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Concours du second degré Rapport de jury Concours : CAPES INTERNE DE LETTRES Sections : LETTRES CLASSIQUES ET MODERNES Session 2015 Rapport de jury présenté par : Anne VIBERT présidente du jury

CAPES INTERNE DE LETTRES Sections : LETTRES CLASSIQUES

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  • Concours du second degr Rapport de jury

    Concours : CAPES INTERNE DE LETTRES

    Sections : LETTRES CLASSIQUES ET MODERNES

    Session 2015

    Rapport de jury prsent par :

    Anne VIBERT prsidente du jury

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    SOMMAIRE

    1. PRSENTATION DU CONCOURS

    2. JURY DU CONCOURS

    3. BILAN DE LADMISSIBILIT ET DE LADMISSION

    4. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSIBILIT

    5. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSION

    6. RAPPORT SUR LPREUVE DE TRADUCTION IMPROVISE EN LANGUES ANCIENNES (OPTION LETTRES CLASSIQUES)

    ANNEXES : EXEMPLES DE DOSSIERS POUR LPREUVE ORALE

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    1. PRSENTATION DU CONCOURS

    Le CAPES interne de lettres et le CAER correspondant ont vu leurs modalits modifies par larrt du 19 avril 2013. La session 2015 tait donc la deuxime de ces concours dans leur forme rnove. Si lpreuve crite est reste inchange et consiste toujours depuis 2011 en un dossier de reconnaissance des acquis de lexprience professionnelle (RAEP), lpreuve orale est, depuis la session 2014, une preuve sur dossier. On trouvera ci-aprs le texte de larrt dfinissant ces preuves.

    En ce qui concerne lpreuve crite, nous redirons ici ce que disaient les rapports prcdents : nous insistons sur la ncessit de ne pas prsenter le mme rapport que celui fourni pour une sessions antrieure, quand bien mme celui-ci aurait obtenu une note qui a permis ladmissibilit. Tout lintrt du dossier de RAEP est de faire tat dune exprience rcente permettant de tmoigner au plus prs de ltat des comptences acquises et la rdaction mme du rapport doit tre considre comme un moyen de progresser dans sa pratique professionnelle. En outre, sagissant dun concours, les notes y ont une valeur relative et non absolue, et reprsenter le mme rapport ne garantit pas lobtention dune note similaire.

    Nous attirons aussi lattention des candidats sur le fait que le dossier de RAEP doit tre personnel et doit rendre compte dune exprience pdagogique quils ont rellement conduite : si des squences trouves sur internet ou mme des analyses de squence peuvent tre des sources de travail, tout emprunt doit tre signal sous peine de relever du plagiat. La session 2015 a malheureusement connu plusieurs cas de plagiat qui ont conduit le jury signaler les dossiers concerns et ont pu entraner, dans certains cas, une exclusion du concours.

    Le jury valorisera linverse les rapports qui rendent compte dune exprience personnelle, avec ses russites et ses questionnements comme ses difficults, qui sont nourris de lectures et de rfrences de premire main et qui, sils prennent appui sur des propositions labores par dautres, non seulement signalent ces emprunts mais sont capables de les adapter un autre contexte et de les mettre en perspective.

    Lpreuve orale a confirm son caractre exigeant mais galement ouvert aux propositions des candidats. Elle suppose quon sy prpare en lisant rgulirement pour dvelopper ses comptences de lecteur et sa culture littraire, quon dveloppe ou conforte ses connaissances linguistiques et sa rflexion didactique. Elle suppose aussi quon sy entrane pour prendre la mesure de sa dure (3 heures 50 au total) et de la gestion du temps quelle suppose dans ses diffrentes parties mais aussi pour matriser sa communication orale et faire preuve de ractivit dans lchange avec le jury. Des candidats qui avaient bien compris les objectifs de lpreuve et maitrisaient les tapes de son droulement ont su lire vritablement les textes du dossier et faire partager au jury des propositions de squence convaincantes, nourries de leur exprience denseignant et de leur culture personnelle, susceptibles de nourrir en retour les lves, de les intresser et de favoriser leurs apprentissages. La moyenne dadmission du concours en lettres modernes est dailleurs plus leve en 2015 quen 2014, alors que le nombre de postes tait suprieur en 2015, pour le CAPES et plus encore pour le CAER, signe que les candidats se sont mieux prpars et ont abord lpreuve en connaissance de cause. La situation est plus proccupante en lettres

  • 4 classiques o le vivier des candidats est peu important et o on a vu certains se prsenter cette anne encore avec des connaissances lacunaires ou inexistantes dans une des deux langues anciennes qui font lobjet de lpreuve de traduction improvise. Or loption lettres classiques sadresse des candidats qui ont fait du latin et du grec et lpreuve orale permet de vrifier quils ont des connaissances dans les deux langues, mme sils nont pas eu loccasion denseigner le grec.

    Enfin, quil sagisse des lettres modernes ou des lettres classiques, rappelons quau-del de la prparation aux preuves du concours, on attend plus gnralement des candidats quils fassent preuve non seulement des connaissances ncessaires la matrise de la discipline mais encore de la culture, de louverture desprit, et de la curiosit intellectuelle et artistique ncessaires aujourdhui comme hier un professeur de lettres.

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    Nouvelles modalits du CAPES interne compter de la session 2014

    Arrt du 19 avril 2013 Section lettres Les candidats ont le choix au moment de l'inscription entre deux options : - option lettres classiques ; - option lettres modernes. Les candidats proposs pour l'admissibilit et pour l'admission par le jury du concours font l'objet de classements distincts selon l'option. A.Epreuved'admissibilit Epreuve de reconnaissance des acquis de l'exprience professionnelle dfinie l'annexe III (coefficient 1). Pour les candidats ayant choisi l'option lettres classiques, le dossier de RAEP porte, au choix du candidat au moment de l'inscription, soit sur le franais, soit sur une langue ancienne (latin ou grec). B.Epreuved'admission Epreuve professionnelle. Dure de la prparation : deux heures et trente minutes. Dure totale de l'preuve : une heure et vingt minutes maximum (dure de l'expos : quarante minutes maximum ; dure de l'entretien : quarante minutes maximum). Coefficient 2. L'preuve comporte : 1. Une analyse d'une situation d'enseignement. Le jury propose au candidat un dossier de nature professionnelle et prcise le niveau d'enseignement (collge ou lyce) auquel la situation d'enseignement doit tre aborde. L'preuve consiste laborer, pour un niveau donn et partir d'un dossier comportant un ou plusieurs textes littraires ventuellement accompagns d'un ou de plusieurs documents, un projet de squence d'enseignement assorti de l'explication d'un texte de langue franaise choisi par le jury. La mthode d'explication est laisse au choix du candidat. La squence devra comporter une sance d'tude de la langue. 2. L'expos est suivi d'un entretien qui a pour base la situation d'enseignement propose et est tendu certains aspects de l'exprience professionnelle du candidat.

    a) Il inclut, pour les candidats de l'option lettres modernes, un temps d'interrogation relatif la matrise de la langue franaise et comportant une ou plusieurs questions d'analyse grammaticale (dure : dix minutes maximum) ;

    b) Il inclut pour les candidats de l'option lettres classiques une traduction improvise, sans dictionnaire, d'un court texte de latin ou de grec choisi par le jury parmi les auteurs du programme des classes (dure : dix minutes maximum).

    Pour les deux options, le programme de l'preuve est celui des lyces d'enseignement gnral et technologique et des collges.

    Lors de l'entretien, dix minutes maximum pourront tre rserves un change sur le dossier de reconnaissance des acquis de l'exprience professionnelle tabli pour l'preuve d'admissibilit, qui reste, cet effet, la disposition du jury.

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    2. JURY DU CONCOURS

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    3. BILAN DE LADMISSIBILIT ET DE LADMISSION

    Option lettres modernes

    CAPES CAER

    Nombre de postes 111 105 Nombre dinscrits 1497 817

    Nombre de candidats non limins 788 560 Barre dadmissibilit 10 / 20 10 / 20

    Nombre dadmissibles 249 236

    Moyenne des candidats admissibles 11,08 / 20 11,08 / 20

    Nombre de candidats non limins et prsents loral

    235 218

    Nombre dadmis 111 105

    Barre dadmission de la liste principale

    10 / 20 10 / 20

    Moyenne des candidats admis sur liste principale (total de ladmissibilit et de ladmission)

    12,92 / 20 13,25 / 20

    Option lettres classiques

    CAPES CAER

    Nombre de postes 16 11

    Nombre dinscrits 78 40 Nombre de candidats non limins 40 24

    Barre dadmissibilit 7 / 20 7 / 20

    Nombre dadmissibles 30 16 Moyenne des candidats admissibles 10,03 / 20 9,69 / 20

    Nombre de candidats non limins et prsents loral

    26 12

    Nombre dadmis 16 11

    Barre dadmission de la liste principale

    8,67 / 20 9,67 / 20

    Moyenne des candidats admis sur liste principale (total de ladmissibilit et de ladmission)

    11,07 / 20 13,44 / 20

  • 12 4. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSIBILIT

    PREUVE DE RECONNAISSANCE DES ACQUIS DE LEXPRIENCE PROFESSIONNELLE (RAEP)

    Rapport prsent par Adeline LIBERT

    Fonde sur un dossier devant permettre dvaluer les acquis de lexprience

    professionnelle des candidats, lpreuve dadmissibilit du CAPES interne et du CAER nest

    plus nouvelle et les dossiers en conformit avec les attentes du jury sont de plus en plus

    nombreux. Pour cette quatrime anne dexistence de lpreuve, on est nanmoins surpris de

    constater que trop de dossiers continuent de ne pas satisfaire aux exigences fixes par le

    ministre et prcises chaque anne par les rapports de jury. Tandis que Jean-Pierre Grosset-

    Bourbange revenait la suite de la session de 2012 sur la prsentation matrielle du dossier et

    posait les principes fondamentaux de lpreuve, les rapports de Christine Deronne et Sylvain

    Gonzales mettaient laccent lun sur la question de la problmatisation et de lanalyse de la

    situation denseignement, lautre sur les modalits dcriture dun texte qui est un exercice

    de communication devant permettre de saisir en deux pages un parcours professionnel et

    en six pages une ralisation pdagogique significative . Un candidat soucieux de se

    prparer srieusement au concours ne saurait faire lconomie de la lecture de ces trois

    rapports, dans la continuit desquels se situe celui-ci.

