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Biologie cellulaire et moléculaire

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Page 1: Biologie cellulaire et moléculaire

374 m/s n° 3, vol. 13, mars 97

Biologie

cellulaire

et moléculaire

MINI-SYNTHÈSEmédecine/sciences 1997 ; 13 : 374-6

Régulation transcriptionnelle

par le cholestérol : découverte

de la protéine sensible, SCAP

Tous les biologistes savent le pro-digieux travail réalisé par lesdeux compères de génie, fidèles

en amitié autant qu’à leur axe derecherche : Joseph L. Goldstein etMichael S. Brown, lauréats du prixNobel de médecine en 1985. Cetterecherche, ces auteurs et leur prixsont d’ailleurs particulièrement chersau cœur de médecine/sciences qui ren-dit compte pour la première fois,l’année de son lancement, de cettedistinction dans une nouvelle appe-lée « l’hypercholestérolémie fami-liale, de la maladie aux gènes... »(m/sn° 7, vol. 1, p. 388). Brown et Gold-stein ont été loin de s’endormir surleurs lauriers au retour de Stock-holm, et les progrès réalisés par cetteéquipe de Dallas (TX, USA) ontcontinué d’être réguliers, complétantl’image d’une œuvre exceptionnellepar sa qualité et par sa cohérence(m/s n° 6/7, vol. 10, p. 746). Notam-ment, c’est cette équipe qui a décou-vert les deux facteurs de transcrip-tion SREBP-1 et SREBP-2 dontl’activité sur des gènes codant pourdes protéines du métabolisme ducholestérol est elle-même contrôléepar les stérols (m/s n° 4, vol. 11,p. 642). Ces deux protéines semblentfonctionnellement redondantes etpourraient également intervenir dansle contrôle de la différenciation adi-pocytaire ; SREBP-1 a d’ailleurs étécaractérisé sous le nom d’ADD-1comme un gène activé lors de cettedifférenciation (m/s n° 4, vol. 11,p. 625). Beaucoup des résultats obte-nus sur les mécanismes d’activationde ces protéines l’ont été sur SREBP-2, mais tout laisse à penser que cesmécanismes sont identiques pourSREBP-1. Comme le montre lafigure 1, SREBP est composé de trois

parties : un segment amino-terminald’environ 500 acides aminés, en posi-tion cytoplasmique, qui est un fac-teur de transcription appartenant àla famille bHLH-LZ (basic helix loophelix-leucine zipper). La deuxième par-tie, d’environ 75 résidus, comprenddeux segments transmembranairessitués de part et d’autre d’une petiteboucle hydrophile de 31 acides ami-nés qui se trouve en position endo-luminale, dans le réticulum endo-plasmique. Enfin, également enposition cytoplasmique, l’extrémitécarboxy-terminale d’environ500 acides aminés joue probablementun rôle régulateur. La partie trans-criptionnellement active de SREBP,amino-terminale, est libérée par uneprotéolyse en deux temps. Toutd’abord, une protéase inhibée par lesstérols clive le site 1, dans la boucleendo-luminale. Ensuite, une autreprotéase d’activité constitutive clivele site 2, dans le premier segmenttransmembranaire. Ainsi libérée, lapartie amino-terminale se comportecomme un activateur transcription-nel qui se fixe à des éléments d’ADNde deux types, les SRE (sterol responseelements) et des boîtes E de typeCACGTG. Parmi les gènes ainsi acti-vés après maturation protéolytiquede SREBP, on trouve ceux codantpour le récepteur des LDL, la farné-syl diphosphate synthase, l’HMG-CoAsynthase et l’HMG-CoA réductase.Ces protéines sont nécessaires àl’accumulation intracellulaire de sté-rols exogènes (par l’intermédiaire durécepteur des LDL) ou endogènes(par l’intermédiaire des enzymes dela synthèse du cholestérol). En pré-sence d’un excès de stérols, la pro-téase clivant le site 1 est inhibée,SREBP reste fixée à la membrane du

