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Fleurs de rocaille Catalogue d’exposition / Passe-Murailles hors-série # janvier 2013 « La Métamorphose »

Catalogue Fleurs de Rocaille

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le catalogue de l'exposition 2013 Fleurs de rocaille par le GENEPI

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Fleurs de rocaille

Catalogue d’exposition / Passe-Murailles hors-série # janvier 2013

« La Métamorphose »

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Directeur de publication : Charles BodreauResponsable éditoriale : Héloïse GuisnelRédactrice en chef : Claire van den BogaardComité de rédaction : Yves Januel, Julia Cahour,Renaud Cruells.Coordinateur du numéro :Yves JanuelMaquette/Mise en page :Yves Januel et Claire van den BogaardEn couverture : L’homme à la cigarette, dePhilippe G.Photographies : Renaud CruellsRemerciements :Merci à Philippe G., DaLeV, PierreL., Khaled A., DINGO, Sampiero A., Angélo R. etHamid pour leur participation à l’exposition. Merci à tous les artistes d’avoir eu confiance ennotre projet en nous confiant leurs œuvres.

N° ISSN : 1954-2356 - Dépôt légal à parution

Pour contacter la rédaction : GENEPI - 12 rue Charles Fourier

75013 Paris01 45 88 37 [email protected]

Avec le soutien de :

Ce numéro hors-série constitue un cataloguedes œuvres exposées dans le cadre du projetFleurs de rocaille, rassemblant des produc-tions effectuées lors d’ateliers animés par leGENEPI dans quelques établissements péni-tentiaires français, ainsi que des contributionsproposées à la suite de l’appel à création « LaMétamorphose ».

Catalogue d’expositionPasse-Murailles hors-série# janvier 2013

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Page 3: Catalogue Fleurs de Rocaille

Edito [page 05]Le projet Fleurs de rocaille [page 06]Entretien avec Marguerite Rodenstein

[page 08]Remords [page 11]Métamorphoses [page 15]Insertion [page 16]Confettis [page 18]Mues [page 19]Texte métamorphosé [page 20]Imaginaire [page 22]Entretien avec des bénévoles du GENEPI

[page 24]Transformation [page 28]Transformation [page 31]Entretien avec Women Theology [page 32]Qu’est-ce que le GENEPI ? [page 36]

Sommaire

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Cosm

osI,de Motoko

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«Non, l’art et la culture ne s’arrêterontpas aux portes de la prison. » C’est ceque défendent l’ensemble des ac-

teurs qui ont contribué à produire lesœuvres exposées dans ce deuxième cata-logue Fleurs de Rocaille.

Fers, barreaux, cellule, telles sontles images qui nous permettent de nousreprésenter la prison, de la mettre àl’écart, de la dissocier de nos vies quoti-diennes, tout cela au final pour mieuxl’oublier.

Replacer l’Art en Prison, ce n’estpas mener un combat, défendre un idéal,ou une manière d’agir pour amender despersonnes. Ce que veulent nous dire lesjeunes femmes de Women Theology,Marguerite Rodenstein, les bénévoles duGENEPI ou plus directement les person-nes incarcérées elles-mêmes, c’est quederrière les barreaux, se trouvent deshommes et des femmes – parfois despersonnes très jeunes – qui, s’ils sontprivés de leur liberté, demeurent desêtres humains.

En refusant de classer les œu-vres ici présentées, qu’elles aient étéproduites en détention ou à l’extérieur ;par des personnes ayant un haut niveaud’études ou qui n’en n’ont pas suivi ; quece travail s’inscrive dans une démarcheartistique réfléchie ou qu’il constitue unepremière approche de l’art ; nous sou-haitons rester fidèles à cette démarche.Donner à chacun l’opportunité de s’ex-

primer, de tracer les contours de sonidentité, de ses rêves ou de ses cau-chemars, de donner un sens à la périoded’emprisonnement ou de s’interroger surcette étrange idée qu’est la privation deliberté.

Mais priver quelqu’un de saLiberté, cela est-il vraiment possible ? Àtravers des dessins ou des textes, desimages ou des sons, chacun des auteursde ces œuvres a choisi de se dévoiler, quece soit de manière abstraite, figurative,imagée, interrogative...

Est-ce une œuvre artistique ?Fleurs de Rocaille n’a d’autres prétentionsque d’ouvrir un espace de création dansla détention, de créer un lien avec l’ex-térieur, suspendu au-dessus des règles,de la loi, de la justice, de la morale, sim-plement un moment d’humanité ou despersonnes bénévoles s’associent et s’im-pliquent personnellement pour co-pro-duire un travail, un artisanat, une œuvrequi fasse sens pour elles à cet instantprécis et qu’elles puissent le rendrepublic. Aussi les textes, sons, images,photographies que nous vous présen-tons ici interrogent notre rapport à ladétention, à l’enfermement, à l’isolement,donnent l’occasion à certains de s’expri-mer, par-delà les murs, par delà l’illettris-me, à d’autres de se découvrir des talentsd’artiste, mais surtout à chacun d’ouvrirses yeux et ses oreilles sur l’Autre afin dele considérer.

Editopar Renaud Cruellsdélégué régional

du GENEPI-Île de France-Centre

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Le GENEPI propose de décloisonner lesinstitutions carcérales afin de tisser unlien entre l’intérieur et l’extérieur ; cela

passe notamment par les activités quemettent en place les bénévoles de l’asso-ciation. Parce que les liens avec l’extérieursont encore trop rares pour les personnesincarcérées et que l’enfermement est unprocessus désocialisant, le projet Fleurs derocaille tente de remédier à sa hauteur, à cetétat de fait. Effectivement, si l’art permet des’évader quelque temps de sa cellule, c’estaussi un langage qui permet un dialogueavec l’au-delà des murs. Car l’expositionFleurs de rocaille allie l’art en détention avecdes œuvres d’artistes de l’extérieur. En pro-posant le même cadre à deux sources decréation, elle permet de créer un pont entrel’extérieur et l’intérieur.

Depuis que le GENEPI existe, desateliers culturels fleurissent chaque années :carnet de voyage, revue de presse, écriture,théâtre, art plastique… Les passions desétudiants membres du GENEPI rejoignentles envies et motivations des personnesincarcérées. Ces ateliers regroupent généra-lement entre quatre et dix personnes et sontanimés par deux étudiants bénévoles.

Avec Fleurs de rocaille, le GENEPI adécidé de donner plus de visibilité à cesateliers d’expression artistique. En effet, si lacréation artistique se justifie en elle-mêmecomme moyen d’évasion temporaire,comme processus de mise « hors de soi » dedésirs, pensées, images intérieures, l’œuvreartistique a aussi vocation de trouver uninterlocuteur afin d’exister en tant qu’objetd’Art. Le projet Fleurs de rocaille est né decette idée : exposer des œuvres réalisées endétention, non pour stigmatiser les person-nes incarcérées dans un mode de créationparticulier, mais pour reconnaître que cespersonnes ont, comme chacun, un droitd’expression artistique.

Le projet Fleurs de rocaille a dé-marré en janvier 2011. La première édition atraversé plusieurs villes françaises pendantseize mois (Marseille, Rennes, Poitiers, Mont-pellier, etc.) avec un réel succès que nousavons constaté suites aux nombreuses de-mandes et aux reprises de la presse. Les lieuxd’exposition allaient du plus insolite au plustraditionnel (musée à Toulon, galerie d’art àParis, festival urbain à Bordeaux, etc.).

