois été si

expressive et spontanée. Mais c’était à l’époque, quand elle était encore innocente. Entre-temps, lavie ne l’avait pas épargnée.

— Tu n’as aucune raison d’être jalouse.— Tu les aimes et tu les jettes, comme avant ?Il soutint son regard.— Non.Layla afficha un sourire narquois.— Désolée. Je voulais dire : tu les baises et tu les jettes ?— Non, putain !— Comme tu voudras. Ne me dis rien. Mais ne t’attends pas ensuite à ce que je réponde à tes

questions. C’est donnant-donnant, Brian.— Vraiment ? répliqua-t-il d’un air sombre.Un mélange de colère et de jalousie l’envahit.— Est-ce que tu t’es préservée pour moi, chérie ? Est-ce que tu pensais à moi la nuit en te

touchant ? Dis-moi qu’à part tes doigts et peut-être quelques sex-toys, rien ni personne n’a jamaiscaressé ta précieuse petite chatte. Parce que ça me rendrait fou d’imaginer un autre homme toucher cequi m’appartient !

Elle se redressa dans son siège.— Ha ! Ne me fais pas croire que tu as passé les cinq dernières années à te branler en pensant à

moi. Jacob m’avait mise en garde contre toi, Brian. Il m’a parlé de tes très nombreuses conquêtes.Apparemment, tu ne peux pas la garder dans ton pantalon.

— J’espère que ces histoires ont au moins eu le mérite de t’exciter, ironisa-t-il, furieux deconstater le peu de confiance qu’elle lui accordait. Vu le nombre de fois où tu as questionné ton frèreà ce sujet.

— Va te faire foutre.— Je n’ai eu envie que de toi.Layla se tut. Elle s’apprêtait à protester mais se ravisa. Puis elle le fusilla du regard.— Tu ne me crois pas, s’enquit-il d’une voix sombre en se caressant l’entrejambe.— Si ce que tu dis est vrai, tu es un sacré salopard, répliqua-t-elle d’une voix hachée. En tout

cas, tu m’as laissée partir sans te battre. Ça n’avait pas l’air de te déranger de perdre ma si« précieuse petite chatte ».

— Te laisser partir a été tout sauf facile, soupira-t-il.

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— À quel moment as-tu pris conscience de ton erreur ?Il inspira et expira lentement, tâchant de maîtriser sa colère.— Juste avant que tu franchisses la porte. Je savais que je ne pourrais pas vivre sans toi.— Pourtant tu as réussi. Pendant deux ans. Jusqu’à ce que ma virée à Mexico foute ma vie en

l’air.Elle se rassit droite dans son siège et prit le gobelet de café.— Tu étais très jeune quand on a commencé à se fréquenter. J’avais l’impression de t’avoir prise

au berceau. Tu sortais à peine du lycée et tu t’es retrouvée d’emblée dans une relation très sérieusesans avoir eu le temps de faire l’expérience de la vie.

— Tu as toujours voulu prendre les décisions à ma place. Tu ne m’as jamais considérée commeune adulte.

— Qu’est-ce que tu racontes ? Je me suis plié en quatre pour toi. J’ai tout fait pour te laisser lechoix.

— Non. En réalité, tu orientais toutes mes décisions.Elle posa le gobelet et farfouilla dans le sachet en papier. Elle en sortit un burrito, le plaça sur

les genoux de Brian, puis s’en servit un.— Je n’ai pas faim, marmonna-t-il.— Eh bien moi, j’ai décidé que si. Mange.Brian jura dans sa barbe.— Je savais ce que je voulais, Brian. C’était toi. Toi et personne d’autre. Je ne voulais pas

perdre mon temps à faire l’expérience de la vie. Ce temps, j’avais envie de le passer avec toi.— Alors pourquoi es-tu partie ?Une main sur le volant, il prit le burrito de l’autre et, à l’aide de ses dents, déchira l’aluminium

qui l’enveloppait.— Tu sais très bien pourquoi.— Et toi tu connaissais les risques liés à ma profession depuis le début de notre relation. Tu

savais à quoi tu t’exposais en sortant avec moi.— Tu m’as menti quand tu as intégré l’U.S. Marshals Service.— N’importe quoi.— Tu m’avais caché avoir postulé pour l’unité de forces spéciales, protesta-t-elle.Layla mordit dans son burrito.— J’étais qualifié pour le poste.Elle mastiqua avec rage et avala une grande gorgée de café pour faire passer sa bouchée.— Tu étais également qualifié pour celui d’expert en sécurité.Il reposa son burrito. Lancer sa propre boîte, c’était un projet qu’il avait partagé avec Jacob.

Après le décès de son meilleur ami, Brian avait eu l’impression que son rêve était mort aussi. Iln’avait pu s’imaginer le réaliser sans Jacob.

— Les choses changent.— Toi non. Tu es un accroc à l’adrénaline qui souffre d’un complexe de super-héros.— Tu oublies de mentionner mon gros engin, s’écria-t-il, piqué au vif.Elle planta son regard dans le sien.— La vérité fait mal, hein ? le nargua-t-elle.— Ta petite chatte ne semble pas s’en plaindre.Elle lui fit un doigt d’honneur, se tourna vers la vitre et se remit à manger.

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À l’époque, il avait tenté de discuter avec elle du poste qu’on lui offrait au sein du groupe deforces spéciales de l’U.S. Marshals Service. Mais elle lui avait lancé un ultimatum, considérant qu’ilaurait dû lui en parler avant de se porter volontaire. En outre, elle avait déclaré qu’elle ne resteraitpas avec un type qui était résolu à mourir.

— Et si on parlait des vérités qui te font mal, Layla ? La peur qu’on t’abandonne, par exemple.Cette peur qui t’a empêchée de me faire confiance. Tu me faisais constamment du chantage pourmettre à l’épreuve mon amour pour toi. Tu cherchais sans cesse un prétexte pour me faire fuir et direensuite que je n’avais jamais eu l’intention de rester avec toi.

— Et tu as fini par me prouver que j’avais raison, non ?— À force de chercher la petite bête, Layla, tu as fini par la trouver.Elle haussa les épaules.— Tout le monde a des blessures secrètes. Quand on aime quelqu’un, on l’accepte avec ses

bagages.— C’est ce que j’ai fait. C’est toi qui n’as pas su accepter les miens.— Tu sais quoi ? dit-elle en pivotant face à lui sur son siège. Je ne sais pas pourquoi on parle de

ça. Le fond du problème, c’est que nous voulons tous deux différentes choses, et que ces désirs sontincompatibles. Ce qui est nécessaire à ton bonheur me rend malheureuse et vice versa.

— Tu oublies le fait que nous avons besoin l’un de l’autre.— De toute façon, dans quarante-huit heures, je vais me volatiliser dans la nature et toi, tu vas

devoir rendre des comptes à ta hiérarchie pour avoir disparu de la circulation avec un témoin. Ledestin joue contre nous, Brian, dit-elle avec un soupir. Prends cela comme une bénédiction. Dieu saitque nous sommes trop stupides pour renoncer à une relation qui ne marchera jamais. Du coup, Il nousdonne un coup de pouce.

Peut-être, songea-t-il, hors de lui. Mais stupide ou pas, cette fois il n’allait pas la laisser lui filerentre les doigts sans se battre.

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6

Ils firent halte pour la nuit à Joplin, dans le Missouri. Le motel sur lequel Brian jeta son dévoluétait bon marché et aurait eu besoin d’un petit rafraîchissement. Mais Layla était tellement soulagéede descendre de voiture qu’elle n’y prêta aucune attention. Elle pénétra dans la chambre en titubant ets’écroula sur le lit la tête la première. Puis elle s’étira les jambes.

En entendant Brian apporter les bagages, elle poussa un long soupir de gratitude, impatiente deprendre une douche.

— Qu’est-ce que tu as envie de manger pour le dîner ? demanda-t-il en enroulant sa main autourde sa cheville et en la lui massant.

— Une salade avec du poulet grillé ou du poisson. Rien de frit. Je ne peux pas continuer àmanger n’importe quoi alors que je reste assise toute la journée. Je commence à me sentir grasse etimmonde.

— OK. Je n’en ai pas pour longtemps. Tu connais la procédure.— Oui. N’ouvrir la porte sous aucun prétexte, même si c’est toi qui frappes.Juste avant de sortir, il prit soin de tirer les rideaux. Après son départ, Layla se glissa au pied du

lit. Comme la veille, elle se prépara pour la nuit, se demandant cette fois, tandis qu’elle déballait unrasoir jetable, si Brian avait pensé à récupérer la boîte de préservatifs qu’il avait jetée dans lapoubelle de l’autre motel.

Ils n’avaient jamais utilisé de préservatifs. Dès le début de leur relation, Layla avait pris lapilule ; et ils étaient trop accrocs à la sensation de connexion totale pour mettre une barrière entreeux. Sans oublier à quel point ils étaient spontanés. Il croyait sans doute qu’elle était toujours souscontraceptif.

Ce qui n’était pas le cas. À quoi bon continuer à prendre la pilule alors qu’elle n’avait plus derapports sexuels ?

Brian lui avait certifié être resté célibataire depuis leur rupture. À cette pensée, Layla ressentitune pointe de culpabilité. De son côté, elle avait eu plusieurs amants. Assez pour s’assurer qu’aucunhomme ne pourrait jamais remplacer Brian. Elle avait fréquenté des types aussi attirants que lui, deshommes à l’appétit sexuel débridé, des hommes expérimentés qui veillaient à lui prodiguer du plaisir.Mais elle avait beau passer du bon temps, ce n’était rien que du sexe, du sexe dénué de sentiments.À chaque nouvelle aventure, elle avait eu l’impression de partager son lit avec la mauvaise personne.

Elle prit une longue douche chaude pour se détendre. Elle se rasa les jambes et appliqua sur sapeau la lotion hydratante fournie par le motel. Un mélange d’excitation et de désespoir l’envahit. Lescirconstances de leurs retrouvailles et le fait de savoir que d’ici à deux jours ils devraient se séparerinstillaient dans ses veines un flux continu d’adrénaline.

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Quand elle sortit de la salle de bains, elle découvrit Brian allongé sur le lit, torse nu. Il avaitdéboutonné la braguette de son jean et s’était adossé à la tête de lit, jambes croisées. Latélécommande dans une main, une bouteille d’eau dans l’autre, il regardait les informations à la télé.À son apparition, il tourna la tête vers elle et ses yeux s’assombrirent.

— Ça va mieux ? demanda-t-il d’une voix caverneuse.Layla le dévora du regard. Il avait le buste bronzé et couvert d’une fine toison qui formait une

ligne de son nombril à sa ceinture, sous laquelle elle s’engouffrait. Ses bras étaient sculptés à laperfection ; ses biceps se gonflèrent quand il leva la bouteille à ses lèvres et avala une grande gorgéed’eau. Sa gorge se contracta à chaque déglutition. À ce spectacle, Layla sentit le désir s’emparerd’elle. Elle eut très envie de lui.

Il était sexy en diable. D’une exquise virilité.— À quoi penses-tu, ma chérie ?Il passa sa langue sur sa lèvre inférieure pour essuyer une goutte d’eau.— J’ai très envie que tu poses ta bouche sur moi.Il émit un grognement qui la fit tressaillir et se leva du lit d’un mouvement preste.— Avale ton dîner pendant que je me douche. Ensuite, je te mangerai toi.Le regard qu’il lui adressa attisa son désir. La pointe de ses seins se tendit.Il s’approcha d’elle et posa les yeux sur sa poitrine.— Je ne pense qu’à lécher ta petite chatte appétissante depuis que tu m’en as empêché la nuit

dernière. Je voulais me garer sur une aire d’autoroute, t’attirer à l’arrière du pick-up et te lécherjusqu’à ce que tu hurles.

— Brian.Il engouffra sa main dans sa culotte et posa la main en coupe sur son sexe.— Hum… Tu es déjà chaude et humide.D’instinct, elle écarta les jambes, le cœur battant à tout rompre. Brian était très porté sur les

plaisirs de la chair et n’avait pas honte de le montrer. Son absence d’inhibition la rendait folle.Elle lui agrippa les biceps tandis qu’il écartait les replis de sa féminité et lui caressait le clitoris.

Ses jambes se dérobèrent sous elle. Sa respiration se précipita. Brian effleura l’entrée de son sexe endessinant des cercles puis introduisit deux doigts en elle.

— Oh, mon Dieu, murmura-t-elle.Elle lui retourna la faveur, glissant sa main par la braguette entrebâillée de son pantalon et

l’insinuant sous son caleçon. Son membre tomba dans ses paumes avec lourdeur. Son gland était déjàhumide.

De sa main libre, il lui saisit la jambe et l’enroula autour de sa taille pour qu’elle s’ouvredavantage à lui. Il retira ses doigts et les plongea à nouveau en elle, ce qui la fit s’arc-bouter dans unhalètement.

— Combien de fois as-tu été tellement excitée qu’il a fallu que je trouve un recoin de touteurgence pour te doigter jusqu’à l’orgasme ? ronronna-t-il en frottant son pénis contre ses mains.

— Pas assez.— Ce n’est jamais assez.Il enfonça les doigts en elle encore et encore, œuvrant d’un geste expert. Du pouce, il frôla son

clitoris et le malaxa, la menant au bord de la jouissance.— Seigneur, tu es si belle.Layla se mit à le caresser des deux mains, d’un geste ferme et rapide, juste comme il aimait.— Tu es toute mouillée. Je meurs d’envie de te goûter. Et tu n’es pas loin de me faire jouir…

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— Non.Elle se figea après avoir serré son sexe dans sa paume une dernière fois.— Layla ! protesta-t-il en crochetant ses doigts pour trouver son point G.— Quand tu jouiras, ce sera en moi.Il plissa ses yeux verts d’un air menaçant puis s’empara de sa bouche avec une tendresse

surprenante. Ce fut ce baiser qui provoqua son orgasme.Sa plainte se perdit contre les lèvres de Brian. Son sexe convulsa autour de ses doigts et ses

mains se fermèrent par réflexe autour de son membre.Il émit un sifflement en se frottant entre ses paumes.— Tu me tues.Elle ondula contre ses doigts pendant quelques instants, jusqu’à ce que son orgasme se dissipe,

laissant son corps fébrile. Elle retomba contre son torse, la respiration saccadée.— Je te tiens, murmura-t-il en frottant sa joue contre le sommet de son crâne.Il lui lâcha la jambe et la saisit par la taille pour l’attirer contre lui.— La douche peut attendre, dit-elle.— J’ai une barbe de trois jours, ma chérie. Il faut que je me rase, répliqua-t-il en s’écartant, le

visage en feu et le regard enfiévré. Quand je sortirai, je veux que tu sois nue, ajouta-t-il.Elle commença à se déshabiller avant qu’il ait atteint la salle de bains. Quand l’eau se mit à

couler, elle prit sa salade et se faufila sous les draps. Afin de calmer les battements erratiques de soncœur, elle saisit la télécommande sur la table de chevet et alluma la télévision. Après avoir zappéplusieurs fois, elle tomba sur un épisode de Navy SEALs, qu’elle commença à regarder.

Ses pensées s’égarèrent. Elle se demanda ce qui poussait un homme à choisir ce genre de vie.Jacob l’avait fait pour suivre les traces de leur père, qui avait lui-même opté pour cette carrière àcause de son propre paternel. Mais Brian n’avait jamais vraiment su répondre à cette question. Dansson cas, ce n’était pas une affaire de famille. Il avait été élevé par sa mère, qui ne lui avait jamaisrévélé l’identité de son géniteur. Quand Layla lui avait demandé pourquoi il avait rejoint l’armée, ils’était contenté de hausser les épaules en disant : « Qu’étais-je censé faire d’autre ? »

Pourtant, il était doué en tout. Il pouvait aussi bien réparer un circuit électronique que cuisiner oufaire de la maçonnerie. Il aurait pu exercer n’importe quel métier.

— Tu ferais mieux de finir ta salade et vite, la prévint Brian en fermant le robinet. Je vais bientôtte sauter dessus.

Layla coupa le son de la télévision et feignit un ronflement sonore.— Ha ! Je connais une manière de te réveiller.— Vas-y, je t’attends.Quand il sortit de la salle de bains dans toute la gloire de sa nudité, le cœur de Layla cessa de

battre. Les larmes lui montèrent aux yeux et embuèrent sa vision. Elle les chassa d’un geste impatientpour ne rien perdre du spectacle qu’il lui offrait.

Elle l’aimait tant. Sa poitrine se serra douloureusement.Il s’arrêta quelques secondes près du lit pour lui permettre de le contempler à sa guise. Il était

plus mince qu’avant, sans doute parce qu’il travaillait trop. Mais son corps était tout de même parfait.Il n’y avait rien qu’elle eût voulu changer. Elle ferma sa barquette et la posa sur la table de nuit sansle quitter des yeux.

Brian saisit le drap et le tira doucement, découvrant peu à peu le corps de Layla.— Quand je te regarde, mon souffle se suspend, murmura-t-il. Je n’ose plus cligner les yeux de

peur que tu ne te volatilises.

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Il la voyait. Il la voyait pour ce qu’elle était vraiment ; il la connaissait par cœur et tenait à elleen dépit de ses défauts. Elle s’était sentie invisible pendant des années, dissimulée derrière un nomd’emprunt et une vie qui n’était pas réellement la sienne. Aussi, être avec quelqu’un qui lacomprenait signifiait beaucoup pour elle. Brian la soutenait durant la période la plus dangereuse et laplus oppressante de sa vie.

Il posa les paumes à plat sur le matelas, s’agenouilla sur le lit et rampa vers elle en exhibant sesmuscles. Son sexe pendait lourdement entre ses cuisses. À cette vue, le ventre de Layla se mit àpapillonner. Quand il baisa la plante de son pied, ses orteils se recroquevillèrent. Il plaqua ensuiteses lèvres sur sa cheville en enroulant sa main autour de son autre pied.

— Brian ?— Oui, ma chérie ?— Viens ici.Il releva la tête et vrilla ses yeux aux siens.— Non.— Je ne veux pas t’arrêter dans ton élan. Je veux juste te serrer contre moi quelques instants.Dans un soupir, il vint s’allonger près d’elle.Elle roula dans ses bras et colla son visage à son torse. Sa peau était encore humide et fraîche,

son cœur battait fort. Il l’étreignit et elle déposa des baisers sur ses mâchoires rasées de près,heureuse de l’enlacer une fois encore.

— Layla… dit-il d’une voix éraillée où perçait le désir.Malgré son érection, il avait pris le temps de se raser pour éviter de lui irriter la peau. Il était

plein d’attentions, petites et grandes. Toujours prêt à combler ses moindres envies.Sauf s’il était question de son travail.— J’aimerais comprendre, chuchota-t-elle. Pourquoi tiens-tu absolument à risquer ta vie ?Brian se raidit. Puis il posa son menton sur sa tête avec un soupir.— Ce n’est pas ça.— Explique-moi, alors. De quoi s’agit-il ?— Je ne sais pas. Je me suis posé la question tant de fois. Étendu dans mon lit sans toi, à me

demander où tu étais, si tu allais bien, à me reprocher de ne pas avoir plaqué mon travail quand tum’en as imploré.

Il lui effleura la colonne vertébrale de haut en bas.Elle ferma les yeux et se blottit tout contre lui.— Ton métier t’apporte quelque chose que je ne peux pas te donner. Quelque chose dont tu as

besoin.— C’est surtout de toi que j’ai besoin.Il la fit rouler sur le dos et se pencha au-dessus d’elle. Il glissa les cuisses entre les siennes et

reposa doucement son poids sur elle d’une manière qui l’avait toujours réconfortée.— Ce qui me ronge, c’est que tu aies pu croire que mon travail passe avant toi, poursuivit-il. Que

j’aie pu te donner une raison de le penser.Layla posa les doigts sur ses lèvres pour l’interrompre. Il les lui mordilla avant de les sucer tout

en soutenant son regard.— Cramponne-toi à l’oreiller, dit-il d’une voix brusque.Elle s’exécuta et tendit les bras en arrière pour attraper le coussin. Cette posture la força à

cambrer le dos et à tendre la poitrine vers sa bouche. Il lécha le sommet de son sein, lui arrachant unpetit gémissement de plaisir.

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Le souffle de Brian lui caressa la peau.— J’adore les bruits que tu fais.— Et moi la manière dont tu me touches.Comme si elle était la chose la plus précieuse au monde, comme si seul son plaisir importait.— Alors je ne vais pas m’arrêter.Une chaleur humide s’empara de la pointe sensible de son sein quand il la prit dans sa bouche.

Ses joues se creusèrent tandis qu’il aspirait lentement son téton, déclenchant une salve de bonheur quise diffusa à travers ses membres. Elle renversa la tête en arrière en émettant une plainte.

— Oui…Le centre de sa féminité palpita, jaloux de l’attention portée à sa poitrine. Brian prit son autre

sein en coupe, en fit rouler la pointe entre son index et son pouce, puis la pinça tendrement.Elle arc-bouta le dos et entrouvrit les lèvres, le souffle haletant. Elle avait l’impression que

c’était la première fois qu’on la touchait depuis des années. Les sensations étaient puissantes ettorrides, trop vives en comparaison de l’engourdissement dans lequel elle avait vécu depuis leurséparation.

— Mon Dieu, Brian…Du bout de la langue il flatta la pointe de son sein. Les caresses de sa bouche se répercutèrent

dans le bas de son ventre, entre ses cuisses. Elle frotta son pubis contre lui, ondulant contre sonmembre dressé.

— Tu m’excites tellement, souffla-t-elle.Des perles de sueur apparurent sur sa peau. Elle eut presque la sensation d’avoir pris un coup de

soleil, tant sa chair était sensible, quasiment douloureuse. Lorsque la bouche de Brian se referma surson autre sein, elle lâcha un cri, grisée par l’excès de plaisir. Il se mit à l’aspirer de plus belle, lamordillant juste assez pour la faire frissonner.

Il faufila sa tête entre ses cuisses et elle enroula une jambe autour de son épaule, allongea l’autrele long de son flanc, les doigts crispés sur l’oreiller.

— C’est superbe, la complimenta-t-il en écartant les replis de son sexe. Il donna un coup delangue sur son clitoris et elle arc-bouta le dos pour l’encourager à continuer.

— Et tellement bon. Je vais te manger pendant des heures… pour rattraper le temps perdu. Toutesles fois où j’avais envie de te goûter et où tu n’étais pas là.

— Brian, je t’en prie…— Vas-y, ma chérie, dit-il en lui léchant le sexe. Supplie-moi.Il prit ses fesses en coupe et plongea le visage dans sa féminité. Elle ondula les hanches, frottant

sa chair tremblante contre sa bouche. Il fit lentement glisser sa langue de haut en bas et encerclal’orée de son sexe jusqu’à ce qu’elle n’en puisse plus.

— Ne joue pas avec moi, chuchota-t-elle. Fais-moi jouir.— Pas encore.— J’ai attendu cinq ans. Ne me fais plus patienter.— Je n’ai pas encore fini.Layla se mordit la lèvre en se tortillant.— S’il te plaît.Agrippé à ses hanches, il enfouit peu à peu sa langue en elle. Ses grognements exaltèrent Layla.

Les bruits de succion de sa bouche avide contre sa féminité trempée étaient d’un érotisme incroyable.Son bassin se trémoussait, son clitoris palpitait.

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Sa langue plongeait en elle de manière si délicieuse qu’elle ne put s’empêcher de remuer leshanches en cadence avec ses pénétrations. Le plaisir la submergeait, son amour pour lui l’accablait.

Brian poursuivit en poussant des grondements ; ses lèvres aspirèrent son bouton de chair et, àcoups de langue, il la mena vers un paradis qui l’ébranla.

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7

— Assez.Layla lui repoussa doucement la tête.— Encore une fois, murmura Brian en posant la langue sur son clitoris gonflé.Il ignorait à combien de reprises elle avait joui, mais il aurait pu continuer toute la nuit. Son

membre palpitait, désireux de plonger à son tour dans ses replis humides et brûlants, mais il se retint,plaçant le plaisir de Layla avant le sien.

Peu à peu, il la fit culminer à nouveau. Ses grognements se perdirent tandis qu’il lui prodiguait duplaisir avec sa langue. Elle poussa de petits cris rauques, le corps en nage, frémissant, épuisé.

Lorsqu’il s’écarta, elle ôta la jambe de son épaule et la laissa retomber lourdement sur le lit. Elleétait à présent presque aussi détendue qu’il le désirait.

Il se mit debout. Elle se roula sur le flanc et posa les yeux sur son érection en s’humectant leslèvres.

— Tu veux que je te prenne dans ma bouche ?Il ouvrit le tiroir de la table de nuit.— Tu es décontractée, dit-il en brandissant le tube de gel intime. Tu n’as rien à faire, tu n’as qu’à

rester immobile. Je m’occupe de tout.— Brian… objecta-t-elle.— Il le faut et tu le sais.Sous son regard, le corps de Layla fut parcouru d’un frisson. Elle s’étendit sur le ventre ; il se

rallongea à côté d’elle sur le lit et déposa une traînée de baisers le long de son dos.— Tu n’imagines pas combien de fois j’en ai rêvé… et généralement, je me réveillais tout dur.Il saisit un oreiller, la souleva légèrement et le plaça sous elle afin d’incliner son bassin à

sa guise.Layla se cramponna au drap de dessous ; sa poitrine gonflait et retombait au gré de son souffle,

haché.— Tu vas m’achever… C’est trop. Pas maintenant.Il joignit deux doigts qu’il badigeonna de lubrifiant.— Il faut qu’on le fasse maintenant.Lorsqu’il approcha les doigts de son anus, un frisson la balaya. Il se mit à la caresser en

dessinant des cercles lents, tâchant de prendre son mal en patience. Il avait conscience de ce que cetacte représentait pour elle, du sacrifice qu’elle faisait quand il la prenait de cette manière, à quelpoint elle se sentait exposée et vulnérable. Elle l’avait elle-même mis dans cette position la nuitdernière. À présent, il comprenait.

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— Personne d’autre n’a eu accès à cet endroit, n’est-ce pas, ma chérie ? demanda-t-il sans labrusquer.

Sa lèvre inférieure frémit, mais elle ne répondit rien.— Tu es toujours mienne, Layla ? De même que moi je t’ai toujours appartenu.— Brian, je t’en prie… je n’en peux plus.Il insinua un doigt en elle, lui arrachant un petit cri. Son corps menu fut secoué d’un spasme.Il alla et vint en elle en remuant le poignet. Au bout de quelques instants, il joignit un deuxième

doigt au premier. Elle poussa un juron et remua les hanches en imprimant un mouvement circulaire.Lorsqu’il introduisit un troisième doigt dans le mince orifice, elle émit un sifflement.— Tu es très étroite. Et brûlante.— Oh, Seigneur…Il ôta ses doigts et s’enduisit la paume de gel. Puis il caressa son pénis de bas en haut, impatient

de le glisser en elle. Plus que l’acte en soi, c’était le fait qu’elle s’abandonne totalement à lui quil’excitait.

D’abord réticente, Layla lui céda progressivement. À présent alanguie par le plaisir, elles’ouvrait à lui. La veille encore, elle affichait une mine impénétrable. Mais ce soir, il lisaitpleinement en elle, et il sut qu’il avait enfin l’occasion de lui transmettre ses regrets et son chagrin.Ainsi que le désir qui le rongeait de l’intérieur.

Brian posa la main sur sa hanche pour calmer ses tremblements. Il saisit son membre et fit courirson gland entre ses fesses en titillant son anus. Layla inspira à fond et il la pénétra dans ungrognement.

— Brian… dit-elle d’une voix frémissante.— Je suis là.Layla releva la croupe pour l’encourager. Son corps s’étira pour l’accueillir. Submergé par le

plaisir, c’est à peine s’il arrivait à respirer. Des gouttes de sueur ruisselaient le long de son torse etde son dos, ses mains tremblaient comme celles d’un drogué, et sa bouche était si sèche qu’il avait dumal à déglutir.

Il passa les mains autour de sa taille et prit son sexe en coupe. En constatant à quel point elle étaitmouillée, il lâcha une plainte. Il plongea davantage en elle tout en glissant les doigts dans sa féminité.

— Bon sang, s’écria-t-il, sentant son sexe à travers la fine membrane séparant les deux orifices.Il se retint de jouir. Il voulait d’abord être ancré en elle avant de donner libre cours à sa passion.Elle s’agrippa aux draps. De gémissements désemparés jaillirent de sa gorge. Ses cuisses

s’écartèrent encore et ses fesses s’élevèrent pour le recevoir plus en profondeur.

— C’est bien, l’encouragea-t-il.Son membre s’enfonça jusqu’à la garde.— Brian…Sa voix se brisa.Il retira les doigts de son sexe et s’empressa d’ôter l’oreiller placé sous ses hanches pour le jeter

par terre. Il lui empoigna le bassin et, ensemble, ils roulèrent sur le flanc. Il entrelaça ses doigts auxsiens et posa leurs deux mains jointes sur le ventre de Layla. Puis il la maintint immobile et se mit àaller et venir en elle.

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Layla se sentit se défaire… se désagréger… prise d’un vertige impossible à stopper. Elle futsaisie de tremblements incontrôlables. Un désir effréné montait en elle, frémissait sous sa peau,exigeant qu’on le libère.

Brian était partout à la fois. Il avait pris possession de son corps et de son âme. Contre son dos,elle sentait son torse se gonfler. Il avait la peau brûlante et ruisselante de sueur. Ils fusionnaient.

Elle avait vraiment besoin de lui. Trop. Et le désir farouche auquel il s’abandonnait prouvait àLayla combien il avait besoin d’elle en retour.

Il recula le bassin et une sensation atrocement délicieuse s’empara de Layla, l’encourageant àcambrer le postérieur pour qu’il s’enfonce à nouveau.

— Doucement, dit-il d’une voix rauque.Il replongea lentement en elle pour qu’elle éprouve toutes les nuances de la pénétration. Pour

qu’elle se sente dominée.Layla renversa la tête contre son épaule. La légère douleur qu’il lui infligeait en la prenant ainsi

était contrebalancée par la déferlante de plaisir suscitée. Elle se crispa autour de son membre durci,tentant désespérément de le retenir en elle alors qu’il se retirait une fois de plus.

— Oh oui, gronda-t-il tandis que son nectar se distillait en elle. Continue de m’étreindre commeça. C’est si bon, Layla…

Dans un gémissement, elle approcha la main de son clitoris et le caressa.— Laisse-moi faire, dit-il en écartant ses doigts.Il plaça son index et son majeur sur son sexe et en écarta les replis avec une telle douceur qu’elle

eut envie de pleurer.Il retira son membre jusqu’à l’extrémité puis s’enfouit à nouveau en poussant un cri qui se

répercuta en elle. Délicatement, il introduisit deux doigts dans sa féminité. Avec sa paume, il massason clitoris frémissant.

— Oh, mon Dieu… prends-moi fort. Maintenant, l’implora-t-elle.Brian se mit à aller et venir à une cadence mesurée. Ses hanches montaient et descendaient

comme une machine bien huilée, rebondissant contre la rondeur de ses fesses.Layla fut secoué de sanglots ; son sang bouillonnait dans ses veines. Les sons qu’il émettait en lui

faisant l’amour alimentaient son désir – ses grognements sonores, ses jurons étouffés et sesgémissements de plaisir. À chaque nouvelle poussée, il frottait sa paume contre son clitoris, lamenant progressivement vers l’orgasme qui l’anéantirait. Une fois qu’il en aurait fini avec elle, elleserait totalement à sa merci, elle n’aurait plus la moindre défense, rien qui puisse la protéger contrela douleur de le perdre à nouveau.

— Je t’aime, Layla, souffla-t-il au creux de son oreille. Je t’aime tellement.Ses coups de boutoir s’intensifièrent tandis que ses doigts glissaient en elle avec frénésie.— Je t’aime aussi, avoua-t-elle d’une voix haletante.Elle fut saisie de tremblements. Son anus se resserra autour de son membre. Au même instant, il

atteignit la jouissance et se répandit en elle.Il se cramponna à elle et la serra fort. Jamais ils n’avaient été si proches. Et si loin à la fois.

Quand Layla rouvrit les yeux, Brian dormait encore, le bras autour de sa taille et la jambeentrelacée à la sienne. Il avait le visage blotti contre sa nuque. Son souffle régulier lui caressait lapeau.

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Le lendemain, ils parviendraient à San Diego. Et leurs chemins se sépareraient à nouveau. Aumoins, elle savait désormais qu’il regrettait de l’avoir laissée partir cinq ans plus tôt. C’était unmaigre lot de consolation, mais c’était mieux que rien. S’ils avaient pu revenir en arrière, ils auraientfait les choses différemment, pas de doute.

Layla avait à peine dix-neuf ans quand elle l’avait quitté. C’était si jeune. Brian avait été sonpremier petit ami. À l’époque, il avait vingt-cinq ans ; il était beaucoup plus mûr qu’elle. Comme elleavait dû lui paraître puérile quand elle lui avait demandé de choisir entre elle et sa carrière, un postequ’il avait obtenu en travaillant d’arrache-pied ! Déjà, c’était à cause d’elle qu’il avait quitté laNavy. Tout ça parce qu’elle voulait à tout prix le garder auprès d’elle.

Et elle, qu’avait-elle sacrifié pour lui ? Pas assez. Elle n’était alors qu’une adolescente en attented’une grande preuve d’amour. Elle manquait cruellement de confiance en elle et avait craint qu’il nefinisse par se lasser de leur relation. En outre, elle avait eu l’impression qu’il la traitait comme unegamine. Mais elle s’était trompée. Il avait désiré son bonheur, point barre.

À présent, il était trop tard.Elle poussa un profond soupir.— N’y pense pas, dit Brian d’une voix éraillée en déposant un baiser sur son épaule.— J’essaie.Et s’ils s’enfuyaient tous les deux ? S’ils quittaient le pays ensemble ? Jamais plus elle ne le

laisserait s’en aller. Non. C’était inconcevable. L’agent Sandoval avait sacrifié sa vie pour celle deLayla ; c’était son devoir et sa responsabilité d’aider les autorités à condamner les hommes qui lesavaient tués, lui et son amie Steph.

