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Lus et elus 81 recidives. Cependant, le pourcen- tage important de faux positifs, & des taux eleves, dans de nom- breuses pathologies benignes emp¢che son utilisation dans le diagnostic differentiel avec les maladies malignes. FM Bilan thyroi'dien : un cahier des charges L'American Thyroid Association a fait recemment le point sur les tests thyroidiens devant ~tre utili- ses, et propose un cahier des charges auquel doivent repondre les dosages d'hormone libre et de TSH. Dosages d'hormone libre Le dosage direct des hormones libres represente une gageure & trois points de vue : d'abord la concentration d'hormone libre correspond & une fraction infime de la concentration d'hormone totale (0,03% pour la T4; 0,3% pour la T3), et sa mesure requiert donc une sensibilite de I'ordre de la picomole. Ensuite il importe au cours du dosage de ne pas per- turber I'equilibre existant entre la forme liee et la forme libre. Enfin, le serum de certains patients pre- sentant une maladie non thyroi- dienne contient des inhibiteurs ou d'autres sources d'interference pouvant fausser la mesure. Pour compliquer le probleme, ces inhi- biteurs peuvent 6tre responsables d'artefacts analytiques, mais peu- vent aussi modifier reellement la concentration de T4 libre in vivo. Les techniques de reference (ultrafiltration, equilibre de dialy- se) etant Iongues, co0teuses, et inadaptees & la routine, la plupart des laboratoires utilisent des esti- mations dites <<indirectes>> : mesure d'un index de T4 libre, mesure en deux etapes, ou mesure & I'aide d'un traceur ,<ana- logue,, (methode <<une etape>,). Ces estimations peuvent poser probl~me en cas d'elevation congenitale de la TBG (frequence 3/100 000), de deficit congenital de TBG (1/10 000), devant une dysalbuminemie familiale (exc~s d'une fraction normalement mineure de I'albumine, dont I'affi- nite pour la T4 est tr6s elevee, [1 cas sur 10 000]. La presence d'un autoanticorps anti-T4 ou anti-T3 est egalement rare (5/10 000), elle perturbe les dosages <<une etape>>. En cas de maladie non thyroidienne, plusieurs anomalies se manifestent : une diminution des proteines vectrices, ou une alteration de leur capacite de liai- son, entrMne une elevation de la fraction libre, alors que I'hormone totale est eventuellement basse. Selon que le traceur interagit ou non avec les proteines vectrices, le dosage d'hormone libre expri- mera differemment ces modifica- tions. Devant un nouveau dosage d'hormone libre, le fabricant se devrait d'informer ses utilisateurs au regard des differents pro- blemes evoques: - quelle perturbation I'anticorps du dosage introduit-il dans I'equi- libre T4 liee-T4 libre (moins de 1 & 2% de la T4 totale doit se lier & I'anticorps) ? - pour les methodes ,,ana- logues,,, la structure precise du traceur et ses caracteristiques de liaison avec I'albumine, la TBG et la prealbumine, avec ou sans <<bloqueur-, doivent 6tre don- nees; -les bases theoriques du dosage doivent 6tre etablies clairement; - parmi les caracteristiques ana- lytiques, doivent en particulier Ctre fournies la precision au niveau des seuils de decision, et la linearite du test devant I'addi- tion de T4 avec TBG; - bien ser une evaluation des valeurs usuelles chez les patients <<ambulatoires>> est necessaire; -I'etude des reactions croisees avec les autres iodothyronines, et les donnees sur les interferences dues aux rrfedicaments doivent ~tre fournies; - enfin, les resultats du dosage dans les dysthyrofdies, les pertur- bations des proteines vectrices, et les maladies non thyrofdiennes avec T4 basse. Les auteurs regrettent enfin qu'aucun standard universel en milieu serum n'existe et ne puisse servir de reference. Dosages de TSH Le probleme de la determination de TSH est moins epineux. II reste bien sQr I'evaluation de la limite de detection qui alimente encore les querelles d'experts. Toute le monde est d'accord cependant pour rejeter une limite de detection evaluee & partir de la repetabilite de mesure du stan- dard zero. Cette limite de detec- tion devrait plut6t tenir compte du profil de precision interessai du dosage. Pour une utilisation eclairee, les notices d'emploi des trousses doi- vent I& encore fournir un certain nombre de renseignements : - la limite de detection <<fonction- nelle>> basee sur la precision interessai; - les pourcentages de reactivite croisee avec la LH, la FSH, et I'HCG (ils doivent ~tre inferieurs & 0,1%); - la linearite du test Iors des dilu- tions avec le diluant (la courbe de dilution doit Ctre parall~le & la courbe standard & 10% pres); - la recuperation des surcharges doit ¢tre correcte & plus ou moins 10%; -la recuperation d'un standard de TSH ajoute (MRC ou OMS) doit correspondre & 5% pres & la valeur attendue; - les CV interessai doivent Ctre de I'ordre de 10% et inferieurs & 20% pour la concentration 0,1 mUI/I; -les serums d'hyperthyrofdiens doivent donner un signal equiva- lent & celui du standard zero & 5% pres; - le dosage doit ~tre protege de I'interference des anticorps anti- souris, par du serum ou des IgG