Nous souhaitons montrer que l’artne s’arrête pas aux portes de la prison,donner la parole à celles et ceux qui sontprivés de liberté d’expression et tisser unlien dans et hors des murs de la détention.

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Le projet Fleurs de rocaille

Afin de contribuer à enrichir le dialoguede part et d’autre des murs, le projetFleurs de rocaille se prolonge par unappel à création extérieur. Dans la mêmeexposition se côtoient des œuvrescréées en détention – en lien ou nonavec leur expérience carcérale – et d’au-tres élaborées à l’extérieur. L’appel àcréation en-dehors des murs a eu pourthème « La Métamorphose ». À traversl’image de la métamorphose, il s’agitavant tout d’interroger le rapport à laréalité, à ses potentialités, mais égale-ment la possibilité de transformer et dechanger le monde, les valeurs, les autresou soi-même, dans une nouvelle quête,métaphorique ou non, de liberté.

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Le projet Fleurs de rocaille :

* Participe à la création artistique au seindes établissements pénitentiaires. Lesœuvres rassemblées autour du projetFleurs de rocaille émanent d’ateliers decréation animés par des Génépistes (béné-voles de l’association). Chaque semaine,des étudiants des quatre coins de laFrance sont entrés en détention et, au fild’un processus de création, les personnesincarcérées ont pu elles-même sélection-ner les œuvres d’art qui font partie del’exposition.* Permet un accès à la culture en déten-tion. Les œuvres créées au sein des diffé-rents lieux de détention ont vocation àêtre exposées aussi bien à l’extérieur de la

prison qu’à l’intérieur. Cette nouvelle édi-tion a donc pour ambition d’exposer lesœuvres au sein même des établissementspénitentiaires. Exposer de l’art en prisonpermet aux personnes détenues de sortirde leur cellule ; dès lors, cet art sensibiliseet constitue un moyen d’évasion vis-à-visdu quotidien carcéral. * Tisse un lien entre la société civile et lesétablissements pénitentiaires. Mélangerau sein d’une même exposition des œu-vres créées dans et hors des murs de laprison, et les exposer à l’intérieur et àl’extérieur des lieux de détention cons-titue bien un lien tissé entre la sociétécivile et les établissements pénitentiaires,et ce conformément à l’objet social del’association.

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Prisonniers, par Jaber (réponse à l’appel à création « La métamorphose »)

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Depuis combien de temps intervenez-vous dans le milieu carcéral et dansquel cadre s’est effectué votre pre-

mière entrée (association, SPIP…) ?

Je vais à la maison d’arrêt de Colmar depuisun peu plus de vingt ans et ma premièreintervention a été dans le cadre de l’école,puisqu’on m’a demandé de venir pour fairede la lutte contre l’illettrisme. Nous avions uncentre de formation à l’association « Espoir »dont je fais partie, qui était spécialisé pour laremise à niveau de personnes en très grandedifficulté notamment des adolescents etadultes en situation d’illettrisme. J’étais éga-lement à l’époque responsable du centredépartemental de lutte contre l’illettrisme.On nous a donc demandé de venir dans cecadre-là pour faire de la remise à niveau. Onsait qu’en France, il y a un gros pourcentagede personnes qui sont illettrées mais enprison, il y en a encore bien plus... On compteau minimum 15 % de personnes qui sontdans cette situation.

Après avoir commencé à travailler autour del’illettrisme avez-vous changé petit à petitles objectifs de vos ateliers ?

Nous avons fait de la lutte contre l’illettrismeà proprement parler pendant cinq ans et,comme chaque année, j’effectuais un« recyclage », j’ai découvert les ateliersd’écriture il y a quinze ans. J’ai été tota-lement emballée ; il s’agissait d’un moyen delutter contre l’illettrisme mais de façon dé-tournée. C’est une manière ludique de fairede la formation, un moment de plaisir et de

liberté. Depuis lors, je ne fais plus que ça : jeconduis et anime cet atelier d’écriture à lamaison d’arrêt de Colmar. Ainsi, tout unchacun, quel que soit son niveau, peut yparticiper sans honte ni appréhension, justeavec envie et plaisir.

Comment travaillez-vous spécifiquementavec le public illettré dans le cadre d’unatelier écriture ?

Je travaille avec le public illettré comme avecles autres. À la seule différence que lorsqu’ ils’agit d’écrire, je propose ou bien de tenir laplume et l’auteur me dicte, ou bien uncodétenu qui écrit à la place de l’intéressé.Cela n’empêche pas que la personne qui esten grande difficulté réfléchisse et metteéventuellement sur papier des petits repè-res, des signes, qui lui permettront ensuitede s’exprimer de façon plus libre, plusdégagée. Je me suis rendu compte que lespersonnes illettrées ont souvent des idéesextraordinaires. Je n’en doutais pas, maisc’est vraiment la preuve que le fait d’êtreillettré, de ne pas pouvoir écrire ou de fairedes écrits criblés de fautes, n’empêche pasde réfléchir.

Dans vos ateliers d’écriture, quelle formeprennent les réalisations que vous sortezhors des murs ?

Nous avons deux formes de réalisations.Tout d’abord, nous réalisons des ouvrages :chaque année, l’ensemble des écrits despersonnes incarcérées est regroupé. Il n’y aaucun choix, aucune sélection de faits : tous

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Entretien avec Marguerite RodensteinMarguerite Rodenstein, intervient depuis plus de vingt ans à lamaison d’arrêt de Colmar : sa première entrée en détention fut dansle cadre d’un atelier pour lutter contre l’illettrisme des personnesincarcérées. Mais elle s’est vite rendu compte que les heures de coursscolaire correspondaient très mal aux besoins des « élèves ».

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les écrits paraissent dans cet ouvrage, inté-gralement. Et nous nous sommes renducompte que tous les écrits sont beaux, diffé-rents, qu’il s’agisse de ceux de personnestotalement illettrées ou de personnes quiont un bac+5. Souvent, on ne voit même pasla différence, on ne peut pas le déterminer àla lecture des écrits. Ensuite, il y a une expo-sition itinérante –Derrière les murs, des êtreshumains – qui a été réalisée il y a déjà troisans avec des photos de la maison d’arrêt etdes écrits de détenus. Les écrits qui fontpartie de l’exposition ont été tirés de tous lesouvrages parus. Pour sélectionner ces textes,j’ai réparti les livres entre plusieurs per-sonnes et je leur ai demandé de faire unchoix de deux écrits dans chaque ouvrage.C’était en effet très délicat pour moi de faireun choix parmi la centaine d’écrits dechaque ouvrage, d’autant plus que je con-naissais les écrivains. Cette exposition com-porte donc 40 photos et 40 écrits et dessinsde détenus.

Vous intervenez donc sur la maison d’arrêtde Colmar, il s’agit de personnes plutôtcondamnées à de petites peines. Sur com-bien de temps arrivez vous à travailler avecles mêmes personnes ?

La maison d’arrêt deColmar est un peuparticulière étantdonné que c’est lesiège du Tribunal degrande instance, dela cour d’Assises etde la cour d’Appel.Ce qui veut dire qu’ilvient à Colmar toustypes de détenus :les personnes quisont là en préven-tive, avant le juge-ment et pendantl’instruction de leurdossier, ce qui peutdurer jusqu’à deux

ans. Mais aussi des personnes qui restent làou qui reviennent pour aller en appel. Ellespeuvent donc être présentes durant quel-ques séances mais aussi rester pendantdeux ans ; c’est donc extrêmement variable.

