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Lucie Laplane (Univ. Paris 10), « Cellules souches et développement » Journée « frontières du développement » 04-12-2101 Introducti on ................................................................................................................................ 1 Frontière de début ...................................................................................................................... 3 Frontière de fin ........................................................................................................................... 4 Autres espèces ........................................................................................................................... 4 Conclusi on :................................................................................................................................ 5 Problèmes et perspecti ves : ........................................................................................................ 6 Introduction La qu estion rale est : quel le s sont le s fr onti èr es te mpor el le s et sp at ia le s du développement ? Ma présentation concerne les frontières temporelles : quand commence et quand s’achève le développement ? Mon angle d’approche est celui des cellules souches. Les cellules souches sont absolument essentielles au développement, elles représentent la source cellulaire à partir de laquelle se développent les organismes et, à l’intérieur des organismes, les organes et tissus qui les composent.  L es ce ll ules souches pe rmette nt -e ll es d’ as si gn er de s fr ontièr es te mpor el les au développement ? Les cellules souches sont essentiellemen t définies par leur capacité à l’auto-renouvellemen t et à la différenciation.  Néanmoins, ces deux propriétés ont fait l’objet de critiques. Toutes les cellules souches ne s’auto-renouvellent pas et les potentiels de différenciation peuvent fortement varier entre les cellules souches (totipotence 1 , pluripotence 2 , multipotence 3 , unipotence 4 ). Le concept de cellule souche recouvre donc un ensemble hétérogène et les cellules souches  peuvent être triées en fonction de différents critères : le potentiel de différenciation, l’auto- renouvellement mais aussi la vitesse de division (ou état de recrutement : à l’état stable les cellules souches sont généralement quiescentes et ne se divisent que très rarement, l’état recruté indique une forte activité mitotique). Potentiel de différenciation Auto-renouvellement V itesse de division (ou é tat de recrutement) - CS totipote ntes - CS pluripoten tes - CS multipot entes (ou tissus-spécifiques) - CS avec auto- renouvellement - CS sans auto- renouvellement - CS à division rapide (« recrutées ») - CS à division lente (« état stable ») 1 Les cellules souches totipotentes sont capables de produire toutes les cellules différenciées d’un organisme, ainsi que les cellules extra-embryonnair es. Ce sont les seules à permettre le développement complet d’un individu. 2 Les cellules souches pluripotentes sont capables de donner des cellules représentatives de tous les tissus de l’organisme mais pas les cellules extra-embryonnaires. 3 Les cellules souches multipotentes sont capable de donner naissance aux différents types cellulaires d’un tissu. On parle aussi de cellule souche tissu-spécifique. 4 Les cellules souches unipotentes ne peuvent produire qu’un seul type cellulaire. 1

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Lucie Laplane (Univ. Paris 10), « Cellules souches et développement »

Journée « frontières du développement »

04-12-2101

Introduction ................................................................................................................................1

Frontière de début ...................................................................................................................... 3Frontière de fin ...........................................................................................................................4Autres espèces ...........................................................................................................................4Conclusion :................................................................................................................................ 5Problèmes et perspectives : ........................................................................................................6

Introduction

La question générale est : quelles sont les frontières temporelles et spatiales dudéveloppement ? Ma présentation concerne les frontières temporelles : quand commence et quand s’achève ledéveloppement ?Mon angle d’approche est celui des cellules souches.Les cellules souches sont absolument essentielles au développement, elles représentent lasource cellulaire à partir de laquelle se développent les organismes et, à l’intérieur desorganismes, les organes et tissus qui les composent.

  Les cellules souches permettent-elles d’assigner des frontières temporelles audéveloppement ?

Les cellules souches sont essentiellement définies par leur capacité à l’auto-renouvellement età la différenciation.

 Néanmoins, ces deux propriétés ont fait l’objet de critiques. Toutes les cellules souches nes’auto-renouvellent pas et les potentiels de différenciation peuvent fortement varier entre lescellules souches (totipotence1, pluripotence2, multipotence3, unipotence4).Le concept de cellule souche recouvre donc un ensemble hétérogène et les cellules souches

 peuvent être triées en fonction de différents critères : le potentiel de différenciation, l’auto-renouvellement mais aussi la vitesse de division (ou état de recrutement : à l’état stable lescellules souches sont généralement quiescentes et ne se divisent que très rarement, l’étatrecruté indique une forte activité mitotique).

