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Banques et marchés Jézabel Couppey-Soubeyran Université Paris 1 L3

Banques et marchés

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Page 1: Banques et marchés

Banques et marchés

Jézabel Couppey-Soubeyran

Université Paris 1 L3

Page 2: Banques et marchés

Chapitre 2

Financement de l’économie et systèmes financiers

Page 3: Banques et marchés

Objectifs de ce chapitre

l  Comprendre les modalités du financement

l  Mettre en évidence le rôle central des banques dans le financement de l’économie

l  Montrer que les systèmes financiers sont tous fortement « intermédiés »

Page 4: Banques et marchés

Plan du chapitre

l  1. Les modalités du financement l  2. Les fonctions du système financier l  3. Typologie et structure des systèmes

financiers l  4. Finance et croissance

Page 5: Banques et marchés

1. Les modalités du financement l  A/ Autofinancement / financement

externe l  B/ Les deux formes du financement

externe : financement direct / financement indirect

Page 6: Banques et marchés

A/ Autofinancement / financement externe l  3 points clé :

•  financement pour qui, pour quoi ? • Qu’est-ce que l’autofinancement ? • Capacité / besoin de financement

Page 7: Banques et marchés

Le financement pour qui, pourquoi ?

•  Le financement de l’économie désigne à la fois : • Le financement des entreprises

•  Investissement productif • Le financement des administrations publiques

•  Dépenses publiques • Le financement des ménages

•  Investissement immobilier

Page 8: Banques et marchés

Qu’est-ce que l’autofinancement ?

l  Activité productive + détention de titres financiers à revenus primaires à distribution secondaire (cotisations sociales, impôts, prestations sociales …) à RDB à Dépense de consommation à EB à FBCF.

l  Auto-financement = financement de l’investissement par l’épargne brute

Page 9: Banques et marchés

capacité / besoin de financement

l  EB < FBCF à besoin de financement (externe) : globalement le cas, chaque année, des entreprises (ó ampleur de leur FBCF) et des administrations publiques (ó faiblesse de leur EB ó ampleur des dépenses publiques)

l  EB > FBCF à capacité de financement : globalement le cas, chaque année, des ménages (même si bien entendu les ménages peuvent également avoir recours individuellement au financement externe)

Page 10: Banques et marchés

B/ Financement direct / financement indirect

l  Le système financier organise la rencontre entre les agents à capacité de financement et ceux à besoin de financement

l  Cette rencontre peut se faire selon deux modalités : •  Directe : émission de titres sur un marché •  Indirecte ou intermédiée : un intermédiaire financier

(banque) s’interpose

l  Financements externes en dehors du système financier : crédits interentreprises

Page 11: Banques et marchés

Financement

Financement externe

Financement direct

Émission de titres

Actions, obligations, TCN,

Crédits non bancaires

Financement indirect

Crédit

Achats de titres par les IF

Auto-financement

Page 12: Banques et marchés

2. Les fonctions d’un système financier

l  a) définition et fonction de base du système financier

l  b) système de paiement l  c) collecte de l’épargne l  d) transfert des ressources l  e) gestion des risques l  f) production d’information l  g) résolution des problèmes d’incitation

Page 13: Banques et marchés

a) définition et fonction de base du système financier

l  Définition : Le système financier désigne l’ensemble des intermédiaires et des marchés financiers, mais aussi des mécanismes institutionnels (réglementations, systèmes de compensation, régime de change, etc.) qui rendent possibles les échanges financiers et qui participent à leur bon déroulement.

Page 14: Banques et marchés

a) définition et fonction de base du système financier (suite)

l  La fonction de base du système financier : allocation efficace des ressources.

l  Six fonctions primordiales (Zvi Bodie & Robert Merton), relativement stables dans le temps et dans l’espace, sont dévolues à cette fonction de base.