Chaque année, vous faites sortir des œuvresdes personnes incarcérées pour en faire unouvrage. Est-ce que vous rencontrez desdifficultés particulières pour faire sortir cesœuvres et est-ce que c’est quelque chosequi a évolué au cours des années ?

Le type de population a changé. Elle s’estbeaucoup rajeunie. Quand j’ai commencé, ily a vingt ans, la moyenne d’âge était de45 ans environ, alors qu’à l’heure actuelle,elle est entre 25 et 30 ans. Les délits commisont également changé puisque beaucoupde personnes qui sont incarcérées sont làpour des problèmes, je dirais relativementmineurs, des problèmes liés à la drogue,alors qu’à l'époque, il y avait plus de per-sonnes qui avaient commis des délits unpetit peu plus importants, voire de gros« casses ». Ces personnes étaient souventd’une intelligence au-dessus de la moyenneet arrivaient à réaliser des écrits extra-ordinaires, dans un style élaboré et avec une

Extrait de Derrière les murs, des êtres humains

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imagination débordante. Étant donné qu’ils’agit d'un public allant de l’illettrisme àbac+5, les écrits sont évidemment trèsdifférents mais la qualité a néanmoins quel-que peu diminué, me semble-t-il.

Et sur la sortie des œuvres en elle-même, est-ce difficile d’obtenir les autorisations dediffusion de l’administration pénitentiaire ?

J’ai toujours eu un accueil et une écoutefavorables de la part de toutes les directionsque j’ai côtoyées depuis vingt ans et je n’airencontré aucune difficulté pour faire sortirdes livres. Pour la mise en place de l’exposi-tion, cela a été plus difficile : c’était un peu leparcours du combattant pour avoir toutesles autorisations nécessaires depuis la direc-tion de l’établissement jusqu’à la directioninterrégionale mais je pense que c’est unpetit peu la lenteur administrative habi-tuelle. Mais une fois que les autorisationsétaient obtenues, il n’y avait plus de problè-mes. Le premier ouvrage que j’avais faitparaître a été réalisé avec le soutien dudirecteur de l’époque : je crois qu’il auraitvraiment tout fait pour permettre aux per-sonnes incarcérées de se réaliser, de voirautre chose, de se voir sous un autre angle,de pouvoir s’épanouir et trouver, en eux, àl’intérieur même de la prison, les forcesnécessaires pour se réinsérer.

Quels sont les retours, si vous avez lapossibilité d’en avoir, des personnes incarcé-rées une fois le projet finalisé ?

Tout d’abord, ils se découvrent. Car quand ilsvoient leurs écrits une fois terminés, bienque je n’y change rien du tout sauf la correc-tion des fautes, ils trouvent que c’est formi-dable. Très souvent, leur réaction, c’est de sedire, « est-ce que c’est possible ? Est-ce quec-est moi qui ai écrit ça ? » À chaque séance,

leurs textes sont lus et partagés avec lesautres, déjà à ce niveau-là, c’est extra-ordinaire mais quand ils voient l’ouvrage, ilstrouvent que c’est formidable d’être dans unlivre, de pouvoir le donner à leurs familles,pour qu’ils soient perçus, vus et reconnussous un angle différent, car souvent, la fa-mille les rejette ou ne vient plus les voir.Ainsi, pouvoir se montrer dans un livre defaçon valorisante est facteur de fierté. Jetrouve que c’est très important de pouvoiraussi montrer cette facette de la personnequi se trouve derrière les barreaux.

Et du grand public ?

Le public est toujours extrêmement surpris.Tout d’abord, quand il voit les photos de lamaison d’arrêt, ils ont toujours un peu entête les images, qu’on voit à la télévision, desfilms américains... La maison d’arrêt de Col-mar est une prison extrêmement vétustemais, malgré cela, il faut relever une grandehumanité à travers le contact direct entresurveillants et détenus. Même si de tempsen temps, ça se frite… Le public est d’autantplus surpris par les écrits puisqu’il ne pensepas trouver dans le cœur d’un détenu autantd’humanité, de sensibilité. Or il me sembletrès important et valorisant de montrer que,même si on a fait une erreur dans sa vie, onn’en reste pas moins un être humain.

Pour finir, où en est l'accrochage de l’exposi-tion, continue-t-elle de tourner ?

L’exposition sillonne toute la France etmême l’étranger. Nous en avons quatreexemplaires en raison de la demande. Cetteannée, elle a été, entre autres, à Genève, enAllemagne, à l’Abbaye de Lérins, etc. Trèssouvent, on me demande d’accompagnerl’exposition pour animer une soirée-débatet c’est toujours très riche et positif.

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Il suffit de quelques secondes, d’un instantEt rien n’est plus jamais comme avant !La vie semblait nous sourire,Chaque jour était un nouveau plaisir,Nous nagions dans le bonheur,Sans nous soucier ni du jour, ni de l’heure.Mais il suffit d’un petit momentPour tout bouleverser carrément.Si seulement je pouvais revenir en arrière,Pour gommer ce qui m’a amené ici, hier !Jamais je n’aurais pensé,Que moi aussi, un jour, je serais enfermé.Si je pouvais, je décrocherais la lunePour partir loin avec toi, courir sur les dunes.Nuit et jour je suis rongé par les remords,Je paie mes erreurs, j’assume mes tortsMais toi, ma bien aimée, tu n’as rien faitEt tu paies autant que moi cette plaie.Aurai-je assez d’une vie, pour rattraperCette déchirure que nous devons partager ?Oui, il suffit d’un instant, d’un petitinstant,Et rien, plus rien, n’est plus jamaiscomme avant.

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Extrait de Derrière les murs, des êtres humains

Remords (anonyme)Extrait de Derrière les murs, des êtres humains

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Excalibur, par Philippe G.

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Falaises Bretonnes, par Phlippe G.

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L’Enfant bleu, par DaLeV

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Maniaque je le suisEn pleine nuitTout bruit me fait peurAmoureux des phénomènes paranormauxMonstres, vampires, loup-garous.Ostracisés, mes cauchemars sombrentRavageant mes rêves joyeux.Pourquoi la lune ne me parle-t-elle pas ?Histoire de dire que fou je ne le suis pas ?!Otage… otage de ma paranoïa.Sors de ce corps esprit du mal ! Ferais-je l’élogeEtrange d’un schizophrène ?

Métamorphosespar Dingo

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Insertion, par Joël Curtz

(réponse à l’appel à création « La métamorphose »)

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Confettis, par Lucie Deschamps(réponse à l’appel à création « La métamorphose »)

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Mues (am I what I am ?) par Tami Notsani et Laurent Mareschal

(réponse à l’appel à création « La métamorphose »)

Mues questionne la notion d’identité individuelle et collective à travers un ensembled’autoportraits sonores et d’autoportraits-robots réalisés par trois groupes d’ado-lescents originaires de France, d’Israël et de Palestine.

Ils muent, vulnérables comme des homards dans leur nouvelle carapace.Nous leur avons demandé de nous laisser l’ancienne, abandonnée pour grandir ànouveau. Elle est à leur image, mais ne leur ressemble déjà plus. Cette œuvre sera, nousl’espérons, un souvenir marquant de leur mue.