    Pour enrichir la rflexion du candidat sur les attendus du dossier RAEP, nous partirons

    de la notion de choix, qui prside invitablement lcriture dun tel dossier puisquil sagit

    de montrer au jury, dans les huit pages imparties, plus quelques annexes, toutes les facettes de

    lenseignement : une certaine manire de savoir, de transmettre et de questionner, une volont

    de partager, de construire et de sengager, afin que les lves en retour construisent leur

    propre rapport au savoir et au monde.

    Choisir, cest galement le quotidien des enseignants, tous les moments de la

    prparation des cours et de la vie en classe. Nous tenterons ainsi dans un second temps de

    donner aux candidats quelques conseils sur la manire dont ils peuvent en rendre compte.

    Enfin, nous souhaitons revenir sur le joli mot dlve, qui renvoie lide dune

    lvation rendue possible par une situation denseignement. Comment montrer dans un

  • 13 dossier RAEP ce que lon met en uvre pour faire grandir, spanouir et ouvrir au monde

    ceux dont on a la charge ? partir de quelques exemples, nous nous pencherons sur cette

    question dans le troisime temps de ce rapport.

    Prcisons demble tout ce que ces lignes doivent lensemble des membres du jury,

    aux nombreuses remarques que jai reues, et aux fructueuses discussions qui ont

    accompagn chaque tape de cette session 2015. Que chacun en soit remerci.

    I. LES CHOIX QUI PRSIDENT LCRITURE DU DOSSIER

    1.1. Rendre compte dun parcours professionnel

    Dans leur grande majorit, les candidats ont saisi les enjeux de cette premire partie de

    leur dossier et proposent au jury une approche rflexive de litinraire qui les a mens se

    prsenter au concours. Dans les deux pages qui leur sont imparties, ces candidats ne se

    contentent pas dun simple rcit de leurs expriences, et parviennent, au-del du factuel,

    donner du sens un faisceau dvnements, de ralits et de choix professionnels ayant abouti

    au projet dtre titularis au sein de lducation nationale comme professeur de lettres.

    Chaque parcours a sa logique et ses spcificits quil convient au candidat de mettre en

    vidence, sans luder, le cas chant, les changements dorientation professionnelle, qui sont

    souvent riches et significatifs et dont on aurait tort de croire quils sont rdhibitoires. On

    regrette aussi que tel candidat titulaire dune matrise dhistoire nexplicite pas les raisons

    layant port se prsenter un concours de lettres, et lon aurait aim que cette autre

    candidate dispose prparer le concours de professeur des coles explique ce qui a amen

    lun de ses enseignants lui conseiller de [s]inscrire pour faire des remplacements , la

    considrant davantage faite pour le second degr , considration qui par ailleurs na suscit

    aucun commentaire.

    Sans doute par crainte dtre disqualifis, certains candidats ne mentionnent pas leur

    formation initiale. Cela permettrait pourtant de se faire une ide de lassise culturelle et

    mthodologique avec laquelle le candidat sest lanc dans la vie professionnelle, sachant l

    encore quun engagement rcent mais justifi dans la voie des lettres ne prsage pas moins de

    qualits littraires et pdagogiques que le maladroitement rebattu jai toujours voulu tre

  • 14 professeur de franais . De mme, le jury nest ni plus ni moins sensible une longue

    exprience de lenseignement du second degr qu un parcours professionnel commenc

    dans un domaine trs diffrent. L encore, tout est dans la justification. La cohrence dun

    parcours est rendue par un cheminement rtrospectif, il s'agit donc d'un processus de

    construction et danalyse.

    On rappellera enfin que si le premier rapport saluait un bon usage du rfrentiel de

    comptences de lenseignant, le rapport rdig par Sylvain Gonzals mettait en garde contre

    certaines drives visant plaquer inutilement des rfrences des documents officiels, sans

    que la rflexion sen trouve enrichie. Nous en profitons pour renouveler le conseil qui avait

    t donn de recourir, de faon modre, aux notes de bas de page, lorsque celles-ci

    permettent dallger le propos, et nous suggrons par ailleurs aux candidats dviter les

    parenthses qui court-circuitent la logique du discours.

    travers son retour rflexif sur ses comptences et ses expriences, il sagit donc bien pour le

    candidat de faire des choix dans la manire dont il mettra en lumire les grandes tapes de son

    exprience professionnelle et danalyser les moments clefs de son parcours en fonction du

    projet quil manifeste en se prsentant au concours.

    1.2. Choisir une exprience pdagogique

    Le jury ne saurait assez insister sur la ncessit de prsenter une exprience personnelle.

    La reprise sans vritable appropriation dune squence de manuel, dactivits pdagogiques

    ou de squences mises en ligne sur les sites acadmiques (ou dautres sources plus ou moins

    valides par les instances officielles) rend le travail du jury plus difficile, car il doit faire la

    part de ce qui relve du candidat, et de ce qui a t conu par ailleurs. Lhonntet

    intellectuelle exige que toute source soit mentionne. Aussi convient-il que les candidats

    prcisent en note les rfrences des manuels, des ouvrages et des sites consults

    pralablement ou au cours de lexprience pdagogique quils prsentent.

    On dplore de devoir mentionner ici des cas de plagiat particulirement regrettables pour des

    enseignants, lesquels sont en premire ligne dans la lutte contre lineptie pdagogique du

    copier-coller. Cest dommageable lorsque la reprise de sources extrieures sans citations ni

    rfrences explicites est le fait dlves, cest affligeant lorsquelle mane de professeurs, qui

    plus est en situation de concours. Pour viter dimposer au jury de faire lui-mme la part de ce

    qui relve de leur parole et de ce qui a t emprunt, nous invitons les candidats tre trs

  • 15 rigoureux dans leurs rfrences. La reprise de paragraphes entiers, voire de pages compltes,

    relve videmment de la tricherie et les dossiers concerns, fort heureusement une infime

    minorit, sont sanctionns par une note trs basse.

    Enfin, on rappellera que les conditions dune bonne communication ncessitent que le

    rcepteur sache de quoi il est question, et que, par exemple, la rfrence aux textes littraires

    soit prcise. Par rigueur, le candidat peut prciser de quel livre est tire telle fable de La

    Fontaine, par ncessit, il convient de prciser pour un pome le nom du recueil do il

    provient, ou encore la situation dun passage extrait dun roman ou dune pice de thtre.

    Enfin, on aimerait que les candidats contextualisent mieux les textes choisis, et en prcisent

    avec concision et efficacit les enjeux, afin que le jury puisse concrtement suivre les analyses

    littraires et les dmarches pdagogiques mises en uvre. En revanche, il est inutile

    denvoyer une copie du texte en question, ce nest pas le rle des annexes.

    Ces prcisions tablies, nous laisserons la parole une candidate qui soulve explicitement

    La question que tous se posent : Faire un choix au niveau de la squence est mon

    humble avis un vrai dilemme. Quelle squence va reprsenter au mieux le travail accompli

    avec les lves ? .

    Il est vident que ce choix est primordial, et certains candidats se fourvoient. Ainsi on a pu

    lire un dossier intressant sur des activits dexposs mens par des lves autour de romans

    daventures, mais le travail ordinaire de la classe tait compltement occult, rendant le

    dossier extrmement difficile valuer. Autre exemple, une candidate prsente deux sances

    de langue sur la phrase complexe : ce choix dactivit a le mrite de proposer une rflexion

    sur la grammaire, trop peu souvent prise en charge par les candidats, mais la liste de toutes les

    phrases inventes par la candidate tait-elle ncessaire ? Le tout aurait mrit de gagner en

    concision, et dtre augment dune prsentation de la manire dont la notion a pu tre

    rinvestie dans des activits de lecture ou dcriture La dernire phrase du dossier est

    dailleurs significative : Mais ai-je contribu structurer leur pense ? . Cest justement sur

    cette question que le jury aurait aim lire au moins lesquisse dune rponse.

    Heureusement, cette session a t riche en propositions de squences ou dactivits

    vritablement originales, avec notamment des problmatiques intressantes et des choix de

    textes moins souvent proposs aux lves que ceux que lon trouve dans de nombreux

    manuels de collge, descriptifs pour loral du baccalaurat au lyce, ou encore sur Internet.

    Un enseignant qui se contente de reprendre ce que dautres ont construit avant lui oublie que,

  • 16 parmi les comptences requises communes tous les professeurs, figure celle-ci :

    construire, mettre en uvre et animer des situations d'enseignement et d'apprentissage . Ce

    rle de btisseur est une inpuisable source de satisfaction pour les enseignants, et certains

    dossiers savent adroitement en tmoigner.

    Par ailleurs, on aimerait croire quil ny a pas que la nouvelle fantastique ou la nouvelle

    raliste dans le programme de 4e, et que pour cette dernire il existe dautres uvres que La

    Parure ou Aux champs de Maupassant Certes, par la force des choses, les candidats

    prsentent souvent des squences de dbut danne, mais le peu de varit dans le choix des

    entres du programme en dit long sur la manire dont les progressions annuelles ont tendance

    se figer sur un cheminement plutt quun autre.

    Ajoutons quil convient de proposer une exprience pdagogique rcente, et quil est

    souhaitable que les candidats qui ont dj prsent le concours fassent voluer leur dossier,

    ventuellement en r-exploitant lactivit pdagogique prsente avec une autre classe, et

    avec les modifications quun enseignant apporte ncessairement dans sa reprise de travaux

    antrieurs.

    Aux candidats qui ne peuvent prsenter une exprience professionnelle directement en lien

    avec lenseignement du franais et de la littrature, il nous semble important de rappeler que

    lactivit prsente doit donner lieu une proposition de transferts didactiques et

    pdagogiques. Un dossier bien construit sur un travail ralis en classe de CE2/CM1 visant

    faire dcouvrir aux lves luvre de Jules Verne et notamment son roman Voyage au centre

    de la terre na malheureusement pas pu obtenir une note suffisante parce quaucune vritable

    transposition de cette ralisation pdagogique avec des lves de collge na t propose,

    alors que le programme de 5e et son entre sur le roman daventure aurait pu tre lobjet

    dun rinvestissement intressant. Dautres professeurs des coles sont mieux parvenus

    convaincre le jury grce un va-et-vient constant entre les activits proposes, notamment sur

    le rcit Alice aux pays de merveilles de Lewis Caroll, et un travail susceptible dtre men en

    classe de 6e.