Page 15: Banques et marchés

b) système de paiement

l  Une fonction importante du système financier est de fournir un système de paiement efficace pour faciliter l’échange des biens, des services et des actifs :

-  mise en circulation d’instruments de paiement (monnaies métalliques, monnaies papier, monnaie scripturale, …)

-  convertibilité des monnaies -  gestion des moyens de paiements (rôle clé

des banques) -  systèmes de compensation interbancaires

Page 16: Banques et marchés

b) système de paiement (suite)

•  Plus grande efficacité du système de paiement portée par : •  La dématérialisation des signes monétaires (de

l’or aux monnaies de papier, puis à la monnaie scripturale)

•  et des instruments de paiement (chèque, avis de prélèvement, virements automatisés, prélèvement automatique, etc.)

Page 17: Banques et marchés

c) collecte de l’épargne

l  Le système financier offre des mécanismes pour mettre en commun ou agréger la richesse des ménages (collecter leur épargne) et en faire des ressources en capital utilisables par les entreprises

l  Banques, intermédiaires financiers, marchés monétaires et financiers remplissent cette fonction à mise en commun des fonds des investisseurs

Page 18: Banques et marchés

d) transfert des ressources

l  Un système financier fournit des moyens de transfert des ressources économiques, dans le temps, dans le monde et entre les entreprises: • Prêts et emprunts à transferts inter-

temporels • Mobilité internationale des capitaux à

investissements internationaux

Page 19: Banques et marchés

e) gestion des risques

l  Un système financier ne transfère pas que des fonds, il transfère aussi des risques: - Un contrat d’assurance transfert le risque sur

la compagnie d’assurance - Actionnaires et créanciers (y compris les

banques) supportent le risque de faillite de l’entreprise dans laquelle ils ont investi

- Tous les produits dérivés sont des instruments de transfert des risques

Page 20: Banques et marchés

f) production d’information

l  Le système financier produit l’information nécessaire aux décisions financières des agents : •  Informations « publiques » contenues dans le prix

des actifs financiers, les taux d’intérêt, les taux de change

•  Informations « privées » produites par les agences de notation (évaluation du risque de défaut), les banques (information via la gestion des comptes de dépôts, via les scorings, …)

Page 21: Banques et marchés

g) résolution des problèmes d’incitation

l  Les problèmes d’incitation sont liés : •  Aux asymétries d’information relatives à la qualité

de l’emprunteur (sélection adverse) et à l’usage qu’il fait des fonds prêtés (aléa moral) à solutions : production d’information, prises de participation, contrats de prêt incitatifs, cautionnement, …

•  Aux conflits d’agence qui naissent par exemple dans le cadre de la délégation de responsabilités des actionnaires (principal) au dirigeant de l’entreprise à solutions : rémunérations indexées sur la performance de l’entreprises (stock options par exemple); OPA/OPE

Page 22: Banques et marchés

3. Typologie et structure des systèmes financiers

l  A/ Systèmes orientés banques / systèmes orientés marché

l  B/ Caractéristiques d’un système orienté banque

l  C/ Caractéristiques d’un système orienté marché

l  D/ Which is better ? (Levine, 2002) l  E/ Vous avez dit désintermédiation ?!

Page 23: Banques et marchés

A/ Systèmes orientés banques / systèmes orientés marché

l  John Hicks (1974) : à Economie d’endettement

(prédominance du financement intermédié) / économie de marchés de capitaux (prédominance du financement direct)

l  Allen & Gale (2000), Levine (2002), Rajan & Zingales (2003) :

à Bank-based system / Market-based system

Page 24: Banques et marchés

Bank-based system / Market-based system

l  Bank-based system = systèmes orientés banques à les banques dominent à la fois dans le financement de l’économie et dans la gouvernance des entreprises

l  Market-based system = systèmes orientés marché à les marchés de titres dominent …

Page 25: Banques et marchés

B/ Caractéristiques d’un système orienté banque

l  Les agents à capacité de financement et ceux à besoin de financement ne se rencontrent qu’indirectement par le biais d’IF

l  Relations bilatérales entre les ANF et les IF sur la base de l’information privée de ces derniers

l  Gestion des risques par mutualisation (et diversification)

l  Forte concentration du capital des entreprises l  Les entreprises sont liées, voire contrôlées, par un

petit nombre de grandes banques peu spécialisées (“banques universelles”)

! le cas des pays européens ?