Nous leur avons tendu un miroir déformant où ils devaient malgré tout sereconnaître. Notre proposition était violente. Construire une image de soi quand ellechange le plus n’est pas évident, il faut un peu de courage. Beaucoup en ont manqué,certains ont profité de l’occasion pour faire le tour d’eux-mêmes avec une acuiténarcissique ou masochiste. Ces derniers ont eu la générosité de s’éprouver sous nosyeux. Contrairement aux portraits robots utilisés par la police et l’usage sensation-naliste qu’en font certains médias, cette expérience propose de tourner le téléobjectifvers un soi quotidien, banal et pourtant irréductible à une sommaire description. Lapersonnalité de chacun ne peut être réduite, le langage est simplement impuissant àen saisir l’essence. Reste à essayer…

© Le Fresnoy - Tami Notsani, Laurent Mareschal - 2007

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En se réveillant un matin après des rêvesagités, Gregor Samsa se retrouva, dansson lit, métamorphosé en un mons-

trueux insecte. Il était sur le dos, un dos aussidur qu’une carapace, et, en relevant un peula tête, il vit, bombé, brun, cloisonné par desarceaux plus rigides, son abdomen sur lehaut duquel la couverture, prête à glissertout à fait, ne tenait plus qu’à peine. Sesnombreuses pattes, lamentablement grêlespar comparaison avec la corpulence qu’ilavait par ailleurs, grouillaient désespéré-ment sous ses yeux. « Qu’est-ce qui m’estarrivé ? » pensa-t-il. Ce n’était pas un rêve. Sachambre, une vraie chambre humaine, justeun peu trop petite, était là tranquille entreles quatre murs qu’il connaissait bien.

Il voulut d’abord sortir du lit encommen-çant par le bas de son corps, maisce bas, que du reste il n’avait pas encore vuet dont il ne pouvait guère se faire non plusd’idée précise, se révéla trop lourd à remuer ;cela allait trop lentement ; et quand, pour

finir, prenant le mors aux dents, il poussa detoutes ses forces et sans précaution aucune,voilà qu’il avait mal visé : il heurta violem-ment le montant inférieur du lit, et la dou-leur cuisante qu’il éprouva lui apprit à sesdépens que, pour l’instant, le bas de soncorps en était peut-être précisément la par-tie la plus sensible.

Il essaya donc de commencer parextraire du lit le haut de son corps, et iltourna prudemment la tête vers le bord. Celamarcha d’ailleurs sans difficulté, et finale-ment la masse de son corps, en dépit de salargeur et de son poids, suivit lentement larotation de la tête. Mais lorsqu’enfin Gregortint la tête hors du lit, en l’air, il eut peur depoursuivre de la sorte sa progression, car sipour finir il se laissait tomber ainsi, il faudraitun vrai miracle pour ne pas se blesser à latête. Et c’était le moment ou jamais de gar-der à tout prix la tête claire ; il aimait mieuxrester au lit.

Texte originalIncipit de La Métamorphose de Franz Kafka

Tableau de feu, par Phlippe G.

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En se réveillant après des rêves agités dans uncontexte spatio-temporel incertain, GregorSamsa se retrouva métamorphosé. Je crois bien

qu’il était devenu une sorte de monstrueux insecte,mais je ne peux pas vous le garantir, et je pourraisencore moins vous le décrire avec précision. Il était surle dos. Ou sur le ventre. À mon avis, s’il était vraimentsur le dos, on peut raisonnablement penser que cedos était aussi dur et rigide qu’une carapace de tortue.Si vous préférez l’imaginer sur le ventre – libre à vous,disons qu’il avait un abdomen passablement mou, unpeu comme un oisif qui néglige l’activité physique etqui se laisse aller au plaisir de la nourriture. Par unmouvement que je ne saurais qualifier, probable-ment en relevant la tête, il dut voir son abdomen, surle haut duquel la couverture – peut-être devrait-onplutôt l’appeler couette – sans doute prête à glissertout à fait, ne tenait plus qu’à peine. À ce stade durécit, j’imagine que vous brûlez de curiosité, et quevous n’attendez qu’une chose : une description de cetimmonde abdomen. Bande de voyeurs… Mais je nesuis pas un narrateur omniscient, moi. Je ne sais pastout sur tout. Et puis mes souvenirs sont un peu flous.Mais malgré mes hésitations, je vais m’exécuter pourvous faire plaisir. Son abdomen était bombé ourecroquevillé, brun ou blond, cloisonné ou ouvert, pardes arceaux pus rigides, ou peut-être bien plus mous.Je crois me souvenir que ses nombreuses pattes,lamentablement grêles par comparaison avec lacorpulence qu’il avait par ailleurs, je pense, grouil-laient désespérément, enfin je pense, à moins qu’ellesaient plutôt grouillé sous les deux globules gluantsqui lui faisaient office d’yeux. Après cette terriblevision, il dut se dire quelque chose dans le genre«Qu’est-ce qui m’est arrivé ? » ou plutôt « Qu’est-cequi m’arrive ? ». Ce n’était sans doute pas un rêve, maisaprès tout, peut-être en était-ce un, qui sait… Peuimporte où il se trouvait, il était là, tranquille, ou peut-être nerveux, entre ces quatre murs qu’il connaissait sibien, ou plutôt qu’il croyait connaître…

À 6h32, il tenta d’abord de se lever enbasculant les quatre-vingts deux pattes de sa cara-pace afin de sortir de son lit. La position horizontaledans laquelle sa carapace rigide le maintenait limitaitson champ de vision à 45 degrés, ce qui lui permettaituniquement de contempler les fissures du plafondblanc de sa chambre, constellé d’humidité. Cette

position le priva de la vision de son abdomen. Lehandicap provoqué par ses 323 kilos ralentissaitconsidérablement chaque geste qu’il entreprenait.Cette gêne le poussa à exercer une contractionmusculaire brusque afin de s’extraire du lit. Il con-tracta donc ses quatre-vingts arceaux cuticulairesrigides, ce qui était censé provoquer une rotationcirculaire de gauche à droite des vingt-huit méta-mères inférieurs, constitués de deux pattes chacun.Hélas il heurta violemment la barre verticale arrièredroite du lit, qui servait à maintenir le pied de fontesurélevant le sommier de soixante centimètres. Lacollision provoqua une excitation particulièrementexacerbée du système nerveux nociceptif et dont lasensation limbique correspondante était proche decelle provoquée par le contact d’alcool à 90° sur uneplaie. Il se rendit compte que les 40 % de son corpsqui en composaient la partie postérieure en étaientla zone la plus sensible.

Il essaya donc de commencer par extraireson thorax – semblable à un tronc – de son lit, quiétait de style Louis XVI et avait un matelas à ressortDodo. Il tourna prudemment vers le bord la partiesupérieure de son corps, celle qui lui faisait avantoffice de boîte crânienne. Il y réussit d’ailleurs sansdifficulté et de surcroît avec aisance, et finalement laquantité de matière de son corps, en dépit de sa lar-geur/son étendue et de la résultante des forces gravi-tationnelles qui s’exerçaient sur lui, suivit lentementà 180° de sa tête (la partie supérieure de son corps,celle qui lui faisait avant office de boîte crânienne).Mais lorsqu’enfin cet être dont le nom était issu de lacivilisation grégorienne du XIe siècle, tint la tête horsdu lit, en l’air, il ressentit ce que ressentent les êtresvivants face au danger, à l’idée de la sorte sa pro-gression, qui consistait dans l’extraction de cettemasse visqueuse. Car si pour finir il se laissait tomberainsi, selon la gravitation universelle, il faudrait un vraimiracle, un phénomène interprété comme résultantd’une intervention divine, pour ne pas se blesser latête. Et c’était le moment ou jamais de garder à toutprix au clair son principe immatériel vital, sa substan-ce incorporelle. Il aimait mieux, pas au sens d’unamour passionnel, mais plutôt au sens d’une résigna-tion, rester dans son meuble à sommier conçu pourdormir ou se reposer.

