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6/10/2014 Bygmalion : Nicolas Sarkozy directement visé
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Bygmalion : Nicolas Sarkozydirectement viséLE MONDE | 06.10.2014 à 11h00 • Mis à jour le 06.10.2014 à 12h38 |
Par Gérard Davet (/journaliste/gerard-davet/) et Fabrice Lhomme (/journaliste/fabr ice-lhomme/)
L’affaire Bygmalion est bien une affaire Sarkozy. Les policiers qui
enquêtent sur un soupçon de financement occulte de la campagne
présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012 par des fausses factures imputées
à l’UMP, évoquent désormais l’infraction de « financement illégal de la
campagne électorale » et plus seulement celle d’« abus de confiance ».
Lire aussi : Affaire Bygmalion : la défense de Jean-FrançoisCopé fragilisée (/politique/article/2014/10/06/affaire-bygmalion-la-defense-de-
jean-francois-cope-fragilisee_4501121_823448.html)
Or, l’article 113-1 du code électoral dispose que « sera puni d'une amende
de 3 750 euros et d'un emprisonnement d’un an, tout candidat en cas de
scrutin uninominal qui aura dépassé le plafond des dépenses électorales,
n'aura pas respecté les formalités d'établissement du compte de
campagne, (…) aura fait état, dans le compte de campagne ou dans ses
annexes, d'éléments comptables sciemment minorés ».
Nicolas Sarkozy au Parc des princes, dimanche 5 octobre 2014. | AFP / MIGUEL
MEDINA
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Après avoir mis en examen les cadres de la société de communication
Bygmalion et de sa filiale Event & Cie, soupçonnés d’avoir émis ces fausses
factures, puis ceux de l’UMP, les juges Serge Tournaire, Roger Le Loire et
Renaud Van Ruymbeke vont donc maintenant s’intéresser à l’échelon
politique, et plus particulièrement à Nicolas Sarkozy.
Les conclusions du procès-verbal de synthèse, rédigé le 1 octobre par la
chef de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractionsfinancières et fiscales (OCLCIFF), Christine Dufau, lèvent le voile sur les
intentions des enquêteurs : « Les investigations confirment les
constatations faites au cours de l’enquête préliminaire selon lesquelles la
société Event & Cie, à la demande de l’UMP, a adressé au parti des fausses
factures à hauteur de 18 556 175,95 euros TTC courant 2012, faisant
référence à des prestations liées notamment à des conventions, alors que
les prestations réelles correspondaient à l’organisation de meetings pour
la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy », commence la
commissaire Dufau.
Outre le délit d’« abus de confiance », retenu contre les cadres de l’UMP, «
ces fausses factures adressées par Event & Cie à l’UMP constituent
également l’infraction de financement illégal de la campagne électorale de
Nicolas Sarkozy puisque, sciemment, les deux parties ont établi de fausses
factures pour éviter de devoir comptabiliser dans le compte de campagne
des factures de prestations liées à cette campagne », affirme la patronne
de l’OCLCIFF.
« SURPRENANT »
Evoquant les divers protagonistes poursuivis dans cette affaire, M Dufau
va jusqu’à évoquer « leur participation au financement illégal de la
campagne de Nicolas Sarkozy et la présentation de comptes de campagne
inexacts à la Commission nationale des comptes de campagne et des
financements politiques et [au] Conseil constitutionnel ». Elle précise,
comme pour répondre à Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé – patron de
l’UMP au moment des faits – qui ont démenti avoir eu connaissance du
système frauduleux : « Etant donné le nombre de meetings, l’enjeu
financier qu’ils représentaient, il peut paraître très surprenant que
personne ne se soit préoccupé de leur financement, et que les responsables
du groupe Bygmalion n’aient pas pris contact avec ceux de l’UMP. »
Si l’enquête devait être étendue à des faits de « financement illégal de
campagne électorale », voire de « fraude électorale », la menace se
préciserait donc encore un peu plus pour M. Sarkozy. Les juges vont
maintenant s’attacher à évaluer son degré de connaissance du « système »
délictueux mis en place.