Page 26: Banques et marchés

C/ caractéristiques d’un système orienté marché

l  Rencontre directe des agents à capacité et à besoin de financement

l  Relations multilatérales entre les ANF fondées sur une information publique (prix de marché)

l  Gestion des risques par transfert (et diversification) l  Forte fragmentation du capital (détention directe des

actions) l  Dirigeants soumis aux investisseurs (discipline de marché),

et mécanismes incitatifs type stock-options, OPA/OPE l  Secteur bancaire étroit et spécialisé (« banques d’affaires »

ou « banques commerciales »)

! Le cas des pays anglo-saxons ?

Page 27: Banques et marchés

D/ Which is better ? (Levine, 2002)

Market based ?

Ou

Bank-based ?

Page 28: Banques et marchés

Le développement financier dépend-il de la structure du système financier ?

l  L’une de ces deux orientations permet-elle un développement financier plus important ?

l  Le développement financier = accès à une gamme étendue de services financiers

l  Niveau du développement financier « mesuré » par des indicateurs.

Page 29: Banques et marchés

Indicateurs de développement financier

l  2 dimensions à mesurer : •  Intermédiation financière : taille, activité,

efficience, concentration des intermédiaires financiers

• Marchés financiers : taille, activité, efficience des marchés de titres

Page 30: Banques et marchés

Indicateurs de développement de l’intermédiation

l  Indicateurs de taille : actifs des banques / PIB, actifs des IF/PIB, …

l  Indicateur d’activité : crédits / PIB, dépôts / PIB, primes d’assurance / PIB

l  Indicateur d’efficience : Marge d’intermédiation / Actif total des banques; Frais bancaires généraux / Actif total des banques

l  Indicateurs de concentration : actif des 3 ou 5 plus grandes banques / Actif total du secteur

Page 31: Banques et marchés

Indicateurs de développement des marchés de titres

l  Indicateurs de taille: • capitalisation boursière / PIB • Actions émises / PIB • Obligations / PIB

l  Tous ces indicateurs augmentent avec le niveau de revenu.

Page 32: Banques et marchés

Indicateurs de développement des marchés (suite)

l  Indicateurs d’activité et de liquidité: • volume total des transactions / PIB

l  Indicateur d’efficience: • volume total des transactions boursières /

capitalisation boursière à un marché petit mais actif aura un ratio élevé, tandis qu’un marché grand mais peu actif ou peu liquide présentera un ratio faible

Page 33: Banques et marchés

Beck, Levine & Demirgüc-Kunt (1999, 2009)

l  Beck, Levine & Demirgüc-Kunt (« Bank based and market based financial systems : a cross country comparisons », 1999) utilisent ces ratios pour : • comparer le développement financier des

pays (cf. graph)

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Levine & Demirgüc-Kunt (1999) l  Leur objectif est de classer les pays en

systèmes orientés banques / systèmes orientés marchés

l  Le classement qu’ils effectuent repose sur l’observation du ratio : développement du secteur bancaire (actifs des banques/PIB) / développement du marché boursier (capitalisation boursière/PIB)

•  si ratio élevé à systèmes orientés banques •  si ratio < moyenne à systèmes orientés marchés

Page 40: Banques et marchés

Levine & Dermigüc-Kunt (1999)

l  Problème : un ratio élevé peut aussi bien s’expliquer par un développement important du secteur bancaire que par un sous-développement des marchés de capitaux

l  d’où la nécessité de distinguer entre les pays à niveau faible de développement financier et ceux à niveau élevé. •  En dessous de la valeur médiane du développement de

l’intermédiation et du développement des marchés boursiers, le pays appartient à la catégorie “peu développé financièrement”

•  3 catégories de structure financière : peu développée, orientation banque, orientation marché

Page 41: Banques et marchés

Principaux résultats de DK&L (1999)

l  “Banques, intermédiaires non bancaires et marchés de titres sont plus importants, plus actifs, plus efficients dans les pays riches”

l  “Les systèmes financiers sont plus développés en moyenne dans les pays les plus riches”

l  “Dans les pays à haut revenus, les marchés boursiers tendent à être plus efficients que les banques” .

l  “A mesure qu’ils s’enrichissent les pays convergeraient vers l’orientation marché”

Page 42: Banques et marchés

Principaux résultats de DK&L (1999) (suite)

l  “Au plan institutionnel, la tradition juridique de Common law (jurisprudence), la protection des petits actionnaires, la présence de standards comptables, un faible niveau de corruption, et l’absence de garantie explicite des dépôts favoriseraient l’orientation marché.

l  A l’inverse, la tradition juridique de “French Civil Law tradition”, une faible protection des petits investisseurs, l’absence de clauses de bonne exécution des contrats, des niveaux élevés de corruption, l’absence ou l’insuffisance de standards comptables, l’existence de réglementations bancaires strictes seraient des obstacles au développement financier.

