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Ce dossier électronique est mis à la disposition des Eglises et de tous les intéressés afin d'encourager une discussion individuelle et œcuménique du texte. Pour un usage plus large, nous vous encourageons à acheter le texte imprimé, que vous pourrez obtenir auprès des Publications du COE. (En cas de divergence entre les deux textes, c'est le texte imprimé qui fait foi.) Foi et Constitution Conseil œcuménique des Églises Lima 1982 Baptême Eucharistie Ministère Convergence de la foi TEXTE FRANÇAIS ÉTABLI PAR FR. MAX THURIAN Nouvelle édition

Baptême, Eucaristie, Ministère

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Foi et Constitution, Conseil Oecuménique des Églises, Lima 1982, Paper 111

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  • Ce dossier lectronique est mis la disposition des Eglises et de tous les intresss afin d'encourager une discussion individuelle et cumnique du texte. Pour un usage plus large, nous vous

    encourageons acheter le texte imprim, que vous pourrez obtenir auprs des Publications du COE. (En cas de divergence entre les deux textes, c'est le texte imprim qui fait foi.)

    Foi et Constitution Conseil cumnique des glises

    Lima 1982

    Baptme

    Eucharistie Ministre

    Convergence de la foi

    TEXTE FRANAIS TABLI PAR FR. MAX THURIAN

    Nouvelle dition

  • TABLE DES MATIRES

    Prface ..................................................................................................................................... iii

    BAPTME I. L'institution du baptme.............................................................................................. 1 II. La signification du baptme......................................................................................... 1

    A Participation la mort et la rsurrection du Christ ........................................... 1 B Conversion, pardon, purification ......................................................................... 2 C Don de l'Esprit ..................................................................................................... 2 D Incorporation dans le Corps du Christ ................................................................. 2 E Signe du Royaume ............................................................................................... 3

    III. Le baptme et la foi ...................................................................................................... 3 IV. La pratique du baptme............................................................................................... 3

    A Baptme des adultes et baptme des enfants ....................................................... 3 B Baptme Chrismation Confirmation .......................................................... 5 C Pour une reconnaissance mutuelle du baptme ................................................... 6

    V. La clbration du baptme .......................................................................................... 6

    EUCHARISTIE I. L'institution de l'eucharistie ........................................................................................ 8 II. La signification de l'eucharistie................................................................................... 8

    A L'eucharistie comme action de grce au Pre ...................................................... 9 B L'eucharistie comme anamnse ou mmorial du Christ ...................................... 9 C L'eucharistie comme invocation de l'Esprit ....................................................... 11 D L'eucharistie comme communion des fidles .................................................... 12 E L'eucharistie comme repas du Royaume............................................................ 13

    III. La clbration de l'eucharistie................................................................................... 14

    MINISTRE I. La vocation du peuple de Dieu tout entier................................................................ 16 II. Lglise et le ministre ordonn................................................................................ 17

    A Le ministre ordonn ......................................................................................... 17 B Ministre ordonn et autorit ............................................................................. 19 C Ministre ordonn et sacerdoce ......................................................................... 20 D Le ministre des hommes et des femmes dans l'glise ..................................... 21

    III. Les formes du ministre ordonn.............................................................................. 22 A vques, presbytres et diacres ........................................................................... 22 B Principes directeurs pour l'exercice du ministre ordonn dans l'glise ........... 23 C Fonctions des vques, des presbytres et des diacres ........................................ 24 D Varit des charismes ........................................................................................ 25

    IV. La succession dans la tradition apostolique ............................................................. 26 A La tradition apostolique dans l'glise................................................................ 26 B La succession du ministre apostolique............................................................. 26

    V. L'ordination ................................................................................................................ 28 A La signification de l'ordination .......................................................................... 28 B L'acte de l'ordination.......................................................................................... 29 C Les conditions pour l'ordination ........................................................................ 29

    VI. Vers la reconnaissance mutuelle des ministres ordonns...................................... 30 Appendice............................................................................................................................... 32

  • iii

    PRFACE

    Le Conseil cumnique des glises est une communaut fraternelle d'glises qui confessent le Seigneur Jsus-Christ comme Dieu et Sauveur selon les critures et s'efforcent de rpondre ensemble leur commune vocation pour la gloire du seul Dieu, Pre, Fils et Saint-Esprit (constitution).

    Le Conseil cumnique est ici clairement dfini. Il n'est pas une autorit universelle contrlant ce que les chrtiens devraient croire et faire. Cependant, aprs trois dcennies seulement, il est dj devenu une remarquable communaut d'environ trois cents glises. Ces Eglises reprsentent une riche diversit de cultures, de traditions, de liturgies en de nombreuses langues, d'existence sous toutes sortes de systmes politiques. Mais elles sont toutes engages dans une troite collaboration de tmoignage chrtien et de service. En mme temps, elles luttent ensemble pour atteindre le but de l'unit visible de l'glise.

    La Commission de Foi et Constitution du Conseil cumnique assure un soutien thologique aux efforts des Eglises vers l'unit. En effet la Commission a t charge par les membres du Conseil de leur rappeler toujours leur obligation consentie de travailler en vue de la manifestation du don par Dieu de l'unit de l'glise, de faon plus visible. C'est pourquoi le but clairement tabli de la Commission est de proclamer l'unit de l'glise de Jsus-Christ et d'appeler les glises rendre visible cette unit en une seule foi et une seule communaut eucharistique, s'exprimant dans le culte et la vie commune en Christ, afin que le Inonde croie. (rglement).

    * * *

    Si les glises divises doivent parvenir l'unit visible qu'elles recherchent, un des pralables essentiels est qu'elles soient en accord fondamental sur le baptme, l'eucharistie et le ministre. Naturellement, donc, la Commission de Foi et Constitution a consacr beaucoup d'attention pour surmonter la division doctrinale sur ces trois thmes. Durant les cinquante dernires annes, la plupart de ses confrences ont eu l'un ou l'autre de ces sujets au centre de leurs discussions.

    Les trois textes sont le fruit d'un processus de recherche de cinquante ans qui remonte la premire Confrence de Foi et Constitution Lausanne en 1927. Le matriel a t discut et rvis par la Commission de Foi et Constitution Accra (1974), Bangalore (1978) et Lima (1982). Entre les rencontres de la Commission plnire, la Commission permanente, et son Comit de travail sur baptme, eucharistie et ministre, sous la prsidence de frre Max Thurian, de la Communaut de Taiz, ont poursuivi le travail et la rdaction.

    Ces textes cumniques refltent galement des consultations suivies et une collaboration continue avec les membres de la Commission (approuvs par les glises) et les Eglises particulires elles-mmes. La 5e Assemble du Conseil cumnique (Nairobi 1975) a permis l'envoi aux glises pour tude d'un premier texte imprim (srie Faith and Order No. 73). Il est trs significatif que plus de cent glises de toutes les rgions et toutes les traditions aient envoy des commentaires dtaills. Ceux-ci ont t soigneusement analyss lors d'une consultation Crt-Brard, en 1977 (srie Faith and Order No. 84).

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    Conjointement, certains problmes particulirement difficiles furent galement analyss lors de consultations cumniques spciales tenues sur les thmes suivants : e Baptme des enfants et des adultes , Louisville, en 1978 (srie Faith and Order No. 97), Episcop et piscopat , Genve, en 1979 (srie Faith and Order No. 102). Le texte a t galement revu par des reprsentants des glises orthodoxes, Chambry, en 1979. Enfin, la Commission de Foi et Constitution a t autorise une nouvelle fois, par le Comit central du Conseil cumnique Dresden (1981) transmettre le document rvis (le texte de Lima de 1982) aux glises, en leur demandant leur rponse officielle, comme une tape vitale dans le processus cumnique de rception.

    Ce travail n'a pas t accompli seulement par Foi et Constitution. Les trois thmes du baptme, de l'eucharistie et du ministre ont fait l'objet d'une recherche dans beaucoup de dialogues cumniques. Les deux principaux types de conversations entre glises, le type bilatral et le type multilatral, ont prouv qu'ils taient complmentaires et mutuellement bnfiques. Les trois rapports du Forum sur les conversations bilatrales le montrent clairement : a Conceptions de l'unit (1978), g Consensus sur textes d'accord . (1979), Autorit et rception (1980) (srie Faith and Order No. 107). En consquence, la Commission de Foi et Constitution, dans sa propre recherche multilatrale concernant les trois thmes a essay de construire autant que possible sur les dcouvertes particulires des conversations bilatrales. En effet, l'une des tches de la Commission est d'valuer le rsultat de tous ces efforts particuliers au profit du mouvement cumnique dans son ensemble.

    Le tmoignage d'glises locales qui ont dj pass par le processus d'union par-del les divisions confessionnelles a t galement important pour le dveloppement de ce texte. Il est important de reconnatre que la recherche de l'union des glises locales et la recherche d'un consensus universel sont intimement lies.

    Peut-tre mme plus influents que les tudes officielles sont les changements qui se produisent dans la vie des glises elles-mmes. Nous vivons un moment crucial dans l'histoire de l'humanit. Tandis que les glises progressent vers l'unit, elles se demandent comment leurs comprhensions et pratiques du baptme, de l'eucharistie et du ministre sont en rapport avec leur mission dans et pour le renouveau de la communaut humaine, alors qu'elles cherchent promouvoir la justice, la paix et la rconciliation. Ce texte donc ne peut tre dissoci de la mission rdemptrice et libratrice du Christ par le moyen des glises dans le monde moderne.

    Comme rsultat des tudes bibliques et patristiques, du renouveau liturgique et de la ncessit d'un tmoignage commun, une communion fraternelle cumnique est apparue qui souvent transcende les frontires confessionnelles et dans laquelle les anciennes diffrences sont vues maintenant dans une lumire nouvelle. Ainsi, bien que le langage de ce texte: soit encore trs classique, dans l'effort de rconciliation des controverses historiques, il a une intention nettement contemporaine et relie aux contextes modernes. Cet esprit stimulera certainement beaucoup de reformulations du texte dans les langages varis de notre temps.

    * * *

    Jusqu'o ces efforts nous ont-ils conduits? Comme cela est manifeste dans le texte de Lima, nous avons dj atteint un degr remarquable d'accord. Certainement, nous ne sommes pas encore parvenus compltement un consensus (consentire), compris ici comme cette exprience de vie et d'expression de la foi ncessaire pour raliser et maintenir l'unit visible de l'glise. Un tel consensus est enracin dans la communion fonde sur le Christ et le tmoignage des aptres. En tant que don de l'Esprit, il se ralise comme une exprience partage avant de pouvoir tre exprim par des paroles, dans un effort concert. Un

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    consensus complet ne peut tre proclam qu'aprs que les glises ont atteint le point o elles peuvent vivre et agir ensemble dans l'unit.