Potentiel de différenciation Auto-renouvellement Vitesse de division (ou étatde recrutement)

- CS totipotentes- CS pluripotentes- CS multipotentes (outissus-spécifiques)

- CS avec auto-renouvellement- CS sans auto-renouvellement

- CS à division rapide(« recrutées »)- CS à division lente (« étatstable »)

1 Les cellules souches totipotentes sont capables de produire toutes les cellules différenciéesd’un organisme, ainsi que les cellules extra-embryonnaires. Ce sont les seules à permettre ledéveloppement complet d’un individu.2 Les cellules souches pluripotentes sont capables de donner des cellules représentatives detous les tissus de l’organisme mais pas les cellules extra-embryonnaires.3

Les cellules souches multipotentes sont capable de donner naissance aux différents typescellulaires d’un tissu. On parle aussi de cellule souche tissu-spécifique.4 Les cellules souches unipotentes ne peuvent produire qu’un seul type cellulaire.

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- CS unipotentes (ou tissus-spécifiques) Les types de cellules souches définies ci-dessus présentent une répartition différentielle dansle temps, c'est-à-dire qu’elles sont présentes à des périodes précises de la vie de l’organisme.

Les courbes ci-dessous illustrent cette répartition différentielle en prenant le cas desmammifères (les humains, plus précisément, en ce qui concerne les indications temporelles).

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Le fait que l’on puisse distinguer entre des types de cellules souches exerçant chacun unefonction systémique propre et que ces types de cellules souches présentent une répartitiondifférentielle dans le temps offre un argument fort pour soutenir l’existence de frontièrestemporelles du développement chez tous les organismes disposant de cette répartition (et doncde ces types de cellules souches).

Les différences dans le  potentiel de différenciation et dans l’auto-renouvellement  présententdes frontières concomitantes :- le stade morula- le stade blastocysteEn revanche, la différence de vitesse de division, c'est-à-dire la différence dans le recrutementdes cellules souches ne fait apparaître qu’une seule frontière et plus tardive.L’analyse de ces trois partitions au regard du rôle des cellules souches dans l’ontogenèse

 permet de soutenir la thèse suivante concernant les frontières temporelles du développementchez ces organismes :

 Le développement commence au stade morula, quand toutes les cellules ne s’équivalent plus,

et s’achève à la fin de la mise en place de tous les types de cellules souches présents dansl’organisme adulte.

 NB : Pour donner une idée plus précise de cette seconde frontière : la fin du développementdevrait se situer au alentour du stade dit « phylotypique », stade auquel tous les tissus etorganes sont mis en place.

Frontière de début

L’alternative actuelle concernant les frontières du développement (le développement duretoute la vie vs le développement est fini à la maturité sexuelle) propose une seule et même

frontière de début : l’oeuf fécondé.Pourtant cette frontière n’est pas toujours évidente.Premièrement, elle pose problème concernant un certain nombre d’espèces, à générationasexuée notamment. Pour les espèces capables de génération par parthénogenèse pour lesquelles la fécondation de l’œuf n’est pas nécessaire et ne peut donc pas faire office de« début du développement » (e.g. l’abeille, le papillon, etc…). Pour les espèces capables degénération par fissiparité (e.g. l’hydre), il n’y a pas d’œuf à proprement parler et il est encore

 plus difficile d’identifier le début. Pour ces espèces, la question de la frontière temporelle dudébut est intimement liée à celle de la frontière spatiale de l’organisme [cf présentationThomas Pradeu].

Deuxièmement, même pour les organismes à génération sexuée, comme les mammifères, larépartition différentielle des cellules souches indique une autre frontière que la fécondation (cf courbes 1 et 2). Les premiers stades de division cellulaire, c'est-à-dire jusqu’à la morula,

  présentent des différences de caractéristiques (totipotence vs pluripotence) et decomportements (auto-renouvellement ou non) par rapport aux stades suivants (segmentation).