Page 43: Banques et marchés

Remarques

l  Ces résultats sous-tendent une vision assez linéaire du développement financier: • Pays peu développés = systèmes orientés

banques ou systèmes fin sous-développés • Pays riches = systèmes orientés marchés • Développement économique à orientation

marché • Boyd & Smith (1998)

l  Ils ne permettent pas d’appréhender le développement concomitant des IF et des marchés dans les années 1990 en Europe

Page 44: Banques et marchés

Levine « Bank based or Market based systems : which is better ? » (2002)

l  Dans son article de 2002, Levine aborde la question un peu différemment.

l  Il met en avant les différents points de vue et finit par montrer que finalement la question qui fait le titre de son article n’est pas la question pertinente !

Page 45: Banques et marchés

Différents point de vue théoriques sur la question

l  “Bank-Based view” (Diamond, Rajan, Zingales, Stiglitz)

l  “Market-Based view” (Tirole, Obstfeld, Jensen)

l  “Financial services view” (Merton, Bodie, Levine)

l  “Legal system view” (La Porta, Lopes-de-Silanez, Schleifer, Vishny)

Page 46: Banques et marchés

“Bank-based view” Pour

l  Les banques sont supérieures aux

marchés dans la production d’information (Stiglitz,1985 à pb de passager clandestin / info par les prix de marché)

l  Les banques permettent aux ménages de s’endetter et de gérer leur risque de liquidité à favorable à l’investissement et à la croissance

l  Agrégation de l’épargne et réalisation d’économie d’échelle

l  Meilleure capacité à contrôler les entreprises et à les contraindre à rembourser car relations de LT

Contre

l  “Too big to fail” l  Problèmes de collusion entre

les banques et les entreprises qu’elles financent au détriment des épargnants

l  “Exploitation de rente”, défavorable à l’innovation, obstacles à la concurrence

Page 47: Banques et marchés

“Market-based view”

pour

l  Des marchés dynamiques et profonds incitent les investisseurs à y rechercher des placements car ils peuvent facilement en tirer profit

l  Mécanismes de bonne gouvernance (effet disciplinant des OPA/ OPE); possibilité d’indexer la rémunération des managers sur la performance des entreprises cotées

l  Diversification des risques

contre

l  La révélation de l’information par les prix de marché peut réduire l’incitation des investisseurs à rechercher de l’information

l  La liquidité du marché peut finalement décourager un contrôle rigoureux des entreprises émettrices car les investisseurs peuvent se débarasser facilement de leurs titres.

Page 48: Banques et marchés

“Financial Services View” l  Ce qui importe n’est pas tant l’orientation “marchés”

ou “banques” des systèmes financiers mais l’existence d’arrangements financiers (contrats financiers) qu’ils soient conclus sur des marchés ou avec des intermédiaires – pour réduire les imperfections de marché et fournir des services financiers”

l  L’ensemble de ces arrangements améliore la liquidité et le partage de l’information, l’exercice du contrôle, et facilite la mobilisation de l’épargne.

Page 49: Banques et marchés

“Legal Systems view”

l  souligne le rôle du système légal pour promouvoir le développement financier.

l  Finance = ensemble de contrats financiers qui requièrent un cadre juridique garantissant leur bonne exécution. Les systèmes légaux déterminent la plus ou moins grande facilité avec laquelle les contrats financiers peuvent être conclus.