Texte métamorphosépar Adjimi et Sampiero A.

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Il s’est trouvé là par hasard, les yeux vides et le regard fuyant,Marchant dans la pénombre froide et lugubre,Aspiré par un conflit de forces qu’il ne putGagner que par son esprit qui lui offrit alors un espoirImaginaire lui faisant dire avec forceNon au fruit défendu et à la tentationAbyssale qui par le passé lui avait faitIncarner la dangerosité,Rappelant un passé sombre,Etrange et fou.

Imaginairepar Sampiero A.

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L’homme – La mer, par Philippe G.

Une lumière dans la nuit, par Philippe G.

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Depuis quand êtes-vous bénévole auGENEPI, en quoi consiste votre enga-gement dans l’association ?

Depuis octobre 2011. En tant que Génépiste,l’objectif de nos actions est multiple. Unpremier pan de notre action est l’interven-tion en détention (dans divers centres péni-tentiaires). Il est possible pour nous, soit d’yeffectuer du soutien scolaire (pour une miseà niveau où pour une préparation à unexamen), soit de développer une activitésocio-culturelle. Notre choix s’est tourné versune activité art plastique : l’atelier avait lieuune fois par semaine pendant une heure etdemie à la maison d’arrêt de Nantes puis àla nouvelle maison d’arrêt située à Carque-fou.

Cependant, l’engagement du Gé-népiste ne s’arrête pas là. Nous nous devonsde participer à diverses formations et collo-ques au cours de l’année. Un autre versantde notre action consiste à la sensibilisationet à l’information sur le thème de la prisonet de la justice. Il s’agit de faire part de notreexpérience de Génépiste et de nos réfle-xions, lors de manifestations diverses, dansla rue ou à l’école, afin de pousser les person-nes rencontrées à se questionner sur la pri-son et la justice, son fonctionnement, sonrôle et ses possibilités.

Comment décrirez vous la maison d’arrêt deNantes dans laquelle vous interveniez ?

La maison d’arrêt a déménagé début juin.L’ancienne maison d’arrêt dans laquellenous intervenions était très délabrée et le

couloir d’activité a d’ailleurs été en partieinondé pendant l’hiver. Au niveau du plande construction, la maison d’arrêt étaitorganisée de manière à ce que tous lescouloirs débouchent sur un même lieubaptisé « le rond point », gardé par dessurveillants. Au niveau de la circulation, lescouloirs sont coupés par de nombreusesgrilles, afin de gérer le flux de personnes. Ondoit donc attendre derrière une grille qu’elles’ouvre pour pouvoir continuer d’avancer.Atteindre la zone d’activité peut donc pren-dre du temps, avec en tout dix grilles àfranchir. Dans l’ancienne maison d’arrêt, il yavait un couloir d’activités, comprenant lebureau du surveillant du couloir, la salle desprof’, des salles de cours et des sallesd’activité. À l'intérieur de la salle, des chaises,des grandes tables, un tableau et une petitearmoire dans laquelle nous pouvions laisserle matériel nécessaire à notre activité.

Au mois de juin, il nous a étépossible de poursuivre notre activité dans lanouvelle maison d’arrêt ce qui a permis auxparticipants une continuité malgré le démé-nagement. Bien évidemment, la maisond’arrêt de Carquefou est beaucoup plusmoderne comparé à l’ancienne. Les diversbâtiments (séparés par des cours, et desgrilles) nous ont parus plus grands, plusaérés que les locaux de l’ancienne maisond’arrêt. Cependant, nous ne pouvons pasvraiment dire, car même en intervenantdans la nouvelle maison d’arrêt, nous envoyons une partie beaucoup plus restreinteque dans l’ancienne. En effet, après avoirfranchi les portes d’entrée, l’accès au secteurd’activité se fait pour les intervenants exté-

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Entretien avec Kathleen et Aurélie,bénévoles au GENEPI

Rencontre avec des bénévoles du GENEPI ayant participé à l’atelier d’arten détention à la maison d’arrêt de Nantes : la plupart des œuvres decette édition provenant de cet atelier, il est intéressant de savoir dansquelles conditions a été mis en place cette activité du GENEPI.

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Angélique Charlery, Réflexion<Déconstruction de la prison>

rieurs, par des cours séparant différentsbâtiments, la plupart administratifs. Lespersonnes incarcérées accèdent, elles, à cesecteur en traversant des couloirs et lescours de promenades, il nous semble. Ainsi,contrairement à l’ancienne maison d’arrêtoù détenus, surveillants, intervenants, avo-cats, se croisaient dans les couloirs, on nerencontre presque plus de personnes incar-cérées avant d’arriver au secteur d’activités(hormis celles se trouvant dans cette partiede la maison d’arrêt pour diverses raisons :rendez-vous au Service pénitentiaire d’inser-tion et de probation, par exemple). Cetteorganisation de l’espace dans les nouveauxcentres pénitentiaires est souvent qualifiéede déshumanisante : le contact visuel directn’existe plus, les zones d’accès entre lesdifférentes grilles sont toujours gérées pardes surveillants, mais que l’on ne voit plus,cachés derrière des vitre teintées. Nous nesavons pas comment, au quotidien, cela estvécu par l’ensemble du personnel et de lapopulation carcérale. Au mois de juin, laplupart des participants à l’atelier étaientsoulagés que le déménagement soit passé,et contents d’être dans un lieu moins insa-lubre, bien que l’absence de contacts leurposait un peu question pour la suite.

Quelle impression peut faire la premièreentrée en détention (sensations, bruitspremiers contacts avec les personnesincarcérées, etc.) ?

Personnellement, j’ai ressenti un malaise lorsde la première entrée en détention et unegrosse sensation d’étouffement . Il s’agissaitsimplement d’une visite de la maison d’arrêtafin de nous préparer à la première inter-vention, je me suis même demandée si jeserais capable de venir toute les semaines.Finalement, une fois les couloirs traversés,arrivée en salle d’activité, on oublie facile-ment où l’on se trouve. Surtout lorsque lesparticipants arrivent et que les activitéscommencent, le dialogue se noue facile-ment. Après, on sait toujours dans un coin de

notre tête où nous sommes et qu’il y a dessujets à éviter. Mais en règle générale, pen-dant la durée de l’atelier on oublie et l’am-biance est plutôt à la rigolade.

Lors de notre premier jour d’acti-vité, il fallait se présenter, présenter l’associa-tion et l’activité que l’on souhaitait mettreen place avec les détenus inscrits dans notreatelier. Pas d’appréhension négative à cemoment-là, les choses se font assez simple-ment. La première entrevue reste quandmême difficile dans le sens où les personnesincarcérées sont certainement aussi mal àl’aise que nous, puis, bien évidemment,l’atmosphère finit par décompresser et sedétendre au cours du temps : lorsque noussommes plus à l’aise, nous nous permettonsde faire de l’humour, la relation Génépiste-détenu qui se crée devient alors plus natu-relle, plus décontractée, plus humaine !