Elle lui prit la main et la porta à ses lèvres. Elle embrassa ses doigts et les frotta contre sa joue,sentit son souffle se suspendre, puis accélérer. Il la serra fort.

— Je suis désolée, murmura-t-elle. Vraiment désolée.— Ne le sois pas, ma chérie. C’est moi qui ai tout foutu en l’air. Tu avais besoin d’être rassurée

et je n’ai pas compris.Elle se tourna face à lui et se blottit contre son torse ferme.— J’avais peur que tu ne finisses par te lasser de ma présence. Je craignais d’être trop

inexpérimentée.Il esquissa un sourire.— Tu as toujours été compliquée, Layla. Je ne vois pas comment je pourrais m’ennuyer avec toi.— J’étais folle de jalousie chaque fois que je voyais une femme de ton âge te tourner autour. Je

ne me sentais pas à ma place quand je rencontrais les copines de tes amis. Elles avaient l’air si biendans leur peau.

— Et pendant ce temps-là, je me disais que j’étais le mec plus chanceux de la planète. Parce queje t’avais toi.

Les larmes jaillirent des yeux de Layla et coulèrent sur le torse de Brian.— J’avais l’impression de t’avoir obligé à être avec moi. Tu n’étais pas prêt, mais tu ne

supportais pas l’idée que je sois avec un autre. Je t’ai forcé la main, en quelque sorte. Résultat, tun’étais pas à l’aise dans notre relation.

Les mains calleuses de Brian lui caressèrent le dos.— C’est vrai.Layla leva les yeux sur son visage. Ses cheveux courts étaient en bataille et ses yeux rougis par le

sommeil. Pourtant, c’était sans doute le plus bel homme qu’elle ait jamais vu.— Je m’en rendais bien compte.

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— J’avais peur d’être trop posé pour toi. J’avais déjà eu ma dose de nuits blanches et de soiréesalcoolisées. Quand je rentrais à la maison, je voulais juste être avec toi.

— Moi aussi.Il poussa un soupir sonore.— Je me sentais vieux. Je pensais que tu avais eu le béguin pour moi, que c’était passager. Je me

disais que le jour où tu partirais, je serais dégoûté. En fait, j’ai surmonté notre rupture en mepersuadant que tu me reviendrais un jour. Je songeais que lorsque tu serais prête à te poser, c’est versmoi que tu te tournerais.

— C’est pour ça que tu m’as laissée partir ?— En partie. Et aussi parce que je pensais qu’il fallait que tu fasses ta propre expérience de la

vie. Tu n’étais pas la seule à manquer de confiance. Je ne voulais pas que tu aies de regrets, que tu tedises un jour que tu aurais pu rencontrer un autre homme si tu avais pris le temps de regarder un peuautour de toi.

Layla ferma les yeux, épuisée physiquement et nerveusement.— Je suis contente qu’on ait eu ces quelques jours en tête à tête, dit-elle d’une voix

imperceptible. Chaque fois qu’on m’envoyait un nouvel agent, j’espérais en secret que ce serait toi.Et en voyant que ce n’était pas le cas, je ressentais toujours un mélange de soulagement et dedéception. C’est bien de pourvoir enfin mettre les choses à plat. Au moins, je sais qu’on n’a pas toutgâché…

— Chhh.Il s’empara de ses lèvres dans un baiser plein de tendresse et d’affliction.Layla se pelotonna contre lui dans l’espoir de ne plus jamais le perdre.Dieu savait qu’elle l’aimait. Comment allait-elle pouvoir vivre sans lui tout en le sachant quelque

part, encore amoureux d’elle ?— N’y pense pas, répéta-t-il.Plus facile à dire qu’à faire. D’autant que son cœur se brisait de nouveau en un millier de

morceaux.

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8

Ils roulèrent d’une seule traite jusqu’à Albuquerque, ne s’arrêtant qu’à quelques reprises pourfaire le plein et manger.

Brian quitta l’autoroute I-40 et entra dans la banlieue. Sur le siège passager, Layla étaitsilencieuse. Elle n’avait quasiment pas dit un mot de la journée. Par la vitre, elle regardait le paysagedéfiler. Bien que son visage fût en partie dissimulé par une casquette de baseball, il percevait satristesse. Il avait lui-même le ventre noué par le chagrin et la frustration. Les mains crispées sur levolant, il se maudissait de ne pas avoir su gérer la situation à l’époque, quand il en était encoretemps.

S’il lui avait parlé à cœur ouvert lorsqu’elle avait eu besoin d’être rassurée, si elle avait eu sonmot à dire dans ses projets de carrière, ils n’en seraient pas là aujourd’hui. Layla ne courrait pas dedanger ; il serait à son côté et, ensemble, ils vivraient des jours heureux.

Il pénétra dans un quartier résidentiel et elle se mit à remuer. Elle tourna la tête vers lui etl’interrogea du regard.

— J’ai un copain qui habite dans le coin, expliqua-t-il en ralentissant devant un pavillon deplain-pied à un étage.

Dans l’allée était garée une Chevy Silverado ainsi qu’une remorque avec un jet-ski.Il se gara, laissa les clés sur le contact et annonça :— Je vais voir s’il est là.Au même instant, la porte de la maison s’ouvrit et Jack Killigrew apparut sur le seuil. C’était un

homme grand et ténébreux, membre lui aussi des forces spéciales, un Shadow Stalker en lequel Brianavait une confiance aveugle.

— Ne bouge pas, dit-il à voix basse en descendant de la Bronco.Il s’avança vers le perron en s’exclamant :— Je suis dans le pétrin, Killigrew.— C’est le moins qu’on puisse dire.Ils se serrèrent l’avant-bras et se donnèrent l’accolade.— Tu es chaud comme la braise, mon vieux. C’est elle, n’est-ce pas ? La fameuse Layla ?— Évidemment.Une jolie blonde vêtue d’une robe d’été très légère sortit sur le perron et lui adressa un sourire

timide.— Ah merde, maugréa Brian. Je n’avais pas prévu que Rachel et Riley seraient là. On va s’en

aller.

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Jack s’était récemment retrouvé dans une position similaire à celle de Brian – amoureux d’unefemme inaccessible. Mais Jack avait su trouver une solution. Il avait fini par obtenir la fille de sesrêves et mener la vie dont il avait toujours rêvé. Brian n’allait certainement pas tout mettre en péril.Non, plutôt mourir.

— Riley est avec sa grand-mère, intervint Rachel. En Californie.Brian tendit la main.— Brian Simmons. Ravi de te rencontrer, Rachel.— Enchantée, Brian, répondit-elle avec un sourire. On était sur le point de faire un barbecue.

Jack a acheté assez de viande pour nourrir un régiment tout entier, comme d’habitude. J’espère quevous avez prévu de rester dîner avec nous.

Brian décocha un sourire triste à Jack.— Ce serait avec plaisir mais je suis juste passé en coup de vent.— Ne dis pas de bêtise, répliqua Jack. Vous tombez à pic. J’ai dit à tout le monde que je serais

chez Rachel à Monterey pour qu’on nous fiche la paix. Personne ne sait qu’on est là.— Jack…Ce dernier l’ignora et se dirigea vers la Bronco.— J’ai des chambres d’amis. Je vais bouger ma voiture de l’allée pour que tu puisses mettre la

tienne dans le garage.Il ouvrit la portière de Layla, se présenta, et désigna le pavillon d’un geste de la main. D’un

regard, elle questionna Brian. Il haussa les épaules.Leurs yeux restèrent vrillés quelques instants. Un flot d’émotions passa entre eux.Il leur restait si peu de temps. L’idée de partager leurs derniers moments avec d’autres personnes

le répugnait. Toutefois, il avait besoin de l’aide et de l’opinion d’un collègue, et Layla dedécompresser.

Quand elle l’eut rejoint, il lui prit la main et l’escorta jusqu’à la maison.

— Comment puis-je me rendre utile ? demanda Layla tandis que Rachel sortait les légumes duréfrigérateur pour faire une salade.

— Ça ne te dérange pas d’éplucher un concombre et de le couper en morceaux avec destomates ?

— Absolument pas.Layla rejoignit Rachel face au plan de travail en granit. Elle lui adressa un sourire reconnaissant.

La jeune femme arborait un carré de boucles blondes qui encadrait parfaitement son visage sertid’yeux bleus. Son regard exprimait la bonté.

— Tu as une charmante maison, fit remarquer Layla, qui enviait sa situation.— Ce n’est pas la mienne. Jack et moi, c’est encore tout frais.— Je n’aurais jamais deviné.Jack était fou de Rachel, c’était une évidence. D’une certaine manière, il lui rappelait Brian. En

apparence, c’étaient des durs à cuire, qui dissimulaient un cœur tendre. Lorsque Jack regardaitRachel, l’amour qu’il lui vouait était manifeste.

— On se connaît depuis des années, dit Rachel. C’était le meilleur ami de mon défunt mari et leparrain de mon fils.

— Toi et moi avons beaucoup de points communs, releva Layla.Rachel continua d’effeuiller une salade.

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— Jack m’a expliqué ta situation dans les grandes lignes. Tu dois vivre un vrai cauchemar, etpourtant tu fais preuve d’un sang-froid hors du commun. Tu es incroyable. Jack m’a dit que tu venaisd’une famille de militaires…

— On dirait que Jack sait beaucoup de choses à mon sujet.— C’est exactement ce que je lui ai fait remarquer, dit Rachel en éclatant de rire. Apparemment

Brian parle beaucoup de toi. Tu dois être soulagée de l’avoir à ton côté maintenant.— Très, acquiesça Layla en coupant les tomates en dés. C’est ironique. Si on a rompu, c’est en

grande partie à cause de son travail. Et aujourd’hui, je ne sais pas ce que je ferais sans son aide.— Le boulot de Jack a aussi représenté un obstacle pour nous au départ. Il craignait que ça

ne soit trop dangereux pour Riley et moi, et que je ne finisse par me lasser de ses absences àrépétition.

— Les déplacements de Brian ne me dérangeaient pas plus que ça, répliqua Layla en y songeant.Peut-être parce que j’ai grandi avec un père militaire. Mon problème, c’était… et c’est toujours…son besoin de se porter volontaire pour les missions les plus périlleuses, de mettre sa vie en danger.Il ne pouvait pas se contenter d’être Marshal ? Ou Marine dans la Navy ? Non. Il a fallu qu’il intègreles forces spéciales.

— Je sais. J’ai toujours la boule au ventre quand ils s’en vont en mission.— C’est encore pire quand ils ne reviennent pas.Rachel marqua une pause, le regard bas.Dans un soupir, Layla cessa de couper les tomates.— Désolée, je n’aurais pas dû dire ça.— Ce n’est pas grave, dit Rachel en s’approchant du réfrigérateur pour y prendre une bière.Elle en offrit une à Layla qui déclina.— J’ai dû réfléchir longuement au problème avant de me lancer dans une histoire avec Jack. Je

voulais être sûre de moi. Il fallait que je songe à mon fils, qui risquait de perdre un beau-père en plusd’avoir perdu son propre père.

Layla posa le couteau.— Qu’est-ce qui t’a fait changer d’avis ?— Jack. Avec tout ce qu’il fait pour les autres, il mérite d’être aimé et entouré.Rachel prit une grande goulée de bière, posa la bouteille et se remit à sa tâche.— Jack a grandi en famille d’accueil. J’ai mis un certain temps à le comprendre, mais ses

collègues de travail sont comme sa famille, la seule qu’il ait jamais eue. J’ai pris conscience que sonmétier, c’était un peu comme une belle-mère envahissante : il faut faire avec.

Layla s’agrippa au comptoir et se força à respirer à fond pour calmer les battements de son cœur.En principe, une famille se compose d’un cercle de gens qui se soucient de vous, qui remueraient

ciel et terre pour vous… voire qui mourraient pour vous. Si elle avait eu la chance de connaître cela,Brian et Jack en avaient été privés. Obnubilée par ses histoires de cœur, la mère de Brian l’avaitnégligé, enchaînant les relations désastreuses. Brian ignorait qui était son père et, à sa connaissance,il n’avait ni frère ni sœur.

Aussi, il avait choisi une carrière qui lui tenait lieu de famille. Une carrière qui lui permettaitd’être entouré de gens en qui il avait une confiance absolue. Entre les mains desquels il aurait remissa vie. Et celle de Layla.

Elle avait exigé de lui qu’il renonce à tout cela pour elle. Sachant qu’à l’époque, il vivait dans lapeur qu’elle ne le quitte, sa requête avait dû le mettre dans une position impossible. Il avait déjàperdu Jacob.

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À présent, Layla comprenait pourquoi il n’avait pas pu lui sacrifier sa carrière. Ce n’était pastant le travail en soi, sinon les liens d’amitié que son travail lui avait permis de tisser. — Ça va ?demanda Rachel avec douceur.

— Désolée. Je suis épuisée, c’est tout, répondit Layla en relevant la tête. J’étais très stressée ausujet du procès. Et puis il y a eu l’attaque et ces deux derniers jours…

— Ce sera bientôt fini, n’est-ce pas ?— Ce ne sera jamais fini. Une fois que j’aurai témoigné, je serai de nouveau prise en charge par

le programme de protection des témoins. Il se peut qu’ils aient encore besoin de moi à l’avenir.— Brian sera avec toi ?Layla secoua la tête en signe de négation.— Il ne saura pas où je suis, il ne connaîtra même pas mon nom de famille. Nous n’avons plus

que demain.— Alors qu’est-ce que tu fiches ici dans la cuisine avec moi ? s’exclama Rachel. Je m’occupe du

dîner. Va profiter de ton homme.— Je pense qu’il est en pleine discussion avec le tien, répliqua Layla.Un sourire lui échappa. Elle appréciait beaucoup Rachel. Elle aurait aimé pouvoir passer du

temps avec les proches de Brian, faire un barbecue par une journée ensoleillée, partager ses craintesavec des femmes qui vivaient la même situation et compatissaient. Le pire, c’est qu’elle avait un jourvécu la vie qu’elle enviait aujourd’hui, et c’était elle qui avait tout foutu en l’air.

— Alors va prendre une douche et faire une sieste. Nous n’allons pas manger tout de suite. Tu asquelques heures devant toi.

— J’aurai l’impression de mettre les pieds sous la table si je ne me rends pas utile.— Tu pourras m’aider à faire la vaisselle après, qu’est-ce que tu en dis ? J’aime bien préparer

les repas. C’est la partie nettoyage qui me plaît moins, remarqua Rachel en contournant l’îlot decuisine. Je vais te montrer ta chambre. Tu as même ta propre salle de bains.

— Merci, Rachel.Layla tenta de lui transmettre par un regard la profondeur de sa gratitude. Bénéficier d’un bref

répit avec Brian dans un foyer rempli d’amour signifiait beaucoup pour elle. Elle avait le sentimentde vivre quelque chose de vrai et d’authentique, même si elle avait conscience de passer un momenthors du temps, comme les deux nuits précédentes dans les motels miteux.

Rachel lui prit la main et la serra fort.— De rien.

— On ne t’avait pas briefé en amont ? s’étonna Jack.— C’était un remplacement de dernière minute…La voix de Brian s’éteignit lorsque Layla passa devant le salon, les épaules rentrées et la tête

basse. Il sut aussitôt qu’elle était triste.Il inspira un grand coup et s’appuya de tout son poids sur le bureau de Jack. Ce dernier se tenait

dos au couloir, face à lui, mais il suivit le regard de Brian et se retourna.— Qu’est-ce que tu as l’intention de faire avec elle ? demanda Jack à voix basse.— Qu’est-ce que je ne ferais pas pour elle ? répliqua Brian en glissant une main dans ses

cheveux. Elle se reproche d’avoir causé notre rupture.— C’est elle qui t’a quitté, non ?

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— On est tous les deux en tort dans cette affaire, rétorqua-t-il sèchement, éprouvant le besoin dedéfendre Layla. Nous attendions tous les deux quelque chose de l’autre sans réussir à l’exprimer.

Jack afficha une grimace compatissante.— Je suis passé par là.— Peu importe aujourd’hui. Je n’arrive plus à imaginer ma vie sans elle. Ça me rend dingue.Brian s’efforça de revenir au sujet le plus pressant : protéger Layla.— On m’a appelé en renfort à la dernière minute parce que l’un des agents censés participer à la

mission s’était désisté. Il faut que tu découvres de qui il s’agit.— Je suis sûr que le département mène également son enquête. Et si l’agent en question est

impliqué, il aura sûrement assuré ses arrières. Mais je vais voir ce que je peux dénicher, dit Jack encroisant les bras. C’est un gros enjeu pour la DEA. Ils en font une affaire personnelle.

Brian comprit le sous-entendu de Jack. Il y allait de la réputation de hauts responsables et lesmédias se déchaînaient. Toutes les précautions avaient été prises ; on avait assigné la mission auxagents les plus fiables, les plus chevronnés. L’un ou l’autre des services allait devoir admettre qu’unde ses employés était corrompu. C’était à la fois embarrassant et lourd de conséquences. Autrementdit, c’était comme si l’on avait ouvert la boîte de Pandore.

— Dans n’importe quelle autre situation, j’aurais misé sur le témoin ; je me serais dit qu’il avaitmerdé d’une manière ou d’une autre. Mais pas Layla. Elle connaît les enjeux et elle ne mettrait pas enpéril la vie des agents qui ont pour mission de la protéger. Non, il y a eu une fuite. L’un des nôtres aété soudoyé.

— Qu’est-ce que je peux faire d’autre pour t’aider ?Brian afficha un sourire triste.— Je te dois déjà une fière chandelle. Layla est fatiguée et angoissée. Elle se fait du mouron pour

des choses qu’on ne peut pas changer. Elle avait besoin de se reposer dans un endroit autre qu’unmotel pourri.

— Tu passes la nuit ici.Ce n’était pas une question.— On repartira avant trois heures du matin. Je veux la déposer à San Diego avant la fermeture

des bureaux pour qu’elle passe quelques heures avec le substitut, histoire qu’il la prépare un peupour son témoignage du lendemain.

Jack hocha la tête.— J’aurai besoin d’une nouvelle voiture, ajouta Brian. J’ai eu de la chance d’arriver aussi loin

avec la Bronco de Jim. Tu pourrais m’aider à louer un véhicule ?— Tu n’as qu’à prendre mon pick-up.— Non. Tu en fais déjà assez pour moi.— On sait tous les deux qu’une voiture de location n’est pas fiable et risque d’attirer l’attention.

Prends le pick-up.Jack croisa les bras d’un air déterminé.Brian se redressa.— Je te revaudrai ça.— Un peu. Ne va pas t’imaginer que je fais ça par pure générosité. Tu me devras un service en

retour, dit Jack en se tournant vers la porte. Je vais passer un peu de temps avec ma femme. Tudevrais suivre mon exemple.

— Merci, Jack.Son ami marqua une pause sur le seuil.

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— De rien.

En entrant dans la chambre, Brian entendit l’eau couler. Il commença à se dévêtir. Une fois nu, ilpoussa la porte de la salle de bains entrebâillée et pénétra dans la pièce embuée. Layla se tenait dansla cabine, une main appuyée contre le mur face à elle et la tête ployée sous le jet. Sa longue chevelurebrune se déployait tout autour de son visage.

Sa posture révélait un abattement et une souffrance insoutenables. Il ouvrit la portière en verre, larejoignit dans la cabine et prit son visage en coupe pour l’orienter vers lui. Puis il attira son corpscontre le sien. Elle pleurait à chaudes larmes. À cette vue, le cœur de Brian se brisa.

— Ma chérie, murmura-t-il en lui caressant le dos. Je ne supporte pas de te voir pleurer.Elle enroula ses bras autour de lui et enfouit la tête contre son torse.Il la serra fort tout en lui susurrant des mots réconfortants, et elle finit par se calmer. Il prit soin

d’elle comme il aurait dû le faire les cinq dernières années. Il lui lava les cheveux et le corps, puisl’emmitoufla dans une serviette avant de la porter jusqu’au lit. Ils se blottirent l’un contre l’autre sousles couvertures jusqu’à sombrer dans un profond sommeil.

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9

— Il est entré dans la pièce avec mon frère Jacob, et j’ai eu le coup de foudre.Layla se renversa en arrière sur sa chaise, savourant la brise rafraîchissante du soir qui

s’engouffrait dans sa chevelure.— J’avais seize ans. Il en avait vingt-deux et il était beau comme un dieu. Vraiment canon, bâti

comme un athlète. Il avait un sex-appeal incroyable. De quoi émoustiller mes hormonesd’adolescente. C’était l’homme le plus sexy que j’aie jamais vu.

Rachel partit d’un rire léger.— C’était chimique.— C’est le moins qu’on puisse dire. À partir de là, impossible de sortir avec des mecs du lycée.

C’étaient tous des gamins empotés comparés à Brian, dit Layla en effleurant le rebord de son verred’eau du bout de l’index. Malheureusement, à ses yeux, je n’étais que la petite sœur chiante de sonmeilleur ami.

— Si seulement, intervint Brian en surgissant derrière elle et en plantant un baiser sur sa tempe.J’avais l’impression d’être un pervers. Elle m’a complètement retourné la tête. Je la voulais commejamais je n’avais jamais désiré une femme, et pourtant je devais attendre qu’elle grandisse.

— Ah ! Ne le laisse pas te baratiner, Rachel, répliqua Layla en lui décochant un regard en coin.Je te rassure, entre-temps, il n’a pas fait vœu d’abstinence.

— Toi non plus, rétorqua-t-il.Il approcha un fauteuil du sien et lui prit la main.— Tu savais pertinemment que j’étais fou de toi, poursuivit-il. Tu le faisais exprès pour me

rendre jaloux.— Et ça te faisait les pieds. Avec toutes les filles qui te tournaient autour, tu avais pris la grosse

tête.Jack revint de la cuisine avec une bière fraîche pour Rachel. Ils échangèrent un regard tendre et

complice.Layla détourna le regard. Ses yeux se posèrent sur Brian qui avait la tête renversée en arrière et

les paupières closes. S’il avait l’air détendu, elle savait qu’il n’en était rien. Ni l’un ni l’autre n’avaiteu d’appétit au dîner. Ils étaient tous deux trop soucieux pour apprécier la viande que Jack avaitpréparée au barbecue.

— Tu veux aller te coucher ? demanda-t-elle à voix basse, sachant qu’il était à bout de forcesmalgré la sieste qu’ils avaient faite avant le dîner.

Il inspira profondément et hocha la tête.— Ce serait plus raisonnable. On va reprendre la route dans quelques heures.

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À nouveau, Layla contempla Jack et Rachel. Ils formaient un couple saisissant. Les bouclesblondes de la jeune femme contrastaient joliment avec les cheveux sombres de Jack.

— Merci pour le dîner. Et surtout, merci d’héberger sous votre toit des fugitifs !— Et merci à toi d’avoir fait la vaisselle, répondit Rachel en se levant avec grâce. J’ai vraiment

apprécié ta compagnie, Layla. J’espère que nous nous reverrons.Malheureusement non, songea Layla. D’ici quelques jours, Layla Creed cesserait d’exister une

fois encore pour devenir quelqu’un d’autre. Elle chassa cette pensée en se composant un sourire,préférant profiter de l’instant présent. À trop réfléchir, elle devenait folle. À tour de rôle, elle pritRachel et Jack dans ses bras.

Ce dernier la dévisagea d’un air grave.— Je t’admire, Layla. Il faut du cran pour affronter le cartel de Tijuana – et Simmons ici présent.

Sois forte.Ses yeux la picotèrent. De la part d’un homme comme Jack Killigrew, un compliment n’était pas

anodin, et elle l’apprécia d’autant plus.— Tu prendras soin de lui ? demanda-t-elle d’une voix presque inaudible.Il hocha la tête.Elle recula d’un pas.— Merci.— Monte. J’arrive dans une minute, dit Brian en lui caressant les cheveux.Elle fut soulagée de déguerpir. Elle avait besoin d’un peu de répit pour canaliser ses émotions.

De retour dans la chambre, elle se brossa les dents et les cheveux, puis enfila la nuisette qu’elle avaitachetée. Elle se glissa entre les draps frais et se tourna vers la table de chevet où étaient posés lepistolet de Brian ainsi que son insigne.

Il la rejoignit quelques minutes plus tard. En silence, il s’adonna à sa routine du soir sans allumerla lumière pour ne pas la déranger. Puis il vint se blottir contre elle, collant son corps ferme etmusclé contre son dos.

Elle s’imprégna de sa chaleur et inhala l’odeur de sa peau qu’elle chérissait. Contre ses fesses,elle sentit son sexe se durcir. Du bout des lèvres, il effleura son épaule tandis qu’il engouffrait samain sous sa nuisette.

Layla réagit instantanément à ses caresses : la pointe de ses seins se tendit, sa poitrine se gonflaet sa féminité s’humidifia. Trop longtemps privée de lui, elle brûlait de l’entendre gémir au creux deson oreille et de sentir ses muscles puissants se mouvoir contre sa chair.

— Layla, murmura-t-il en frottant son nez contre sa nuque. Parle-moi.Elle jeta un coup d’œil à l’horloge, où défilait le peu d’heures qu’il leur restait à passer

ensemble.— Je veux que tu me promettes une chose.Il posa ses mains calleuses sous sa poitrine et pressa doucement son sein.— Tout ce que tu voudras.— Promets-moi que tu ne m’attendras plus. Promets-moi que tu trouveras quelqu’un qui t’aimera

et prendra soin de toi.Il se figea.— Tu peux tout me demander sauf ça.Elle se tourna face à lui. Dans la semi-pénombre, les yeux de Brian pétillaient. Les stores

vénitiens devant les fenêtres n’étaient pas totalement fermés ; ils orientaient les rais de lune vers leplafond, baignant la pièce d’une lumière vespérale.

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— Je veux que tu connaisses toi aussi ce que Jack partage avec Rachel. Une famille, des gens quit’aiment et t’attendent le soir à la maison. Tu le mérites. Tu en as besoin. Je refuse que, par ma faute,tu ne mènes pas une existence normale. Je ne veux plus chambouler ta vie.

— Sans toi, je ne pourrai jamais être aussi heureux et comblé que Jack. C’est impossible.Elle recueillit sa joue dans sa paume.— Parce que tu te raccroches à un rêve qui a disparu, Brian. Par ma faute. C’est moi qui l’ai

anéanti. Maintenant il faut que tu l’oublies. Il faut que tu m’oublies moi.Les doigts de Jack s’enfoncèrent dans son dos.— Tais-toi, Layla.— Si seulement je ne t’avais pas couru après quand tu venais à la maison avec Jacob, dit-elle

d’une voix amère. Si seulement je…Il écrasa sa bouche sur la sienne. Sous la couverture, il saisit l’élastique de sa petite culotte et

l’arracha. Il lui écarta les cuisses et lui ôta le bout de tissu qu’il jeta de côté. Puis il prit son membredans sa main et le frotta contre son clitoris.

— Je crève d’envie de te faire l’amour depuis le réveil, geignit-il.La peau de Layla était couverte d’une fine pellicule de transpiration. Comme elle, Brian

recherchait à ce que leurs corps ne forment plus qu’un.Layla détourna la tête dans un halètement.— Brian, arrête. Tu cherches à me distraire.— Chut. Tais-toi et profite de l’instant.Il déposa une traînée de baisers le long de ses mâchoires et parcourut le contour de son oreille

avec sa langue. Le souffle saccadé de Layla l’excita. Il glissa le bout de son pénis à l’orée de sonvagin, s’y arrêta un instant avec un gémissement avant de le frotter de nouveau contre son bouton dechair gonflé.

— Tu es tellement mouillée, ma chérie. Tout excitée.Un petit cri échappa à Layla tandis qu’il continuait à caresser les replis de sa féminité avec son

membre érigé.— Promets-le-moi, dit-elle dans un souffle en se cramponnant à ses hanches.— Je t’ai prise à cru, Layla, murmura-t-il en aspirant son téton à travers la fine étoffe de sa

nuisette. Tu m’as demandé de jouir en toi. Pourtant tu ne te protèges pas, n’est-ce pas ?— Tu n’en sais rien, dit-elle, la respiration hachée.Il se repositionna et s’introduisit en elle.— Tu es étroite et tu as très envie de moi. Ça fait un bail qu’un homme ne t’a pas possédée.

Pourquoi prendre la pilule si tu ne couches avec personne ?— Ce n’est pas la seule raison pour laquelle les femmes prennent la pilule, Brian.— Tu éludes la question, dit-il en léchant le contour de son aréole.Il la pénétra de quelques centimètres. Elle frémit, le corps à vif, troublée par son jeu de séduction

infernal. Sa volupté, ses caresses, la passion qui l’habitait étaient d’un érotisme incroyable. Ellesvalaient tous les préliminaires.

— Brian…Elle s’arc-bouta pour l’accueillir davantage en elle.— Tu veux que je te fasse un enfant, Layla ? ronronna-t-il d’une voix sombre, roulant les hanches

pour s’enfoncer en elle. Tu espères t’en aller en emportant un peu de moi ?— Tu ne m’as jamais quittée, susurra-t-elle.Il plongea en elle jusqu’à la garde dans un sifflement de plaisir. La tête de lit cogna contre le mur.

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— Tu me demandes de te laisser partir et pourtant, tu cherches à te raccrocher à moi en me volantun petit souvenir ? Un être qui sera une partie de moi ?

Elle enroula les jambes autour de ses cuisses musculeuses et souleva le bassin pour le sentirentièrement en elle.

— Tais-toi, Brian. C’est toi qui voulais baiser au lieu de parler.Il lui saisit les poignets et lui plaqua les mains sur le matelas, de part et d’autre de sa tête. Brian

avait le visage grave, le regard assombri, les lèvres pincées. Il se retira lentement, puis s’enfonçabrusquement en elle, faisant à nouveau vibrer la tête de lit contre le mur.

Une plainte échappa à Layla. Une onde de plaisir frémit dans ses veines.— Fichu lit ! pesta-t-il. Je vais devoir te prendre lentement.Elle contracta son sexe autour du sien pour le tourmenter.— Petite coquine.Il imprima un mouvement circulaire des hanches pour exercer une pression sur son clitoris.Au bord de l’orgasme, elle appuya sa tête dans l’oreiller.Il lui lâcha les poignets pour placer un traversin sous ses épaules.— Regarde-moi pendant que je te fais l’amour, Layla. Vois l’effet que tu me fais.Brian ôta son pénis épais et reluisant de son fourreau de chair.— Regarde comme je suis dur. Tu m’excites. Je ne me lasserai jamais de toi.Il s’enfouit de nouveau en elle, les mâchoires serrées.— C’est tellement bon, souffla-t-elle.D’un côté, elle voulait que cela dure toute la nuit ; de l’autre, elle avait une terrible envie de

jouir.— Il n’y a rien de meilleur, dit-il d’une voix rauque en lui reprenant les poignets. Tu le sais. On

est faits l’un pour l’autre. Il n’y a personne d’autre qui puisse nous convenir. Ne me demande pas det’oublier et de refaire ma vie. C’est hors de question.

Il se retira jusqu’à l’extrémité, puis la pénétra lentement. Son grondement résonna à travers lapièce. Penché au-dessus d’elle, le visage face au sien, ses larges épaules tremblant de plaisir, il lacontemplait tandis qu’elle palpitait autour de son membre.

— Je t’aime, chuchota Layla dans un élan de passion.Il s’empara de sa bouche ; ses hanches montaient et descendaient à un rythme nonchalant. Elle

crispait les poings tout en l’embrassant avec voracité, aspirant sa langue comme elle aurait vouluaspirer son sexe. Sa peau était couverte de sueur ; leurs corps se mouvaient à l’unisson, leurs bassinsse rejoignaient à une cadence très sensuelle. Ses testicules alourdis venaient frapper son postérieur àchacun de ses coups de reins, et son torse se gonflait à mesure que le plaisir augmentait.

Le rythme mesuré de ses poussées était à la fois un supplice et un délice. Ils se trémoussaient l’uncontre l’autre avec frénésie cherchant à oublier la séparation qui les guettait.

Brian se retira soudain. Elle poussa un cri de protestation, le bas-ventre titillé par le désir.— Putain de lit, grogna-t-il. Qu’est-ce qu’il fait comme bruit !Il la souleva et la porta jusqu’au mur de la salle de bains, contre lequel il la plaqua. Sans

attendre, il plongea en elle avec la violence du désespoir.Layla lâcha un petit cri, grisée par son ardeur. Elle savait qu’il cherchait à tromper le temps.— Accroche-toi à moi, ma chérie.Il l’empoigna par les flancs et se mit à aller et venir en elle avec fougue.Elle gémit en enfonçant les ongles dans son dos.— Plus fort. Plus profond. Oui. Oh, mon Dieu… Je vais jouir.

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Il la prit encore et la contempla tandis qu’elle atteignait l’extase. De violents tremblements laparcoururent.

— Vas-y, Layla.Le paroxysme de la jouissance passé, toute tension quitta le corps de la jeune femme, qui

s’avachit. Mais Brian continua à imprimer des va-et-vient dans son fourreau rassasié, claquant seshanches contre les siennes.

Le plaisir monta de nouveau en elle et elle poussa un gémissement.— Brian.— Encore une fois, dit-il d’une voix enrouée.Les mâchoires serrées, il retarda autant que possible le moment fatidique.Frottant son pénis contre son clitoris, il la fit jouir une seconde fois. Ils crièrent de concert.

Tandis qu’elle se contractait autour de son membre, il se répandit en elle.Le genou de Brian heurta le mur dans un bruit sec ; son corps puissant s’affaissa contre celui de

Layla. Les lèvres plaquées contre sa gorge, il lâcha un grognement tout en serrant son corpsfrémissant contre lui.

— Je t’aime, murmura-t-il au creux de son cou, le front pressé contre sa joue. Ta petite chatte vame mener droit à ma perte. Un jour prochain, j’en crèverai. Mais, bon sang… Ça en aura valu lapeine.

Layla éclata de rire, et l’atmosphère se détendit. Elle le sentit sourire contre sa peau. Ce momentétait aussi intime que l’orgasme qu’ils venaient de partager.