    Sur le chemin vers le but de leur unit visible, cependant, les glises auront passer par diverses tapes. Elles ont t bnies nouveau par l'coute mutuelle et le retour, accompli ensemble, aux sources premires, c'est--dire la Tradition de l'vangile atteste dans l'criture, transmise dans et par l'glise, par la puissance du Saint-Esprit (Confrence mondiale de Foi et Constitution, 1963).

    En abandonnant les oppositions du pass, les glises ont commenc dcouvrir de nombreuses convergences pleines de promesses dans des convictions et des perspectives qu'elles partagent. Ces convergences donnent l'assurance que malgr beaucoup de diversit dans l'expression thologique, les Eglises ont beaucoup en commun dans leur comprhension de la foi. Le texte qui en rsulte tend devenir partie du reflet fidle et suffisant de la Tradition chrtienne sur des lments essentiels de la communion chrtienne. Dans le processus d'une croissance commune, avec une confiance mutuelle, les glises doivent dvelopper ces convergences doctrinales, tape par tape, jusqu' ce qu'elles soient capables finalement de dclarer ensemble qu'elles vivent en communion les unes avec les autres, dans la continuit avec les aptres et avec les enseignements de l'glise universelle.

    Ce texte de Lima reprsente les convergences thologiques significatives que Foi et Constitution a discernes et formules. Ceux qui savent combien les glises ont diverg dans la doctrine et la pratique du baptme, de l'eucharistie et du ministre, peuvent apprcier l'importance de la mesure d'accord enregistre ici. Pratiquement toutes les confessions traditionnelles sont incluses dans la participation la Commission. Que des thologiens de traditions aussi fortement diffrentes puissent tre capables de parler avec une telle harmonie sur le baptme, l'eucharistie et le ministre est un fait sans prcdent dans le mouvement cumnique moderne. Il faut noter avec une attention particulire le fait que la Commission comprend galement parmi ses membres de plein droit des thologiens de l'glise catholique romaine et d'autres glises qui n'appartiennent pas au Conseil cumnique des Eglises lui-mme.

    Au cours d'une valuation critique, l'intention premire de ce texte cumnique doit tre bien prsente l'esprit. Le lecteur ne doit pas s'attendre y trouver un expos thologique complet sur le baptme, l'eucharistie et le ministre. Ce ne serait ni appropri, ni dsirable. Le texte d'accord se concentre intentionnellement sur les aspects du thme qui sont directement ou indirectement en rapport avec les problmes de la reconnaissance mutuelle conduisant l'unit. Le texte principal montre les domaines de convergence thologique majeure; les commentaires qui s'y ajoutent indiquent soit des diffrences historiques surmontes, soit des points controverss qui exigent encore recherche et rconciliation.

    * * *

    A la lumire de tous ces dveloppements, la Commission de Foi et Constitution prsente maintenant ce texte de Lima 1982 aux glises. Nous faisons cela avec une conviction profonde, car nous sommes devenus de plus en plus conscients de notre unit dans le Corps du Christ. Nous avons trouv une raison de nous rjouir en redcouvrant les richesses de notre hritage commun dans l'vangile. Nous croyons que le Saint-Esprit nous a conduits jusqu' ce temps, kairos du mouvement cumnique, o les Eglises malheureusement divises ont t rendues capables d'arriver des accords thologiques substantiels. Nous croyons que de nombreux progrs significatifs sont possibles si, dans nos glises, nous avons suffisamment de courage et d'imagination pour accueillir le don de l'unit que Dieu nous accorde.

    Comme signe de leur engagement cumnique, les glises sont invites rendre possible le plus large engagement du peuple de Dieu, tous les niveaux de la vie de l'glise, dans le processus spirituel de

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    rception de ce texte. Des suggestions particulires en relation avec l'usage de ce texte dans le culte, le tmoignage et la rflexion des glises sont donnes en appendice.

    La Commission de Foi et Constitution invite maintenant respectueusement toutes les glises prparer une rponse officielle ce texte, un niveau d'autorit appropri le plus lev, soit un Conseil, soit un Synode, soit une Confrence, soit une Assemble ou toute autre institution. Pour favoriser le processus de rception, la Commission voudrait connatre aussi prcisment que possible :

    jusqu' quel point votre Eglise peut reconnatre dans ce texte la foi de l'glise travers les sicles;

    les consquences que votre glise peut tirer de ce texte pour ses relations et dialogues avec d'autres Eglises, particulirement avec les glises qui reconnaissent aussi le texte comme une expression de la foi apostolique;

    les indications que votre glise peut recevoir de ce texte en ce qui concerne sa vie et son tmoignage au plan du culte, de l'ducation, de l'thique et de la spiritualit;

    les suggestions que votre glise peut faire pour la suite du travail de Foi et Constitution, en ce qui concerne le rapport entre le matriel de ce texte sur le baptme, l'eucharistie et le ministre et son projet de recherche long terme sur L'expression commune de la foi apostolique aujourd'hui .

    Notre intention est de comparer toutes les rponses officielles reues, de publier les rsultats et d'analyser les implications cumniques pour les glises, lors d'une future Confrence mondiale de Foi et Constitution.

    Toute rponse ces questions devrait tre envoye avant le 31 dcembre 1984 au secrtariat de Foi et Constitution, Conseil cumnique des glises, 150 route de Ferney, 1211 Genve 20, Suisse.

    William H. Lazareth Nikos Nissiotis Directeur du Secrtariat Modrateur de la de Foi et Constitution Commission de Foi et Constitution

    N.B. On veillera bien distinguer le texte principal, rparti en paragraphes prcds d'un chiffre, et le commentaire, qui a pour but d'clairer le texte principal, mais sur lequel les Eglises n'ont pas se prononcer.

  • 1

    BAPTME

    I. L'institution du baptme

    1. Le baptme chrtien est fond dans le ministre de Jsus de Nazareth, dans sa mort et sa rsurrection. Il est incorporation en Christ, le Seigneur crucifi et ressuscit; il est entre dans l'Alliance nouvelle entre Dieu et son peuple. Le baptme est un don de Dieu et il est confr au nom du Pre, du Fils et du Saint-Esprit. Saint Matthieu rapporte que le Seigneur ressuscit, en envoyant ses disciples dans le monde, leur ordonna de baptiser (Mt 28,18-20). La pratique universelle du baptme par l'glise apostolique, depuis les premiers jours, est atteste dans les lettres du Nouveau Testament, les Actes des aptres et les crits des Pres. Les glises aujourd'hui continuent cette pratique comme un rite d'engagement l'gard du Seigneur, qui rpand sa grce sur son peuple.

    II. La signification du baptme

    2. Le baptme est le signe de la vie nouvelle en Jsus-Christ. Il unit le baptis avec le Christ et son peuple. Les critures du Nouveau Testament et la liturgie de l'glise dveloppent la signification du baptme, en utilisant des images varies, exprimant les richesses du Christ et les dons de son salut. Ces images sont parfois en relation avec les usages symboliques de l'eau dans l'Ancien Testament. Le baptme est participation la mort et la rsurrection du Christ (Rm 6,3-5; Col 2,12); purification du pch (I Co 6,11); nouvelle naissance (Jn 3,5); illumination par le Christ (Ep 5,14); changement de vtement en Christ (Ga 3,27); renouvellement par l'Esprit (Tt 3,5); exprience de dlivrance travers les flots de la destruction (I P 3,20-21); sortie de l'esclavage (I Co 10,1-2); libration en vue d'une nouvelle humanit dans laquelle sont dpasses les barrires entre les sexes, les races et les situations sociales (Ga 3,27-28; I Co 12,13). Les images sont nombreuses mais la ralit est une.

    A Participation la mort et la rsurrection du Christ

    3. Le baptme signifie une participation la vie, la mort et la rsurrection de Jsus-Christ. Jsus est descendu dans le Jourdain et a t baptis, en solidarit avec les pcheurs, afin d'accomplir toute justice (Mt 3,15). Ce baptme a conduit Jsus sur le chemin du Serviteur souffrant, manifest par sa passion, sa mort et sa rsurrection (Mc 10,38-40; 45). Par le baptme les chrtiens sont plongs dans la mort libratrice du Christ, o leurs pchs sont ensevelis, o le vieil Adam est crucifi avec le Christ et o le pouvoir du pch est bris. Ainsi, les baptiss ne sont plus esclaves du pch, mais libres. Totalement assimils la mort du Christ, ils sont ensevelis avec lui et ressuscitent, ici et maintenant, une vie nouvelle dans la puissance de la rsurrection de Jsus-Christ, confiants d'tre aussi un jour unis lui dans une rsurrection semblable la sienne (Rm 6,3-11; Col 2,13; 3,1; Ep 2,5-6).

  • 2

    B Conversion, pardon, purification

    4. Le baptme, qui fait participer les chrtiens au mystre de la mort et de la rsurrection du Christ, implique la confession du pch et la conversion du cur. Dj le baptme donn par Jean tait un baptme de conversion en vue du pardon des pchs (Mc 1,4). Le Nouveau Testament souligne les implications thiques du baptme en le reprsentant comme une ablution qui lave le corps avec une eau pure, une purification du cur de tout pch et un acte de justification (He 10,22; I P 3,21; Ac 22,16; I Co 6,11). Ainsi, les baptiss sont pardonns, purifis et sanctifis par le Christ; ils reoivent une nouvelle orientation thique, sous la conduite du Saint-Esprit, qui fait partie de leur exprience baptismale.

    C Don de l'Esprit

    5. Le Saint-Esprit est luvre dans les vies avant, pendant et aprs le baptme. C'est le mme Esprit qui a rvl Jsus comme le Fils (Mc 1,10-11) et qui a donn sa puissance aux disciples, ainsi que, l'unit, Pentecte (Ac 2). Dieu rpand sur chaque baptis l'onction du Saint Esprit promis, il les marque de son sceau et met dans leur cur l'acompte de leur hritage comme enfants de Dieu. Le Saint Esprit nourrit la vie de la foi dans leur cur, jusqu' la dlivrance finale o ils prendront possession de leur hritage, la louange de la gloire de Dieu (II Co 1,21-22; Ep 1,13-14).

    D Incorporation dans le Corps du Christ

    6. Clbr en obissance notre Seigneur, le baptme est un signe et un sceau de notre engagement commun de disciples. A travers leur propre baptme, les chrtiens sont conduits l'union avec le Christ, avec chacun des autres chrtiens et avec l'Eglise de tous les temps et de tous les lieux. Notre baptme commun, qui nous unit au Christ dans la foi, est ainsi un lien fondamental d'unit. Nous sommes un seul peuple et nous sommes appels confesser et servir un seul Seigneur, en chaque lieu et dans le monde entier. L'union avec le Christ que nous partageons par le baptme a des implications importantes pour l'unit chrtienne : Il y a... un seul baptme, un seul Dieu et Pre de tous... (Ep 4,4-6). Quand l'unit baptismale est ralise dans l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique, un tmoignage chrtien authentique peut tre rendu l'amour de Dieu qui gurit et rconcilie. C'est pourquoi notre unique baptme en Christ constitue un appel aux glises, pour qu'elles surmontent leurs divisions et manifestent visiblement leur communion.