Vous avez animé un atelier artistique endétention duquel est sortie des œuvres quisont intégrées à Fleurs de rocaille : commentse passe ce type d’intervention en déten-tion ?

Nous sommes surtout là pour apporter dumatériel, car nous dessinons toutes les deuxmoins bien que plusieurs participants àl’atelier. Lorsqu’on arrive, on installe d’abordles tables en rectangle, puis on sort tout lematériel. Après, chacun s’assoit où il veut eton commence à dessiner (nous y compris). Iln’y a pas de thème imposé, ni quoi que cesoit du genre. Chacun dessine ce qu’il veut,et on discute de tout et de rien, on parle dela semaine qui s’est écoulée, de nos « sou-cis » et vies d’étudiante dehors, des dessinsqu’on est en train de faire, chacun essaied’apporter ses conseils à l’autre ou dedonner des idées de thèmes…

Avec combien de personnes travailliez-vouset sur combien de temps ? Les œuvresétaient-elles réalisées pendant les ateliers ouplutôt en dehors ?

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Le plus souvent, il y avait quatre participantspar atelier, dont deux qui ont été présents toutau long de l’année. Les autres sont en généralvenus pendant deux mois, parfois juste pen-dant une ou deux séances. Les œuvres surgrand format (format raisin) ou peintes, sontforcément réalisées pendant l’atelier, le grandformat et la peinture étant interdits en cellule.Sinon, la plupart des œuvres étaient réaliséeshors atelier. Les participants à Fleurs de rocailledessinent beaucoup en cellule ; l’atelier étaitpour eux plutôt un moment de détente, dediscussion. Ils apportaient leurs dessins pournous les faire partager et lire (un des parti-cipant de cet atelier créait des bandes dessi-nées dans lesquelles il animait des petitspersonnages représentant des animaux). Ducoup, il faut bien avouer que les dessins àproprement parler n’avançaient pas forcémentbeaucoup pendant l’atelier. Mais les partici-pants eux-mêmes ne souhaitaient pas justedessiner, ils nous ont d’ailleurs fait remarquer àune séance où l’on était particulièrementsérieuses, qu’on n’avait pas l’air d’aller très bienet qu’on n’était pas très bavardes aujourd’hui.

Comment avez vous expliqué la démarche deFleurs de rocaille aux personnes que vousrencontriez ? Quelle était leur démarchelorsqu’elles ont souhaité y participer ?

La démarchede Fleurs de rocaille leur a bien évidemmentété expliquée par nos soin. À la base, lorsquel’on a présenté l’atelier aux premiers détenus,nous leur avions dit que nous souhaitions lesvoir participer à une exposition. Fleurs de ro-caille s’est présentée à nous comme uneopportunité qui permettait à la fois de voir unaboutissement à l’investissement fourni par lesdétenus et de donner une continuité à notreaction au sein de la maison d’arrêt.

Après, chacun était libre de partici-per ou non à Fleurs de rocaille. Certainsparticipants à l’atelier n’ont pas souhaité faireparvenir leur production pour l’exposition, caril venaient plutôt pour le plaisir d’être réunis etde discuter, que pour l’activité d’art en elle-même. D’autres étaient très motivés et nousont apporté les dessins qu’ils souhaitaient voirexposer. C’est quand même une démarchepersonnelle, dans le sens où ils acceptent denous laisser un dessin sur lequel ils ont parfoispassé du temps et dont ils peuvent, à juste titre,être fiers. Pour certains dessins, ils préféraientdonc les garder. Hormis le choix des œuvres, ilsont simplement remplis une cession de droitssur les œuvres adressée au GENEPI pendant unan, documents que nous leur avions apporté.Les autres démarches dépendent du GENEPI.

Paysage de fantaisie, par Damien L.

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Le Paysage, par Philippe G.

Domme, Dordogne, Périgord, par Philippe G.

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Sa transformation était incroyable : un animal différent, une nouvelle

identité, on racontait même qu’il étaitméconnaissable. C’est choquant

tout de même, non ?Ce monde avait besoin d’un

révolutionnaire pour un changementbrutal. Mais… sa mutation en effrayaitplus d’un. Sa folie de suivre les espritssaints la nuit ne les enchantait guère.

Rien d’irréel à ne pas être hypnotisé parle chant des sirènes quand on n’a pas

l’esprit sain et cela même quand vient la pleine lune.

Volte face ! Parfois ange, parfois démon,on a seulement deux métamorphoses.

Alors, pile ou face ?

Transformationpar Dingo

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La métamorphose dans tous ses états, par Lobsang

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L’Inconnue, par Philippe G.

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Trouvée dans une grange près d’une bergerie, était une forme au

Regard à la fois troublant et effrayant. J’étais complètementAnéanti à la vue de la choseNoire etSombre, à tel point qu’on aurait pu penser que cet être

venait tout droit des enfers.Fier comme je suis, je ne voulais pas partir, car plus le temps

passait, plus ma curiosité grandissait devant cette scène

Onirique. Je ne réalisais pas encore sur quel genre de phénomène paranormal j’étais tombé. J’étais venu me

Rassasier d’eau pour moi et mes bêtes.Mes mains ainsi que mes jambes ne répondaient plus.Au fil du temps, je m’approchaisToit doucement de la bête, pour ne pas être surpris par sa

réaction, déjà que mon corps ne me répondait plus.Informé de sa présence, je ne pu m’empêcher de prendre

mon bâton de berger que je tins fermement dans ma main.

Opérationnel et équipé comme je l’étais, je n’avais qu’une idée en tête : capturer cette créature pas vraiment

Négligeable…

Transformationpar Mohamed

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GENEPI / Quelle forme prend votre en-gagement artistique ?

Julie / Tout dépend de ce qu’on entend par« engagement ». Dans mon travail photo-graphique, je ne revendique rien. Je ne suispas engagée socialement ou politiquement.Je ne dénonce pas ; j’essaie de montrer. Monutilisation des techniques anciennes dephotographie me permet de les appliquersur des faits sociaux/politiques contempo-rains comme on appliquerait une grille delecture ; ça permet, pour moi, de voir deschoses connues sous un autre angle, et deles interroger. Mais parler d’engagement, jene sais pas. J’essaie simplement de trouverd’autres angles, par exemple concernantmon travail sur la féminité.

Marina / Il ne s’agit pas de délivrer un messa-ge ou de me positionner d’un côté ou del’autre de manière radicale. Pour moi, il s’agitréellement de soulever des questions, demontrer plutôt que de démontrer. Je choisisun point de vue, par exemple, dans le cadreprécis de ce projet, celui des prisons. Jecollecte les informations, les conserve et lesprésente de manière construite. Même si cesinformations me semblent toujours opa-ques et complexes, inscrites dans de nom-breuses considérations pol it iques etsociales. C’est précisément en les inscrivantdans une construction esthétique qu’ellesprennent sens.