Sans se retirer, il la ramena en titubant sur le lit où il s’écroula avec elle.Elle glissa les mains dans ses cheveux humides et le tint contre elle.— Je veux ton bonheur. Plus que tout au monde, dit-elle.— Je sais.Il glissa les bras sous ses épaules et la serra fort.— Je ne veux pas te rendre malheureux.— Alors arrête de parler de choses tristes, Layla.— Ah, les hommes, soupira-t-elle. C’est bien vous. Ignorer un problème en espérant qu’il

disparaîtra tout seul.Il lui mordilla la base du cou.— Pas la peine d’insister, Layla. Je ne vais pas te promettre de tourner la page.— Promets-moi au moins que tu essaieras d’être heureux. Et que tu ne laisseras pas mon souvenir

tout gâcher, dit-elle en lui massant le crâne. Je ne supporte pas l’idée que tu attendes dans l’espoirqu’on se revoie peut-être dans une dizaine d’années, voire plus.

Il leva la tête et planta son regard dans le sien.— Admettons que nos chemins se croisent à nouveau, tu auras refait ta vie ? Tu seras mariée et

heureuse ?À cette seule pensée, le cœur de Layla se pinça. Elle fit la moue.— C’est bien ce que je pensais, fit-il remarquer. Je n’ai rien à ajouter.— Brian…— Endors-toi.Elle se demanda comment elle était censée trouver le sommeil, d’autant qu’il était allongé sur

elle et qu’il ne s’était pas encore retiré. Mais elle n’allait pas s’en plaindre. Elle voulait que lasensation de son corps s’imprime sur sa peau et en elle. Une sensation à laquelle elle se raccrocheraitdans les années à venir.

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10

Brian contemplait l’aurore par la fenêtre de la cuisine quand Jack entra dans la pièce. Il étaitdescendu un peu plus tôt pour préparer le café après avoir entendu son ami se lever et quitter lachambre d’amis. Cette fois, il était habillé. Comme lui, il portait un holster d’épaule et son insigneagrafé à sa ceinture.

Brian avala d’un trait le reste de sa boisson qui avait refroidi, et s’approcha de la cafetière pourse servir une autre tasse. Malgré son manque de sommeil, il était aux aguets. Une grosse journéel’attendait. La plus importante de sa vie.

Il s’adossa au comptoir, croisa les jambes et observa Jack. Il n’était pas encore trois heures dumatin, et ce dernier avait déjà chaussé ses boots.

— Pourquoi tu t’es habillé ?— À ton avis ? Je vous accompagne.— Le contraire m’aurait étonné.Jack afficha un sourire.— Tu es un véritable rayon de soleil le matin, Brian.— Rachel a besoin de toi.— Et je suis là pour elle.— C’est mon problème, Jack, insista Brian. C’est à moi de le régler. Reste ici auprès de ta

femme.— Non, ce n’est pas une option, répliqua Jack le regard dur, les épaules droites. Ta jeune amie a

un rendez-vous très important demain et une paire d’yeux supplémentaire ne sera pas de trop.— Bon sang.Difficile pour Brian de refuser l’aide de son collègue alors qu’il s’agissait de la sécurité de

Layla. Il pouvait conjurer Jack de penser à lui en priorité, point barre. Mais le témoignage de Laylaétait d’une importance cruciale. Cet argument surpassait de loin tous ceux que Brian aurait puavancer.

— Ces mecs ne plaisantent pas, Jack.— Rachel est au courant des risques liés à mon métier et me soutient à cent pour cent. Tu as

appelé Jim ?— J’ai essayé hier soir. Sans succès. Je lui ai laissé un message. L’annonce de son répondeur

n’avait rien d’anormal. Il aurait trouvé une manière de m’avertir, si j’avais eu du souci à me faire.— OK. Layla et toi, vous allez prendre mon pick-up et moi je vous suivrai avec la Bronco.Brian passa une main sur ses cheveux encore humides de la douche.— Pour info, je suis fermement opposé à ce que tu t’impliques dans cette affaire, Killigrew.

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— Tu t’en remettras.

Quand ils firent halte à Flagstaff pour le petit déjeuner, Brian prit le temps de laisser un messagesur le répondeur professionnel du substitut du procureur. Puis il alluma un nouveau portable prépayéet passa un coup de fil à Doug Preston, un superviseur de l’U.S. Marshals Service du district sud dela Californie. Une fois encore, il tomba sur un répondeur. Il expliqua la situation d’un ton posé. Ilcommença par décrire l’explosion et finit par annoncer son arrivée imminente à San Diego. Mis àpart la dernière information, il espérait que le reste de son message ne serait qu’une répétition dedonnées déjà connues du service. Quoi qu’il en soit, il tenait à laisser un enregistrement de sa propreversion des faits au cas où il ne soit pas en mesure de formuler une déposition plus tard. Plus ilsapprocheraient de San Diego, plus le danger augmenterait. Il voulait s’assurer que la vérité soit ditepour protéger Layla, même s’il ne pouvait pas témoigner lui-même, le moment venu.

Jack le rejoignit, un verre de soda à la main.— Tu es sûr de toi ?Constatant que son collègue avait épié sa conversation, Brian lui décocha un regard narquois tout

en ôtant la batterie du téléphone.— Tu ne le ferais pas à ma place ?— Si. Mais je suis ton ami. C’est mon devoir de te poser la question.Brian hocha la tête. Il s’apprêtait à répondre quand Layla sortit des toilettes et s’avança à leur

rencontre. Il lui adressa un bref sourire qu’elle lui renvoya, mais ils se connaissaient trop bien pourse leurrer l’un l’autre. Layla sentait qu’il était à vif. Qu’il se faisait du souci pour elle, pour sasécurité, pour leur relation. Elle lui répondit d’un regard et lui prit la main.

— Tu es prête ? demanda-t-il.— Non.Il lui serra les doigts et l’escorta jusqu’au véhicule en faisant bouclier de son corps.

— Le droit pénal, tu disais. Ça te plaît ?Layla posa les yeux sur Brian tandis qu’ils franchissaient la frontière séparant l’Arizona de la

Californie. Cela faisait une demi-heure qu’il s’efforçait de la distraire et elle jouait le jeu, même sielle avait l’estomac noué et le cœur très lourd.

— Oui.— Tu dis ça d’un ton étonné.— Un peu, avoua-t-elle. Je savais que je ne détesterais pas ça, mais je ne m’attendais pas à

adorer.Il lui coula un regard en coin et lui décocha un sourire mutin.Par le pare-brise, elle contempla le désert qui les entourait.— Comme la Californie m’a manqué !— Tu es née ici ; ça te manquera toujours.— Et toi ? Tu es sur la côte Est maintenant ?— Pour l’instant. Je bouge pas mal. Je me fais muter dès que l’opportunité se présente.— Et ça te plaît de passer d’un lieu à un autre sans jamais te poser ? lui demanda-t-elle à son

tour.L’idée que Brian mène une vie de nomade l’emplissait de tristesse.

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Il haussa une épaule.— Ça m’empêche de trop réfléchir.— Qu’est-ce que tu as fait de ta maison ?— Je l’ai vendue.— Mais tu l’adorais.Elle aussi d’ailleurs. Il l’avait achetée à l’époque où ils étaient encore ensemble. Elle avait alors

songé aux maintes manières d’aménager la bâtisse située dans la ville d’Anaheim. Mais ce qu’il enavait fait avait surpassé ses attentes. Il avait remplacé la moquette par un plancher de bois foncé ;posé des tapis clairs et peint les murs dans les mêmes teintes ; il avait ensuite ajouté des meublessombres, conférant au pavillon des années cinquante une touche à la fois moderne et masculine. À sonemménagement, elle lui avait offert un vase en verre soufflé multicolore pour agrémenter les lieuxd’une note de couleur. Il avait placé l’objet en évidence, sous une rampe d’éclairage qu’il avaitinstallée exprès pour le mettre en valeur.

— J’adorais l’idée d’avoir une maison, rectifia-t-il. L’idée de la partager avec toi et de teregarder y mettre ta touche personnelle. Une fois que tu as intégré le programme de protection destémoins, je savais que tu ne reviendrais jamais dans le sud de la Californie. Du coup, la maison aperdu tout son charme.

— Brian, ne dis pas ça. Ça me rend triste.Il lui prit la main et entremêla ses doigts aux siens.— Pas plus que ton choix d’études me rend triste.— Est-ce que nous aurions tous les deux misé sur un avenir que nous ne pourrons jamais avoir ?Il porta sa main à ses lèvres et lui baisa les doigts.— Sur quoi d’autre aurait-on pu miser ?Elle fut forcée d’admettre qu’il avait raison. Sans en avoir conscience, elle avait vécu jour après

jour dans l’espoir de revoir Brian. Pour elle, c’était inconcevable qu’ils vivent tous deux dans lemême monde, respirent le même air, et pourtant soient séparés à jamais.

Elle lui pressa la main.— Je t’aime, Brian.Elle avait beau le répéter, elle avait l’impression de ne pas le dire assez. Elle se rendait compte

qu’elle avait baissé les bras quand elle l’avait quitté, et cela la rendait infiniment triste. S’il était unechose qu’elle voulait qu’il retienne de ces dernières quarante-huit heures, c’est qu’elle l’aimait.

— Je sais, murmura-t-il, l’air sombre. Moi aussi, ma chérie.

Ils firent une dernière pause à une station-service sur l’autoroute I-8 pour permuter les voitures.Sous la chemise en flanelle de Brian, qu’elle avait choisi de mettre ce matin-là, Layla portait un giletpare-balles. Son regard se posa sur Jack tandis qu’il se glissait au volant à côté d’elle. Il avaitéchangé ses vêtements avec ceux de Brian à l’intérieur du magasin, à l’exception des chaussures.

Il poussa un long soupir d’aise. En s’apercevant qu’elle le regardait, il afficha un sourire penaud.— Ce siège est beaucoup plus confortable que celui de la Bronco.Cela faisait près de onze heures que Brian et lui conduisaient l’un derrière l’autre. San Diego

n’était plus qu’à quelques minutes.Elle était terrifiée. Brian l’avait confiée à Jack et, à l’idée qu’elle puisse ne plus le revoir, elle

avait la gorge nouée. Dès qu’ils se présenteraient devant le substitut du procureur, Brian devraitaffronter les retombées de son escapade avec le témoin clé du procès. Il se pouvait qu’il enchaîne

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des interrogatoires pendant des semaines. Entre-temps, elle serait de nouveau avalée par le systèmeWITSEC.

Jack mit le contact. Déjà, Brian, devant eux au volant de la Bronco, s’insérait dans la circulation.— Qu’est-ce qui se passe ? demanda-t-elle, sachant que s’ils avaient échangé leur place, c’est

que quelque chose clochait.Jack jeta un coup d’œil par-dessus son épaule pour vérifier l’angle mort, puis quitta le parking.— On n’arrive pas à joindre le propriétaire de la Bronco. Il ne répond pas à son téléphone fixe et

son portable est sur répondeur.— Qu’est-ce que ça veut dire ?— Ce n’est peut-être pas grave. Mais on ne peut pas se permettre de prendre le moindre risque.

On ne veut pas que tu restes dans la Bronco au cas où elle serait compromise.Brian y était, lui.— Pourquoi on ne se contente pas de la laisser sur le parking ?Jack lui lança un regard.— Si jamais les choses se gâtent, ça détournera l’attention de ce véhicule.— Mon Dieu.Elle devint pâle comme un linge. Des flashs de l’explosion de Maryland lui revinrent en mémoire

et elle se recroquevilla dans son siège.— Il sert d’appât ?— Hé, la réconforta-t-il. Ils ne vont pas lancer des grenades en plein cœur de San Diego. Le

temps leur est compté. Ils ne peuvent pas se permettre de te rater. Ils vont vouloir se rapprocher aumaximum, et c’est là que Brian est le meilleur.

— C’est censé me rassurer ?Elle porta les mains à sa gorge pour tâcher de désagréger le nœud qui s’y était formé.— Brian doit remplir son rôle, Layla. C’est son job.— C’est son job d’attirer des meurtriers ?Elle déglutit avec peine et tourna les yeux vers la vitre, prise d’un haut-le-cœur. Elle se demanda

si Rachel avait éprouvé le même malaise lorsque Jack avait quitté son lit le matin même.— Ça vaut ce que ça vaut, mais je suis d’avis que tout arrive pour une raison. Le pourcentage de

probabilité que Brian croise de nouveau ton chemin était très faible. Les éléments en votre faveur sesont accumulés comme une enfilade de dominos : Brian s’est trouvé au bon endroit au bon moment. Ila sauvé ta peau et la sienne, et a réussi à te faire traverser le pays sans incident. Je n’arrive pas àcroire que vous soyez allés si loin ensemble pour rien. Aie un peu foi en le destin ou, du moins, enune puissance supérieure – quelle que soit celle en laquelle tu crois.

Layla secoua la tête.— Tu n’as pas la moindre idée de ce que ce qu’on vit quand vous partez en mission. L’angoisse

et la terreur qu’on éprouve en votre absence.— Qu’est-ce que tu crois que Brian a ressenti quand tu as intégré WITSEC ? C’est toi qui étais

en danger, et lui qui n’en dormait plus. Il s’est efforcé de faire bonne figure devant nous, mais il n’yarrivait pas toujours. Je ne lui en ai jamais parlé ouvertement, mais je me suis vraiment fait du soucipour lui à un moment donné.

Doux Jésus. Et à cause d’elle, il allait replonger. C’était peut-être pour cette raison qu’il semontrait si téméraire aujourd’hui. Sans doute fonçait-il tête baissée vers le danger parce qu’il étaitrongé par le chagrin, comme elle.

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Elle se redressa et roula les épaules en arrière. Il fallait à tout prix qu’elle rejoigne un lieusûr pour que Brian puisse enfin se concentrer sur lui-même, et soit en mesure d’affronter les mesuresdisciplinaires qu’il encourrait par la suite. C’était peu, mais c’était tout ce qu’elle pouvait faire pourlui.

— Emmène-moi auprès du substitut du procureur. Qu’on en finisse une bonne fois pour toutes.— C’est ce qui est prévu.

Brian s’arrêtait devant un motel situé sur Pacific Coast Highway, dans San Diego, quand leportable de Jack retentit. Il le saisit et décrocha. À l’autre bout du fil, le responsable régional,manifestement impatient de lui faire part des informations qu’il avait glanées sur l’affaire. Sans luilaisser le temps de le saluer, il lâcha, pensant s’adresser à Jack :

— Bonjour Killigrew. J’ai obtenu les renseignements que vous m’avez demandés.Brian se gara sur le bas-côté sans quitter des yeux le rétroviseur central.— De qui s’agit-il, chef ?— James Reynolds. C’est lui, l’agent qui s’est désisté cet après-midi-là. Il a été interrogé puis

relâché. On ignore à présent où il se trouve. Vous croyez qu’il est de mèche avec Simmons ?Jim. Bon sang.— Je suis absolument certain que non.Un bref silence s’ensuivit.— Qui est à l’appareil ?— En ce moment même, Killigrew est en train d’escorter miss Creed jusqu’au bureau du

substitut.Brian lâcha un long soupir, tout en disant adieu à sa carrière en son for intérieur.— Merci pour votre aide, monsieur.Il raccrocha et descendit de voiture. Il se tint entre le véhicule et la portière entrouverte tout en

observant les alentours. Il était quasiment arrivé, mais son instinct le mit soudain en garde. Jim et luiétaient amis depuis des lustres. Il lui avait sauvé la vie à plus d’une reprise. Nul doute que Jim lestraquait via le système de détection de vol de la Bronco. Pourtant, il les avait laissés arriver jusqu’àSan Diego.

Pourquoi ? Brian avait la ferme intention de lui poser la question directement.

Dieu merci, il portait des gants. Sans cela, la lampe torche lui aurait glissé des mains. Le soufflerauque, Jim Reynolds essuya le sang sur l’extrémité du manche de la torche à l’aide d’un mouchoir. Illa laissa tomber près du corps étendu à plat ventre sur le plancher du bureau d’accueil. Puis ilneutralisa la caméra de sécurité obsolète et mal positionnée, fixée en hauteur dans le vestibuleétriqué. Il en effaça le contenu des dernières vingt-quatre heures. Puis, en un éclair, il dégota unmultipass. Avant de partir, il plaça l’écriteau DE RETOUR DANS QUELQUES MINUTES sur lecomptoir.

— Tu es un satané veinard, Reynolds, marmonna-t-il pour lui-même en quittant le localfaiblement éclairé pour retrouver l’obscurité de la nuit.

Il jeta un coup d’œil vers le snack ouvert non-stop, devant lequel était garée sa Bronco. Ilfréquentait Simmons depuis suffisamment longtemps pour connaître ses petites habitudes. Malgré lesdizaines de motels qui flanquaient la rue, il avait trouvé l’agent et sa petite amie – le témoin – du

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premier coup. Il lui avait alors suffi de brandir son insigne et une photo de Simmons pour que leréceptionniste confirme ce qu’il savait déjà.

À vrai dire, tout était allé dans son sens depuis que Simmons l’avait appelé, trois jours plus tôt.Ç’aurait été plus simple si le cartel avait tué la fille dans le Maryland. Mais malgré le loupé,l’apparition imprévue de Simmons avait joué en faveur de Jim. L’ancien SEAL était le seul agent àêtre personnellement lié à Layla Creed. N’importe quel autre Marshal aurait fait ce qu’il faut pour laremettre illico sous la protection de WITSEC. Jim aurait alors eu toutes les peines du monde à laretrouver. Simmons était également le seul à être assez dingue pour risquer une dernière nuit au motelavec elle au lieu de l’emmener directement auprès du procureur pour qu’elle se prépare à sontémoignage. Tout ça parce qu’il réfléchissait avec sa queue. Tant mieux. Voilà qui offrait à Reynoldsl’occasion de faire d’une pierre deux coups : supprimer la fille et Simmons en mettant en scène unmeurtre suivi d’un suicide. Et voilà comment mettre un point final à l’affaire. Un coup de maître.

Il sortit un tube de médicaments de sa poche et avala trois cachets de bicarbonate de sodium d’uncoup pour calmer ses crampes d’estomac. Depuis quelque temps, il souffrait d’ulcères. Il ne sereconnaissait plus. Il détestait celui qu’il était devenu. Mais il avait beau avoir des scrupules quant àce qu’il s’apprêtait à commettre, il serait soulagé de mettre enfin un terme à cette histoire.

Parvenu devant la chambre de Simmons, il marqua une pause et tendit l’oreille. La pièce étaitplongée dans le noir et le silence. D’une main, il brandit le pass. De l’autre son Taser. Il allait devoirêtre rapide. À son entrée, Simmons réagirait en un éclair. Il ne fallait pas qu’il le manque.

Il introduisit la carte dans la fente et ouvrit la porte à la volée. Pointant le Taser sur le lit défaitoù apparaissaient des formes vagues, il pressa le bouton. Un flash éclaira la pièce à l’instant oùle pistolet délivra sa charge électrique. Un quart de seconde plus tard, il perçut le bruit d’un barilletderrière lui.

Il se figea net.— Pourquoi, Jim ?C’était la voix froide de Simmons. Reynolds ferma les paupières. Il n’était plus aussi bon

qu’avant. Se faire prendre la main dans le sac de cette manière ne faisait que le prouver.— Quand est-ce que tu m’as démasqué ?— Il y a deux heures. Et je n’en reviens toujours pas.Jim pivota face à lui. Un rapide regard tout autour de lui l’informa de la présence d’une flopée

d’agents se déployant sur la passerelle du premier étage et d’autres se positionnant en contrebas, depart et d’autre du parking.

— Pourquoi ? insista Simmons.— Stella.— Qu’est-ce que ta fille a à voir dans cette histoire ?— Le cartel est beaucoup plus déterminé que nous ne le pensons, répliqua-t-il en laissant

retomber ses bras. Stella a rencontré un garçon l’année dernière, lors de sa première annéed’université. Un beau jeune homme cultivé. Elle l’a ramené à la maison pour Noël et il m’a plud’emblée. Il la gâte et la rend heureuse.

L’expression de Simmons était difficile à déchiffrer dans la semi-pénombre.— Il fait partie du cartel, devina-t-il.— Évidemment. Il m’a avoué la vérité il y a deux semaines. Ça fait un bail qu’ils montent leur

coup. Imagine la patience et l’organisation qu’il leur a fallu pour localiser ma famille, trouver ungarçon qui puisse s’immiscer dans notre vie, inscrire ce jeune homme à l’université, lui donnerquelques mois pour faire en sorte que Stella tombe raide amoureuse de lui. J’ai essayé de lui parler,

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elle ne veut rien entendre. Elle croit le connaître, et elle ne le quitte plus d’une semelle. Il pourrait latuer à tout instant – ce qu’il ne se prive pas de me rappeler dès qu’il en a l’occasion. Je ne sais pascombien d’autres agents ils ont à leur botte, mais je suis sûr qu’ils ont mis le grappin sur tous ceuxque tu considères comme tes amis. Ils préparent leur coup depuis des années. Ils n’ont sans doute euaucun mal à découvrir que Layla Creed et toi êtes liés.

— Tu aurais dû demander de l’aide au département.— Je ne pouvais pas prendre le risque, rétorqua Jim, en proie à une nouvelle brûlure à l’estomac.

Remercie-moi au moins pour les trois derniers jours. J’aurais pu vous éliminer tous les deux quandvous avez emprunté mon pick-up. Mais j’ai voulu vous donner le temps de vous retrouver avant devous liquider. Je te devais bien ça. En plus, je me disais que je vous rendais service en vous tuanttous les deux. C’était mieux pour toi que de la perdre une fois encore tout en sachant ces bâtards à sestrousses.

— Bon sang, Jim !— Tu veilleras sur Stella pour moi ? Peut-être que maintenant, elle ouvrira les yeux et se rendra

compte que le mec avec qui elle couche n’attend qu’un signal de ses complices pour l’abattre.— Il y avait d’autres solutions, Jim. Tu aurais pu me parler, accepter mon aide, dit Brian en se

grattant la nuque avec lassitude. Tu n’imagines pas à quel point je regrette que tu ne l’aies pas fait.Il lui tourna le dos et les agents postés de part et d’autre de la chambre intervinrent.

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11

Au sortir de la salle d’audience, Layla était tellement épuisée qu’elle avait l’impression d’êtresous l’effet d’une drogue. Une chape de plomb pesait sur ses épaules et ses paupières étaient lourdescomme des cailloux ; ses gestes étaient si lents et dénués d’énergie que les gens qui l’escortaient luijetèrent des regards inquiets.

Elle n’avait pas vu Brian depuis plus de vingt-quatre heures.La peine que son absence lui causait avait eu au moins un avantage : celui d’endormir son

angoisse. Une torpeur bienheureuse qui lui avait permis de surmonter la série de questions que luiavait posées le substitut du procureur. Ce n’était pas fini. Le lendemain, elle devrait poursuivre sontémoignage. S’ensuivrait le contre-interrogatoire. Cela faisait des mois qu’elle appréhendait sonapparition à la cour, mais à présent la crainte de ne plus revoir Brian consumait toute son énergie, nelaissant aucune place au stress.

— Vous vous en êtes très bien tirée, la rassura le substitut Terri LeBow avec un sourire.L’espace d’un instant, elle revit le regard noir de l’homme qui lui avait tiré dessus. L’homme qui

avait abattu l’agent Sandoval. Alors qu’elle rapportait les événements de la nuit tragique au Mexiqueau jury, elle avait soudain pris conscience que son pire cauchemar ne se tenait qu’à quelques mètresd’elle. Alors elle avait été prise de sueurs froides. Sans l’engourdissement dans lequel l’avait plongéla disparition de Brian, elle aurait fondu en sanglots.

— Je veux que ce salopard paie, dit-elle d’une voix maussade.— Nous avons un dossier en béton.Terri ralentit avant de s’arrêter devant une porte.— Entrez un instant, dit-elle en accompagnant ses paroles d’un geste de la main. Je vais chercher

les agents chargés de vous raccompagner.Avec un soupir, Layla pénétra dans la pièce. Deux hommes étaient assis à une table ; un troisième

se tenait debout, légèrement en retrait derrière eux. Tous trois étaient penchés sur une liasse depapiers. À leur vue, elle se figea et eut un mouvement de recul, croyant les avoir interrompus. Puisl’homme qui se tenait un peu à l’écart se redressa et la regarda droit dans les yeux.

Elle lâcha un petit cri de surprise.— Brian !Il vint à sa rencontre. Elle se jeta dans ses bras, et il la serra fort.— Ma chérie. Désolé de ne pas avoir assisté à ton témoignage aujourd’hui ; j’avais des affaires à

régler. Mais je serai présent demain.— Je me fiche de ça. Je me suis fait un sang d’encre pour toi, dit-elle en s’écartant pour

l’examiner. Tu vas bien ?

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— Ça va aller, dit-il avec un sourire crispé.Il avait l’air épuisé.Les deux autres hommes quittèrent la pièce. Le sourire qu’ils affichaient effaça quelque peu les

craintes de Layla. Pourtant, après leur départ, elle ne put s’empêcher de demander :— Qu’est-ce qui ne va pas ?— Rien, répliqua-t-il en posant sur elle un regard embrasé. En fait, il se peut même que tout aille

pour le mieux. Tout dépend de ce que tu vas me répondre.Des papillons lui chatouillèrent le ventre.— Ah bon ?Brian l’entraîna vers une chaise et elle s’assit. Il prit une grande inspiration avant de mettre un

genou à terre, face à elle.— Oh, mon Dieu, lâcha-t-elle dans un souffle, saisie de vertige.Il fourra la main dans la poche arrière de son pantalon et brandit un écrin.Son cœur cogna dans sa poitrine.— Qu’est-ce que tu fais ?— Je me prépare à te dire que je t’aime et à te demander de devenir ma femme.Il ouvrit la boîte et elle posa les yeux sur la bague, un anneau de platine serti d’un gros diamant

rond. Elle porta les mains à ses lèvres.— Layla Creed. Je t’aime et je tiens absolument à ce que tu m’épouses.Les yeux écarquillés, le souffle saccadé, elle le dévisagea en bredouillant :— Quoi… ? Comment… ?Un sourire aux lèvres, il lui expliqua :— J’ai signé un contrat pour intégrer avec toi le programme de protection des témoins. Les deux

gentlemen que tu as entraperçus travaillent pour le comté. L’un d’eux peut se charger de nous procurerune licence de mariage. L’autre de nous marier civilement. Dans environ une heure, si tu le veux, jet’appartiendrai pour le restant de tes jours.

— Ce n’est pas déjà le cas ? plaisanta-t-elle pour détendre l’atmosphère, bouleversée parl’énormité de son offre.

— Si. Mais rendons la chose officielle. Dans quelques mois, nous pourrons procéder à unecérémonie digne de ce nom, une fois que nous aurons choisi un endroit où nous installer.

Layla laissa échapper un soupir et effleura la somptueuse bague.— Et ton travail… ?Il lui passa la bague à l’annulaire.— J’ai mis de l’argent de côté à la vente de la maison ; et ces cinq dernières années, à force de

ne rien faire d’autre que travailler, j’ai accumulé un petit pactole. Tu finiras tes études, puis nousmonterons notre agence de sécurité. Rien ne me rendrait plus heureux.

Elle lui caressa la joue.— Alors ? s’impatienta-t-il. Le suspense me tue.Les lèvres de Layla se mirent à frémir.Il arqua les sourcils.— Je nage sûrement en plein rêve, dit-elle. Si jamais tu me réveilles, je te botterai les fesses.Il partit d’un éclat de rire, brisant le froid qui avait étreint Layla toute la journée.— Nous avons assez rêvé, ma chérie. Je veux du concret. Du réel.— Qui aurait cru que nous aurions une seconde chance ?— On revient de très loin, acquiesça-t-il. Ne la laisse pas passer.

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Layla se pencha en avant et appuya son front contre le sien.— Pas question.— Ça veut dire que tu acceptes ?— Plutôt deux fois qu’une !Brian se releva en la portant dans les airs.— Je te préviens, ça ne va pas être facile, dit-elle en se rappelant à quel point elle avait lutté

quand elle avait intégré le programme.— Je suis un dur à cuire. Je peux prendre sur moi.Layla noua les bras autour de ses épaules.— Je préférerais que tu me prennes moi.— Jusqu’à ce que la mort nous sépare, jura-t-il en l’emmenant jusqu’à la sortie.

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1. Taking the Heat.

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SHILOH WALKER

Fiévreuses visions1

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1

Étendu sur une chaise longue, une bière à la main, Colby Mathis essayait en vain de se détendreen se répétant en boucle le mantra « C’est la vie ».

Ex-agent du F.B.I., il avait pris sa retraite de très bonne heure. Aujourd’hui, il n’avait plus que demaigres responsabilités dont la plupart consistaient à faire tourner une librairie au commerce déjàflorissant. Un jeu d’enfants comparé à son ancienne existence.

Désormais, il n’avait plus à craindre que quelqu’un ne meure par sa faute si jamais il foirait samission.

Sans compter qu’il passait à présent son temps sur une plage ensoleillée.Et, cerise sur le gâteau, il matait les jolies nénettes en bikini à longueur de journée.Rien à voir avec son ancien travail, au sein de l’unité opérationnelle du F.B.I., où la majorité des

agents étaient aussi déglingués psychologiquement que lui – même si aucun d’entre eux n’avaitdéconné comme il l’avait fait.

Dez…Maussade, il porta la bouteille à ses lèvres et avala une gorgée de bière. Presque deux ans

auparavant, il avait pris une décision qui avait failli coûter la vie à l’un de ses collègues… ainsi qu’àun enfant. Dez – Desiree Lincoln avait survécu. L’enfant aussi. Mais certainement pas grâce à lui. Parla suite, Colby avait démissionné. Et rien ni personne, y compris son ex-patron, ne le ferait changerd’avis.

Non, il était bien ici. Il se la coulait douce. La plage. Les filles à moitié nues. Une petite bière enpleine journée…

En réalité, il avait du mal à y croire. Mais il avait encore deux heures devant lui pour seconvaincre de la beauté de la vie. Puis, il irait prendre la relève pour l’après-midi dans la librairieque possédait son père. La boutique qui lui reviendrait d’ici à quelques années – même si d’un pointde vue technique, il détenait d’ores et déjà un tiers du magasin. Il ferait des commandes de livres. Ilindiquerait aux touristes les bons plans pour sortir, dîner, boire, ou encore pêcher. Tout ce qu’ilsdésireraient savoir.

C’était un mercredi du mois de juin, et il faisait un temps splendide. La librairie serait sans doutebondée jusqu’à vingt et une heures trente, après quoi ça se calmerait.

Après la fermeture, il rentrerait chez lui et passerait une soirée pépère, arrosée d’une bonne dosede whisky. Depuis quelques jours, il s’était remis à ruminer à fond, ce qui signifiait que sescauchemars n’allaient pas tarder à se pointer. Autant les noyer dans des litres d’alcool.

S’il ne se réveillait pas avec la gueule de bois le lendemain, il irait à la pêche.Le jeudi était son jour de repos, propice à une petite virée en bateau.

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Pour se détendre. Oublier ses échecs. Son boulot, les gens qu’il avait déçus, laissés tomber. Bref,faire le vide dans sa tête…

Cette vie-là n’était plus la sienne. Il y avait renoncé en quittant le F.B.I.Soudain, son cœur se mit à cogner dans sa poitrine. Un poids lui comprima le thorax. Le sang

martela ses tempes. Sa bouteille lui parut brusquement très lourde. Des taches noires obstruèrent savision pendant quelques instants avant de disparaître. Puis il vit avec une netteté presque irréelle. Lepoids qui l’oppressait se fit de plus en plus intense et les battements de son cœur s’intensifièrent,pareils à de violents coups de masse. Il eut l’impression qu’une créature cherchait à jaillir de sontorse.

Un autre que lui aurait cru faire une crise de panique, voire un infarctus.Mais Colby n’était pas dupe. Ce n’était pas un arrêt cardiaque. Il aurait préféré, à la rigueur.Il aurait tout donné pour ne pas revivre ce genre d’épisode. C’était devenu insupportable pour

lui… Son pire calvaire.La première fois que son don de médium s’était déclaré, Colby n’était encore qu’un adolescent.

Et le pouvoir s’était manifesté brutalement. Parfois, les visions étaient violentes. À d’autres moments,moins.

Celle-ci était puissante, assez pour lui couper le souffle.Il érigea ses barrières mentales, le mur qui le préservait lors de telles manifestations, et secoua la

tête.— Non.Il renforça ses défenses et inspira longuement.— Non.Non, cette vision ne lui était pas destinée. Impossible…

PAS POUR MOI…Il lui fallut près de deux heures pour que le poids se dissipe. Il avait envie de rentrer chez lui, de

s’effondrer sur son lit et de dormir pendant dix bonnes heures d’affilée. Souvent, les premièresvagues le frappaient ainsi. Parfois, elles lui tombaient dessus en plein milieu de son travail, à moinsqu’il ne soit accompagné de son « pilier », un autre voyant qui le soutenait pendant son état deconscience altérée et l’aidait à rester connecté à la réalité. Son point d’ancrage, en quelque sorte. Lesvisions l’épuisaient et, dans ces moments-là, il n’avait qu’un désir : plonger dans un profondsommeil.

Il aurait pu prendre son après-midi ; son père se serait montré compréhensif.Pour cela, encore eût-il fallu que Colby admette qu’il s’était passé quelque chose. Mais, têtu

comme une mule, il était résolu à faire comme si de rien n’était. Aussi, le midi venu, il parcourut àpied le kilomètre et demi qui séparait son spot sur la plage de la librairie.

Parvenu au magasin, il avait l’impression d’avoir les jambes en coton. C’était bon signe, très bonsigne même. Cela lui permettait de détourner son attention du mauvais pressentiment qui le tenaillaitdepuis sa crise. Mieux valait penser à autre chose.

Seulement il avait omis un détail : son père. Un simple coup d’œil suffit au vieil homme pourcomprendre qu’un truc clochait.

