58
Cet ouvrage a été expliqué litéralement et annoté par M. F. de Parnajon, qui a également revu et corrigé la traduction française de M. J. Lagrange. Le texte latin est celui du recueil publié par M. C. Poyard. Félix Achille de Parnajon est né à Fécamp (alors Seine-Inférieure) le c janvier 1X2c et est décédé à Paris le 1X décembre 1c12. Fils de Dominique Couillard et d’Adélaïde de Parnajon, il est autorisé à s’appeler de Parnajon par décision du tribunal civil du Havre en date du 25 octobre 1X5X. Élève de l’École normale supérieure de 1X4M à 1X50, il est agrégé de grammaire en 1X50. Il a été professeur de sixième au lycée de Rouen de 1X50 à 1X52, de sixième au lycée d’Amiens de 1X52 à 1X53, de cinquième au lycée Henri IV de 1X53 à 1X54, de quatrième au lycée Henri IV de 1X54 à 1XX2, au moins. Il est nommé cevalier de la Légion d’honneur le 13 juillet 1XX2. Il mourut à l’âge de X3 ans à Paris-1Be, 21, rue Vital. Son épouse Césarine Méhala née le 20 janvier 1X3B, était décédée le 30 novembre 1c02 à Paris-1Be. Joseph Lagrange (orthographié à l’époque La Grange) est né à Paris en 1M3X et y est décédé le 1X octobre 1MM5. Bien que d’origine pauvre, il re- çut une solide formation ; une bourse d’études lui permetant de poursuivre ses études, il devient Maître ès arts au collège de Beauvais (Paris, 1M5M). Désigné, par la suite, comme précepteur des enfants du baron d’Holbac, il y entra en contact avec les encyclopédistes — c’est notamment sur les conseils de Diderot qu’il aurait traduit Lucrèce (Lucrèce. Traduction nou- velle, avec des notes, par M. L* G**, Paris, 1MBX, 2 tomes, souvent rééditée) et Sénèque — traductions « élégantes et assez dèles ». (M. N. Bouillet, L.-G. Gourraigne, Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, 1Xc3, p. 1023). — Pour metre en valeur ce style élégant, le texte original de 1MBX a été restitué dans la présente édition, sauf en raison de la correspondance avec le texte latin révisé, ou en cas d’erreur manifeste. Albert Henri Constant Poyard est né à Paris le 11 mai 1X2B et y est décéde le 1X mai 1c0c. Reçu à l’École normale supérieure en 1X4B, il est agrégé des letres en 1X4c. Il a été professeur de rhétorique au lycée de Vendôme (1X4c), au lycée de Grenoble (1X52), de troisième au lycée Henri IV (1X54), de seconde (1X55), de rhétorique (dès 1XM3). En 1XBc il fut désigné précepteur du prince impérial. Il est nommé cevalier de la Légion d’honneur le 14 novembre 1XM4, promu ocier le 10 janvier 1Xc4.

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Cet ouvrage a eacuteteacute expliqueacute litteacuteralement et annoteacute parM F de Parnajon qui a eacutegalement revu et corrigeacute la traductionfranccedilaise de M J Lagrange Le texte latin est celui du recueil publieacutepar M C Poyard

Feacutelix Achille de Parnajon est neacute agrave Feacutecamp (alors Seine-Infeacuterieure) le9 janvier 1829 et est deacuteceacutedeacute agrave Paris le 18 deacutecembre 1912 Fils de DominiqueCouillard et drsquoAdeacutelaiumlde de Parnajon il est autoriseacute agrave srsquoappeler de Parnajonpar deacutecision du tribunal civil du Havre en date du 25 octobre 1858 Eacutelegravevede lrsquoEacutecole normale supeacuterieure de 1847 agrave 1850 il est agreacutegeacute de grammaireen 1850 Il a eacuteteacute professeur de sixiegraveme au lyceacutee de Rouen de 1850 agrave 1852 desixiegraveme au lyceacutee drsquoAmiens de 1852 agrave 1853 de cinquiegraveme au lyceacutee Henri IVde 1853 agrave 1854 de quatriegraveme au lyceacutee Henri IV de 1854 agrave 1882 au moinsIl est nommeacute chevalier de la Leacutegion drsquohonneur le 13 juillet 1882 Il mourutagrave lrsquoacircge de 83 ans agrave Paris-16e 21 rue Vital Son eacutepouse Ceacutesarine Meacutehalaneacutee le 20 janvier 1836 eacutetait deacuteceacutedeacutee le 30 novembre 1902 agrave Paris-16e

Joseph Lagrange (orthographieacute agrave lrsquoeacutepoque La Grange) est neacute agrave Parisen 1738 et y est deacuteceacutedeacute le 18 octobre 1775 Bien que drsquoorigine pauvre il re-ccedilut une solide formation une bourse drsquoeacutetudes lui permettant de poursuivreses eacutetudes il devient Maicirctre egraves arts au collegravege de Beauvais (Paris 1757)Deacutesigneacute par la suite comme preacutecepteur des enfants du baron drsquoHolbachil y entra en contact avec les encyclopeacutedistes mdash crsquoest notamment sur lesconseils de Diderot qursquoil aurait traduit Lucregravece (Lucregravece Traduction nou-velle avec des notes par M L G Paris 1768 2 tomes souvent reacuteeacutediteacutee)et Seacutenegraveque mdash traductions laquo eacuteleacutegantes et assez fidegraveles raquo (M N BouilletL-G Gourraigne Dictionnaire universel drsquohistoire et de geacuteographie 1893p 1023) mdash Pour mettre en valeur ce style eacuteleacutegant le texte original de 1768a eacuteteacute restitueacute dans la preacutesente eacutedition sauf en raison de la correspondanceavec le texte latin reacuteviseacute ou en cas drsquoerreur manifeste

Albert Henri Constant Poyard est neacute agrave Paris le 11 mai 1826 et yest deacuteceacutede le 18 mai 1909 Reccedilu agrave lrsquoEacutecole normale supeacuterieure en 1846 ilest agreacutegeacute des lettres en 1849 Il a eacuteteacute professeur de rheacutetorique au lyceacuteede Vendocircme (1849) au lyceacutee de Grenoble (1852) de troisiegraveme au lyceacuteeHenri IV (1854) de seconde (1855) de rheacutetorique (degraves 1873) En 1869 ilfut deacutesigneacute preacutecepteur du prince impeacuterial Il est nommeacute chevalier de laLeacutegion drsquohonneur le 14 novembre 1874 promu officier le 10 janvier 1894

Il mourut agrave lrsquoacircge de 83 ans agrave Paris-6e 14 rue de Tournon Il eacutetait marieacute agraveEugeacutenie de Regardin M Poyard a composeacute nombre de traductions souventreacuteeacutediteacutees dont celles de Pindare (1851) et de Deacutemosthegravene (1905) ont eacuteteacutecouronneacutees par lrsquoAcadeacutemie franccedilaise Le recueil mentionneacute ci-dessus estLucregravece Morceaux choisis publieacutes avec une notice des analyses des reacutesumeacutes etdes notes en franccedilais Paris 1867

Le texte de lrsquoeacutedition originale (1880 [= 1868 avec corrections])parue chez Hachette a eacuteteacute numeacuteriseacute leacutegegraverement modifieacute et recom-poseacute avec TEX en Linux Lrsquoimage p 2 vient de eacutedition deJoseph Lagrange Op cit exemplaire de la Bibliothegraveque municipale de Lyonhttpsnumelyobmndashlyonfrf viewBMLBML 00GOO0100137001102551178IMG00000034

Le texte les traductions de cet ouvrage ont eacuteteacute revus et corrigeacutespar Mark De Wilde

Publieacute par Geacuterard Greacuteco sur httpgerardgrecofreefr

copy Mark De Wilde 2021

Version 300 du 25 septembre 2021

Tous droits reacuteserveacutes Il est toleacutereacute drsquoutiliser ce document dans un cadrescolaire ou universitaire ou personnel sans but lucratif La diffusion mecircmeeacutelectronique de ce document nrsquoest pas autoriseacutee

La recomposition de cet ouvrage est baseacutee sur les travaux dePetr Březina concernant la composition bilingue et plurilingue publieacutesdans le bulletin du Groupe tcheacutecoslovaque des utilisateurs de TEX anneacutee2008 numeacutero 4 ISSN 1211-6661 et preacutesenteacutes au public francophone danslrsquoarticle laquo Eacuteditions bilingues et TEXraquo qui est librement disponible sur sonsite web

httpswebarchiveorgweb20130512105242httpwwwvolnyczpetr-brezinalibellibilinguepdf

1017 mdash Imprimerie A Lahure rue de Fleurus 9 agrave Paris

Cet ouvrage a eacuteteacute expliqueacute litteacuteralement et annoteacute parM F de Parnajon qui a eacutegalement revu et corrigeacute la traductionfranccedilaise de M J Lagrange Le texte latin est celui du recueil publieacutepar M C Poyard

Feacutelix Achille de Parnajon est neacute agrave Feacutecamp (alors Seine-Infeacuterieure) le9 janvier 1829 et est deacuteceacutedeacute agrave Paris le 18 deacutecembre 1912 Fils de DominiqueCouillard et drsquoAdeacutelaiumlde de Parnajon il est autoriseacute agrave srsquoappeler de Parnajonpar deacutecision du tribunal civil du Havre en date du 25 octobre 1858 Eacutelegravevede lrsquoEacutecole normale supeacuterieure de 1847 agrave 1850 il est agreacutegeacute de grammaireen 1850 Il a eacuteteacute professeur de sixiegraveme au lyceacutee de Rouen de 1850 agrave 1852 desixiegraveme au lyceacutee drsquoAmiens de 1852 agrave 1853 de cinquiegraveme au lyceacutee Henri IVde 1853 agrave 1854 de quatriegraveme au lyceacutee Henri IV de 1854 agrave 1882 au moinsIl est nommeacute chevalier de la Leacutegion drsquohonneur le 13 juillet 1882 Il mourutagrave lrsquoacircge de 83 ans agrave Paris-16e 21 rue Vital Son eacutepouse Ceacutesarine Meacutehalaneacutee le 20 janvier 1836 eacutetait deacuteceacutedeacutee le 30 novembre 1902 agrave Paris-16e

Joseph Lagrange (orthographieacute agrave lrsquoeacutepoque La Grange) est neacute agrave Parisen 1738 et y est deacuteceacutedeacute le 18 octobre 1775 Bien que drsquoorigine pauvre il re-ccedilut une solide formation une bourse drsquoeacutetudes lui permettant de poursuivreses eacutetudes il devient Maicirctre egraves arts au collegravege de Beauvais (Paris 1757)Deacutesigneacute par la suite comme preacutecepteur des enfants du baron drsquoHolbachil y entra en contact avec les encyclopeacutedistes mdash crsquoest notamment sur lesconseils de Diderot qursquoil aurait traduit Lucregravece (Lucregravece Traduction nou-velle avec des notes par M L G Paris 1768 2 tomes souvent reacuteeacutediteacutee)et Seacutenegraveque mdash traductions laquo eacuteleacutegantes et assez fidegraveles raquo (M N BouilletL-G Gourraigne Dictionnaire universel drsquohistoire et de geacuteographie 1893p 1023) mdash Pour mettre en valeur ce style eacuteleacutegant le texte original de 1768a eacuteteacute restitueacute dans la preacutesente eacutedition sauf en raison de la correspondanceavec le texte latin reacuteviseacute ou en cas drsquoerreur manifeste

Albert Henri Constant Poyard est neacute agrave Paris le 11 mai 1826 et yest deacuteceacutede le 18 mai 1909 Reccedilu agrave lrsquoEacutecole normale supeacuterieure en 1846 ilest agreacutegeacute des lettres en 1849 Il a eacuteteacute professeur de rheacutetorique au lyceacuteede Vendocircme (1849) au lyceacutee de Grenoble (1852) de troisiegraveme au lyceacuteeHenri IV (1854) de seconde (1855) de rheacutetorique (degraves 1873) En 1869 ilfut deacutesigneacute preacutecepteur du prince impeacuterial Il est nommeacute chevalier de laLeacutegion drsquohonneur le 14 novembre 1874 promu officier le 10 janvier 1894

Il mourut agrave lrsquoacircge de 83 ans agrave Paris-6e 14 rue de Tournon Il eacutetait marieacute agraveEugeacutenie de Regardin M Poyard a composeacute nombre de traductions souventreacuteeacutediteacutees dont celles de Pindare (1851) et de Deacutemosthegravene (1905) ont eacuteteacutecouronneacutees par lrsquoAcadeacutemie franccedilaise Le recueil mentionneacute ci-dessus estLucregravece Morceaux choisis publieacutes avec une notice des analyses des reacutesumeacutes etdes notes en franccedilais Paris 1867

Le texte de lrsquoeacutedition originale (1880 [= 1868 avec corrections])parue chez Hachette a eacuteteacute numeacuteriseacute leacutegegraverement modifieacute et recom-poseacute avec TEX en Linux Lrsquoimage p 2 vient de eacutedition deJoseph Lagrange Op cit exemplaire de la Bibliothegraveque municipale de Lyonhttpsnumelyobmndashlyonfrf viewBMLBML 00GOO0100137001102551178IMG00000034

Le texte les traductions de cet ouvrage ont eacuteteacute revus et corrigeacutespar Mark De Wilde

Publieacute par Geacuterard Greacuteco sur httpgerardgrecofreefr

copy Mark De Wilde 2021

Version 300 du 25 septembre 2021

Tous droits reacuteserveacutes Il est toleacutereacute drsquoutiliser ce document dans un cadrescolaire ou universitaire ou personnel sans but lucratif La diffusion mecircmeeacutelectronique de ce document nrsquoest pas autoriseacutee

La recomposition de cet ouvrage est baseacutee sur les travaux dePetr Březina concernant la composition bilingue et plurilingue publieacutesdans le bulletin du Groupe tcheacutecoslovaque des utilisateurs de TEX anneacutee2008 numeacutero 4 ISSN 1211-6661 et preacutesenteacutes au public francophone danslrsquoarticle laquo Eacuteditions bilingues et TEXraquo qui est librement disponible sur sonsite web

httpswebarchiveorgweb20130512105242httpwwwvolnyczpetr-brezinalibellibilinguepdf

1017 mdash Imprimerie A Lahure rue de Fleurus 9 agrave Paris

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 2: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

Cet ouvrage a eacuteteacute expliqueacute litteacuteralement et annoteacute parM F de Parnajon qui a eacutegalement revu et corrigeacute la traductionfranccedilaise de M J Lagrange Le texte latin est celui du recueil publieacutepar M C Poyard

Feacutelix Achille de Parnajon est neacute agrave Feacutecamp (alors Seine-Infeacuterieure) le9 janvier 1829 et est deacuteceacutedeacute agrave Paris le 18 deacutecembre 1912 Fils de DominiqueCouillard et drsquoAdeacutelaiumlde de Parnajon il est autoriseacute agrave srsquoappeler de Parnajonpar deacutecision du tribunal civil du Havre en date du 25 octobre 1858 Eacutelegravevede lrsquoEacutecole normale supeacuterieure de 1847 agrave 1850 il est agreacutegeacute de grammaireen 1850 Il a eacuteteacute professeur de sixiegraveme au lyceacutee de Rouen de 1850 agrave 1852 desixiegraveme au lyceacutee drsquoAmiens de 1852 agrave 1853 de cinquiegraveme au lyceacutee Henri IVde 1853 agrave 1854 de quatriegraveme au lyceacutee Henri IV de 1854 agrave 1882 au moinsIl est nommeacute chevalier de la Leacutegion drsquohonneur le 13 juillet 1882 Il mourutagrave lrsquoacircge de 83 ans agrave Paris-16e 21 rue Vital Son eacutepouse Ceacutesarine Meacutehalaneacutee le 20 janvier 1836 eacutetait deacuteceacutedeacutee le 30 novembre 1902 agrave Paris-16e