GENEPI / Pouvez vous nous expliquer votreprojet en détention ? D’où vous est venuecette idée ?Julie / Women Theology s’inscrit dans lacontinuité de nos travaux autour de la fémi-nité des cas-limites : que signifie être unefemme ? Que signifie avoir une image desoi-même en tant que femme ? Que signifiese construire une identité, en tant quefemme, et à quel moment cette identitépeut-elle vaciller, à quel moment cesse-t-onde se voir renvoyer cette identité ? Quellesressources mobiliser alors pour conservercette image de soi ? J’avais déjà travaillé surdes projets photo [dont sont issues les illus-trations de cet article] avec des femmesvictimes de violences conjugales, je suis ence moment en train de travailler sur unprojet concernant la scarification chez lesadolescentes, et Marina et moi-même tra-vaillons autour de la figure de la mère... Toutce que j’appelle des « cas-limites » capables,par l’intensité de leurs difficultés, de remet-tre en cause notre image de nous-mêmes entant que femmes. La prison était une suitelogique.

L’univers carcéral articule un para-doxe déroutant : d’un régime de la punitionpar le supplice, punition qui, politiquement,avait l’avantage d’être vue de tous, noussommes passés à un régime de la punitionpar l’isolement, une partie de la punitionétant, justement, l’invisibilité de la personnepunie vis-à-vis de la société, mais en mêmetemps, sa constante visibilité à l’intérieur de

Entretien avec Women TheologyWomen Theology s’inscrit dans la continuité des préoccupations d’ALTER, qui développeplusieurs projets autour de la féminité des cas-limites : que signifie être une femme ? Quesignifie avoir une image de soi-même en tant que femme ? Que signifie se construire uneidentité, en tant que femme, et à quel moment cette identité peut-elle vaciller, à quel momentcesse-t-on de se voir renvoyer cette identité ? Quelles ressources mobiliser alors pourconserver cette image de soi ? Ce projet repose sur ce constat : ne plus être visible aux yeuxde la société, tout en étant sur-visible aux yeux de la prison, déconstruit une forme d’identitéféminine. Il s’agirait alors de monter un atelier autour du portrait, qu’il soit écrit, photo-graphique, ou dessiné ; de proposer aux femmes incarcérées de réaliser un portrait de femme,ce qu’elles perçoivent être un portrait de femme.

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la prison. Comment, dès lors, se définir entant que femme, en tant que mère, commentse construire une image de la féminité, alorsque cette image est définie à la fois dans lecadre exclusif d’une société, et dans la sphè-re intime ? Ce projet repose sur ce constat :ne plus être visible aux yeux de la société,tout en étant sur-visible aux yeux de laprison, déconstruit une forme d’identitéféminine.

GENEPI / Quels liens faitesvous entre féminité et pri-son ?Marina / Je ne fais pas delien particulier entre prisonet féminité. Seulement, laprison est un point de vuelimite sur la féminité. La pri-son est un monde danslequel les règles sont régiespar des paramètres diffé-rents de ceux auxquels noussommes habitués.

Julie / Il faut redéfinir ce quevous entendez par « fémi-nité ». Mon travail en ce mo-ment interroge la manièredont on construit son iden-tité en tant que femme, demanière organique (porterun enfant, inciser sa peaupour rechercher son iden-tité) et sociale (se construireune image adéquate, …) Cen’est pas la « féminité » ausens « rester féminine pourse sentir bien », ou quelquechose dans ce genre-là. C’est plutôt poser laquestion de savoir si le masculin et le fémi-nin existent en dehors des limites du regardposé sur vous par la société – et, en prison,vous êtes en dehors de ces limites.

GENEPI / En quoi l’art peut-il œuvrer enfaveur de la féminité ? Marina / Il ne s’agit pas d’œuvrer pour une

cause ou une notion aussi complexe que laféminité. Je ne pense pas que l’art œuvrepour quoi que soit. Et c’est très bien commeça, je crois.

Julie / Je ne prétends pas faire œuvrer l’artpour la féminité, et je crois que tout art quis’en prévaudrait ferait une grosse erreur.Encore une fois, il faut redéfinir « féminité ».La féminité pour moi, ce sont des conditions

sociales et organiques, et il faut se demanderquelle part a le social et quelle part a l’orga-nique dans la définition féminin/masculin– ce n’est pas aussi déterminé qu’on le croit.Travailler sur ce qui fait femme comme ima-ge, ce n’est pas travailler sur la féminité, entout cas au sens commun; et ce n’est pas nonplus œuvrer pour la féminité. On a demandéà Louise Bourgeois si elle se reconnaissait

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dans le qualificatif d’artiste féministe ; elle arépondu qu’elle n’était pas féministe, qu’elletravaillait sur ce qu’elle connaissait, c’est-à-dire sa condition de femme. C’est exacte-ment ça ; j’interroge cette condition à traversmon travail sur les « cas-limites de féminité »,ça ne signifie pas que j’œuvre pour la fémi-nité. J’essaie juste de poser la question de lafemme en dehors des situations dans les-quelles la réponse serait pré-déterminéesocialement.

GENEPI / Comment envisagez-vous vos in-terventions ? Marina / Dans le cadre du projet WomenTheology, mon travail consisterait à propo-ser une recherche engagée par les femmesincarcérées elles-mêmes sur leur propreimage en tant que femme. La réalisationd’un autoportrait ou d’un portrait de femmeserait l’objectif de cet atelier autour duportrait. Le dessin implique une distanceavec son image réelle et une reconstructionligne par ligne, trait par trait. Du matérielserait mis à leur disposition : fusain, mine deplomb, crayon à papier ou encore encre deChine. Chacune serait invitée à choisir latechnique qui lui correspond. L’atelier seraitfondé sur l’expérimentation et la rechercheautour de leur propre perception de la fémi-nité au sein de l’univers carcéral. Le portraitserait alors abordé non pas nécessairementcomme un exercice figuratif, mais commeune recherche sur la conscience de leur visa-ge, de la peau, de leurs cheveux et des attri-buts qui les définissent en tant que femmes.Il s’agit réellement de mettre à plat leurimage et la perception qu’elles ont d’elles-mêmes en tant que femme sur une feuille depapier, ou tout support choisi par les partici-pantes. Dans le cadre d’un atelier d’écriture,le portrait serait alors une forme d’écrituredessinée de la féminité. L’autoportrait seraitsur la base du volontariat. Il s’agit, en effet,d’un exercice difficile engageant de manièreconsciente sa propre image. Les dessinsréalisés seront ensuite animés image parimage, trait par trait dans un ensemble de

vidéos d’animation. Sans dénaturer leur tra-vail, le portrait serait alors associé aux con-versations enregistrées lors des discussionsengendrées par la réalisation du dessin outout simplement par leurs histoires, leurstémoignages en tant qu’identités fémininesmises à mal par l’enfermement. Une voixviendrait amplifier le portrait dessiné et luidonner une nouvelle dimension. L’anima-tion image par image ne sera pas penséecomme une mise en mouvement externe duvisage dessiné mais comme une mise enmouvement interne. Le processus de fabri-cation de l’image serait retranscrit dans lejeu des intervalles entre les différentes éta-pes de création. Il s’agirait davantage dedécomposer le mouvement inhérent au tra-vail du dessin lui-même en tant que travaildu corps, de la main sur le papier pour reve-nir à la feuille blanche comme support deprojection d’une identité limite. Autrementdit, l’animation n’aurait pas lieu sur le dessinmais dans les marges, dans les intervalles, lesblancs et les vides laissés par la participante.L’image par image est, avant d’être un travailsur le mouvement, un travail sur des entitésimmobiles, qui, ensemble, forment un blocspatio-temporel, un bloc de durée : le tempsde la création du dessin en tant qu’expé-rience de mise à distance de sa propreimage.