    Le jury salue par ailleurs les candidats qui, dans des conditions parfois compliques,

    parviennent se faire prter une classe pour quelques sances afin de sortir de la situation

    priphrique dans laquelle ils se trouvent. Dautres, qui enseignent luniversit ou

    destination dlves non francophones, sont parvenus montrer une rflexion convaincante

    sur la manire dont lactivit quils prsentent serait susceptible de nourrir une squence

  • 17 denseignement ou une activit en classe de franais. En revanche, pour un module de

    remobilisation et de raccrochage , un atelier sur la posie comme fentre sur le monde ,

    nous considrons qu'il est trop limit de se contenter dune conclusion telle que : ce projet

    datelier me semble transposable dans une classe de secondaire classique : tout lve,

    particulirement ladolescence, a besoin de se construire par lexpression .

    Pour terminer sur la question des choix de lactivit propose, telle candidate qui

    accompagne deux lves anglaises scolarises en classe de 5e et 4e et se demande si cette

    exprience sera reconnue comme une exprience professionnelle dducation , le jury a

    rpondu oui (une telle question, inhrente lcriture du dossier et aux choix possibles plus

    ou moins tendus en fonction de lexprience de chacun, ne mritait cependant pas dtre

    pose explicitement), mais na pas t convaincu par les choix didactiques et pdagogiques

    oprs pour rsoudre les difficults propres aux enfants anglophones dans leur apprentissage

    de la langue franaise.

    1.3. Analyser cette exprience dans une prsentation adquate et avec des mots

    choisis

    Lanalyse doit tre omniprsente. Elle nquivaut pas un bilan, ni une simple prise

    de recul mme si celle-ci est ncessaire. Trop de candidats pensent que la dimension rflexive

    de leur dossier commence aprs la prsentation de lactivit propose ; or elle doit tre

    permanente. Analyser, cest revenir sur les choix que lon a faits, sen expliquer et continuer

    les questionner. Cest pourquoi diviser les six pages dvolues la prsentation de lactivit

    pdagogique tel que le fait un candidat qui spare le droulement de la squence et un

    bilan et retour rflexif sur la squence ne nous semble gure pertinent. La prsentation

    dune squence ne se rsume dailleurs en aucun cas un droulement de celle-ci, et trop de

    candidats numrent les unes aprs les autres les activits menes, sans donner voir et

    comprendre les articulations qui permettent de passer de lune lautre, les chos, les

    approfondissements, les retours, qui seffectuent dans toute dmarche pdagogique rflchie.

    Cest pourquoi la prsentation chronologique, sans tre rdhibitoire, nest bien souvent pas la

    plus efficace. Dans le cas frquemment choisi de la prsentation dune squence pdagogique,

    le candidat doit avoir cur dorganiser une restitution mme de rendre compte

    efficacement de la problmatique mise en uvre, des savoirs pris en compte, des comptences

    vises, des activits qui ont t menes, et plus gnralement de toute cette attitude rflexive

    qui est au cur des mtiers de lenseignement.

  • 18 Nous attirons ici lattention des candidats sur limportance de la prsentation matrielle du

    dossier, qui, tout en respectant les contraintes fixes par les instances officielles, doit

    permettre une lecture fluide, avec ventuellement quelques titres susceptibles dimprimer une

    dynamique au propos. Labsence de retrait en dbut de paragraphe impose aux candidats ne

    doit pas les empcher de recourir au passage la ligne pour marquer un changement dide, et

    un espacement dune ligne lorsquils le jugent ncessaire, afin darer leur texte et den

    matrialiser la logique.

    Nous invitons les candidats tre particulirement attentifs aux mots quils emploient. Un

    professeur de lettres sait que chaque mot compte, et que les formulations ne sont pas

    anodines. Lorsquune candidate affirme avoir pris conscience en corrigeant ses copies que ses

    attentes taient trop grandes , elle semble rejoindre cette annonce bien maladroite dune

    autre candidate : si je devais recommencer, je me montrerais moins ambitieuse . Car peut-

    on tre trop ambitieux, ou avoir trop dattentes vis--vis de ses lves ? Une formulation plus

    juste aurait analys lcart entre les ralisations espres et la ralit, afin ventuellement de

    justifier une autre approche, non pas moins ambitieuse, mais en meilleure adquation avec des

    contraintes matrielles (par exemple le temps limit dvolu la ralisation dune squence),

    ou mieux mme de faire progresser les lves avec les objectifs que lon sest fixs et qui

    doivent bien sr tre en conformit avec les programmes officiels.

    Souvent, aprs avoir videmment indiqu le niveau concern par lexprience pdagogique

    propose, lentre des programmes qui est en jeu, et ventuellement la progression annuelle

    dans laquelle lexprience sinscrit, les candidats prsentent le profil de la classe ou des

    classes impliques. Cest bien sr fondamental. Cependant, l encore la manire est

    essentielle. Les candidats donnent parfois limpression de compartimenter leurs classes entre

    lves dys (sic) et lves prcoces, avec des dnombrements prcis qui ne permettent

    finalement gure au jury de se rendre compte de latmosphre dune classe alors que dautres

    candidats russissent camper tout au long de leur dossier un climat de travail et un certain

    profil de leurs lves, sans tomber dans un jugement de valeur du type le niveau intellectuel

    de mes lves est correct .

    Autre mise en garde, certains candidats semblent croire en lexistence de mots magiques

    dont la seule mention suffirait. Ainsi le terme significatif na rien de performatif et

    lemploi de cet adjectif ne prsage de rien. Dautre part, certains candidats semblent penser

    que faire une distinction thorique entre valuation diagnostique et valuation

    sommative suffit justifier de la pertinence des consignes dun devoir, que mentionner sans

  • 19 lexpliciter une dmarche inductive ou affirmer sans rien en dire que lon pratique une

    pdagogie diffrencie remplacent lanalyse dune pratique pdagogique efficace et

    soucieuse de ses lves. Il ny a pas non plus des mots attendus qu'il serait ncessaire

    d'employer et on met en garde les candidats contre un jargon non matris venu des sciences

    de lducation.

    loppos de ce jargon, on dplorera labsence de rflexion lexicale dun candidat qui

    nhsite pas dire quil a saucissonn la nouvelle tudie avec ses lves. Enfin, sans

    tablir la liste des nombreuses coquilles releves, et qui semblent dans certains cas tmoigner

    de lacunes dommageables au niveau des rgles daccord ou en matire de conjugaison, on se

    permettra de rappeler aux candidats quune phrase contenant une proposition subordonne

    interrogative indirecte ne se construit pas de la mme manire quune phrase interrogative, et

    que la question Comment lauteur fait-il comprendre son point de vue au lecteur ? devient

    dans une tournure assertive : Nous nous demanderons comment lauteur fait comprendre

    son point de vue au lecteur. .

    1.4. Ne pas occulter limprvu

    De nombreux candidats semblent croire quils gagnent en crdibilit en ne mentionnant

    pas les imprvus qui ne manquent pas de rythmer le quotidien des professeurs. Or enseigner,

    cest devoir faire face des imprvus, ne serait-ce que parce que des ajustements sont

    ncessaires par rapport ce qui a t pens en amont. Cest pourquoi les prsentations qui

    listent des sances une par une sont trs rarement les plus efficaces. Les dossiers gagneraient

    questionner les carts, modulations, et autres surprises qui accompagnent toute ralisation

    pdagogique. Pour illustrer brivement ceci, nous aimerions citer, propos dune sance en

    histoire des arts, une remarque dune candidate qui a laiss le jury perplexe : je navais pas

    anticip les questions incongrues sur la nudit ou sur les tableaux abstraits . Outre que

    ltonnement des lves pouvait tre prvisible, on est drang ici de ce quune question

    lgitime puisse tre perue comme incongrue.

    linverse, une phrase du type jai alors dcid de pallier la difficult en bouleversant ma

    progression est de bon augure, de mme que semble pertinente la dcision suivante cet

    crit a t not alors que ce ntait pas prvu car il a t trs bien russi par les lves. , ou

    encore ce constat bien explicit par ailleurs : ltude de la langue la plus difiante a t sans

    doute celle qui reposait sur les connecteurs. Paradoxalement, cest une sance qui ntait pas

  • 20 prvue en tant que telle quand jai prpar la squence, mais le travail sur les connecteurs

    sest avr un outil indispensable pour comprendre la nouvelle "Un mariage damour" .

    Notons enfin que les alas des remplacements imposent parfois de tenir compte des choix dj

    engags par le professeur dont on reprend la classe. Or certains candidats parviennent

    tourner cette contrainte leur avantage en montrant comment ils trouvent leur place dans une

    ralisation pdagogique amorce par quelquun dautre. Nous citerons assez longuement une

    candidate qui, aprs avoir dcouvert en dbut de remplacement des lves trs rticents et

    hostiles aux savoirs enseigns, a su rorienter une squence sur la posie engage pour mieux

    impliquer ses lves rfractaires : Llaboration de cette squence repose sur une volont de

    trouver un questionnement qui fasse effectivement sens pour ces lves []aborder

    frontalement et au moyen des seuls savoirs universitaires la notion dengagement en posie ne

    semble pas cohrent dun point de vue pdagogique. [] Les textes sont donc choisis afin

    que soient progressivement dvoils les enjeux de la posie engage, et afin quils puissent

    rgulirement clairer la problmatique initiale suivante : dans quelle mesure lcriture

    potique peut-elle tre une forme dexpression efficace de la colre ?

    II. LES CHOIX LIS CE QUE LON VEUT TRANSMETTRE AUX LVES

    2.1. Matriser les savoirs savants

    Il est vident que les connaissances littraires et linguistiques dun professeur de

    franais doivent tre assures. Cependant, que les candidats nayant pas une solide formation

    initiale en littrature se rassurent : choisir lenseignement, cest aussi savoir que lon na

    jamais totalement explor la discipline que lon a lue, et la manire dont les savoirs savants

    sont abords dans les dossiers est souvent une indication prcieuse sur les rapports

    questionnant et curieux que leur auteur entretient avec lhistoire littraire, les textes, les outils

    danalyse, les savoirs grammaticaux. Certains candidats parviennent montrer comment des

    lectures scientifiques ont nourri leur rflexion, et lon sest flicit, par exemple, de voir que,

    sur le registre fantastique, tel candidat ne sest pas content des analyses bien connues de

    Todorov, avec notamment des rfrences matrises et utiles louvrage de Pierres-Georges

    Castex Le conte fantastique en France, de Nodier Maupassant, paru aux ditions Corti.