Joseph Lagrange (orthographieacute agrave lrsquoeacutepoque La Grange) est neacute agrave Parisen 1738 et y est deacuteceacutedeacute le 18 octobre 1775 Bien que drsquoorigine pauvre il re-ccedilut une solide formation une bourse drsquoeacutetudes lui permettant de poursuivreses eacutetudes il devient Maicirctre egraves arts au collegravege de Beauvais (Paris 1757)Deacutesigneacute par la suite comme preacutecepteur des enfants du baron drsquoHolbachil y entra en contact avec les encyclopeacutedistes mdash crsquoest notamment sur lesconseils de Diderot qursquoil aurait traduit Lucregravece (Lucregravece Traduction nou-velle avec des notes par M L G Paris 1768 2 tomes souvent reacuteeacutediteacutee)et Seacutenegraveque mdash traductions laquo eacuteleacutegantes et assez fidegraveles raquo (M N BouilletL-G Gourraigne Dictionnaire universel drsquohistoire et de geacuteographie 1893p 1023) mdash Pour mettre en valeur ce style eacuteleacutegant le texte original de 1768a eacuteteacute restitueacute dans la preacutesente eacutedition sauf en raison de la correspondanceavec le texte latin reacuteviseacute ou en cas drsquoerreur manifeste

Albert Henri Constant Poyard est neacute agrave Paris le 11 mai 1826 et yest deacuteceacutede le 18 mai 1909 Reccedilu agrave lrsquoEacutecole normale supeacuterieure en 1846 ilest agreacutegeacute des lettres en 1849 Il a eacuteteacute professeur de rheacutetorique au lyceacuteede Vendocircme (1849) au lyceacutee de Grenoble (1852) de troisiegraveme au lyceacuteeHenri IV (1854) de seconde (1855) de rheacutetorique (degraves 1873) En 1869 ilfut deacutesigneacute preacutecepteur du prince impeacuterial Il est nommeacute chevalier de laLeacutegion drsquohonneur le 14 novembre 1874 promu officier le 10 janvier 1894

Il mourut agrave lrsquoacircge de 83 ans agrave Paris-6e 14 rue de Tournon Il eacutetait marieacute agraveEugeacutenie de Regardin M Poyard a composeacute nombre de traductions souventreacuteeacutediteacutees dont celles de Pindare (1851) et de Deacutemosthegravene (1905) ont eacuteteacutecouronneacutees par lrsquoAcadeacutemie franccedilaise Le recueil mentionneacute ci-dessus estLucregravece Morceaux choisis publieacutes avec une notice des analyses des reacutesumeacutes etdes notes en franccedilais Paris 1867

Le texte de lrsquoeacutedition originale (1880 [= 1868 avec corrections])parue chez Hachette a eacuteteacute numeacuteriseacute leacutegegraverement modifieacute et recom-poseacute avec TEX en Linux Lrsquoimage p 2 vient de eacutedition deJoseph Lagrange Op cit exemplaire de la Bibliothegraveque municipale de Lyonhttpsnumelyobmndashlyonfrf viewBMLBML 00GOO0100137001102551178IMG00000034

Le texte les traductions de cet ouvrage ont eacuteteacute revus et corrigeacutespar Mark De Wilde

Publieacute par Geacuterard Greacuteco sur httpgerardgrecofreefr

copy Mark De Wilde 2021

Version 300 du 25 septembre 2021

Tous droits reacuteserveacutes Il est toleacutereacute drsquoutiliser ce document dans un cadrescolaire ou universitaire ou personnel sans but lucratif La diffusion mecircmeeacutelectronique de ce document nrsquoest pas autoriseacutee

La recomposition de cet ouvrage est baseacutee sur les travaux dePetr Březina concernant la composition bilingue et plurilingue publieacutesdans le bulletin du Groupe tcheacutecoslovaque des utilisateurs de TEX anneacutee2008 numeacutero 4 ISSN 1211-6661 et preacutesenteacutes au public francophone danslrsquoarticle laquo Eacuteditions bilingues et TEXraquo qui est librement disponible sur sonsite web

httpswebarchiveorgweb20130512105242httpwwwvolnyczpetr-brezinalibellibilinguepdf

1017 mdash Imprimerie A Lahure rue de Fleurus 9 agrave Paris

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 3: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 4: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōre

LES

AUTEURS LATINSEXPLIQUEacuteS DrsquoAPREgraveS UNE MEacuteTHODE NOUVELLE

PAR DEUX TRADUCTIONS FRANCcedilAISESLrsquoUNE LITTEacuteRALE ET JUXTALINEacuteAIRE PREacuteSENTANT LE MOT Agrave MOT

FRANCcedilAISEN REGARD DES MOTS LATINS CORRESPONDANTSLrsquoAUTRE CORRECTE ET PREacuteCEacuteDEacuteE DU TEXTE LATIN

avec des arguments et des notes

PAR UNE SOCIEacuteTEacute DE PROFESSEURS

ET DE LATINISTES

LUCREgraveCEMORCEAUX CHOISIS

Paris2021

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 5: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 6: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

AV I S

RELATIF Agrave LA TRADUCTION JUXTALINEacuteAIRE

On a reacuteuni par des traits les mots franccedilais qui traduisent un seulmot latin

On a imprimeacute en italique les mots qursquoil eacutetait neacutecessaire drsquoajouterpour rendre intelligible la traduction litteacuterale et qui nrsquoont pas leureacutequivalent dans le latin

Enfin les mots placeacutes entre parenthegraveses dans le franccedilais doiventecirctre consideacutereacutes comme une seconde explication plus intelligible quela version litteacuterale

ARGUMENT ANALYTIQUE

des morceaux extraits du livre premier

1 Invocation agrave Veacutenus mdash Lucregravece ceacutelegravebre la puissance de Veacutenus illa supplie drsquoaccorder aux Romains les douceurs de la paix et agrave lui-mecircmeles loisirs neacutecessaires pour chanter les merveilles de la nature

2 La Superstition mdash La Superstition a longtemps voileacute la veacuteriteacute etpousseacute les mortels aux excegraves les plus cruels Eacutepicure nous a deacutelivreacutes dece joug odieux

3 Tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit mdash La vie ne peut sortirdu neacuteant mais aussi elle ne peut rentrer dans le neacuteant La Natureau lieu de srsquoeacutepuiser en creacuteations nouvelles combine drsquoune maniegraverediffeacuterente les eacuteleacutements que la mort seacutepare

4 Des corps invisibles mdash Les atomes sont invisibles mais il nrsquoy apas lieu de srsquoen eacutetonner puisque certains corps mecircmes comme le ventdont lrsquoexistence est attesteacutee par de terribles ravages eacutechappent agrave nosregards

5 Le feu nrsquoest pas le principe du monde Eacuteloge drsquoEmpeacutedocle mdashLucregravece reacutefute la doctrine drsquoHeacuteraclite qui veut que le feu soit lrsquoeacuteleacutementunique de lrsquounivers il reacutefute eacutegalement les systegravemes des autres phi-losophes qui preacutetendent que la terre ou lrsquoeau ou lrsquoair ou ces deuxeacuteleacutements combineacutes sont le principe de lrsquounivers

6 La poeacutesie au service de la veacuteriteacute mdash Lucregravece explique pourquoiil a revecirctu son aride sujet des charmes de la poeacutesie

7 Les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur vers lecentre du monde mdash Lucregravece nrsquoadmet pas lrsquoattraction centrale selonlui lrsquoadheacutesion des ecirctres au sol doit ecirctre attribueacutee agrave une seacuterie de chocsproduits par des principes mateacuteriels exteacuterieurs agrave notre systegraveme terrestreEn conseacutequence il nie que les antipodes soient habiteacutes Il combat aussilrsquoopinion qui veut que seules lrsquoeau et la terre tendent vers le centretandis que le feu et lrsquoair srsquoen eacutecartent en donnant un raisonnement exabsurdo un feu centrifuge impliquerait la destruction immeacutediate dumonde

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 7: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 8: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER1 mdash invocation agrave veacutenus

(V 1-9 21-43)

AEligneadum genetrīx 1 hominum Dīvumque voluptāsAlma Venus caeliglī subter lābentia signaQuaelig mare nāvigerum quaelig terrās frūgiferentīsConcelebrās per tē quoniam genus omne animantumConcipitur vīsitque exortum lūmina sōlis 5Tē Dea tē fugiunt ventī tē nūbila caeliglīAdventumque tuum tibi suāvīs daeligdala tellūsSummittit flōrēs tibi rīdent aeligquora pontīPlācātumque nitet diffūsō lūmine caeliglum 9

Quaelig quoniam rērum nātūram sōla gubernās 21Nec sine tē quicquam dīās in lūminis ōrās

1Megravere des Romains charme des hommes et des dieux ocirc Veacutenus

ocirc deacuteesse bienfaisante du haut de la voucircte eacutetoileacutee tu reacutepands lafeacuteconditeacute sur les mers qui portent les navires sur les terres quidonnent les moissons Crsquoest par toi que les animaux de toute espegravecesont conccedilus et ouvrent leurs yeux agrave la lumiegravere Tu parais et lesvents srsquoenfuient les nuages sont dissipeacutes la terre deacuteploie la varieacuteteacutede ses tapis lrsquoOceacutean prend une face riante le ciel devenu sereinreacutepand au loin la plus vive splendeur

hellip Puisque tu es lrsquounique souveraine de la Nature la creacuteatrice desecirctres la source des gracircces et du plaisir daigne ocirc Veacutenus trsquoassocier

MORCEAUX CHOISIS

DE LUCREgraveCE

LIVRE PREMIER

1 mdash invocation agrave veacutenus

Genetrīx AEligneadum Megravere des descendants-drsquo-Eacuteneacuteevoluptās volupteacutehominum dīvumque des hommes et des dieuxVenus alma Veacutenus nourriciegraverequaelig subter toi qui soussigna caeliglī lābentia les astres du ciel opeacuterant-leur-reacutevolutionconcelebrās peuples (remplis abondamment de vie)mare nāvigerum la mer qui-porte-des-naviresquaelig toi qui peuplesterrās frūgiferentīs les terres qui-portent-des-grains quoniam omne genus puisque toute espegraveceanimantum drsquoecirctres-animeacutesconcipitur per tē est conccedilue par toiexortumque vīsit et eacutetant neacutee voit par toilūmina sōlis les lumiegraveres (la lumiegravere) du soleil ventī Dea les vents deacuteessefugiunt tē tē fuient toi toinūbila caeliglī tē les nuages du ciel fuient toituumque adventum et ton arriveacutee tellūs daeligdala la terre qui-faccedilonne-avec-artsummittit tibi envoie-de-dessous pour toi (fait naicirctre sous

[tes pas)flōrēs suāvīs des fleurs suaves aeligquora pontī les plaines de la merrīdent tibi rient pour toi (agrave ton approche) caeliglumque plācātum nitet et le ciel apaiseacute brillelūmine diffūsō drsquoune lumiegravere reacutepandue-en-tous-senshellip hellip

Quaelig quoniam Laquelle puisque (puisque toi)sōla gubernās seule tu gouvernesnātūram rērum la nature des chosesnec quicquam exoritur et que rien ne naicirct

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

Page 9: Cet ouvrage a été expliqué ... - gerardgreco.free.fr

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

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8 LUCREgraveCE

Exoritur neque fit laeligtum neque amābile quicquam Tē sociam studeō scrībendīs versibus esseQuōs ego dē rērum nātūrā 1 pangere cōnor 25Memmiadaelig 2 nostrō quem tū Dea tempore in omnīOmnibus ōrnātum voluistī excellere rēbus Quō magis aeligternum dā dictīs Dīva lepōrem

Effice ut intereā fera mœnera 3 mīlitiāī 4

Per maria ac terrās omnīs sōpīta quiēscant 30Nam tū sōla potes tranquillā pāce juvāreMortālīs quoniam bellī fera mœnera MāvorsArmipotēns regit in gremium quī saeligpe tuum sēRējicit aeligternō dēvictus vulnere amōrisAtque ita suspiciēns teretī cervīce repostā 5 35Pāscit amōre avidōs inhiāns in tē Dea vīsūsĒque tuō pendet resupīnī spīritus ōreHunc tū Dīva tuō recubantem corpore sānctō

agrave mon travail et mrsquoinspirer ce Poegraveme sur la Nature Je le consacre agravece Memmius que tu as orneacute en tout temps de tes dons les plus rareset qui nous est eacutegalement cher agrave tous deux Crsquoest en sa faveur queje te demande pour mes vers un charme qui ne se fleacutetrisse jamais

Cependant assoupis et suspends sur la terre et lrsquoonde les fureursde la guerre Toi seule peux faire goucircter aux mortels les douceurs dela paix Du sein des alarmes le dieu des batailles se rejette dans tesbras Lagrave vaincu par la blessure drsquoun amour eacuteternel les yeux leveacutesvers toi la tecircte poseacutee sur ton sein la bouche entrrsquoouverte il repaicirctdrsquoamour ses regards avides et son acircme reste comme suspendue agravetes legravevres Dans ce moment drsquoivresse ougrave tes membres sacreacutes le sou-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 9

sine tē sans toiin ōrās dīās lūminis aux reacutegions divines de la lumiegravereneque quicquam fit et que rien nrsquoest fait (nrsquoexiste)laeligtum neque amābile drsquoagreacuteable ni drsquoaimable sans toi studeō tē esse sociam je deacutesire toi ecirctre associeacuteeversibus scrībendīs aux vers devant ecirctre eacutecritsquōs ego cōnor pangere que moi je mrsquoefforce de composerdē nātūrā rērum touchant la nature des chosesnostrō pour notreMemmiadaelig descendant-de-la-famille-Memmiaquem tū Dea lequel toi deacuteessevoluistī excellere tu as voulu excellerin omnī tempore en tout tempsōrnātum omnibus rēbus orneacute de toutes choses quō Dīva par quoi deacuteessedā magis dictīs donne davantage agrave mes paroleslepōrem aeligternum un charme eacuteternel

Effice ut intereā Fais que pendant-ce-tempsmœnera fera mīlitiāī les occupations cruelles de la guerrequiēscant sōpīta reposent assoupiesper maria par toutes les mersac omnīs terrās et par toutes les terres nam tū sōla potes car toi seule peuxjuvāre mortālīs soulager les mortelspāce tranquillā par une paix tranquillequoniam Māvors armipo- puisque Mars puissant-par-les-armes

[tēnsregit gouvernemœnera fera bellī les occupations cruelles de la guerrequī sē rējicit saeligpe Mars qui se rejette souventin tuum gremium sur ton seindēvictus vulnere aeligternō vaincu-complegravetement par la blessure eacuteter-

[nelleamōris de lrsquoamouratque ita suspiciēns et ainsi levant-ses-regardscervīce teretī sa nuque ronderepostā rejeteacutee-en-arriegraverepāscit amōre il repaicirct drsquoamourvīsūs avidōs ses yeux avidesinhiāns in tē Dea eacutetant-beacuteant apregraves toi deacuteessespīritusque et lrsquohaleineresupīnī de lui ayant-la-tecircte-en-arriegraverependet ē tuō ōre est-suspendue agrave ta boucheTū Dīva Toi deacuteesse

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

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10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

10 LUCREgraveCE

Circumfūsa super suāvīs ex ōre loquellāsFunde petēns placidam Rōmānīs incluta pācem 40Nam neque nōs agere hoc patriāī tempore inīquō 1

Possumus aeligquō animō nec Memmī clāra propāgōTālibus in rēbus commūnī dēsse salūtī

2 mdash la superstition(V 62-101)

Hūmāna ante oculōs fœdē cum vīta jacēretIn terrīs oppressa gravī sub Rĕligiōne 2Quaelig caput ā caeliglī regiōnibus ostendēbatHorribilī super aspectū mortālibus īnstāns 65Prīmum Grājus homō 3 mortālīs tollere contrāEst oculōs ausus prīmusque obsistere contrāQuem neque fāma Deum nec fulmina nec minitantīMurmure compressit caeliglum sed eō magis ācremIrrītāt 4 animī virtūtem effringere ut arta 70

tiennent ocirc deacuteesse pencheacutee tendrement sur lui abandonneacutee agrave sesembrassements verse dans son acircme la douce persuasion et sois lapuissante meacutediatrice de la paix Heacutelas Dans les troubles de ma pa-trie mrsquoest-il permis de chanter et lrsquoillustre Memmius manquera-t-ilagrave la deacutefense de lrsquoeacutetat pour precircter lrsquooreille agrave mes sons