Page 50: Banques et marchés

Levine (2002) teste plusieurs relations l  La première relie la performance économique

(croissance du PIB par tête) à la structure financière (développement des marchés boursiers / développement des banques)

l  La seconde relie la performance économique au développement financier dans son ensemble (testé deux fois : une fois sans puis une fois avec instrument « variable légale »)

l  La troisième fait intervenir ces deux variables explicatives dans la même équation

Page 51: Banques et marchés

Levine (2002) teste plusieurs relations (suite)

l  La quatrième teste l’interaction entre structure financière et niveau de revenu suivant Boyd and Smith (1998) qui suggèrent que l’orientation banque serait importante à des stades peu avancés du développement économique et qu’en devenant plus riches, les pays tendraient vers une orientation marché de leur système financier.

Page 52: Banques et marchés

Levine (2002) teste plusieurs relations (suite)

l  La cinquième fait interagir la structure financière et une variable « légale » (indice de développement du système légal) suivant l’hypothèse de Rajan & Zingales (1998) selon laquelle les systèmes orientés banques présenteraient un avantage dans les pays dotés d’un faible système légal.

Page 53: Banques et marchés

Resultats … l  La structure du système financier

n’est pas la variable explicative pertinente • « Distinguishing countries by financial

structure does not help in explaining cross-country differences in long-run economic performance ».

Page 54: Banques et marchés

Resultats (…) l  Les estimations réalisées confortent davantage la

« financial services view » : •  « Distinguishing countries by their overall level of

financial development helps to explain cross-country difference in economic growth »

•  « Countries with greater degrees of financial development – as measured by aggregate measures of bank development and market development – enjoy substantially greater economic growth rates. »

Page 55: Banques et marchés

Resultats (…) l  La composante du développement financier

expliquée par des variables légales est positivement relié à la croissance de long terme.

l  Cela tend à montrer que le cadre légal influence de manière significative le développement financier qui lui-même influence la croissance de long terme.

Page 56: Banques et marchés

Eclairage sur les déterminants juridique des systèmes financiers l  La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer,

Vishny (1997) « Legal environment matters for the size and extent of a country’s capital market », The Journal of Finance, vol 52, n°3

l  Le cadre juridique définit le contenu des contrats et les conditions de leur exécution.

l  La protection accordée aux investisseurs individuels est un déterminant important de la faisabilité des contrats financiers.

Page 57: Banques et marchés

La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer, Vishny (1997) l  Le modèle anglo-saxon des "common law" (fondé

sur la jurisprudence) favoriserait l'accès aux financements notamment aux financements de marchés, parce que •  il permet de conclure des contrats plus diversifiés •  il est plus adaptable •  il protège mieux les intérêts des créditeurs ou des

actionnaires minoritaires

Page 58: Banques et marchés

La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer, Vishny (1997)

l  A l'opposé, le système de "french civil law" serait un frein au développement et à l'enrichissement de relations financières du fait de son caractère centralisé rigide, moins soucieux des intérêts particuliers que de ceux de l'Etat.

l  Il inciterait à la concentration du capital et confèrerait plus de poids aux institutions financières mieux à même de prendre des garanties et de faire exécuter les contrats

Page 59: Banques et marchés

La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer, Vishny (1997)

l  Beaucoup de travaux empiriques dans la lignée de La Porta visent à montrer la coïncidence entre la typologie des systèmes financiers et celle des systèmes juridiques.

l  Il est incontestable que la constitution et le respect d'un état de droit sont un préalable nécessaire au développement des contrats financiers

l  A cet égard, la qualité de l'environnement juridique est un facteur important de croissance (Levine, 1999).

Page 60: Banques et marchés

La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer, Vishny (1997)

l  Cependant, la thèse de La Porta est loin de rendre compte de toute la réalité des systèmes de financement.

l  De nombreuses expériences historiques montrent qu'il n'y a pas de lien évident entre l'évolution de la finance et celle du droit

Page 61: Banques et marchés

La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer, Vishny (1997)

l  Au début du XXe siècle, divers pays d'Europe Continentale disposaient de marchés financiers développés qui se sont ensuite contractés pour faire place à une extension de l'intermédiation financière, sans que les fondements des systèmes juridiques aient évolué.

l  Dans ces mêmes pays on a assisté, au cours de ces 20 dernières années, à un retour des financements de marchés sans que l'on observe de changements majeurs dans les droits nationaux.