Conclusions :-   La question des frontières temporelles ne se limite pas à l’alternative classique

concernant la fin du développement. La question du début ne devrait pas être ignorée

ou trop vite considérée comme évidente.-  La question des frontières temporelles est concomitante à celle des frontières spatiales

en ce qui concerne le début du développement.

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Frontière de fin

Attribuer une frontière à la fin du développement est plus délicat :A) du fait du chevauchement entre les différents types de cellules souches. L’aspectdifférentiel de la répartition des types de cellules souches est graduel.B) Parce que la frontière différentielle liée à l’état de recrutement des cellules souches indique

une frontière différente par rapport aux répartitions liées à la potentialité et à l’auto-renouvellement.Dans tous les cas de répartition différentielle (1, 2 et 3), la frontière de fin apparaît à un stade

 précoce de la vie de l’organisme. Cela permet d’établir notre premier point : Les cellules souches indiquent des frontières du développement (début et fin) en contradiction

avec les deux thèses classiques : en ce qui concerne les cellules souches, le développement nedure pas toute la vie, mais il ne s’arrête pas non plus à maturité sexuelle . Les cellules souches peuvent être considérées comme un critère déterminant pour la questiondes frontières du développement parce qu’elles ont un rôle essentiel à la fois dans la

 production de l’organisme et dans la production des tissus et organes qui le composent et ce pendant toute la durée de vie de l’organisme.Plus précisément, l’histoire développementale des cellules souches qui mène des cellulessouches totipotentes aux cellules souches tissus-spécifiques (multi ou unipotentes) estabsolument nécessaire à l’élaboration de l’organisme. Ce dernier dépend, en tantqu’ « organisme », de la présence de tous les types de cellules tissus-spécifiques qui lui sont

 propres.Il y a une différence majeure entre les cellules souches tissus-spécifiques et les cellules toti et

 pluripotentes. Les cellules totipotentes et pluripotentes sont équivalentes entre elles : toutesles cellules souches totipotentes ont le même potentiel de différentiation et peuvent chacunedonner un organisme, il en va de même pour les cellules pluripotentes. En revanche, les

cellules souches tissus-spécifiques (multi ou unipotentes) sont, in vivo, absolument distinctesentres elles dans leur potentiel de différenciation.Exemple : les cellules souches hématopoïétiques peuvent se différencier en lymphocytes,granulocytes, érythrocytes, etc. mais pas en muscle. À l’inverse, les cellules satellites (cellulessouches musculaires) ne peuvent pas se différencier en lymphocytes5.Le développement de l’organisme nécessite donc la mise en place de tous les types de cellulessouches tissus-spécifiques qui lui sont propres.De ce fait, la frontière de la fin du développement indiquée par les cellules souches n’est pasexactement celle annoncée par la partition différentielle. En effet, la partition différentielleindique la mise en place des premières cellules souches tissus spécifiques alors que ce sont lesdernières formées qui nous intéressent.

Conclusion :Cela nous permet d’établir plus précisément la thèse du développement restreint :

  Le développement débute lorsque les dernières cellules totipotentes commencent à sedifférencier en cellules pluripotentes (morula) et finit, au plus tôt quand tous les types de

cellules souches tissus-spécifiques sont formés.

Autres espèces

Les distinctions entre les cellules souches en fonction de leur potentiel de différenciation, de

5 Je fais référence au potentiel in vivo, la transdifférenciation étant encore sujette à débat.

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leur auto-renouvellement et de leur vitesse de division ne s’appliquent pas à toutes les espèceset, pour un certain nombre d’espèces, les distinctions possibles entre cellules souches ne

 présentent pas les mêmes répartitions temporelles.

Dans certains organismes, les cellules souches conservent durant toute leur vie un fort

 potentiel de différenciation et un fort taux de recrutement, tout en maintenant la capacitéd’auto-renouvellement (e.g. les plantes).Pour ces espèces, les cellules souches ne permettent aucune délimitation temporelledéveloppementale et tendent à indiquer que le développement dure toute la vie.