Julie / Il s’agirait alors de monter un atelierautour du portrait, qu’il soit écrit, photogra-phique, ou dessiné ; de proposer aux fem-mes incarcérées de réaliser un portrait defemme, ce qu’elles perçoivent être un por-trait de femme. L’atelier offrirait alors, selonles séances, trois supports : un support écrit,pour lequel on pourra demander à toutesles participantes (y compris nous-mêmes)d’écrire un texte sur la manière dont elleperçoit sa féminité (cela pourra être uneanecdote, ou même le choix d’un mot) ; unsupport photographique, afin de réaliseravec la collaboration des détenues (choix dela composition, de ce qui se trouve dansl’image...) une série de portraits autour de ce

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que signifie être une femme, sans jamaismontrer un visage ; et un support vidéo, quiconsisterait en la réalisation de courts-mé-trages d’animation partant du thème duvisage de la femme, courts-métrages réalisésà partir des dessins réalisés par les femmesincarcérées, avec notre aide technique si elleest nécessaire (si elles désirent apprendre lesbases des proportions en dessin, la techni-que du fusain plutôt que du crayon...).

Pour ce qui est de ma partie, laphoto, je voudrais recourir à unprocédé que j’utilisais déjà dans desséries antérieures traitant de laféminité : le collodion humide. Latechnique du collodion humide, quidate de 1851, fut la première techni-que d’image photographique instan-tanée. La plaque de métal doit êtrerecouverte d’émulsion, sensibilisée àla lumière puis placée dans un châs-sis étanche. Elle doit impérativementêtre exposée et développée avant leséchage de la pellicule de collodionqui sert de médium aux sels d’argent,sinon celle-ci perd toute sensibilité àla lumière et tout développementdevient impossible. Il faut quelquesminutes pour sensibiliser la plaque,l’impressionner et la développer ;une fois la plaque développée etrincée, on peut la sortir à la lumière,et regarder l’image apparaître avec lemodèle. La majorité des photogra-phes au collodion humide procèdede cette manière, pour prolonger larelation avec son modèle, et lui permettre devoir sa propre image apparaître. Développerun processus durant lequel les femmesdétenues peuvent voir apparaître leur ima-ge permettrait d’aller au bout de la démar-che de construction de l’identité féminine.Le collodion, bien avant d’être utilisé enphotographie, était utilisé en chirurgie auXIXe siècle ; il permettait de créer uneseconde peau sur les blessures, afin de lesprotéger le temps que la véritable peau sereforme. Le collodion possède une di-men-

sion épidermique, une dimension de guéri-son.

Les images des détenues ainsiobtenues ne seront jamais montrées endehors de la prison. Leur image leur appar-tient ; leur visage leur appartient. La plaqueobtenue leur sera confiée, sans scannage. Àmoi de trouver le moyen de rendre ces visa-ges, ces visages dont je ne possède pasl’image, par une deuxième étape dans leprojet : une fois leur portrait réalisé, je vou-

drais, sans montrer leur visage cette fois, leurdemander de me donner quelque chose àphotographier qui, pour elles, signifie êtrefemme ; cela peut être un objet, ou un gestede la main, ou une mise en scène d’elles-mêmes, de dos par exemple. Les femmesdétenues construisent ainsi elles-mêmesleur image, tout en la préservant, paradoxa-lement.

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Le GENEPI est une associationestudiantine qui se donnepour but d’œuvrer en faveur

du décloisonnement des institu-tions carcérales par la circulationdes savoirs entre les personnesincarcérées, ses bénévoles et lasociété. Cet engagement va depair avec une conscience militantedes enjeux politiques liés à la jus-tice et au système pénitentiairefrançais. Chaque semaine, les bé-névoles du GENEPI écartent lesbarreaux de la prison pour recréerun lien entre la société et les per-sonnes détenues.

À l’intérieur des murs : enconcertation avec des personnesincarcérées, nous intervenons enmilieu carcéral pour organiser desateliers scolaires et culturels, eninsistant sur l’importance de l’hori-zontalité et la circulation des sa-voirs. Le but de cette démarche etde créer un « moment » hors de ladétention pour les personnesincarcérées afin que celles-ci puis-sent échanger avec les bénévolesqui représentent le monde exté-rieur. Les ateliers ont pour vocationd’engager une discussion entre les

bénévoles de l’extérieur et les per-sonnes qu’elles rencontrent en dé-tention. Ils peuvent aussi être à labase d’une création collective cu-lturelle ou artistique comme c’estle cas avec les œuvres de la collec-tion « Fleurs de rocaille » (peinture,dessins, textes, chansons…).

Chaque année, plus demille bénévoles interviennentdans 85 établissements péniten-tiaires en France. La priorité duGENEPI ces dernières années estd’ouvrir l’association aux person-nes incarcérées en leur permettantde devenir bénévoles de l’associa-tion. Nous cherchons à construiredes ponts entre l’intérieur etl’extérieur : l’adhésion de person-nes incarcérées à l’association estdonc une évidence. D’autant quenous militons pour une libertéd’expression effective en déten-tion : à l’heure actuelle, cette liber-té d’expression – pourtant inalié-nable – est trop peu respectée.Concrètement, cela nous permetégalement de mettre en place desateliers coanimés par un bénévolede l’extérieur et une personneprivée de sa liberté.

Qu’est-ce que le GENEPI ?

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Sur la place publique, les Génépis-tes militent pour le respect desdroits des personnes détenues etpour des conditions d’incarcé-ration dignes. Afin de rendre audi-bles leurs revendications auprèsdes élus mais aussi de la sociétécivile dans son ensemble, nousallons à la rencontre des citoyenslors d’évènements publics tout aulong de l’année. Les actions d’in-formation et de sensibilisation dupublic ont pour objectifs de sus-citer une prise de conscience sur laréalité de la prison en France et delancer des débats critiques etconstructifs sur les alternatives à ladétention. D’autre part, l’asso-ciation est également vigilante surtoutes les formes d’instrumen-talisation politique des thémati-ques sécuritaires.

Une association militante. La for-mation des bénévoles est unmoment privilégié pour approfon-dir certaines questions liées auxcontextes politique et judiciairedans lesquels l’action du GENEPIs’inscrit une année durant. Fortede sa longévité, l’association ras-semble des bénévoles qui ontconnu des expériences différentesà l’intérieur des lieux d’enferme-ment. Cette connaissance acquisepar l’expérience est mise en com-mun et formalisée au cours desrencontres nationales ou régiona-

les, moments d’échange et deréflexion sur la ligne qu’elle sou-haite développer d’une année surl’autre, parfois sur le plus longterme.

Cette année, il est questionde faire davantage participer lespersonnes incarcérées dans l’infor-mation que les bénévoles diffu-sent sur la prison, de rendreeffective la coanimation des ate-liers par les personnes incarcérées,d’aller à la rencontre des étrangersprivés de leur liberté dans lescentres de rétention adminis-trative.

Le GENEPI s’exprime régu-lièrement sur les thématiques pé-nales et carcérales qui fontl’actualité en usant de sa voixpolitique, en publiant des commu-niqués et des tribunes ou enanimant des émissions de radio.L’association participe égalementà la réflexion et à l’informationd’un public non professionnel surle monde carcéral à travers sarevue, le Passe-Murailles.

Pour plus d’informations,contacter

[email protected] ou [email protected]

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Le Guide, par Philippe G.

Vie, par Pierre L.

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Citron pressé, par Pierre L.

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