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Brochure de l'ouvrage Le bestiaire médiéval
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Le bestiaire médiévalChristian HECK
Rémy CORDONNIER
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es animaux occupaient une place
centrale dans la société médiévale. Outre la nourriture et le vête-
ment, la plupart des tâches aujourd’hui dévolues à des auxi-
liaires mécaniques ou électroniques étaient autrefois assumées
par les bêtes. Représentés au premier ou second plan, pour leur
simple valeur ornementale, comme acteurs d’une histoire ou
comme signes d’autre chose qu’eux-mêmes, les animaux sont
omniprésents dans les œuvres d’art que nous a laissé le Moyen
Âge, et en particulier dans les manuscrits peints.
Ce livre propose de visualiser cette présence animale au Moyen
Âge à travers les représentations que l’on en trouve dans l’en-
luminure. La richesse matérielle, ornementale et iconogra-
phique de ce mode d’expression artistique en fait le témoin
privilégié de son époque dont il est également emblématique
entre tous les arts.
Comme toutes les expressions artistiques, l’enluminure ne
peut pas être appréhendée sans un minimum de recul et
nécessite d’être interprétée. Pour comprendre le langage des
figures animalières dans l’enluminure il s’agit donc de tenir
compte des contextes littéraires où il s’exprime et des catégo-
ries de représentation que ces contextes déterminent. Bien
qu’il n’y ait pas de frontières strictes entre les genres, on ne lit
pas de la même manière un texte religieux et un roman de
chevalerie. Les animaux représentés dans tous ces textes n’ont
donc pas la même signification et sont souvent représentés
selon des modes différents.
La richesse du sens et du mode d’expression des représentations
animalières dans l’enluminure est ici mise en valeur. Le symbo-
lisme animalier au Moyen Âge (dans une même image ou dans
plusieurs miniatures différentes), son intégration à une percep-
tion spatio-temporelle particulière au contexte culturel et surtout
religieux de l’Occident médiéval, et son mode d’expression
gouverné par les goûts et les conceptions artistiques de l’époque
sont étudiés en détail. Remises en situations, les figures animales
qui peuplent les enluminures sont une immense source de
connaissance sur la pensée et la culture du temps.
La tradition des fabulistes antiques se poursuit au Moyen Âge
qui en a conservé l’héritage, l’a enrichi et l’a adapté à ses
attentes, faisant du monde animal un véritable miroir de la
société humaine. Le jeu de la proximité et de la distanciation
entre ces deux univers (humain et animal), rendu possible par
le principe d’analogie et de mimétisme, a été largement utilisé
par les auteurs et les enlumineurs pour stigmatiser les excès de
leur temps, mais aussi pour enseigner le moyen de les corriger.
Souvent donc, là où en apparence l’on voit un chien pour-
suivre un lapin il faut comprendre la cour assidue du galant à
sa dame. Lorsque l’on sourit devant les facéties vulgaires de
petits singes, il faut y voir une condamnation des comporte-
ments plus animaux que rationnels chez l’homme, ou encore,
lorsque l’on admire l’élégante figure d’une grue et que l’on
s’interroge sur la petite pierre qu’elle tient dans sa patte
gracieusement relevée, il faut comprendre que l’on a là un
appel à la vigilance. Autant de lectures qui ne sont possibles
que si l’on se replonge, autant que faire se peut, dans la
perception médiévale du monde animal.
Ce livre est richement illustré de plus de six cents reproduc-
tions d’enluminures peintes durant tout le Moyen Âge dans sa
plus large acception (du IVe au début du XVIe siècle). Nombre
d’entre elles qui sont encore inédites ou très peu connues en
dehors du cercle des spécialistes, se verront ainsi mises en
lumière et portées à la connaissance d’un plus grand nombre
d’amateurs. Ces derniers trouveront dans cet ouvrage de
nouvelles clefs de lecture du bestiaire de l’art médiéval, comme
de la vision du monde qu’il exprime.
Le bestiaire médiéval
L
PAGE CI-CONTRE
George Zothor, Liber astrologiae, Sicile, second quart XIIIe siècle.
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms lat. 7330, folio 8v.