    COMMENTAIRE

    Quand les glises sont incapables de reconnatre que leurs pratiques diverses du baptme sont une participation l'unique baptme, et lorsqu'elles restent divises malgr leur reconnaissance mutuelle du baptme, elles donnent l'image dramatique d'un tmoignage divis de l'glise. Lorsque les glises acceptent, en certains lieux et temps, que les diffrences de sexes, de races, de situations sociales, divisent le Corps du Christ, cela met en question l'authenticit de l'unit baptismale de la communaut chrtienne (Ga 3,27-28) et compromet srieusement son tmoignage. Le besoin de retrouver l'unit baptismale est au cur du travail cumnique; il est galement central pour vivre une authentique communion au sein des communauts chrtiennes.

  • 3

    E Signe du Royaume

    7. Le baptme ouvre sur la ralit de la vie nouvelle donne en ce monde. Il fait participer la communaut du Saint-Esprit. II est un signe du Royaume de Dieu et de la vie du monde venir. Grce aux dons de la foi, de l'esprance et de l'amour, le baptme possde une dynamique qui atteint toute la vie, s'tend toutes les nations et anticipe le jour o toute langue confessera que Jsus-Christ est le Seigneur la gloire de Dieu le Pre.

    III. Le baptme et la foi

    8. Le baptme est la fois le don de Dieu et notre rponse humaine ce don. Il tend une croissance vers l'tat d'adulte, la taille du Christ dans sa plnitude (Ep 4,13). Toutes les glises reconnaissent la ncessit de la foi pour recevoir le salut impliqu et manifest dans le baptme. L'engagement personnel est ncessaire pour tre un membre responsable dans le Corps du Christ.

    9. Le baptme ne consiste pas seulement en une exprience momentane, mais il concerne la croissance de toute une vie dans la communion du Christ. Les baptiss sont appels reflter la gloire du Seigneur, tre transfigurs en cette mme image, avec une gloire toujours plus grande, par la puissance du Saint-Esprit (II Co 3,18). La vie du chrtien est ncessairement un combat continuel, mais aussi une continuelle exprience de la grce. Dans cette relation nouvelle, les baptiss vivent pour le Christ, pour son Eglise et le monde qu'il aime, tout en attendant dans l'esprance la manifestation de la nouvelle cration de Dieu et le temps o Dieu sera tout en tous (Rm 8,18-24; I Co 15,22-28; 49-57).

    10. En croissant dans la vie de la foi, les croyants baptiss manifestent que l'humanit peut tre rgnre et libre. Ils ont la commune responsabilit, ici et maintenant, de rendre tmoignage ensemble l'vangile du Christ, le librateur de tous les tres humains. Le contexte de ce tmoignage commun c'est l'glise et le monde. Dans cette communion de tmoignage et de service, les chrtiens dcouvrent la pleine signification de l'unique baptme comme don de Dieu tout son peuple. De mme, ils reconnaissent que le baptme en la mort du Christ a des implications thiques, qui non seulement appellent la sanctification personnelle, mais aussi engagent les chrtiens lutter pour que se ralise la volont de Dieu dans tous les secteurs de la vie (Rm 6,9 ss; Ga 3,26-28; I P 2,21 - 4,6).

    IV. La pratique du baptme

    A Baptme des adultes et baptme des enfants

    11. II est possible que le baptme des enfants ait t pratiqu l'ge apostolique, mais le baptme aprs une profession de foi personnelle est la forme la plus clairement atteste dans les documents du Nouveau Testament. Au cours de l'histoire, la pratique du baptme s'est dveloppe selon des formes varies. Certaines Eglises baptisent des enfants prsents par des parents ou responsables disposs les lever, dans et avec l'Eglise, selon la foi chrtienne. D'autres Eglises pratiquent exclusivement le baptme des croyants capables de faire une confession de foi personnelle. Certaines de ces Eglises recommandent que les nouveau-ns ou les enfants soient prsents et bnis au cours d'un service qui comprend habituellement une action de grces pour le don de l'enfant et aussi

  • 4

    l'engagement de la mre et du pre tre des parents chrtiens. Toutes les Eglises baptisent des croyants qui, venant d'autres religions ou de l'incroyance, acceptent la foi chrtienne et participent une instruction catchtique.

    12. Le baptme des adultes et le baptme des enfants ont lieu, l'un et l'autre, au sein de l'Eglise comme communaut de foi. Lorsqu'un croyant responsable est baptis, une confession de foi personnelle fera partie intgrante du service baptismal. Lorsqu'un enfant est baptis, la rponse personnelle sera prsente plus tard dans sa vie. Dans les deux cas, le baptis aura grandir dans la comprhension de la foi. Dans le cas des baptiss qui confessent personnellement la foi, il y a toujours l'exigence d'une croissance continue de la rponse personnelle dans la foi. Dans le cas des enfants, une confession personnelle est attendue pour plus tard; l'ducation chrtienne est oriente vers le dveloppement de cette confession. Tout baptme est fond dans la fidlit du Christ jusqu' la mort et proclame cette fidlit. Il se situe au cur de la vie et de la foi de l'glise, et rvle par le tmoignage de toute l'glise la fidlit de Dieu, fondement de toute vie dans la foi. A chaque baptme, la communaut tout entire raffirme sa foi en Dieu et s'engage procurer au baptis un environnement de tmoignage et de service. Le baptme devrait donc toujours tre clbr et dvelopp dans le cadre de la communaut chrtienne.

    COMMENTAIRE

    Lorsqu'on utilise les expressions baptme des enfants et baptme des adultes , il faut avoir l'esprit que la relle distinction est entre ceux qui baptisent n'importe quel ge et ceux qui baptisent seulement les croyants capables de prononcer eux-mmes la confession de foi. Il y a moins de diffrence entre le baptme des enfants et le baptme des adultes, si l'on reconnat que les deux formes de baptme impliquent l'initiative de Dieu en Christ et expriment une rponse de la foi au sein de la communaut croyante.

    La pratique du baptme des enfants insiste sur la foi communautaire et la foi que l'enfant partage avec ses parents. L'enfant est n dans un monde bris et partage cette rupture. Par le baptme, la promesse et l'appel de l'vangile sont dposs sur l'enfant. La foi personnelle du baptis et sa participation fidle la vie de l'glise sont essentielles pour que le baptme porte tous ses fruits.

    La pratique du baptme des adultes souligne la confession explicite de la personne qui rpond la grce de Dieu, dans et travers la communaut de foi, et qui demande le baptme. Les deux formes de baptme exigent une attitude responsable identique concernant l'ducation chrtienne. Une redcouverte du caractre permanent de la formation chrtienne peut faciliter l'acceptation mutuelle de diffrentes pratiques d'initiation.

    Dans certaines glises qui runissent les deux traditions du baptme des enfants et du baptme des adultes, il a t possible de considrer comme des alternatives quivalentes pour l'entre dans l'glise, d'une part la forme o le baptme dans l'enfance est suivi plus tard d'une profession de foi, et d'autre part la forme o le baptme d'adultes vient la suite d'une prsentation et bndiction dans l'enfance. Cet exemple invite d'autres glises dcider si, galement, elles ne pourraient pas reconnatre des alternatives quivalentes dans leurs relations rciproques et dans les ngociations d'union entre glises.

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    13. Le baptme est un acte qui ne peut tre rpt. Il faut viter toute pratique qui pourrait tre interprte comme un re-baptme .

    COMMENTAIRE

    Des glises qui ont insist sur une forme particulire du baptme, ou qui ont eu de srieuses questions propos de l'authenticit des sacrements et des ministres d'autres glises, ont parfois demand des personnes venant d'autres traditions ecclsiales d'tre baptises avant de devenir pleinement des membres communiants. Puisque les glises arrivent une comprhension mutuelle plus grande et s'acceptent l'une l'autre, puisqu'elles entrent en relations plus troites de tmoignage et de service, elles s'abstiendront de toute pratique qui pourrait mettre en question l'intgrit sacramentelle d'autres glises ou attnuer le fait que le sacrement du baptme ne peut tre rpt.

    B Baptme Chrismation Confirmation

    14. Dans luvre de Dieu pour le salut, le mystre pascal de la mort et de la rsurrection du Christ est insparablement li au don pentecostal du Saint-Esprit. De mme, la participation la mort et la rsurrection du Christ est insparablement lie la rception de l'Esprit. Le baptme dans son sens plnier signifie et accomplit l'une et l'autre.

    Les chrtiens diffrent dans leur comprhension de la place du signe du don de l'Esprit. La transmission de l'Esprit a t associe diffrents gestes. Pour certains, c'est le rite de l'eau lui-mme. Pour d'autres, c'est l'onction avec le chrme et (ou) l'imposition des mains que beaucoup d'glises appellent confirmation. Pour d'autres encore ce sont les trois, car ils considrent que l'Esprit agit travers tout le rite. Tous sont' d'accord pour dire que le baptme chrtien est un baptme dans l'eau et dans l'Esprit-Saint.

    COMMENTAIRE

    (a) Dans certaines traditions, on explique que, comme le baptme nous conforme au Christ crucifi, enseveli et ressuscit, ainsi, par la chrismation, les chrtiens reoivent le don de l'Esprit de la Pentecte de la part du Fils qui a reu l'onction.

    (b) Si le baptme, comme incorporation au Corps du Christ, tend, par sa nature mme, la communion eucharistique au corps et au sang du Christ, la question se pose de savoir pourquoi un rite spar peut s'ajouter entre baptme et admission la communion. Les glises qui baptisent des enfants, mais leur refusent la communion l'eucharistie avant un tel rite, devraient se demander si elles ont pleinement valu et accept les consquences du baptme.

    (c) Le baptme doit tre sans cesse raffirm. La forme la plus naturelle d'une telle raffirmation est la clbration de l'eucharistie. Le renouvellement des vux du baptme peut aussi prendre place certaines occasions, comme la clbration annuelle du mystre pascal ou lors du baptme d'autres personnes.

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    C Pour une reconnaissance mutuelle du baptme

    15. Les glises sont de plus en plus capables de reconnatre le baptme les unes des autres comme l'unique baptme du Christ, dans la mesure o Jsus-Christ a t confess comme Seigneur par le candidat, ou, dans le cas d'un baptme d'enfant, lorsque cette confession a t faite par l'glise (les parents, responsables, parrains, marraines, et la communaut) et affirme plus tard dans la foi personnelle et l'engagement. La reconnaissance mutuelle du baptme est videmment un signe important et un moyen d'exprimer l'unit baptismale donne en Christ. Partout o &est possible, les Eglises devraient exprimer de manire explicite la reconnaissance mutuelle de leurs baptmes.