    Nous mentionnerons galement le dossier dune candidate qui, prsentant une squence en 6e

  • 21 sur le conte merveilleux, a su sappuyer sur une bibliographie savante trs riche dont elle sest

    servie avec beaucoup de pertinence. L encore, tout est dans les choix et la manire, car

    transposer des savoirs savants pour en faire bnficier les lves et accrotre leurs

    comptences de lecture et dcriture suppose de trier, hirarchiser les informations, et les

    adapter sans en modifier lessence.

    En matire dhistoire littraire, certains candidats gagneraient relire les manifestes ou crits

    thoriques posant les bases de telle cole, de tel mouvement, puis de simprgner des uvres

    qui en dcoulent. On viterait de fcheuses remarques, telle cette candidate qui considre que

    les personnages fictifs des romans ralistes constituent une limite au ralisme. Concernant les

    outils narratologiques, les lments de rhtorique, le vocabulaire de lanalyse dun texte

    argumentatif ou thtral, certains candidats semblent manquer de recul : les notions de point

    de vue ou de focalisation ne semblent pas toujours trs claires, de mme que les ralits

    linguistiques auxquelles renvoient certaines figures de style. Il pourrait tre judicieux que les

    candidats lisent ou relisent la partie Discours du rcit de Grard Genette dans son essai

    Figures III, de mme que certains ouvrages de la collection 128 chez Nathan Universit

    pourraient les aider affermir leurs connaissances scientifiques. Quelle que soit leur

    formation initiale, les enseignants se doivent davoir un esprit rigoureux et clair, et on ne

    comprend pas que certains candidats utilisent le terme monologue pour faire rfrence

    une tirade, ou emploient indiffremment les mots genres ou thme , avec des

    formulations du type : ma squence a port sur le thme de la posie .

    Aprs ces quelques constats, il nous semble indispensable de rappeler le bon usage de ces

    savoirs savants, qui sont au service des textes quils doivent permettre dclairer, denvisager

    dans toute leur richesse et leur profondeur. Ils doivent ainsi rester des instruments permettant

    de saisir la singularit des textes, leur polysmie constitutive, pour que se joue ce dialogue

    entre des consciences et des sensibilits qui est lun des grands enjeux de la littrature. En ce

    sens on ne saurait trop recommander aux candidats de frquenter le plus souvent possible les

    auteurs travers leurs uvres intgrales. Mme lorsque lon travaille sur des groupements de

    texte, la construction dune lecture analytique est souvent bien plus riche lorsque lenseignant

    connat luvre complte.

    2.2. Sintresser la spcificit des textes

    Les textes sont au cur du cours de franais. Aussi leur choix est-il primordial, et il

    convient den rendre compte au sein du dossier RAEP. Avancer que lon a choisi tel conte

  • 22 pour faire travailler ses lves sur le schma narratif notion qui rappelons-le nest plus

    inscrite dans les programmes en vigueur ne justifie en aucun cas le choix de ce conte prcis

    plutt quun autre. En outre, comment le professeur fera-t-il ensuite sentir ses lves que

    personne, pas mme leur professeur, ne lit un conte pour reprer llment perturbateur, mais

    parce que les contes parlent notre sensibilit et notre raison ?

    Le rle de lenseignant est de tmoigner de la singularit de chaque texte, ce qui suppose une

    stratgie particulire fonde la fois sur la spcificit de ce texte, et le profil des lves de la

    classe. Ajoutons que trop de justifications sur le choix des textes proposs en lecture

    analytique portent sur le niveau des lves, comme sil y avait un corpus duvres rserv

    une lite, et un autre pour les lves dits en difficult . On apprcie au contraire la

    remarque de cette candidate : au dbut jadaptais le texte en fonction du niveau des lves,

    maintenant, jaborde plus facilement des extraits duvres dont le sens est moins explicite,

    car llve, lorsquil parvient la comprhension dun texte difficile, ressent du plaisir et une

    satisfaction.

    Choisir, cest renoncer, aussi est-il intressant, lorsque le dossier repose sur la prsentation

    dune squence, de mentionner les textes retenus dans un premier temps de rflexion sur la

    squence, puis de montrer en quoi ils ont t carts. Lamour dun texte est videmment trs

    important lorsque lon veut le faire aimer de ses lves, mais il est bon que les choix soient

    rendus rationnels, comme dans le glissement qu'opre cette candidate entre ses gots et les

    chos quelle souhaite susciter entre les textes dune mme squence, voire entre diffrentes

    uvres travailles dans lanne : En texte complmentaire, jai choisi de travailler le conte

    La Boule de cristal des frres Grimm. Jaime ce conte qui nest pas au programme mais

    qui, comme le conte La Biche au bois de Madame dAulnoy, aborde le thme de la

    mtamorphose. Thme qui sera abord en cours danne avec les Mtamorphoses dOvide.

    Enfin, le jury est las des squences qui proposent des listes de textes sans lien plus prcis

    entre eux que lentre du programme. Il apprcie les entres qui soulignent la cohrence du

    corpus, par exemple une rflexion sur le mariage pour une squence en 4e sur le ralisme, un

    travail sur la figure du pre dans le cadre des rcits denfance et dadolescence en troisime,

    ou encore une approche du fantastique partir de la figure de la bte. De mme, dans le cadre

    de ltude dune uvre intgrale, le choix des extraits ne simpose pas, il dpend de la

    problmatique adopte.

  • 23 Le travail sur la problmatique est un autre point essentiel de la rflexion pdagogique, et elle

    doit tre bien dfinie pour que lon puisse saisir la manire dont un professeur oriente la

    lecture des textes quil a choisis pour ses lves. Le rapport de Christine Deronne (session

    2013) rappelait quune problmatique est une manire dinterpeller les lves, une question

    quon leur pose pour quils sachent mettre en tension les textes, entendre des chos,

    interprter des carts. Cest pourquoi la problmatisation ne va pas de soi, et il convient

    dexpliquer ce qui a men telle ou telle formulation. Le titre de squence na pas la mme

    fonction, et constitue avant tout un repre pour llve. Bien souvent la simplicit est

    privilgie, ce qui est plus efficace que des jeux de mots douteux, mais le jury a galement

    relev quelques trouvailles avec des formulations la fois rigoureuses et attractives.

    La grande majorit des dossiers proposs par des enseignants en exercice dans le secondaire

    rend compte de sances de lecture analytique. Cette restitution est un exercice difficile car il

    sagit de montrer au jury comment les lves se sont empars du texte tudi pour quil leur

    parle. Recourir un argument dautorit comme le fait cette candidate ne suffit videmment

    pas : Yves Pinguilly a dit quil avait t tonn de la varit, de la pertinence des questions

    sur son roman. Il a senti que les lves se ltaient appropri . On ne doute pas de la vracit

    de cette remarque, mais malheureusement le travail de la classe tel quil avait t prsent na

    pas permis au jury de sen faire une vritable ide.

    Par ailleurs, le jury est trs sceptique lorsque les lectures analytiques semblent suivre un

    schma immuable : prsentation biographique de lauteur, lecture du texte, questionnaire puis

    rponses. On apprcie davantage la souplesse, par exemple dans le choix du lanceur , qui,

    pour permettre aux lves de vritablement rencontrer le texte qui leur est soumis,

    sappuie sur la spcificit du texte, de la classe et du moment, afin que la lecture analytique

    soit un vnement dont llve saura se souvenir. On invite galement les candidats tre

    attentifs aux fausses bonnes solutions, qui font prconiser par lun deux, partir dune

    remarque pertinente selon laquelle les lves prouvent des difficults lire un texte loral

    quils ne connaissent pas : la prochaine fois je donnerai lire les extraits en prambule des

    sances . On doute quen dcouvrant seuls la maison un texte difficile, les lves soient

    mieux mme de le lire voix haute une fois arrivs en classe.

  • 24

    2.3. Manifester la prise en compte des lves et de leur htrognit

    Lexprience du jury dans la lecture des dossiers RAEP montre que cest lorsquil sent la

    prsence des lves dans la classe quil peut se faire une ide suffisamment prcise de la

    manire dont une activit a t mene. Certains candidats oprent des analyses remarquables,

    et savent utiliser bon escient quelques paroles dlves pour montrer comment le cours a

    progress, telle cette phrase par laquelle une candidate fait la jonction entre deux sances de

    lecture analytique : un lve attentif ma fait remarquer que cette fois-ci Maupassant utilisait

    beaucoup dadjectifs, linverse du prcdent extrait . Cependant, rendre prsents ses lves

    dans le dossier, donner entendre les interactions entre le professeur et ses lves, ce nest

    pas les citer tort et travers. Ainsi on se demande en quoi la phrase suivante apporte

    quelque chose au dossier : Mdame vous dites des trucs chelous aujourdhui (sic). De

    mme, il ne suffit pas daffirmer ce quil aurait fallu montrer, comme on a pu le lire dans un

    dossier portant sur la lecture intgrale des Misrables : Les lves sont arrivs la

    conclusion que les personnages sont empreints de la subjectivit de lauteur . Un tel propos

    ne prend sens que si sont donns voir les moments qui ont permis aux lves de tirer cette

    conclusion de leur lecture. Ainsi, les dossiers qui sappuient sur des gnralits ne permettent

    pas au jury de se faire une ide des aptitudes de lenseignant.

    Bien souvent, mentionner les erreurs des lves permet au jury de saisir les enjeux d'une

    situation d'enseignement. Ainsi, une candidate voque les difficults rencontres par ses

    lves pour se reprer au sein de la phrase complexe, puis explique les mtaphores quelle

    utilise pour faire comprendre aux lves le rapport de la proposition subordonne la

    proposition principale. Cette explication convaincante est plus utile au jury qui cherche

    valuer des comptences pdagogiques quune mention du type les lves ont bien russi le

    devoir, seuls trois nont pas eu la moyenne .

    Un bon pdagogue doit bien entendu prendre en compte les spcificits de ses classes. Or le

    jury regrette que cette prise en compte semble aboutir un tiquetage des lves, donnant

    limpression que les choses sont figes et que les lves concerns sont condamns une fois

    pour toutes avoir des difficults. Ainsi, en guise de pdagogie diffrencie, et avec

    lintention louable doffrir les mmes chances de russite chacun , on en arrive des

    solutions systmatiques du type : je donne toujours mes lves dys des textes trous

    afin de leur faciliter la tche .

  • 25 Le jury a au contraire t convaincu par de belles ides, tel ce candidat qui propose des jokers

    ses lves, sous forme dindices et dides supplmentaires, pour les rengager dans une

    criture dinvention quils peinent dployer.

    Notons enfin que toutes les consignes donnes aux lves, quel que soit le travail demand,

    doivent tre clairement exposes, avec une analyse des choix qui ont men telle ou telle

    formulation.