(zodiac, taureau)
EN COUVERTURE
Le Livre d'images de Madame Marie, Hainaut, vers 1285-1290
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms nouvelle acquisition française 16251, folio 100
(Marguerite et le dragon)
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Introduction
L’homme et l’animal : entre le réel et l’imaginaire,au service de l’ordre du mondePoésie, symboles, et présence au monde
Un vieux compagnonnage, sans cesse réinventéParadis perdus, luttes, et réconciliation
Une géographie du cosmos, entre l’observation et le mytheHiérarchies et transgressions, raison et déraison
Une communauté de créatures
Répertoire de 100 animaux
Sommaire
Bréviaire de Marie de Savoie, Milan, vers 1430
Chambéry, Bibliothèque municipale, ms 4, folio 453
(Hermine, faisan)
PAGE CI-CONTRE
Apocalypse illustrée, Flandre, fin du XIVe-début du XVe siècle
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms néerlandais 3, folio 7
(Deux cavaliers de l’Apocalypse, les âmes sous l’autel, ouverture
du sixième sceau, cheval, lion, aigle, bœuf, baleine)
L’alouetteL’alcyonLe canardL’anguille et la lamproieL’oieLe sanglier et le cochonL’abeilleL’aigleL’araignéeLe héronL’âne, la mule et l’onagreL’antilopeLa baleineLe basilicLe bonnaconLes bovins : le taureau, le bœuf,la vache et le veau
Le hibou et la chouetteLe caladreLa girafeLe chameau et le dromadaireLe chienLa chèvre, le bouc et le chevreauLe castorLe centaureLe cerf
La cigogneLe cannelierL’escargotLe crocodileLa colombe, le pigeon et la tourterelleLes coquillages et les mollusquesLa corneille, la pie, le geaiLe corbeauLa cailleLes crustacésLe lapin et le lièvreLe dauphinLe dragonL’éléphantLe chevalLe cheval marin, l’hippocampe,hippopotame
Les oiseaux hercyniensLe hérisson et le porc-épicLe faucon et l’autourLa fourmi et le fourmi-lionLa foulqueLe coq et la pouleLe griffonLa grueL’hirondelle
La hyène, la leucrotte,la crocotte et le lycaon
L’hydreL’ibexL’ibisLe lionLa sauterelleLe rossignolLe loupLa loutreLe lynxLa manticoreLe merleLe milanLa licorne et le rhinocérosLa sourisLa moucheLe chatLa belette, la genetteet autres petits carnaciers
Le cygneLes ovins : brebis, bélier, agneauLa panthèreLe papillonLe parandre et l’éale ou yaleLe pard et le léopard
Les passereauxLe paonLe pélicanLa perdrixLe phénixLes poissonsLa perruche à collierLa grenouille et le crapaudLa salamandreLe satyre et l’homme sauvageL’écureuilLe scorpionLes serpentsLa serreLe singeLa sirèneL’autrucheLa taupeLa tortueLe tigreLa huppeL’oursLe ver et la chenilleLa chauve-sourisLe renardLe vautour
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Histoire ancienne jusqu’à César, Acre, 4e quart du XIIIe siècle
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms fr. 20125, folio 112
(Tigresse de Thèbes)
PAGE CI-CONTRE
Wauchier de Denain (?), Histoire ancienne jusqu’à César, France, vers 1320
Bruxelles, Bibliothèque royale de Belgique, ms 10175, folio 20
(Paradis terrestre, tigre, loup, chardonneret, lion, paon, licorne,
ours, coq, chèvre)
e tigre figuré dans les manuscrits du
Moyen Âge n’a pratiquement rien à voir avec l’animal réel.
Les enluminures figurent la plupart du temps une espèce de
canidé au pelage tacheté absorbé dans la contemplation de
son reflet dans un petit miroir posé au sol, tandis qu’un cava-
lier en armure semble s’enfuir dans la direction opposée en
emportant un petit dans ses bras. Cette scène représente en
fait le comportement le plus communément attribué à la
tigresse dans les Bestiaires. On y explique que lorsque celle-ci
découvre qu’il lui manque un petit, elle s’élance comme une
flèche, c’est d’ailleurs de là que viendrait son nom selon
Isidore (Étymologies, XII, II, 7), sur les traces du ravisseur.
Ce dernier, connaissant la vélocité de la bête, utilise alors un
stratagème pour la tromper, qui consiste à jeter sur le chemin
une boule de verre ou un miroir. Le reflet de la tigresse dans
celui-ci fera croire au fauve qu’elle est en face de son petit
enfin retrouvé. Toutefois, voulant ramener celui-ci dans sa
tanière, elle se rend compte de la supercherie et se remet de
plus belle à la poursuite du ravisseur. Ce dernier réitère alors
sa ruse qui, au dam de l’animal, fonctionne à nouveau et ce,
pour de bon, car il permet cette fois au chasseur de prendre
assez d’avance pour que la tigresse ne puisse plus le rattraper.