Page 62: Banques et marchés

La Porta, Lopez De Silanes, Schleifer, Vishny (1997)

l  Manifestement, la "french civil law" n'a pas empêché la profonde transformation de notre système financier.

l  Un même cadre juridique peut donc s'appliquer à des architectures financières très différentes. C'est donc qu'il n'est pas un déterminant exclusif ni même décisif en ce domaine.

Page 63: Banques et marchés

D’autres déterminants importants … l  La culture (via notamment le rapport au

risque, à l’incertitude) : une plus grande aversion à l’incertitude à orientation banque

l  La religion (cf. Max Weber « L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme »)

l  La structure productive (petites/grandes entreprises, secteurs d’activités à plus ou moins grande dépendance au financement externe).

Page 64: Banques et marchés

D’autres déterminants importants …

l  La protection sociale, les régimes de retraites : besoin plus important des marchés financiers si retraites par capitalisation

Page 65: Banques et marchés

E/ Vous avez dit « désintermédiation » ?

l  La diminution du rôle des intermédiaires financiers, et surtout des banques, a souvent été présentée comme un phénomène moteur de la globalisation financière.

l  Ce processus a été désigné sous le terme de « désintermédiation financière » supposé décrire une diminution notable des financements intermédiés dans le total des financements des entreprises.

Page 66: Banques et marchés

E/ Vous avez dit « désintermédiation » ? (suite)

l  Empiriquement, on ne constate pas de désintermédiation : •  la part des financements intermédiés est

restée assez stable: près de 70% en moyenne en Europe

• dans beaucoup de pays, si l’on regarde les FI accordés à l’ensemble des ANF la baisse des crédits a été en partie compensée par l’augmentation des titres achetés par les intermédiaires financiers

Page 67: Banques et marchés

En % des financements externes des ANF (1994-2001)

l  Crédits •  Allemagne : 62%à56% •  Belgique : 31%à25% •  Espagne : 42%à 44% •  France : 42%à34% •  Suède : 41%à38% • R-U : 34%à43% •  Europe : 44%!43%

l  Titres achetés par les IF •  Allemagne : 10%à20% •  Belgique : 22%à27% •  Espagne :23%à 24% •  France : 22%à29% •  Suède : 38%à26% • R-U : 27%à31% •  Europe : 23%!25%

Page 68: Banques et marchés

Vous avez dit « désintermédiation » ? (suite)

l  La baisse des crédits concerne bien plus les administrations publiques que les entreprises

l  La hausse des besoins de financement des APU a augmenté le poids des APU (et de leur comportement financier) dans les financements externes de l’ensemble des ANF : effets de structure (changement dans la composition des FE) >> effets de variation pure (changement dans les comportements financiers de tous les agents)

Page 69: Banques et marchés

Evolution de la part des crédits dans les financements externes des SNF

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Portugal

Finlande

Suède

Norvège

Royaume-Uni

Europe

La hauteur du chandelier mesure la différence entre la part des crédits dans les FE des SNF en 1995 et celle en 2000 ; il est noir (blanc) en cas de baisse (hausse).

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Evolution de la part des crédits dans les financements externes des APU

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Danemark

Allemagne

Espagne

France

Italie

Pays-Bas

Autriche

Portugal

Finlande

Suède

Norvège

Royaume-Uni

Europe

La hauteur du chandelier mesure la différence entre la part des crédits dans les FE des APU en 1995 et celle en 2000 ; il est noir (blanc) en cas de baisse (hausse).

Page 71: Banques et marchés

Vous avez dit « désintermédiation » ? (suite) l  La part des financements intermédiés doit être

évaluée en encours mais en volume pour corriger l’effet de la valorisation boursière

l  Effet mécanique de la valorisation boursière souvent assimilé à tort à de la désintermédiation

l  Exemple : évolution du taux d’intermédiation en France entre 1994 et 2001 •  Part des crédits

• valeur (estimation biaisée) : 42% à 22% • volume : 42% à 34%

•  Part de l’ensemble des financements intermédiés • valeur (estimation biaisée) : 64% à 49% • volume : 64% à 62%