    16. Afin de surmonter leurs diffrences, ceux qui pratiquent le baptme des adultes et ceux qui baptisent les enfants devraient reconsidrer certains aspects de leurs manires de faire. Les premiers devraient chercher exprimer plus visiblement le fait que les enfants sont placs sous la protection de la grce de Dieu. Les seconds devraient se garder contre la pratique de baptmes apparemment sans rflexion pralable et prendre plus au srieux leur responsabilit dans l'ducation des enfants baptiss en vue d'un engagement adulte pour le Christ.

    V. La clbration du baptme

    17. Le baptme est clbr avec de l'eau, au nom du Pre, du Fils et du Saint-Esprit.

    18. Dans la clbration du baptme, la valeur symbolique de l'eau devrait tre prise au srieux et ne pas tre minimise. L'acte de l'immersion peut exprimer de faon concrte le fait que, dans le baptme, le chrtien participe la mort, l'ensevelissement et la rsurrection du Christ.

    COMMENTAIRE

    Dans certaines traditions thologiques, l'usage de l'eau, toutes ses associations positives avec la vie et la

    bndiction, signifient la continuit entre l'ancienne et la nouvelle cration, manifestant ainsi la signification du baptme non seulement pour les tres humains mais aussi pour tout le cosmos. En mme temps, l'usage de l'eau reprsente une purification de la cration, une mort tout ce qui est ngatif et destructif dans le monde : ceux qui sont baptiss dans le Corps du Christ sont faits participants d'une nouvelle existence.

    19. Comme ce fut le cas dans les premiers sicles, le don de l'Esprit au baptme peut tre signifi de manires diverses : par exemple par le signe de l'imposition des mains et par l'onction ou chrismation. Le signe de la croix voque la marque du sceau de l'Esprit promis, signe eschatologique et acompte de l'hritage final dans le Royaume de Dieu (Ep 1, 13-14). La redcouverte de tels signes concrets peut approfondir la liturgie.

    20. Dans une liturgie complte du baptme, on devrait trouver au moins les lments suivants : une proclamation des textes de l'criture se rapportant au baptme; une invocation du Saint-Esprit; une renonciation au mal; une profession de foi au Christ et la Sainte Trinit; l'usage de l'eau; une dclaration que les personnes baptises ont acquis

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    une nouvelle identit comme fils et filles de Dieu, et comme membres de l'glise, appels rendre tmoignage l'Evangile. Certaines glises considrent que l'initiation chrtienne n'est pas complte sans le sceau du Saint-Esprit donn au baptis et la participation la communion.

    21. Il convient que, dans le cadre du service baptismal, on donne une explication du sens du baptme, conformment l'criture : participation la mort et la rsurrection du Christ, conversion, pardon et purification, don de l'Esprit, incorporation dans le Corps du Christ et signe du Royaume.

    COMMENTAIRE

    Des discussions rcentes montrent qu'il faudrait accorder plus d'attention des malentendus entretenus par le contexte socio-culturel dans lequel se situe le baptme.

    (a) Dans certaines parties du monde, l'usage de donner un prnom au baptis au cours de la liturgie baptismale a conduit la confusion entre baptme et coutumes locales de l'attribution d'un nom. Cette confusion est particulirement regrettable si, dans des cultures prdominance non chrtienne, les baptiss doivent recevoir des prnoms chrtiens qui ne sont pas enracins dans leur tradition culturelle. En laborant leurs disciplines du baptme, les Eglises devraient tre attentives mettre l'accent sur la vraie signification du baptme pour viter que les baptiss soient inutilement loigns de leur culture locale par l'imposition de prnoms trangers. Un prnom reu de sa propre culture d'origine enracine le baptis dans cette culture et, en mme temps, manifeste l'universalit du baptme, incorporation dans l'glise une, sainte, catholique et apostolique, qui s'tend sur toutes les nations de la terre.

    (b) Dans beaucoup d'Eglises multitudinistes europennes et nord-amricaines, on pratique souvent le baptme des enfants apparemment sans aucune discrimination. Cela contribue au peu d'empressement des glises pratiquant le baptme des adultes reconnatre la validit de ce baptme; ce fait devrait conduire une rflexion plus critique sur la signification du baptme au sein des glises multitudinistes elles-mmes.

    (c) Certaines Eglises africaines pratiquent le baptme du Saint-Esprit, sans eau, par l'imposition des mains, tout en reconnaissant le baptme des autres glises. Une tude est ncessaire en ce qui concerne cette pratique et sa relation avec le baptme d'eau.

    22. Le baptme est normalement clbr par un ministre ordonn, bien que dans certaines circonstances d'autres soient autoriss baptiser.

    23. Puisque le baptme est troitement li la vie communautaire et au culte de l'glise, il devrait tre clbr pendant un service liturgique public de sorte que les membres de la communaut se rappellent leur propre baptme, accueillent les baptiss dans leur communion fraternelle et s'engagent les former dans la foi chrtienne. Comme c'tait la pratique dans l'glise ancienne, les grandes ftes de Pques, de Pentecte et de l'piphanie conviennent bien la clbration du baptme.

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    EUCHARISTIE

    I. L'institution de l'eucharistie

    1. L'glise reoit l'eucharistie comme un don de la part du Seigneur. Saint Paul crivait : Voici ce que j'ai reu du Seigneur, et ce que je vous ai transmis : le Seigneur Jsus, dans la nuit o il fut livr, prit du pain, et, aprs avoir rendu grce, il le rompit et dit : Ceci est mon corps, qui est pour vous, faites cela en mmorial (anamnesis) de moi . Il fit de mme pour la coupe, aprs le repas, en disant : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang; faites cela, toutes les fois que vous en boirez, en mmorial de moi. (I Co 11,23-25; cf. Mt 26,26-29; Mc 14,22-25; Lc 22,14-20).

    Les repas que Jsus a partags durant son ministre terrestre, et dont le rcit nous est conserv, proclament et mettent en oeuvre le Royaume tout proche : la multiplication des pains en est un signe. Lors de son dernier repas, la communion du Royaume a t mise en relation avec la perspective des souffrances de Jsus. Aprs sa rsurrection, le Seigneur a manifest sa prsence et s'est fait connatre ses disciples dans la fraction du pain. Ainsi 1'eucharistie est en continuit avec ces repas de Jsus durant sa vie terrestre et aprs sa rsurrection, qui sont toujours des` signes du Royaume. Les chrtiens considrent que l'eucharistie est prfigure par le mmorial de la dlivrance, dans la Pque d'Isral, libration du pays de servitude, et par le repas de l'Alliance au mont Sina (Ex 24). Elle est le nouveau repas pascal de l'glise, le repas de la Nouvelle Alliance que le Christ a donn ses disciples comme le mmorial (anamnesis) de sa mort et de sa rsurrection, comme l'anticipation du festin de l'Agneau (Ap 19,9); le Christ a ordonn ses disciples de faire mmoire de lui et de le rencontrer ainsi, dans ce repas sacramentel, comme peuple de Dieu prgrinant, jusqu' son retour.

    Le dernier repas clbr par Jsus fut un repas liturgique qui utilisait des paroles et des gestes symboliques. En consquence, l'eucharistie est un repas sacramentel qui, par le moyen de signes visibles, nous communique l'amour de Dieu en Jsus-Christ, l'amour dont Jsus aima les siens jusqu' l'extrme (Jn 13,1). On lui a donn divers noms, par exemple : le repas du Seigneur, la fraction du pain, la sainte cne, la sainte communion, la divine liturgie, la messe. Sa clbration est toujours l'acte central du culte de l'glise.

    II. La signification de l'eucharistie

    2. L'eucharistie est essentiellement le sacrement du don que Dieu nous fait en Christ par la puissance du Saint-Esprit. Chaque chrtien reoit ce don du salut par la communion au corps et au sang du Christ. Dans le repas eucharistique, dans l'acte de manger le pain et de boire le vin, le Christ accorde la communion avec lui. Dieu lui-mme agit dans l'eucharistie en donnant vie au Corps du Christ et en renouvelant chaque membre de ce corps. Selon la promesse du Christ, chaque baptis, membre du Corps du Christ, reoit dans l'eucharistie l'assurance de la rmission des pchs (Mt 26,28) et le

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    gage de la vie ternelle (Jn 6,51-58). Bien que l'eucharistie soit essentiellement un tout, elle sera considre ici sous les aspects suivants : action de grce au Pre, mmorial du Christ, invocation de l'Esprit, communion des fidles, repas du Royaume.

    A L'eucharistie comme action de grce au Pre

    3. L'eucharistie, qui contient toujours la fois parole et sacrement, est une proclamation et une clbration de luvre de Dieu. L'eucharistie est la grande action de grce au Pre pour tout ce qu'il a accompli dans la cration, la rdemption et la sanctification, pour tout ce qu'il accomplit maintenant dans l'glise et dans le monde malgr le pch des tres humains, pour tout ce qu'il accomplira en conduisant son Royaume la plnitude. Ainsi, l'eucharistie est la bndiction (berakah) par laquelle l'glise exprime sa reconnaissance envers Dieu pour tous ses bienfaits.

    4. L'eucharistie est le grand sacrifice de louange, par lequel l'glise parle au nom de la cration tout entire. En effet, le monde que Dieu a rconcili avec lui-mme est prsent chaque eucharistie : dans le pain et le vin, dans la personne des fidles et dans les prires qu'ils offrent pour eux et pour tous les humains. Le Christ unit les fidles sa personne et leurs prires sa propre intercession, de sorte que les fidles sont transfigurs et leurs prires acceptes. Ce sacrifice de louange n'est possible que par le Christ, avec lui et en lui. Le pain et le vin, fruits de la terre et du travail des hommes, sont prsents au Pre dans la foi et l'action de grce. Ainsi, l'eucharistie rvle au monde ce qu'il doit devenir : une offrande et une louange au Crateur, une communion universelle dans le Corps du Christ, un royaume de justice, d'amour et de paix dans l'Esprit Saint.

    B L'eucharistie comme anamnse ou mmorial du Christ

    5. L'eucharistie est le mmorial du Christ crucifi et ressuscit, c'est--dire le signe vivant et efficace de son sacrifice, accompli une fois pour toutes sur la croix et toujours agissant en faveur de toute l'humanit. La conception biblique du mmorial applique l'eucharistie. exprime cette efficacit actuelle de luvre de Dieu quand elle est clbre par son peuple sous forme de liturgie.

    6. Le Christ lui-mme, avec tout ce qu'il a accompli pour nous et pour la cration entire (dans son incarnation, sa condition de serviteur, son ministre, son enseignement, sa souffrance, son sacrifice, sa rsurrection, son ascension et l'envoi de l'Esprit Saint) est prsent dans ce mmorial : il nous accorde la communion avec lui. L'eucharistie est aussi l'avant-got de son retour et du Royaume ternel.