Bilan thyroïdien : un cahier des charges

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Page 1: Bilan thyroïdien : un cahier des charges

Lus et elus 81

recidives. Cependant, le pourcen- tage important de faux positifs, & des taux eleves, dans de nom- breuses pathologies benignes emp¢che son utilisation dans le diagnostic differentiel avec les maladies malignes.

FM

B i l a n t h y r o i ' d i e n : u n c a h i e r

d e s c h a r g e s

L'American Thyroid Association a fait recemment le point sur les tests thyroidiens devant ~tre utili- ses, et propose un cahier des charges auquel doivent repondre les dosages d'hormone libre et de TSH.

Dosages d'hormone libre

Le dosage direct des hormones libres represente une gageure & trois points de vue : d'abord la concentration d'hormone libre correspond & une fraction infime de la concentration d'hormone totale (0,03% pour la T4; 0,3% pour la T3), et sa mesure requiert donc une sensibilite de I'ordre de la picomole. Ensuite il importe au cours du dosage de ne pas per- turber I'equilibre existant entre la forme liee et la forme libre. Enfin, le serum de certains patients pre- sentant une maladie non thyroi- dienne contient des inhibiteurs ou d'autres sources d'interference pouvant fausser la mesure. Pour compliquer le probleme, ces inhi- biteurs peuvent 6tre responsables d'artefacts analytiques, mais peu- vent aussi modifier reellement la concentration de T4 libre in vivo.

Les techniques de reference (ultrafiltration, equilibre de dialy- se) etant Iongues, co0teuses, et inadaptees & la routine, la plupart des laboratoires utilisent des esti- mations dites <<indirectes>> : mesure d'un index de T4 libre, mesure en deux etapes, ou mesure & I'aide d'un traceur ,<ana- logue,, (methode <<une etape>,). Ces estimations peuvent poser

probl~me en cas d'elevation congenitale de la TBG (frequence 3/100 000), de deficit congenital de TBG (1/10 000), devant une dysalbuminemie familiale (exc~s d'une fraction normalement mineure de I'albumine, dont I'affi- nite pour la T4 est tr6s elevee, [1 cas sur 10 000]. La presence d'un autoanticorps anti-T4 ou anti-T3 est egalement rare (5/10 000), elle perturbe les dosages <<une etape>>. En cas de maladie non thyroidienne, plusieurs anomalies se manifestent : une diminution des proteines vectrices, ou une alteration de leur capacite de liai- son, entrMne une elevation de la fraction libre, alors que I'hormone totale est eventuellement basse. Selon que le traceur interagit ou non avec les proteines vectrices, le dosage d'hormone libre expri- mera differemment ces modifica- tions.