— Tout va bien, fiston ?— Oui, répondit Colby en se forçant à sourire.

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Il mentait. Et son père le sentait probablement. Tant pis, il ferait mine d’aller bien jusqu’à ce queça soit vraiment le cas.

— Tu en es sûr ?Colby soutint son regard.— Sûr et certain. J’ai mal dormi, c’est tout.Son père le dévisagea d’un air sceptique.— Ça recommence, n’est-ce pas ?— Non.Colby se racla la gorge. Son ton n’était pas très convaincant. Peu importe. Pas question que les

visions reprennent. C’était fini, point barre. Cette période de sa vie était révolue.— Je t’assure que non.

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2

Quand elle le vit approcher, elle poussa un cri de terreur. Elle l’implora. Le supplia.— Je vous en prie… Arrêtez…— Arrêter ? répéta-t-il avec un sourire amusé. Non. Je ne m’arrêterai que quand j’aurai fini ce

que j’ai commencé.Les sanglots brisés de la jeune femme résonnaient comme une douce musique à ses oreilles tandis

qu’il se mettait à l’œuvre en fredonnant, disposant ses outils face à lui. Il savait déjà ce qu’il allaitlui faire. Ça allait être… exceptionnel.

Il fit la première entaille en chantant.« Would you dance… »Le corps de la femme se contorsionna et un hurlement de douleur jaillit de sa bouche.« … if I asked you to dance… »Il essuya consciencieusement le sang qui coulait de la plaie et attendit que les hurlements se

calment. Après tout, il voulait qu’elle apprécie sa chanson.« Would you run and never look back1 ? »De nouveau, il glissa le scalpel sur le corps de sa victime, savourant ses cris avec un sourire en

coin.Quand il parvint au refrain, elle hurlait si fort et avec une telle constance qu’il n’arrivait plus à

s’entendre.Tant pis… il connaissait les paroles. Il les connaissait par cœur. Il poursuivit son ouvrage en

chantant.

— Merde alors, quelle boucherie !L’inspectrice Mica Greer était penchée sur le cadavre ; à côté d’elle, les deux agents de police

qui l’accompagnaient, deux jeunes novices, se retenaient de vomir devant l’horreur de la scène. Sanscompter qu’il faisait très chaud dehors. La mort et la chaleur faisaient rarement bon ménage.

Bien qu’elle n’ait quasiment pas fermé l’œil de la nuit, Mica gardait l’esprit clair. Concentrée,elle examinait le corps en lambeaux qui gisait à ses pieds avec autant de détachement que possible.

C’était la troisième victime.Ce ne sera pas la dernière, murmura une petite voix dans sa tête. Un écho de son rêve. Rêve

interrompu cette nuit par un coup de téléphone – un coup de fil du Central. Il y avait eu un nouveaumeurtre. Alors elle s’était levée pour aller affronter un cauchemar cette fois bien réel.

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Elle avait beau avoir l’estomac particulièrement accroché, elle eut un haut-le-cœur en inspectantles blessures infligées à la jeune femme.

Qui avait été très belle de son vivant.Vu l’état du corps, Mica ne pouvait que le deviner ou le déduire. L’espèce de barjot qui l’avait

tuée choisissait toujours de belles proies. Les médias l’avaient surnommé « le Chirurgien ». Saufqu’ils changeraient illico ce surnom s’ils voyaient ce que ce psychopathe avait fait subir à sa dernièrevictime.

D’accord, Mica décelait une certaine précision dans la démarche, mais dans l’ensemble… c’étaitde la charpie. Rien à voir, de près ou de loin, avec un acte chirurgical.

Son ventre se noua.— Sommes-nous certains qu’il s’agit du même type ? demanda un collègue.Elle garda les yeux rivés à la victime, tâchant de mémoriser la scène dans ses moindres détails.

De toute façon, comment pourrait-elle oublier pareille vision d’horreur ?— Greer ?— Oui. C’est lui, répondit-elle d’une voix blanche.Ils n’avaient pas encore retrouvé la carte de visite du meurtrier, mais ça n’allait pas tarder. En

tout cas, même sans cet indice, elle était certaine qu’il s’agissait du même homme.Elle se fiait à son intuition.La nuit même, Greer avait été en proie à une vision sombre et mystérieuse. Des fleurs noires

comme la nuit. Des giclées de sang. Et des cris de souffrance produisant une musique épouvantable.Ces images et ces sons s’étaient envolés à la seconde où le téléphone avait sonné, la réveillant ensursaut. Pourtant elle avait su. Instantanément.

Tu l’as su avant de recevoir l’appel.Elle fit taire la voix sournoise qui chuchotait dans sa tête. Les rêves prémonitoires ne lui avaient

servi à rien dans cette affaire ; ils n’avaient pas influé sur la réalité. Il fallait qu’elle retrouve ce filsde pute. Et qu’elle l’épingle.

— Eh bien, si c’est lui, on va bien finir par trouver sa putain de carte de visite. À ton avis, il l’aplanquée où cette fois ?

— Je ne sais pas. (Elle inclina la tête de côté et s’accroupit près du visage de la femme pourobserver son regard vitreux.) On va le trouver.

Son coéquipier, Barry Phillips, l’imita et se mit à genoux. Une cigarette éteinte pendait à seslèvres. Il n’avait pas fumé depuis trois mois. Parfois, il en avait une sur lui. Ça l’aidait prétendument« à réfléchir ».

— Tu veux dire que toi tu vas le trouver, rectifia Barry à voix basse.Elle aurait aimé faire la sourde oreille. Faire mine de ne pas comprendre son sous-entendu. Un

jet de bile remonta dans sa gorge. Le corps tailladé de la femme ne lui avait pas retourné le ventre,mais la remarque de son collègue lui fichait la nausée.

N’y songe pas alors. Elle chassa cette pensée de son esprit.— Je me demande si elle était danseuse, un truc comme ça. Notre première victime se servait de

sa bouche. Elle répondait au téléphone rose. (On lui avait coupé la langue.) La deuxième faisait desmassages. (On lui avait coupé les mains.)

— Des massages et autres choses, intervint Barry.Mica lui coula un regard en coin.— Peut-être bien. Mais ses clients la connaissaient via le salon de massage… il lui a pris

ses mains.

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— C’était un travail propre, pas bâclé. Il n’y a rien de soigné dans le cas présent. C’est de laboucherie.

— Tu te trompes.Elle examina les entailles sur le corps de la victime. Il y avait du sang mais en faible quantité.

Surtout au niveau des poignets et des chevilles, où son bourreau l’avait ligotée. Visiblement elle avaitlutté contre ses liens. Il l’avait tuée ici même. Pourtant il n’y avait quasiment aucune trace de sang.

Mica souleva le corps avec précaution. La chair était marbrée de noir là où les liquidesorganiques avaient formé une mare après le décès. Elle ne s’était pas vidée de son sang. Sa gorgeétait couverte de bleus ; la femme était morte asphyxiée.

— Elle aurait dû saigner vu toutes les coupures qui lui couvrent le corps. Mais il n’y a pasbeaucoup de sang autour du cadavre. Il a pris le temps de nettoyer au fur et à mesure qu’il ladécoupait.

Phillips laissa échapper une grimace de dégoût.— C’est… tordu.— En effet.Elle souffla, écœurée par la puanteur de la chair en décomposition. L’air empestait la mort. La

puanteur lui collait aux narines et à la gorge.— Tu t’attendais à quoi ? À une scène bucolique ?Phillips marmonna dans sa barbe. Il poursuivit son examen de la dépouille.— Une danseuse, commenta-t-il au bout d’une minute. Et pourquoi pas une prostituée ?— Parce qu’une prostituée gagne son argent en vendant autre chose que son corps, répliqua Mica.

Or c’est le corps qui était visé cette fois ; il l’a mis en charpie.Elle préférait ne pas penser à ce que le tueur ferait subir à une prostituée, à quelles parties de son

anatomie il s’en serait pris.— Hein ?— Du sexe, précisa-t-elle. Une putain vend du sexe.Sur ces mots, elle se mit à arpenter l’entrepôt désaffecté. Durant la journée, cette partie de la

ville était assez fréquentée. En revanche, la nuit venue, le quartier était quasiment désert. Le tueurl’avait-il su ?

Elle tâcha d’ignorer la voix qui lui chuchotait : Oui…C’était dur. Ces derniers temps, elle n’arrivait pas à faire taire complètement la voix. Il fallait

qu’elle trouve la carte de visite du tueur. Elle était quelque part ici. Elle le savait. Sans compter surla voix, qui l’aiguillait…

Tu chauffes.Tu brûles.Elle avait presque atteint la fenêtre. Une vitre grise de saleté sur laquelle avait été tracé un signe.

Une flèche. Les sourcils froncés, elle suivit la direction indiquée – l’est.— Qu’est-ce que tu essaies de me dire, espèce de salopard ?Quelques étages plus bas, elle trouva ce qu’elle cherchait.Sa carte de visite. Les vêtements de sa victime. Soigneusement pliés. Au sommet de la pile

reposait une fleur. Les amateurs de plantes auraient certainement su qu’il s’agissait d’une reine de lanuit. À ses yeux, la fleur ressemblait à s’y méprendre à une tulipe. Si elle en connaissait le nom, c’estpour l’avoir lu dans les rapports des victimes précédentes. Une fleur aux pétales violet foncé,presque noirs. Presque mais pas complètement. Leurs experts lui répéteraient ce qu’elle avait déjà

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entendu : c’était une belle plante. Mais elle n’avait rien d’exotique. N’importe qui était capable de lacultiver dans son carré de pelouse.

D’expérience, elle savait qu’elle allait ensuite trouver la carte d’identité de la victime, plusprobablement son sac à main et ce qu’il contenait. Le bourreau n’était pas du genre à conserver destrophées.

Ce ne sont pas les butins qui l’excitent. C’est la peur qu’il suscite chez ses victimes. Il veutleur faire du mal.

— Tais-toi, marmonna-t-elle.— Ça va, Greer ?Elle releva la tête et jeta un coup d’œil par-dessus son épaule. Elle ravala un juron, s’apercevant

que Phillips s’était approché d’elle à son insu. Comment passer pour une cinglée…— Ça va. Je pense avoir trouvé sa carte de visite. (Elle pointa du doigt la vitre.) Il y a également

une flèche. Elle indique l’est. Je me demande si c’est lui qui l’a tracée.Oui. Il te montre quelque chose.Mica refusa fermement de prêter attention à la voix dans sa tête. De même qu’elle refusait de

prendre en compte ses rêves. Elle n’en avait pas besoin. Elle trouverait toute seule comme unegrande. Elle était sacrément bonne dans son domaine, elle était un excellent flic et n’avait pas besoind’aide.

— Il nous faut du renfort, Greer.— Capitaine, si on fait appel aux médias, ce sera une catastrophe…Le capitaine Alice D. Kellog leva la main pour lui intimer le silence. Elle avait fait partie de

l’équipe de basket-ball au lycée et à l’université, et elle faisait sept kilomètres de course à pied parjour, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il brille. À plat, elle mesurait un mètre quatre-vingt-huit ; or elleavait un faible pour les talons et les tailleurs. Mica n’était pas naine, mais lorsqu’elle se tenait deboutà côté du capitaine, elle avait l’impression d’être une gamine dépenaillée.

— Il n’est pas question de demander l’aide des médias. Je veux que vous passiez un coup de fil.Le ventre de Mica se noua. Elle savait exactement ce que son supérieur allait lui demander.

Exactement.Non. Pitié non.Tandis que Kellog fouillait dans le tiroir de son bureau, Mica regarda fixement un point sur le

mur derrière sa patronne, s’efforçant de calmer sa respiration et son humeur. Pas question. Pasquestion. Pas question…

Le capitaine lui tendit une carte. Mica la prit et l’examina.Et zut…— Je vous sens réticente.Réticente ? Elle interrogea Kellog du regard.— Qu’est-ce qui vous fait penser ça ?— La veine qui palpite à votre tempe, d’une part. De l’autre, votre regard me dit que vous

aimeriez m’en coller une.— Capitaine, je ne veux pas… (Elle fronça les sourcils et détourna les yeux.) Je n’ai aucune

envie de vous en coller une.Et le cas échéant, elle ne pourrait sans doute pas le faire. Mica avait l’habitude de remporter

toutes les bagarres ; elle ne faisait pas de cadeau à ses adversaires, elle utilisait les ongles et lesdents, n’y allant pas de main morte. Or elle avait le sentiment que le capitaine risquait de la battre àplates coutures.

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Kellog posa sur elle ses yeux noisette pénétrants.— Vous êtes en contact avec des gens qui peuvent s’avérer utiles à notre affaire. Inutile de le nier.— Je ne vois pas où vous êtes allée chercher ça.— Ne faites pas l’innocente, rétorqua Kellog en la scrutant d’un air entendu. Vous avez des

relations. Vous pouvez vous passer de la paperasse habituelle. Je vous y autorise.— Si nous appelons le F.B.I., ils nous feront mijoter. Ils n’ont aucune raison de nous aider.— Officiellement ? (Kellog hocha la tête.) En effet.— Je ne suis même pas certaine qu’ils acceptent de me parler.On ne lui devait aucune faveur. Elle ne savait même pas s’il y avait encore des gens de sa

connaissance au sein du service. À l’exception de Taylor Jones, le grand patron, évidemment. Maisles autres… elle avait entendu dire que Taige Branch était parti. Quant à ceux avec qui elle avaitsuivi sa formation… Et l’homme auquel elle tâchait de ne pas penser. De ne jamais penser même.

Colby.Colby Mathis.Son visage lui apparut et un frisson la parcourut. Des yeux bleus… des yeux qui la perçaient à

jour. Ils n’avaient jamais cessé de la hanter. Ils la hanteraient pour toujours.— Faites en sorte qu’ils vous aident, lui ordonna Kellog d’une voix sèche, ramenant brutalement

Mica au temps présent. Nous avons trois femmes mortes sur les bras en l’espace de trois semaines etvous savez aussi bien que moi que si nous ne mettons pas la main sur le tueur d’ici à la semaineprochaine, il y aura un quatrième cadavre.

Si seulement le capitaine avait tort…

— Je n’ai personne à vous envoyer. Toutes mes équipes sont prises.Mica était en ligne avec Taylor Jones, l’agent spécial en charge de l’unité opérationnelle qui,

officiellement, n’existait pas. Sa réponse ne la surprit pas et la soulagea presque. Le F.B.I. ne pouvaitpas leur envoyer de renfort.

Ils allaient donc devoir se contenter des moyens qu’ils avaient au sein de la police. Ce quisignifiait également que Mica n’aurait pas à revivre la période la plus éprouvante de sa vie… La plusdifficile. La plus heureuse aussi. Celle où elle avait eu le cœur brisé.

— Je n’ai que trois équipes. Et elles sont toutes prises pour le moment. Mais…En entendant son interlocuteur feuilleter une liasse de papier, Mica eut un mauvais pressentiment.

Son estomac se noua.— Mais… Jones ?— Toujours aussi impatiente à ce que je constate, mademoiselle Greer ! Enfin, je devrais plutôt

dire inspecteur Greer, non ?— Lieutenant Greer, corrigea-t-elle. Écoutez, j’ai trois meurtres à élucider et un autre à

empêcher, Jones. Je n’ai pas le temps d’être patiente. Puisque vous ne pouvez rien faire pour moi…— Je ne peux pas vous envoyer une équipe. Mais je n’ai jamais dit que je pouvais pas vous

aider.À l’autre bout de la ligne, Taylor Jones étudia une image. Le dossier reposait sur son bureau

depuis plus d’une semaine, même s’il ignorait encore pourquoi il avait demandé à Gina de le luisortir des archives. Ce n’était pas comme s’il y avait une chance pour que Colby Mathis réintègrel’unité. Cet homme avait perdu toute confiance en lui. Pourtant, Jones avait ressenti le besoin desortir son dossier. Il avait fonctionné par instinct.

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Or Jones s’en remettait toujours à son flair.Songeur, il se demanda si Mathis avait la moindre idée que son ex avait déménagé dans le Texas

des années plus tôt. Elle n’était plus qu’à une heure de distance.Une heure. Trois fois rien.Avait-il eu des rêves ?Si oui…— Il y a un ancien agent de mon équipe qui habite dans votre région, lieutenant. Un de mes

limiers. Je ne sais pas s’il vous permettra d’empêcher le meurtrier de faire une nouvelle victime,mais s’il intervient dans votre affaire, vous arriverez peut-être à le stopper avant qu’il ne soit troptard.

— L’un de vos limiers, répéta Mica, dubitative.Non. Mica devina à qui il faisait référence. Son ventre se tordit et son pouls s’accéléra.— Ce fameux limier, comment s’appelle-t-il ?— Je vous conseille de vous rendre sur la plage de Galveston. Vous l’y trouverez. À moins que

ce ne soit lui qui vous trouve en premier.Et sans lui laisser le temps de poser d’autres questions, Taylor Jones raccrocha.Mica pesta et baissa le bras, foudroyant du regard l’écran de son portable.— Ma parole, je rêve !Mais son intuition ne la trompait jamais. Et son cœur battit de plus belle.

Il avait passé une semaine vraiment épouvantable.Trois jours s’étaient écoulés depuis le déclenchement des crises, qui le frappaient à intervalles

réguliers.Oui. Une semaine effroyable. À cause de cela, il faisait n’importe quoi. Et ça ne risquait pas de

s’arranger. Pour couronner le tout, les rêves avaient commencé, s’ajoutant aux crises. Pas desvisions. Juste des réminiscences des échecs de sa vie. Encore. Et encore. Et encore. Comme uncouteau qu’on remuait dans une plaie. Impossible d’y échapper. Alors, il avait deux options : souffriren silence ou bien noyer ces satanés songes dans l’alcool. Dans un sens comme dans l’autre, ildevrait faire avec.

Mais les crises, c’était une tout autre histoire. Elles s’insinuaient en lui, plantaient leurs griffesdans son cœur et dans son esprit, le dévoraient de l’intérieur, instillaient en lui des sensations de mortet de douleur en lui chuchotant des paroles pernicieuses.

Ça n’est pas fini, l’avertit sa conscience alors qu’il poussait la porte de la librairie. Ça n’estpas fini, et tu le sais.

C’est ça ! Non. Pas question qu’il replonge – pas question que ces conneries lui fassent mettre denouveau en péril la vie d’autrui. Il en avait fini avec ça. Bel et bien fini. Il avait juste à attendre queles rêves cessent, ce qui finirait bien par arriver.

Quelqu’un d’autre répondrait à cet appel. Quant à lui, il allait se plonger dans le travail etconcentrer toute son énergie sur la librairie. Il lui restait encore beaucoup à apprendre dans cedomaine. Au lieu de prêter attention à ces fichus rêves et à ses crises…

— Colby.Il croisa le regard de son père. L’expression qu’il lut dans ses yeux bleus, semblables aux siens,

lui noua l’estomac.— Oui ?

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— Tu as eu un appel.— Ah bon ?Pour toute réponse, son père indiqua d’un geste du menton une feuille posée sur le comptoir, sous

un oursin plat qui tenait lieu de presse-papiers. Un bourdonnement résonna à ses tympans quand ilprit connaissance du message. Je pense que vous allez avoir de la visite aujourd’hui. Navré,Mathis. Elle a besoin d’aide. Mon instinct me dit que vous pourrez l’aider.

Le mot ne mentionnait aucun nom mais c’était inutile. Il savait déjà à qui son ancien supérieurfaisait référence. Et plus il contemplait le papier, plus le bourdonnement s’intensifiait dans sa tête. Ilfinit par glisser un regard à son père.

— C’est Jones.— Oui, répondit simplement le vieil homme en baissant les yeux (il essuya les carreaux de ses

lunettes sur sa chemise d’un air pensif). Tu aurais sans doute préféré que je ne prenne pas le message.Colby esquissa un sourire.— Non. Tu es trop poli pour ça.— Cette femme qui doit te rendre visite, je suppose qu’elle va venir ici.Colby dévisagea son père.— Je crois. Mais je ne serai pas là. Je ne peux aider personne, papa. Ça ne sert à rien.Il pivota sur lui-même et sortit.

La plage.Mica le trouverait sur la plage.Colby Mathis. C’était lui qu’elle devait rejoindre sur la plage. Elle le savait, même si elle eût

aimé se convaincre du contraire. Elle le sentait dans ses tripes. Dans sa moelle. Dans son cœur. Enclaquant la portière de son véhicule, elle se reprocha d’avoir décalé son rendez-vous chez lecoiffeur. De ne pas avoir pensé à se maquiller. De ne pas avoir revêtu autre chose que sa veste et sonpantalon de tailleur. Elle aurait voulu être plus… apprêtée au moment de le revoir.

À cette pensée, elle s’en voulut. C’était une affaire de meurtre qui l’amenait là. Son apparencen’avait aucune importance.

— OK, marmonna-t-elle en parcourant la plage du regard. Où aller maintenant ?Le lieu était assez vaste. Colby pouvait se trouver n’importe où. Pourtant elle marcha vers le

rivage – pas au hasard non plus. Comme si un aimant l’attirait dans cette direction. Au fil de ses pas,sa nervosité s’accrut. Son cœur battit de plus en plus vite et la température de son corps augmenta.Rien à voir avec le soleil de juin qui brillait dans le ciel.

La plage formait un coude ; à cet instant, son souffle se coupa et elle sut.Il était là.Au détour du virage, elle aperçut une silhouette qui se tenait au bord de la mer.— Et zut.

1. « Danserais-tu si je t’invitais ? T’enfuirais-tu sans jamais te retourner ? » (N.d.T.)

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3

Le sentiment d’oppression qu’il avait éprouvé tout au long de la journée finit par se désagrégerquelque peu.

Colby voulut se convaincre qu’il avait réussi à éviter cette chose, quelle qu’elle fût, quil’invoquait malgré lui. Mais, même si la tension s’était dissipée, d’autres sensations ne le lâchaientpas. Son cœur continuait de battre à tout rompre comme s’il était en train de courir un marathon. Lesmurmures se bousculaient dans sa tête. Tu ne peux pas y échapper, tu ne peux pas y échapper, tu nepeux pas, tu ne peux pas, tu ne peux pas…

Il était prêt à tout pour faire taire ces fichues voix. Tout.Et soudain, le silence retomba.Comme le calme précédant la tempête.Avant même de tourner la tête et de la voir, il sut. Au fond de lui-même, il sut. Il ignorait si c’était

lié à sa faculté de voyance. Certaines choses se percevaient comme ça, instinctivement. Lepressentiment d’un problème imminent.

Un problème… d’un mètre soixante-quinze tout en jambes. Des cheveux noirs noués en une tressesi serrée qu’on n’aurait jamais deviné qu’ils étaient bouclés. Sauf qu’il avait passé des heures etdes heures à caresser ces boucles. Elle portait des lunettes de soleil qui dissimulaient ses yeux d’unbleu tirant sur le violet, une nuance peu commune. Des yeux rieurs, d’après ses souvenirs.

Mica Greer ne s’était jamais vraiment intéressé aux médiums. Étrange, étant donné qu’elle enétait une. Ou peut-être pas si étonnant, songea-t-il. Le déni…

Le don de Mica, comme le sien, avait d’abord été instable. Contrairement à lui, elle n’avait pasappris à le stabiliser au travers d’une pratique solitaire. Elle avait eu besoin d’un partenaire. Et elleétait devenue son « pilier » et avait excellé dans ce rôle. Pendant un temps, ils s’étaient entraînés enbinôme. Le don de la jeune femme s’était développé, épanoui… en parallèle, un lien absolument fous’était tissé entre eux.

Puis elle avait décidé qu’elle ne voulait pas de toute cette « folie » dans sa vie.Elle était partie. Non seulement elle avait quitté leur unité, mais elle avait abandonné le F.B.I.Et elle l’avait abandonné lui aussi…Ne pense pas à ça. Il reporta son attention sur l’océan, s’efforçant d’atteindre la paix intérieure.

Sans succès. Il ne pouvait s’empêcher d’y voir une coïncidence : La jeune femme réapparaissait danssa vie au moment où ses crises recommençaient. Ce n’était pas un simple hasard.

Je peux toujours me dire que si elle est là, après tout ce temps, c’est parce qu’elle a prisconscience qu’elle m’aimait toujours. Il partit d’un rire jaune. Mais oui bien sûr, dans ses rêves.

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Quinze ans… Quinze satanées années s’étaient écoulées depuis son départ. Le temps avait filé sansqu’il s’en aperçoive.

Parvenue près de lui, elle s’arrêta, son épaule frôlant presque la sienne. Il attendit qu’elle parle,mais elle demeura silencieuse. Inutile de préciser qu’il avait longtemps attendu qu’elle luirevienne… en vain. Au bout de plusieurs mois, voire plusieurs années, il avait abandonné tout espoir.En revanche, il n’avait jamais cessé de désirer son retour. De la désirer elle.

Les vagues se brisaient sur le sable ; elles lui léchaient les pieds. Il s’accroupit, glissa les doigtsdans le sable humide et observa les sillons se reboucher en formant des tourbillons avant qu’uneautre vague ne vienne recouvrir ses traces. Près de lui, Mica restait murée dans le silence.

S’il lâchait du lest, il était capable de s’immiscer dans son esprit, de ressentir son trouble. Mêmesans abaisser son « bouclier », sa forteresse intérieure. Il n’avait qu’à se concentrer un peu…

Voilà, il était dans ses pensées. Elle n’avait pas envie d’être là, elle redoutait que le don deColby ne soit devenu plus fort, qu’il ne s’immisce dans sa tête… Mince… !

Comme si elle avait senti son intrusion, elle interrompit brusquement le fil de sa réflexion. Ilesquissa un sourire.

— Tu ne sais toujours pas penser en silence, commenta-t-il à voix basse.— Et toi tu ne sais toujours pas t’occuper de tes oignons, rétorqua-t-elle sèchement.Il haussa les épaules.— Si les gens crient dans la pièce voisine, je suis contraint de les entendre. Ça ne veut pas dire

que ça me plaît. (Il lui coula un regard.) Arrête de crier. Contrôle tes pensées. Tu as appris à le faire.Peut-être bien. Sauf que depuis, le don de Colby avait pris de l’ampleur. À l’époque, il

ne s’insinuait pas aussi facilement dans la tête des gens. Qu’il l’admette ou non.Mica fit la moue. Elle était craquante. Il eut envie de la renverser à terre et de la déshabiller.

Quoi ? Il ne fallait pas fricoter sur la plage parce que les grains de sable se glissent dans des partiesintimes ? Et alors ? L’océan était à portée de main s’ils voulaient se rincer ensuite. Et sa maison étaità deux pas.

L’attirance était si forte qu’il se voyait déjà le faire, et il doutait qu’elle lui résiste. Le souffle deMica se précipita tandis qu’elle le fixait du regard. Non, elle ne lui résisterait pas. Pas un instant.

Il détourna la tête.— Je ne peux pas t’aider, Mica. Va-t’en.— Tu ne sais même pas ce que je suis venue te demander.Colby ferma les yeux un instant. Les images, les sensations qui hantaient ses rêves depuis

quelques jours lui apparurent. Le sang, la terreur et la mort. La peur et les ténèbres qui planaient au-dessus de lui comme un nuage menaçant.

— J’en sais suffisamment, murmura-t-il.Mica s’accroupit près de lui. Elle s’était un peu rapprochée. Trop à son goût.— Tu ne fais plus partie de l’unité de Jones.— Non, dit-il en glissant ses doigts dans le sable pour se distraire.Il mourait d’envie de la toucher.— Depuis quand ?— Ça fait presque deux ans.Bon, si elle avait l’intention de rester assise là à lui faire la conversation, il n’allait pas résister

longtemps à la tentation. Il profita de la vague suivante pour se rincer les mains, puis il se leva.— J’imagine que tu n’es pas venue me parler du bon vieux temps ni me demander ce que j’ai fait

ces quinze dernières années.

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Depuis que tu as renoncé à nous, faillit-il ajouter. Bref, ça n’avait plus aucune importanceaujourd’hui. Ils n’avaient plus aucune importance puisqu’ils avaient cessé d’exister en tant quecouple.

— Je t’ai déjà dit que je ne peux rien faire pour toi, Mica.— Tu n’en sais rien.— Si parce que je ne veux pas t’aider.Sur ces mots, il allait s’en aller – il fallait qu’il parte, qu’il s’éloigne d’elle.Mais Mica ne l’entendait pas de cette oreille. Elle le rattrapa par le bras et ce contact faillit le

paralyser. Le contact de sa peau contre la sienne l’électrisa. La connexion se fit instantanément et lesimages déferlèrent en lui. Des souvenirs. Leurs souvenirs. Le sang frémit dans ses veines et lesémotions l’envahirent. Le désir ainsi que l’amour qu’elle avait foulé des années plus tôt… Pendant unbref instant, ce sentiment noya tout le reste.

Mais le voile des souvenirs s’estompa trop vite, bientôt remplacé par des images ignobles.Une boucherie.Mica avait volontairement abaissé sa forteresse intérieure et donnait désormais libre cours à ses

pensées pour les partager avec lui.Elle se remémorait des souvenirs très récents.Les yeux plongés dans les siens, il vit tout avec la netteté du Technicolor, de la pointe de ses

boots à la manière dont ses boucles tombaient devant ses yeux… et la façon dont son regardexaminait le corps au sol, celui d’une femme gisant à terre, ligotée.

La victime était entaillée de la tête aux pieds mais étonnamment, il n’y avait que très peu de sangautour de la dépouille.

Le tueur l’a nettoyée à mesure qu’il la torturait…Et ça va recommencer…Il faut que je le trouve. Je savais que cela allait arriver…Les pensées de Mica devinrent de plus en plus fortes et Colby recula brusquement, rompant leur

connexion physique en mettant une distance entre eux. La liaison était interrompue mais il était déjàtrop tard. Il avait vu.

D’accord, il avait déjà eu en tête des scènes plus horribles. Il y avait toujours pire. Mais ce quiétait surtout pénible pour lui, c’était de voir ces images à travers la conscience de Mica. Il pivotaface à elle en jurant.

— Bon sang, qu’est-ce que tu veux ?!— J’ai besoin de ton aide.— Tu as des visions… tu es une grande fille maintenant. Règle ça toute seule.Elle poussa un soupir désemparé. Sa réaction le surprit. Il s’était attendu à ce qu’elle se hérisse,

monte au créneau, se batte. Tout sauf cet aveu d’impuissance.— Je ne peux pas… je ne suis pas assez bonne, Colby. Je suis partie avant d’avoir réussi à

développer suffisamment mes facultés. Je n’arrive pas à contrôler mon pouvoir. Du coup, je trouve çaplus simple de…

— Te cacher ?Elle vrilla son regard au sien.— Oui.— Et tu peux me dire en quoi c’est mon problème ?Il l’observa d’un air suspicieux.

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— Écoute, il y a quinze ans, je n’étais pas prête à gérer tout ce qui m’arrivait, surtout quand onm’a mise en équipe avec toi.

Il fit la grimace. Plutôt montrer sa colère que son chagrin.— En gros, tout est ma faute ?— Non, dit-elle en faisant un pas vers lui. C’est la mienne. Mais abstraction faite de nos

problèmes personnels…Elle baissa les yeux. Ce fut seulement là qu’il remarqua le dossier qu’elle tenait à la main. Ce fut

comme un appât, un aimant l’attirant irrémédiablement à lui.Putain… Non, il ne faut pas que je me mêle de cette histoire…Mica ouvrit le dossier et lui tendit le portrait d’une femme. À l’instant où il toucha le cliché, il fut

assailli par des images et des sons. Les pulsations lentes d’une musique très sensuelle, les regardsqui reluquaient le corps de la femme en photo tandis qu’elle dansait à demi nue.

— C’était une danseuse, dit-il sèchement. Elle était strip-teaseuse.Mica plissa les yeux mais il n’y prêta pas attention. La scène se poursuivait dans sa tête. Les

émotions de la victime l’envahirent. De l’excitation – elle éprouvait un vif enthousiasme. Ce boulotlui permettait de gagner beaucoup d’argent en peu de temps. De l’argent facile. Elle allait enfinpouvoir commencer à rembourser ses dettes, payer ses factures et aller faire une virée shopping…

Colby eut envie de chiffonner l’image. Il leva la tête et observa Mica.La jeune femme soutint son regard.— D’accord, je t’ai quitté. Je suis partie du F.B.I. Si je l’ai fait, c’est parce que je me sentais

dépassée par la situation. Quand nous unissions nos pouvoirs, il se passait un phénomène incroyable,qui m’a affolée. Je n’étais pas assez forte. Je me sentais nulle, faible, stupide en ta présence. Ducoup, j’ai préféré partir. (Elle posa les yeux sur la photo qu’il n’avait pas lâchée.) Tu m’en veux ?C’est compréhensible. Tu es furieux ? Tu en as le droit. Tu ne me dois rien. Mais sache qu’une autrefemme va mourir d’ici peu. Et ce ne sera sans doute pas la dernière. Je le sens. Je ne sais pas si c’estgrâce à mon… habileté ou bien si c’est juste intuitif. En tout cas, j’en suis sûre. Or l’enquête piétine.Dans une semaine ou moins, il y aura une autre victime, Colby, et on n’aura pas pu l’empêcher. Uneinnocente.

Colby lui prit le dossier des mains et fourra la photo à l’intérieur. Hors de question qu’il la tienneune seconde de plus. Puis, le regard porté vers l’océan, il lui tendit la chemise, attendant qu’elle lareprenne.

Elle le fit, au bout de quelques secondes. Du coin de l’œil, il vit que sa main tremblait.— Colby, je t’en prie…— Je vais t’aider, répondit-il d’une voix quasiment imperceptible.Plus vraiment le choix à présent.Au contact de la photo, il avait eu une vision. Il avait vu le visage de la morte, avait ressenti sa

joie et son engouement. Autrement, il aurait pu dire non.Cette jeune femme avait été heureuse… son boulot l’avait emballée, de même que l’idée d’aller

faire du shopping. Elle aimait la vie. Or quelqu’un lui avait arraché son bonheur.Colby en faisait désormais une affaire personnelle. Il fallait au moins qu’il essaie de stopper ce

monstre. Celui qui avait saccagé la vie de cette innocente.