Cette anecdote est rapportée dans l’Hexaméron (VI, 4, 21)
d’Ambroise de Milan, qui l’a lue chez Pline (Histoire natu-
relle, VIII, 22, 66) et Solin (Collectanea, XVII, 6-7). Le même
stratagème est décrit dans les livres de chasse (mais sans
mention de la tigresse) pour la capture de certains oiseaux
comme le faisan, ce qui explique qu’on le trouve représenté
dans la même marge qu’une tigresse dans le Psautier Luttrell.
Raban Maur (De rerum naturis, VIII, 1) fait du tigre une
image de l’astuce du Démon en vertu d’un passage du Livre de
Job (IV, 11) qui, dans la Vulgate, dit : « Le tigre est mort parce
qu’il n’avait pas de proies. » Selon Raban, le tigre évoque les
multiples ruses du diable par la variété colorée de son pelage.
On retrouve ici la mauvaise connotation de la bigarrure au
Moyen Âge, étudiée par Michel Pastoureau. Ambroise de
Milan (Hexaméron, VI, 4, 36) fait de la tigresse un symbole
de férocité aux côtés du lion. Quant à Richard de Fournival,
dans son Bestiaire d’amour, il en fait une image de l’amou-
reux berné par les belles paroles de sa dame, qui lui fait croire
à son amour mais ne donne jamais satisfaction.
En dehors des Bestiaires et des encyclopédies, on trouve rela-
tivement peu de tigres dans l’iconographie médiévale, car cet
animal était pratiquement inconnu. Il arrive parfois que l’on
retrouve la légende de la tigresse dans les marges de certains
manuscrits gothiques, mais cela reste rare. D’autres textes
médiévaux mentionnent toutefois des tigres, essentiellement
dans un contexte lié à l’Antiquité classique. Tertullien, par
exemple, mentionne des tigres dans son Apologie du
Christianisme (XII, 4), parmi les animaux de Bacchus et
Cybèle auxquels sont livrés les chrétiens dans l’arène.
L’évocation de la fameuse tigresse de Thèbes, nourrie par
Antigone, est aussi une occasion pour les artistes de donner
libre cours à leur imagination. Cet animal plus fabuleux que
réel est décrit dans l’Histoire ancienne jusqu’à César, première
compilation historique en prose française composée vers
1213-1214 : « En la cité de Thèbes se trouvait une tigresse
apprivoisée. Antigone, la sœur d’Étéocle, l’avait nourrie et
offerte à deux sœurs égyptiennes. Cette tigresse avait énor-
mément grandi car elle était nourrie au palais depuis sa nais-
sance. Elle était semblable à la tigresse sauvage : de la même
grandeur et semblable de corps avec la tête proche de celle du
cerf, et plus puissante et légère que n’importe quelle autre
bête. Elle a les pattes, et la queue du lion, mais le museau
doux, beau et gentil, et son pelage est de couleur d’or. Aucun
animal tout furieux soit-il n’oserait l’attaquer car elle le dévo-
rerait sur-le-champ. Mais elle est autant capable de fureur que
de douceur et de bonté quand elle n’est pas en colère, au point
Tigris Le tigre
L
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Gaston Phébus, Le Livre de la chasse, Paris, vers 1410
New York, The Pierpont Morgan Library, ms M 1044, folio 1v
(Aigle, renard avec un oiseau dans la gueule, laie et marcassins,
ours se battant, petit carnassier, lièvres, hibou, bouquetins)
PAGE CI-CONTRE
Livre d’heures, Barthélemy d’Eyck, Provence, vers 1440-1450
New York, The Pierpont Morgan Library, ms 358, folio 13
(Début de l’Évangile de Jean)
PAGES 6-7
Évrard de Conty, Livre des échecs amoureux
Enluminé par Robinet Testard, Cognac, 1496-1498
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms fr. 143, folio 130v
(Neptune et sirènes musiciennes, raie, dauphin, poissons)
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Beatus de Liébana, Commentaire de l’Apocalypse et du Livre de Daniel,
dit Beatus de Saint-Sever, Saint-Sever, avant 1072
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms lat. 8878, folio 13
(Paon combattant un serpent)
PAGE 13
Beatus de Liébana, Commentaire de l’Apocalypse et du Livre de Daniel,
dit Beatus de Saint-Sever, Saint-Sever, avant 1072
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms lat. 8878, folio 198
(Griffon, lion, éléphant, sanglier, ours, lion, dromadaire, bœuf, chèvre, échassiers)
Gaston Phébus, Le Livre de la chasse, Paris, début du XVe siècle
Enluminé par le Maître des Adelphes
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms fr. 616, folio 92
(Chasse au lapin)
PAGE CI-CONTRE
Psautier et Heures de Yolande de Soissons, Nord de la France,
dernier quart du XIIIe siècle