Page 72: Banques et marchés

Japon : taux d’intermédiation

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Market intermediation ratio

Credit intermediation ratio

Total intermediation ratio

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Japon : Financements externes par secteur

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Nonfinancial corporationsGeneral GovernmentHouseholds

Page 74: Banques et marchés

Japon : taux d’intermédiation (avec et sans effet de structure)

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1996

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2003

2004

Market intermediation ratioMarket intermediation ratio without change in the external financings compositionCredit intermediation ratioCredit intermediation ratio without change in the external financings composition

Page 75: Banques et marchés

Vous avez dit « désintermédiation » ?

l  Pas d’uniformisation des systemes fi vers une « orientation marché »

l  Le clivage orientation banque / orientation marché est en réalité très peu discriminant

l  Quand on compare les structures de financement par pays, les écarts tiennent bien plus aux modalités de l’intermédiation elle-même, qu’à celles des financements externes dans leur ensemble.

Page 76: Banques et marchés

Structuredufinancementdesentreprises:Allemagne/R.U(1995)

En % du financement externe des SNF

Page 77: Banques et marchés

Structuredufinancementdesentreprises:Allemagne/R.U(2001)

En % du financement externe des SNF

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Vous avez dit « désintermédiation » ? (suite)

l  Pas de désintermédiation des placements non plus : • Les placements des ménages restent

fortement intermédiés (assurance-vie, OPCVM, …): 70% aux USA, 80% en Allemagne, en France ou au R.U.

• peu de détention directe de titres en France

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peu de détention directe de titres (actions)

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Complémentarité banques/marché

l  Si convergence il y a ce n’est pas vers moins de banques mais vers une plus grande mixité banque/marché (vers plus d’intermédiation de marché)

l  La complémentarité IF/Marchés est de plus en plus forte : les marchés sont porteurs d’activités pour les IF et les IF porteurs de liquidités pour les marchés

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4. Finance et croissance

l  Cf. Manuel Monnaie, banques, finance (Jézabel Couppey-Soubeyran, édition PUF, coll. Quadrige, 2015), chapitre 5, section « Finance et croissance » pp195-202.

l  Revue d’économie financière n°127, « Finance et croissance »

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la poule et l’œuf

l  Un débat ancien : • Pour Joseph Schumpeter (1883-1950) : « les

institutions financières sont nécessaires à l’innovation technologique qui sous-tend la croissance »

• Causalité inverse pour Joan Robinson (1903-1983) : « Là où la croissance conduit, la finance suit ».

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l  Dans les années 1960-1970, les travaux de John Hicks (1969), Ronald McKinnon (1973), Edward Shaw (1973) attiraient l’attention sur les politiques de répression financière bridant selon eux le développement financier et, ce faisant, entravent la croissance.

l  Deux questions mêlées : « réglementation » / « lien entre finance et croissance »

l  Une première étude empirique tente de clarifier les choses en 1969 (Raymond Goldsmith) en cherchant à identifier une relation statistique entre croissance et finance.

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Résultats de Goldsmith (1969) et prolongements

l  Le test proposé met en équation une variable représentative de la croissance moyenne de 36 pays au cours d’une longue période (1860-1963) – à gauche (variable expliquée) - et une variable de développement financier (valeur des actifs bancaires / PIB) – à droite (variable explicative).

l  Son résultat : corrélation positive et significative entre finance et croissance

l  1ère étude très fruste mais qui va inspirer de nombreux prolongements : •  Choix de la variable de développement fin (dépôts / PIB,

Crédit / PIB, capitalisation boursière / PIB, … •  Variables de contrôle (niveau de développement initial,

d’éducation, pol éco, ...) l  Attention “corrélation n’est pas causalité” !

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Prolongements importants

l  King et Levine (1993) : « Finance and growth: Schumpeter might be right » !

l  Leur résultat : la taille du secteur financier est un indicateur de la croissance économique

l  L’étude concerne 77 pays pour la période 1960-1989 et montre que la taille du secteur financier en 1960 laissait présager la croissance économique, l’investissement et la croissance de la productivité au cours des trente années qui ont suivi

l  Même en tenant compte du revenu initial, de la scolarisation, de la consommation publique et de l’ouverture commerciale.