2Dans le temps ougrave lrsquohomme avili rampait sous les chaicircnes pesantes

du fanatisme ce tyran farouche qui du milieu des nues montraitsa tecircte eacutepouvantable et dont lrsquoœil effrayant menaccedilait drsquoen haut lesmortels un homme neacute dans la Gregravece osa le premier lever contrelui ses regards et refuser de srsquoincliner Ni ces dieux si vanteacutes nileurs foudres ni le bruit menaccedilant du ciel en courroux ne purentlrsquointimider Son courage srsquoirrita par les obstacles Impatient de briser

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 11

circumfūsa te-reacutepandant-autour-de (enlaccedilant)hunc recubantem celui-ci eacutetant-coucheacute-sur-le-doscorpore sānctō de ton corps sacreacutesuper du dessusfunde suāvīs loquellās reacutepands de douces parolesex tuō ōre de ta bouchepetēns incluta demandant ocirc deacuteesse glorieusepācem placidam Rōmānīs une paix calme pour les RomainsNam neque nōs possumus Car ni nous nous ne pouvonsagere hoc animō aeligquō nous occuper de ce travail avec un esprit

[tranquilletempore inīquō dans une conjoncture difficilepatriāī de (pour) la patrienec propāgō clāra ni la race illustreMemmī de Memmiusin tālibus rēbus ne peut dans de telles circonstancesdēsse salūtī commūnī faire-deacutefaut au salut commun

2 mdash la superstition

Cum vīta hūmāna Lorsque la vie (lrsquoespegravece) humainejacēret fœdē gisait drsquoune-maniegravere-hideusein terrīs sur les terres (sur la terre)ante oculōs devant les yeux de tousoppressa eacutecraseacuteesub Religiōne gravī sous une Religion (Superstition) pesantequaelig ostendēbat caput laquelle montrait sa tecircteā regiōnibus caeliglī des reacutegions du cielīnstāns super menaccedilant drsquo-en-hautmortālibus les mortelsaspectū horribilī de son aspect horribleGrājus homō un Grec un hommeausus est prīmum osa pour-la-premiegravere-fois (le premier)tollere oculōs mortālīs con- lever les yeux mortels en-face

[trāprīmusque et osa le premierobsistere contrā reacutesister en-faceQuem neque fāma Deum Lequel ni la renommeacutee des dieuxnec fulmina ni les foudresnec caeliglum compressit ni le ciel ne retintmurmure minitantī par son murmure menaccedilant sed irrītāt eō magis mais tout cela irrita drsquoautant plusvirtūtem ācrem animī la vigueur bouillante de son espritut cupīret afin qursquoil deacutesiracircteffringere prīmus briser le premier

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

12 LUCREgraveCE

Nātūraelig prīmus portārum claustra cupīret 1Ergō vīvida vīs animī pervīcit et extrāPrōcessit longē flammantia mœnia mundī 2Atque omne 3 immēnsum peragrāvit mente animōque Unde refert nōbīs victor quid possit orīrī 75Quid nequeat 4 fīnīta potestās dēnique cuiqueQuānam sit ratiōne atque altē terminus haeligrēns 5Quārē Rĕligiō pedibus subjecta vicissimOpteritur nōs exaeligquat victōria caeliglō

Illud in hīs rēbus vereor nē forte reāris 80Impia tē ratiōnis inīre elementa viamqueIndugredī 6 sceleris quod contrā saeligpius illaRĕligiō peperit scelerōsa atque impia facta Aulide 7 quō pactō Triviāī virginis āramĪphianassāī 8 turpārunt sanguine fœdē 85Ductōrēs Danaum dēlēctī prīma virōrum 9Cui simul īnfula virgineōs circumdata cōmptūs

lrsquoeacutetroite enceinte de la Nature son geacutenie vainqueur srsquoeacutelanccedila au-delagravedes bornes enflammeacutees du monde parcourut agrave pas de geacuteant lesplaines de lrsquoimmensiteacute et eut la gloire drsquoenseigner aux hommes cequi peut ou ne peut pas naicirctre et comment la puissance des corpsest borneacutee par leur essence mecircme Ainsi la Superstition fut agrave sontour fouleacutee aux pieds et sa deacutefaite nous rendit eacutegaux aux dieux

Mais je crains ocirc Memmius que vous ne mrsquoaccusiez de vousouvrir une eacutecole drsquoimpieacuteteacute et de conduire vos pas dans la route ducrime Crsquoest au contraire la Superstition qui trop souvent inspirades actions impies et criminelles Ainsi lrsquoeacutelite des chefs de la Gregraveceles premiers heacuteros du monde souillegraverent jadis en Aulide lrsquoautelde Diane du sang drsquoIphigeacutenie Quand le bandeau funegravebre eut pareacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 13

claustra arta les fermetures eacutetroitesportārum Nātūraelig des portes de la NatureErgō vīs vīvida animī Donc la force vive de son espritpervīcit en triomphaet prōcessit longē et srsquoavanccedila aux-loinextrā horsmœnia flammantia mundī des murailles enflammeacutees du mondeatque peragrāvit et parcourutmente animōque par lrsquointelligence et lrsquoespritomne immēnsum le tout immense unde victor refert nōbīs drsquoougrave vainqueur il rapporte agrave nousquid possit orīrī quelle chose peut naicirctrequid nequeat quelle chose ne-peut naicirctre dēnique quānam ratiōne enfin selon quelle loipotestās fīnīta sit le pouvoir (la porteacutee) a eacuteteacute circonscritcuique pour chaque choseatque terminus et sa bornehaeligrēns altē qui est enfonceacutee profondeacutementQuārē Religiō Crsquoest pourquoi la Religionsubjecta pedibus vicissim placeacutee-sous les pieds agrave-son-touropteritur est eacutecraseacuteevictōria la victoireexaeligquat nōs caeliglō nous eacutegale (nous eacutelegraveve jusqursquo) au ciel

Vereor illud Je crains ceciin hīs rēbus dans ces choses-lagravenē forte reāris que par hasard tu ne pensestē inīre toi trsquoengager-danselementa impia ratiōnis les principes impies drsquoun systegravemeindugredīque et entrer-dansviam sceleris la voie du crime quod contrā relativement-agrave-quoi au contraire (tandis

[qursquoau contraire)illa Religiō cette mecircme Religionpeperit saeligpius a engendreacute plus souventfacta scelerōsa des actes criminelsatque impia et impies quō pactō de laquelle maniegravere (crsquoest ainsi que)ductōrēs dēlēctī Danaum les chefs choisis parmi les Grecsprīma virōrum les premiers des hommesturpārunt fœdē souillegraverent drsquoune-maniegravere-hideuseAulide agrave Aulisāram virginis Triviāī lrsquoautel de la vierge des-carrefourssanguine Īphianassāī du sang drsquoIphianassaCui simul īnfula Agrave laquelle degraves-que la bandelette

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

14 LUCREgraveCE

Ex utrāque parī mālārum parte profūsa est 1Et maeligstum simul ante ārās adstāre parentemSēnsit et hunc propter ferrum cēlāre ministrōs 90Aspectūque suō lacrimās effundere cīvīsMūta metū terram genibus summissa petēbat Nec miseraelig prōdesse in tālī tempore quībatQuod patriō prīnceps 2 dōnārat nōmine rēgem Nam sublāta virum manibus tremebundaque ad ārās 95Dēducta est nōn ut sollemnī mōre sacrōrumPerfectō posset clārō comitārī Hymenaeligō 3 Sed casta incestē nūbendī tempore in ipsōHostia concideret mactātū maeligsta parentisExitus ut classī fēlīx faustusque darētur 100Tantum Rĕligiō potuit suādēre malōrum

la chevelure de la jeune princesse et flotteacute le long de ses jouesinnocentes quand elle vit son pegravere au pied de lrsquoautel debout lrsquoœiltriste et lrsquoair morne agrave cocircteacute de lui les sacrificateurs cachant sousleurs robes le couteau sacreacute et un grand peuple en larmes autourdrsquoelle agrave ce spectacle muette drsquoeffroi elle tombe sur ses genouxcomme une suppliante Que lui servait dans cet instant fatal drsquoavoirla premiegravere donneacute le nom de pegravere au roi de Mycegravenes Des precirctresimpitoyables la soulegravevent et la portent tremblante agrave lrsquoautel non pourla reconduire au milieu drsquoun pompeux cortegravege apregraves la ceacutereacutemonie delrsquohymeacuteneacutee mais pour la faire expirer sous les coups de son pegravere aumoment mecircme que lrsquoamour destinait agrave son mariage Et pourquoi Afin drsquoobtenir un heureux deacutepart pour la flotte des Grecs Tant laSuperstition inspire aux hommes de barbarie

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 15

circumdata placeacutee-autourcōmptūs virgineōs de ses coiffures virginalesprofūsa est tombaparte parī avec une portion eacutegale (eacutegalement)ex utrāque mālārum de lrsquoune-et-lrsquo-autre de ses joueset simul sēnsit parentem et degraves-qursquoelle aperccedilut son pegravereadstāre maeligstum se tenir-debout tristeante ārās devant les autelset propter hunc et pregraves de celui-ciministrōs cēlāre ferrum les sacrificateurs cacher le fercīvīsque et les citoyenseffundere lacrimās verser des larmessuō aspectū agrave son aspectmūta metū muette de craintesummissa genibus fleacutechie par les genouxpetēbat terram elle se dirigeait-vers la (elle tombait agrave)

[terre nec quībat ni cela ne pouvaitprōdesse miseraelig servir agrave la malheureusein tempore tālī dans une circonstance tellequod prīnceps de-ce-que la premiegraveredōnārat rēgem elle avait gratifieacute le roinōmine patriō du nom de-pegravere nam sublāta car souleveacuteemanibus virum par les mains des hommestremebundaque et tremblantedēducta est ad ārās elle fut ameneacutee devant les autelsnōn ut posset non pour-qursquoelle pucirctmōre sollemnī sacrōrum la ceacutereacutemonie ordinaire des sacrificesperfectō ayant eacuteteacute accompliecomitārī Hymenaeligō clārō ecirctre accompagneacutee par lrsquohymeacuteneacutee au-chant-clair sed hostia casta mais pour que victime pureconcideret incestē elle tombacirct drsquoune-maniegravere-impurein tempore ipsō nūbendī au moment mecircme de se-mariermaeligsta mactātū parentis triste par lrsquoimmolation de son pegravereut exitus afin qursquoune sortiefēlīx faustusque heureuse et propicedarētur classī fucirct donneacutee agrave la flotteTantum Religiō potuit Tant la Religion a pusuādēre malōrum conseiller de maux

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

16 LUCREgraveCE

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit(V 215-264)

Hūc accēdit utī quicque in sua corpora 1 rūrsum 215Dissolvat Nātūra neque ad nīlum interimat rēsNam sī quid mortāle ē cūnctīs partibus essetEx oculīs rēs quaeligque repente ērepta perīretNūllā vī foret ūsus 2 enim quaelig partibus ejusDiscidium parere et nexūs exsolvere posset 220Quod nunc aeligternō quia cōnstant sēmine quaeligqueDōnec vīs obiit quaelig rēs dīverberet ictūAut intus penetret per inānia 3 dissoluatqueNūllius exitium patitur Nātūra vidērī

Praeligtereā quaeligcumque vetustāte āmovet aeligtās 4 225Sī penitus peremit cōnsūmēns māteriem omnemUnde animāle genus generātim 5 in lūmina vītaeligReddūcit 6 Venus Aut redductum daeligdala tellūsUnde alit atque auget generātim pābula praeligbēns

3Agrave cette veacuteriteacute joignons-en une autre crsquoest que la Nature

nrsquoaneacuteantit rien mais reacuteduit simplement chaque tout en ses partieseacuteleacutementaires Si les eacuteleacutements eacutetaient destructibles les corps dispa-raicirctraient en un moment il ne serait pas neacutecessaire qursquoune actionlente troublacirct lrsquounion des principes en rompicirct les liens au lieu quela Nature ayant rendu eacuteternels les eacuteleacutements de la matiegravere ne nouspreacutesente lrsquoimage de la destruction que quand une force eacutetrangegravere afrappeacute la masse ou peacuteneacutetreacute le tissu des corps

Drsquoailleurs si le temps aneacuteantissait tout ce qui disparaicirct agrave nosyeux dans quelle source la Nature puiserait-elle ses reproductions Comment la terre pourrait-elle nourrir les espegraveces reacutegeacuteneacutereacutees De

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 17

3 mdash tout se transforme rien ne srsquoaneacuteantit

Hūc accēdit utī Agrave-cela srsquo-ajoute queNātūra dissolvat rūrsum la Nature dissout de-nouveauquicque chaque chosein sua corpora en ses atomesneque interimat rēs et ne deacutetruit pas les chosesad nīlum pour les reacuteduire agrave rien nam sī quid esset car si quelque chose eacutetaitmortāle ē cūnctīs partibus mortel dans toutes ses partiesquaeligque rēs chaque choseērepta ex oculīs arracheacutee de nos yeuxperīret repente peacuterirait soudainement foret enim ūsus nūllā vī il ne serait en effet besoin drsquoaucune forcequaelig posset qui pucirctparere discidium enfanter (amener) une divisionpartibus ejus aux parties de luiet exsolvere nexūs et deacutenouer les liensQuod nunc Pendant que maintenantquia quaeligque cōnstant parce que toutes choses sont composeacuteessēmine aeligternō drsquoun germe (atome) eacuteternelNātūra patitur la Nature ne souffreexitium nūllīus la destruction drsquoaucune chosevidērī ecirctre vue (ne se manifester)dōnec vīs obiit jusqursquoagrave ce qursquoune force soit survenuequaelig dīverberet rēs qui puisse-seacuteparer-en-frappant les chosesictū par un chocaut penetret intus ou qui puisse-peacuteneacutetrer au-dedansper inānia par les espaces laisseacutes videsdissolvatque et puisse-les-dissoudre

Praeligtereā sī aeligtās En outre si le tempscōnsūmēns consumantomnem māteriem toute matiegravereperemit penitus aneacuteantit complegravetementquaeligcumque āmovet toutes-les-choses-qursquoil eacuteloigne de nos re-

[gardsvetustāte par la vieillesseunde Venus drsquoougrave Veacutenusreddūcit generātim ramegravene-t-elle par-espegravecesin lūmina vītaelig aux lumiegraveres (agrave la lumiegravere) de la viegenus animāle la race des ecirctres vivants Aut unde tellūs daeligdala Ou-bien drsquoougrave la terre qui-faccedilonne-avec-artalit atque auget nourrit-elle et multiplie-t-elle

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

18 LUCREgraveCE

Unde mare ingenuī fontēs externaque longē 230Flūmina suppeditant Unde aeligthēr sīdera pāscit 1 Omnia enim dēbet mortālī corpore quaelig suntĪnfīnīta aeligtās cōnsūmpse 2 anteācta diēsqueQuod sī in eō spatiō atque anteāctā aeligtāte fuēreĒ quibus haeligc rērum cōnsistit summa refecta 235Immortālī sunt nātūrā praeligdita certē Haud igitur possunt ad nīlum quaeligque revertī

Dēnique 3 rēs omnīs eadem vīs causaque volgōCōnficeret nisĭ 4 māteriēs aeligterna tenēretInter sē nexū minus aut magis indupedīta 5 240Tāctus enim lētī satis esset causa profectōQuippe ubi nūlla forent aeligternō corpore quōrumContextum vīs dēbēret dissolvere quaeligque 6At nunc inter sē quia nexūs prīncipiōrumDissimilēs cōnstant aeligternaque māteriēs est 245

quel reacuteservoir les riviegraveres et les fontaines tireraient-elles ce tributcontinuel qursquoelles viennent de si loin payer agrave lrsquoOceacutean De quelsaliments se repaicirctraient les feux du ciel Si les eacuteleacutements eacutetaient peacute-rissables la reacutevolution de tant de siegravecles eacutecouleacutes devrait en avoir tarila source Si au contraire aussi anciens que les temps ils travaillentde toute eacuteterniteacute aux reproductions de la Nature il faut qursquoils soientimmortels et que rien dans lrsquoUnivers ne puisse srsquoaneacuteantir