    III. Tmoigner dun esprit de rigueur et douverture

    3. 1. Donner de la cohrence aux ralisations pdagogiques menes

    Les lves sont sensibles la cohrence de ce que lon entreprend avec eux, et un

    dossier RAEP bien men doit pouvoir en tmoigner. Un candidat fait le bon constat : jai

    remarqu que les lves ont parfois des difficults percevoir le lien entre les diffrentes

    sances et lordre de leur tude . Cependant la suite est dcevante : jattends par

    consquent des lves quils ne perdent pas de vue les notions de la sance 1 car ils vont

    devoir les conjuguer celles de la sance 2 . Les meilleurs dossiers rendent au contraire

    compte de la manire dont les lves sapproprient un savoir ou un savoir-faire, en

    tmoignant de moments de retour ou d'activits de bilan sur des notions vues antrieurement.

    Dans le mme ordre dides, il parat difficile de prsenter un atelier dcriture qui ne soit pas

    fond sur des lectures et un travail littraire sur des textes. Le jury a t sensible la manire

    dont une candidate a su rellement rendre compte de l importance de la lecture dans le

    processus de cration et dexpression crite , travers un travail sur deux nouvelles de

    Maupassant, Le Modle et Une Vendetta , la seconde ayant t distribue sans son

    incipit, que les lves ont t invits crire en fonction de la suite du rcit, mais aussi du

    travail de lecture analytique propos pour lincipit de la premire nouvelle.

    Au-del des annonces selon lesquelles la classe a progress en liant plaisirs et savoirs , ou

    qu il est important avant tout de montrer que lon prend plaisir tudier et lire les textes

    choisis , le jury a plusieurs fois eu la satisfaction de sentir une relle mise en apptit des

    lves, et ce avec ce quils sont, leurs ventuelles rserves et rticences.

  • 26

    3.2. Ouvrir les lves lpaisseur du monde

    Il est mille et une faons dintresser les lves au monde qui les entoure, de leur faire

    prendre conscience que les textes dhier parlent aux hommes daujourdhui, quune vie,

    ncessairement situe dans lespace et dans le temps, et avec dautres dterminations

    historiques et sociales que les ntres, peut nanmoins ne pas nous rester trangre, tant il est

    vrai, comme le dit Montaigne, que chaque homme porte la forme entire de lhumaine

    condition . Il convient donc de dpasser le propos a priori pertinent dun lve sur Les

    Bonnes de Genet, rapport par une candidate : on ne peut pas en vouloir Madame de ne

    pas comprendre ses bonnes car on ne comprend pas ce quon na jamais vcu . Car la

    littrature nous permet justement de nous projeter dans dautres univers et de vivre dautres

    expriences que les ntres. Pourtant, cette aptitude nimplique nullement une confusion des

    valeurs. Cest pourquoi on mettra en garde un candidat qui, dans une squence sur les

    Lumires, a cru bon dorganiser un dbat sur le racisme dont on na pas compris quel tait

    lobjet et dont on ose esprer quil na pas conduit certains lves dvelopper des arguments

    en faveur du racisme. Une simple opinion na pas de lien ncessaire avec la vrit et ne mrite

    pas forcment dtre dfendue.

    Souvrir au monde, cest aussi ne pas tre ignorant de ce qui est proche, et certains

    candidats montrent bien comment ils tiennent compte des particularits de leur rgion, dun

    vnement ou dune commmoration clbre dans la ville o ils enseignent, pour proposer

    des activits qui enrichissent le regard des lves sur une ralit quils navaient jamais

    aborde dun point de vue rflexif.

    Certains candidats parviennent enfin rellement articuler le cours de franais avec les

    enjeux fondamentaux de toute ducation et de tout enseignement. Le jury a t enthousiaste

    la lecture de propos sur la formation dune culture humaniste qui taient parfaitement articuls

    la squence prsente. Mentionnons galement une problmatique de squence trs

    ambitieuse dont le dveloppement na pas du le jury et qui visait montrer comment la

    lecture des contes en 6e fait mditer les lves sur la condition humaine.

    3.3. Le rle des annexes

    Dans la prsentation de lpreuve pour la session 2016, il est indiqu que les candidats

    peuvent joindre, sur support papier, un deux exemples de documents ou travaux, raliss

    dans le cadre de l'activit dcrite, et qu'ils jugent utile de porter la connaissance du jury. .

  • 27 On voit que le nombre des annexes doit ainsi rester limit, et quun choix rflchi est essentiel

    la cohsion du dossier.

    Comme cela a t prcis dans les autres rapports, il convient de rappeler aux candidats que la

    photocopie dun texte connu ou dune page de manuel na pas dintrt. Un document

    construit par lenseignant, la production dun lve, peuvent au contraire clairer la cohrence

    du travail propos et tmoigner de la manire dont les lves ont progress, se sont appropri

    une notion, ont t ports vers lautonomie, etc.

    Par ailleurs, les pages dannexe ne viennent pas illustrer ce qui prcde, elles doivent tre

    exploites au sein du dossier lui-mme, cest--dire explicites et analyses, la simple

    mention de lannexe entre parenthses ne suffisant videmment pas montrer en quoi elle

    claire le propos. Plutt que des copies entires, le jury apprcie quand on lui propose en

    annexe des documents qui confrontent diffrentes tapes dun travail par un mme lve, ou

    qui comparent diffrentes ralisations Sur des copies annotes, on sattend voir des

    corrections significatives, voire un commentaire sur les corrections. Le contenu du dossier

    appelle parfois de lui-mme un certain type dannexes, par exemple une rflexion sur

    quelques crits ou fragments dcrits dlves lorsque la ralisation pdagogique met laccent

    sur un travail dcriture, ou encore des transcriptions de temps forts dune sance de cours

    ayant fait lobjet dune analyse particulire, des exemples de prise de notes dlves, un

    tableau de synthse sur une notion, une carte mentale ralise par un lve, la photographie de

    pages significatives dun cahier de voyage, un document pdagogique utilis comme support

    une sance dhistoire des arts, etc.

    Pour conclure, on voudrait avoir suffisamment insist sur limportance de la restitution

    des dmarches, des choix oprs tous les moments de la ralisation pdagogique. Sil sagit

    de rendre compte dune exprience, le dossier ne doit pas tre un simple compte-rendu parce

    quau-del du factuel, lapproche doit tre dynamique. De mme quil est souhaitable quun

    professeur ne cesse jamais de se remettre en question, un dossier RAEP qui ne rvle pas les

    interrogations du candidat face aux choix quil est amen raliser ne permet pas de

    reconnatre les acquis de lexprience professionnelle du professeur en question.

  • 28 En toute conscience de la difficult de lexercice demand, nous souhaitons que la lecture de

    ce rapport, la suite de celle des rapports prcdents, permette aux candidats de tmoigner

    plus efficacement de leurs pratiques professionnelles.

  • 29 5. RAPPORT SUR LPREUVE DADMISSION

    EPREUVE DADMISSION

    Rapport prsent par Pascal DUCHNE et Sylvie LELEU

    Ce rapport qui sattache rendre compte des preuves orales de la session 2015 du

    CAPES interne de lettres se veut une analyse constructive des observations faites par les

    membres du jury. Il sinscrit dans la continuit des propos tenus dans le document rdig par

    Catherine Daumas et Fabrice Carnet pour les preuves de 2014. Ceux-ci explicitaient le cadre

    de cette rcente preuve dadmission dont les modalits sont dcrites par larrt du 19 avril

    2013 paru au Journal Officiel du 27 avril 20131.

    Le prsent rapport cherche quant lui complter les informations dlivres lanne

    dernire et, en revenant sur les attentes du jury, affiner les conseils pour prparer au mieux

    ces preuves, dun double point de vue, pratique et mthodologique. Ce rapport est donc

    construit, dans une perspective de formation, comme une srie de rponses commentes aux

    questions que les candidats peuvent se poser :

    En quoi consiste lpreuve orale ?

    Quels sont les sujets proposs ?

    Quels auteurs retrouve-t-on le plus frquemment dans les sujets ?

    Y a-t-il des auteurs inconnus ?

    Quelle place donner aux documents iconographiques ?

    Quelle forme peut prendre le corpus ?

    Quel type de problmatique est attendu pour la squence ?

    Comment faut-il organiser la prsentation de la squence ?

    Faut-il proposer dtoffer le corpus ?

    Faut-il prciser les travaux que les lves auraient faire dans la squence ?

    1 http://www.education.gouv.fr/cid51250/descriptif-des-epreuves-capes-interne-caer-capes-section-lettres.html

  • 30

    Lexplication de texte doit-elle prendre une forme particulire ?

    Quelle place donner la sance de langue ?

    Quelles questions de langue peuvent tre poses ?

    Sur quoi se construit lentretien ?

    Y a-t-il un temps rserv pour des questions sur le Raep ?

    Comment prparer loral au mieux ?

    Ainsi, dans le bilan de cette session 2015 seront abords dans un premier temps les

    sujets proposs, des auteurs, du corpus et de la forme du dossier. Ensuite, le rapport propose

    une analyse des enjeux de la prsentation de la squence, de llaboration de la

    problmatique, et de lexploitation du corpus. Puis il sefforcera de nourrir la rflexion de

    chaque prparationnaire sur lexplication littraire et la question de la langue : la place et la

    forme quelles peuvent prendre ainsi que les qualits ou les difficults rvles lors de

    lpreuve. Enfin il s'attardera sur lentretien, qui constitue une situation de communication

    spcifique, et conclura plus gnralement sur la ncessaire prparation aux diffrents aspects

    de cet oral. Ce compte rendu a t rdig en prenant appui sur les remarques de lensemble

    des membres du jury dont la prcieuse contribution, nous a permis dillustrer les diffrents

    aspects abords par des exemples concrets : nous les en remercions vivement.

    En quoi consiste lpreuve doral ?

    Les candidats peuvent choisir entre une option Lettres Modernes et une option

    Lettres classiques . Lpreuve orale est dote dun coefficient 2, soit le double de la note

    attribue au dossier RAEP de lcrit. Loral, prcd dun temps de prparation de 2 heures, a

    une dure dune heure vingt, rpartie en deux temps distincts :

    - Les quarante premires minutes correspondent un expos du candidat, au cours

    duquel il est engag dvelopper ses rponses aux consignes du sujet (projet de squence,

    incluant une sance de langue et une explication de texte).