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4

Franchement, quelle mouche l’avait piqué ?Colby Mathis se tenait devant la porte d’une chambre d’hôtel. L’air frais lui balayait la peau

tandis que ses yeux s’accommodaient à la lumière vive et que sa tête lui tournait encore.La bonne blague – il était à Pasadena en compagnie de Mica Greer !Mica… qui était désormais inspecteur de police. Elle travaillait sur une sale affaire d’homicides

et avait requis son aide.Son aide.Après toutes ces années…Il pesta.— Nom de…— Tout va bien, Mathis ?Mathis. Apparemment elle avait oublié son prénom au cours des quinze dernières années. Il lui

décocha un regard noir par-dessus son épaule et poussa brusquement la porte de la chambre.— Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes, inspecteur Greer, dit-il sans prendre la

peine de masquer son agacement.Il avait fallu qu’il accepte sa requête et qu’il replonge ! Mince alors. Et s’il merdait une fois de

plus ? Cette idée le terrifiait. Et s’il commettait encore une erreur et que quelqu’un soit victime de saméprise ?

Une main se posa sur son épaule.— Qu’est-ce qui ne va pas, Colby ?— Rien, répliqua-t-il en s’écartant.Le contact de la jeune femme le déstabilisait. Il craignait qu’une connexion ne s’établisse entre

eux si jamais elle le touchait. Il n’était pas encore prêt. Il fallait d’abord qu’il se ressaisisse puis seblinde.

Pour ça, il faudrait que tu arrêtes de faire ta mauviette. Cette voix froide et désapprobatriceréussit à transpercer le brouillard qui l’enveloppait progressivement. Tu as déjà effectué ce genre demission et tu as tenu bon. Tu l’as fait seul et ça s’est bien passé. Tu es tout à fait capable derecommencer.

Il ferma les yeux tandis qu’un combat psychologique s’engageait dans sa tête. Et si jamais jemerde ?

Eh bien quelqu’un mourra. À en croire Mica, il y aura une nouvelle victime de toute façon. Tun’as rien à perdre. Au moins, si tu essaies, tu as une chance d’empêcher cette tragédie. Alors, tu asl’intention de faire ta mauviette, ou quoi ?

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Il rouvrit les yeux avec un soupir et s’aperçut qu’il se tenait sur le balcon. C’est à peine s’il serappelait être entré dans la chambre d’hôtel. Il aspira une grande goulée d’air estival et mit de côtéles doutes, les craintes et les peurs qui l’assaillaient. S’il ne faisait pas gaffe, ces derniers finiraientpar le ronger. C’était déjà plus ou moins le cas, à vrai dire. Les démons intérieurs étaient les piresdes adversaires.

Il pivota sur lui-même et sursauta. Mica se tenait à quelques pas de lui ; elle l’observait d’un airinquiet. Son regard magnifique était indéchiffrable, mais il devinait ses pensées sans problème. Ellese demandait s’il était assez bien dans sa tête en ce moment pour gérer cette affaire. Elle hésitaitsûrement à passer un coup de fil à Taylor Jones, leur ancien patron au F.B.I., histoire de s’en assurer.

Tu ferais bien, chérie.— Il faut que je voie les lieux où on a retrouvé les corps, articula-t-il nerveusement. (Concentre-

toi sur le travail – ça et rien d’autre.) J’aimerais aussi jeter un coup d’œil aux rapports d’enquête,aux preuves, bref à tout ce que tu pourras me fournir.

Mica se renfrogna.— Je verrai ce que je peux faire pour les preuves. Je vais certainement pouvoir t’en montrer

certaines…— Il me les faut toutes. (Il se dirigea brusquement vers le lit et jeta son sac sur le matelas.) Je ne

pourrai t’être d’aucun secours si je travaille à l’aveugle.Elle expira lentement.— Écoute, Mathis, je vais faire mon possible, mais ces gens n’ont pas l’habitude de travailler

avec… des personnes comme toi.Des personnes comme moi ? Cette remarque le fit sourire et désagrégea quelque peu la tension

en lui. Des personnes comme moi… c’est-à-dire ? Des voyants ? Des psychotiques ? Ou biensimplement des névrosés ? Les trois se prêtaient probablement à son cas.

Un sourire en coin, il glissa un regard à Mica.— Ils travaillent bien avec toi.Elle pinça les lèvres.— Tiens donc… commenta-t-il. Ton équipe ne sait pas, n’est-ce pas ?— Il n’y a rien à savoir.— Mais bien sûr. Et comment est-ce que tu te justifies quand tu trouves des réponses dix étapes

avant le reste de tes collègues ? Tu mets ça sur le compte de ton intuition ? Sur le fait que tu es plusintelligente qu’eux ? (Il fouilla dans son sac et en sortit un jean, des chaussettes, des caleçons et destee-shirts, puis les empila sur le lit.) Tu as dû te faire pas mal d’amis grâce à ça, ironisa-t-il.

Elle ne répondit pas ; il lui lança un regard.— Tu ne peux pas cacher qui tu es. Ce que tu fais.— Il n’y a rien à cacher, rétorqua-t-elle, des éclairs dans les yeux.— Arrête. Tu es de mauvaise foi.Il sentait que dans sa tête, c’était compliqué. Très compliqué. Les yeux plissés, il la scruta en

silence.Elle ouvrit la bouche et la referma en secouant la tête.— Je ne suis pas comme le reste d’entre vous, Colby. Mes facultés se sont amenuisées lorsque

j’ai quitté le F.B.I. Je n’ai jamais réussi à les développer autant que vous. J’avais besoin d’unpartenaire, d’un pilier. Toi tu n’as jamais eu besoin de l’aide de personne. Ce qui n’a jamais été moncas. Après mon départ, les choses se sont juste… dégradées.

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Avec un soupir, elle cala une mèche rebelle derrière son oreille et alla se placer près de lafenêtre pour contempler le parking en contrebas.

— Il n’y a rien à expliquer à personne.— Tu veux peut-être me faire croire qu’il ne t’arrive jamais de résoudre les enquêtes de manière

inexplicable ? De prendre des décisions sans pouvoir donner tes motivations au reste de ton équipe ?Sous sa fine veste, il vit son corps se raidir.— Tu le fais en cachette, devina-t-il à voix basse.Il rassembla ses vêtements et s’approcha de la commode, où il fourra le tas. Il la referma mais,

au lieu de se retourner, il resta devant le meuble, les mains appuyées dessus. Dans le miroir qui luifaisait face, il apercevait le profil de la jeune femme, tournée vers la vitre.

— Quinze ans à dissimuler ta véritable identité, Mica. Tu n’en as pas assez ?Elle lui décocha un regard noir.— Je ne me cache pas. C’est simplement que je ne suis pas capable d’exploiter mon don comme

vous autres. Je n’arrive pas à l’assumer. Je ne suis pas assez forte, Colby. Je n’ai pas les épaulesassez solides. Je m’en sers discrètement. De cette manière, je peux me montrer utile sans risquer deperdre la tête. Désolée si ça ne te plaît pas. Je ne peux pas faire mieux.

— Tu ne peux pas faire mieux, répéta-t-il d’un ton dubitatif. (Il poussa un soupir puis s’écarta dela commode et se dirigea vers la porte de la chambre.) Au moins, tu as l’honnêteté de l’admettre.Contrairement à moi.

— Colby ?Il ne se retourna pas. Il avait besoin de prendre l’air. De se dégourdir les jambes. De se vider

la tête.— Apporte-moi les rapports, inspecteur.— Nom de…Il ferma la porte. Le reste de sa réplique fut étouffé par la cloison. Il emprunta la cage d’escalier

sans un regard en arrière.

Deux heures plus tard, Mica ruminait encore le fait qu’il l’avait plantée. Plantée. En plein milieude la conversation. En exigeant qu’elle lui produise les rapports, qui plus est. Comme si c’était sifacile…

— Veillez à lui fournir tout ce dont il a besoin pour nous aider.Assise à son bureau, Mica sursauta. Elle tourna la tête vers son supérieur.— Navrée, capitaine, j’étais dans mes pensées…Cette dernière agita la main.— Vous avez fait beaucoup d’heures sup ces derniers temps. J’étais en train de vous demander

comment ça se passait avec l’agent Mathis. Faites en sorte qu’il ait tout ce dont il a besoin pourfaire… (Elle remua l’index.) Ses trucs.

— Ses trucs ? répéta Mica.Son chef lui ordonnait à présent de répondre aux moindres désirs de Colby. Décidément, le destin

se riait d’elle. Comme pour la punir de s’être prise de bec avec lui quelques heures plus tôt. Arrêted’être parano, songea-t-elle en signant les papiers officialisant l’intervention de Colby dansl’affaire.

— Je lui apporterai les documents tout à l’heure pour qu’il les contresigne.

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— Hum, marmonna Kellog en lisant les feuilles en diagonale. Demandez-lui de rester discret surl’affaire. Je n’ai pas très envie qu’on sache que j’ai demandé à un médium de nous épauler sur cetteenquête.

Mica voulut intervenir mais elle se retint. Tu ne veux pas que ça se sache ? D’accord, certainespersonnes, certaines professions prenaient la voyance au sérieux. La police n’en faisait pas partie.

Mica fut forcée d’admettre l’ironie de sa position. Voilà qu’elle reprochait à son supérieur depréférer dissimuler l’existence de Colby et son implication dans l’enquête !

Sentant un regard sur elle, elle releva la tête.Le capitaine l’observait avec attention.— Ça vous contrarie ?— Je ne vois pas pourquoi, répliqua Mica.Mieux valait ne rien dire. Autrement, elle risquerait de se faire démasquer.Kellog esquissa un petit sourire.— Je suis au courant de vos liens avec le F.B.I., vous savez, fit-elle remarquer d’un air entendu.Son expression ne fit qu’accroître l’agitation de Mica. Elle agrippa son bureau d’une main.— Il n’y a pas de liens, capitaine. J’ai brièvement entretenu l’idée d’entrer au F.B.I.— Oui… vous avez commencé la formation, etc., dit Kellog en se redressant dans son siège et en

se penchant en avant, ses yeux noirs impénétrables. Je suis au courant pour Jones, l’agent spécial encharge. J’ai… disons que j’ai moi aussi le bras long.

— Le bras long ?— Oui. (Elle remua et lissa sa jupe, qui devait correspondre à l’équivalent d’un mois de salaire

pour Mica, voire plus.) Et je ne vais pas vous mentir. Je n’étais pas ravie d’apprendre que vous étiezliée à son unité.

— Je n’ai rien à voir avec lui ou avec son unité. Et quasiment rien non plus avec le F.B.I.,rétorqua la jeune femme.

Mica n’aimait pas, mais alors pas du tout la tournure que prenait la discussion. Elle se sentait àdeux doigts de perdre son sang-froid.

— Bien sûr que si. Tout avec lui comme avec moi, vous avez un lien.— Je travaille pour vous, nuance. Je ne travaille pas pour lui, et ça n’a jamais été le cas. Si

j’avais poursuivi ma formation, oui, j’aurais travaillé pour lui.— Ça n’en reste pas moins un contact, répliqua Kellog. Et même si je comprends que ça vous

déplaise, inutile de prendre la mouche – si vous êtes ici, c’est parce que vous êtes un très bon flic. Etvous restez pour cette bonne et simple raison. Le fait que je sois prête à employer toutes les armes àma disposition vous contrarie, et je le conçois aussi. Mais ces meurtres me rongent également. Nousdevinons tous que le tueur ne s’arrêtera pas là. (Elle vrilla ses yeux sur ceux de Mica et, pendant uninstant, ni l’une ni l’autre ne parla.) Sauf que vous ne faites pas que deviner, je me trompe ?

L’espace d’une seconde, Mica se sentit mise à nue. Kellog savait. Bon sang, le capitaine savait !Sa supérieure haussa un sourcil.— Je connais bien mon équipe, Greer. J’ai conscience des atouts et des faiblesses de chacun.Mica faillit éclater d’un rire nerveux. Ce que Kellog prenait pour un « atout » chez Mica était en

réalité son plus gros défaut. Elle n’était qu’une ratée, et sa présence dans cette unité une imposture.Elle déglutit avec peine.— Où voulez-vous en venir ? demanda-t-elle finalement d’un ton calme.Ses mains transpiraient. D’un air nonchalant, elle les glissa sous le bureau et les essuya sur son

pantalon.

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— Je tiens juste à ce que vous gardiez ça en tête : je connais mon équipe. Et je veux égalementque vous sachiez que vous avez mon feu vert. Donnez à cet agent tout ce dont il a besoin pour nousaider dans cette enquête.

Kellog se leva.Son « feu vert ». Mica se sentait impuissante, inutile… Puis elle songea au sang-froid avec lequel

Colby lui avait demandé de lui fournir toutes les informations nécessaires, la facilité avec laquelleKellog était prête à les lui donner.

Alors que cette dernière parvenait à la porte, Mica l’arrêta.— Ce n’est pas un agent.Peut-être était-ce mesquin de sa part, mais tant pis.Le capitaine marqua une pause et la dévisagea d’un air méfiant.— Je vous demande pardon ?Mica haussa les épaules.— Vous êtes partie du principe qu’il était agent, mais je ne vous ai jamais dit ça. Quand j’ai

appelé Jones, il n’avait personne à m’envoyer. Toutes ses équipes étaient occupées. En revanche, ilm’a parlé d’un ex-agent qui vivait dans la région… Il n’avait rien de mieux à me proposer.

— Donc nous nous retrouvons avec un voyant qui n’exerce plus pour le compte du Bureau.Kellog tourna cette pensée dans sa tête, visiblement contrariée par cette nouvelle donnée.Mica aurait sans doute pu le lui apprendre plus tôt, du moins le lui avouer avec un peu plus

de tact.— Pourquoi n’est-il plus au service du F.B.I. ?Cette question, Mica se l’était posée de nombreuses fois. Elle haussa les épaules. À vrai dire,

elle n’en avait jamais parlé avec Colby.— Il a ses raisons. Tout ce que je sais, c’est que Jones ne me l’aurait pas recommandé s’il n’était

pas à la hauteur de la tâche.Sa réponse arracha un grognement de frustration à sa supérieure. Sans ajouter un mot, Kellog

quitta la pièce.

Ce n’était pas là qu’elle était morte.Mais c’était là qu’elle avait dansé.Dansé sous des spots chauds, des lumières vives, pour des clopinettes. Parfois, les hommes

avaient cherché à la tripoter. Mais elle avait aspiré à une autre vie. Une vie meilleure. Elle avait eude l’ambition. Elle ne s’était pas plainte de son sort. Non, au contraire, elle avait été impatiente,enjouée.

Colby se tenait devant l’immeuble. Lentement, il démêla les fils qui étaient apparus dans sonesprit afin de trouver ceux dont il avait besoin. Cela lui prit plus de temps que prévu. Il avait perdu lamain et il avait du mal à canaliser ses visions. En fin de compte, ce fut la danseuse qui devint sonancrage. Cette femme trop tôt happée par la mort. Elle l’attira à elle et lui permit de stabiliser son flotde pensées.

La tête baissée, les yeux fermés, les mains dans les poches, il demeura immobile, cherchant àassembler les pièces du puzzle apparues pêle-mêle dans son esprit. Un fatras de fils entremêlés, unemasse indistincte qu’il tâchait d’ordonner dans sa tête.

Au milieu de cet enchevêtrement, la ligne qui correspondait à la danseuse ressortait, plusbrillante que les autres. Son âme. Sa vie… et sa mort.

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Finalement, il s’y cramponna mentalement et rouvrit les yeux pour examiner le bâtiment délabré.Ses verres teintés le protégeaient des rayons aveuglants.

Il faut dire que le soleil éclatant n’arrangeait rien. Au contraire, il ne faisait qu’accentuer l’aspectsordide de l’immeuble.

Un immeuble constitué de parpaings peints en blanc. Pas exactement un taudis. Mais presque. Lavictime n’avait pas été très emballée à l’idée de travailler ici, mais ça ne l’avait pas découragée nonplus. Elle avait pour ambition de danser dans un endroit plus classe. Juste avant sa mort, elle avaitquitté ce job sans regret.

Vivante.Oui, Colby le sentait. Lorsqu’elle avait quitté cet endroit, elle était encore en vie.Pour combien de temps ?Son tueur l’avait-il rencontrée dans cette boîte de strip-tease ou bien la connaissait-il déjà ?Une fois de plus, Colby ferma les yeux et se laissa submerger par les émotions de la jeune

femme, une vague de sensations qui l’obligèrent à puiser plus profondément en lui-même.Il perçut l’écho de la musique sur laquelle elle dansait, le murmure de sa voix, celle d’une petite

fille, alors qu’elle annonçait à son patron qu’elle ne pouvait pas finir son service tard. Il ressentit sonexcitation, l’entendit se demander si elle aurait dû aller chez le coiffeur, se faire faire une manucure.

Elle se mit à marcher dans la rue et une sensation désagréable s’empara d’elle. Elle avait lesjambes lourdes et ses talons la faisaient souffrir. Mais elle préféra ignorer tout ça. Ça faisait partie duboulot. Si elle décrochait ce nouveau job, elle s’achèterait de meilleures chaussures.

Le cœur battant, Colby sentit soudain l’enthousiasme de la jeune femme diminuer. Sa joie vacillaet se volatilisa net. La peur s’épanouit en elle.

Il détestait ça, mais c’était ce dont il avait besoin pour avancer. Sa peur le guiderait. C’était lemeilleur indicateur possible.

Sans hésiter, Colby s’en saisit.Il perçut une voix grave et malveillante. À part ça, Colby n’aurait pas su la décrire. Jeune,

vieille, féminine, masculine, impossible à dire.D’instinct, son esprit voulut fuir ce sentiment de peur, y échapper, comme chaque fois, mais

Colby s’y raccrocha et tint bon.Il perdit la notion du temps. Il resta figé sur le trottoir un long moment. Quand il rouvrit les

paupières, il savait dans quelle direction aller, vers où porter ses pas, bravant la chaleur accablantedu soleil texan. Il se mit en marche et fit glisser son sac à dos de ses épaules pour en sortir unebouteille d’eau.

Son instinct l’orienta vers l’ouest. Il effectua un trajet sinueux, monta et descendit rues et ruelles,s’engouffrant dans des impasses pour en ressortir ensuite. Ce qui aurait pu prendre quelques minutesen voiture lui demanda des heures. Il suivit la ligne invisible qui se déployait progressivement devantlui, lui indiquant le chemin effectué par la danseuse.

Au gré de ses pas, le bourdonnement dans sa tête augmenta.Quand il s’arrêta, le ronronnement s’était mué en un cri.Il se retrouva devant un entrepôt désaffecté en ruine, un bâtiment occupant tout un pâté de maisons

et dont la moitié des fenêtres étaient cassées. Çà et là, les murs étaient barbouillés de graffitis. Vu lequartier, rien de très étonnant. Ce n’était pas un coin prisé. Certaines fenêtres étaient barricadées.D’autres non, et ces trous béants, semblables à des yeux, semblaient le dévisager.

L’endroit empestait la mort.C’était ici. C’était ici qu’elle avait succombé.

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La danseuse s’en était allée en silence, asphyxiée, ses cris étouffés. Elle s’était éteinte dans lasouffrance et la terreur.

Colby ferma les yeux et s’efforça de passer outre à ces hurlements pour trouver un indicesusceptible de l’aiguiller. Il demeura immobile, les poumons endoloris, la gorge en feu, revivant ledécès de la jeune femme.

La douleur irradiait, se diffusant à travers lui, générée par la multitude de coupures superficiellesdont le corps de la victime était couvert.

Il perçut le frottement d’une serviette – celle dont le tueur s’était servi pour absorber le sang –,l’étincelle de folie dans ses yeux tandis qu’il se penchait au-dessus de sa victime.

Regarde-le plus attentivement, songea Colby. Il fallait qu’il ait un meilleur aperçu de l’homme.Qu’il voie son visage.

Mais la seule partie qu’il distingua clairement, ce fut ses yeux. Ceux d’un homme qui se savaitfou… mais qui s’en fichait.

Dan sa tête, Colby entendit une voix. Une voix masculine.Il chantait.« Would you dance… if I asked you to dance… »

— Il y a quelqu’un qui reste planté devant l’entrepôt.Mica, qui était en train de fourrer les dossiers dans sa sacoche, leva la tête et posa les yeux sur

son coéquipier.— Hein ? Où ça ?— Devant l’entrepôt où on a retrouvé le corps de la dernière victime. Une patrouille qui passait

par là l’a aperçu. Il est planté devant le bâtiment.Phillips lui tendit son téléphone où s’affichait une photo.Mais avant même de la regarder, elle sut. Elle jura en son for intérieur. OK, capitaine, comment

fait-on pour rester discret maintenant ?Elle examina l’image d’un air impassible.— Ne t’en fais pas. C’est un ami à moi. Je lui ai demandé son avis sur l’affaire.— Le capitaine est au courant ? demanda Phillips en lui coulant un regard méfiant.— Je lui ai dit que j’allais explorer différentes pistes.— Sans même m’en informer ?Il fit un pas vers elle, le regard haineux.C’était un jour comme les autres. Phillips en voulait au monde entier. Et surtout à elle. Mais elle

ne se laissa pas démonter.— Pour le moment, il n’y a rien à dire, Phillips. On tâtonne. C’est sans doute une impasse. Il n’a

actuellement rien trouvé, et je ne sais pas si son intervention sera utile.Menteuse.Son coéquipier se rapprocha, envahissant son espace personnel.— Ce n’est pas comme ça que ça marche, putain ! Pas de cachotteries entre nous, OK ?— Tu préférerais que je te laisse mener l’enquête, Phillips ? dit-elle d’une voix blanche.Non, il ne voulait pas ça. Ce n’était pas dans son intérêt. Il se rapprocha encore et vrilla ses yeux

dans les siens.— Qu’est-ce qui se passe, Greer ? Tu me dissimules de plus en plus de choses en ce moment, et

ça me rend dingue.

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Un vague sourire sur les lèvres, elle s’écarta de lui pour rétablir une certaine distance entre eux.Une fois cette fichue affaire bouclée, elle irait en toucher un mot au capitaine. Et si ça ne suffisait pas,elle demanderait sa propre mutation. Quand on l’avait mise en équipe avec Phillips, ça ne l’avait pasemballée. Tous les autres membres de la brigade avaient refusé de l’avoir pour coéquipier, et si Micaexprimait à son tour sa désapprobation, le capitaine ne saurait plus quoi faire de Phillips.

Mica s’en fichait. C’était vraiment le cadet de ses soucis.— Tu vas me répondre, Greer ?! Qu’est-ce qui se passe, bon sang ?— Pour l’instant, rien. L’intervention de cet homme ne va probablement rien donner, mentit-elle

mal. Le cas échéant, je te le ferai savoir. Mais pour le moment, inutile qu’on perde notre temps tousles deux.

Phillips n’était pas dupe. C’était écrit sur son visage.Mais là encore, elle n’en avait cure. Farfouillant parmi les dossiers, elle sortit celui qui devait

être leur priorité du lendemain.— Tu n’as qu’à retourner sur le lieu de travail de la dernière victime et interroger ses collègues

pour savoir si elle a parlé à qui que ce soit le jour de sa mort. Il y a bien quelqu’un qui sait quelquechose.

Il lui prit le dossier des mains mais demeura là pendant quelques instants, tapotant le rapportcontre sa jambe tout en la scrutant d’un air méfiant.

— On est censés travailler en équipe. Faire les choses ensemble. Pas chacun de son côté.— Sauf quand c’est la meilleure stratégie à adopter, répliqua-t-elle sans se départir de son

calme.Elle le contourna, passant sa sacoche en bandoulière. Elle n’avait pas de temps à perdre avec de

telles futilités. En outre, elle n’était pas prête à parler des « facultés » de Colby avec un connard depremière – ce qui risquait aussi de compromettre leur affaire.

Elle imaginait déjà les gros titres le lendemain si jamais elle se livrait à Phillips : « Un prétendumédium embauché par la police pour tenter de mettre la main sur le Chirurgien. »

Si jamais l’information était divulguée, ce serait le merdier. Sans oublier la manière dont pourraitréagir le serial killer.

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5

« Would you dance… if I asked you to dance… »« If I asked you to dance… »« Dance… »« Dance… »Des lumières vives, la danseuse se pavanant à travers la scène. Ces images tourbillonnaient dans

son esprit, encore et encore.« Would you dance… »Ces paroles hantaient Colby inlassablement.« Would you cry… »Il vit la première victime. Attachée, couverte de sang et de bleus, la bouche grande ouverte sans

qu’aucun son n’en sorte ; une langue coupée, ensanglantée.Elle ne pouvait plus crier.La deuxième victime s’était battue, et elle avait hurlé à pleins poumons. Les accords saccadés et

discordants de la chanson résonnèrent de nouveau dans sa tête sans qu’il réussît à établir un vrai lienentre les différents meurtres.

La première victime – il lui avait coupé la langue.La deuxième – il lui avait pris ses mains.De quoi étaient-elles mortes ? Il se demandait… Était-ce le choc ou bien l’hémorragie qui les

avait tuées ? Elles étaient encore vivantes quand il les avait torturées.« Would you dance… »— Colby.La voix de Mica le fit sursauter, interrompant le fil de ses pensées. Il accueillit ce répit avec

soulagement ; elle le tirait du bain de sang et de désespoir dans lequel il était plongé. Lentement, il seretourna et la contempla tandis qu’elle traversait à grands pas le parking, les talons usés de ses bootscrissant sur le gravier, les brisures de verre et les mégots de cigarette.

Sans un mot, il reporta son attention sur l’entrepôt.La mélodie de la chanson continuait de résonner dans sa tête.Parvenue à sa hauteur, elle s’arrêta. Malgré la chaleur, elle portait une petite veste légère pour

dissimuler l’arme à son buste. La brise titillait l’extrémité de ses cheveux noir de jais ; il songea àl’époque où il pouvait lui aussi jouer avec sa chevelure.

Une époque révolue.Cela faisait une éternité qu’il ne l’avait pas touchée.Quel gâchis.

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S’il avait pu, il…— Qu’est-ce que tu fais ici ? s’enquit Mica.Son fantasme s’évanouit avant même de s’être vraiment formé.Dommage. Il se serait volontiers perdu quelques instants dans un rêve voluptueux, histoire

d’oublier les images cauchemardesques qui l’avaient assailli un peu plus tôt.— C’est ici qu’elle est morte, dit-il simplement sans se donner la peine de développer.Mica était-elle vraiment surprise de le trouver là ? Probablement pas.La danseuse avait perdu la vie dans cet entrepôt désaffecté. C’était donc à ce lieu que son esprit

se raccrocherait le plus longtemps. Peut-être qu’elle était déjà partie. Toutefois, ses émotionss’attarderaient ici, et c’était exactement ce dont il avait besoin pour approfondir ses visions.

— J’aurais dû me douter que tu allais retrouver cet endroit, commenta Mica d’une voix presqueimperceptible.

Du coin de l’œil, il vit qu’elle l’observait.Il s’attendait à la question suivante :— Tu as trouvé quelque chose ?Colby ferma les yeux, laissant son esprit dériver une fois encore vers la voix hypnotique, le chant

discordant.— Il leur chante une chanson.Mica se crispa.— Comment ça ?— Je n’en sais pas davantage.Il lui glissa un regard et la vit grimacer ; elle réfléchissait.— Quelle chanson ? demanda-t-elle.— Comme je viens de te le dire, je n’ai pas encore tous les morceaux du puzzle. Rien qu’un vers

par-ci par-là, et franchement, je ne suis pas très calé en musique pop. Ne t’en fais pas, je vais finirpar trouver.

— Chante-la-moi.Colby la dévisagea sans répondre.Agacée, elle se détourna et se mit à faire les cent pas.— Il leur chante la sérénade, ou quoi ?Il l’observa en silence. S’il l’avait voulu, il aurait pu abaisser ses barrières psychologiques et

écouter ses pensées ; il percevait vaguement leur murmure.Au bout d’un moment, Mica secoua la tête.— Non, ça ne colle pas.— Il ne leur chante pas la sérénade. Pas exactement, dit-il en reportant son attention sur le

bâtiment.« Would you dance… » Il chassa cette mélodie de son esprit, tâchant de se concentrer sur

l’instant présent, sur Mica. Il avait plus de mal à faire le vide qu’avant. C’était difficile pour lui de lefaire seul, sans le soutien d’un confrère. L’obscurité menaçait de l’avaler.

— Ce n’est pas une sérénade, et il ne cherche pas à séduire. Il ne désire pas ces femmes.Colby ferma les paupières, essayant de s’accorder une fois de plus à la chanson, sans pour autant

qu’elle l’envahisse complètement. Elle résonnait dans sa tête mais diminuait progressivement. Ildevait plonger davantage en lui-même… Avec un soupir, il se tourna face à Mica. Elle étaitsuspendue à ses lèvres, dans l’attente de plus de renseignements.

— C’est tout. Je n’ai rien trouvé d’autre.

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La déception se peignit sur ses traits.— C’est tout ? répéta-t-elle, son regard naviguant de l’entrepôt à lui. Comment ça, c’est tout ? Il

faut que j’en sache plus. Tu connais le titre de la chanson ?— Non. Rien qu’un vers ou deux, répliqua Colby en se mettant à marcher. Il suffit que je fasse

une petite recherche sur Internet.Il s’arrêta quelques pas plus loin pour réfléchir. D’où venait-il ? C’était son instinct qui l’avait

mené jusqu’à cet endroit, mais ce n’était certainement pas grâce à lui qu’il retrouverait le chemin del’hôtel. Or il devait y retourner, et vite. La connexion rompue, il se sentait très fébrile.

— Bon sang, Colby. Tu m’écoutes ?Il jeta un coup d’œil par-dessus son épaule. Mica fonçait vers lui.Il passa sa main sur sa bouche ; une migraine terrible lui martelait le crâne.— Non, désolé. Ce n’était pas intentionnel.Hôtel. Nourriture. Lit. Un pied après l’autre. Cinq pas. Dix pas. Le ronron dans sa tête

s’intensifia. Il eut bientôt le tournis. OK. Nouveau plan : nourriture. Taxi. Hôtel. Puis lit. Lebourdonnement dans sa tête se mua en une cacophonie assourdissante ; le soleil d’été le frappa avecune nouvelle force, et il déglutit avec peine, sentant son estomac gargouiller. Il n’avait bu que del’eau.

Pourtant, il avait l’impression d’être sur le point de vomir…Mica lui agrippa le bras.— Mince, ça te secoue toujours autant qu’avant ?— Ne t’en fais pas, répondit-il brutalement en s’écartant.Non, ça ne le secouait pas « toujours autant qu’avant ». Quand il n’employait pas son don, tout

allait bien. Lorsqu’il avait un partenaire, un ancrage, aussi. Mais tout seul, c’était compliqué. En plus,il manquait de pratique. Faute d’entraînement, son pouvoir devenait plus difficile à maîtriser.

Il dégagea son bras et se remit à marcher, fourrant son téléphone dans sa poche. À quelquescentaines de mètres devant lui, il distinguait vaguement le sigle familier de McDonald. Le taxipourrait le cueillir là. Mais où était-il au juste ?

— Colby, si tu me plantes encore une fois, je te jure que je t’éclate la tête.Mica se campa devant lui pour lui bloquer le passage. Un mètre soixante-dix-neuf, des éclairs

dans les yeux. Il glissa la main dans ses cheveux et détourna le regard.— Putain, qu’est-ce que tu me veux à la fin, Mica ?— Arrête-toi. Pas question que tu retournes maintenant à l’hôtel. Il faut que tu manges quelque

chose sinon tu vas faire un malaise.Elle lui tendit la main.Il la jaugea d’un air méfiant.— Tu veux me taper sur les doigts ?— Non. Je vais veiller à ce que tu te remplisses l’estomac. Ensuite je te mettrai au lit.Seul ! précisa-t-elle dans sa tête. Seul. Même si elle se serait bien allongée à côté de lui. Et la

manière alanguie dont il la contemplait n’arrangeait rien. Elle ne put s’empêcher de penser àl’époque où il la couvait de ce même regard après des heures et des heures de sexe.

Après toutes ces années, ce souvenir aurait pourtant dû s’estomper.Bon sang, le moment était vraiment mal choisi pour songer à ça. Pas maintenant. Stupide, stupide,

stupide…Les effets secondaires des visions n’étaient pas nouveaux. À l’époque déjà, Colby réagissait

violemment à ses états de conscience modifiée. Avant qu’ils ne commencent à collaborer, à unir leurs

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pouvoirs.Mais elle avait cru qu’avec le temps il avait appris à contrôler l’impact de ces songes. Car s’il

en souffrait toujours et qu’il persévérait pourtant, cela ne faisait-il pas d’elle une trouillarde ?Pas maintenant, songea-t-elle. Elle contempla son regard bleu, sa tignasse châtain striée de

mèches blondes qui lui cachait en partie le visage, et les lèvres qu’elle mourait d’envie d’embrasser.Une voiture les dépassa, le moteur vrombissant, les baffles crachant de la musique, brisant le

charme du moment. Mica se força à détourner les yeux et déglutit avec difficulté.— Allons. Il faut que tu manges quelque chose. Tu ne vas pas marcher jusqu’à l’hôtel. C’est à

trois kilomètres d’ici et je ne pense pas que tu sois en état.

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6

Mica avait cru qu’un repas permettrait d’apaiser un peu la tension. Bon, elle n’en avait pas missa main à couper non plus. Toujours est-il qu’elle s’était trompée ; il y avait encore trop de non-ditsentre eux, trop de sentiment d’inachevé. Sans doute ne fallait-il pas remuer le passé.

Un seul moment d’égarement, et elle replongerait. Elle lui confierait tout ce qu’elle avait sur lecœur ; puis, une chose en entraînant une autre, elle voudrait le toucher. Lui faire l’amour. Resterallongée dans ses bras et l’écouter respirer pendant qu’il jouerait avec sa chevelure. Elle aurait enviede rire et de bavarder avec lui… d’être avec lui tout simplement.