Enfin la mecircme cause ferait peacuterir tous les corps si leurs eacuteleacutementsnrsquoeacutetaient eacuteternels et lieacutes par des nœuds plus ou moins serreacutes Letact seul suffirait pour les deacutetruire Quelle reacutesistance opposerait unfrecircle assemblage de parties destructibles Au lieu que les liens descorps eacutetant dissemblables et la matiegravere eacuteternelle chaque ecirctre sub-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 19

redductum cette race qui a eacuteteacute rameneacuteepraeligbēns pābula generātim en fournissant des pacircturages par-espegraveces Unde fontēs ingenuī Drsquoougrave ses sources indigegravenesflūminaque externa longē et les fleuves eacutetrangers venant de-loinsuppeditant mare fournissent-ils (alimentent-ils) la mer Unde aeligthēr pāscit sīdera Drsquoougrave lrsquoeacutether nourrit-il les astres AEligtās enim īnfīnīta En effet lrsquoacircge infinianteācta passeacute-anteacuterieurementdiēsque et les jours (le temps)dēbet cōnsūmpse doit (devraient) avoir consumeacuteomnia quaelig sunt toutes les choses qui sontcorpore mortālī drsquoun corps mortelQuod sī in eō spatiō Que si dans cet espace de tempsatque aeligtāte anteāctā et dans cet acircge passeacute-anteacuterieurementfuēre ē quibus il y eut des eacuteleacutements au moyen desquelshaeligc summa rērum cet ensemble de choses (notre monde)refecta cōnsistit ayant eacuteteacute renouveleacute subsistesunt praeligdita certē ils sont doueacutes certainementnātūrā immortālī drsquoune nature immortelleIgitur quaeligque Donc chaque chosehaud possunt ne peutrevertī ad nīlum revenir agrave rien

Dēnique eadem vīs Enfin la mecircme forcecausaque et la mecircme causecōnficeret volgō achegraveverait (ferait peacuterir) universellementomnīs rēs toutes chosesnisī māteriēs aeligterna si une matiegravere eacuteternelle (des atomes)tenēret ne les tenait ensembleindupedīta cette matiegravere eacutetant enlaceacuteeminus aut magis moins ou plusinter sē nexū entre elle (eux) par un lientāctus enim le toucher en effetesset satis profectō serait assez assureacutementcausa lētī comme cause de destructionquippe ubi nūlla car alors aucuns atomescorpore aeligternō forent formeacutes drsquoune substance eacuteternelle ne se-

[raient

quōrum quaeligque vīs desquels chaque force (une force appro-[prieacutee)dēbēret dissolvere devrait dissoudre

contextum lrsquoassemblage at nunc mais maintenantquia nexūs inter sē parce que les liens mutuelsprīncipiōrum des eacuteleacutementscōnstant dissimilēs subsistent (sont) dissemblables

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

20 LUCREgraveCE

Incolumī remanent rēs corpore dum satis ācrisVīs obeat prō textūrā cujusque repertaHaud igitur redit ad nihilum rēs ūlla sed omnēsDiscidiō redeunt in corpora māteriāī

Postrēmō pereunt imbrēs 1 ubi eōs pater AEligthēr 2 250In gremium mātris Terrāī praeligcipitāvit At nitidaelig surgunt frūgēs rāmīque virēscuntArboribus crēscunt ipsaelig fētūque gravanturHinc alitur porrō nostrum genus atque ferārum Hinc laeligtās urbēs puerīs flōrēre vidēmus 255Frondiferāsque novīs avibus canere undique silvās Hinc fessaelig pecudēs pinguī per pābula laeligtaCorpora dēpōnunt et candēns lacteus ūmorŪberibus mānat distentīs hinc nova prōlēsArtubus īnfirmīs tenerās lascīva per herbās 260Lūdit lacte merō mentēs perculsa novellāsHaud igitur penitus pereunt quaeligcumque videntur

siste jusqursquoagrave ce qursquoil eacuteprouve un choc proportionneacute agrave lrsquounion deses principes Rien donc ne srsquoaneacuteantit et la destruction nrsquoest que ladissolution des eacuteleacutements

Ces pluies que lrsquoair feacutecond verse agrave grands flots dans le seinde notre megravere commune vous paraissent perdues Mais par ellesla terre se couvre de moissons les arbres reverdissent leur cimesrsquoeacutelegraveve leurs rameaux se courbent sous le poids des fruits Ce sontces pluies salutaires qui fournissent aux hommes leurs aliments etaux animaux leur pacircture De lagrave cette jeunesse florissante qui peuplenos villes ce nouvel essaim de chantres harmonieux qui font re-tentir nos bois Voyez les troupeaux reposer dans les riants pacirc-turages leurs membres fatigueacutes drsquoembonpoint des ruisseaux drsquounlait pur srsquoeacutechapper de leurs mamelles tendues Enivreacutes de cettedouce liqueur les tendres agneaux srsquoeacutegaient sur le gazon et essaiententrrsquoeux mille jeux folacirctres Les corps ne sont donc pas aneacuteantis en

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 21

māteriēsque est aeligterna et que la matiegravere est eacuteternellerēs remanent les choses continuent-drsquo-existercorpore incolumī avec un corps intactdum vīs satis ācris jusqursquoagrave ce qursquoune force assez eacutenergiqueobeat surviennereperta ayant eacuteteacute trouveacuteeprō textūrā cujusque en-proportion-de la contexture de chacunIgitur haud ūlla rēs Donc aucune choseredit ad nihilum ne retourne agrave neacuteantsed omnēs mais toutesredeunt discidiō reviennent par la seacuteparation de leurs eacuteleacute-

[mentsin corpora māteriāī en atomes de la matiegraverePostrēmō imbrēs pereunt Enfin les pluies disparaissent

ubi AEligthēr pater degraves que lrsquoEacutether qui est pegraverepraeligcipitāvit eōs a preacutecipiteacute ellesin gremium dans le seinTerrāī mātris de la Terre qui est megravere at frūgēs nitidaelig surgunt mais les moissons brillantes se legraveventrāmīque virēscunt et les branches verdissentarboribus pour les (aux) arbres ipsaelig crēscunt les arbres eux-mecircmes croissentgravanturque fētū et sont surchargeacutes par leur productionHinc porrō nostrum genus Par lagrave en outre notre raceatque ferārum et celle des becirctesalitur est nourrie hinc vidēmus urbēs laeligtās par lagrave nous voyons les villes riantesflōrēre puerīs ecirctre-florissantes par les enfantssilvāsque frondiferās et les forecircts qui-portent-des-feuillescanere undique chanter de-tous-cocircteacutesavibus novīs par les oiseaux nouvellement-neacutes hinc pecudēs fessaelig pinguī par lagrave les troupeaux fatigueacutes par leur em-

[bonpointdēpōnunt corpora couchent leurs corpsper pābula laeligta agrave travers les pacircturages fertileset ūmor candēns lacteus et la liqueur blanche du-laitmānat ūberibus distentīs coule de leurs mamelles gonfleacutees hinc prōlēs nova par lagrave la race nouvelleperculsa frappeacutee (troubleacutee)mentēs novellās quant aux esprits nouvellement-formeacuteslacte merō par un lait purlūdit lascīva joue folacirctreartubus īnfirmīs avec ses membres faiblesper herbās tenerās agrave-travers les herbes tendresIgitur quaeligcumque videntur Donc toutes-les-choses-qui sont vues

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

22 LUCREgraveCE

Quandō alid 1 ex aliō reficit Nātūra nec ūllamRem gignī patitur nisi morte adjūta aliēnā 2

4 mdash des corps invisibles(V 265-297)

Nunc age rēs quoniam docuī nōn posse creārī 265Dē nīlō neque item genitās ad nīl revocārī Nē quā forte tamen cœptēs diffīdere dictīsQuod nequeunt oculīs rērum prīmōrdia cernī Accipe praeligtereā quaelig corpora tūte necesse estCōnfiteāre esse in rēbus nec posse vidērī 270

Prīncipiō ventī vīs verberat incita pontumIngentīsque ruit nāvīs et nūbila differt Interdum rapidō percurrēns turbine campōsArboribus magnīs sternit montēsque suprēmōsSilvifragīs vexat flābrīs ita perfurit ācrī 275Cum fremitū saeligvitque minācī murmure ventus

disparaissant agrave nos yeux La Nature forme de nouveaux ecirctres deleurs deacutebris et ce nrsquoest que par la mort des uns qursquoelle accorde lavie aux autres

4Vous ecirctes convaincu maintenant Memmius que lrsquoecirctre ne peut

sortir du neacuteant ni srsquoy perdre mais pour dissiper les doutes quepourrait laisser dans votre esprit lrsquoinvisibiliteacute des atomes apprenezqursquoil est des corps que lrsquoœil nrsquoaperccediloit pas et dont toutefois la raisonreconnaicirct lrsquoexistence

Tel est le vent cet eacuteleacutement terrible dont la fureur soulegraveve lesondes submerge la masse des vaisseaux et disperse les nuages dont les tourbillons rapides srsquoeacutelancent dans les plaines et couvrent laterre de la deacutepouille des plus grands arbres dont le souffle destruc-teur tourmente la cime des monts et fait bouillonner lrsquoatmosphegravere

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 23

haud pereunt penitus ne peacuterissent pas complegravetement quandō Nātūra puisque la Naturereficit alid ex aliō refait une autre chose avec une autre chosenec patitur et qursquoelle ne souffre pasūllam rem gignī aucune chose ecirctre engendreacuteenisī adjūta sinon aideacuteemorte aliēnā par la mort drsquoune-autre

4 mdash des corps invisibles

Nunc age Maintenant allonsquoniam docuī puisque jrsquoai enseigneacuterēs nōn posse creārī les choses ne pouvoir ecirctre creacuteeacuteesdē nīlō de rienneque item genitās ni de-mecircme ayant eacuteteacute engendreacuteesrevocārī ad nīl pouvoir ecirctre rappeleacutees agrave riennē tamen de peur que cependantcœptēs quā forte tu ne commences par quelque hasarddiffīdere dictīs agrave te deacutefier de mes parolesquod prīmōrdia rērum parce que les principes des choses (les

[atomes)

nequeunt cernī oculīs ne-peuvent ecirctre distingueacutes par les yeuxaccipe praeligtereā reccedilois (apprends) outre celaquaelig corpora lesquels corpsnecesse est il est neacutecessairetūte cōnfiteāre que toi tu avouesesse in rēbus exister dans les choses (la Nature)nec posse vidērī et ne pouvoir ecirctre vus

Prīncipiō Drsquoabordvīs incita ventī la violence deacutechaicircneacutee du ventverberat pontum frappe la merruitque nāvīs ingentīs et renverse (engloutit) les navires im-

[menseset differt nūbila et disperse les nuages interdum parfoispercurrēns campōs courant-agrave-travers les plainesturbine rapidō avec un tourbillon qui-entraicircnesternit magnīs arboribus il les jonche de grands arbresvexatque et il batmontēs suprēmōs les montagnes agrave-leur-sommetflābrīs silvifragīs avec des souffles qui-rompent-les-arbres ita tellementventus perfurit le vent devient-tregraves-furieuxcum fremitū ācrī avec un bruit violentsaeligvitque et seacutevit

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

24 LUCREgraveCE

Sunt igitur ventī nīmīrum corpora caeligcaQuaelig mare quaelig terrās quaelig dēnique nūbila caeliglīVerrunt ac subitō vexantia turbine raptantNec ratiōne fluunt aliā strāgemque propāgant 280Et cum mollis aquaelig fertur nātūra 1 repenteFlūmine abundantī quam largīs imbribus augetMontibus ex altīs magnus dēcursus aquāīFragmina conjiciēns silvārum arbustaque tōta Nec validī possunt pontēs venientis aquāī 285Vim subitam tolerāre ita magnō turbidus imbrīMōlibus incurrit validīs cum vīribus amnisDat sonitū magnō strāgem volvitque sub undīsGrandia saxa ruit quā quicquid flūctibus obstatSīc 2 igitur dēbent ventī quoque flāmina ferrī 290Quaelig velutī validum cum flūmen prōcubuēreQuamlibet in partem trūdunt rēs ante ruuntque

avec un affreux murmure Le vent quoiqursquoinvisible est donc uncorps puisqursquoil balaie agrave la fois le ciel la terre et la mer et parsegravemelrsquoair de leurs deacutebris Crsquoest un fluide semblable agrave un fleuve dont lelit tranquille est gonfleacute tout agrave coup par les pluies abondantes quiroulent en torrent du haut des monts chargeacutees de la deacutepouille desforecircts Les ponts les plus solides ne peuvent soutenir le choc delrsquoonde deacutechaineacutee Ces redoutables masses drsquoeau heurtent les diguesles font eacutecrouler avec bruit en emportent les rochers flottants etrenversent tous les obstacles qui srsquoopposent agrave leur fureur Crsquoest ainsique les vents en courroux font tout plier sous lrsquoeffort de leur ha-leine Ils chassent leur proie devant eux la terrassent lui livrent

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 25

murmure minācī avec un murmure menaccedilantCorpora caeligca ventī Des corps invisibles de ventsunt igitur nīmīrum existent donc apparemmentquaelig verrunt mare lesquels corps balayent la merquaelig terrās lesquels balayent les terresquaelig dēnique nūbila caeliglī lesquels balayent enfin les nuages du cielac vexantia et les agitantraptant turbine subitō les entraicircnent dans un tourbillon soudainNec fluunt Et ils ne coulent paspropāgantque strāgem et ne propagent pas la ruinealiā ratiōne drsquoune autre maniegravereet cum nātūra aquaelig et (que) lorsque la nature de lrsquoeau (lrsquoeau)mollis non-solide (molle)fertur repente est emporteacutee tout agrave coupflūmine abundantī par un cours deacutebordeacutequam magnus dēcursus eau qursquoune grande chuteaquāī drsquoeauex altīs montibus descendant des hautes montagnesauget imbribus largīs augmente par des pluies abondantesconjiciēns jetant-ensemblefragmina silvārum des deacutebris des forecirctsarbustaque tōta et des arbres entiers nec pontēs validī ni les ponts solidespossunt tolerāre ne peuvent supportervim subitam la violence soudaineaquāī venientis de lrsquoeau qui-arrive ita amnis tellement le fleuveturbidus magnō imbrī troubleacute par une grande pluieincurrit mōlibus se-preacutecipite-sur les assises des pontscum vīribus validīs avec des forces puissantesdat strāgem donne (reacutepand) la ruinemagnō sonitū avec un grand bruitvolvitque sub undīs et roule sous ses ondessaxa grandia des rochers (blocs) eacutenormes ruit quicquid obstat quā il renverse tout-ce qui srsquooppose quelque-partflūctibus agrave ses flotsIgitur flāmina ventī Donc les souffles du ventdēbent ferrī quoque doivent ecirctre porteacutes aussisīc de-la-mecircme-maniegraverequaelig cum prōcubuēre lesquels lorsqursquoils se sont abattusvelutī flūmen validum comme un fleuve violentin partem quamlibet sur un cocircteacute quelconque

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

26 LUCREgraveCE

Impetibus crēbrīs interdum vertice tortōCorripiunt rapidīque rotantī turbine portantQuārē etiam atque etiam sunt ventī corpora caeligca 295Quandōquidem factīs et mōribus 1 aeligmula magnīsAmnibus inveniuntur apertō corpore quī sunt

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacutelogedrsquoempeacutedocle

(V 635-654 690-741)