    - Les quarante minutes suivantes sont consacres un entretien dialogu avec le jury,

    portant dabord sur un point de grammaire ou sur une traduction de latin ou de grec selon les

  • 31 options, puis au retour sur les propositions faites dans la premire partie de lpreuve. Ce

    deuxime temps pourra galement comporter des questions portant sur le dossier RAEP. Les

    candidats, pour ce faire, devront en apporter un exemplaire.

    Quels sont les sujets proposs ?

    La formulation de lnonc donn en dbut dpreuve est normalise. Cest pourquoi il

    est important de se familiariser avec sa prsentation, sa formulation, et den tirer parti lors de

    la prparation lpreuve. On y trouve, dans lordre, les lments suivants :

    - La liste des extraits duvres et les documents qui constituent le corpus, comme, par

    exemple :

    1. Gustave FLAUBERT, Madame Bovary, Premire partie, V (1857)

    2. Emile ZOLA, LAssommoir, extrait du chapitre 2 (1877)

    3. Guy de MAUPASSANT, Bel Ami, partie 2, extrait du chapitre 7 (1885)

    4. Emile ZOLA, Plan de la grande maison

    - des indications sur la classe dans laquelle proposer la squence :

    Dans le cadre de lenseignement de franais en classe de seconde.

    - des prcisions sur les objets dtude :

    .et plus particulirement de lobjet dtude le roman et la nouvelle

    au XIXme sicle : ralisme et naturalisme .

    - et enfin les diffrents lments traiter :

    vous analyserez le corpus propos.

    Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun

    projet de squence qui comportera une sance dtude de la langue.

    Vous proposerez lexplication du texte n1 : Gustave FLAUBERT,

    Madame Bovary, 1857

    La connaissance des programmes, de la sixime la premire, constitue la condition sine

    qua non dune apprhension raisonne du sujet. Dans le cas du dernier sujet prsent, ayant

    trait au ralisme et au naturalisme, un enseignant en collge ou en lyce, peut, partir de sa

  • 32 matrise des textes officiels, cerner le sujet pour l'exploiter. L'objectif que le candidat peut se

    fixer est de montrer comment le roman ou la nouvelle s'inscrivent dans le mouvement

    littraire et culturel du ralisme ou du naturalisme, de faire apparatre les caractristiques d'un

    genre narratif et la singularit des uvres tudies, et de donner des repres dans l'histoire de

    ce genre. La frquentation rgulire des programmes permet chacun de cadrer et

    contextualiser la prsentation de squence. Un prparationnaire rigoureux, susceptible

    denseigner tous les niveaux, se doit de connatre lensemble des programmes

    correspondants..

    Voici un second exemple prsent sous sa forme finale.

    1. Manon ROLAND, Mmoires de Madame Roland (1795)

    2. STENDHAL, Vie de Henry Bruslard (dition posthume de 1890)

    3. Victor HUGO, Aux Feuillantines , Les Contemplations (1856)

    4. Jean GIONO, Jean le Bleu (1932)

    5. Jean-Honor FRAGONARD, La Liseuse (1772) Huile sur toile, 81,1 x 64,8,

    National Gallery of Art, Washington

    Dans le cadre de lenseignement du franais en classe de 3me et plus

    particulirement de ltude des rcits denfance et dadolescence , vous analyserez le

    corpus propos. Vous prciserez les modalits de son exploitation sous la forme dun

    projet de squence qui comportera une sance dtude de la langue. Vous proposerez

    lexplication du texte n4.

    Ds la premire lecture, il est primordial d'tre attentif aux diffrents lments du sujet

    pour les mettre en relation efficacement, et construire ainsi le cadre de son expos. La lecture

    du paratexte ne doit pas non plus tre nglige pour saisir les enjeux de la squence.

    Il est judicieux dans le travail prparatoire de prvoir un temps pour chaque tape

    donne dans lnonc et de saccorder des repres temporels pour organiser la prestation

    orale. La prparation dune squence en temps rduit nest pas chose aise : un entranement

    rgulier la gestion de ce temps de prparation est ncessaire. Bien quil ny ait aucune

    indication ni aucune exigence dordre dans la conduite de lexpos lors de lpreuve orale,

    chaque candidat doit tre conscient quil est judicieux de rpartir le temps de prparation entre

    les diffrentes parties prsenter. De mme, un entranement pendant lanne la prise de

    notes, lutilisation ordonne des feuillets de brouillon permet de rendre plus sereine la prise

  • 33 de parole. Faute de quoi, le jury a pu constater les consquences dun manque dorganisation :

    un candidat lit intgralement des phrases, pralablement crites. Un second se perd dans ses

    notes, ou cherche nerveusement une conclusion introuvable ; un autre ne garde quune dizaine

    de minutes pour faire lexplication de texte en ayant pralablement consacr beaucoup de

    temps des remarques disperses sur les autres textes.

    Il est possible par ailleurs de consulter un dictionnaire pendant le temps de prparation :

    la candidate qui a parl de quatre romans africains en ce qui concerne Une enfance crole,

    de P. Chamoiseau, LAfricain de J-M G. Le Clezio, La rue Cases-Ngres de J. Zobel,

    Lenfant de sable, de T B Jelloun, aurait pu au moins spargner cette erreur en vrifiant le

    sens de ladjectif crole dans le dictionnaire, comme elle aurait pu, ainsi que dautres

    candidats, sappuyer galement sur les indications du dictionnaire pour rflchir sur lemploi

    que fait Chamoiseau du terme ngre et le commenter bon escient. Le dictionnaire est

    donc une aide prcieuse, quil ne faut pas cependant transformer en pige. Il ne sagit pas de

    consacrer inutilement du temps un exercice de copie. Plusieurs candidats ont ainsi utilis

    mot pour mot le mme extrait de biographie de Maupassant, pour raliser leur introduction,

    sans se lapproprier.

    Quels auteurs retrouve-t-on dans les sujets ?

    Les sujets proposs abordent tous les sicles et tous les genres littraires cits dans les

    programmes officiels du collge et du lyce. On y trouve ainsi frquemment les auteurs les

    plus tudis dans chaque classe :

    - XVIe : Montaigne, Ronsard.

    - XVIIe : Pascal, Racine.

    - XVIIIe : Beaumarchais, Rousseau, Voltaire.

    - XIXe : Baudelaire, Feydeau, Flaubert, Hugo, Maupassant, Stendhal, Verlaine,

    Zola.

    - XXe : Anouilh, Apollinaire, Camus, Cline, Giono, Ionesco, Prec.

    Les programmes du collge et du lyce tablissent une liste des ouvrages et des auteurs qui

    doivent tre abords pour chaque niveau. Il est indispensable de sy rfrer. Il nest donc pas

    inutile, pour prparer le concours, certes de se servir des manuels explorant les diffrents

  • 34 objets dtude, mais aussi, et surtout, des ouvrages dhistoire littraire2, voire des revues

    dactualit littraire. Il convient surtout de relire (ou de lire) les romans, pices de thtre et

    posies qui fondent le socle d'une culture littraire. La prparation ne peut donc stablir en

    quelques semaines, une fois reue la bonne nouvelle de ladmissibilit. Il sagit bien de se

    constituer une culture personnelle vivante des uvres, en complment dune approche plus

    scientifique de la littrature.

    Outre les uvres, les notions de genre, de mouvement littraire et de registre sont

    autant de repres efficaces permettant de susciter la rflexion et de produire des hypothses

    fiables : Orient par le contrat de lecture, le lecteur [] construit sa rception en sappuyant

    sur les lieux de certitude fournis par le texte. Ces points dancrage balisent la lecture et

    lempchent de se perdre dans nimporte quelle direction3.

    Ainsi, lunit gnrique du corpus autour de MOLIERE, Tartuffe ou lImposteur, de

    BEAUMARCHAIS, Le Mariage de Figaro, de FEYDEAU, La Dame de chez Maxims,

    conduit une analyse des variations du motif thtral du tmoin cach et une tude de la

    mise en abyme et du systme dnonciation mis en uvre.

    La connaissance des mouvements littraires permet danticiper des enjeux importants,

    comme diffrencier ralisme et naturalisme et ne pas confondre Maupassant et Zola, linstar

    de cette candidate qui pense Maupassant naturaliste. La Prface de Pierre et Jean aurait pu

    utilement la guider : Le raliste, s'il est un artiste, cherchera, non pas nous montrer la

    photographie banale de la vie, mais nous en donner la vision plus complte, plus saisissante,

    plus probante que la ralit mme. Raconter tout serait impossible, car il faudrait alors un

    volume au moins par journe, pour numrer les multitudes d'incidents insignifiants qui

    emplissent notre existence. Un choix s'impose donc, ce qui est une premire atteinte la

    thorie de toute la vrit. Lcriture raliste et lcriture naturalise procdent donc de

    diffrences remarquables, dans leur rapport la ralit. Une connaissance ferme simpose ds

    lors sur l'ensemble des mouvements littraires et leurs ralisations dans les diffrents genres.

    La notion de registre mrite elle aussi dtre bien cerne pour conduire une analyse

    assure, recommandation importante, dj explicite la page 24 du rapport de 2014. Ainsi,

    2 La littrature franaise (t.1 et 2) sous la direction de J.-Y Tadi, Folio Essais n476 Editions Gallimard, 2007 Dominique Viart et Bruno Vercier, La littrature franaise au prsent, Hritage, modernit, mutations, Bordas, Paris, 2005 3 Vincent Jouve, La lecture, Collection Concours littraire, Hachette Suprieur, 1993, pages 50 -51

  • 35 M. Navaez4 dfinit le registre littraire comme le "code" selon lequel iI faut dchiffrer

    l'uvre, et sa tonalit principale, cest--dire sa dominante affective, lie une attitude

    fondamentale face lexprience : il traduit la vision que l'auteur a du monde (pessimiste,

    nostalgique, enthousiaste...), i1 indique l'motion qu'il cherche susciter chez le lecteur : rire

    ou sourire, exaltation, indignation, tristesse, piti, peur... [...] Le registre littraire est la

    caractrisation dominante du style d'une uvre [...]. Le registre nous rvle donc l'motion, la

    subjectivit de l'auteur, mais il indique galement l'effet que celui-ci souhaite produire sur le

    lecteur.