Les cellules souches étant considérées comme un facteur essentiel (bien que non suffisant) audéveloppement, les espèces qui n’ont pas de cellules souches (e.g. les unicellulaires) ne

 peuvent pas se développer .

Les organismes capables de régénération (plus précisément de « régénération factultative » etnon de « régénération homéostatique » selon les expressions de Poss, 2010 ; cf. présentation

Michel Vervoort) présentent une répartition des types de cellules souches plus délicate car variable en fonction des critères, du temps et des espèces.Le recrutement des cellules souches est quantitativement plus variable que dans lesorganismes ne régénérant pas. La quantité de cellules souches recrutées peut être beaucoup

 plus élevée et les états « stable » vs « recruté » sont beaucoup plus instables. De ce fait larégénération semble présenter un pattern distinct.Cependant, il y a d’importantes différences entre les espèces capables de régénérer : par exemple, certaines espèces (e.g. l’hydre) conservent des cellules souches ayant des potentielsde différenciation très élevés (toti ou pluripotence), certaines espèces passent par des stades dedédifférenciation dans les blastèmes avant la régénération.La régénération recouvre des phénomènes très distincts du point de vue de l’activité descellules souches en fonction des espèces. La répartition des types des cellules souches n’est

 pas nécessairement la même dans toutes les espèces capables de régénérer (e.g. Salamandre vshydres). La régénération n’est donc pas un critère unifié pour déterminer les frontières dudéveloppement à travers les cellules souches. Il faut toujours se référer à l’espèce et àl’organisation spécifique des cellules souches.

 NB sur la régénération :Il est possible de considérer la régénération comme du développement. C’est ce quesoutiennent les partisans de la thèse du développement qui dure toute la vie. Mais cette thèse

 présente plusieurs problèmes (hormis ceux décrits précédemment) :

- La régénération présente des différences significatives par rapport au développement [cf  présentation Michel Vervoort]- Quand bien même la régénération serait une réactivation de mécanismes et/ou processusdéveloppementaux, on ne pourrait pas en conclure que le développement dure tout au long dela vie mais seulement « phasiquement » durant la vie (et chaque fois sur des périodes courtes).Par exemple, une salamandre qui ne perdrait pas de membre pendant sa vie et n’aurait pas

 besoin de mettre en route les mécanismes de régénération. Dans ce cas, son développementaurait pris fin à la fin de la mise en place de tous ses types de cellules souches tissus-spécifiques.

Conclusion :-   La question des frontières temporelles ne se limite pas à celle de la fin du

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développement, on peut également se demander quand commence le développement.

-  La perspective temporelle est parfois très proche de la perspective spatiale.

-  Les cellules souches offrent un critère applicable à tout le vivant pour déterminer les frontières temporelles du développement.

-  La répartition des cellules souches varie d’une espèce à l’autre et, de ce fait, il n’y a

 pas une réponse unique et ubiquitaire à la question des frontières temporelles dudéveloppement.

- Mais, pour chaque espèce, elle permet de répondre à la question des frontièrestemporelles du développement :

-  Plusieurs frontières temporelles sont possibles : le développement peut durer toute lavie, une période très courte (du stade morula jusqu’à la mise en place de toutes les

cellules souches tissus-spécifiques), voir pas du tout (les espèces sans cellules souches

ne se développent pas).

Problèmes et perspectives :

A) Les cellules souches sont un élément central et absolument nécessaire au développement.Mais elles ne sont pas suffisantes. Le développement est un concept large et peu défini. Par conséquent, il semble toujours possible d’objecter que d’autres frontières seraient possibles à

 partir d’autres critères.B) Ces frontières reposent sur un certain déterminisme génétique : tout se passe comme si ladifférenciation finale, c'est-à-dire celle des cellules non souches, était « programmée ».C) Ces frontières reposent sur une définition typologique et essentialiste des cellules souches.