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Prolongements importants (suite)

l  Levine et Zervos (1998) se concentrent sur les marchés d’action et montrent que la liquidité du marché boursier (et non la taille du marché boursier) est positivement corrélé à la croissance du PIB.

l  Liquidité mesurée par le « taux de rotation », c’est-à-dire la valeur totale des actions échangées sur une période rapportée à la valeur totale des actions cotées.

l  Leur étude porte sur 42 pays au cours de la période 1976 à 1993 et montre que le niveau initial du crédit des banques et le niveau initial de ce taux de rotation en 1976 présentent une corrélation positive et significative avec la croissance moyenne de la productivité sur la période 1976 à 1993.

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Des données macro aux données sectorielles et de firme

l  Croiser le développement financier et la taille des firmes, à partir de données sectorielles ou de firmes, aide aussi à mesurer plus finement le lien entre finance et croissance.

l  Les firmes de moyenne et petite taille, plus dépendantes du financement externe que les grandes, voient leur croissance ou leur productivité plus significativement améliorée par le développement financier • Rajan, R. G. et L. Zingales (1998) •  Beck T., A. Demirguc-Kunt, L. Laeven, R. Levine

(NBER, 2004)

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Le consensus d’avant crise

l  Tous ces travaux et leurs prolongements, pour la plupart réalisés à la Banque mondiale (institution financière internationale créée en 1944 à Bretton Woods), ont forgé un consensus : + de finance = + de croissance + de finance à + de croissance

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Une relation positive … jusqu’à un certain seuil

l  Les limites de cette relation positive n’ont guère été interrogées.

l  Il a fallu la crise pour cela : •  Avant 2007, thèse dominante : relation positive

entre finance et croissance de long terme car la finance permet d'améliorer l’allocation ressources, favorise l’investissement, etc.

• Depuis 2007, les études mettant en lumière les coûts économiques de la finance reçoivent un accueil plus favorable.

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Une relation réexaminée depuis la crise financière de 2007-2008

l  Dans un papier de mars 2011, Jean-Louis Arcand, Enrico Berkes, Ugo Panizza s’interrogent : « Too much finance ? »

l  Leur réponse : oui, au-delà d’un volume de crédit > 110% du PIB, la finance a des effets négatifs sur la croissance.

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Crédit au secteur privé dans les pays où ce crédit dépasse 90 % du PIB, 2006 (en % du PIB)

Source : Panizza (2012)

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« Too much finance ? »

l  Jusqu’au début des années 1990, moins de 5 % des pays présentaient un indice de développement financier supérieur au seuil de 110 % du PIB.

l  En 2006, 17 pays présentaient des secteurs financiers dépassant le seuil de 110 % du PIB et 6 autres pays affichaient un crédit au secteur privé supérieur à 100 % du PIB.

l  Seuil à partir duquel la relation positive entre le DF et la croissance n’est plus statistiquement significative

l  Ces résultats suggèrent qu’il existe de nombreux pays pour lesquels des normes de crédit plus strictes pourraient favoriser la croissance (≠ travaux des 90’s soutenaient la libéralisation financière)

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Effet de seuil l  « même si le développement financier est

généralement bénéfique à la croissance économique, il existe un seuil à partir duquel la finance commence à avoir un rendement négatif, en raison, peut-être, de l’accroissement de la volatilité macroéconomique qu’elle induit. »

l  P. Rousseau et P. Wachtel (2011) montrent quant à eux que le lien positif que la plupart des études empiriques mettaient en avant pour la période 1960-1980 ne se retrouve pas quand on réplique ces études à partir de données plus récentes couvrant les décennies 1990-2000.

l  Conforte l’idée d’une relation non monotone entre finance et croissance

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Une relation non monotone

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Pour aller plus loin

l  Finance, Zvi Bodie & Robert Merton, ed française dirigée par Christophe Thibierge, ed. Pearson Education, 2002.

l  Les systèmes financiers, …, ouvrage collectif dirigé par Christian de Boissieu, 3ème édition, Ed. Economica, 2013

l  « Finance et croissance », Revue d’économie financière n°127, Novembre 2017

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