Devant un nouveau dosage d'hormone libre, le fabricant se devrait d'informer ses utilisateurs au regard des differents pro- blemes evoques: - quelle perturbation I'anticorps du dosage introduit-il dans I'equi- libre T4 liee-T4 libre (moins de 1 & 2% de la T4 totale doit se lier & I'anticorps) ? - pour les methodes ,,ana- logues,,, la structure precise du traceur et ses caracteristiques de liaison avec I'albumine, la TBG et la prealbumine, avec ou sans <<bloqueur-, doivent 6tre don- nees; - l e s bases theoriques du dosage doivent 6tre etablies clairement; - parmi les caracteristiques ana- lytiques, doivent en particulier Ctre fournies la precision au niveau des seuils de decision, et la linearite du test devant I'addi- tion de T4 avec TBG; - bien ser une evaluation des valeurs usuelles chez les patients <<ambulatoires>> est necessaire; - I ' e tude des reactions croisees avec les autres iodothyronines, et les donnees sur les interferences dues aux rrfedicaments doivent ~tre fournies;

- enfin, les resultats du dosage dans les dysthyrofdies, les pertur- bations des proteines vectrices, et les maladies non thyrofdiennes avec T4 basse. Les auteurs regrettent enfin qu'aucun standard universel en milieu serum n'existe et ne puisse servir de reference.

Dosages de TSH

Le probleme de la determination de TSH est moins epineux. II reste bien sQr I'evaluation de la limite de detection qui alimente encore les querelles d'experts. Toute le monde est d'accord cependant pour rejeter une limite de detection evaluee & partir de la repetabilite de mesure du stan- dard zero. Cette limite de detec- tion devrait plut6t tenir compte du profil de precision interessai du dosage.

Pour une utilisation eclairee, les notices d'emploi des trousses doi- vent I& encore fournir un certain nombre de renseignements : - la limite de detection <<fonction- nelle>> basee sur la precision interessai; - les pourcentages de reactivite croisee avec la LH, la FSH, et I'HCG (ils doivent ~tre inferieurs & 0,1%); - la linearite du test Iors des dilu- tions avec le diluant (la courbe de dilution doit Ctre parall~le & la courbe standard & 10% pres); - la recuperation des surcharges doit ¢tre correcte & plus ou moins 10%; - l a recuperation d'un standard de TSH ajoute (MRC ou OMS) doit correspondre & 5% pres & la valeur attendue; - les CV interessai doivent Ctre de I'ordre de 10% et inferieurs & 20% pour la concentration 0,1 mUI/I; - l e s serums d'hyperthyrofdiens doivent donner un signal equiva- lent & celui du standard zero & 5% pres; - le dosage doit ~tre protege de I'interference des anticorps anti- souris, par du serum ou des IgG

Page 2: Bilan thyroïdien : un cahier des charges

82 Lus et elus

de souris, dont la concentration dans le reactif doit ~tre pr~cisee;

- la Courbe ne doit pas s'aplatir ou s'inverser pour les concentra- tions inf~rieures ou 6gales & 300 mUI/I; - le chevauchement entre les populations euthyro'fdiennes et hyperthyroidiennes doit 6tre inf6- rieur & 5%, ou mieux 1% (mais cela depend du recrutement).

Les auteurs concluent en espY- rant que ies nouveaux dosages

de TSH pr~senteront une amelio- ration dans la sensibilit~ analy- tique autorisant :

- la discrimination entre les taux de TSH moderement abaiss6s (comme ceux rencontr6s clans les maladies non thyro'fdiennes et les traitements par corticoi'des) et les taux effondres des hyperthyro'f- dies franches;

- ainsi que I'appr~ciation de dif- f~rents degr~s de suppression de

la TSH dans les hyperthyroi'dies frustes.

Hay ID, Bayer MF, Kaplan MM, Klee GG, Larsen PR, Spencer CA (1991) American Thyroid Associa- tion assessment of Current Free Thyroid Hormone and Thyrotropin Measurements and Guidelines for Future Clinical Assays. Clin Chem 37/11,2002-2008

MLP