Quī māteriem rērum esse putārunt 635Ignem atque ex ignī summam cōnsistere sōlōMagnopere ā vērā lāpsī ratiōne videnturHēraclītus 2 init quōrum dux prœlia prīmusClārus ob obscūram linguam magis inter inānīsQuamde 3 gravīs 4 inter Grājōs quī vēra requīrunt 640Omnia enim stolidī 5 magis admīrantur amantqueInversīs quaelig sub verbīs latitantia cernunt Vēraque cōnstituunt quaelig bellē tangere possuntAurīs et lepidō quaelig sunt fūcāta sonōre

mille assauts lrsquoenveloppent dans leurs tourbillons et la font tour-ner rapidement dans le vague de lrsquoatmosphegravere Je le reacutepegravete doncle vent quoiqursquoinvisible est un corps puisqursquoil ressemble dans sanature et dans ses effets aux grands fleuves dont lrsquoexistence estsensible agrave tous les yeux

5Ceux qui ont regardeacute le feu comme le seul principe de cet uni-

vers sont tombeacutes dans une erreur bien grossiegravere Agrave la tecircte de cesphilosophes marche Heacuteraclite auquel un langage obscur attira dansla Gregravece la veacuteneacuteration des hommes superficiels mais non pas dessages accoutumeacutes agrave reacutefleacutechir Car la stupiditeacute nrsquoadmire que les opi-nions cacheacutees sous des termes mysteacuterieux Une harmonie agreacuteableet un coloris brillant font pour elle le sceau de la veacuteriteacute

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 27

trūdunt rēs ante poussent les choses devant euxruuntque et les renversentimpetibus crēbrīs par des chocs redoubleacutes interdum corripiunt parfois ils les saisissentvertice tortō dans un tourbillon qui-tourne-sur-lui-mecircmerapidīque et entraicircnantsportant les emportentturbine rotantī dans un tourbillon tournantQuārē etiam atque etiam Crsquoest pourquoi je le dis encore et encorecorpora caeligca ventī des corps invisibles du ventsunt existentquandōquidem inveniuntur puisqursquoils sont trouveacutesaeligmula eacutemulesfactīs et mōribus par leurs actes et leurs habitudesmagnīs amnibus aux (des) grands fleuvesquī sunt qui sontcorpore apertō drsquoun corps deacutecouvert (visible)

5 mdash le feu nrsquoest pas le principe du monde eacuteloge drsquoempeacutedocle

Quī putārunt Ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam cōnsistere et lrsquoensemble (lrsquounivers) subsisterex ignī sōlō par le feu seulvidentur sont vuslāpsī magnopere ecirctre glisseacutes (srsquoecirctre eacuteloigneacutes) beaucoupā vērā ratiōne de la veacuteritable raisonQuōrum dux Hēraclītus Desquels le chef Heacuteracliteinit prīmus prœlia engage le premier les combats (le combat)clārus Heacuteraclite illustreob linguam obscūram agrave-cause-de son langage obscurmagis inter Grājōs inānīs plutocirct parmi les Grecs frivolesquamde inter gravīs que parmi les Grecs seacuterieuxquī requīrunt vēra qui recherchent les choses vraiesStolidī enim admīrantur Les gens stupides en effet admirentamantque magis et aiment davantageomnia quaelig cernunt latitan- tout ce qursquoils voient se cachant

[tiasub verbīs inversīs sous des paroles deacutetourneacuteescōnstituuntque vēra et ils eacutetablissent (admettent) pour vraiesquaelig possunt celles qui peuventtangere aurīs bellē frapper les oreilles agreacuteablementet quaelig sunt fūcāta et qui ont eacuteteacute fardeacutees

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

28 LUCREgraveCE

Nam cūr tam variaelig rēs possent esse requīrō 645Ex ūnō sī sunt ignī pūrōque creātaelig Nīl prōdesset enim calidum dēnsērier ignemNec rārēfierī sī partēs ignis eandemNātūram quam tōtus habet super 1 ignis habērentĀcrior ārdor enim conductīs partibus esset 650Languidior porrō disjectīs disque supātīs 2Amplius hōc 3 fierī nīl est quod posse reārisTālibus in causīs 4 nēdum variantia rērumTanta queat dēnsīs rārīsque ex ignibus esse 654

Dīcere porrō ignem rēs omnīs esse neque ūllam 690Rem vēram in numerō rērum cōnstāre nisi ignem(Quod facit hĭc īdem) perdēlīrum esse vidēturNam contrā sēnsūs ab sēnsibus ipse repugnatEt labefactat eōs unde omnia crēdita pendentUnde hic cognitus est ipsī quem nōminat ignem 695Crēdit enim sēnsūs ignem cognōscere vērē

Je demande donc agrave Heacuteraclite comment le feu seul avec les pro-prieacuteteacutes que nous lui connaissons peut avoir produit cette varieacuteteacute decorps qui frappent nos yeux Condensez ou rareacutefiez la flamme tantque vous voudrez si les parties ont la mecircme nature que le toutvous nrsquoen obtiendrez qursquoune chaleur plus consideacuterable en rappro-chant les eacuteleacutements ou moins sensible en les eacuteloignant bien loin deformer tant de corps divers par la condensation ou la rareacutefactiondu feu hellip

Dire avec Heacuteraclite que le feu est tout que le feu seul meacuteritele nom de corps me paraicirct le comble de la folie Crsquoest combattreles sens par les sens mecircmes Crsquoest eacutebranler ces ineacutebranlables fonde-ments de la certitude agrave la faveur desquels il a connu lui-mecircme cefeu dont il abuse Pourquoi ajoute-t-il foi au teacutemoignage des sens

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 29

sonōre lepidō par un son seacuteduisantNam requīrō Car je demande

cūr rēs tam variaelig pourquoi (comment) des choses si varieacuteespossent esse pourraient existersī creātaelig sunt si elles ont eacuteteacute creacuteeacuteesex ignī ūnō pūrōque avec le feu seul et pur prōdesset enim nīl il ne servirait en effet agrave rienignem calidum dēnsērier le feu chaud ecirctre condenseacutenec rārēfierī ni ecirctre rareacutefieacutesī partēs ignis habērent si les parties (particules) du feu avaienteandem nātūram la mecircme naturequam habet ignis tōtus qursquoa le feu tout-entiersuper en outre (aussi)Ārdor enim esset ācrior La chaleur en effet serait plus vivepartibus conductīs les parties eacutetant condenseacuteesporrō languidior puis plus languissante (faible)disjectīs disque supātīs les parties eacutetant disperseacutees et disseacutemineacuteesEst nīl quod reāris Il nrsquoest rien que tu croiesposse fierī pouvoir ecirctre faitamplius hōc de plus que celain causīs tālibus dans (pour) des causes telles nēdum bien-loin-quevariantia tanta rērum la varieacuteteacute si-grande des chosesqueat esse ex ignibus puisse naicirctre des feuxdēnsīs rārīsque condenseacutee et rareacutefieacuteshellip hellip

Porrō dīcere Or direomnīs rēs esse ignem toutes choses ecirctre feuneque ūllam rem vēram et aucun ecirctre veacuteritablecōnstāre in numerō rērum nrsquoexister dans le nombre des chosesnisī ignem sinon le feu(quod hic īdem facit) (ce que ce mecircme Heacuteraclite fait)vidētur esse perdēlīrum me paraicirct ecirctre tregraves-extravagantNam ipse repugnat Car lui-mecircme combatcontrā sēnsūs contre les sensab sēnsibus du cocircteacute des senset labefactat eōs et il eacutebranle ces sensunde omnia crēdita drsquoougrave toutes les choses qui sont cruespendent deacutependentunde hic drsquoougrave cet eacuteleacutementquem nōminat ignem qursquoil appelle feucognitus est ipsī a eacuteteacute connu agrave lui-mecircmeCrēdit enim sēnsūs Il croit en effet les sens

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

30 LUCREgraveCE

Cētera nōn crēdit 1 quaelig nīlō clāra minus sunt Quod mihi cum vānum tum dēlīrum esse vidētur Quō referēmus enim quid nōbīs certius ipsīsSēnsibus esse potest quī vēra ac falsa notēmus 700

Praeligtereā quārē quisquam magis omnia tollatEt velit ārdōris nātūram linquere sōlamQuam neget esse ignīs aliam tamen esse relinquat 2 AEligqua vidētur enim dēmentia dīcere utrumqueQuāpropter quī māteriem rērum esse putārunt 705Ignem atque ex ignī summam cōnsistere posse Et quī prīncipium gignundīs āera 3 rēbusCōnstituēre aut ūmōrem 4 quīcumque putāruntFingere rēs ipsum per sē terramve 5 creāreOmnia et in rērum nātūrās vertier omnīs 710Magnopere ā vērō longē dērāsse videnturAdde etiam quī conduplicant prīmōrdia rērum 6

quand il srsquoagit du feu srsquoil le reacutecuse pour les autres corps aussi sen-sibles Dans quelle source faut-il donc puiser la veacuteriteacute Qui mieuxque les sens nous fait distinguer le vrai du faux

Drsquoailleurs pourquoi reconnaicirctre lrsquoexistence du feu au preacutejudicede celle des autres corps plutocirct que lrsquoexistence des autres corps aupreacutejudice de celle du feu Je ne vois pas qursquoil y ait plus drsquoabsurditeacutedans la seconde de ces exclusions que dans la premiegravere Crsquoest doncsrsquoeacutecarter de la veacuteriteacute que de donner le feu pour principe du grandtout Portons le mecircme jugement des philosophes qui ont attribueacute agravelrsquoair la formation de tous les corps de ceux qui ont regardeacute lrsquoeaucomme la source des ecirctres de ceux qui ont enseigneacute que la terrepeut prendre la forme et la nature de tous les corps Mettez encore

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 31

cognōscere vērē ignem connaicirctre veacuteritablement le feu nōn crēdit il ne croit pas qursquoils connaissent veacuteritable-

[mentcētera les autres eacuteleacutementsquaelig sunt nīlō minus qui ne sont en rien moinsclāra manifestes quod vidētur mihi esse ce qui paraicirct agrave moi ecirctrecum vānum drsquoun-cocircteacute sans-fondementtum dēlīrum drsquoun-autre-cocircteacute extravagantquō referēmus enim Ougrave en effet nous reporterons-nous quid potest esse nōbīs Quelle chose peut ecirctre agrave nouscertius sēnsibus ipsīs plus sucircre que les sens eux-mecircmesquī notēmus par laquelle nous distinguionsvēra ac falsa les choses vraies et les choses fausses

Praeligtereā En outrequārē quisquam pourquoi quelqursquountollat omnia supprimerait-il tous les eacuteleacutementset velit linquere et voudrait-il laissernātūram ārdōris sōlam la nature du feu (le feu) seulemagis quam neget plutocirct qursquoil nieraitignīs esse des-instances-de-feu (le feu) existerrelinquat tamen et laisserait (admettrait) cependantaliam esse une autre nature exister Dīcere enim utrumque Dire en effet lrsquoune-et-lrsquo-autre chosevidētur dēmentia aeligqua me paraicirct ecirctre une deacuteraison eacutegaleQuāpropter quī putārunt Crsquoest pourquoi ceux qui ont penseacuteignem esse le feu ecirctremāteriem rērum la matiegravere creacuteatrice des chosesatque summam posse et lrsquoensemble (lrsquounivers) pouvoircōnsistere ex ignī ecirctre composeacute de feuet quī cōnstituēre aera et ceux qui ont eacutetabli (assigneacute) lrsquoairprīncipium comme principerēbus gignundīs aux choses devant ecirctre creacuteeacuteesaut quīcumque putārunt ou tous-ceux-qui ont penseacuteūmōrem fingere rēs lrsquoeau former les chosesipsum per sē elle-mecircme par elle-mecircme (agrave elle seule) terramve creāre omnia ou la terre creacuteer toutes choseset vertier et ecirctre transformeacuteein omnīs nātūrās rērum en toutes natures de choses (toutes choses)videntur dērāsse sont vus srsquoecirctre eacutecarteacutesmagnopere longē beaucoup loinā vērō de la veacuteriteacuteAdde etiam Ajoute encore

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

32 LUCREgraveCE

Āera jungentēs ignī terramque liquōrī Et quī quattuor ex rēbus posse omnia rentur 1Ex ignī terrā atque animā prōcrēscere et imbrī 715

Quōrum Acragantīnus cum prīmīs Empedoclēs 2 estĪnsula quem triquetrīs terrārum gessit in ōrīs 3Quam fluitāns circum magnīs ānfrāctibus aeligquorĪonium 4 glaucīs aspargit vīrus ab undīsAngustōque fretū rapidum mare dīvidit undīs 720Ītaliaelig terrārum ōrās ā fīnibus ejusHīc est vāsta Charybdis 5 et hīc AEligtnaeliga minanturMurmura flammārum rūrsum sē colligere īrāsFaucibus ēruptōs iterum vīs ut vomat ignīsAd caeliglumque ferat flammāī fulgura rūrsum 725Quaelig cum magna modīs multīs mīranda vidēturGentibus hūmānīs regiō vīsendaque ferturRēbus opīma bonīs multā mūnīta virum vīNīl tamen hōc habuisse virō praeligclārius in sē

dans la mecircme classe ceux qui doublent les eacuteleacutements joignant lrsquoairau feu et lrsquoeau agrave la terre et ceux enfin qui les prennent tous lesquatre persuadeacutes que la terre lrsquoeau lrsquoair et le feu reacuteunis peuventproduire tous les ecirctres

Agrave la tecircte de ces derniers est Empedocles drsquoAgrigente neacute sur lesbords triangulaires de cette icircle fameuse que lrsquoazur des flots ioniensbaigne en serpentant et seacutepare de lrsquoItalie par un canal eacutetroit et ra-pide Lagrave mugit lrsquoimplacable Charybde lagrave bouillonnant au fond deses abicircmes lrsquoEtna donne le signal drsquoune nouvelle guerre menace devomir un nouveau deacuteluge de flammes et de lancer encore au cielles eacuteclairs de sa bouche Cette reacutegion feacuteconde en prodiges digneagrave jamais de la curiositeacute des voyageurs et de lrsquoadmiration du genrehumain ce seacutejour enrichi de tous les biens et deacutefendu par un rem-part de heacuteros nrsquoa pourtant rien produit de plus estimable de plus

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 33

quī conduplicant ceux qui doublent (accouplent)prīmōrdia rērum les principes des chosesjungentēs aera ignī joignant lrsquoair au feuterramque liquōrī et la terre agrave lrsquoeauet quī rentur et ceux qui croientomnia posse prōcrēscere toutes choses pouvoir croicirctreex quattuor rēbus de quatre eacuteleacutementsex ignī terrā du feu de la terreatque animā et imbrī et de souffle (de lrsquoair) et de la pluie (de

[lrsquoeau)

Cum prīmīs quōrum Avec les premiers (au premier rang) des-[quelsest Empedoclēs Acragantī- est Empeacutedocle drsquo-Agrigente

[nusquem īnsula gessit qursquoune icircle a porteacutein ōrīs triquetrīs sur les bords triangulairesterrārum de ses terrescircum quam aeligquor Iōnium icircle autour de laquelle la mer ioniennefluitāns magnīs ānfrāctibus coulant avec de grandes deacutecoupuresaspargit vīrus fait-jaillir lrsquoamertume (lrsquoeacutecume amegravere)ab undīs glaucīs du sein des ondes vertesmareque rapidum et la mer rapidefretū angustō dans un deacutetroit resserreacutedīvidit undīs seacutepare au moyen des eauxōrās terrārum Ītaliaelig les bords des terres de lrsquoItalieā fīnibus ejus des limites de cette icircleHīc est vāsta Charybdis Lagrave est la deacutevorante Charybdehīc et murmura AEligtnaeliga lagrave aussi les murmures de-lrsquoEtnaminantur annoncent-drsquoune-maniegravere-menaccedilanteīrās flammārum les colegraveres de ses flammessē colligere rūrsum srsquoamasser de-nouveauut vīs pour que sa violencevomat iterum faucibus vomisse de-nouveau des gorges (de ses