réticulum endoplasmique et lesgènes de l’accumulation de cholesté-rol sont inhibés. Cependant, onconnaît des lignées cellulaires quisont résistantes à cet effet inhibiteurdes stérols. Normalement, en effet,des dérivés hydrogénés tels que le 25-hydroxycholestérol (25-HC) inhibentla synthèse de cholestérol sans pou-voir le remplacer, et entraînent doncla mort des cellules sensibles, maisnon pas des cellules résistantes. Cephénotype de résistance au 25-HCpeut être entraîné par plusieurs typesde mutations. Dans l’une d’entreelles, SREBP est présent et normal,mais il est en permanence clivé auniveau du site 1, aboutissant à l’activa-tion des gènes sensibles à SREBPmême en présence de 25-HC. Cettemutation semble dominante en cequ’un hybride entre une cellule nor-male et une cellule mutante a unphénotype de résistance partielle au25-HC. C’est partant de cette obser-vation que Hua et al, du laboratoirede Brown et Goldstein, ont conçu unsystème de criblage par expressiondestiné à isoler le gène muté [1].Ces auteurs ont établi une banqued’expression des ADNc provenant decellules mutantes et ont transfectédes cellules sensibles avec 100 poolsde 1 000 clones. Ils ont observé que 2de ces pools permettaient de conférerle phénotype de résistance au 25-HC.Dès lors, les 1 000 espèces d’ADNc del’un de ces pools ont été divisées en10 x 100, puis 10 x 10, et enfin,1 clone capable à lui tout seul derendre des cellules sensibles résis-tantes à l’effet toxique du 25-HC aété isolé et séquencé. La séquencenucléotidique de l’ADNc permet deprédire qu’il code pour une protéinedénommée SCAP (SREBP cleavage-

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activating protein) de 1 276 acides ami-nés, qui peut être divisée en deuxrégions. Une région aminoterminalesemble comporter 10 segments trans-membranaires et présente des simili-tudes de séquence et de structureavec l’enzyme HMG-CoA réductase.La comparaison entre la séquence deSCAP de cellules mutantes et de cel-lules normales montre une mutationchangeant un acide aspartique 443en une asparagine. Des expériencesde transfection de cellules à l’aide devecteurs d’expression pour SCAPnormale ou mutante montrent que laprotéine mutante et la protéine nor-male sont toutes deux capablesd’activer la protéase clivant le site 1,avec une efficacité environ 10 foisplus grande de la protéine mutanteque de la protéine normale. Proba-blement du fait de cette activationplus efficace, la protéine mutantesurmonte l’effet inhibiteur des sté-rols sur le clivage du site 1, ce quiexplique l’insensibilité des cellulesmutantes à ces agents. A ce jour, onne peut que faire des spéculationssur le mode d’action de SCAP. Il nesemble pas s’agir de la protéase sen-sible aux stérols elle-même car iln’existe aucun motif protéique évo-quant une activité protéasique. Enrevanche, la similitude entre la partieamino-terminale de SCAP et l’HMG-CoA réductase indique que SCAPpourrait être la protéine sensible auxstérols. En effet, l’activité enzyma-tique de l’HMG-CoA réductase estelle-même modulée par les stérols.SCAP apparaît être une protéine liéeà la membrane du réticulum endo-plasmique ; elle pourrait, en fonctionde la présence de stérols, activer plusou moins une protéase encore incon-nue, probablement présente dans leréticulum endoplasmique, active surle site 1 de clivage de SREBP. Parallèlement à ces travaux spectacu-laires, le groupe de Robert Tjian (Ber-keley, CA, USA) contribue lui aussi àl’amélioration de notre compréhen-sion du mode d’action de SREBP ; cesauteurs montrent en effet que la par-tie transcriptionnellement active deSREBP fixe le co-activateur CBP etque celui-ci est indispensable à l’acti-vation de la transcription par SREBP[2]. A noter que ces interactions phy-siques et fonctionnelles entre SREBP

LDL-RFarnésyl diphosphate synthaseHMG-CoA synthaseHMG-CoA réductase

II

II

I I I I I I I I I II

II

II

II

I

Noyau

SREBP

Transcription

SREBP soluble

NH2

COOH

CholestérolLDL

25-hydroxycholestérol

Cholestérol

Membrane plasmique

SCAP REProtéase 1

Site 1

Site 2

LDL-R

bHLH.LZ

CBP

Figure 1. Schéma de la régulation transcriptionnelle par les stérols. Le cho-lestérol pénètre dans la cellule complexé aux LDL (low density lipoproteins)qui se fixent aux récepteurs des LDL (LDL-R) et sont internalisées dans la cel-lule par endocytose débutant par la formation des puits ou invaginationsmantelés (coated pits). Le cholestérol intracellulaire ou des dérivés non méta-bolisables tels que le 25-hydroxycholestérol agirait alors sur une protéine dela membrane du réticulum endoplasmique, la SCAP (SREBP cleavage-activa-ting protein) dont il diminue le potentiel d’activation d’une protéase, proba-blement localisée dans le réticulum endoplasmique (RE). Cette protéase clivele site 1, situé au niveau de la boucle endo-luminale de la protéine SREBP.Après clivage du site 2, la partie amino-terminale, un facteur de transcriptionde type bHLH-LZ, va dans le noyau où elle se fixe à ses éléments d’ADN cibledénommés SRE (sterol-response elements). Ainsi positionné et en interactionavec le co-activateur CBP (CREB-binding protein), le facteur SREBP activé sti-mule la transcription d’une série de gènes, celui du récepteur des LDL (LDL-R)et ceux d’enzymes de la synthèse endogène du cholestérol telles que la far-nésyl diphosphate synthase, l’HMG-CoA synthase et l’HMG-CoA réductase.Ainsi, ces gènes sont-ils activement transcrits dans des conditions de carenceen stérols, puisque SREBP subit alors, continuellement, sa maturation protéo-lytique. En revanche, la protéolyse activatrice est inhibée par les stérols, inhi-bant les gènes codant pour des protéines qui facilitent l’endocytose du cho-lestérol exogène ou la synthèse de cholestérol endogène.