    7. Le mmorial, o le Christ agit travers la clbration joyeuse de son glise, est donc la fois reprsentation et anticipation. Le mmorial n'est pas seulement un rappel du pass ou de sa signification, il est la proclamation efficace par l'glise du grand oeuvre de Dieu et de ses promesses.

    8. Le mmorial, comme reprsentation et anticipation, s'accomplit sous forme d'action de grce et d'intercession. Proclamant devant Dieu, dans l'action de grce, le grand oeuvre de la rdemption, l'glise intercde auprs de lui, pour qu'il accorde tout tre les bienfaits de cette libration. Dans cette action de grce et cette intercession, l'glise est unie avec le Fils, son Grand Prtre et son Intercesseur (Rm 8,34; He 7,25). L'eucharistie est le sacrement du sacrifice unique du Christ, toujours vivant pour intercder en notre faveur. Elle est le mmorial de tout ce que Dieu a fait pour le salut du monde. Ce que

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    Dieu a voulu accomplir dans l'incarnation, la vie, la mort, la rsurrection et l'ascension du Christ, il ne le refait pas; ces vnements sont uniques, ils ne peuvent tre ni rpts, ni prolongs. Mais, dans le mmorial de l'eucharistie, l'glise offre son intercession, dans la communion du Christ notre Grand Prtre.

    COMMENTAIRE

    C'est la lumire de cette signification de l'eucharistie comme intercession que l'on peut comprendre les rfrences l'eucharistie comme sacrifice propitiatoire en thologie catholique. Il n'y a qu'une expiation, celle du sacrifice unique de la croix, rendu agissant dans l'eucharistie et prsent au Pre dans l'intercession du Christ et de l'glise pour toute l'humanit. A la lumire de la conception biblique du mmorial, toutes les glises pourraient revoir les vieilles controverses propos de la notion de sacrifice et approfondir leur comprhension des raisons pour lesquelles d'autres traditions ont utilis ou rejet ce terme.

    9. Le mmorial du Christ est le fondement et la source de toute prire chrtienne. Notre prire s'appuie sur l'intercession continuelle du Seigneur ressuscit, elle est unie cette intercession. Dans l'eucharistie, le Christ nous donne la force de vivre avec lui, de souffrir avec lui et de prier par lui, comme des pcheurs justifis accomplissant librement et joyeusement sa volont.

    10. En Christ nous nous offrons nous-mmes en sacrifice vivant et saint dans toute notre vie quotidienne (Rm 12,1; I P 2,5) : ce culte spirituel agrable Dieu s'alimente l'eucharistie, o nous sommes sanctifis et rconcilis dans l'amour pour tre serviteurs de la rconciliation dans le monde.

    11. Unis notre Seigneur et en communion avec tous les saints et martyrs, nous sommes renouvels dans l'alliance scelle par le sang du Christ.

    12. Puisque l'anamnse du Christ est le vrai contenu de la Parole proclame comme elle est l'essence du repas eucharistique, l'une renforce l'autre. La clbration de l'eucharistie implique normalement la proclamation de la Parole.

    13. Les paroles et gestes du Christ dans l'institution de l'eucharistie sont au cur de la clbration : le repas eucharistique est le sacrement du corps et du sang du Christ, le sacrement de sa prsence relle. Le Christ accomplit de multiples faons sa promesse d'tre avec les siens pour toujours jusqu' la fin du monde. Mais le mode de la prsence du Christ dans l'eucharistie est unique. Jsus a dit sur le pain et le vin de l'eucharistie : Ceci est mon corps... Ceci est mon sang... Ce que le Christ a dit est la vrit et s'accomplit chaque fois que l'eucharistie est clbre. L'glise confesse la prsence relle, vivante et agissante du Christ dans l'eucharistie. Bien que la prsence relle du Christ dans l'eucharistie ne dpende pas de la foi des individus, tous sont d'accord pour dire que le discernement du corps et du sang du Christ requiert la foi.

    COMMENTAIRE

    C'est la foi de beaucoup d'glises que par les paroles mmes de Jsus et par la puissance de l'Esprit Saint, le pain et le vin de l'eucharistie deviennent, d'une manire relle et dans le mystre, le corps et le sang du Christ ressuscit, c'est--

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    dire du Christ vivant prsent dans toute sa plnitude. Sous les signes du pain et du vin, la ralit profonde est l'tre total du Christ, qui vient nous pour nous nourrir et transformer tout notre tre. D'autres glises, tout en affirmant la prsence relle du Christ l'eucharistie, ne lient pas cette prsence de manire aussi dfinie aux signes du pain et du vin. Les glises ont dcider si cette diffrence peut coexister avec la convergence formule dans le texte lui-mme.

    C L'eucharistie comme invocation de l'Esprit

    14. L'Esprit Saint fait que le Christ crucifi et ressuscit soit rellement prsent pour nous dans le repas eucharistique, en accomplissant la promesse contenue dans les paroles de l'institution. Il est vident que l'eucharistie est centre sur la prsence du Christ et donc que la promesse contenue dans les paroles de l'institution est fondamentale pour la clbration. Cependant, le Pre est l'origine premire et l'accomplissement final de l'vnement eucharistique. Le Fils de Dieu fait homme, par qui, avec qui et en qui il s'accomplit, en est le centre vivant. Le Saint-Esprit est l'incommensurable force d'amour qui l'opre et qui continue de le rendre efficace. Ce lien de la clbration eucharistique avec le mystre de Dieu-Trinit situe le rle de l'Esprit Saint comme celui qui actualise et vivifie les paroles historiques du Christ. Dans la certitude d'tre exauce en raison de la promesse de Jsus dans les paroles de l'institution, l'glise demande au Pre l'Esprit Saint pour qu'il accomplisse l'vnement eucharistique : la prsence relle du Christ crucifi et ressuscit donnant sa vie pour toute l'humanit.

    COMMENTAIRE

    Il ne s'agit pas d'une, spiritualisation de la prsence eucharistique du Christ, mais de l'affirmation d'une union indissoluble entre le Fils et l'Esprit. Cette union manifeste que l'eucharistie n'est pas un acte magique et automatique, mais qu'elle est une prire qui s'adresse au Pre, soulignant la totale dpendance de l'glise son gard. Les paroles de l'institution, promesse du Christ, et l'piclse, invocation de l'Esprit, sont donc en troite relation dans la liturgie. L'piclse est situe diffremment par rapport aux paroles de l'institution dans les diverses traditions liturgiques. Dans les liturgies primitives, toute la prire eucharistique tait conue comme apportant la ralit promise par le Christ. L'invocation de l'Esprit tait faite la fois sur la communaut et sur les lments du pain et du vin. En retrouvant cette conception, nous pourrions surmonter nos difficults concernant un moment particulier de la conscration.

    15. C'est en vertu de la parole vivante du Christ et par la puissance du Saint-Esprit que le pain et le vin deviennent les signes sacramentels du corps et du sang du Christ. Ils le demeurent en vue de la communion.

    COMMENTAIRE

    Dans l'histoire de l'glise, il y a eu diverses tentatives pour comprendre le mystre de la prsence relle unique du Christ dans l'eucharistie. Certains se limitent l'affirmation pure et simple de cette prsence sans vouloir l'expliquer. D'autres considrent comme ncessaire l'affirmation d'un changement accompli par l'Esprit Saint et les paroles du Christ, qui fait qu'il n'y a plus un pain et un vin ordinaires mais le corps et le sang du Christ. D'autres enfin ont labor une explication de la prsence relle, qui ne prtend pas puiser la signification du mystre, mais veut la protger contre les interprtations nuisibles.

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    16. Toute la clbration de l'eucharistie a un caractre picltique , c'est--dire qu'elle est dpendante de l'action du Saint-Esprit. Cet aspect de l'eucharistie trouve une expression varie dans les paroles de la liturgie.

    17. L'glise, comme communaut de la nouvelle alliance, invoque l'Esprit avec confiance, afin d'tre sanctifie et renouvele, conduite en toute justice, vrit et unit, et fortifie pour remplir sa mission dans le monde.

    18. Le Saint-Esprit, par l'eucharistie, donne un avant-got du Royaume de Dieu : l'glise reoit la vie de la nouvelle cration et l'assurance du retour du Seigneur.

    D L'eucharistie comme communion des fidles

    19. La communion eucharistique avec le Christ prsent, qui nourrit la vie de l'Eglise, est en mme temps communion dans le Corps du Christ qu'est l'glise. Le partage du mme pain et de la coupe commune, en un lieu donn, manifeste et accomplit l'unit des participants avec le Christ et avec tous les communiants, en tous temps et en tous lieux. C'est dans l'eucharistie que la communaut du peuple de Dieu est pleinement manifeste. Les clbrations eucharistiques sont toujours en relation avec l'glise tout entire, et toute l'glise est implique dans chaque clbration eucharistique. Dans la mesure o une glise prtend tre une manifestation de l'glise universelle, elle devrait prendre soin d'ordonner sa propre vie selon des voies qui prennent au srieux les intrts et proccupations des Eglises surs.

    COMMENTAIRE

    Ds les dbuts, le baptme a t conu comme le sacrement par lequel les croyants sont incorpors au Corps du Christ et remplis de l'Esprit Saint. Si donc une glise, ses ministres et ses fidles, contestent d'autres glises, leurs baptiss et leurs ministres, le droit de participer l'eucharistie ou de la prsider, la catholicit de l'eucharistie est moins manifeste. Dans beaucoup d'Eglises aujourd'hui il y a une discussion propos de l'admission des enfants baptiss comme communiants l'eucharistie.

    20. L'eucharistie embrasse tous les aspects de la vie. Elle est un acte reprsentatif d'action de grce et d'offrande au nom du monde entier. La clbration eucharistique prsuppose la rconciliation et le partage avec tous, regards comme frres et surs de l'unique famille de Dieu; elle est un constant dfi dans la recherche de relations normales au sein de la vie sociale, conomique et politique (Mt 5, 23 ss; I Co. 10,16 ss; I Co. 11,20-22; Ga. 3,28). Toutes les formes d'injustice, de racisme, de sparation et d'absence de libert sont radicalement mises au dfi quand nous partageons le corps et le sang du Christ. A travers l'eucharistie, la grce de Dieu qui renouvelle tout pntre et restaure la personne humaine et sa dignit. L'eucharistie entrane le croyant dans l'vnement central de l'histoire du monde. Comme participants l'eucharistie, donc, nous nous montrons inconsquents si nous ne participons pas activement cette restauration continue de la situation du monde et de la condition humaine. L'eucharistie nous montre que notre comportement est inconsistant en face de la prsence rconciliatrice de Dieu dans l'histoire humaine : nous sommes placs sous un jugement continuel parla persistance de relations injustes de toutes sortes dans notre socit, par les nombreuses divisions dues l'orgueil humain, l'intrt matriel et aux politiques du pouvoir, et enfin par

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    l'obstination dans des oppositions confessionnelles injustifiables au sein du Corps du Christ.