De ce point de vue, la mise en examen de l’un de ses proches, Eric Cesari,
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ex-directeur général de l’UMP – où il était surnommé « l’œil de Sarkozy » –
n’est pas de nature à le rassurer… D’autant que les magistrats devraient
prochainement convoquer Guillaume Lambert, directeur de la campagne
présidentielle de l’ex-chef de l’Etat, et Jérôme Lavrilleux, son adjoint, qui a
reconnu, publiquement puis devant les policiers, lors de l’enquête
préliminaire, la mise en place d’une double facturation.
« CANDIDAT IDÉAL »
Ce n’est pas tout : les enquêteurs ont découvert que non seulement
Bygmalion (et sa filiale Event & Cie) travaillait de longue date pour l’UMP,
mais aussi que le système de fausse facturation avait été institué bien avant
la campagne présidentielle de 2012. Le rapport de l’OCLCIFF souligne que
« la société Event & Cie a établi à la demande de l’UMP des fausses
factures en 2012 pour inclure le coût de prestations faites en 2011. Durant
les auditions, les prestations concernées faites en 2011 n’ont pas pu être
clairement précisées ».
Cette découverte, évoquée par Le Journal du dimanche du 5 octobre, a
conduit, selon nos informations, le parquet de Paris à accorder aux juges, le
1 octobre, un réquisitoire supplétif afin d’élargir leur enquête à ces faits
nouveaux, qualifiés de « faux et usage de faux ». Elle signifie surtout, pour
les enquêteurs, que le procédé illégal mis en place pour masquer l’explosion
des dépenses de campagne de M. Sarkozy n’a pas été élaboré par hasard
avec la société Bygmalion.
Les policiers l’ont d’ailleurs fait observer au patron d’Event & Cie, Franck
Attal, au cours de sa garde à vue, le 30 septembre : « Début janvier 2012,
vous avez accepté, avec Sébastien Borivent et Matthieu Fay
[respectivement directeur général d’Event & Cie et comptable de
Bygmalion], de faire des fausses factures à la demande de l’UMP . Event &
Cie a été choisie par l’équipe de campagne du candidat UMP début février
2012 pour organiser les meetings du candidat. Cela donne l’impression
qu’Event & Cie était le candidat idéal pour un montage de sous-évaluation
des dépenses de campagne »…
Dans les locaux de l’OCLCIFF, M. Attal, le 30 septembre, a dédouané – en
termes prudents – MM. Sarkozy et Copé. « Je n’ai aucun élément factuel
qui me permet de dire qu’il était au courant », a-t-il dit à propos de l’ex-
secréatire général de l’UMP. S’agissant de l’ancien chef de l’Etat, il s’est
borné à déclarer : « J’ai tendance à croire qu’il n’était pas au courant. »
« PRIS AU PIÈGE PAR L’UMP ET LA CAMPAGNE »
Mais, pour Guy Alvès, cofondateur de Bygmalion, c’est beaucoup moins
sûr. Pour les enquêteurs également. « Est-il envisageable que les plus
hautes autorités de l’UMP, donc M. Copé lui-même, et de la campagne,
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donc M. Lambert, voire M. Sarkozy, n’aient pas été associés à cette
décision [de faire des fausses factures] ou tout au moins que leur accord
n’ait pas été obtenu ? », ont ainsi demandé les policiers à M. Alvès. « Je
suis incapable de répondre. (…) Pour moi, les deux scénarios sont
techniquement possibles », a-t-il répondu.
Estimant avoir été « pris au piège par l’UMP et la campagne », M. Alvès
s’est posé en « victime de l’UMP et de ses agissements ». Et de conclure, àpropos de la décision de recourir aux fausses factures : « Elle n’a pu être
prise que par des dirigeants à l’UMP et/ou de la campagne. Je ne peux pas
imaginer qu’une telle décision ait été prise que par M. Lavrilleux. »
(/journaliste/gerard-davet/) Gérard Davet (/journaliste/gerard-davet/)
Journaliste au Monde
Fabrice Lhomme (/journaliste/fabrice-lhomme/)
Journaliste au Monde