    A ces ressources, il est judicieux dadjoindre la connaissance des formes fixes,

    notamment potiques. On pourra ainsi questionner les sonnets assembls en groupement en se

    penchant sur la tradition qui associe volontiers cette forme lexpression lyrique de lamour

    pour mieux en interroger les spcificits. Par exemple une candidate peroit correctement la

    cohrence textuelle autour du thme de la femme reprsente dans des sonnets divers5 et

    interroge le texte : En quoi la femme est-elle une source dinspiration pour le pote ? sans

    identifier le fait que parfois la femme est dsigne comme absente et que mme absente, elle

    inspire : pourquoi, comment ? Comment le pote comble-t-il cette absence ? la compense-t-

    il ? lcrit-il ? Et pourquoi dans un sonnet, forme traditionnelle rserve lexpression lyrique

    de lamour ? On voit bien que ces questions prparent autant dhypothses qui viendront

    nourrir la problmatique

    4 Dans la dcouverte des genres littraires, Ellipses. Un des rles spcifiques de la littrature et des arts est d'exprimer et de fixer des motions et des mouvements de sensibilit qui ne s'expriment pas dans les langages scientifiques ou utilitaires et qui, par les langages artistiques et par l'art du langage, peuvent tre changs mme grande distance dans le temps et dans l'espace. [...] Les registres sont la manifestation par le langage de ces grandes catgories d'motions et de mouvements de sensibilit. La joie, l'angoisse, la colre, l'indignation, l'admiration, la plainte, la compassion, la mfiance, le doute trouvent l leur lieu, travers des formes d'expression multiples.

    5 Pierre de RONSARD, Sur la mort de Marie , Second livre des Amours (1578) ; Charles BAUDELAIRE, une passante , Les Fleurs du Mal (1861) ; Paul VERLAINE, Mon rve familier , Pomes saturniens (1866) ; Yves BONNEFOY, Le bel t , Hier rgnant dsert (1958)

  • 36

    Tous les corpus se fondent-ils sur des auteurs canoniques ?

    La plupart des auteurs sont des rfrences absolument incontournables pour des

    enseignants de franais. Certains, sils sont moins unanimement connus, comme E. Robls, ou

    Y. Bonnefoy (dailleurs au programme des Terminales littraire il y a quelques annes, et de

    lagrgation cette anne) chappent difficilement une culture gnrale solide. De plus,

    lintrt que les enseignants doivent porter la littrature d'aujourd'hui devrait leur permettre

    de ne pas tre dsaronns par des auteurs plus contemporains comme J.-P. Simon. Au

    demeurant, mme un auteur inconnu du candidat sinscrit dans un corpus qui permet des

    hypothses de lecture judicieuses. Les sujets proposs ne sont jamais conus comme des

    piges. Il sagit moins davoir des connaissances trs approfondies sur chaque extrait que de

    mettre en uvre des dmarches qui permettent daborder un texte sans contresens. Il faut donc

    allier culture et mthodologie pour explorer un texte que lon na jamais lu. Le candidat devra

    alors se placer dans la position de llve dcouvrant une uvre et montrer quels outils sont

    efficaces pour laborder, sans toutefois se cantonner de timides propositions.

    Il sagit souvent moins de connatre la totalit des uvres dun corpus que de les relier

    des objets dtude ou des enjeux littraires, comme par exemple ceux de la littrature

    francophone. partir dun corpus qui associait des textes de P. Chamoiseau (Une enfance

    crole), J. Zobel (Rue Cases-Ngres), de T. B. Jelloun (LEnfant de sable) et de J.M-G. Le

    Clzio (LAfricain) autour des rcits denfance et dadolescence , le jury a pu stonner la

    fois de la mconnaissance de Le Clzio, pourtant rcent prix Nobel de littrature, de celle de

    la littrature antillaise, et de labsence de prise en compte des contextes dcriture de ces

    textes : certains candidats nont pas cern les enjeux spcifiques que la langue et la culture

    mtropolitaines ont pu susciter chez les auteurs francophones doutre-mer ou de ltranger.

    Cela a souvent conduit des faux-sens et des analyses peu fiables alors mme que les textes

    se faisaient lcho explicite des difficults de la construction dun je dans ces

    circonstances particulires.

    Chaque corpus propos suppose au moins la connaissance des oeuvres au programme,

    mais invite s'appuyer sur une culture littraire plus large. Cela constitue un axe de

    prparation essentiel des preuves. Le CAPES interne est un concours qui sadresse des

    candidats ayant une exprience de lenseignement, mais dont la culture ne se limite pas ce

    quils ont ralis en classe, et l'preuve doral vise justement valuer ces comptences de

    culture littraire et d'aptitude se confronter des texte.

  • 37

    Quelle forme peut prendre le corpus ?

    Majoritairement, les corpus sont constitus de trois ou quatre textes, et parfois dun

    document iconographique, en gnral une reproduction duvre picturale. Les textes sont

    dune longueur variable, mais ceux qui sont soumis lexplication de texte sont calibrs pour

    que leur lecture voix haute ne dpasse pas trois minutes.

    Les candidats ne doivent cependant pas smouvoir de corpus composs de deux textes,

    voire dun seul dans le cas dune nouvelle donne en intgralit ou en trs grands extraits. De

    mme, ils ne doivent pas stonner de la nature varie des documents iconographiques (carte

    postale, photographie, plan) ou mme leur absence. Ce qui importe, cest dtre attentif la

    logique gnrale du corpus. Celui-ci est conu comme un tout cohrent ; il est donc attendu

    que tous les lments soient exploits. La squence qui sera labore doit faire une place

    tous les textes et documents, le candidat ayant soin de justifier cette place dans sa proposition

    didactique.

    Les documents iconographiques : quelle place ? Quel(s) rle(s) ?

    Comme nous lavons prcis, les corpus peuvent comporter des documents

    iconographiques de nature varie. Leur prsence revt chaque fois une porte particulire

    quil convient de cerner, en ayant toutefois clairement en tte quils sinscrivent dans

    lconomie gnrale du dossier. Une image trouvera son sens dans son lien aux autres

    documents, et ne saurait tre considre comme une simple illustration ou un lment

    accessoire.

    Dans un corpus consacr au rcit du XIXe pour une classe de 4me, une carte postale

    reprsentant une rempailleuse de chaises mrite dtre analyse selon les critres

    sociologiques et esthtiques propres ce support, sans perdre de vue que cette spcificit

    permettra de mieux discerner les autres rponses que les artistes donnent leur recherche de

    ralisme. Cette confrontation alimentera la squence tout entire. Ainsi la valeur de

  • 38 tmoignage et la recherche dune authenticit donne voir par la photographie

    compltent la rflexion sur le ralisme mise en uvre par Flaubert et Maupassant dans Un

    cur simple ou La rempailleuse . La reprsentation du peuple et des petites gens sur

    cette carte postale, de leurs mtiers et de leurs outils, rpond des exigences de vracit mais

    les fige aussi dans les conventions du pittoresque quil convient de dcrypter. Dans ce cas

    prcis, ouvrir la squence sur la comparaison entre les deux portraits de rempailleuses, lun

    photographique et lautre littraire, lun statique, lautre en mouvement, pouvait permettre

    dentrer dans une problmatique riche, nourrie du regard attentif port sur chaque document.

    Le traitement du document iconographique exige la matrise de connaissances

    spcifiques : le vocabulaire ncessaire ltude des images construit un discours clair et

    fiable. Le tableau intitul Auto-da-fe (1853) de Eugenio Lucas Velsquez, dans un corpus

    labor pour une classe de premire et relevant de La question de lhomme dans les genres

    de largumentation du XVIe sicle nos jours , mritait une analyse pousse de sa

    composition, des choix chromatiques, des lments reprsents, de lutilisation de la lumire.

    Toutes les remarques pouvaient ensuite tre mises au service de la dnonciation de la torture

    qui constitue le fil directeur de la squence. Dans ce cas prcis, il fallait galement tre

    attentif au paratexte et faire preuve dune culture historique et artistique pour ne pas

    confondre le peintre du XIXe sicle avec son clbre homonyme, Diego, ayant uvr au

    sicle prcdent, ce qui changeait bien sr la porte du tableau. Rappelons que pendant la

    prparation, des dictionnaires sont consultables en cas de doute.

    Les documents officiels, l-encore, donnent les pistes essentielles de rflexion. Les

    programmes du lyce soulignent quil faut mettre en relation avec l'histoire des arts, un

    choix de textes et de documents montrant comment l'esthtique raliste concerne plusieurs

    formes d'expression artistique et traverse tout le XIXe sicle. On peut rflchir en amont la

    faon dont les arts visuels, notamment, ont introduit la ralit quotidienne, qu'elle soit

    naturelle ou sociale, dans le champ de l'art et dtermin des choix esthtiques qui entrent en

    rsonance avec l'volution du genre romanesque, depuis le XVIIe jusqu'au XXe sicle.

    L'influence de la photographie sur les romanciers du XIXe sicle peut galement faire l'objet

    d'un travail avec les lves. Les documents officiels concernant l'enseignement de histoire

    des arts6, de mme que le socle commun de connaissances et de comptences peuvent nourrir

    les propositions dobjectifs : tre capable de lire et dutiliser diffrents langages, en

    6 Encart Bulletin officiel n 32 du 28 aot 2008, Organisation de l'enseignement de l'histoire des arts l'cole primaire, au collge et au lyce

  • 39 particulier les images ( reprsentations d'uvres d'art, photographies) et de situer dans le

    temps les vnements, les uvres littraires ou artistiques, d'avoir une approche sensible de la

    ralit .

    Quel type de problmatique le jury attend-il pour la squence ? Comment

    trouver une problmatique satisfaisante ?

    Le jury se flicite du fait que la grande majorit des candidats propose une entre

    problmatise dans le corpus. C'est en effet un prlable absolu une construction didactique

    solide, pour peu que la question qui structure le travail soit bien dfinie. Il est assez logique

    que les problmatiques aient un lien avec les programmes et le niveau de la classe en jeu. Par

    exemple, pour un groupement incluant des pomes de Verlaine, Laforgue, Apollinaire,

    Maulpoix et une photographie de Cartier Bresson, portant sur lobjet dtude de premire

    Ecriture potique et qute de sens , le jury a apprci les problmatiques explorant le

    lyrisme Comment dire le monde et se dire soi-mme ? ou lcriture potique Comment

    re-crer le monde par lart ? . Pour dautres corpus, le jury a pu apprcier les problmatiques

    telles que Comment les genres de largumentation directe permettent-ils de faire voluer les

    esprits ? , Comment le thtre du XXe sicle fait-il entendre la voix de la rsistance ? ,

    Comment crer du conflit dans un monologue ? .