Non, mieux valait laisser le passé derrière soi. Et ça n’allait pas être facile vu qu’ils allaientpasser du temps ensemble sur cette affaire.

Quinze ans plus tôt, elle avait fui. Et depuis, pas un seul jour ne s’était passé sans qu’elle regrettesa décision. Avait-elle commis une erreur en écoutant ce qu’elle pensait être la voix de la raison ?

Aujourd’hui, elle était perdue. Une chose était sûre : elle ne voulait pas le quitter comme ça,aussi brusquement que la dernière fois.

Ils se dirigeaient à présent vers l’hôtel. Elle n’avait aucune excuse pour l’accompagner. À moinsqu’elle ne prétexte le besoin de lui remettre les dossiers qu’elle avait dans sa sacoche. Cela dit, elleaurait pu les lui donner dehors. Ici même.

Non. Colby les avait déjà parcourus, et il avait besoin de se reposer un peu avant de se remettreau travail. Il était exténué, elle le voyait dans ses yeux.

Il fallait qu’elle l’oblige à faire une pause, autrement il continuerait sans relâche et s’épuiserait àla tâche.

J’aurais pu attendre jusqu’à demain…Mais ils n’avaient pas une minute à perdre. Il fallait qu’il dorme un peu, oui, mais pas trop

longtemps non plus. Le temps pressait.Tu refuses de partir. S’il s’était agi d’un autre, tu l’aurais laissé dormir ; ensuite tu lui aurais

passé un coup de fil. Alors, soit tu es sincère avec toi-même… soit tu rentres chez toi et tul’appelles dans six heures. La voix de la raison fut bientôt remplacée par celle de la tentation. Avoueque tu ne veux pas t’en aller, dit-elle, sournoise, presque enjouée. Tu as trop envie de lui. Allez,fais-le.

Faire quoi ?Se le faire… lui ?Qu’elle soit sincère avec elle-même ? Oui, elle le désirait. La question ne s’était jamais posée.Perdue dans ses pensées, elle buta brusquement contre le dos de Colby, qui s’était arrêté devant

la porte. Il la dévisagea. Elle bafouilla quelques mots d’excuse sans oser le regarder. Son souffle se

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suspendit et elle faillit fondre sur place.— C’est bon, maman ? la taquina-t-il. Tu as veillé à ce que je rentre à la maison à une heure

convenable. Maintenant, tu peux partir sereine, dit-il avec un sourire sardonique.Mica lui décocha un regard irrité.— Oh, la ferme, grommela-t-elle.Elle s’en voulut aussitôt de réagir comme ça. Elle devait vraiment passer pour une garce. Colby,

pour sa part, avait l’air complètement détaché. C’était trop injuste. Zut, et s’il était vraimentindifférent ? Arrête. Ce n’est pas le moment. Arrête tout de suite, se gronda-t-elle. Elle enfila sasacoche à l’épaule et l’interrogea du regard.

— Tu comptes m’inviter à entrer ?— Pourquoi ?Je ne sais pas – bon, elle ne pouvait pas répondre ça. Du coup, elle se servit de l’excuse qui se

trouvait dans son sac : les dossiers. C’était également un excellent prétexte pour détourner le regardde ses yeux bleus envoûtants. Qu’il aille au diable ! Comment se faisait-il qu’il lui fasse toujoursautant d’effet après toutes ces années ? Et pourquoi demeurait-il de marbre, lui ? Avait-il tourné lapage ? Était-il passé à autre chose ?

Bon sang, ça fait quinze ans, Mica… Elle avala la boule qui s’était formée dans sa gorge ets’éclaircit la voix, s’efforçant de se ressaisir. Elle avait une mission à accomplir, non ? Sauf qu’elleavait l’esprit occupé ailleurs. Une question cruciale la dévorait : Colby avait-il tourné la page ?

Elle fouilla dans sa sacoche et brandit une liasse de papiers.— Tu m’as demandé des infos. Je te les ai apportées.— Donne, répondit-il en tendant la main.— Bien sûr. Une fois que tu m’auras laissée entrer. Il y a certains détails de l’affaire qui ne sont

pas consignés dans les rapports.Des détails dont je n’ai sans doute pas besoin pour l’instant, songea Colby. Il aurait pu le lui

faire remarquer. Pourtant il n’en fit rien. L’occasion de se retrouver en tête à tête avec Mica Greer seprésentait. Pas question de la rater.

S’il était là, ce n’était pas seulement pour les besoins de l’enquête ; il aurait très bien putravailler sur cette affaire depuis chez lui. Du moment qu’elle lui remettait une pièce à conviction,une preuve, n’importe quoi. C’était tout ce dont il avait besoin pour avancer.

Avant de démissionner du F.B.I., il avait travaillé sur quelques affaires à distance, depuis parfoisl’autre bout du pays. Cette fois-ci, il n’était qu’à une heure de route.

Mais il avait voulu retrouver Mica et profiter de sa compagnie. Il avait besoin d’elle comme on abesoin d’air pour respirer. S’il était là aujourd’hui, c’est parce qu’il avait été incapable de lui direnon.

Car, dans le fond, il l’aimait encore.La bonne blague ! Et elle qui restait plantée devant lui, à le scruter, les joues roses, le regard

brûlant de désir. Mais à quoi bon céder ? Ils allaient devoir se dire adieu une fois de plus.Car Mica s’en irait. Elle partirait puisqu’ils ne pouvaient pas être tels qu’elle le souhaitait. Pas

ensemble. Bon sang ! Jurant dans sa barbe, il pivota vers la porte. Il sortit la carte de sa poche et,d’un geste sec, la glissa dans la serrure. Puis il poussa brutalement la porte mais elle était si lourdequ’elle s’ouvrit sans un bruit.

Il n’avait pas besoin de ça.Ce n’était pas la peine qu’il examine ces rapports de police. Pas tant qu’il ne s’était pas reposé.

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Il ne fallait pas qu’il se retrouve dans la même pièce que Mica, pas après toutes ces années, alorsqu’il avait encore envie d’elle. Qu’il l’aimait toujours.

Il n’avait pas besoin d’elle… Non, c’était faux. Le problème, c’est justement que c’était bien lecas. Mais s’il avait un brin de jugeote, il garderait ses distances. Car Mica allait finir par le faire denouveau souffrir. Elle n’assumait pas sa différence, préférant vivre cachée. Et à supposer que Colbydécide de ne plus employer son don, il n’avait pas l’intention de nier celui qu’il était pour autant.Impossible pour lui de vivre comme elle. Il ne croyait pas au mensonge.

Pourtant, il s’écarta pour la laisser entrer. À son passage, il inhala son parfum. Et son corps semit aussitôt en alerte rouge.

Elle pénétra avec nonchalance dans la chambre d’hôtel peu éclairée. Il fourra les mains dans lespoches avant de son jean et la regarda fixement.

— Vas-y. Je t’écoute.— Pardon ? s’étonna-t-elle en se tournant vers lui. Comme ça ?— Oui.Avant que je te saute dessus.Mica contourna le lit et alla s’installer sur le canapé ; elle posa son sac à côté d’elle. Il croisa

son regard et il y vit briller la flamme du désir un bref instant avant qu’elle ne baisse les yeux. Quandelle releva la tête, son expression était redevenue impassible. Mais cette étincelle avait suffi à lerendre dingue.

Plus encore qu’il ne l’était déjà.Il se racla la gorge et se dirigea vers le bureau, où le personnel de l’hôtel avait laissé une

bouteille d’eau minérale. Cela lui coûterait une poignée de dollars – enfin ce serait à la charge de lapolice locale de régler sa note, mais il avait une soif de pendu.

— Qu’est-ce que tu veux me dire au juste, Mica ?— Il faut que tu te reposes.— Tu es entrée de force ici pour me dire ça ? répliqua-t-il en jetant un coup d’œil par-dessus son

épaule. Ce n’était pas la peine.Elle se frotta le visage en poussant un soupir las.— Tu ne pourras pas donner ton maximum si tu es crevé. Or j’ai besoin que tu aies l’esprit clair.— Ne t’en fais pas pour ça.D’accord, il n’était pas au top de la forme, mais il ferait son possible pour l’aider. Il dévissa le

bouchon de la bouteille et prit une longue gorgée d’eau puis il l’observa, flapi.— Maintenant que tu as mis les points sur les i, tu vas pouvoir me donner les infos, puis t’en

aller.Elle ferma les paupières.— Quelle mouche t’a piqué ?— Comme tu l’as souligné, j’ai besoin de repos. Je suis crevé, Mica.Fatigué. Excité. Je suis en train de péter les plombs et c’est encore pire quand je te regarde…

Comment quinze années avaient-elles pu passer sans que rien ne change ? C’était exactement commeavant – le temps semblait s’être mis sur pause depuis leur dernière entrevue.

Mais il ne pouvait pas le lui dire.— Je suis rincé, poursuivit-il avec un sourire froid. Et ça ne va pas aller en s’arrangeant tant

qu’on n’aura pas clos cette affaire. J’aimerais dormir avant de me plonger dedans.Effectivement, les épaules voûtées, la voix tendue, il avait l’air à bout.

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Elle aurait dû s’en aller et le laisser tranquille. Mais elle ne put s’empêcher d’émettre uncommentaire :

— Tu sais, je n’ai pas réussi à grappiller plus de quelques heures de sommeil par nuit depuis ledébut de cette affaire. Et ça fait des semaines que je suis dessus – en plus des autres dossiers encours. Tu as pris l’habitude de prendre une pause pour faire ta sieste au F.B.I. ?

Il la fusilla du regard.— Oh que oui. Une vraie partie de plaisir. On s’amuse comme des fous. C’est peut-être pour ça

que tu as déguerpi.— Je n’avais pas ma place là-bas.— Tu ne voulais pas la trouver, rectifia-t-il. Et tu sais quoi ? Ce n’est pas un problème. Je n’y

suis plus pour la même raison que toi. Je ne me sentais pas à ma place. Alors qu’est-ce que tu veuxmaintenant ? s’écria-t-il d’un air menaçant en s’avançant vers le canapé.

Elle se leva d’un bond en le foudroyant à son tour du regard.— Nous avons une affaire à élucider – trois meurtres et potentiellement un quatrième à venir. Et

toi tu te plains d’être fatigué ?Bon sang, tais-toi ! se dit-elle. Il ne se lamentait pas. Il avait juste besoin d’un peu de sommeil…

et il voulait qu’elle s’en aille.C’était surtout ça qui la dérangeait. Elle se sentait rejetée. Et ça la blessait. Ça la piquait au vif.

Peut-être la désirait-il encore, même si elle ne pouvait pas en être sûre à cent pour cent. En tout cas,il ne la désirait pas suffisamment.

Un frisson remonta le long de sa nuque ; elle contourna Colby et attrapa sa sacoche.— Je ne sais pas ce qui m’a pris, mentit-elle. (Pourvu qu’elle ne se laisse pas déborder par ses

émotions. Il ne fallait surtout pas qu’il entrevoie ses pensées.) Tu as raison. Nous allons devoirtravailler nuit et jour pour boucler cette affaire. D’ici là, tu vas avoir beaucoup de pression.

Elle glissa sa main tremblante dans sa chevelure et souleva sa sacoche. Elle fouilla dedans et ensortit le dossier qu’elle déposa sur le petit bureau.

— Du coup, tu devrais effectivement te reposer. Je te laisse ça. Parcours-le quand bon tesemblera. Je… je t’appellerai dans quelques heures. Tu n’as qu’à dormir et quand tu y auras jeté unœil…

Elle laissa sa phrase en suspens tout en se dirigeant vers la sortie. Il fallait qu’elle sorte. Qu’ellequitte cette pièce.

Elle avait presque atteint la porte.Mais elle commit l’erreur de se retourner une dernière fois.Et elle croisa le regard sombre de Colby. Il l’avait suivie et se tenait juste derrière elle. Il la

dévisageait. Il posa la main sur sa joue et l’effleura. Sa caresse se propagea à travers son corps, telleune onde de choc. Il allait s’écarter quand elle le retint par le poignet.

Très mauvaise idée, songea-t-elle.Colby restait immobile ; elle fit un pas vers lui.Il avait les yeux baissés, cachés sous ses cils.— Mica.Elle posa ses lèvres sur son menton et les glissa le long de sa mâchoire.— Oui ?— On ne devrait pas.— Non. Tu as raison. (Elle engouffra la main dans ses cheveux et les souvenirs l’assaillirent.) Je

m’en fiche pas mal. (Elle renversa la tête en arrière et plongea son regard dans le sien.) Pas toi ?

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— C’est une mauvaise idée, dit-il en fermant les paupières. Je le regretterai peut-être… après.Sur ces mots, il écrasa sa bouche sur la sienne. On verra plus tard, songea-t-elle alors. Ce fut la

dernière pensée sensée qui lui traversa l’esprit.Il plaça les mains autour de sa taille et une bouffée de chaleur monta en elle. Il la fit reculer

contre le mur et pressa contre elle son corps ferme et musculeux. Mince, trop mince, mais elle s’enfichait. Elle lui caressa les épaules et les bras et en mémorisa les moindres lignes, s’imprégnant denouveau du contact de sa peau.

Entre ses cuisses, elle sentit son érection. Dans un gémissement, elle ondula contre lui. Il remontales mains le long de son buste, écarta les pans de sa veste et fit couler le vêtement sur ses épaules. Unfrisson la parcourut. Elle se rappela qu’elle portait encore son arme, à son flanc gauche, et poussa ungrognement. Elle lâcha Colby pour détacher son holster. Il l’arrêta en plein geste et pressa ses lèvrescontre son cou.

Des étincelles envahirent sa vision, et son cerveau se mit à bouillonner ; ses neurones cédèrent unà un.

Mica expira entre ses dents et bascula la tête contre le mur. Elle abandonna l’idée d’ôter sonholster, glissa la main dans ses cheveux et l’attira contre elle.

Colby n’était pas du même avis. Il tritura le cuir du harnais en marmonnant :— Je préférerais que tu retires cette chose.Il lui mordilla l’oreille sans cesser de trifouiller les sangles de son holster. Mica lâcha un petit

gémissement et se colla contre lui, maudissant tout ce qui les séparait… Les habits. Les années. Ladistance…

Une distance que tu as choisie, chuchota une petite voix sournoise dans sa tête.Résolue à faire le vide dans sa tête et à se concentrer sur le moment présent, elle s’appuya contre

le mur et l’observa sous ses cils.— Si tu veux que je l’enlève, il va falloir que tu t’écartes un instant.— Je n’aime pas trop cette idée.Il avait glissé sa main sous son chemisier, et le contact de ses mains rugueuses sur sa peau la fit

vaciller. Ses jambes faillirent se dérober sous elle.— Ça fait trop longtemps déjà que je ne t’ai pas touchée. Et maintenant tu veux que j’arrête ?— Ça ne me plaît pas trop non plus. Mais si tu continues, je n’arriverai pas à me concentrer.

(Elle enfouit son visage au creux de son cou et inhala son odeur.) Et si je ne me concentre pas, je nepourrai retirer ni mon harnais ni le reste.

— Hum. Dans ce cas…Aussitôt dit, aussitôt fait. Il lui ôta le holster d’un geste expert. Elle tremblait comme une feuille.

Il recula et, prise de tournis, elle faillit perdre l’équilibre.— Hé ! protesta-t-elle.— Du calme. (Il lui planta un baiser au creux de la gorge et alla déposer l’arme sur la table.) On

ne va pas le jeter par terre quand même.Oui, bon, elle s’en moquait. La sécurité était enclenchée. C’était fait pour ça, non ?— Reviens tout de suite.— À vos ordres, madame.Il s’approcha, un sourire canaille aux lèvres. Puis il la prit par la taille et lui retroussa le

chemisier.— On va au lit ? susurra-t-il au creux de son oreille.— Comme tu veux. Du moment que tu me touches.

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Ça faisait trop longtemps. Elle brûlait d’impatience. Son cœur battait la chamade et elle avait lesouffle court. Le désir augmentait au fil des secondes. Elle l’enlaça par le cou et chercha sa boucheavec la sienne.

— Touche-moi, Colby. C’est tout ce que je te demande.

— Touche-moi, Colby…Sa voix, douce et légèrement voilée, l’enivra. Son corps, sa manière de rougir, son regard

gourmand, son souffle saccadé… Et ses mains qui tremblaient tandis qu’elle lui caressait les épaules.Tous ces détails le rendirent fou.

— Tu m’as manqué, susurra-t-il avant de s’emparer de sa bouche.Bon sang, comme elle lui avait manqué !Au fil des années, il s’était efforcé de ne pas rester bloqué sur le passé, de ne pas trop songer à

ce qu’ils auraient pu bâtir ensemble. Mais par moments, des souvenirs d’elle s’échappaient de soninconscient et le poignardaient dans le dos, mettant son cœur en charpie, l’obligeant à repenser à laseule époque de sa vie où il s’était senti entier. Complet. La seule époque… un temps révolu car ill’avait perdue. Il avait perdu Mica.

Aujourd’hui, elle était de retour ; son corps charnel et élancé était pressé contre le sien ; elleavait la peau chaude, les lèvres douces. Il fit courir ses mains sur son ventre, glissa les doigts sous laceinture de son pantalon, sous l’élastique de sa culotte, les trempa dans la moiteur de son intimité.Chaude. Humide. Étroite. Elle se crispa autour de ses doigts tandis qu’elle ouvrait la bouche pouraccueillir sa langue. Il lui mordilla la lèvre inférieure et tira gentiment dessus.

Empressé, il déboutonna son chemisier blanc et le lui ôta. Il eut plus de mal à lui retirer sonsoutien-gorge d’une seule main, mais il n’était pas question qu’il enlève son autre main de sonintimité, surtout qu’elle s’était mise à onduler contre sa paume.

— Aide-moi.Avec un sourire, elle dégrafa son soutien-gorge puis, à son tour, elle s’attaqua à la chemise de

Colby, qu’elle arracha.— Tu portes encore trop de vêtements, souffla-t-il contre sa bouche.— Toi aussi.Il allait devoir cesser ses caresses pendant quelques secondes. Pas plus. Juste le temps de la

déshabiller.Les secondes parurent durer une éternité, le temps qu’ils se déshabillent en toute hâte. Ensuite il

put enfin la toucher, tout entière. La sentir, tout entière. Et la goûter… Il déposa une traînée de baiserssur son épaule puis s’aventura plus bas. Il s’agenouilla devant elle et appliqua les lèvres à l’intérieurde ses cuisses. Mica poussa un gémissement de plaisir et se cramponna d’une main à ses cheveux, del’autre à son épaule.

Il saisit sa cuisse et la souleva.— Colby…Il enfouit son visage au creux de ses jambes, ouvrit la bouche et se mit à laper sa chair délicate.

Elle laissa échapper un cri étranglé. Puis elle gémit en se frottant contre sa bouche.Ils étaient proches mais pas assez. Les lèvres imprégnées de son nectar, il se redressa d’un bond

et appuya son sexe à la naissance de ses cuisses.— Je t’en prie, dis-moi que tu as des préservatifs.Elle l’observa d’un air alangui.

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— Tu me prends pour qui, Colby ?Il tâcha d’interpréter sa réponse. Elle n’avait donc rien sur elle ?Mica se colla contre son torse. Perplexe, Colby s’adossa au mur, le souffle court. Il avait

tellement envie d’elle qu’il craignait de succomber au désir.Soudain, Mica se pencha sur sa sacoche qu’elle ouvrit d’un geste brusque. Il perçut le zip d’une

fermeture Éclair. Puis elle pivota face à lui, un sourire aux lèvres et une boîte à la main.— Pour une femme parée à toute éventualité, non ?Elle déchira le paquet.— On va dire ça, marmonna Colby qui préférait ne pas savoir pourquoi elle avait une boîte de

préservatifs sur elle.Elle revint auprès de lui, brandissant un sachet en aluminium.— Je les ai achetés un peu plus tôt, dit-elle comme si elle lisait dans ses pensées. Quand je te

vois, j’ai envie de toi. J’étais sûre que ça finirait par arriver si nous faisions équipe. C’étaitinéluctable.

Ses paroles le frappèrent en plein cœur. Une boule de glace se forma au creux de son ventre.« J’étais sûre que ça finirait par arriver si nous faisions équipe. C’était inéluctable… »Qu’est-ce qui était inéluctable, au juste ? Le sexe ? Ou plus ? Non, pas question de se prendre la

tête maintenant. Il préférait profiter du moment. Trop d’années s’étaient écoulées depuis leursderniers ébats. Il allait enfin la posséder. Il lui prit le préservatif des mains et déchira le sachet. Àprésent, c’est lui qui avait les mains qui tremblaient. Il déroula la capote sur son sexe palpitant. Ilavait l’impression de trembler de la tête aux pieds, et cette sensation se renforça quand il se tournavers elle.

— Viens par là, dit-il en lui prenant la main.Elle pressa son corps voluptueux contre le sien. Ses yeux d’un brun chaud se posèrent sur lui

tandis qu’il la plaquait contre le mur.— On va au lit ? demanda-t-il.Il lui mordilla la lèvre tout en lui écartant les cuisses.— Non. Je préfère rester ici.Mica enroula ses bras autour de son cou, leva le genou et le frotta contre sa cuisse. Elle l’attira

contre elle, glissa la main le long de son torse et referma la paume autour de sa verge.— Juste ici… sauf que j’aimerais que tu sois encore plus proche de moi, là.Colby fit courir la main sur son dos et se cramponna à son bassin.— Accroche-toi à moi, Mica.« Accroche-toi à moi… »Ses mots résonnèrent au fin fond de son être. Elle enroula les jambes autour de sa taille.

« Accroche-toi… » Elle ne demandait que ça. Si seulement elle l’avait fait des années plus tôt ! Uneonde de regret voulut s’insinuer en elle, mais elle la repoussa. Pas maintenant.

Lorsqu’il appuya son gland engorgé contre elle, tout le reste cessa d’exister. Elle ne songea plusqu’au sexe long et chaud qu’elle s’apprêtait à accueillir en elle. Elle se concentra sur le plaisir qu’illui prodiguait à mesure qu’il la pénétrait.

Son souffle se suspendit et ses paupières se fermèrent d’elles-mêmes.— Non, dit Colby en lui tirant doucement les cheveux. Regarde-moi.Mica se força à rouvrir les yeux et sonda son regard bleu agité. Elle aurait aimé abaisser son

bouclier mental et le laisser entrer. Afin que plus rien ne les sépare.Mais elle n’était pas encore prête à se montrer à nu.

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Pourtant, quand il effleura sa bouche des lèvres, sa détermination vacilla. Comment était-ellecensée se protéger alors qu’elle mourait d’envie qu’il la possède ?

Il s’ancra en elle jusqu’à la garde. Son sexe glissait contre sa chair. Le désir s’épanouit, cru etinfini. Mais malgré la force de leur appétit, ils étaient plein de délicatesse l’un envers l’autre. Ils’empara de sa bouche dans un baiser d’une incroyable tendresse, les yeux dans les siens.

Elle eut soudain l’impression que la pièce s’était mise à tourner – non, c’était eux. Colby s’étaitéloigné du mur et les entraînait dans la chambre, les mains cramponnées à ses hanches. Elle avait lesjambes enroulées autour de sa taille. En quelques secondes, ils se retrouvèrent sur le lit. Elle se mit àcalifourchon sur lui et prit appui sur son torse.

Leurs regards se soudèrent l’un à l’autre et elle se mit à remuer. Une plainte lui échappa tandisqu’il s’enfouissait en elle, son sexe frictionnant sa chair de manière délicieuse. Le désir se déchaînaen elle, tel un tourbillon, alors qu’elle le chevauchait. Quand, du pouce, il effleura son clitoris, ellelâcha un gémissement, la tête renversée en arrière. Il la caressa d’avant en arrière et elle explosa,incapable de se retenir plus longtemps.

Mica atteignit la jouissance dans un cri. S’effondrant sur son buste, elle le sentit se raidir etgonfler en elle. Il s’agrippa à ses hanches et augmenta la cadence de ses poussées, orientant sonbassin de manière à stimuler son point G. Elle émit de nouveau un cri quand il déclencha une autretornade en elle, son intimité se crispant autour de son sexe, ses ongles s’enfonçant dans sa peau.

— Colby, dit-elle d’une voix frémissante.Il captura ses lèvres tout en entremêlant ses doigts dans ses boucles.La tendresse avait cédé la place à l’avidité, brutale, presque désespérée… une avidité infinie.

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7

Elle s’endormit dans ses bras.Colby aurait dû fermer les yeux et tâcher de dormir un peu aussi. Mais il n’y arrivait pas.

Bizarrement, il ne s’était pas senti aussi reposé depuis des jours. Reposé… voire serein. Grâce àMica. Il la tenait de nouveau contre lui, même s’il avait conscience que c’était temporaire. L’enquêtebouclée, il retournerait chez lui et Mica reprendrait le cours de sa vie. Elle ferait comme si elleappartenait à un monde qui n’était pas le sien. Un monde où les gens étaient normaux, n’entendantaucune voix dans leur tête, ne voyant pas de fantômes, ne percevant pas le chant d’un tueur fredonnantdes paroles funèbres à ses victimes.

C’était inévitable, il le savait.Si Mica avait voulu s’accepter telle qu’elle était, elle l’aurait fait depuis longtemps. Qu’il

réapparaisse soudain dans sa vie ne changerait rien. Surtout qu’elle n’avait pas particulièrement tenuà ce qu’il resurgisse du passé.

Mais pour l’instant, ça n’avait pas d’importance. Il penserait au chagrin d’amour qui lui pendaitau nez une fois le moment venu. La réalité le rattraperait suffisamment vite.

Il le sentait déjà, ce nuage lourd et noir qui menaçait à l’horizon, présageant l’orage.Il effleura son épaule des lèvres et s’installa de manière à être plus à l’aise. Elle s’accordait

parfaitement à ses bras. Il songea à leur première rencontre. Colby avait senti sa présence avantmême de l’apercevoir, et lorsqu’il l’avait vue, son cœur s’était arrêté un bref instant. Un seul regardavait suffi. Il avait su d’emblée que c’était la bonne. La seule et l’unique. Et ils avaient tout de suitebien accroché – bon sang, ça avait collé immédiatement ! À la fois sur le plan physique et sur le planémotionnel. Jusqu’à leurs dons, qui s’étaient combinés de manière unique – renforçant leurs facultésindividuelles.

Puis un beau jour, Mica avait décidé que ce monde n’était pas fait pour elle. La puissance àlaquelle ils parvenaient en unissant leurs pouvoirs l’avait effrayée. Et au lieu d’attendre un peu pourvoir comment les choses évoluaient, elle était partie. Parce qu’il n’avait pas été capable de contenirses propres facultés. Parce qu’il en avait trop déversé en elle.

Il aurait pu choisir de changer de vie, mais il ne pouvait pas nier qui il était. Faire semblantd’être normal. C’était ce que Mica voulait – pour lui c’était impensable. Alors non, ce bref rayon debonheur ne durerait pas. En revanche, il comptait en profiter aussi longtemps que possible.

Il pressa ses lèvres au creux de sa nuque et ferma les yeux.Mica était très agitée. Elle pressentait sûrement la même noirceur que lui, peut-être pas aussi

nettement. Elle savait la menace proche et ça la mettait dans tous ses états. Il percevait son tourmentmalgré la forteresse intérieure qu’elle avait érigée.

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S’il voulait tenir le coup dans les prochains jours, il fallait qu’il dorme.

Il était rare que Colby ne fasse pas de cauchemars. En général, il ne se passait pas une nuit sansqu’il en fasse au moins un. Et ça ne rata pas. Les rêves l’assaillirent à la seconde où il sombra dansun profond sommeil.

Seulement ce n’étaient pas ses cauchemars.Ni ses cauchemars, ni ses rêves. Ni ses visions.C’étaient ceux de Mica… ses souvenirs. À travers ses yeux, il vit la victime. Pâle et mutilée, elle

gisait à terre. Un spectacle désolant. Ses jambes étaient striées de cicatrices, qui dessinaient unesorte de carte macabre sur sa peau. Il n’y avait que très peu de sang autour du corps. Avec toutes cesblessures, c’était étonnant. On aurait cru qu’elle était morte ailleurs, mais il savait que non.

Il savait qu’elle s’était éteinte ici. Il percevait même les échos lointains de ses cris… à traversles oreilles de Mica.

Et ses yeux. Il l’entendit s’entretenir avec ses collègues. L’observa se lever et ôter ses gants.S’approcher d’une fenêtre. Elle savait que c’était là. À l’attendre. Alors elle le vit… un petit cadeausordide laissé par le tueur.

Une fleur.Jolie, de couleur noire.Le rêve se modifia, et il ne vit plus que la fleur en gros plan. Ses poumons le brûlèrent ; il

manquait d’air. Il fallait qu’il respire, qu’il bouge, mais il était tétanisé.Dans le rêve, quelque chose vola en éclats. Se transforma. Et quand il se reconstitua, il aperçut

un océan de fleurs noires, ondoyant sous la brise. Il perçut la voix étouffée d’un homme qui chantait.Et la musique atroce des hurlements d’une femme à l’agonie.

Les sons se mêlèrent ; ils passèrent et repassèrent en boucle dans sa tête, lui filant le tournis,jouant avec lui, l’attirant puis le rejetant à tour de rôle. L’obscurité le cernait, se rapprochait,l’enveloppait, menaçant de l’avaler. Une bouffée d’adrénaline le saisit et il s’arracha au rêve, à lavision.

Étendu sur le lit, le souffle saccadé, Colby cligna les yeux.Ces cris. Ils résonnaient encore dans sa tête, comme de lointains échos.Étaient-ce ceux de la femme qui venait de mourir ?Non. Dans ses tripes, il connaissait la réponse.C’était ceux de la suivante.Le tueur avait déjà choisi sa prochaine victime.Le rêve s’estompa. Il s’y raccrocha, s’efforçant de l’imprimer dans son esprit. Un rêve, oui, mais

tellement plus, et il fallait qu’il s’en souvienne.À son côté, Mica remua. Un faible gémissement lui échappa.Colby se souleva sur un coude et l’observa. Elle glissa la main sur son estomac et la posa d’un

geste protecteur sur le bas de son ventre. Un grognement et un petit cri, suivis d’un hurlementétranglé. Apparemment, il n’était pas le seul à être en proie aux cauchemars, ce soir.

Il se concentra.Ça ne le réjouissait pas vraiment d’envahir le rêve de Mica, mais…Son instinct lui dictait de le faire.Un murmure menaçant lui parvenait. La jeune femme possédait des informations importantes. Il

fallait qu’il sache… Désolée Mica, songea-t-il en posant la main sur son bras. Il se raidit aussitôt,

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assailli par les images qui déferlaient dans l’esprit de la jeune femme.La douleur. Ce fut la première sensation qui le frappa. Horrible, très graphique, elle lui tordit les

boyaux.

À la seconde où elle se réveilla, Mica sut qu’il y avait un truc qui clochait.La tension dans l’air était palpable, voire oppressante. La chambre était plongée dans le noir.Une boule dans la gorge, elle se redressa, serrant la couverture contre son buste tout en fouillant

la pièce du regard, à la recherche de Colby. La silhouette sombre près de la fenêtre la fit sursauter. Ilétait là.

Elle sentit que quelque chose le tracassait.Tout allait si mal en ce moment… Ses mains se mirent à transpirer.Une bouffée de colère la frappa de plein fouet, la faisant frémir. Comment se faisait-il qu’elle

ressente les émotions de Colby ?Mince.Elle avait baissé sa garde pendant son sommeil. Elle se concentra, érigea ses barrières mentales

et se faufila hors du lit. Et zut ! Les rêves étranges et chaotiques qui l’avaient tourmentée pendant lanuit resurgirent dans sa tête, et une bouffée de panique la saisit à la gorge. Depuis le début del’affaire, elle n’avait pas réussi à interpréter ses cauchemars. C’était surtout son instinct qui l’avaitguidée dans son enquête ; les rêves y étaient liés mais ils demeuraient encore une énigme à ses yeux.

Or quelque chose lui disait que Colby avait réussi à les décrypter.Bon sang.— Il veut te tuer.Il veut te tuer…Elle ferma les yeux, s’imprégnant de ces paroles. À vrai dire, elle s’en était doutée. Ses rêves

étaient empreints de malveillance, une malveillance qui n’était pas seulement dirigée contre lesvictimes du tueur. Il y avait eu quelque chose de… plus sombre, qu’elle n’avait pas su déchiffrer.

Les mains tremblantes, elle noua un drap autour de son buste.— Peut-être qu’il ne souhaite pas ma mort. (Elle avala la boule qu’elle avait dans la gorge et,

levant la tête, elle croisa son regard dans la pièce sombre.) Peut-être que c’est parce que je meretrouve en travers de son chemin.

Elle haussa les épaules et parvint même à se composer un sourire. Un sourire crédible, songea-t-elle. En réalité, elle avait du mal à se convaincre elle-même.

— Parce que tu te retrouves en travers de son chemin, répéta Colby d’une voix sarcastique. C’estpour cette raison, à ton avis, qu’il décide de t’arracher les yeux et de te couper les mains ?

Son rêve lui revint brusquement à l’esprit. C’était une chose de penser à sa mort ; une autre devoir en avance comment elle allait se dérouler. Elle ferma les yeux et secoua la tête.

— Ça n’arrivera pas, dit-elle d’une voix faussement calme.Colby ne le permettrait pas. Mica n’avait pas l’intention de se laisser faire non plus.— Content de savoir qu’on est d’accord sur la question. (Il croisa les bras.) Intéressant, ton

nouveau copain – il veut te voler tes yeux et tes mains ?— Eh bien, disons que c’est plus facile pour lui que de me prendre mon cerveau, rétorqua-t-elle

avec un léger sourire. C’est mon meilleur atout, mais peut-être qu’il n’a pas assez de cran pourdécouper cette partie de mon corps.

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— Ça te fait rire ? (Il s’écarta du mur, les yeux brillants de colère.) Je viens de le voir temassacrer, et toi, tu prends ça sur le ton de la plaisanterie.