    21. La solidarit dans le Corps du Christ, affirme par la communion eucharistique, et la responsabilit des chrtiens les uns l'gard des autres, et envers le monde, trouvent une expression particulire dans les liturgies : le pardon mutuel des pchs, le signe de paix, l'intercession pour tous, manger et boire ensemble, porter les lments eucharistiques aux malades et aux prisonniers ou clbrer l'eucharistie avec eux. Tous ces signes de l'amour fraternel dans l'eucharistie sont directement lis au propre tmoignage du Christ serviteur : les chrtiens eux-mmes participent sa condition de serviteur. Dieu, en Christ, est entr dans la condition humaine; ainsi, la liturgie eucharistique est proche des situations concrtes et particulires des hommes et des femmes. Dans l'glise primitive, le ministre des diacres et des diaconesses tait spcifiquement responsable de manifester cet aspect de l'eucharistie. L'exercice d'un tel ministre entre la Table et la misre humaine exprime concrtement la prsence libratrice du Christ dans le monde.

    E L'eucharistie comme repas du Royaume

    22. L'eucharistie ouvre sur la vision du Royaume de Dieu, promis comme le renouvellement final de la cration, elle en est un avant-got. Des signes de ce renouveau sont prsents dans le monde partout o la grce de Dieu se manifeste et o les tres humains travaillent pour la justice, l'amour et la paix. L'eucharistie est la fte dans laquelle l'glise rend grce Dieu pour ces signes, clbre et anticipe dans la joie la venue du Royaume en Christ (I Co 11,26; Mt 26,29).

    23. Le monde promis au renouveau est prsent dans toute la clbration eucharistique. Le monde est prsent dans l'action de grce au Pre, o l'glise parle au nom de la cration tout entire; le monde est prsent pendant le mmorial du Christ, o l'glise est unie son Grand Prtre et Intercesseur, dans sa prire pour toute l'humanit; le monde est prsent au moment de l'invocation pour le don de l'Esprit, o l'glise aspire la sanctification et la nouvelle cration.

    24. Rconcilis dans l'eucharistie, les membres du Corps du Christ sont appels tre serviteurs de la rconciliation parmi les hommes et les femmes, et tmoins de la joie dont la source est la rsurrection. Comme Jsus allait la rencontre des publicains et des pcheurs et partageait leurs repas, durant son ministre terrestre, ainsi les chrtiens sont appels, dans l'eucharistie, tre en solidarit avec les marginaux et devenir signes de l'amour du Christ, qui a vcu et s'est sacrifi pour tous, qui se donne maintenant lui-mme dans l'eucharistie.

    25. La clbration de l'eucharistie est un moment o l'glise participe la mission de Dieu dans le monde. Cette participation prend forme quotidiennement dans la proclamation de l'vangile, le service du prochain et la prsence fidle au monde.

    26. Don total de Dieu, l'eucharistie offre la ralit nouvelle qui transforme la vie des chrtiens, afin qu'ils soient l'image du Christ et deviennent ses tmoins efficaces. L'eucharistie est ainsi une prcieuse nourriture pour les missionnaires, le pain et le vin des plerins, en vue de leur exode apostolique dans le monde. La communaut eucharistique est nourrie de manire pouvoir confesser en parole et en action que Jsus-Christ est le Seigneur qui a offert sa vie pour le salut du monde. En devenant un peuple unique autour

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    d'un repas unique, l'assemble eucharistique doit ncessairement tre soucieuse du rassemblement de ceux qui sont au-del de ses limites visibles, parce que c'est le Christ qui a invit son festin tous ceux pour lesquels il est mort. Le fait que les chrtiens ne puissent se runir en une pleine communion la mme table, pour manger le mme pain et boire la mme coupe, constitue un affaiblissement de leur tmoignage missionnaire individuel et commun.

    III. La clbration de l'eucharistie

    27. La liturgie eucharistique est essentiellement un tout, impliquant historiquement les lments suivants, qui peuvent se prsenter dans un ordre diffrent et dont l'importance n'est pas gale :

    chant de louange; acte de repentance; dclaration du pardon; proclamation de la Parole de Dieu, de diverses faons; confession de la foi (credo); intercession pour toute l'glise et pour le monde; prparation du pain et du vin; action de grce au Pre pour les merveilles de la cration, de la rdemption et de la sanctification (dont l'origine est la berakah de la

    tradition juive); paroles du Christ pour l'institution du sacrement, selon la tradition no-testamentaire; anamnse ou mmorial des grands actes de la rdemption : passion, mort,

    rsurrection, ascension du Christ et pentecte qui a conduit l'glise l'existence; invocation du Saint-Esprit sur la communaut et sur les lments du pain et du vin

    (piclse, soit avant les paroles de l'institution, soit aprs le mmorial, ou l'un et l'autre, ou une autre rfrence l'Esprit Saint, qui exprime adquatement le caractre picltique de l'eucharistie);

    conscration des fidles Dieu; rappel de la communion des saints; prire pour la venue du Seigneur et la manifestation dfinitive de son Royaume; amen de toute la communaut; oraison dominicale; signe de rconciliation et de paix; fraction du pain; manger et boire en communion avec le Christ et avec chaque membre de l'glise; louange finale; bndiction et envoi en mission. 28. La meilleure voie vers l'unit dans la clbration eucharistique et la communion est le renouveau lui-mme de l'eucharistie dans les diverses glises, au plan de l'enseignement et de la liturgie. Les Eglises devraient examiner nouveau leurs liturgies la lumire de l'accord eucharistique grandissant. Le mouvement de rforme liturgique a rapproch les Eglises dans leur manire de clbrer l'eucharistie. Cependant, une certaine diversit liturgique compatible avec notre foi eucharistique commune est reconnue comme une ralit saine et enrichissante. L'affirmation d'une foi commune propos de l'eucharistie n'implique pas l'uniformit dans la liturgie et la pratique.

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    COMMENTAIRE

    Depuis l'poque du Nouveau Testament, l'glise attache une trs grande importance l'usage continu des lments du pain et du vin que Jsus a employs la sainte Cne. Dans certaines parties du monde, o le pain et le vin ne peuvent pas tre obtenus facilement, on prtend quelquefois aujourd'hui que la nourriture et la boisson locales servent mieux enraciner l'eucharistie dans la vie de tous les jours. Une tude ultrieure s'impose concernant la question de savoir quels aspects de la sainte Cne sont inchangeables en raison de l'institution de Jsus, et quels aspects peuvent dpendre de la comptence et de la dcision de l'glise.

    29. Dans la clbration de l'eucharistie, le Christ rassemble, enseigne et nourrit l'glise. C'est le Christ qui invite au repas et le prside. Il est le Pasteur qui conduit le Peuple de Dieu, le Prophte qui annonce la Parole de Dieu, le Prtre qui clbre le Mystre de Dieu. Dans la plupart des glises, cette prsidence du Christ a pour signe celle d'un ministre ordonn. Celui qui prside la clbration eucharistique au nom du Christ manifeste que l'assemble n'est pas propritaire du geste qu'elle accomplit, qu'elle n'est pas matresse de l'eucharistie : elle la reoit comme un don du Christ vivant dans son glise. Le ministre de l'eucharistie est l'envoy qui reprsente l'initiative de Dieu et exprime le lien de la communaut locale avec les autres communauts dans l'glise universelle.

    30. La foi chrtienne s'approfondit dans la clbration de l'eucharistie. Ainsi, l'eucharistie devrait tre clbre frquemment. Bien des diffrences de thologie, de liturgie et de pratique sont lies la frquence de la clbration eucharistique.

    31. Puisque l'eucharistie clbre la rsurrection du Christ, il serait normal qu'elle ait lieu au moine tous les dimanches. Puisqu'elle est le nouveau repas sacramentel du peuple de Dieu, tout chrtien devrait tre encourag recevoir la communion frquemment.

    32. Certaines glises insistent sur la dure de la prsence du Christ dans les lments consacrs de l'eucharistie, aprs la clbration; d'autres mettent l'accent majeur sur l'acte de la clbration elle-mme et la consommation des lments dans la communion. La manire de traiter les lments rclame une attention particulire. En ce qui concerne la rservation des lments, chaque glise devrait respecter les pratiques et la pit des autres. tant donn la diversit parmi les glises et en tenant compte aussi de la situation prsente dans le dveloppement des convergences, il est utile de suggrer

    que, d'un ct, on rappelle, notamment dans la catchse et la prdication, que l'intention premire de la rservation des lments est leur distribution aux malades et aux absents;

    et que, d'un autre ct, on reconnaisse que la meilleure faon de tmoigner le respect d aux lments qui ont servi la clbration eucharistique est leur consommation, sans exclure leur usage pour la communion des malades.

    33. La comprhension mutuelle croissante exprime dans le prsent document peut permettre certaines Eglises d'atteindre une plus grande mesure de communion eucharistique entre elles et ainsi de rapprocher le jour o le peuple du Christ divis sera runi visiblement autour de la Table du Seigneur.

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    MINISTRE

    I. La vocation du peuple de Dieu tout entier

    1. Dans un monde dchir, Dieu appelle toute l'humanit devenir son peuple. A ce dessein il a choisi Isral, puis il a parl d'une manire unique et dcisive en Jsus-Christ. Fils de Dieu, Jsus a fait siennes la nature, la condition et la cause du genre humain tout entier en se donnant lui-mme en sacrifice pour tous. Sa vie de service, sa mort et sa rsurrection sont les fondements d'une nouvelle communaut qui est difie continuellement par la bonne nouvelle de l'vangile et par le don des sacrements. Le Saint-Esprit unit en un seul Corps ceux qui suivent Jsus-Christ et il les envoie comme tmoins dans le monde. Appartenir l'glise signifie vivre en communion avec Dieu par Jsus-Christ dans l'Esprit Saint.

    2. La vie de l'glise est fonde sur la victoire du Christ contre les puissances du mal et de la mort, accomplie une fois pour toutes. Le Christ offre le pardon, invite la repentance et dlivre de la destruction. Il rend capable de se tourner vers Dieu dans la louange et vers le prochain dans le service. Il est la source de la vie nouvelle dans la libert, le pardon mutuel et l'amour. Il 'dirige les curs et les esprits vers l'accomplissement du Royaume o sa victoire deviendra manifeste et o toutes choses seront faites nouvelles. Le dessein de Dieu est que, en Jsus-Christ, tous puissent partager cette communion.

    3. L'glise vit par la puissance libratrice et rgnrante de l'Esprit Saint. Jsus a reu l'onction du Saint-Esprit, lors de son baptme et, aprs sa rsurrection, ce mme Esprit a t donn ceux qui croyaient au Seigneur ressuscit, pour en faire le Corps du Christ. L'Esprit 'appelle la foi, sanctifie par ses nombreux dons et accorde la force de tmoigner pour l'vangile et de servir dans l'esprance et l'amour. Il garde l'glise dans la vrit et la conduit malgr la faiblesse de ses membres.