    Les candidats, craignant parfois de proposer une problmatique mal oriente, prfrent une

    formulation vague et passe-partout qui risque de ne pas rendre compte de lintrt spcifique

    du groupement. Ainsi la question Comment luvre romanesque rend-elle compte de la

    ralit de son poque ? , applique aux cinq extraits tirs du Bonheur des Dames, passe sous

    silence lenjeu essentiel de ces passages prcis qui, tous, sattachaient au grand magasin en

    tant quentit. Dautres candidats ont-ils pu lgitimement construire une rflexion autour du

    naturalisme ou autour du genre romanesque : Comment Zola fait-il du grand magasin le

    personnage principal de son roman ? ou Comment Zola transforme-t-il le rel travers

    ltude du grand magasin ? .

    Il est intressant de donner voir le cheminement qui permet d'aboutir l'nonc d'une

    problmatique : prendre le temps non seulement dannoncer clairement celle-ci, mais aussi

    den expliciter les mcanismes de construction, est bienvenu. Les candidats sont parfois tents

  • 40 de se dbarrasser de cette tape, alors que le jury attend que cette phase dlicate, sur laquelle

    repose tout le travail ultrieur, soit dtaille avec rigueur et prcision. Par exemple, la

    formulation au sujet des quatre textes de littrature francophone voque plus haut : Dans

    quelle mesure le rcit dadolescence met-il en scne un je en cours de construction ?,

    oubliait la distorsion entre ralit gographique et diktats culturels pourtant fondateurs des

    constructions de personnalits dveloppes dans ces textes.

    Ce fil directeur gagnera ensuite tre mis en vidence durant tout le droulement de la

    squence. Revenir la problmatique gnrale chaque tude de texte ou chaque tape

    importante de la squence est gnralement un gage de rigueur et de russite. Loriginalit et

    lacuit de certaines problmatiques ont permis des candidats de se distinguer et de

    convaincre un jury galement sensible des problmatiques qui souvraient judicieusement

    sur lactualit et permettaient de relier littrature et monde contemporain.

    La formulation de la problmatique est modulable et polymorphe. Elle peut prendre

    une tournure directe ou indirecte, avoir la forme :

    - dune question, voire de plusieurs questions relies entre elles, prsentant des

    concepts associs par juxtaposition ( La passion de lire, une contribution la formation de la

    personnalit ? , ou par relation logique ;

    - dune alternative ( Peut-on dire non au thtre, dsobir pour sengager ou se

    soumettre invitablement ? ) ;

    - dun lien de cause effet ( le rcit denfance engendre-il ou/et rvle-t-il la gense

    dun crivain en construction ? ) ;

    - ou enfin dun rapport dopposition ou didentit entre deux phnomnes.

    Les questions qui napportent quune dfinition, les propositions qui se cantonnent

    une juxtaposition de remarques catalogues arbitrairement, les descriptions paraphrasant un

    texte ou encore lvocation dun thme ne permettent pas de constituer une rflexion

    problmatise.

  • 41

    Comment faut-il organiser la prsentation de la squence ?

    Lexpos de quarante minutes doit comporter la fois le projet de squence,

    lexplication de texte et la sance de langue, mais lordre des points abords est laiss au

    choix de chaque candidat. Il est bienvenu de ne pas oublier de prsenter les diffrents

    documents sur lesquels il tait demand de travailler et de justifier par l sa problmatique. Le

    temps que chaque candidat consacre cette premire tape est trs variable. Certains font

    preuve dun esprit de synthse tout fait louable et permettent ainsi de rentrer dans le vif de la

    squence avec dynamisme.

    Diffrentes modalits dans la suite de lexpos ont pu tre observes et apprcies par le

    jury : des drouls chronologiques de squence au cours desquels les sances de langue et

    lexplication de texte prennent place naturellement dans le cours de la prsentation, ou bien

    des prsentations procdant en plusieurs tapes : par exemple, dabord la squence, ensuite la

    sance de langue et enfin lexplication de texte. Aucune solution nest rejeter a priori. Il faut

    simplement que les candidats aient bien identifi leur dmarche et la prsentent au jury. La

    clart du propos et la capacit faire partager ses choix son auditoire sont des qualits

    importantes dans lenseignement.

    Inversement, il a parfois t dplor que les propos senchanent sans quune trame soit

    explicite, voire mme que certains candidats jouent la montre en juxtaposant des ides

    trop disparates. Lorsque le fil directeur est trop relch, lexpos risque de se perdre dans des

    dveloppements peu judicieux. Lorganisation rythme du temps de parole est une qualit qui,

    pour se manifester le jour de loral, doit tre rgulirement travaille.

    Un mme sujet, consacr lautobiographie (annexe 3) a pu donner lieu des

    propositions diverses, sur lesquelles il peut tre clairant de sarrter. Lune, pointant les

    spcificits de ces rcits denfance et dadolescence, sest construite essentiellement autour

    des interactions entre lecture et criture. Les extraits sont lus comme des textes sources

    dmancipation, de transfiguration du rel et dinspiration pour rcrire le monde et la

    squence se construit par des aller-retours entre plonges dans les textes et rdaction. Il sagit

    l dun vritable projet dcriture dont la matrice serait le texte de Giono, nourri ensuite des

    lectures des autres textes.

    Une autre candidate, moins inspire, sest parpille en activits isoles. Sa lecture des

    textes souffrait dun manque de recul qui empchait de porter un regard densemble sur le

  • 42 corpus ; le souffle pique du texte de Giono est pass inaperu. En effet, elle na pas identifi

    lpithte dinspiration homrique de la colline aime des btes , ni lvocation potique

    dune guerre raconte depuis lAntiquit, et, plus largement, na pas compris la faon dont la

    lecture de LIliade nourrit vritablement le jeune Giono. Cette page nest reste pour elle

    qu une mise lhonneur des agriculteurs .

    Un troisime candidat sattache quant lui travailler loral et en fait son axe directeur.

    La squence souvre sur un dbat : Doit-on raconter ses souvenirs ? , bientt suivi par un

    autre sujet de discussion soumis la classe sur la place de la lecture aujourdhui . Le jury

    reste perplexe devant une squence dont lenjeu argumentatif et linsistance sur lexpression

    orale paraissent sans lien avec la tonalit et la nature du corpus o chaque texte tmoigne de

    limportance de la lecture ds lenfance et en montre le cheminement dans lcriture elle-

    mme.

    Ds 1995, Claudine Garcia Debanc sinterroge dans crire pour lire 7 sur cette

    complmentarit fort productive : [] je voudrais interroger la lecture sous l'angle de

    l'criture en situant leurs places respectives []. En quoi la mise en place de situations

    d'criture peut-elle aider les lves lire davantage ? Comment, par confrontations entre

    leurs propres essais d'criture et les textes d'auteurs, peuvent-ils tre conduits lire

    mieux, c'est--dire avec le regard de l'artisan interrogeant les procds d'criture, et

    ainsi s'initier trs tt l'analyse de textes littraires ? Dans quelle mesure, au cours

    mme de l'criture, la lecture est-elle partie intgrante du processus d'criture et intervient-elle

    tous les moments de l'laboration d'un texte ? .

    Enfin, nous ne rentrerons pas dans les dtails de la fabrication dune sance : la pratique

    quotidienne peut laisser supposer que tout candidat matrise cette comptence. De nombreux

    ouvrages y contribuent ; citons toutefois une ressource disponible sur le site de lAcadmie de

    Lille8 pour les candidats qui souhaiteraient une mise au point efficace.

    7 Dans Didactique de la lecture Regards croiss, textes runis par C. Garcia-Debanc, M. Grandaty et Angeline Liva, Presses Universitaires du Mirail, CRDP Midi-Pyrnes, 1996, page 191. Dautres comme Y. Reuter, B. Schneuwly proposent aussi des dveloppements trs formateurs sur le sujet de lcriture et ses liens avec la lecture.

    8 Question : Quest-ce quune sance et comment la prparer ? disponible sur le Net : http://lettres.discipline.ac-lille.fr/ressources/entree_metier_approfondir_pratiques/construire-une-sequence-et-une-seance-denseignement/quest-ce-quune-seance-comment-preparer-une-seance.pdf

  • 43

    Faut-il proposer dtoffer le corpus ?

    Un certain nombre de candidats prsentent des squences enrichies par des apports

    dautres textes et dautres uvres. Il est bien sr judicieux douvrir les perspectives de travail

    et de ne pas se cantonner une entre trop troite dans un groupement. Cependant, le corpus

    initial est conu dans une logique quil convient justement de cerner. Il est donc

    contreproductif de vouloir toute force y adjoindre des textes, ce qui peut conduire ngliger

    le traitement de certains extraits. La squence prsenter doit en effet faire rfrence tous

    les lments du sujet, sans exception.

    Lorsquun candidat propose, pour complter les textes de J.M-G. Le Clzio, J.Zobel,

    P.Chamoiseau et T. Ben Jelloun, de rutiliser deux exemples sur lesquels il stait appuy

    pour nourrir son dossier RAEP, ( Nous autres de Zamiatine et un livre de Hampt B),

    lintention est louable, pour peu que les liens avec les uvres du corpus soient explicits, et

    que le rapprochement dpasse le stade de lassociation dides. Les similitudes pressenties ne

    donneront leur pleine mesure quaccompagnes de justifications et darguments.

    Lorsquun candidat propose en lecture cursive, dans le cadre dune squence sur

    lautobiographie, Un secret, de Philippe Grimbert, il ne faut pas quil nglige de cerner la

    spcificit de ce roman , o tmoignage, fiction et procd thrapeutique sentremlent. Ce

    mme corpus prendra une toute autre direction si le texte complmentaire convoqu est

    Aliocha de Henri Troyat. Il sagira alors de montrer comment le rcit individuel sefface

    derrire le processus de rejet de la culture sovitique. Il faut avancer avec suffisamment de

    prudence et de rflexion et prendre le temps de valider des propositions surgies spontanment.

    Le jury a pu pointer un autre cueil : sil est intressant de convoquer dautres

    rfrences pour apporter une part personnelle au travail circonscrit par le corpus, y recourir

    doit apporter quelque chose la squence que lon prvoit. Il faut viter les prtextes ou les

    rapprochements artificiels : ainsi lvocation d un tableau de Tissot pour entrer dans un

    corpus qui contenait un extrait de Bel Ami dcrivant une rception mondaine peut avoir du

    sens, mais prendre plusieurs minutes dun temps prcieux pour dtailler la place de lventail

    dans un tableau dcrit de mmoire est peu pertinent, dautant que cela napporte aucun

    renseignement utile pour la suite. Il est prfrable, pour les uvres dart, de travailler sur de