— Il ne m’a pas massacrée. Je suis là, devant toi. Et tant que je serai prudente, je pourraiesquiver son plan, quel qu’il soit.

Lorsqu’elle dormait, Mica entrevoyait des bribes de l’avenir. Lorsque Colby se connectait à elle,ses visions, ses rêves se précisaient. Avec lui, son pouvoir prenait de l’ampleur, se renforçait. Àl’époque, ce changement l’avait terrifiée. Aujourd’hui… aujourd’hui elle n’était plus sûre de rien.Non, en vérité, elle était toujours aussi terrifiée.

Oui, cette vision l’épouvantait. Mais, ce n’était pas ça qui allait la stopper. Colby non plus,d’ailleurs. À eux deux, ils avaient une chance de coincer ce salopard.

— Je ne t’ai rien appris. Tu le savais déjà, devina-t-il. Putain, tu le sais depuis le début et il afallu que je m’introduise dans ton rêve pour le découvrir !

— Non… non, Colby.Elle le dévisagea et, voyant l’expression d’horreur dans son regard, elle eut un haut-le-cœur.

Qu’avait-elle fait ? Elle s’effondra sur le bord du lit et enfouit son visage dans ses mains. Elle pritune profonde inspiration et chassa de son esprit la peur et l’adrénaline pour se concentrer sur Colby.

— Je ne savais pas, dit-elle d’une voix calme.— Ne me raconte pas de…— Je ne savais pas ! s’écria-t-elle en se dressant sur ses pieds.Elle pivota sur elle-même et scruta la peinture impersonnelle suspendue au-dessus du lit. Un

méli-mélo de formes géométriques, de traînées de couleurs dorées, le genre de tableaux qu’onretrouvait dans un millier d’hôtels différents. Elle se focalisa sur l’une de ces traînées dorées etrépéta :

— Je ne savais pas. Aucun de ces rêves n’est jamais clair et, à mon réveil, c’est à peine si je mesouviens de la victime. Quand ça me revient, il est trop tard pour les sauver. C’est comme si jerevoyais un film que j’avais déjà vu mais oublié. Je conserve quelques images en mémoire, sans plus.

Derrière elle, Colby restait silencieux. Sa colère finit par s’estomper.— Tu ne savais pas qu’il te prendrait pour cible ?Mica haussa les épaules.— Pas vraiment. À mon réveil, j’ai une sensation désagréable qui me colle à la peau. Sans

oublier le mauvais pressentiment que j’ai depuis le début de cette affaire. Mais quoi de plus normal ?Trois femmes ont été assassinées.

Mica se frotta la tempe, prise d’une soudaine migraine. À sa place, je serais aussi en colère.Elle se retourna lentement.— Désolée. J’aurais préféré que tu ne voies pas ça.— Je ne te le fais pas dire.Il s’approcha d’elle et posa sa paume contre sa joue ; le cœur de la jeune femme battit la

chamade. Elle soupira.— Tu aurais dû me prévenir, Mica.Elle hocha la tête, une boule dans la gorge.— Oui. Je sais. C’est juste que… je te le jure, Colby. Je ne savais pas. Comment aurais-je pu ?

Je me…— Tu te caches ; tu refuses d’exploiter ton don.— Oui, admit-elle en faisant la moue. J’évite de l’employer.Il la saisit par les bras et l’attira brusquement contre lui.

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— C’est fini, Mica.Surprise, elle abattit ses paumes contre son torse et le drap glissa à terre. Elle se retrouva toute

nue. Elle plongea son regard dans le sien. Il était furieux.— Promets-moi que tu vas arrêter de nier ta vraie nature, murmura-t-il en approchant ses lèvres

des siennes.Sa voix et son regard l’envoûtèrent. Comment promettre pareille chose ? Sauf qu’elle n’avait

plus le choix. Elle hocha la tête avec hésitation.— Promis, Colby. Je vais assumer qui je suis. Exploiter mon don.— Et cesse de lutter contre ton inconscient. Bon sang, écoute-le. Il cherche à te faire passer un

message.Elle se crispa.— Tu sais bien que je n’aime pas qu’on me donne des ordres, Mathis. Je ne suis pas…Il lui prit le visage en coupe.— Concentre-toi, chérie. Qu’est-ce que te disent tes rêves ?— Je…Elle secoua la tête.Pour s’être insinué dans son cauchemar peu avant, Colby connaissait déjà la réponse à sa

question. Il décida de partager ce qu’il avait vu. Ses yeux s’assombrirent tandis qu’il se connectait àelle. Alors Mica vit ce que son inconscient avait tenté de lui apprendre au travers de ses songes,songes dont elle n’avait gardé qu’un souvenir incomplet et qui lui apparaissaient maintenant dans leurintégralité.

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8

Quelques heures plus tard, Mica était encore pâle comme la mort, sous le choc de ce qu’elleavait vu.

Plongés dans la lecture des rapports d’enquête, Colby et elle n’échangeaient que de raresparoles. Il l’observait à la dérobée à la moindre occasion, et sa pâleur lui vrillait l’estomac. Peut-être avait-il été trop brusque. Il aurait dû agir avec plus de tact.

Mais il avait fallu lui ouvrir les yeux.Colby savait comment elle fonctionnait. Mica refusait d’exploiter son don jusqu’à ce qu’elle se

retrouve au pied du mur. Sauf que cette fois, il serait peut-être trop tard. Il avait pris un risque enpartageant avec elle ce qu’il avait vu ; elle aurait pu le rejeter pour le punir de s’être introduit dansson esprit à son insu, passant outre à la forteresse qu’elle avait érigée.

Tant pis. Si ça lui sauvait la vie, le reste n’avait pas d’importance. Du moment qu’elle ne finissaitpas…

Non. Il chassa cette pensée de son esprit. Il était là. Il contribuait à l’enquête. Ce qui changeait ladonne. En plus, elle avait désormais conscience du danger qui planait au-dessus d’elle. Ce quichangeait tout aussi.

Ensemble, ils allaient mettre la main sur le meurtrier avant qu’il ne kidnappe sa prochainevictime.

Enfin, il croisait les doigts.Colby reporta son attention sur le dossier, qu’il parcourut. Il se concentrait pour ne pas se laisser

envahir par les visions glauques qui le hantaient.Il fallait qu’il approfondisse l’une d’elles. Qu’il relève un détail significatif. Un élément qui

fasse toute la différence. Concernant le tueur de préférence. Il poussa un soupir en caressant du poucele bas de la photo – un cliché de l’autopsie. Endormie à jamais, la jeune femme était livide, et lesbleus sur sa peau blanche ressortaient nettement. Elle avait les cheveux noirs, courts, le visagedégagé. Ce portrait était celui de la mort.

Colby entendit la voix grave et mélodieuse.« Would you dance… if I asked you to dance… »Il ferma les yeux et répéta les paroles à voix basse.Près de lui, Mica se figea.— Colby ?Il lui lança un regard.— La chanson. C’est la chanson qu’il leur a fredonnée.Il feuilleta le dossier, examina une deuxième photo, une troisième, puis une quatrième…

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— Colby…Elle lui toucha la main.La connexion s’établit aussitôt.Une étincelle jaillit et il abattit sa paume contre la table en jurant. L’obscurité l’enveloppa peu à

peu et l’avala.Elle prit possession de lui. Elle l’attirait à elle… Des voix résonnaient dans sa tête. Elles lui

hurlaient des choses. Il vit du sang, des éclaboussures. Du sang partout…Qui giclait sur un visage, faisant ressortir une paire d’yeux noirs impassibles. Des yeux de fou.Une voix résonna dans sa tête, douce, profonde… mélodieuse. C’était pourtant celle d’un

monstre.« Would you run… »Dans l’esprit de Colby, un paysage défila, vu à travers le regard d’une femme qui fuyait. Elle

courait, terrifiée. Colby était noyé dans ses souvenirs, il voyait avec ses yeux à elle, et entendait avecses oreilles. Tout était déformé ; il dut prendre du recul de manière à obtenir une image plus nette. Cen’est pas réel, songea-t-il. C’est une vision… il passa outre au sentiment de terreur, s’efforçant devoir les choses par lui-même même à travers le prisme du cerveau de la jeune femme.

L’image disparut d’un coup. Pendant quelques secondes, son souffle se suspendit et il futbringuebalé d’un esprit à l’autre ; il vit au travers d’un autre regard. Des fleurs. Rien que des fleurs.Seigneur, pourquoi y en avait-il autant ?

Elles emplirent sa vision pendant un long moment avant de s’estomper, remplacées par une autreimage. Une main. Il se concentra pour la détailler. Celle d’un homme. Un homme blanc. Les onglescoupés et limés. Le poignet couvert de poils noirs, l’avant-bras fort mais pas costaud. De longsdoigts. Ils tripotaient des fleurs ; l’homme en sélectionna une parfaite. Il y avait une vitre face à lui.

Lève la tête, espèce d’enfoiré, lève la tête…L’image vacilla puis disparut.Une voix brutale, forte et autoritaire, résonna à ses oreilles.Il serra les dents, laissa la connexion se rompre, puis leva les yeux. Dans la pièce faiblement

éclairée, Mica le foudroyait du regard. D’une main, elle agrippait le devant de sa chemise comme sielle voulait le secouer. Il était assis par terre en plein milieu de la chambre. Il avait le souffle court,les joues en feu. Il se rendit compte qu’elle avait hurlé son prénom. Qu’elle l’avait giflé. Et face àson absence de réaction…

— Mon Dieu, Colby, tu m’as fichu une de ces trouilles ! Qu’est-ce qui t’est arrivé ?Il cligna les paupières et se força à déglutir, même s’il avait la bouche sèche comme du papier de

verre. Lorsqu’il posa le regard sur elle, il la vit à travers un écran de brouillard. Des vaguesd’énergie émanaient d’elle. Son énergie. Il plongea ses yeux dans les siens et vit de nouveau la fillequ’il avait aperçue en songe.

Bon sang, c’était Mica – c’était elle la connexion dont il avait besoin ! Il aurait dû s’enapercevoir plus tôt.

— Redonne-moi ta main.

Colby lui avait fait peur.Pendant quelques instants, il lui avait vraiment fait peur. À un certain moment, il avait même

cessé de respirer.

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Elle l’avait touché et puis il… Mince. Son regard s’était tout à coup éteint, comme si la viel’avait quitté. Sa peau avait pâli. Et l’air autour de lui s’était chargé, semblant sur le point de prendrefeu.

Tout ça parce qu’elle l’avait frôlé. Et maintenant, il voulait qu’elle recommence.Elle tituba en arrière.— Tu as perdu la tête ?Il tendit le bras et lui saisit la cheville ; à travers le tissu de son pantalon, elle sentit la chaleur de

sa main. Mais la connexion ne se produirait que si leur peau entrait en contact.— J’ai vu quelque chose, répondit-il d’un ton bourru. La vision était plus profonde cette fois.

Je… je ne m’y attendais pas, mais si je m’y prépare, je peux la contrôler. Il faut que j’y retourne. Queje regarde à nouveau.

— Et si tu n’arrives pas à la maîtriser ?— J’ai toujours été en mesure de le faire. Même après ton départ, quand j’ai dû trouver un autre

appui.— Tu as cessé de respirer plusieurs fois, murmura-t-elle en tremblant, les yeux rivés à la main

qu’il lui tendait.— Ce n’est rien. Au pire, je m’évanouis. C’est déjà arrivé. C’est comme un interrupteur. Si

je cesse de respirer durant l’une de mes visions, je tombe dans les pommes, la connexions’interrompt et c’est fini. (Il marqua une pause avant d’ajouter d’un ton calme :) Tu as dit que tu allaiscesser de lutter contre ton don. Que tu allais l’exploiter. Tu l’as promis.

Il avait encore la nausée. Elle le percevait. Terreur, adrénaline et tension se mêlaient en lui,l’enveloppaient. Pourtant, Colby s’en fichait. Il était prêt à utiliser son pouvoir, quoi qu’il lui encoûte.

— OK, chuchota-t-elle.La gorge nouée, elle lui tendit la main et s’ouvrit à lui. Lorsque leurs doigts s’effleurèrent, elle

s’ancra au sol, comme on lui avait appris plus d’une dizaine d’années plus tôt. Il lui fallut quelquessecondes pour se stabiliser, mais elle y parvint. Certaines leçons ne s’oubliaient pas.

Leurs doigts s’entrelacèrent et leurs paumes se pressèrent l’une contre l’autre. Elle posa les yeuxsur lui.

— Ne me fais pas regretter, dit-elle à voix basse. Tout ce fichu bazar, ce n’est pas bon pour moi.— Pour moi non plus. Mais soit on fait avec, soit on laisse une innocente mourir.Mica lui en voulait d’être plus fort qu’elle. Pourtant, elle chassa cette pensée. Si elle voulait se

montrer à la hauteur, elle n’avait pas le choix : il fallait qu’elle surmonte ses propres démons. Cettefois, pas question de décevoir Colby. Quinze ans plus tôt, elle avait jeté l’éponge et l’avaitabandonné. Elle ne commettrait pas la même erreur deux fois.

— Je suis prête.

« Would you dance… if I asked you to dance… »« Would you run… and never look back ? »La voix résonna dans la tête de Colby, plus puissante cette fois. Elle était emplie de malveillance

et de désir, celui insatiable de faire du mal.Colby perdit toute notion du temps.La femme était de nouveau là. Elle n’avait absolument pas conscience d’être suivie. Elle

marchait en direction du sordide club de strip-tease. Son sac à main pendait à son bras, rebondissant

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contre sa hanche. Elle tourna la tête à gauche puis à droite ; on aurait pu croire qu’elle avaitvaguement conscience du danger.

Mais non. La menace était derrière elle. Loin, loin derrière elle ; et personne ne prêtait attention àlui.

Ce qui l’amusait, lui procurait un sentiment de plaisir. Ce sentiment même fut pour Colby un pointde départ. Il s’y accrocha et le déroula comme un fil ; puis il se laissa envahir par les pensées del’assassin. À travers ce lien, ainsi que celui entre Mica et lui – Mica, qui le reliait à la réalité et lestabilisait –, tout devint plus net.

Tout à coup, la mort se déploya. Partout.Des dépouilles de femmes. Certaines abandonnées dans des impasses. D’autres enterrées. Et puis

les trois dernières proies. Leurs visages défilèrent un à un devant lui. Un pétale de fleur leur frôla lajoue, une caresse accompagnée d’un ricanement insupportable.

« Would you dance… »Les murmures des trois victimes s’élevèrent dans la tête de Colby, se mêlant au rire démoniaque.

Il distingua d’autres voix encore.Noyé dans cette cacophonie, Colby avait beau se concentrer, il n’arrivait pas à distinguer les

paroles. Il tenta de se focaliser sur l’une des voix pour l’isoler. Sans succès. Elles se muèrent en unerumeur, en un mélange confus. Pendant ce temps, les visages continuaient de passer en boucle dans satête.

Puis il ne vit plus qu’une femme.La quatrième victime… une prostituée, devina Colby. Choisie pour cette raison précise. L’homme

ne la désirait pas, il ne voulait rien d’elle. À l’exception de sa douleur. De ses cris… de sontourment.

C’était ça qui le faisait jubiler.Il y avait une cinquième proie aussi. Son portrait se superposa aux autres images. Colby la vit

traverser un bâtiment – une station de police.Cette femme-là, l’homme la désirait. Colby ressentit la colère de l’assassin envers elle tandis

qu’il l’observait s’installer à son bureau, ses cheveux noirs retenus en arrière, ses yeux plissés sousl’effet de la concentration.

Alors l’étincelle du désir jaillit. Le tueur avait envie d’elle. Elle n’était pas comme les autres – elle serait moins facile à attraper, moins facile à briser… or c’était ça qui l’excitait.

La vision se modifia. À présent, le tueur était seul. Il déambulait à travers une maison sombre,pénétrait dans une chambre obscure. Des pièces de monnaie tintèrent dans une poche. Captivé par cequ’il voyait, Colby regarda le tueur déposer quelques pièces sur une coiffeuse.

Ainsi qu’une arme.Colby se raidit, surpris. La vision devint floue, en réaction à son soudain manque de

concentration. Il s’efforça de rétablir la connexion, les yeux rivés au revolver posé dans son étui, ungenre de holster d’épaule. Comme celui d’un flic.

Un flic…Alors, Colby remarqua un objet sur la coiffeuse, près de l’arme.Un éclair doré, fourré dans un portefeuille en cuir.Un insigne.Le tueur était un putain de flic.

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— Tu te trompes, je te dis, insista Mica.Une heure s’était écoulée. Les premières lueurs du jour apparaissaient déjà. En vingt-quatre

heures, ni l’un ni l’autre n’avaient vraiment dormi, Colby encore moins qu’elle. Pourtant, il avait l’airfrais et alerte.

Mica portait encore ses vêtements de la veille, elle avait les cheveux en bataille et, même si elletâchait de ne pas trop y penser, elle portait encore l’odeur de Colby. Du coup, elle avait du mal à seconcentrer.

— Il ne s’agit pas d’un flic. Je n’y crois pas.— Pourquoi ?L’indolence qui s’était emparée de lui après sa vision s’était depuis envolée. Il était prêt à

recommencer.Afin de découvrir de nouveaux indices pour prouver à Mica que le tueur était un policier. Son

esprit était en proie aux doutes.Il ne laisse aucune trace de son passage. Personne ne l’a jamais vu. En outre, ces meurtres

sont trop parfaits…Elle lui tourna le dos et se mit à faire les cent pas. N’importe qui savait comment effacer ses

traces. Grâce aux reportages télévisés sur les enquêtes criminelles ou encore à Internet, n’importe quipouvait s’improviser tueur en série.

Non, on commet toujours des erreurs. On oublie des indices. Or les meurtres de ce mec étaientnickels.

Mica refusait de se rendre à l’évidence…Elle s’arrêta devant la fenêtre et tapa son front contre la vitre. Malheureusement, il fallait

envisager toutes les possibilités.L’une d’elles étant que le tueur soit l’un de ses collègues.— Tu as seulement vu un revolver, dit-elle à voix basse. Beaucoup de personnes possèdent une

arme.— Ce n’est pas faux.— Tu n’as même pas vu son insigne, enfin tu n’en as pas la certitude. Tu n’as pas distingué son

visage. Tu n’as aperçu que son satané revolver. Ça ne veut rien dire.Elle pivota face à lui et s’adossa à la fenêtre.Colby riva son regard bleu au sien. Elle n’y lut ni reproche ni colère. Simplement de la patience.

Il avait toujours été le plus calme des deux. Il était prêt à attendre le temps qu’il faudrait pour qu’ellese fasse à l’idée que le coupable était peut-être un policier.

Le problème, c’est que les heures étaient comptées.— Où se trouvait la quatrième victime ? demanda-t-elle en s’écartant de la fenêtre.Chaque chose en son temps. Se concentrer sur les faits.Le problème… c’était qu’elle possédait à présent des faits qu’elle aurait préféré ignorer. À cause

de la vision de Colby.Dans le fond, elle savait que le tueur était très probablement un flic. Son instinct le lui soufflait.Autrement dit, Mica pourchassait l’un des siens.

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9

— A-t-il appris des choses ?La voix discrète de Kellog fit tressaillir Mica. Elle détourna son attention de la sélection de

boissons chaudes offerte par le distributeur automatique. Elle avait le choix entre un mauvaischocolat au lait et du jus de chaussette. Mais elle avait besoin de caféine.

Elle fouilla dans sa poche et sortit des pièces de monnaie, évitant de croiser le regard de sonchef.

— Il envisage deux ou trois pistes. Rien de concluant.Ce qui n’était pas un mensonge. Ils n’avaient encore rien de concret. Elle préférait avoir des

preuves solides avant d’accuser un collègue.Et comment as-tu l’intention d’obtenir ces éléments ? Il n’a laissé aucune trace jusqu’à

présent…— Il n’a rien d’exploitable ?Mica haussa les épaules.— Mathis n’est pas un robot. Ça ne marche pas comme ça. Il ne suffit pas de presser un bouton

pour obtenir des réponses.— Peut-être qu’il devrait se mettre un coup de cravache, rétorqua sèchement le capitaine. Nous

n’avons plus que quelques jours ; je ne veux pas d’une autre victime sur les bras, inspecteur.— Moi non plus, répondit calmement Mica. Il fait de son mieux, ajouta-t-elle en glissant un

regard en coin à Kellog. Il faut être un peu plus patient.Kellog poussa un soupir tandis que Mica s’éloignait de la machine, une cannette à la main. Elle

avait finalement opté pour un soda, histoire d’épargner son estomac. Le capitaine se tenait à présentdevant le distributeur, qu’elle lorgnait avec un dégoût suprême.

— Ces cochonneries vont finir par me détruire l’estomac, marmonna-t-elle en y glissant unepièce.

— C’est pour ça que j’ai pris un Coca.— Il me faut plus de caféine que ça, murmura Kellog. Est-ce que votre coéquipier a compris ce

qui se passait avec le… consultant ?— Il m’a interrogée à son sujet, mais j’ai réussi à esquiver ses questions. Ça ne servirait à rien

de se confier à Phillips sur la véritable « profession » de Colby.— Colby ? nota Kellog en récupérant son café.Mica faillit perdre son aplomb, mais elle se ressaisit.— Le médium, dit-elle d’une voix blanche. Je gère pour le moment, mais je ne vais pas pouvoir

mentir à Phillips éternellement. On a prévu de retourner sur le lieu de travail de la dernière victime

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aujourd’hui, et il va sans doute continuer à me harceler de questions.— Ce n’est pas le coéquipier le plus commode, hein ?Visiblement, Kellog connaissait déjà la réponse.— Je me fiche qu’il le soit ou pas. Tout ce qu’on lui demande, c’est de faire son boulot.Le capitaine aspira une gorgée de café en faisant la grimace.— Vous voulez ma permission pour lui dire la vérité sur l’identité du consultant ?Non…Mica tourna sa langue dans sa bouche. Attention… prudence, se mit-elle en garde.— À ce stade de l’enquête, tant que nous n’avons rien de concret, je pense qu’il est préférable de

taire son implication dans cette affaire autant que possible. De n’en informer que ceux qui ontabsolument besoin de le savoir.

Kellog observa Mica d’un air mi-approbateur, mi-conspirateur.— Et je suppose que vous ne considérez pas votre coéquipier comme l’une de ces personnes.— À l’heure actuelle, je pars du principe que les seules personnes qui doivent être informées

sont celles qui le savent déjà, répondit Mica en toute sincérité.Après tout, Mica connaissait déjà les « compétences particulières » de Colby ; quant à Kellog,

c’était elle qui avait voulu faire appel à lui en premier lieu. Inutile d’étendre davantage l’information.— Vous ne me dites pas tout, grommela Kellog.— Pas vraiment. Je suis encore en train de jauger la situation, dit-elle en lui adressant un sourire

entendu. Je ne possède pas encore toutes les pièces du puzzle. Dès que j’y verrai plus clair, je vousen dirai plus.

— Bon, Greer, tu vas me dire ce qui se passe avec ton ami le consultant ?Ils traversaient la rue en direction du club de strip-tease où leur dernière victime avait travaillé.— Pour le moment, il ne se passe rien, Phillips.Il lâcha un petit cri dédaigneux et fourra la main dans sa poche pour en sortir une cigarette à

moitié mâchouillée.Qu’il la fume ou qu’il la jette, bon sang !La cigarette pendue à sa bouche, Phillips reprit :— Ça fait deux jours qu’il est arrivé, et je parie que tu passes tes soirées avec lui à plancher sur

l’affaire. Et pourtant, tu t’acharnes à me laisser à l’écart.— Je te le répète, il n’y a rien à dire.Mica était en nage. Des gouttes de sueur ruisselaient le long de son dos. Ils avaient quitté leur

véhicule climatisé pour rejoindre la chaleur de la rue. Il était à peine onze heures du matin, et déjà, lemercure indiquait près de trente-cinq degrés. L’été allait être insupportable.

— Pour l’instant, il se contente de passer en revue les preuves qu’on a répertoriées. Si jamais ila une illumination, tu en seras le premier informé.

— Merci, Greer, c’est très généreux de ta part, ironisa-t-il. Merde, comment veux-tu que je fassemon boulot si tu me caches des choses ?! Tu ne veux même pas me dire ce que ce type fait vraiment.

Logiquement, elle aurait toutes les raisons de le mettre dans le secret. Mais son instinct la mettaiten garde contre cela. Pas avant qu’ils ne tiennent quelque chose de solide. Elle ne voulait mettrepersonne dans la confidence, ni son capitaine ni son coéquipier. Personne.

— Ton boulot ? Notre boulot, tu veux dire. Et puis merde, Phillips. Ne fais pas comme si tun’avais pas tes propres sources. Et tu ne les partages pas systématiquement avec moi. En plus, unefois que j’aurai mis la main sur un truc intéressant, je t’en ferai part. Pour le moment, il n’y a rien àpartager, c’est tout.

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Ils s’arrêtèrent devant la vitre teintée de la porte d’entrée. Impossible de distinguer l’intérieur dela boutique.

— Tu es prêt à user de tes charmes ? le railla-t-elle.Sans attendre de réponse, elle sonna à la porte.C’était la première halte d’une longue série. La journée allait être longue et elle n’avait surtout

pas envie de se prendre de bec avec son coéquipier. D’accord, cette fois il avait une vraie raisond’être en colère. Mais pour autant, ça ne lui facilitait pas la tâche.

— Quelle perte de temps, putain ! grogna Phillips, trois heures plus tard.Ils avaient passé des heures à interroger les proches de la victime ainsi que ses voisins.Mica partageait son avis. Dans un soupir, elle glissa sa main dans sa chevelure humide.— Oui, mais c’est nécessaire.Cela faisait partie du boulot. Et puis, on ne savait jamais. Peut-être que quelque chose allait la

faire tiquer, stimuler ses visions. Et par la même occasion servir à Colby.Cela dit, elle savait que ce n’était pas en battant le trottoir qu’elle allait trouver un indice. En

revanche, elle avait fourré dans sa sacoche certaines preuves consignées qui pourraient être utiles àColby.

Il avait besoin d’une nouvelle connexion – un objet personnel ayant appartenu à la défunte lestimulerait plus que des photos d’autopsie.

Mais avant, il fallait qu’elle boucle cette journée qui s’avérait sans fin.

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10

— Tu as eu une journée productive ?— Tout dépend de ce que tu entends par là, rétorqua Mica tandis que Colby réglait le siège côté

passager. J’ai dû écouter mon coéquipier se plaindre et esquiver des questions de mon capitaine à tonsujet. Quand à l’enquête, elle piétine. Ça ne donne rien. Donc je dirai que ça n’a pas été trèsproductif, non.

Colby l’interrogea du regard.— Pourquoi est-ce que tu cherches à éviter les questions de ton supérieur ? Elle sait ce que je

fais.— D’accord, répondit Mica en faisant une marche arrière. Mais à mon avis, elle ne s’attend pas à

ce que tu accuses un flic d’être l’auteur des meurtres en série. Je préfère attendre d’avoir des preuvestangibles avant de lui soumettre cette théorie.

— En gros, tu travailles en solo.— Non. Je ne suis pas seule. Tu es là, répliqua-t-elle avec un léger sourire. Je n’ai confiance

qu’en toi de toute façon. (Elle attrapa sa sacoche et en sortit le sachet contenant les preuves.) Enfinj’ai quand même été un peu productive. Je t’ai rapporté quelque chose.

Les boucles d’oreilles dans le sachet avaient appartenu à la troisième victime – des pendantes enforme de cœurs ; lorsque Mica avait effleuré le plastique qui les contenait, une légère décharge luiavait parcouru les doigts.

Pourvu qu’elle ait eu du flair.Une seule manière de le savoir : les remettre à Colby pour voir s’il pouvait en tirer profit.Elle brandit le sachet en prenant soin de le toucher au minimum.Il posa les yeux dessus.— Merci, mais ce n’est pas trop mon style, ironisa-t-il.Sa plaisanterie fut accueillie par un silence.Il prit une grande inspiration et tendit la main, paume en l’air.— Passe-moi seulement les boucles. Garde le paquet.Elle acquiesça sans un mot et ouvrit le plastique, s’efforçant d’oublier qu’elle était en train

d’enfreindre le protocole, quoique le capitaine lui ait donné le feu vert. De toute façon le mal étaitfait. Quitte à enfreindre les règles, autant aller jusqu’au bout.

Colby recueillit les bijoux au creux de sa paume.Elle lui tendit la main.— Tu veux que…— Non. Ça va aller…

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Puis il se tut.Et un changement se produisit.L’air dans l’habitacle se chargea d’électricité. Un tourbillon d’énergie s’enroula autour d’elle et

un courant léger lui courut sur la peau.Les secondes, les minutes défilèrent. Un bon quart d’heure passa avant qu’il ne rouvre les yeux.Il la regarda fixement.— Conduis, dit-il d’une voix d’outre-tombe qui lui fila la chair de poule.— Dans quelle direction ? murmura-t-elle, la gorge nouée.Il porta son regard par la vitre.— Vers l’est. C’est quelque part à l’est.

Ils quittèrent le centre-ville et roulèrent pendant environ trois quarts d’heure. Sur l’autoroute, lacirculation était fluide et, au fil du trajet, le silence qui régnait dans la voiture devint presqueoppressant.

La rase campagne s’étendait sur des kilomètres. Mica se sentit perdue au milieu de nulle partsous l’immense ciel bleu azuré, avec pour seul paysage la route et les champs…

Colby était muré dans le silence.Une énergie intense émanait de lui, électrisant la jeune femme. Elle l’aurait sans doute perçu sans

son don de médium. C’était accablant.— Nous approchons, murmura-t-il au bout d’un moment.Mica se rembrunit. Elle parcourut les alentours du regard. Nous approchons de quoi ? Ils

quittèrent la voie express, prirent un virage et gravirent une légère côte au bout de laquelle se dressaitun grillage. Au loin, un vieux ranch abandonné.

Ils s’engagèrent sur le chemin de terre, criblé d’ornières. Le paysage était vallonné, aussi lamaison disparaissait-elle de son champ de vision par intermittence. Mica distingua surtout lesbâtiments les plus éloignés, dont une grange en ruine.

— Nous y sommes, annonça-t-il d’une voix imperceptible.Dans un soupir, elle observa les lieux.Qu’est-ce qui les amenait là ?

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11

Ils ne s’arrêtèrent pas devant la grange.Mica attendait un signe de la part de Colby mais il demeura silencieux. Une fois devant la

maison, elle freina et coupa le contact.— C’est ici ?— On verra.Il était de marbre.— Tu as une idée de ce qu’on cherche, au juste ?Sans répondre, il descendit de voiture. Elle l’imita et, accablée tout à coup par la chaleur, elle

grimaça, puis l’observa à travers les verres teintés de ses lunettes de soleil. Immobile, il contemplaitla maison.

— Colby ?Il finit par porter les yeux sur elle et haussa les épaules.— Je l’ignore. Je le saurai quand je le verrai.

La découverte de la serre, à l’arrière de la maison, le fit frissonner. Il avait un très mauvaispressentiment. Pourtant, ce n’était qu’un bâtiment constitué de verre et de métal ; les rayons du soleilpénétraient par tous les côtés, baignant le jardin d’hiver de lumière.

Contrairement au reste du ranch, cette partie paraissait entretenue. Non seulement les vitresn’étaient pas cassées, mais il était presque sûr d’avoir aperçu des plantes vertes à l’intérieur. Ce quiaurait été impossible si l’endroit avait été à l’abandon.

— La serre, murmura Mica, faisant écho à ses propres pensées. (Elle se frotta le dos de la mainsur le front et lui adressa un regard interrogateur.) Pourquoi ai-je le sentiment que nous allons devoiry entrer ?

— Je ne sais pas, répondit Colby avec un petit sourire en coin. Tu ne serais pas devin parhasard ?

Elle avança de quelques pas, peu amusée par sa plaisanterie.Un léger mieux, songea-t-il. Au moins, elle ne l’avait pas insulté.Quelques minutes plus tard, ils étaient enveloppés par la chaleur humide de la serre ; l’air était

saturé du parfum de la terre mouillée et de la chlorophylle.Il percevait également l’odeur de la mort et ça n’était pas normal.Parvenu au milieu d’une allée étroite, il ferma les yeux. À cet instant, la vision l’assaillit – il vit

des mains. Des mains d’homme. En train de jardiner – élaguant, taillant, coupant. Une pluie de fleurs

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fanées tombait tout autour de ces mains, les pétales pleuvaient sur le sol, recouvraient une paire debottes de chantier élimées.

Certains pétales étaient noirs comme la nuit.Ces fleurs… Colby les avait déjà vues. Leur image le hantait.Des dizaines et des dizaines d’entre elles s’imposaient à son esprit, puis une seule et unique.

Choisie méticuleusement parmi tous les nouveaux boutons, coupée au niveau de la tige,soigneusement emballée. Et puis en bruit de fond, un fredonnement. De plus en plus fort. Et il vit unefemme… dansant au son de la mélodie.

Une éternité s’écoula. Quelques minutes peut-être. Ou bien des heures. Le songe se modifia,devint flou, puis se désagrégea. Et Colby rouvrit les yeux.

Il pivota sur lui-même et se retrouva face à un banc de fleurs.Des tulipes, songea-t-il.Noires comme la nuit.

Décidément, les phases de transe de Colby ne s’étaient pas arrangées avec les années. Celafaisait une bonne vingtaine de minutes qu’il était dans un état de conscience modifiée, les paupièrescloses, la respiration à peine perceptible.

Mica l’observait en silence.Lorsqu’elle entendit un moteur de voiture, elle s’écarta de lui aussi discrètement que possible. En

même temps, le monde aurait pu s’écrouler, la terre trembler et les volcans entrer en éruption, ColbyMathis n’aurait rien remarqué. Quand il était en proie à l’une de ses visions, rien ni personne nepouvait l’en détourner. Certes, une bonne gifle ou un coup sur la tête le tireraient brutalement de sonrêve. Mais pas les bruits environnants.