[gouffres)ignīs ēruptōs les feux lanceacutes-au-dehorsferatque rūrsum ad caeliglum et porte de-nouveau au cielfulgura flammāī les eacuteclairs de sa flammeQuaelig regiō cum vidētur Laquelle contreacutee bien qursquoelle paraissemagna mīranda grande et devant ecirctre admireacuteemultīs modīs de beaucoup de maniegraveresgentibus hūmānīs par les nations humainesferturque vīsenda et soit citeacutee comme devant ecirctre visiteacuteeopīma rēbus bonīs eacutetant riche en choses bonnesmūnīta multā vī virum proteacutegeacutee par une grande multitude drsquohommes vidētur tamen elle ne paraicirct cependanthabuisse in sē avoir eu en elle-mecircme

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

34 LUCREgraveCE

Nec sānctum magis et mīrum cārumque vidētur 730Carmina quīn etiam dīvīnī pectoris ejusVōciferantur 1 et expōnunt praeligclāra reperta Ut vix hūmānā videātur stirpe creātusHic tamen et suprā quōs dīximus īnferiōrēsPartibus ēgregiē multīs multōque minōrēs 735Quamquam multa bene ac dīvīnitus invenientēsEx adytō tamquam cordis respōnsa dedēreSānctius et multō certā ratiōne magis quamPȳthia quaelig tripodī ā Phœbī laurōque 2 profātur Prīncipiīs tamen in rērum fēcēre ruīnās 3 740Et graviter magnī magnō cecidēre ibi cāsū

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute(V 921-950)

Nunc age quod superest cognōsce et clārius audīNec mē animī fallit 4 quam sint obscūra sed ācrīPercussit thyrsō 5 laudis spēs magna meum corEt simul incussit suāvem mī in pectus amōrem

eacutetonnant de plus grand qursquoEmpedocles Les vers qursquoenfanta songeacutenie divin font retentir encore aujourdrsquohui lrsquounivers de ses su-blimes deacutecouvertes et laissent en doute la posteacuteriteacute srsquoil eut uneorigine mortelle Cependant ce fameux sage et drsquoautres beaucoupmoins illustres que lui oracles plus sucircrs et plus respectables quela Sibylle couronneacute de lauriers sur le treacutepied drsquoApollon apregraves avoireacutetonneacute le monde par la grandeur de leurs deacutecouvertes ont erreacute danslrsquoexplication des principes de la matiegravere eacutecueil fatal ougrave leur geacuteniefit un naufrage meacutemorable

6Apprenez maintenant ocirc Memmius les veacuteriteacutes qui me restent

agrave vous deacutecouvrir Je nrsquoignore pas qursquoune nuit eacutepaisse en deacuterobe laconnaissance Mais lrsquoespeacuterance de la gloire aiguillonne mon courageet verse dans mon acircme la passion des Muses cet enthousiasme di-

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 35

nīl praeligclārius hōc virō rien de plus remarquable que cet hommenec magis sānctum ni de plus respectableet mīrum cārumque et rien de plus admirable et de plus cherQuīn etiam carmina Bien plus les verspectoris dīvīnī ejus de la poitrine divine de luivōciferantur et expōnunt proclament et exposentpraeligclāra reperta ses belles deacutecouvertes ut videātur vix de-sorte-qursquoil paraicirct agrave-peinecreātus stirpe hūmānā issu de souche humaineHic tamen Celui-ci cependantet quōs dīximus suprā et ceux que nous avons nommeacutes plus hautīnferiōrēs infeacuterieurs agrave Empeacutedoclepartibus ēgregiē multīs par des cocircteacutes fort nombreuxminōrēsque multō et moindres de beaucoupquamquam invenientēs quoique trouvantmulta beaucoup de veacuteriteacutesbene ac dīvīnitus bien et divinementdedēre respōnsa ils aient donneacute des reacuteponsestamquam ex adytō cordis comme du sanctuaire de leur cœursānctius plus saintementet ratiōne et drsquoune maniegraveremultō magis certā beaucoup plus sucircrequam Pȳthia que la Pythiequaelig profātur ā tripodī qui propheacutetise du treacutepiedlaurōque Phœbī et du laurier drsquoApollonfēcēre tamen ruīnās ont fait cependant des eacutecroulementsin prīncipiīs rērum sur les principes des choseset magnī et grandscecidēre ibi graviter ils sont tombeacutes lagrave lourdementmagnō cāsū drsquoune grande chute

6 mdash la poeacutesie au service de la veacuteriteacute

Nunc age Maintenant allonscognōsce quod superest connais ce qui reste agrave connaicirctreet audī clārius et apprends le plus clairementNec fallit mē animī Et il ne mrsquoeacutechappe pas quant agrave lrsquoespritquam sint obscūra combien ces choses sont obscures sed magna spēs laudis mais une grande espeacuterance de gloirepercussit meum cor a frappeacute mon cœurthyrsō ācrī drsquoun thyrse (drsquoun aiguillon) vifet simul incussit mī et en-mecircme-temps a jeteacute agrave moiin pectus dans la poitrine

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

36 LUCREgraveCE

Mūsārum quō nunc īnstīnctus mente vigentī 925Āvia Pīeridum peragrō loca nūllĭus anteTrīta solō juvat integrōs accēdere fontīsAtque haurīre juvatque novōs dēcerpere flōrēsĪnsignemque meō capitī petere inde corōnamUnde 1 prius nūllī vēlārint tempora Mūsaelig 930Prīmum quod magnīs doceō dē rēbus et artīsRĕligiōnum animum nōdīs 2 exsolvere pergō Deinde quod obscūrā dē rē tam lūcida pangōCarmina Mūsaeligō contingēns cūncta lepōreId 3 quoque enim nōn ab nūllā ratiōne vidētur 935Sed velutī puerīs absinthia taeligtra medentēsCum dare cōnantur prius ōrās pōcula circumContingunt mellis dulcī flāvōque liquōreUt puerōrum aeligtās inprōvida lūdificēturLabrōrum tenus 4 intereā perpōtet amārum 940Absinthī laticem dēceptaque nōn capiātur 5

vin qui mrsquoeacutelegraveve sur la cime du Parnasse dans les lieux jusqursquoalorsinterdits aux mortels Jrsquoaime agrave puiser dans des sources inconnues jrsquoaime agrave cueillir des fleurs nouvelles et agrave ceindre ma tecircte drsquoune cou-ronne brillante dont les Muses nrsquoont encore pareacute le front drsquoaucunpoegravete drsquoabord parce que mon sujet est grand et que jrsquoaffranchis leshommes du joug de la Superstition ensuite parce que je reacutepandsdes flots de lumiegravere sur les matiegraveres les plus obscures et les fleurs dela poeacutesie sur les eacutepines drsquoune philosophie aride Et nrsquoai-je pas raisondrsquoimiter ces meacutedecins habiles qui pour engager les jeunes enfantsagrave boire lrsquoabsinthe amegravere dorent drsquoun miel pur les bords de la coupeafin que leurs legravevres seacuteduites par cette douceur trompeuse avalentsans deacutefiance le noir breuvage innocent artifice qui rend agrave leurs

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 37

suāvem amōrem Mūsārum un doux amour des Musesquō īnstīnctus nunc par lequel pousseacute maintenantperagrō mente vigentī je parcours drsquoun esprit vigoureuxloca āvia les lieux deacutetourneacutes (les reacutegions non freacute-

[quenteacutees)Pīeridum du domaine des Pieacuteridestrīta ante fouleacutes auparavantsolō nūllīus par la plante-des-pieds drsquoaucun homme juvat accēdere il me plaicirct drsquoapprocherfontīs integrōs de sources non-entameacuteesatque haurīre et drsquoy puiser juvatque dēcerpere et il me plaicirct de cueillirflōrēs novōs des fleurs nouvellespetereque meō capitī et drsquoaller-chercher pour ma tecirctecorōnam īnsignem une couronne distingueacuteeinde unde Mūsaelig prius de lagrave drsquoougrave les Muses auparavantvēlārint tempora nūllī nrsquoaient voileacute (couronneacute) les tempes agrave per-

[sonne prīmum quod doceō drsquoabord parce que jrsquoenseignedē magnīs rēbus sur de grandes choseset pergō et que jrsquoentreprendsexsolvere animum de deacutegager lrsquoacircmenōdīs artīs religiōnum des nœuds eacutetroits des superstitions deinde quod pangō ensuite parce que je composecarmina tam lūcida des vers si lumineuxdē rē obscūrā sur un sujet obscurcontingēns cūncta touchant (impreacutegnant) toutlepōre Mūsaeligō de la gracircce des-MusesId enim quoque Cela en effet aussinōn vidētur nrsquoapparaicirct pasab nūllā ratiōne ne provenir drsquoaucune raison sed velutī medentēs mais de-mecircme-que les meacutedecinscum cōnantur dare puerīs lorsqursquoils entreprennent de donner aux en-

[fantsabsinthia taeligtra de lrsquoabsinthe repoussantcontingunt prius ōrās touchent (impregravegnent) drsquoabord les bordscircum pōcula autour des coupesliquōre dulcī flāvōque de la liqueur douce et jaunemellis du mielut aeligtās inprōvida afin que lrsquoacircge impreacutevoyant (naif)puerōrum des enfantslūdificētur tenus labrōrum soit abuseacute jusqursquoaux legravevresintereā perpōtet et que cependant il boit-entiegraverementlaticem amārum absinthī la liqueur amegravere de lrsquoabsinthedēceptaque et ayant eacuteteacute trompeacute

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

38 LUCREgraveCE

Sed potius tālī pactō recreāta valēscat Sīc ego nunc quoniam haeligc ratiō 1 plērumque vidēturTrīstior esse quibus nōn est tractāta retrōqueVolgus abhorret ab hāc voluī tibi suāviloquentī 945Carmine Pīeriō ratiōnem expōnere nostramEt quasi Mūsaeligō dulcī contingere melle Sī tibi forte animum tālī ratiōne tenēreVersibus in nostrīs possem dum perspicis omnemNātūram rērum 2 quā cōnstet cōmpta 3 figūrā 950

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteurvers le centre du monde

(V 1052-1117)

Illud in hīs rēbus 4 longē fuge crēdere MemmīIn medium summaelig quod dīcunt omnia nītī 5Atque ideō mundī nātūram stāre sine ūllīsIctibus externīs 6 neque quōquam posse resolvī 7 1055Summa atque īma quod in medium sint omnia nīxa

jeunes membres la vigueur de la santeacute Ainsi le sujet que je traiteeacutetant trop seacuterieux pour ceux qui nrsquoy ont pas reacutefleacutechi et rebutantpour le commun des hommes jrsquoai emprunteacute le langage des Musesjrsquoai corrigeacute lrsquoamertume de la philosophie avec le miel de la poeacutesieHeureux si seacuteduit par les charmes de lrsquoharmonie vous ne quittezmon ouvrage qursquoapregraves y avoir puiseacute une profonde connaissance dela Nature

7En effet gardez-vous de croire ocirc Memmius avec quelques phi-

losophes que tous les corps tendent vers le centre du monde quelrsquounivers nrsquoa pas besoin drsquoecirctre retenu par des chocs exteacuterieurs etqursquoil nrsquoest pas agrave craindre que les extreacutemiteacutes supeacuterieures ou infeacute-rieures srsquoeacutechappent ayant toutes la mecircme tendance vers un centre

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 39

nōn capiātur ne soit pas pris (abuseacute reacuteellement)sed potius valēscat mais plutocirct se fortifierecreāta tālī pactō ranimeacute drsquoune telle maniegravere sīc ego nunc ainsi moi maintenantquoniam haeligc ratiō parce que ce systegravemevidētur plērumque semble la-plupart-du-tempsesse trīstior ecirctre plus triste (amer)quibus nōn tractāta est agrave ceux par lesquels il nrsquoa pas eacuteteacute pratiqueacutevolgusque et que le vulgaireabhorret retrō srsquoeacuteloigne-avec-horreur en-arriegravereab hāc de ce systegravemevoluī expōnere tibi jrsquoai voulu exposer agrave toicarmine Pīeriō dans un chant des-Pieacuteridessuāviloquentī chant au-doux-langagenostram ratiōnem notre systegravemeet quasi contingere et en-quelque-sorte le toucher (lrsquoimpreacutegner)dulcī melle Mūsaeligō du doux miel des-Muses sī possem forte pour voir si je pourrais par hasardtenēre animum tibi retenir lrsquoesprit agrave toiratiōne tālī par une maniegravere tellein nostrīs versibus sur nos versdum perspicis tandis que tu eacutetudiesomnem nātūram rērum toute la nature des chosesquā figūrā cōnstet sous quelle figure elle subsistecōmpta ayant eacuteteacute arrangeacutee

7 mdash les corps ne sont pas entraicircneacutes par leur pesanteur versle centre du monde

Memmī fuge longē Memmius eacutevite loin (garde-toi bien)crēdere illud de croire ceciin hīs rēbus sur ces sujetsomnia nītī toutes choses faire-effort (tendre)in quod dīcunt vers ce qursquoils (certains philosophes) ap-

[pellentmedium summaelig le milieu (le centre) de lrsquouniversatque ideō et pour-celanātūram mundī stāre la nature du monde (le monde) se soutenirsine ūllīs ictibus externīs sans aucuns chocs exteacuterieursneque summa ni les extreacutemiteacutes (lrsquoheacutemisphegravere) supeacuterieuresatque īma et (ni) les extreacutemiteacutes infeacuterieuresposse resolvī ne pouvoir se dissoudrequōquam srsquoeacutechappant vers-quelqursquo-endroitquod omnia nīxa sint parce que toutes choses ont fait-effort

[(tendent)

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

40 LUCREgraveCE

(Ipsum sī quicquam posse in sē sistere crēdis) Et quaelig pondera sunt sub terrīs omnia sūrsumNītier 1 in terrāque retrō requiēscere posta 2Ut per aquās quaelig nunc rērum simulācra vidēmus 1060Et similī ratiōne animālia suppa 3 vagārīContendunt neque posse ē terrīs in loca caeliglīReccidere īnferiōra magis quam corpora nostraSponte suā possint in caeliglī templa volāre Illī cum videant sōlem nōs sīdera noctis 1065Cernere et alternīs nōbīscum tempora caeliglīDīvidere et noctēs parilīs agitāre diēbus

Sed vānus stolidīs haeligc error somnia fīnxit 4Amplexī quod habent perversā rem ratiōneNam medium nihil esse potest ubi summa profundī est 1070Īnfīnīta neque omnīnō sī jam medium sitPossit ibī quicquam cōnsistere eam magis ob rem 5

commun Qui peut concevoir qursquoun ecirctre se soutienne sur lui-mecircmeque sous nos pieds les corps pesants exercent leur gravitation enhaut et soient porteacutes sur la terre dans une direction opposeacutee agravela nocirctre comme nos images repreacutesenteacutees dans lrsquoeau Crsquoest pour-tant drsquoapregraves de pareils principes qursquoon explique comment un mondedrsquoanimaux de toute espegravece va et vient sous nos pieds sans ecirctre ex-poseacutes agrave tomber de la terre dans les reacutegions infeacuterieures comme nousne pouvons nous eacutelever de nous-mecircmes vers la voucircte ceacuteleste Onajoute que ces peuples voient le soleil quand les flambeaux noc-turnes nous eacuteclairent qursquoils partagent alternativement avec nousles saisons de lrsquoanneacutee que leurs jours et leurs nuits ont la mecircmedureacutee que nos nuits et nos jours

Voilagrave les erreurs grossiegraveres ougrave sont tombeacutes des philosophes pourecirctre partis drsquoapregraves de faux principes Ils ne comprenaient pas qursquoilne peut y avoir de milieu dans une eacutetendue infinie et que quandil y en aurait les corps ne seraient pas plus neacutecessiteacutes agrave srsquoy arrecircter

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 41

in medium vers le milieu (le centre)(sī crēdis (tu peux croire cela si tu croisquicquam posse sistere quelque objet pouvoir se teniripsum in sē) par lui-mecircme sur lui-mecircme) et omnia pondera et tous les corps-pesantsquaelig sunt sub terrīs qui sont sous les terres (de lrsquoautre cocircteacute de