    4. L'glise est appele proclamer et prfigurer le Royaume de Dieu, en annonant l'vangile au monde et en vivant comme le Corps du Christ. En Jsus, le Royaume de Dieu est venu parmi nous. Il a offert le salut aux pcheurs. Il a annonc la bonne nouvelle aux pauvres, aux captifs la libration, aux aveugles la vue, aux opprims la dlivrance (Le 4,18). Le Christ a ouvert un nouvel accs auprs du Pre. Vivant cette communion avec Dieu, tous les membres de l'glise sont appels confesser leur foi et rendre compte de leur esprance. Ils partagent avec tous joies et souffrances, cherchant tmoigner chacun un amour plein de compassion. Les membres du Corps du Christ lutteront aux cts de ceux qui sont oppresss, en vue de cette libert et cette dignit promises avec la venue du Royaume. Cette mission doit tre accomplie dans les divers contextes politiques, sociaux et culturels. Afin de remplir leur mission fidlement, ils rechercheront les formes adaptes au tmoignage et au service dans chaque situation. Ainsi, ils apporteront au monde un avant-got de la joie et de la gloire du Royaume de Dieu.

  • 17

    5. Le Saint-Esprit accorde la communaut des dons divers et complmentaires. Ils sont donns pour le bien commun de tout le peuple et se manifestent dans des actions de service au sein de la communaut et pour le monde. Ce peut tre des dons de communication de l'vangile en parole et en acte. des dons de gurison, de prire, d'enseignement et d'coute, des dons de service, de direction et d'obissance, d'inspiration et de vision. Tous les membres sont appels dcouvrir, avec l'aide de la communaut, les dons qu'ils ont reus et les utiliser pou, l'dification de l'glise et au service du monde vers lequel l'glise est envoye.

    6. Bien que les glises soient d'accord dans leu, comprhension gnrale de la vocation du peuple de Dieu, elles diffrent dans leurs conceptions de k structure de la vie de l'glise. En particulier, il y des diffrences propos de la place et des l'ormet du ministre ordonn. En s'engageant dans l'effort pour surmonter leurs diffrences, il est ncessaire que les Eglises prennent leur point de dpart dam la vocation du peuple de Dieu tout entier. Les glises doivent chercher une rponse commune la question suivante : comment, selon la volont de Dieu et sou: la conduite de l'Esprit, la vie de l'glise doit-elle tre conue et structure, en sorte que l'vangile, puisse se rpandre et la communaut tre construite dans l'amour?

    II. Lglise et le ministre ordonn

    7. Les diffrences dans la terminologie font partie du dbat. Pour viter la confusion dans les discussions sur le ministre ordonn dans l'glise, il est ncessaire de prciser clairement dans quel sens divers termes sont utiliss au cours des paragraphes qui suivent.

    Le mot charisme se rapporte aux dons accords par le Saint-Esprit tout membre du Corps du Christ en vue de l'dification de la communaut et de l'accomplissement de sa vocation.

    Le mot ministre au sens large se rapporte au service que tout le peuple de Dieu est appel accomplir, soit par des personnes, soit par la communaut locale, soit comme glise universelle; ministre ou ministres peuvent aussi se rapporter des formes institutionnelles particulires que prend ce service.

    Le terme ministre ordonn se rapporte aux personnes qui ont reu un charisme et que l'glise institue pour un service par ordination, par invocation de l'Esprit et imposition des mains.

    Beaucoup d'glises emploient le mot prtre pour dsigner certains ministres ordonns. tant donn que cet usage n'est pas universel, ce document va aborder la question fondamentale au paragraphe 17.

    A Le ministre ordonn

    8. Afin d'accomplir sa mission, l'glise a besoin de personnes qui soient responsables publiquement et de faon continue pour mettre en vidence sa dpendance fondamentale par rapport Jsus-Christ et qui ainsi constituent, parmi la multiplicit des dons, un foyer de son unit. Le ministre de telle personnes, qui, depuis des temps trs anciens, ont t ordonnes, est constitutif de la vie et du tmoignage de l'glise.

    Foyer, qui traduit focus, est pris au sens optique d'un foyer qui fait converger des rayons.

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    9. L'glise n'a jamais exist sans des personnes qui tiennent une autorit et une responsabilit spcifiques. Jsus a choisi et envoy les disciples pour tre des tmoins du Royaume (Mt 10,1-18). Les Douze ont reu la promesse qu'ils sigeraient sur des trnes jugeant les tribus d'Isral (Lc 22,30). Un rle particulier est attribu aux Douze dans les communauts de la premire gnration. Ils sont des tmoins de la vie et de la rsurrection du Seigneur (Ac 1,21-26), des guides de la communaut dans la prire, dans l'enseignement, dans la fraction du pain, dans la proclamation et dans le service (Ac 2,42-47; 6,2-6; etc.). L'existence mme des Douze et des autres aptres montre que, ds le dbut, il y avait des rles diffrencis dans la communaut.

    COMMENTAIRE

    Dans le Nouveau Testament, le terme aptre est employ dans des sens varis. Il est utilis pour les Douze mais aussi pour un cercle plus large de disciples. Il est appliqu Paul et d'autres en tant qu'ils sont envoys par le Christ ressuscit pour proclamer l'vangile. Les rles des aptres couvrent la fois la fondation et la mission.

    10. Jsus a appel les Douze tre reprsentants de l'Isral renouvel. A ce moment-l ils reprsentaient le peuple de Dieu tout entier et en mme temps ils exeraient un rle spcial au milieu de la communaut. Aprs la rsurrection, ils sont parmi les guides de la communaut. On peut donc dire que les aptres prfigurent la fois I'Eglise entire et les personnes charges d'une autorit et d'une responsabilit spcifiques dans l'glise. Le rle des aptres comme tmoins de la rsurrection du Christ est unique et ne peut pas tre ritr. Il y a donc une diffrence entre les aptres et les ministres ordonns, dont les ministres sont fonds sur ceux des aptres.

    11. Le Christ, qui a choisi et envoy les aptres, continue, par le Saint-Esprit, choisir et appeler des personnes en vue du ministre ordonn. Comme hrauts et ambassadeurs, les ministres ordonns reprsentent Jsus-Christ pour la communaut et proclament son message de rconciliation. Comme guides et enseignants, ils appellent la communaut se soumettre l'autorit de Jsus-Christ le matre et le prophte, en qui la loi et les prophtes sont accomplis. Comme pasteurs, sous l'autorit de Jsus-Christ le grand pasteur, ils rassemblent et conduisent le peuple de Dieu dispers, dans l'attente du Royaume qui vient.

    COMMENTAIRE

    La ralit fondamentale d'un ministre ordonn existait ds le dbut (voir paragraphe 8). Les formes actuelles de l'ordination et du ministre ordonn, cependant, ont volu au cours d'un dveloppement historique compliqu (voir paragraphe 19). Les glises doivent donc viter d'attribuer leurs formes particulires du ministre ordonn directement la volont et l'institution de Jsus-Christ lui-mme.

    12. Tous les membres de la communaut croyante, ordonns et laques, sont troitement lis. D'une part, la communaut a besoin de ministres ordonns. Leur prsence rappelle la communaut l'initiative divine et la dpendance de l'Eglise par rapport Jsus-Christ, qui est la source de sa mission et le fondement de son unit. Ils sont au service de l'dification de la communaut en Christ et du renforcement de son tmoignage. En eux, l'Eglise cherche donner un exemple de saintet et de compassion. D'autre part, le

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    ministre ordonn ne peut exister sans la communaut. Les ministres ordonns ne peuvent accomplir leur vocation que dans et pour la communaut. Ils ne peuvent se passer de la reconnaissance, du soutien et de l'encouragement de la communaut.

    13. La fonction spcifique du ministre ordonn est de rassembler et construire le Corps du Christ, par la proclamation et l'enseignement de la Parole de Dieu, par la clbration des sacrements, et par la direction de la vie de la communaut dans sa liturgie, sa mission et sa diaconie.

    COMMENTAIRE

    Ces fonctions ne sont pas exerces par le ministre ordonn d'une manire exclusive. Puisque le ministre ordonn et la communaut sont troitement lis, tous les membres participent l'exercice de ces fonctions. En fait, tout charisme sert rassembler et construire le Corps du Christ. Tout membre du Corps peut participer la proclamation et l'enseignement de la Parole de Dieu, peut contribuer la vie sacramentelle du Corps. Le ministre ordonn accomplit ces fonctions d'une manire reprsentative, constituant le foyer d'unit de la vie et du tmoignage de la communaut.

    14. C'est tout spcialement dans la clbration eucharistique que le ministre ordonn est le foyer visible de la communion profonde qui unit le Christ et les membres de son Corps, et qui embrasse toute la ralit. Dans la clbration de l'eucharistie, le Christ rassemble, enseigne et nourrit l'glise. C'est le Christ qui invite au repas et le prside. Dans la plupart des Eglises, cette prsidence du Christ a pour signe celle d'un ministre ordonn, qui la reprsente.

    COMMENTAIRE

    Le Nouveau Testament dit peu de choses sur l'ordonnance de l'eucharistie. Il n'y a pas d'indication explicite sur la prsidence de l'eucharistie. Trs tt, il est vident qu'un ministre ordonn a la fonction de prsider la clbration. S'il est vrai que le ministre ordonn constitue un foyer d'unit de la vie et du tmoignage de l'glise, il est naturel de donner un ministre ordonn cette tche de prsidence eucharistique. Elle est intimement lie la responsabilit de conduire la communaut, c'est--dire de veiller sur sa vie (episcop) et de fortifier sa vigilance par rapport la vrit du message apostolique et en relation avec la venue du Royaume.

    B Ministre ordonn et autorit

    15. L'autorit du ministre ordonn est enracine en Jsus-Christ, qui l'a reue du Pre (Mt 28,18), et qui la confre dans l'Esprit Saint travers l'acte d'ordination. Cet acte prend place dans une communaut qui accorde une reconnaissance publique une personne. Parce que Jsus est venu comme celui qui sert (Mc 10,45; Lc 22,27), tre mis part pour le ministre ordonn signifie tre consacr pour le service. Puisque l'ordination est essentiellement une mise part avec prire pour le don de l'Esprit Saint, l'autorit du ministre ordonn ne peut pas tre comprise comme la proprit de la personne ordonne, mais comme un don pour l'dification continue du Corps dans et pour lequel le ministre a t ordonn. L'autorit a le caractre d'une responsabilit devant Dieu et est exerce avec la participation de toute la communaut.