Elle s’approcha du seuil de la serre et jeta un coup d’œil à l’extérieur. Pitié, faites que ce ne soitpas le propriétaire, faites que ce ne soit pas le propriétaire…

En apercevant le véhicule de son coéquipier qui tournait à l’angle de la maison, elle serra lesdents. Si ce connard l’avait suivie, elle allait lui montrer de quel bois elle se chauffait.

Un frisson remonta le long de sa colonne ; elle observa par-dessus son épaule et vit que Colbyavait enfin rouvert les yeux.

Et il regardait fixement un point dans le jardin d’hiver.Une portière de voiture claqua et elle reporta son attention sur son coéquipier. Ex-coéquipier,

rectifia-t-elle dans sa tête. Elle allait toucher deux mots à son capitaine le plus vite possible. Ellen’était pas en service, elle prenait sur son temps personnel…

Pour travailler sur cette affaire avec une personne qui n’est pas ton coéquipier, souligna unevoix avec cynisme dans sa tête.

— Nous avons de la visite, Colby.Il avait l’air agité. Qu’avait-il aperçu ?Malheureusement, il ne raconterait pas sa vision en présence d’une tierce personne. Et son petit

doigt lui disait qu’elle n’allait pas se débarrasser de Phillips si facilement.Elle sortit de la serre en trombe. Son cerveau carburait tandis qu’elle essayait d’élaborer un

scénario plausible à servir à son coéquipier pour qu’il lui fiche la paix.Phillips se tenait près de son véhicule, l’air revêche. Dommage que ce mec soit un tel salopard,

songea-t-elle. Il posa sur elle ses yeux noirs, haineux, comme d’ordinaire. Du Phillips tout craché.Elle se campa face à lui et l’étudia en silence.

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— Je te demanderais volontiers ce que tu fiches ici, mais je te parie que je connais déjà laréponse, dit Phillips.

— Ah bon ?Il ricana.— Ne fais pas l’innocente. Comme si tu n’avais pas eu le même coup de fil anonyme que moi,

poursuivit-il, un rictus aux lèvres et l’air agressif. Bon sang, quand est-ce que tu l’as reçu ? Depuiscombien de temps connais-tu l’existence de ce ranch ?

« Coup de fil anonyme ? »— Je viens tout juste de découvrir cet endroit.— Tout juste – tu veux dire plus tôt dans la journée ? Avant ou après qu’on a gâché tout un après-

midi à interroger des gens ? s’écria-t-il en avançant vers elle. On a laissé le message sur ma boîtevocale plus tôt dans l’après-midi. J’ai répondu après avoir fini notre service, parce que tu tenaisabsolument à procéder à ces putains d’interrogatoires.

Elle allait lui confier qu’elle n’avait rien reçu du tout mais elle se ravisa. Comment expliquer saprésence en ces lieux autrement ? En lui avouant que son petit copain médium l’avait guidéejusqu’ici ?

Éludant la question, elle reprit :— Je n’ai découvert cet endroit qu’à la fin de notre service, Phillips. Ne monte pas sur tes grands

chevaux.La porte derrière elle s’ouvrit dans un grincement ; Phillips décocha un regard noir à l’homme

qui apparut derrière elle. Colby posa la main sur son épaule. Elle lui adressa un sourire crispé.— Colby, je te présente mon coéquipier, Barry Phillips.

Colby était encore imprégné de sa vision. Son esprit baignait dans la souffrance et le sang. Deshurlements résonnaient à ses oreilles. Et tandis qu’il voyait l’homme s’approcher d’eux, il avait dumal à chasser les images funestes de sa tête. Des fleurs éclaboussées de sang. Des femmes sans vie.Et cette femme en particulier… qui dansait au son de la musique.

Il porta son regard sur la maison, la regarda fixement, cherchant des réponses. Mais elles ne setrouvaient pas là.

À moins que… – sauf que les rugissements dans sa tête l’empêchaient d’y voir clair.Il posa la main sur l’épaule de Mica et le chaos cessa. Il parvint aussitôt à une sorte de stabilité

et de paix intérieure – c’était incroyable à quel point ils se complétaient. L’un sans l’autre, ils étaientperdus. Mais dès qu’ils entraient en contact… c’était l’harmonie. Quand elle acceptait de se laisserfaire.

Et cette fois, c’était le cas. Les voix dans la tête de Colby s’étouffèrent, se muant en un faiblebourdonnement. Il ouvrit la bouche pour dire à Mica qu’il devait lui parler. Mais le crétin qui luiservait de coéquipier pivota sur ses talons et se dirigea vers la maison.

— Je vais fouiller cet endroit moi-même puisque c’est comme ça, lança-t-il par-dessus sonépaule. Vous n’avez qu’à continuer à faire joujou, tous les deux.

Colby sentit Mica se raidir. Grâce au lien qui les unissait, il perçut sa colère. Elle s’élança surles pas de son coéquipier. Phillips. Ce mec s’appelait Phillips, Barry Phillips. Colby les observaquelques instants tandis qu’ils gravissaient les marches du perron.

Le policier tambourina à la porte arrière, fit le tour de la maison, collant son nez sur les fenêtrespour inspecter l’intérieur. Mica le suivit.

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Un sentiment de malaise gagna Colby.Mort. Mort. Mort.La mort le cernait. Elle était partout, accablante. Il n’arrivait pas à se concentrer, surtout en

l’absence de Mica. Leur connexion s’était interrompue. Il aurait pu la rétablir à distance, mais il nevoulait pas la gêner.

Phillips s’arrêta devant la porte qui menait vraisemblablement à la cave. Il s’accroupit etexamina le verrou.

— Quelqu’un a forcé le cadenas.Mica haussa un sourcil.— C’est peut-être le propriétaire. (Oui, elle n’était pas aveugle. Elle voyait bien qu’on était entré

par effraction. Elle avait remarqué le cadenas flambant neuf.) C’est une propriété privée. Nous nepouvons pas y pénétrer comme ça, sans mandat.

— Je sais. Seulement… (Il fronça les sourcils.) Tu as entendu ?— Quoi ?Elle n’avait rien perçu du tout.— On aurait dit une voix, un peu étouffée.Il se redressa, plissa les yeux et poussa un juron. Il se mit à arpenter la pelouse devant la porte.— Enfin, Phillips, je n’ai rien entendu…Mica se figea. Un bruit lui parvenait. Comme fragmenté.Mais elle ne savait pas s’il était réel ou dans sa tête. Son regard navigua de Phillips à la porte de

la cave. Son cœur se mit à battre à tout rompre et elle déglutit avec peine. Impossible pour elled’établir un lien avec ce son. Mais si Phillips avait raison ?

Le tueur est un flic, Mica. Colby en était certain.Un flic.Un sentiment atroce s’empara d’elle.Elle voulut crier pour alerter Colby.Mais elle était coincée. Si elle faisait machine arrière, il se douterait de quelque chose. Or elle

ne pouvait avancer à l’aveugle non plus.L’assassin souhaitait sa mort.S’agissait-il de Phillips ?

Le téléphone vibra dans sa main et Colby lut le SMS de Jones : Trop long par message – envoipar e-mail.

Il pesta et appuya sur l’icône du courrier électronique.L’e-mail était encore en train de charger quand il releva la tête.C’était trop silencieux.Le ventre noué, il s’élança en direction de la maison.Le message finit par s’afficher. Tout ce qu’il avait besoin de savoir se trouvait dans les premières

lignes.À cet instant, il entendit le fracas du métal.Et il perçut le murmure de Mica, qui communiquait avec lui par l’esprit. Elle était agitée et

incohérente, mais résolue.

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Elle s’enfonçait dans l’obscurité quoique son instinct lui hurle de rebrousser chemin.L’air empestait la mort. La mort récente. La mort ancienne.La voix de Phillips lui parvint aux oreilles, basse, calme.— Tu sens ça ?— Oui. (Comment ne pas sentir ?)— C’est peut-être juste un animal crevé ?Sa vision s’accommoda à la pénombre. Devant elle, Phillips était parvenu au pied de l’escalier

et tripotait la poignée. Il faisait trop sombre et son corps massif bloquait la porte. Un frisson remontale long de sa nuque et elle avala la salive qui s’accumulait dans sa bouche.

Tu fais une connerie. Une putain de connerie.Il poussa la porte, qui s’ouvrit en silence – et trop facilement.— Je passe devant, chuchota-t-il.— Tu es sûr que c’est une bonne idée ?Il fit mine de ne pas l’avoir entendue.Que faire ?Elle hésitait. Pénétrer dans la cave seule…Un murmure lui caressa l’esprit. Une sensation de réconfort doublée d’un ordre ferme. Colby. Il

la rejoignait et il voulait qu’elle sorte de là.Qu’elle sorte…Elle avait la chair de poule. Le problème, c’est qu’elle risquait d’alerter Phillips si elle reculait

maintenant ; il comprendrait qu’elle avait deviné. Avec un peu de chance – en partant du principequ’elle avait vu juste – il ferait mine de s’en aller en même temps qu’eux et reviendrait en catiminipour se débarrasser des preuves qui se trouvaient là. Le cas échéant, il se méfierait et s’en prendraità elle.

Elle n’avait plus trop le choix.Il fallait qu’elle continue sur sa lancée. Elle se tint prête à dégainer, sachant que Colby n’était pas

loin derrière.Pourvu que Phillips ne sache rien sur Colby et sur son don.Pourvu qu’elle se trompe au sujet de Phillips.

À mesure qu’ils s’enfonçaient dans les ténèbres, l’odeur s’intensifiait. Incapable de supporter lenoir plus longtemps, Mica sortit sa torche.

— J’allume ma lampe, avertit-elle son coéquipier d’une voix faussement nonchalante.Derrière eux, par la porte entrouverte, filtrait un mince filet de lumière provenant de l’extérieur.

Il fallait qu’ils s’en éloignent au plus vite, de sorte que l’ombre de Colby, quand il arriverait, ne letrahisse pas.

Phillips lâcha un grognement de mécontentement.— Il y a une porte. Elle est coincée… ah voilà. C’est bon.Qu’est-ce qu’on fout ? se demandait Mica.En même temps, elle était trop occupée à épier Phillips pour chercher à comprendre quoi que ce

soit. Il ne se déplaçait plus dans l’espace comme le ferait un flic lors d’une enquête. Sous le faisceau

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lumineux de sa lampe, elle le vit avancer dans la pièce avec bien trop d’assurance, sans aucuneprudence.

Mica se mit dos à un mur ; elle inspecta le sol avec précaution du bout des pieds avant dereprendre sa marche.

Décidément, Phillips se comportait bizarrement…— L’odeur vient d’ici, dit-il sans plus prendre la peine de chuchoter.Elle perçut quelque chose dans son ton… une pointe de moquerie, de dédain peut-être.Mica se crispa. Fais gaffe, la prévint la voix dans sa tête.Soudain il alluma le plafonnier.Phillips la tenait en joue ; en un éclair, elle dégaina son arme.

L’instinct guidait ses pas.Colby choisit de ne pas emprunter le même chemin qu’eux. Comment pouvait-il savoir que c’était

la bonne décision ? Il ne se posa pas la question, pas plus qu’il n’hésita.Il avança, c’est tout. Il avait des épingles dans sa poche et s’en servit pour forcer la serrure de la

porte d’entrée, qui s’ouvrit sans problème. Il traversa une cuisine abandonnée, longea un couloirsombre au bout duquel se trouvait une porte. Les émotions et les couleurs se mélangeaient etpalpitaient dans son esprit. Le rouge, le mal, la colère…

Il allait poser son pied gauche par terre et se figea, le décala de quelques centimètres sur lagauche. Le parquet allait craquer, il l’avait pressenti. Le tueur était en bas, seul avec Mica. Il enfila lecouloir, mesurant chacun de ses pas avec une extrême précaution, ce qui lui prit trop de temps maislui évita de produire le moindre bruit.

Il y avait un escalier. Il se concentra et sut que les première, troisième, septième et huitièmemarches grinçaient. Quelqu’un, une femme – Colby perçut sa voix – avait voulu les réparer mais ellen’avait pas eu assez d’argent. Et puis elle avait disparu.

Il poussa lentement la porte, et jeta un regard en bas. Il aperçut une très faible lumière. Au piedde l’escalier devaient se trouver un lave-linge et un sèche-linge, sauf qu’on les avait retirés. Àprésent, l’espace était vide…

Concentre-toi, se morigéna-t-il en reprenant brutalement le contrôle de son esprit.Une fois en bas, après avoir évité toutes les marches qui craquaient, son attention se déploya,

captant le moindre son.Il entendait des voix, à présent…

Des fleurs mortes.Partout.Et sur un lit placé contre un mur, les restes d’une femme. Chevelure noire. Robe ivoire… une

robe de mariée. Dans ses mains, un bouquet séché.Près du lit, une table de chevet. Mica releva tous ces détails dans son champ de vision

périphérique, car elle gardait les yeux rivés sur Phillips.— Si tu as l’intention de m’abattre, tu ferais mieux de te dépêcher, dit-elle d’un ton provocateur.S’il était une chose qu’elle savait au sujet de son coéquipier, c’est que c’était une vraie tête de

lard. À partir du moment où on lui donnait un ordre, il tendait à faire l’inverse. Esprit decontradiction oblige.

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Peut-être qu’elle bénéficierait d’un peu de répit avant qu’il ne presse la détente.— Pourquoi ? dit-il avec un sourire. Tu veux me faire croire que tu attends du renfort ? En dehors

de ton petit minet de consultant ?— Justement, le consultant pose problème. Tu ne vas quand même pas lui faire avaler que je me

suis tiré dessus toute seule.S’il s’était agi d’un autre que Colby, elle n’aurait pas pris le risque de le mêler à ça. Mais c’était

Colby… et ce n’était pas un risque pour lui. S’il n’était pas à la hauteur de la situation, personne nel’était.

Phillips se contenta de sourire. Dans ses yeux brillait la flamme de la folie. C’était un malade. Unpsychopathe. OK, ça sent mauvais… S’il se persuadait qu’il pouvait la tuer en toute impunité, ehbien, elle allait mourir.

Une sensation de calme lui caressa l’esprit. Une présence rassurante. Même en l’absence demots, elle reçut le message de Colby cinq sur cinq. Arrête. Il voulait qu’elle cesse de penser à lamort.

Retarde-le.Il fallait qu’elle le fasse patienter.Colby approchait. À présent, ils étaient suffisamment enfoncés dans la pièce pour que Phillips ne

voie pas la porte par laquelle ils étaient entrés.Colby allait arriver. Mais si jamais il ne venait pas, et qu’elle voyait Phillips presser la putain de

détente, elle lui exploserait la tête en premier.Elle sentit une autre caresse dans son esprit. Colby. Une pensée plus forte, presque claire cette

fois… Ne meurs pas, Mica.Elle n’en avait nullement l’intention. Elle avait trop de raisons de vivre.Une fois parvenu au sous-sol, Colby souffla. Sous ses pas, le ciment dur et solide. Pas de risque

qu’il grince. Adossé au mur, il brandit l’arme qu’il n’avait pas touchée depuis des années, un Glock26, petit et maniable, facile à dissimuler… fatal.

Un vestige de sa vie d’avant. Or il n’avait voulu garder aucun souvenir de cette existence.À présent, il espérait qu’il ne serait pas trop rouillé, car lorsqu’il apercevrait ce salopard, il

allait lui coller une balle entre les yeux.Du calme… du calme…Il jaugea la distance qui le séparait de la porte. Une vingtaine de centimètres. Il distinguait des

ombres. Entendait des voix – et cette putain de chanson. Bon sang ! L’air empestait la chair endécomposition. Il percevait les émotions de Mica, son épouvante ainsi que sa colère – et sadétermination.

Quinze centimètres. Une arme était braquée sur elle – le mec avait brandi un revolver. Douzecentimètres.

Il suait à grosses gouttes. Il avait l’impression d’être dans une fournaise, sous ses couches devêtements. L’odeur infecte de putréfaction lui donnait la nausée. Il se retint du mieux qu’il put.

Concentre-toi… Concentre-toi…Il devait mettre de côté toutes les émotions de Mica car elles l’empêchaient de se concentrer.

L’instinct.Il pouvait vous sauver la vie – Mica était bien placée pour le savoir. Mais il pouvait aussi vous

coûter la vie. Un éclair passa dans le regard de Phillips et elle prit conscience que son instinct allaitpeut-être la perdre. Lui coûter la vie.

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Il savait qu’elle savait. Elle s’insinua dans ses pensées.Phillips était fou de haine, de rage et de désir. Un désir tordu. Un désir qu’elle n’arrivait pas à

appréhender complètement. Elle perçut aussi une chose dont elle avait besoin – l’avertissement justeavant qu’il ne presse la détente.

— Tu tires, je tire, le prévint-elle. Tu le sais.— Tu tires, je tire, répéta-t-il avec un sourire. Moi d’abord.

Colby surgit derrière lui.— Non, moi d’abord, dit-il en enfonçant son canon dans la nuque de Phillips.Mais Phillips pivota sur lui-même à la vitesse de l’éclair et bondit de côté.Colby ajusta et pressa la détente. Un trou apparu dans le front de son adversaire. La balle lui

traversa la tête et le sang gicla.Au même instant, Colby éprouva une douleur pareille à une déchirure. Il perdit l’équilibre et le

noir l’engloutit.

Mica poussa un cri de terreur.Elle se rua vers Colby sans même porter assistance à Phillips. De toute façon, il était mort. Bel et

bien mort. Des morceaux de cervelle jonchaient le sol autour de son crâne. Le sang s’écoulait de satête, formant une mare dans laquelle baignait son cadavre.

Colby… Seul Colby comptait. Il était étendu face contre terre.Mais il respirait…Ouf !Il respirait. Elle posa ses doigts sur sa gorge pour vérifier son pouls. Un peu rapide.— OK. Ça va aller, tenta-t-elle de se rassurer.Doucement, elle le souleva par l’épaule. Il fallait qu’elle voie la blessure… Elle fronça les

sourcils, palpant son corps. Pas de sang. Rien…Elle l’allongea sur le dos, profondément soulagée. Si elle avait été debout, elle se serait

effondrée. L’espace d’un moment, le noir l’avait avalée, l’air lui avait manqué. Mais peu à peu, lalumière revenait et elle se remettait à respirer.

Ça irait. Colby était hors de danger.Il aurait mal pendant un temps. Mais il s’en remettrait.Cet imbécile portait un gilet pare-balles.— Colby…Mica plaça la main sur sa joue. Aucune réaction.Elle ferma les yeux, se pencha sur lui, colla son front au sien. Rien qu’une minute, songea-t-elle.

Elle avait besoin d’une minute. Dieu merci. Il était en vie.Par réflexe, elle posa sa bouche sur la sienne.— Je t’aime…

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12

— Des côtes fêlées.Mica s’adossa au mur tandis que Colby se redressait dans son lit.Il faisait nuit. Plusieurs heures s’étaient écoulées depuis le drame. Elle venait à peine d’arriver à

l’hôpital ; mais tout du long, en pensée, elle n’avait pas quitté son chevet. Ici, à une heure de trajet,alors qu’il était pris en charge par les médecins.

Elle avait encore du travail, et elle savait que sa place était ailleurs pour le moment.Mais elle avait eu envie de le voir rien que quelques minutes. Même s’il s’était réveillé bien

avant l’arrivée des secouristes et que ses jours n’étaient pas en danger.Il vrilla son regard bleu à son visage et elle avança dans le petit espace carré, les mains dans les

poches. Il était pâle, il avait les traits tirés. Mais à peine l’eut-il aperçue qu’un léger sourire incurvases lèvres.

Elle réprima l’envie de lui renvoyer son sourire.— Quelques côtes fêlées et des contusions internes. Une balle à bout portant… C’est au F.B.I.

que tu as appris à faire de telles prouesses, Mathis ?— Seulement quand on est forcés de voler au secours de femmes flics têtues comme des mules,

répliqua-t-il.Il allait se lever mais elle vint se placer à son chevet.— Tu es vraiment obligé de bouger ? le gronda-t-elle.Elle lui barrait le passage.— Oui. Parce qu’il faut que je sorte de cet hôpital, dit-il en affichant une grimace de douleur. Je

déteste ce genre d’endroit.Elle posa la main sur son épaule.— Tu viens de te faire tirer dessus.— C’est la veste qui a le plus souffert.Colby portait une chemise. Il l’avait probablement piquée à un médecin ; à moins qu’il n’ait joué

de son charme auprès d’une infirmière. Elle porta la main à son col et l’écarta. L’impact de la balleavait causé un bleu qui s’épanouissait sur toute la partie supérieure de son buste. Et elle ne voyait pastout.

— Tu es bien amoché. Tu devrais te… reposer.— Oui. Mais pas ici.Il lui serra la main et lui baisa le poignet.— Colby…— Mica… Tu as une affaire à boucler, non ?

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Elle se figea. Une sensation de chaleur et d’espoir s’était immiscée dans son cœur depuis…Depuis qu’elle l’avait aperçu sur la plage. Un sentiment qui avait failli mourir quand il s’étaiteffondré sous ses yeux. Et qui l’avait reprise de plus belle à son réveil. Et maintenant, il la chassait ?

La gorge nouée, elle s’écarta du lit.— Oui, tu as raison.Elle se dirigea vers le rideau qui tenait lieu de cloison.— Tu veux que le capitaine prenne contact avec toi pour ajouter au rapport ton témoignage

concernant ta contribution à l’enquête ? demanda-t-elle d’une voix froide.— Non. Ce ne sera pas nécessaire.— OK. Bonne continuation, Colby.

Il la suivit du regard jusqu’à ce qu’elle disparaisse de son champ de vision, réprimant l’envie delui courir après.

Le problème, c’est que, dans son état présent, il aurait fallu qu’il rampe pour la rattraper.Et ça ne risquait pas d’arriver.Elle n’avait pas eu conscience qu’il l’avait entendue.Ce murmure à travers les ténèbres l’avait guidé, rendant la douleur supportable.« Je t’aime… »Oui. Ces paroles l’avaient soutenu. Et ils allaient devoir en parler, trouver un compromis, une

manière de vivre ensemble.Car il l’aimait aussi, et pas question qu’il la laisse partir une seconde fois.Auparavant, il allait devoir faire la paix avec lui-même.

— C’est du bon boulot.Le capitaine Alice Kellog signa le rapport et se rejeta en arrière dans son fauteuil en étudiant la

jeune femme qui lui faisait face.Mica se tenait debout devant le bureau, les mains croisées dans son dos, le visage impassible.

Ses yeux étaient cernés de noir, trahissant les nuits blanches qu’elle avait accumulées depuis dessemaines. Elle avait une tête à faire peur, et alors ? Elle s’en fichait. Elle n’avait personne à quiplaire de toute façon.

Le capitaine examina une photo emballée dans un sachet contenant les preuves.— Vous lui ressemblez.Mica jeta un coup d’œil au cliché et détourna le regard. La femme de Phillips. Christine. Elle

avait demandé le divorce huit ans plus tôt. D’après les renseignements que Mica avait réunis,Christine Phillips avait quitté le pays avec son amant peu après son divorce. Une licence de mariageà leur nom était enregistrée en Jamaïque… ainsi que la possession d’une maison. Une maisonaujourd’hui abandonnée. Cela faisait cinq ans que personne n’avait eu de nouvelles d’elle ou de sonnouveau mari. Comme s’ils avaient disparu de la planète Terre.

Mica n’avait pas attendu la remarque du capitaine pour relever sa ressemblance avec l’ex-femmede Phillips. La même chevelure noire et bouclée, la même silhouette élancée, jusqu’à leur regard,étrangement similaire. Le visionnage de la vidéo de mariage de Phillips lui avait donné la chair depoule. La chanson qu’ils avaient choisie pour leur première danse n’était autre que Hero de Enrique

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Iglesias – la chanson qui avait hanté Colby, celle que cet enfoiré avait fredonnée à ses victimes tandisqu’il les torturait à mort.

C’était troublant de voir ce monstre danser avec une femme qui lui ressemblait tant. Elle en étaitencore toute chamboulée. En revanche, Christine avait une délicatesse qui faisait défaut à Mica.

Soudain, elle prit conscience d’une chose. Elle eut envie de se gifler. Chaque jour, quand Micacontemplait son reflet dans le miroir, elle y voyait une femme forte – mais ce n’était qu’aujourd’huiqu’elle s’en rendait compte. Une femme forte – et non plus la fille lâche qu’elle avait été par lepassé…

Consciente que le capitaine la dévisageait d’un air interrogateur, elle reporta son attention surl’affaire. Elle aurait amplement le temps de tirer des conclusions sur elle-même plus tard.

S’éclaircissant la voix, elle indiqua du menton la photo de mariage que son chef brandissait.— La reine de la nuit, hein ?— Oui. Elle était horticultrice. Elle n’a plus de membres de sa famille en vie, mais j’ai réussi à

retrouver la trace de certains de ses proches. Elle adorait cette espèce de tulipes.Kellog jeta un coup d’œil par la fenêtre. Dehors brillait le soleil éclatant de milieu de journée.— J’ai eu des nouvelles d’un de vos amis, il y a peu de temps.Mica décocha un regard à Kellog ; son cœur battit la chamade.Colby…— Jones a appelé. Apparemment, il a reçu un message d’un ancien agent à lui pendant que vous

étiez sur le terrain. Il ne s’est pas étendu sur le sujet, mais il voulait s’assurer que je possédais lesbonnes informations concernant le propriétaire du ranch… Il avait appartenu au père de l’épouse.Phillips s’en est occupé pendant toutes ces années, comme vous le savez déjà. (Kellog tapota sonrapport avec un stylo.) Reste à savoir comment vous avez trouvé l’existence de cette propriété…Voilà ce que je dirai : une fois que Mathis a eu établi le lien, il s’est rué dans la maison. Je suisobligée de deviner le déroulement des faits… vu que votre compte rendu reste très évasif.

Mica se tendit.— Il y a une raison qui vous a empêchée de me fournir ces détails ?— Il est sorti de l’hôpital, répondit-elle sèchement. Il a quitté la ville. Vous vouliez taire son

implication durant l’enquête, je ne vois pas pourquoi vous changez d’avis à présent.— Hum. Bonne repartie, dit Kellog sans cesser de la dévisager. (Elle se pencha sur son bureau.)

Vous avez besoin d’un peu de repos. Prenez votre après-midi.— Capitaine, je…— Prenez votre après-midi, répéta Kellog en lui adressant un regard glacial.

Une fois Mica sortie, Kellog se leva et s’approcha de la fenêtre.Étant donné l’angle dans lequel elle s’était trouvée, Kellog doutait que la jeune femme l’ait

aperçu.Mais cela faisait une heure qu’il se tenait là, appuyé contre la voiture de Mica. Immobile. Patient

comme un ange.Comme il avait reçu une balle en pleine poitrine quelques jours plus tôt, Kellog n’avait pas eu le

cœur de le faire attendre plus longtemps.

Il faisait une chaleur à crever.

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Appuyé contre le véhicule, Colby porta la bouteille à ses lèvres et prit une autre gorgée d’eau.Son thorax lui faisait un mal de chien. Si elle ne sortait pas d’ici peu…L’heure du déjeuner était passée.Il avait arpenté le trottoir devant l’entrée du poste pendant la pause déjeuner, convaincu qu’elle

était allée s’acheter un sandwich chez le traiteur de l’autre côté de la rue, mais non.À présent, il attendait juste que son service se termine.Il aurait pu se rendre chez elle, tout simplement. Après tout, il connaissait son adresse même si ce

n’était pas elle qui la lui avait donnée et qu’il avait eu du mal à la dégoter. S’il le fallait, il irait. Aurisque de passer pour un harceleur. Mais… il le ferait en dernier recours.

Une sensation chaude et agréable s’épanouit dans son esprit.Dans sa cage thoracique abîmée, son cœur s’accéléra.Il leva la tête et la vit.Elle avait jailli du poste de police à grands pas, les épaules droites, le visage dur. Je suis de

mauvais poil, fichez-moi la paix, semblait dire son expression.— Désolé, bébé.Elle se figea. Comme si elle l’avait entendu.Mais il devina qu’elle avait surtout senti sa présence. Tout comme il avait perçu la sienne. Une

douleur sourde palpita dans ses veines. Le désir s’instilla en lui, chaud et éclatant. Et l’amour, si purqu’il en avait mal, cogna dans sa poitrine. Il ne voulait plus vivre sans elle. Il avait bien tenté pendantdes années mais ça l’avait rendu malheureux. Il était prêt à tout… à condition qu’elle soit à son côté.

Elle redressa la tête et, sous la chaleur accablante du parking, leurs regards se verrouillèrent.Colby prit son courage à deux mains et lui décocha un petit sourire en coin. Il la salua de la main.Elle s’approcha de lui comme une furie, des éclairs dans les yeux.

Il était là.Le cœur de Mica battit à tout rompre.Il était là…Ne t’emballe pas. Ça ne veut rien dire. Elle redressa les épaules tout en se dirigeant vers lui

d’un pas fier.Elle réprima l’envie de mettre de l’ordre dans ses cheveux, de tirer sur sa jupe. Elle lui collait

déjà à la peau. C’était l’été texan. Pas très surprenant.Elle s’arrêta à moins d’un mètre de lui, les mains sur les hanches.— Oui ?Une étincelle s’alluma dans ses yeux d’un bleu infini. Un sourire dansait sur ses lèvres. Il avait

l’air fatigué pourtant. Elle ne put s’empêcher de le remarquer. Souffrait-il encore ? Mince,évidemment. Quatre jours à peine s’étaient écoulés depuis qu’il s’était pris une balle quasiment àbout portant.

Il s’apprêtait à parler. Elle posa les yeux sur sa bouche et son cœur battit la chamade. Arrête,Mica. Il t’a envoyé promener, tu te rappelles ?

— Alors tu as bouclé ton enquête ?Elle haussa un sourcil.— Tu es venu jusqu’ici pour me poser cette question ? Tu aurais pu me passer un coup de fil à la

place.— En effet, j’aurais pu.

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En un éclair, il l’attira contre lui. Elle n’eut pas le temps de réagir. Elle s’écrasa contre son torse.— Aïe, grommela-t-il. Mais par téléphone, je n’aurais pas pu faire ça.Faire quoi ?Colby s’empara de sa bouche et leurs langues se mêlèrent. Cinq secondes passèrent… dix…

vingt…Soudain, elle s’écarta de lui en titubant, le souffle court.— Aïe, se plaignit-il encore en portant la main à son torse.Elle faillit s’excuser mais elle se ravisa.— Qu’est-ce que tu fabriques ?— Je m’y suis mal pris ? demanda-t-il, ironique.Elle secoua la tête, passa sa main dans ses cheveux et lissa sa queue-de-cheval ébouriffée.— Qu’est-ce que tu veux, Colby ? demanda-t-elle en posant les yeux au loin, sur un groupe

d’immeubles.— Ça, dit-il d’une voix calme et intense. C’est ça que je veux.Elle reporta son regard sur lui. Une question lui brûlait les lèvres malgré ses bonnes résolutions.

Mais elle resta coincée dans sa gorge quand elle vit l’objet qu’il tenait. Un petit écrin bleu envelours. Ouvert, il révélait une bague où se reflétaient les rayons du soleil dans un prisme decouleurs éclatant.

— Elle appartenait à ma grand-mère paternelle. J’avais prévu de te la donner il y a quinze ans…j’avais tout préparé. Mais tu es partie.

Émue, Mica plongea ses yeux dans les siens.— Colby…Il s’écarta de la voiture pour s’approcher d’elle. Il ferma l’écrin et plaqua sa main sur la bouche

de Mica pour la faire taire.— Je t’aimais. Je t’aime toujours. Je n’ai jamais cessé de t’aimer… Et je t’aimerai jusqu’à mon

dernier souffle. Je peux vivre sans toi, Mica, mais je n’en ai pas la moindre envie.Les sanglots s’amoncelèrent dans sa gorge.— C’est… (Elle s’éclaircit la voix et secoua la tête.) Mais tu m’as repoussée. Il y a quatre jours.— J’étais à l’hôpital, dit-il en lui décochant un sourire. J’étais claqué. Et je ne voulais pas te

faire ma déclaration alors que tu étais pressée de boucler cette affaire. J’avais encore l’esprit confus,j’étais un peu paumé. Il m’a fallu quelques jours pour m’assurer que j’avais bien la réponse à cettequestion… et le temps que tu mettes cette enquête derrière toi.

— Tu avais prévu de revenir… de revenir pour moi.Il prit son menton dans sa main et approcha son visage du sien. Il effleura ses lèvres.— Depuis la seconde où je t’ai revue sur la plage, murmura-t-il. Je n’allais pas te laisser

t’échapper une seconde fois, Mica.Bouleversée, elle l’enlaça par la taille.— Et tout le reste ? Tu… tu as dit que tu étais paumé ?— Je vais me lancer en free-lance, travailler à mon compte. J’ai un contact en Géorgie qui peut

me donner des tuyaux et j’imagine que Jones n’hésitera pas à faire appel à mes services si jamais il abesoin de mon aide. Je… (Avec un soupir, il porta le regard au loin, dans le vide.) Je me cachedepuis trop longtemps et je n’en peux plus. J’en ai assez…

Il laissa sa phrase en suspens et lui caressa la bouche.— Moi aussi j’en ai marre de vivre cachée, dit-elle. Je me suis rendu compte un peu plus tôt que

je suis beaucoup moins fragile que je ne le pensais. En tout cas, j’ai décidé d’assumer mon don.

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— Mica. (Il passa ses doigts dans ses cheveux et dénoua l’élastique qui les attachait.) Tu n’asjamais été faible. On avance chacun à son rythme, c’est tout. (Il effleura sa bouche avec son nez.) Tupenses qu’on peut continuer la route tous les deux et trouver notre place ensemble ? murmura-t-il.Qu’en dis-tu ? Veux-tu m’épouser, Mica ?

Elle fit un pas en arrière et sonda ces yeux d’un bleu infini, ces yeux et ce visage qui l’avaienthantée depuis le jour où elle était partie. Plus jamais, songea-t-elle.

— Colby, susurra-t-elle en s’emparant de ses lèvres. Bien sûr que je le veux !

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1. The Unwilling.