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et CBP ne semblent pas être la consé-quence de l’effet de mode que noussignalions et craignions récemmentdans médecine/sciences (m/s n° 10,vol. 12, p. 1113). En effet, c’est sansaucune idée préconçue que Oliver etal. ont recherché des protéines sefixant à SREBP... et sont tombés surCBP, et son frère jumeau p300. En conclusion, notre couverture duprix Nobel 1985 insistait sur le che-min parcouru de l’hypercholestérolé-mie familiale au gène. Aujourd’hui,11 ans après, c’est du cholestérol etdes signaux qu’il engendre aux gènesque l’on sait aller, et cette recherchea débouché sur une des innovationsthérapeutiques majeures de cettedernière décennie dans le traitement

TIRÉS À PARTA. Kahn.

Axel Kahn

Inserm U. 129, Unité de recherche en phy-siologie et pathologie moléculaires, ICGM,24, rue du Faubourg-Saint-Jacques,75014 Paris, France.

RÉFÉRENCES1. Hua X, Nohturfft A, Goldstein JL, BrownMS. Sterol resistance in CHO cells traced topoint mutation in SREBP cleavage-activa-ting protein. Cell 1996 ; 87 : 415-26.

■■■ BRÈVES ■■■

■■■ Des protéines G aux MAPkinases en passant par la phospho-inositide 3-kinase-γ. Une équipeinternationale réunissant des cher-cheurs allemands, italiens et améri-cains vient de mettre en évidence,par une série d’expériences élé-gantes et claires, une nouvelle voiede transmission du signal dans lacellule. En bref, l’activation degrandes protéines G trimériquescouplées à des récepteurs serpen-tines (c’est-à-dire à 7 passages trans-membranaires) induit la dissocia-tion entre la sous-unité α-GTP et ledimère-βγ [1]. Ce dernier recrute-rait à la membrane une isoformeparticulière de la phospho-inositide3-kinase (ou phosphatidylinositol 3-kinase), la PI3Kγ. Contrairementaux autres isoformes, α et β, laPI3Kγ est composée d’une sous-unité catalytique non couplée à

une sous-unité régulatrice p85.Cette PI3Kγ activerait alors des tyro-sine kinases intracellulaires, par unmécanisme inconnu mais exigeantl’intégrité de son activité de phos-phorylation des lipides. L’activationd’une tyrosine kinase est ensuiterelayée par un adaptateur, la molé-cule Shc, vers la cascade bienconnue Grb2-Sos-Ras-Raf-MEK-MAPK [2]. De façon cohérenteavec ce schéma de cascades, l’acti-vation des MAP kinases par ledimère βγ est inhibé par la wort-mannine, un inhibiteur des PI3K,ainsi que par des mutants trans-dominants négatifs de Shc, de Ras,et de Raf.

[1. Lopez-Ilasaka M, et al. Science1997 ; 275 : 394-7.][2. Chardin P. Med Sci 1994 ; 10 :657-64.]

■■■ Signal, phosphorylation et stabi-lisation de c-Jun. L’une des voies detransmission des signaux inflamma-toires et de prolifération passe parl’activation d’une MAP kinase, la JNK(Jun aminoterminal kinase) qui active lamolécule c-Jun, un partenaire de Fosdans le complexe d’activation trans-criptionnel AP1. Un laboratoire del’EMBL (Heidelberg, Allemagne)démontre que l’activation de c-Junprocède de deux mécanismes : laphosphorylation elle-même, et uneréduction de l’ubiquitinylation decette molécule lorsqu’elle est phopho-rylée [1]. Ce phénomène diminue ladégradation protéolytique de c-Jun,puisque l’addition de chaînes de poly-ubiquitine aux protéines est un signalles destinant à la dégradation.

[1. Musti AM, et al. Science 1997 ;275 : 400-2.]

des hypercholestérolémies. Il est pro-bable que ce quart de siècle derecherches menées par deux scienti-fiques d’exception restera dans l’his-toire des sciences comme l’une desplus belles illustrations de ce à quoipeut aboutir en ce domaine laconjonction de l’idéal, de la cohé-rence et de l’excellence ; et l’histoiren’est pas terminée ! ■

2. Oliver JD, Andresen M, Hansen SK, ZhouS, Tjian R. SREBP transcriptional activitymediated through an interation with theactivator CREB-binding protein. Genes Dev1996 ; 10 : 2903-11.