[la terre)nītier sūrsum faire-effort pour monter en-hautrequiēscereque in terrā et reposer (srsquoappuyer) sur la terreposta retrō placeacutes en-arriegravere (renverseacutes)ut simulācra rērum comme les images des objetsquaelig vidēmus nunc images que nous voyons maintenantper aquās agrave travers les eaux et contendunt et ils (ces philosophes) preacutetendentratiōne similī drsquoune maniegravere semblableanimālia vagārī suppa des ecirctres-animeacutes errer renverseacutesneque posse et ces ecirctres ne pouvoirreccidere ē terrīs retomber des terres (de la terre)in loca īnferiōra caeliglī dans des reacutegions infeacuterieures du cielmagis quam nostra corpora pas plus que nos corps ne pourraient

[possintvolāre suā sponte voler de leur propre-mouvementin templa caeliglī vers les espaces du ciel nōs cernere sīdera noctis nous voir les astres de la nuitcum illī lorsque eux (ces habitants des antipodes)videant sōlem voient le soleilet dīvidere alternīs et eux partager alternativementnōbīscum avec noustempora caeliglī les temps (les saisons) du cielet agitāre et passernoctēs parilīs diēbus des nuits eacutegales agrave nos jours

Sed error vānus Mais une erreur vainefīnxit haeligc somnia a imagineacute ces recircveriesstolidīs pour eux stupidesquod habent parce qursquoils ontamplexī rem embrasseacute une theacuteorieratiōne perversā avec un raisonnement fauxNam nihil Car rienpotest esse medium ne peut ecirctre le milieuubi summa profundī lagrave ougrave la totaliteacute de lrsquoeacutetendueest īnfīnīta est sans-bornes neque sī jam medium sit ni si mecircme un milieu eacutetaitomnīnō quicquam possit absolument rien ne pourraitcōnsistere ibī srsquoarrecircter lagrave davantage

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

42 LUCREgraveCE

Quam quāvīs aliā longē ratiōne repellīOmnis enim locus ac spatium quod ināne vocāmusPer medium per nōn medium concēdere dēbet 1075AEligquē ponderibus mōtūs quācumque ferunturNec quisquam locus est quō corpora cum vēnērePonderis āmissā vī possint stāre in inānī Nec quod ināne autem est ūllī subsistere dēbetQuīn sua quod nātūra petit concēdere pergat 1080Haud igitur possunt tālī ratiōne tenērīRēs in conciliō mediī cuppēdine vīctaelig

Praeligtereā quoniam nōn omnia corpora fingunt 1

In medium nītī sed terrārum atque liquōrisŪmōrem pontī magnāsque ē montibus undās 1086Et quasi terrēnō quaelig corpore contineantur 1085At contrā tenuīs expōnunt āeris aurās 1087Et calidōs simul ā mediō differrier ignīsAtque ideō tōtum circum tremere aeligthera signīs

que drsquoapregraves un autre point de vue agrave srsquoen eacuteloigner En effet lanature du vide est de ceacuteder aux corps graves quelque part qursquoilstendent au centre ou non Il nrsquoy a point de lieu dans lrsquounivers ougrave lescorps une fois arriveacutes srsquoarrecirctent et perdent leur pesanteur Le videne cessera jamais drsquoouvrir un passage agrave leur chute parce qursquoainsilrsquoexige sa nature Cet amour supposeacute du centre ne suffit donc paspour empecirccher la deacutesunion du grand tout

Une autre contradiction est que suivant les mecircmes philosophesla tendance vers le centre nrsquoest pas commune agrave tous les corps etnrsquoa lieu que dans ceux qui sont composeacutes de terre ou drsquoeau tels quele fluide de lrsquoOceacutean les fleuves qui jaillissent des hautes montagneset tous les ecirctres qui participent agrave la nature terrestre Au contrairelrsquoair subtil et la flamme leacutegegravere tendent agrave srsquoeacuteloigner du centre et

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 43

ob eam rem pour ce motifmagis quam repellī plutocirct que drsquoecirctre rejeteacutequāvīs longē aliā ratiōne pour une bien autre raisonOmnis enim locus En effet tout lieuac spatium et tout espacequod vocāmus ināne que nous appelons videaeligquē eacutegalementper medium situeacute au milieuper nōn medium ou non au milieudēbet concēdere ponderibus doit ceacuteder (livrer passage) aux corps-pesantsquācumque vers-quelque-direction-quemōtūs feruntur les mouvements soient porteacutesNec quisquam locus est Ni quelque lieu estquō cum corpora ougrave lorsque les corpsvēnēre sont arriveacutespossint stāre in inānī ils puissent se tenir dans le videvī ponderis āmissā la proprieacuteteacute de la pesanteur eacutetant perdue nec autem ni drsquoun-autre-cocircteacutequod est ināne ce qui est videdēbet subsistere ūllī ne doit opposer-de reacutesistance agrave aucun de ces

[corpsquīn pergat sans-qursquoil continueconcēdere agrave ceacutederquod sua nātūra petit chose que sa nature demandeIgitur rēs haud possunt Donc les choses ne peuventtenērī in conciliō ecirctre tenues en reacuteunionratiōne tālī par une maniegravere tellevīctaelig cuppēdine mediī vaincues par le deacutesir du milieu

Praeligtereā quoniam En outre puisquenōn fingunt ils ne supposent plusomnia corpora tous les corpsnītī in medium faire-effort vers le milieused terrārum atque liquōris mais ceux des terres et de lrsquoeauūmōrem pontī le fluide de la mermagnāsque undās et les grandes ondesē montibus qui viennent des montagneset quaelig contineantur quasi et les corps qui sont renfermeacutes en-quelque-sortecorpore terrēnō par un corps terrestre mdashat contrā expōnunt mais puisque au contraire ils exposentaurās tenuīs āeris les eacutemanations subtiles de lrsquoairet simul ignīs calidōs et en-mecircme-temps les feux brucirclantsdifferrier ā mediō srsquoeacutecarter du milieuatque aeligthera tōtum et lrsquoeacutether tout-entier

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

44 LUCREgraveCE

Et sōlis flammam per caeliglī caeligrula pāscī 1 1090Quod calor ā mediō fugiēns sē ibi colligat omnisNec prōrsum arboribus summōs frondēscere rāmōsPosse nisi ā terrīs paulātim cuique cibātumhellip 2 1093Nē volucrī rītū flammārum mœnia mundī 1102Diffugiant subitō magnum per ināne solūtaEt nē cētera cōnsimilī ratiōne sequantur Nēve ruant caeliglī tonitrālia templa superne 1105Terraque sē pedibus raptim subdūcat et omnisInter permixtās rērum caeliglīque ruīnāsCorpora solventēs abeat per ināne profundum Temporis ut pūnctō nīl extet rĕliquiārum 3Dēsertum praeligter spatium et prīmōrdia caeligca 1110Nam quācumque prius dē partī 4 corpora dēsse 5

Cōnstituēs haeligc rēbus erit pars jānua lētī

si nous voyons toute la voucircte du ciel eacutetinceler de feux et la feacute-conde lumiegravere du soleil se nourrir au milieu de lrsquoazur eacutetheacutereacute crsquoestque les eacuteleacutements de la flamme srsquoy reacuteunissent sans cesse en fuyantle centre de mecircme que sans les sucs nourriciers qui srsquoeacutelegravevent dela terre les arbres seraient priveacutes de verdure hellip les feux du cielpour srsquoeacuteloigner du centre franchiraient les limites du monde Lemecircme deacutesordre gagnerait toute la Nature le ciel avec ses foudressrsquoeacutecroulerait sur nos tecirctes la terre srsquoouvrirait sous nos pieds etnos corps deacutecomposeacutes tomberaient engloutis dans lrsquoabicircme avec lesdeacutebris mecircleacutes du ciel et de la terre Bientocirct il ne resterait plus decet immense univers qursquoun amas drsquoatomes sans eacutenergie une vastesolitude Car en quelque lieu que commence la dissolution ce sera

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 45

tremere circum signīs trembler (scintiller) agrave lrsquoentour par des[eacutetoileset flammam sōlis et la flamme du soleil

pāscī ecirctre alimenteacuteeper caeligrula caeliglī au milieu des espaces azureacutes du cielideō quod omnis pour-cette-raison que toutecalor fugiēns ā mediō la chaleur (le feu) fuyant du milieusē colligat ibi se rassemble lagravenec prōrsum et puisqursquoils exposent absolument pasrāmōs summōs les rameaux supeacuterieursposse frondēscere arboribus pouvoir verdir aux (dans les) arbresnisī hellip agrave-moins-que un feu interne ne donnepaulātim cuique peu-agrave-peu agrave chacuncibātum ā terrīs sa nourriture des terres (venue de la terre)hellip puisqursquoils preacutetendent celahellip ils sont peu coheacuterentshellip Drsquoailleurs agrave cause de cet eacuteloignementhellip nē il y danger quemœnia mundī les murailles du mondediffugiant subitō ne se dispersent subitementrītū volucrī flammārum agrave la maniegravere aileacutee des flammes (des flammes

[rapides)solūta dissoutesper magnum ināne agrave travers le grand videet nē cētera sequantur et danger que les autres eacuteleacutements ne suiventratiōne cōnsimilī drsquoune maniegravere semblable nēve superne et danger qursquoen-hauttempla caeliglī tonitrālia les espaces du ciel qui-retentissent-du-tonnerreruant ne srsquoeacutecroulentterraque et que la terresē subdūcat raptim pedibus ne se deacuterobe preacutecipitamment sous nos

[piedset inter ruīnās permixtās et au milieu des ruines mecircleacuteesrērum caeliglīque des choses (de la terre) et du cielsolventēs corpora deacutecomposant leurs corps (matiegravere)abeat omnis elle ne srsquoen aille (ne disparaisse) tout-entiegravereper ināne profundum agrave travers le vide profondut pūnctō temporis de-sorte-qursquoen un point du temps (qursquoen un

[instant)nīl reliquiārum rien des restesextet ne subsistepraeligter spatium dēsertum excepteacute un espace deacutesertet prīmōrdia caeligca et des principes (atomes) invisiblesNam dē quācumque partī Car de quelque partie (lieu) quecōnstituēs tu eacutetablirascorpora dēsse prius des corps (la matiegravere) manquer auparavanthaeligc pars erit cette partie sera

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

46 LUCREgraveCE

Hāc sē turba forās dabit omnis māteriāīHaeligc sic pernōscēs parvā perductus opellā

Namque alid 1 ex aliō clārēscet nec tibi caeligca 1115Nox iter ēripiet quīn ultima NātūrāīPervideās ita rēs accendent lūmina rēbus 2

une porte de destruction toujours ouverte par ougrave tous les atomesen foule se hacircteront de srsquoeacutechapper

Ainsi en vous laissant guider pas agrave pas vous maicirctriserez le su-jet la philosophie nrsquoaura plus de teacutenegravebres la Nature plus de se-crets pour vous Vos principes srsquoeacuteclairciront lrsquoun par lrsquoautre et lesconnaissances acquises vous serviront de flambeau pour en acqueacuterirde nouvelles

MORCEAUX CHOISIS LIVRE 1 47

jānua lētī une porte de mortrēbus pour les choses (lrsquounivers) omnis turba māteriāī toute la foule de la matiegravere (des eacuteleacutements)sē dabit forās se mettra dehors (srsquoeacutechappera)hāc par-lagrave

Sic pernōscēs haeligc Ainsi tu-connaicirctras agrave fond ces chosesperductus opellā parvā ameneacute avec un effort faible namque alid car une autre choseclārēscet ex aliō srsquoeacuteclaircira agrave-la-suite-drsquoune autre chosenec nox caeligca et la nuit obscure neēripiet tibi deacuterobera pas agrave toiiter le cheminquīn pervideās en empecircchant que tu ne voies-agrave-fondultima Nātūrāī les derniers secrets de la Nature ita rēs ainsi les choses (les veacuteriteacutes)accendent lūmina rēbus allumeront des lumiegraveres pour les choses

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

NOTES 49

NOTE S

du livre premier des morceaux choisis de Lucregravece

1Page 6 1 AEligneadum genetrīx Les Romains preacutetendaient descendre

drsquoEacuteneacutee fils drsquoAnchise et de VeacutenusPage 8 1 Dē rērum nātūrā Les principes naturels de tout ce qui

existe crsquoest le titre du poegraveme drsquoapregraves le grec Περὶ φύσεως ouvragedrsquoEacutepicure en 37 livres et un poegraveme drsquoEmpeacutedocle (v la note v 716)

mdash 2 Memmiadaelig Memmius agrave qui Lucregravece deacutedia son poegraveme eacutetait ne-veu du ceacutelegravebre tribun qui au teacutemoignage de Salluste combattit avec uneeacutenergie si passionneacutee le pouvoir de la noblesse Lui-mecircme fut preacuteteur enBithynie et tribun du peuple Moins heureux dans sa candidature au consu-lat il eacutechoua malgreacute lrsquoappui de Pompeacutee Il fut mecircme accuseacute de brigue etle talent de Ciceacuteron ne put le preacuteserver de lrsquoexil il se retira agrave Athegravenespuis agrave Patras Il aimait les lettres et la philosophie Orateur distingueacute ilcomposa aussi des vers empreints de la facile morale drsquoEacutepicure Les eacutelogesdont Lucregravece combla Memmius nous semblent quelque peu exageacutereacutes maisle poegravete eacutetait son proteacutegeacute son ami peut-ecirctre et lrsquohyperbole a toujours eacuteteacuteprodigueacutee aux Meacutecegravenes

mdash 3 Mœnera forme archaiumlque pour mūnera

mdash 4 Mīlitiāī Nous trouverons freacutequemment chez Lucregravece cette formeprimitive du geacutenitif singulier de la premiegravere deacuteclinaison forme remplaceacuteedeacutefinitivement au siegravecle drsquoAuguste par la terminaison aelig

mdash 5 Repostā syncope pour repositā mdash Voyez lrsquoimage p 2 on peutconcevoir que Lucregravece dans cette ecphrasis srsquoest laisseacute inspirer par uneœuvre drsquoart

Page 10 1 Tempore inīquō Agrave lrsquoeacutepoque ougrave Lucregravece eacutecrivait ce poegravemeles discordes civiles ensanglantaient le sol de lrsquoItalie

2

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

50 NOTES

mdash 2 Rĕligiōne la premiegravere syllabe est lourde avec ĕ bref et prononcia-tion double du l (Relligiōne) mdash Au vers suivant notez lrsquoeacutecho verbal caeliglīregiōnibus mdash Superhellipīnstāns (v 65) suggegravere Superstitiō

mdash 3 Grājus homō Eacutepicure philosophe atheacutenien neacute en 342341 morten 271270 avant Jeacutesus-Christ Lucregravece ne fait que reproduire exactementles doctrines de ce philosophe

mdash 4 Irrītāt contraction pour irrītāvit La derniegravere voyelle est longue(preacutesent irrītăt)

Page 12 1 Cupīret forme archaiumlque pour cuperetmdash 2 Flammantia mœnia mundī Les anciens croyaient que les reacutegions

supeacuterieures du ciel qui limitaient le monde eacutetaient occupeacutees par une sub-stance subtile et enflammeacutee qursquoils appelaient eacutether de αἴθω brucircler

mdash 3 Omne le grand tout τὸ πᾶν qui outre lrsquounivers mateacuteriel com-prenait encore le grand vide

mdash 4 Quidhellip nequeat Eacutepicure distingue le possible ce qui se produiten vertu des lois naturelles du merveilleux qursquoil nrsquoadmet point

mdash 5 Atque altē terminus haeligrēnsMeacutetaphore emprunteacutee aux bornes donton se servait pour limiter les champs et qursquoon enfonccedilait profondeacutement dansle sol

mdash 6 Indugredī forme archaiumlque pour ingredīmdash 7 Aulide Aulis ville et port de Beacuteotie sur lrsquoEuripemdash 8 Īphianassāī Crsquoest le nom qursquoHomegravere (Iliade 9 145) donne agrave la fille

drsquoAgamemnon appeleacutee par les tragiques Iphigeacutenie Suivant une traditioncette princesse fut sacrifieacutee agrave Diane (Arteacutemis) pour apaiser la colegravere dela deacuteesse et obtenir un vent favorable qui permit agrave la flotte grecque dequitter le port drsquoAulis

mdash 9 Prīma virōrum helleacutenisme pour prīmī virī cf Euripide Meacutedeacutee916 οἶμαι ὑμᾶς τὰ πρῶτrsquo ἔσεσθαι