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    16. C'est pourquoi les ministres ordonns ne doivent pas tre des autocrates ni des fonctionnaires impersonnels. Bien qu'ils soient appels a exercer une fonction de direction, dans la sagesse et l'amour, sur la base de la Parole de Dieu, ils sont lis aux fidles dans l'interdpendance et la rciprocit. Ce n'est que s'ils recherchent vraiment la raction et l'accord de la communaut que leur autorit peut tre protge des dviations de l'isolement et de la domination. Ils manifestent et exercent l'autorit du Christ de la manire selon laquelle le Christ lui-mme a rvl l'autorit de Dieu au monde : en engageant leur vie pour la communaut. L'autorit du Christ est unique. Il les enseignait en homme qui a autorit (exousia) et non pas comme leurs scribes (Mt 7,29). Son autorit est une autorit domine par l'amour pour les brebis qui n'ont pas de berger (Mt 9,36). Elle est confirme par sa vie de service et, de faon suprme, par sa mort et sa rsurrection. L'autorit dans l'glise ne peut tre authentique que si elle cherche se conformer ce modle.

    COMMENTAIRE

    Ici deux dangers doivent tre vits. D'une part, l'autorit ne peut pas tre exerce sans gard pour la communaut. Les aptres taient attentifs l'exprience et au jugement des croyants. D'autre part, l'autorit des ministres ordonns ne doit pas tre rduite au point de les rendre dpendants de l'opinion commune de la communaut. Leur autorit repose sur leur responsabilit de rappeler la volont de Dieu dans la communaut.

    C Ministre ordonn et sacerdoce

    17. Jsus-Christ est l'unique prtre de la Nouvelle Alliance. Il a donn sa vie en sacrifice pour tous. D'une manire drive, l'glise tout entire peut tre dcrite comme un sacerdoce. Tous les membres sont appels offrir leur tre en sacrifice vivant et intercder pour l'glise et le salut du monde. Les ministres ordonns participent, comme tous les chrtiens, la fois au sacerdoce du Christ et au sacerdoce de l'glise. Mais ils peuvent tre proprement appels prtres, parce qu'ils accomplissent un service sacerdotal, particulier en fortifiant et en construisant le sacerdoce royal et prophtique des fidles par la Parole et les sacrements, par leurs prires d'intercession et leur direction pastorale de la communaut.

    COMMENTAIRE

    Le Nouveau Testament n'utilise jamais les termes sacerdoce ou prtre (hiereus) pour dsigner le ministre ordonn ou le ministre ordonn. Dans le Nouveau Testament ces termes sont rservs, d'une part, l'unique sacerdoce de Jsus-Christ et, d'autre part, au sacerdoce royal et prophtique de tous les baptiss. Le sacerdoce du Christ et le sacerdoce des baptiss, leur manire propre, sont une fonction de sacrifice et d'intercession. Comme le Christ s'est offert lui-mme, les chrtiens offrent leur tre en sacrifice vivant . Comme le Christ intercde devant le Pre, les chrtiens intercdent pour l'glise et le salut du monde. Cependant, les diffrences entre ces deux sortes de sacerdoce ne peuvent pas tre sous-estimes. Alors que le Christ s'est offert lui-mme en un sacrifice unique, une fois pour toutes, pour le salut du monde, les croyants ont recevoir comme un don de Dieu ce que le Christ a fait pour eux.

    Dans l'glise ancienne on commena utiliser les termes sacerdoce et prtre pour dsigner le ministre ordonn et le ministre prsidant l'eucharistie.

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    Ils soulignent le fait que le ministre ordonn est en relation avec la ralit sacerdotale de Jsus-Christ et de la communaut. Quand les termes sont utiliss en relation avec le ministre ordonn, ils ont un sens diffrent que lorsqu'ils sont appliqus au sacerdoce sacrificiel de l'Ancien Testament, l'unique sacerdoce rdempteur du Christ et au sacerdoce commun du peuple de Dieu. Saint Paul caractrisait ainsi son ministre : Je suis un liturge de Jsus-Christ pour les nations, accomplissant une fonction de prtre au moyen de l'vangile de Dieu, afin qu'ait lieu l'offrande des nations, agrable, sanctifie dans l'Esprit Saint (Rm 15,16).

    D Le ministre des hommes et des femmes dans l'glise

    l8. L o le Christ est prsent, les barrires humaines sont brises. L'glise est appele prsenter au monde l'image d'une nouvelle humanit. En Christ il n'y a ni homme ni femme. Hommes et femmes doivent dcouvrir ensemble leurs contributions au service du Christ dans l'glise. L'Eglise doit dcouvrir les ministres qui peuvent tre exercs par des femmes aussi bien que ceux qui peuvent tre exercs par des hommes. Une comprhension plus profonde de l'tendue du ministre qui reflte l'interdpendance des hommes et des femmes doit tre plus largement manifeste dans la vie de l'glise.

    Quoiqu'elles soient d'accord sur cette ncessaire rflexion, les glises tirent des conclusions diffrentes en ce qui concerne l'admission des femmes au ministre ordonn. Un nombre croissant d'glises ont dcid qu'il n'y a pas de raison biblique ou thologique contre l'ordination des femmes et beaucoup d'entre elles la pratiquent. Cependant, beaucoup d'glises affirment que la tradition de l'glise ce sujet ne doit pas tre change.

    COMMENTAIRE

    Les glises qui pratiquent l'ordination des femmes le font en raison de leur comprhension de l'vangile et du ministre. Cela repose pour elles sur leur conviction thologique profonde que le ministre ordonn de l'glise manque en plnitude lorsqu'il est limit un seul sexe. Cette conviction thologique a t renforce par leur exprience durant les annes o elles ont inclus des femmes dans leurs ministres ordonns. Elles ont dcouvert que les dons des femmes sont aussi larges et varis que ceux des hommes et que leur ministre est aussi pleinement bni par le Saint-Esprit que le ministre des hommes. Aucune n'a trouv de raison pour revenir sur sa dcision.

    Les glises qui ne pratiquent pas l'ordination des femmes considrent que la force de dix-neuf sicles de tradition contre cette ordination ne doit pas tre mise de ct. Elles croient qu'on ne peut pas renoncer cette tradition comme si elle tait un manque de respect pour le rle de la femme dans l'glise. Elles croient qu'il y a des problmes thologiques concernant la nature humaine et concernant la christologie qui sont lis au cur de leurs convictions et de leur comprhension du rle des femmes dans l'glise.

    La discussion de ces questions pratiques et thologiques dans les diverses glises et traditions chrtiennes devrait tre complte par une tude commune et une rflexion l'intrieur de la communion cumnique de toutes les glises.

  • 22

    III. Les formes du ministre ordonn

    A vques, presbytres et diacres

    19. Le Nouveau Testament ne dcrit pas une forme unique de ministre qui devrait servir d'esquisse ou de norme durable pour tout ministre futur dans l'glise. Dans le Nouveau Testament apparat plutt une varit de formes qui existaient en diffrents lieux et temps. Alors que le Saint-Esprit continuait conduire l'glise dans sa vie, son culte et sa mission, certains lments de cette varit primitive furent dvelopps, puis fixs dans une forme de ministre plus universelle. Durant les IIe et IIIe sicles, une triple forme, avec vque, presbytre et diacre, s'tablit comme la forme du ministre ordonn travers l'glise. Dans les sicles suivants, les ministres de l'vque, du presbytre et du diacre connurent des changements considrables dans leur exercice pratique. A certains moments de crise dans l'histoire de l'glise, les fonctions durables du ministre furent distribues, en certains lieux et communauts, selon d'autres structures que la triple forme prdominante. Parfois, on fit appel au Nouveau Testament pour justifier ces autres formes. En d'autres cas, on soutint que la restructuration du ministre appartenait la comptence de l'glise, dans son effort d'adaptation au changement des circonstances.

    20. Il est important d'tre attentif aux changements que le triple ministre a subis dans l'histoire de l'glise. Les indications les plus anciennes sur le triple ministre en font la forme du ministre ordonn dans la communaut eucharistique locale. L'vque tait le chef de la communaut. Il tait ordonn, et install pour proclamer la Parole et prsider la clbration de l'eucharistie. Il tait entour d'un collge de presbytres et par des diacres qui l'assistaient dans ses tches. Dans ce contexte, le ministre de l'vque tait un foyer de l'unit dans la communaut entire.

    21. Cependant, assez tt, les fonctions se modifirent. Les vques commencrent exercer de plus en plus 1'episcop sur plusieurs communauts locales la fois. Dans la premire gnration, des aptres avaient exerc l'episcop dans l'glise au sens plus large. Plus tard, on note que Timothe et Tite ont accompli une fonction de supervision dans une rgion donne. Plus tard encore, cette tche apostolique est exerce d'une manire nouvelle par les vques. Ils constituent un foyer d'unit de la vie et du tmoignage dans des rgions comprenant plusieurs communauts eucharistiques. En consquence, des rles nouveaux sont assigns aux presbytres et aux diacres. Les presbytres deviennent les conducteurs d'une communaut eucharistique locale et, comme assistants des vques, les diacres reoivent des responsabilits dans une rgion plus large.

    COMMENTAIRE

    L'glise, ds ses dbuts, a connu la fois le ministre itinrant de missionnaires comme Paul et le ministre local de direction dans les endroits o l'vangile tait reu. Au plan local, les formes d'organisation semblent avoir vari selon les circonstances. Les Actes des Aptres mentionnent pour Jrusalem les Douze et les Sept, plus tard Jacques et les anciens; pour Antioche, les prophtes et les didascales (Ac 6,1-6; 15,13-22; 13, 1). Les lettres aux Corinthiens parlent des aptres, des prophtes et des didascales (I Co 12,28); de mme la lettre aux Romains, qui parle aussi des diacres ou assistants (Rom 16,1). A Philippe, les termes sculiers episcopoi et diaconoi taient tous deux utiliss pour les ministres chrtiens (Ph 1,1). Plusieurs de ces ministres sont attribus aux femmes et aux

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    hommes. Tandis que certains taient dsigns par l'imposition des mains, il n'y a pas d'indication de cette procdure dans d'autres cas. Quel qu'en ft le nom, ces ministres avaient pour but de proclamer la Parole de Dieu, de transmettre et sauvegarder le contenu originel de l'vangile, de nourrir et fortifier la foi, la discipline et le service des communauts chrtiennes, de protger et stimuler l'unit en elles et entre elles. Ces tches du ministre ont t constantes travers les dveloppements et les crises de l'histoire chrtienne.

    22. Bien qu'il n'y ait pas qu'une seule forme du ministre selon le Nouveau Testament, bien que l'Esprit ait souvent conduit l'glise adapter ses ministres aux besoins d'un contexte historique et bien que d'autres formes du ministre ordonn aient t bnies par les dons du Saint-Esprit, cependant, le triple ministre de l'vque, du presbytre et du diacre peut servir aujourd'hui d'expression l'unit que nous cherchons et aussi de moyen pour y parvenir. Historiquement, il est vrai que le triple ministre devint la forme gnralement accepte dans l'glise des premiers sicles et qu'il est encore conserv aujourd'hui par beaucoup d'glises. Pour 1'accomplissement de leur mission et de leur service, les glises ont besoin de personnes qui, de diverses manires, expriment et remplissent