New York, The Pierpont Morgan Library, ms 729, folio 354v
(Parabole de la licorne et des deux rats)
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Bestiaire de la seconde famille contenant l’Aviarium de Hugues de Fouilloy,
abbaye de Peterborough ou de Canterbury, vers 1200-1210
Oxford, Bodleian Library, ms Ashmole 1511, folio 74
(Aigle pêchant, aigle regardant le soleil, aigle plongeant dans la fontaine)
PAGE CI-CONTRE
Beatus de Liébana, Commentaire de l’Apocalypse et du Livre de Daniel,
dit Beatus de Saint-Sever, Saint-Sever, avant 1072
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms lat. 8878, folio 141
(Aigle parcourant le ciel)
u même titre que le lion est le roi
des mammifères et le dauphin celui des poissons, l’aigle est
considéré comme le roi des oiseaux en raison de sa force et
probablement aussi de la noblesse de son port. Mais trans-
posé dans la sphère du symbolisme des hommes, l’aigle est
devenu l’image des empereurs et non uniquement des rois,
car en sa qualité de Maître des airs il peut contempler plusieurs
royaumes terrestres d’un seul regard, évoquant le pouvoir impé-
rial qui s’étend sur plusieurs frontières. Ce symbolisme impérial
remonte aux civilisations mésopotamiennes, quand les Hittites
lui vouaient un culte. D’ailleurs, dans l’Ancien Testament,
Nabuchodonosor, roi de Babylone qui soumit les rois de Judée
– ici comparés aux cèdres du Liban –, est comparé à l’aigle par
Ézéchiel, comme nous l’explique Hugues de Fouilloy dans son
Traité des oiseaux (chap. 60) : « L’aigle énorme, aux grandes ailes,
aux longs membres, plein de plumes variées, vint sur le Liban,
et prit la moelle du cèdre. Il arracha les sommités de ses
branches » (Ézéchiel XVII, 3-4). Ici, l’aigle ne représente nul
autre que Nabuchodonosor, roi de Babylone qui est désigné par
l’étendue des ailes pour l’ampleur de son armée, par la longueur
des pattes pour la longueur de sa vie, par la variété des plumes
pour sa grande opulence et par les riches couleurs également
pour l’immensité infinie de sa gloire. Redouté pour sa puissance,
on le pensait capable d’enlever du bétail ou même des enfants,
mais il est plus souvent figuré en train de s’attaquer à des lièvres
ou du petit gibier, ce qui est plus proche de la réalité. Sa nature
rapace en a fait parfois un symbole négatif, conformément à
l’ambivalence récurrente des symboles animaliers auMoyen Âge,
y compris pour les plus nobles d’entre eux.
Grégoire le Grand, qui fut pape au VIe siècle et l’un des plus
grands docteurs de l’Église, a moralisé le Livre de Job, proba-
blement l’un des plus complexes de tous ceux de l’Ancien
Testament. Ce livre biblique inclut de nombreuses de réfé-
rences au monde animal, ce qui fait que lesMorales sur Job de
Grégoire furent régulièrement reprises dans la littérature
animalière du Moyen Âge. Concernant l’aigle, Grégoire
rappelle notamment à propos de l’aigle qu’il « désigne le Malin
à l’affût de nos âmes : Nos persécuteurs ont été plus vite que les
aigles du ciel (Lamech IV, 19). Parce les impies sont si mauvais
envers nous qu’ils semblent surpasser en invention mauvaise la
puissance de vol des aigles ». Qui dit rapace dit carnassier, et
qui dit carnassier dit animal impur selon la loi juive (Lévitique
XI, 13) : « Entre les oiseaux, voici quels sont ceux dont vous ne
mangerez point, et que vous aurez soin d’éviter : l’aigle, le
griffon, le faucon ». Cette impureté a donné lieu à des inter-
prétations surprenantes par les exégètes du Moyen Âge qui
avaient pour tâche d’interpréter le message biblique pour le
rendre accessible aux chrétiens. Grégoire le Grand explique
donc aussi, toujours dans ses Morales sur Job (XXXI, 47) que
l’aigle qui vole dans les hauteurs mais doit régulièrement redes-
cendre sur terre pour se nourrir de la chair, symbolise dans un
premier temps les contemplatifs qui s’élèvent en pensée mais
doivent de temps à autre assumer leur condition humaine et
accepter de se fortifier en mangeant. Poussant plus loin encore
sa comparaison, Grégoire va jusqu’à comparer l’aigle à l’en-
semble du genre humain qui était à l’origine autorisé à contem-
pler la Divinité sans voile. Mais le péché originel a entraîné la
mortalité de la chair et obligé l’homme à se nourrir désormais
de la chair morte des cadavres de ses proies, qui sont comme
autant de vanités lui rappelant sa propre déchéance.