Objection A :Une difficulté majeure de l’attribution de frontières temporelles au développement provient

du manque de définition rigoureuse de ce que recouvre le développement. De plus, il y a unecertaine circularité entre la délimitation temporelle du développement et sa définition :délimiter le développement, c’est aussi le définir et vice-versa. Par quoi faut-il commencer ?sur quoi peut-on/doit-on s’appuyer ?Les cellules souches sont considérées comme un facteur indispensable du développement. Ence sens, elles présentent un critère minimal.

  Par conséquent, le développement ne peut pas durer moins longtemps que la période

minimale indiquée par le développement des cellules souches.Peut-il durer plus longtemps ?La définition du développement est vague. En particulier, il y a un écart important entre lesens commun du développement et le concept de développement véhiculé par la biologie du

développement (anciennement nommée embryologie).Les frontières du développement présentées par les cellules souches donnent une définition dudéveloppement proche de celle de la biologie du développement mais très éloignée du senscommun.Proche de la biologie du développement : parce que concomitant avec les notions de mise en

 place du « plan d’organisation » et de « ségrégation des lignages cellulaires ».Lointain du sens commun : parce que le développement peut s’arrêter avant la naissance pour certaines espèces.D’après les partisans du développement qui dure toute la vie, le développement est défini par tous les types de changements subis par l’organisme au cours de sa vie, toute différencequantitative comprise. Cette définition reviendrait à définir toute la biologie comme de la

 biologie du développement. Une définition aussi vaste est peu opérationnelle.Les cellules souches offrent une définition beaucoup plus précise mais aussi beaucoup plus

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restreinte. En particulier le critère de cellule souche exclut la croissance du développement.Croissance et développement sont, au regard de la biologie du développement, deux conceptsdifférents.Piste possible : pour accorder les différentes conceptions du développement, il serait possiblede conserver une définition vaste et vague du développement et de distinguer, à l’intérieur, des

types distincts de développement définis par des mécanismes et/ou processus précis. Danscette perspective, le développement défini par les cellules souches serait un type dedéveloppement que l’on pourrait appeler le développement ségrégatif, par exemple.

Objection B :L’objection B porte sur l’idée d’un déroulement déterminé qui mènerait des cellules souchestissus-spécifiques aux cellules différenciées du tissu en question.Les biologistes justifient cette idée par la capacité, maintes fois démontrée, d’une seule cellulesouche à reformer son tissu in vivo (e.g. le système hématopoïétique).Une autre façon de répondre à cette objection serait de dire qu’il peut y avoir d’une part desfacteurs épigénétiques, d’autre part des facteurs extrinsèques (environnementaux au sens

large) présents à chaque génération qui rendent possible cette différenciation.Que les facteurs nécessaires à la différenciation et à la ségrégation soient génétiques,épigénétiques ou environnementaux ne perturbe pas la façon dont les cellules souchesétablissent des frontières temporelles.

Objection C :L’objection C repose sur l’existence présupposée d’une différence de type entre les cellulessouches et les cellules non souches et entre les différents types de cellules souches.C’est l’objection la plus forte à l’utilisation des cellules souches comme critèred’identification de frontières temporelles. Les frontières temporelles dépendent de larépartition des types de cellules souches et reposent donc sur la définition de ses types et sur la possibilité de les distinguer.Or, la définition des cellules souches pose aujourd’hui un certain nombre de problèmes.Premièrement, les cellules souches multipotentes échappent toujours à la caractérisationmoléculaire. Deuxièmement, les critères de définition fonctionnelle sont de plus en plussouvent critiqués. Ces deux points ont mené un ensemble de chercheurs à défendre le conceptd’un caractère souche, plus ou moins indépendant de la cellule porteuse, contre le conceptessentialiste de cellule souche (Zipori en particulier).Piste et perspective :Il faudrait réexaminer la question en définissant le caractère souche comme une propriétédispositionnelle d’un système.

Dans ce cadre, il est possible que la définition spatiale de l’organisme en développement soitdéterminante dans l’établissement des frontières temporelles. Il est possible, notamment, queces frontières spatiales changent au cours du temps : les différents types cellulaires seraientdes propriétés dispositionnelles de systèmes différents.

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