Page 14 1 Īnfulahellip profūsa est La bandelette de laine īnfula eacutetaitfixeacutee sur le front de la victime par des rubans de lin vittaelig dont les deuxbouts retombaient symeacutetriquement de chaque cocircteacute de la tecircte

mdash 2 Prīnceps Iphianassa eacutetait lrsquoaicircneacutee des enfants drsquoAgamemnon etde Clytemnestre Cf Euripide Iphigeacutenie agrave Aulis 1220 πρώτη σrsquo ἐκάλεσαπατέρα καὶ σὺ παῖδrsquo ἐμέ

NOTES 51

mdash 3 Possethellip Hymenaeligō Elle avait eacuteteacute appeleacutee au camp sous le preacute-texte drsquoecirctre unie agrave Achille Sublāta et dēducta sont des termes agrave doublesens suggestifs de la ceacutereacutemonie du mariage agrave Rome ougrave lrsquoon simulait unenlegravevement

On pourra encore lire et traduire avec fruit les passages suivants surlrsquoignorance des hommes (102-135) sur la difficulteacute drsquoexposer en vers latinsles systegravemes philosophiques des Grecs (136-145) sur lrsquoordre constant quiregravegne dans la reproduction des ecirctres (159-183)

3Page 16 1 In sua corpora Ce sont les eacuteleacutements dont chaque corps est

composeacute les atomesmdash 2 Foret ūsus archaiumlsme pour opus foretmdash 3 Per inānia Ce sont les espaces libres laisseacutes vides entreacute les par-

ticules de la matiegraveremdash 4 Praeligtereāhellip aeligtās Apregraves avoir parleacute des corps qui sont deacutesagreacutegeacutes

par un choc violent Lucregravece srsquooccupe de ceux qui se dissolvent lentementpar lrsquoaction du temps en introduisant la notion de laquo cycle raquo

mdash 5 Generātim en conservant agrave chaque espegravece son type distinctif etgeacuteneacuterique

mdash 6 Reddūcit forme archaiumlque pour redūcit v la note v 63laquo Ramegravene raquo parce que ce nrsquoest qursquoune combinaison nouvelle drsquoeacuteleacutementsdeacutejagrave employeacutes

Page 18 1 AEligthēr sīdera pāscit Les eacutepicuriens consideacuteraient le soleilet les astres comme des flambeaux qui avaient besoin de srsquoalimenter agrave lasource ardente de lrsquoeacutether Voyez aussi v 1090

mdash 2 Cōnsūmpse forme archaiumlque et contraction pour cōnsūmpsisse

mdash 3 Dēnique Lucregravece passe agrave un autre ordre drsquoideacutees se rattachant agravelrsquoargumentation des vv 215-224 Si les principes des corps nrsquoeacutetaient paseacuteternels le plus leacuteger choc suffirait pour les aneacuteantir

mdash 4 Nisĭ la voyelle longue de la deuxiegraveme syllabe (nisī ) est abreacutegeacuteepar lrsquoeffet de la loi des mots iambiques (brevis breviāns)

mdash 5 Indupedīta forme archaiumlque pour impedīta Lucregravece suppose queles atomes qui composent les corps sont plus ou moins eacutetroitement agreacutegeacutesdeacutependant de leur forme et la distance de leur trajectoire pour assurer leurstabiliteacute

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

52 NOTES

mdash 6 Vīs quaeligque une force approprieacutee expliqueacute immeacutediatementci-apregraves par satis ācris vīs (v 246)

Page 20 1 Pereunt imbrēs Crsquoest une objection mais dira-t-onLrsquoargumentation revient agrave la notion du cycle (vv 225-237) La dispositiondes ideacutees srsquoarrange donc dans lrsquoorde A-B-A-B

mdash 2 Pater AEligthēr Lrsquoeacutether ou ciel peut ecirctre consideacutereacute comme le pegraveredes ecirctres puisque crsquoest lui qui fait descendre la pluie feacutecondante dans lesein de la Terre qualifieacutee elle-mecircme du nom de megravere Cf Eschyle fr 44(Danaides mdash crsquoest Aphrodite qui parle)

Ἐρᾷ μὲν ἁγνὸς Οὐρανὸς τρῶσαι Χθόναἔρως δὲ Γαῖαν λαμϐάνει γάμου τυχεῖνὄμϐρος δrsquo ἀπrsquo εὐνάεντος Οὐρανοῦ πεσὼνἔκυσε Γαῖαν ἡ δὲ τίκτεται βροτοῖςμήλων τε βοσκὰς καὶ βίον Δημήτριονδένδρων τrsquo ὀπώραν ἐκ νοτίζοντος γάμουτέλειός ἔστι τῶν δrsquo ἐγὼ παραίτιος

laquo Le Ciel sacreacute deacutesire peacuteneacutetrer la Terre et le deacutesir drsquoentrer en unionsrsquoempare de la Terre la pluie tombant du Ciel qui coule abondammentfeacuteconde la Terre et elle met au monde pour les mortels pacircture pour leurbeacutetail des ceacutereacuteales pour vivre et le fruit des arbres de ce rite nuptialmouillant elle srsquoaccomplit De tout cela je suis complice raquo

Page 22 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rem gignīhellip aliēnā Drsquoapregraves ce systegraveme crsquoest la mort qui est le

principe de la vie4

Page 24 1 Mollis aquaelig nātūra Mollis est plutocirct nominatif que geacutenitifaquaelig nātūra eacutetant une peacuteriphrase pour aqua

mdash 2 Sīc Ce mot indique la seconde partie de la comparaisonPage 26 1 Factīs et mōribus Les vents sont ici comme personnifieacutesVoyez un beau passage sur les progregraves imperceptibles de la dissolution

des corps (311-329) et une explication poeacutetique de la peacuteneacutetrabiliteacute descorps (346-357)

5mdash 2 Hēraclītus Heacuteraclite neacute agrave Eacutephegravese surnommeacute σκοτεινός le Teacuteneacute-

breux agrave cause de ce langage obscur que Lucregravece lui reproche ici

NOTES 53

mdash 3 Quamde forme archaiumlque pour quam

mdash 4 Gravīs Lucregravece ne fait pas le procegraves agrave tous les Grecs il reconnaicirctqursquoil y a parmi eux des esprits seacuterieux notamment les eacutepicuriens

mdash 5 Stolidī Ce mot est suggestif de Stoici qui avaient en grande partieadopteacute la doctrine physique drsquoHeacuteraclite et se vantaient que seul le stoiumlcienest sapiēns les autres stultī

Page 28 1 Super comme īnsuper laquo de plus en outre raquo Il nrsquoy a pasde diffeacuterence qualitative entre le feu consideacutereacute au point de vue geacuteneacuteral etles diffeacuterentes formes sous lesquelles il se manifeste

mdash 2 Disque supātīs tmegravese agrave cause du megravetre et forme archaiumlque pourdissipātīsque

mdash 3 Amplius hōc en outre de cela crsquoest-agrave-dire sauf ces diffeacuterencesdrsquoardeur et drsquoeacuteclat dont le poegravete vient de parler

mdash 4 Tālibus in causīs pour de telles causes crsquoest-agrave-dire selon que lefeu est plus ou moins condenseacute ou rareacutefieacute

Page 30 1 Nōn crēdit Lucregravece met Heacuteraclite en contradiction aveclui-mecircme Les sens nous font connaicirctre non seulement le feu mais aussilrsquoeau la terre la mer etc Pourquoi le premier de ces teacutemoignages serait-ilseul vrai et les autres erroneacutes

mdash 2 Aliamhellip relinquat mais admet encore qursquoil existe un seul principeeacuteleacutementaire qui est autre que le feu Aliam est une conjecture pour un motqui ne se trouve pas dans les mss Drsquoautres proposent quidvīs laquo nrsquoimportequoi raquo soulignant le caractegravere arbitraire de ces theacuteories dans ce derniercas ignis peut ecirctre aussi un geacutenitif (sc nātūram)

mdash 3 Āera lrsquoair Crsquoeacutetait le systegraveme drsquoAnaximegravene de Milet

mdash 4 Ūmōrem lrsquoeau systegraveme de Thales de Milet

mdash 5 Terram la terre peut-ecirctre systegraveme de Pheacutereacutecyde mais selon Aris-tote crsquoeacutetait une croyance populaire non pas un systegraveme philosophique

mdash 6 Conduplicanthellip rērum admettent deux eacuteleacutements geacuteneacuterateurscomme Xeacutenophane de Colophon

Page 32 1 Quattuorhellip rentur Certains philosophes dont le plus ceacute-legravebre est Empeacutedocle pensaient que le monde reacutesulte de lrsquoharmonie dequatre eacuteleacutements

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

54 NOTES

mdash 2 Empedoclēs Empeacutedocle drsquoAgrigente florissait vers la fin du cin-quiegraveme siegravecle avant Jeacutesus-Christ Il avait composeacute un poegraveme sur la NatureΠερὶ φύσεως

mdash 3 Triquetrīshellip in ōrīs La Sicile est de forme triangulaire ellesrsquoavance dans la mer par les trois promontoires de Peacutelore de Pachynumet de Lilybeacutee

mdash 4 AEligquor Īonium La mer drsquoIonie srsquoeacutetendait entre la Sicile et la Cregravetemdash 5 Charybdis le ceacutelegravebre gouffre de Charybde tant chanteacute par les

poegravetes anciensPage 34 1 Vōciferantur La beauteacute et lrsquoeacuteclat de la poeacutesie (carmina)

font mieux ressortir la grandeur des doctrinesmdash 2 Laurō Le treacutepied sur lequel sieacutegeait la precirctresse eacutetait couronneacute

de lauriers ainsi que la precirctresse elle-mecircmemdash 3 Fēcēre ruīnās laquo ils ont fait des eacutecroulements raquo agrave double sens (1) ils

se sont effondreacutes ils ont eacutechoueacute (2) leur systegraveme (notamment la divisionagrave lrsquoinfini) implique la destruction du monde

Voyez encore les passages suivants La Nature se transforme agrave lrsquoinfini(803-829) reacutefutation des homœomeacuteries drsquoAnaxagore qui preacutetend que toutcorps renferme en soi agrave lrsquoeacutetat latent les eacuteleacutements de tous les autres(874-906)

6mdash 4 Necmē animī fallit pour necmeum animum fallit Animī consideacutereacute

comme locatif laquo en mon cœur raquo est apparemment agrave lrsquoorigine un geacutenitif derelation

mdash 5 Thyrsō dans le sens de aculeō dīvīnō Le thyrse consacreacute agrave Bacchus(Dionysos) eacutetait une lance entoureacutee de lierre et termineacutee le plus souventpar une pomme de pin

Page 36 1 Unde en traitant un sujet qui nrsquoavait encore inspireacute aucunpoegravete

mdash 2 Artīs Religiōnumhellipnōdīs La meacutetaphore suggegravere une eacutetymologierattachant religiō agrave religāre laquo le fait de se lier vis-agrave-vis les dieux raquo cflrsquoemploi des vittaelig (voyez note v 88)

mdash 3 Id cette application de la poeacutesie aux ideacutees philosophiquesmdash 4 Labrōrum tenus Les legravevres seules sont trompeacutees puisque le corps

malade reccediloit le remegravede qui lui est en reacutealiteacute le plus profitable

NOTES 55

mdash 5 Dēceptaque nōn capiātur Lrsquoenfant est trompeacute mais dans son inteacute-recirct ce nrsquoest donc pas une tromperie reacuteelle Capiātur est employeacute ici dansle sens de laquo ecirctre saisi raquo (Gaffiot sv I sect 6) oculīs et auribus captus CicTusc 5 117 priveacute de la vue et de lrsquoouiumle

Page 38 1 Haeligc ratiō ce systegraveme celui drsquoEacutepicuremdash 2 Nātūramhellip figūrā Crsquoest comme srsquoil y avait quaelig sit tōtīus rērum

nātūraelig figūra

mdash 3 Cōmpta est pris ici dans son sens propre de laquo disposeacute arrangeacute raquoVoyez le systegraveme drsquoEacutepicure sur la formation de lrsquounivers par des com-

binaisons fortuites drsquoatomes (1021-1051)7

mdash 4 In hīs rēbus agrave ce sujet quant au mouvement des atomesmdash 5 Omnia nītī Les peacuteripateacuteticiens et les stoiumlciens admettaient une

attraction centrale qursquoils supposaient exerceacutee par la terremdash 6 Ictibus externīs Lucregravece pense que les atomes en se heurtant

les uns contre les autres forment sans cesse des agreacutegations nouvelleset qursquoainsi ce sont ces chocs creacuteateurs qui renouvellent et conservent lemonde

mdash 7 Quōquam posse resolvī Drsquoapregraves le systegraveme que combat Lucregraveceles corps ne peuvent se dissoudre et se disperser dans lrsquoespace (quōquamresolvī ) parce qursquoils sont maintenus par lrsquoattraction terrestre

Page 40 1 Nītier sūrsum faire effort pour monter en hautcrsquoest-agrave-dire vers le centre par rapport aux antipodes Drsquoapregraves le systegravemeque combat Lucregravece la terre est une sphegravere tandis que dans la theacuteorieeacutepicurienne elle eacutetait une sorte de disque

mdash 2 Retrōhellip posta les objets renverseacutes du point de vue de lrsquoheacutemisphegraveresupeacuterieur mdash posta syncope pour posita

mdash 3 Suppa forme archaiumlque pour supīna au-dessous de nouscrsquoest-agrave-dire aux antipodes

mdash 4 Error somnia fīnxit La perte drsquoun coin supeacuterieur de la page dedroite dans lrsquoarcheacutetype a deacutetruit la fin des vv 1068-1075 Ils ont eacuteteacute re-construits par conjecture 26 vers plus tard (vv 1094-1101) il y a la lacunecorrespondante de la page de gauche

mdash 5 Ob eam rem pour ce motif parce que crsquoest le centre

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

56 NOTES

Page 42 1 Praeligtereāhellip fingunt En outre les philosophes que combatLucregravece imaginent que cette attraction ne srsquoexerce que sur certains corps

Page 44 1 Pāscī Certains philosophes anciens ont cru que des prin-cipes igneacutes qui ne sont autres que les vapeurs deacutegageacutees du sein de la terreforment lrsquoeacutether dont srsquoalimentent le soleil et les astres Voyez la note v231

mdash 2 Cibātum Deuxiegraveme exception agrave la regravegle de lrsquoattraction centraleproposeacutee par les adversaires de Lucregravece crsquoest de la terre que la segravevefeacuteconde monte dans les arbres

Ci-apregraves suit une lacune de 8 vers correspondant au vv 1068-1075(voyez la note) Dans la traduction litteacuterale une restitution hypotheacutetiqueest donneacutee

1 continuant la proposition subordonneacutee introduite par nisi (v 1093)on pose une reacutefeacuterence au feu interne de la theacuteorie stoiumlcienne qui feraitmonter la segraveve

2 puis une principale apodose de la subordonneacutee introduite par quo-niam (v 1083) affirmant lrsquoinconseacutequence des stoiumlciens qui nrsquoattribuentpas agrave tous les corps une tendance centripegravete mais la reacuteservent agrave lrsquoeau etagrave la terre la refusant agrave lrsquoair et au feu

3 Une nouvelle principale de laquelle deacutepend la subordonneacutee intro-duite par nē (v 1102) entamant la destruction du monde agrave cause de ceteacuteloignement centrifuge

mdash 3 Rĕliquiārum pour relliquiārum v la note v 63mdash 4 Partī ablatif archaiumlque pour partemdash 5 Dēsse forme archaiumlque et synizegravese pour deessePage 46 1 Alid forme archaiumlque pour aliudmdash 2 Rēs deacutesigne ici les veacuteriteacutes connues rēbus les veacuteriteacutes agrave connaicirctre

Lrsquoimage est celle drsquoun voyageur dans la nuit

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