Toutefois, le grand rapace est quand même plus souvent perçu
en bien et reste majoritairement un symbole de gloire. Cela en
raison de ses multiples qualités physiques vantées par les
Bestiaires. Ainsi sa vue perçante est réputée telle qu’il est
capable, planant très haut dans le ciel, de percevoir les petits
poissons qui nagent sous la surface de l’eau, et de fondre sur
eux à la vitesse de l’éclair. Une légende veut que l’oiseau roi,
devenu vieux, s’élève d’abord jusqu’au soleil auprès duquel il
Aquila L’aigle
A
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Christian HECK
Ancien conservateur en chef dumusée d’Unterlinden à Colmar,
est membre senior de l’Institut Universitaire de France (Chaire
d’iconographie médiévale), et professeur d’histoire de l’art à
l’Université de Lille 3. Il dirige le RILMA (Répertoire
Iconographique de la Littérature du Moyen Âge), et le GRIM
(Groupe de Recherches en IconographieMédiévale). Ses travaux
portent également sur les manuscrits enluminés, et sur la pein-
ture au nord des Alpes à la fin du Moyen Age. Parmi ses princi-
pales publications figurentGrünewald. Le retable d’Issenheim (en
japonais), Tokyo, Shinchosha, 1993 ; Conques. Les vitraux de
Soulages, Paris, Seuil, 1994 ; L’échelle céleste dans l’art du Moyen
Age. Une image de la quête du ciel, Paris, Flammarion (collection
Idées et Recherches), 1997. Il a dirigé les volumes Histoire de
l’Art : Moyen Age. Chrétienté et Islam, Paris, Flammarion, 1996 ;
et L’art flamand et hollandais : le siècle des Primitifs, 1380-1520,
Paris, Citadelles et Mazenod (collection L’art et les grandes
civilisations), 2003.
Rémy CORDONNIER
Docteur en histoire de l’art, membre associé de l’Institut de
Rechercher Historiques du Septentrion (Université de Lille
Nord de France,), du Groupe de Recherches en Iconographie
Médiévale, du projet FSR de l’Université de Louvain la Neuve
« Encyclopédies comme images du monde et comme vecteurs
d’échanges intellectuels dans l’Islam et l’Occident au Moyen
Âge, et de la Société Internationale Renardienne ». Spécialiste
de l’iconographie animale et de l’exégèse visuelle au Moyen
Âge, il travaille sur le rôle et la place de l’image dans la trans-
mission des savoirs au Moyen Âge et est l’auteur d’une ving-
taine d’articles et d’ouvrages sur le sujet.
Lambert de Saint-Omer, Liber Floridus, France du Nord,
3e quart du XIIIe siècle
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms lat. 8865, folio 43
(Le lion de la tribu de Juda)
PAGE CI-CONTRE
Villard de Honnecourt, « Album », France, vers 1220-1235
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms fr. 19.093), folio 24v
(lion et porc-épic)
Les auteurs
• 620 pages environ• 600-650 illustrations
• vernis sélectif sur papier noir• ouvrage relié sous jaquette
et étui illustrés• 27 x 38,5 cm
• ISBN : 978 2 85088 513 6• H : 44 38545
• CM : 11032 PL
EN 4e DE COUVERTURE
Traduction anonyme du Triomphe des vertus de Pétrarque, Rouen, 1503
Paris, Bibliothèque nationale de France, ms fr. 594, folio 375v.
(anguille, poissons, chevaux, sanglier, cerf, chèvre, zodiac)
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